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Gestion de Ressources Humaines
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I. La GRH en Tunisie :
1. La naissance du prolétariat :
Le colonialisme désireux d’introduire certaines industries en Tunisie a créé des conditions
économiques et politiques pour s’assurer en premier lieu une main d’œuvre abondante :
expropriation des paysans, détérioration et ruine des corporations artisanales par
l’encouragement de la consommation des produits industriels, d’où la prolétarisation des
paysans et de la petite bourgeoisie.
Le problème de gestion fondamentale à savoir attirer et retenir des travailleurs s’est posé
particulièrement dans les mines de Gafsa. Les mineurs restaient avant tout des paysans et
considéraient le travail dans les mines comme une activité d’appoint qu’ils négligeaient
facilement quand la récolte était bonne. La direction des mines a alors développé une gestion
visant à assurer la stabilité du personnel en combinat les politiques d’endettement des
ouvriers, de sanction, de hauts salaires et d’intéressement par les primes d’assiduité, la
distribution gratuite des terres voisines des zones d’exploitation en contrepartie de
l’engagement des mineurs à fournir un nombre déterminé de jours de travail par an.
2. Indépendance et développement :
La politique dirigiste des années soixante a œuvré sur deux volets : création d’entreprises
publiques, encouragement de l’investissement industriel et découragement de celui dans le
commerce.
Cela a donné naissance à un tissu d’industries manufacturières produisant des biens de
substitution à l’importation et naturellement peu concurrentiels. La période des années 70-80
a été celle du déclenchement d’une politique de la libéralisation associée à la mise en place de
mécanismes incitant à l’ investissement notamment celui en partenariat avec des étrangers.
La loi promulguée en 1972 à cette fin a donné naissance à de nombre u s e s joint-ventures et
a placé les entreprises, peut-être pour la première fois, dans une logique de concurrence
internationale.
Mais depuis l’adhésion du pays à l’OMC et la signature des accords de création d’une zone de
libre échange avec l’ Union Européenne en 1995, l’enjeu de la concurrence internationale et
de la survie de l’entreprise s’est davantage affirmé. L’Etat intervient encore une fois sur deux
volets : celui de la stimulation de l’investissement privé notamment dans les nouvelles
technologies, et celui de l’incitation des entreprises à améliorer leur processus de gestion et la
qualité de leurs produits et services.
L’objectif est de soutenir la concurrence internationale de plus en plus rude dans un marché
national de plus en plus ouvert. A cet effet, l’un des principaux mécanismes mis en place est
celui du « Projet National de Mise à Niveau » qui apporte aux entreprises « éligibles » (selon
des critères définis par le comité de pilotage du PNMA) un soutien sur plusieurs volets :
soutien matériel et technique pour un diagnostic du processus de gestion en place, soutien
matériel pour moderniser les technologies utilisées, améliorer la qualification du personnel, en
particulier, par le recrutement de cadres.
Des formules de recrutement dans le cadre de contrats à durée déterminée ont été
promulguées par le Ministère de la Formation Professionnelle et de l’Emploi. Dès 1980 il a
été institué un système de contrat emploi-formation en vue d’encourager à l’emploi des
jeunes, sans contrainte d’insertion dans l’entreprise pour un emploi stable, puis en 1987 et
1988 ont été introduits les stages d’initiation à la vie professionnelle ‘SIVP, une autre formule
d’emploi flexible qui, de plus est financé en partie par l’Etat sous forme de contribution au
salaire (150D) et d’exonération de charges sociales.
3. Les orientations actuelles :
Plusieurs recherches récentes s’accordent sur le fait que la gestion des R.H. n’occupe pas une
place stratégique dans la gestion des entreprises tunisiennes.
Rares sont les entreprises qui ont une stratégie sociale, au contraire c’est la gestion corrective
qui domine, l’intervention en GRH est guidée par l’apparition de problèmes, sinon le désir de
cultiver une image positive de l’entreprise.
Souvent l’introduction de l’informatique, l’adoption de formules organisationnelles telles que
les cercles de qualité, l’organisation de programmes de formation ne sont pas faites pour
répondre à une nécessité mais constituent souvent des actions entreprises sous l’effet
d’incitations émanent d’agent extérieurs (fournisseurs, partenaires étrangers, experts,
législation). L’environnement de la GRH reste caractérisé par une centralisation des décisions
et un style de commandement autoritaire.
Néanmoins le contexte économique et social tunisien (vue l’importance du syndicat après la
révolution) renferme des indicateurs susceptibles de provoquer un regain d’intérêt pour la
GRH. Pour cela il faudra faire appel à des techniques avancées de GRH mais aussi tenir
compte d’un contexte culturel particulier sans quoi toute imitation aveugle est vouée à
l’échec.
Références bibliographiques
Ben Ferjani M. (1998), Nouveau contexte de l’entreprise tunisienne et pratiques de GRH: cas
de quelques entreprises «performantes», in La gestion des entreprises, contextes et
performances. Tunis, Centre de Publication Universitaire.
Zghal R. (2005), « La question des ressources humaines en Tunisie », in YANAT Z.,
SCOUARNEC, A. (éd) Perspectives sur la GRH au Maghreb, Paris : Vuibert. 165-174.webmanagercenter.com - 26 Août 2008
Articles relatifs à l’évolution de la GRH en Tunisie
La gestion des ressources humaines en Tunisie
Par Imededdine BOULAABA
La mondialisation s’applique-t-elle aussi à la gestion des ressources humaines (GRH) ?
Autrement dit, les pratiques en vogue au sein des services RH des différents holdings du
monde occidental, comme l’évaluation des performances ou le salaire au mérite,
s’appliquent-elles de plus en plus uniformément ou, au contraire, les usages RH restent-
ils essentiellement influencés par la culture locale ? Est-ce que le management des
ressources humaines en Tunisie s’uniformise, surtout sous l’influence d’une
délocalisation européenne opérée en masse dans le pays ? En fait, il ya un peu des deux
dans les pratiques actuelles : certaines manières de faire se sont répandues, d’autres
restent très locales.
Standardisation en cours
Avec le démantèlement progressif de l’industrie lourde un peu partout dans le monde et
l’essor vertigineux du secteur des services, l’appartenance aux syndicats et la
symbolique des luttes collectives ont perdu, au niveau individuel, en importance, ce qui
a permis au modèle anglo-saxon des pratiques RH de se propager, de se positionner en
leader dans le domaine des techniques de la sélection du personnel et de s’exporter en
véhiculant les valeurs de l’individualisation des rapports de travail, le principe du
développement du potentiel des collaborateurs à travers la formation continue, tout en
mettant l’accent sur la communication et la participation pour voir les performances
s’améliorer tout au long de la vie professionnelle.
«Désormais, devant la montée des nouvelles réglementations liées à la bonne
gouvernance, on remarque, dans les pays du Nord, l’augmentation du potentiel
stratégique des départements RH au niveau des PME et des grandes sociétés, ce qui a
favorisé une meilleure qualification des services du personnel et une
professionnalisation du métier avec l’engagement de diplômés en droit, en psychologie
et en gestion», nous souligne M. Chiheb Eddine Driss, consultant en management, qui
met l’accent sur les techniques de plus en plus sophistiquées (tests psychotechniques,
assessments, etc.) utilisées dans le monde du travail anglo-saxon pour le recrutement de
la bonne personne au bon endroit.
Le profil de la Tunisie
«Notre pays a adopté, après l’indépendance, plus précisément dans les années soixante
du siècle passé, le modèle social-démocrate allemand fondé sur les vertus de la bonne
planification au travail, mesure à même d’engendrer de grandes incidences sur le
rendement des employés, l’efficacité organisationnelle de l’acte productif et l’équité
dans la répartition de l’effort», indique de son côté M. Aissa Baccouche, secrétaire
général de l’U.G.E.T à l’époque pour qui la standardisation des modes de
fonctionnement dans la gestion des ressources humaines est un véritable mythe car les
différents praticiens, dit-il, tout en gardant les grandes lignes conductrices comme la
performance doivent savoir que pour y arriver, les moyens déployés divergent d’un pays
à un autre d’où la notion du management de la diversité, en vogue dans certaines
capitales du sud de l’Europe, généralement rétives à la prépondérance du modèle outre-
Atlantique.
Il est clair qu’actuellement, en Tunisie, insiste notre vis-à-vis, avec le maillage
entrepreneurial en cours et l’internationalisation du tissu industriel du pays, plusieurs
grandes sociétés investissent réellement du temps pour penser le développement des
compétences, faire évoluer les collaborateurs, réfléchir à la politique salariale et mettre
le capital humain de l’entreprise en avant dans l’agenda des conseils d’administration.
Par contre, au niveau du secteur public, dont le nombre des fonctionnaires dépasse les
400.000 affiliés, la responsabilité des décisions touchant le personnel (rétribution,
formation, recrutement…) appartient le plus souvent au département concerné, «à la
ligne» comme on dit, avec la bénédiction bien entendu des services communs, véritables
Etat dans l’Etat.
EVOLUTION DE LA FONCTION RESSOURCES HUMAINES EN TUNISIE
Synthèse élaboré par Radhia H.CHEBBI (ARFORGHE-Tunisie)
RÉSUMÉ :
Promue dans le cadre de la libéralisation économique engagée par l’Etat dès 1996, la fonction
RH se trouve confrontée à une double contrainte. D’une part la fonction est liée à l’héritage
colonial de la GRH, d’autre part elle est liée aux représentations culturelles du travail (sens
attribué au travail, traditions et valeurs qui lui sont rattachées…).
Or la fonction RH doit relever un certain nombre de défis: Indépendance / Industrialisation /
modernisation / mondialisation ; et cela en un temps très court soit 40 ans alors que la GRH
européenne affronte ces mêmes défis depuis plus d’un siècle.
Cette situation a développé des pratiques chargées d’ambiguïtés et de paradoxes, souvent
sources de dysfonctionnements générateurs d’une gestion du « flou », d’une autorité
paternaliste et du recours aux relations d’appartenance.
ABSTRACT
Promoted within the context of the economic liberalization movement initiated by the State in
1996, the HR function faces constraints that are twofold. On the one hand, the function is
linked to a colonial heritage, on the other hand it is linked to the cultural representation of
work (work values, traditions). Due to these factors the HR function faces certain challenges
such as Independence /Industrialization / modernization / globalization all over a very short
period of time; i.e. 40 years, whereas the European HR function has been facing these
challenges for over a century now. This situation has resulted in the development of practices
that are ambiguous and paradoxical and which are often at the origin of malfunctions, creating
a management that is unfocused, an authority which is paternalistic and the use of contacts
and acquaintances.
1. CONTEXTE GÉNÉRAL ET DÉFINITION DE LA FRH EN TUNISIE
La Fonction RH en Tunisie ne peut être considérée sans prendre en compte les
bouleversements et les mutations rapides que l’entreprise tunisienne a connues depuis
l’indépendance (1956). Une littérature de plus en plus abondante portant sur l’évolution
récente de la GRH témoigne du souci de contribuer à une meilleure connaissance des
contraintes et des défis auxquels la FRH a toujours été confrontée. La plupart des recherches
effectuées, soit dans le cadre universitaire, soit à partir des observations sur le terrain, révèlent
des pratiques de GRH dominées par l’approche administrative du personnel. La persistance de
ces pratiques relèverait de la pesanteur historique de l’entreprise publique qui a été créée dans
la foulée de l’édification de l’Etat national et dont les caractéristiques managériales ont
marqué et marquent encore profondément la gestion des hommes et des femmes au travail.
CHENNOUFI A.(1) relève 3 types de stratégies de GRH correspondant à 3 moments forts de
la politique économique du pays depuis l’indépendance jusqu’à nos jours :
Une stratégie de salut public correspondant au soucis de l’entreprise de la première
période post coloniale d’assurer les services publics vitaux (électricité, chemin de fer,
eau…) et de stimuler la croissance économique nationale (création d’emploi, distribution
des salaires…). Cette stratégie s’appuyait sur une logique de service public (Etat
transporteur, Etat agriculteur…) l’entreprise publique s’étant attribué un rôle social :
recruter massivement sans se préoccuper des dépenses ni du profit.
Une stratégie de minimisation des coûts (années 70, 80, et début des années 90) qui
atteint en priorité le coût de la main d’oeuvre : gel des recrutements, compression du
personnel… Cette stratégie n’a pas été accompagnée de l’utilisation des moyens de
développement des R.H. en place : systèmes de motivation, de formation,
d’individualisation des salaires…
L’époque actuelle est caractérisée par un « éveil » à l’ajustement
Ressources/Besoins et à l’optimisation des R.H.
L’auteur souligne cependant que « pendant près d’un demi siècle, les R.H. étaient considérées
comme étant des éléments constitutifs des coûts de production », la fonction RH ne disposant
pas de stratégie. Ce constat est partagé par l’ensemble des auteurs qui se sont penchés sur la
question.
Analysant les facteurs influant sur la configuration de la GRH dans les entreprises
tunisiennes, ZGHAL R. (2) met en exergue l’importance à la fois de la politique volontariste
d’industrialisation et de modernisation impulsée par l’Etat mais aussi des facteurs culturels «
endogènes » et « exogènes » qui guident et imprègnent le « comportement organisationnel »
(des acteurs en présence). Selon l’auteur, le problème de la période post-coloniale était moins
la disponibilité de la main d’œuvre (paysanne) que l’adaptation de celle-ci à de nouvelles
conceptions du temps, de l’espace et de l’autorité. En effet, jusqu’à nos jours, la GRH semble
tiraillée entre les contraintes persistantes des représentations culturelles du travail (sens
attribué au travail, traditions et valeurs qui lui sont rattachées…) et les défis auxquels elle se
trouve sans cesse confrontée : Indépendance / Industrialisation / modernisation /
mondialisation ; et cela en un temps très court soit 40 ans (les défis qu’affronte la GRH
européenne depuis plus d’un siècle !). Cette situation aurait développé, selon R. ZGHAL (à
l’instar de plusieurs autres observateurs), des pratiques chargées d’ambiguïté et de paradoxes
(H.CHEBBI R(3)), souvent sources de dysfonctionnements et de contre-productivité,
générateurs d’une gestion du « flou », d’une autorité paternaliste et du recours aux relations
d’appartenance (4)…
En dépit du développement de modèles proches de l’O.S.T. et du processus entamé de
modernisation des structures de l’entreprise tunisienne (du moins dans ses aspects formels), la
GRH demeure, selon ZGHAL R(5), pour une grande part :
Dépendante des caractéristiques personnelles du « chef »
Dominée par la gestion corrective (selon l’apparition des problèmes) caractérisée par la
centralisation des décisions et la persistance des formules traditionnelles du travail
flexible : travail occasionnel et heures supplémentaires…
Handicapée par un faible degré de professionnalisation de la fonction RH
Face aux contraintes de la compétitivité et aux défis de la mondialisation, l’Etat a signé, dès
1996, un accord avec l’Europe pour la création d’une zone de libre échange.
Un programme de financement important soutenu par la CEE a été mis en œuvre pour
permettre la mise à niveau des entreprises, ainsi que des mécanismes d’appui et
d’accompagnement visant tous les secteurs et tous les domaines, parmi lesquels se place en
priorité la mise à niveau de la GRH :
Révision du Code du Travail introduisant la flexibilité de l’emploi CDD et CDI,
complétant ainsi les réformes mises en place dès les années 70 en matière de législation
de travail.
Mesures d’incitation et d’encouragement à l’emploi et à l’investissement : emploi
flexible (SIVP1, SIVP2) financé par l’Etat sous forme de contribution au salaire et de
moyen d’exonération des charges sociales.
Développement d’une politique de formation promotionnelle, accompagnée par la
mise à niveau de l’ensemble du dispositif Education- Formation (MANFORM)
Obligation pour l’Entreprise employant plus de 40 salariés de disposer d’une
commission consultative d’entreprise.
Existence d’un syndicat puissant « avec ancrage social fort » (souligné par ZGHAL R.)
avec lequel l’Etat s’est engagé dans une politique contractuelle depuis déjà fort
longtemps.
Cet arsenal de mesures, impulsé essentiellement par l’Etat devenu « acteur principal du
changement » ( ZGHAL R.), est en train, à l’heure actuelle, de mettre à l’épreuve les
pratiques issues du lourd héritage des périodes pré-coloniale et coloniale, fonctionnant sur une
trame agissante des représentations collectives culturelles traditionnelles patrimoniales, sur
lesquelles se sont greffés les modèles coloniaux du management de type tayloriste. Cette mise
à l’épreuve, rendue possible grâce au Programme National de Mise à Niveau, semble indiquer
(ceci est souligné par la plupart des observateurs) une reconnaissance officielle ainsi qu’une
prise de conscience importante chez les jeunes chefs d’entreprises et les jeunes cadres, du rôle
de la GRH dans la performance de l’entreprise. Celles-ci seraient-elles porteuses des
tendances futures de la FRH dans l’entreprise tunisienne ?
2. ETAT DES LIEUX DE LA GRH EN TUNISIE
Quatre enquêtes importantes ont permis d’établir un état des lieux de la GRH en
Tunisie. Il s’agit de :
1. L’enquête menée en 1994-1995 par l’équipe de recherche ERGE (Université de Sfax) dirigée
par ZGHAL R(6) qui a touché 18 entreprises (PTE& PME) ayant adhéré au PMN
2. L’enquête réalisée par BEN FERJANI M. & EZZRALI F. en 2000 sur les pratiques GRH
dans 45 entreprises (PME ) ayant adhéré au PMN (7).
3. Deux enquêtes menées par l’ERGE dans le cadre du réseau de recherche CRANET.
La première, réalisée en 1999-2000 a touché 64 entreprises dont 22 hôtels et 12 hôpitaux
publics ; La deuxième, en 2004, a concerné 150 entreprises industrielles (PME) engagées dans
le PMN.(8)
L’ensemble de ces enquêtes a ainsi touché un total de 277 entreprises, des PME pour la
majorité d’entre elles, relevant de secteurs industriels variés : textile, bâtiment, matériaux de
construction, papier - carton, agro – alimentaire… et adhérant au PMN.
La pertinence dans le choix de ces enquêtes réside dans le fait que leurs résultats permettent
de situer la GRH (fonction, pratiques, activités…) dans le contexte particulier de mise à
l’épreuve des entreprises tunisiennes par rapport à leur engagement dans le programme
national de mise à niveau (compris ici comme indicateur de taille dans l’appréciation de la
FRH et de son évolution au cours de ces dix dernières années).
Les résultats de ces enquêtes peuvent être résumés à travers les principaux indicateurs
suivants :
1. Position de la fonction RH dans l’entreprise
2. Formulation d’une stratégie RH
3. Processus et/ou activités RH
4. GRH & NTIC
2.1. Position de la GRH :
Entre 1994 et 2004, la FRH a connu une évolution notable. En effet, vers les années 80 et le
début des années 90, la fonction était, soit absente (dans 50% des entreprises interrogées en
1994), soit confondue avec le service du personnel (dans 30% à 40% des Entreprises) ou bien
confiée à un employé rattaché à une D.A.A.F (dans 17% des cas). Selon les enquêtes réalisées
pendant les années 2000 et 2004, environ 80% à 90% des entreprises disposent d’un
Responsable RH ou DRH. Le niveau de formation du Responsable RH a connu une nette
amélioration : on est passé du niveau bac+2 pour environ 40% des Responsables RH (quand
ils existent) au niveau > ou égal au bac+4 pour environ 70% des entreprises, selon les
enquêtes 2000 et 2004. Le nombre des personnes en charge de la FRH se situait entre 1 à 2
personnes pour arriver à 3, 5 et 10 personnes entre 2000 et 2004. La profession évolue
également progressivement vers une féminisation.
2.2. Formulation d’une stratégie RH
Jusqu’aux années 90, les RH sont gérées en termes quantitatifs d’éducation, de formation et
de postes à pouvoir. Dans le contexte d’économie fermée et d’« Etat providence » qui
caractérise cette période, l’environnement est relativement stable, et la stratégie de
développement peu complexe. Nous sommes en présence d’une logique de gestion « au coup
par coup » ; et l’entreprise a pour objectif de développer ses prestations en contrôlant ses
ressources. La « culture de résultats » reste le critère prédominant. Sur le plan managérial, la
stratégie est élaborée au sommet, avec une forte centralisation de la prise de décision. La
priorité est au contrôle de l’activité, au traitement des problèmes quotidiens et à la bonne
exécution des décisions.
S’élaborent ainsi des systèmes de contrôle et de stimulation du personnel : rédaction des
règlements de travail ; développement d’une législation sociale ; protection des droits
syndicaux, instauration des conventions collectives. On demande au responsable des RH,
généralement chef du personnel ou DAF, de veiller à l’application de la réglementation en
vigueur. Cette approche administrative, centralisée-autoritaire, sera renforcée par la mise en
oeuvre des mesures restrictives imposées par la F.M.I. dans le cadre du P.A.S. Des mesures
qui n’ont pas manqué d’assèner des « coups durs » à la GRH : suppression des Fonds sociaux,
réduction des effectifs ; arrêt des recrutements dans les entreprises publiques « principal
employeur » ; tension sociale et crise syndicale (« l’émeute du pain », janvier 1983)
Avec l’ouverture de l’économie nationale et le lancement du PMN ; l’Etat tente de propulser
de nouveaux modèles d’organisation du travail, basés sur l’encouragement aux
investissements privés et sur la mise en oeuvre de plans de réformes législatives et
organisationnelles = introduction et généralisation des NTIC, démarche qualité, flexibilité de
l’emploi… Sur le plan managérial, l’enquête 2004 enregistre une participation croissante du
DRH à l’élaboration de la stratégie de l’entreprise (28% des cas en 99, et 50% des cas en
2004). Toutefois, la logique de gestion prédomine encore aux dépens de celle de l’anticipation
; et les procédures informelles (la culture orale, le « non écrit ») pèsent encore lourdement sur
les décisions.
3. DIFFICULTÉS ET ENJEUX DE LA FRH DANS L’ENTREPRISE TUNISIENNE
La désignation « Fonction Ressources Humaines » de l’entité chargée de la gestion du
personnel dans l'entreprise tunisienne est ainsi très récente. Promue dans le cadre du processus
de libéralisation économique engagé par l’Etat en 1996 (suite aux accords de libre échange
avec la CEE, soutenus par le FMI), la fonction RH figure comme l'un des axes sur lesquels a
été articulé le programme national de mise à niveau des entreprises.
Entre 1995-2004 la fonction RH au sein des entreprises tunisiennes a connu une évolution
indéniable. Les enquêtes et les observations sur le terrain ont pu, ainsi, dégager certains
indicateurs significatifs que nous rappelons succinctement :
Une reconnaissance de la Fonction RH : la DRH se substitue aux DAAF, service du
personnel, etc.
Une amélioration du niveau de formation des DRH désormais diplômés de
l’université ; ainsi qu’une féminisation, certes encore timide, des personnes en charge de
cette fonction.
Une croissante participation des DRH à l’élaboration de la stratégie de l’entreprise
(50 % des entreprises enquêtées en 2004)
Le recours à la flexibilité de l’emploi et à des techniques modernes de recrutement
(tests psychotechniques, entretiens, etc.)
Des efforts dans l'application des démarches qualité (procédures de normalisation)
L’utilisation de plus en plus généralisée de l’outil informatique
Une présence accrue des structures de concertation (95% des entreprises interrogées)
Toutefois, en dépit de ces avancées, la fonction RH demeure tiraillée entre les contraintes
imposées par les dynamiques internes de l’évolution sociétale, et l’impérieuse nécessité de
relever les défis d’une évolution à mille vitesses . Cette situation, devenue quasiment
chronique, semble peser lourdement sur l’état de la fonction et sur son devenir ; obstruant, en
quelque sorte, les possibilités du « compromis managérial » indispensable à une évolution
intégrée de la fonction RH.
Cette situation a pu être décrite par les enquêtes menées dans certaines entreprises, à travers
les observations suivantes :
Le contact direct et les relations informelles continuent à être privilégiés dans le contexte
du programme de mise à niveau, qui promeut les modèles de l’efficacité « impersonnelle
» et de la performance à travers la maîtrise des nouvelles technologies de l’information et
de la communication…
Le style de leadership reste fortement centralisé autour du chef, légitimé par une
image idéale du père exemplaire, soucieux des intérêts de ses employés… tandis qu’on
continue à discourir - et à investir - sur les nécessaires transformations à opérer dans le
sens des « certifications-qualité », de la normalisation, de l’approche compétence…
La motivation est principalement axée sur les avantages sociaux et matériels et le recours
aux heures supplémentaires reste un des éléments constitutifs de l’organisation du travail.
Un budget important est alloué à la formation à l’échelle nationale, avec un dispositif
institutionnel et législatif opérationnel, depuis les années 60 . La formation
professionnelle, qui constitue un des piliers fondamentaux de ce dispositif, se heurte
néanmoins à la difficulté d’une articulation aux objectifs de développement, à même de
mobiliser les savoirs collectifs nécessaires à l'entreprise "apprenante"
(H.CHEBBI.R(12) )
L’Etat apparaît comme étant le principal acteur du changement, au sein même de la
stratégie de libéralisation qu’il met en oeuvre.
En conclusion :
Le processus de modernisation de la GRH – bien que réel - semble s’inscrire dans un modèle
managérial, caractérisé par une centralisation des processus de décision, ainsi qu’une forme «
d’autoritarisme » qui empêcherait la FRH d’émerger en tant que levier de développement et
d’amélioration des performances de l’entreprise. En même temps qu'il en tire une certaine
légitimité, un tel registre alimente et tend à reproduire sous de nouvelles formes les pratiques
managériales ancestrales de type patriarcal. Les difficultés majeures auxquelles se heurtent la
fonction RH en Tunisie découleraient de ce paradoxe « autoritarisme / modernisation »
caractéristique des pratiques néo-patrimoniales (au sens webérien (10) du terme), génératrices
de la culture du "flou" (remarquablement décrite par ZGHAL R.). Face au nouveau contexte
de la mondialisation et de l'ouverture de l'économie tunisienne, la
Fonction Ressources Humaines représente en elle-même un véritable enjeu pour le devenir de
l'entreprise tunisienne. Cela suppose un repositionnement des visions du travail et de son
organisation à l’intérieur d’un contexte sociétal où la valeur de l’être humain reste encore un
des piliers fondamentaux sur lesquels s’articulent les relations sociales. Cela suppose
également qu’au coeur des enjeux de la fonction RH et, dans son accès à la modernité, il
demeure nécessaire de développer une nouvelle vision de l’Homme au travail, considéré
comme acteur à part entière du processus de production.
SOURCES BIBLIOGRAPHIQUES
(1)- Channoufi A, « Stratégies de GRH dans l'entreprise tunisienne, de l'indépendance à ce
jour ». Publication ARFORGHE 2001
(2)- Zghal R.. La GRH en Tunisie, Actes de la 5ème univ d'été ARFORGHE 2000
(3)- Chebbi Halouani R. ; « Ambiguïtés et paradoxes des pratiques GRH dans l’entreprise
publique tunisienne », Actes 12ème congrès de L' AIPTLF, Presse - Université de Louvain
2001
(4)- Zghal R. ; « La culture de la dignité et le flou dans l'organisation » CERES - 1994
(5)- Zghal R ; « Globalisation et transformation de la GRH en Tunisie sous l'impulsion de
l'Etat », Symposium AGRH Euromed Marseille 2004
(6)- Ben Ferjani M ; « Enquête sur les pratiques GRH », Publication ARFORGHE
(7)- Ben Ferjani M .&.Ezzerelli F. ; « Enquête sur les pratiques GRH dans les entreprises
performantes » 2000
(8)- Zghal R. ; « Globalisation et transformation de la GRH en Tunisie » sous l'impulsion de
l'Etat, Symposium AGRH Euromed Marseille 2004
(9)- Cadin &, Guerin F & Pigeyre F ; « GRH, pratique et éléments de théorie ». Dunod Paris
1997.
(10)- Weber M. ; « Economie et société » 1995.
(11)- Camau M & Geisser ; « Le syndrome autoritaire », Sciences po 2004
(12)- Halouani Chebbi R ; « Enquête sur l’état de la formation dans les entreprises de
transport public » - Ministère du transport 1996