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1 Centre Français de Recherche sur le Renseignement LA CRISE ENTRE L’ARABIE SAOUDITE, LES ÉMIRATS ARABES UNIS, L’ÉGYPTE, BAHREIN ET LE QATAR : UN DIFFÉREND PLUS GRAVE QU’IL N’Y PARAÎT Pierre CONESA Rapport de recherche #22 Novembre 2017

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1Centre Français de Recherche sur le Renseignement

LA CRISE ENTREL’ARABIE SAOUDITE,

LES ÉMIRATS ARABES UNIS, L’ÉGYPTE, BAHREIN ET LE QATAR :

UN DIFFÉREND PLUS GRAVEQU’IL N’Y PARAÎT

Pierre CONESARapport de recherche #22

Novembre 2017

2 PRÉSENTATION DE L’AUTEUR

Pierre CONESA est agrégé d’histoire, ancien élève de l’École nationale d’administration (ENA) et ancien auditeur du Centre des hautes études de l’armement (CHEAR).Au cours de sa carrière, il a notamment occupé les fonctions de :- Directeur adjoint à la Délégation aux Affaires Stratégiques

(ministère de la Défense) (1992-1997),- Directeur adjoint de la Direction des relations internatio-

nales de la Délégation générale pour l’armement (DGA/DRI), en charge de la politique d’exportation (1997-2003),

- Directeur général de la Compagnie européenne d’Intelli-gence stratégique (CEIS) (2003-2010).

En matière scientifique, Pierre Conesa est directeur adjoint de l’Observatoire des Radicalisations (Fondation de la Mai-son des Sciences de l’Homme) et membre du Conseil scien-tifique de la Fondation Res Publica, du site Diploweb (www.diploweb.com), de l’Observatoire international des criminali-tés, et du programme de contre-radicalisation à la prison de Bois d’Arcy.Il a été également Maître de conférences à Sciences Po et à l’ENA où il enseigne l’intelligence économique et la lutte an-ticorruption.

Pierre Conesa est l’auteur de plusieurs rapports remarqués sur la propagande de Daech et la contre-radicalisation et a dirigé une demi-douzaine d’ouvrages collectifs et de diffé-rents rapports publics ou classifiés.Il est l’auteur de huit livres de huit livres - dont un roman -, parmi lesquels :- Docteur Saoud et Mister Djihad. La diplomatie religieuse de

l’Arabie saoudite, Robert Laffont, 2016 (Prix du Meilleur Livre de Géopolitique Axyntis/Conflits, traduit en anglais et en Arabe)

- Guide du petit djihadiste, Fayard, 2016- Surtout ne rien décider : petit manuel de survie en milieu poli-

tique avec exercices pratiques corrigés, Robert Laffont, 2014- La Fabrication de l’ennemi ou comment tuer avec sa conscience

pour, Robert Laffont, 2011- Les Mécaniques du chaos : bushisme, prolifération et terro-

risme, Éditions de l’Aube, 2007- Guide du paradis, publicité comparée des au-delà, Éditions de

l’Aube, 2003- La Persuasion de masse, en collaboration avec Gérard Cha-

liand, Laffont 1992.Rapports récents sur la radicalisation :- Quelle politique de contre-radicalisaiton en France (dé-

cembre 2014) ? (www.favt.org)- La communication francophone de Daech, la mythologie du

combattant heureux (www.favt.org)

Enfin, Pierre Conesa est consultant en affaires militaires et stratégiques pour France 24 (rédactions française et anglaise) et de nombreux autres médias.

3AUTHOR’S PRESENTATION

Pierre CONESA is a professor who has obtained the French State agrégation examination in history, a former student of the French National School of Administration (l’Ecole natio-nale d’administration - ENA) and former auditor at the French Center for Higher Armament Studies (CHEAR).Over the course of his career he has held a variety of high-le-vel positions :- Deputy Director at the Strategic Affairs Section (Délégation

aux Affaires Stratégiques) at the French Ministry of Defence (1992-1997),

- Deputy Director of the Directorate of International Rela-tions at the French Defence Procurement Agency (DGA/DRI), in charge of its export policy (1997-2003),

- Director General of the European Company for Strategic In-telligence (CEIS) (2003-2010).

In the field of scientific expertise, Pierre Conesa is deputy di-rector of the Radicalization Monitoring Unit (Fondation de la Maison des Sciences de l’Homme) and member of the Scien-tific Council of the Res Publica Foundation, of the Diploweb (www.diploweb.com) website, of the International Crime Mo-nitoring Unit (l’Observatoire international des criminalités), and of the counter-radicalization program at the prison of Bois d’Arcy.He is also a Lecturer at Sciences Po and ENA where he teaches economic intelligence and classes on the develop-ment of effective anti-corruption policies.

Pierre Conesa is the author of several acclaimed reports on the propaganda techniques used by Daech and counter-radi-calization and has supervised half a dozen joint publications. He is the author of eight books, including one novel, including the following : - Docteur Saoud et Mister Djihad. La diplomatie religieuse de

l’Arabie saoudite, Robert Laffont, 2016 (Prix du Meilleur Livre de Géopolitique Axyntis/Conflits, traduit en anglais et en Arabe)

- Guide du petit djihadiste, Fayard, 2016- Surtout ne rien décider : petit manuel de survie en milieu poli-

tique avec exercices pratiques corrigés, Robert Laffont, 2014- La Fabrication de l’ennemi ou comment tuer avec sa conscience

pour, Robert Laffont, 2011- Les Mécaniques du chaos : bushisme, prolifération et terro-

risme, Éditions de l’Aube, 2007- Guide du paradis, publicité comparée des au-delà, Éditions de

l’Aube, 2003- La Persuasion de masse, en collaboration avec Gérard Cha-

liand, Laffont 1992.

Finally, Pierre Conesa works as a consultant in military and strategic affairs for France 24 (both French and English news desks) as well as for numerous other media outlets.

4 RÉSUMÉ

L’embargo contre le Qatar, déclenché par la coalition formée par l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, l’Égypte et le Bahreïn le 5 juin 2017, est une des plus graves crises qu’aient connu les pays du Golfe et risque de mettre la France, et plus généralement les Européens, dans une situation difficile.

L’embargo total, commercial, aérien, maritime et humanitaire vise à faire plier Doha sur les 13 points de l’ultimatum associé, comprenant entre autres la fermeture de la chaîne TV Al-Jazeera, l’arrêt des aides aux Frères musulmans - qualifiés de « groupe terroriste » -, l’expulsion des opposants, la fermeture de la base militaire turque… le tout associé à des contrôles et des pénalités.

Mais l’embargo semble se retourner contre ses auteurs : au Qatar, la panique a duré deux à trois jours, le temps nécessaire aux pays étrangers de fournir les approvisionnements en produits frais achetés traditionnellement en Arabie ; la Qatar National Bank a vu quelques investisseurs institutionnels et fonds de placement prendre les précautions d’usage mais le cours de la monnaie n’a pas varié ; enfin les produits importés étaient traditionnellement des réexportations depuis Dubaï, le hub commercial de la région, qui se trouve dorénavant privé de plus de 600 millions de dollars de trafic.Les produits arrivent directement dans le port de Doha, jusque-là en surcapacité. Contre ces sanctions, le Qatar a joué le droit international saisissant l’OMC et l’OACI, et surtout décidant de ne pas couper le pipe-line Dolphin qui alimente Dubaï en gaz.

La crise qui a des racines anciennes ne semble pas pouvoir se régler par des négociations étant donné les personnalités des leaders des trois principaux États impliqués.L’hypothèse de l’invasion militaire du Qatar semble exclue et la guerre de la communication à laquelle se livrent les trois pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) en Occident et aux États-Unis ne paraît pas décisive.Les échanges intra-golfiens sont limités. Reste alors l’hypothèse de la guerre commerciale par entreprises étrangères interposées comme cela a été évoqué par deux ambassadeurs émiratis à Washington et à Moscou.Les entreprises américaines étant par nature exclues du champ des sanctions, chacune des parties a des arguments soit commerciaux, soit capitalistiques pour contraindre les pays européens à prendre position, ce que ceux-ci doivent absolument éviter.

LA CRISE ENTRE L’ARABIE SAOUDITE, LES ÉMIRATS ARABES UNIS, L’ÉGYPTE, BAHREIN ET LE QATAR : UN DIFFÉREND PLUS GRAVE QU’IL N’Y PARAÎT

5EXECUTIVE SUMMARY

The embargo against Qatar, implemented by a coalition made up of Saudi Arabia, the United Arab Emirates, Egypt and Bahrain on June 5th, 2017, is one of the most serious crises to have rocked the Gulf States, and risks placing France, and more generally European countries, in a difficult situation.

The total embargo, covering commercial, air, maritime and humanitarian routes, is aimed at forcing Doha to submit and comply with the 13 points of the associated ultimatum, which include the closure of the Al-Jazeera television channel, an end to support for the Muslim Brotherhood, described as a "terrorist" organisation, the expulsion of political opponents, the closing of the Turkish military base, all associated with a series of inspections and penalties.

But the embargo appears to be turning against its authors : in Qatar, the panic lasted two or three days, the time needed for foreign countries to deliver supplies of fresh products traditionally purchased in Saudi Arabia ; the Qatar National Bank did see some institutional and mutual fund investors take the usual precautions but the currency's central rate has not varied ; finally, imported products have traditionally been re-exports from Dubai, the region's commercial hub, which now finds itself short of more than 600 million dollars of traffic.The products arrive directly into the port of Doha, which until then was in a situation of structural overcapacity. In response to these sanctions, Qatar has called on international law and brought the case to the WTO and the ICAO for settlement ; above all, it did not cut off the Dolphin pipeline that supplies gas to Dubai.

The crisis is rooted in ancient quarrels and it does not appear likely that it will be resolved through negotiations given the personalities of the leaders of the three main states involved. The possibility of a military invasion of Qatar appears to be off the table and the communications war waged by the three countries of the Gulf Cooperation Council (GCC) in the West and in the United States has not broken the deadlock. Intra-community trade is limited.Consequently, there remains the hypothesis of a commercial war waged by third-party foreign companies as evoked by two Emirati ambassadors in both Washington and Moscow.Given that American firms are de facto excluded from the scope of sanctions, each of the parties have serious arguments, both commercial and capital-related, to force European states to formulate a position, which is something they must absolutely avoid.

THE CRISIS BETWEEN SAUDI ARABIA, THE UNITED ARAB EMIRATES, EGYPT, BAHRAIN AND QATAR : A MORE SERIOUS DISPUTE THAN MAY APPEAR AT FIRST SIGHT

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INTRODUCTION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

1. LES DONNÉES D’UNE CRISE INSOLUBLE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

UNE CRISE SOUDAINE ET BRUTALE… MAIS DES DIFFÉRENDS ANCIENS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

UN ULTIMATUM INACCEPTABLE MARQUÉ PAR UNE VOLONTÉ DE RUPTURE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

ANALYSES DES EXIGENCES ET DES ARGUMENTS DE L’ULTIMATUM . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

La fin du soutien du Qatar au « terrorisme » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

La fermeture d’Al-Djazeera . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

La fin des relations avec l’Iran . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

Les autres exigences . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

2. UNE CRISE QUI VA DURER . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

DES INIMITIÉS POLITIQUES AMPLIFIÉES PAR DES RIVALITÉS PERSONNELLES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

UNE CRISE DE PLUS DANS UN MOYEN-ORIENT DÉJÀ TRÈS DÉSTABILISÉ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

3. LE QATAR FACE À L’EMBARGO . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

DES EFFETS MODÉRÉS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14

LA DÉFAITE DES PAYS DE L’ALLIANCE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

UNE GUERRE MÉDIATIQUE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

Aux États-Unis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

En France . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

Une débauche de moyens à l’efficacité limitée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16

4. QUELLES HYPOTHÈSES DE SORTIE DE CRISE ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

L’OPTION POLITIQUE ET DIPLOMATIQUE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

L’OPTION MILITAIRE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

LES OPTIONS ÉCONOMIQUES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

5. LE DÉFI FRANÇAIS : NE PAS CHOISIR ET PROTÉGER SES ENTREPRISES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

ARABIE SAOUDITE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

ÉMIRATS ARABES UNIS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

ÉGYPTE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

BAHREIN . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

QATAR. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

ANNEXES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21

SOMMAIRE

7INTRODUCTION

L’embargo contre le Qatar, déclenché par la coalition formée par l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, l’Égypte et le Bahreïn le 5 juin 2017, est une des plus graves crises qu’aient connu les pays du Golfe et risque de mettre la France, et plus généralement les Européens, dans une situation difficile.

L’embargo total, commercial, aérien, maritime et humanitaire vise à faire plier Doha sur les 13 points de l’ultimatum associé, comprenant entre autres la fermeture de la chaîne TV Al-Jazeera, l’arrêt des aides aux Frères musulmans - qualifiés de « groupe terroriste » -, l’expulsion des opposants, la fermeture de la base militaire turque… le tout associé à des contrôles et des pénalités.

Mais l’embargo semble se retourner contre ses auteurs : au Qatar, la panique a duré deux à trois jours, le temps nécessaire aux pays étrangers de fournir les approvisionnements en produits frais achetés traditionnellement en Arabie ; la Qatar National Bank a vu quelques investisseurs institutionnels et fonds de placement prendre les précautions d’usage mais le cours de la monnaie n’a pas varié ; enfin les produits importés étaient traditionnellement des réexportations depuis Dubaï, le hub commercial de la région, qui se trouve dorénavant privé de plus de 600 millions de dollars de trafic.Les produits arrivent directement dans le port de Doha, jusque-là en surcapacité. Contre ces sanctions, le Qatar a joué le droit international saisissant l’OMC et l’OACI, et surtout décidant de ne pas couper le pipe-line Dolphin qui alimente Dubaï en gaz.

La crise qui a des racines anciennes ne semble pas pouvoir se régler par des négociations étant donné les personnalités des leaders des trois principaux États impliqués. L’hypothèse de l’invasion militaire du Qatar semble exclue et la guerre de la communication à laquelle se livrent les trois pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) en Occident et aux États-Unis ne paraît pas décisive.Les échanges intra-golfiens sont limités. Reste alors l’hypothèse de la guerre commerciale par entreprises étrangères interposées comme cela a été évoqué par deux ambassadeurs émiratis à Washington et à Moscou.Les entreprises américaines étant par nature exclues du champ des sanctions, chacune des parties a des arguments soit commerciaux, soit capitalistiques pour contraindre les pays européens à prendre position, ce que ceux-ci doivent absolument éviter.

8 1. LES DONNÉES D’UNE CRISE INSOLUBLE

Tout semblait s’apaiser entre Ryiad et Doha lors de la première visite d’État du roi d’Arabie saoudite au Qatar en décembre 2016. Jusque-là, le "grand frère" saoudien n’avait jamais accepté l’indépendance de l’émirat voisin, a fortiori la diplomatie d’autonomie menée par son émir depuis les années 80. Lors du sommet arabo-américain de Riyad en mai 2017, aucune évocation n’a été faite des différends qui, un mois plus tard, le 5 juin, donneront lieu à l’ultimatum d’application immédiate lancé par Riyad, Abou Dhabi, Le Caire et Manama à l’encontre de Doha.

Cette crise est l’aboutissement paroxystique d’une longue série de différends plus ou moins violents entre les deux pays.

En 1992, lors d’un accrochage à la frontière entre les forces saoudiennes et qataries, au lieu-dit Al-Khaffous deux soldats de l’émirat furent tués.

Le 27 juin 1995 à Doha, Hamad déposa son père Khalifa Al-Thani, au pouvoir depuis 1972. Quelques mois plus tard, le 14 février 1996, le camp pro-Khalifa tenta, sans succès, un contrecoup d’État, avec le soutien de l’Arabie saoudite et de mercenaires français. Ryiad soutenait le prince Abdelaziz, le demi-frère d’Hamad, officiellement prince héritier depuis 1976.

Lors des Jeux asiatiques de 2006, Doha demanda à la France une aide logistique et sécuritaire par crainte d’un coup de main de l’Arabie qui avait refusé que la flamme transite par son territoire.

En 2012, Ryiad rappela son ambassadeur au Qatar en signe de protestation contre la couverture des événements d’Ara-bie saoudite par la chaîne qatarie Al-Djazeera qui donnait beaucoup la parole aux mouvements d’opposition au régime.

Enfin en 2014, éclata la première véritable crise entre les différents protagonistes : l’Arabie et les Émirats arabes unis rappelèrent leurs ambassadeurs à l’occasion d’une crise qui allait durer huit mois. Un accord en deux temps intervint as-sez difficilement et CNN diffusa le 11 juillet 2017 le contenu des deux textes supposés mettre fin aux tensions dans la région.

- Le premier de ces accords, relativement informel, sous forme manuscrite, a été ratifié par le roi d'Arabie saoudite, l'émir du Qatar et l'émir du Koweït le 23 novembre 2014. Doha s'engageait alors à ne fournir aucune aide à des « groupes déviants » - c’est-à-dire à des mouvements non alignés avec la ligne officielle du gouvernement saoudien -, notamment les Frères musulmans, que l'Arabie saoudite soupçonnait d'avoir joué un grand rôle dans le déclenche-ment des printemps arabes. Étaient également visés, le Hamas et le Hezbollah.

- Le second accord, qualifié de « Top Secret » par CNN, a été signé le 16 novembre 2014, pour tenter de trouver une nouvelle solution, après l'échec du premier, dont Riyad at-tribuait la responsabilité à Doha. Cette fois, la liste des par-ties était plus large, puisque le roi du Bahreïn, le Premier mi-nistre des Émirats arabes unis et le prince d'Abou Dhabi en étaient cosignataires. Parmi les objectifs du texte : soutenir la stabilité de l'Égypte, limiter la portée d'Al-Djazeera et iso-ler les Frères musulmans considérés comme « une menace à la sécurité et la stabilité des pays du Golfe ». Pourtant, le Qatar continua de démentir avoir jamais financé les Frères musulmans.

En 2014, une loi qatarienne sur la cybercriminalité, considé-rée comme faisant partie des accords entre les États du Golfe, criminalisa les insultes en ligne contre les familles royales de la région, interdit la propagation de « fausses nouvelles » vio-lant les « valeurs sociales » du pays ou « l’ordre général » et rendit illégal d'inciter, d'aider et de faciliter la publication de matériel offensant. C'est la violation supposée de cette loi par Doha, qui serait à l'origine de la crise actuelle1.

UNE CRISE SOUDAINE ET BRUTALE… MAIS DES DIFFÉRENDS ANCIENS

1www.lemonde.fr/proche-orient/article/2017/07/03/crise-entre-qatar-et-arabie-saoudite-riyad-ne-veut-pas-laisser-ses-vassaux-s-emanciper_ 5154766_3218.html#JYqDdiPwKiUFUvwQ.99

L’ultimatum adressé au Qatar a été préparé, mais mal prépa-ré. Comme le constate un chroniqueur, l’ultimatum est une « poudrière sur un gazomètre ».

Tout commence par une quinzaine de papiers d’opinion dans la presse américaine sur les dangers pour la stabilité régio-nale provoqués par le Qatar, alors que les médias locaux avaient peu publié sur ce pays depuis quelque temps.

Puis, c’est la Fake News du 24 mai - attribué à Qatar News Agency (QNA) - prétendant que l’émir Tamim ben Hamad Al-Thani du Qatar aurait déclaré que l’Iran était un « pouvoir islamique », que le Qatar avait d’excellentes relations avec Is-raël, que le Hamas était un représentant légitime du Peuple palestinien, le tout malgré d’excellentes relations avec Was-hington. L’investigation conduite par le FBI a montré que le hacking du site de la QNA provenait des Émirats, le 20 avril, et

UN ULTIMATUM INACCEPTABLE MARQUÉ PAR UNE VOLONTÉ DE RUPTURE

991. LES DONNÉES D’UNE CRISE INSOLUBLE

que le faux communiqué attribué à Tamim devait être diffusé le 11 mai, dix jours avant l’arrivée de Trump en Arabie saou-dite. Le 20 juillet, le gouvernement qatari organisa une confé-rence de presse pour exposer les résultats des investigations menées par le FBI et Scotland Yard, accusant Abou Dhabi.

L’ultimatum en 13 points adressés par Riyad, Abou Dhabi, Le Caire et Manama à Doha le 5 juin 2017 formule des exi-gences difficilement acceptables pour le Qatar. En effet, il exige :1- La rupture de toute coopération militaire et sécuritaire

avec l’Iran, en abaissant le niveau des relations entre les deux pays et en fermant la représentation diplomatique de Téhéran à Doha.

2- La fermeture immédiate de la base militaire turque en cours de construction et l’arrêt de la coopération militaire avec Ankara.

3- L’interruption de tout lien avec les organisations terro-ristes, en particulier les Frères musulmans, l’État isla-mique, le Front de la conquête du Levant (ex Jabat Al-Nos-ra) et le Hezbollah.

4- La fin du financement d’individus, de groupes ou d’organi-sations désignés comme terroristes par l'Arabie saoudite, les Émirats, l'Égypte, le Bahreïn ou les États-Unis (dont bien évidemment le Hamas).

5- L’expulsion des « personnalités terroristes » installées au Qatar et recherchées par l’Arabie saoudite et ses alliés, dont le cheikh Youssouf al-Qaradawi qui figure dans la liste de 59 personnalités dressée par Riyad et Abou Dhabi (cf. annexe I).

6- La fermeture la chaîne Al-Djazeera et toutes les filiales qui lui sont liées.

7- La fin des ingérences de Doha dans les affaires intérieures des pays de la région.

8- Le paiement de réparations à ses voisins en guise de dé-dommagement pour la nocivité de sa politique poursuivie ces dernières années.

9- L’obligation pour le Qatar de s’aligner sur les autres pays du Golfe pour la conduite de ses politiques au niveau mili-taire, social et économique.

10- La communication de toutes les informations sur les membres de l’opposition que le Qatar a pu héberger par le passé et l’arrêt de tout contact avec les opposants des régimes saoudien, émirati, égyptien et bahreini.

11- La fermeture de tous les médias que le Qatar a pu, di-rectement ou indirectement, fonder, comme les sites Arabi21, Al Araby al-Jadeed, Rassd, Mekameleen ou Middle East Eye.

12- L’obligation de satisfaire aux exigences de cet ultimatum dans un délai de 10 jours.

13- L’obligation pour le Qatar consentir à un audit mensuel par ses voisins pour s’assurer de la mise en place effec-tive de ces mesures au cours de la première année sui-vant l’approbation de l’accord.

15 jours après l’annonce de cet utlimatum, les exigences de Riyad, Abou Dhabi, Le Caire et Manama à l’égard de Doha sont résumées en 6 principes, énoncés le 20 juillet 2017 :1- Engagement à combattre l’extrémisme et le terrorisme

sous toutes ses formes et à empêcher leur financement ou la fourniture de lieux de refuge.

2- Interdire tous les actes et les formes d’expression qui pro-pagent, incitent, favorisent ou justifient la haine et la vio-lence.

3- Engagement total envers l’accord de Riyad de 2014, l’ac-cord complémentaire et son mécanisme exécutif pour 2014 dans le cadre du Conseil de coopération du Golfe.

4- Engagement envers tous les résultats du sommet ara-bo-islamique-américain, tenu à Riyad en mai 2017.

5- S’abstenir de s’ingérer dans les affaires intérieures des États et s’abstenir de soutenir les entités illégales.

6- Un dernier principe, ajouté sans doute pour s’assurer l’adhésion de la communatué intenrationale mentionne la « responsabilité de tous les États de la communauté internationale de faire face à toutes les formes d’extré-misme et de terrorisme telles que les menaces pour la paix et la sécurité internationales ».

L’ultimatum du 5 juin ressemble de très près à l’ultimatum d’Hitler contre la Tchécoslovaquie de Benes en 1938, puis à celui en 11 points contre la Lituanie, immédiatement après son succès dans les Sudètes ; c’est-à-dire le choix entre la renonciation à toute souveraineté ou la guerre.

La fin du soutien du Qatar au « terrorisme »

L’un des points importants de l’ultimatum est l’accusation de soutien au « terrorisme » c’est-à-dire aux Frères musulmans et d’une façon plus générale aux opposants des différents régimes arabes que Doha est sommer d’expulser et de livrer. C’est un débat original lancé par des hypocrites contre des menteurs.

Les Frères musulmans sont classés « groupe terroriste » par l’Arabie, le Bahreïn, l’Égypte et les Émirats depuis le 7 mars 2014. Or, la confrérie est sortie vainqueur de la quasi-tota-lité des élections qui ont suivi les "révolutions" arabes. Pour le Qatar, elle est l’expression de l’islam politique « démocra-tique ».

ANALYSES DES EXIGENCES ET DES ARGUMENTS DE L’ULTIMATUM

10Son soutien aux Frères musulmans participe plus d’une « di-plomatie d’influence » que d’un véritable soutien religieux (surtout venant du « wahhabisme soft » du Qatar). Ainsi, Doha finance en Tunisie à la fois le gouvernement et Ennahda (Frères musulmans), et en Palestine aussi bien le Hamas que l’Autorité palestinienne. Un des maitres à penser des Frères musulmans, Youssef Al-Qaradawi, fait depuis Doha une émission télévisée hebdomadaire suivie par près de 60 mil-lions de personnes à travers le monde.

L’Arabie saoudite qui a expulsé les Frères musulmans depuis la première guerre du Golfe (1991), en raison de leur opposi-tion à l’arrivée des GI’s, leur préfère les militaires et a soutenu l’accesison au pouvoir du général Sissi en Egypte le 3 juillet 2013. Pour sa part, le dirigeant des Émirats arabes unis, Mo-hamed bin Zayed, regarde les Frères musulmans comme une « nouvelle version du colonialisme » voué à renverser les ré-gimes arabes, voler leurs richesses et détruire leurs armées. Il a refusé de traiter avec le Bureau d'orientation de la confré-rie et son guide, Khairat Al-Shater, ainsi qu'avec tout autre membre de cette organisation.

Sous le règne de Tamim, l’actuel émir, et de son père le Qatar a offert l’asile aux taliban (en 2011 avec l’accord américain), mais aussi aux Shebaab somaliens, au Hamas et au Hezbol-lah ainsi qu’à un certain nombre de « réfugiés politiques » is-lamistes comme l’Algérien Abassi Madani. Le Qatar finance les partis islamistes au Yémen et au Maroc, porterait à bout de bras l’Erythrée et aurait accordé un soutien financier et matériel aux insurgés islamistes libyens mais pas au Conseil national de transition (CNT). En Syrie, Doha est accusé de fi-nancer Jabat Al-Nosra, filiale locale d’Al-Qaida.

Les services américains accusent Doha d’avoir abrité le Kowei-tien Khaled Cheikh Mohamed, un des organisateurs des atten-tats du 11 septembre, avec le soutien du ministre de l’Intérieur de l’époque, Abdallah bin Khalid al-Thani, membre de la famille royale. Ce dernier a été démis de ses fonctions en 2003. Fahd, le plus intégriste des fils de l’Emir, fit le coup de feu en Afgha-nistan, et son oncle, Cheikh Abdallah, fut un ami du cerveau des attentats du 11 septembre longtemps domicilié au Qa-tar. Mais selon un compagnon de Ben Laden, Abdulla Anas, les Saoudiens et les Émiratis avaient eux aussi tenté d’attirer les taliban chez eux, avant que Doha ne le fit1. L’ambassadeur émirati à Washington s’en est défendu expliquant que les conditions posées par Abou Dhabi - et acceptées par Was-hington – à leur venue étaient claires : « dénoncer Al-Qaida et Ben Laden ; reconnaître la constitution afghane ; et renoncer à la violence2 ». Les taliban ayant refusé, auraient préféré le Qatar.

Daech et Al-Nosra ont une politique systématique de kid-napping qui leur rapporte des ressources considérables. Le Qatar leur a versé des sommes considérables afin d’obtenir

la libération de membres de la famille princière. Il s’est vu im-médiatement accusé de leur fournir une aide dissimulée3 ?

L’accusation de "soutien au terrorisme" ne manque pas de piquant venant de Riyad puisque Daech est un pur produit de l’idéologie wahhabite saoudienne. Au moment même de l’ultimatum, au Royaume Uni, Tom Wilson de la Henry Jackson Society publiait un rapport concluant que le finan-cement de l’extrémisme religieux outre-Manche venait surtout d’Arabie saoudite et était en forte croissance ces dernières années4. Theresa May s’est trouvée mise en dif-ficulté pour ne pas avoir voulu publier un rapport comman-dé par l’ancien Premier ministre à la suite des attentats. Aux États-Unis, le président du Comité des Relations internatio-nales du Sénat américain, Bob Corker, déclare simplement : « le montant des soutiens au terrorisme de la part de l’Arabie saoudite ramène le Qatar au rang de nain en la matière5 ». Enfin, l'Arabie saoudite elle-même est accusée de terrorisme, par la loi Justice Against Sponsors of Terrorism Act (JASTA), qui permet à la justice américaine de poursuivre des États étran-gers pour terrorisme. Une Class Action est ainsi en cours outre-Atlantique en raison de la responsabilité de Riyad dans les attentats du 11 septembre 2001.

À noter que le Qatar a annoncé avoir modifié par décret, sa loi de 2004 sur la Lutte contre le financement du terrorisme à l'occasion de la tournée du secrétaire d'État américain Rex Tillerson. Ce texte6 établit « deux listes nationales pour les indi-vidus et les entités terroristes » et énonce les mesures néces-saires pour pouvoir les inscrire sur ces listes, tout en donnant aux suspects le droit de faire appel contre leur inscription. Le décret a été salué comme « un pas positif » par le ministre d'État émirati aux Affaires étrangères, Anwar Gargash.

La fermeture d’Al-Djazeera

La fermeture d’Al-Djazeera et de tous les médias aidés par le Qatar est une vieille revendication de ses voisins

Al-Djazeera, née en 1974, émet depuis 1998, 24 heures sur 24. Diffusée dans 35 pays, elle a ringardisé toutes les chaînes arabes par sa liberté de ton et sa couverture journalistique, en particulier lors du bombardement de Gaza en 2014. Déjà, en 2002, tous les pays de la Ligue arabe avait critiqué l’orien-tation de la chaîne et six d’entre eux (Arabie souadite. Koweït, Jordanie, Tunisie, Libye, Maroc) avaient rappelé leurs ambas-sadeurs du Qatar. Une large purge dans la rédaction de la chaîne avait suivi la crise de 2014.

Les adversaires de Doha réclament également la fermeture des autres médias que le Qatar a directement ou indirec-tement fondés comme les sites Arabi21, Al Araby al-Jadeed, Rassd, Mekameleen ou Middle East Eye, hébergés en Turquie ou basés à Londres.

1www.aljazeera.com/news/2017/08/saudi-arabia-uae-host-taliban-170812171821732.html2www.nytimes.com/2017/08/09/opinion/the-united-arab-emirates-and-the-taliban.html

3Wall Street Journal 29 juillet 20144http://henryjacksonsociety.org/category/regions/middle-east/saudi-arabia/

5www.independent.co.uk/News/uk/politics/jeremy-corbyn-saudi-arabia-extremist-funding-terrorism-gulf-states-qatar-isis-al-qaeda-labour-a7773451.html6www.qfcra.com/.../Laws/Law%20No%20(3)%20of%202004%20on%20Combating%

11La fin des relations avec l’Iran

Les relations du Qatar avec l’Iran sont un point particulière-ment urticant pour les Saoudiens. L’ultimatum impose que Qatar s’aligne sur la diplomatie des pays du Conseil de coo-pération du Golfe (CCG). Demande incohérente. Oman, par exemple, n’entend pas rompre ses relations avec Téhéran. Les Émiratis eux-mêmes ne sont pas clairs, car si Abu Dha-bi insiste sur le contentieux des îles Abou Moussa et Grande Tomb, revendiqués par les deux Etats, Dubaï a fait sa fortune en violant des années durant l‘embargo international contre Téhéran. En réalité, la mise en accusation du Qatar vise l’Iran : « Qatar is accused of having a hidden relationship with Iran, but its relations with Iran are clear, transparent and time-tested1 » déclare Sheikh Mohammed bin Abdulrahman Al-Thani, le mi-nistre des Affaires étrangères qatarien, qui note en passant que les Émirats arbaes unis commercent plus que le Qatar avec l’Iran.

Les autres exigences

Ses adversaires demandent au Qatar de payer des répa-rations en guise de dédommagements à ses voisins pour la nocivité de sa politique poursuivie ces dernières années (chiffres non fournis). Il devra également désormais aligner sa politique extérieure sur celle des autres pays du CCG et ac-cepter des contrôles réguliers sur le respect des dispositions de l’ultimatum

Quelques autres points annexes sont assez circonstanciels comme la fermeture de la base turque Tariq Bin Ziyad. L'inter-vention actuelle de la Turquie dans la crise est la conséquence de l’accord signé en 2014 visant à envoyer plus de troupes au Qatar. Des responsables2 ont déclaré qu'il pourrait y avoir jusqu'à 3 000 soldats turcs sur la base, principalement pour des exercices de formation et pour améliorer la sécurité du CCG. À l’occasion de cette crise, le président Recep Tayyip Er-dogan a déclaré que le Qatar était un pays contre lequel « une peine de mort avait en quelque sorte été prononcée ».

¹www.reuters.com/article/us-gulf-qatar-idUSKBN1910B62www.globalsecurity.org/military/world/gulf/qatar-forrel-bases.htm

12

1Le Monde, 14 septembre 2017

2. UNE CRISE QUI VA DURER

La crise a été gérée de façon à humilier les simples citoyens qataris créant ainsi un sentiment « national » perceptible dans la quotidienneté. Plusieurs centaines de sujets qataris ont été bloqués en Arabie. Les autorités locales refusaient de les laisser embarquer dans des avions de Qatar Airways, contraints de repartir à vide. Même les chameaux ont subi l’ire saoudienne. Quelques centaines d’animaux appartenant à des Qataris sont morts bloqués à la frontière, dans le désert.

Cette crise semble bien partie pour durer car les facteurs de dissensions sont multiples.

Au regard de la gérontocratie qui a longtemps caractérisé ces pays, la crise actuelle est une querelle de « gamins » bercés d’histoires guerrières qui tous trois entendent personnaliser l’avenir de leur pays en parrainant des plans de développe-ment à échéance de 15 à 20 ans - qui sont tout à fait iden-tiques - pour préparer l’après pétrole. - Le Saoudien Mohamed Bin Salmane (MBS) a 32 ans (il né

en 1985). Il a un petit diplôme juridique de l’Université isla-mique de Riyad. Il est devenu ministre de la Défense à 30 ans -, ayant immédiatement en charge de gros dossiers, notamment celui de la guerre au Yémen dont il est consi-déré comme l’instigateur. MBS est l’auteur du projet Vision 2030 destiné à préparer « l’après pétrole ». À noter que ce projet s'affiche en calendrier grégorien et non hégirien sur toutes les façades de la capitale. MBS vient d’être nommé Prince héritier le 21 juin 2017, en "marchant" sur la tête de son cousin, Mohamed Ben Nayef, Prince héritier putatif (ce-lui que Hollande et Valls voyaient comme successeur royal). Enfin, Mohamed Bin Salmane est annoncé comme roi dans l’année, son père, l’actuel roi étant malade.

- Le Qatari Tamim ben Hamad Al-Thani est âgé de 36 ans

(il est né en 1980). Il est d’éducation anglaise, diplômé de l’académie militaire de Sandhurst (1998). Il a apporté un soutien actif à la guerre en Libye contre Muamar Kadhafi.

Il est l’auteur de la Qatar National Vision 2030. La passation de pouvoirs s’est faite sans heurts le 25 juin 2013, dix-huit ans après la prise du pouvoir par son père Hamad.

- L’Emirati Sheikh Mohamed bin Zayed al-Nayan (MBZ) est le plus âgé (56 ans), il est né en 1961. Il est également diplô-mé de l’Académie militaire de Sandhurst (1979) et de l’École des officiers de Sharjah (Émirats arabes unis). Il a été promu vice-chef d’état-major des armées à 33 ans, puis mérachal un an plus tard. Il est prince héritier depuis 2005. MBZ a toujours exercé des responsabilités. Il est l’auteur de la UAE vision 2021. Il est atteint d’une phobie épidermique de l’isla-misme sous tous ses aspects : chiites iraniens, Frères mu-sulmans, salafistes ou djihadistes sunnites… dès lors qu’ils s’invitent sur le terrain du pouvoir temporel.

La rivalité des trois hommes vire parfois au grotesque, comme cela a été illustré lors de la défaite en Ligue des Champions du PSG – propriété du Qatar - contre le club de Manchester City - propriété de Cheikh Mansour, membre de la famille royale d’Abou Dhabi. Selon l’un de ses proches « L’émir (du Qatar) en était malade. Sur plein de sujets il a la tête sur les épaules, mais dès qu’il s’agit des Émirats arabes unis, on change de dimension. Ce n’est plus du foot, ce n’est plus un club contre un autre, mais un pays contre un autre, et même un dirigeant contre un autre : un vrai concours de stéroïdes1 ».

Cette crise vient en effet se surajouter à d’autres graves crises. Les divers conflits régionaux sont dans une hystérésis grave : - la Syrie avec ou sans Assad ; - l’Afghanistan et le retour des taliban ; - la guerre sunnites/chiites au Pakistan, en Afghanistan, en

Irak, au Yémen, en Syrie, au Bahreïn et au Liban - sans parler de la répression contre ceux de la côte est de l’Arabie (dans les zones pétrolières) ;

- les massacres causés par les bombardements saoudiens au Yémen depuis 2015 ;

- le retour des Russes dans la région ; - le référendum d’indépendance kurde ; l’occupation saou-

dienne à Bahreïn et les condamnations d’opposants ;

- enfin la tension entre Riyad et Téhéran.

De plus, la cession gracieuse par l’Égypte à l’Arabie saoudite des îles de Tiran et Sanafir à la sortie de mer Rouge, à l’ex-trémité du Golfe d’Aqaba le 27 juin 2017 (avec l’accord tacite d’Israël) suscite les protestations de rue en Égypte.

Au centre de nombre de ces crises, l’Arabie a décidé de construire un mur de 950 kilomètres au nord du pays - plus long que le mur israélien des territoires occupés - pour em-pêcher les réfugiés d’entrer dans le pays.

DES INIMITIÉS POLITIQUES AMPLIFIÉES PAR DES RIVALITÉS PERSONNELLES

UNE CRISE DE PLUS DANS UN MOYEN-ORIENT DÉJÀ TRÈS DÉSTABILISÉ

13

L’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, l’Égypte et le Bahrein ont mis en place un véritable embargo contre le Qatar, réduisant drastiquement la libre circulation des biens, des personnes et des capitaux. Toutefois son efficacité laisse à désirer.

Les effets physiques de l’embargo ont été sensibles 5 à 6 jours. Il faut dire que la dépendance du Qatar était forte : avant la crise, l’émirat n’était autosuffisant que pour 15 à 20 % de ses besoins alimentaires ; 80% des produits frais venaient d’Ara-bie et environ 80 % des produits étrangers importés étaient réexpédiés de Djebel Ali, la grande zone franche de Dubaï ; les réimportations coûtaient au Qatar environ 600 millions de dollars par mois à elles seules. Et les échanges avec les autres pays du Golfe (Dubaï, Bahreïn, Arabie) représentaient environ 2 milliards de dollars par an.

Aucune leçon n’ayant été tirée de la crise de 2014, le leitmotiv actuel est donc « Plus jamais cela ! ». La diversification des ap-provisionnements est ainsi devenue une priorité stratégique pour Doha. La gêne occasionnée par le blocus des voies ma-ritimes et aériennes est financièrement supportable et peut-être contournée en utilisant des détours par le Koweït, Oman, l’Iran, la Turquie, l’Inde etc. Cela a permis de comprendre que les produits proposés par l’Iran, la Turquie, le Maroc, la Tunisie et l’Azerbaïdjan - ou même l’Europe - étaient moins chers. La construction d’un Food Strategic Storage de 500 000 m2 à Doha est en cours et le Qatar a acheté 5 000 vaches laitières au Danemark.

L’effet sur le tourisme est plus significatif : 3 millions de tou-ristes du Golfe dont 900 000 Saoudiens venaient dans l’émi-rat chaque année. Un des groupes hôteliers français présent depuis 16 ans au Qatar prévoit encore la construction de cinq hôtels supplémentaires en 2018, et cinq autres sont envisa-gés pour les années ultérieures. Par contre, selon le respon-sable de ce groupe, leurs 30 hôtels en Arabie et aux Émirats ont subi une baisse de fréquentation de 15 à 20 %. Les Saou-diens vont dorénavant en vacances en Égypte.

Les effets financiers ont été peu durables : quelques fonds de pension, grands institutionnels, par précaution minimum, ont retiré environ 2,5 milliards de dollars à Paris, 10 milliards sur 140 milliards de dollars des actifs de la Qatar National Bank (QNB) au total. Mais les ratios QNB chez Moody’s et Fitch n’ont pas bougé. Le cours du ryal n’a pas bougé non plus par rapport au dollar. Les prévisions de croissance du Qatar pour 2017-2018 sont les meilleures de tous les pays du Conseil de coopération des États arabes du Golfe (CCEAG). Toutefois, le coût de l’embargo est encore aujourd’hui de 100 millions de dollars par jour, soit 3 à 4 milliards par an.

DES EFFETS MODÉRÉS

3. LE QATAR FACE À L’EMBARGO

Les pays de l’alliance ont politiquement et économiquement perdu. Les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite semblent s’être tirés eux-mêmes une balle dans le pied sous les princi-paux aspects de la crise.

Économiquement, Dubaï dépend à 40 % du gaz qatari par le pipe Dolphin que Doha n’a pas coupé, et fait 33 milliards de dollars d’échanges avec l’Iran. Inutile de préciser que per-sonne ne va acheter les produits agricoles saoudiens bloqués à la frontière.

Le Qatar a engagé des actions légales contre les mesures de l’embargo dans diverses enceintes internationales : - une plainte auprès de l'Organisation mondiale du commerce

(OMC) pour contester le boycott commercial et a demandé des "consultations" ;

- une autre devant l'Organisation de l'aviation civile interna-tionale (OACI) pour mettre fin au blocage aérien, en citant les risques sur la sécurité aérienne dans la région. Le Qatar demande que les quatre pays alliés définissent des couloirs d'urgence pour les vols de Qatar Airways et, par la suite, an-nulent totalement leur blocus aérien.

En mettant l'accent sur la règle de droit international, le Qatar souhaite forcer tous les États du CCG à se mettre d'accord sur la manière de définir le « terrorisme » et, par conséquent, préciser si l'un d'eux, ou la plupart d'entre eux, appuie les mouvements de « terreur ». Le Qatar a lancé le même pro-cessus politique, technique et juridique dans son accord bila-téral avec les États-Unis le mois dernier.

Saoudiens et Emiratis ont été trop confiants dans leur force, leur détermination et leur volonté de punir le Qatar. Le pro-blème est que personne n'achète les biens et services qu’ils proudisnet et qu’ils ont eux-mêmes sanctionnés en décré-tant le blocus et ils se sont maladroitement isolés. Ils en sont réduits à acheter le soutien d’autres pays comme le Tchad, les Maldives ou le Niger, à travers les prêts accordés par la Banque islamique.

LA DÉFAITE DES PAYS DE L’ALLIANCE

14

Les adversaires du Qatar en sont réduits à mener une vé-ritable campagne de propagande dans les pays étrangers. Alors que les monarques du Golfe ont toujours veillé à régler leurs différends en « famille », à l’abri des regards extérieurs, ils ont choisi cette fois de recourir à une vaste campagne mé-diatique de dénigrement en vue de « faire plier l’adversaire ».

Aux États-Unis

Aux États-Unis, les dépenses de relations publiques saou-diennes se sont brutalement accrues après le 11 septembre 2001. Ryiad1 avait réuni une quantité ahurissante d’experts et de lobbyistes américains pour "aider" la communication des journalistes et influencer les décideurs, toutes couleurs politiques confondues. Depuis 2014, le régime a payé :- le groupe Podesta, société de lobbying dirigée par un collec-

teur de fonds pour la campagne d’Hillary Clinton ; - Norm Coleman, ancien sénateur républicain, qui dirige un

grand Super PAC [comité d’action politique] ; - H.P. Goldfield, lobbyiste du cabinet d’avocats Hogan Lovells

et vice-président du Albright Stonebridge Group de Made-leine Albright ;

- Targeted Victory, un cabinet de conseil fondé par d’anciens assistants de la campagne présidentielle de Mitt Romney ;

- ainsi que deux grands cabinets d’avocats comprenant de nombreux anciens fonctionnaires du gouvernement.

Ryiad a depuis encore ajouté des lobbyistes américains à ses effectifs salariés, avec l’embauche de Barbour Griffith and Rodgers (BGR Government Affairs), une société fondée par l’ancien président du Comité national républicain Haley Bar-bour pour aider au « rayonnement du Centre d’études et des affaires médiatiques de la Cour royale saoudienne » (contrat de 500 000 dollars par an).

Le dispositif inclut également les services de Jeffrey Birn-baum - journaliste qui autrefois couvrait l’action des lobbys au Washington Post et a travaillé pour Fox News - et d’Ed Ro-gers, ancien fonctionnaire de l’administration Reagan.

Principal opérateur au service de Ryiad, Podesta Group (contrat de 140 000 dollars/mois) travaille essentiellement les quotidiens et les chaînes de télévision nationales. Mais il a également contacté des membres du Sénat et de la Chambre des représentants, les partis politiques et des centres de re-cherche et même des lobbyistes israéliens. Par exemple, la société a contacté Michael Pregent, cher-cheur au Hudson Institute, sept fois en janvier, quatre fois en février et une fois le 20 avril 2016 - soit le jour même où l’analyste publie un long article intitulé « L’Arabie saoudite est le plus grand allié des États-Unis » dans Foreign Policy2. Ce groupe de pression a ainsi quelques beaux succès à son actif.

Podesta Group, BGR Affaires gouvernementales, DLA Piper et Pillsbury Winthropont3 ont agi de concert pour contrer la proposition des candidats démocrates Hillary Clinton et Ber-nie Sanders, qui sont à l’origine du projet de loi JASTA permet-tant aux familles des victimes des attentats du 11 septembre de poursuivre en Class Action des gouvernements étrangers ayant participé à des actes terroristes.

Finalement, revenant aux bonnes vieilles méthodes, le gouvernement saoudien aurait menacé de vendre jusqu’à 750 milliards de dollars détenus en bons du Trésor et d’autres actifs si le projet de loi était adopté. Il a néanmoins été adopté ! Pour calmer le jeu, un porte-parole de la Maison Blanche avait pourtant laissé entendre que le président Obama met-trait son veto à la mesure.

Au-delà de ces consultants et de l’action personnelle de l’ambassadeur saoudien à Washington, le régime décline sur plusieurs terrains l’action d’influence : dons à de grandes fondations présidentielles4, financement de chaires univer-sitaires sur le Moyen-Orient et l’islam ; invitations de parle-mentaires, etc.

Selon le Financial Times5, en plus de ce dispositif, l'Arabie saoudite vient de lancer une offensive mondiale pour contrer les média anti saoudiens à Londres, Berlin et Paris, pour valo-riser le « nouveau visage du royaume ». Depuis ces villes, les consultants pilotés de Riyad produiraient des communiqués de presse, publieraient du contenu sur les réseaux sociaux et inviteraient des « faiseurs d’opinion » à visiter l'Arabie saou-dite et à « faire connaître la vision saoudienne sur les dévelop-pements mondiaux en réponse à des publications négatives et inexactes sur le royaume ». Leur mission est aussi de dévelop-per la connaissance de la culture saoudienne à travers des expositions d'art et des discussions religieuses. Le ministère de l'Information saoudien pourrait mettre en place égale-ment d’autres "hubs" médiatiques à Moscou dès fin 2017, selon un document officiel, puis à Pékin, Tokyo, Mumbai et dans d'autres grandes villes à partir de l'année prochaine.

Ces efforts de communication sont capitaux pour le royaume : l’échec de la guerre au Yémen a soulevé l’opinion internatio-nale contre lui. Et l’ambiance délétère dans la région pour-rait faire le lit d’Al-Qaïda dans la péninsule arabique (AQPA), considéré par la CIA comme la filiale la plus dangereuse de la nébuleuse terroriste. Un tel échec serait exclusivement im-putable à Salmane. En France

En France, la campagne de communication de Riyad a été pilotée par Qorvis MSLGroup, société issue de la fusion de

UNE GUERRE MÉDIATIQUE

1Lee Fang (ancien journaliste du Washington Post) The Intercept, 21 mars 20162http://foreignpolicy.com/2016/04/20/saudi-arabia-is-a-great-american-ally-not-iran/

3www.washingtonpost.com/news/powerpost/wp/2016/04/20/saudi-government-has-vast-network-of-pr-lobby-firms-in-u-s/?utm_term=.5a0f1f88aac74Voir mon livre Docteur Saoud et Mister Djihad, la diplomatie religieuse de l’Arabie saoudite

5Simeon Kerr, Financial Times, 11 septembre 2017.

Intro

15Publicis Consultants et Manning Selvage & Lee (MSL). La nouvelle entité travaille pour Riyad depuis plus de 10 ans afin d’expliquer la « politique des droits de l’homme » du Royaume. Contrat modeste (40 000 dollars par mois) au départ, les honoraires ont bondi en 2016. Qorvis a facturé 7 millions de dollars à l’ambassade d’Arabie saoudite pour ses frais de dépôt semi-annuels, plus de deux fois le montant facturé au cours des années précédentes.Mais il restait à compléter le dispositif. « Depuis plusieurs mois, quatre agences de communication et de relations presse fran-çaises : Publicis1, Image 7, Edile Consulting et une autre dont le nom n’a pas filtré (fortement liée à Israël selon certaines sources), se sont vues confier par le royaume, la mission d’améliorer l’image de Riyad dans l’hexagone » révèle l’hebdomadaire Challenges2.L’ancienne porte-parole d’Arnaud Montebourg, Sihem Souid, qui dirige ELN Technology a publié en 2016 un livre intitulé L'Arabie Saoudite, ce pays méconnu (L’Harmattan) dans le-quel elle fait l'apologie dans la presse du Forum pour le dia-logue des civilisations créé par le pays religieusement le plus intolérant de la planète.Image 7, fondée par Anne Méaux, l'ancienne attachée de presse de l'Élysée sous Valéry Giscard d'Estaing, a permis à trois journalistes de couvrir un exercice militaire important Tonnerre du Nord, dans le nord-est de la péninsule. « Les Saoudiens nous ont demandé de faire une opération pour mon-trer la guerre qu'ils livrent aux terroristes, précise Anne Méaux. Ils veulent que leur pays soit mieux compris et disent que nos pays ont des cultures différentes, qu'il faut respecter cela3 ». Étonnante conception de la guerre, alors même que ces ter-roristes qui sont formés dans les madrasas du pays.

Point d’orgue de l’offensive saoudienne en France, deux col-loques ont été organisés pour promouvoir le royaume. Le premier, « France et Arabie saoudite face au terrorisme », organisé le 23 mai 2016 à l’Académie diplomatique interna-tionale, et présidé par l’ambassadeur d’Arabie en France et la sénatrice Nathalie Goulet, présidente du groupe d’amitié France-Pays du Golfe du Sénat. Présidence identique à celle retenue par le second colloque, le 17 novembre 2017 au Sé-nat, cette fois sur le thème « Nouveaux visages de l’Arabie saoudite ».Aucune de ces deux conférences n’a jugé bon d’inviter le Grand mufti d’Arabie saoudite, un Al-Shaikh descendant d’Abd Al-Wahhab, fondateur du wahhabisme, « religion de paix et d’amour » comme chacun sait, religion officielle du pays qui coupe les mains des voleurs, décapite, opprime les femmes et interdit les autres religions, pratiques similaires à celle de l’État islamique qui compte les mêmes références religieuses. Un aspect essentiel des "valeurs" de l’Arabie saoudite a donc été escamoté, car elle est un « allié » et un excellent client.

Une débauche de moyens à l’efficacité limitée

Le dispositif stratégique d’influence saoudien dans le monde est donc assez fourni. Il a démontré ses capacités à l’occa-sion de la publication du décret anti-immigration de Donald Trump, qui exclut de l‘entrée aux États-Unis les citoyens de six pays musulmans - dont l’Irak -, mais laisse les frontières ouvertes aux sujets saoudiens. En dépit de tous ces moyens, la rumeur et les Fake News restent l’arme principale3.- La chaîne saoudienne Al-Arabiya en Arabe, a accusé le PSG -

Donc l’émir du Qatar - de financer le sionisme pour avoir re-cruté un Israélien Pini Zahavi comme agent de joueur dans son staff.

- Selon l’agence chinoise Xinhua du 31 juillet 2017, le ministre saoudien des Affaires étrangères, Adel al-Jubeir, a averti que l'appel du Qatar à « l'internationalisation des sites sacrés » est « une déclaration de guerre contre le royaume4 ».

- Salman al-Ansari du Saudi American Public Relation Affairs Committee (SAPRAC) - groupe de lobbying saoudien basé aux États-Unis - a déclaré sur Twitter que le soutien du Qatar à l'Iran et les « insultes » contre Riyad conduiraient, pour l’Émir, à la même issue que celle qu’a connu Mohamed Morsi, l’ex président Frère musulman d’Égypte, qui a fini par être isolé et emprisonné5 ». Selon la chaîne qatarienne Al-Jazeera, l’Arabie aurait signé un contrat de 138 000 $ pour cette campagne

Il a été également fait appel à de pseudo-think tanks. Une étrange conférence6 a été organisée, jeudi 14 septembre à Londres, au nom d’Abdallah ben Ali ben Abdallah ben Jassem Al-Thani, obscure personnalité apparentée à la dynastie ré-gnante à Doha et cheikh se croyant apte à renverser l’émir du Qatar. La liste des invités était tenue secrète, de gracieuses hôtesses d’accueil, des chiens renifleurs et des sbires à oreil-lette encadraient l’événement. La conférence était payée par Khalid Al-Hail, un homme d’affaires qatarien qui se fait ap-peler « Excellence » et se présente comme le fondateur d’un « Parti national démocratique du Qatar ». Il ne se cache pas de vouloir installer au pouvoir à Doha son candidat.

À Paris, un Centre arabo-européen pour combattre l’extré-misme a publié une étude introuvable, Qatar : The Black Book, qui souligne le long soutien de Doha au terrorisme et révèle l'existence de cellules terroristes à dans l’émirat7. L’étude est largement commentée par la presse égyptienne. Ce à quoi Doha a répliqué par la publication d’un livre intitulé lui aussi The Black Book of Arabia, édité par la Qatar Foundation8.

1Elisabeth Badinter, présidente du Conseil de Publicis, vient d'appeler au boycott des entreprises qui se lancent dans la mode islamique2 « L’Arabie saoudite entend redorer son image en France », www.challenges.monde3Ibid.4www.lemonde.fr/proche-orient/article/2017/09/15/a-londres-le-qatar-entre-james-bond-et-monty-python_5186070_3218.html#4pFOdwtR3KbSiZu3.995http://news.xinhuanet.com/english/2017-07/31/c_136486352.htm6www.middleeasteye.net/news/saudi-lobbyist-attacks-emir-qatar-and-seems-admit-supporting-coup-egypt-15019522377http://qatarcrisisnews.com/?gclid=EAIaIQobChMI86nZ87jN1gIVV-cbCh0zsgZeEAMYASAAEgJ0ZvD_BwE8Bloomsbury Qatar Foundation Publishing

16À l’occasion de cette crise, le Qatar a également dépensé beaucoup d’argent pour « exister », contrer les accusations de financement du terrorisme et se faire reconnaître comme partenaire international fiable. Cette campagne de commu-nication fondée sur « la diplomatie du chéquier » a fini par provoquer une réaction de Qatar Bashing. L’émirat s’est ainsi vu accuser d’être le pays le plus riche et le plus pollueur par habitant ; le pays au plus fort taux d’immigrés par habitant ; et le plus gros financeur de l’islam de France (cf. annexe 2).Cette campagne a été extrêmement virulente en France, en particulier du fait des accusations visant l’ancien président Sarkozy. Les dirigeants de Qatar, un peu désorientés, sont ainsi passés de l’époque flamboyante de l’émir Hamad, au silence imposé aujourd’hui. Le contrat liant l’émirat à l’agence Havas a été stoppé, ce qui a libéré celle-ci pour signer avec Riyad. La mise en sommeil de Qadran, organisme de lobbying patronal, doit être compensée par le recours à une société de RP britannique Portland Communication1 pour communiquer en France (sic).

Certains analystes comme Andrew Bowen, chercheur invité à l'American Enterprise Institute - think-tank républicain plu-tôt pro-saoudien -, pensent cependant que le Qatar a gagné la guerre des mots pour deux raisons : la ligne de communi-cation du royaume saoudien insiste sur le plan de réforme visant à moderniser l'économie, attirer les investissements étrangers et réduire sa dépendance à l'égard du pétrole, mais il apparaît de plus en plus que Riyad est contraint de redé-finir son programme et donc que certains objectifs étaient trop ambitieux. « Alors que Riyad a fait une offensive de RP très négative à Washington et à Londres contre le Qatar, Doha a fait profil bas et s’est placé sur le terrain moral 2 » et diplomatique commente un diplomate à Doha.

1https://portland-communications.com/publications/uk-sports-integrity-index-2017/ 2Entretien avec un diplomate occidental dans le Golfe.

17

1https://francais.rt.com/international/40381-prince-heritier-emirats-arabes-unis-bombarder-al-jazeera2Wall Street Journal, 12 juin 2017.

L’option politique et diplomatique est pour le moment dans l’impasse. Le Koweït, chargé d’une mission de conciliation, semble tenté de jeter l’éponge. Un compromis politique fini-ra peut-être par être accepté de la part de l’Arabie saoudite, pour éviter les oppositions dans la famille royale et la contes-

tation des classes moyennes déçues de la politique activiste de MBS. Mais aucun des autres acteurs n’acceptera de faire machine arrière : le Qatar s’y refuse et même MBZ le Prince héritier d’Abu Dhabi, en dépit de la crise économique et éner-gétique que Dubaï pourrait avoir à affronter, ne reculera pas.

Pour Riyad et ses alliés, il n’existe guère de moyens de pres-sion économique directs : il y a peu d’intérêts croisés avec Doha et assez peu de commerce intra-golfien. Les Émirats représentent à peine 2 % du commerce extérieur du Qatar. Les quelques projets patronnés par le CCG ont été arrêtés : le TGV continental, la TVA commune et la filiale que QNB souhaitait ouvrir au printemps 2018 en Arabie saoudite sont dans les limbes. Dans le portefeuille de QNB, 4 % seulement des dépôts sont saoudiens ou émiratis. Quelques pays ont cependant demandé de retirer le Mondial au Qatar, notam-ment l'Arabie saoudite, le Yémen, la Mauritanie, les Émirats arabes unis, Bahreïn et l'Égypte, sans résultat pour le mo-ment.

Ainsi, seule des stratégies économiques indirectes semblent de nature à porter leurs fruits et les pressions sur les socié-tés étrangères sont apparues dans les discours « officiels ». Le 13 juin 2017, l'ambassadeur des Émirats arabes unis à Washington, Yousef Al-Otaiba, a déclaré que son pays et les

États-Unis avaient toléré trop longtemps le « mauvais com-portement du Qatar (…). Pour être honnête, je pense que la raison est à cause de la base aérienne Al-Udeid (…). La base aérienne est une très bonne police d'assurance contre toute pression supplémentaire (…). Peut-être quelqu'un au Congrès devrait (…) simplement dire : Devrions-nous envisager de déménager ? (…) Peut-être ne pas déplacer la base entière. Peut-être simplement la redistribuer sur différents pays ». Il ne prévoyait pas que la crise dévie vers « un conflit militaire, même si le Qatar refusait de plier ». Par contre, il estime "qu'il y aura une escalade de la pression économique, (...) le Qatar investit des milliards de dol-lars aux États-Unis et en Europe, puis recycle les bénéfices pour soutenir le Hamas, les Frères musulmans et les groupes liés à Al-Qaïda2". Certains analystes du Moyen-Orient ont souligné sur la plate-forme digitale Bisnow que cet argumentaire était ambigu et dangereux car il attaquaiy le Qatar, mais aussi les États et les entreprises qui acceptaient les investissements de Doha.

L’OPTION POLITIQUE ET DIPLOMATIQUE

L’option militaire est peu probable, mais la tentation existe. En 1992, s’est produit un accrochage entre les forces saou-diennes et qataries au lieu-dit Al-Khaffous, à la frontière entre les deux pays. Deux soldats qataris ont été tués. Puis, en 2003-2004, le prince héritier d’Abou Dhabi aurait demandé aux États-Unis de "bombarder Al-Djazeera1" avant l’invasion de l’Afghanistan de 2002. Le bombardement de la chaîne qa-tarienne a bien eu lieu, mais lors de l‘invasion de l’Irak le 8 avril 2003. En 2014, les Saoudiens auraient demandé à envahir le Qatar, mais l’administration Obama a refusé.

Il convient de rappeler que la France est liée aux Émirats arabes unis et au Qatar par deux accords de défense qui ne

prévoient pas l’hypothèse d’un conflit entre eux. Chacun de ces pays est un gros client de l’industrie d’armement fran-çaise et Paris serait dès lors bien en peine d’honorer ses en-gagements à l’égard des deux émirats en cas de conflit.

Enfin, le Parlement européen a adopté le 25 février 2016 une résolution demandant aux États membres de cesser les li-vraisons d’armes à l’Arabie saoudite en raison des crimes de guerre commis au Yémen. Tout cela limite donc les risques d’escalade vers un conflit que les Occidentaux ne souhaitent pas.

L’OPTION MILITAIRE

LES OPTIONS ÉCONOMIQUES

4. QUELLES HYPOTHÈSESDE SORTIE DE CRISE ?

18L’ambassadeur des Émirats arabes unis à Moscou, Omar Ghobash, dans un discours à Londres le 28 juin¹ a déclaré que « l'expulsion du Qatar du Conseil de coopération du Golfe - sou-vent soulevée comme une possible sanction - n'était pas la seule sanction possible (…). Il existe certaines sanctions économiques que nous pouvons prendre actuellement examinées (…) L’une d’entre elles serait d'imposer des conditions à nos propres par-tenaires commerciaux et de dire si vous souhaitez travailler avec nous, alors vous devez faire un choix commercial (…) Les Émirats Arabes Unis et l'Arabie saoudite pourraient demander à leurs par-tenaires commerciaux de choisir entre travailler avec eux ou avec Doha ». La banque HSBC semble avoir été l’objet de pressions de ce genre.

Cette crise, qui n’est ni la première ni la dernière, va donc s’installer dans la durée car il n’y a pas de réelle volonté d’en gérer l’issue : un recul, même négocié apparaîtrait comme une perte de face pour l’un ou l’autre des émirs. Il n’existe aucune solidarité dans le CCG, car ni Oman ni le Koweït, en charge d’une médiation, n’appliquent les sanctions. Le CCG, en état de mort clinique, a peu de chances de survivre. Les experts locaux espèrent que la solution sera arabe et pas occiden-tale, mais sans trop y croire : "I don’t think that will happen (...) I believe everyone agrees this is an Arab problem that requires an Arab solution2". Faute de solution politique, il existe le risque de dériver vers des scénarios qui impliqueraient des tiers. Les États-Unis sont à l’abri, mais qu’en est-il des Européens ?

19

La France qui commerce aussi bien avec l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis que le Qatar et est prise dans un étau. Thales, Veolia, Airbus, Total, Suez Environnement, Areva, Vinci et Bouygues sont toutes implantées dans chacun de ces pays. 70 PME françaises sont implantées en Arabie saoudite et plus de 600 aux Émirats arabes unis. Cette crise pourrait avoir pour elles des conséquences dommageables.

L’Arabie saoudite occupe le premier rang de nos partenaires commerciaux dans le Golfe, avec des échanges d’un montant 7,9 milliards d’euros (2016). Les flux d’investissement entre la France et l’Arabie saoudite entre les deux pays sont impor-tants : selon les statistiques saoudiennes, le montant total des IDE français en Arabie saoudite est de 15,3 milliards de dollars ce qui place la France au 3ème rang des investisseurs étrangers dans le royaume, derrière les États Unis et le Ko-weït. Les IDE français sont concentrés dans les secteurs de l’énergie et de la pétrochimie, du traitement de l’eau, de la santé ou encore de l’agro-alimentaire.

Les 82 implantations françaises sont souvent le fait de grandes sociétés, dont une majorité est membre du CAC 40. Elles emploient environ 30 000 personnes avec un taux de saoudisation de 36 %. La moitié de ces implantations se font sous forme de Joint-Ventures avec des partenaires saou-diens, l’autre moitié étant à 100 % françaises.

Toutefois, aux dires d’hommes d’affaires, peu de sociétés étrangères (hors énergie) gagnent de l’argent en Arabie. Le coût du trail local s’est nettement accru : « Une caissière

saoudienne revient dorénavant le même prix qu’une caissière en France » avoue un commercial ayant vécu dans les différents pays du Golfe. De plus, une taxe sur les expatriés vient d’être créée. Le visa est devenu payant pour tous les membres des familles. Ainsi, 2,5 millions d’expatriés auraient quitté l’Arabie saoudite.

Les IDE saoudiens en France totalisent, selon les données résultant de recoupements entre plusieurs sources, 829 mil-lions d’euros soit environ 3 % des IDE saoudiens dans le monde, et un peu moins de 30 % des IDE des pays du CCEAG en France. Mais la Banque de France ne prend en compte ni les investissements indirects, ni les investissements en portefeuille, ni les investissements immobiliers (résidentiels) dont le montant est estimé à plusieurs centaines de mil-lions d’euros. 24 sociétés saoudiennes sont implantées en France. Il s’agit le plus souvent de rachat, employant 3 200 personnes en direct et réalisant un chiffre d’affaires cumu-lé d’environ 350 millions d’euros. Les IDE saoudiens sont concentrés dans les secteurs de l’hôtellerie de luxe, des loisirs et de l’agro-alimentaire.

ARABIE SAOUDITE

5. LE DÉFI FRANÇAIS : NE PAS CHOISIRET PROTÉGER SES ENTREPRISES

Le volume des échanges commerciaux France/Émirats arabes unis s’est établi à 4,7 milliards d’euros en 2016.Ce chiffre place les Émirats au deuxième rang de nos parte-naires commerciaux dans le Golfe, derrière l’Arabie saoudite. Les exportations françaises à destination des Émirats arabes unis ont diminué de -9,9 % en valeur au premier semestre 2016 à 1,79 milliard d’euros. Les Émirats ont absorbé 41,7 % de nos ventes dans le Golfe au cours des six premiers mois 2016 (contre 33,6 % en 2015), consolidant ainsi leur position de premier débouché commercial de notre pays dans le Golfe, devant l’Arabie saoudite (34,6 %).

La France est le 3ème pays investisseur aux Émirats arabes unis au regard du stock d’IDE (6 % du stock) ; le 2ème pays in-vestisseur dans l’émirat d’Abu Dhabi en 2015 ; et le 9ème pays fournisseur des Émirats arabes unis en 2016.600 entreprises françaises sont installées aux Émirats avec lesquels notre excédent commercial s’élève à 2,57 milliards d’euros, soit le 4ème excédent commercial le plus important de notre pays.

ÉMIRATS ARABES UNIS

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Le montant des échanges commerciaux entre la France et le Qatar en 2016 s’est élevé à 2 milliards d’euros. Le Qatar constitue ainsi le 5e excédent commercial français. Mais les résultats de 2016 sont en retrait par rapport à 2015 (-31,3 %), année exceptionnelle en termes à la fois de montant d’ex-portation et de solde commercial. 106 entreprises françaises sont installées au Qatar et 8 milliards de dollars de contrats civils et militaires ont été conclus avec Doha en 2015-2016,

De son côté, le Qatar Investment Authority (QIA) a investi en-viron 335 milliards de dollars dans le monde, en particulier en France. Doha semble jusqu’à récemment être un action-naire dormant, stable, pas toujours intéressé par un siège au Conseil d’administration et acceptant des clauses de Lock In (accord de non-revente des actions durant un certain temps).Les prises de participation minoritaires dans les grands groupes français tout confondus représentent de 18 à 22 milliards d’Euros à Paris plus divers et avec les autres formes d’investissement un total de 30 à 32 milliards euros en France. Notre pays représente à peine 8 % des avoirs du fonds souverain, qui aurait ainsi un moyen de pression peu risqué en cas de besoin.

Doha est le premier actionnaire du groupe de média La-gardère (16,69 %) et d’Airbus (6 %) ; le deuxième du groupe géant de l'hôtellerie Accor (10,3 %) ; il est actionnaire majori-taire dans les grands magasins du Printemps et détient 1 % d’Orange. Le Qatar possède aussi des participations minori-taires dans de nombreuses grandes entreprises françaises : Total (3 %), Vinci (5,8 %), Suez Environnement (4,5 %) - reven-dus pour entrer au capital de Veolia environnement (5 %) -, LVMH (1 %) et Vivendi (2 %). La société qatarie Mannai Corp contrôle 51 % du capital de GI Informatique. Doha est aussi propriétaire du PSG football club et du PSG handball, ainsi que de plusieurs courses hippiques de renom, comme le Prix de l'Arc de triomphe, ainsi que de la chaîne télévisée Bein Sports. Le Qatar possède par ailleurs plusieurs milliers de mètres carrés sur l'avenue des Champs-Élysées et près d'un quart de la Société du casino de Cannes (SFCMC), qui exploite les

hôtels Majestic Barrière et Gray d'Albion. Enfin, l'émir du Qa-tar possède l'hôtel d'Evreux, sur la place Vendôme à Paris, et son frère l'hôtel Lambert, sur l'île Saint-Louis. Des inves-tisseurs qataris détiennent les hôtels parisiens Raffles (ex-Royal Monceau), Concorde Lafayette, Peninsula et l'Hôtel du Louvre, ainsi que le Martinez et le Carlton à Cannes, et le Pa-lais de la Méditerranée à Nice. Mais le Qatar n’est pas le plus gros investisseur étranger dans l’économie française - il se situe loin derrière les États-Unis - et la France n’est pas le premier bénéficiaire européen des investissements qataris.Sur le plan militaire, le Qatar est un client ancien et important de l’industrie de défense de la France, à qui il a notamment commandé en 2015, 24 Rafale pour 6,3 milliards d'euros. Pour la France les risques économiques sont donc impor-tants : - le Qatar, cible du ressentiment de ses voisins, gère la crise

en restant dans le droit international, pour le moment. Il a en main un gros portefeuille d’actifs dans les grandes en-treprises françaises ;

- les Émirats arabes unis, notre plus gros client dans la région, sont les plus acharnés contre Doha et l’attitude de leurs ambassadeurs aux États-Unis et en Russie, laisse penser que l’idée d’une action de nuisance par entreprises interpo-sées n’est pas exclue ;

- l’Arabie saoudite est atteinte d’une hubris guerrière et impé-riale, pour des enjeux symboliques, mais se trouve empê-trée dans des crises dont elle est l’origine ; elle ne peut que chercher la solution extrême.

Beaucoup d’entreprises françaises présentes d’un côté ou l’autre n’ont pas les mêmes accès aux autorités politiques. Il est donc indispensable de concevoir une démarche d’en-semble, afin de marquer notre indépendance à l’égard des différents acteurs et concevoir une stratégie centrée sur nos intérêts et non sur les principes.Il nous semble qu’il faut agir par anticipation sans attendre. À terme, il est certain que des Joint Ventures d’entreprises françaises avec des acteurs non européens rendraient les sanctions plus difficiles.

Il ne faut pas oublier que l’Égypte, tenue à bout de bras par l’Ara-bie saoudite et les Émirats arabes unis, est le plus gros encours de la COFACE. Il pourrait donc y avoir des conséquences pour les acteurs économiques français. Le contrat des 24 Rafale

pour 6,3 milliards d'euros et l’achat des bâtiments de projec-tion de commandement (BPC) Mistral, payés de fait par Riyad et Abu Dhabi, constitueraient un moyen de pression indirect non négligeable sur la France en cas d’aggravation de la crise.

ÉGYPTE

Les exportations françaises à destination du Bahrein se sont élevées à 129,9 millions d’euros en 2015, avec un solde commer-cial excédentaire de 41,8 millions d’euros au bénéfice de la France.

BAHREIN

QATAR

21ANNEXE I

LISTE SAOUDO-ÉMIRATIE DES « TERRORISTES ET GROUPES TERRORISTES »DU 9 JUIN 2017, REJETÉE PAR L’ONU

Individus considérés comme « terroristes »

1. Khalifa Mohammed Turki al-Subaie - Qatar2. Abdelmalek Mohammed Yousef Abdel Salam - Jordan3. Ashraf Mohammed Yusuf Othman Abdel Salam - Jordan4. Ibrahim Eissa Al-Hajji Mohammed Al-Baker - Qatar5. Abdulaziz bin Khalifa al-Attiyah - Qatar6. Salem Hassan Khalifa Rashid al-Kuwari - Qatar7. Abdullah Ghanem Muslim al-Khawar - Qatari8. Saad bin Saad Mohammed al-Kaabi - Qatar9. Abdullatif bin Abdullah al-Kuwari - Qatar10. Mohammed Saeed Bin Helwan al-Sakhtari - Qatar11. Abdul Rahman bin Omair al-Nuaimi - Qatar12. Abdul Wahab Mohammed Abdul Rahman

al-Hmeikani - Yemen13. Khalifa bin Mohammed al-Rabban - Qatar14. Abdullah Bin Khalid al-Thani - Qatar15. Abdul Rahim Ahmad al-Haram - Qatari16. Hajjaj bin Fahad Hajjaj Mohammed al-Ajmi - Koweit17. Mubarak Mohammed al-Ajji - Qatar18. Jaber bin Nasser al-Marri - Qatar19. Yusuf Abdullah al-Qaradawi - Égypte20. Mohammed Jassim al-Sulaiti - Qatar21. Ali bin Abdullah al-Suwaidi - Qatar22. Hashem Saleh Abdullah al-Awadhi - Qatar23. Ali Mohammed Mohammed al-Salabi - Libye24. Abdelhakim Belhadj - Libye25. Mahdi Harati - Libye26. Ismail Muhammad Mohammed al-Salabi - Libye27. Al-Sadiq Abdulrahman Ali al-Ghuraini - Libye28. Hamad Abdullah Al-Futtais al-Marri - Qatar29. Mohamed Ahmed Shawky Islambouli - Égypte30. Tariq Abdelmagoud Ibrahim al-Zomor - Égypte31. Mohamed Abdelmaksoud Mohamed Afifi - Égypte32. Mohamed el-Saghir Abdel Rahim Mohamed - Égypte33. Wajdi Abdelhamid Mohamed Ghoneim - Égypte34. Hassan Ahmed Hassan Mohammed Al Dokki Al Houti – Émirats arabes unis35. Hakem al-Humaidi al-Mutairi – Arabie saoudite/Koweit36. Abdullah Mohammed Sulaiman al-Moheiseni -

Arabie saoudite37. Hamed Abdullah Ahmed al-Ali - Koweit38. Ayman Ahmed Abdel Ghani Hassanein - Égypte39. Assem Abdel-Maged Mohamed Madi - Égypte40. Yahya Aqil Salman Aqeel - Égypte41. Mohamed Hamada el-Sayed Ibrahim - Égypte42. Abdel Rahman Mohamed Shokry Abdel Rahman -

Égypte43. Hussein Mohamed Reza Ibrahim Youssef - Égypte44. Ahmed Abdelhafif Mahmoud Abdelhady - Égypte45. Muslim Fouad Tafran - Égypte

46. Ayman Mahmoud Sadeq Rifat - Égypte47. Mohamed Saad Abdel-Naim Ahmed - Égypte48. Mohamed Saad Abdel Muttalib Abdo Al-Razaki - Égypte49. Ahmed Fouad Ahmed Gad Beltagy - Égypte50. Ahmed Ragab Ragab Soliman - Égypte51. Karim Mohamed Mohamed Abdel Aziz - Égypte52. Ali Zaki Mohammed Ali - Égypte53. Naji Ibrahim Ezzouli - Égypte54. Shehata Fathi Hafez Mohammed Suleiman - Égypte55. Muhammad Muharram Fahmi Abu Zeid - Égypte56. Amr Abdel Nasser Abdelhak Abdel-Barry - Égypte57. Ali Hassan Ibrahim Abdel-Zaher - Égypte58. Murtada Majeed al-Sindi - Bahrein59. Ahmed Al-Hassan al-Daski – Bahrein.

Nota : les 18 Qataris inclus dans cette liste sont des hommes politiques, des hommes d’affaires ou des membres importants de la famille princière, dont un ancien ministre de l’Intérieur.

Groupes terroristes

1. Qatar Volunteer Center - Qatar2. Doha Apple Company (Internet and Technology Support

Company) - Qatar3. Qatar Charity - Qatar4. Sheikh Eid al-Thani Charity Foundation (Eid Charity) -

Qatar5. Sheikh Thani Bin Abdullah Foundation for Humanitarian

Services - Qatar6. Saraya Defend Benghazi - Libye7. Saraya al-Ashtar - Bahrein8. February 14 Coalition - Bahrein9. The Resistance Brigades - Bahrein10. Hezbollah Bahrain - Bahrein11. Saraya al-Mukhtar - Bahrein12. Harakat Ahrar Bahrain - Bahrein.

22 ANNEXE II

L’ISLAM DE FRANCE ET LES PAYS DU GOLFE

En France, le Qatar est accusé de vouloir prendre le contrôle de l’Union des organisations islamiques de France (UOIF, proche des Frères musulmans). D’autres sources l’accusent d’avoir soutenu le Collectif contre l’islamophobie en France, sorte de CRIJF musulman, qui n’a jamais condamné claire-ment et sans retenue les attentats commis dans notre pays. Enfin, Doha a directement ou par contributeurs privés, fi-nancé des mosquées (Nantes, Mulhouse,…) pour prendre le contrôle du Conseil français du culte musulman (CFCM, struc-ture dans laquelle les votes sont proportionnels à la surface de la mosquée).

L’Arabie saoudite joue beaucoup, en France, de ses prédica-teurs et téléprédicateurs pour propager le salafisme. Elle a longtemps réussi à passer à travers des études sur sa diplo-matie religieuse et la diffusion du salafisme dans le monde, mais elle est maintenant dans l’œil du cyclone d’où son acti-visme médiatique dans notre pays.

Les Émirats arabes unis, pour les raisons évoquées plus haut d’opposition formelle à toutes formes d’islam politique, n’ont pas participé à ces campagnes en France. Une vieille proposition de loi, jamais inscrite à l’ordre du jour du Parlement, propose que soient soumises aux contrôles des organismes publics les associations françaises recevant des dons de l’étranger.

Centre Français de Recherche sur le Renseignement

Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R)

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VOCATIONFondé en 2000, le CENTRE FRANÇAIS DE RECHERCHE SUR LE RENSEIGNEMENT (CF2R) est un Think Tank indépendant, régi par la loi de 1901, spécialisé sur l’étude du renseignement et de la sécurité internationale.

Il a pour objectifs :- le développement de la recherche

académique et des publications consacrées au renseignement et à la sécurité internationale,

- l’apport d’expertise au profit des parties prenantes aux politiques publiques (décideurs, administration, parlementaires, médias, etc.),

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ORGANISATIONLe CF2R est organisé en trois pôles spécialisés, regroupant une vingtaine de chercheurs.

HISTOIRE DU RENSEIGNEMENT qui étudie les activités de renseignement à travers l’histoire :

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du renseignement,- Contrôle parlementaire.

SÉCURITÉ INTERNATIONALE qui a pour objet l’analyse des grands enjeux de la sécuriét internationale :

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ACTIVITÉS RECHERCHE ACADÉMIQUE ET ENCADREMENT DE THÈSES

L’équipe du CF2R compte 8 docteurs dans des disciplines diverses (droit, science politique, histoire, sciences de l’information, sociologie, psychologie), dont 2 HDR, et encadre des thèses en cotutelle avec plusieurs universités françaises et étrangères.

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SOUTIEN À LA RECHERCHE Chaque année, le CF2R décerne deux prix universitaires qui récompensent les meilleurs travaux académiques francophones consacrés au renseignement :

- le « Prix Jeune chercheur » prime un mémoire de mastère,

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PARTICIPATION À DES RÉUNIONS SCIENTIFIQUES ET COLLOQUES EN FRANCE ET À L’ÉTRANGER

ACTIONS DE SENSIBILISATION À L’INTENTION DES PARLEMENTAIRES ET DES DÉCIDEURS POLITIQUES ET ÉCONOMIQUES

FORMATIONS SPÉCIALISÉES Notamment une session internationale « Management des agences de renseignement et de sécurité (MARS) ».

ASSISTANCE AUX MÉDIAS Le CF2R met son expertise à la disposition des médias (journalistes), du cinéma (scénaristes, réalisateurs) et de l’édition (romanciers, éditeurs, traducteurs) afin de les éclairer dans leur approche du renseignement.

MISSIONS D’EXPERTISE DE TERRAIN ET D’ÉVALUATION DES CONFLITS INTERNATIONAUX

MISSIONS DE CONSEIL, D’ÉTUDE ET DE FORMATION AU PROFIT D’ENTREPRISES, DE CLIENTS GOUVERNEMENTAUX, D’INSTITUTIONS INTERNATIONALES OU D’ORGANISATIONS NON GOUVERNEMENTALES

• Jean-Marie COTTERETLes fichiers de Police et de renseignement en FranceRapport de recherche n°21, octobre 2017.

• Général Alain LAMBALLELes services de renseignement et de sécurité d’Asie du SudRapport de recherche n°20, juin 2017.

• Eric DENÉCÉ, Général Michel MASSON, Michel NESTERENKO et Jean-François LOEWENTHAL

Quelle contribution de l’arme aérienne aux besoins en renseignements civils et militaires à l’horizon 2035 ?Rapport de recherche n°19, juin 2016 (confidentiel).

• Gérald ARBOIT Quelles armées secrètes de l’OTAN ?Rapport de recherche n°18, mai 2016.

• CHLOÉ AEBERHARDT ET ALIIDes femmes dans le renseignement belge : un défi permanentRapport de recherche n°17, mars 2016.

• CHRISTIAN DARGNAT2015-2016 : années d’inflexion de la stratégie géo-économique chinoiseRapport de recherche n°16, février 2016.

• OLIVIER DUJARDINLe renseignement technique d’origine électromagnétique appliqué au radar (ELINT)Rapport de recherche n°15, octobre 2015.

• OLIVIER GUILMAINLe Smart Power au secours de la puissance américaine Rapport de recherche n°14, mars 2015.

• LESLIE VARENNE ET ERIC DENÉCÉRacket américain et démission d’Etat. Le dessous des cartes du rachat d’ALSTOM par General ElectricRapport de recherche n°13, décembre 2014.

• DR FARHAN ZAHIDOperation Cyclone and its ConsequencesRapport de recherche n°12 (en anglais), août 2014.• DR FARHAN ZAHID AND HAIDER SULTANThe US Objectives in GWOT and their Effectson AfPak TheaterRapport de recherche n°11 (en anglais), juillet 2014.

• DR FARHAN ZAHIDIslamist Radicalization in South Asia. Origins, Ideologies and Significance of Radical Islamist Violent Non-State ActorsRapport de recherche n°10 (en anglais), mai 2014.

• GÉRALD ARBOITLe renseignement, dimension manquante de l’histoire contemporaine de la FranceRapport de recherche n°9, mars 2013.

• ERIC DENÉCÉ & GÉRALD ARBOITLes études sur le renseignement en FranceRapport de recherche n°8, novembre 2009.

• NATHALIE CETTINACommunication et gestion du risque terroristeRapport de recherche n°7, mars 2009.

• PHILIPPE BOTTONoukhaev et le nationalisme tchétchèneRapport de recherche n°6, septembre 2008.

• ALAIN RODIERLa menace iranienneRapport de recherche n°5, janvier 2007.

• NATHALIE CETTINASpecificités de la gestion organisationnelle de la lutte antiterroriste en CorseRapport de recherche n°4, mars 2006.

Centre Français de Recherche sur le Renseignement

RAPPORTS DE RECHERCHE DU CF2RLes Rapports de recherche (RR) publiés par le Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R) sont des travaux de recherche approfondis menés par un ou plusieurs de ses chercheurs, afin d’apporter des éléments d’information nouveaux sur un sujet d’actualité. Ces rapports sont téléchargeables sur notre site www.cf2r.org.

RAPPORTSDE RECHERCHE

• GROUPE MILITAIRE DE HAUT NIVEAUÉvaluation du conflit de Gaza en 2014, Israël, octobre 2015.À l’instigation de Friends of Israel Initiative, un Groupe militaire de haut niveau (High Level Military Group/HLMG) a été créé au début de l’année 2015 avec pour mandat d’examiner la conduite d’Israël lors du conflit de Gaza en 2014.Le rapport final, évalue le fait de savoir si Israël a agi dans ce conflit comme un pays responsable, soucieux du respect des normes et des lois régissant la guerre, en adoptant des attitudes appropriées dans les domaines juridique, opérationnel et moral.Dans le cadre de ses activités d’évaluation des conflits internationaux, le Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R) a envoyé l’un de ses directeurs de recherche, le général Alain Lamballe, participer à ce travail d’évaluation du conflit de Gaza.

• Yves-Marie PEYRYProblemi et prospettivi della cyberwarfareCentre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R)/Centro Studi Strategici Carlo De Cristoforis (CESTUDEC), Italie, 2012.

• Éric DENÉCÉ et Valéry GAUDINSous-traitance et externalisation : quels risques pour les établissements financiers et les entreprises de services et de conseil ?Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R)/Groupe Synergie Globale, Paris, avril 2009.

• SOUS LA DIRECTION D’ÉRIC DENÉCÉSyrie : une libanisation fabriquée. Compte rendu de mission d’évaluation auprès des protagonistes de la crise syrienne”Centre international de recherche et d’études sur le terrorisme et d’aide aux victimes du terrorisme (CIRET-AVT) et Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R), Paris, janvier 2012 (traduit en anglais et en arabe).

• YVES BONNETIran : l’oublié du printempsCentre international de recherche et d’études sur le terrorisme et d’aide aux victimes du terrorisme (CIRET-AVT) et Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R), Paris, décembre 2011.

• SOUS LA DIRECTION D’ÉRIC DENÉCÉ (CF2R)ET D’YVES BONNET (CIRET/AVT)Libye : un avenir incertain, compte rendu de mission d’évaluation auprès des belligérants libyensCentre international de recherche et d’études sur le terrorisme et d’aide aux victimes du terrorisme (CIRET-AVT) et Centre Français de Recherche sur le Renseignement (CF2R), Paris, avril 2011 (traduit en anglais et en italien).

• GÉNÉRAL ALAIN LAMBALLETerrorism in South AsiaRapport de recherche n°3 (en anglais), novembre 2005.

• MICHEL NESTERENKOProject for a New American Century : la politique des néoconservateurs derrière la guerre contre la terreur Rapport de recherche n°2, octobre 2005.

• ERIC DENÉCÉLe développement de l’islam fondamentaliste en France : conséquences sécuritaires, économiques et socialesRapport de recherche n°1, septembre 2005.

RAPPORTS DE RECHERCHE CF2R/CIRET-AVT Les rapports publiés en partenariat avec le Centre international de recherche et d’étude sur le terrorisme et d’aide aux victimes du terrorisme (CIRET-AVT) font suite à des missions d’évaluation de terrain réalisées dans le cadre d’une mission internationale francophone.

Centre Français de Recherchesur le Renseignement (CF2R)

21 boulevard Haussmann75 009 Paris

FRANCECourriel : [email protected]. 33 (1) 53 43 92 44Fax 33 (1) 53 43 92 00

www.cf2r.org

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