Upload
lamhanh
View
213
Download
0
Embed Size (px)
Citation preview
Directeur des Soins
Promotion : 2012
Date du Jury : dcembre 2012
La dmarche qualit en
Institut de Formation en Soins Infirmiers :
Une opportunit pour dynamiser lintelligence
collective
Monique BUNET
Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012
R e m e r c i e m e n t s
Je tiens remercier :
Toutes les personnes qui ont contribu llaboration de ce mmoire et plus
particulirement les personnes interviewes qui ont bien voulu maccorder de leur temps
prcieux.
Le responsable de la filire, Monsieur Jean Ren LEDOYEN pour son accompagnement
tout au long de la formation.
Ma famille pour son soutien et sa patience tout au long de ce parcours de formation.
Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012
S o m m a i r e
Introduction ............................................................................................................................ 1
1 Cadre et champ de ltude ............................................................................................. 5
1.1 Lintelligence collective ........................................................................................... 5
1.1.1 Un concept non stabilis ................................................................................. 5
1.1.2 Les dimensions de lintelligence collective ..................................................... 7
1.1.3 La fiabilit de lintelligence collective ............................................................ 12
1.2 La dmarche qualit ............................................................................................. 13
1.2.1 Le concept de qualit travers le temps ...................................................... 13
1.2.2 De la qualit en sant la qualit en formation ........................................... 14
1.2.3 Les enjeux dune dmarche qualit en IFSI ................................................. 16
1.3 La dmarche qualit et lintelligence collective : des aspects communs ............ 18
2 Lenqute de terrain ..................................................................................................... 19
2.1 Les objectifs .......................................................................................................... 19
2.2 La mthodologie ................................................................................................... 19
2.2.1 Les populations enqutes .......................................................................... 19
2.2.2 Loutil denqute ............................................................................................ 19
2.2.3 Le modle danalyse ..................................................................................... 20
2.2.4 Les limites de ltude ..................................................................................... 21
2.3 Le regard des acteurs ........................................................................................... 21
2.3.1 Une approche quantitative des donnes ...................................................... 21
2.3.2 Un processus cognitif de reprsentations et de partages ............................ 23
2.3.3 Un processus social et relationnel dchanges et de reconnaissances ....... 28
2.3.4 Un processus systmique qui sappuie sur laction collective et
lengagement ................................................................................................................ 31
2.4 Mise en perspective analyse et axes dinvestigations ......................................... 33
3 Stratgie du directeur dIFSI lors de la mise en place de la dmarche qualit .......... 37
3.1 Faire de la qualit en formation, laffaire de tous ................................................. 37
3.1.1 Penser et imaginer ensemble la dmarche qualit ...................................... 37
Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012
3.1.2 Engager une approche managriale participative ........................................ 38
3.1.3 Rsoudre un problme en groupe : exploiter lintelligence collective .......... 39
3.2 Favoriser lmergence de lintelligence collective au sein de linstitut ................. 39
3.2.1 Faciliter la cohsion et l'interaction de l'quipe de travail ............................. 39
3.2.2 Favoriser la rflexion collective au sein de lquipe ..................................... 40
3.2.3 Optimiser le processus de prise de dcision ................................................ 41
3.2.4 Crer une mmoire collective au sein de l'organisation ............................... 41
3.3 Promouvoir la DQ et lIC comme un objectif commun permettant linstitution de
planifier des projets davenir, danticiper et de se prparer aux volutions .................... 42
Conclusion ........................................................................................................................... 45
Sources et bibliographie ...................................................................................................... 47
Liste des annexes ................................................................................................................... I
Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012
L i s t e d e s s i g l e s u t i l i s s
AERES : Agence dEvaluation de la Recherche et de lEnseignement Suprieur.
AFAQ : Association Franaise de lAssurance Qualit.
AFCIQ : Association Franaise de Contrle Industriel et Qualit.
AFNOR : Association Franaise de Normalisation.
CEFIEC : Comit dEntente des Formations Infirmires Et Cadres.
DS : Directeur des Soins.
DS/DIF : Directeur des Soins / directeur dInstitut de formation.
DQ : Dmarche Qualit
EHESP : Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique.
ENSP : Ecole Nationale de Sant publique.
EPP : Evaluation des Pratiques Professionnelles.
F : Formateurs.
FFP : Fdration de la Formation Professionnelle.
HAS : Haute Autorit de Sant.
LMD : Licence -Master-Doctorat.
OMS : Organisation Mondiale de la Sant.
OPQF : Office Professionnel de Qualification des Organismes de Formation.
IC : Intelligence Collective
IFSI : Institut de Formation en Soins Infirmiers.
ISO : International Organisation for Standardization.
TIC : Technologies de l'Information et de la communication.
VAE : Validation des Acquis de lExprience
Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012 - 1 -
Introduction
Depuis ces dernires annes, les politiques-qualit se sont dveloppes dans
plusieurs secteurs professionnels afin de rpondre aux volutions conomiques. Les
institutions ont d satisfaire lexigence qualit en repensant leurs organisations, leur
politique qualit. La politique-qualit dun tablissement comprend lensemble des
orientations et des objectifs quil sest fix dans le domaine de la qualit, ainsi que les
objectifs affichs en termes de satisfaction de ses clients ou bnficiaires. Pour raliser
cette politique qualit, ltablissement met en place une dmarche qualit (DQ) qui
interroge plusieurs champs de son organisation. Cette volution de la recherche de la
qualit sest galement largie au monde de la sant avec la mise en place de
laccrditation devenue certification des tablissements de sant. La demande en soins
sacclre considrablement avec dune part, laugmentation des connaissances
scientifiques et technologiques, et dautre part, un accroissement de la dure de vie et un
vieillissement dmographique de la population. La consquence majeure de cette
demande en soins est une aggravation des dpenses de sant. Dans ce contexte, la
recherche defficience, que nous dfinirons comme lefficacit maximale au meilleur cot,
oblige les tablissements de sant assurer le juste soin , tout en garantissant une
amlioration continue de la qualit des soins et de la prise en charge des usagers. Alors
que ces tablissements se trouvent engags dans des dmarches de certification, il
nexiste, ce jour, aucune obligation de certification concernant les Instituts de Formation
en Soins Infirmiers (IFSI). Or, si nous considrons quun institut de formation doit
satisfaire aux besoins des personnes quil forme, quil doit rpondre aux exigences de
comptences attendues par les usagers et aux demandes des tutelles concernant la
qualit de la formation quil dispense, la dmarche qualit devient une opportunit
laquelle chaque institut se doit de rflchir.
Depuis les accords de Bologne1 , en 1999, la formation des professions paramdicales
connait une succession de modifications, avec la reconnaissance de la qualification
professionnelle par le biais de la Validation des Acquis de lExprience (VAE),
luniversitarisation des professions para mdicales et linscription dans un processus
Licence-Master-Doctorat des tudes dinfirmiers. Face ces diffrents enjeux, et face la
modification et lexigence de qualit des enseignements en regard des comptences
attendues, il est indispensable de rendre plus efficace la matrise du processus de
formation tant matriel quintellectuel. Le contexte changeant et volutif en matire
rglementaire, europenne ou universitaire rend la situation de la formation trs
1 Le processus de Bologne (ou processus Sorbonne-Bologne) est un engagement construire un
espace europen de l'enseignement suprieur.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Europe
- 2 - Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012
complexe. La dmarche qualit en formation peut tre un des outils de gestion de cette
complexit.
Des dmarches qualit et des dbuts de dmarche de certification concernant les
Instituts de Formation en Soins Infirmiers se sont mises en place linitiative de quelques
directeurs dinstituts de formation ds 2001 (IFSI de Privas) Ces instituts certifis ont
obtenu une certification par lAssociation Franaise de Normalisation (AFNOR) pour la
norme ISO 90012. Des directeurs dinstitut se sont appuys sur dautres rfrentiels pour
mettre en place cette dmarche, rpondant la proccupation defficience au sein des
instituts.
Selon le tmoignage de la directrice dun IFSI ayant mis en place la dmarche qualit
dans son tablissement, cette dmarche, outre son aspect organisationnel, permet de
donner confiance aux acteurs dans ce quils font au quotidien, de donner confiance aux
clients et aux tutelles en regard de ce qui est produit en interne, de donner voir en
externe ce que lon produit et de reprsenter une attractivit pour les bnficiaires de la
formation. Cest un moyen dvaluer lorganisation et de proposer des axes damlioration
permettant ainsi au centre de formation de progresser dune faon pense et rflchie.
Pour elle, cette dmarche objective la matrise de lensemble du processus de formation
et rend visible la qualit de loffre de formation et les savoirs professionnels3.
Notre projet professionnel est dexercer en tant que Directeur des soins, la fonction de
directeur dInstitut de Formation en Soins Infirmiers. Luniversitarisation des tudes
dinfirmiers et la mise en place dun nouveau rfrentiel de formation bas sur les
comptences nous semblent tre lopportunit pour rinterroger, dune part, lorganisation
de la formation et dautre part, les pratiques professionnelles en formation. Promouvoir
une culture qualit en IFSI fait partie des missions confies au directeur dinstitut. En effet,
le rfrentiel mtier de Directeur (trice) des soins4, directeur dinstitut de formation
prcise : . Il dfinit et met en uvre la dmarche qualit de la structure et participe au
processus de certification . Cest dans cette perspective et soucieuse denrichir notre
rflexion concernant notre prochaine prise de poste dans un IFSI o il sera ncessaire de
mettre en place une dmarche qualit, que nous conduisons cette tude qui poursuit trois
objectifs :
Approfondir nos connaissances en ce qui concerne lapplication dune dmarche
qualit en formation professionnelle.
2 La famille des normes ISO 9000 correspond un ensemble de rfrentiels de bonnes pratiques
de management en matire de qualit, ports par l'organisme international de standardisation (ISO, International Organisation for Standardization). 3 BOYER C, mai 2005, la dmarche qualit : une opportunit pour les Ifsi .Soins Cadres, n54,
pp 58 62 4 Rfrentiel mtier de Directeur (trice) des soins : DGOS-CNG-Mars 2010.
Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012 - 3 -
Apprhender les enjeux managriaux dans la mise en uvre dune dmarche
qualit au sein dun Institut de Formation en Soins Infirmiers.
Anticiper les volutions venir dans le cadre de luniversitarisation des formations
paramdicales.
Afin dorienter ce travail, nous avons ralis une observation de trois semaines lors
dun stage dimmersion professionnelle auprs dune quipe pdagogique, dans un IFSI
certifi ISO 9001 version 2008. Ce temps nous a permis dassister une journe daudit
externe ralise par lorganisme certificateur AFNOR. Le constat gnral que nous avons
pu faire est que la mise en place et le suivi de cette dmarche demande un vritable
investissement de la part de tous les membres de linstitut. Nous avons pu galement
observer une dynamique dquipe tourne vers la culture de lvaluation avec une remise
en question des pratiques pdagogiques. Cette exprience nous laisse penser que la
dmarche qualit, outre son intrt dordre organisationnel peut dynamiser les relations
entre les diffrents membres de linstitut, potentialiser les comptences, engendrer une
dynamique de dveloppement, de rflexion et de cration collective.
Suite cette exprience sur le terrain, notre rflexion sera guide par la question
suivante :
En quoi la dmarche qualit en Institut de Formation en Soins Infirmier peut
elle constituer un levier de lintelligence collective?
Notre recherche explorera plusieurs axes dinvestigations :
La dmarche qualit comme un moyen de reconnaissance des comptences de
lautre, une volont collective de faire progresser les pratiques et la rflexion
collective afin dencourager lmergence dides nouvelles.
La dmarche qualit comme un outil fdrateur autour dun projet commun,
favorisant la collaboration et la cohsion dquipe, donnant un sentiment de
confiance en lautre et en linstitution.
La dmarche qualit comme prtexte linstauration despaces collaboratifs
permettant la confrontation dopinion et la prise de dcision.
Dans une premire partie, nous explorerons les concepts en lien avec notre
questionnement en nous appuyant sur les expriences et les publications relatives notre
sujet de recherche. Dans une deuxime partie, nous prsenterons la mthodologie et les
rsultats des enqutes menes auprs de professionnels exerant dans des IFSI
possdant une dmarche qualit. Nous effectuerons des points de synthse reprenant
lanalyse des rsultats en lien avec les apports thoriques. Dans une troisime partie,
nous laborerons des pistes stratgiques pour le directeur dinstitut souhaitant mettre en
- 4 - Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012
place une dmarche qualit, puis, nous conclurons en mettant en relief les contributions
du travail.
Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012 - 5 -
1 Cadre et champ de ltude
Nous allons dans ce premier chapitre apporter un clairage thorique sur le concept
dintelligence collective, les diffrentes formes quelle peut prendre selon les collectifs
auxquels elle sapplique. Nous tenterons dtablir des liens avec les groupes de
rfrences qui intressent notre tude. Nous prsenterons la dmarche qualit. Nous
resituerons rapidement cette dmarche dans un contexte global de recherche de qualit
et damlioration des soins. Nous relaterons lvolution de lapproche qualit en formation,
son volution en formation professionnelle. Nous montrerons lvolution des dmarches
qualit en IFSI, ces instituts tant les lieux de nos investigations.
1.1 Lintelligence collective
Le concept de lintelligence collective (IC) tel quil est voqu dans la littrature, se
rfre la notion dun groupe dindividus, mobiliss autour de la ralisation de projets
communs et qui pour parvenir leurs fins, mettent au profit du collectif, leurs
connaissances et leurs savoirs. Ce sont les interactions qui se produisent entre les
membres de ce groupe qui permettent le dveloppement dune intelligence collective.
Lintelligence collective est un concept qui a vu le jour la Renaissance, autour de la
mtaphore de locan des savoirs , qui reprsente limmense quantit de
connaissances qui fonde notre socit. La reprsentation de lintelligence collective a
volu ensuite, aux 19e et 20e sicles, autour des rvolutions technologiques
successives. De nos jours, la rvolution Internet lui permet dtre plus quun concept.5
1.1.1 Un concept non stabilis
La notion dintelligence collective sous entend dune manire gnrale la notion
dintelligence individuelle que nous dfinirons sommairement comme la facult de
comprhension et de connaissances. Lintelligence collective suppose donc la
mobilisation de toutes les intelligences individuelles lintrieur dun mme groupe de
travail afin de mener terme un projet commun. Lintelligence collective existait dj dans
les socits dites primitives et se caractrisait par la recherche dun avenir commun
et sur les moyens de latteindre. Cette intelligence collective dite originelle serait
effective galement dans le fonctionnement de groupe comme les quipes sportives, les
groupes de musique6. Elle sapparente, dans ce cas l, la perception que chacun a de
ce que fait lautre pour le collectif et le sens que cela prend pour laction commune.
5 Intelligence collective : les limites de locan des savoirs /les dossiers de lobservatoire [visit le
27.09.2012], disponible sur internet : http://obstest.sciencescom.org/?p=1113. 6 NOUBEL JF, Intelligence Collective, la rvolution invisible. [Mise jour le 24 aot 2007],
disponible sur Internet : http//www.thetransitioner.org/Intelligence_Collective_Revolution_ /Intelligence_Collective_Revolution_Invisible_JFNoubel.pdf.p 7
- 6 - Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012
Lintelligence collective est un concept dvelopp par Pierre LEVY7. Selon lui :
L'intelligence collective repose sur un double postulat. Le premier suppose que tout tre
humain est dtenteur d'une intelligence individuelle laquelle il peut faire appel. Le
second est qu'il existe une forme d'intelligence, dite "collective", susceptible de dpasser,
en les intgrant, les intelligences individuelles et les savoirs spcialiss . Afin de prciser
ce que reprsente pour nous lintelligence collective, nous nous sommes rfre
diffrentes dfinitions de ce concept. Pierre LEVY la dfinit comme : une intelligence
partout distribue, sans cesse valorise, coordonne en temps rel, qui aboutit une
mobilisation effective des comptences. . Il explique que : personne ne sait tout, tout
le monde sait quelque chose . Il affirme que : chaque membre du collectif serait
porteur dune richesse quon ne pourrait ngliger et qui lui assurerait une place et une
contribution uniques au sein du collectif intelligent . Ainsi pour Pierre Lvy :
Lintelligence collective nest pas quun concept thorique ou philosophique, elle peut
sous-tendre une nouvelle organisation sociale effective et efficace, base sur les
comptences, le savoir et les connaissances 8.
Pour Franoise DUPUICH- RABASSE en 1997 : Il y a intelligence collective lorsque
lon observe lutilisation collective, au sein dune entreprise, dinformations parses
dtenues par diffrents individus au travail et que cette dmarche vise susciter un
consensus daction collective par le biais de processus individuels et collectifs 9.
Manfred MACK en 2004 dfinit lintelligence collective comme : Une capacit qui, par la
combinaison et la mise en interaction de connaissances, ides, opinions,
questionnements, doutes de plusieurs personnes, gnre de la valeur (ou une
performance ou un rsultat) suprieure ce qui serait obtenu par la simple addition des
contributions (connaissances, ides, etc.) de chaque individu 10. Quant Olivier
ZARA, il considre que lIntelligence collective : ...cest un outil pour dvelopper la
responsabilit, la crativit, ladaptabilit dune organisation et garantir la mise en uvre
des dcisions en rduisant la rsistance au changement et en crant une mulation
positive.. 11.
Ces diffrentes dfinitions de lIntelligence collective renvoient aux notions de travail
collectif, dorganisation sociale, dactions et de dcisions collectives, comme
caractristiques indispensables au bon fonctionnement dun collectif de travail. Le terme
7 LEVY P, sociologue, fonde le concept dintelligence collective dans son ouvrage : LIntelligence
collective : pour une anthropologie du cyberspace.IL est titulaire d'une chaire de recherche en Intelligence Collective l'universit d'Ottawa au Canada. 8LEVY P, 1997, L'intelligence collective : pour une anthropologie du cyberespace, Paris : La
Dcouverte/Poche, p 29. 9 DUPUICH-RABASSE F, 1997, cit par ZABET O, Collaboration dans lentreprise et intelligence
collective , in Association internationale de management stratgique, XVme Confrence Internationale de Management Stratgique, 13-16 Juin 2006, Annecy / Genve, p 12. 10
Ibid., p 12. 11
ZARA O, 2004, Le management de lintelligence collective : vers une thique de la collaboration, Paris : M2 Editions, p 6.
Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012 - 7 -
de collectif pouvant indiffremment reprsenter un groupe rduit comme un groupe de
travail ou une quipe, ou au contraire un nombre plus important de personnes qui
collaborent latteinte dobjectifs communs. Cependant, les crits relatifs lIC
saccordent sur le principe que lintelligence collective se dveloppe principalement dans
des groupes de petite taille, dans lesquels les changes sont plus productifs.
Dans le contexte de notre travail, ce collectif correspond souvent une quipe de
moyenne constitution, compose de professionnels issus dune mme formation. Il sagit
alors de crer au sein de cette quipe, une collaboration efficace, un collectif intelligent
que Grard GUINGOUAIN dfinit par : la connaissance des comptences des uns et
des autres , la confiance dans ces comptences des uns et des autres et la
coopration volont de travailler et russir ensemble 12. Dans nombre de cas, cette
collaboration permet chacun de participer llaboration dun savoir commun et
partag.
1.1.2 Les dimensions de lintelligence collective
Lintelligence collective se caractrise par des cooprations intellectuelles qui se
manifestent lors des temps de rflexion collective. Elle reste cependant difficilement
identifiable au sein des collectifs de travail car il existe peu doutils permettant de la
reconnatre en tant que telle13. Cependant, les diffrentes approches de lintelligence
collective qui mergent de la littrature saccordent pour mettre en avant trois dimensions:
une dimension sociale et relationnelle, une dimension cognitive et une dimension
systmique. Lmergence de lintelligence collective ncessite que ces trois dimensions
soient runies et mises profit au sein de lorganisation14. Afin dclairer ce concept et de
guider notre recherche, nous nous proposons de les dtailler :
A) La dimension sociale ou relationnelle
Cette dimension est essentielle au fonctionnement du groupe. Elle permet de crer des
liens entre les membres de lquipe. Elle se traduit par la ralisation dactions collectives.
Laction collective prsume la constitution dun groupe de personnes ayant un objectif et
qui, pour latteindre mettent leurs efforts en commun. LIC suppose une quantit et une
qualit des cooprations intellectuelles permettant lenrichissement du collectif. Il nous
12
GOSSELIN P, GUINGOUAIN G, Une perspective psychosociologique de lvaluation, cours EHESP, 27 avril 2012. 13
ZAIBET O, Dfinir et reprer lintelligence collective dans les quipes de travail oprationnelles : le cas dune PME du secteur de llectronique, disponible sur Internet : http://isdm.univ-tln.fr/PDF/isdm28/isdm28-zaibet.pdf 14
ZABET O, Collaboration dans lentreprise et intelligence collective , in Association internationale de management stratgique, XVme Confrence Internationale de Management Stratgique, 13-16 Juin 2006, Annecy / Genve, p 20, disponible sur internet : http://www.strategie-aims.com:events/conferences/8-XVeme-conference-de-l-aims/communication/2183-collaboration-dans-lentreprise-et-intelligence-collective/dowload
- 8 - Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012
semble important didentifier les situations qui peuvent altrer cette coopration. Parmi les
freins dnoncs par Olivier ZARA, nous retiendrons : la culture oriente vers le pouvoir, le
statut plutt que le partage, une organisation pyramidale et hirarchique qui cloisonne et
qui oppose plutt que de favoriser lesprit de collaboration et la rsistance au changement
qui est souvent lie la peur de l'inconnu, de la nouveaut, et qui bouscule le confort et la
scurit que procurent les habitudes15. Face ces possibles drives, la cohsion dquipe
comme condition de lintelligence collective, doit donner du sens et de la cohrence au
collectif. Pour cela, il est ncessaire quune dynamique collective se cre permettant aux
membres du groupe dharmoniser leurs comportements en tenant compte du caractre et
des motions de chacun.
La coopration implique donc au sein des collectifs, des espaces de collaboration,
dautonomie et de conflits indispensables un fonctionnement efficace.
a) La collaboration :
Lintrt de la collaboration est : dimpliquer lensemble des membres du groupe. Elle
suppose quil existe un sentiment de confiance entre les membres dun mme groupe,
ainsi que des espaces dinteractions bass sur le respect, la fiabilit et la reconnaissance
de lautre. Lchange entre les membres dun groupe passe galement par le partage dun
but commun. Pour quune personne accepte de collaborer, il est indispensable quelle
obtienne en contre partie des signes de reconnaissance de son organisation ou de ses
pairs. Par rapport au mode coopratif, le mode collaboratif ncessite plus dinteractions
entre les membres du groupe et sollicite davantage le facteur humain. Il permet entre
autre, datteindre un niveau suprieur de performance. La capacit dun groupe social
valoriser son capital humain peut devenir ainsi une marque dintelligence collective.16.
b) Lautonomie
Elle peut tre dfinie spontanment comme la libert et le choix dans laction. Elle doit
tre prsente au niveau individuel et collectif. Lautonomie de lindividu renvoie au mode
de management individuel qui vise favoriser lautonomie dun collaborateur, sa
motivation et ses comptences en situation de travail. Sur le plan collectif, le management
dquipe consiste dvelopper lautonomie du groupe par la motivation de ses membres
travailler ensemble et la mobilisation active des comptences dans latteinte de lobjectif
poursuivi. Concilier ces deux modes dautonomie peut tre difficile raliser. Une quipe
peut avoir une grande marge de libert pour mener la mission qui lui est donne, mais les
15
ZARA O, 2004, Le management de lintelligence collective : vers une thique de la collaboration, Paris : M2 Editions, p10 16
Op.cit. p 6
Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012 - 9 -
membres de lquipe peuvent trs bien navoir aucune libert quant leurs tches au sein
de cette mme quipe17.
c) Le conflit :
Dans tout groupe, il existe des alliances et des rivalits qui peuvent entrainer des zones
de conflit. Le conflit au sein dune quipe est ncessaire. Il peut sagir du conflit de
situation, relatif aux valeurs, aux rgles. Il peut galement concerner les membres du
groupe en tant quentit, cest le conflit de personnes, avec la remise en cause de la
personnalit de lautre, lexistence de prjugs ou laccumulation de conflits rpts et
jamais clarifis. Cette situation peut provoquer au sein du collectif, soit lvitement, la
distanciation, soit la conciliation avec la recherche de lestime de lautre, lmergence
dune confiance mutuelle. Dans tout les cas, les conflits ne peuvent pas tre supprims
car ils relvent de la nature sociale. Quelques travaux soulignent que lexistence de
conflits au sein dune quipe ou dun groupe est gnratrice dintelligence, de crativit.
18.
B) La dimension cognitive
Elle permet de donner une orientation laction collective. Elle se dcline en trois sous
dimensions :
a) La comprhension collective
La comprhension collective se caractrise au sein du groupe par la confrontation des
ides et des reprsentations de chacun.
Lactivit collective qui exige la coordination des activits individuelles ncessite
elle aussi, llaboration dune reprsentation de rfrence dite souvent rfrentiel
commun. Quoique ces notions ne concident pas tout fait, on parle aussi de rfrentiel
opratif commun, de vue partage, denvironnement cognitif mutuel, despace
dinformation commun, de modle mental partag... 19.
La comprhension collective est labore par les membres du groupe engags dans la
ralisation de laction20. Elle se construit par la confrontation des connaissances, des
reprsentations, par le partage de rfrentiels communs et la mise en place dun langage
17
ZAIBET O, Dfinir et reprer lintelligence collective dans les quipes de travail oprationnelles : le cas dune PME du secteur de llectronique, disponible sur Internet : http://isdm.univ-tln.fr/PDF/isdm28/isdm28-zaibet.pdf.p10. 18
Ibid. p 10 19
HUBERT BELESCOT M, Les diffrentes dimensions de lIntelligence collective. [Mise jour le 28 dcembre 2011], disponible sur Internet : http://max-hubert.belescot.over-blog.com/article-les-differentes-dimensions-de-l-intelligence-collective-95202158.html. 20
ZABET O, Collaboration dans lentreprise et intelligence collective , in Association internationale de management stratgique, XVme Confrence Internationale de Management Stratgique, 13-16 Juin 2006, Annecy / Genve ,28p, disponible sur internet : http://www.strategie-aims.com:events/conferences/8-XVeme-conference-de-l-aims/communication/2183-collaboration-dans-lentreprise-et-intelligence-collective/dowload.p 21.
http://www.strategie-aims.com:events/conferences/8-XVeme-conference-de-l-aims/communication/2183-collaboration-dans-lentreprise-et-intelligence-collective/dowload.phttp://www.strategie-aims.com:events/conferences/8-XVeme-conference-de-l-aims/communication/2183-collaboration-dans-lentreprise-et-intelligence-collective/dowload.phttp://www.strategie-aims.com:events/conferences/8-XVeme-conference-de-l-aims/communication/2183-collaboration-dans-lentreprise-et-intelligence-collective/dowload.p
- 10 - Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012
commun et opratif. Toute situation dinteraction dans un groupe peut galement donner
lieu au dveloppement dun tat desprit propre ce collectif, la construction dune
intercomprhension.
b) La rflexion collective
Lapprentissage est une condition lmergence dune intelligence collective. Il sobtient
partir des diffrents savoirs. Il comprend des savoirs thoriques qui sont des savoirs
communs issus de linteraction entre les membres du collectif de travail et bass sur les
affinits existantes entre les personnes. Des savoirs faire rsultant des expriences
vcues ou relatifs laction du travail collectif. Des savoirs actionnables car
mobilisables lors de laction permettant lmergence de connaissances qui soient
reprsentatives d'expriences, d'actions et de rflexions.21 A partir de cette rflexion
collective, et de la mise en commun de ces savoirs, le groupe se cre une mmoire
collective.
Dans un collectif intelligent, il est important de diffrencier la rflexion collective de la
communication collective. La communication est un change dinformations qui ne
ncessitent pas de cooprations intellectuelles. Lors de la rflexion collective, ces
cooprations sont mobilises afin de crer ou de transformer linformation, de lui donner
du sens22. Dans la majorit des cas, nous nous contentons de recueillir ou de concevoir
une information plutt que de la co construire. Cela relve donc plus de la communication
que dune coopration effective. La co-construction dune information reste une activit
rare et complique.
c) La dcision collective
Comme nous lavons vu auparavant, lIC est troitement lie laction de rflchir et de
collaborer. Si la prise de dcision nest pas directement associe lIC, il est cependant
ncessaire que la construction de la dcision soit le rsultat de cette Intelligence collective
et de la prise en compte des connaissances de chacun. Ds lors, la dcision peut tre
celle dune ou de plusieurs personnes car si lIC contribue la construction de la dcision,
elle ne limpacte pas directement. Il serait cependant rducteur de penser quil existe un
lien systmatique entre rflexion collective et dcision intelligente23. Olivier ZARA
considre ce propos, quune rflexion collective peut trs bien mener une dcision
inadapte, et que le fruit dune rflexion individuelle peut donner lieu une dcision
21
ZAIBET O, Dfinir et reprer lintelligence collective dans les quipes de travail oprationnelles : le cas dune PME du secteur de llectronique, disponible sur Internet : http://isdm.univ-tln.fr/PDF/isdm28/isdm28-zaibet.pdf.p9. 22
ZARA O., 2005, Le management de l'intelligence collective : Vers une nouvelle gouvernance, Paris : M2Editions, p 17. 23
Ibid. p 18.
Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012 - 11 -
gniale24. Selon Pierre LEVY : La masse n'a pas toujours raison, surtout s'il s'agit d'une
masse moutonnire et conformiste qui ne remet rien en question. C'est pourquoi le projet
de l'intelligence collective consiste prcisment valoriser toute la diversit des
connaissances, des comptences et des ides qui se trouvent dans une collectivit et
organiser cette diversit en un dialogue cratif et productif. 25.
Dans le cadre de notre tude, lIC permet lquipe, partir dune rflexion collective,
de confronter ensemble une multitude de solutions et de parvenir dboucher sur une
prise de dcision collective. Lintrt de cette dcision collective rsidant dans le fait
quelle est le rsultat dune rflexion commune et quelle fdre le groupe autour dun
objectif commun. LIC permet de crer des espaces de paroles permettant le
rapprochement et la confrontation des intelligences individuelles. La culture de
l'intelligence collective travaille tablir de manire douce et pacifique un "multilogue"
ouvert, qui est prfrable aussi bien au cloisonnement et l'isolement des intelligences,
qu' l'uniformit bien pensante.26 Une des craintes manant des managers et
concernant lIC est la perte de leur pouvoir. Or comme lexplique Olivier ZARA :
Lintelligence collective n'induit pas une redistribution du pouvoir (chacun reste sa place,
chacun conserve la mme quantit de pouvoir) mais un changement dans l'exercice du
pouvoir, dans les modes de management 27. LIC nenlve pas au directeur son rle de
dcideur. Elle lui permet de renforcer sa prise de dcision en sappuyant sur la rflexion
collective du groupe, sur la co construction dune dcision labore partir des
connaissances et des expriences de chacun de ses collaborateurs.
C) La dimension systmique
Cette dimension englobe les deux dimensions prcdemment dcrites. Elle situe lIC
au carrefour des interactions cognitives et relationnelles qui se ralisent en interne du
collectif de travail et des interactions qui se produisent lextrieur du groupe et qui le
relient son environnement. Ces actions collectives traduisent, nous lavons vu, le
rsultat dune collaboration entre les membres du collectif en vue daccomplir la
ralisation dobjectifs communs et utiles lorganisation. Au sens de Michel CROZIER et
dErhard FRIEDBERG : Laction collective nest pas un phnomne naturelil nexiste
pas de dynamique naturelle qui pousserait les hommes en tant qu tres sociaux
sunir, se grouper, sorganiser 28. Lindividu se trouve au centre dun systme auquel
il apporte sa contribution. II participe au systme en construisant ses actions en fonction
24
ZARA O., 2005, Le management de l'intelligence collective : Vers une nouvelle gouvernance, Paris : M2Editions, .p18. 25
LEVY P, cit par ZARA O., 2005, Le management de l'intelligence collective : Vers une nouvelle gouvernance, Paris : M2Editions, p 18. 26
Ibid. p18. 27
ZARA O, 2004, Le management de lintelligence collective : vers une thique de la collaboration, Paris : M2 Editions, p5. 28
CROZIER M, FRIEDBERG E, 1977, Lacteur et le systme, Paris : Edition du seuil, p15.
- 12 - Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012
des connaissances quil possde et de la perception quil a de son environnement. Selon
RIBETTE (1996) : Lefficacit dun groupe humain oblige la gestion des projets
individuels et des projets collectifs. Au-del de lefficience interne, la vritable efficacit
dune organisation dpend dune bonne mise en perspective avec son environnement 29.
Il nous parait donc indispensable de relier lorganisation son environnement et au
contexte dans lequel doivent voluer ses projets.
1.1.3 La fiabilit de lintelligence collective
Nous avons vu prcdemment que le concept dintelligence collective repose
principalement sur la dynamique de groupe et les interactions qui en dcoulent.
Cependant, il mane parfois de ces interactions, des dysfonctionnements qui peuvent
remettre en cause les principes de lintelligence collective. Christian MOREL attire notre
attention sur les drives qui peuvent se produire au sein de ces collectifs. Il crit :
Lorsque des individus dcident et agissent en groupe, de multiples piges entravent
leurs interactions, dgradant de ce fait fortement lintelligence collective 30.Il dcrit
comme enchainements pervers principaux31 :
Leffet de polarisation : le groupe prend aprs une discussion, une dcision plus
risque que celle quil aurait prise sans cette discussion. Cest un effet contreproductif et
inverse lesprit de dlibration qui consiste tenir compte de ce qui a t au
pralablement discut. Le paradigme de Asch : lindividu a tendance se ranger lavis
unanime du groupe mme si il en peroit les inexactitudes. Le biais de confirmation : les
membres du groupe ne tiennent compte que des informations et arguments qui servent
leurs positionnements. La pense de groupe : il sagit de privilgier lharmonie et la
cohsion du groupe lexpression des dsaccords et des conflits interne. La
communication silencieuse : chacun pense savoir ce que lautre pense, ce qui peut crer
des apprciations fausses et des confusions. Lillusion de lunanimit : comme certains
membres taisent leurs dsaccords, le reste du groupe pense quil y a unanimit alors que
ce nest pas le cas. C MOREL affirme quajouts les uns aux autres, ces effets
provoquent une sorte divresse de groupe qui peut donner lillusion dune adhsion
absolue. Outre ces effets lis leffet de groupe, il dnonce galement comme effet
pervers, la pression hirarchique qui peut sexercer sur le groupe, qui par crainte de
mcontenter le chef va dissimuler ses dsaccords : Le respect excessif de lautorit est
un des plus vieux dysfonctionnement du monde 32. Nous avons prioriss les effets de
29
RIBETTE, cit par HUBERT M : http://max-hubert.belescot.over-blog.com/article-les-differentes-dimensions-de-l-intelligence collective- 95202158.html 30
MOREL C., 2012, Les dcisions absurdes II, comment les viter, Mesnil-sur- lEstre : Gallimard, p6. 31
Ibid. p119 32
Ibid. p124
http://max-hubert.belescot.over-blog.com/article-les-differentes-dimensions-de-l-intelligencehttp://max-hubert.belescot.over-blog.com/article-les-differentes-dimensions-de-l-intelligence
Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012 - 13 -
groupe qui nous paraissent tre observables dans les groupes de rfrences de notre
tude.
Nous pensons quil est important pour un directeur dtre conscient de ces
manifestations et de leurs interfrences dans les dlibrations et la prise de dcision. Le
rle du directeur est de permettre la mobilisation de lintelligence collective et des
connaissances en facilitant le partage des savoirs et la co-construction lintrieur du
groupe. Dans le cadre de notre tude, le directeur dinstitut de formation manage une
quipe forme de professionnels de la sant. Cest un collectif possdant des
connaissances communes issues dexpriences professionnelles diverses, ce qui nous
semble tre un lment favorisant lmergence de lIC.
Au fil de la dcouverte de ce concept, nous pouvons conclure que runir des individus
dans un groupe de travail nest pas une condition suffisante pour que se cre de lIC. Il est
ncessaire que la situation de travail collectif comporte des lments suffisant gnrer
une coordination entre les membres du groupe. Afin de poursuivre nos investigations,
nous allons tenter dtablir si ces lments sont observables dans le cadre de la mise en
uvre dune dmarche qualit en IFSI.
1.2 La dmarche qualit
1.2.1 Le concept de qualit travers le temps
La notion de qualit se dveloppe au dbut du XXme sicle avec lvolution de
lindustrie. En 1950, Williams Edwards DEMING dveloppe et applique ce concept au
management des entreprises. Les principes de la qualit totale sont poss par J.M.
JURAN selon trois principes : la planification, le contrle, et lamlioration continue de la
qualit. Dans les annes 1960, K. ISHIKAWA dveloppe le management par la qualit
totale fond sur trois grands principes : lengagement de la hirarchie, ladhsion
volontaire de tous et la prise en compte des besoins exprims par les utilisateurs33. En
France, lAssociation Franaise de Normalisation (AFNOR) est cre en 1926 et
lAssociation Franaise de Contrle Industriel et Qualit (AFCIQ) en 1957. Les premires
normes ISO sont publies en 1987, rvises en 1994, en 2000 et en 2008. LAssociation
Franaise de lAssurance Qualit (AFAQ) est cr en 1988 afin dauditer les systmes
qualit. Pour cela, elle utilise les normes ISO qui admettent un langage commun toutes
les entreprises et permettent lobtention de certificats de conformit34.
33
GALIZIA JL., L'accrditation/certification et ses consquences pour les tablissements de sant : tude juridique et perspectives, thse en Droit de la Sant., disponible sur internet : http://www.adequationsante.com/assets/pdf/La-demarche-qualite-a-travers-l'histoire.pdf.p2. 34
Ibid.pp 2-3
- 14 - Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012
La qualit reste un concept difficile dfinir au regard de son caractre multi
dimensionnel. Cependant, il nous parait indispensable dclaircir cette notion afin de
mieux comprendre en quoi consiste la dmarche qualit que nous nous proposons
dtudier dans la suite de ce travail.
Du point de vue du consommateur, la qualit dsigne laptitude dun produit rpondre
ses besoins et ses exigences. Pour le patient, elle interroge principalement sa relation
avec les professionnels de sant, les conditions de son hospitalisation, la performance de
sa prise en charge. Pour les professionnels de sante, elle met en avant les comptences
des professionnels, lopportunit dexcution des soins, la communication avec le patient
et le maintien de sa confiance. Pour le dirigeant, elle est davantage considre comme
une politique qui permet la mobilisation de tous les personnels dans le but damliorer le
fonctionnement de lorganisation. Pour le financeur, elle intgre la notion defficience du
systme. 35 Face ces diffrents points de vue, lAFNOR propose une dfinition unifie de
la qualit. Cette dernire est prsente comme : Lensemble des caractristiques dune
entit qui lui confrent laptitude satisfaire des besoins exprims ou implicites. 36. Pour
parler de la qualit, il existe un nombre important de locutions : assurance qualit,
systme qualit, politique qualit, dmarche qualit, qualit totale, norme qualit, gestion
de la qualit, certification, etc..Parmi toutes ces appellations, lexpression de dmarche
qualit semble tre de nos jours, la plus utilise dans les organisations. En effet, la notion
de dmarche prsuppose en amont, une rflexion, un cheminement, une mthode. Elle
rappelle en cela les dmarches de projet et conforte la notion de participation active du
personnel. De par ses diffrents aspects, elle semble tre mieux accepte au sein des
institutions et particulirement dans les tablissements de sant.
1.2.2 De la qualit en sant la qualit en formation
Nous avons vu que la dmarche qualit permet une institution danalyser et
damliorer son organisation interne afin dobtenir la satisfaction de ses clients ou usagers
en regard de leurs attentes. La dmarche qualit des tablissements de sant ne diffrent
pas de ces principes. Elle se fonde sur les orientations et objectifs formuls par la Haute
Autorit de Sant (HAS) et poursuit comme objectif premier la satisfaction des patients.
LOrganisation Mondiale de la Sant (OMS) dfinit la dmarche qualit comme :
Dmarche qui doit permettre de garantir chaque patient la combinaison dactes
diagnostiques et thrapeutiques qui lui assurera le meilleur rsultat en terme de sant,
conformment ltat actuel de la science mdicale, au meilleur cot pour un mme
rsultat, au moindre risque iatrognique et pour sa plus grande satisfaction en termes de
35
GALIZIA JL., L'accrditation/certification et ses consquences pour les tablissements de sant : tude juridique et perspectives, thse en Droit de la Sant., Disponible sur internet : http://www.adequationsante.com/assets/pdf/La-demarche-qualite-a-travers-l'histoire.pdf p7 36
Ibid. p7
Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012 - 15 -
procdures, de rsultats et de contacts humains lintrieur du systme de soins . La
procdure de certification des tablissements de sant a t introduite au sein des
tablissements de sant franais par les ordonnances de 199637 . Elle a pour objectif de
porter une apprciation indpendante sur la qualit des prestations dun tablissement
(introduction au manuel de certification V 2010 ; HAS juin 2009). Entre 2003 et 2010, la
certification a connu trois versions successives. La version 2010 porte laccent sur les
dynamiques managriales en sappuyant sur la dfinition dune politique qualit et dun
plan daction, la ralisation dactivits respectant les exigences et galement lvaluation
de lactivit avec la mise en uvre dactions damlioration et lassurance de leur
efficacit. Si tous les tablissements, publics ou privs, de sant sont tenus dentrer dans
cette procdure tous les quatre ans, il nexiste pas dobligations analogues concernant les
organismes de formation.
En formation, la recherche de la qualit prend son essor la suite de la loi de 1971
relative la formation professionnelle38 qui institue lobligation pour lemployeur de
financer la formation professionnelle continue. A cette occasion, de nombreux organismes
de formation voient le jour. Ds lors apparait la notion de slection partir de critres de
qualit dorganisation. En 1989, lEtat demande au cabinet Bernard Brunhes un rapport
sur les formations quil finance. A cette poque, la formation professionnelle est
suspecte dinefficacit, de gaspillage et de dtournement de fonds publics .Une
approche oprationnelle de la qualit est propose. Elle comprend sept critres
permettant lvaluation des organismes de formation. Ces sept critres sont : le cadre
pdagogique, la mise en uvre de lalternance, la gestion des ressources humaines de
lorganisme de formation, la pratique du partenariat, la comptence ou la spcialisation de
lorganisme de formation, la capacit dinnovation et linvestissement pdagogique, la
capacit dauto valuation de lorganisme. 39
A partir de 1990, les initiatives se multiplient et la Chambre syndicale des
professionnels de la formation sengage sur les normes AFNOR. Ces normes proposent
un vritable cahier des charges liant organisme et entreprise commanditaire. Des
rfrentiels damlioration de la qualit en formation voient le jour, qui concernent
indiffremment les formateurs et les organismes40. En 1994, lOffice Professionnel de
Qualification des Organismes de Formation (OPQF) est cr, linitiative de la Fdration
de la Formation Professionnelle (FFP) et du ministre du Travail, de lEmploi et de la
Formation Professionnelle. Lobjectif de cet organisme est de participer au
37
Ordonnance n 96-346 du 24 avril 1996 portant rforme de l'hospitalisation publique et prive. 38
Loi n 71-575 du 16 juillet 1971 portant organisation de la formation professionnelle continue dans le cadre de l'ducation permanente. 39
GRIMALDI Y., 2005, Dmarches qualit et identit professionnelle en conflit Quand le management par la qualit simpose des formateurs en travail social, Paris : LHarmattan. p 41 40
Ibid. p 41
- 16 - Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012
dveloppement, lamlioration et lvaluation du professionnalisme des organismes de
formation. LOPQF dlivre un certificat de qualification attestant du fait que la structure
qualifie rpond toutes les caractristiques du professionnalisme. Les normes AFNOR
restent toute fois les plus utilises dans la formation. Cest sous ce label qu eu lieu la
premire certification dun IFSI. .
1.2.3 Les enjeux dune dmarche qualit en IFSI
Jusquen 2009, il nexiste aucune lgislation, ni obligation pour les IFSI concernant la
mise en uvre dune dmarche qualit. Un guide pour un autodiagnostic de la qualit de
formation en IFSI est ralis manant dun groupe de travail national du Comit dEntente
des Formations Infirmires Et Cadres (CEFIEC) en fvrier 2000. A linstar de lIFSI de
Privas qui sera le premier IFSI certifi ISO 9001 en 2001, des approches qualit se
concrtisent au sein des IFSI. En novembre 2005, la direction de lvaluation et du
dveloppement pdagogique de lEcole des Hautes Etudes en Sant Publique (EHESP)
dite un rfrentiel qualit portant sur laccrditation de dispositifs de formations
suprieures professionnelles. Selon les auteurs de ce manuel, ce rfrentiel a t conu
pour pouvoir sadapter de nombreuses formations suprieures professionnelles41.
Dailleurs, de plus en plus dIFSI sinspirent de ce rfrentiel pour guider leurs dmarches
qualit.
A partir de 2009, la notion dvaluation des dispositifs de formations devient plus forte
avec la mise en place dun nouveau rfrentiel de formation rpondant aux exigences
duniversitarisation des tudes. La lgislation va suivre cette volution et prciser les
attentes rglementaires en termes dvaluation du cursus de formation des tudiants
infirmiers42. Elle va affirmer lvaluation des IFSI par une autorit extrieure.
Circulaire interministrielle n DHOS/RH1/DGESIP/2009/201 du 26 juin 2009,
relative la dlivrance du grade de licence aux infirmiers diplms dEtat et
lorganisation du partenariat Conseils rgionaux/Universits/IFSI :
La dimension universitaire qui caractrisera dsormais le cursus de formation des
infirmiers se traduira notamment par [] lvaluation, chance rgulire, des
formations par une autorit administrative indpendante, en lespce lAgence
dvaluation de la recherche et de lenseignement suprieur (AERES) .
Circulaire interministrielle n DHOS/RH1/DGESIP/2009/202 du 9 juillet 2009,
relative au conventionnement des instituts de formation en soins infirmiers IFSI avec
luniversit et la rgion dans le cadre de la mise en uvre du processus Licence -Master-
Doctorat (LMD). : [La convention] prvoira galement les modalits suivant
41
DIRECTION DE LEVALUATION ET DU DEVELOPPEMENT PEDAGOGIQUE., 2005, Accrditation de dispositifs de formations suprieures professionnelles : rfrentiel qualit, Rennes : ENSP, 53p 42
BOUSSEMAERE S : La dmarche qualit en Institut de formation, cours EHESP, 12-13 avril 2012.
Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012 - 17 -
lesquelles les dossiers dvaluation des formations seront transmis chance rgulire,
par lintermdiaire de luniversit coordinatrice, lagence dvaluation de la recherche et
de lenseignement suprieur .
Arrt du 31 juillet 2009 relatif aux autorisations des instituts de formation [] et
aux agrments de leurs directeurs.
Dans lannexe 1, relatif la composition du dossier dautorisation en vue de la cration ou
du renouvellement dautorisation de linstitut, lengagement dans une dmarche qualit de
dispositifs de formations professionnelles suprieures est attendu.
Ds lors, les IFSI sengagent dans des dmarches qualit sans toutefois quil existe de
rfrentiel prdfini pour cela. Les ralisations concrtes de dmarches qualit vont se
mettre progressivement en place avec comme support des rfrentiels varis. La
dmarche qualit en IFSI peut alors tre dcrite comme une dmarche exposant dune
manire rationnelle les diffrents actes de formation. Cependant, sa mise en uvre ne se
contente pas de rpondre aux exigences rglementaires, elle affiche galement dautres
enjeux pour la formation. Selon une directrice dIFSI, la dmarche qualit permet la
reconnaissance du travail effectu et lvaluation objective des comptences. Elle reflte
la volont de progresser dans les pratiques. Pour cela, la dmarche qualit doit tre au
service dun projet partag, une invitation aux changes et la responsabilisation des
acteurs. Elle favorise lmergence dune identit spcifique de lIFSI43.
Cet engagement des IFSI dans la dmarche qualit questionne le rle du directeur
dinstitut. Nous avons vu en introduction de ce travail quil doit dfinir et mettre en uvre
une DQ au sein de sa structure. Nous avons galement montr que lintgration dune DQ
implique des changements importants au niveau de lorganisation et des pratiques du
personnel de linstitut. Face ces enjeux, le directeur doit faire preuve dun rel
engagement et mettre en place une organisation favorable au projet : Il pilote la
dmarche, met en place des conditions favorables au travail, donne du sens laction,
explicite les objectifs et les buts, signifie clairement lquipe que linstitut sinscrit dans
une dynamique de changement et dinnovation44. Il met en place un management de la
qualit en utilisant la dmarche qualit comme un vritable outil de ce management.
Elisabeth GUILLEMAIN, directrice dIFSI, conclut dans son mmoire de recherche : Ce
travail nous a conduit mettre en vidence quune dmarche qualit pouvait avoir une
vise damlioration au niveau strictement organisationnel ou pouvait tre conue comme
43
BOYER C, mai 2005, la dmarche qualit : une opportunit pour les Ifsi .Soins Cadres, n54, pp 58 62. 44
GALIZIA JL., Le management adapt la Dmarche Qualit en tablissement de soins : vaincre les rsistances au changement : Editions SUEZ S.A. 2002 disponible sur internet : http://www.adequationsante.com/assets/pdf/management.pdf.p 24.
http://www.adequationsante.com/assets/pdf/management.pdf.p
- 18 - Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012
un vritable outil de management et conduire penser linstitut dans une vision
prospective. 45.
Nous pouvons dire que la mise en place dune dmarche qualit en IFSI implique
lmergence et le dveloppement dune culture partage de la qualit impliquant tous les
acteurs et en particulier la direction. Nous retiendrons que si la dmarche qualit interroge
lefficience de linstitut au travers de son organisation, elle permet galement dinterroger
les relations et les modes de coopration entres ses membres. Cest en cela quelle sous
tend lexistence de collectifs de travail propices lmergence dune intelligence
collective.
1.3 La dmarche qualit et lintelligence collective : des aspects
communs
Nous avons vu que lobjectif principal poursuivi par la dmarche qualit est damliorer
la qualit des organisations en mobilisant ses ressources internes, en responsabilisant les
diffrents acteurs et en permettant la mise en commun des comptences. Dans un
contexte o les IFSI doivent faire face de rapides volutions, les directeurs sont appels
revoir les modes dorganisation des quipes de formateurs. Il est parfois compliqu pour
le directeur de faire en sorte que tous les membres de lquipe travaillent ensemble et de
manire efficace la ralisation de projets communs.
Mettre en place une dmarche qualit rinterroge le mode de fonctionnement de
linstitut mais galement les modes de relations et de collaboration entre les membres de
lquipe, et leur efficacit au travail. Le fait de recourir aux ressources internes plutt que
de faire appel des personnes extrieures, suppose que linstitut dispose au sein de sa
structure dune intelligence collective et organisationnelle mobilisable. Lintelligence
collective telle que nous lavons dfinie en amont, nous semble tre en corrlation avec la
recherche defficience de ces collectifs de travail.
Aprs avoir men ce raisonnement rigoureux, nous pourrons donc conclure cette partie
thorique par le fait que la dmarche qualit en IFSI peut favoriser et dvelopper
lintelligence collective de lorganisation. Cest ce que se propose de dmontrer lenqute
suivante ralise auprs de professionnels confronts la dmarche qualit en formation.
45
GUILLEMAIN E., 2008, La dmarche qualit, un outil de management pour le directeur dInstitut de formation en soins infirmiers, Rennes : Mmoire de lEcole des Hautes Etudes en Sant Publique, Filire des directeurs des soins, p 35.
Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012 - 19 -
2 Lenqute de terrain
Nous allons dans ce chapitre, prsenter les objectifs et la mthodologie gnrale de
lenqute. Aprs avoir prsent nos outils de recherche, nous dcrierons les diffrentes
tapes de lanalyse des rsultats et leur interprtation. Une synthse permettra un
comparatif des carts avec les axes dinvestigations.
2.1 Les objectifs
Comme annonc au dbut de ce travail, le premier objectif de cette enqute est de
savoir si la mise en uvre dune dmarche qualit au sein dun IFSI induit implicitement
pour lquipe pdagogique le dveloppement daptitudes relatives lintelligence
collective. Un deuxime objectif est de recueillir le tmoignage de directeurs dIFSI ayant
mis en place une dmarche qualit et danalyser leur regard quant aux rpercussions de
cette mise en uvre sur la dynamique de lquipe pdagogique afin den retirer des
conclusions et des prconisations en vue dune prise de poste future.
2.2 La mthodologie
2.2.1 Les populations enqutes 46
Lobjet de notre recherche ciblant la dynamique dune quipe pdagogique, nous
avons ralis nos entretiens auprs dune quipe de huit formateurs en charge de la
formation des tudiants infirmiers dans linstitut mme o nous avons ralis notre stage
et notre observation. Il nous parait important de signifier que cet institut a obtenu une
certification selon la norme AFNOR, et que la dmarche qualit est oprationnelle. A ce
stade du travail, nous navons pas souhait interviewer le directeur de cet institut, ni le
formateur rfrent qualit car les entretiens informels raliss auprs de ces
interlocuteurs ont nourri notre rflexion lors de notre phase exploratoire. Nous avons
ralis des entretiens auprs de quatre Directeurs des soins, directeurs dIFSI issus de
rgions diffrentes et possdant une dmarche qualit au sein de leur institution.
2.2.2 Loutil denqute
Loutil utilis auprs des diffrents publics est lentretien semi-directif. Nous lavons
prioris car il permet de favoriser la production dun discours sur un thme donn, en
favorisant un expos narratif et fluide. Loutil nous parat cohrent au regard des objectifs
fixs qui sous tendent la comprhension du sens que les acteurs donnent leurs
pratiques, leur systme de valeurs. Cela permet galement de mettre en exergue les
points de vue en prsence, les interactions entre individus. Les entretiens ont t mens
46
Annexe 1 : Caractristiques des populations enqutes.
- 20 - Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012
partir de guides dentretien47.48 Ces entretiens dune heure environ ont t enregistrs
aprs accord des personnes interviewes.
2.2.3 Le modle danalyse
Nous avons choisi le modle de lanalyse de contenu qui est une mthode qui cherche
rendre compte de ce quon dit les personnes enqutes de la manire la plus objective
et fiable possible. La procdure ncessite dans un premier temps la mise en texte du
discours recueilli puis la construction dune grille danalyse pour tudier la signification des
propose tenus. Pour cela, nous avons effectu une retranscription fidle et intgrale des
discours partir des enregistrements audio raliss. Afin de pouvoir exploiter ces
donnes qualitatives, nous avons construit une grille danalyse49 compose de critres et
dindicateurs appeles catgories. Notre tude cherchant travers les discours reprer
les aspects relevant de lIntelligence collective, nous nous sommes appuys sur le cadre
thorique de ltude pour tablir cette catgorisation.
Pour chaque composante, nous avons tabli une liste dindicateurs gnraux non
exhaustive qui nous a permis de reprer et de formaliser ces variables tout au long des
discours. Nous avons donc exploit chaque entretien en reprant des mots ou phrases
que nous avons regroups en units de sens et que nous avons classs dans chaque
catgorie. Puis, nous avons traduit les rsultats obtenus en graphique radar afin de
visualiser et de comparer les multiples caractristiques relatives notre recherche.
47
Annexe 2 : Guide dentretien utilis auprs des formateurs dIFSI. 48
Annexe 3 : Guide dentretien utilis auprs des directeurs dIFSI 49
Annexe 4 : Grille danalyse
Dimension systmique
Dimension cognitive
Comprhension
Rflexion
Dcision
Dimension sociale / relationnelle
Collaboration
Autonomie
Conflit
Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012 - 21 -
01020304050607080
Dimension cognitive
comprhension collective
Dimension cognitive reflexion
collective
Dimension cognitive dcision
collective
Dimension sociale /relationnelle collaboration
Dimension sociale /relationnelle
conflits
Dimension sociale /relationnelle Autonomie
Equipe de formateurs
2.2.4 Les limites de ltude
Notre objet de recherche tant de nature qualitative, les rsultats de lenqute ne nous
permettent pas la gnralisation statistique des donnes. Cependant, leurs portes
admettent une orientation et nous permettront de formuler des pistes de rflexion et de
prconisations dans le cadre de la mise en place dune dmarche qualit lors de notre
future fonction.
2.3 Le regard des acteurs
2.3.1 Une approche quantitative des donnes
La retranscription et ltude des entretiens ont permis de mettre en vidence 272 units
de sens releves partir des discours des formateurs et 122 issues des entretiens auprs
des directeurs des soins Ces chiffres ont servit de base de calcul lapproche quantitative
des rsultats afin dobtenir une reprsentation graphique des donnes. Nous avons
cherch dterminer la proportion que reprsente chaque composante de lIC pour
chaque population enqute, puis nous les avons compares.
A) Lenqute ralise auprs des formateurs
Fig. 1 : Les diffrentes
dimensions de lIC et leurs
composantes exprimes
par lensemble des
formateurs sont
reprsentes en fonction
de leur prgnance dans les
discours.
Les formateurs se sont exprims quant lutilisation de la DQ dans leurs pratiques au
quotidien. La premire observation que nous pouvons faire est le classement des valeurs
exprimes par les formateurs. Comprhension collective (27,2%), rflexion collective
(25%), collaboration (18%), autonomie (14,5%), conflit (10,2%) et dcision collective
(5,1%).
Nous remarquons que la dimension cognitive est la variable dominante mais
uniquement au travers de deux de ses composantes que sont la comprhension collective
et la rflexion collective. La rpartition dtaille se fait ainsi: pour 5/8 des formateurs, la
comprhension collective arrive en premire place et pour 3/8 en deuxime. Pour 4/8 des
- 22 - Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012
0
10
20
30
40
Dimension cognitive comprhension
collective
Dimension cognitive reflexion collective
Dimension cognitive dcision collective
Dimension sociale /relationnelle collaboration
Dimension sociale /relationnelle
conflits
Dimension sociale /relationnelle Autonomie
Directeurs d'Instituts de Formation
formateurs, cest la rflexion collective qui est priorise. La notion de dcision collective
se dmarque trs largement avec une reprsentation trs faible dans les discours, pour
6/8 des formateurs, cest la variable la moins reprsente. Concernant la dimension
sociale et relationnelle, cest la collaboration entre les membres de lquipe qui est mise
en avant, devant lautonomie et la notion de conflit. Nous nous intressons la porte
collective de la DQ sur une quipe de formateurs, cest pourquoi les rsultats ont t
interprts dans leur globalit. Cependant, il semble intressant de prciser que parmi les
formateurs, nous avons pu relever des profils individuels plus marqus en regard dune
dimension ou dune autre sans toutefois quil y ait une relle opposition dans leur
positionnements.
Devant ces rsultats, nous nous sommes interrogs quant au niveau de ressenti du
formateur. Sa participation ou non la mise en place de la dmarche qualit peut elle
influer sur ses attentes ? Pour cela, nous avons raliss deux chantillons de population :
les formateurs prsents la cration de la DQ et les formateurs ayant intgr lIFSI alors
que la DQ tait dj oprationnelle, puis nous avons compar les donnes. Le rsultat
montre que cette variable nimpacte pas de manire gnrale lapprciation du formateur
quant la DQ50. Nous tenons notifier que si les donnes sont trs ressemblantes , elles
ne permettent pas dinclure le niveau dimplication personnelle des formateurs qui est plus
nettement plus marqu chez les formateurs lorigine de la dmarche du fait de
linvestissement et de la charge de travail qui leur a t ncessaire daccomplir et quils ne
manquent pas de relater dans leur discours : a t un travail monstrueux,
titanesque...le plus gros du travail a t de sapproprier toute la norme et de la mettre la
norme de lIFSI
B) Lenqute concernant les directeurs
Fig. 3 : Les diffrentes
composantes de lIC issues
des entretiens avec les
directeurs dinstitut de
formation
Chaque directeur sest exprim en regard de la mise en uvre dune DQ dans leur
institut et des enjeux pour les membres de leur quipe pdagogique. Les composantes de
50
Annexe 5 : Donnes comparatives entre les formateurs selon lavance de la DQ leur entre lIFSI.
Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012 - 23 -
0
10
20
30
40
50
60
70
80
Dimension cognitive comprhension
collective
Dimension cognitive reflexion collective
Dimension cognitive dcision collective
Dimension sociale /relationnelle collaboration
Dimension sociale /relationnelle
conflits
Dimension sociale /relationnelle Autonomie
formateurs
Directeurs
lIC qui prdominent de leurs discours sont la rflexion collective (31,2%), la collaboration
(26,2%) et la comprhension (19,7%). Deux directeurs sur quatre priorisent la rflexion
collective, les deux autres la considrent comme la deuxime valeur quils recherchent
aprs la notion de collaboration. Ces donnes peuvent sexpliquer par la proccupation
des directeurs favoriser ladhsion des formateurs au projet et leur dsir de le voir
aboutir. Nous notons une reprsentation plus significative de la part de la dcision
collective (10,6%) dans les interactions. Les valeurs les moins sollicites sont le conflit
(4,9%).et lautonomie (7,4%).
C) Des caractristiques similaires mais des dclinaisons diffrentes
Fig. 4 : Mise en perspective
des rsultats obtenus sur
lensemble des personnes
enqutes.
Si nous comparons la reprsentation des diffrentes dimensions de lIC entre les deux
groupes, nous remarquons une similitude du graphisme. Nous notons une dimension
cognitive valorise dans les deux groupes. Elle reprsente 57,3 % des rsultats du
groupe formateur et est reprsente hauteur de 61,4 % dans le discours des directeurs.
Au sein de cette dimension, une composante est trs faiblement reprsente dans les
deux populations, il sagit de la dcision collective. Concernant la dimension sociale et
relationnelle, nous soulignons lmergence de la collaboration et la sous reprsentativit
du conflit dans les interactions. Cependant, la nature du discours, si elle concerne une
mme dimension, peut revtir des regards et des approches diffrents. Cest ce que nous
nous proposons dtudier par lanalyse qualitative des diffrents entretiens.
2.3.2 Un processus cognitif de reprsentations et de partages
A) Des interactions constructives qui se forment au sein de lquipe
Au sein de lquipe de formateur, il nous semble que la DQ a permis de dvelopper un
tat desprit spcifique ce groupe, en favorisant la possibilit de partage dexpriences
et de connaissances. Certains formateurs disent avoir acquis une culture commune :
- 24 - Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012
llan, on la,...le dynamisme on la,cest tous les formateurs.qui ont cette culture
l. La notion de culture qualit est aborde par lensemble des directeurs comme un
postulat la mise en place de la DQ : Avant de faire un choix de rfrentiel qualit, je
prfre travailler sur lappropriation dune culture qualit . Ils sont unanimes pour affirmer
que la notion de qualit est encore peu dveloppe en institut de formation et que cela
pourrait constituer un frein lapplication de cette dmarche : on a aussi sur linstitut,
une quipe qui a un pass assez important pour beaucoup en institut, donc des habitudes
lourdes et nayant pas du tout vcu laccrditation encore moins la certification des
tablissements de sant, donc aucune culture qualit, de partage de leurs
productions. Nous identifions l, un aspect de lIC qui est la ncessit dacqurir un
environnement cognitif mutuel, un modle mental partag, favorisant lintercomprhension
au sein du groupe.
Afin de mettre en place cette DQ, les formateurs ont accept de travailler ensemble sur
des outils communs et dchanger sur leurs habitudes de travail : chacun dentre nous
avait des outils de travail qui lui taient propres et quil ne partageait pas avec les autres,
on avait une multiplicit de documents; mais ctait affreux, donc du coup il a fallu faire le
tri de ce que lon gardait, de ce que lon quon jetait, il a fallu harmoniser nos pratiques.
Les formateurs reconnaissent que la DQ leur permet davoir des outils communs, des
outils quils ont construits ensemble partir de leurs connaissances et de leurs
expriences diverses et que cela leur permet de mieux travailler ensemble : la
dmarche qualit, pour moi, cest les outils, une organisation en place, je men serson a
du crer des outils communs. Cette organisation facilite la coordination des activits
au sein de lorganisation : Avant la qualit, ce ntait pas simple; parce que franchement
il y avait plein de choses que si on ne te les disait pas, tu ne pouvais pas le deviner...alors
tu tais la pche en permanence. Nous constatons que pour le collectif, il est
important de se crer une rfrence commune, des outils communs comme fondement
leur coopration. Cest ce que Grard GUINGOUAIN pose comme un des postulats dun
collectif intelligent : La volont de travailler et russir ensemble 51. Pour les directeurs,
llaboration doutils communs reprsente une tape de la DQ qui nest pas toujours bien
vcue et qui peut crer des rsistances au sein de lquipe : ...il a fallu initier les
documents partags.et cest l, en fait, que jai eu le plus de rsistances de la part de
certains formateurs et qui perdurent toujourstrs compliqu pour quun autre collgue
ait un regard sur la production dun formateur. Un directeur nous confie quil a d
stopper la production de documents qui se rvlait contre productive par rapport
lappropriation de la dmarche : ...au dpart, il y eu une sorte deuphorie en lien avec la
51
GOSSELIN P, GUINGOUAIN G, Une perspective psychosociologique de lvaluation, cours EHESP, 27 avril 2012.
Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012 - 25 -
DQ ou chacun sest lanc dans la production de documents, et puis aprs il y a eu
comme un dcouragement parce que srement quil y avait trop de documents et puis les
quipes nont pas trop vu ou on allait avec ces productions l. Il lui a sembl primordial
que lquipe trouve un intrt cette production qui reprsentait une somme importante
de travail : pour que les quipes sy retrouvent, il faut quelles voient lapplication de la
dmarche sinon elles ne voient que la production de documents. Les directeurs
insistent sur la ncessit de rguler la production de documents et de procdures que
rclament certaines DQ, notamment celles qui donnent lieu certification : On a mis
des procdures sur ce qui nous semblait des lments cls, on a harmonis les
procdures existantes. Le directeur de lIFSI certifi AFNOR ISO 9001 a reconnu une
certaine prudence quant la spcificit des procdures : il faut que les documents
soient adapts et pas adaptables car ils ne le sont jamais vraiment.
Les runions dquipe ou temps de travail sont prsents comme des espaces
collaboratifs propices la confrontation dides, de reprsentations : si vraiment le
cadre nous va pas, on peut le faire volueril suffit daller en runion pdagogique et de
dire moi je ne suis pas daccord avec a... et la limite, on a le droit de parole; si on a des
arguments, on est entendu. Ils favorisent un langage partag : On ne peut pas faire
ce que lon veut parce quon nest pas tout seul fonctionner, on fait partie dun groupe
le groupe a ses codes, la reconnaissance dun rfrentiel commun, le partages de
connaissances. Ces espaces sont perus comme des lieux permettant aux formateurs de
questionner leurs pratiques, de confronter leurs ides : chaque fois quon saperoit
quil y a quelque chose qui serait modifiable au niveau de la qualit, on se met tous
dedans, on sy met volontiers...on en parle, on modifie les choses... de proposer des
rajustements: Cest une faon de fonctionner, cest des outils chaque fois quon est
confronts des limites, on va proposer des rajustements . Un seul formateur
mentionne clairement llaboration dobjectifs communs au sein de lquipe : a
contraint mais cela nous permets surtout davoir des objectifs communs ... Un directeur
prcise que ces interactions sont ncessaires lefficacit de cette dmarche : dans
une DQ, ce quil faut, cest quil y ai une connaissance, une mutualisation, un partage et
un lien, un rajustement dans les activits pdagogiques pour quil y ait une meilleure
qualit et une progression.. . Pour un seul des formateurs, ce nest pas tout fait
satisfaisant : je trouve quon fait beaucoup trop de qualit au dtriment de la
pdagogie.. .
B) Le partage des savoirs et la construction dune mmoire collective
Tous les formateurs soulignent limportance de pouvoir mettre en commun leurs
rflexions. Quelles soient en lien avec lorganisation : la qualit permet de temps en
- 26 - Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012
temps de se reposer des questions sur notre fonctionnement organisationnel... cest dire,
on fait cela, pourquoi on le fait ? est-ce que cest encore utile ? ou quelles concernent
leurs pratiques pdagogiques quotidiennes : on a la possibilit de rflexion et damener
chacune nos rflexions dans la pdagogie, la DQ est l pour que lon construise un projet
mais qui soit. ; qui rentre dans cette dmarche, un souci de qualit de lenseignement
...on na pas de souci pour amener des thmes de travail . Nous relevons dans les
discours que les changes permettent dinterroger les activits et les savoirs
pdagogiques et quils sont loccasion dune rencontre et dune mise en lien de la
dmarche qualit avec la dmarche pdagogique. Pour les directeurs cela peut tre un
levier possible lacceptation de la DQ : ...faire le lien avec le rfrentiel de la formation,
la comptence 7, danalyser la qualit des soins et damliorer sa pratique
professionnelle, je dirai lancrage direct dans la culture de la qualit .quelque part cest
un moyen dembarquer les formateurs et lquipe . Un directeur souligne que le lien
avec la pdagogie est incontournable pour favoriser ladhsion de lquipe : ... tout ce
qui est ISO, moi a ne me convient pas du tout parce que je pense que la DQ pour que
les formateurs adhrent, il faut que ca passe par la pdagogie, or dans la dmarche ISO,
il ny a rien sur la pdagogie.. . Dautres, ont mis en exergue le ncessaire ancrage de la
DQ dans le projet de linstitut : un des axes majeurs du projet dinstitut est : mettre en
uvre une dynamique qualit dans linstitut a pose le cadre de lensemble du projet .
Ces temps de rflexion ou groupe de travail sont galement dcrits comme des lieux
de confrontation dexpriences et dlaboration de savoirs au service du collectif, pour agir
ensemble : Amener lquipe justement reformuler les choses, revoir ses pratiques,
et mme en crer de nouvelles...avec la rflexion qui va avec.. . Certains formateurs
trouvent que ces temps sont parfois tendus : la rflexion sur les pratiques
pdagogiques, ce nest pas quelque chose de facile...cest peut tre pas
maitrisable... mais cela permet de partager nos points de vue et nos pratiques.. En
mme temps, ces moments sont reconnus comme indispensables la cohrence du
groupe : On se rencontre sur des questions, comment vous faites ? on reprend un
projet, quelles sont les choses reproduire ou viter... on est bien sur une pratique
professionnelle pas dune personne mais dun groupe en fin de compte... ; Nous avons
vu que pour Franoise DUPUICH- RABASSE Il y a intelligence collective lorsque lon
observe lutilisation collective, au sein dune entreprise, dinformations parses dtenues
par diffrents individus au travail . Lchange et la capitalisation des savoirs et savoirs
faire prend progressivement la forme d'une mmoire collective, dans le sens o elle
permet au collectif dafficher et de faire perdurer ses pratiques au gr des mouvements
pouvant intervenir dans lquipe :: Quand nos collgues arrivent, cest plus facile pour
elles , dans lintgration ,cest quand mme mieux cest galement ressenti au niveau
Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012 - 27 -
dun directeur : les nouveaux formateurs sont plus adhrents , parce que ils sont
imprgns du choix du collectif ..
C) Une prise de dcision implicite
La prise de dcision napparait pas en tant que telle dans le discours des formateurs.
Cest comme si le processus dcisionnel se confondait dans lensemble de la dmarche
comme une recherche perptuelle de consensus suffisant arrter le positionnement de
chacun et laissant supposer une prise de dcision collective. Le comit de lecture...a
nous permet de confronter nos points de vue sur les valuations et de finir par se mettre
daccord, de crer une feuille de route pour que tous les formateurs sy retrouvent.. .
Cependant, lors de notre immersion au sein de cette quipe, nous avons t tmoin de
prises de position amenant discuter de lopportunit de nouveaux outils ou de validation
de procdures et donnant lieu une dcision formalise et acte par la directrice dans le
cadre de la procdure de la DQ. La prise de dcision na pas t formule telle quelle
mais plutt sous entendu comme le rsultat dun consensus qui reflterai la confrontation
des ides et avis exprims par le groupe. Or si nous reprenons quelques expressions de
formateurs, la notion de consensus nous semble incertaine : On nest pas daccord sur
le sujet, en ce moment tu ne peux plus te permettre de ... si tu parles ca va tre
compliqu...il vaut mieux faire comme tout le monde et dire oui.. , et le fondement de la
dcision discutable : Tu fais un choix pour tre tranquille, tu ne veux plus te heurter
tes collgues...donc tu laisses aller Nous observons dans ces discours, un des effets
pervers dcrit par C MOREL, la pense de groupe qui fait que parfois les personnes
prfrent taire leurs rticences plutt que de rompre lentente du collectif.
Nous nous interrogeons sur le rle de la direction dans la prise de dcision ou en tout
cas sur lexpression de cette dcision. Nous avons vu quil importe peu que la dcision
soit prise par une seule personne ds linstant quelle a t co-construite partir des
apports et des points de vus de chaque membre du groupe. Cependant, une dcision
manant du groupe peut tre une condition favorable son acceptation et son
observance : dans le systme qualit, a t dcid en groupe.. . Cela nous amne
nous interroger dune manire plus gnrale sur le positionnement de la direction dans
la DQ.
Pour les formateurs, il ne fait pas de doute que la direction est implique dans la DQ:
La direction doit tre dans la dmarche qualit ,elle doit tre implique parce que cest
quelque chose qui se fait dans un tablissement dont la personne est responsable et en
fin de compte elle a un autre regard .ce nest pas un regard de formateur ,cest pas le
regard de rfrent ,mais cest le regard de la direction et je pense que tous ces regards
font que justement cette dmarche est le plus adapte possible .. . Elle est perue
- 28 - Monique BUNET - Mmoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Sant Publique - 2012
comme un lment de rgulation voir dautorit : on a lautonomie pour tout sujet qui
nous intresse...on a toute autonomie, bien sr avec laval de la directrice ... . La
direction est souvent linitiative du projet : les formateurs nimaginaient pas ce que
pouvait tre une DQ en institut...jai commenc par en parler individuellement lors des
entretiens dvaluation, a les a intress par curiosit, sans squeezer la rflexion sur les
atouts et les contraintes .Ses proccupations dpassent quelque fois celles de lquipe :
Il ne faut pas oublier que tout ce qui est procdure, a nous permet de nous protger
contre des recours ventuels .je pense notamment toute la procdure concours ....
Lquipe de formateur na pas fait mention de relations hirarchiques ou dexercice de
pouvoir dans son mode de fonctionnement interne.