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La Legion en Afghanistan,RAIDS N°230,2005.júli

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L : 7,50 € - ANO ; 6,35 € - CAN : 9,45 S CAN - IUX : 7,50 € - CH : 10,70 CHF - Fronce métro : 6,3

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Le 2 février 2005, lecontingent françaisentamait son dixièmemandat au sein de laForce internationaled'assistance pour lasécurité (FIAS) enAfghanistan, trois ansaprès l'arrivée despremiers soldats françaisà Kaboul. Ce sont leslégionnaires dela 6e brigade légèreblindée qui armentle bataillon françaisdans le cadre dela mission Pamir X.

Texte ; Marc BleuchatPhotos : Joseph Kovac

Ils ont connu la neige au début du mandat, laboue au moment du dégel. A1 800 mètres d'alti-tude à Kaboul, et plus de 2 500 dans certains sec-teurs, les variations climatiques sont plus quecontrastées. Depuis avril, les Français composentavec un soleil de plomb et les nuages de poussièresoulevés par les véhicules sur les pistes. En unejournée la température passe de plus de 30 degrésla journée à parfois 4 la nuit. Et il a fait jusqu'à moins17 degrés cet hiver. Au mois de mars, les pluiesont été abondantes, un petit miracle dans ce paysqui avait connu plus de sept années de sécheres-se. Les crues ont emporté des habitations etquelques ponts de fortune. Ce climat extrême doit

toujours être pris en compte par leslégionnaires de Pamir X.

Chaque mission peut changerdu tout au tout. Un peu commel'attitude des Afghans. Toujourscalmes, posés et polis, ils peu-vent très vite s'avérer hostiles,comme après les événe-

ments de mai. ^annonce par un magazine améri-cain de blasphèmes commis à Guantanamo à ren-contre du Coran et de prisonniers afghans a pro-voqué une vague de protestations qui a faitune vingtaine de morts et une centaine deblessés, dont certains à Kaboul. Un

« front commun des moudjahi-din » est alors créé

pour pour-suivre la

te -corf infidèles. Re

.e--=r ---c.d'une Italienne tra-

,a --::•:_• ,-e :•: = - -sation humanitaire'. Enfin, le

Ci-contre.Depuis la Bosnie, les VAB sontsystématiquement déployés sur les théâtresd'engagement français pour protégerles personnels. On assiste au « blindage »des unités. Le temps des jeeps et des GBC-8» découverts • évoluant dans Beyrouth à feuet à sang est bien loin !

1 . Elle a été libérée le 9 juin dernier (NDLR).

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Ci-contre.Lors d'un exercice franco-américain,les légionnaires répètent les actes élémentairesdu Pire Team engagé dans un espace confiné.On notera la position de tir les deux yeuxouverts rendu, possible par les lunettes « pointerouge ».

30 mai à 1 heure du matin, c'est une roquette de107 mm qui s'abat sur un bâtiment quasi désertdu poste de commandement de l'ISAF à Kaboul— mais qui n'occasionne pas de dégâts majeurs.Comme en Irak, terrorisme et criminalité se mêlent,même si l'ampleur est moindre.

Jamais la routineSur le terrain, les missions quotidiennes ne sont

donc jamais une routine. « Le paysage, l'état desvoies de communication évoluent en moins d'u-ne journée : telle route praticable hier peut êtresubmergée le lendemain, une mine enfouie peutêtre déplacée par une coulée de boue et se retro-uver sur le chemin », explique un chef de peloton.

Tous les jours, les missions sont remplies :sécurisation des implantations de la force, aideà la sécurisation dans les PD (Police District) 11,PD 15 et PD 17 au nord-est de Kaboul et dansla partie nord de la zone de responsabilité de laFIAS, notamment autour de l'axe stratégiqueKaboul-Bagram (plaine de la Shamali). Sur les600 soldats français présents sur le territoireafghan, environ 500 arment le bataillon françaisde Kaboul (BATFRA). Celui-ci se compose d'unétat-major tactique, d'une compagnie d'infante-rie, et d'une unité de commandement et de logis-tique du 2e régiment étranger d'infanterie (2e REI)de Nîmes. Lescadron de reconnaissance et d'in-vestigation (ERI) à trois pelotons est armé parl'escadron d'éclairage et d'investigation de la6e brigade légère blindée du 1er régiment étran-ger de cavalerie (le REC d'Orange). Un déta-chement du génie (DETGEN) du 1er régimentétranger du génie (1er REG du camp de l'Ardoi-

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se) complète ce bataillon interarmes. Les élé-ments de combat du bataillon forment un grou-pement tactique aux ordres du lieutenant-colo-nel Hervé Fouilland, chef des opérations du2e régiment étranger. D'autres composantes, cel-lule renseignement, détachement léger d'inter-vention, ou élément d'actions civilo-militaires(ACM), mettent leur expertise au profit des uni-tés sur le terrain. « L'objectif majeur dans cemilieu âpre et changeant est d'éviter une mau-vaise surprise et de garder la confiance d'unepopulation tout acquise aux Français. Chaquemission est conduite en second rideau de la poli-ce afghane. Celle-ci comprend tout le bénéficequ'elle peut tirer du soutien militaire de cet outilbien rôdé qu'est le bataillon », souligne un offi-cier du centre des opérations du BATFRA.

Pour assurer leurs missions, les légionnairesenchaînent les patrouilles aléatoires, collectentdes renseignements, dans un but à la fois pré-ventif et dissuasif. Au total, les légionnaires en onteffectué plus de 500. Ce type de mission est « unart tout d'exécution », pour paraphraser un pen-seur militaire à propos de la guerre. Ici, tout estaffaire de dosage et d'équilibre. Chaque geste,chaque attitude peut prêter à interprétation etdonc susciter une réaction. Le type de véhiculechoisi pour patrouiller en ville permet de graduerla visibilité de la force. Ainsi les légionnaires ontà leur disposition les blindés VAB présents aujour-d'hui partout où servent des soldats français, etles VLRA très adaptés au climat et au reliefafghans. Les éléments légers et de renseigne-ment disposent de véhicules de gamme civile Nis-san ou Toyota, « pick-up » ou tôles. C'est bien ce

14 type de véhicule très répandu, discret et conçu

pour les pays au réseau routier déficient qui estle plus prisé par les militaires.

Infanterie en contrôlede zone

En secteur urbain, la compagnie d'infanteriepatrouille à pied, parcourt les ruelles sombres etétroites, se fraie un passage dans les détritus quijonchent le sol de ce secteur dont la population estestimée à plus d'un million d'habitants. Les servicesde voirie sont inexistants et le tout-à-l'égout inconnu.Quotidiennement, de jour comme de nuit, chaquesection effectue au moins une patrouille danschacun des trois PD11, PD15 et PD17, au nord-ouest de Kaboul. Là, les légionnaires font étalagede tous leurs savoir-faire en matière de contrôle dezone. Ecoute, fermeté parfois, sourire bien sûr, capa-cité à renforcer l'action des policiers en graduant lariposte, sont au programme de chaque sortie. Unadjudant-chef de section souligne : « En plus il fautobserver, adapter la progression et les distances decombat, repérer les masques et angles morts, sanspour autant faire peur aux passants, et en étant prêtà sourire aux enfants. »

Les missions de jour et de nuit ont chacuneleur spécificité. En journée, la foule se presseautour des échoppes, autour des arrêts de busou de taxi « c'est-à-dire partout et n'importe où »,remarque un légionnaire. La circulation est unvrai casse-tête, malgré la bonne volonté desagents de la circulation, souvent assez âgés etun peu dépassés par l'ampleur du trafic.

La nuit, les Afghans sortent peu. La ville se videà la nuit tombée entre 18 heures et 20 heures.L'éclairage public n'est présent que sur les

Le VBL, d'un poids réduit (classe 4), bienarmé, robuste et rapide, est le véritable

« cheval de bataille », capable d'aller partoutdans la zone de responsabilité française.

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La situation sécuritaire en AfghanistanUne dérive terroriste toujours possible dans un pays

qui aspire à la paix mais qui a connu près d'un quartde siècle de guerre. Les actes terroristes isolés conti-nuent. Des roquettes posées sur affûts de fortune sonttirées certaines nuits. « La semaine dernière, deux onttouché des zones, heureusement peu habitées,de Kaboul », précise un officier de renseignement. Unmalek, ou chef de village, souligne que de tous tempsles Afghans ont protesté contre le pouvoir central, jadisavec les djezzaïrs, ces longs fusils ouvragés à longueportée, aujourd'hui avec des roquettes de 82 à 122 mm.La situation en zone FIAS sous commandement del'OTAN est bien plus calme que dans le sud et l'ouestdu pays. Et puis l'Afghanistan vit dans l'attente des pro-chaines élections parlementaires et des conseils deprovince, programmées le 18 septembre 2005.

Les grandes manœuvres politiques ont commencé.En apparence, elles semblent pacifiques. Mais déjà laplace des femmes voulue par la communauté interna-tionale fait débat dans cette société marquée par unislam rigoureux sinon rétrograde. Une présentatricevedette de la télévision a été assassinée mi-mai, « pourblasphème » selon ses meurtriers. Peut-être aussi pourfaire peur aux femmes de l'élite qui seraient tentées dese présenter aux élections. Dans un souci d'ouverture,un quart des sièges à l'Assemblée leur réservés.

Les coups bas se multiplient entre anciens alliés,anciens adversaires, et souvent les deux. Les cliva-ges ethniques, tribaux, familiaux, religieux, historiques,mais aussi les conflits d'intérêts entre affidés du régi-me et anciens seigneurs de la guerre s'exacerbent.Le 12 mai, un candidat a été assassiné dans uneembuscade dans la province de Ghazni. Le 31, le chefde la police de Kaboul est tué lors d'un attentatsuicide pendant une réunion dans une mosquée àKandahar (le fief historique des talibans). Vingtautres personnes ont trouvé la mort dans ce qui doitpourtant être un sanctuaire pour tout musulman.

A ces soubresauts s'ajoute la guerre du pavot, cultureancestrale relancée après la chute des talibans. La DEAest présente dans le pays aux côtés des Britanniqueschargés de la conduite de la lutte antidrogue en Afgha-nistan. Pourtant, malgré la désignation d'un chef debureau afghan et l'affectation de troupes à cette tâche,les résultats restent minces. LAfghanistan détient le tri-ste record mondial de production de pavot à opium,matière première de l'héroïne. Cette dernière, produitelocalement dans divers laboratoires clandestins, repré-sente plus de 80 % de la production mondiale.

La drogue est le moyen le plus rapide pour tous dese procurer le « nerf de la guerre ».

Il s'agit pour les islamistes anciens maîtres du paysde lever des fonds pour leur djihad. Certains seigneursde la guerre financent leurs armées privées pourtantcensées être désarmées, démobilisées, et rapatriées,« dédéérisées » en langage ONU. Le 2 mai dernier, undépôt d'armes explosait dans la province de Baghlanà 180 kilomètres au nord de Kaboul. L'endroit était larésidence d'un commandant de milice de niveau local,censé avoir remis ses armes. Vingt-neuf personnes sonttuées et plus de 70 sont blessées dans l'explosion !

Et puis il y a, là comme ailleurs, la main du Pakistan.Tout décideur afghan dénonce un jour ou l'autre l'in-fluence néfaste du puissant voisin. Il semble indénia-ble que les trafiquants pakistanais, eux, n'ont pas bais-sé le rythme. Si la lutte contre la drogue semble si effi-cace à Karachi, c'est sans doute parce que les baronsde la drogue ont rapatrié leurs activités dans le Sudafghan. Autre spécialité du crime organisé, l'enlève-ment d'enfants « vendus comme esclaves dans leszones tribales puis renégociés dans les pays arabes »,selon un policier afghan. Le mois dernier, la police dela route de la plaine de la Shamali a saisi plus de 50 kgd'héroïne qui faisaient route vers le nord, c'est-à-direl'Ouzbékistan, la Russie puis l'Europe. Autre trafic flo-rissant, celui des voitures volées. En ville, on commenceà croiser des limousines allemandes. Les garages devoitures « d'occasion » fleurissent aux alentours del'aéroport international de Kaboul. Dans l'un d'eux, lespuissants 4 x 4 allemands BMW ou Volkswagen, ailleursun Hummer 2 presque neuf.

Et puis il y a les armes. Alors que des armementsde tous types circulent sous le manteau, certains fabri-qués après 2001 commencent à être saisis. Parmiceux-là, on trouve des copies pakistanaises de pau-vre qualité mais qui peuvent faire illusion, etd'autres encore com- | me des lance-roquettesantichars jetables \. Plus perfection-nés que des RPG-7, ils |1 sont craints par les mili-taires occidentaux. La %faute originelle a étécommise par la coalition qui a péché avec debonnes intentions. Pen- sant à la fois se débar-

portation clandestine via les montagnes qui bordentles frontières. Avec les dollars récoltés, certains moder-nisent leur arsenal après avoir revendu leurs vieuxstocks.

Il est certain que la vacance de l'Etat laisse le crimeorganisé exprimer ses talents. Mais à terme, et com-me dans les Balkans, le rôle de ces chefs mafieux pour-rait influencer le sort du pays, et cristalliser les mécon-tentements contre les étrangers accusés d'avoir, aumieux, laissé faire, au pire, favorisé l'émergence de cesgangs — ouvrant ainsi la porte, par la voie des urnes,à des partis islamistes rigoureux et répressifs,

II est certain que si s'ajoute à cette exaspérationcelle causée par l'afflux d'étrangers qui occupent desemplois pouvant être tenus par des Afghans, la valeurrefuge qu'est le repli islamiste ira à la hausse. Les orga-nisations non gouvernementales sont mal acceptées.Elles imposent leurs usages, leurs salariés, souvent fémi-nins, et dictent leurs conditions contre l'aide qu'ellesdispensent. C'est beaucoup pour un pays où la traditionest à la discussion et au respect des valeurs ancestra-les. Le rapt d'une expatriée italienne est à la fois le symp-tôme d'une défiance contre les étrangers, par des grou-puscules politico-mafieux en mal de publicité, et de capi-taux vite amassés. Un attentat dans un cybercafé a tuétrois personnes et fait six blessés, le 8 mai dernier. Il estcertain que l'exemple de la dérive irakienne guette.

Les manifestations antiaméricaines de début maiont peut-être été encouragées et encadrées. Mais le nom-bre de manifestants et la rapidité de l'extension duphénomène inquiètent, argument du blasphème anti-musulman est porteur. Malgré ses efforts, l'Amérique res-te un « grand Satan », Les musulmans trouvent là un thè-me fédérateur, capable de cristalliser les vrais problèmesafghans liés à l'absence de services publics et à un sous-développement économique chronique qui pourrait être,à terme, propice à toutes les dérives extrémistes.

rasser du trafic et injec-l'économie, certainsdes armes. Outre quedébarrasser d'armes encela a favorisé un nou-marché, lequelemprunte lesvoies tradition-nelles et bienrodées de l'im-

ter de l'argent frais danscontingents ont racheté

I cela a permis de sei mauvais état,

v e a u

V

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grandes artères. Il impose prudence et espace-ment durant la progression à pied. Les véhiculessont postés, moteurs tournant, prêts à appuyer legroupe à pied à tout moment. Dans les ruelles, leport des lunettes de vision nocturne est constant.Les légionnaires resserrent le dispositif, l'arme estportée à deux mains avec un style qui rappelle lespatrouilles à pied britanniques en Irlande du Norddurant les années soixante-dix et quatre-vingt.

Aux cavaliers les grandsespaces

Le lendemain, une section part pour deux joursdans le nord-ouest de la zone de responsabilitéfrançaise. Il s'agira de renforcer la visibilité de laprésence française dans la vallée d'Istaleph ausein d'un sous-groupement tactique composéd'une section d'infanterie, d'un peloton d'éclai-rage, d'un élément du génie. Une équipe ACMsera présente durant une matinée pour dispen-ser une aide vétérinaire gratuite. Le commandantde ce détachement, capitaine adjoint de la com-pagnie, précise que cette action conduite par unvétérinaire français et un Espagnol contribue àfaire accepter la présence militaire. Le printempsest la période de la pâture des troupeaux, lesnomades kouchis regagnent cette plaine fertileoù s'étendent les prairies poussées en moinsd'un mois. Le capitaine ne s'y trompe pas. Il nese laisse pas abuser par le paysage à la beautéà couper le souffle. Lafflux de nomades, c'est unaccroissement de la population, c'est la multipli-cation de possibles disputes pour s'octroyer desterrains, c'est un regain de tensions avec les habi-tants sédentaires, c'est un risque d'accidents sur

2. Ou UXO (unexplosed abjects) dans le jargon dessapeurs des équipes EOD (Explosive OrdnanceDisposai), les « pros » du déminage formés à l'Ecolesupérieure d'application du génie d'Angers.

3. Dans la plaine qui voit se succéder d'ancienneslignes de défense, les abris et souterrains pullulent.Les sites en ruine sont aussi autant de lieux decaches possibles.

Exercice de tir mortier en appuides progressions des sections.Outre les missions de l'ISAF, les unitésfrançaises ont des possibilités extraordinairesd'exercices en Afghanistan, totalement différentsdes camps en France.

les deux axes stratégiques nord et sud qui bor-dent le secteur.

Cette plaine de la Shamali, qui fut le théâtre desexploits militaires du commandant Massoud, faitpartie du secteur de l'escadron de recherche etd'investigation. La totalité de la zone s'étend sur40 kilomètres de long et plus de 35 de large. Lesdeux itinéraires nord et sud, et les seuls bitumés,sont, à l'ouest, l'axe Horseshoe (fer à cheval) quiconduit à Mazar-e-Charif et, à l'est, l'axe Bottle(ou route soviétique) construit par l'armée Rougepour éviter les embuscades menées dans les villa-ges de l'ouest du secteur.

Létendue, la densité de la population, son carac-tère multiethnique à l'inverse du pays (là, lesTad-jiks sont plus nombreux alors qu'ils sont minori-taires dans le pays par rapport aux Pachtouns),une coexistence pacifique entre les communau-tés, et un relief propice aux caches et infiltrationsde tous types caractérisent ce secteur aux pay-sages grandioses. « Le bonheur d'évoluer avecles très agiles VBL bien adaptés au milieu com-pense les inquiétudes nées de l'étendue du sec-teur », ajoute un maréchal des logis. Il est vrai queles légionnaires cavaliers sont bien lotis. A eux lesgrands espaces, les rencontres insolites,les patrouilles dans des espaces superbes. Enquatre mois, ils vont parcourir plus de 4 000 000kilomètres au cours de 2 000 patrouilles en véhi-cules. Pour les fantassins qui les accompagnent,chaque mission de présence dans ce secteur estun dépaysement et la découverte d'un autre Afgha-nistan, plus rural et sauvage, plus accueillant etplus farouche à la fois. Bref ! l'Afghanistan rêvé.

Mais l'état d'un pays qui sort de plus de vingtans de guerre rappelle les légionnaires à la réali-té. Ici le danger dû aux mines est omniprésent.Lune des tâches essentielles est de vérifier la via-bilité des axes. Il existe des cartes des zonesminées, mais celles-ci évoluent. La société HaloTrust, par exemple, assure le gros du déminagesous le patronage de l'ONU. Cependant le dan-ger est permanent. Les intempéries déplacent desmines. Les travaux ^^^ de reconstructionou dans les ^P*t^ c h a m p s

mettent à jour des objets non exploses2.Le détachement du génie composé d'une sec-

tion de sapeurs légionnaires et d'une équiped'EOD est toujours sur la brèche. Ces hommescumulent soutien aux patrouilles, alertes au pro-fit de la brigade, fouilles de caches de munitions3.Les interventions inopinées ne sont pas rares.Dans une vigne, c'est un obus non explosé et tropabîmé pour être déplacé qui est détruit sur place.Dans ce pâturage, c'est une roquette encore dansson emballage ; ailleurs, c'est un animal qui sautesur une mine antipersonnel ou un paysan quidépose au bord de la route une mine antichardéterrée par sa charrue. Le chef des EOD, adju-dant-chef chevronné, dispense son savoir aux jeu-nes sapeurs chargés de ramasser les divers•< objets ». Les légionnaires sont aux anges. Cesleçons sont à la fois pédagogiques et psycholo-giques. Elles améliorent la connaissance des hom-mes et démystifient le danger sans le négliger.Sinon il se transforme en psychose, comme cesmessages venus de sources américaines qui fontétat d'un mortier repéré sur le toit d'une maisondans notre secteur et qui s'est avéré être le tuyaucoudé d'une cheminée ; ou encore cet obus poséau bord de l'axe Bottle pour être ramassé et quiétait désigné du nom d'IED4. « Céder à cette ten-dance, c'est déjà être victime du procédé dont lebut est bien de terroriser et d'accroître l'insécuri-té », souligne un officier du centre des opérations.

La situation à Kaboul est évolutive. Le calme estsouvent précaire. Si la population est lasse, les habi-tudes restent. Le silence s'impose envers les étran-gers. La méfiance envers le processus de désar-mement et démobilisation (DDR) est permanente.Les chefs militaires démobilisés n'hésitent pas àdire que si le besoin s'en fait sentir ils récupérerontleur bien. Quant aux saisies de munitions et d'ar-mement, elles sont contras- ^^tées. Si le BATFRA dePam/rXobtient la palmeavec plus 86 tonnes sai-sies ou récupérées,soit près des quatrecinquièmes de la

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Ci-dessus et ci-contre.Nord-Shamali, à 50 kilomètres de Kaboul.Ce type d'exercice d'évacuation de blessés,avec un passage en zone minée, est vital.En milieu interallié, langues, procédureset matériels sont différents, et le nombre réduitd'équipes spécialisées impose de se connaîtreà fond, car des vies sont en jeu.

totalité des prises dans la zone de la FIAS, les armesindividuelles récupérées restent plus rares. Le nom-bre de munitions de gros calibre diminue. Et celuides remises volontaires d'armement individueln'augmente guère. « Dans un pays où des com-bats ont encore lieu et où culturellement posséderune Kalachnikov est le signe que l'on est un hom-me, il est illusoire de croire que les Afghans n'ontplus d'armement individuel », explique un officierdu bataillon. Il est cependant possible de compo-ser avec cet état de fait. Il faut savoir qu'il reflète uneI réalité culturelle et la survivance d'un sentiment d'in-

sécurité causé par une guerre qui fut en partie civi-le. Récemment la police de la route a demandél'appui des Français pour mettre fin à un différend

4. Improvisée/ Explosive Device, dispositif explosifdestiné à exploser au passage des convois, dont

l'utilisation est meurtrière pour lessoldats et les populations civiles. Ces

objets plus ou moins artisanaux sontminutés mais aussi commandés àdistance avec des télécommandes

de porte de garage, par exemple. Ence domaine, les artificiers donnent libre

cours à leur inventivité 17

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sur l'utilisation de terrains. La querelle avait dégé-néré en début de conflit armé entre deux factionsde familles antagonistes. Dix Kalachnikov plus oumoins récentes ont été saisies.

L'Afghanistan a longtemps été surnommé« le royaume de l'inso-lence ». Non sansraison : la défiance enversle pouvoir central est une constante.Lautorité a toujours été mise à mal, qu'elle vîntdes Anglais au XIXe siècle, du roi au début du XXe,puis des Soviétiques et enfin des talibans.

Le cœur du problème pour les troupes étran-gères — de la FIAS comme celles de la coalitionsous commandement américain — est le rensei-gnement. « II faut non seulement connaître la situa-tion en cours, mais aussi appréhender les chan-gements d'alliance, fréquents dans ce pays », pré-cise un officier de renseignement. Un incident banalpeut être instrumentalisé et mettre le feu aux pou-dres. Les militaires sont conscients qu'il existe desobstacles à une connaissance parfaite de leursinterlocuteurs afghans. « La culture n'est pasl'obstacle majeur. Les Français savent prendre letemps de parler et d'écouter, et puis le fait religieuxest bien intégré dans nos rangs. Le souci est desavoir qui est l'allié de qui, pourquoi, et si possiblecombien de temps », dit le spécialiste renseigne-ment. Et d'ajouter : « La multiplication des inter-venants, et le vrai rôle de chacun, est un jeu diffi-cile, aussi complexe que le jeu d'échecs, fort pri-sés ici. » Mais un autre « jeu » est aussi populaire,les combats de chiens, contraste afghan. C'est direla diversité des interlocuteurs, et la complexité dechacun.

Le « Rens »f clé du succèsCôté afghan, policiers de Kaboul, policiers de la

route, département pour la sécurité nationale (NOS),sans parler des diverses autorités politiques, reli-^gieuses et morales, composentmosaïque qui se recompose souvent.Côté occidental, les piliers de la j/ recons-truction (justice, armée, police, lutte antidro-gue, désarmement des mili- ces...) sont pris encompte par diverses nations avec leurs propres pro-cédures et spécificités. Et puis les agences améri-caines, CIA, DEA et d'autres moins connues dontcertaines sont privées, débarquent avec des moyensénormes, mais pas toujours adaptés, et des pro-cédures étrangères à la mentalité locale.

Si le BATFRA parvient à se passer de cesmanœuvres souvent souterraines, et par trop poli-tiques, chacun à son niveau obtient

Srgjg. .

•*»!?*••«ams,,*,* *_ * -S^

Ci-dessus.Baïonnette au canon et lunette de visée pointrouge Pirat sur le Famas, ou comment rester •authentiquement fantassin au XXIe siècle.

Lors d'un parcoursde tir bataillon, cetadjudant chef écouteles ordres donnés parle lieutenant chefde section, son rôleétant de confirmer audirecteur d'exercicela validité des ordresdonnés. Avec plus de200 tireurs déployés,coordination etsécurité sontvitales.

"18•«*:

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les renseignements nécessaires à l'exécution de lamission. Le but permanent est de préserver la liber-té de manœuvre du bataillon. La charge en revientau capitaine Négroni, officier à titre étranger, tren-te ans de Légion. Lofficier de renseignement dubataillon organise et planifie le travail d'un déta-chement léger d'intervention issu de l'unité derecherche humaine du 27e bataillon de chasseursalpins d'Annecy. Léquipe de chasseurs est aux ord-res d'un jeune capitaine et composée de spécia-

listes « pointus ». Pour les « Rens » du bataillon,discrétion ne signifie pas confinement. Les rensei-gnements glanés par les unités sur le terrain sontprécieux. « Ils permettent de recouper les nôtres,et nous conduisent aussi sur les bonnes pistes »,observe l'officier de renseignement. Et ces bonnespistes conduisent aux bonnes caches. Mais il nesuffit pas d'obtenir un renseignement. Les chas-seurs partent en mission d'observation jour et nuitpour préciser l'information. De son côté, le capitai-

ne Négroni recoupe les infos avec les éléments enpossession du lieutenant-colonel conseiller rensei-gnement pour le théâtre afghan. « Surtout, je télé-phone et rends visite à mes interlocuteurs des ser-

Ci-dessous.Exercice de tir de précision pour ces TE

de plusieurs contingents de l'ISAF. Trois armesde tir à longue distance : l'Accuracy en 7,62 mm

des Belges, le PGM en 12,7 mm des Français,et la Mac Millan là aussi en 12,7 avec modérateur

de son pour les Canadiens.

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vices de police et de renseignement afghans »,précise le capitaine. Ici tout passe par des relationspersonnelles. Le respect se gagne et n'est jamaisdonné. Les chefs afghans, vétérans de nombreuxcombats, savent évaluer les hommes. « C'est peut-être là la clé du succès du bataillon », souligne lecapitaine, ancien de Kolwezi.

Du légionnaire en patrouille à pied ou en VBL,en passant par l'éclaireur du DLI, chacun saitque son action, et la façon dont il est perçu, influesur le sort des autres. Linformation circule vite.C'est le pays de la rumeur, et celle-ci peut enflertrès vite. C'est pourquoi le terrain doit être tenuen permanence, partout où cela est nécessaire.

Là, c'est le lieutenant Leinekugel le Cocq du1er REC qui vient assister comme tous les lundisà la réunion des malek (équivalents des maires,élus parmi les anciens) du district de Shakarda-ra. Cela permet de faire le point sur les préoccu-pations des villageois, de collecter des informa-tions et d'évaluer la situation sécuritaire. Après laréunion, le lieutenant s'entretient avec le chef dela police et planifie des patrouilles communesavec son peloton. Dans un village pachtoun, lemaréchal des logis Rogozan, chef de patrouille,

Ci-contre.Cet éclaireur vient de reconnaître plus de

100 mètres de tunnels avec les démineurs. Parmiles caches talibanes redécouvertes, certaines

ont un sol cimenté et des vestiges d'installationsélectriques.

Ci-dessous.Ce sapeur du REG aligne, sous les yeux avertisdu spécialiste en déminage (EOD), des roquettesde ftPG-7 qu'un simple nettoyage peut rendreutilisables sans délai.

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palabre. Il a pour objectif la mise à jour d'unecache qui l'occupe depuis plusieurs semaines.

Pour le DLI, c'est la tournée des contacts offi-ciels et des « correspondants ». Il faut aussiconvaincre ses interlocuteurs d'accepter de ren-dre les armes et munitions. Le plus important estque les Afghans fassent aussi la démarche, sinonce sera l'impasse à court terme. Tant qu'ils accep-tent de rendre des armes ou qu'ils ferment lesyeux sur les découvertes, c'est déjà une réussite.Pour cela la méthode « douce » fait ses preu-ves. Il est contre-productif de déployer desmoyens dans les villages. Apparaître comme unintrus peut ruiner les efforts de plusieurs man-dats. Petit à petit la confiance s'installe, et cha-cun comprend son intérêt. La saison est bonne,et les Afghans semblent aspirer à la paix. Lesanciens réunis en choura conviennent que lesarmes doivent être remises. Ou alors ils accep-tent d'eux-mêmes telle ou telle fouille. Lors desopérations, il y a toujours sur place au moins unofficier de police ou des forces de sécurité inté-rieure. Léclaireur du DLI prévient que les Fran-çais seront nombreux si la cache est importan-te, mais que tout sera fait dans la discrétion.

Pour une « fouille moyenne », il y a toujours unélément du génie et un EOD. Un peloton recon-naît la zone, et une section de fantassins la sécu-rise. Selon l'importance du site à fouiller, des ren-forts sont demandés à la brigade : des chiensdressés à la recherche d'explosifs d'une équipede sapeurs norvégiens, ou un blindé allemandFennek d'observation et de détection, ou encoreune patrouille de Reco blindée canadienne desRoyal Canadian Dragoons sur les blindés Coyote5.

Le travail sur le terrain avec les alliés est toujourspayant. Il permet au moins de montrer aux Afghansla réalité de la multinationalité. « Surtout, cela com-ble les vides capacitaires de l'un ou de l'autre »,observe un officier de l'escadron. Chaque paysayant des limitations d'emploi de ses moyens, il estpossible en connaissant les procédures des alliésde choisir « sur étagère » pour obtenir le meilleurcompromis. Système D français là encore, amélio-ré par l'expérience des missions interalliées.

L'interaction de toutes les composantes dubataillon et des renforts ponctuels permet derépondre à des situations jamais simples et pou-vant dégénérer très vite. La présence des poli-ciers afghans, et l'aval de leurs chefs, ne dispen-se pas de la plus élémentaire prudence. « Lelégionnaire s'adapte à toutes les situations maisne sacrifie jamais sa capacité à combattre », pré-cise le chef de bataillon Calmon, assistant mili-taire au sein de Pamir X.

Cet officier, pur produit du 2e REI, a organisédeux exercices majeurs pour le bataillon. Il s'estagi, tout en remplissant les missions quotidiennes,de faire participer tout le bataillon à une manœu-vre à tir réel sur un champ de tir de l'armée natio-nale afghane (ANA). Cette dernière, dont une gran-de partie des officiers est formée par les Françaisde l'opération Epidote, a gracieusement mis à

Ci-dessus.Obus chinois ou britanniques, roquettessoviétiques, mines italiennes, caissesde cartouches de 14,5 mm tchèques,les destructions donnent lieu à un inventairedes moyens utilisés depuis plus decinquante ans durant les guerres de libération.

Ci-contre.Cette préparation de destruction par les sapeursdu 1er REG n'est qu'une infime partiedes 86 tonnes mises à jour par le BATFRA,et de ce qu'il reste sans doute à découvrir...

5. Version Reco du très réputé et très répandu LAVIII. 21

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Lors du parcours de tir bataillon durantun « combat de rencontre », tir aux armesindividuelles depuis les véhicules. La riposteà une éventuelle embuscade est l'undes savoir-faire critiques pour les équipagesde VBL.

Sans moyens en hélicoptères, turcs ouespagnols durant le 7e mandat de l'ISAF,l'élongation de la zone de responsabilitéet le danger permanent de ce paysaux-7 millions de mines resteraientinacceptables aux Occidentaux.

disposition son Live Pire Range n° 5. Le terrain esdà la fois ouvert et compartimenté. Il est typique-jment afghan : 6 kilomètres de profondeur sur 2 kiojmètres de large, de pitons rocheux, d'étenduessablonneuses, d'oueds, de pistes roulantes ou caslsantés, et... une décharge publique. En fond adtableau, la montagne offre un panorama de ca-apostale. Pendant deux fois trente-six heures, lellégionnaires vont faire étalage de leur savoir fa -aC'est bien d'une manœuvre et pas d'un parce .,*de tir qu'il s'agit. Les tirs de missiles Milan et E-Jont lieu à partir des blindés, dans la foulée deamise en place, sur des épaves de BMP et de B™.

Maintenir les standardsélevés de la Légion

Les tireurs d'élite engagent à plus d2 800 mètres. Des groupes canadiens et beloasont venus se greffer sur l'exercice. « On ne rênise pas une invitation à venir s'entraîner, sur*avec les légionnaires », nous disent de conce-. Icommandant de compagnie belge issue du 1 f iligne et le sous-officier chef de groupe snipe-1Royal Canadian Régiment. Sur la position de tr •reconnaît les PGM 12,7 et FRF2 7,62 frança s •=Accuracy en 7,62 des Belges, un C7 à luner.r 35,56, un AR 10 à silencieux en 7,62, et ce*McMillan 12,7 dont un modèle muni d'un réduo»de son. Les tireurs travaillent plusieurs cas de re : tir de circonstance, sur position préparée"]coordonné. Les échanges se font naturellerdLadjudant, chef de la section appui de la ccrJgnie d'infanterie, déclare : « Les TE sont de; : îsionnés, les échanges d'infos fusent, chacun 3l

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pare son matériel, ses tables de tirs, et vante lesmérites de son matériel. Entre snipers, il y a rare-ment de problèmes de langage. » En fin d'exerci-ce, les Canadiens enjoignent leurs camarades àparticiper à une « concentration sniper » interna-tionale qui se déroulera au Canada en septembre2005.

Mais les plus enthousiastes sont les fantas-sins. Sur ce terrain varié et ce site ouvert, ils peu-vent manœuvrer, progresser en VAB à pleinevitesse, « comme dans la réalité pour éviterd'être engagés par un tir missile », commenteun chef de section, s'infiltrer et — cerise sur legâteau — charger baïonnette au canon aprèsun lancer de grenades offensives.

Les sapeurs de la section de génie combat nesont pas oubliés. Ils confectionnent des chargesallongées, les fameux « bengalores » rendus célè-bres par le film Le Jour le plus long. Le lieutenantchef de section, l'œil pétillant, savoure par avancel'explosion sèche et massive qui va suivre. Et il n'estpas déçu. Les VAB s'infiltrent, dans la foulée, par lecouloir ainsi réalisé dans le réseau de barbelés.«Dans la réalité, il y aurait aussi eu des mines, maisavec le dosage des charges, elles auraient été souf-flées, elles aussi », précise un sapeur.

La manœuvre est ardue. Il s'agit pour les capi-taines de la compagnie d'infanterie et de l'esca-dron qui commandent à tour de rôle le sous-grou-pement engagé d'allier coordination des feux etdu mouvement de toutes les composantes, infan-terie, blindés VAB, et VBL, ainsi qu'un Pandurbelge qui s'est joint à l'escadron. « Et sur ce site,ils sont servis », souligne, goguenard, le direc-teur d'exercice. Toutes les armes en dotation surle théâtre sont utilisées, de l'AA 52 au lance-gre-nades individuel en passant par la Minimi. « Maisla reine aujourd'hui, c'est la 12,7 », insiste le CBACalmon. Les distances offertes sur le parcours per-mettent effectivement à la vénérable mitrailleusede donner encore toute sa mesure.

La manœuvre se poursuit jusqu'à la nuit tom-bée. Le tir de nuit se fait avec les désormais nom-breux moyens de vision nocturne OB 50 ou OB 70.Le groupe mortier effectue un tir d'éclairementaprès mise en place tactique. Lors de l'exerciceprécédent, ils avaient effectué un tir dans la fouléeaprès héliportage par les hélicoptères Cougar dudétachement espagnol. Un grand moment pourles légionnaires, dont la sécurité à bord des appa-reils était assurée par des servants de mitrailleu-ses espagnoles, à la fois charmantes et redouta-bles derrière leur MG 3, montées en sabord.

Le soir au bivouac, chacun se reconditionne pourle tir du lendemain ou pour le retour auxmissions quotidiennes. Au cas où la routine mena-cerait de s'installer, le centre des opérationsconcocte le 75e ordre d'opération dubataillon. Fouille de caches, recherched'armements, sécurisation d'iti-néraires, l'éventail est large,et le terrain varié. Pourtantil faut aussi revenir inlas-sablement aux mêmes endroits. Ils peuvent êtreréutilisés après une première fouille. Et puis la région

Ci-contre.Ce chef de groupe va bientôt donner l'ordre

de l'assaut. On note les genouillères, très utilessur ce terrain fait de pierres acérées.

offre un réservoir inépuisable de caches, grottes,puits, galeries souterraines naturelles ou artificiel-les. Dans les années quatre-vingt, 100 000 Sovié-tiques ne sont jamais venus à bout de ces déda-les inextricables. Certains abris avaient des paroiscimentées et des installations électriques. La plu-part sont désaffectés, et des porcs-épics de bon-ne taille les ont annexés ; d'autres servent encore,et certains sont même bien pourvus, comme celui-ci où 12,5 tonnes de munitions ont été trouvéesparmi lesquelles plus de 100 roquettes de 122 mm.

Demain une fouille ne donnera rien, et puis uneautre dévoilera un véritable arsenal. Sur tel site, plusde huit tunnels et goulets sont reconnus. Les maté-riels montagne de l'URH 27 seront même mis enœuvre par les éclaireurs au profit d'un sapeur démi-neur norvégien qui plonge littéralement dans un puitssombre de près de 20 mètres de profondeur.

Si, au combat, le terrain commande, ici toutamateurisme est interdit. Les légionnaires et lesautres membres du bataillon français l'ont biencompris. En première ligne ou en soutien, ils s'in-vestissent avec une motivation sans faille. Le 30avril dernier, ils ont célébré le 142e anniversaire

de la bataille de Camerone, symbole du sacrifi-ce et du nécessaire accomplissement de la mis-sion à n'importe quel prix. Une première sur lesol afghan pour la Légion. Et avec un caractèreparticulier puisque quatre régiments de Légioncomposent le détachement6. Sans oublier les sol-dats venus de régiments et établissements detoute l'armée de terre. « II y a aussi des aviateurs,un groupe de désignateurs aériens et les per-sonnels de l'escale air qui nous relient à la basefrançaise de Douchanbé au Tadjikistan », préci-se un officier du centre des opérations

Le 6 juin le mandat Pamir X aura vécu,laissant la place au onzième mandat. D'ici là, leBATFRA aura sans doute atteint les 65 opéra-tions conduites en quatre mois, dont la saisie de24 caches d'armements. Dans le secteur fran-çais, les légionnaires ont réalisé au pied de lalettre le contrôle continu du milieu. O

L'auteur remercie particulièrement le lieute-nant-colonel Fouilland, chef des opérations du2? REI et commandant du groupement tactiquede Pamir X.

6. 2e REI, 1er REC et 1er REG, auxquels il convientde souligner la participation de légionnaires du 4e REde Castelnaudary.

7. Les TACP (Tact/cal Air Control Party) selon laterminologie OTAN.

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