1

Click here to load reader

LA LIBERT É MARDI 21 FÉVRIER 2012 MAGAZINE 25 · PDF filePour la Journée des maladies rares, ce sa - ... leur place sur la liste des spé - ... quantaine de familles en Suisse,

  • Upload
    ngodan

  • View
    217

  • Download
    2

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: LA LIBERT É MARDI 21 FÉVRIER 2012 MAGAZINE 25 · PDF filePour la Journée des maladies rares, ce sa - ... leur place sur la liste des spé - ... quantaine de familles en Suisse,

LA LIBERTÉ MARDI 21 FÉVRIER 2012

MAGAZINEMARDI

2526-28 LOCATION-VENTE29 CINÉMA30 RADIO-TV31 JARDINAGE32 MÉTÉO

Maladies rares: «C’est l’arbitraire»SANTÉ • En Suisse, les patients atteints de maladies orphelines ont peur de se voir couper lesremboursements médicaux. Explications d’Esther Neiditsch, présidente de l’Alliance ProRaris.ANNICK MONOD

C’est combien, un traitement médical«trop cher»? Depuis un peu plus d’une an-née, un demi-million de Suisses atteintsde maladies dites «rares» se posent cettequestion. Avec inquiétude. En novembre2010, en effet, le Tribunal fédéral (TF) adonné raison à un assureur qui refusait derembourser les soins d’un patient atteintd’une maladie rare au-delà d’un plafondde 100000 fr. par année. Dans ce cas parti-culier, le traitement aurait coûté entre750000 et 900000 fr. par an. Trop cher,pour une efficacité thérapeutique nonprouvée, ont estimé les juges.

Le problème, c’est que dans le sillagede ce cas particulier, c’est toute la relationentre assurances et patients atteints demaladies orphelines qui s’est durcie. Leparlement s’en est ému dès le printempsdernier: trois interventions ont dénoncéun «rationnement» des soins, et le risqued’arbitraire ou d’inégalités. Rapidement,l’Office fédéral de la santé publique et leConseil fédéral ont rappelé que l’arrêt duTF ne constitue pas une nouvelle norme.Et que chaque demande de rembourse-ment doit être évaluée au cas par cas.

Pas de quoi rassurer complètementles patients atteints de maladies rares. Aen croire l’Alliance ProRaris, qui cha-peaute une quarantaine d’associations,plus de nombreux patients isolés enSuisse, ceux-ci ont toujours peur de setrouver unilatéralement privés de soins,simplement pour avoir la malchanced’être porteurs d’une maladie peuconnue, et dont les traitements, parfoiscoûteux, ne sont pas toujours reconnus.Pour la Journée des maladies rares, ce sa-medi, ProRaris relance le débat sousforme d’un congrès à Lausanne. Le pointavec sa présidente, Esther Neiditsch.

Le jugement du Tribunal fédéral a suscitébeaucoup de craintes. A-t-il eu des consé-quences concrètes pour les patients?Esther Neiditsch: Oui. Le jugement duTF devait s’appliquer à un cas particulier.Mais dans les faits, beaucoup d’assurancesen ont tiré une règle générale. Plusieurs denos membres ont vu leurs prestationscoupées, parfois aussi pour des frais médi-caux inférieurs à 100 000 fr. par an. La si-

tuation légale actuelle génèreune grande insécurité. Et avec la modifica-tion de l’ordonnance sur l’assurance-ma-ladie OAMal, début 2011, il incombe auxassureurs de décider de ce qu’ils rembour-sent ou non. Sur quelle base? Ce n’est pasclair. Une assurance peut décider de rem-bourser ici, et pour un cas analogue dansun autre canton elle ne remboursera pas.C’est très arbitraire.

Comment changer cela? Les médecins-conseils des assurances nesont pas outillés pour décider de ces soins.Sur les 7000 à 8000 maladies rares recen-sées, il y a des cas qu’un non-spécialiste nevoit qu’une fois dans sa vie professionnelle.Ce qu’il faut, c’est créer des centres d’ex-perts pour les maladies rares: à eux de déci-der quelle thérapie est adéquate pour quelpatient. Et une fois que ces spécialistes ontdéfini les soins, ceux-ci devraient être prisen charge, quelle que soit l’assurance.

Justement, l’OFSP a annoncé fin 2011 leprojet d’une «stratégie nationale» maladiesrares. C’est le fruit de votre mobilisation?

En grande partie, certainement. Dans lemonde entier, les plans nationaux ont tou-jours été lancés sous la pression des pa-tients et des familles. Le pays le plusavancé en la matière étant la France.

Et pourquoi la Suisse est-elle en retard? Globalement, notre système de santémarche assez bien. Mais dans le cas desmaladies rares, le système est très compli-qué, notamment à cause du fédéralisme.On aurait par exemple besoin de registresnationaux des maladies, et ça pose pro-blème au niveau de la législation.

Ne faudrait-il pas carrément viser uneéchelle internationale?Si, bien sûr! Face à des maladies qui necomptent que quelques centaines de casdans le monde, on ne peut pas se permet-tre d’agir seuls. C’est beaucoup plus effi-cace et économique de travailler en ré-seau plutôt que de tout réinventer cheznous. Dans l’idéal, le diagnostic et la thé-rapie devraient être posés dans un centreexpert, situé en Suisse ou à l’étranger selonles cas. Ce centre donnera ensuite des ins-

tructions au médecin de proximité quisuit le patient.

Certains traitements d’une maladie rarepeuvent dépasser les 500000 fr. par an.Pourra-t-on vraiment payer cela? Dit comme cela, ça paraît énorme. Maistoutes les maladies rares n’occasionnentpas des coûts de ce genre. Pour 98% d’en-tre elles, il n’existe tout simplement pas detraitement. Et d’après les statistiques de lacaisse Helsana, le coût total des médica-ments «rares» ne représente que 3,5% desremboursements de médicaments de l’as-surance de base. Un pays riche comme laSuisse peut se le permettre.

Le débat actuel a-t-il sensibilisé le public? Oui: ce n’est pas parce que ses maladiessont «rares» qu’elles concernent peu degens. Toutes ne sont pas gravissimes ni in-validantes, mais cela fait beaucoup demonde qui doit faire face à de grandescontraintes au quotidien. I> Congrès à l’occasion de la Journée mondiale desmaladies rares, samedi 25 février à l’Université deLausanne. Progr. et inscr.: www.proraris.ch

Les maladies rares (moins d’un individu sur 2000) causent un grand isolement à ceux qui en souffrent. KEYSTONE

6% DE LA POPULATION TOUCHÉEOn dit d’une maladie qu’elleest «rare» lorsqu’elle touchemoins d’un individu sur 2000.Aujourd’hui, on en recenseentre 7000 et 8000, et 80%d’entre elles ont une originegénétique. Elles concernent 6à 8% de la population, soit undemi-million de Suisses.Caractéristiques: les maladiesrares sont des affections chro-niques, évolutives, souventgraves et qui peuvent à termemenacer la vie.

Les maladies rares sont desaffections complexes, peuconnues et aux symptômestrès divers, donc difficiles àdiagnostiquer. Les patientsdoivent souvent recourir à plu-sieurs médecins avant de

savoir enfin de quoi ils souf-frent – au risque d’être prispour des simulateurs.

On dit des maladies raresqu’elles sont «orphelines», carelles sont trop peu fréquentespour susciter des recherchesimportantes, avec les frais quecela suppose. Raison pourlaquelle la plupart des mala-dies rares sont à ce jour sanstraitement pour les guérir.Quant aux traitements exis-tants, leur reconnaissancepose problème: sur une cen-taine de médicaments «rares»autorisés par Swissmedic, unequarantaine seulement ontleur place sur la liste des spé-cialités remboursées par l’as-surance de base. AMO

«Pour un mêmecas, une assuranceremboursera, etl’autre refusera»

ESTHER NEIDITSCH

«Le ciel est tombé sur ma tête»«Lorsque ma fille est née, tous les médecins ontaccouru en salle d’accouchement pour voir le «petitmonstre». Mélina pesait seulement 1,6 kilo, et sespleurs avaient exactement le son d’un chat quimiaule.» Brigitte Jaques, d’Estavayer-le-Lac, aconnu le dignostic au bout d’une semaine: sa fillesouffre du syndrôme du cri du chat. Une maladiegénétique rarissime (elle touche une naissance sur50000), qui cause de graves handicaps physiques etmentaux. Ce printemps, Mélina fêtera ses 18 ans àla Fondation Les Buissonnets à Fribourg, où elle vit.Pour mère et fille, la vie avec cette maladie rare a étéun vrai parcours du combattant.

«Les médecins ne savaient presque rien decette maladie. Ils ont seulement pu me dire quec’était très grave, et que ma fille ne vivrait probable-ment pas. Ça a été très dur», raconte Brigitte Jaques.«Je ne connaissais aucun autre parent dans ce cas,et il n’existait aucune plate-forme où m’adresser.»En 1999, la Staviacoise, entre-temps mère de 3 en-fants, a lancé une association qui regroupe une cin-

quantaine de familles en Suisse, France, Belgiqueet au Canada. L’occasion d’échanger aussi destuyaux médicaux. «Pour les médecins, la maladierare est un «cas intéressant». Mais quand on a es-sayé un traitement et que ça ne marche pas, ilsn’ont souvent rien d’autre à proposer. J’ai beaucoupdû aller à la pêche aux renseignements, sur internetou à l’étranger, constate Brigitte Jaques. «Oui, uncentre de compétences où des experts travaillenten réseau, ce serait vraiment bien.»

Financièrement, la maladie pèse aussi. BrigitteJaques s’est arrêtée de travailler 12 ans pour s’occu-per de sa fille, totalement dépendante. «On a dûpayer beaucoup de choses de notre poche», note-t-elle. Et affronter des montagnes de papiers, entreassurance-invalidité et caisse-maladie. «Les assu-rances ne savent jamais où nous classer: la maladierare, ce n’est pas prévu. Résultat: différentes fa-milles sont enregistrées sous différents chiffres, etne touchent pas les mêmes prestations.» AMO

EN BREF

UN CASTING POUR CHANTER À LA TÉLÉFRIBOURG Vous adorez chan-ter en public et vous rêvez depasser à la télé? Alors «Paque-bot», le nouveau projet d’émis-sion musicale de la RadioTélévision suisse, est pourvous. Pour choisir les protago-nistes de cette série qui offriraun «cocktail original de réalitéet de fiction», la chaîneromande organise un casting,jeudi 1er mars au CO de Joli-mont à Fribourg. Renseigne-ments et inscription sur le siteinternet de la TSR. AMO> www.tsr-ch/divertissement

FESTIVAL DE BIENNE

L’heure est àl’optimismeLes organisateurs du Festivaldu film français d’Helvétie(FFFH) peuvent préparer serei-nement la 8e édition de la mani-festation qui se déroulera àBienne du 12 au 16 septembre.Le FFFH ne connaît en effet plusles mêmes soucis financiers queceux rencontrés en 2011.

«Le ton est moins dramatiqueque l’année dernière et nous par-tons optimistes», a lancé hier àBienne Christian Kellenberger,membre du comité d’organisa-tion. Il y a une année, la manifes-tation avait dû faire face au dé-part de son principal sponsor.Aujourd’hui, plus de 90% despartenaires ont confirmé leursoutien au FFFH. Le comité d’or-ganisation doit encore réunir80000 francs, la moitié du mon-tant de 2011. Mais il n’est pas in-quiet grâce à la campagne de ré-colte de fonds «Les Amis duFFFH.» Le budget pour 2012s’élève à 1,9 million de francs. Laprogrammation ne sera dévoiléequ’en septembre. L’objectif est deréaliser à Bienne un grand festi-val de cinéma au niveau de laqualité, a souligné Christian Kel-lenberger. L’année dernière, cesont 10400 festivaliers qui ont as-sisté aux projections du FFFH,une fréquentation en hausse de10%.

Cette manifestation doit faireface à une concurrence avecd’autres festivals de cinéma quise déroulent aussi en automne,comme ceux de Zurich, Genèveou Lucerne. Autre inquiétude, leFFFH, qui s’adresse aussi au pu-blic germanophone, estconfronté à la diminution dunombre de films français sous-ti-trés en allemand. Ce procédécoûte très cher aux distributeurset n’est guère rentable. ATS

LA MIGRATION COMMEMÉTAPHORECONFÉRENCE Le pédopsy-chiatre Jean-Claude Métraux,qui travaille depuis longtempsavec les migrants, sera jeudi àFribourg pour présenter sonouvrage intitulé «La Migrationcomme Métaphore», paru auxEditions La Dispute. Dans celivre, l’auteur réfléchit aux sensde la migration, qu’elle soitgéographique, sociale, cultu-relle, temporelle… La confé-rence commence à 10h30, ch.des Mazots 2, à Fribourg. LIB