22
LA GRANDE ARMÉE DE LA LIBERTÉ WALTER BRUYÈRE-OSTELLS

La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

  • Upload
    others

  • View
    1

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Automne 1815, Napoléon est exilé à Sainte-Hélène. LaRestauration tente alors de balayer l’héritage de 1789. Symbole del’Empire, la Grande Armée est dissoute. Proscrits par le nouveaurégime, plusieurs milliers d’officiers, vétérans des guerres napoléo-niennes, désirent toujours défendre la liberté des peuples et desnations.

Parfois sans le sou, souvent sans avenir et attachés aux idéauxrévolutionnaires, ils sont avides d’aventure et rêvent de gloire pouroublier l’Europe des rois. Professionnels de la guerre, ils vont alorsproposer leurs services en Amérique du Sud, rejoindre l’Espagne ouconduire le peuple lors des journées révolutionnaires de 1830.

Leur engagement politique frise parfois l’esprit de sacrifice. Ilsacceptent de nouveaux risques : l’exil, la prison, voire la mort. Car laSainte-Alliance (Autriche, Prusse, Russie) écrase les foyers libérauxet pourchasse ces officiers, sans répit. Craints pour leur ardeur aucombat, leurs rôles au sein des sociétés secrètes et leurs convictionspolitiques, ils incarnent l’éventail de la gauche politique du XIXe siècle : libéraux, bonapartistes ou orléanistes, républicains modérés ou radicaux.

La Grande Armée est ainsi le creuset de générations d’officierspour lesquels le combat au nom de l’idéal de liberté n’est pas un vain mot. Walter Bruyère-Ostells narre leurs parcours, de Naplesà Buenos Aires, offrant enfin une histoire vivante, pleinement incarnée, des mouvements révolutionnaires du premier XIXe siècle.

Agrégé, Walter Bruyère-Ostells est l’auteur d’une thèse remarquéesur les officiers de la Grande Armée dans les mouvements nationauxet libéraux. Il a publié Napoléon III et le second Empire (Vuibert,2004).

Préface de Jacques-Olivier Boudon.

9 7 8 2 8 4 7 3 4 4 0 3 5

www.tallandier.comEn couverture : Les Trois Glorieuses, 27-29 juillet 1830, peinturede Jean-Victor Schnetz (1787-1870) © Akg-images / Erich Lessing Graphisme Aurélia Lombard-Martin.

ISBN : 978-2-84734-403-5 / Imprimé en France 04.2009 25€

WA

LTE

R

BR

UY

ÈR

E-

OS

TELL

SLA

GRA

NDE

ARM

ÉE D

E LA

LIBE

RTÉ

Chez le même éditeur :

LA GRANDE ARMÉEDE LA LIBERTÉ

W A L T E R B R U Y È R E - O S T E L L S

LA GRANDE ARMÉEDE LA LIBERTÉ

W A L T E R B R U Y È R E - O S T E L L S

exe•Napole?on-crg:exe 23/03/09 11:53 Page 1

Page 2: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 2/336

Page 3: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 3/336

LA GRANDE ARMÉE DE LA LIBERTÉ

Page 4: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 4/336

Page 5: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 5/336

WALTER BRUYÈRE-OSTELLS

LA GRANDE ARMÉEDE LA LIBERTÉ

Préface de Jacques-Olivier Boudon

TALLANDIER

Page 6: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 6/336

© Éditions Tallandier, 20092, rue Rotrou – 75006 Paris

www.tallandier.com

Page 7: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 7/336

SOMMAIRE

PRÉFACE, par Jacques-Olivier Boudon 9INTRODUCTION 15

PREMIÈRE PARTIE

À L’AVENTURE, POUR LA GLOIRE ET LA FORTUNE

Chapitre premierLA NOSTALGIE DE L’EMPIRE 23

Chapitre IIUN NOUVEAU CHAMP DE BATAILLE, L’AMÉRIQUE LATINE 39

Chapitre IIINOUVEAU MONDE, NOUVELLES CARRIÈRES 55

DEUXIÈME PARTIE

AU SECOURS DES PEUPLES OPPRIMÉS

Chapitre IVSAUVER L’ESPAGNE LIBÉRALE 81

Chapitre VLA GRÈCE, REFUGE DES LIBÉRAUX POURCHASSÉS 109

Chapitre VIPREMIER TRIOMPHE DES NATIONALITÉS 127

Chapitre VIIUN ARCHIPEL LIBÉRAL? 143

Page 8: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 8/336

TROISIÈME PARTIE

LA NATION AU BOUT DU SABRE

Chapitre VIIILA SOUFRIÈRE ITALIENNE 161

Chapitre IXLES FRACTURES SECRÈTES DE LA PÉNINSULE 189

Chapitre XDES CHEFS POUR LE PEUPLE RÉVOLUTIONNAIRE 207

Chapitre XILA RÉVOLUTION S’EXPORTE EN BELGIQUE 231

Chapitre XIILE RÊVE POLONAIS 243

Chapitre XIIILA LIBERTÉ ÉTOUFFÉE EN ITALIE 255

Chapitre XIVULTIMES CAMPAGNES 269

CONCLUSION 279

NOTES 287BIBLIOGRAPHIE 326TABLE DES CARTES 330INDEX DES NOMS 331

Page 9: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 9/336

PRÉFACE

Le livre que propose aujourd’hui Walter Bruyère-Ostells s’ins-crit dans le renouveau des études sur le premier XIXe siècle, enparticulier dans le domaine de l’histoire sociale du fait militaire.Après Natalie Petiteau s’intéressant aux vétérans de la GrandeArmée, avant Stéphane Calvet s’interrogeant sur le devenir desofficiers charentais après 1815, Walter Bruyère-Ostells pose laquestion essentielle de la reconversion des dizaines de milliersd’officiers ayant participé à l’épopée napoléonienne entre 1800et 1815. À l’origine de cette recherche, figuraient quelques intui-tions liées à la découverte de parcours individuels laissant penserque certains de ces officiers avaient joué un rôle dans les mouve-ments révolutionnaires qui ont suivi la chute de Napoléon, malgrél’intention affichée par les négociateurs du Congrès de Vienned’empêcher le retour de la Révolution en Europe. L’auteur apatiemment scruté, dans les archives, les dossiers des officiers dela Grande Armée tant en France qu’à l’étranger et a pu ainsidresser la liste de plus de 330 officiers engagés dans des mou-vements révolutionnaires après 1815 : 139 Italiens, 119 Français,40 Polonais, 24 Belges, 3 Allemands, 2 Grecs, 1 Espagnol, 1 Portu-gais et 1 Anglais. Cette identification est déjà en soi une perfor-mance ; elle fait sortir de l’ombre bien des figures oubliées à côtédes généraux Pepe, Lallemand ou Vaudoncourt qui étaient bienconnus.

On suit pas à pas ces personnages d’abord à travers les révolu-tions américaines, notamment aux côtés de Bolívar, héros de l’indé-pendance de l’Amérique latine, mais aussi dans les projets suscitésaux États-Unis, par exemple au Champ d’Asile, pour faire revivre lesouvenir de Napoléon. On passe ensuite en Europe où la révolutionnapolitaine de 1820-1821 mobilise certains de ces officiers d’autantmieux que le souvenir de Murat, propagateur de l’idée de l’unité

Page 10: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 10/336

italienne, est encore prégnant, au point que sa femme Caroline estalors interdite de séjour en Italie. Puis l’on passe avec eux dans lePiémont, où les esprits s’échauffent à leur tour à la suite de larévolution napolitaine, et enfin en Espagne où les anciens officiersde la Grande Armée jouent un rôle essentiel aux côtés des libérauxpartisans de la constitution de Cadix de 1812, entraînant du restedans leur sillage de plus jeunes militaires, à l’image d’ArmandCarrel ; ces officiers européens engagés en Espagne préfigurent lesbrigades internationales. L’étude montre bien au passage le lienentre ces divers mouvements révolutionnaires. On connaissait lesinfluences réciproques entre Naples et Madrid, autour du débatconstitutionnel. On voit apparaître à travers l’itinéraire de certainsofficiers passés de Naples en Espagne, à l’image du général Pepelui-même, la constitution de réseaux humains dans le prolongementdu mouvement révolutionnaire au sud de l’Europe. L’engagementdans la guerre d’indépendance de la Grèce est ensuite analysé,autour de la figure de Fabvier, de même qu’il est perçu à traversles réseaux de philhellènes à travers l’Europe. Dans tous ces lieux,les officiers de la Grande Armée servent à la fois de forces d’enca-drement pour les troupes réunies sur place, mais ils jouent aussi unrôle dans la construction d’une idéologie nationalitaire. Il ne fautpas non plus oublier que ces hommes sont souvent des profession-nels de la guerre qui ne savent pas faire autre chose et se trans-forment donc en mercenaires. Toutefois, il ne faut pas majorer leurimportance sur le plan numérique. En Espagne, en Grèce et enAmérique latine, leur participation est faible ; elle est un peu plusforte en Italie. On notera enfin, au cours de cette première décen-nie, l’absence complète de l’espace germanique, pourtant lui aussiparcouru de mouvements libéraux, ce que confirme la faiblesse desofficiers d’origine allemande dans l’échantillon constitué. On peuts’interroger sur cette absence qui semblerait confirmer un rejet plusnet de la période napoléonienne et à l’inverse un lien plus fort entreles opposants à Napoléon et les libéraux des années 1817 et sui-vantes. L’étude de la révolution de 1830 et de la part prise par lesanciens officiers napoléoniens est d’une autre nature ; l’analyse desrévolutions de France, de Belgique et de Pologne est de ce point devue très significative, car les officiers de la Grande Armée y ont uneplace non négligeable. Ils organisent les combats, mais finalementprennent une faible part à la solution politique de la crise en France

LA GRANDE ARMÉE DE LA LIBERTÉ10

Page 11: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 11/336

et en Belgique, où la révolution est victorieuse ; ils sont plus actifssur le plan politique en Pologne, où la révolution échoue.

Mais qui sont ces officiers ? Sont-ils représentatifs de l’ensemblede ceux qui ont servi dans la Grande Armée ? Questions aux-quelles Walter Bruyère-Ostells répond au fil des pages, en mettanten avant quatre générations successives parmi ces hommes, celledes officiers nés autour de 1769 (41) – ils ont vingt ans en 1789et ont connu pour la plupart toutes les guerres de la Révolutionet de l’Empire – ; la génération suivante, celle de 1779, quicomprend 66 officiers, est intermédiaire ; celle de 1789 est compo-sée de 173 officiers qui entrent dans l’armée essentiellement sousl’Empire, enfin la génération des Marie-Louise, est marquée par ladéfaite (ils sont 31). Ce sont pour l’essentiel des représentants dela bourgeoisie, mais surtout de la noblesse, ou plutôt des noblesses,française mais aussi étrangères, italienne notamment. La plupart deces officiers sont sortis du rang, conformément à la moyenne desofficiers français de la Grande Armée. Près d’un sur cinq a appar-tenu à la Garde, mais dans l’ensemble ils ont eu sous l’Empire descarrières ordinaires. Beaucoup sont décorés de la Légion d’hon-neur. Proportionnellement en revanche, les armes d’élite dominent(artillerie et cavalerie). Mais souvent ils subissent une déception àl’époque de la Restauration. Ils ne sont pas conservés dans l’armée(67,8% sont placés en demi-solde, 83,1% pour les seuls officiersfrançais) ou bien leur grade n’est pas reconnu, d’où une frustrationqui peut conduire à un engagement à l’étranger. Walter Bruyère-Ostells remet à juste raison en cause l’idée selon laquelle tous lesofficiers de la Grande Armée hostiles à la monarchie restauréeseraient bonapartistes. La plupart se caractérisent surtout par leurattachement aux idéaux de 1789 et oscillent donc entre libéralisme,républicanisme et bonapartisme. Ce sont des patriotes au sens quel’on donne alors à ce terme. De ce fait il ne faut pas majorer leurattachement à la cause de Napoléon II, ce qui peut expliquer leurrelative discrétion sur ce point en 1830, la solution libérale finale-ment adoptée, avec l’adoption d’une monarchie constitutionnelleen France comme en Belgique, leur convenant assez bien. En Italieen revanche, ils contribuent à la formation d’une idéologie plusradicale, qui participe du mouvement de Risorgimento.

L’auteur souligne aussi l’importance des réseaux ayant contribuéà leurs engagements, à travers les liens régimentaires noués dans la

PRÉFACE 11

Page 12: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 12/336

Grande Armée, puis surtout à travers les complots des premièresannées de la Restauration. L’organisation de véritables agences derecrutement n’est pas l’aspect le moins intéressant de cette analyse.Les pages consacrées à la manière dont Bolivar recrute à partir deLondres des officiers de l’armée de Napoléon sont à cet égard trèssuggestives. On notera aussi l’importance des lieux : Marseille, portd’embarquement vers la Grèce, Genève, plaque tournante du libé-ralisme européen, Paris, siège de plusieurs comités patriotiques.Mais c’est évidemment la franc-maçonnerie qui paraît être lecommun dénominateur à tous ces hommes. On connaissait bien,depuis les travaux de Jean-Luc Quoy-Bodin, l’influence de lafranc-maçonnerie dans l’armée de la Révolution et de l’Empire. Celivre confirme sa forte imprégnation chez les officiers engagés dansles mouvements révolutionnaires au début du XIXe siècle. Elle est lecreuset de ces engagements. On en retrouve l’influence particuliè-rement à Naples, mais aussi en Piémont et en Espagne. Le lienentre loges et sociétés secrètes est bien mis en valeur (Philadelphes,réseaux de Buonarotti). À travers la participation de ces officiersaux divers complots développés notamment en France, c’est à unerelecture du poids des anciens militaires dans ces tentatives derenversement du pouvoir monarchique qui est ainsi proposée. Ilsjouent aussi un rôle essentiel dans la charbonnerie italienne maisaussi française. Les liens s’entrecroisent donc pour constituer dansl’Europe du temps une internationale patriote et libérale, dont lesofficiers sont une des matrices essentielles.

Walter Bruyère-Ostells montre en effet fort bien comment l’ana-lyse d’une révolution atlantique décrite jadis par Godechot etPalmer, reprise il y a peu par Annie Jourdan, s’appuie non seule-ment sur un fondement idéologique commun, mais aussi sur unréseau d’hommes. La Grande Armée et avant elle l’armée de laRévolution a servi de creuset. Elle a accueilli une génération dejeunes gens pour lesquels le combat au nom d’un idéal n’est pas unvain mot. Certes, parmi eux, se dissimulent des professionnels de laguerre, mais dans l’ensemble c’est bien un idéal libéral, voire répu-blicain, plutôt d’ailleurs que bonapartiste, alimenté par la fréquen-tation des loges et sociétés secrètes, qui les pousse à rester dansl’action. L’étude s’achève au début des années 1830. Ensuite lesrangs de ces officiers se clairsèment. Pourtant tous n’ont pas ditleur dernier mot, à l’image du commandant Parquin, cher à Jacques

LA GRANDE ARMÉE DE LA LIBERTÉ12

Page 13: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 13/336

Jourquin, engagé dans les putschs de Louis Napoléon Bonaparte etqui meurt en prison sans avoir vu la restauration de l’Empire pourlaquelle il s’était battu. Les parcours évoqués sont d’une très granderichesse. Ils offrent une histoire vivante, pleinement incarnée, desmouvements révolutionnaires du premier tiers du XIXe siècle qu’onne pourra désormais plus aborder sans avoir recours à ce livre.

Jacques-Olivier BoudonProfesseur à l’université Paris-Sorbonne

Président de l’Institut Napoléon

PRÉFACE 13

Page 14: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 14/336

Page 15: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 15/336

INTRODUCTION

Le général Pepe, chef de la révolution napolitaine en 1820 ; lescolonels Ansaldi et Regis, meneurs de l’insurrection en Piémont ;le colonel Fabvier, héros de l’indépendance grecque ; le généralChlopicki, dictateur de la Pologne soulevée contre l’autorité russeen 1830 ; le colonel Sercognani, marchant sur la Rome pontificaleen 1831, le général Lallemand, trublion sur la frontière mexicaineou encore le général Brayer, chef d’état-major de San Martín : cesnoms sont évoqués dans tous les manuels d’histoire de la premièremoitié du XIXe siècle. Pourtant, une ligne, au mieux, résume leuraction. Derrière ces noms glorieux, aujourd’hui épars et presquetombés dans un total anonymat, se cachent des hommes non rési-gnés face aux régimes conservateurs qui succèdent à l’Empirenapoléonien après 1815. Leur engagement politique frise parfoisl’esprit de sacrifice. Ils vivent comme des rebelles, des aventuriers.Derrière leurs grades d’officiers se devinent surtout de longuescarrières débutées sous la Révolution ou la période napoléonienne.En effet, les chefs des mouvements nationaux et libéraux sont desvétérans de la Grande Armée. Certains ont déjà une longue car-rière emplie de faits d’armes brillants. Ils acceptent pourtant denouveaux risques : l’exil, la prison, voire la mort.

Un vaste champ de bataille

Après Waterloo, le Vieux et le Nouveau Monde se réorganisentautour des principes de légitimité, d’ordre social et religieux.Après la secousse de la Révolution française, les idées nouvelles nes’éteignent cependant pas. Les monarchies intègrent, à des degrésdivers, les idéaux nationaux et libéraux. En France, Louis XVIIIoctroie une Charte, garantie de nombreux acquis révolutionnaires.La Pologne de 1815 devient un royaume à part entière, liée à la

Page 16: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 16/336

Russie par une simple union unilatérale. Les monarchies réaction-naires construisent cependant la Sainte-Alliance tandis que lesoppositions voudraient une «Alliance des peuples ». Celle-cin’aboutira qu’en 1848. Dans ce laps de temps, le combat pour lescauses nationales et libérales enflamme régulièrement le dispositifdiplomatique et militaire de la Sainte-Alliance, lors des révolutionsde l’Europe du Sud de 1820 à 1823, de la guerre d’indépendancegrecque à partir de 1821 puis du soubresaut insurrectionnel, surtout le continent, en 1830-1831. L’ambition libérale a même étépropagée en Amérique latine, cabrée contre les colonisateurs. Enrevanche, l’Allemagne fait exception. Les idées unitaires se déve-loppent d’abord dans les milieux étudiants (les Burschenschaften)et touchent assez peu les militaires. Là, le mouvement se construitsur les théories nationalistes de Fichte, c’est-à-dire sur un « natio-nalisme du ressentiment » contre l’Empire.En dehors de l’Allemagne, le champ d’action des vétérans napo-

léoniens couvre tous les territoires sous influence française àl’époque impériale dans lesquels ont lieu des mouvements libérauxet/ou patriotiques : France, Italie, Espagne, Portugal, Belgique,Grèce1 et Pologne. Principal autre foyer de construction d’Étatsindépendants, l’Amérique du Sud accueille également des combat-tants issus de la Grande Armée. Dans ces poudrières européenneet sud-américaine, les anciens officiers de Napoléon, en activité ounon, estiment avoir un rôle à jouer. En effet, pour ces hommes, lamission qu’ils ont accomplie au sein des armées impériales a certesété de servir l’ambition de l’Empereur mais aussi de diffuser lesidéaux de la Révolution française.

C’est pourquoi, sous la Restauration, des officiers issus de laGrande Armée figurent parmi les protagonistes des révolutions etguerres d’indépendance. En 1830-1832, les combats sont, certes,en partie animés par la génération de Mazzini ou des frèresBonaparte (Napoléon Louis et Louis Napoléon présents enRomagne) mais l’encadrement est toujours assuré par des vétéransdes guerres d’Empire. Ensuite, les grands mouvements insurrec-tionnels se font hors du contrôle politique des anciens officiers deNapoléon. Ainsi, en 1848, aucune révolution ne porte au pouvoirun vétéran napoléonien. Émergent alors des chefs politiques issusdes « générations romantiques ». Dans la continuité de l’influenceimpériale, le meilleur exemple est d’ailleurs français : Louis Napo-

LA GRANDE ARMÉE DE LA LIBERTÉ16

Page 17: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 17/336

léon Bonaparte devient président de la République puis empereursous le nom de Napoléon III.

Contrairement à celle de 1848, la vague révolutionnaire de 1830est animée par les anciens officiers d’Empire. Entre ces deux évé-nements, quelle date symbolise le mieux le changement de généra-tion des chefs ? La campagne de 1833 au Portugal, qui met face àface libéraux et conservateurs, nous paraît un terme probant àl’engagement au premier plan de vétérans napoléoniens en Europe.Cette année-là, le libéral don Pedro place ses troupes sous lesordres du général Solignac, ancien du corps Junot au Portugal. Ilfait aussi appel à de nombreux autres anciens officiers de la GrandeArmée comme Suarce ou Ramorino. En 1834, ce dernier dirigeencore en Savoie des combattants pour l’unité italienne. Seulement,cette dernière expédition a été organisée par Giuseppe Mazzini.On peut donc voir dans cette conspiration le symbole du bascule-ment de l’initiative révolutionnaire vers la génération de 1848.Surtout, l’année 1834 ouvre une nouvelle ère d’activisme menéepar les futurs quarante-huitards (fondation de la Jeune Europe parle même Mazzini à Berne, agitation républicaine à Paris ou insur-rection de Lyon).

Des officiers en rupture ?

Entre 1815 et 1833, face à la nouvelle Europe politique, seul untrès petit nombre d’anciens officiers de la Grande Armée (quelquesmilliers au plus2) choisissent de se dresser contre le nouvel ordreinternational. Ces vétérans se mettent au ban de leur pays, ilsdoivent passer leur vie en exil. L’errance devient parfois leur quoti-dien. Maurice Persat parcourt l’Amérique du Sud, l’Espagne, l’Ita-lie et la Grèce avant de rentrer en France. À chaque étape, il prendpart aux combats. Les plus persécutés renoncent très vite à demeu-rer en Europe ; ils rejoignent l’Amérique latine dès 1816-1817 poury faire une nouvelle carrière. Pourtant, une grande motivation estnécessaire pour accepter de tels sacrifices. Elle s’explique par lanostalgie d’un passé fait de barouds glorieux, l’envie ou le besoinpécuniaire de poursuivre une carrière militaire malgré les licen-ciements. D’autres motifs encore peuvent être avancés : volontéde continuer la lutte contre les conservatismes royaux ou impé-riaux, désir de voir émerger des nations remises en cause par la

INTRODUCTION 17

Page 18: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 18/336

Sainte-Alliance. Sur ces idéaux, les historiens ont ensuite plaquédes courants politiques pas toujours bien définis, ni clairementidentifiés chronologiquement : bonapartisme, républicanisme, libé-ralisme, nationalisme, autant de termes presque galvaudés tant ilssont utilisés pour désigner les opposants de la première moitié duXIXe siècle. Très flous, ces concepts sont souvent compris dans desacceptions qui dépeignent en fait la seconde moitié du siècle. Fina-lement, la culture politique de ces hommes reste à éclairer. Lagauche politique fait bloc sous la Restauration et ne cherche pas àmettre en relief ses différents courants. Par ailleurs, les officiers nesont pas toujours capables d’expliquer rationnellement leurs choixpolitiques. C’est pourquoi l’étude de la révolution de 1830 estcruciale en France pour saisir les positionnements dynastiques(Orléans ou Bonaparte). On décrit traditionnellement les vétéransnapoléoniens comme bonapartistes. Ils se rallient pourtant majori-tairement à Louis-Philippe en 1830. Pour mieux appréhender cetteapparente incohérence, on peut s’appuyer sur les trajectoires devétérans européens de la Grande Armée. En effet, si ces hommessont de nationalités diverses, leur culture politique a, en partie, étéfaçonnée dans le même creuset, la Grande Armée.

La culture politique des hommes se forge toujours en fonction deleur vécu. Or, certaines générations d’officiers ont débuté sous laRévolution, d’autres sous l’Empire. Alors que ces hommes sontissus de zones géographiques et de milieux socioculturels différents,il est permis de penser que cette diversité a un impact sur leurculture politique. Effectivement, les affrontements personnels entrevétérans au moment des décisions politiques et militaires décisivessont frappants : antagonisme des généraux Pepe et Colleta à Naplesen 1821, entre officiers supérieurs polonais ou entre Sercognani etArmandi en Romagne en 1831. Quel rôle joue le dépit provoqué parle blocage des carrières, la position de demi-solde et le mépris pourle passé de la Grande Armée dans leur culture politique ? Si lesdifficultés économiques de certains anciens officiers les poussentvers des pratiques proches du mercenariat (Amérique du Sud,Grèce, Portugal), le besoin de s’expatrier est parfois beaucoup plusprosaïque (poursuite dans des affaires de mœurs, de dettes, deduels…).

Les filières d’engagement sont également au cœur de notreréflexion. En effet, l’enrôlement n’est que très rarement individuel.

LA GRANDE ARMÉE DE LA LIBERTÉ18

Page 19: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 19/336

Par exemple, dans la conspiration du 19 août 1820 en France, lerecrutement s’est fait au sein de la légion de la Seine. Devenusfuyards, les conspirateurs ont tendance à suivre les mêmes chemins.Desbordes et Delamotte passent ensemble en Belgique et com-battent tous deux en Espagne en 1823. Ainsi, les formes de socia-bilité, les contacts utilisés par les vétérans sont-ils essentiels pourcomprendre comment se préparent les insurrections, comment seforment les corps qui affrontent les armées de la Sainte-Alliance.Parfois recherchés par la police, ces officiers qui voyagent sur delongues distances doivent pouvoir compter sur des lieux d’étape.Leurs combats nécessitent également des sources de financementimportantes.

Dans ces mouvements, le rôle des sociétés secrètes est toujoursévoqué sans que les historiens soient d’accord sur la place à leuraccorder. La sociabilité maçonne était très ancrée au sein de laGrande Armée. Sert-elle de terreau idéologique aux insurrections ?Ses réseaux ont effectivement permis les contacts entre les libérauxdes différents pays au moment des révolutions. Malgré la réputationde neutralité politique de la franc-maçonnerie, certaines loges ontégalement encouragé le philhellénisme de leurs membres. L’engage-ment carbonariste a davantage été pris en compte par l’historio-graphie. Pour autant, il est souvent lié par les historiens aux seulesItalie et France. À travers l’action du général Pepe ou de La Fayette,on mesure pourtant que les ambitions de la société secrètedébordent le cadre de ces deux aires géographiques.

En fait, la plupart des travaux qui portent sur la période ontun cadre national. Embrasser un espace plus large permet doncde mesurer les liens entre les différents mouvements. À partir desannées 1950, Jacques Godechot a tenté de démontrer qu’une rela-tion devait être établie entre tous les mouvements révolutionnaires« atlantiques » de 1770 à 1815, voire à 1848. Ses contradicteursl’ont alors accusé de réduire le rôle de la Révolution française. Lacontroverse est aujourd’hui, sinon apaisée, du moins dépassionnée.Or, ces officiers napoléoniens ont bien l’impression et la volontéde s’inscrire dans un même mouvement qui embraserait l’Europeet l’Amérique contre les monarchies despotiques. Il faut s’interro-ger sur le lien entre les mouvements nationaux et libéraux de lapremière moitié du XIXe siècle et la période antérieure des révolu-tions atlantiques. Leur engagement doit aussi être pensé sur un

INTRODUCTION 19

Page 20: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 20/336

temps long qui court jusqu’à nos jours. Cette culture politiquefondée sur la nation et la démocratie libérale, qu’ils contribuent àdiffuser en Europe et en Amérique du Sud, ne continue-t-elle pasà s’étendre dans le reste du monde aujourd’hui à la demande desgrandes puissances européennes et nord-américaines ?

LA GRANDE ARMÉE DE LA LIBERTÉ20

Page 21: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 335/336

VIEL, Benjamin, 40, 49, 53, 55VILLANI, Camille, 201

W

WILSON, Sir Robert, 47, 94, 98, 106,150, 151, 152

WINNICKI, François, 250-252

Y

YPSILANTI, Dimitrius, 65, 110-113,125, 132

Z

ZUCCHI, Carlo, 257, 259-261, 265,266, 267

INDEX DES NOMS 335

Page 22: La grande armée de la liberté - Numilogexcerpts.numilog.com/books/9782847344035.pdf · la nation au bout du sabre chapitre viii la soufriÈre italienne 161 chapitre ix les fractures

Dossier : tallandier304686_3b2 Document : La_grande_armee_304686Date : 16/3/2009 16h26 Page 336/336

Dépôt légal : avril 2009ISBN : 978-2-84734-403-5

No d’édition : 3 287Imprimé en Italie