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SPÉCIAL JESS FRANCO Numéro 005 Novembre 2015

La Machine A Démonter Le Temps Et L'Espace 005 — preview

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Quelques extraits de ce cinquième numéro, presque exclusivement consacré à Jess Franco (avec un dossier de 69 pages — ça ne s'invente pas !), que complètent les habituelles rubriques «A l'ombre du bananier» et «Pour ceux qui ne veulent pas rester chez eux...» Plus d'infos ici : http://saucisse-et-saucisson.blogspot.ch/2015/10/lmad-05-novembre-2015-special-jess.html

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SPÉCIAL JESS FRANCO

Numéro 005 Novembre 2015

Ce n'est plus tous les jours que l'on peut voir un

Jess Franco sur grand écran. Aussi, la pro-

jection, dans le cadre du «Lausanne under-

ground film & music festival» de cette année

de «Lettres d'amour d'une nonne portugaise»

est assurément une bonne occasion pour repar-

ler de l'oeuvre du génial réalisateur espagnol.

En particulier de ses derniers coups d'éclat, car

il est indubitablement rare, pour ne pas dire

unique, dans l'histoire du septième art, que,

jusqu'à son décès, à un âge aussi avancé que

huitante-deux ans, un auteur arrive encore non

seulement à tourner pareille quantité de films

mais surtout, réussisse à énerver tant de cuistres

et à choquer tant de niais conventionnels.

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Depuis un bout de temps déjà, je ne vous

cassais plus les pieds à vous vanter les mérites

des films de Jess Franco... faut dire aussi que,

grâce (?) au dvd et à l'internet, un nombre sans

cesse plus considérable de sinistres petits mer-

deux se plaisent à écrire n'importe quoi sur lui

et sur son cinéma, ressassant inlassablement les

mêmes vieux lieux communs tout moisis ou

alors, en inventent de nouveaux, pas moins

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pathétiques et insignifiants, afin de dénigrer

une oeuvre qu’ils ne pourront de toute façon

jamais entraver, au vu de son immense richesse

et de sa complexité !

Du coup, j'avais très très moyennement envie

de me retrouver enclavé, même malgré moi,

dans cette masse infâme de bloggeurs déplai-

sants (toujours Brassens : «Parmi les cris des

loups on n'entend pas le mien» !). Surtout que,

d'un autre côté, je dois hélas l'avouer, outre les

sempiternels mêmes titres, déjà vus cent fois,

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que j'avais évidemment récupérés sur support

numérique lors de leur énième ressortie («Justi-

ne», «Névrose», «La comtesse noire» — par

ailleurs assez géniaux mais bon, pas très stimu-

lants quant à la mise en place de nouvelles élu-

cubrations... et j'exècre tout particulièrement la

redite, que ce soit dans ma vie ou mes écrits !),

les dernières tentatives du maître, après l'excel-

lent «Tender flesh» (vivement élogié dans l'en-

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cadré pages suivantes), m'avaient laissé pas-

sablement dubitatif pour ne pas dire franche-

ment déçu : faute en est, principalement, à des

versions hispano-ricaines carrément inaudibles,

à une photographie vidéo révulsante et au phy-

sique d'actrices plus nécessairement à mon goût

(désolé, Lina !!).

De même, la poignée d'anciens Franco que j'ai

pu découvrir récemment, à part «Las chicas de

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Entre mille neuf cent nonante-sept et nonante-

neuf, «Draculina», éditeur américain spécialisé

dans les hybrides entre revue de cinéma

d'horreur et érotisme soft pour adolescents que

ça démange (l'éponyme «Draculina», «Scream

queens illustrated», etc.) publia quatre «photo

comics». Des hybrides, cette fois, entre les «fo-

tostorie» italiennes des sixties (comme «Kil-

ling» — «Satanik» en français — ou toute la

série des «Star ciné» quelque chose) et, par leur

mise en page volontiers éclatée, la BD super-

héroïque. Une idée évidemment déjà très sym-

pathique à la base, surtout à cette époque où les

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seuls romans-photos que l'on risquait de pou-

voir lire se trouvaient dans les pages de revues

aussi passionnantes que «Nous deux», mais

magnifiée par le fait que, parmi la poignée de

fascicules édités, trois étaient des adaptations

des premières productions «One shot» de Jess

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Franco. Et force m'est de reconnaître que je

préfère grandement les versions papier de

«Lust for Frankenstein» et «Mari-Cookie and

the killer tarantula» que lesdits films dont elles

ont été tirées.

Ici, pas d'accents incompréhensibles, le sens de

l'humour si particulier du petit Jesus, qui peut

s'avérer tour à tour aussi subtil, cultivé que

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Reproche-t-on à un auteur d'Art Brut de

dessiner ses automobiles comme des boîtes de

conserve usagées ou de ne pas respecter à la

lettre les conventions en matière de pro-

portions, du moment que son langage lui est

propre et expressif ? Eh bien ! ici, c'est exacte-

ment la même chose !

Du coup, ne comptez pas sur moi pour tenter

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d'excuser les éventuelles «faiblesses» de ce

«Paula-Paula» en recourant laborieusement à

un discours pseudo-auteurisant...

Ne vous attendez pas non plus à ce que je vous

affirme, comme tous les chroniqueurs que j'ai

pu lire sur le net, qu'à l'origine de cet antépé-

nultième bras d'honneur du petit Jesus (les deux

parties de «La cripta de las condenadas» bien

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que sorties après, ont en fait été réalisées avant,

puisqu'il s'agit, si je ne m'abuse — comme le

docteur du même nom — d'une refonte du pré-

cédent «La cripta de las mujeres malditas»,

demeuré invisible), donc qu'à l'origine de ce

«Paula-Paula», il y a un CD, reçu par Franco,

contenant des enregistrements inédits de Fried-

rich Gulda et que c'est assurément ce qu'il y a

de meilleur (ou de moins pire, suivant les avis)

de tout le métrage...

N'imaginez même pas non plus un seul instant

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A l'instar des derniers films de Franco, «A

ritmo de Jess» est un objet singulier. Pas vrai-

ment un documentaire (en cela qu'à aucun mo-

ment il ne semble refléter la moindre opinion

de son «auteur», Naxo Fiol, sur quelque sujet

que ce soit) ni même un making of (dans le

sens habituel de publireportage lisse comme

aiment à en produire les grands studios). En

fait, le métrage se contente de suivre, durant

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une dizaine de jours, sans autre tentative d'or-

ganisation qu'un découpage en autant de cha-

pitres, le chaotique tournage d'«Al Pereira vs.

the alligator ladies», ultime oeuvre achevée de

son vivant par Jess Franco.

Et autant dire que c(e n)'est (pas) triste !

Très vite, le grand retour d'Antonio Mayans

(acteur récurrent dans toute la production fran-

quienne des eighties, qui avait disparu après

«Downtown heat» — pour ne réapparaître briè-

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vement qu'à l'occasion de «Snakewoman», en

deux mille cinq), dont n'importe quel fan aurait

normalement été en droit de se réjouir, semble

au contraire nuire au projet. Puisque le bon-

homme, ici aussi au poste de directeur de pro-

duction, loin de fournir à Jess la complicité

dont il aurait pu avoir besoin après le décès de

Lina Romay et encore moins de lui assurer la

liberté dont il avait pu bénéficier sur «Paula-

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ARBEITEN 1959 - 2010, par Peter Brötzmann

Peter Brötzmann n'est pas seulement l'immense

musicien que beaucoup trop ignorent encore. Il

est aussi un intéressant plasticien, à l'oeuvre

singulière, développée dans une sorte de pé-

nombre féconde depuis plus de quarante-cinq

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ans : affiches de concerts, pochettes de disques,

gouache, crayon, nescafé, paysages, objets.

Presque jamais exposé jusqu'au début des an-

nées deux mille, son travail a été recueilli

depuis dans divers livres et catalogues, dont ce

«Arbeiten 1959 - 2010» édité à l'occasion d'une

personnelle à la galerie «Epikur» de Wuppertal,

sa ville d'adoption.

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Je pense être assez content de ma carrière. C'est une

étrange carrière. J'ai toujours été un indépendant — un

outsider, si vous préférez. Mais je peux vous affirmer

une chose : peut-être bien que je n'ai pas toujours eu

assez d'argent pour boucler correctement mes films ;

mais j'ai toujours choisi mes sujets. Je les ai toujours

fait de la façon que je voulais. Et lorsque les gens ont

tenté de m'obliger à faire les choses à leur manière, je

ne l'ai pas fait. Ainsi je sais que ma carrière a eu ses

moments forts (à part ici en Espagne où je n'ai jamais

été populaire), par exemple, souvent, j'avais quatre à

cinq longs métrages qui passaient en même temps en

Allemagne, France, Italie ou même en Angleterre et

aux Etats-Unis. Et cela me suffit, vous savez. Et sin-

cèrement, aussi longtemps que je pourrai continuer à

réaliser des films de la façon qui me plaît... tout ira

bien.

Jess Franco 1930 - 2013

La machine à démonter le temps et l'espace est éditée par «Les éditions de la saucisse et du saucisson» et paraît dix fois par année. Numéro 5, novembre 2015 Tous les textes sont de Stéphane Venanzi. Quant aux photos, qui demeurent la propriété exclusive de leurs ayant-droits, elles sont reproduites ici uniquement à titre d'exemple. Abonnement pour 1 année (10 numéros) : 20 francs suisses à verser sur le CCP 87-190546-6 au nom de Stéphane Venanzi.