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La localisation et la magnitude du séisme du 5 février 1663 (Charlevoix) revues à laide des mouvements de terrain 1 Jacques Locat Résumé : Le séisme du 5 février 1663 est le premier séisme historique violent au Canada dont la magnitude M est estimée comme étant autour de 7. Il a laissé dans le paysage plusieurs signatures qui en révèlent létendue et lintensité. Côté terres- tre, on note des glissements de terrain dans diverses régions du Québec dont la région de Betsiamites, du Saguenay, de Charlevoix et de la Mauricie. Côté subaquatique, plusieurs signatures de mouvements de terrain ont été attribuées à ce séisme, particulièrement le long de lestuaire du Saint-Laurent, du fjord du Saguenay et quelques lacs localisés sur le Bou- clier laurentien et probablement dans les Appalaches. Le volume minimum cumulé des glissements de terrain associés au séisme de 1663 est de 1,7 km 3 . À partir de lanalyse des données reliées aux mouvements de terrain causés par le séisme, et de lutilisation de méthodes empiriques pour lestimation de la magnitude, la localisation de lépicentre proposée du séisme serait située sur le Bouclier canadien au nord du Saint-Laurent et le séisme aurait une magnitude M minimale de 7,2 ± 0,2 et une valeur maximale qui pourrait sapprocher de celle prévue pour la région de Charlevoix qui est de M = 7,8 ± 0,6. Motsclés : séisme, magnitude, intensité, glissements de terrain, glissements sous-marins, épicentre, localisation. Abstract: The earthquake that occured on 5 February 1663 is the first strong historical earthquake recorded in Canada and is currently estimated to have been located near La Malbaie and to have had a magnitude M of about 7. It left various signa- tures in the landscape that reveal its extent and significance. In the terrestrial domain, landslides were observed in various regions of Quebec, including Betsiamites, Saguenay, Charlevoix, and Mauricie. In the subaqueous domain, related mass movements were found along the St. Lawrence Estuary, the Saguenay Fjord, and various lakes on the Canadian Shield and likely also in the Appalachian. The minimum cumulative volume of mass movements associated with the 1663 earthquake is 1.7 km 3 . From the analysis of landslide-related data and using empirical methods for magnitude estimation, the position of the epicentre would be located in the Canadian Shield to the north of the St. Lawrence River with a minimum magnitude M of 7.2 ± 0.2 and a maximum magnitude that would be close to the maximum for the Charlevoix area, which has been previously estimated at M = 7.8 ± 0.6. Key words: seismicity, magnitude, intensity, landslides, underwater landslides, epicentre, location. Introduction Le séisme du 5 février 1663 est lun des séismes histori- ques les plus forts ayant été ressentis dans lest de lAmérique du Nord, avec une magnitude actuellement estimée à M = 7 (Smith 1962; Lamontagne 2004; M est ici considéré comme étant la magnitude de moment). À ce moment-là, loccupa- tion du territoire était limitée tout autant que les observations, dont la plupart ont été rapportées par des écrits dont le style était souvent coloré (Gouin 2001). Ce séisme majeur fait par- tie de la banque de données ayant servi à la confection de la carte de zonage sismique du Canada (fig. 1) et dont lélabo- ration constitue un travail minutieux et essentiel pour le Can- ada, car elle est un outil important permettant latténuation et la prévention des risques liés aux tremblements de terre (Ba- sham et al. 1979; Adams et Atkinson 2003). Ainsi, pour ce qui est du Québec, le portrait sismique a été élaboré à partir dobservations récentes dactivités sismiques ainsi que par la prise en compte de certaines données historiques limitées aux témoignages rapportés dans les documents historiques antér- ieurs à lavènement des sismographes (Gouin 2001). Au Qué- bec, les quatre zones lactivité sismique est plus importante se moulent en grande partie sur des composantes structurales de la géologie du territoire, cest-à-dire (i) le gra- ben de la rivière des Outaouais, (ii) la zone de Charlevoix (associée à lastroblème), (iii) le graben du Saguenay et (iv) le rift du Saint-Laurent, particulièrement dans la région de Sept- Iles (fig. 1). Le zonage sismique présenté à la figure 1 est très sensible aux séismes historiques majeurs. Par exemple, si on regarde la forte valeur accordée au secteur des Grand Bancs de Terre-Neuve (GB, fig. 1), elle est en fait le résultat dun seul séisme majeur connu dans ce secteur, lequel est survenu en 1929 (M = 7,2). Comme autre exemple, prenons le séisme de 1988 (M = 5,9, Du Berger et al. 1991; Lamontagne 2002; fig. 2) au Saguenay qui a entraîné une révision de la Reçu le 15 janvier 2009. Acceptée le 10 mars 2011. Publié au www.nrcresearchpress.com/cgj, le 16 août 2011. J. Locat. Laboratoire détudes sur les risques naturels (LERN), Département de géologie et de génie géologique, Université Laval, Québec, QC G1K 7P4, Canada. Courriel de correspondance: [email protected]. 1 Version initiale présentée à la 4 e Conférence canadienne sur les géorisques, Québec, mai 2008. 1266 Rev. can. géotech. 48 : 12661286 (2011) doi:10.1139/T11-029 Publié par NRC Research Press Can. Geotech. J. Downloaded from www.nrcresearchpress.com by University of North Dakota on 10/03/13 For personal use only.

La localisation et la magnitude du séisme du 5 février 1663 (Charlevoix) revues à l’aide des mouvements de terrain 11 Version initiale présentée à la 4 e Conférence canadienne

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Page 1: La localisation et la magnitude du séisme du 5 février 1663 (Charlevoix) revues à l’aide des mouvements de terrain 11 Version initiale présentée à la 4 e Conférence canadienne

La localisation et la magnitude du séisme du 5février 1663 (Charlevoix) revues à l’aide desmouvements de terrain1

Jacques Locat

Résumé : Le séisme du 5 février 1663 est le premier séisme historique violent au Canada dont la magnitude M est estiméecomme étant autour de 7. Il a laissé dans le paysage plusieurs signatures qui en révèlent l’étendue et l’intensité. Côté terres-tre, on note des glissements de terrain dans diverses régions du Québec dont la région de Betsiamites, du Saguenay, deCharlevoix et de la Mauricie. Côté subaquatique, plusieurs signatures de mouvements de terrain ont été attribuées à ceséisme, particulièrement le long de l’estuaire du Saint-Laurent, du fjord du Saguenay et quelques lacs localisés sur le Bou-clier laurentien et probablement dans les Appalaches. Le volume minimum cumulé des glissements de terrain associés auséisme de 1663 est de 1,7 km3. À partir de l’analyse des données reliées aux mouvements de terrain causés par le séisme,et de l’utilisation de méthodes empiriques pour l’estimation de la magnitude, la localisation de l’épicentre proposée duséisme serait située sur le Bouclier canadien au nord du Saint-Laurent et le séisme aurait une magnitude M minimale de7,2 ± 0,2 et une valeur maximale qui pourrait s’approcher de celle prévue pour la région de Charlevoix qui est de M =7,8 ± 0,6.

Mots‐clés : séisme, magnitude, intensité, glissements de terrain, glissements sous-marins, épicentre, localisation.

Abstract: The earthquake that occured on 5 February 1663 is the first strong historical earthquake recorded in Canada andis currently estimated to have been located near La Malbaie and to have had a magnitude M of about 7. It left various signa-tures in the landscape that reveal its extent and significance. In the terrestrial domain, landslides were observed in variousregions of Quebec, including Betsiamites, Saguenay, Charlevoix, and Mauricie. In the subaqueous domain, related massmovements were found along the St. Lawrence Estuary, the Saguenay Fjord, and various lakes on the Canadian Shield andlikely also in the Appalachian. The minimum cumulative volume of mass movements associated with the 1663 earthquakeis 1.7 km3. From the analysis of landslide-related data and using empirical methods for magnitude estimation, the positionof the epicentre would be located in the Canadian Shield to the north of the St. Lawrence River with a minimum magnitudeM of 7.2 ± 0.2 and a maximum magnitude that would be close to the maximum for the Charlevoix area, which has beenpreviously estimated at M = 7.8 ± 0.6.

Key words: seismicity, magnitude, intensity, landslides, underwater landslides, epicentre, location.

IntroductionLe séisme du 5 février 1663 est l’un des séismes histori-

ques les plus forts ayant été ressentis dans l’est de l’Amériquedu Nord, avec une magnitude actuellement estimée à M = ∼7(Smith 1962; Lamontagne 2004; M est ici considéré commeétant la magnitude de moment). À ce moment-là, l’occupa-tion du territoire était limitée tout autant que les observations,dont la plupart ont été rapportées par des écrits dont le styleétait souvent coloré (Gouin 2001). Ce séisme majeur fait par-tie de la banque de données ayant servi à la confection de lacarte de zonage sismique du Canada (fig. 1) et dont l’élabo-ration constitue un travail minutieux et essentiel pour le Can-

ada, car elle est un outil important permettant l’atténuation etla prévention des risques liés aux tremblements de terre (Ba-sham et al. 1979; Adams et Atkinson 2003). Ainsi, pour cequi est du Québec, le portrait sismique a été élaboré à partird’observations récentes d’activités sismiques ainsi que par laprise en compte de certaines données historiques limitées auxtémoignages rapportés dans les documents historiques antér-ieurs à l’avènement des sismographes (Gouin 2001). Au Qué-bec, les quatre zones où l’activité sismique est plusimportante se moulent en grande partie sur des composantesstructurales de la géologie du territoire, c’est-à-dire (i) le gra-ben de la rivière des Outaouais, (ii) la zone de Charlevoix(associée à l’astroblème), (iii) le graben du Saguenay et (iv) lerift du Saint-Laurent, particulièrement dans la région de Sept-Iles (fig. 1).Le zonage sismique présenté à la figure 1 est très sensible

aux séismes historiques majeurs. Par exemple, si on regardela forte valeur accordée au secteur des Grand Bancs deTerre-Neuve (GB, fig. 1), elle est en fait le résultat d’un seulséisme majeur connu dans ce secteur, lequel est survenu en1929 (M = 7,2). Comme autre exemple, prenons le séismede 1988 (M = 5,9, Du Berger et al. 1991; Lamontagne2002; fig. 2) au Saguenay qui a entraîné une révision de la

Reçu le 15 janvier 2009. Acceptée le 10 mars 2011. Publié auwww.nrcresearchpress.com/cgj, le 16 août 2011.

J. Locat. Laboratoire d’études sur les risques naturels (LERN),Département de géologie et de génie géologique, UniversitéLaval, Québec, QC G1K 7P4, Canada.

Courriel de correspondance: [email protected] initiale présentée à la 4e Conférence canadienne sur lesgéorisques, Québec, mai 2008.

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compréhension de la séismicité dans cette région. Récem-ment, la prise en compte d’évidences de liquéfaction dans larégion de Charlevoix (Tuttle et Atkinson 2010) qui se traduitpar un nouveau modèle de prédiction des mouvements du soldans la vallée du Saint-Laurent (Atkinson et Goda 2011).Comme pour l’utilisation des signatures de liquéfaction dé-

crites par Tuttle et Atkinson (2010), on développe ci-aprèsl’utilisation de nos connaissances sur les glissements de ter-rain afin de mieux cerner la magnitude et la localisation duséisme du 5 février 1663, dont une première ébauche a étéprésentée par Locat (2008) et qui est revue ci-après. Cette an-alyse est faite en prenant comme point de départ la magni-tude M = ∼7 pour le séisme du 5 février 1663 et enconsidérant que la valeur maximale de la magnitude de ceséisme ne pourrait pas dépasser celle prévue pour la régionde Charlevoix par Mazzotti et al. (2005). Ces derniers, parune analyse des déformations de la croûte terrestre dans l’Estdu Canada obtenues à l’aide des déplacements GPS et de leurmodélisation, placent la limite supérieure de la magnitude Md’un séisme dans la région de Charlevoix à 7,8 ± 0,6, c’est-à-dire un maximum de 8,4.

Tout comme pour le séisme des Grands Bancs de Terre-Neuve, le séisme de Charlevoix (CH, fig. 1) est déterminantpour l’établissement des cartes de zonage sismique dans lavallée du Saint-Laurent. La magnitude (M = ∼7) et la local-isation (47°36′N, 70°06′O, fig. 2) du séisme du 5 février1663 ont été établies par Hodgson (1928, 1945) principale-ment à partir de l’analyse du séisme de 1925 et des donnéeshistoriques dont les paramètres utilisés pour caractériser leséisme de 1663, lesquels sont repris par Smith, en 1962, ettoujours considérés et acceptés jusqu’à tout récemment(Adams et Halchuk 2003).Afin de fournir une perspective historique sur l’origine de

la magnitude et de la position du séisme de 1663, il est doncimportant de rappeler les éléments considérés par Hodgson(1928, p. 333), établis surtout à partir des observations desJésuites et de l’analyse du séisme de 1925 :

1. The actual seismic intensity of the earthquake ofFebruary 5, 1663, was not incomparable with thatof the disturbance of September 5, 1732; December6, 1791; October 17, 1860; October 20, 1870; or

Fig. 1. Carte de l’accélération au sol maximale pour une probabilité de 2 % sur 50 ans et pour des conditions de sol ferme (classe C du Codedu bâtiment du Canada 2005 (CNRC 2005), source modifiée : seismescanada.rncan.gc.ca). CH, zone sismique de Charlevoix; GB, site duséisme des Grands Bancs de Terre-Neuve de 1929 (M = 7,2).

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that of February 28, 1925. That is to say, it wasnot markedly greater.

2. The documentary reports, while undoubtedly colouredby the excitement and terror of the early settlers, maybe accepted to a much greater degree if we considerthe possibilities of landslides.

3. Landslides are obviously aggravated by a previous wetseason. It becomes, therefore, a matter of extremeimportance to examine carefully all available ac-counts with a view to establishing the meteorologi-cal conditions in Canada, during the fall of 1662.

This evidence would have considerable bearing onthe question of whether the reported disturbance (ifreal) were due to landslides or to unusually severeseismic tremors.

4. The reported devastation near Three Rivers and in thevalley of the Saint Maurice does not, in all probabil-ity, indicate a separate focus there, but was due to alandslide of major proportions in that valley.

5. There seems to be a reasonable basis for the assump-tion that the epicenter of the earthquake of February5, 1663, lay below the city of Quebec, near that of

Fig. 2. Distribution des glissements connus comme ayant été causés par le séisme de 1663 ainsi que la position des deux glissements les pluséloignés du séisme de 1988. Les numéros réfèrent aux différents sites identifiés au tableau 1.

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the earthquake of 1925. We read, for example, fromwritings of Francis Mercier (1665) that, “…Twohighly trustworthy Frenchmen, who have traversedthe whole coast of Malbay (down to Tadoussac is in-dicated) made the assertion that the Relations of theyear 1663 (Lalemant) had only half described theravages wrought by the earthquake shocks in thatregion”.

Ainsi, Hodgson (1928) propose que l’épicentre soit loca-lisé près de celui de 1925, soit : longitude 47,6°N et latitude70,1°W avec une incertitude élevée sur la localisation, c'est-à-dire d’environ ±50 km (fig. 2). Hodgson (1945) attribue auséisme une intensité de X (sur l’échelle de Rossi-Forel de1883 décrite ainsi : « Great disasters, ruins, disturbance ofstrata, fissures in the earth's crust, rockfalls from moun-tains »). Plus tard, Smith (1962) attribue une intensité de X(échelle Mercalli modifiée de Wood et Neuman 1931).2 Tantpour Hodgson (1928) que pour Smith (1962), les mouve-ments de terrain décrits dans la région (surtout de Shawini-gan) ne peuvent pas être considérés comme ayant résultéd’un tremblement de terre, car, d’après Smith (1962) « thegreat release of seismic energy necessary to explain the ef-fects along the river banks is incompatible with the minordamage sustained by buildings in the area ».Étant donné le développement des connaissances sur les

diverses signatures géologiques laissées par le séisme de1663 (Lamontagne 2002; Locat 2008), il devient opportund’évaluer comment ces données plus récentes peuvent êtreutilisées afin de faire avancer nos connaissances sur la magni-tude du séisme de 1663, et à un moindre degré, sur la positionde l’épicentre, pour ainsi apporter un éclairage complémen-taire sur le séisme de 1663 à la lumière des données récentestant marines que terrestres liées aux glissements de terrain.L’étude proposée ici sur le séisme de 1663 est faite dans

une perspective géomorphologique, géotechnique et sédimen-tologique, gravitant autour des larges glissements de terrainassociés au séisme de 1663. Cette étude va, pour la premièrefois, tenter d’évaluer le potentiel offert par les modèles em-piriques disponibles permettant de mettre en relation la dis-tance des glissements ou de la superficie qui les englobe,ainsi que des volumes impliqués, par rapport à un épicentreproposé, et cela, afin d’évaluer la magnitude du séisme. Poury arriver, l’analyse sera abordée de la façon suivante : (i) unedescription des méthodes utilisées, (ii) une analyse de la per-ception actuelle du séisme de 1663, (iii) un inventaire et unedescription des données pertinentes et récentes liées auxmouvements de terrain permettant d’estimer la superficie af-fectée par le séisme de 1663 ainsi que les distances desglissements de terrain observés par rapport à l’épicentre ac-tuel et (iv) l’estimation de la magnitude du séisme à partirde l’inventaire des glissements de terrain. Par la suite, unediscussion portera sur divers aspects dont l’estimation de lamagnitude du séisme de 1663 et la localisation de son épi-centre. Le but principal de cette analyse est de démontrerque la prise en compte des glissements de terrain entraîneraitune augmentation significative de la valeur de la magnitudeactuellement attribuée au séisme du 5 février 1663 et que salocalisation mériterait aussi d’être revue.

Approche méthodologiqueL’analyse qui sera présentée plus loin s’appuie sur deux élé-

ments importants : (i) les glissements de terrain (reconnais-sance, cause et datation) et (ii) l’utilisation de modèlesempiriques qui ont été établis afin de tenter d’estimer lamagnitude et la localisation des séismes historiques d’avantl’avènement des sismographes.

Glissements de terrain : reconnaissance, cause et datationD’après Jibson (1996, 2009), l’évaluation de la paléosismi-

cité à partir des mouvements de terrain nécessite trois étapes :(i) reconnaître une morphologie comme un mouvement deterrain, (ii) dater le glissement et (iii) montrer que le glisse-ment a été créé par un séisme. Au cours des dernières décen-nies (p. ex. Turner et Schuster 1996; Sassa et Canuti 2009),les méthodologies de reconnaissance des glissements de ter-rain ont grandement évolué avec, au départ, l’utilisation desphotographies aériennes suivi par les levés LiDAR (« lightdetection and ranging ») aéroportés et terrestres (Jaboyedoffet al. 2009). Dans le domaine marin, l’utilisation des sonarsmultifaisceaux a permis l’obtention d’images équivalentes àdes photographies aériennes, lesquelles peuvent être préciséesà l’aide de levés sismiques en deux ou trois dimensions et decarottage (Locat et Lee 2009). Depuis 1993, le couplage delevés multifaisceaux et de sismique réflexion a permis la car-tographie et l’étude de plusieurs mouvements sous-marins(Hampton et al. 1996; Urgeles et al. 2002; J. Locat et al.2003; P. Locat et al. 2003; Levesque et al. 2006).Pour les glissements de terrain répertoriés ici, la cause sis-

mique est déduite à partir du couplage des observations histor-iques (p. ex. Gouin 2001) et des analyses géomorphologiques,sédimentologiques et géotechniques (p. ex. Levesque et al.2006), et de la datation de l’événement. Tel qu’indiqué parJibson (2009), il est possible d’évaluer l’origine sismiqued’un glissement par une analyse de stabilité à rebours (Jib-son et Keefer 1993). Pour les glissements où une analysegéotechnique a été réalisée, la validation de la cause sismi-que est estimée en considérant tout d’abord la stabilité sta-tique du massif étudié, et ensuite il faut évaluer s’il estnécessaire d’ajouter une accélération sismique pour initierla rupture (p. ex. le cas du glissement de la Pointe du Fort,P. Locat et al. 2003) et cela en considérant des valeurs rai-sonnables pour les pressions interstitielles. Les détails perti-nents à ces analyses se retrouvent dans les différents articlespubliés sur les glissements de terrain et ne seront donc pasrepris ici.La composante qui comporte le plus d’incertitudes est liée

à la datation des événements qui n’ont pu être directementrapportés par des observateurs et être ainsi datés. Étant donnéqu’au moment du séisme de 1663 le territoire était peu hab-ité, la détermination de l’âge de la plupart des mouvementsde terrain répertoriés n’a été possible qu’en utilisant desméthodes indirectes (Jibson 1996; St-Onge et al. 2008). Lesméthodes utilisées ici comprennent, par exemple, cellesbasées sur des méthodes de datation au 14C sur des débris or-ganiques (p. ex. Filion et al. 1991) et, pour le domaine aqua-tique, par l’analyse des taux de sédimentation de couchesrecouvrant des débris établis à partir des profils de 210Pb

2Une valeur de X sur l’échelle de Rossi-Forel correspond à une valeur comprise entre X et XII sur l’échelle modifiée de Mercalli (MMI).Ainsi, Smith (1962) utilise l’intensité inférieure de la classe équivalente, X sur l’échelle modifiée de Mercali.

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(p. ex. Schafer et al. 1980; Doig 1986; Levesque et al. 2006).Quelle que soit la méthode de datation utilisée, il est impos-sible d’avoir une résolution de l’ordre annuelle sauf pour descas très récents comme les débris du glissement de Saint-Jean-Vianney de 1971 déposés dans le Bras Nord du fjorddu Saguenay (Smith et Walton 1980). En fait, la plupart dutemps, les données basées sur les taux de sédimentation don-nent une fourchette de valeurs possibles à partir de laquelleon peut ou non associer un séisme historique connu (Lev-esque et al. 2006). Quant aux datations au 14C sur des débrisorganiques (p. ex. morceaux de bois), elles donnent toujoursdes âges plus vieux que l’événement lui-même, à moinsqu’elles ne puissent être corroborées avec des données den-drochronologiques (Filion et al. 1991). Par contre, et commenous le verrons plus loin, les données historiques, quoiquelimitées, vont permettre dans certains cas de corroborer lesdates estimées avec les observations historiques décrivantdes glissements de terrain majeurs dans ces secteurs.

Modèles empiriques glissement–magnitudeLes observations recueillies sur les divers glissements de

terrain historiques sont analysées selon deux approches dif-férentes qui présentent des modèles empiriques développésen reliant les glissements de terrain, les intensités MMI ob-servées (dont les glissements de terrain) avec la magnitudeconnue des séismes.

Glissement–magnitude (approche de Keefer)Keefer (1984, 2002) et Rodríguez et al. (1999) ont déve-

loppé des relations empiriques entre les glissements de ter-rain et la magnitude des tremblements de terre connus. Cetteméthode offre donc la possibilité d’estimer la magnitudeminimale d’un séisme à partir de la distance la plus éloignéede glissements attribués au séisme. Leur approche est baséesur une compilation des mouvements de terrain reconnuscomme étant associés à un séisme dont la magnitude et l’ép-icentre sont connus et cela dans plusieurs régions du monde.Ces auteurs ont ainsi compilé plusieurs séismes (M > 4) dansle monde et ont élaboré des graphiques mettant en relation ladistance maximale par rapport à l’épicentre des mouvementsde terrain en fonction de la magnitude du séisme ayant causéles glissements de terrain. De plus, ils ont aussi considéré lasuperficie circonscrite par les événements liés à un séismedonné en fonction de la magnitude mesurée pour chacun descas. À l’aide de ces travaux, Rodríguez et al. (1999) et Kee-fer (2002) proposent des courbes enveloppes (voir plus loindans la section intitulée Approche de Keefer) permettantd’estimer la magnitude minimale d’un séisme historique dontla distance du glissement à l’épicentre est connue. Dans cecontexte, et en partant de la classification de Varnes (1978),Keefer (1984, 2002) propose de classer les glissementscausés par les séismes selon les trois catégories suivantes :(1) fragmenté et (ou) chute, (2) rotationel et (ou) translationelet (3) latéral et (ou) coulée. Pour chacune de ces catégories,Keefer (1984) propose une courbe enveloppe mettant en rela-tion la magnitude M d’un séisme et la distance maximale oùl’on observe un glissement de terrain. Rodríguez et al. (1999)ont ajouté une série de cas à la liste de Keefer (1984) et ont

proposé une relation empirique légèrement différente qui uti-lise les valeurs maximales supérieures de tous les cas ob-servés (voir fig. 2 dans Rodríguez et al. 1999 et utilisé icidans la figure citée dans la section Approche de Keefer). Ro-dríguez et al. (1999) soulignent que des glissements survien-nent aussi sans l’aide de séisme et que, dans certains cas, letalus pouvait être dans un état déjà précaire comme pour lecas qu’ils rapportent pour un glissement en Chine causé parun séisme d’une magnitude M = 2,9.La détermination de la superficie est ici faite selon deux

méthodes. La première consiste à utiliser la distance maxi-male du glissement observé et d’utiliser cette distancecomme étant le rayon maximum d’un cercle déterminant lasuperficie maximale ayant pu être affectée par le séisme. Ladeuxième méthode consiste à utiliser la surface d’un péri-mètre maximal englobant l’ensemble des observations. Étantdonné que des iso-contours ne peuvent pas être tracés avecles données existantes, on va utiliser la superficie d’un rec-tangle dont la longueur serait égale à la somme des deux ray-ons les plus éloignés et opposés à l’épicentre. Ces deuxapproches sont utilisées ici afin de prendre en compte l’incer-titude de l’estimation de la superficie.

Intensité et magnitude (approche de Bakun)L’intensité, tout comme l’énergie sismique, s’atténue avec

la distance de l’épicentre (Bakun et Wentworth 1997). À ceteffet, Bakun et al. (2003) ont proposé une approche visant àaider à estimer la magnitude (incluant les valeurs minimaleset maximales) de séismes historiques dans la grande régionde l’est de l’Amérique du Nord et qui a récemment été uti-lisée par Beauval et al. (2010) en France. La relation empiri-que du modèle initial de Bakun et al. (2003, modèle 1), pourl’Est de l’Amérique du Nord (à l’est du Texas jusqu’à Terre-Neuve), se présente comme suit :

½1� M1i ¼ ½MMI� 1; 41þ 0; 00345Dþ 2; 08 logðDÞ�

1; 68

où D est la distance médiane (en km) du point d’évaluationde l’intensité modifiée de Mercalli (MMI) par rapport à l’épi-centre présumé du séisme et Mw est la magnitude par rapportau point d’analyse de l’intensité avec une incertitude associéeà une déviation standard de 0,31 pour des intensités supér-ieures à III (Bakun et Hopper 2004). La distance médianeutilisée par Bakun et al. (2003) est la médiane des distancesd’observation des endroits où le séisme a été ressenti.3 Ici, ladistance médiane (D) sera considérée comme la distance duglissement de terrain utilisé qui est estimée par rapport à l’é-picentre choisi (tableau 1).Bakun et Hopper (2004) ont par la suite considéré que

le modèle 1 n’était pas satisfaisant pour les séismes dontla magnitude M était supérieure à 6, ce qui serait le casici pour le séisme de 1663, et l’ont donc modifié en le cal-ant sur les séismes de New Madrid et Charleston pour ob-tenir le modèle suivant (modèle 3 de Bakun et Hopper2004) :

½2� M3i ¼ ½MMI� 2; 89þ 0; 00277Dþ 2; 10 log ðDÞ�

1; 36

3Gouin (2001, p. 208) conclut que pour les gens d’alors, la zone macrosismique s’étendait entre Baie-Saint-Paul et Manhattan, un rayon de825 km.

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Tableau 1. Caractéristiques des principaux mouvements de terrain rattachés au séisme de 1663 ainsi que celles de deux glissements de terrain associés au séisme du 25 novembre 1988au Saguenay et de Val-des-Bois en juin 2010.

No Séisme ou glissement Lat. N Long. O D T M A (km2) V (Mm3) D (km) RéférenceCharlevoix 1663 47°36′ 70°06′ Hodgson 1928Terrestre

1 Colombier 48°54,8′ 68°43,9′ 2,3 2 3 210,5+16+0 530 178 Cauchon-Voyer et al. 2008a, 2008b2 Mont Éboulé 48°26,0′ 70°22,9′ 2 2 1 1,0 10 95 Dubé 19983 Saint-Jean-Vianney 48°30,0′ 71°12,8′ 2 2 3 20,6 500 130 Lasalle et Chagnon 1968; Potvin et al. 2001

Riv. Du Gouffre4 A 47°31,88′ 70°30,98′ 2,4 3 3 — — 33 Filion et al. 19915 B 47°30,45′ 70°30,22′ 2,4 3 3 — — 33 Filion et al. 19916 C 47°29,43′ 70°30,54′ 2,4 3 3 — — 33 Filion et al. 19917 D1 47°27,08′ 70°30,54′ 2,4 3 3 — — 34 Filion et al. 19918 D2 47°28,63′ 70°30,60′ 2,4 3 3 — — 34 Filion et al. 19919 Saint-Joseph-de-la-Rive 47°27,5′ 70°22,2′ 1 2 2, 3 0,32 6,4 26 Quilliam et Allard 198910 Shawinigan : LB 46°28,0′ 72°45,9′ 2 2 3 6 120 238 Desjardins 198011 Shawinigan : SB 46°28,0′ 72°45,9′ 2 2 3 9,5 190 238 Desjardins 1980

Marin et (ou) lacustreFjord du Saguenay

12 Baie des Ha! Ha! 48°20,8′ 70°49,0′ 3 2 3 7,5 280 99 Urgeles et al. 2002; J. Locat et al. 200313 Pointe-du-Fort 48°21,28′ 70°45,40′ 3 2 3 0,22 1,95 97 P. Locat et al. 2003; Locat et al. 200714 Bassin central 48°18,3′ 70°15,4′ 3 5 3 — (310) 78 St-Onge et al. 2004; Syvitski et Schafer 199615 Bassin central C8 48°21,18′ 70°40,98′ 3 3 3 0,63 10,5 94 Levesque et al. 200616 Bassin central C11 48°22,62′ 70°38,24′ 3 3 3 0,72 16,0 93 Levesque et al. 200617 Témiscouata 47°41,3′ 68°51,3′ 5 6 4 — — 95 Shilts et al. 1992; Ouellet 199718 Lac Jacques-Cartier 47°35,6′ 71°14,3′ 3 6 4 — — 84 Doig 199819 Lac Éternité 48°13,3′ 70°33,2′ 3 6 4 — — 76 Doig 199820 Lac Tadoussac 48,233 69,667 3 6 4 — — 76 Doig 199021 Lac du Basque 48°01,0′ 69°50,1′ 3 6 4 — — 50 Doig 1986

Volume total connu 1665 Excluant le No 14

Saguenay 1988 (M = 5,9) 48°06′ 71°12′22 Sainte-Thècle 46°48,9′ 72°30,3′ 1 1 3 0,008 0,08 170 Lefebvre et al. 199223 Saint-Adelphe 46°43,8′ 72°25,9′ 1 1 3 0,010 0,1 175 Lefebvre et al. 1992

Volume total connu 0,18 Lefebvre et al. 1992

Val-des-Bois 2010 (M = 5,0) 48°06′ 71°12′ Atkinson et Assatourians 2010Mulgrave-et-Derry 46°52′ 72°29′ 1 1 2 0,013 0,09 21 D. Demers, communication personnelle 2011.

Nota : Les numéros de la première colonne correspondent à la localisation des sites aux figures 2 et 5. D (méthode de datation) : 1, observé; 2, datation au 14C; 3, taux de sédimentation; 4, dendrochrono-logie; 5, possible, sans méthode de datation. T (type de glissement) : 1, glissement; 2, étalement; 3, coulée; 4, avalanche rocheuse; 5, turbidite; 6, indéterminé. M (matériaux impliqués dans le glissement) : 1,roc; 2, till; 3, argiles marines; 4, argiles lacustres. A, superficie; V, volume; d, distance de l’épicentre. LB, La Bissonière; SB, Saint-Boniface.

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L’approche proposée par Bakun et al. (2003) et Bakun etHopper (2004) peut-être utilisée avec seulement quelques in-formations sur les intensités observées et elle se réduit àseulement deux paramètres. Puisque les données historiquessont limitées et que la précision de l’épicentre le sera doncaussi, le modèle proposé par Bakun et Hopper (2004) simpli-fie l’estimation en considérant une source unique et une pro-fondeur focale en surface.Pour s’assurer de l’applicabilité de ces modèles à la région

de l’Est du Canada et de Charlevoix en particulier, les mod-èles empiriques 1 et 3 (Bakun et Hopper 2004) sont appli-qués sur les données d’intensités du séisme de Charlevoix de1925 et dont les résultats sont présentés à la figure 3. Lesmodèles de Bakun et al. (2003) et de Bakun et Hopper(2004) se calent assez bien aux observations des intensitésdu séisme de Charlevoix de 1925 qui sont inférieures à 6.Pour des valeurs de MMI supérieures à 6, le modèle 3, selonBakun et Hopper (2004), s’ajusterait mieux aux moyennesdes intensités observées tout en prédisant des magnitudesplus faibles que le modèle 1 pour une distance équivalente(fig. 3). Étant donnée la magnitude approximative de 7 déjàestimée pour le séisme de 1663, nous utiliserons le modèlede Bakun et Hopper (2004, modèle 3, trait continu de lafig. 3). Quant à la localisation de l’épicentre présumée pourle séisme de 1663, la valeur utilisée sera celle proposée parHodgson (1950), c'est-à-dire au même endroit que la positiondu séisme de 1925, mais avec une précision de ±50 km(fig. 2). Le modèle de Bakun et Hopper (2004, modèle 3)sera utilisé ici en exprimant la magnitude du séisme en fonc-tion de la distance de l’épicentre et cela pour différentes va-leurs d’intensité (de IV à IX, voir plus loin dans la sectionintitulée Approche de Bakun).

Données historiquesDans une perspective historique de l’évaluation du séisme

du 5 février 1663, il est crucial de bien analyser les diverssignes relevés à l’époque mais en le faisant selon notre com-préhension actuelle des phénomènes en jeu. Les caractéris-tiques actuellement reconnues pour le séisme de 1663 ontété principalement élaborées à partir des données historiques(p. ex. Gouin 2001) et de l’analyse faite des séismes impor-tants d’avant 1925 et de celui de 1925, qui est le premierséisme majeur à être enregistré par des séismographes auCanada (Hodgson 1950). La plupart des sites mentionnés ci-après sont localisés à la figure 2.Gouin (2001) présente une synthèse étoffée des documents

traitant du séisme de 1663. D’après Gouin (2001), le séismede 1663 aurait été ressenti le long du golfe et du fleuveSaint-Laurent, de ses tributaires, jusqu’à Montréal, et le longde la côte atlantique de l’Acadie jusqu’à New York, couvrantainsi une superficie de plus de 2,5 Mkm2. Gouin (2001) rap-porte les écrits de plusieurs auteurs du temps incluant le PèreLalemant et Mère Marie de l’Incarnation. Puisque Gouin(2001) considère que les observations du Père Lalemant sontles plus fiables, nous allons surtout nous limiter à celles-ci.Pour la région de Betsiamites et Portneuf, Gouin (2001,

p. 172)4 rapporte que : « Le onzième du même mois (mai1663) nous arrivâmes à la rivière que les Sauvages appellent

Kouakoueou: nous vîmes en passant les ravages que le Trem-ble-terre a fait aux rivières du Port neuf; l’eau qui en sort esttoute jaune, et elle garde cette couleur bien avant dans legrand fleuve, aussi bien que celle des Betsiamites: les Sau-vages ne sauraient plus naviguer dans ces deux rivières.(Nouvel; in JR, XLIX, p. 44) ».Dans la région du Saguenay, Gouin (2001, p. 174) nous

rappelle que le nom « Terres Rompues » était utilisé pour dé-crire plusieurs secteurs de la région : nom évocateur de lacatastrophe incluant le grand glissement de Saint-Jean-Vianney(voir tableau 1) ! Entre Québec et Tadoussac, Gouin (2001,p. 180) rapporte les observations reliées au glissement deterrain ayant formé la presqu’île sur laquelle le village deSaint-Joseph-de-la-Rive a par la suite été érigé. Gouin(2001, p. 182) note aussi qu’un glissement de terrain ait puse produire dans la région de Pointe aux Alouettes (48,1°N,69,7°O, près de Baie Sainte-Catherine, fig. 2) qui, d’aprèsla description imagée du temps, constituerait la première de-scription, au Canada, d’une rupture par étalement (Gouin2001, p. 182) : « … plus bas vers la Pointe aux Alouettes,une forêt entière s’étant détachée de la terre-ferme, s’estglissée dans le fleuve, et fait voir de grands arbres droits etverdoyants qui ont pris naissance dans l’eau, du jour aulendemain. (Lalemant; in JR, XLVIII, p. 48) ». Les débrisde ce glissement n’ont pas encore été cartographiés dans lefleuve Saint-Laurent.Dans la région de Québec, il n’y a pas eu de mouvements

de terrain spécifiques rapportés, mais le texte de Lalemant,parlant de la région immédiate de Québec, est plutôt évoca-teur (Gouin 2001, p. 186) : « La guerre semblait être mêmeentre les Montagnes, dont les unes se déracinaient pour sejeter sur les autres, laissant de grands abîmes au lieu d’où el-

Fig. 3. Modèles applicables à l’analyse de la variation spatiale del’intensité (MMI) associée au séisme de Charlevoix de 1925 (M =6.3). La ligne en tirets représente le modèle 1 de Bakun et al. (2003)pour l’Est de l’Amérique du Nord, alors que la ligne en trait continureprésente le modèle 3 adapté par Bakun et Hopper (2004) pour desséismes de magnitude M de 7 et plus dans l’Est de l’Amérique duNord. Les carrés et les triangles représentent les valeurs moyennes etmédianes de la distribution des intensités MMI comprises entre III etVIII pour le séisme de Charlevoix de 1925. L’écart type est illustrépour la plage de variation des intensités.

4Ici le texte original a été adapté pour une lecture plus facile.

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les sortaient: Et tantôt enfonçaient les arbres dont elles étaientchargées bien avant dans terre jusqu’à la cime: tantôt elles lesenfouissaient les branches en bas, qui allaient prendre laplace des racines; de sorte qu’elles ne laissaient plus qu’uneforêt de troncs renversés (Lalemant; in JR, XLVII, p. 42) ».Dans la région de Trois-Rivières, on rapporte que les riv-

ières ont transporté beaucoup de sédiments provenant deglissements de terrain le long de la rivière Batiscan ainsiqu’en amont du Saint-Maurice, à la hauteur de Saint-Étienne-des-Grès (Gouin 2001, p. 196). Il ajoute qu’il n’y a eu quetrès peu de dommages aux infrastructures, cela dû en partieaux constructions surtout en bois rond. Un des extraits rap-porté par Gouin (2001, p. 196), donne une belle image dubouleversement, dont voici un des extraits rapporté : « L’onvoit de nouveaux Lacs où il y en eût jamais: on ne voitplus certaines Montagnes qui sont engouffrées: Plusieurssaults sont aplanis; plusieurs Rivières ne paraissent plus…(Lelemant; in JR, XLVIII, p. 48) ».Dans la région de Montréal, on ne rapporte pas de mouve-

ments de terrain mais plutôt que des cheminées, des grangeset des étables se seraient écroulées (Gouin 2001, p. 200). Ilest intéressant ici de citer les observations de Sr Marie Morinrapportées par Gouin (2001, p. 200) : « Notre maison s’estconservée dans l’île de Montréal, sans qu’il s’y soit fait aucundommage; aussi le mal n’a pas été aussi grand dans notre îleque dans Québec. Il n’y a eu que des cheminées, des grangeset des étables qui sont tombées en assez bon nombre. »Cet inventaire, réalisé par Gouin (2001), souligne la vaste

superficie du territoire affecté par le séisme de 1663. Un élé-ment important à souligner, et qui sera discuté plus tard, estque la plupart des observations historiques réfèrent à des en-droits se retrouvant surtout au nord du fleuve Saint-Laurent.

Données récentes sur les mouvements deterrain associés au seisme de 1663Un peu à la façon de Gouin (2001), les observations ré-

centes, c'est-à-dire après 1962, sur les mouvements de terrainassociés au séisme de 1663, seront décrites à partir de l’em-bouchure de l’estuaire du Saint-Laurent en se dirigeant versMontréal. Les régions principalement considérées sont lessuivantes : Betsiamites, Saguenay, Charlevoix et la Mauricie.Afin de bien souligner la grande superficie sur laquelle onretrouve les signatures laissées par le séisme de 1663, ellesont été regroupées à la figure 2, et leurs caractéristiques ontété rassemblées au tableau 1.

BetsiamitesDans la région de l’embouchure de la rivière Betsiamites,

et non loin du village de Colombier, une large cicatrice demouvement de terrain y a été rapportée par Bernatchez(2003) et étudiée plus en détails par Cauchon-Voyer (2011)(fig. 4) et auquel on attribue le nom de glissement de Co-lombier (Cauchon-Voyer et al. 2008a, 2011).Le secteur représenté à la figure 4 est situé à moins de

7 km à l’ouest du village de Betsiamites, endroit où les Jésu-ites ont rapporté les perturbations importantes à la navigationmentionnées plus haut (Gouin 2001). La rupture aurait été in-itiée dans le domaine marin pour par la suite englober unvaste territoire terrestre pour un volume total de 530 Mm3

(dont 385 Mm3 dans la partie terrestre) et couvrant une

superficie totale de 20 km2 (fig. 4). Bernatchez (2003), àl’aide de datations au 14C réalisées sur des débris organiquesimbriqués dans le glissement, conclut qu’il aurait été causépar le séisme de 1663. De plus, Cauchon-Voyer et al.(2008a) ont cartographié l’extension des débris du glissementde 1663 dans le domaine marin et ont estimé, à partir d’uneanalyse des taux de sédimentation de la couche de sédimentrecouvrant les débris, que ces derniers dataient vraisembla-blement de 1663. Il faut souligner ici que le secteur de Bet-siamites n’est pas très loin de la zone sismique du Bas-Saint-Laurent (Lamontagne et al. 2003) et que d’autres mouve-ments de terrain pourraient être associés à des séismes prove-nant de cette zone.

SaguenayDans la région du Saguenay, de nombreuses données ont

été accumulées, surtout depuis 1980, tant dans le domainesubaquatique que terrestre.

Observations subaquatiquesLes premiers glissements sous-marins à être étudiés au fjord

du Saguenay le furent par Locat et Bergeron (1988) et parBergeron (1989). Déjà Schafer et al. en 1980, ont pu recon-naître la trace du glissement (terrestre) de Saint-Jean-Vianneyde 1971 dans une carotte prise dans le fjord du Saguenay, etl’événement a pu être daté avec une précision de plus oumoins une année, soulignant ainsi l’intérêt des méthodesstratigraphiques (Jibson 1996) pour retracer des événementscatastrophiques au pourtour d’un bassin sédimentaire. Par lasuite, Doig (1986, 1990), pour des sédiments lacustres prèsde Tadoussac, et Schafer et Smith (1987, 1988), ainsi quePerret et al. (1995) et St-Onge et al. (2004), pour des carottesprises au fond du Saguenay, ont démontré la présence detraces sédimentologiques (p. ex. turbidites) laissées par leséisme de 1663. En 1996, Syvitski et Schafer estiment quele séisme de 1663 aurait déplacé un volume de 3 km3 desédiments dont une partie (310 Mm3, tableau 1) a formé uneturbidite de plus de 15 m d’épaisseur déposée dans la partiecentrale du fjord (no 14, fig. 5; Perret et al. 1995; St-Onge etal. 2004). Syvitski et Schafer (1996) concluent que le séismede 1663 aurait provoqué une rupture généralisée du bassinsédimentaire de la partie amont du fjord du Saguenay (in-cluant la Baie des Ha! Ha! et le Bras Nord).Les travaux de Levesque et al. (2006) ont permis de local-

iser au moins 16 glissements sous-marins bordant les flancsdu fjord (fig. 5a). Ces glissements latéraux se sont tous pro-duits le long de plans de rupture correspondant à un lit plusgrossier qui aurait été liquéfié lors de divers séismes (Lev-esque et al. 2006). L’âge de ces glissements a été estimé àpartir de l’analyse des taux de sédimentation. Les résultats in-diquent qu’au moins cinq d’entre eux auraient été provoquéspar le séisme de 1663, raffinant ainsi les observations de Sy-vitski et Schafer (1996), alors que d’autres glissements ser-aient reliés aux séismes de 1791, 1860–1870 et 1988.Le grand glissement (étalement) de la Baie des Ha! Ha!,

associé au séisme de 1663, couvre à lui seul une superficiede 7,5 km2 et implique un volume déplacé d’au moins280 Mm3 (figs. 5a et 5d; tableau 1). Urgeles et al. (2002)ont analysé le déclenchement sismique du glissement de laBaie des Ha! Ha! et ont évalué que l’épicentre du séismeayant provoqué ce grand glissement devait être localisé dans

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la région du Saguenay et non pas dans Charlevoix, et celaafin de fournir l’accélération au sol nécessaire à la rupture(valeur de M égale ou supérieure à 6,75). De plus, des for-mes coniques, pouvant être associées à des volcans de sable,ont été identifiées juste à proximité de l’escarpement amontdu glissement de la Baie des Ha! Ha! (V à la fig. 5d; Trem-blay et Locat 2002; J. Locat et al. 2003). L’escarpement prin-cipal de ce glissement se situe juste en face de ce que Locat(1999) a interprété comme pouvant être une évidence d’unerupture en surface de la faille sur laquelle aurait pu se pro-duire le séisme de 1663 (figs. 5b, 5c et 5d). Cette faille aune direction de 161° avec un pendage vers l’ouest de 76°,valeurs semblables à un des deux plans que Du Berger et al.(1991) ont calculés pour le séisme de 1988.

Observations terrestresDans le domaine terrestre, Lasalle et Chagnon (1968)

avaient déjà rapporté la présence d’une grande cicatrice deglissement de terrain dans la région de Saint-Jean-Vianney,beaucoup plus grande que celle survenue en 1971, et dontl’âge estimé au 14C permettait de la relier au séisme de 1663(fig. 5). Chagnon (fig. 40 dans Lasalle et Tremblay 1978)rapporte la présence de dykes de sable recoupant verticale-ment la stratification argileuse et qui auraient été causés parles perturbations associées au glissement de terrain, et quipourraient, comme le font Tuttle et Atkinson (2010), résulterde phénomènes de liquéfaction causés par le séisme lui-même. Plus récemment, le glissement de Saint-Jean-Vianneyde 1663 a été étudié plus en détails à la suite du déluge duSaguenay de 1996. Ces dernières études indiquent que l’éten-due du glissement de 1663 couvrirait une superficie de20,6 km2 et impliquerait un volume déplacé d’environ500 Mm3 (Potvin et al. 2001, et J. Potvin, communicationpersonnelle 2010). Les travaux de Potvin et al. (2001) ont

Fig. 4. Glissement de Colombier (Cauchon-Voyer et al. 2008a, 2011) de 1663 avec l’extension des débris jusque dans le fleuve Saint-Laurent.La zone en mauve représente la superficie initiale mobilisée lors du glissement de terrain (environ 20 km2). Les courbes de niveaux marinssont en mètres sous le niveau de la mer.

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aussi révélé la présence de plans de ruptures profonds, indi-ces là aussi de la forte intensité des mouvements de sol quiconcorderait ainsi avec le concept d’une rupture généraliséedu bassin telle que proposée par Syvitski et Schafer (1996).Bergeron (1988) a rapporté un des plus grands glissements

rocheux de l’Est du Canada : le Mont Éboulé (figs. 5 et 6)situé le long de la faille de la rivière Sainte-Marguerite quiborde le côté nord du graben du Saguenay. Le glissement duMont Éboulé, étudié en détails par Dubé (1998) et Locat etal. (1997), s’est produit dans des gneiss (roches métamorphi-ques très résistantes), couvrant une superficie, incluant lazone de débris, d’environ 1 km2 et ayant un volume déplacéd’au moins 10 Mm3. L’étude à rebours a démontré que seulun fort séisme pouvait en être la cause. Un morceau de bois,coincé sous un caillou dans les débris du glissement, a donnéun âge 14C de 1030 ± 90 ans (Dubé 1998), ce qui permet deconsidérer que le séisme de 1663 pourrait possiblement enêtre à l’origine. Cette date est discutée plus loin.

CharlevoixPour la région de Charlevoix les travaux comprennent l’é-

tude de glissements de terrain dans la vallée de la rivière duGouffre, dont les anciennes terrasses ont été presque toutes

perturbées (Chagnon 1969; Lajoie 1981; Filion et al. 1991)et le glissement de terrain de Saint-Joseph-de-la-Rive de1663 décrit dans la section historique (Quilliam et Allard1989; Flon et al. 2008; fig. 7). Les levés au LiDAR du sec-teur de Saint-Joseph-de-la-Rive (fig. 7) ont mis en évidencela présence d’autres cicatrices de glissements de terrain quise sont accumulés sur la terrasse principale surplombant lerivage, mais dont l’âge n’a pas encore été confirmé.Chagnon et Locat (1988) ont aussi décrit des volcans de

sables dans la vallée de la rivière du Gouffre, mais sans lesdater précisément, quoique la fraîcheur des formes, observ-ables sur les photographies aériennes de 1925, pourrait sug-gérer qu’ils auraient été produits lors du séisme de 1925 (J.-Y. Chagnon, communication personnelle 2007).Des mouvements de terrain sous lacustres sont aussi rap-

portés par Doig (1986, 1990) et par Ouellet (1997) parmi les-quels plusieurs sont associés au séisme de 1663 (datés enutilisant des taux de sédimentation). S’ajoutent aussi des cic-atrices de mouvements subaquatiques entre Rimouski etSaint-Siméon (Campbell et al. 2008; Locat et al. 2008;Mosher 2008), certaines aussi grandes que celles observéessur terre à Saint-Joseph-de-la-Rive, mais qui, quoiquefraîches, n’ont pas encore été datées.

Fig. 5. Région du fjord du Saguenay montrant les divers éléments utilisés dans le texte : (a) la localisation des glissements de Saint-Jean-Vianney (SJV) de 1663 et de 1971, la rupture dans la Baie des Ha! Ha!, glissement latéraux, position de l’escarpement de la faille de Sainte-Marguerite et du glissement du Mont Éboulé, ainsi que la trace de la faille possiblement ré-activée en 1663 (F, voir aussi en b, c et d) et devolcans de sables (V). Les numéros entre parenthèses correspondent à ceux fournis au tableau 1 et à la figure 2.

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MauriciePour la Mauricie, on ne dispose que du travail de Desjar-

dins (1980). Il considère que parmi les trois glissements qu’ila étudiés (fig. 8), ceux de Saint-Boniface et de La Bissonièreseraient reliés au séisme de 1663. Ces deux glissements

couvriraient des superficies respectives de 19 et 12 km2 pourdes épaisseurs moyennes de 20 m. Desjardins (1980) a aussiobservé que les amphithéâtres de ces glissements se seraientformés en trois étapes, dont la plus récente coïnciderait avecle séisme de 1663. Malheureusement, Desjardins (1980) ne

Fig. 6. (a) Glissement rocheux du Mont Éboulé et (b) vue en plan : 1, escarpement; 2, débris; 3, terrasse modifiée sur la rivière. Le trait entirait vert indique la position du pied du talus estimée avant la rupture (voir la localisation aux figs. 2 et 5).

Fig. 7. (a) Le modèle de terrain de la région de Saint-Joseph-de-la-Rive (source modifiée : Ministère des transports du Québec, Flon et al.2008) et en (b) une vue aérienne oblique en direction nord-est du glissement (SJR, no 9 au tableau 1 ; photo par J.-Y. Chagnon, avec permis-sion).

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donne pas de précisions sur les superficies relatives de cha-cune des étapes, bien que les observations de l’époque indi-quent des bouleversements majeurs (voir plus haut). Faute deplus de précisions et aux fins de notre analyse, nous allons con-server le volume total comme étant celui mobilisé lors du séismede 1663. Les volumes ainsi calculés sont de 190 et 120 Mm3

respectivement pour les glissements de Saint-Boniface et deLa Bissonière. Ces glissements de terrain, connus commeétant les plus éloignés, se situeraient à 238 km de l’épi-centre actuel du séisme de 1663 (tableau 1).

Autres régionsShilts et al. (1992), à l’aide de levés sismiques au Lac Té-

miscouata (no 17, fig. 2 et tableau 1) ont observé plusieursglissements sous-lacustres qu’ils attribuent à un ou desséismes dont l’épicentre aurait été dans la région immédiatedu lac. Ouellet (1997), qui a aussi par la suite étudié deslacs dans cette région, incluant celui de Témiscouata, arriveà la conclusion que la source principale de la séismicité cau-

sant les mouvements de terrain observés serait située dans larégion de Charlevoix. Cette conclusion de Ouellet (1997) pour-rait être appuyée par le fait que des dommages ont été causésau poste de transmission d’Hydro-Québec, près du lac Témis-couata, par le séisme du Saguenay de 1988 (J. Robert-Pierre,communication personnelle 2005) et dont l’épicentre seraitencore plus distant que celui de Charlevoix de 1663.Cet inventaire des glissements de terrain attribués au

séisme de 1663 nous permet de réaliser que, comme pour leséisme de 1988, la plupart des observations se situent le longdu fleuve Saint-Laurent et au nord de celui-ci, et cela jusquedans la région du Saguenay et de la Mauricie. La plupart deces informations sont utilisées ci-après pour revoir la localisa-tion et la magnitude du séisme de 1663.

Estimation de la magnitude du séisme de1663Aux fins de l’analyse, la magnitude sera estimée en con-

sidérant la position attribuée au séisme de 1663 (tableau 1;Hodgson 1928) avec une précision de ±50 km. Quant auxglissements de terrain qui seront utilisés ci-après, nous nouslimiterons à ceux qui se retrouvent le plus loin de la positionen surface de l’épicentre du séisme. Il s’agira donc, pour leséisme de 1663, des glissements de La Bissonière (Shawini-gan, fig. 8, no 10 du tableau 1) et de Colombier (fig. 4, no 1du tableau 1). Pour le séisme de 1988 qui sera discuté ici,nous utiliserons le glissement de Saint-Adelphe (no 23 au ta-bleau 1).

Approche de KeeferLa relation empirique, entre la magnitude d’un séisme et la

distance le séparant des glissements de terrains concomitants,est illustrée à la figure 9a en utilisant la relation de Rodrí-guez et al. (1999). La distance utilisée ici est celle déterminéepar la mesure de la distance aux épicentres calculée pour lesglissements connus comme étant les plus éloignés, c'est-à-dire celui de la région de Shawinigan (tableau 1) sur lequelon applique une variation de ±50 km afin de prendre encompte l’incertitude rattachée à la position du séisme de1663. La position du cas du glissement de Saint-Adelphe(M = 5,9) est aussi rapportée sur la figure 9a montrant ainsiun écart important par rapport aux prédictions du modèle deKeefer (1984) modifié par Rodríguez et al. (1999). Cette dif-férence sera discutée plus loin. S’ajoute aussi à la figure 9a,le cas du glissement de Mulgrave-et-Derry dans les argilessensibles (tableau 1, D. Demers 2011, comunication person-nelle) qui a été causé par le séisme Val-des-Bois du 23 juin2010, localisé à environ 70 km au nord-est d’Ottawa, et dontla magnitude M était de 5,0. Ce séisme serait associé au gra-ben de la rivière des Outaouais (Atkinson et Assatourians2010; Halchuk 2010). Ce dernier glissement se retrouve as-sez proche de la courbe enveloppe, mais demeure légèrementen dessous. Pour le glissement de Shawinigan de 1663, lesrésultats de la projection sur la courbe enveloppe de la fig-ure 9a donnent une magnitude M pouvant varier entre 6,8 et7,6 (c.-à-d. M = 7,2 ± 0,4).La méthode reliant la superficie de la zone à l’intérieur de

laquelle on retrouve les glissements de terrain, et la magni-tude du séisme qui les aurait causés, est illustrée à la figure9b. Le résultat obtenu avec l’estimation de la superficie en

Fig. 8. Localisation des glissements de Shawinigan considérés parDesjardins (1980) comme ayant été causés par le séisme de 1663, etdes sites de datation 14C (modifiée d’après Desjardins 1980). LB(no 10 au tableau 1 et fig. 2) : glissement de La Bissonière. SB(no 11 au tableau 1) : glissement de Saint-Boniface. Les dates QU-390 et QU-392 sur des morceaux de bois ont respectivement donnédes âges au 14C de 380 ± 100 et de 390 ± 100 ans.

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considérant le rayon du cercle comme étant la distance entrel’épicentre de 1663 et le glissement de Shawinigan donneune superficie de 177 952 km2 en considérant l’épicentre pro-posé pour le séisme de 1663 comme le centre du cercle (ta-bleau 1). La deuxième estimation considère un rectangle dontle côté le plus long serait égal à deux fois le rayon, c'est-à-dire 476 km et dont la largeur englobant les points les pluséloignés, prise ici comme étant la distance entre le site duglissement de Saint-Jean-Vianney et le lac Témiscouata, soitenviron 200 km, donne une superficie de 95 200 km2. Cettesuperficie pourrait être considérée comme minimale maisplus réaliste, puisqu’elle n’englobe que la région actuelle-ment connue. Une fois la superficie déterminée, l’estimationde la magnitude devient possible par l’utilisation de la courbeenveloppe (fig. 9b) proposée par Rodríguez et al. (1999).L’utilisation de la courbe enveloppe de Rodríguez et al.(1999), pour les superficies établies en considérant un rectan-gle ou un cercle donne des valeurs respectives de M com-prises entre 7,8 et 8,6 (fig. 9b). À noter ici que la valeur deM = 8,6 est proche de celle de M = 8,4 proposée par Maz-zotti et al. (2005) comme valeur maximale pour Charlevoix,

ce qui indiquerait qu’une valeur minimale de M = 8,4 seraittrop élevée. À noter ici, qu’à l’inverse, une magnitude M de 7impliquerait une superficie d’environ seulement 20 000 km2.Pour le cas de Saint-Adelphe, la différence par rapport aumodèle de Rodríguez est encore plus importante que pourla relation magnitude–distance (fig. 9a). Tel que discutéplus loin, l’atténuation plus faible sur le bouclier pourraitpartiellement expliquer ces écarts importants (Lamontagneet Dascal 2006).Étant donné que les valeurs minimales basées sur la super-

ficie sont proches des valeurs maximales possibles, nous uti-liserons plutôt celles provenant de la relation distance–magnitude (fig. 9a). Ainsi, à ce stade-ci de notre analyse, lavaleur minimale de la magnitude M du séisme de 1663, éta-blie à partir de l’approche de Keefer, indiquerait une valeurde M comprise entre 6,8 et 7,6. (ou M = 7,2 ± 0,4).

Approche de BakunTel qu’indiqué plus haut, on peut estimer la magnitude du

séisme de 1663 en utilisant un modèle basé sur le celui pro-posé par Bakun et Hopper (2004) et calibré sur des données

Fig. 9. La position des glissements de Shawinigan de 1663 (rectangle), de Saint-Adelphe (1988, point noir) et de Mulgrave-et-Derry (2010,croix) pour les magnitudes qui leurs sont associées et cela par rapport aux données compilées par Rodríguez et al. (1999), en tirets) et larelation proposée par Keefer (1984, en trait continu). En (a), la variation verticale du rectangle représente l’incertitude de ±50 km attribuée àla position du séisme de 1663; en (b) le point minimum est pour l’utilisation de la superficie d’un rectangle, alors que la valeur maximale estpour celle utilisant la superficie d’un cercle. Les cercles ouverts sont pour les différents cas répertoriés par Rodríguez et al. (1999) pourdéfinir les courbes enveloppes.

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obtenues pour le séisme de Charlevoix de 1925 (fig. 3). Lemodèle de Bakun et Hopper (2004) sera ici inversé pour es-timer la magnitude à partir de la distance connue des glisse-ments de terrain et cela pour des plages possibles d’intensitéMMI (fig. 10).Pour l’analyse qui suit, nous n’utilisons que des glisse-

ments de terrain de grande ampleur; de tels mouvements deterrain sont indiqués dans l’échelle d’intensité modifiée deMercalli (Wood et Neuman 1931) qu’à partir d’une valeurMMI de X. Le modèle 3 (éq. [2]), décrit plus haut, a été uti-lisé afin de construire un abaque mettant ainsi en relation lamagnitude M en fonction de la distance de l’épicentre utiliséet cela pour des valeurs de MMI variant de IV à IX (fig. 10).Bakun et al. (2003) et Bakun et Hopper (2004), aux fins del’utilisation de leurs modèles (p. ex. éq. [1] et [2]), proposentd’utiliser la valeur MMI de IX pour les valeurs MMI rapport-ées supérieures ou égales à IX.Sur l’abaque ainsi créé, on a reporté les glissements de

Shawinigan et de Colombier liés au séisme de 1663 en con-sidérant une magnitude M de 7, ainsi que celui de Saint-Adelphe causé par le séisme du Saguenay de 1988 pour unemagnitude M de 5,7 et celui de Mulgarve-et-Derry de 2010ayant une magnitude M de 5 (tableau 1). Sur l’abaque, on aaussi reporté une fenêtre d’analyse centrée autour du glisse-ment de Shawinigan de 1663 et qui est établie selon deuxconsidérations. La première concerne la variation possible dela distance de l’épicentre à laquelle on attribue une incerti-

tude de ±50 km. La deuxième considération est liée à laplage possible de séismes qui peuvent générer des glisse-ments de terrain. Selon l’échelle des intensités de Mercallimodifiée (Wood et Newman 1931), on observe des glisse-ments de terrain à partir d’intensités de X, ce qui fait que laborne supérieure, comme indiqué plus haut, sera limitée àdes valeurs de MMI de IX. Sauf exception, la valeur d’inten-sité MMI de VI correspondrait à la valeur minimale desglissements de terrain pouvant être causés par des séismes(Keefer 2002), valeur utilisée ici pour délimiter la borne infé-rieure de la fenêtre d’analyse (fig. 10). On peut noter ici queles glissements de Saint-Adelphe et de Mulgrave-et-Derrysont proches de la courbe d’intensité de VI.Cette fenêtre d’analyse indique que l’incertitude sur la po-

sition de l’épicentre (±50 km) entraîne une variation de l’es-timation de la magnitude M d’environ ±0,2 unité. Par contre,par rapport à l’échelle des intensités, la fenêtre indique unevariation maximale de la magnitude M allant de 6,1 à 8,8,toujours en se basant sur le cas du glissement de Shawinigan.On pourrait réduire l’incertitude quant à la borne inférieure

de la fenêtre d’analyse en prenant en compte l’observation deKeefer (2002) qui note que pour les étalements, la valeurmoyenne des intensités MMI provoquant des ruptures parétalement serait de VII. De leur côté, Hancox et al. (2002),pour des glissements en Nouvelle Zélande, ont observé quede tels glissements étaient déclenchés sismiquement à unseuil d’intensité MMI de VIII. Ces deux informations sontutilisées afin de réduire la fenêtre d’analyse pour estimer lamagnitude minimale possible du séisme ayant causé le glisse-ment de Shawinigan. Cette considération est représentée parla partie grillagée de la figure 10. Dans un tel cas, la plagede variation minimale de la magnitude M serait comprise en-tre 6,6 et 8,0.Pour comparer ces résultats avec la méthode de Keefer, la

courbe enveloppe de la figure 9a a été insérée à la figure 10.Il est intéressant d’y noter que dans un tel cadre, la relationde Keefer a une forme assez semblable aux courbes d’inten-sité et qu’elle suivrait à peu près la courbe d’intensité de VIIdéfinissant ainsi les valeurs minimales de la magnitude d’unséisme qui provoquerait une glissement de terrain du typeétalement ou coulée. Lorsque l’on reporte la relation de Kee-fer (1984; fig. 9a) à la figure 10, on peut s’en servir pourpréciser davantage la limite inférieure à la magnitude duséisme. Dans un tel cas, l’utilisation du glissement de Shawi-nigan indiquerait une magnitude minimale de M de 7,2 ± 0,2pour le séisme du 5 février 1663 (cercle noir à la fig. 10).Les glissements de Shawinigan (coulée ?) et de Betsia-

mites (étalement, Cauchon-Voyer et al. 2011), de par leursvolumes très importants, et le fait qu’ils soient associés à demultiples glissements de terrain couvrant une grande superfi-cie, pourraient donc être considérés comme correspondant àune intensité majeure, se situant minimalement entre des in-tensités équivalentes comprises ente VII et IX. Tel qu’indiquépar (Hodgson 1928), si une estimation de magnitude de M =∼7 a été déduite sans tenir compte des glissements de terrainet il est raisonnable de penser qu’en tenir compte impliquer-ait une valeur plus grande.Pour ce qui est de la valeur maximale de la magnitude M,

l’incertitude demeure importante, puisque les données empir-iques indiqueraient une valeur maximale pouvant correspon-dre à une intensité de IX sur le graphique de la figure 10. Si

Fig. 10. Estimation de la magnitude à partir de la distance par rap-port à l’épicentre et de l’intensité selon la méthode de Bakun etHopper (2004). La variation horizontale de la zone ombragée repré-sente la variation de 50 km sur la précision de la position de l’épi-centre de 1663 appliquée au glissement de Shawinigan. La variationverticale de la zone ombragée prend en compte l’observation liée auglissement de Saint-Adelphe (1988) et de Mulgrave-et-Derry. Laligne en tirets correspond à celle utilisée à la figure 9a. La zonegrillagée considère une fourchette d’intensités MMI comprises entreVII et VIII, et la barre verticale placée sur le triangle noir représentela variation de la magnitude pour ce point.

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on considère que la magnitude du séisme peut effectivements’étaler entre des intensités de VII et IX et que la valeur min-imale serait de M = 7,2 ± 0,2, alors l’approche de Bakun uti-lisée ici indiquerait qu’en se basant sur le glissement deShawinigan, le séisme aurait une magnitude centrée autourd’une valeur de M = 7,9 ± 0,7 (triangle à la fig. 10), ce quiest proche de la valeur maximale possible considérée pour lavallée du Saint-Laurent proposée par Mazzotti et al. (2005) àune valeur de M = 7,8 ± 0,6.

Discussion

Les données et analyses présentées plus haut représententune première tentative de la prise en compte des mouvementsde terrain dans une estimation de la magnitude du séisme de1663. Cette analyse permet de revoir l’appréciation actuelledu séisme de 1663, et les résultats sont discutés ci-après afinde considérer les incertitudes importantes inhérentes à unetelle approche.

Datation des mouvements de terrainEn l’absence d’observations directes, diverses méthodes de

datation ont été utilisées et les résultats sont comparés à ladate du séisme de 1663.Pour ce qui est de glissements de terrain subaériens, les

dates obtenues par les divers auteurs convergent aux alen-tours de 1663 et ces valeurs viennent aussi s’appuyer sur desobservations faites dans la plupart de ces secteurs au prin-temps de 1663 (Gouin 2001). Pour ce qui est du cas duMont Éboulé, le matériel daté (bois) a donné un âge plusvieux que 1663 (c.-à-d. en l’an 1000 de notre ère) suggérantque l’arbre d’origine aurait été plus que centenaire au mo-ment du séisme. À cet égard, Tuttle et al. (1990) et Tuttle(1994) ont identifié des dykes de sables près de Fernand-Boileau (environ 26 km au nord-est de l’épicentre du séismede 1988) dont une série ancienne y a été datée pour unséisme qui serait survenu vers l’an 588 de notre ère (c.-à-d.1420 ± 200 ans A.A.), date plus vielle que celle obtenuepour le glissement du Mont Éboulé. La datation du glisse-ment du Mont Éboulé pourrait peut-être être précisée davant-age par une étude des lichens formés sur les débris rocheux(Jibson 1996). Pour conclure sur le glissement du MontÉboulé, à moins de pouvoir identifier un séisme majeur plusproche de la date obtenue pour le glissement du MontÉboulé, nous allons continuer à relier ce dernier au séismede 1663.La datation d’événements sédimentologiques, tels que des

couches silteuses imbriquées dans des sédiments argileux(p. ex. Doig 1986), doit tenir compte des phénomènes possi-bles ayant pu causer une telle accumulation de sédimentsainsi que la signature granulométrique fine (St-Onge et al.2008). Par exemple, les travaux réalisés au fjord du Saguenayà la suite du déluge de 1996 ont mis en évidence des couchesturbiditiques causées par des séismes et par des pluies diluvi-ennes (Pelletier et al. 2003; Tremblay et al. 2003). Une tellepossibilité n’a pas été prise en compte par Doig (1986,1990), ce qui fait que les dates qu’il propose ne peuvent êtreattribuées avec autant de certitude au séisme de 1663 ou àd’autres séismes, sauf celui de 1988 ou encore pour celles es-timées à l’aide d’un taux de sédimentation.

Utilisation des glissements de terrainHodgson (1928), Smith (1962) et Gouin (2001) s’accor-

dent pour indiquer que si les glissements de terrain étaientpris en compte, cela aurait un impact important sur l’appréci-ation de l’intensité et donc de la magnitude du séisme de1663.Les données historiques rapportées par les observateurs du

temps et le développement de nos connaissances depuis 1962supportent le lien entre le séisme de 1663 et les mouvementsde terrain dans la région de Betsiamites, du Haut Saguenay,de Charlevoix et de la Mauricie. Gouin (2001, p. 206), bienque prenant en note les divers mouvements de terrain rap-portés par cette étude (voir la fig. 8 dans Gouin 2001), n’ac-corde pas trop d’importance à ces derniers car, selon lui, « ily a trop de facteurs qui ne sont pas spécifiquement sismiquesdans le déclenchement d’un glissement de terrain : la naturedu sol, le temps d’accumulation de sa masse jusqu’à équili-bre instable, le pendage du lit rocheux, l’huilage occasionnelpar l’eau etc. pour que ce phénomène puisse être utilisécomme critère d’une intensité sismique et surtout pour qu’ilpermette d’attribuer une intensité fixe à tous les glissementsde terrain coïncidant avec le séisme ». Vu sous cet angle, onpeut souligner le glissement de Saint-Alban du 27 avril 1894,dont le volume impliqué dans le mouvement est estimé à225 Mm3 (Laflamme 1900; Locat et Chagnon 1989) lequeln’est pas d’origine sismique. Par contre, pour Saint-Alban, ils’agissait d’un cas isolé, alors que pour le séisme de 1663,plusieurs grands glissements seraient survenus au même mo-ment sur un territoire couvrant un minimum 100 000 km2.Dans notre analyse, les glissements de terrain de la région

de Shawinigan ont une incidence majeure sur l’estimation dela magnitude du séisme de 1663. Smith (1962), qui a réviséles diverses données disponibles à l’époque, s’appuie sur lesobservations de Hodgson (1928) et indique qu’en l’absence dedommages significatifs aux infrastructures de Trois-Rivières,on ne peut pas considérer que les mouvements de terrainobservés en Mauricie aient été causés par le séisme de1663. Toutefois, les travaux subséquents dans ce secteurpar Desjardins (1980), bien qu’encore limités, indiqueraientque les dates obtenues soutiendraient l’hypothèse qu’ils sontle résultat du séisme de 1663. Ce cas ne semble pas avoirété particulier à la région de la Mauricie, car la lecture desdonnées historiques rapportées par Gouin (2001) indiqueque la plupart des grandes rivières du côté nord du Saint-Laurent ont charrié des sédiments et des arbres d’une façonnotable et, coïncidence, dans chaque cas on a noté d’im-menses bouleversements des terrains en amont de ces riv-ières : il ne s’agit donc pas là de cas isolés.D’un autre côté, Keefer (2002) aux États-Unis, Hancox et

al. (2002) en Nouvelle-Zélande et Papadopoulos et Plessa(2000) en Grèce ont illustré l’intérêt d’utiliser les glissementsde terrain comme proxy à l’évaluation des séismes histori-ques (c.-à-d. avant l’avènement du sismographe). Keefer(2002) note que malgré le fait que plusieurs facteurs influen-cent le déclenchement des glissements de terrain (p. ex. effetsde site, conditions de pressions interstitielles, etc.) et la na-ture de la géologie des secteurs impliqués (p. ex. séismes in-tra-plaques versus séismes de marges actives), de telséléments ne semblent pas ressortir particulièrement dans l’a-nalyse des données accumulées, de telle sorte qu’il juge lesrelations utiles surtout pour les cas où les données historiques

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et les observations sur les dommages aux infrastructures sontlimitées. Bien que la profondeur puisse jouer un rôle sur l’in-tensité locale d’un séisme, cette valeur n’est pas prise encompte directement par l’approche de Keefer (Keefer 2002).Dans la région de Charlevoix, le foyer des séismes est rare-ment plus profond que 30 km (Lamontagne et al. 2003).Bien que Keefer (2002) considère que la composante géo-

graphique ne ressort pas dans leur analyse, il est bon de sou-ligner que, sauf pour le cas du glissement de Saint-Adelphecompilé par Rodríguez et al. (1999), les autres données com-pilées par ce dernier ainsi que celles de Keefer (1984) necomprennent pas de sites provenant d’une région dont laroche en place est constituée de roches précambriennes quisubiraient un relèvement glacio-isostatique permettant ainsid’évaluer l’importance de cet aspect vis-à-vis l’applicabilitéde cette approche pour de telles régions.Au Québec, l’utilisation de glissements récents causés par

des séismes (p. ex. celui du Saguenay de 1988 et de Val-des-Bois de 2010) montrent que des séismes d’environ M5 à M6peuvent provoquer des glissements de terrain. Dans ces deuxcas, les volumes impliqués n’ont rien de comparable à ceuxidentifiés pour le séisme de 1663. Le glissement de Val-des-Bois est actuellement étudié (D. Demers, communication per-sonnelle 2011), et il est donc impossible de prendre encompte les paramètres géotechniques reliés à la rupture. Parcontre, celui de Saint-Adelphe a été étudié en détail par Le-febvre et al. (1992) qui ont démontré que dans ce cas, la sta-bilité du talus était déjà précaire au moment du séisme. Cetaspect soulève une lacune de l’approche de Keefer en cequ’elle ne peut pas tenir compte de la stabilité du talus avantla rupture. Pour les glissements récents, on peut réaliser uneétude à rebours et évaluer la composante nécessaire de l’ac-célération sismique qui pourrait agir comme déclencheur.Pour ce qui est des séismes plus anciens, par exemple celuide 1663, une telle rétro-analyse conserverait une incertitudeélevée. Malgré cela, le cas de Shawinigan mériterait uneétude plus poussée semblable à l’étude réalisée pour leglissement de Saint-Adelphe (Lefebvre et al. 1992), car iljoue un rôle crucial dans l’évaluation de la magnitude duséisme de 1663.Dans le cas de séismes anciens (p. ex. celui de 1663), une

approche qui pourrait être explorée est celle qui prendrait encompte la magnitude des mouvements de terrain pour leur at-tribuer un poids relatif basé, entre autre, sur le volume.Ojeda-Moncayo et al. (2004) ont proposé une approche pourquantifier la magnitude des glissements de terrain (LM) quiprend en compte différents paramètres dont le volume, lasuperficie, la vitesse de déplacement. Par exemple, seloncette approche, les glissements de Saint-Jean-Vianney (celuide 1663) et de Colombier auraient une valeur de LM respec-tive comprise entre 30 et 35 (sur une échelle de 40), alorsque ceux, en 1988, de Sainte-Thècle et de Saint-Adelphe aur-aient une valeur inférieure à 18. Cette méthode demeure ru-dimentaire, mais offre une avenue qui permettrait d’améliorerl’appréciation de l’intensité (MMI) attribuée à un glissementde terrain. Elle pourrait peut-être permettre d’intégrer, à l’é-valuation de la magnitude de séismes anciens proposée parKeefer (1984) une autre dimension qui prendrait en comptela magnitude des glissements de terrain utilisés, par exempleen considérant leur volume et leur étendue.

Localisation de l’épicentre du séisme de 1663Hodgson (1928) base la position de l’épicentre du séisme

de 1663 dans la région de Charlevoix surtout sur la foi desobservations de Mercier qui, en 1665, soulignait que les« ravages » faits par le séisme n’étaient que la moitié de ceque les Jésuites avaient rapporté. De plus, puisque Hodgson(1928) considère le séisme de 1663 semblable à celui de1925, il suggère, faute de plus de précisions, la même posi-tion, laquelle est toujours utilisée. Une compilation récentedes séismes au Québec (Lamontagne 2008) indique que laposition de l’épicentre est fournie avec une précision « D »,c'est-à-dire de ±50 km, mais toujours centrée par rapport à lamême position que celle proposée par Hodgson (1928), signi-fiant ainsi le lien avec la zone sismique de Charlevoix, quiest aussi celle qui est la plus active au Québec.Une observation qui pourrait appuyer une position différ-

ente de l’épicentre résulte de la comparaison entre lesséismes du 1 mars 1925, sous le fleuve Saint-Laurent, enface de La Malbaie, avec celui du 25 novembre 1988 au Sa-guenay. Sans aller dans les détails quant à la différence entrela nature des deux séismes, il est quand même intéressant denoter que celui de 1925 a fait relativement peu de dommages(Hodgson 1950), se limitant surtout à des dommages liés auxinfrastructures, sans mouvements de terrain rapportés (saufpeut-être les volcans de sables le long de la rivière duGouffre à Baie-Saint-Paul étudiés par Chagnon et Locat1988). Tout comme pour le séisme de 1988, Hodgson(1950) rapporte aussi des dommages causés par le séisme de1925 dans la région de Trois-Rivières et de Shawinigan. Leséisme de 1988, proche du Haut Saguenay, a quant à lui gén-éré des mouvements de terrain, bien que petits (c.-à-d. moinsde 80 000 m3, Lefebvre et al. 1992), jusqu’à Saint-Adelphe(en Mauricie, à 175 km de l’épicentre). Lorsque l’on analysela distribution des glissements de terrain qui seraient reliés auséisme de 1663, force est de constater que, comme pour leséisme de 1988 au Saguenay, ils se retrouvent presque tousau nord du Saint-Laurent. Le séisme de 1925 était sensible-ment plus puissant que celui du Saguenay de 1988 maisn’aurait pas causé de glissements de terrain au nord duSaint-Laurent. Ces différences quant aux conséquences deces deux séismes pourraient venir du fait que, comme le sou-lignent Lamontagne et Dascal (2006), les séismes ayant leurépicentre sur le Bouclier canadien subissent une plus faibleatténuation en fonction de la distance. De telles différencesentre les séismes du Saguenay de 1988 et de Charlevoix de1925 et la distribution des glissements de terrain liés auséisme de 1663 indiqueraient que le séisme de 1663 devraitêtre centré au nord du Saint-Laurent, mais avec la même in-certitude. Tuttle et Atkinson (2010) considèrent que, à partirdes données sur la liquéfaction qu’ils n’ont observées quedans les rivières du Gouffre, La Malbaie et Ouelle, les grandsséismes auraient leur origine dans Charlevoix. Il est impor-tant de souligner ici que la plupart des glissements de terraindans les sédiments générés par les tremblements de terre sontsouvent associés à diverses formes de liquéfaction (Kokusho1999) et qu’ils devraient donc être aussi considérés commetels dans les synthèses portant sur ce sujet. De plus, l’étudede Tuttle et Atkinson (2010) ne tient pas compte des travauxréalisés sur le glissement de Saint-Jean-Vianney de 1663(Potvin et al. 2001) qui rapportent des blocs déplacés et flot-tant dans des matériaux remaniés, non plus que les volcans

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de sable identifiés par J. Locat et al. (2003) dans la Baie desHa ! Ha ! et les dykes de sables observés par Chagnon (dansLasalle et Tremblay 1978) dans le périmètre du glissement deSaint-Jean-Vianney de 1663. De plus, pour la rétro-analysedu grand glissement de 1663 de la Baie des Ha ! Ha !(no 12 à la fig. 2 et au tableau 1), Urgeles et al. (2002) pro-posent de rapprocher la position du séisme de 1663 à la ré-gion du Saguenay afin d’être en mesure de générer lesaccélérations au sol nécessaires au déclenchement de ceglissement sous-marin. À ceci s’ajoute l’observation faite parDoig (1998) au lac Éternité (no 19 fig. 2 et tableau 1), qui luifait dire que l’onde de choc du séisme à l’origine de dépôtsde silt devait provenir du nord-ouest ou du nord-est, c'est-à-dire en provenance du graben du Saguenay. Tout comme lesouligne Doig (1998), le lac Éternité devrait être étudié da-vantage afin de mieux cerner les divers phénomènes catastro-phiques qui y sont observés et, si les phénomènes observéssont causés par le séisme de 1663, aider à en préciser davant-age le secteur englobant l’épicentre.Ainsi, la distribution des grands glissements au nord et le

long de la rive nord du Saint-Laurent sont autant de donnéesadditionnelles qui font pencher en faveur d’une position duséisme de 1663 au nord du Saint-Laurent. Il y aurait donclieu de considérer le déplacement de la position actuelle, sit-uée dans le Saint-Laurent, à une position au nord du Saint-Laurent, et non loin du graben du Saguenay, tout en conserv-ant, pour le moment, le même degré d’incertitude, c'est-à-dire ±50 km. Si la localisation de l’épicentre était déplacéedans la Baie des Ha ! Ha ! cela entraînerait une augmentationd’environ 20 km de la distance relative du glissement de Sha-winigan par rapport à cette nouvelle position (Locat 2008).D’autres études sont naturellement nécessaires pour évaluersi cette position pourrait encore être rattachée à l’astroblèmede Charlevoix.

La magnitude du séisme de 1663Tel qu’indiqué plus haut, les glissements de Shawinigan de

1663 ont un poids important dans les estimations de la mag-nitude et mériteraient donc d’être étudiés plus à fond. Il esttout de même important de rappeler que le volume total min-imal des glissements de terrain associés au séisme de 1663serait de 1,7 km3. Ce volume ne tient pas compte de l’estima-tion de 2,7 km3 additionnel de sédiments déplacés dans lefjord du Saguenay responsable en partie du dépôt d’une tur-bidite atteignant jusqu’à 15m d’épaisseur dans le fjord du Sa-guenay (Perret et al. 1995; Syvitski et Schafer 1996; St-Ongeet al. 2004; Locat et Levesque 2009). Il est intéressant ici desouligner que l’étude de St-Onge et al. (2004), par l’analysed’une longue carotte de 38 m dans le bassin central du fjorddu Saguenay, a permis d’établir les événements sismiquesdans ce secteur depuis 7200 ans. St-Onge et al. (2004), enutilisant les données paléomagnétiques et des datations au14C ont pu identifier et dater diverses turbidités associées àdes séismes. Ainsi, depuis 7200 ans BP (« Before Present »;en années calibrées), il y aurait eu six séismes majeurs quiauraient laissé des turbidites (carotte MD99-2222 de la fig. 2de St-Onge et al. 2004). Les séismes y sont rapportés pourdes âges avant aujourd’hui (en années calibrées) de 6850,5975, 5750, 5250 et 4200 ans, et qui correspondent à desépaisseurs respectives de turbidités de 2,3, 0,8, 1,9, 0,36 et0,51 m, alors que la dernière, c'est-à-dire celle de l’an 1663,

y a une épaisseur de 15,1 m ! Si l’épaisseur de la turbiditepeut-être utilisée comme un indicateur local de l’intensitérelative des séismes, celui du 5 février 1663 serait sans con-tredit le plus puissant à survenir dans ce secteur depuis7200 ans. Lors de la mission ayant permis de récolter lacarotte étudiée par St-Onge et al. (2004), une autre d’unelongueur de 58,5 m a aussi été récoltée mais n’a pas encoreété analysée (carotte MD99-2224, Hillaire-Marcel et al.1999). Son analyse permettrait possiblement de prolongerles données de paléosismicité au-delà de la période de7200 ans obtenue à ce jour pour le fjord du Saguenay.La prise en compte du séisme de 1988 (fig. 9), qui a pro-

voqué deux petits glissements de terrain non loin de Shawini-gan (Lefebvre et al. 1992), met en relief des exceptionspossibles, car ils se positionnent sous les relations proposéespar Keefer (1984) et Rodríguez et al. (1997). Leurs faiblesvolumes (presque 1000 fois moindre que ceux estimés pourShawinigan en 1663), et le fait qu’une analyse fine a révéléque le facteur de sécurité du talus était déjà très précaire àces deux endroits précis (Lefebvre et al. 1992), viennent ap-puyer l’analyse de Keefer (2002) qui trouve ces glissementscomme étant peu utilisables pour ce genre d’exercice. Notonsici que le séisme de 1988 est survenu un 25 novembre, alorsque celui de 1663 un 5 février, période de l’année où lanappe phréatique est normalement à son plus bas.Un séisme d’une magnitude de M = 7 à M = 7,5 devrait,

en principe, laisser une trace de la rupture en surface (Wellset Coppersmith 1994). Par contre, pour Bent (1996), Lamon-tagne (2002) et Mazzotti (2007), les séismes répertoriés auQuébec ne laisseraient pas de traces facilement visibles ensurface, sauf celui de l’Ungava de 1989 (M = 6,3, Adams etal. 1991) qui a laissé une trace de 8,5 km de longueur. À cesujet, J. Locat et al. (2003) proposent un secteur particulierde la Baie des Ha ! Ha ! où une faille (linéament) coïncider-ait avec la position de la tête de la coulée sous-marine de laBaie des Ha ! Ha ! reliée au séisme de 1663 (figs. 5b, 5c,5d). Cette faille présenterait un rejet vertical, sur terre, d’en-viron 0,6 m et cela sur une distance de moins de 1 km(fig. 5b), ce qui serait très faible pour un séisme ayant unemagnitude supérieure à 7 (Wells et Coppersmith 1994).Dans la portion marine, le rejet observé serait de moins de2 m dans les sédiments sous-marins au droit de la portionterrestre de la faille (fig. 5d et J. Locat et al. 2003). Ces ob-servations demeurent fragmentaires mais elles suggèrent quece secteur serait propice à des études plus poussées.Nos observations indiquent que les manifestations « géo-

morphologiques » du séisme de 1663 n’ont absolument riende comparable en intensité ni en étendue avec tout ce quenous avons pu répertorier au Québec depuis ce temps. Ainsi,en nous appuyant sur nos observations, et contrairement à cequi a déjà été proposé par Hodgson (1928), ce séisme seraitnettement plus puissant que les autres séismes historiques (c.-à-d. que ceux de 1732, 1791, 1870 et 1925). Les approchesempiriques basées sur les glissements de terrain indiqueraientque la valeur minimale de la magnitude M du séisme de1663, établie à partir du glissement de Shawinigan de 1663,serait de 7,2 ± 0,2.Quant à la valeur maximale de la magnitude du séisme de

1663, elle pourrait être précisée davantage par une rétro-analysedétaillée des glissements de Shawinigan de 1663 ainsi quepar une modélisation de l’approche de Bakun et Hopper

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(2004) qui utiliserait les données d’intensité du séisme duSaguenay de 1988 afin de voir l’effet d’un séisme dontl’épicentre est localisé à proximité du graben du Saguenaysur les relations intensité–magnitude. Pour le moment, ens’appuyant sur l’approche de Bakun, la valeur maximale dela magnitude serait considérée ici comme proche de la va-leur maximale proposée pour la région de Charlevoix parMazzotti et al. (2005) qui est M = 7,8 ± 0,6.Des études dans d’autres régions du Québec, incluant les

lacs Saint-Jean, Manicouagan, Témiscouata, Jacques-Cartier(Lajeunesse et al. 2008), Éternité, et bien d’autres, pourraientpermettre de découvrir d’autres signatures majeures liées auséisme de 1663 et réduire les incertitudes.

ConclusionL’analyse des critères ayant été utilisés pour établir la lo-

calisation et la magnitude du séisme de 1663, faites à la lu-mière des données marines et terrestres acquises récemmentpour différents mouvements de terrain (c.-à-d. depuis aumoins 1962), nous amène à proposer les conclusions sui-vantes :

1. Le séisme de 1663 aurait son épicentre localisé dans leBouclier canadien au nord du Saint-Laurent, dans unerégion possiblement associée au graben du Saguenay.L’étude des perturbations sismiques du lac Éternitépourrait réduire l’incertitude à ce sujet.

2. La magnitude M du séisme de 1663, estimée à partir de laprise en compte des mouvements de terrain, aurait unevaleur minimale de M = 7,2 ± 0,2. Étant donné que ceséisme, à partir des données du Saguenay, serait le plusimportant depuis 7200 ans, la valeur maximale pourraitapprocher celle prévue pour la région par Mazzotti et al.(2005) pour la région et qui est de M = 7,8 ± 0,6. Unetelle conclusion devrait être revue par une rétro-analysedu glissement de Shawinigan de 1663, par le développe-ment d’un modèle inspiré de l’approche de Bakun calibréavec les données d’intensité du séisme du Saguenay de1988 et par l’analyse de la carotte de 58,5 m (MD99-2224) prise dans le bassin central du fjord du Saguenay.

3. Il est essentiel d’améliorer la validation des méthodes uti-lisées, lesquelles maximisent les données géomorphologi-ques, sédimentologiques et géotechniques visant la rétro-analyse des glissements causés par les séismes.

4. L’analyse présentée ici révèle l’énorme potentiel inexploitédes enregistrements géologiques d’événements catastro-phiques (p. ex. St-Onge et al. 2008) en vue de réduirel’exposition aux risques naturels des personnes et des in-frastructures au Canada.

Ce travail constitue une première tentative de la prise encompte des mouvements de terrain dans une estimation de lamagnitude du séisme du 5 février 1663. Au demeurant, cetteétude est préliminaire et sera grandement bonifiée par l’ap-port des études détaillées en cours et à venir sur les grandsglissements de terrain, dont ceux de Colombier, Shawiniganet Saint-Jean-Vianney, ainsi que des environnements subaqua-

tiques le long du Saint-Laurent entre Baie Saint-Paul et Ta-doussac et de lacs situés entre le Saint-Laurent et leSaguenay.

RemerciementsL’analyse présentée ici n’aurait pas été possible sans les

apports immenses de divers chercheurs qui ont fouillé les ar-chives (p. ex. P. Gouin, M. Lamontagne), les sols (p. ex. J.-Y.Chagnon, R. Desjardins, M. Tuttle) et le fond des lacs (R.Doig, W.W. Shilts, M. Ouellet) ou des fjords (J.P.M. Syvit-sky, C.T. Schafer, D. Perret, C. Levesque, R. Urgeles).Toutes ces informations colligées ici proviennent de plusieurstravaux réalisés par autant d’étudiantes et d’étudiants dip-lômés incluant G. Cauchon-Voyer, P. Locat, A. Locat, F.Martin, F. Maurice, D. Turmel, M. Sansoucy, S. Dubé, M.Bergeron, R. Couture ainsi que d’excellents collègues detravail et amis, tels que S. Leroueil, J.-M. Konrad, G. St-Onge, P. Lajeunesse, H. Tremblay et L. Boisvert. L’acquisi-tion de telles connaissances n’aurait pas été possible sans lesoutien financier du Conseil de recherches en sciences na-turelles et en génie du Canada, du Fonds québécois de la re-cherche sur la nature et technologies (FQRNT) ainsi que desdivers collaborateurs majeurs, tels que la Commission géolo-gique du Canada (Québec, Halifax et Ottawa), l’InstitutMaurice Lamontagne et le ministère des Transports du Qué-bec. Finalement, un merci particulier va à Denis Demers, De-nis Leboeuf et à Maurice Lamontagne ainsi qu’à Hans-BalderHavenith et aux deux autres évaluateurs anonymes de la re-vue pour leur évaluation constructive du manuscrit.

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