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This article was downloaded by: [University of Western Ontario] On: 13 November 2014, At: 04:21 Publisher: Routledge Informa Ltd Registered in England and Wales Registered Number: 1072954 Registered office: Mortimer House, 37-41 Mortimer Street, London W1T 3JH, UK Loisir et Société / Society and Leisure Publication details, including instructions for authors and subscription information: http://www.tandfonline.com/loi/rles20 La Culture comme Facteur de développement de la ville : quelques expériences étrangères Diane Saint-Pierre professeure a a Institut national de la recherche scientifique (INRS-Urbanisation, Culture et Société) Published online: 02 Jul 2013. To cite this article: Diane Saint-Pierre professeure (2004) La Culture comme Facteur de développement de la ville : quelques expériences étrangères, Loisir et Société / Society and Leisure, 27:2, 423-444, DOI: 10.1080/07053436.2004.10707658 To link to this article: http://dx.doi.org/10.1080/07053436.2004.10707658 PLEASE SCROLL DOWN FOR ARTICLE Taylor & Francis makes every effort to ensure the accuracy of all the information (the “Content”) contained in the publications on our platform. However, Taylor & Francis, our agents, and our licensors make no representations or warranties whatsoever as to the accuracy, completeness, or suitability for any purpose of the Content. Any opinions and views expressed in this publication are the opinions and views of the authors, and are not the views of or endorsed by Taylor & Francis. The accuracy of the Content should not be relied upon and should be independently verified with primary sources of information. Taylor and Francis shall not be liable for any losses, actions, claims, proceedings, demands, costs, expenses, damages, and other liabilities whatsoever or howsoever caused arising directly or indirectly in connection with, in relation to or arising out of the use of the Content. This article may be used for research, teaching, and private study purposes. Any substantial or systematic reproduction, redistribution, reselling, loan, sub-licensing, systematic supply, or distribution in any form to anyone is expressly forbidden. Terms & Conditions of access and use can be found at http:// www.tandfonline.com/page/terms-and-conditions

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This article was downloaded by: [University of Western Ontario]On: 13 November 2014, At: 04:21Publisher: RoutledgeInforma Ltd Registered in England and Wales Registered Number: 1072954 Registered office: Mortimer House,37-41 Mortimer Street, London W1T 3JH, UK

Loisir et Société / Society and LeisurePublication details, including instructions for authors and subscription information:http://www.tandfonline.com/loi/rles20

La Culture comme Facteur de développement de laville : quelques expériences étrangèresDiane Saint-Pierre professeurea

a Institut national de la recherche scientifique (INRS-Urbanisation, Culture et Société)Published online: 02 Jul 2013.

To cite this article: Diane Saint-Pierre professeure (2004) La Culture comme Facteur de développement de la ville : quelquesexpériences étrangères, Loisir et Société / Society and Leisure, 27:2, 423-444, DOI: 10.1080/07053436.2004.10707658

To link to this article: http://dx.doi.org/10.1080/07053436.2004.10707658

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This article may be used for research, teaching, and private study purposes. Any substantial or systematicreproduction, redistribution, reselling, loan, sub-licensing, systematic supply, or distribution in anyform to anyone is expressly forbidden. Terms & Conditions of access and use can be found at http://www.tandfonline.com/page/terms-and-conditions

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La culture comme facteur de développement de la ville :

quelques expériences étrangères

Diane Saint-Pierre, professeureInstitut national de la recherche scientifique

(INRS-Urbanisation, Culture et Société)

Issu d’une recherche commandée par la Direction de l’action stratégique, de la recherche et de la statistique du ministère de la Culture et des Communications du Québec, cet article a pour objectif de faire état des résultats d’une étude réalisée sur des villes européennes1. Comme le soulignait le devis de recherche, le mandat consistait à réaliser une recension documentaire ainsi que des principaux sites Internet, objet d’un premier rapport (Saint-Pierre et Coutard, 2002), puis une étude de quatre villes européennes − Glasgow, en Écosse, Dublin, en Irlande, Barcelone et Bilbao, en Espagne − qui ont effectué une reconversion économique ou une régéné-ration urbaine à l’aide de la culture (Saint-Pierre, 2002). Mais pour bien comprendre le contexte dans lequel s’inscrivait cette recherche − soit celui où le gouvernement du Québec venait d’enclencher une réforme majeure de l’organisation territoriale municipale −, reprenons le libellé des six questions alors soumises par le Ministère, et dont les deux premières demandaient une exploration plus approfondie alors que les quatre autres devaient faire l’objet d’une collecte de données :

– Comment ces grandes villes s’y sont-elles prises en matière d’action culturelle ?

– Quels sont leurs pouvoirs et leurs responsabilités par rapport aux différents paliers de gouvernement (régional, métropolitain ou national) en matière culturelle ?

– Quels ont été leurs principaux facteurs de succès ?

– Sur quelle période s’est échelonnée la démarche avant d’atteindre des résultats concrets ?

– Quels étaient leurs partenaires dans l’action ?

– Dispose-t-on d’effets mesurables de cette action et quel a été son impact sur la revitalisation de la ville ?

Loisir et société / Society and LeisureVolume 27, numéro 2, automne 2004, p. 423-444 • © Presses de l’Université du Québec

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La première partie de cet article rappelle brièvement la notion de « régénéra-tion urbaine » qui, pour reprendre cette expression, a « fait la pluie et le beau temps » dans les années 1980 et 1990 ainsi que celle de « ville durable » qui, de nos jours, a tendance à transcender nombre d’actions publiques en matière de développement local et régional, puis présente les principales caractéristiques des quatre villes retenues2. La deuxième partie se consacre aux différentes stratégies mises en place par les pouvoirs publics écossais, irlandais et espagnols, et ce, à différents niveaux de gouvernement, y compris une instance supranationale comme la Communauté européenne (CE). La partie suivante s’attarde plus particulièrement à deux des quatre études de cas réalisées pour le Ministère, Glasgow, en Écosse, et Bilbao, en Espagne3, qui se caractérisent respectivement par l’ancienneté et la relative jeunesse des actions économiques, sociales et culturelles entreprises dans ces villes. Enfin, en guise de conclusion, seront rappelés quelques impacts des différents projets mis en place au sein des villes européennes étudiées.

De la « régénération urbaine » à la « ville durable »

La littérature qui fait état de l’interaction de la culture, de la croissance économique et du développement social fait très souvent appel à la notion de « régénération urbaine ». Devenue un thème majeur de l’urbanisme contemporain, encensée par les uns, critiquée par les autres, cette notion englobe un ensemble de stratégies adoptées à la fin des années 1980. Ces stratégies qui se rapportent de plus en plus à la notion de « ville durable » prennent des formes diverses selon les processus de diffusion des modèles qui s’expriment dans la conception de grands projets urbains. Il en est ainsi de la reconquête des bords de mer et des rives fluviales (waterfronts et riverfronts) et des vides industrialo-portuaires des villes retenues dans notre étude, mais dont le modèle ne date cependant pas des années 1980.

En effet, le mouvement de reconquête des friches industrielles pour des activités culturelles est né aux États-Unis dans les années 1960 et 1970. Il a donné naissance à un modèle urbanistique particulier, le waterfront redevelopment4, qui a connu un développement important en Grande-Bretagne au cours des années 1980, pour s’étendre peu à peu au reste de l’Europe avec les exemples de référence de Barcelone et de Bilbao. Certaines villes canadiennes s’y sont également inscrites, Toronto et Montréal en tout premier lieu, mais aussi Québec (Augustin et Latouche, 1998, p. 18). La chercheure Rachel Rodriguès Malta, qui a mené une étude sur des villes espagnoles pour le compte de la Commission européenne, a défini en ces termes cette notion :

[…] la régénération urbaine est un thème bien plus large que celui du recyclage de vastes emprises centrales réservées à l’activité de grands organismes de la vie économique tels les ports maritimes, le transport ferroviaire ou bien encore l’Armée. Elle concerne également la revitalisation de quartiers atteints d’une rapide dégradation de leur cadre de vie bâti et de leurs conditions de vie. […] Ces espaces deviennent des supports expérimentaux pour l’élaboration de

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stratégies capables de répondre aux mutations socio-économiques imposées par la mondialisation et pour la conception d’outils urbanistiques innovants (Rodriguès Malta, 1999, p. 398).

Quant à la notion de « ville durable » − étroitement liée à celle de « dévelop-pement durable5 » − qui retient de plus en plus l’attention des décideurs québécois et canadiens, mais également celle de toute une gamme d’acteurs publics, allant du simple citoyen aux entreprises et aux industries, en passant par les institutions et les groupes communautaires, la Commission européenne en définissait les principaux principes, dans Villes durables européennes (Commission européenne, mars 1996, p. 6-8) ; en voici les idées maîtresses :

1. Le principe de la gestion urbaine : « La gestion durable du milieu urbain requiert une gamme d’outils qui répondent aux préoccupations écologiques, sociales et économiques de manière à fournir le fondement nécessaire à l’intégration. »

2. Le principe de l’intégration de la politique : « […] doit s’effectuer horizontalement, afi n de concrétiser la synergie entre les dimensions sociale, environnementale et économique de la durabilité, et verticalement, entre tous les niveaux de pouvoirs communautaires, nationaux, régionaux et locaux ».

3. Le principe du raisonnement écosystémique : « […] considère des éléments tels que l’énergie, les ressources naturelles et la production de déchets comme des enchaînements d’activités qu’il s’agit d’entretenir, de restaurer, de stimuler et de boucler afi n de favoriser le développement durable. La régulation du trafi c et des transports est un autre aspect de ce raisonnement [qui] comporte également une dimension sociale ».

4. Le principe de la coopération et du partenariat : « La gestion durable est un processus d’éducation dont les éléments primordiaux sont l’apprentissage par la pratique, le partage des connaissances, l’instruction et la formation professionnelles, le travail interdisciplinaire, les partenariats et les réseaux, la consultation et la participation de la communauté, les mécanismes éducatifs novateurs et la sensibilisation. »

Au cœur de ces grands principes se trouve une diversité de projets sous-jacents : gestion écologique des ressources naturelles, création d’emplois, promotion de l’égalité, intégration sociale, amélioration générale du cadre urbain, viabilité économique des villes, accessibilités des services publics, protection de l’environ-nement urbain, mise en valeur des bâtiments existants, protection de la campagne et de la nature, participation de la collectivité, développement des activités touristiques et récréatives, mise en valeur du patrimoine culturel d’une localité. Bref, selon les auteurs de ce rapport, « [le] processus de la ville durable est une affaire de créativité et de changement. Il met en cause l’intervention classique des autorités et tend au renouveau des compétences et des relations institutionnelles et organisationnels. » (Ibid., p. 7-8).

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Sujet à l’ordre du jour, on retrouve plusieurs de ces grands principes et projets sous-jacents dans divers documents législatifs et ministériels précédant ou découlant de la réforme territoriale municipale récente du gouvernement du Québec, dont le Plan de développement du territoire (PDT6). Ce plan a pour objectif d’identi-fier diverses actions devant assurer le développement d’une municipalité, d’une communauté métropolitaine ou d’une MRC. Intégré au schéma d’aménagement et de développement d’une MRC ou au plan d’urbanisme d’une ville ou d’une municipalité, il doit inclure des orientations spécifiques en matière d’activités économiques, sociales, culturelles et communautaires. Cela étant dit, revenons à l’objet de cet article.

Des caractéristiques communes aux villes à l’étude

L’Écosse, l’Irlande, la Catalogne et le Pays basque sont des pays ou des provinces autonomes marqués depuis plusieurs décennies par de fortes revendications auto-nomistes. Ce sont de « petites sociétés », peu populeuses, possédant et promouvant leur langue et leur culture spécifiques. À cet effet, les projets de régénération élaborés à la fin du xxe siècle ont mis l’accent sur le rôle de la culture comme facteur de l’identité écossaise, irlandaise, catalane et basque, véritable référentiel d’une région-nation, mais il y a aussi bien d’autres objectifs à atteindre :

[…] embellissement de l’image de la ville ; reconquête d’une forme de sécurité et d’une qualité de vie pour le citoyen devant le dépérissement de quartiers urbains ; retour de l’université dans le centre-ville ; maîtrise de problématiques criantes fréquemment liées à la circulation urbaine ; création de pôles d’attrac-tion touristique, ludique et culturelle ; revalorisation de l’héritage collectif ; redécouverte de la rue commerciale et des espaces publics ; réappropriation des friches industrielles et des bords de mer ; relocalisation d’activités industrielles en dehors du centre-ville ; protection de l’environnement naturel (Saint-Pierre, 2002, p. 3).

Autre caractéristique commune aux quatre villes étudiées : Glasgow, Dublin, Barcelone et Bilbao ont eu une forte tradition industrielle. Au cours des années 1970 et 1980, ces villes connaissent un déclin important de leurs activités industrielles. Dublin, par exemple, voit sa population décliner de 50 % entre 1961 et 1995. Cette situation entraîne une détérioration du patrimoine bâti et de la qualité de vie. Égale-ment, ces quatre villes jouissent du statut de ville-capitale, de ville-métropole ou d’agglomération métropolitaine. Villes du savoir et de culture, elles sont dotées d’institutions éducatives et culturelles, souvent d’importance nationale.

Enfin, dernier point à souligner, ces quatre villes ont dû faire face à des événements déclencheurs et à des prises de conscience importantes. Pour Glasgow et Dublin, cela a été la décroissance démographique et industrielle qui a entraîné un appauvrissement et une baisse de la qualité de la vie ainsi qu’une hausse des problèmes sociaux. Par exemple, on dénombrait 612 000 Glaswegiens en 1999,

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alors que cette ville en comptait 1,13 million en 1939. Depuis les années 1980, l’activité industrielle du Grand Glasgow est passée de l’industrie lourde, comme la construction navale (bien qu’elle soit encore présente), à l’industrie des services, dont les technologies de l’information et le tourisme. Pour Barcelone et Bilbao, cela a été le renversement du gouvernement franquiste au milieu des années 1970, la crise industrielle majeure qui toucha alors l’Espagne et l’adoption de la Constitution qui amenèrent la création des 17 régions autonomes en 1978. Barcelone a profité de l’élan donné par la préparation des Jeux olympiques de 1992, alors que Bilbao, également stimulée par un nouveau contexte politique favorisant l’autonomie des régions, a travaillé pour devenir une ville leader sur la façade Atlantique.

Tableau 1

Statut et population des villes à l’étude

Ville Statut Population

Barcelone Capitale de la Catalogne« Région autonome » (6,1 M hab.)

Barcelone : 1,6 M hab. (1998)Région métropolitaine : 4,2 M hab. (1998)

Dublin Capitale de la République d’Irlande(3,6 M hab.)

Grand Dublin : 1,05 M hab. (2001)

Glasgow Première ville d’Écosse (5,1 M hab.)pour la population

Glasgow : 612 000 hab. (1999)Agglomération : 1,8 M hab. (1995)

Bilbao Capitale de la province de Viscaya*Deuxième ville du Pays basque (2,1 M hab.) pour la population

Ville-centre : 370 000 hab. (2001 : prévision)Communauté métropolitaine : près de 1 M hab. (2001 : prévision)

* Viscaya est l’une des grandes régions historiques de l’Espagne.

Les différentes stratégies mises en place par les pouvoirs publics

Depuis les années 1980, plusieurs stratégies de reconversion ont été mises en œuvre au sein de ces quatre villes. Dans le tableau suivant sont transposés ces objectifs et stratégies pour chacune des villes en leur accordant une valeur qui demeure, somme toute, très subjective puisqu’elle repose essentiellement sur une appré-ciation générale des renseignements recueillis lors de cette recherche. Présentons brièvement chacun de ces objectifs.

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Objectifs / stratégies Glasgow Dublin Barcelone Bilbao

1- Revalorisation et positionnement *** *** *** ***

2- Redynamisation économique *** *** ** ***

3- Requalification urbaine ** ** *** ***

4- Valorisation de l’économie sociale ** ** * *

5- Développement culturel *** *** *** ***

6- Coordination stratégique et opérationnelle * * *** ***

7- Participation citoyenne * ** ** *

8- Participation de la CE ** ** * **

* Moins présent : volet parmi d’autres, parfois très secondaire.

** Relativement présent : volet important.

*** Très présent : volet prioritaire, au cœur du projet de régénération urbaine.

1. La (re)valorisation de l’image de la ville et son positionnement international. Il s’agit de deux grands objectifs très présents dans les projets de régénération urbaine des quatre villes étudiées. Ces objectifs vont généralement de pair avec une forte médiatisation des projets. Changer l’image d’une ville en déclin oblige d’adopter des stratégies de marketing et de multiplier les outils de communication. Cela incite également à intégrer des réseaux comme celui des eurocités ou des villes de la côte Atlantique. Certaines villes choisissent de développer des pôles d’excellence (culture, logiciel, etc.) ; d’autres privilégient l’organisation de manifestations à rayon-nement international et le développement de l’industrie touristique en misant sur des institutions culturelles de prestige, comme le Musée Guggenheim de Bilbao.

2. La redynamisation économique. Cet objectif vise le renouvellement des entreprises, notamment par l’adoption de mesures d’imposition avantageuses. La prospection, le recrutement et la création de nouvelles entreprises et la promotion de domaines d’excellence sont au cœur de plusieurs projets. On mise très souvent sur le développement des activités de services pour contrer le déclin économique et la désindustrialisation. On dénote aussi la présence de programmes d’insertion des groupes en diffi culté (jeunes, chômeurs, femmes).

3. La requalification urbaine. Ce troisième objectif est étroitement associé à la réappropriation des bords de mer et des rives fl uviales par la population après la démolition ou la reconversion des hangars et des entrepôts. Les sites

Tableau 2

Grands objectifs des projets urbains des villes à l’étude

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libérés sont réaménagés en parcs urbains, en espaces verts et en promenades. La réhabilitation des immeubles et la revalorisation du patrimoine architec-tural sont au cœur des initiatives entreprises en ce sens. Dans le cas de Bilbao, par exemple, de telles initiatives ont obligé la relocalisation à l’extérieur de la ville des activités portuaires et ferroviaires et l’adoption d’une politique foncière ambitieuse.

4. La valorisation de l’économie sociale. Les projets associés à ce quatrième objectif mettent l’accent sur des zones urbaines très touchées par le chômage et la pauvreté. Des projets sont mis en œuvre pour améliorer la situation des populations de ces zones, pour lutter contre l’exclusion et la dégradation des cadres de vie et de travail, pour développer l’employabilité et l’insertion sociale. On y retrouve aussi divers projets dans le domaine du logement social.

5. Le développement culturel. Ce cinquième objectif est étroitement associé à la symbolique identitaire et met en valeur les particularismes locaux. Les nouvelles « centralités » (parcs, jardins publics, etc.) sont souvent associées à des événements historiques. L’accent est mis sur la cohésion sociale et la dimension civique, et ce, afi n de sécuriser les citoyens et les touristes. Des politiques et des programmes de développement culturel sont mis en place afi n d’assurer l’essor des activités de création, d’éducation, d’animation, de diffusion et de participation. On remarque aussi l’adoption de mesures fi scales afi n de stimuler le domaine des arts et de la culture. Les projets conçus en ce sens ont un intérêt marqué pour la protection du patrimoine bâti.

6. La coordination stratégique et opérationnelle. Moins apparente à Glasgow et à Dublin, mais très importante à Barcelone et à Bilbao, elle néces-site la création de structures de partenariat afi n d’assurer la mise en œuvre des programmes selon les prescriptions des plans stratégiques. Ces structures qui allient secteur public et secteur privé, entreprises, milieux universitaires et groupes communautaires, prennent en considération de nombreux para-mètres : la culture, le patrimoine bâti, la formation, l’emploi, le transport, le logement social. Elles démontrent aussi un intérêt marqué pour l’évaluation des projets : leurs incidences, les besoins futurs, les mesures de redressement à adopter, etc.

7. La participation citoyenne. L’atteinte de ce septième objectif implique la réalisation de projets qui n’engagent pas seulement des élus et des fonction-naires, des pourvoyeurs de services urbains et des aménageurs de territoire, mais aussi des citoyens, des groupes communautaires et associatifs, des acteurs issus de multiples horizons (milieux des affaires, de l’éducation, de la culture, etc.). La documentation témoigne d’initiatives plus importantes en ce sens à Dublin et à Barcelone. Des projets élaborés dans ces villes s’inspirent de solutions construites collectivement quoiqu’elles suscitent, à l’occasion, de grands débats.

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8. La participation de la Communauté européenne (CE). Elle a été observée dans les villes étudiées, bien qu’à des degrés variables. La Commu-nauté européenne apporte son soutien logistique et fi nancier à de grands projets qui favorisent, notamment, des quartiers défavorisés. À titre d’exemple, au lendemain de son adhésion au Marché commun en 1973, l’Irlande recevait huit fois plus d’argent qu’elle n’en versait à la Communauté européenne. En un quart de siècle, l’aide européenne à ce pays de 3 à 4 millions d’habitants a totalisé 45 milliards de dollars canadiens7 (Cornu, Mercier et Pudlowski, 1997, p. 37).

Les acteurs, les projets et les différentes formes de partenariat

L’étude des villes de Glasgow, de Dublin, de Barcelone et de Bilbao est riche d’enseignements. Elle met au jour, bien sûr, l’originalité des projets urbains, mais permet aussi de circonscrire les diverses formes de partenariat et de financement ainsi que les principaux obstacles et contraintes.

De façon générale, pour les quatre villes étudiées, les autorités locales ont vu à la mise en place de structures de partenariat, quoique ces dernières demeurent variables selon les villes. Les fonctions des organisations publiques et de ces struc-tures consistent alors à se concerter avec des investisseurs privés, à mobiliser des capitaux locaux, parfois même extérieurs. Ces structures sont des lieux de concer-tation et de négociation. Mais il y a une distinction fondamentale dans les formes de partenariat, du moins en ce qui concerne les villes européennes étudiées.

Profitant de mesures fiscales avantageuses, les acteurs du secteur privé des villes de Glasgow et de Dublin semblent avoir lancé plusieurs des opérations de régénération urbaine s’alliant, après coup, aux autorités publiques. Il en est ainsi par la création de regroupements comme la Glasgow Action dès 1985, puis la Glasgow Development Agency (GDA) à compter de 19918. Dans le cas de Barcelone et de Bilbao, comme pour bien des villes et des métropoles du continent, c’est le contraire. L’initiative est d’abord de nature publique, et le secteur privé participe par la suite au financement. Selon Rachel Rodriguès Malta (1999, p. 410), cette seconde formule est plus fréquente en Europe, bien qu’elle « rencontre un succès variable selon les villes ».

Chose certaine, le vocabulaire employé est explicite dans les quatre villes étudiées. On y trouve régulièrement les mots « synergie », « consensus » et « partena-riat ». Ce nouveau langage est emprunté en grande partie au secteur privé, mais aussi rattaché à un nouveau courant des années 1980 en matière d’actions publiques, soit le nouveau management public qui introduit également les notions de gouvernance, de concurrence, d’efficience, de proactivité, de flexibilité et d’entrepreneuriat au sein des instances décisionnelles urbaines et gouvernementales.

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En fait, à compter de la fin des années 1980, la question du gouvernement des grandes villes est plus que jamais à l’ordre du jour. Il faut dire que la crise de l’État-providence, bien sûr financière, mais aussi l’incapacité à produire des politiques pertinentes au regard des populations aux prises avec des problèmes sociaux et économiques croissants posent de manière nouvelle la question de la gouvernance locale. Tous ces changements obligent à mobiliser de nouveaux acteurs : les citoyens, le secteur associatif, les groupes communautaires, le monde des affaires.

Attardons-nous aux villes de Glasgow et de Bilbao qui se caractérisent respectivement par l’ancienneté (années 1970 et 1980) et par la relative jeunesse (années 1990) des initiatives visant leur reconversion, mais aussi par leurs objectifs et stratégies ainsi que par leurs formes de partenariat.

Le cas de la ville de Glasgow, en Écosse

Selon John McCarthy (1999), spécialiste en matière de planification urbaine et régionale de l’Université Dundee, en Écosse, trois phases distinctes caractérisent la politique urbaine du Royaume-Uni, à laquelle est intégrée l’Écosse, du moins jusqu’à une date très récente : 1) une « orientation sociale » jusqu’au milieu des années 1970, 2) une plus grande attention accordée aux facteurs économiques et au chômage au cours de la seconde moitié des années 1970 et, enfin, 3) une confiance croissante dans le secteur privé depuis 1979. Cette dernière phase correspond à des changements dans les priorités du gouvernement central − surtout à la suite de l’élection du gouvernement conservateur de Margaret Thatcher − et imposent des réorientations gouvernementales majeures afin de s’adapter aux forces du marché et de susciter des engagements financiers du secteur privé pour alléger le financement public dans divers domaines.

Toujours selon McCarthy, il y a cependant des différences majeures dans la politique de régénération urbaine du Royaume-Uni, car l’expérience de l’Écosse en ce domaine suggère plutôt des caractéristiques distinctives incluant « a leading role for local authorities, consensus between national and local governement agencies, an emphasis on strategy and, perhaps to a lesser extent, on adressing local needs and involving local communities » (1999, p. 563).

Le tableau suivant résume les principales étapes et initiatives de régénération urbaine du gouvernement britannique, notamment de son Scottish Office − une agence gouvernementale qui, jusqu’à la mise sur pied du Parlement écossais en 1999, était responsable du développement de l’Écosse depuis les années 1940 −, mais aussi du conseil municipal de Glasgow.

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Tableau 3Principales étapes visant la régénération de la ville de Glasgow

À l’échelle nationale (Royaume-Uni et / ou Écosse)

Urban Programme in Scotland (1969-1975)

Supervisé par le Scottish Office, une agence britannique : améliorer les conditions sociales, économiques et environnementales des régions urbaines éprouvant d’importants problèmes.

Scottish Development Agency (1975)

Attirer les investisseurs dans les zones industrielles en déclin, lancer des projets locaux de régénération et développer le logement social (public housing).

Enterprise Zones and Urban Development Corporations (début des années 1980)

Contrer la désindustrialisation et la dégradation des villes du Royaume-Uni par la récupération et la mise à niveau des principaux sites industriels. Glasgow profite de cette politique, notamment avec la création de la Clydebank Enterprise Zone, en 1981.

Locate in Scotland (1981)

Promouvoir l’Écosse et recruter des sociétés et entreprises industrielles étrangères en offrant, notamment, une gamme d’incitations et d’allégements fiscaux.

New Life for Urban Scotland (ca 1988)

Accroître la coordination des agences du secteur public ; cibler des zones où la population éprouve des problèmes de chômage et de pauvreté et où les activités industrielles et commerciales sont en déclin. Quatre zones sont établies en 1988 : Castlemilk (Glasgow), Ferguslie Park (Paisley), Wester Hailes (Édimbourg) et Whitfield (Dundee).

Priority Partnership Areas (PPAs) (lancéeen 1991-1992)

Mettre l’accent sur les communautés les plus désavantagées et soutenir des projets impliquant la participation active des autorités centrales et locales, du secteur privé et des groupes communautaires. En 1996, douze régions sont désignées, dont trois à Glasgow.

Social Inclusion Partnerships (SIPs) (1998)

L’initiative des PPAs est remplacée par les « Social Inclusion Partnerships » (SIPs) ; 48 SIPs existent en Écosse, dont les objectifs sont le renouvellement du voisinage, l’amélioration de l’accès à l’éducation, des soins de santé, des opportunités d’emploi et de la qualité de la vie. Pour la ville de Glasgow, on comptait neuf SIPs.

À l’échelle plus locale (ville de Glasgow et sa région)

Glasgow Eastern Area Renewal Program (GEAR) (1976-1986)

Subventions pour la relocalisation des industries, investissements dans les transports, développement de logements sociaux et autres services, etc. Dans Glasgow, près de 1,3 milliard de dollars canadiens (550 M ) sont investis, dont les trois cinquièmes proviennent de fonds publics.

Strathclyde Structure Plan (1995-2000)

Voué à la région de Strathclyde, qui inclut la ville de Glasgow, ce plan concerne différentes politiques de développement, y compris celles qui touchent le tourisme, les loisirs et les sports ainsi que la mise en valeur de l’environnement et du patrimoine bâti.

Glasgow and the Clyde Valley Joint Structure Plan (2000)

Le Joint Structure Plan est le plan stratégique de développement des huit localités de l’agglomération de Glasgow. Ses objectifs sont d’accroître la compétitivité économique, de promouvoir une plus grande intégration sociale, de soutenir et d’embellir l’environnement construit et naturel et, enfin, de revoir l’utilisation des sols et d’intégrer le transport public.

City Plan (2001-2021) Ce plan intègre des initiatives pour la protection et l’embellissement de l’environnement construit et naturel, et ce, pour les années 2001-2006, et précise les orientations pour le développement de la ville pour les vingt prochaines années (2001-2021).

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Comme en témoigne Claire Moreau-Shirbon, dans son article « La ville écos-saise, victime des années Thatcher, fonde sa renaissance sur la culture », Glasgow a connu dans les années 1980 des changements plus que notables :

Les grues du port, désormais immobiles, sont devenues des monuments. Sur des dizaines d’hectares, au long de la rivière Clyde, des cales sèches désertées, des hangars vides témoignent du passé glorieux de l’estuaire […] Aujourd’hui, à Govan, dans le quartier de construction naval situé le plus près du cœur de Glasgow, un seul chantier demeure […].

Sur l’autre rive de la Clyde, au cœur de cette cité de 700 000 âmes, on ne compte plus les immeubles en construction, les rénovations de prestige. Il y a dix ans à peine, le centre-ville de Glasgow donnait l’impression d’une cité laissée en l’état après le blitz. Aujourd’hui, les belles façades victoriennes de grès rouge ont retrouvé leur éclat. Regorgeant de clientèle jusqu’à 4 heures du matin, des cafés chics poussent comme des champignons. Dans Buchanan Street, des joueurs de cornemuse en kilt font la marche devant les boutiques des stylistes en vogue. Les restaurants abritent des galeries d’art et on s’y bouscule (Moreau-Shirbon, 1990, p. 22).

Ainsi, plusieurs projets de rénovation et de reconversion ont été réalisés durant les années 1980. Des édifices de la ville-centre ont été restaurés ou rénovés à grands frais, alors que trois nouveaux centres commerciaux – le St. Enoch (le deuxième centre commercial en importance de la Grande-Bretagne), le Princes Square et l’Italian Centre – ont été construits. De vieux entrepôts, d’anciennes manufactures laissées à l’abandon et les Riverside Docklands sont devenus de luxueuses habitations de la Cité des marchands (Merchant City). Ce dernier quar-tier historique, aux fonctions commerciales, a été revitalisé, alors que l’on a investi dans les institutions culturelles de la ville (galeries d’art, musées, théâtres, salles de concert, etc.). Mayfest, le Festival annuel des arts, a été lancé en 1982. En 1985, le Scottish Exhibition and Conference Centre, le plus grand centre du genre au Royaume-Uni, est inauguré. Trois ans plus tard, c’est au tour du National Garden Festival à voir le jour. L’année 1990 est significative pour Glasgow qui est proclamée « Ville européenne de la culture », une initiative qui semble avoir inspiré le gouvernement du Canada avec la création, en 2002, du programme national de « Capitales culturelles du Canada »9.

Bref, tous ces événements et initiatives mais également la plupart des institutions culturelles contribuent directement à modifier l’image de la ville et à promouvoir l’industrie touristique. La rue piétonnière Buchanan et la zone portuaire reconvertie (Waterfront Area) attirent des milliers de touristes chaque année. Également, de nombreux édifices publics ont été réhabilités, alors que l’on a procédé au développement de l’autoroute M8 ceinturant la ville. En fait, quelque 350 millions de livres (ou 800,9 millions de dollars canadiens) furent investis dans des projets touristiques entre 1996 et 2001 (Kantor, 2000). En 1999, la ville de Glasgow obtient une nouvelle reconnaissance, soit celle de « Ville britannique de l’architecture et du design ».

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Le cas de la ville de Bilbao, Pays basque, en Espagne

Lieu d’implantation de nombreux sièges sociaux d’entreprises et de la deuxième Bourse du pays en importance, la ville de Bilbao est située au cœur d’une impor-tante région industrielle et minière. Septième ville d’Espagne en importance, elle regroupe aussi des entreprises vouées à la construction navale et à l’industrie lourde. Cependant, comme bien des villes portuaires et commerçantes florissantes du xixe et du début xxe siècle, elle a connu un déclin économique important au cours des dernières décennies : elle perd près de 50 % de ses emplois dans le secteur manufacturier entre 1975 et 1996, alors que la proportion des emplois industriels chute de 46 à 23 %. Plus révélateur encore, son taux de chômage passe de 2,3 % en 1975 à 26 % en 1986, et ce, avec toutes les conséquences qui en résultent. Par contre, signe d’une nette amélioration, le taux de chômage s’élève à 16 %, en 1998 (Rodriguez, Martinez et Guenaga, 2001, p. 162-163). Bref, il y a quelques années à peine, on disait de Bilbao qu’elle était « une vieille dame malade » : « Défigurée et mise à l’index par le régime franquiste, elle s’est battue pour devenir l’une des cités les plus actives d’Espagne » (Pays basque magazine, 1999).

En fait, le projet urbain de Bilbao est intéressant à plusieurs points de vue. Il ne se centre pas seulement sur la valorisation de son patrimoine bâti ou l’établis-sement d’infrastructures culturelles de grande envergure, mais il incorpore aussi des initiatives de revitalisation de quartiers, de construction d’infrastructures et de mise en valeur des rives du fleuve Nervión. Ainsi, pour relancer son économie, Bilbao a transformé son territoire dont la vocation industrielle traditionnelle était devenue obsolète en recyclant et en modifiant l’usage des terrains industriels et portuaires, souvent très pollués. Le projet urbain, qui réunit des acteurs de plusieurs niveaux de gouvernement, comprend deux grands volets : les infrastructures (port, réseau ferroviaire, aéroport et métro) et le projet Abandoïbarra (aménagement des rives du fleuve Nervión et construction du Musée Guggenheim et du Palais Euskalduna). Le tableau suivant présente ces principaux plans et projets soutenant la régénération de la ville de Bilbao.

Le Plan général (1987) ou Plan de revitalisation de l’espace urbain de Bilbao, d’une durée de huit ans, se limitait essentiellement à la ville-centre (370 000 habitants, soit le tiers de l’agglomération). Pour sa part, le Plan stratégique (1989) établissait les grandes orientations de développement de l’agglomération pour une période de quinze ans. Il concernait notamment la requalification des espaces sur les berges et à l’embouchure du fleuve Nervión ainsi que les secteurs de l’emploi et de la formation, les actions culturelles, universitaires et environnementales et la coordination des administrations publiques et du secteur privé. Enfin, le Plan territorial (1993) mettait particulièrement l’accent sur la régénération de l’embouchure du fleuve Nervión et la promotion internationale du secteur d’Abandoïbarra, et ce, grâce à la construc-tion du Palais Euskalduna des congrès et de la musique et du Musée Guggenheim. Il promouvait aussi la création d’espaces verts et diverses autres mesures, comme l’accès au logement social et la réhabilitation de l’ancien parc de la ville.

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Tableau 4

Principaux plans et projets visant la régénération de Bilbao

Plans et projets Responsables et financement

Plan général (1987) Mairie de Bilbao / avec l’approbation définitive de la province de Biscaye et du gouvernement basque.

Plan stratégique (1989) Gouvernement basque / Province de Biscaye / Metropoli 30.

Plan territorial (1993) Gouvernement basque / Province de Biscaye.

Musée Guggenheim (ouvert en 1997)

Gouvernement basque (50 %) / Province de Biscaye (50 %) / Mairie de Bilbao (fournit et prépare les terrains appartenant initialement à l’État).

Palais Euskalduna des congrès et de la musique (ouvert en 1999)

Gouvernement basque / Province de Biscaye / Mairie de Bilbao (fournit et prépare les terrains appartenant à l’État).

Centre d’affaires (ouvert en 1999)

Mairie de Bilbao (organise le concours pour définir l’aménagement de la zone d’Abandoïbarra) / Bilbao Ria 2000.

Métro (en service en 1995)

Gouvernement basque (50 %) / Province de Biscaye (50 %) / Mairie de Bilbao (participe au déficit d’exploitation).

Déplacement du port (entrepris à la fin des années 1980)

État espagnol / Bilbao Ria 2000 / Mairie (par la récupération des terrains pour la réalisation de projets).

Restructuration des voies ferrées

État espagnol / RENFE (Société espagnole des chemins de fer) / Bilbao Ria 2000.

Extension de l’aéroport (modernisé en 1999)

État espagnol.

Sources : Chimits, Godier et Tapie (s. d., non paginé) ; Rodriguès Malta (1999, p. 402).

Quant aux partenaires dans l’action, c’est au début des années 1990 que le Grand Bilbao devient pour le gouvernement espagnol une de ses priorités en matière d’aménagement économique. Dans son plan d’infrastructure de 1993-2007, le gouvernement central prévoyait des investissements massifs devant totaliser plus de 160 milliards de dollars canadiens. Les principales infrastructures visées sont le transport interurbain et urbain ainsi que la construction d’une ligne de chemin de fer à grande vitesse entre la capitale et la frontière franco-espagnole.

Pour sa part, le gouvernement de la communauté autonome basque, créée en 1992, a la responsabilité d’un certain nombre de compétences. Il est responsable de l’aménagement et de l’urbanisme, du logement, de l’éducation et de la santé,

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de la culture et des équipements sportifs ainsi que des locaux administratifs et de justice. Dans le projet lié à Bilbao, le gouvernement basque finance une partie des infrastructures (métro) et des projets d’envergure, comme le Musée Guggenheim et le Palais Euskalduna.

Un autre niveau de gouvernement du Pays basque est celui de la province ou de la diputación qui constitue une puissance financière. En effet, les autorités politiques de la province de Biscaye ont le pouvoir de lever et de répartir les impôts entre les collectivités territoriales et le gouvernement central. Les compétences de la province en matière de culture et ses capacités financières l’ont amenée à initier les projets du Musée Guggenheim et du Palais Euskalduna.

Enfin, l’aire territoriale du projet de régénération de Bilbao repose sur les 30 communes de la zone métropolitaine. Contrairement au système politique et administratif du type communauté urbaine française ou communauté métropo-litaine québécoise, les 30 communes n’ont alors pas de structure de coopération comme telle. Pour contrer les problèmes inhérents à cette absence de structure, les municipalités du Grand Bilbao concédèrent ce rôle stratégique à la province de Biscaye. Deux grandes organisations sont cependant chargées de la maîtrise d’ouvrage urbain : Bilbao Ria 2000 et Metropoli 30.

Créée en 1991, Metropoli 30 regroupe plus d’une centaine d’associés de la grande métropole ; le chiffre « 30 » correspond aux 30 municipalités de l’aire métropolitaine. Le gouvernement basque, les autorités de la province de Biscaye et les municipalités du Grand Bilbao ainsi que de grandes et moyennes entreprises, des associations et des fondations, des universités et des ordres professionnels y sont représentés. Les autorités portuaires et diverses institutions publiques sont également présentes. Mise sur pied par des acteurs publics, cette association est financée aux deux tiers par le secteur privé. Sa fonction première est de soutenir une vision d’ensemble du développement métropolitain de Bilbao.

Pour sa part, Bilbao Ria 2000 a été créée en 1992. Cette instance est la structure clé du projet de régénération urbaine puisqu’elle a comme mandat de coordonner le processus de revitalisation, d’assurer la cohérence du projet à long terme et de favoriser la médiation des multiples intérêts en présence. La composition de Bilbao Ria 2000 est répartie entre l’État et les collectivités territoriales basques (Rodriguès Malta, 1999, p. 402). Elle a la responsabilité de stimuler et de soutenir d’ambitieux projets et d’encadrer des réalisations d’importance concernant, entre autres, des infrastructures urbaines et régionales et un quartier des affaires.

Bref, pour clore cette section, mentionnons que le financement des opéra-tions, le processus de consultation et les promesses de prospérité, somme toute à nuancer, ont cependant été la cible de vives critiques depuis le lancement des diverses opérations.

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Ainsi, bien qu’à l’origine le financement public fût important, un système de financement des opérations a été mis en place graduellement par Bilbao Ria 2000 afin d’attirer des investisseurs privés : par exemple, en concédant des droits de construire à des promoteurs immobiliers et à des propriétaires privés. Pour ce qui est des terrains se trouvant sous des emprises industrielles, on adopte une autre stratégie : acquérir le terrain, puis le mettre sur le marché. Le profit obtenu est alors réinvesti dans d’autres projets ou sites.

Malgré de telles initiatives, la grande majorité du financement semble toujours provenir des administrations publiques, notamment en ce qui concerne les projets d’envergure. Même un projet comme celui auquel a pris part la Fondation new-yorkaise Guggenheim, associé à une initiative culturelle privée, n’aurait pu voir le jour sans le financement public. Ce qui expliquerait cette faible participation financière du privé, selon Rodriguès Malta (1999, p. 411), serait « les formules d’intéressement offertes par les acteurs institutionnels » : généralement exclu des phases de programmation, le secteur privé n’est invité que dans un second temps. En outre, les grands propriétaires fonciers publics, comme la RENFE, la société nationale des chemins de fer, sont souvent suspects pour le secteur privé.

Par ailleurs, les premières étapes de la transformation de Bilbao ont suscité des critiques parce que les pouvoirs publics semblaient insister plus sur les carac-téristiques culturelles et économiques du projet d’agglomération que sur sa dimen-sion sociale. Devant les doléances, cette dimension fut ajoutée au Plan stratégique (1989). D’autres acteurs se sont insurgés « contre la destruction systématique des vieux locaux industriels de la zone portuaire, que certaines villes, comme Londres, [avaient] su stabiliser » (Rioux, 1999, p. A-1). Enfin, contrairement à l’implanta-tion d’équipements sportifs (par exemple, le stade de football), les projets portant sur la construction d’équipements culturels prestigieux n’ont pas toujours suscité l’unanimité. Ainsi, avant l’ouverture du Musée Guggenheim, des artistes basques ont manifesté leur mécontentement envers le gouvernement autonome. Selon eux, la construction de ce musée représentait « l’impérialisme américain, contre la spécificité de la culture basque », signifiant du même coup que l’on « aurait dû mieux dépenser » les fonds publics (Le Droit, AP, 1997, p. 26).

En ce qui a trait à cette volonté de susciter un nouveau dynamisme écono-mique, mentionnons que la grande majorité des nouveaux emplois créés à Bilbao sont associés aux secteurs tertiaire (commerce, communication, bureaux) et quater-naire (culture et loisir). Compensant quelque peu la perte des emplois dans les autres secteurs (agricole, manufacturier et industriel), les emplois du secteur des services se sont accrus de près de 46 % entre 1975 et 1996, passant de 124 900 à 182 000 (Rodriguez, Martinez et Guenaga, 2001, p. 163). Malgré de tels changements, les chantiers navals, la sidérurgie et des entreprises de fabrication ont fui sous d’autres cieux, alors que l’Université Deusto se vide. Bien sûr, l’effet d’entraînement du Musée Guggenheim a des incidences sur le développement urbain, dont l’une

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des plus remarquables est d’avoir produit pour la seule année 1998 quelque 8 500 articles (Rioux, 1999, p. A-1). Une récente évaluation réalisée par la firme inter-nationale KPMG Peat Marwick (Impacto de las actividades de la Guggenheim Bilbao Museum, 1999, cité par Rodriguez, Martinez et Guenada, 2001) estime que les dépenses directes de ces visiteurs durant la première année d’activité est de 194 millions d’euros, soit près de 180 euros (218 dollars canadiens) par visiteur. Les secteurs qui en ont bénéficié le plus sont ceux de l’hôtellerie, des transports, de la restauration et du commerce au détail.

Les principaux impacts des projets de régénération urbaine

Les projets de régénération des villes de Glasgow et de Bilbao, mais également ceux de Dublin et Barcelone qui ont été abordés dans l’étude publiée par le ministère de la Culture du Québec (à ce sujet, voir Saint-Pierre, 2002), ont eu des impacts importants sur l’emploi, la capacité de production, le tourisme urbain, les infra-structures culturelles, la qualité de la vie et l’image des villes concernées. Plusieurs auteurs ont vanté les mérites des projets mis en œuvre par ces villes, leurs impacts positifs et leurs effets d’entraînement… (à titre indicatif : McCrone, 1991 ; Jones et Watkins, 1996 ; Rosenburgh et Watkins, 1999 ; Pacione, 2001 ; Rodriguès Malta, 1999 ; Rodriguez, Martinez et Guenaga, 2001). D’autres, par contre, ont été plus critiques (Gomez, 1998 ; Danson, 1999 ; McCarthy, 1999 ; Kantor, 2000 ; Marshall, 2000 ; Cornu, 2001).

Ainsi, malgré les nombreuses actions publiques et privées menées en vue de régénérer la ville de Glasgow et améliorer son image, Maria Gomez (1998) et John McCarthy (1999) rappellent que les résultats en matière d’emploi sont loin d’être probants. Quelques auteurs soulignent également que l’action du gouvernement du Royaume-Uni et des gouvernements locaux a contribué à modifier les symptômes du déclin de Glasgow, sans pour autant les éliminer complètement (Atkinson et Moon, 1994 ; Pacione, 1997 ; Danson, 1999). Bien que la ville ait un taux de chômage avoisinant 7 %, il atteint encore 40 % dans certains quartiers caractérisés par la pauvreté et la délinquance (Taylor, 2000).

Par ailleurs, la réussite du projet de régénération de la ville de Dublin a aussi sa contre-partie, laquelle s’est traduite, notamment, par la flambée des prix dans le domaine de l’immobilier, par l’accroissement des villes-dortoirs et par l’augmentation importante des problèmes de circulation urbaine. La Communauté européenne blâme également les pouvoirs publics irlandais pour le manque de logements sociaux, l’importante carence en garderies et les mauvaises performances du gouvernement en matière de protection de l’environnement. Autre problème découlant de la forte expansion économique : l’Irlande manque cruellement de travailleurs dans des secteurs clés (services de santé, hôtellerie, restauration, informatique). Pour recruter cette main-d’œuvre, des missions ont été envoyées dans des pays d’Europe, au Canada et en Afrique du Sud. Comme le souligne

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Yves Cornu (2001, p. 59), les arguments ont porté puisque l’île s’est transformée « petit à petit en société multiethnique ». Mais, comme il le souligne, « la mue est douloureuse » : un pays aussi petit n’intègre pas des milliers de travailleurs étrangers sans quelques réticences : les « Irlandais se demandent s’ils ne sont pas en train de devenir xénophobes ».

Quant à Barcelone, bien que non traitée dans le présent article (voir plutôt Saint-Pierre, 2002), il convient de faire état de quelques impacts découlant des diverses initiatives et actions visant à en faire un modèle de référence pour les métropoles de l’Europe méditerranéenne et la « porte d’entrée de l’Europe » pour certains pays sud-américains de langue hispanique. Bien que parfois critiqués (voir notamment Pongy et Saez, 1994 ; Rodriguès Malta, 199910 ; Marshall, 2000), les projets de régénération de la ville de Barcelone semble avoir eu le mérite de démocratiser la démarche en élargissant sa méthode de planification à une grande diversité d’acteurs. D’autres éléments ont aussi concouru à la réussite du modèle barcelonais. Parmi ceux-ci, Rachel Rodriguès Malta souligne le changement des fonctions de l’espace portuaire par rapport à l’ensemble de la ville et la prise en considération d’un urbanisme proposant « un modèle de voies rapides et de chemins de fer entre la ville et le port ». Selon elle, il ne fait aucun doute que « la priorité accordée à [la] dimension des opérations, “Ville olympique” et “Port Vell”, [a] largement contribué à leur réussite » (1999, p. 415). Bien que la qualité de l’opéra-tion soit parfois discutée, le succès du plan d’aménagement de la zone portuaire de Barcelone se traduit, notamment, par les quelque 16 millions de visiteurs qui y sont venus et par la création de 5 000 emplois directs (données de 1996 ; Ibid., p. 408). Un autre point intéressant est « la dynamique décisionnelle locale, la mobilisation de la matière grise et le pragmatisme [qui] ont permis de réaliser dans un temps record la grande transformation de la métropole » (Ibid., p. 416).

Terminons avec Bilbao. Malgré les efforts consacrés à attirer les investisseurs privés, la grande majorité du financement semble toujours provenir des adminis-trations publiques. L’explication avancée pour la faible participation financière du privé serait que les investisseurs privés sont souvent exclus des phases de programmation. En fait, ils ne semblent invités que dans un second temps. Les premières étapes de la transformation de Bilbao ont également suscité des critiques importantes de la part de la population : on reprochait alors aux pouvoirs publics de mettre plus l’accent sur les caractéristiques culturelles et économiques du projet d’agglomération que sur sa dimension sociale. Devant les doléances des citoyens, cette dimension fut ajoutée au Plan stratégique de 1989. D’autres acteurs se sont insurgés « contre la destruction systématique des vieux locaux industriels de la zone portuaire » (Rioux, 1999, p. A-1), alors que la construction d’équipements culturels prestigieux n’a pas toujours suscité l’unanimité.

Bref, malgré cette volonté d’engendrer un nouveau dynamisme économique à Bilbao, plusieurs industries ont fui. Bien sûr, l’effet d’entraînement du Musée Guggenheim a des incidences sur le développement urbain, dont l’une des plus

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remarquables est d’avoir attiré plus de 1,4 million de visiteurs au cours de sa première année d’opération. Mais une fois passée l’attraction de la nouveauté, que se produira-t-il ? L’« effet Guggenheim », pour paraphraser Lucia Iglesias (1998), se maintiendra-t-il ?

Notes

1. Cet article est issu d’une communication présentée dans le cadre du Congrès annuel du Réseau canadien de recherche culturelle (RCRC), en 2002, à l’Université de Toronto.

2. Il existe également bien d’autres études de cas fort intéressantes : voir notamment la recension réalisée par Saint-Pierre et Coutard (2002) ; pour des exemples de projets et de stratégies mis en place dans d’autres villes, voir France, Ministère de l’Équipement, des Transports, de l’Aménagement du territoire, du Tourisme et de la Mer (non daté) ; voir également Taylor (2000).

3. Pour une étude plus élaborée et critique des différents projets et initiatives des quatre villes à l’étude dans le cadre de la recherche publiée par le Ministère, voir Saint-Pierre (2002).

4. Pour un article intéressant sur le waterfront redevelopment, le lecteur est invité à consulter Gordon (1997).

5. Le développement durable (sustainable development) a été défini en 1987 dans le rapport de Gro Harlem Bruntlandt, Premier ministre de la Norvège et présidente de la Commission mondiale sur l’environnement et le développement. Intitulé Notre avenir à tous (CMED, 1987), ce rapport définit cette notion comme « un développement qui répond au besoin du présent, à commencer par ceux des plus démunis, sans compro-mettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ». Par après, cette notion a été consacrée lors du Sommet de Rio de Janeiro, en 1992, qui l’a inscrite dans le premier principe de sa déclaration solennelle.

6. En ce domaine, les pouvoirs se trouvent définis dans la Loi sur l’aménagement et l’urbanisme (LRQ, c. A-19.1 : article 79.20 : « plan de développement »), dans les lois sur les Communautés métropolitaines de Montréal (LRQ, c. C-37.0.1 : article 150) et de Québec (LRQ, c. C-37.0.2 : article 143) ainsi que dans les chartes de certaines villes québécoises.

7. Dans cet article, les données monétaires converties (livres sterling, euros, dollars améri-cains) en dollars canadiens sont en date du taux de change actualisés (mars 2005).

8. La Glasgow Action regroupe des élites locales de la ville de Glasgow, soit des person-nalités issues du milieu politique et du monde des affaires. La Glasgow Development Agency (GDA), qui lui a succédé en 1991, s’attarde à différents domaines : le dévelop-pement local, les services aux entreprises, les services aux autorité locales et régionales (supervision de dossiers, aide financière aux entreprises, recherche d’investisseurs étrangers), à des activités de formation (chômeurs, femmes, immigrants) et à des actions internationales. En 2001, la GDA comptait 165 employés.

9. Ce programme a pour but de reconnaître et de soutenir les municipalités canadiennes qui mettent à profit pour leurs collectivités des activités artistiques et culturelles.

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10. Par exemple, pour Rodriguès Malta (1999, p. 416), le projet Port Vell de Barcelone ne « reprend néanmoins que les grandes recettes du modèle nord-américain qui […] ont été élaborées il y a presque 40 ans aujourd’hui : activités culturelles et récréatives à thème maritime ou non ; activités commerciales ; édifices pour accueillir le tertiaire ; espaces publics et promenades ». Bien plus, elle se demande si les choix favorisés par les autorités portuaires de la ville, et ce, malgré de « virulentes oppositions » de la part de nombreux acteurs et professionnels locaux, n’entraîneront pas à brève échéance l’obsolescence des nouveaux équipements.

Bibliographie

Atkinson, R., et Moon, G. (1994). Urban policy in Britain. Londres : Macmillan.

Augustin, J.-P., et Latouche, D. (dir.) (1998). Lieux culturels et contextes de villes. Talence : Maison des sciences de l’homme d’Aquitaine.

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Diane Saint-PierreLa culture comme facteur de développement de la ville : quelques expériences étrangères

Résumé

Comment mettre des villes en valeur et les sortir de situations préjudiciables dans lesquelles les changements économiques et sociaux les ont plongées au fil des décennies ? Cette question est commune à nombre de grandes villes nord- américaines et européennes fortement marquées par un déclin économique et, incidemment, par une dégradation de leur cadre de vie bâti et des conditions de vie de leurs habitants. L’une des voies privilégiées par certaines grandes villes dans le dernier quart du xxe siècle, puis par des communautés de plus petites tailles qui s’inspirèrent en cela de certaines réussites « retentissantes », fut de miser sur la culture et d’en faire un facteur essentiel de développement. Reposant sur une analyse documentaire, le présent article fait état de projets de reconversion écono-mique à l’aide de la culture de villes européennes qui ont réalisé des changements importants en ce sens depuis les années 1980.

Diane Saint-PierreCulture as a Factor in Urban Development: Some International Examples

Abstract

How can we enhace our towns and cities and help them recover from the detrimental situation inflicted upon them by decades of harmful economic and social change? The same question is being asked in many large North-American and European cities, seriously affected by economic decline and, concomitantly, by the deteriora-tion of their built environment and of their citizens’ lifestyles. One of the preferred solutions to this dilemma adopted in the last quarter of the 20th century first by a number of major cities, and then by smaller communities, taking their cue from some spectalular successes, was to stake their futures on culture, building it up into a developmental cornerstone. This paper, articulated around a documented analysis, discusses some projects for culture-based economic rehabilitation in European cities that have introduced major changes of this type since the 1980s.

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Diane Saint-PierreLa cultura como factor de desarrollo de la ciudad : algunas experiencias extranjeras

Resumen

¿Cómo valorizar las ciudades y sacarlas de situaciones perjudiciales en la que han sido sumergidas a través de los años debido a los cambios económicos y sociales ? Esta pregunta es común a un gran número de grandes ciudades norteamericanas y europeas fuertemente marcadas por una decadencia económica e, incidental-mente, por una degradación del marco de vida construido y de las condiciones de vida de sus habitantes. Una de las vías privilegiadas por algunas grandes ciudades en inspiradas de algunos éxitos « ruidosos », fue de apostar sobre la cultura y de hacerla un factor esencial de desarrollo. Apoyándose en un análisis documental, el presente artículo se vale de proyectos de reconversión económica por medio de la cultura, de ciudades europeas que han operado cambios importantes en este sentido desde los años 1980.

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