UneDoublureImparfaite

DumêmeauteurauxÉditionsSharonKena

Aucœurdelavolupté

Lescow-boyslovers

Lamalédictiontsiganetome1à5

JAWD

Souslemasquedesapparences

Défisentreamiesl’intégrale

Unrôlesurmesure

LesWarriorstome1à3

Flicsdemoncœurl’intégrale

PierretteLavallée

UneDoublureImparfaite

«LeCodedelapropriétéintellectuelleetartistiquen’autorisant,auxtermesdesalinéas2et3del’articleL.122-5,d’unepart,queles«copiesoureproductionsstrictementréservéesàl’usageprivéducopisteetnondestinéesàuneutilisationcollective»et,d’autrepart,quelesanalysesetlescourtes

citationsdansunbutd’exempleetd’illustration,«toutereprésentationoureproductionintégrale,oupartielle,faitesansleconsentementdel’auteuroudesesayantsdroitouayantscause,estillicite»

(alinéa1erdel’articleL.122-4).«Cettereprésentationoureproduction,parquelqueprocédéquecesoit,constitueraitdoncunecontrefaçonsanctionnéeparlesarticles425etsuivantsduCodepénal.»

©2017LesEditionsSharonKena

www.leseditionssharonkena.com

REMERCIEMENTS

Jemedoisdecommencercequatrièmetomepardesremerciementsetc’estdifficile,carjeressenstellementdegratitudeenversvoustousquejenesaispasparoùcommencer…

Alorspourchanger,mespremiersremerciementsvontversvous,lecteurs,quiprenezplaisiràmesuivre,mercipourvosremarques,pourvospetitsmotsd’encouragement,pourvossouriressurlessalonsdulivre,pourvoscoupsdecolèreàproposdecertainsdemespersonnages,devoscoupsdecœur…

Tousvosretourssontautantdesoleilsdansmoncœur…

Celivreneseraitpasentrevosmainsaujourd’hui,sansCyrielle,monéditrice,quidepuisquejeluiaienvoyéentremblantmatoutepremièrenouvelle,merenouvellesanscessesaconfiance.Merci,Cyrielle,tunepeuxpassavoiràquelpoint,tucontribuesàmonbonheur.

Dansunemaisond’édition,ilyalapartievisible,maiségalementcellequ’onnevoitpasmaisquiœuvredansl’ombre…MerciàtoutlestaffSharonKena:comitédelecture,correctrices,servicepresse,sansoublierFeatherWenlockmonillustratrice,vousfaitesunboulotgénial!

Merciégalementàmafamille,poursonsoutieninconditionnel,sapatience,sonamour:mesparents,mafrangineetsonchériFrankie,Aurélie,NicolasetThéo,mestroisamoursetmonchéri,quiveillesurtoutcepetitmondelorsquejesuisenpleinecréationlittéraire…Merciàvoustous,jevousaime…Petitepenséepourmonangegardienquiveilledelà-hautsurmoi…Quechaquemotquej’écrisvolejusqu’àtoi…

MerciàmesadorablesBêtaslectrices,vousêtesgénialesetj’adorerecevoirvosremarquesouvoirvosréactionsen«live»,n’est-cepas,lesfilles?

Jen’oubliepasmesamisqui,dansl’ombre,mesoutiennentdepuismespremierspasd’auteur…

MerciauxBlogueurs,Booktubeurs,Chroniqueurs…

Merciàmespartenaires:LeslivresenFolies,labibliothèquedeMiangeMidémon,Kat’c’estmoi,Jelis,tulis,nouslisonsoulecoindeslecturespartagées,l’incontournableRebellesWebzineetplusspécialementPrincessTitietCocomilady.

Jen’oubliepasnonplusdansmesremerciements:LeslivresérotiquesdeMarieetSamanta,Elo-ditetmachèreJulia,Hookedonthebook,Sariahlit,Ninou,dublogInfluenceoftheMoon,auxquelsvientsegrefferPlaisirdesLivresetBenjaminetNadèged’IndeciseBook.

Alorsàvoustous…Simplement«MERCI»

Tabledesmatières

PROLOGUE

CHAPITRE1

CHAPITRE2

CHAPITRE3

CHAPITRE4

CHAPITRE5

CHAPITRE6

CHAPITRE7

CHAPITRE8

CHAPITRE9

CHAPITRE10

CHAPITRE11

CHAPITRE12

CHAPITRE13

CHAPITRE14

CHAPITRE15

CHAPITRE16

CHAPITRE17

CHAPITRE18

CHAPITRE19

CHAPITRE20

CHAPITRE21

CHAPITRE22

CHAPITRE23

CHAPITRE24

CHAPITRE25

CHAPITRE26

CHAPITRE27

CHAPITRE28

CHAPITRE29

CHAPITRE30

CHAPITRE31

CHAPITRE32

CHAPITRE33

CHAPITRE34

CHAPITRE35

ÉPILOGUE1

ÉPILOGUE2

PROLOGUE

Lorsqu’oncherchedansledictionnaireladéfinitiondumotdoublure,onnousrenvoieversplusieurssignifications:étoffequel’onemploiepourdoublerunvêtement,garniturechaudeàportersousunhabitléger,prête-nomoupersonnejouantabusivementlerôled’uneautreouencoreacteursecondairequisetientprêtàremplacerletitulairedurôleencasdebesoin.

Etauthéâtre,c’estcettedernièreexplicationquiprendtoutsonsens…commedanslavraievie!Quin’ajamaisrêvéd’êtrequelqu’und’autre,d’avoirdansleplusgrandsecretunmodèleetvouloirluiressembleraupointqu’onvousprendraitpourdesjumeaux?Ilyalameilleurecopinequiatteintuntelniveaudepopularitéquevousavezenviedeluiressembler,d’êtresonimage,sondouble…Alorsvousvousglissezdanssapeau,vouscommencezàvoushabillercommeelle,àparler,àpenser,àvivrecommeelle.

Etcen’estpasleseulexemple,toutlemondevoudraitressembleràquelqu’und’autre,poureffacersapropreviequinenoussatisfaitpas,cherchercettenotoriétéqu’aufonddesoncœur,onaspireàtrouver…Alorsons’appliqueàressembleràunemuse,unmentor,celuioucellequiseracapabledefairesortirnotre«moi»profond,mêmes’ilnefautpourcelaquejouerunrôle.Oncalquesesexpressionssurtelleactricequel’onconsidèrecommeparfaite,ouons’imaginepleindetalents,aussi

douéquelechanteurquiparvientàmonterdanslesaigus,onveutêtrelui,onsepersuadequ’onestlui…

Etilyenaquivontdansl’extrême,quisonttellementmaldansleurpeau,qu’ilsveulenttotalementsetransformer,allantjusqu’àsefaireopérerafind’avoirdestraitscommunsavecleursidoles,neressemblantplusqu’àdepâlescopies…PauvreBarbiesiliconéeetpauvreKenplusvraiquenature…

Despoupées,desreproductionsenlatexsansâme,sanscœur,sansconsistance…

Etl’inverseestvraiaussi,certainssosies,certainesdoubluressouffrentdecettepopularitéacquiseparleurressemblanceavecleurarchétype…Cespersonnesontl’impressiondenepasavoirderéelleexistence,denevivrequeparl’intermédiairedeleur«modèle»,deleur«mentor»,deleur«double»

quimèneunevieparfaite,alorsqu’euxn’ensontqu’unepiètrereproduction.Certainsvivrontdansl’ombre,préférantnepassefaireremarquer,tentantdesecoifferdifféremment,dechangerdestylevestimentaire,maiscetteimagededoublurecontinueradeleurcolleràlapeauencoreetencore…

D’autresn’accepteronttoutsimplementpasd’êtretoujourscomparésàcetêtreparfaitàquiilsressemblentdefaçonpresquesurnaturelle.Leursouffranceseratellequ’ilschercherontàeffacercetteimageidylliquequ’ilsrenvoient,allantjusqu’às’autodétruireetrenvoyeruneimaged’eux-mêmesplusprochedelaréalité.Maisparfoiscen’estpassuffisant!Lorsqu’unepersonnequevousaimeznevoitenvousqu’unepâleimitation,qu’unsimplefaire-valoir,vousvouleztoutsimplementdisparaître,nejamaisavoirexisté,occulterdevospenséescetêtresiparfaitquiabousillévotreviemaisqu’onamissurunpiédestal.Alors,commelesdoubluresauthéâtre,vousrestezdansl’ombre,àmoinsquecenesoitellequivousengloutisse,voulantvousenfermerdanssonétreintemorbide.Vospenséesnevousappartiennent

plus,cesontlessiennes,àmoinsque…Etplusvousvousenfoncez,moinsvousavezenvied’émerger,c’estfaciledetoutsimplementoublier,defairecommesivousn’existiezpas…Vousrecherchezl’oublitoutsimplement,detouteslesfaçonspossibles…S’imagineruninstantpouvoirquittercettevieetrecommencerànouveausonenfance,atteindrecefameuxParadisBlancchantéparBerger…Puis,petitàpetit,lesombresvousengloutissent,vousnedistinguezpluslescauchemarsdelaréalitéetbientôtvotrevéritablepersonnalités’effacepournelaisserlaplacequ’àunedoublureimparfaitequevousavezenhorreur.Puisunjour,ilyacettelueurauboutdutunnel,etenfinquelqu’unvousvoittelquevousêtes…

CHAPITRE1

Dick

J’allaisêtreenretardunenouvellefoisetc’estenpoussantunjuronquejemelevaidemonlitetmerendissousladouche.Habituellement,c’estSashaquiveillaitàcequejesortedesousmescouverturesdèsqueleréveilsonnaitetquimehouspillaitpourquej’ailleprendreunedouche,maisellenelefaisaitplus.Lorsquejedescendais,monpetitdéjeunerétaitprêtsurlatabledelacuisine,ilnemerestaitplusqu’àleprendre,débarrasserlatableetpartirtravailler.Avantquejem’enaille,ellemedétaillaitdelatêteauxpiedspourvérifierquejen’avaisrienoubliéetposaitseslèvressurmajoueenmesouhaitantunebonnejournée.

Maisça,c’étaitavant…Depuisquelquessemaines,Sasham’ignoraittoutsimplement.PlusprécisémentdepuislejouroùLucky,notreamidontelleétaitamoureuse,nousavaitannoncésondépart.

Luckyestmusicien,compositeurmaiségalementunputaindechanteur.Ilavaitunevoixàfairepâlirlesstarsmontantesdelachanson.Lorsqu’ilsemettaitàinterpréterunedesescréations,c’étaitcommesilesoleilselevait,mêmesidehorsilpleuvaitàverse,commesiunemainplongeaitdansvotrepoitrinepourcaresservotrecœur,commesi…commesivousétiezheureuxtoutsimplement.

Luckyestuntypeextra,c’estunsuperpoteetilfautavouerqu’ilfaitcraquertouteslesfilles,ycomprismafrangine.Lui-mêmel’avaitmisesurunsacrépiédestal,laconsidérantcommeunedéessevirginale,intouchableetparfaite…Lachuteavaitétédurelorsqu’elleavaittrahilesZonardsens’acoquinantaveccettepétassedeSuziepourblesserOphélie,cettedernièreétantdéjàpsychologiquementaffaiblieparsonaccident,lapertedesonbébémaisaussidesamobilitéréduite.

Luckyavaitétéunvéritablerocpourelleetleuramitiés’étaitincroyablementrenforcéeaupointqu’ils’étaitsentiirrémédiablementblesséparlatrahisondeSasha.

Ill’avaitalorsréellementvue,avecsesqualités,maisaussisesdéfauts…Ellen’étaitplusqueSasha,unejeunegothiqueetnoncettedoublureangéliquequ’ilidéalisait…etlorsquesesœillèresétaienttombées,ilavaitdécidéqu’illuifallaitdutempspourparveniràluipardonner,àl’aimerdenouveauenprenantencomptesapersonnalitéqu’ilvenaitdedécouvrir.Aussi,lorsqu’onluiavaitproposéuncontratavecungrandlabelmusical,lapromessedesortirunalbumetunetournéeeuropéenne,iln’avaitpashésité…

Maisdepuis,Sashaavaitchangé,ellenemeparlaitpresqueplus,sortaitpratiquementtouslessoirsetnerentraitqu’aupetitmatin,sanssedouterquejenedormaispas…Enfait,j’étaisincapabledetrouverlesommeillorsqu’ellen’étaitpaslà.Jem’inquiétaispourelleetlorsquejeleluiavaisdit,ellem’avaitriaunez,d’unrirequim’avaitprofondémentglacéetdepuis…jesouffrais.

Jeretournaidansmachambreetsortisunepetitefichecartonnéedematabledenuit.

*Douche:ok

*Rasage:ok

*Déodorant:Zut!Oublié…

Jeretournaidanslasalledebainsetm’aspergeaideparfumensecouantlatête.J’avaisvraimentl’impressiond’êtreunbonàrien,unassistédelavie,commemel’avaitassenéSashaenmenotantsurdesboutsdecartonscequejedevaisfairelematinavantd’allertravailler.C’étaitdemafaute,jen’allaispaschercheruncoupablelàoùiln’yenavaitpas.C’estmoiquiavaisvécuplusieursannéesaveccommeseulecompagneuneseringue,uneaiguilleetquelquesgrammesdedroguedure.Cesmerdesavaient

bousilléquelquechoseenmoietsouvent,j’avaisdesabsences,surtoutpourlesgestesduquotidien,telsquepenseràchangerdechaussettesoucommelà,nepasomettredemeparfumer.

Dèsquejefusderetourdansmachambre,jesuivislalisteàlalettre,sous-vêtementspropres,mettrelelingesaledanslapanièredelasalledebains,faireaérermaliterie,ouvrirlesfenêtres…

Ilmefallutprèsd’unedemi-heurepourtoutfaireetlà,sijeprenaisletempsdeprendremonpetitdéjeuner,jeseraisfranchementenretard.J’allaissortirlorsqu’onfrappaàlaporte.J’ouvrislebattantetunsouriresefichasurmonvisageenvoyantJonas,monmeilleuramiquimeregardaitd’unairrieur.

Salut,Dick,Ophéliem’aenvoyépourt’emmeneràtonrendez-vousavecletypedePôleemploi,tuesprêt?

Bonsang,marmonnai-je,malàl’aise,ellesedoutaitquejeseraisenretard,pasvrai?

Eneffet,etc’estjustementpourcetteraisonquejesuisici,pourquetunelesoispas,biaisa-t-ilenfronçantlessourcils.Sashan’estpaslà?

Elledort,marmonnai-jeenprenantmondossiercontenantmespapiersquej’avaispréparésurlasellette.Onyva?

Jonasmeregardafixementetposasamainsurmonépaule.

Eh,toutvabien,d’accord?Cen’estpasunproblèmepourmoideteconduiresurplace.

Jehaussailesépaules,fataliste.Mesamismeconnaissaientetmêmesiparfoisilssemoquaientdemoi,mêmesidetempsentempsleurironiemefaisaitmal,jesavaisquejepouvaiscomptersureux.Pourlapremièrefois,jenesavaispasquoidire.Jerestaienlisédansunsilencequifinitparm’étouffer.

J’ouvrislecarreaudelaportièreetprisunegrandegouléed’air.Jenesavaispascequej’avais,j’avaisl’impressiond’êtreenfermédansuncarcanetcettesituationmefaisaitpeur.

Dick…Dick,toutvabien?

JemetournaiversJonasenopinantd’unsignedetêtealorsqu’auplusprofonddemoi,j’avaisenviedecrierquenon,çan’allaitpas,quej’avaispeuretquelafaçondontSashameregardaitmepeinaitplusquederaison.J’auraisvouluhurleràJonastoutematristesse,macolère,maisjenepusqu’étirerles

lèvresenuneparodiedesourire.

Ouais,cool,m’entendis-jerépondre.JemeposaislaquestiondesavoirpourquoilesréférentsàPôleEmploisemblenttousplusdémoralisésquenouslesdemandeurs?S’ilsveulentmotiverlesgarspourleursrecherches,pourquoimettredesquinquagénairesbedonnantsetmyopesaulieudebellesetsplendidesjeunesfemmesavecuntourdepoitrineplusélevéqueleurQI?Nuldoutequ’onnerisqueraitaucunretardpourêtreaurendez-vous!

Jonass’esclaffa.

Figure-toiqu’ilyaquelquesannées,ilyavaituneconseillèredecegenre,Liliqu’elles’appelait.

Elleétaitblonde,avaitdesseinsaussigrosquedesmelons,cesdernierssemblaientvouloirjaillirdesesdébardeursserrésqu’elleportait,etunepairedefesses...Situavaisunetronchequiluiplaisait,tupassaisàlafoisdans,suretsoussonbureauetelleterefilaitunpostepourquelquessemainesouquelquesmoisenfonctiondelafaçondonttul’avais…contentée.

Jetournailatêteverslui,n’encroyantpasmesoreilles.

Tutefichesdemoi,c’estça?

Non,demandeàBoubasic’estdesconneries,s’exclama-t-il.Elleluiafaitunepropositionquepersonnen’auraitpurefuser.UnboulotpeinarddegardiendesécuritédansunepetiteentrepriseenCDI,etce,pourunsalaireplusquecorrect.Laseulechosequ’elledemandaitenéchangec’étaitqueBoubapayedesapersonne.

Bordel,cen’estpasàmoiqueçaarriveraitunechosepareille!m’écriai-jeenriant.Alorsqu’est-cequ’ilafait?

Oh,Boubaapassélesdeuxheuressuivantesàcontentersexuellementsaconseillère,puisilestsortidelapièce,s’estdirigéverslebureaududirecteuretluiadit:«Jeviensicipourchercherduboulotenrapportavecmescompétences,pasparcequejesaisutilisermaqueue!».Etilaquittél’agence…

Deuxjoursplustard,ledirecteurlerappelaitenpersonnepours’excuserducomportementdeLiliquiavaitététransféréedansuneautrevilleetBoubaaobtenulejob!

Çaalors,j’ignoraiscomplètementcettehistoire!Commentsefait-ilquejen’enaieriensu?

Jonass’assombritetjecomprissansqu’ilaitbesoindemerépondre.Unsentimentdepertem’envahitàl’idéedetoutcequej’avaismanquéenleurcompagnie.

C’estbonmec,tebilepas,j’aicompris,luirépondis-je.C’étaitpendantmapériodefarineetsucreglace,c’estça?

Jonasneputs’empêcherderire.

Oui,c’esttoutàfaitça!Çayest,onestarrivé!poursuivit-ilensegarantsurleparkingdelastructurequiabritaitnonseulementPôleemploimaiségalementtouslesorganismessociaux.Tuveuxqu’unedesjumellesviennetechercher?

C’estbon,Jo’,jevaisprendrelebus,etnon,papa,jen’aipasoubliémacartedetransportetoui,jesaisquejedoisprendrelaligneB832pourrejoindrelaZone.Jenesuispasnonplusunattardé,maugréai-jeendescendantduvéhicule.

Eh,Dick,jen’aijamaispenséça!s’écriaJonasàtraverslavitre.

C’estbon,excuse-moi,jesuisunpeusurlesnerfsencemoment,luiavouai-je,regrettantdéjàmoncoupd’éclat.

JesentaisleregarddeJonasposésurmoi,ilfautdirequ’ilm’avaitsauvélavieàunmomentoùjen’aspiraisqu’àunechose:LaMort.J’entraidanslebâtimentaprèsêtrepasséauxdifférentspointsdecontrôle.Onseseraitcrudansunjeuvidéooùchaque«checkpoint»étaitunmoyendesauvegarderlapartieencours.Contrôled’identitéenscannantsacarteperso?Check…Vérificationdel’heuredurendez-vousetdunomdevotreréférent?Check…Etseulementàpartirdecemoment-là,vousaviezlapossibilitédemonterdeniveau…

J’ignorecequ’ilscraignaientpourquelasécuritésoitainsirenforcée.Jesaisqu’aprèslesattentatsquiavaientsecouélepays,leplanVigipirateavaitétémisenplaceafindeprotégerleshabitantsmaisjetrouvaisquelà,c’étaitallerunpeuloindanslaparano…J’enétaislàdansmesréflexionslorsquemonréférent,FélixDugranneau,passaleboutdesonnezparlaportedesonbureaupourm’appelerd’unevoixsibassequejedustendrel’oreille.

Dèsquejefusentré,ilmefitsignedem’asseoirettapalentementsursonordinateur.Cinqminutesplustardilmeregardaenfin…Sionpeutconsidérerlebrefcoupd’œilqu’ilvenaitdemelancercommel’expressiondesonattention…etseraclalagorge.

DicksonCorbins,j’aiuntravailpourvous!

Bonjour,MonsieurDugranneau,jevaisbien,merci!

Jevissonfrontseplisser,commes’ilcherchaitoùilavaitbienpufaireuneerreurmaisdetouteévidence,lapolitessedevaitavoirétéoubliéedanslaprogrammation.Ilpoursuivittoutefoissurunairàlafoisfébrileetanxieux.

Vousêtesun«toucheàtout»,MonsieurCorbins.Vousêtesl’undesseulsinscritscommedemandeurd’emploidanscetteagenceàacceptertoutetn’importequoi!

Jenesaispassijedoisprendreçapouruncompliment!murmurai-je,enmedemandantoùilvoulaitenvenir.

Voilà,jevousproposeunemploientantqueconcierge!

Jelefixaicommes’ilvenaitdeperdrelatête.Okay,j’avaisl’impressionquecetentretienallaitêtrelong…trèslong.

CHAPITRE2

Dilyanna

Moncœurbattaitlachamadeetjenepouvaisrienfairepourl’arrêter.Oh,biensûr,cen’étaitpasunhommequimedonnaitdespalpitations,nilafrayeurouencorelajoiemaisuniquementlefaitquej’yétaisarrivée…Aprèsunanàl’étrangerpourvoirlefonctionnementdecertainsdispensaires,j’étaisenfinparvenueàconvaincreleMairequeceseraitunebonneidéed’enouvrirundansmavillenatale.

Etmevoilàdonc,àvingtetunans,prêteàouvrircettemaisonmédicaleenassociationavecdeuxamismédecinsafindevenirenaideàunepopulationensituationdeplusenplusprécaire.Maisilyavaitdesinconvénientségalement.Jesavaisquedonnerdessoinsgratuitementàdespersonnesdanslebesoinseraitvud’unmauvaisœilparlesmembresdel’Élite,mêmesij’enfaisaiségalementpartie.Jeprisuneprofondeinspirationetappréciaimonmomentdedétente.Quatreansquej’avaisquittécetteville,cesmédisances,ceMaireimbudelui-mêmequin’écoutaitriendecequ’onluidisait.Heureusement,cettefois,j’avaiseudesibonsargumentsqu’iln’avaitpurefuserunetelleproposition.Jeserraimonmugdechocolatcrémeuxentremesmainsetenhumailedélicatparfum.Ça,çam’avaitmanqué,cepetitsalondethéfamilialoùj’aimaisveniraprèslescours.Jem’installaissouventàl’étagepourqu’onnemeremarquepasetmerégalaisdesgâteauxetviennoiseriesquiyétaientproposés.

Deséclatsdevoixmefirenttournerlatêteetjevisavecstupeurunebandedejeunesinvestirleslieuxets’installerdansunimmenseboxenchahutantgentiment…desZonards!Jesecouailatêteenréalisantqu’aumoinsici,ilsnesouffraientpasd’ostracisme,toutcommemoij’enavaisétévictimeautrefois!

Maisc’étaitdupassé!Jecroquaisdansunchouàlacrèmelorsquej’entendisunevoixféminineeninterpellerjoyeusementuneautre.

Hé,Ophie,roulejusqu’ici,Raphaëllevanousamenernotrecommande!

Jemeretournaietcontemplai,choquée,lajeunefemmequiéclataderire.

Ohferme-la,Éva!J’embrassaismonhomme!

OphélieDavidson!LafilleduMaire,l’unedemesplusgrandespersécutricessetrouvaitlà,àquelquespasdemoi,dansunfauteuilroulant…Non…Çanepouvaitpasêtreelle,elleétaittropsnob,tropÉlitepoursecompromettreavecunebandedejeunescommelesZonards.Deplus,lajeunefemmeétaittropdétendue,tropheureusepourêtreOphélie.

Monregarddutêtreunpeutropinsistant,carellesetournaversmoi,fronçalessourcilsetunelueurs’illuminadanssonregard.Elles’excusaauprèsdesongroupeetsedirigeaversmoi,manœuvrantson

fauteuilavechabileté.

Dilyanna?demanda-t-elleenhésitant,commesiellen’étaitpascertainedequisetrouvaitdevantelle.

Jeprisuneprofondeinspirationetunsourireforcéétirameslèvres.

Bonjour,Ophélie,soufflai-jedansunsoupir.

Ellemefixaencoreunlongmoment,ouvrantlabouchecommesiellevoulaitmeparlermaisvisiblementlesmotsnesortaientpas.C’estalorsqu’unedesfillessortitduboxetsedirigeaversnous.

Ellemeregardad’unairsuspicieuxetposasamainsurl’épauled’Ophélie.

Ilyaunproblème?s’enquitlanouvellevenue,légèrementmenaçante.

Jenecroispas,répondis-je.Àmoinsqu’Ophélieneveuillelancerleshostilitéscommeellesavaitsibienlefaireautrefois.

Jedusmeretenirpournepasmemordrelalèvre.Qu’est-cequim’avaitprisdel’attaquerainsi?

Toutvabien,Mel’,ditOphéliepourrassurercellequisedressaitàsescôtéscommeungardeducorps.JeteprésenteDilyannaDeMayeur.

Élite?crachaladénomméeMel’enmefixantavecdégoût.

Parlanaissance,pasparchoixnipardécision,répondis-jecalmement.

Ophéliesouritetpoursuivit.

Dilyanna,jeteprésenteMélinaVanDerMay!

Élite?persiflai-jeàmontour.

Parlanaissance,merépondit-elle,merenvoyantmespropresmotsàlafigure.Pasparchoixnipardécision!

Nousnousdéfiâmesduregardquelquessecondesavantquenoslèvresnes’étirentdansunsourireetquenousnousesclaffâmesdeconcert.

OhbonsangOphélie,tuauraispumedirequetuavaisdesamiespotableset…

Ilyauneerreur,lacorrigeai-jegentiment.Ophélieetmoinesommespasamies,j’étaissa…souffre-douleur!

Lesangseretiraduvisaged’OphélieetMélinahaussalesépaulesd’unairgêné.

Oui,jesaisàquelpointellepeutêtregarce,m’approuva-t-elleenprenantplaceàmescôtés,maisnoustravaillonspourqueçachange!

Nous?demandai-je,curieuse.

Ophéliepoussaunprofondsoupir.

J’aiétébanniedel’Éliteàcausedemonaccident.Jesuisparaplégiqueetjenepourraiplusjamaisremarcher,m’annonça-t-elle.C’estJonas,le…leaderdesZonardsettoutesabanded’amisquim’ontaidéeàm’ensortiretmevoilà!

C’estcomplètementdingue,murmurai-je.Toi,OphélieDavidson,quiaacceptédel’aidedecesjeunes?Jen’enrevienspas.

Etcen’estpastout,poursuivit-elleenriant.JesuisencoupleavecJonas,etjenesaispassitutesouviensd’AngèleDuphiro?

LafilleduRequin?Biensûrquejem’ensouviens,elleétaitlaseuleàêtrecorrecteavecmoi.

Mais…sonpèren’estpasenprison?

Si,effectivement,etlavied’Angèleachangéelleaussi.EllehabiteàprésentavecJayson,le…

seconddeJonas,mêmesiditcommeça,çafaitunpeugangderue,semit-elleàrire.Ilsontrachetél’aubergeàlasortiedelavilleetl’ontentièrementretapée.

Tuasd’autresnouvellesdecegenreàm’annoncer?luidemandai-je,mesentanttoutdesuiteplusàl’aise.

Jelavissetroubleruninstant,posersonregardsurMélinaquil’observaitenfronçantlessourcils,sedemandantvisiblementcequilabloquaitainsi.

Léopoldaemménagéluiaussiavecsacompagneetleurfils,m’assena-t-elle.

Alorsça,jenem’yattendaisabsolumentpas.Jefermailesyeuxunmoment,pourmeremettreduchocqu’avaitprovoquélanouvelle.Léopold…papa…encouple…cesmotstournaientenboucledansmonesprit.Finalement,jerouvrislesyeuxetmeforçaiàsourire.LeregarddeMélinaétaitbraquéàprésentsurmoi,àlafoismenaçantetcompréhensif.

J’étaisamoureusedelui,ilyaplusieursannées,luirévélai-je.Tuvois,cetamourdegamine,quitefaitgriffonnersonprénomdanslamargedetoncahieraccoléautien,entouréd’unjolicœurrouge…J’aifantasmésurluiplusieursmoiset…maistoutça,c’estdupassé!

Jesuisraviedetel’entendredire,énonçatranquillementMélina.

Je…jenevoispasoùtuveuxenvenir!

Mélinaestmabelle-sœur,merenseignaOphélie.

D’accord,jecomprenaisàprésentpourquoiOphélieavaitsembléhésitanteavantdemeparlerdesonfrère.

Je…Çafaitbeaucoupàassimiler,murmurai-jeavechonnêteté.

Jenetelefaispasdire,affirmaMélinaensouriant.Cenedoitpasêtrefaciled’apprendretoutescesnouvelles?Tun’habitesplusdanscetteville?

Mesparentsyrésidenttoujoursmais,aprèslesproblèmesquej’aieusilyaquelquesannées,j’aipréféréprendrelelarge.J’aipassémonbac,puisjesuispartie.Jenesuisderetourquedepuismai,enfait,çanefaitquetroissemainesenvironquejesuisrevenue,etcoïncidenceétrange,monpremierarrêtaétéàl’aubergedevotreamie.J’étaistombéeenpannedevoitureetjen’avaisplusdebatteriesurmonportable…

Terappelles-tudequit’aaidée?medemandaOphélie.

Jevoulaisgarderpourmoilesecretdemarencontreaveccejeunehommesigentilquej’avaisbousculéviolemment.Alorsquejebafouillaisenluiprésentantmesexcuses,ilavaitéclatéderireenmedisantquec’étaitdesafaute,quesonéquilibreétaitinstablecarilavaitmisdeuxchaussuresdifférentes…Jel’avaisregardé,interloquée,avantderireaveclui.Nousavionsdiscutéunmomentetilm’avaitraccompagnéejusqu’àmavoiture,trifouillédanslemoteuretcinqminutesplustardlavoitureavaitredémarré.Jel’avaisregardéunlongmomentdanslerétro,maisunesilhouettetoutevêtuedenoirsepromenantsurlebas-côtém’avaitsurprise…Jemedevaisd’êtreprudente,surtoutsurcetteroutepeu

éclairéeetc’estainsiquej’étaisrentréechezmesparents.

L’aubergeétaitfermée,répondis-je.Jecroisqu’ilyavaitunesoiréeprivée.

Monanniversaire,murmuraMélina,émue.C’étaitunefêtesurpriseetunejournéeinoubliable.

Jenesavaispascequis’étaitdéroulécejour-là,maisdetouteévidence,Mélinaavaitencoredesétoilesdanslesyeuxenyrepensant.Monportablesemitàsonneretjem’excusaiunmoment.Quelquesminutesplustard,jeraccrochaienréalisantqu’ilallaitfalloirquejemerendesurl’emplacementdufuturdispensaire.JeretournaiàmatableetfussurprisedevoirqueMélinaetOphélieyétaienttoujours.

Riendegrave?medemandaMélina.

Rienquejenepuissegérer,répondis-jedansunsourire.

Ellesm’observèrenttandisquejerassemblaismesaffairesetMélinalaissaéchapperunjuron.

Jesaisqueçanesefaitpas,maisjesuiscurieuse.Pourquoias-tuétémiseàl’écartdel’Élite?

J’éclataiderireavantderéaliserqu’elleétaitonnepeutplussérieuse.

Tunetemoquaispasdemoi,réalisai-jealors.Regarde-moi,Mélina,quevois-tu?

Euh,unejeunefemmedanslavingtained’années,avecunsuperbesourire,unmagnifiquevisage,desyeuxàfairecraquerlesmecsetunepairedenibardsàrendrejalouseslaplupartdesfilles!

Mélina,j’aiétémiseàl’écartparcequejenerentrepasdanslanorme!

Jenevoisvraimentpas…balbutia-t-elle.

Jerentredansunetaillequarante-deux,pasdansunetailletrente-six,luidis-je.Sij’aiétémiseàl’écart,c’estparcequej’aiduventreetdesfessesmaisque,malheureusement,jenepeuxrienyfaire!

Maintenant,pardonnez-moi,maisilfautquej’yaille!

Jefilaicommesilediablemepoursuivait.Cetteconfrontationavaitéténécessaireetj’espéraisqu’ellem’aideàavancerdanslavie.JegrimpaidansmavoiturelorsquelevisagedeLéopolds’insinuadansmonesprit…etunsoupirs’échappademeslèvres.

CHAPITRE3

Dick

Jerestaiabasourdidevantmonconseillerquivenaitdemeproposercejob!

Concierge?!répétai-je.Vousvoulezdirequejevaisavoirlacharged’unimmeubled’appartements,ramasserlecourrier,passerlaserpillièreoucegenredechoses?

Alorslà,j’étaismal,cen’étaitdéjàpasfaciledem’occuperdemoi-même,maisêtreenchargedeplusieurslogements,ceseraitmissionimpossible!

Non!Non!Non!s’écria-t-ilens’épongeantlefrontd’ungrandmouchoiràcarreaux.Ce…cen’estpasça!

Vousn’êtespastrèsprolixe!marmonnai-je.

Voilà,vousvoyez,c’estpourçaquevousêtesparfaitpourceposte!renchérit-il.Vouspouvezpasserduvocabulairesoutenuàceluidelarueenquelquessecondesàpeine!

Ouah,voussavezquoi?Cetteconversationdevientdeplusenplussurréaliste!dis-jeensoufflant.

J’ail’impressiond’êtreenpleincoursdefrançais.Déjà,sij’utiliselesbonsmotsoulabonnesyntaxe,c’estparcequemêmesijesuisidiot,j’aimebeaucouplireetquejenelispasquedesbandesdessinées!

Doncjeparledjeun’soujeparlecorrectementenmemettantauniveaudemoninterlocuteur.

C’estça,c’estça!ajouta-t-ilensefrottantlesmains.

Ouah,lemecétaitdeplusenpluschelou!Sonregardbrillaitcommesijeluiavaisavouéquej’étaisDieuetquejepouvaisfairedesmiraclesetlevoilààprésentquimefixaitsiintensémentques’ils’étaitappeléSuperman,jeseraispasséauxrayonsX.

Non,vousnecomprenezpas,insista-t-ilenagitantlesbras.Ilnes’agitenfaitqued’unepetitestructure.Voshorairesserontassezflexibles.Enfait,ilvousfaudraêtreprésentauxheuresd’ouvertureafind’êtredisponiblesilespersonnesytravaillantontbesoindevouspournettoyer,ranger,changeruneampoule,etmêmeaccueillirlesgens,récupérerleslivraisons,lesranger…Cegenredechosesquoi!

Combiendepersonnestravaillentdanscette…structure?memoquai-je.

Trois!Deplus,c’estuncontratàduréeindéterminéeetlesalaireesttoutàfaitcorrect.

Benvoyons,jedemandeàvoir...ironisai-je.Jusqu’àprésentvousnem’avezconfiéquedespostesausalaireminimumet…

Ledouble,laissa-t-iléchapperdansunsouffle,quatorzeeurosnetdel’heuresurunebasedecenttrente-cinqheuresmensuelles.Vousaurezledroitgratuitementàlamutuelleetuneprimederisquetrimestrielledecinqcentseurosvousseraversée.

Jefronçailessourcils…Toutçanesentaitpasbon,maisalorspasbondutout.Jem’affalainonchalammentsurmachaise,allongeailesjambesetcroisailesbrassurmontorse.

Okay,soyezhonnête.Unsuperboulot,unsalaireàfairepâlird’envielasecrétairedemairie,lefaitquevoustranspiriezcommeunporcin…Dites-moi,vousmevoulezoù?Surlebureauoudessous?luidemandai-jeenprenantmonairleplussérieux.

Ilclignadesyeuxunefois…deuxfoisavantquelalumièrenesefassedanssonespritetc’estavecuneexpressiond’horreurqu’ilmeregardaitàprésent.

Quoi?Vouspensezque…Non!s’exclama-t-il,outré.

Bond’accord,iln’avaitpasnonpluslesensdel’humour…

Oùestl’entourloupe,MonsieurDugranneau?m’enquis-jesèchementenmepenchantverslui.J’aipeut-êtreoubliédemettredudéocematin,maisjesaisqu’onnefaitpasunepropositionsialléchanteàunZonardsansqu’ilyaitquelquechosedelouchelà-dessous!

Je…jenevoispasdequoivousvoulezparler,murmura-t-ilensortantunenouvellefoissonmouchoirdesapoche.

Alorsjevaisvousexpliquer…poursuivis-je.Nous,lesZonards,onsedémerdehabituellementparnous-mêmespournoustrouverdutaf…Etvousvoyez,j’utilisedesmotsquevouspourrezcomprendre.

J’aiacceptétoutcequej’aiputrouver.J’aibossépourlavilleentantquebalayeurderues,ahnon,c’estvrai…çafaitunpeutropesclavagiste.Ilfaututiliseruntermequifassemoinspéjoratif…commeagent

depropretéurbaine.J’aitravaillécommeéboueur,j’aiétéintérimairepouruneentreprisedetravauxpublics,etmêmepouruneautrequiconstruisaitdesmaisons.Ilsvoulaientmefairesigneruncontrat,maiscommeparhasard,ilyaeuunproblèmeinterneavecmondossier!Alorsnevenezpasmefairecroirequetoutàcoupvousm’offrezuncontrataussiintéressantsurunplateauenargentsansqu’ilyaitunemerdequirisquedemetombersurlagueule!

Ouhlà,là…Lorsquelacolèremontaitenmoi,jeneparvenaisplusàcontrôlermalangueetàlafaçondontDugranneaum’observait,labouchegrandeouverte,madernièretiradel’avaitlaissésurlecul!Ilseleva,s’épongeaànouveau,seservitunverred’eauàl’immensefontainequisetrouvaitderrièreluietseréinstalladevantmoi.

D’accord,souffla-t-il.Vousavezentièrementraison.Je…Lapersonnequivousarecommandépourcepostem’avaitassuréquevousétieztrop…enfinpasassez…

Intelligent?luisoufflai-je.

Oui,m’avoua-t-il.Ilpensaitquevousaccepteriezdesignerlecontratsansposerdequestionsmaisdetouteévidence…

Bon,dites-moitout,c’estquelquechosed’illégal?

Quoi?Maisnon,vousn’ypensezpas!Jesuisunhommeintègre,jeunehomme,quoiquevouspuissiezenpenser.C’estjusteque…quejeconnaisvosantécédents,MonsieurCorbins,etj’aiàcœurdeprendremonmétierausérieuxetdefairemonpossiblepourtrouverunemploistablepourlespersonnesquej’aidansmesdossiers,maislaconjonctureactuellen’estpasfavorableauxembauches.

Vousêtesentraindevousenliserdanslessablesmouvants!m’exclamai-je.Vousnepourriezpasêtreunpeumoinsvague?…

D’accord,soupira-t-il.Cetemploi,dansdesconditionsnormales,auraitétéattribuéàunjeunedel’Élitequiavaitbesoind’unboulotpeinardavecunejolierentréed’argentàlaclétouslesmoiscommeargentdepoche.

Alorspourquoimeleproposeràmoi?demandai-je,n’ycomprenantrien.

Parcequel’endroitoùsetrouvelastructuren’estpasanodin!Ilsetrouvedanslesquartierssud!

Ooookayyyy!

Là,d’accord,jecomprenais…Enfinnouspourrionspartirsurdebonnesbases.Lesquartierssud…Onpouvaitdire,eneffet,quejeconnaissais…Unpeutropbienmême,parcequec’étaitl’endroitoùjem’étaisréfugiéàdenombreusesreprisespendantmonadolescence.C’estencompagnied’amisvivantsurplacequej’avaisfumémapremièrecigarette,quej’avaispicoléetprismonpremierjoint…Etc’estlàaussiquejem’étaisinjectémapremièredose.Siàl’adolescence,lesquartierssudétaientpourmoileparadis,àprésent,lorsquejeregardaisenarrière,cen’étaitquemonenferpersonnel,maiscommetoutêtredesténèbres,onygardetoujoursunpied.

Vousvoyez,avecvotrepassé,lestentationsquis’offrirontàvous…C’estunrisquequejenevoulaispasprendre,maisquelqu’undehautplacém’aconvaincuquec’étaitaucontraireunendroitparfaitpourvous,unretourauxsources,avoua-t-ilenbaissantencorelavoix.

Jesecouailatête,réalisantsoudainquiétaitderrièrecettepropositionquinetendaitqu’àmefairereplongerdanslesaffresdeladrogue,quelqu’unquienvoulaitauxZonards,quelqu’unquivoulaitnousdétruireainsiquelaZone.

LeMaireDavidson!laissai-jeéchapper.

MonsieurDugranneauremualatêtedehautenbascommesielleétaitsoudainmontéesurressort.

Donnez-moiplusdedétails,ordonnai-je.

Jemeréinstallaiconfortablement.C’est-à-direquejem’avachissurmonsiège,carjesavaisquelesexplicationsseraientlongues,trèslongues,etjefermailesyeuxpourmieuxmeconcentrer.

Deuxmédecinsetuneinfirmièresesontassociéspourmonterundispensairemédicalàl’entréedesquartierssud,dansl’ancienrestaurantleSignolqui,commevouslesavez,aprisfeuilyaunan.Lestravauxsontfinisdepuisquelquesjours,lamunicipalitéadonnésonaccordpourl’ouvertureetaoctroyédesfondspourl’embauched’unepersonnequidevrafairelesréparationsaufuretàmesure.

Ouais,marmonnai-jesansmêmeouvrirlesyeux,unboulotàpleintemps,surtoutdanscesquartiers.

Eneffet!QuecesoitlaMairie,lesforcesdel’ordreoumêmevosfutursemployeurs,toutlemondes’attendàdesdébordements.

Etencore,lemotestfaible,soupirai-je.J’espèrequelesdocs’etl’infirmièresontmentalementarméspourcequilesattendlà-bas!

Enfait,l’infirmièreetl’undesmédecinsonttravaillédansdesdispensairesunpeupartoutàl’étrangerafindesefamiliariseraveclajungleenvironnante.

Bonsang!m’exclamai-je.Onneparlepasicidelions,detigresoudegrosmatousdecegenre.Onparledemecsetdegonzessesquin’ontplusrienàattendredelavie,deshumainspiresquedessauvagescarilyamoinsd’humanitédansleurpetitdoigtquedanslapatted’undecesfélins!

Vousconnaissezlespièges,medit-ilalors.Vousavezl’habitudedecette…fauneincontrôlable.Ilsaurontbesoindevous!

J’ouvrisbrutalementlesyeuxetlesplongeaidansceuxdemonréférent.

Voussavezcequevousêtesentraindefaire?luidemandai-jeenserrantlespoings,c’estm’envoyerdanslecouloirdelamort!

Jelesais,etjem’enexcuse,maisçanechangerienaufaitquesansvous,ilsnes’ensortirontpas!

Jepassaimesmainstremblantesdansmescheveux.J’ignoraissij’auraislaforcederésisteràtouteslestentationsquiseprésenteraientàmoi,sij’allaispouvoircontrerlesappelsdecessirènesillicites.Jesavaisquej’allaisdevoirmebattrecontreceuxdesquartiers,contremoi-même,maisj’avaisquelquechoseàmeprouver…Ilallaitfalloirquejesoisfort,incorruptible,carJonasetlesZonardsavaientconfianceenmoietilétaithorsdequestionquejelesdéçoive…Etilyavaituneautrepersonneàquijevoulaisdémontrerquej’avaischangé,unepersonnequicomptaitpluspourmoiquen’importequi…

Sasha!

D’accord,laissai-jeéchapperdansunsouffle.Jesigneoù?

CHAPITRE4

Dilyanna

Assisedansmavoiture,jetentaisderecouvrermoncalme.AvoirrevuOphélieavaitremuéenmoipleindesouvenirs,tousaussidétestableslesunsquelesautres.Maisilyenavaitquelques-unsquimeblessaientpar-dessustoutencoredesannéesplustard,cependantjenevoulaispasypenser.Lecoupdefilquej’avaisreçuétaitbeaucouppluspréoccupant.J’appelaiMaximilienetMike,lesdeuxmédecinsavecquij’allaistravaillerpourleurfairepartdelanouvelle.

Maximilienavaitàpeinetrenteans,ilétaitgrand,blond,incroyablementsexy,maisilétaitgay,cequin’étaitabsolumentpasunproblèmepourmoi.Ilvenaitd’ouvrirsoncabinetencentre-villeetavaittoutdesuiteremarquélesdifférencesflagrantesconcernantlessoinsapportésauxmembresdel’Éliteetlesautres.Lorsquejeluiavaisdemandés’ilseraitprêtàconsacrerquelquesheurespourvenirenaideàlapopulationdéfavorisée,etce,bénévolement,ilavaittoutdesuiteaccepté.EtilenavaitétédemêmepourMike,quiétaitunpeuplusâgéetquej’avaisrencontrélorsdemonroadtripmédical.Ilavaittrente-cinqans,célibataire,etcequiluiplaisaitpar-dessustout,c’étaitd’aiderlesplusdémunis.Lorsquejeluiavaisfaitpartdemadécisiond’ouvrirundispensairedesoinsdansunezoneàrisquesdemaville,ilavaitfaitsesvalisesetétaitrentréavecmoi.

Unefoisquejeleseusmisaucourantducontretemps,jemedirigeaiverslesquartierssudpourvoirlesdégâtset,enarrivantsurplace,unevaguededécouragementmesaisit.Lesmursextérieursquenousavionsrepeintslaveilleavaientététaguésettoutétaitàrefaire.Quelqu’unavaitmêmetentédeforcerlaserruredelaporteblindéeenacierrenforcé.Heureusement,là,ilsn’yétaientpasparvenus,maisdeuxvitresaurez-de-chausséeavaientétébriséesalorsqu’ellesétaientprotégéespardesbarreauxetunvoletmécaniqueprésentaitunénormetrouensonmilieu.

Ehbien,constataMikequis’étaitmisenroutedèsmonappeletquimerejoignitrapidement,nousnesommespasencoreinstallésquenousdérangeonsdéjàalorsquenousnefaisonsquetenterdelesaider.

Ilssontencolère,ilscroientsûrementqu’onestlàpourfairedusocial,pourlesfairerentrerdanslerang,maisilsnecomprennentpasquenousvenonsicipourlesaider,pourlessoigner,riendeplus!

soupirai-je.

Onvadevoirrecommencerunenouvellefois!repritMikeavecentrain.

Jemedemandesiçaenvautlapeine.

Oui,tuaspeut-êtreraison,maistuycroisàcedispensaireetmoiaussi,alorsonnevapasdéjà

baisserlesbras.Qu’enpenseMax?medemanda-t-il.

Qu’ilvautmieuxs’occuperdel’intérieurpourl’instantetqu’ilserabienasseztôtderefairelerestejusteavantl’ouverture,lerenseignai-je.

Ilestaucourantquenousouvronsdansquelquesjours?marmonnaMike.

Oui,illesait,maiscontrairementànous,ildoitgérersapropreclientèleetn’apasconsciencedesproblèmesquel’onrencontre.

Jeseraisbienrestéavectoipourt’aidermaisj’airendez-vousavecplusieursreprésentantspharmaceutiques…

Çaavancecommetuveux,lecoupai-je?

Çava,l’und’euxs’estmontrétrèsenthousiasteetlouenotregrandeintégrité,segaussa-t-il.Non,trêvedeplaisanterie,reprit-ilplussérieusement,enfaitlui-mêmeestissud’unmilieudéfavoriséets’estdéclaréplusquefavorableàl’ouverturedececentremédical.Ilnousfourniraenpansements,bandages,désinfectants…Toutlenécessairepoursoignerlesblessures.

Dis-moiquec’estunebonnechose,quejen’aipaseuunemauvaiseidéeenagissantainsi?lesuppliai-je.

Non,tuaslaisséparlertoncœur,merépondit-ilenmeserrantcontrelui.Àprésent,ilnenousresteplusqu’àleurmontrerdequoinoussommescapablesetdansunan,peut-êtremoins,ilsnousmangerontdanslamain.

Tuycroissincèrement?luidemandai-je.

Oui!

DevoirMikesioptimistemeremontalemoral.Ilm’aidaàouvrirlaporteblindéeetuneforteodeurdepeinturem’assaillit.Jenepusm’empêcherdesourireenréalisantletravailfabuleuxquiavaitétéabattucettedernièresemaine.Dèsqu’unpatientpousseraitlaporte,ilseretrouveraitfaceàl’accueil,unimmensebureautoutenhauteurdecouleursombrequiformaituncontrasteaveclesmurscolorés.Ici,pasdeblanc,commedansleshôpitaux…durouge,dujaune,del’orange,descouleursvivespourcélébrerla

vie.C’estlàquelesmaladesoulesblessésviendraientseprésenter,donnerleurspapierslecaséchéant…

Puisunefoisleursdossiersremplis,ilsseraientdirigésversl’immensesalled’attente.Danscelle-ci,unevingtainedechaisesconfortables,destablesbassessurlesquellesseraientdisposésdesmagazines.

Surlemurdufond,unebibliothèqueavecquelquesromansrécents,unefontaineàeauetunemachineàcafé.Au-dessusdelaporte,untéléviseurpasseraitdesclipsvidéoouencoredesdocumentaires…Unsourireétirameslèvres,j’avaistoutprévu…

Jemerendisensuitedanslessallesàl’arrière,celleréservéeaumédecindepermanenceetl’autre,pluspetite,quiseraitmondomaine.Sij’avaisacceptéqueleshommessechargenteux-mêmesdeladécodeleurcabinetd’auscultation,jen’auraislaisséàpersonnelesoindes’occuperdelamienne.Lorsque

j’ypénétrai,unsentimentdebien-êtrem’envahitetjem’installaiàmaplace.Toutétaitprêtpouraccueillirlespremierspatients,monbureauétaitsimplemaisfonctionnel,enchênefoncé,assortiauxarmoiresoùseraientrangéslesmédicamentsettoutcequimeseraitutilepoursoignerdesblessures,pourfairemonmétierd’infirmière.Pourlespeinturesdesmurs,j’avaischoisiunecouleurneutre,unbeigeclair,etlerevêtementdesolétaitdelamêmecouleurquelesrideauxquiseraientposésdansquelquesjours,celled’unchocolatchaud.

Unbruitdansl’entréemefitsursauteretjememaudisdenepasavoirreferméderrièremoi.Jemedirigeaipourtantversl’accueiletcroisaileregardd’unejeunefemmed’àpeuprèsmonâgequim’observaitfroidement,lesbrascroisés.

C’estpastrèsmalindegardervotreporteouvertealorsqu’onadéjàdégradévosmurs,commença-telle.Etunejeunefemmecommevousnedevraitpasêtreseuledansunendroitpareil.

J’étaisstupéfaiteparletoupetdecettefilleetavançaiverselle,lesbrascroisés.

Sachez,Mademoiselle,qu’ilyasixmois,jetravaillaiscommeinfirmièredansunezonedeguerre,dansundispensairedefortunependantquedesbombesexplosaienttoutautourdenousetjamaisjen’aiautoriséquiquecesoitàm’intimider,cen’estpasmaintenantquejevaiscommencer,déclarai-je.Maisjepeuxpeut-êtrefairequelquechosepourvous?

Jelavissetroublerunmomentetellerepritsamorguequisemblaithabituellechezelle.

Moi,cequej’endis…semoqua-t-elleenlevantlesmainsdevantellecommesiellen’enavaitrienàfaire.Maisilfautquevoussachiezunechose.Ici,vousêtesdanscequ’onappellelePandémonium…

Alors,necroyezpasquevousparviendrezàfairedesmiracles!

Jenem’attendsàriendetel,repris-je.Jenesuispaslàpourvousmontrerlechemindelalumièreoutouteautreineptiedecegenre.Jesuislàpoursoignerlesgens,pourrecoudreleursplaies,soignerleurshématomes,leurapporterunpeuderéconfort.

Laseulepersonnequirisquedesechoperunesaloperieici,c’esttoi!Ici,enenfer,noussommesvaccinés,nousn’avonspasbesoinqu’unefilledel’Élitenousvienneenaide,cracha-t-elleavecdédaintoutenmetutoyant.Cartuesl’undesesmembres,n’est-cepas?

Jerepensaiàlaconversationquej’avaiseuequelquesheuresplustôtavecdeuxd’entreellesquiavaientchangédeclassesociale.

Parlanaissance,pasparchoixnipardécision,répondis-jecalmementenreprenantlamêmephrasequej’avaissortieàMélina.

Foutaises!s’énerva-t-elleenhaussantleton.Vous,lesfillesdel’Élite,vouspensezpouvoirvenirsurnotreterritoire,nousprendrenoshommesetvousensortirlaboucheencœur.Vouslescorrompez,vousenfaitesdesgonzessesquin’ontpasplusdecouillesquelepluscastrédeseunuques,ilsdeviennentdespetitstoutousbiendressésquilèventlaqueuedèsqu’onlessiffle!

Ehbien!nepus-jem’empêcherdem’exclamer,ondiraitquetuaslahaineenversl’Élite,maisjet’enprie,lâche-toi,çanepeuttefairequedubien!

Voilàencoreunechosequimedébectechezvous…c’estvotrefausseté!Toujoursànouscaresserdanslesensdupoilpourmieuxnouspoignarderunefoisqu’onaledostourné!

Écoute,cetteconversationestpalpitante,maisjenevoispascequeçavientfairedanslefaitqu’undispensairevaouvrirsesportes!

Tunesaispasdansquoitut’embarques,persifla-t-elle.

Alorsvas-y,explique-moi!

Tucroistoutsavoir,hein?Çafaitcombiendetempsquetuessortiedetajolieécoled’infirmière?

Unan?Deuxtoutauplus?Leshommesetlesfemmesquetuvassoignericin’ontrienàperdre!Tuvasvoircertainsd’entreeuxvenirtevoiravecuncouteauplantédanslebide,àmoinsqueleursintestinsnependentjusqu’àleursgenoux…Tuvasavoiraffaireàdesfemmesalcooliquesetdroguées,enceintesjusqu’auxyeuxetlorsquetumettrasaumondeleursgosses,c’estunevisiond’horreurquit’attendra,caraumieux,l’enfantseramort,aupire,ilviendraaumondecomplètementstone…Caroui,çaarrive…

Alorstuferasquoi?Hein,tuferasquoi,bordel?hurla-t-elle.C’estpareil,tuverrasaussidescamés,quiviendronticienespérantquetuleurrefilesunedosedeSubutex{1},ous’ilsontdelachancedelaméthadone{2},maisuniquementletempsqu’ilstrouventleurputaindefricpoursepayerunevraiedose.

Tuserasamenéeàcôtoyerdesdroguésenmanque,tusaiscequeçafaituntoxicolorsqu’ilestdanscetétat?

Non,soufflai-je,voyantqu’elleattendaituneréponse.

Çahurle,çadégueule,çatrembleetçahurleencoreetencore,tesuppliantdeluifournirunedose,tejurantquec’estladernièrefois…Voilàdansquoitumetstesblanchesmains!

Jet’ailaisséparler,alorsàmontour!Non,jeneconnaispastoutescessituations,maissachequej’aivingtetunansetquej’aiobtenumondiplômeilyaquatreans!Ilyadix-huitmois,j’aipostulépourfairepartiedeMédecinssansFrontière.Etcrois-moi,lorsquetudoisprocéderàuneamputationetquetun’asplusdemorphineparcequ’unebombeaexplosétonstock,tunepeuxqu’encouragerleblesséàmordresurunecordeetlafermerpourqueceuxquinouscanardentnedécouvrentpasnotreposition.J’aivudesmèressurlepointd’accouchermourirdeleursblessuresetdevoirprocéderàuneextractionsauvagepoursauverl’enfant…Tuveuxqu’oncontinue?luidemandai-jeenlavoyantpâlirviolemment.

Elleneréponditpas,secontentantdesecouerlatêteetdequitterleslieuxcommesij’étaislediable,unpeuironique,sachantoùjemetrouvais,aucœurmêmedesenfers.Jemedirigeaiverslaportelorsquejelavisunpeuplusloin,lebrasd’unjeunehommeentourantsataille.Jeplissailesyeux,maudissantmamyopie.J’étaiscertainedeleconnaîtremaislaquestionétait:oùavais-jebienpulerencontrer?

Lasonneriedemonportablequej’avaislaissédansmonbureausemitàretentir.Jeprissoindefermerlaporteetmeprécipitaisurmontéléphone.J’écoutaismoninterlocuteurenn’entendantqu’uneseulechose…monfuturemployépasseraitenfind’après-midi!

CHAPITRE5

Dick

J’avaislecœurquibattaitlachamadeetunenauséeacidemeremontaitdansl’œsophagetandisquejem’approchaisduterritoiredesquartierssud.Toutmerappelaitunpasséquejerêvaisd’oublier,maisquejenepouvaispaseffacerparceque,quoiquejefasse,ilfaisaittoujourspartiedemoi.

Dugranneaus’étaitsentisoulagéquej’acceptelejob,quantàmoi,jecraignaislaréactiondemesamis,surtoutcelledeJonasenapprenantquej’allaistravailleràl’endroitmêmeoùjem’étaisplongésiprofondémentenenfer,qu’ilm’enresteraittoujoursdestraces.Maisquelquechosem’avaitpousséàaccepter,commesiunenouvellevieallaits’ouvriràmoi,àmoinsquelesténèbresnem’engloutissentàjamais…

Ilétaitseizeheureslorsquej’arrivaienfinfaceauSignol.Cetancienrestaurantsesituaitsurcequ’onappelaitcommunémentlaFrontière,pasréellementimplantésurlesterresduPandémonium,maispasassezéloignénonpluspourqu’onnel’associepasàcetenfer.Unanplustôt,deuxclansrivauxs’yétaientaffrontés…Uneballeperdue,dugazquis’échappe,uneétincelleetBOUM!NonseulementleSignolavaitsubidegrosdommages,maisunedizained’EnfantsdeSatanavaitététuéedansl’explosion.

Seulslesfondationsetquelquesmursétaientrestésdebout.

LesEnfantsdeSatan,lenomdonnéauxhabitantsduPandémonium,parfaitementenaccordavecleursnaturesplusoumoinsviolentes,monstrueuses,morbides…Lavilleétaitséparéeenquatrequartiers.Lepremier,toutauNord,étaitlerepairedel’Élite,maisonschicos,résidenceshuppées…Toutlebeaugratinyétaitinstallé!Puisilyavaitlecentre-ville,qu’onauraitpuappelerleNoMan’sLand,ouencorelequartierdesaffairesoul’immensecentrecommercial.C’étaitàcetendroitquetouslescommerces,cafés,restaurantsétaientrassemblés,permettantauxpersonneslambdasdesemêlerauxmembrespluscoincésdel’Élite.Etentrelesdeux,laZone,lamaisondeJonasquifaisaittacheaumilieudecequartierfriqué…

Ceuxquilisaientlesbandesdessinéesd’Astérixconnaissaientcettephrasequiintroduisaitchacundesesalbums:«ToutelaGauleestoccupéeparlesRomains...Toute?Non!Carunvillagepeupléd’irréductiblesGauloisrésisteencoreettoujoursàl’envahisseur…».Ehbien,cettetiradepourraittoutàfaitconveniràl’ÉliteetànouslesZonards,quidéfendionsenversetcontretousnotrepetitcoindeparadiscontrecesmembresfriquésquinerêvaientqued’unechose…nousvoirabdiquer…

Puisàl’Estdelaville,setrouvaientlesLambdas…Deshommesetdesfemmesnefaisantpaspartiedel’Élitemaismenantuneviecorrecte.Ilssetenaientàl’écartdesmembreslesplushuppésdelacommune,carilssavaienttrèsbienqu’ilsn’enferaientjamaispartie,etcraignaientlesEnfantsdeSatan,nonpasàcausedeleurscomportementsasociaux,nimêmeleurviolencesous-jacente,maistoutsimplementparcequ’ilsn’ignoraientpasqu’unmauvaiscoupdusortlesobligeraitàvenirgrossirleur

rang…C’étaitlà,auseindesLambdasqueSashaetmoiyavionsunappartement.C’étaitellequiavait

choisideretourneryvivrepourêtreplusprochesd’«eux»,mêmes’ilsavaientquittélavilledepuislongtemps…

Jepoussaiunjuronetsecouailatête,espérantfairesortirtouscessouvenirsdemoncrâne.Jesavaisquec’étaitunemauvaiseidée…JereportaitoutefoismonattentionsurcequiétaitautrefoisleSignol.Detouteévidence,ceuxquiavaientdécidéd’enfaireuncentredesoinsavaientbossédurementpourleretapermaisjepouvaisconstaterégalementquerienn’avaitchangé…Lesvitresavaientétécaillassées,lesmursquivenaientd’êtrerepeintsprésentaientdéjàdessignesdedégradationsetjerepéraimêmedestracesd’effraction.Jesoupiraiprofondément,décidément,lePandémoniumrestaittoujourslemême…

Jefrappaiénergiquementàlaporte,commemel’avaitconseilléDugranneau.J’entendisdubruitderrièrelebattantetunevoixquimesemblafamilièreparvintàmesoreilles.

Jesuisdésolée,nousnesommespasencoreouverts,c’estpouruneurgence?

Oui,M’dame,uneurgencepourvous,paspourmoi,jesuisvotrenouvelemployé!

Pourriez-vousmeconfirmervotreidentité?

Jenepusm’empêcherd’éprouverunélandefiertépourcettefemme,quiavaitvitecomprisqu’ici,ilnefallaitfaireconfianceàpersonne.

Jem’appelleDickensCorbins,maisvouspouvezm’appelerDick,criai-jeàtraverslevantail.C’estMonsieurDugranneau,dePôleEmploi,quim’envoie!

Pendantquelquessecondes,iln’yeutplusunson.Puis,j’entendislebruitcaractéristiquedeverrousquel’onpousse,declésdanslaserrurequel’ontourneetlaportes’ouvrit.Jeplissailespaupièressouslaluminositéquis’échappaitdel’endroit…Véritablebombedelumièrecernéeparlesténèbres.

Pourtant,petitàpetitjeparvinsàdétaillerl’endroitmaissurtout,lajeunefemmequimefaisaitfaceetquim’observait,laboucheentrouverte.

Ouah,c’esttoi?Lafillequiesttombéeenpanneàl’auberge,m’exclamai-je,n’encroyantpasmesyeux.

Je…jesuisenchantéedeterevoir,moiaussi,s’écria-t-elleenriant.Lemondeestvraimentpetit.

Alorsainsi,tuesDickens!Jem’appelleDilyanna.

Tonprénomesttrèssexy,luirépondis-jeenlagratifiantd’unclind’œil.Etsitupréfères,tupeuxm’appelerDick

J’avaisrepenséàplusieursreprisesàmarencontreaveccettefille.Ellem’avaitviolemmentbousculéàl’aubergealorsquejesortaisprendreunpeul’airlesoirdel’anniversairedeMel’.Elles’étaitexcusée,unpeumalàl’aise,lorsquejeluiavaisavouéporterdeuxchaussuresdifférentes,cequim’avaitfaittrébucher.Nousavionséclatéderire,elle,parcequ’ellepensaitquejeracontaisn’importequoipourl’excuser,moi,parcequesonrirechantaitàmesoreilles.Ellem’avaitsemblésiperdue,sifatiguée,quejeluiavaisproposémonaide.Elleavaitparusoulagée,jem’étaispenchésouslecapotetelleavaitquittéleslieuxdèsquelemoteuravaitgrondé…

Alorsainsi,c’esttoiquiesàl’originedececentredesoins?luidemandai-jeenregardantautourdemoitandisqu’elleverrouillaitànouveaul’entrée.J’avouequec’estpasmal!

Pasmal?!s’écria-t-elle,offusquée.Tuneterendspascomptedetoutletravailquenousavonsfourniet…Tutemoquesdemoi,c’estça?

Jelafixai,unsourireauxlèvres.

Biensûrquejememoquedetoi.Ilyaencoresixmois,cen’étaitqu’uneruineetlà,bonsang,çadonneenviedetombermalade.

C’estunbeaucompliment,murmura-t-elleenrougissantlégèrement.Alorsainsi,tuvastravailleravecnous?

Jemetroublailégèrement.Jeréalisaialorsqueçaneseraitpasfacilepourmoideresterconcentrétouteunejournéeetqu’àunmomentouàunautre,Dilyannafiniraitbienpars’apercevoirquejen’étaispasunmeccommelesautres.

Quoi?medemanda-t-elleenfronçantlessourcils.Nemedispasquetuenvisagesdéjàdedémissionner?

Enfait,jecroisquec’estplutôttoiquivasmevirerenapprenantquijesuisréellement,murmurai-jeenmesentantunpeumalàl’aise,maisbiendécidéàfairepreuved’honnêtetéenverselle.

J’avançaidequelquespas,memisàmarcherdelongenlarge,nesachantpascommentluiannoncerça.

Cen’étaitpasquelquechosedefacileàavouer,surtoutquej’avaishontedemonpassé.Jemetournaiverselleetvitdesfroncesd’inquiétudeplissersonfront,entresesdeuxsourcils.Maissonbeauregardvertémeraudenelâchaitpaslemien.

Jesuisunancientoxicomane,luiassenai-jetoutdego.

Ellecontinuaàmefixerlonguement,croisalesbrassursapoitrineetsecoualatête.

Jenecomprendspas,murmura-t-elle.Pourquoimedis-tuunetellechose?Surtoutmaintenant,alorsqu’ilfautquejecontresignelecontratpourvalidertonembauche.

Justementàcausedeça!Jenevaispasessayerdeteroulersurlamarchandise,luirépondis-je,malàl’aise.J’aiétéplusoumoinscontraintd’acceptercecontrat,parcequel’Élitenevoulaitpasenvoyerundesleursdanscecoindelaville.Mefairebosseràproximitédesquartierssud,c’estcommefairetravaillerundiabétiquedansunmagasindebonbons.Latentationestlà,àchaquepas…Etilfautaussiquetusachesqueparfoisjerisqued’êtremoins…commentt’expliquerça…opérationnel?Non…cen’estpasleterme…efficace.Maconditiond’héroïnomaneagrilléquelquesneurones…là…

Jetapotaismonindexcontrematempe.

Ilm’arrived’avoirdesabsences…desoublis…continuai-jeenhésitant,voyantqu’ellenerépondaittoujoursrien.Ilfautmerépéterconstammentcequejedoisfaireoumefairedeslistesafinquejepuissesuivrelesindicationspournerienoublier…

Tuesledeuxièmeàmeparlerdesproblèmesquerencontrentlesdroguésaujourd’hui,medit-elle,toujoursaussiimpassible.

Ah!Unepatiente?

Non…jenepensepas,merépondit-elle,unpeuhésitante.Quelqu’unquivoulaitmemettreengardesurcequejerisquaisdevoirici,oumemenacerimplicitement,jenesuispasparvenueàcomprendre.

Maisjedoisreconnaîtrequetoi,tufaispreuved’unehonnêtetéplusquetroublante.Toutautrequetoiauraitmenti,outoutaumoins,n’auraitpasfaitmentiondesesproblèmesafind’obtenirleposte.Toic’estexactementlecontraire,tumedistoutcommeça,cash…Etjenesaispasencoresic’estparcequetuespèresquejedéchiretoncontratetquejecherchequelqu’und’autreousituveuxmeconvaincredetelaisserunechance.

Jen’avaispasderéponseàluiapporter,mêmesiunepetitevoixenmoilasuppliaitmentalementdemelaisserlachancedeluidémontrerquejepouvaisfairedubonboulot,qu’ellepouvaitmefaireconfianceetquejemedémèneraispourluivenirenaide.Maisenmêmetemps,monespritmechuchotaitqueceseraitunetrèstrèsmauvaiseidéeparcequedepuisquej’étaisfaceàDilyanna,uneautrepartiedemoi,cellesituéesouslaceinture,manifestaitdefaçonplusquetroublantesonintérêtpourlajeunefemme.

Voilàcequenousallonsfaire,medit-elleensemordillantlalèvreinférieure,jevaissignerlecontrat.Unepérioded’essaid’unmoisestprévue,sipassécedélai,tunousasdonnésatisfaction,oncontinueraainsi,danslecascontraire,onmettrauntermeauCDI,qu’endis-tu?

Cequej’endisais,c’estquej’auraisvoulul’attirercontremoi,laserrercontremontorseetluiroulerunepelledetouslesdiables.

Merci,jenetedécevraipas,luipromis-jeàlaplace.

Alorsc’estparfait,etsijetefaisaisfaireletourdupropriétaire?

CHAPITRE6

Dilyanna

Jenesavaispascequim’arrivait!J’avaislagorgeserrée,moncœurbattaitlachamadeetjenepouvaisquetordremesmainsdanstouslessenseninvitantDickensàdécouvrirleslieux.JesavaisqueMikeetMaximilienmemettraientengardecontrelui,meferaientlaleçonenmesignifiantquejen’étaispasassezprudente,quej’étaistropconfianteenverslesgens.MaisquelquechosechezDickmetouchaitau-delàduraisonnable.Alorsqu’ilmeconfiaitsonpassé,jen’avaisqu’uneenvie:m’approcherdeluieteffacercettedouleuretcettetristessequejelisaisdanssonregard.

Qu’est-cequej’auraiàfaireexactement?medemanda-t-ilsoudain,mefaisantviolemmentsursauter.

Oh,excuse-moi,j’étaisdansmespensées,marmonnai-je.Tesattributions?Alorslematin,iltefaudraêtrelàunedemi-heureavantl’ouverturepourdonneruncoupdenettoyageetvérifierqu’iln’yaeuaucunedégradation.Iltefaudraveillerégalementàcequelesdistributeursdeboissons,lesfontainesàeausoientcorrectementremplis,quelestoilettessoienttoujoursdansunétatimpeccable.Tuseraschargédechangerlesampoules,desmenuesréparationset…et…

Ohbonsang,jen’osaismêmepasluiavouerladernièretâchequ’ilallaitdevoirremplir.C’étaituneidéedeMaxetMike,pourlesheuresoùjeseraisseuledanslastructure.Jemeraclailagorgeunefois…

deux…

Etquoi?insista-t-il.

Veillersurmoilorsqu’iln’yauraquemoiprésentedanslecentre,avouai-jedansunsouffle.

Attends,qu’est-cequeturacontescommeconnerie?gronda-t-ilenfonçantversmoi.Nemedispasquetuvasresterparfoisseuleici,sanspersonnepourteprotégerdetoutelaracailleenvironnante?Maisc’estdusuicide!

J’auraisvoululeremettreenplacevertementmaisilétaitproche,siprochequejenepusquefermerlesyeuxethumersonparfumquis’insinuaitdansmesnarines.DuScorpio!J’adoraiscettelignedeparfumchezunhomme,àlafoissexyetenvoûtante…

Situeslà,parvins-jeàénoncer,jeneseraipasseule!

Jesoulevailespaupièresetledécouvriseneffettoutprèsdemoi.Sonregardd’unbleuazurflamboyaitdecolère,d’inquiétudemaisjepusylireautrechose…unelueurd’intérêtquin’étaitpasdu

toutprofessionnelle.J’étaistroublée,jenepouvaispaslenier.Cetteconnexionentrenousduradelonguessecondes…unlapsdetempspendantlequelmespulsationscardiaquess’accélérèrentencore,mapoitrineseserra,mesmainstremblèrent,maislepirefutlorsqu’unedoucechaleurserépanditdansmoncorpsetsenichaaucreuxdemonventre…JedésiraisDickens!

Cetteconstatationmefitrevenirauprésent.Jemesecouaivivementetreculaid’unpas.Commes’ilvenaitdeprendreconscienceluiaussidelasituation,Dickensfourrageadanssachevelureetmarmonnaentreseslèvresserrées.

Jesuisdésolé,c’était…Jen’auraispasdûm’énerverainsi.

Non,eneffet,répondis-je,malàl’aise,etpourenreveniràtesattributionsje…

Non,c’estbon,tun’aspasàtejustifier,iltefaudraseulementmefaireunelistetouslesmatinsdestâchesquejevaisdevoirrempliretilnedevraitpasyavoirdeproblèmes.

Jeremarquaiqu’iln’osaitpasmeregarderetqu’ilfixaitleboutdeseschaussuresensedandinantd’unpiedsurl’autre.C’estalorsquelaported’entrées’ouvritsurMike.J’étaissiconcentréesurl’échangequejevenaisd’avoiravecDickensquejenel’avaispasentendudéverrouillerlaserrure.Ilnousdévisageaunmoment,interloqué,etsedirigeaversnous.

Quesepasse-t-ilici?Ilyaunproblème,Dilyanna,cegarst’ennuie?

JevisDickensserrerlespoingsmaisilneréponditpas,secontentantd’observerMikeenfronçantlessourcils.

Mike,jeteprésenteDickens,iltravailleraavecnousàpartirdedemain.Dick,voicileDocteurMikeDienstal,c’estl’undemesassociés.

Lesdeuxhommessedétaillèrentetmoi-mêmenepusm’empêcherd’enfaireautant.Mikeétaitcequ’onappelleunbaroudeuretportaitfièrementsestrente-cinqans.Ilmesuraitenvironunmètrequatre-vingt,pesaitsoixante-dixkilosetsescheveuxchâtainsétaientcoupéscourts.Dickens,lui,étaitunpeupluspetit,semblaitégalementplusmince,maisjepouvaisvoiràtraverssontee-shirtquiseplaquaitsursonventrequelquesabdosalléchants.Sescheveuxsombresétaienthirsutes,certainementdûaufaitqu’ilypassaitrégulièrementlesmains.Sesyeuxd’unbleutroublantétaientourlésdelongscilsluidonnantunairangélique.Jepoursuivismoninspection,m’attardantsursonjeanlargequitombaitbassurseshanches,medonnantunaperçucoquinsursonboxerdontlelargeélastiquedépassaitdefaçonàattirerleregardsursesfesses.Jesavaisquecesdernièresétaienttrèsbiendessinéespourlesavoirmatéespendantqu’ilétaitpenchédanslemoteur,lesoiroùjel’avaiscroisé.

Mabouches’asséchaunenouvellefois.Aucunmotn’avaitétéprononcéentrelesdeuxhommesmais,pourtant,jelesvoyaissedévisagercommedeuxanimauxprêtsàsebattre.Étonnamment,cefutDickensquifitlepremierpas.IltenditlamainversMike,quirefusatoutsimplementdelaluiserrerenretour.

Ok,mec,iln’yapasdemalaise!secontentaderétorquerDicktandisquejesentaismonterenmoiunecolèreabsurde.

Jepeuxsavoircequiteprend,Mike?grondai-je.Oùsontpasséstapolitesse,tonsensdel’accueilet

tonsourire?

Restésàlaportelorsquej’aivuce…garsavectoi!cracha-t-il.

Ilsetournaversmoietmesaisitparlesépaules.

Ilestencoretempsderomprelecontrat,Lyanna,ceténergumènevat’entraînerdanslesennuis,c’estmoiquiteledis,crois-enmonexpérience!

Oh,etilenabeaucoup,crois-moi,semoquaDickencroisantsesbrassursapoitrine.

Quoi?Queveux-tudire?grondaMikeensetournantversDick,lespoingsserrés.

Riendeplusquecequejen’aidit,réponditDickcalmement,commes’ilsavaitquelquechosequej’ignorais.

Jereviendraiplustard,lorsqu’ilneserapaslà,meditMikeenlepointantdudoigt.Ettumeferasleplaisirdemedonnermeshorairesdetellesortequejetravaillelorsqueluineserapaslà.

Alorsjeteferaiparvenirlesmiens!soupirai-je.Dickensestungarsbien,tudevraisaumoinsluilaisserunechanceet…

Ilnem’autorisapasàfinir.Quelquesminutesplustard,laporteserefermaitavecfracas.

Ouah,m’exclamai-je,maisc’étaitquoi,ça?

Ça,c’estunmecquivientderéaliserqu’iladelaconcurrence!meréponditnonchalammentDickens.

Attends,tupourraisêtreunpeuplusprécis,s’ilteplaît?!

Écoute,majolie,cegars,mêmes’ilestplusvieuxquenous,nerêvequed’unechose,teglisserdanssonlit!Cen’estpaspourlapopulacequ’ilestvenuseperdredanscetteville,nimêmeparcequ’ilaimesonmétier,maisparcequ’ilespéraitgagnerdespointsentesuivantdanscetteaventure!

Jen’encroyaispasmesoreilles!OùDickensavaitpuallerchercheruntrucpareil?Maisunechoseencoremechiffonnait.

Dequelleconcurrencevoulais-tuparler?m’exclamai-je.

Dickmelançaunregardironique,haussalessourcilsetunsouriresefichaaucoindeseslèvres.Ilnemeréponditpas,iln’enavaitpasbesoin,jesavaisàprésentquel’attirancequejeressentaispourluiétaitréciproque,maisj’étaisbiendécidéeànepasmêlermavieprofessionnelleetmavieprivée.

Tumefaisvisiterlereste?demanda-t-ild’unevoixposée.

Etdetouteévidence,luinonplus,pensai-jeavantderépondreàvoixhaute.

Nousavonspresquefaitletour.Ici,c’estlasallederepos,tupourrast’yinstallerpendantqueje

donnemessoinset…

Non,sijedoissurveillertesfesses,jeresteraidanstonbureau!énonça-t-ilcalmement.

C’esthorsdequestion,jevaisdevoirm’occuperdefemmes,d’enfants…

Alorsvoilàcequ’onvafaire,sij’estimequelameufneposerapasdeproblème,jesortiraietj’iraifaireuntourdanslasalled’attenteouailleurs.Maissij’estimequ’ellepeutêtreundangerpourtoi,alorsjeresteraiavectoietcen’estpasnégociable.Pareil,tuneresterasjamaisseuleavecundesmecsduPandémonium!

J’adoretevoirjouerlesmachos,grinçai-je,etsachequej’aihorreurderecevoirdesordres.

Désolé,PoupéeDily,maislorsquenousneseronsquetouslesdeux,c’estmoiquigèrelebusiness!

m’assena-t-ilensouriant.

Jenem’attendaispasàcequ’ilsoitaussidirectif.Ilfautdirequ’ilparaissaitinoffensif,passifmême,poursoudainsematérialiseren…enunbadboyhypercraquant.J’allaisluirépondrelorsquesonportablesonna.Illesortitdesapoche,regardalecorrespondantetlevalamainpourmefairetaire.

Hé,salutmabeauté,quoideneuf?s’écria-t-ilendécrochant.Jetemanquedéjà?

…

Jedevraisêtrerentrédansunpeumoinsd’uneheure,quesepasse-t-il?

…

Merde,faischier,j’avaisbienditàBoubaquec’étaitunemauvaiseidée.Jepeuxtefaireunrafistolagequitiendraquelquetemps,maisfaudraprévoiràlechanger.

…

D’accord,jedîneraiavectoietÉlouan,jet’embrasse,mapuce!

Jeluidécrochaiunregardglacialauquelilmeréponditparunhaussementd’épaules.

C’estuneamie,sachaudièrevientdelâcher!medit-illaconiquement.

Jecroisquenousavonsfini,marmonnai-je,honteusedemesentirjalouse.

Sansunmotdeplus,jefermaitoutesleslumièresetmedirigeaiversl’accueil.Jemesaisisdemonsacàmainainsiquedemasacoched’infirmièreetouvrislaporte.Dickensmelatint,commeunvéritablegentlemanetattenditquejefermesoigneusementledispensairepourmeraccompagnerjusqu’àmavoiture.

Ilfaudrarepeindrelafaçade,laissai-jeéchapperdansunsouffle.

Tuessérieuse?medemanda-t-ilenmefixantcommesij’avaisdituneénormité.

Pourquoi?Tuescapablederéparerunechaudièremaispasd’appliquerdelapeinturesurunmur?

luilançai-je,demauvaisefoi.

Non,merépondit-ilcalmement,c’esttoutsimplementquelesseulespeinturesquelesEnfantsdeSatan

acceptent,cesontlesgraffs’!S’ilyenavaitsurtoutetafaçade,elleneseraitplusjamaisdégradéecarlePandémoniumrespectelesgraffeurs!

Alorsquoi?Tuvoudraisquejelaisseuntagueurs’occuperdesmursd’undispensairemédical?Tonidéeestcomplètementidiote!

Hé,jesaisqu’onnem’écoutejamais,carontrouvemes«idéesidiotes»,mesingea-t-ilenmimantlesguillemets,maissiceuxduPandémoniumvoientquevoustentezdevousfondredanslamasse,quevousêtesvraimentlàpourlesaiderenadoptantleurs…coutumes,alorsvousavezpeut-êtreunechanced’attirerleurconfiance!Maiscequej’endisaprèstout…

Iltournaitlestalons,prêtàpartirlorsquejelerappelai.

Tu…tuconnaisquelqu’unquipourraitfairequelquechoseàlafoisesthétiquemaisquisignalequ’ils’agitd’unétablissementdesoins?

Tumefaisconfiance?medemanda-t-ilenplongeantsonregarddanslemien.

Jerestaiunmomentsilencieuse.

Oui,soufflai-je.

Alorstuneleregretteraspas,murmura-t-ilavantdedisparaîtreàviveallure.

Àmontour,jegrimpaidansmavoitureetmemisenroutejusquechezmesparents,oùj’étaisretournéevivrepourlemoment.«…Tuneleregretteraspas»!Cesmotss’insinuaientenmoicommeunedoucepromesseetjemesentistressaillir.Ilallaitfalloirquejemereprenne,carnouerunerelationintimeavecceBadboybriséparlavien’étaitpasunebonneidée,mêmesielleétaittrèsalléchante.

CHAPITRE7

Dick

Bonsang,jem’étaisenfuicommesitoutlePandémoniumétaitàmestroussesavantdefaireuneconnerieencoreplusénormequecellesauxquellesj’étaishabitué,commeplaquerladouceetpulpeuseDilycontresavoitureetmejetersursabouche!

Ilfallaitquejemecalme,etquej’appelleVinceavantd’oublierdelefaire.Vinceétaituntagueurquiavaitsonpropreatelieràlasortiedelaville.Ilrefusaitd’êtrecataloguécommeLambda,commeÉliteouautre.Aussi,lorsquesonartavaitprissonessor,ils’étaitéloigné,avaitemménagédansunefermeabandonnéeettravaillaitpourquiilvoulait,quandilvoulait.Maisilmedevaitunserviceetj’espéraissincèrementqu’ilacceptemaproposition.

Dixminutesplustard,l’affaireétaitdanslesacetj’avaisl’assurancequelesmursducentreseraient

recouvertsd’ungraffitienaccordaveclethèmedèslelendemainmatin!Jerentrairapidementàl’appartementetremarquaiqu’unefoisdeplusSashan’étaitpaslà.J’ignoraistotalementoùellesetrouvaitouencoreavecqui.Laseulechosequejesavais,c’étaitquesijeluienvoyaisunmessageousijetentaisdel’appeler,ellemebasculeraitsurmessagerie.

JerangeaimoncontratsignédelamaindeDilyannadansmondossieremploi,mesaisisdemaboîteàoutilsetfonçaiendirectiondelamaisondeMélina.Lorsqu’ellel’avaitachetéeainsiquelesalond’esthétismeattenant,ellenes’attendaitpasàcequ’ilyaitautantdetravauxàeffectuer.Heureusement,j’étaisdevenuunexpertentoutcequiétaitréfectiondemaisonetj’avaisunrêvemoiaussi…C’était,unjour,d’acheterunvieuxcorpsdefermeetlerénoverdemesmains,voirmesenfantss’ébattredansunjardinquemafemmeetmoiaurionsdessiné,maisvoilàtoutçan’étaitquelefantasmed’unhommequiétaitsipathétiquequ’ilseraccrochaitauxmoindresdesesdésirs…

Lorsquej’arrivaienfinchezMélina,elletravaillaitencore.Jeluifisunsignedelamainetmedirigeaiversl’arrière,longeantl’alléepourrejoindrelademeureprincipale.Dèsquej’yentrai,Élouancourutversmoi.

OncleDick,oncleDick,viensvoir,j’aiapprisàMuffinàfaireunnouveautour!

Eh,salut,monpetitpote,répondis-jeenlesoulevantdeterreetenlefaisanttournoyer.Maisdis-moi,tuasgrandi…

Non,c’estpasvrai!

Sic’estvrai!

Non,mêmepasvrai!

Lesenfants,çasuffit,vousm’empêchezdemeconcentrer,marmonnaLéopoldensurgissantdesonbureau.

Salut,mec!Unproblème?m’enquis-jeenobservantsonfrontplissé.

Mespersonnagesn’enfontqu’àleurtêteetjenesaisplustropcommentlesfaireévoluer.

PourtasérielesSauvageons?luidemandai-jeenfaisantallusionàsasagapourenfantspourlaquelleilavaitprislesZonardscommeexemple.

Oh,non,avectoutesvospéripéties,j’aimatièreàécrireunevingtainedelivres!s’esclaffa-t-ilenpoursuivant.C’estpourunmanuscritpouradultesquej’aicommencéàrédiger,unromanquiseplaceradanslacatégoriehorreur.Maisj’aiunblocage,ilmefautunlieuunpeuglauquepourmemettredansl’ambiance…

Eh,j’aiuneidée…Ilyalevieuxcimetièreabandonnéquisetrouveàquelqueskilomètres,vraimentflippantdenuit!Tuveuxqu’onaillesefaireunepetitepeurunefoisquej’auraifinideréparertachaudière?luiproposai-je.

Çanetedérangepas?

Jehaussailesépaulesd’unairdésinvolte.

C’estpascommesij’avaisunemeufquim’attendaitàlamaison,dis-jed’untonamer.

Sashaesttoujoursauxabonnésabsents,c’estça?medemandaLéo.

Jenel’aipresquepasvuedepuisledépartdeLucky,ilyatroissemaines,soupirai-je,etsionvientàsecroiser…disonsqu’ellen’estpastrèsagréable,commesic’étaitmoileresponsable!

Elleabesoind’unpeudetemps,d’aprèscequej’aicompris,elleapasmaldéconné.Ilfautletempsqu’elle…digèretoutça!

Ouais,tuaspeut-êtreraison!reconnus-je.Bon,jevaistenterdedécouvrirpourquoilaréparationdeBouban’apastenu,encorequejepeuxdéjàtedirequelestleproblème…

Sansmêmeregarderlachaudière,jedemandeàvoir,segaussaLéopold.

Lejointd’étanchéité!lerenseignai-je.Ilfautlechangermaisavantilyad’autresréglagesàeffectuer,cequ’avisiblementoubliénotrepoteblack!Franchement,ilestmeilleuragentdesécuritéquechauffagiste!

Léosemitàrireetjemerendisdanslapièceminusculesituéeàcôtédelasalledebainsoùsetrouvait

lafameusechaudière.Ilmefallutprèsdedeuxheurespourêtreenfinsatisfaitdemesréparations.

JedescendisrejoindreMélinaetsafamilledanslacuisine,m’installaiàtablemaisdevantsonregardnoir,jecomprisquej’avaisunefoisdeplusoubliéquelquechose.Jefronçailessourcils.Lachaudièreétaitopérationnelle,mesoutilsétaientrangéscorrectementdansleurtrousseetj’avaismêmepasséuncoupdeserpillère.

Mamanveutqu’onselavelesmainsavantdepasseràtable,chuchotaÉlouand’unevoixsiaudiblequejevisMélinaseretenirpournepasrire.

Jemelevai,medirigeaiversl’évieretvisqu’eneffet,mespaumesetleboutdemesdoigtsétaientsalisàlafoisparlagraisseetparlasaleté.Jepassaiunlongmomentàlesnettoyerconsciencieusement,àlafoisgênéethonteuxquecesoitungamindequatreansquidoivemerappelercequemonespritavaittendanceàoublier.Ilmefallutquelquesminutessupplémentairespourquelerougequim’étaitmontéauxjouesetaufronts’atténue.

Jesuisdésolée,jenevoulaispasteblesser,murmuraMélinaenmetendantuntorchonimmaculé.

C’estjustequej’essaied’inculquerlesbonnesmanièresàÉlouanet…

Tun’aspasàmefournird’explications,marmonnai-je.Cen’estpasdetafautesicetidiotdeDicks’estunenouvellefoiscomportécommeun…

Non,nefaispasça,netedépréciepascommeça,mesupplia-t-elle,et…

C’estbon,iln’yapasmortd’homme,rétorquai-jeenmelaissanttombersurlachaise,ils’agitjustederegarderlaréalitéenface.Quoiquejediseouquoiquejefasse,çanechangerajamais,jeseraitoujoursconsidérédelamêmefaçon.

JesavaisqueMélinasesentaitmalàl’aiseàl’idéedem’avoirblessé.Quantàmoi,jefiscommesiderienn’était,passantlerepasàrireetamuserÉlouanqueçanedérangeaitpasquejenesoispasirréprochable.

Unefoisledînerterminé,jevisqueMélinavoulaitunenouvellefoiss’excuser,maisj’enavaismarredetoutesleursjustifications,detousleursairsdepitiésurleurvisagelorsquejefaisaisuneconnerie.

Dèsquelavaissellefutrangée,jelaremerciairapidement,mesaisisdematrousseàoutilsetfilaiàl’extérieur.JetiraissuruneclopelorsqueLéomerejoignitenmegratifiantd’unetapedansledos.

Allez,monvieux,montre-moicevieuxcimetièreetj’espèrequ’ilvautlecoup,j’aienviedeglauque,desombreetd’hémoglobine!

Çayest,quelquessemainesencontactaveclesZonardsettuasvirépsychopathe?C’esttonpèrequiseracontent,dis-moi!memoquai-je.

Surtoutlorsqu’ildécouvriralatrameduroman,s’esclaffa-t-il.Àcaused’uneexpériencedansuneusinequiamaltourné,leshabitantsd’unepetitevillesonttransformésenzombiesmaisayantgardéleursâmes,ilsdécidentdes’allierpourtorturerleresponsabledecetteépidémie,àsavoirleMaire!

JeregardaiLéopourvoirs’ilsemoquaitdemoi,maisilsemblaittoutàfaitsérieux.J’éclataiderireettoutelatensionquej’avaisaccumuléependantlerepassemblas’évaporer.

Allonstrouverl’emplacementdelapremièrescènedetorture,jeveuxquelquechosedegrandiosequifasseflippergravenotrereprésentantlocal!s’exclama-t-ilensefrottantlesmains.

Crois-moi,silàtunetrouvespastonbonheur,luirépondis-je,tuneledécouvriraspasailleurs!

Jegrimpaidanssonvéhiculeetuneheureplustard,nousarrivâmesàdestination.J’entraînaiLéojusqu’àunmuràmoitiéécrouléquinouspermettaitd’entrerdanslecimetièresansnousfaireprendre.Jelevisréprimerunfrissonetnepusm’empêcherdesourire.Nuldoutequ’ici,ilauraitlamatièrepoursonroman.Nonseulementlestombesétaientmagnifiquementhorribles,maisenplusl’ambianceétaitsuperflippante.

C’estça,murmura-t-ilensortantuncahieretunstylodelapochedesaveste,c’estexactementça!

Surcesmots,ils’assitsansaucunegênesurl’unedestombesetsemitàgriffonner.Ilécrivitainsipendantcequ’ilmesemblaêtredesheures.N’ytenantplus,jem’installaiàmontourconfortablement,ledosappuyécontreunestèleenmarbrequipenchaitaussisûrementquelaTourdePiseetcontemplaileciel…Ilmesemblaimmense,àlafoissiloinetpourtantsiproche.Lesétoilesétaientnombreusesetjeréalisaiqu’ici,danscetendroitisolé,onavaitl’impressionqu’ilyenavaitdesmillions.Laluneétaitpleine,ajoutantuneimpressiondesurréalismeàlascène.Ellejouaitàcache-cacheavecquelquesnuages,projetantsalumièresurdesmonumentsdélabrés,dontlesnomss’effaçaientaufildesans.

Denouveau,jefiscerêve,celuid’unvieuxbâtimentàlacampagne,àlafoisenruinemaispourtantpleindecharme.J’avaisutilisédesmatériauxnoblespourlaréfection:despierres,delachaux,despoutresenchênepourlasolidité,dupinpourlesmeublesdelacuisine…Àl’extérieur,deuxchienss’ébattaientaumilieudelacour,poursuivisparplusieursenfants.Uneénormetonnelleprotégeaitplusieurstablesetdenombreuseschaises,maiscequej’appréciaispar-dessustout,c’étaitquetousmesamisétaientlà,ayantréponduàl’invitationquemafemmeetmoiavionslancée.L’ambianceétaitdétendue.Quantàmoi,je

n’étaisplusdifférent,j’étaislibre…libred’aimer,devivretoutsimplement…

Lesoirtombarapidementetc’estalorsquelemiracles’accomplit,lavoûtecélestem’entouradesesbrasetlesastresquiparsemaientcettetoiled’unbleusombrescintillèrentdemillefeux.Et,lorsqu’unemétéoriteentradansl’atmosphèreenlaissantderrièreellesatraînéedefeu,jefermailesyeuxetfislevœuqu’unjourcerêvedevienneréalité…

CHAPITRE8

Dilyanna

MesparentsétaientabsentslorsquejerentraiaprèsmadiscussionavecDickensetjem’étaisréfugiéedansmachambreaupremierétage.C’étaitétrangepourmoiderevenirchezeux,àvingt-deuxans,alorsquej’étaisautonomedepuisquej’enavaisdix-septmaisjeneconsidéraispasçacommeunéchec,plutôtcommeunesolutionpassagère.Monpèreetmamères’étaientdéclarésravisdemonretouretjedoisavouerquesefairedorloterétaittrèsappréciable…àpetitedose.Laraisonpourlaquellej’appréciaisd’avoirlamaisonpourmoitouteseule,mêmepourquelquesheures.

Jem’allongeaisurlelitetfermailesyeuxenrepensantàDickens…Ilm’attirait…irrésistiblement.

Maisjesentaisénormémentdedouleursenlui,etaussibeaucoupdecolère,peut-êtrelaraisonpourlaquelleilsetenaittoujourssurladéfensive.Jelaissaicespenséesdériververslesquelquesgarçonsayanttraversémavie.Ohbiensûr,ilsn’avaientpaséténombreux,maislàencore,jamaisjen’avaisressenticetteirrépressibleattractionquimepoussaitversDickens.

Deuxfois…Jeneluiavaisparléquedeuxpetitesfoisetdéjàmoncorpspartaitenvrille,moncœurfaisaitdessaltosdansmapoitrineetmatêtemesemblaitvide…Touslessymptômesdel’amour!Oui,saufquejen’étaispasidiote…Onnetombaitpasamoureusecommeçaaupremierregard.Del’attirancesexuelle,d’accord,lereste,ilfallaitlaisserletempsautemps…

Çanem’empêchaitpasdepenseràlui…JepoussaiunjuronquiauraiteuplusquesaplacedanslePandémoniumetdécidaideprendreunelonguedoucheafindemeremettrelesidéesenplace.Jeretiraimesvêtementsquej’abandonnaipêle-mêleaupieddemonlit,m’emmitouflaidansunénormepeignoirdebainenmolletontrèsdouxetmedirigeaiàpiedsnusdanslasalledebains.

Çafaisaitunlongmomentquej’évitaislesmiroirscartousmerenvoyaientl’imaged’unejeunefemmeauxyeuxvertsque,j’avoue,jetrouvaismagnifiquesetquiluimangeaientlamoitiéd’unvisageunpeurondetdontlaboucheauxlèvrespleines,d’uneteinterosée,appelaitlesbaisers.Moncoun’étaitnitropcourt,nitroplong,mesépaulesblanchesétaientbiendessinéesetmapoitrineavantageusenesouffraitpasdelagravité.C’estlerestequimeposaitunpeuplusdeproblèmes:meshanchesétaientpleines,monventren’étaitpasplatetsculptécommetouslesmannequinsquel’onvoyaitdanslesmagazinesmaisprésentaitunlégerrenflement.Quantàmescuisses,ellesétaientplusfaitesdechairqued’os.

Pourtant,monphysiqueunpeuenrobén’avaitpasétéunproblèmepourattirerl’attentiondelagentmasculine…Toutaumoinsdeceuxayantpourbutdem’entraînerdansleurlitetvérifiersilesjeunesfemmesrondesétaientaussi…généreusesdansleursilhouettequedansunpieu,maisunefoisqu’ilsenavaienteuconfirmation,ledéfides’afficheravecunefillevoluptueusen’avaitplusriend’intéressant.

J’ôtaimonpeignoiretprisunelonguedouchetièdequimerevigora.J’appréhendaisl’ouvertureducentremédicaletmedemandaissij’avaiseuunebonneidéemaisàlapenséedetouscesgensquin’osaientpasserendrechezlemédecinounevoulaientpasamenerleursenfantsauxurgencesavecparfoislescatastrophesinévitablesquiendécoulaient,laréponseétaitoui,sansaucundoutelapopulationavaitbesoind’undispensaire.

Jeretournaidansmachambre,enfilaiunetenueconfortableetm’apprêtaiàmebrosserlescheveuxlorsquelasonnettedelaported’entréeretentit.Jefronçailessourcils,posaimabrossesurmacoiffeuseetdescendisprécipitammentlesescaliers.J’ouvrislaporte,légèrementessoufflée,lorsquejevisMaximilienquiattendaitpatiemmentsurleperron.Ildardasurmoiunregardàlafoisanxieuxetagité.

Max?Maisquefais-tuici?Entre,jet’enprie!l’accueillis-jetoutenm’effaçantpourluipermettredefranchirleseuil.

Ilpénétrasansunmotdanslehalletsifflalonguementdevantlamagnificencedeslieux.

Ehbien,medit-il,impressionné,direquetuasabandonnétoutçapendantplusieursannéespourvivredansunpetitappartementdebanlieueetensuitesousunetente,jesuisincroyablementsurpris.

Cen’estqu’unemaison,Max,etsacheque,comparéeauxautresvillasdusecteur,lanôtreestl’unedesplusmodestesetpourinfo,jesuisloind’êtresuperficielle.Maisjesupposequetun’espasvenupourfaireletourdupropriétaire,poursuivis-jedansunsourire.Viens,allonsnousinstalleràlacuisine.

Tuveuxboirequelquechose?

Unjusd’orange,merépondit-iltandisquejeleprécédaisdanslapièce.

Jel’invitaiàprendreplace,luiservissonverre,meprisunebièresansalcooletm’installaienfacedelui,lesbrascroisés.

Quesepasse-t-il,Max?Tusemblesàlafoissoucieuxmaiségalementénervé.Ilyaunproblème?

Tusaisquej’aihorreurdememêlerdelavieprivéedesgens,parcequejenesupportepasqu’onviennecritiquerlamienne,maisilsetrouvequej’aibeaucoupd’affectionpourtoietaprèslecoupdefildeMike…

Ohlà,doucementMax,pourquoiMiket’a-t-ilappeléet…non,j’aicompris,m’écriai-je.C’estausujetdeDickens,c’estça?Ohbonsang,maisqu’est-cequiluiprend?

Ilétaitfurieux,ilm’aditqu’ilt’avaitretrouvéedansunesituationdélicateavecunjeuneloubardetqueçapourraitporterpréjudiceaubienmoralducentre.

J’ouvrislaboucheetlarefermaidevanttantdemauvaisefoi.Jesecouailatêteetrepris.

Sijecomprendsbien,ilasous-entenduqueDickensetmoiétionsdansunesituationcompromettante?Quenousbaisionsensembledansledispensaire?

Jenel’auraispasditdefaçonaussiabrupte,maisl’idéeestlà,eneffet!meconfirma-t-il.

Alorssache,Max,quej’aimistoutesmestripes,mahargneetmesconvictionspourquececentredesoinsvoielejouretquejeneferaijamaisrienpourendonnerunemauvaiseimage.Ensuite,siDickensétaitprésentaujourd’hui,c’estparcequ’ilaétéenvoyéparPôleEmploiànotredemande!C’estluiquiseranotre«concierge»,notre«hommeàtoutfaire»situpréfères.Quantaufaitquenousfaisionsjenesaisquellescochonneries,ilfaudraitpeut-êtreinviterMikeàconsulterunophtalmo,parcequ’ilabesoind’unebonnepairedelunettes!

J’avaislapoitrinequisesoulevaitets’abaissaitàunrythmeeffrénétellementj’étaisencolère.

Maisputain,c’estquoisonproblème?grondai-jeentapantdupoingsurlatable.

Jepeuxteposerunequestionsansquetunemesautesàlagorge?m’interrogeaMax,unelueurironiquedansleregard.

Distoujours,marmonnai-je.

Physiquement,ilestcommentceDickens?

Commentpouvais-jedécrirequelqu’unquipourmoiétaitparfait?

IlestunpeupluspetitqueMike,plusminceaussi,etsamusculaturen’estpasostentatoire.Elleestdélicate,légèremaisenmêmetemps,onsaitqu’iln’apasdelaguimauvedanssesbiceps.Onpeutremarquerquelquesplaquettesdechocolatàtraverssontee-shirt,maisriennonplusd’exagéré,ilaunvisagefin,unnezlégèrementpointu,unebouchetrèsappétissante,desyeuxd’unbleumagnifiqueetunecheveluretoujoursdécoifféecarilnefaitqu’ypasserlamaind’unemanièrevraiment…ouah!répondis-je.

Jelevailesyeuxdevantlesilencequis’étaitinstalléetvisMaxmedévisagerd’unelueuramusée.

Ohtoi,tun’aspeut-êtrepasencoresautélepas,maisjevoisdanstesyeuxqueturêvesd’enfairetonquatreheures!

C’estvraiqu’ilm’attire,maisjen’aipasbesoindeçaencemoment,jedoismettretoutemonénergiedanscedispensaireetunehistoiresentimentaleavecDickensseraittrès…compliquée,énonçai-jeenrepensantàcequ’ilm’avaitditàproposdesonpassé.

Carpediem,Dilyanna!répondit-ilcalmementenlevantlesyeuxauciel.Ilfautaussiquetupensesunpeuàtoiet,soitditenpassant,ceDickensal’airtrop…craquant.Quelâgea-t-il?

Ilauravingt-quatreansdansquelquesmois,pourquoi?

ParcequejecomprendsàprésentpourquoiMikenousafaitunetellecrise!

Tum’expliquesparcequelà,jen’aiplusqu’uneseuleenvie,mangerunmorceauetallermecoucher,bougonnai-jeenretenantunbâillement.

Ilmeregardafixementetsecoualatête.

Nemedispasquetun’aspasremarquélafaçondontMiketedévisageet…

Ohnon,gémis-je,pastoiaussi…

Commentça?

Dickensm’afaitpartdesesconclusions.Selonlui,Mikenerêvequedemeglisserdanssonlitetapeurdelaconcurrence,cequiest…

Jem’arrêtaideparlerdevantl’airentendudeMaximilienquihochaitlatête.

Attends,tutefichesdemoi?Ilatrente-cinqans!m’exclamai-je.

Etalors,c’estunhommeenpossessiondetoussesmoyens,tuesunejeunefemmemagnifique,courageuse,aimante…Enquoicelat’étonne-t-ilqu’ilenveuilleplus?

Jenesaispas,jepensaisque…qu’ilnevoyaitenmoiqu’unegamine,que…Merde,jamaisjenel’aivuautrementqu’encollègue,m’énervai-je.

Tucroisquec’estpourledispensairequ’ilaquittéMédecinsSansFrontières?Non,mabelle,c’estuniquementpourtesbeauxyeuxet,crois-moi,iln’apasl’intentionderenoncer!

Ilselevasurcesmots,posaseslèvressurmajoueetquittalamaison.Jerestailà,pétrifiéesurmachaise,nesachantcommentréagir.Commeunautomate,jevidaimaboissondansl’éviersansmêmel’avoirbueet,sansprendrelapeinedemefaireunsandwich,jeremontaidansmachambreetmecouchaisansplusattendre…

Cefurentdesrêvesérotiquesquitroublèrentmonsommeilunebonnepartiedelanuit.JepartageaismoncorpsentreMikeetDickens,maisunseulsavaitlefairevibreraupointdemeréveillerensursautàdenombreusesreprisescettenuit-là…Dickens…Jejetaiuncoupd’œilàmonradioréveiletrâlaienréalisantqu’iln’étaitquedeuxheuresdumatin.Ilmefallutdutempsavantderetrouverlesommeil,maispendanttouteladuréedemoninsomnie,seulDickensmetintcompagniedansuncoindemonesprit…

J’étaisdanslamerde,iln’yavaitpasd’autremot!Jecraquaissuruntypequejeconnaissaisàpeine,quim’avaitrévélélui-mêmeavoirétésujetàuneaddictionàdesdroguesdures,qu’ilétaitencorefragilepsychologiquementetqu’ildevaitsebattrecontinuellementcontresesdémons…Maismalgrétoutça,unepartiedemoimurmuraitquecen’étaitquesecondaireetqu’ilfallaitquejeprofitedelavie.

Surcettedernièrepensée,jemerendormis,lesyeuxdeDickensmepromettantmilleetuntourments.

CHAPITRE9

Dick

Ilétaitsixheuresdumatinetj’étaisfrigorifié.J’avaispassélanuitsurcetteputaindetombependantqueLéoétaitoccupéàécriresanssesoucierdesheuresquifilaient.Résultat,ilm’avaitréveilléàcinqheuresdumatinaveclatronched’unmecquin’apasvulesoleildepuisdesjoursetmeraccompagnaenville.J’espéraispouvoirmerendreàl’appartementsansmefaireremarquer,aussisilencieuxqu’unfantôme,maisjen’euspascettechance.Jonasm’attendait,appuyésursamoto,etmefixaitdesonregardnoirquiprésageaitbiendesennuis.

Mesbrasentourantmataille,jefrissonnaiviolemmentdansmontee-shirthumidederosée.

Jepeuxsavoiroùtuétais?grondaJonasensedirigeantversmoietenmerelevantlevisageavecrudesse.

Jetremblaistellementqueleseulbruitquejepercevaisétaitleclaquementdemesmâchoires.

Ci...me…tière…Bras…coll…balbutiai-jeavecpeine.

Putain,maisqu’est-cequetuesalléfoutrelà-bas?Etavecquiétais-tu?Tuasprisquelquechose?

Unevaguedecolèrem’envahit.Jeposaimesmainssursontorseettentaidelerepoussermaisilétaitbeaucoupplusfortquemoietaussienmeilleurétat!C’étaitcommefairebougerunblocdeciment!

Pauvre…con!grondai-je.Ettoi…tufaisquoidevantchezmoiàsixheuresdumat’?Tum’espionnes?

Enrentrant,Sashaaremarquéquetun’étaispaslàetellem’aappelé!Dick,poursuivit-ilenposantunemainsurmonépaule,elleveutquetuquittesl’appartement!

Que…quoi?bafouillai-je.Je…Non,tuasmalcompris,ellenepeutpasfaireça!

Si,jesuisdésolé,j’aitentédeluifaireentendreraison,maisellem’adit…Non,laissetomber!

Alorsjemeretrouveàlarue!

Souslechoc,jetombaiassissurletrottoir,latêteaucreuxdemesmains.JeneparvenaispasàcomprendrecommentSashaetmoienétionsarrivéslànimêmepourquoi!Jememisàtremblerune

nouvellefois.Toutmoncorpsétaitparcourudefrissonsetmagorgemefaisaitmal,commesij’avais

avalédeslamesderasoir,commecellesquej’utilisaisautrefoispourécrasermacame…Jemetiraiviolemmentlescheveuxetcommençaiàmebalancerd’avantenarrière.

Dick!Hé,çasuffit,regarde-moi!m’ordonnaJonasenmetirantsurlespoignets,m’obligeantàmelever.Onnetelaisserapastomber,d’accord?Tupeuxtoujoursveniràlamaison,àlaZone.DepuisledépartdeMélina,nousavonsdelaplaceet…

Non,marmonnai-je,jeneveuxpas…je…

Tupeuxyaller,Jo’,jevaisluiparler,murmuraOphéliequejen’avaispasentenduearriver.

Jonassepenchaetlaserracontrelui.Jejetaiunbrefcoupd’œilversmonamieetvisquesonattentionétaitposéesurmoietnonsursoncompagnoncommeellel’auraitétésimasituationn’étaitpasaussicritique.Jo’remontasursamoto,nousfixaunmomentetfinalementfitgrondersonmoteuravantdeprendreladirectiondugaragedanslequelilbossait.

Viensàlamaison,meditOphélieencaressantdoucementmamain,nousyseronsmieuxpourdiscuter.

J’opinaid’unsignedetête,lecœurlourd,mesaisisdespoignetsdufauteuiletmedirigeaiverslaZone.Jen’osaispasouvrirlabouche,j’étaisàlafoisblesséetterrassécardepuisquej’avaisdécroché,jen’avaisdonnéaucuneraisonàSashadenepasmefaireconfiance.OphélieetmoientrâmesdanslaZone,làoùjemesentaislepluschezmoi,lamaisonquim’avaitaccueillialorsquejeplongeaisdanslesténèbres.

Jelâchaiavecpeinelefauteuil,voulantdésespérémentmeraccrocheràquelquechosedesolide,devrai.Jefinisparobligermesdoigtsàsedécrisperdespoignéesetm’affalaisurunechaisedelacuisine.

Jenetremblaisplus…Enfin,jen’avaisplusl’impressiondelefaire,maisc’étaitcommesij’étaisglacédel’intérieur.Toujourssansunmot,Ophélies’activaprèsdumeubleetbienviteuneodeurdecaféserépanditdanslapièce.Elles’enservitunetasse,déposaunmugremplisurlatableàmonintentionets’installadevantmoi.

J’entourailatassedemesmains,espérantquecesimplegestepuissemeréchauffer...envain.Matêtesetenaitdansuncotonsiépaisqu’ilmefallutunmomentpourréaliserqu’Ophéliemeparlait.

Je…jen’écoutaispas,avouai-jeàvoixbasse.

Ellenesoupirapas,nelevapaslesyeuxauciel,ninehaussalesépaules.Ellesecontentademesouriregentimentensesaisissantd’unedemesmains.

Tuneméritespasça,Dick,soupira-t-elle.Sashan’apasledroitdetejeterdehorscommeellevientdelefaire.Jesaisquetuparticipesauxfraisdelamaison,quetupayestapartdeloyer,quevousmettezencommunpourl’achatdelanourriture…Elleaagidefaçoncruelleetmesquine,maistun’espasseul!

Merde,Dick,jeteconsidèrecommemonfrère,tuasétépourmoid’ungrandsecourslorsquejemesuisretrouvéedanscefauteuil.Ilesthorsdequestionquecette…pestes’ensortecommeça,laboucheencœur.JesaisqueJonast’aproposédevenirvivreavecnous.Ilétaitsincère,tusais,tueslebienvenuet…

Non…je…jeneveuxplusavoirdebéquilles,ilesttempsquejemedébrouille,maispastoutdesuite…là,jesuis…jenesaispas…vidé!C’estcommesiSasham’avaittiréuneballeenpleinetête,maisqu’ellen’avaitpasencoreexplosé!Jesaisqu’elleestlà,qu’ellepeutfaireénormémentdedégâtsmais…j’attendslemomentoùelleferatoutpéter!

Écoute,Dick,tasœurestsurunepenteglissante,maisquoiqu’elledise,tun’yespourrien,d’accord?s’écriaOphélie.Iltefautunpeudetempspourdigérerlanouvelle?D’accord!Tuveuxprendretonindépendance?Crois-moi,jetecomprends.Alorsvoilàcequenousallonsfaire…etoui,j’aibienditNOUS,poursuivit-elle,quandjerelevailatêteverselle,interloqué.NousallonsrécupérertesaffairespendantqueSashaseraàsonboulotpuistuemménagerasdanslamaisondulac.Cen’estpasunpalace,maisLéoyavécuquelquessemainesetc’étaitpourluiunhavredepaix.Ceseraitunesolutiondedépannage…

Jehaussailesépaulesmaisunevaguedechaleurm’envahitàlapenséequejen’étaispasseul,qu’OphélieetJonassebattraientpourmoi.

Merci,murmurai-je.Jecroisquec’estlameilleuredessolutions.

Iln’estpasencoreseptheures,continua-t-elle.Tun’aspasl’aird’avoirdormi,pourquoinet’installes-tu

passurlecanapéoudanslachambred’amis?Onprofiteradelapausecemidipourrécupérertesaffaires.

Jeneseraipaslà,jebosseàpartirdeneufheureset…jeseraideretourversdix-huitheures,bafouillai-je.

Jen’osaispasluiavouerquejetravaillaisàprésentàlalimiteduPandémonium.DéjàqueSashanemefaisaitplusconfiancealorssimesamispensaienteuxaussiquejedéconnais,jen’auraisplusaucunrochersurlequelm’appuyer.

Iln’yaaucunproblème,onseferaunpetitrepascesoirpourfêtertonemménagement,s’écriaOphélieavecbonnehumeur.OnvademanderàJaysondenouspréparerunapéritifdînatoire!Ceseracool,tuverras!

Jevoyaisqu’Ophéliefaisaitdesonmieuxpourmesortirdemadéprime.Jeprissurmoi,affichaiunsourirequi,jelesavais,n’atteignaitpasmesyeuxetmanifestaimonenthousiasmeàcetteidée.

J’achèterailesboissonsetinterdictiondemeramenerquoiquecesoitpourlapendaisondecrémaillère,hein?Votreprésenceserabiensuffisante!m’exclamai-je.

Ophéliemefixad’unairsuspicieux.

Etsiàlaplaced’allerdormir,onallaitprendreunbonpetitdéjeunerauRaffaïné,luiproposai-jeenmelevant.

Vaprendreunedoucheettechangerd’abord,tuaslaissédesaffairesdansl’anciennechambred’Élouan,merépondit-elle,visiblementsoulagée.

Tunemedispascequej’aiàfaire,commemebrosserlesdentsoucegenredechoses?nepus-je

m’empêcherdegrincer.

Dick,quandcomprendras-tuquejet’accepteavectesqualitésettesdéfauts?Crois-tuquejenemesuispasaperçuequetuportaisdeuxmocassinsdifférentslejourdel’anniversairedeMélina?

Tul’avaisvu?m’écriai-je,étonné.

Biensûr,maisétait-celemomentdet’enfairepart?Non!Est-cequeçam’achoquée?Nonplus.

Est-cequejemeseraismoquéedetoi?Non,Dick!Parcequejesaisquetuasréalisétonerreuretquetuneleferasplus…

Jusqu’àlaprochainefois!marmonnai-je,malàl’aise.

Dick,cenesontquedesbroutilles!C’estcommecegarsquitravailleàlaboucherieetquiporteunecrêtesurlatêtepourservirlesclients,avantçam’auraitchoquée,jemeseraisfichudeluiavecceuxdel’Élite,maisàprésent,j’acceptesadifférence,toutcommelatiennefaitaussipartiedetoncharme!Netefocalisepassurlefaitquetunefaispasattentionent’habillantlematin,quetuportesunechaussetterougeetl’autrebleue,ouquetuoubliespourunefoisdeteraser,ousiencoretunet’espasaspergédedéodorant.Regarde,làaujourd’hui,aveccetteombredebarbesurtonvisage…ehbien,jetetrouvetrèsattirant!

J’éclataideriremalgrémoi.

Ouais,c’estça!JesuisladoubluredePaulWalker,ironisai-je.

Ehbien,j’avouequ’ilyaunepetiteressemblance,merépondit-elleavecsérieux,surtoutàprésentquetuvasrégulièrementàlasalledemusculation.

Jelevailesyeuxaucieletréprimailevertigequimesaisit.

Jevaisprendremadoucheavantquemeschevillesnegonflentetquejenepuisseplusavancerd’unpas,marmonnai-jeensecouantlatête.PaulWalker?Sérieusement?

Jetraînailespiedsjusqu’auxmarcheslorsquej’entendislegrincementdesrouesdufauteuil.Jemeretournai,unpetitsourireironiqueauxcoinsdeslèvres.

Quoi?Quevas-tumedireensuite?Quejesuissisexyquejevaistouteslesfairetombercommedesmouches?

Dick,jesaisquetunemecroispas,maisc’estlavérité,tuesunmecsupercanon,etcellesquitedisentlecontraire,c’estuniquementparcequ’ellessaventquetunejetterasjamaisuncoupd’œilsurelles,meréaffirma-t-elle.Àprésent,jevaisappelerMélina,Angèleetlesjumellespourqu’ellesnousrejoignentpourlepetitdéjeuner!

Jenerépondisplus,çan’envalaitpaslapeine.Jesavaisbienquejen’étaispascanon,mignonouàcroquer…Jen’étaisquemoi,DickensCorbins!Celuiquipossédaittoutescescaractéristiques,etmêmeplusencore,n’étaitplusdecemonde,etjen’enétaisquesapâlecopie!

CHAPITRE10

Dilyanna

Ilétaitàpeinecinqheureslorsquej’étaissortiedemachambresurlapointedespieds.C’étaitl’undesinconvénientsdevivrechezpapaetmaman,ilfallaitquejesoissilencieuse.Jesavaisqu’ilsétaientrentrésaupetitmatin,d’uneréceptionquelconqueet,àprésent,ilsdevaientdormirdusommeildujuste,cequin’étaitabsolumentpasmoncaspuisquemesrêvesmemettantenscèneavecDickensm’avaientempêchéedetrouverlesommeil.C’esttoujoursenprenantsoindenepasfairelemoindrebruitquejemedirigeaiverslasalledebainsoùjeprisunelonguedoucheavantderevenirsurmespaspourm’habiller.

Jemerendissurlaterrasse,unetassedethéàlamain,etm’installaisurlecanapéenrotinquiyétaitdisposé.Ilétaittrèstôtmaisenvoyantlesnappesdebrumeflotterau-dessusdelaville,jesusquelajournéeseraitbelleetensoleillée.Unsourirefleuritsurmonvisage…Pasdepaysagedévasté,pasdebruitdefusilladesnidebombesquiexplosent,laissantledispensaireentouréd’unnuagegrisetpoussiéreux.Jefermailesyeuxetprisuneprofondeinspiration.Ça,c’étaitleparadis,maisjen’oubliaispasquedanscetteville,d’autresn’avaientpaslachancedebénéficierd’untelendroit.Ilyavaitdeplusenplusdepersonnesquis’entassaientdanslesquartierssud.Lessquats,ensurnombre,accueillaientdesjeunesdéfavorisés,enrupturesociale,ouencoreayantétémisàlaportedechezleursparentsetn’ayantaucunbutdansleurexistencequedesurvivreetdechercherunmoyen,mêmeillicitede…s’évader.

MespenséesmeramenèrentversDickensetjemedemandaisquelélémentdéclencheurdesavieavaitétélacausedesadéchéance.Carilnefallaitpasseleurrer,personneneselevaitlematinensedisant:«

Ahbentiens,etsijedevenaistoxico?».Non,unjeuneparvenaitàdetellesextrémitéssouventpardésœuvrement,maissurtoutàcausedumal-êtrequiaccompagnaitsouventcetteaddiction.

Jepoussaiunjuronetm’engouffraiàl’intérieur.J’étaisdetouteévidencetotalementobsédéeparDickensetcettesituationm’inquiétaitcarc’étaitlapremièrefoisqu’unhommemeretournaitlatêteainsi.

Jedéposaimatassedansl’évieretjetaiuncoupd’œilàlapenduleau-dessusdelafenêtre.J’avaisencoredesdossiersàmettreàjourenvuedel’ouverturedudispensaire.Jemerendisdanslebureauquemonpèreavaitmisàmadispositionetmemisautravail.Quatre-vingt-dixminutesplustard,j’étaisfièredecequej’avaisaccomplietdécidaidefaireunepause.Ilétaitprèsdeseptheuresetj’eusunesoudaineenvied’unfeuilletéauchocolatetàlaframboise.J’avaistestécetteviennoiserielaveilleauRaffaïnéetc’étaituntelrégalquejen’avaisqu’unehâte,melaissertenterànouveau.

Jegrimpaidansmavoitureetmemisenrouteverslecentre-ville.Ilétaittôtmaisdenombreusespersonness’ypromenaientdéjà.Jemegaraiprèsdusalondethéetyentrai,fermantlesyeuxdevantlesbonnesodeursquim’assaillirent.Raphaëlle,quejeconnaissaisdepuisunmoment,mefitunsignedelamainetjem’installaiunpeuàl’écart,làoùjepouvaisvoirsansêtrevue.C’estalorsquejeremarquai

Dickens.Ilétaitassisàunetable,sonbraspassénonchalammentderrièrelesépaulesd’unejeunefemmetrèsjolie,grande,élancée,brune,avecunvisagecouleurcaféaulaitetunesilhouetteparfaite.Sacopiesetrouvaitenfaced’eux,buvantlentementlecontenudesatasse.ÀsescôtéssetrouvaitMélinadontj’avaisfaitlaconnaissancelaveille.Elleparlaitavecanimationenlevantlesmains,etsursonvisagejepouvaislireunecolèrequ’elleneparvenaitpasàcontenir.C’estalorsqu’OphéliesesaisitdelamaindeDickenspourlaserrerdanslasienne.Ilfermalesyeux,visiblementheureuxd’êtreaucentredel’attentionféminine,etjenepusm’empêcherderessentirunepointedejalousielorsquelajumellequisetrouvaitprèsdeluiposalatêtesursonépaule.

Ehbien,Dilyanna,tuesbienmatinale,s’exclamaRaphaëlleensouriant.Quepuis-jeteservir?

Jeréfléchisuninstant,jem’étaispromisenrevenantenvilledefaireattentionàmagourmandise,maislà,jenepouvaispasm’enempêcher.

Unchoco-mousseavecdespépitesetdelacrèmefouettéeainsiqu’uneframboisine,s’ilteplaît!

Jeteramèneçatoutdesuite!

Elleavaitàpeinetournélestalons,qu’uncoupleentradanslesalondethé.Lejeunehommeétait…

imposant,iln’yavaitpasd’autremotpourledécrire.Larged’épaules,ilsemblaitgonfléauxstéroïdesmaiss’appuyaitlourdementsurunecanne.Àsescôtés,lajeunefemmequil’accompagnaitfaisaitpartiedel’Élite,àn’enpointdouter.Ellesetenaitdroite,fière,avançaitenregardantdevantellesansqu’aucunsouriren’illuminesonvisage.Celuiquil’accompagnaitposasamainsursonbrasetlà…ellefutcommetransfigurée.Sonvisagesedétendit,unsourireilluminasestraits,etlorsqu’ellesecouladanssesbraspourl’embrasserpassionnément,jerestaiunmomentsouslechoc!

Ilsformentuncoupleassezdisparate,n’est-cepas?medemandaRaphaëlleenposantunplateaudevantmoi.

Assezoui,ils’agitd’AngèleDuphiro?m’enquis-je,enfronçantlessourcils.Ilmesemblel’avoirreconnue.

Oui,eneffet,meconfirma-t-elle,etcejeunehommeimpressionnantàsescôtésn’estautrequemonneveuJayson.

Jeluirépondisd’unsignedetête.Quin’avaitjamaisentenduparlerdeJaysonMarlaux,unnomquifaisaittrembleràlafoislesplusaguerrisdel’ÉlitemaiségalementplusieursmembresduPandémonium.

Simessouvenirsétaientbons,ilétaitparvenuàfairetomberl’undesgangsquisévissaientauxabordsdelavilleetétaitpasséplusieursfoisparlacaseprison.Maisd’aprèslepeuquejepouvaisenvoir,Angèlesemblaitl’avoirapprivoisé.C’estalorsquejevisDickseleveretAngèlesejeterdanssesbrasavantd’êtreenserrédansuneétreinteviriledelapartdeJayson.Pourtant,j’étaisobligéed’admettrequeDickensnesemblaitpasaumieuxdesaforme.Ilnecessaitdesefrotterlefront,plissantlessourcilscommes’ilsouffrait.

Legrouperestaréuniencoreunebonnedemi-heure.Trenteminutesquejepassaiàlesespionner,à

chercherunefailledansleuramitié,maisvisiblement,iln’yenavaitaucune.Puis,petitàpetit,tousquittèrentlesalonetDickrestaseulunmoment,leregardplongédanslevide.Ilfinitsatasselentement,lesyeuxfermés,latêterenverséesurlabanquette.Ilsemblaitnepasavoirdormidelanuitetlapensée

qu’ilpuisseavoirpassécettedernièreencompagniedelajumellememitdansunétatprochedelapanique.

Jemeforçaiàrespirerlentementpuis,sansmêmeprendreconsciencedemesgestes,récupéraimonsacàmainetmedirigeaiverssatable.

Bonjour,Dickens!

Ilouvritlesyeuxpéniblementet,vulafaçondontilplissaitlefront,jecomprisqu’ilessayaitd’ajustersavisionafindemeregarder.

Dilyanna,murmura-t-ild’unevoixsirauquequejesentisdesfrissonsmeparcourir,tuveuxt’asseoir?

Non,merci,enfait,jesuisjustepasséetesalueravantdepartiraucentre.Tuvasbien?m’enquis-jeenlevoyantunefoisdeplusfrottersonfront.

Jepréfèrenepasrépondreàcettequestion,marmonna-t-il.C’estpasunbonjourpourmoi!

Jemedandinaisd’unpiedsurl’autre,medemandantsijedevaislelaisserousiaucontrairejedevaisluitenircompagnie…Finalement,aumomentoùjemedécidaisàpartir,ilplongeasonregarddanslemienetj’yvisunegrandesouffrance.

Oh,Dick,murmurai-je,sanspouvoirmeretenir.

Arrête,jen’aipasbesoindetapitié,soupira-t-ilenfourrageantdanssachevelure.

Jemetinscoite,nesachantpascequ’ilattendaitdemoi.Uneminutepassa,puisuneautre.J’étaislà,deboutprèsdelatable,nesachantquefairepourluivenirenaide.Ilfinitparselever,glissasonbrasautourdematailleenm’arrachantunviolentfrisson.IlfitunsignedelamainàRaphaëllequinousobservait,étonnée,etnousnousdirigeâmesverslasortie.Dickenspoussalaportebattanteets’effaçapourmelaisserpasser.J’avouequej’étaisassezstupéfaitedelevoirsigalant.Ilm’escortajusqu’àma

voitureets’appuyacontremaportière,m’empêchantd’yaccéder.Ilprituneprofondeinspirationmaisjelevistressaillirviolemment.J’avaisvitecomprisqu’iln’aimaitpasqu’onlematernemaissaprésencem’étaitdevenue…indispensable.

Tum’accompagnes?Çat’éviteradefairelaroutejusqu’auxquartierssudàpied,luiproposai-jeenmemordillantlalèvreàcausedemabêtise.

Làencoreilneréponditpas,secontentantdemeregarderfixement.Pourtant,ilfitletourdelavoiture,s’installasurlesiègepassageretbouclasaceinture.Jeprisplaceàmontour,démarraietmeglissaidanslacirculation.Quelquesminutesplustard,jevisDickensfouillerdanssapocheetensortirunpaquetdecigarettes,pourtant,iltremblaittellementqu’ilétaitincapabled’enprendreune.Jeprofitaid’unarrêtàunfeurougepourmesaisirdesonpaquet,glisseruneclopeaucoindemeslèves,l’allumerd’ungestetrahissantunelonguehabitude,entireruneprofondetaffeavantdelaluitendreenlegratifiantd’unclind’œil.

Tudevraisfaireattention,luidis-jeenriant,letabacestdangereuxpourlasanté!

Net’inquiètepas,merépondit-il,amer.Lamortetmoisommesdevieuxamis.Elleaétémacompagnependanttantd’annéesqu’elleestàprésentcommeunesœurquim’enserredansuneétreintelétale.

Surcesmots,ilouvritlavitre,posasanuquesurl’appui-têteetfumalentement,prenantdeprofondesinspirationsavantd’expirerlentementversl’extérieur,commes’ilveillaitànepasm’incommoder.À

chaquefoisqu’ilportaitlefiltreàseslèvres,jevoyaissamaintrembloterlégèrement.Sesyeuxétaientfermésetsicen’estsonbrasdroitqu’ilbougeaitrégulièrementpouramenerlacigaretteàsabouche,onauraitpucroirequ’ildormait.

Monattentionfutsoudainattiréeparunattroupementsurleparkingdudispensaire.Jefronçailessourcilsetuneexclamationdesurprises’échappademeslèvreslorsquejeportaimonregardsurlesmurs…C’était…incroyable,magnifique,splendide…Iln’yavaitpasassezdemotspourdécrirecequejevoyais…Jedescendisduvéhiculeetmedirigeaiverslecentremédical.Untaggigantesques’étendaitsurtoutelafaçade,onpouvaityvoirdesmédecinssoignerdespersonnes,letoutdansdescouleursexplosives.Lemot«dispensairemédical»s’étalaitdansungraffitiimmense,captivantl’attentiondetouslespassants.Pluspersonnedanslesenvironsnepouvaitignorercequenousfaisionsnioùnousnoustrouvionsetdansquelbut:aiderlapopulation!

JemetournaiversDickensquim’avaitsuivieetquimefixait,unelueurinquiètedansleregard.Jenesaispascequimepritàcemoment-là.Jesautaiàsoncou,luisoufflaiun«merci,Dick»contreseslèvresavantd’yposerlesmiennesdansuntendrebaiser…

J’étaismal…trèsmal…

CHAPITRE11

Dick

Ellem’avaitembrassé…Jenepensaisqu’àçadepuisdeuxjours…Mêmelorsquenousétionsrentrés

dansledispensaireetquenousavionstravailléensemble…Ycomprispendantmapendaisondecrémaillère,fêtantmoninstallationdanslamaisonnettedulac.Lesfilless’étaientchargéesderécupérermesaffairesàl’appartementet,dupeuquej’enavaiscompris,ellesn’avaientpasététendresavecSasha.

Maisj’avaisécoutéleursexplicationsavecuneseuleimageentête…celledeDilyannaposantseslèvressurlesmiennes…Bond’accord,ellenel’avaitfaitquesouslecoupdelasurprise,pourmeremercier,maislesfaitsétaientlà,j’avaiskifféàmort,etsielleétaitrestéeencorequelquesinstantsdepluscontremoi,nuldoutequejel’auraisserréedansmesbrasavantdeluienfoncermalanguedanslabouche…

Lapremièrenuitfuthorrible,cebaisertournaitenboucleetenboucledansmatêtetandisquelesfrissonsquim’accompagnaientdepuislematins’étaientfaitsplusviolents.Unemigrainememartelaitlestempesinlassablement,s’accordantenrythmeaveclesbattementsdemoncœur.

Leréveil,lelendemainmatin,futaussidouloureux,tousmesmusclesmefaisaientsouffrir,j’avaisdesdifficultésàgarderlesyeuxouvertset,mêmeaveclapetitefichepourmerappelerdecequejedevaisfaireausautdulit,j’avaisfaitl’impassesurlerasage.J’étaispartitravailleravecl’impressiondemarchersurducoton,celled’avoirunénormecourantd’airentrelesdeuxoreillesquimevidaittotalementlecrâne.Jenesaispascommentjeparvinsàbosser,jenesaispasnonpluscequeDilyannamedonnacommedirective,ninemerappelaissij’avaisfaitconnaissanceavecsondeuxièmeassocié,maisàmonretourchezmoi,jenepusquemelaissertombersurlecanapésurlequeljecomatais…

CefutunefoisdepluslasonneriedesalarmesquimesortitdematorpeuretmapremièrepenséesedirigeaversDilyanna.Pourtant,jemesentaisencoreplusmalquelesdeuxderniersjours,siunetellechoseétaitpossible.Jemetraînaitoutefoisjusqu’àl’étageetfilaiverslasalledebain.Jemedéshabillai,lesyeuxfermés,laluminositéfrappantdansmesrétinescommeunmarteausuruneenclume.

Jeprisunedoucherapidemaischaude,espérantpouvoirmeréchaufferuntantsoitpeu,maisenvain.Jen’avaisplusàmementir,j’étaismalade…Jeréussisquandmêmeànepasoublierdemeparfumerpuismerendisdanslachambreoùj’enfilaiunjeanàmêmelapeau,untee-shirtsansmanchequiavaitconnudesjoursmeilleursetunénormepull-overirlandaisdecouleursombrequim’emmitouflacommeunecouverture.Jen’avaispaslaforcedemettredeschaussettes,aussiglissai-jemespiedsdansmesbaskets,mecontentantd’enpousserleslacetsàl’intérieursansmêmelesnouer.

Jejetaiunbrefregardàmonrefletetjemefispeur.J’avaislespaupièresbordéesd’unelignerouge,mesyeuxétaientfiévreux,monteintpâle,commesijen’allaispastarderàrendretripesetboyaux.

Pourtant,ilfallaitquejemerendeaudispensaire.Ilouvriraitdansquelquesjoursetilyavaitencoredu

boulotavantquetoutnesoitprêt,etjen’oubliaispasnonplusquej’étaisenpérioded’essai.J’allaismemettreenroutelorsquejereçusunmessaged’Ophélie.Cettedernièrevoulaitsavoirsij’allaisbienetsij’avaisbesoindequoiquecesoit.Jeluirépondisaussitôtenlarassurant:non,jen’avaisrienbesoinettoutallaitbien!Jenevoulaispasqu’elles’inquiètepourmoi

Àmonarrivéeaucentre,jenefusmêmepassurprisdevoirquelevéhiculedeDilyannaétaitdéjàgarésurleparking.Elles’investissaitàfonddanscequ’ellefaisaitetjetrouvaisçaadmirable.Jen’avaismêmepasconsciencedetituberenentrantdanslehall.J’avaisseulementcettesensationdeflotter,d’êtredésincarnédemoncorps.Jesentissoudainmesoreillesbourdonner,commesidesmilliersd’abeillesvenaientdeprendreplacesousmoncrâne,battantleursailesdansunvrombissementperturbant.Unvoiledesueurperlasurmonfront,au-dessusdemeslèvres.Mesjambesfléchirentet…

*

**

Jerevinsàmoiquelquessecondes,àmoinsquecenefûtquelquesminutes,plustard.LevisageinquietdeDilyannaétaitpenchésurmoietilmefallutfaireappelàmesdernièresforcespourleverlamainetluicaresserlajoue.

Tuesbelle,murmurai-jed’unevoixrauque.

Merde,Dick,tuesbrûlantdetempérature!

Malade…soufflai-jeenlaissantretombermamain.

Non,tucrois!ironisa-t-elle.Est-cequetuparviendrasàteleversijet’aide?

Mmmm!

Jeprisappuisursonépauleet,avecsonaide,jememisenpositiondebout,quoiqu’instable.

Écoute,Dickens,ilfautqueturentrescheztoi,quetuprennesdesmédicamentset…

Non!m’écriai-jeenvacillantànouveau,pasdemédoc’,pasdedépendance…

J’avaislaissééchappercesderniersmotsdansunsouffle.

Bonsang,Dick,tuastouslessymptômesdelagrippe,etcrois-moi,encettepériode,c’estassezincroyable,maisilfautaumoinsquetuprennesquelquechosepourfairebaisserlafièvreet…

Jevaismedébrouiller,çavapasser…murmurai-jeenmedirigeantverslasortie!

Jemeretinsauchambranledelaportelorsquejel’entendisprendreuneprofondeinspirationetau

momentoùjetrébuchaisànouveau,elleexplosadecolère.

Putaindemerde!s’écria-t-elle,mefaisantsursauteraussibienparletondesavoixqueparlevocabulaireemployé.Tupeuxmedireoùtupensesallercommeça?

Rentrerchezmoi!marmonnai-jeenfermantlesyeux,lesmursvenantdesemettreenbranlecommedansunmanège.

Ohpourçaoui,tuvasrentrercheztoi,répéta-t-elle.Ya-t-ilaumoinsquelqu’unpourveillersurtoi?

Sash…commençai-jeavantdemerappelerqu’ellem’avaitsortidesavie.Non,repris-je,jevaismedébrouiller!

Ouais,c’estça!bougonna-t-elleensesaisissantdesesaffaires.Allez,viens,jeteramène!

Ellem’aidaàprendreplacedanssavoitureetretournajusqu’aucentreafindetoutverrouiller.Elles’installaàmescôtésetposasamainsurmonfront.

Tuasfroid,murmurai-jeententantderetirermonpullmalgrélesfrissonsquimeparcouraientlecorps.

Non,Dick,c’esttoiquiesbrûlant.Donne-moitonadressequejepuissetemettreaulit.

Humm,j’aitoujoursrêvéqu’unefillemediseçaunjour,soupirai-jeensouriant.J’aiencorelegoûtde

teslèvressurlesmiennes…

Jesoliloquaiainsipendantquelquesminutesavantqu’ellenemecoupelaparole.Jesoulevailespaupièresavecdifficultéetvisquesespommettesétaientenflammées.

Turessemblesàunepommetouterouge,tuesàcroquer,murmurai-jeensouriant.

Dick,tonadresse!

LelacprivéàproximitédelaZone,j’habitedanslacabane!

JeneréalisaimêmepasqueDilyannabouclaitmaceinture,nimêmequ’ellesemitenroute.Cen’estquelorsqu’ellesegarasurlestationnementàproximitédulacquejerouvrislesyeux.

Merci,jolieDily,énonçai-jeenbataillantavecmaceinture.Jepasseraidemainet…

Horsdequestionqueturestesicitoutseul.Jeviensavectoi…

Aussitôt,jetentaidemerappelersitoutétaitenordre,sij’avaispenséàmettremesaffairessalesdanslapanière,sij’avaisfaitlavaisselle,avantdemesouvenirquejen’avaispasmangécematin-là,nimêmelaveille.Commesimonestomacétaitconnectéàmoncerveau,ilchoisitcemoment-làpoursemettreàgrondersifortqueDilyannasetournaversmoi.

Depuisquandn’as-tupasprisderepascorrect?mesermonna-t-elletoutenm’aidantàm’extirperdesavoiture.

Jenesaisplus…hiermidi…jepense!

Non,Dick,tun’asrienpris!Tutravaillaisaudispensaire.J’étaislà,tut’escontentédeboireducafé!

Alorsjel’ignore!capitulai-je

Ellepoussaunnouveaujuronetc’estenlacésquenousempruntâmeslescaillebotis.Jemerendiscompte,

lorsqu’elleappuyasurlaclenche,quejen’avaismêmepasverrouillélaportecommej’auraisdûlefaire.Pourtant,Dilyannaneditrien.Ellesecontentadem’escorterjusqu’audivanoùjemelaissaitomber.Jem’affalaisurlescoussinsetelleposasurmesépauleslacouettequej’avaisrepousséeenmelevantquelquesheuresplustôt.J’avaishorreurd’êtremalade,demesentircommeunemarionnettedontonavaitcoupélesfils.J’étaisunêtresansconsistanceetjetremblaistellementqu’onauraitditunsquelettedontlesoss’entrechoquaient.Jeneparvenaismêmeplusàmaîtrisermesmâchoiresquisemirentàclaquerl’unecontrel’autre.

Tiens,boisça,murmuraDilyannaenmetendantunetasse.C’estunthéauquelj’aiajoutéunpeudemiel.Çateferadubien.

Pasdemédicaments,luirépétai-jealorsenmeredressant.

Mêmesijenesuispasd’accordavectoi,merépondit-elle,jerespecteraitesdésirs.

J’opinaid’unsignedetêteetbusunegorgéedebreuvage.Enl’avalant,jemedemandaisquiavaiteul’idéededéposerdumieldanslesplacards.Encoreque…cettemaisonnetteservaithabituellementdegarçonnière.C’esticiquelesgarçonsetlesfillesdelaZoneemmenaientleursplansculpourlanuit.

Enfin,ça,c’étaitavantl’arrivéedansnosviesd’AngèleetOphélie!Àprésent,cetendroitservaitplutôtderefuge,delieuderassemblement.Jeterminaimatasseavantdem’appesantirunenouvellefoissurmonsortetlarendisàDilyannaquilaposasurlatablebasse.

Jesupposequetachambreestàl’étage?medemanda-t-elle.

Oui!

Alorsquedirais-tudemontertecoucher?

Oùtuveux,quandtuveux,bébé!murmurai-jed’unairbéat.

Ohmondieu,sijen’avaispasétédansuntelétatdedélabrement,jemeseraiscruauparadis!

CHAPITRE12

Dilyanna

Ohbonsang,jenepouvaisempêchermoncœurdetambourinerdansmapoitrine.TouslesgestesdeDickens,sesparoles,mefaisaientfondreets’ilmelesavaitprononcéesendehorsd’unepériodededélireprovenantdesafièvre,cequimefitdouterdesasincérité,nuldoutequej’auraiscraquéetquejemeseraisjetéeàsoncoucommeuneadoenproieàsespremièrespulsionsamoureuses.

Maisilétaitréellementsouffrant.Satempératuredevaitoscillerauxalentoursdequaranteetsoncorpsserebellaitcontreelleensedémenantàgrandrenfortdefrissons.Ilsemblaittoutefoislégèrementpluscalmedepuisqu’ilavaitbusonthéetilétaitparvenuàseteniràlarampedel’escalierafindeserendreàl’étage,maisl’effortdemandéétaittropintenseetàpeinefut-ilallongéqu’ilsemitàgrelotterdeplusbelle.

Ilfauttedéshabiller,luidis-jecalmement.Tudoisôtertesvêtementsafinquetatempératurepuissebaisser.

D’ac…cord!bégaya-t-ilentredeuxclaquementsdedents.

Ilposaleboutdesesorteilsdroitssurletalondesachaussuregaucheetendélogeasonpied.Ilenfitdemêmeavecl’autreetpoussaunprofondsoupir.Quantàmoi,jelesregardai,incrédule,etlestrouvai…magnifiques,grands,parfaits…Jemedonnaiunegiflementaleetm’installaiprèsdelui.

J’attrapail’ourletdesonpulletleluienlevailentement,appréciantdedécouvrirsoncorpsdelasorte.

Maislàencore,ilselaissaretomberdèsquejel’eusretiré.

Allez,encoretonjeanetjetelaissetranquille,lehouspillai-je.Tupourrasdormir.

Non,çaira,marmonna-t-il.

Allez,nefaispaslebébé,lesermonnai-jeenriant,toutendéboutonnantsonpantalon.Tuserasplusàtonaiseet…OhmyGod!

Jenepusretenircetteexclamationenréalisantquesoussonjean,Dickensétaittotalementnu.

Jet’avaisditquec’étaitbon!dit-il,untonamusédanslavoix.

Tuoubliesquejesuisinfirmièreetquecen’estpaslepremiermembremasculinquejevois!luirépondis-jed’untonprofessionneltoutentirantsurlescôtéspourlefairedescendre.

Ettoiquejesuismalademaispasmort,renchérit-ildansungémissement,tandissonsexesedressaàdemilorsquejel’effleuraidudosdelamain.

Jerougisviolemment.C’étaitincroyablelafaçondontilparvenaitàmemettredanstousmesétats.

Pourtant,lorsquejelevisserecroquevillersurlecôtéenpositionfœtale,jem’empressaidelecouvrird’ununiquedrap.

J’ail’impressionquemoncorpsestentraindesedisloquer.

Jet’enprie,Dick,laisse-moitedonnerduparacétamol,jepeuxt’assurerqu’iln’yaucunrisqued’accoutumance.

Non,s’ilteplaît…

Ilmel’avaitdemandéavecunetellesupplicationquejecapitulai.J’allaisdevoirfairebaissersatempérature,veilleràcequ’ils’hydratecorrectement,luifaireavalerdesvitaminesetletoutsansfaireusagedemédicaments.J’avaisl’impressiond’êtrederetoursurlefront.Jeredescendisdanslacuisineetcherchaidelaglace.Jen’entrouvaipasmaisparcontre,ilyavaitplusieursaccumulateursdefroiddanslecongélateur.J’englissaideuxdansdesserviettesdetoiletteetremontaiprécipitammentlesescaliers.

JevistoutdesuitequeDicks’étaitlevé.

Maisbonsang,m’exclamai-je,tunepouvaispasattendrequejerevienne?

Ilyavaitcertaineschosesquej’étaisleseulàpouvoirfaire,commeallerauxtoilettes!Etj’enaiprofitépourenvoyerunmessageàmespotespourdirequejequittaislavillequelquesjoursetqu’ilsnedevaientpass’inquiéter.

Jeledévisageaiunpeusoupçonneuse.Detouteévidence,ilavaitditvrai,preuveenétaitquesonentrejambeétaitàprésentemprisonnédansunboxerdecouleursombre.

Pourquoinepasleuravoirditquetuétaissouffrant?

Ilfrissonnaviolemmentlorsquejeglissaiunedesserviettescontresonventreetl’autresoussonoreiller.

Parcequelesfillesseseraientrelayéespourresteràmonchevetetquej’enaimarredeleurgâcherlavie.Etjepréfèrequecesoittoiquimesoignes,ajouta-t-ildansunsouffle.

Moncœurfitunbonddansmapoitrine.Illaissaéchapperunlégercrilorsqu’unfrissonplusviolentquelesautreslefittressaillir.Jeretiraimeschaussures,majupeet,uniquementvêtuedemondébardeuretdemontanga,m’installaiderrièrelui.Jelesentisseraidirviolemment,retenirsarespirationavantdel’exhalerd’uncouplorsquejepassaimonbrasautourdesataille.

Situessaiesdemetuer,balbutia-t-il,tuessurlabonnevoie.

Enfait,j’essaiedetegarderenvie.

Ilneréponditpas,secontenantderecherchermachaleuralorsqu’ilétaitdéjàbrûlant.Jefrottaidoucementsesbras,sondosetpetitàpetitsarespirationsefitplusaiséeetbienviteils’endormit.

Àmontour,jesoupiraietdécidaidefermerlesyeuxquelquessecondes.C’estlebruitdemonportable

quimeréveillaensursaut.Jemedépêchaidemelever,cherchaimontéléphoneetdécrochaienespérantquejen’avaispasréveilléDickens.

Ouiallo!

C’estMike,jepeuxsavoircequetufais?Ilestprèsdemidiettun’estoujourspasarrivéeaudispensaire.

Jesuisdésolée,maisjenepourraipasvenircesprochainsjours.Cependant,jeseraiprésentelorsdel’inaugurationlundi.

Tu…quoi?Etoùesttonemployémodèle,j’aidescartonsàdéballer?

Mike,ilmesemblequenousnousétionsmisd’accord,DickenstravaillelorsqueJEtravaille.Doncluinonplusneserapaslàavantlundi.

Ehbien,cinqjoursdereposjusteaprèsavoircommencéàtravailler,ilyenaquisontvraimentpayésànerienfaire!

Bonnejournée,Mike.

JeraccrochaiviolemmentlorsquelavoixdeDickensmefitsursauter.

Tuasdesennuisàcausedemoi,c’estça?marmonna-t-il.

Laissetomber,c’estjustequ’ilestassezdirectif!

Jen’aimepascemec,ilyaquelquechosequinemeplaîtpaschezlui!

Commenttesens-tu?luidemandai-jepourchangerdesujetdeconversation.

Unpeumieux,surtoutlorsquej’aiuneaussibellevisionenouvrantlesyeux.

Jelevailesyeuxaucieltandisqu’ilmedétaillaitlentement,sonregardglissantsurmoicommeunecaresse.Jemesaisisdemajupeetl’enfilairapidement,unpeumalàl’aisequ’ilm’aitvueàmoitiénue.

Dommage,soupira-t-ilenrefermantlesyeux.

Jevaispréparerquelquechosepourledéjeuner.Jereviens…

Ilnemeréponditpasmaisjen’enprispasombrage.Jesavaisqu’ilenauraitencorepourplusieursjoursavantdeparveniràvaincrelevirusetqu’ilalterneraitlespériodesdeconscienceetd’autresoùsatempératureremonteraitenflèche.Unefoisdanslacuisine,jefouillailesplacardsàlarecherchedepotage,dequoifairedestoastset,surtout,lepleindevitamines.Heureusement,lesarmoiresdeDickensétaientbienfourniesetoutredelasoupeetdupaindemie,jetrouvaidansleréfrigérateurdeuxbriquesdejusd’oranges,dubeurreetdujambon.Jenousconfectionnaiunrepaslégeretremontaiàl’étage,chargéed’unénormeplateau.

Dickensdormait,allongésurledos,laservietteglacéeposéesursonventre,l’autresoussanuque.Il

avaitretirésontee-shirt,certainementpendantquej’étaisdanslacuisinecarilétaitàprésenttorsenu,unbrasrepliésoussatête,ledrapnelerecouvrantqu’àpartirdeshanches.Jeposaileplateausurlacommodeetmedirigeaiverslui.Ilétaitencorechaudmaisplusaussibrûlantquequelquesheuresplustôt.

Eh…réveille-toi,ilfautquetumangesunpeuàprésent.

Sescilspapillonnèrentetjepusplongerdanssonmagnifiqueregardazur.Unlégersourireétiraseslèvresetmoncœurs’emballa.

Salut,j’aidormilongtemps?demanda-t-ild’unevoixrauqueens’étirantlégèrement,faisantbombersespectorauxetfrémirsesplaquettes.

Non,pasassez,répondis-jeenallantchercherleplateauetenleposantsursesgenoux.Bonsang,maiscommentas-tupuattraperlagrippeencettepériode?

Endormantsurunetombe,medit-illeplussérieusementdumonde.Maistusaislepire,c’estqueçafaitdeuxfoiscetteannéequecettefichuegrippemelaisseKO.

Ehbien,onpeutdirequelevirusdoitparticulièrementbienaimertoncorpset,crois-moi,laissai-jeéchapperenlecaressantàmontourduregard,jelecomprends.

Dites-moi,MademoiselleDilyanna,metaquina-t-il,seriez-vousentraindemedraguer?

Serais-tuchoqué?

Ilm’observalonguementetunelueurdetristessetraversasesprunelles.

Jenesuispasunmecbien,Dilyanna,tuméritesmieuxquemoi,crois-moi!Maisdis-moi,tuaspréparéunvéritablefestin!

Alorssachequejenesuispasdupedetonvirageàcentquatre-vingtsdegrésmaistonétatdesantéestmapriorité…pourl’instant,poursuivis-jeenplongeantmonregarddanslesienafinqu’ilcomprennequej’étaissérieuse.Alorstuvasmefaireleplaisirdemangercetoast,prendretonpotageetboirecesvitamines.Ensuite,tuferasunepetitesiesteréparatricependantquejefaislavaisselleetlorsqueceserafait,jeteramèneraidesnouveauxblocsdeglaceparcequetatempératurevaremonter!

C’esttout?

Jecomprislesensdesaquestion.Jen’allaispasjouerlesfilleseffarouchéesalorsqu’ilyaencoretroismoisjepartageaismachambreavecquatreautresinfirmiers,bond’accord,c’étaitparmanquedeplaces…maisquandmême.

Pourl’instant,Dickens,pourl’instant,murmurai-je.

CHAPITRE13

Dick

Cen’estqueledimanchequejemeréveillaisansavoirlasensationdeflotterdansducoton.Ilm’avaitfalluprèsdecinqjourspourveniràboutdecefichuvirus,maisjel’avaiscombattu!Enfinnon,nousl’avionsfait,carjen’oubliaispasqueDilyannaavaitétéàmescôtésàchaqueinstant.Jemetournaisurleflancetlaregardaidormir.C’étaitlapremièrefoisqu’unefillepartageaitmonlit…Enfin,pastoutàfait,jenedevaispasoubliercellesquil’avaientfaitenéchanged’argent,puretractationcommercialequeréelleaffection,maislàencore,cen’étaitquepourquelquesheures,ouquelquesminutes…Unmoyend’entretenirlamachine,commeledisaitautrefoisJonas.

Dilyannapoussaunlégersoupirdanssonsommeiletj’avisailescernessoussesyeux.Jesavaisquej’enétaisresponsable,quesielleétaitaussifatiguée,c’étaitparcequ’elleavaitveillésurmoinuitetjour.Commesiellepouvaitsentirmonregardpesersurelle,ellesoulevalespaupières,mesourittendrementetposasamainsurmajoue,puissurmonfront.

Tafièvreadisparu,murmura-t-elled’unevoixunpeurauquequejetrouvaissexy.Jepeuxd’oresetdéjàt’annoncerquetuesofficiellementguéri.

Jepassaimamainsurmonvisageetremarquaiquemabarbeetmamoustacheavaientpoussé,pasaupointderessemblerauPèreNoël,maisjamaisjen’avaistentécestyle.

Bonsang,ilvafalloirquejemeraseet…

Moij’aimebeaucoup,medit-elledansunsouffle,çatedonneunairdebadboyhypercraquant.Enplus,c’estàlamodechezleshommesetavectacoiffurenégligée,tuessimplement…Wouah!

Tusaisquetun’espasmalnonplus!

Arrête,tun’aspasbesoindefaireça!marmonna-t-elle.

Fairequoi?luidemandai-jesanscomprendre.

Mediredeschosesgentillespargratitude.

Parcequetucroisquec’estpourteremercierquemaqueuesedresselorsquetuesdansmonlit?

grondai-je.

Ellemeregarda,visiblementatterrée.Quantàmoi,j’auraisvoulumeplanquersixpiedssousterre.Ce

quivenaitdesepasserétaitl’undemesproblèmes.TroisansàcôtoyerleshabitantsduPandémoniumetlorsquemesémotionsprenaientledessus,jeredevenaisunEnfantdeSatan,utilisantleurvocabulaire,leursintonations.EncompagniedesfillesdelaZone,jeparvenaisàmemaîtrisermaisdetouteévidence,Dilyannafaisaitressortirlesplussombresdemesinstincts.

Jesuisdésolé,marmonnai-jeenmelevantdulitd’unbond.Jamaisjen’auraisdûteparlerainsi.

Jeplaquailesmainssurlacommodeetbaissailatête,honteux.J’entendisDilyannasortirdulitetvenirseposterderrièremoi.Elleposasamaindouceetfraîcheentremesomoplates.

Arrêtedeteprendrelatêtepoursipeu,murmura-t-elle.Tusais,jenevaispasprendremesjambesàmoncouparcequetumeparlesdefaçonunpeuvulgaire.

Unpeu?m’écriai-je.Situsavaistouteslespenséesquisebousculentdansmatête,toutesceschosesquejevoudraistedire…Maisj’aivuquejet’avaischoquéeet…

Non,cen’estpascequetum’asditquim’atroublée,c’estlefaitquetumeledisesàmoi!

Ellesoupiralonguement.

J’aivulesfillesavecquitutraînes.Lesjumelles,lesautres…Bonsang,ellespourraienttoutesparticiperàuncastingpourfairedumannequinat.Etregarde-moi,Dick…

C’estcequejen’arrêtepasdefairedepuisnotrepremièrerencontreilyaplusieurssemaines,luiavouai-je.Jet’airegardéeetcequej’aivum’aplu…Beaucoup!Jen’arrivaispasàt’oublier.Jel’aifaità

nouveaulundilorsquejesuisvenutefairesignermoncontratetnonseulementtuobsédaismonespritmaisàpartirdecemoment-là,j’airéaliséquej’avaisuneputaind’enviedetebaiser…Etmerde!

grondai-jeenvoyantqueçam’avaitrepris.

Pourtant,Dilyannaéclataderireetposaseslèvressurmapeau.Jefrémislonguementetpasàcausedelafièvrecettefois,maisbeletbienparcequejeladésiraisviolemment.

Jetraînebeaucoupdecasseroles,poursuivis-je.Jet’aiparlédemonpassédedrogué,demon…

espritquimejouedestours.Ilyaquelquesjours,masœurm’afichudehorsdelamaisondanslaquellenousvivionsensembleencolocationparcequej’avaispassélanuitdehors.Ellenemel’amêmepasditenface,secontentantdefairepasserlemessageparmabandedepoteset…etpendantunmoment,j’aicruquej’allaisreplonger.Qu’ilmeseraitfaciled’acheterunelignedecokeouquelquesgrammesd’héroïne,delaissercettemerdes’infiltrerdansmesveinesetretrouverleplaisirdel’oubli…

Maistunel’aspasfait!dit-ellesimplement.

Non,ettusaispourquoi?luidemandai-je.

Non!

Àcausedetoi!Dubaiserquetuasposésurmeslèvres,detajoielorsquetuasvucegraff’etmesidéesnoires,cejour-là,sesont…envolées.

Je…jel’ignorais,bafouilla-t-elle.J’airéaliséquec’étaitdéplacé,quejamaisjen’auraisdûfaireça…Merde,tun’aspasréagi,jecroyais…

Tusaisdequoij’avaisenvie?Deteplaquercontrelemur,contretavoitureetd’enfoncermalanguedans

tajoliepetitebouche,répondis-jeenpivotantverselleetenplongeantmonregarddanslesien.Etjesavaisquesijelefaisais,riennipersonnenepourraitm’arrêter.

Alorspourquoinel’as-tupasfait?

Alorslà,surlemoment,j’enrestaisurlecul.Jesecouailatêtepourtenterderemettremesidéesenplace.

Que…quoi?balbutiai-jecommeunabruti.

Pourquoinem’as-tupasembrasséecommetuledésirais?murmura-t-elleenseplaquantcontremoi.

Ilyapleinderaisonsàcela,énonçai-jeenposantmesmainssurseshanches.Lapremière,c’estquenousallonstravaillerensembleetmespotesm’onttoujoursditdenejamaismélangertravailetplaisir…

Laseconde?

Jerestaiunmomentinterdit…

Parcequ’àpartdesputes,jenesuisjamaissortiavecunefille!Tuentendsça,Dily,j’aivingt-troisansetlesseulesfillesquiacceptentdebaiseravecmoi,jedoislespayerpourlefaire!Etjen’enaiembrasséaucunenonpluscarlescatinsn’embrassentpas!

Jelarelâchaicommesijevenaisdemebrûler,unenauséeauborddeslèvres.Ohmondieu,maisqu’est-cequej’avaisfait?JevenaisdememettreànudevantDilyanna,quiétaitàlafoismapatronne,moninfirmière,ma…

Ilyaunepremièrefoisàtout,Dick,medit-elleenmesortantbrutalementdemespensées.

Etsurcesmotsellesependitàmoncouetposaseslèvressurlesmiennes.Soncorpssemoulaitaumien.Jepouvaissentirsesseinssecollercontremontorse,sestétonsdurcircontremapeau.Mesmainss’étaientenrouléesd’elles-mêmesautourdesatailleetjelapressaicontremoi,tandisquemalanguecaressaitseslèvres.Lorsqu’elleentrouvritsabouche,jel’avançaidoucement,timidement…Ohbonsang…ElleavaitlegoûtduParadis.Jem’enhardisunpeuplus,luieffleurailasienneetellelaissaéchapperunlonggémissementavantdesefrottercontremoi.Jen’avaisaucundoutesurcequejeressentaismaisjenevoulaispaslabrusquer,mêmesisesréactionstentaientàmefairecroirequ’elleétaitdansdebonnesdispositions.Maispourunefoisdansmavie,jevoulaisfaireçabien,nepasmejetersurellecommeundélinquantsexuel.Jem’arrachaidifficilementàcebaiseretposaimonfrontsurlesien.

OhDily,quevais-jefairedetoi?murmurai-je.

Pourl’instant,menourrir,ensuitenousmettronsunpeud’ordredanslamaisonpuisjeretourneraichezmoipourquetupuissestefaireàl’idéequetoietmoiavonsunerelation.Oupourêtreplusclaireet

parlertonlangage,tuasunemeuf,Dick!

Unéclatderirem’échappaetj’enprofitaipourl’étreindreànouveauetl’embrasser.Cettefois,j’ymisplusdecœur,plusdefougue,glissantmesmainsdanssescheveuxpourmieuxapprofondirnotrebaiser.

Cefutellequimerepoussadoucement,lesoufflecourt,lesyeuxbrillantd’unfeuardent.

Ilvautmieuxqu’onarrêtelàpourl’instant,énonça-t-elleenfaisantunpasenarrière.

Je…jevaisprendreunedouche.

Froide!cria-t-elletandisquej’arrivaisàlaporte.

Jesecouailatête.Qu’avais-jefaitpourmériteruntelbonheur?Moi,Dickson,surnommégentimentlePutoisparmesamis,venaisderencontrerunefillemerveilleuse.Uneboufféedetendressem’envahit.Jecroisailesdoigtsparsuperstition…Jen’avaisjamaiseudechancedansmavie,j’espéraisseulementqu’onmepermetteenfind’êtreheureux.

Lorsquejerevinsdansmachambre,laliterieavaitétéchangéeetlesfenêtresouverteslaissaientapparaîtreunsoleilmagnifiqueetjefusravideconstaterquelamétéoétaitaudiapasonavecmoncœur.

Ilyaducaféetdujusd’orange,mecria-t-elleenfilantàsontourverslasalledebains.Jet’aipréparéégalementquelquestoastsàlaconfiture.Nem’attendspas,ilfautquejerentrechezmesparents!

Jesourisenmerendantàlacuisine.Toutétaitparfait,absolumentparfait!Quelquesminutesplustard,jefinissaisdedéjeuneretDilyannaquittaitmamaisonenmegratifiantd’unlongbaiser.Jemeretrouvaiseulpourlapremièrefoisdepuisplusieursjoursetréalisaiquemesamism’avaientmanqué.Jeremisunpeud’ordredanslapièce,mesaisitdemonblousonsurleporte-manteau,nevoulantpasrisquerunerechute,verrouillaisoigneusementderrièremoietprisladirectiondelazone.

Toutmesemblaitbeaucematin.Lesoiseauxgazouillaient,l’odeurdelapelousefraîchementcoupéesemêlaitàdesarômesfleurisetmêmelespersonnesquejerencontraiencheminmeparurentsouriantes.

C’estavecunsourireunpeuniaisquejepénétraichezJonasmaisils’effaçabienviteenpercevantlavoixdemasœur.

Jetedisqu’ilareplongé,Jonas!Onl’avusortirdesquartierssudalorsqu’ilnetenaitmêmepassursesjambes!Iladisparusansunmotet…

Unlongsilencesefitlorsquej’entraidanslapièce.

Alors,çagaze?!m’exclamai-je.

CHAPITRE14

Dilyanna

C’estlecœurbattantetunsourireauxlèvresquejerepensaisàmaconversationavecDick.Lefaitquel’attirancequejeressentaispourluiétaitpartagéemecomblaitdebonheuraupointdechanteràtue-têtesurletrajetquimeramenaitàlavillademesparents.Pourtant,jedéchantaivitelorsque,enremontantl’alléeboisée,jevislavoituredeMikegaréedevantleperron.Jelaissaiéchapperunjuronetaussitôtjesentisunevagueglacialem’envahir.Ilétaitàpeineneufheures,quepouvait-ilbienfairechezmesparentsaussitôt?Àmoinsquel’und’euxnesoitsouffrant…

Jemegarai,lapoitrineserrée,descendisprécipitammentdemavoitureetmeprécipitaiversl’entrée.

Maman!Papa!criai-je,inquiète.

Noussommesdanslacuisine!

Lavoixdemamèreétaitcalme,posée.Ellenesemblaitaucunementfébrileouquoiquecesoitquiauraitpum’alertersurunéventuelproblème.J’entraidanslacuisineetjetaiuncoupd’œilautourdemoi.

Mamèreétaitassiseprèsdelatable,unetassedethédanslamain,encorevêtuedesonpeignoir.Ellen’étaitnihabilléenicoiffée,etjecomprisqueMikel’avaitsaisieausautdulit.Pourtant,étonnamment,ellesemblaitcalme…tropcalme.C’estsurmonpèrequejereportaimonattention.D’aprèscequej’envoyais,iln’avaiteuqueletempsdemettreunpantalonetd’enfilersesbretellessurunmarcelimmaculé.

Simamèresemblaitimpassible,ilenallaitdifféremmentpourlui.

Jeréprimaiunsourire,àlafoisdesoulagement,maissurtoutenvoyantleregardimpitoyablequemonpèredardaitsurMike.Monpère,ÉdouardDeMayeurétaitcequ’onappelleunsanguin.Ils’énervaitrapidementetexplosaittoutaussipromptement,etleconnaissant,ilétaitàdeuxdoigtsdesaisirMikeparlagorgeetlesecouercommeunprunier.

J’avançaiversmamère,Grâce,etl’embrassaitendrementsurlajoue.Ellemeserralamainetnouséchangeâmesunregardemplidecomplicitépuisjemedirigeaiversmonpère.Cederniermeserratendrementdanssesbrasavantdemarmonnerd’untonbourruunvague«bonjour».Mesparentsétaienttoutpourmoi.Alorsquedanslesautresfamillesdel’Élite,lepouvoiretl’argentpassaientavanttout,ici,danslamienne,c’étaitnotretrio,notrenoyaudurquiprévalaitsurlereste.ÉdouardetGrâceétaientàlafoismesparents,mesmeilleursamis,mescomplicesetmespiliersdanslavie,etjelesaimaisautantqu’ilsm’aimaient.

JemetournaienfinversMikequin’avaitmêmepasprislapeinedeseleveràmonarrivée,croisailes

mainssurmapoitrineetlefixaiintensément.

Jepeuxsavoircequetufichesici?grondai-jetoutenmerappelantlesavertissementsdeDicketdeSamàsonégard.

Ton…ami,m’interrompitmonpère,nousaappelésàdenombreusesreprisescesderniersjoursafindesavoiroùtutetrouvais.Jenesaispaspourtoi,maismoij’appelleçaduharcèlement.

Écoutez,Édouard,jepeuxvousappelezÉdouard,n’est-cepas?commençaMike.

Enfait,non…Jenepréfèrepas!Vousavezfaitleforcingdemamaisoncematinàhuitheures!

Huitheures!répéta-t-ilengrondant.C’estunmanqueflagrantd’éducation.

Jepensaisquevotrefilleétaitendanger!serécriaMikeenserrantlespoings.

Endanger?Maispourquoidiablet’imaginais-tuunechosepareille?m’énervai-je.Jet’aiappelépourtedirequejeserailàpourl’ouverturedudispensairedemainmatin.

Bordeldemerde,jet’aienvoyéplusieursmessages,tunerépondspaset…

Papa,maman,vouspouveznouslaisser?leurdemandai-jeencoupantlaparoleàMike.

Çaira,petite?medemandamonpèreenlançantversMikesonregardleplussévère.

Aupoil!ironisai-jeenlevantlepouce.

Mamèreapprochademoietmeserracontreelle.

IlfaudraquetumeparlesdeceDickens,murmura-t-elleàmonoreille.J’espèrequ’ilestmieuxque

celui-ci.

ElleinclinalégèrementlatêteavecdédainversMike,fièrereprésentantedel’Éliteet,aussidignequesielleavaitétévêtued’unerobedegrandcouturier,tournalestalonsetsuivitmonpère.Jerestaiunmomentàcontemplerlaporteet,toutàcoup,uneimmensecolèrem’envahit.

Jet’interdis,àl’avenir,devenirennuyermesparentsparcequetut’esfaitdesfilms!éructai-jeenarticulantbien.Unechosedontj’aihorreur,c’estdelesinquiéter,alorslaprochainefoisabstiens-toi!

Ilselevaàsontouretmesaisitparlebras.

Jecroisquetunecomprendspaslasituation,gronda-t-il.J’aiacceptédequittermonposteauseindeMédecinSansFrontières,pourtoi!J’airenoncéàmavie,àtoutcequimeplaisait,pourtoi,pourtesuivre,parcequejepensaisqu’ilyavaitquelquechoseentrenous!Etàprésent,tumerepousses?Tutecomportescommeunegaminecapricieuseenallantteréfugierdanslesjupesdemaman!Tuneprendsmêmepaslapeinederépondreàmesappels,àmesmessages!Maisc’estquoi,cebordel?

Jel’écoutais,effarée,etréalisaiqueDicketMaxavaientraison,ilétaitvéritablementobnubiléparmoi.Jemedégageaid’ungestebrusqueetlaissaiéchapperunrireléger.

Allez,Mike,c’estbon!Jamaisjenet’ailaissécroirequetuavaisuneinfimepossibilitéavecmoiet,pourêtrehonnête,jen’aijamaispenséàtoidecettefaçon!

Etcebaiserquenousavonséchangé,ilnecomptaitpeut-êtrepaspourtoi?

Surlemoment,jerestaiinterloquée,medemandantdansquellescirconstancesnousavionspunousembrasseret,soudain,toutmerevintenmémoire.

Mike,luirépondis-jeavecgentillesse,cejour-lànousavonsvumourirtroisenfantsdontuneadorablefillettequineprononçaitpasunmot,quin’apaslaissééchapperuncrialorsquenoustentionsdesauversonbrastouchéparuneexplosion.Troisviesquiontétésacrifiéesenvain.Alorsoui,cejour-là,j’ai

cherchéunpeuderéconfort,jet’ailaissém’embrasserparcequej’avaisenviedemesentirvivanteetquemoncœursaignaitsuiteàcestroisdécès.Maisj’enauraisfaitdemêmesic’étaitHasem,ouencoreAméliequiavaitétéàl’initiativedecebaiser.Iln’yavaitriendesentimental…Ils’agissaitjusted’unmoyenpouroublierpendantquelquessecondescetteguerrequinousentourait.

Non…non,jerefusedelecroire,nia-t-ilavecforce.J’aivutonregardposésurmoi,lafaçondonttoncorpssetendaitverslemien.

Jesecouailatête.

Tuaspristesdésirspourlaréalité,Mike,soupirai-je.Jet’aitoujoursregardéavecunimmenserespectparcequetuesunmédecinformidable.Tuasfaitdesmiracleslà-bas,malgrélepeudemoyensquenousavions.J’éprouveégalementdel’admirationenverstontravail,tonempathie…Etc’estuniquementpourcetteraisonquejet’aiproposédetravailleraudispensaire.

Ilneréponditpas,secontentantdemeregardercommesijel’avaistrahiet,sansmêmemerépondre,quittalapièceenclaquantlaporteviolemmentderrièrelui.Jelaissaiéchapperunprofondsoupiretfermailesyeux.Quelquesminutesplustard,desmainsseposèrentsurmesépaulesetjereconnusletoucherdélicatdemamère.

Toutvabien?medemanda-t-elle.

Jenesaispas,avouai-je.Lorsquejemesuismiseenroutecematin,c’étaitcommesilesoleilm’accompagnaitdanslavoiture.J’étaisheureuseetlà,unénormenuagenoirvientd’assombrircettejournéeetj’ail’impressionquetoutestdemafaute!

Allons,nedispasdesottises,megronda-t-elle.Jeteconnais,machérie.Tun’espaslegenredefillesàjoueraveclessentimentsdeshommes,c’estplutôtlecontraire.

Etsijeluiavaisinconsciemmentdonnéàpenserquej’éprouvaispourluiplusquedelaconsidérationet…

Dilyanna,tuesfranche,ouverte,etmalgrécequetuassubilorsdetonadolescenceparlesdemoisellesdel’Élite,tuesparvenueàt’apprécier,àaimercecorpsqu’ellesdénigraientetelleestlàtaforce!Lorsquetuveuxquelquechose,tunevaspastergiverseretuserdefaux-fuyants,tuferaspartdetesdésirs,detesdécisions,commetul’asfaitlorsquetuaseuenvied’utiliserl’argentdetagrand-mèrepourouvrircedispensaire.Situavaisneserait-cequ’àunmomenteuenviedeliertavieàcelledece

Mike,tuleluiauraisavoué,parcequetuescommeça!

C’estcequej’aifaitavecDick,révélai-jeàmamère,soudainpluslégère.Il…ilestspécial,maman!Ilneressembleàpersonneetj’avouequejecraquecomplètement.

Soisprudentequandmême,vousnevousconnaissezquedepuispeudetemps!

C’estpourtantcommes’ilfaisaitpartiedemoidepuistoujours,soupirai-je.

Jetefaisconfiance!murmura-t-elle.

Unbâillementm’échappaetunelueurmoqueuseapparutsursonvisage.

J’aicommel’impressionquetun’aspasbeaucoupdormicesderniersjours.

Tusaisquej’aiveillésurluiletempsqu’ilétaitmalade.Terends-tucompte,unegrippealorsquenoussommespresqueenété!

Çaneveutriendire,mafille,renchéritmonpèreens’installantàmescôtés.Vois-tu,certainespersonnesdontlesystèmeimmunitaire…

Jemelaissaibercerparsavoixgravetandisquel’imagedeDicks’insinuaitdansmonesprit.Jemedemandaissisamatinéeavaitétéaussimouvementéequelamienne,cequ’ilfaisait,etmerendiscomptequejen’avaismêmepassonnumérodansmonportable.Jesavaistoutefoisqu’iltraînaitavecOphélieetMélina.Ilmesemblaitaussiqu’ilsserendaientsouventàRaffaïné…Maisjen’étaispascegenredefilleàharcelersonpetitamiafindesavoircequ’ilfaisait,avecquiilétait…Non,pourmoi,laconfiancen’étaitpasunvainmotetDickméritaitquejeluioffrelamienne.

JerepensaiàsonaveusursesprécédentesrelationsetréalisaiàquelpointDickdevaitsesentirmalheureuxquepersonnen’aitremarquéàquelpointilétaitgénial.Jeleconnaissaisàpeine,pourtantjesavaisqu’ilétaitgentil,tendre,avecuncôtéBadboyquimefaisaitfrissonnerdedésiretjebénislecielquepersonnen’aitcomprisçaavantmoi,carj’étaisbiendécidéeànepaslelâcher.

Jefrôlaimeslèvresduboutdesdoigtsetleshumectaidelapointedelalangue,retrouvantsasaveur,sa…

J’abandonne!

Lavoixdemonpèremefitsursauteretjecroisaileregardamusédemamère.

Vatereposer,meconseilla-t-elleenriant.Tuespeut-êtreprésentedecorps,maistonespritvagabondetrèsloin!

Jemelevai,lesourireauxlèvres,etmedirigeaiverslesétages.Mespensées,eneffet,étaienttoutes

tournéesversDickensetj’espéraisquel’inverseétaitvraiégalement.

CHAPITRE15

Dick

Touslesregardsétaientposéssurmoi.Detouteévidence,Sashaavaitfaitfort,elleétaitparvenueàrassemblertoutelabandeundimanchematinalorsqu’iln’étaitqueneufheuresàpeine.

J’aicommel’impressionquevousparliezdubonvieuxDick,ironisai-jeenretirantmonblousonetenleposantauporte-manteau,maisjevousenprie,nevousgênezpaspourmoi!

JeserrailamaindeJonas,deBoubaetdeJayson,quilevalesyeuxauciel,fislabiseauxfilles,ignorantroyalementSasha,etmelaissaitombersurlecanapéprèsd’Ophélie.

Bonsang,maisregardez-le!éclata-t-ellesoudain.Ilneressembleàrien.Iln’estpasraséetsembleavoirperduquelqueskilos!Jevousdisqu’ilareplongé.Quelqu’unm’aditqu’ilétaitsortientitubantdesquartierssud!Merde,posez-luilaquestionsivousnemecroyezpas!

JevisunnerfbattresurlamâchoiredeJonas.Jesavaisqu’ilfiniraitparmequestionnertoutcommeiln’ignoraitpasquejeneluimentiraisjamais.

Est-cevrai?medemanda-t-il.Est-cequetuasréellementremislespiedsauPandémonium?

Non,jen’aipasdépassélafrontière,luirépondis-je.

Étais-tuenétatd’ébriété?Cequipourraitexpliquerlefaitquetuvacillais.

Non!

Jonasfermalesyeux.Jesavaisqu’uneautrequestionluitrottaitdanslatête,maisnousétionsamis,ilme

faisaitconfianceetn’oseraitjamaislaposer.

Etnon,jen’aipasprisdesubstancesillicites!ajoutai-je.

Mensonges!s’écriaSashaensetournantversmoi,ivrederage.

Cenesontpasdesmensonges!rétorquai-je.

Ophéliepritmamaindanslasienneàlafoisensignedesoutienetderéconfort.

Çasuffitàprésent,dit-ellesèchement.NousnesommespasicipourfaireleprocèsdeDick.Jecommenceàenavoirunpeumarre,Sasha,quetutrouvestoujoursdesexcusespourqu’onvilipendetonfrère.Moi,pourmapart,ilestmonami,s’ilditqu’ilnetouchepasàcettemerde,jelecrois!

PendantqueSashapoursuivaitsascènemélodramatique,jelaissaiDilyannasefrayeruneplacedansmespensées.Jerevécusnotrebaiser,lachaleurdesoncorpscontrelemien…

Nonmaisregardez-le!

LavoixcriardedeSashamefitsursauter.Jemefrottailefrontetmetournaiverselleenfronçantlessourcils.

Quoiencore?marmonnai-je.

Maisregardez-le!répéta-t-ellecommeuntourne-disquerayé.Unebarbe…cetairabrutisurlevisage.Nemeditespasqu’ilestdanssonétatnormal.

Oh,Dick!m’interpellaBouba.Est-cequetuasfaillireplonger?

Jemeraidislégèrementetserraiunpeuplusfortlamaind’Ophéliedanslamienne.

Oui,mec!J’aiétéàdeuxdoigtsd’acheterquelquesgrammesdecoke,maisjenel’aipasfait!

répliquai-jeavecassurance.

Ahvousvoyez,jel’avaisditet…

Tagueule,Sasha!

Toutlemondesetournaversmoi.Ilfautdirequejamais,depuisquej’étaischezlesZonards,jen’avaisfaitpreuvedetantdegrossièreté.Jemelevai,ivrederage,etavançaiverselle.

Avantdemefairechieretd’emmerdernospotesundimanchematin,pose-toilaquestiondanstapetitecabochedemerde,desavoirpourquoij’auraisrechutéetàcausedequi?Maislacausetut’enfous,pasvrai?Seulescomptentpourtoilesconséquences!Ehbien,permets-moidetedirequesij’avaisreplongé,laseuleetuniqueresponsabledecedésastre,c’étaittoi!Parcequetum’asflanquédehorssansraisonouplutôtsi,parcequeLuckyestpartietqueçat’abrisélecœur,parcequeturéalisesquetesconneriest’ontfaitperdrel’amitiédesZonards!Alorstutentesdelesmontercontremoi,defairevacillerlaconfiancequ’ilsmeportent!Toutçaparcequetucrèvesdetrouille,parcequetuesseuleetqueturéalisesàquelpointlaligneentrelebienetlemalestmince,àquelpointilestfaciledebasculerdel’autrecôté!

Ellefitunpasenarrièrecommesielleétaitchoquéedevoirque,pourunefois,j’osaismerebiffer.

Qu’est-cequit’aempêchédereplongerpuisqued’aprèstoionresteborderline?hurlamasœur.

C’estbiençaquetuessaiesdemefairecomprendre?Unefoisqu’onafranchilaligne,quoiqu’onfasse,onatoujoursunpieddechaquecôté!Alors,réponds!

Unange,murmurai-jeensouriant.C’estlesourireetlebaiserd’unangequim’ontrattrapéavantquejenebascule!

Notremèreavaitraison,cracha-t-elle.Tunevauxrien,tun’esqu’untaré!

Bon,Sasha,çasuffit!

LavoixdeMélinaclaquasèchement.

TunousasfaitleverdebonneheurepourteplaindredeDick,pournousconvaincrequ’ilavaitreplongé,cequivisiblementn’estpaslecas.Noust’avonsécoutée,nousavonségalemententenduDicketjecroisqu’ilaraison,ledépartdeLucky…

C’estterminé,jeneveuxpasenentendreparlerpuisquedetoutefaçononm’adéjàcataloguéecommelaméchantedeservice!persiflaSasha.

Ohçasuffit!s’écriaOphélie,exaspérée,arrêtedetecomplairedanslerôledevictime,çanetesiedguère.

SashasetournaversOphéliecommesicettedernièrevenaitlapiquerauvif.

Moi?Jouerlesvictimes?Commeceseraitpratique!

Ellepartitd’unrireamer,secoualatêteetobservachacundenous,unemouedégoûtéesurlevisage.

JemerendscomptequeSuzieavaitraison,lesmecsdelaZonesesonttransformésenmoutons!

Avant,vousétiezdesloups,prêtsàdéfendrevosfemmes…Mélina,moi,lesjumellesetmêmeSuzielorsqu’ellefaisaitpartiedesnôtreset,àprésent,depuisquel’Élite,parlebiaisd’Angèle,s’estincrustéchezlesZonards,vousavezperduàlafoisvoscrocsetvoscouilles!

Tuveuxquecesoitmoiquiprennelaparole?grondaJonas,alorsallons-y.Toutlemondeestlebienvenusousmontoit,etce,depuisdenombreusesannées.Jevousaitousacceptéssanslamoindreretenue.Tous!Vousavieztousdesproblèmesàrégleretdanslamesuredupossible,j’étaislàpourvous!Cettemaisonestlamienne,maisc’estaussilavôtre.Jenevoispascequeviennentfaireiciles…

clans!Élite,Zonard,EnfantsdeSatan,Lambdas…Noussommestouségaux!C’estcommerefuserBoubaparcequ’ilestnoir,lesjumellesparcequ’ellessontmétisses,Ophélieparcequ’elleestenfauteuiloumêmetoi,Sasha,quitraînetonlookgothiquecommeundéguisement,pourcacherlapersonnequetuesréellement.Tudisquenousavonsperdusnoscrocsetnoscouilles…pourlespremiers,jusqu’àprésent,nousavonstoujoursdéfendulesnôtres,quantauxsecondes,tupeuxdemanderàOphélie,maisellessontbienprésentes!

Ophélielaissaéchapperunricanement.

Sasha,tufilesunmauvaiscoton!poursuivitnotrementor.C’esttoiquinousrepousses,toiquit’acoquinesavecdesmoinsqueriencommeSuzie.Àelleaussijeluiaidonnésachanceetellenousatrahisdelapiredesfaçons,enenvoyantunfrère,unami,entaule!Lorsqu’onalancécetteexpéditionpunitivecontreAleksander,nousaurais-tucomparésàdesmoutons?LorsquenousensommesvenusauxmainsavecLéo,c’estcequenousétions?Non…maisonsebatpourdevraiescauses,onsortnoscrocspourdesraisonsvalables,pasparcequetuvoudraiseffacercequetuasfaitenversOphélieetmoietquetunesaispascommentt’yprendre.

Jevois,donctoutlemondeestcontremoi!

Merde,Sasha,personnen’estcontretoi,c’esttoutlecontraire.Tueslaseuleàtefairedumal,etànousenfaire!

C’estça!Jemecasse!cracha-t-elleentournantlestalons.

Enpartant,elleclaqualaportesifortquelesvitresvibrèrent.Nousrestâmeslà,unmomentsouslechoc.J’étaisàlafoisencolèreetabasourdi.Maisc’estlaragequim’empêchaitdem’écrouler,depenseràsesmotsquim’avaienttranspercélecœuraussisûrementqu’unedague.JevacillailégèrementmaisJonasvintseplanterdevantmoi.Ilm’attiraparlanuqueetposasonfrontsurlemien.

PlusjamaisDick,tum’entends.Plusjamaisjenetelaisserait’enfoncercommetul’asfait.Jesuislààprésent,noussommestouslàetnoussommestafamille.Situressensneserait-cequel’enviedet’évader,devouloiroubliertaviepouruninstant,d’échapperàlaréalité,tum’appelles,dejourcommedenuitetjeserailà,jeseraitoujourslàpourtoi,monfrère.

Leslarmesmemontèrentauxyeuxetjesaisqu’ils’enaperçut.Ilsecontentadem’enserrerdansuneétreinteàlafoisvirileetréconfortante.

Jo’,murmurai-je.J’airencontréunefille.Pas…pasunepute,unevraiefille,quiaunvraiboulotetqui…Ohbonsang,jecroisqu’ellem’aimebien!

Jonasmeregardaetéclataderireenmetapantvivementsurl’épaule.

Eh,voustous,notrepetitfrèredevientunhomme…Ilestamoureux!s’exclamaJonas,aussifierquesij’étaisdevenuchampionolympique.

Pendantcinqminutescenefutquedesembrassades,desfélicitationsetlorsquelecalmefutenfinrevenujesusquej’allaisdevoirentrerdanslesdétailsaussipris-jelesdevants.

Alors,commevousêtestouscurieux,voilà,j’airencontréDilyannailyaquelquessemaines,jel’aiperduedevuejusqu’àcequejelaretrouveauboulot.Elleestinfirmièreetnousavonspassélesderniersjoursensembleparcequej’étaismaladeetelleestrestéeàmonchevetpourmesoigner.Riendegrave,précisai-jeenvoyantl’airinquietsurlevisaged’Angèle,j’aieufroidenaccompagnantLéoaucimetière

lasemainedernière.

Dilyanna?DilyannaDeMayeur?medemandaOphélieenserongeantl’ongledupouce.

Oui,confirmai-je.

Mélinaéclataderire.Elleriaittellementqu’elles’entenaitlescôtes.

Sashaaurauneautreraisondeladétester.Outrelefaitqu’ellevaluivolersonpetitfrère,Dilyannaestunmembredel’Élite!

Toutlemondesemitàriredeplusbelle…saufOphéliequipritplacedanssonfauteuiletquittalapièce.Monsouriresefigeasurmeslèvres.Ophélieétaitl’unedemesmeilleuresamies,j’avaisbesoindesabénédiction,desonaccord…J’entendislaported’entréeetjefislaseulechosequimesemblaitnormale.Jelasuivis.Jemarchaiàsescôtés,attendantqu’elleprennelaparole,qu’ellemedisequeje

devaism’éloignerdeDilyannaoucegenredetruc.

Tuvasmedétester,murmura-t-elle.

Quoi?m’exclamai-je,étonné.

Ellefermalesyeuxuninstantetunelarmeroulasursajoue.

Ilyaquelquesannées,tusaisàquelpointj’étaishorrible.Ehbien,l’unedecellesayanteuàsubirmaméchancetén’étaitautrequeDilyanna.J’avaisapprisqu’elleétaitamoureusedeLéoetmêmesijesavaisqu’ellen’avaitaucunechanceaveclui,jemesuismiseàlaharceler,àl’insulter,àluifairedesremarquessursonpoids,lacomparantàtoutessortesd’animauxdisgracieux.Jesavaisqueçalafaisaitsouffrirmaismoi…çamefaisaitmarrerdelavoirretenirseslarmes.Etunjour,j’aiétéplusloin…

Nousavionspiscine,j’aiattenduqu’ellesoitnuedanslesvestiaires,pourlaprendreenphotoetl’envoyeràmonfrère.

Ophie,soupirai-je.

Lepire,c’estqueLéopoldétaitavecdesamisdel’Éliteetbienvitelaphotoafaitlebuzz.Quelquessemainesplustard,Dilyannaquittaitlaville.

Jesecouailatête.Rienquel’idéequeDilyannaaitpusouffrirmedonnaitdesenviesdemeurtre,maisjen’oubliaispasnonplusquejen’avaispasétéparfaitpendantmonadolescenceetquesij’avaiseuledroitàunesecondechance,ilenallaitdemêmepourOphélie.Jemepenchaialorsverselleetposaimeslèvressursajoue.

Nelafaisplussouffrir,plusjamais,murmurai-je.Jetiensàelle…beaucoupmême,etjenevoudraispasmeretrouveràdevoirchoisirentremonamitiépourtoietelle…

Jetelepromets,jevaisorganiserunrepasafinquetupuisseslaprésenterofficiellementàtoutlegroupeetjetejuredemefairepardonner.

Àcesujet,j’auraisbienunepetiteidée,dis-jedansunsouffle.

Laquelle?

Commevouslesavez,jen’aijamaiseudecopinesavant.Lesseulesfillesquicouchaientavecmoi,c’étaitenfin…tum’ascompris.Ophie,jet’enprie,aide-moiàêtreunbonpetitcopain!Je…jeneveuxpaslaperdre!

C’estd’accord,maistusais,Dick,tun’aspasbesoindecoursoudeconseilousi,justeunseul.Soistoi-mêmeetsielletientàtoi,tuverrasqu’elleaccepteratoustespetitsdéfauts!

J’espéraisquecesoitvrai,carjen’avaispasmenti,elleétaitmalumièredanslesténèbresetsielledevaits’éteindre,jenesaispassicettefois,jeparviendraisàémerger!

CHAPITRE16

Dilyanna

J’avaisappréhendélejourdel’inauguration,medemandantcommentDickallaitréagiretaussicommentnousallionspouvoircombinernotrerelationnaissanteavecnotretravail.Pourtant,touts’étaittrèsbienpassé!Lorsquejem’étaisgaréesurleparking,Dickm’attendaitpatiemmenttoutenjetantdesregardsfurtifsautourdelui.J’avaisétésoulagéedeconstaterquepersonnen’avaittouchéaugraffitietétonnéequeMikenem’enaitpasparléenvenantchezmesparents.PuisDicks’étaitapprochétandisqueje

descendaisdevoiture.Ilm’avaittendulamainets’étaitemparédemesaffairesqu’ilavaitdéposéessurlecapot.Puislentement,commes’ilcraignaitdem’effaroucher,ils’étaitsaisidemonvisageencoupeaucreuxdesesmainsetavaitposéseslèvressurlesmiennesdansunbaiserlangoureux.Ettandisquej’enréclamaisplus,ilavaitmisfinànotreétreinte,m’avaitaccompagnéejusqu’àlaporteenmetenantparlamain…etils’étaitéclipsépourfairesontravailtandisquej’accueillaislepremierpatient.

Etlesjourspassèrentetseressemblèrent…

Cesoir,nousallionsfêternostroissemainesentantquecoupleofficielavecsesamislesZonardsetj’étaisbiendécidéeàdonneruneautredimensionàcequenousvivions.Jenevoulaisplusmecontenterdebaisersoud’innocentescaresses.J’étaisprêteàallerplusloinavecDicketj’espéraisseulementqu’ileniraitdemêmepourlui.Jejetaiuncoupd’œilàmonrefletetfitlamoue.Bon,unechoseétaitcertaine,jamaisjen’entreraisdansuntrente-huit,nimêmedansunquarante,maisj’avouequecequejevoyaisn’étaitpassimal…Etcequ’ilyavaitdemieux,c’étaitquedanslesyeuxdeDick,jemesentaisaussicanonqu’untopmodelcarilmeregardaitavectantdepassionquejemesentaislaplusbelledesfemmes.

J’enétaislàdemesréflexionslorsquemonpèrepassaleboutdesonnezdansmachambre.

Dis,mapuce,tucroisqueDickauraletempsderegarderlesplansquej’aidessinéspourlebarbecue?medemanda-t-il.

Papa,cesoir,onsort,onarendez-vouschezsesamis,soupirai-jeenlevantlesyeuxauciel.

Çanemeplaîtpas,bougonna-t-il.LafilleDavidsonseralàetjen’aipasoubliélafaçondontelles’estcomportéeavectoiilyaquelquesannées.

Commetuviensdeledire,c’étaitilyaplusieursannéesetnon,onneresterapasicipourqueDickettoialliezvousenfermerdanslegarage!

Ilquittalapiècetoutenmarmonnant.Dickavaitfaitlaconnaissancedemesparentslasemaine

précédenteetsilecourantétaitbienpasséavecmamère,ilenavaitétédemêmeavecmonpère,avecquiDickpartageaitlapassiondubricolagesibienqu’àlafindelasoirée,lesdeuxhommesnousavaientabandonnées,mamèreetmoi,pours’adonneràdes«trucsdemecs».

LasonnetteretentitetjesourisenconstatantqueDickétaitpileàl’heure.J’entendismamèrel’accueillir,puissemettreàrire.Jemeprécipitaiaurez-de-chausséeetmejetaidanssesbras.Dickmeserracontreluiavantd’effleurermeslèvresd’unbaiser.

Salut,j’aiquelquechosepourtoi!murmura-t-ilencaressantmajouedelapulpedupouceetenmetendantunepetiteboite.

Quoi?Maispourquoi?m’écriai-jeenarrachantlepapier.

Jetombaitoutdesuiteamoureusedubraceletquinecontenaitpourl’instantqu’unebreloque,lalettreD,quipouvaittoutaussibiencorrespondreàsonprénomqu’aumienetjeluitendislebraspourqu’ilmelepasseautourdupoignet.

Parcequej’avaisenviedetefaireplaisirtoutsimplement,merépondit-ilensouriantavantdesetournerversmamère.Grâce,j’aiessayélarecettequevousm’avezdonnéeetc’étaitunvéritabledélice.

Contentequeçat’aitplus,Dick,luiassura-t-elle.

Édouard,j’aipenséàvouségalement,poursuivit-ilenfourrageantdanssapocheetenensortantunefeuillepliée.Regardezçatranquillementetvousmedirezcequevousenpensez!J’aiunpeusimplifiélesschémaspourutilisermoinsdematériauxetgagnerainsienplace.

Oui,çameplaît,s’enthousiasmamonpère.Ilfautquej’étudieçadeplusprès.

Jelaissaiéchapperunlégerrire.IlétaitcommeçaDick,d’unmot,d’unmorceaudepapier,ouencored’unbraceletunique,ilrendaitlesgensheureux.

Onferaitmieuxd’yaller,énonça-t-il.Mesamissontpressésdefairetaconnaissance.

Noussaluâmesmesparentsetnousdirigeâmesversmavoiture.

Tasœurseralà?demandai-jeenm’engageantsurlaroute.

Non!répondit-illaconiquementenserrantlespoings.

Jeposaimamainsursacuisseetilentrelaçasesdoigtsauxmiens.Jesavaisquec’étaitdifficilepourluid’enparler.Jenesaispascequisepassaitentreluietsesparents,etentreluietsasœur,maisjesavaisqueçalerongeaitdel’intérieur.

Oùva-t-on?

Angèlevoulaitquenousallionsàl’aubergeetJonasvoulaitfaireçaàlaZone.

Quiagagné?

Moi,onferaçaaulac!répondit-il,fierdelui.Ilfaitbeau,unelégèrebriseapporteralafraîcheurnécessaireetàpartLuckyetSasha,toutlemondeseralà.

Parle-moideLucky.

Enfait,avantqu’onarrive,ilfautquejet’avoueuntrucquejegardesurlecœurdepuisquenoussommesensemble,dit-ilenhésitant.Ophélie…Ophéliem’aavouécequis’estpasséautrefoisentrevous…

Jeserrailevolantsifortquemesjointuresblanchirent.

Dily…Ophélieestmonamieetelleregrettesincèrement.Tucomprends,avantd’êtreavecJonas,elleétaitunpeu…borderlineelleaussi,ellejouaittoutletempsunrôle.Elleenabavé,AleksanderJochetiatentédelatuer,elleaperdusonbébédansl’accidentetl’usagedesesjambes…etàcausedemasœur,elleaétéàdeuxdoigtsdusuicide.C’estLuckyquil’aaidéeetlui,quiavaitmisSashasurunpiédestal,aététellementécœuréqu’ilaacceptédepartirfaireunetournéeavecsonnouveaugroupe.

Oùveux-tuenvenir?

LéopoldDavidsonseralàavecMélinaetleurpetitgarçon,souffla-t-il.

Ouiet…

Putain,jecrèvedejalousie,voilà!s’écria-t-ilentapantdupoingsursongenou.

Jefreinaisibrusquementqueleconducteurduvéhiculequimesuivaitdeprèssemitàklaxonner,furieux.Jemereprisassezpourmegarersurlebas-côtéettournaimonvisageversceluideDick.Ilregardaitdroitdevantlui,n’osantpasm’affronterdeface.

DickensCorbins,regarde-moi!

Ilsetournaversmoietjepuslirelapeurdanssonregard,celled’êtrerejeté.

Qu’est-cequipeuttefairecroirequej’aiencoredessentimentspourlui?C’étaitilyadesannées,Dick.

Parcequ’onn’oubliepassonpremieramour,murmura-t-il.Entoutcas,jelepensecarjesaisquemoi,jeneparviendraispasàt’oubliermêmesituvenaisàmequitter.

Dick,jen’aiaucuneenviedepartir,luidis-jeenluiprenantlamain.Cettehistoire…Non,jenepeuxmêmepasappelerçaunehistoirecariln’yaabsolumentrieneuentrenous,cen’étaitqu’unetocade,unamourd’adolescente.

JeconnaisLéo,c’estunmecclasse,séduisant,moiàcôtéjenesuisqu’unepâlecopie,non,mêmepas,unefausseimitation,

Maisquandcomprendras-tuqu’àmesyeuxtuesunique?insistai-je,voyanttoujourscettecrainteetcettedouleurdanssonregard.Dick,tumefaisrire,tuesgentil,attentionnéetj’aimelorsquejetefais

perdretesmoyens,t’entendreparlerdecettefaçonsivulgairequin’appartientqu’àtoi.

Jejetaiuncoupd’œilàgaucheetàdroiteet,voyantqu’iln’yavaitpersonneautourdenous,jeretiraiunàunlesboutonsquifermaientmonchemisiertandisqu’ilmefixait,interloqué.

Regarde!murmurai-jeenécartantlespans.Tuvoiscessous-vêtementssexy,c’estpourtoiquejelesaiachetés,parcequej’aibienl’intentiondefinircettejournéedanstesbras,danstonlit.

Illaissaéchapperunlégercoassementettenditlamainversmapoitrine,lentement,avechésitation.Jeluisaisislepoignetetavançailégèrementmonbustepourchercheruncontactplusrapproché,plusintime.

Pourtoi,Dick,répétai-jeenlevoyantclignerdespaupières.PaspourLéopold,paspourunautre,uniquementpourtoi!

Ilmesaisitparlanuqueassezviolemment,commes’ilvenaitdeperdretoutesamaîtrise.

Putain,tumefaisbander,gronda-t-ilenprenantmamainetenlaposantsursonérection.Situsavaisàquelpointj’aienviedefourrermaqueuedanstajoliepetitechatte.

Tuaurastoutel’occasiondelefaireunefoisquelerepasserafini,luipromis-je.

Jerefermaimonchemisiertandisqu’ilenfonçaitsamaindanssoncaleçonpourremettreenplacesonmembrequilelaissaitàl’étroit.

Tuneperdsrienpourattendre,mepromit-il.

Jesouris.Toutestracesdepeuroudedouleuravaientdisparudesesprunellespourlaisserplaceàundésirbrut,animalquiserépercutadansmonentrejambe.C’estentremblantquejemeremisenrouteetlorsqu’enfinjemegarai,j’avaisrepriscontenanceoutoutaumoinsunpeu.NousdescendîmesdevoitureetDicks’emparademamain,commes’ilvoulaitprouveràtoutlemondequejeluiappartenais.Arrivésauborddel’alléedecaillebotisquimenaitaulac,jemetournaiverslui,memissurlapointedespiedsetluibaisaitendrementlabouche.

N’oubliepas,uniquementpourtoi,murmurai-je.

Ilréponditd’unsignedetêteetm’entraînaàsasuite.C’étaitlapremièrefoisquej’allaisvéritablemententrerdansungroupe.Autrefois,j’étaistropjeuneettroptimidepouroserneserait-cequ’ypenser.

PendantmonannéeavecMédecinSansFrontière,c’étaitletravailavanttoutetiln’enmanquaitpas,aupointquelorsquelajournéeétaitfinie,nousnousallongionslàoùnoustrouvionsunmatelaspourdormirquelquesheuresavantderecommencerencoreetencore.

Eh,toutirabien!murmura-t-ilenserrantmamain.

C’étaitluiàprésentquim’encourageaitetmoncœurseremplitdetendresse.

Eh,lesZonards,s’écria-t-ilenarrivantàproximitédesesamis,voicimananaalorssoyezsympa,okay?!

Jefusvitesubmergéemaistousm’accueillirentaveclesourire.C’estMélinaquimepritparlataillepourmeprésenteràtoutlegroupetandisqu’unpetitgarçond’environquatreanssejetaitdanslesbrasdeDickens.

OncleDick!OncleDick!!

Jevislevisagedemonpetitamisetransformeretjecomprisquelà,aumilieudetoutcepetitgroupe,Dickétaitchezlui,c’étaienteuxsavéritablefamille.

CHAPITRE17

Dick

Tandisqu’Élouanmesuppliaitdejoueravecluiaufoot,Mélinas’étaitaccaparéeDilyannapourlaprésenteràceuxqui,pourmoi,étaientdevéritablesfrèresetsœurs.Moncœurfitunlégerbondlorsqu’elleseretrouvadevantLéo,maiscommesiellepouvaitcaptermespensées,ellesetournaversmoietjepusliresurseslèvres«Uniquementpourtoi».

Hé,monpote,ellenevapass’envoler,elleestentredebonnesmainsavecMel’,metaquinaJonasenm’offrantunebièreavantdepoursuivre.Tusais,tuaseuraisondevouloirfaireçaici,c’estjusteparfait!

Putain,mec,j’ailatrouille,luiavouai-je.

Pourquoi?Toutsepassebien,non?medemanda-t-ilenfronçantlessourcilsavantdesourire.

Regarde,mêmeOphélienejouepaslesvilainessorcières!

Jevaisluirépéter,chantonnaLéa(Léo?)enpassantprèsdenous.

Jonaséclataderires’attirantl’attentiond’Ophéliequileregarda,faussementsévère.Ellefinitparluienvoyerunbaiserduboutdesdoigts.

Bonalors,Dick,dequoias-tupeur?

Toutça,c’est…c’estlevraibonheurquoi!balbutiai-je,peinantàtrouvermesmots.Jen’yaijamaiseuledroitet…

Etriendutout!mecoupa-t-ilenmefaisantpivoteretenm’indiquantDilyannadumenton.Tuvoiscettefille,ellenepassepasunmomentsanstechercherduregard.Elleadessentimentspourtoiett’acceptetelquetues!

Merde,Jo’,elleveutqu’onbaiseensembleetmerde,cen’estpasunepute!

Ça,j’airemarqué,ironisa-t-il.Écoute,jeteferaisbienuncoursd’éducationsexuelle,mais,crois-moi,çanet’apporterarien.Laisseparlertoncœur,Dick,soisàl’écoutedesesbesoins,destiens,ressenslafaçondontsoncorpsbougesoustesbaisers,soustescaresseset,crois-moi,c’estenagissantainsiquetuparviendrasàlacombler.

Tucroisquejepeuxyarriver?Sincèrement?

Oui,Dick!meconfirma-t-il.

J’opinaid’unsignedetêtemaislesceptredemesparentssurgitdansmonesprit.Mamèreavaitfaitunsibonboulotenm’humiliantsanscesseetenmerabaissantquejen’avaisplusaucuneconfianceenmoi.

Heureusementquemesamisétaientlàpourmepoussertoujoursenavantetmeredonnerpeuàpeul’estimedemoi-mêmequej’avaisperdue.JevisDilyannasedirigerversnous,ellepassasonbrassouslemienetposasatêtesurmonépaule.

Ilparaît,énonça-t-elleensouriant,quejedoisàprésentprésentermeshommagesàl’Alphadelameute.

J’éclataiderire.D’ungeste,d’unephrase,Dilyannaétaitcapabled’effacertoutcebrouillardquim’entouraitparfois.Jeposaimeslèvressursonfront.

Jonas,jeteprésenteDilyanna.Dily,voiciJo’,notregrand-frèreàtous!L’AbbéPierredesZonards!

m’exclamai-jeavecemphase.

J’espèrequetunemedemanderaspasdevenirmeconfesser,s’esclaffa-t-elle.

Pourquoi?rétorquaderechefJonasenfronçantlessourcils,tuasbeaucoupdepéchésàtefairepardonner

?

Elleleregardad’unepetitemouemutineetsetapotalalèvreinférieuredesonindex.Ellefitminederéfléchir.

Pourl’instant,non!répondit-elle,maisaprèscettenuit,j’enauraidestas!

Jonassemitàrire,sepenchaversDilyannaetlaserradanssesbras.

Bienvenuedanslafamille,s’écria-t-ilenluitendantunebière.

DilyannatrinquaavecJonasetsetournaversmoi.

Moiquisuisfilleunique,j’avouequeçam’amanqué,cettecomplicité,cescoupsdegueule,rit-elleenvoyantlesjumellessedisputerunpaquetdechips.

Jesuisétonnéqu’Happyaitfaitledéplacement!luisignalai-je,jesaisqu’ilavaitunecourseimportanteceweek-end.

J’ail’impressionqueLéon’estpasheureuxdelevoirsiprèsdeMélina,remarqua-t-elle.

Tusais,laviechezlesZonardsestassezcompliquée,larenseignai-je.Ilyaquelquesmois,Léoétaitsurlepointd’épouserunefilledel’Éliteetréclamaitlagarded’Élouan,aussi,pournepasqueMel’soitobligéed’abandonnersonenfant,Happyluiaproposédel’épouseralorsqu’enfait,LéoetMél’

s’aimaientdepuistoutcetempsetavaientjustebesoindesel’avouer.Àprésent,touslestroisformentunefamille,maisLéonepeuts’empêcherderessentirdelajalousievis-à-visd’Happyquiestplusqu’un

frèrepourMel’.

Ehbien,lavieestloind’êtreunlongfleuvetranquillepourvous,lesZonards!s’exclama-t-elle.

Ça,tupeuxledire…Maisviens,allonsnousmêlerauxautres.

Oui,profitons-en,murmura-t-elle,bienquej’aiehâtequenousnesoyonsquetouslesdeux.

Elleposaseslèvressurlesmienneset,prenantuneforteinspiration,sedirigeaversOphéliequi

l’accueillitaveclesourire.J’espéraissincèrementquetouteslesdeuxpuissentmettrelepassédecôtéetdeveniramies.

Étonnamment,lasoiréesepassaàlaperfection,Dilyannas’étaitintégréeaugroupedefaçonsinaturellequ’ellesemblaitenfairepartiedepuistoujours.Habituellement,nousfinissionslarencontreenécoutantLuckyqui,accompagnédesaguitare,noustransportaitparsamusique.Maismêmesisonabsencenouspesait,ilcontinuaitdepenserànous.IlnousavaitpréparéunesurpriseenenvoyantàHappyunemaquettedesonnouvelalbum.Etc’estainsique,malgréladistancequinousséparait,nouseûmesl’impressionqu’ilétaitavecnouscommeautrefois.C’esttoutnaturellementquelescouplesseformèrentets’installèrentsurleschaiseslonguesouàmêmelesolpourécoutersesnouvellescompositionsetunepointedenostalgies’insinuaenmoienréalisantqueSashan’étaitpaslà…

Jem’assisprèsd’unarbre,ledoscollécontreletronc,lesjambesécartées,etentouraiDilyannademesbras.Satêtereposaitcontremontorseetsesmainscaressaientdoucementlesmiennes.ElleétaitdétendueetsesyeuxétaientferméscommepourmieuxapprécierlamusiquedeLucky.

Latenirsiprèsdemoifaisaitrugirlesangdansmesveines.Jedevaismêmemeretenirpournepasreleversajupe,glissermesdoigtssursescuissessidouces,siappétissantes.

J’aienviedetoi,luimurmurai-jeàl’oreille.

Innocemment,jeluifrôlaidudosdelamainlecôtédesonsein.Jelasentisretenirsonsouffle,commesicettesimplecaresseétaitdéjàtroppourelle.

Tuneperdsrienpourattendre,memenaça-t-elle.

Jelaissaiéchapperunlégerrireet,nonchalamment,jememisàcaressersonventre,mepermettantquelquesattouchementslégerssursapoitrinedontjesentaislestétonspointersousmesdoigts.Unlégergémissementsortitdesaboucheetjecomprisquejenepourraispasattendrepluslongtemps.Jelarepoussaidoucement,melevaid’unbond,mepostaifaceàelle,l’aidaiàseleveretlatiraiversmoiavantdel’entraînerjusqu’auseuildelamaison.Ellenem’avaitpasquittédesyeux,maisaumomentd’entrer,elleseretournalesourireauxlèvres.

Commevouspouvezleconstater,Dickestunpeu…pressé,maisjevoulaisvousremercier,lesunsetlesautrespourceformidableaccueil.J’aipasséuneexcellentesoirée…Bonnenuitàtous!

J’ail’impressionquelatienneleseraentoutcas,crial’unedesjumellesenlevantsonverredansmadirection.

Bonsang,ça,çanefaitaucundoute!Àdemain,mespotos!m’écriai-jeenattirantDilyannaàl’intérieur.

Celle-cis’esclaffamaissonrires’éteignitbienvitelorsquejelaplaquaicontrelebattantdelaporteetposaimeslèvressurlessiennes.C’étaitcommesijenepouvaisplusmeretenir,commesiunautreavaitprispossessiondemoncorps.Mesmainsétaientpartoutsurelle,effleurantsesseins,seglissantsoussajupe…

Jeneparviensplusàmecontrôler,gémis-je.

Ellemerepoussadoucementetjecrusquej’allaismourir,maisellesecontentademeprendreparlamainpourm’entraîneràl’étage.Unefoisdansmachambre,ellerestadevantmoiunmomentpuislentement,retiramontee-shirt.Jesifflaientremesdents…Lasensationdesesmainssurmoncorpsétaitindescriptibleetlorsqu’elleposaleslèvressurmontorse,jecrusquej’allaislarenversersurmonlitetm’enfoncerenellesansplusattendre…Maiselleméritaitmieuxqueça…C’estentremblantquejeretiraiunàunlesboutonsdesonchemisier,m’arrêtantentrechaqueboutonpourcouvrirsapeaudénudéedetendresbaisers.Moncœurbattaitàtoutrompreetcefutpireencorelorsque,d’unmouvementd’épaules,ellefittombersonvêtement,restantdevantmoiuniquementvêtuedesajupeetdesonsoutien-gorge.

Je…Ilfautquejem’asseye,Putain.Jesuisauborddumalaise!grondai-jeenm’affalantauboutdulit.

Je…Jeteplais?medemanda-t-elle,soudaintoutetimide.

Jelaregardaicommesiellesemoquaitdemoietréalisaiquenon,elleétaitsérieuse.

Tuessibandantequejesuisàdeuxdoigtsd’exploserdansmonfutal.Situdevaismeplaireuntantsoitplus,tuseraisobligéedemefairedubouche-à-bouchepourmeréanimer,cequiarriverasûrementlorsquejevaisretirercefichuboutdechiffonquim’empêchedet’admirer.

Ellefitunpasenarrière,passalesdoigtssousl’élastiquedesajupeet,lentement,toutenmefixantdroitdanslesyeux,lafitglisserlelongdeseshanches,lescuisses,sesgenoux…jusqu’àcequ’elleviennemourirencorolleautourdeseschevilles,telleunefleur…C’enétaittroppourmoi…Jebasculaienarrièreengémissant,l’avant-brasplaquédevantmesyeux.

Çayest!Tum’astué,gémis-je.

Alors,autorise-moiàteressusciter,murmura-t-elle.

J’entrouvrislespaupièresetlavissemettreàgenouxentremescuisses.Elleretiraleboutondemonjean,fitglisserlafermeturelelongdemaqueueprêteàexploseretjesentissonsoufflemecaresser.Jeneportaispasdesous-vêtements,cequinesemblapasl’ennuyer.Elleredessinaduboutdesdoigtsletracédemabite,sesyeuxplongésdanslesmiensmaintenantécarquillés.Jelarepoussai,medéshabillaileplusrapidementpossibleavantd’aiderDilyannaàsereleveretposaimeslèvressurlessiennes.Ellefitunpasenarrièreetôtasesdessous.

Uniquementpourtoi,murmura-t-elleenapparaissantdevantmoitotalementnue.

Çayest,j’enétaissûr,j’étaismortetj’étaisauparadis…Jelaprisdansmesbras…

CHAPITRE18

Dilyanna

Dickétaitunebêtedesexe!Jenepusm’empêcherderireenmefaisantcetteréflexionpourlaénièmefois.Depuisquinzejours,Dicketmoipassionsnosnuitsensembleetc’étaitàchaquefoisunvéritablefeud’artificesouslesdraps.Dickétaittendre,attentionné,etilsavaitparfaitementtrouvermespointsfaibles,meszonesérogènes…EncorequeDickétaittellementdouéquemoncorpsenétaituneàpartentière.Maiscequej’appréciaislepluschezlui,c’étaitqu’ilparvenaitàséparernotreviesentimentaledenotrevieprofessionnelle…alorsqu’ilm’arrivaitparfoisdefantasmersurluienaccueillantlespatients.

Dilyanna,nousavonsunproblème!

JemeretournaibrusquementversMikeetleregardaifixement.Ilm’avaitàpeineadressélaparoledepuissavisitechezmesparentsetj’avouequej’étaisintriguée.

Quoi?Quesepasse-t-il?

Jemedoisdet’avertirquecertainsproduitsdisparaissentdenosarmoiresàpharmacie.

C’estimpossible,luirépondis-je.Noussommeslesseulsàyavoiraccès.

IlnousmanquedeuxdosesdeSubutexainsiqueplusieursplaquettesd’Actiskenan{3},s’énerva-t-il,ettoiçanet’ennuiepas?Écoute,jenesuispasnédeladernièrepluie,jesaistrèsbienquetonpetitprotégéestunanciencamé,jesuiscertainqu’ilestderrièrecevol,ilalemobile,ilenalapossibilitéet…

Maistuescomplètementfou!m’écriai-je,depuisquandteprends-tupourunflic?Depuisquandaccuses-tulesgenssanspreuve?

Depuisquelaresponsabledecedispensaireécartelescuissespourunmoinsquerienetqu’ellecouvresesagissements.

Jerestaibouchebéedevanttantd’agressivité.

C’estvraimentpetitetmesquin,crachai-je.

Dis-moiquec’estfaux!insista-t-il.Dis-moiquetunecouchespasaveccegamin!

Jetiensàtesignalerqu’ilestplusâgéquemoi,Mike,dois-jecomprendrequetumeconsidères

commeunegamine?

Non,dit-ilenm’empoignantlebrasviolemment,toi,tuesunevraiefemme.

Lâche-moi!grondai-jeententantdemedégagerdesaprise.

Ilnelefitpas,aucontraire,ilm’attiraviolemmentcontreluietmapoitrines’écrasacontresontorse.

Jenetelerépéteraipas,Mike,nemetouchepas,luiordonnai-je.

Alorsluiestassezbonpourtoimaispasmoi,c’estça?éructa-t-ilenlaissantglissersonregardsurmoncorps.Maislaisse-moitemontrercequ’estunvraihommeet…

Jeteledéconseille!Àdirevrai,jen’essaieraismêmepasdeposerunseuldoigtsurelle,énonçacalmementJonasquivenaitdepénétrerdanslehall.Jet’ordonneégalementdevirertessalespattesetdefaireunpasenarrière!

Jepoussaiunsoupirdesoulagementetsentismesjambestrembler.Jenesavaispascequ’étaitvenufaireJonasaudispensaire,maisjenepouvaisquebénirlesangesetlessaintsdesaprésence.Ilétaitimposant,vêtudesonblousonencuiretd’unjeanjudicieusementtroué,maisàcemomentprécis,c’étaitsonvisagequiétaitleplusimpressionnant,ilpromettaitàMikemilleetuntourmentss’ilnemelibéraitpas.

Jenesaispasquitues,crachaMike,maisnosaffairesneteregardentpas!

Dily,est-cequetuesconsentante?medemandafroidementJonas.Est-cequecette…étreinteestvolontaire?

Non!m’exclamai-je,outrée.Jamais!

Alorstuastort,poursuivit-ilens’adressantàMike.C’estpersonnel!Dilyestsousmaprotection!

Pourquiteprends-tu?ironisaMikeencaressantmesfessesd’unemainrude.PourDieu?

Unrictusmenaçants’inscrivitsurlevisagedeJonasetjenepusm’empêcherdefrissonner.

JeprotègelesmiensetDilyannafaitpartiedema…meute!SituneveuxpasfairelesfraisdelacolèredesZonards,jeteconseilledelalâcher!Immédiatement,etsachequejenelerépèteraipasdeuxfois…

Les…LesZonards?balbutiaMikeentremblant.TuesJonasDrioneau?

Jevoisquemaréputationestarrivéejusqu’àtesoreilles,semoquaJonas.Alorsquedécides-tu?

Sansunmotdeplus,MikemepoussaviolemmentdanslesbrasdeJo’.Cederniermeserraunbrefinstantavantdemefairepasserderrièreluipourmeprotéger.

Sijedoisneserait-cequ’encoreunefoistemettreengardesurtafaçondetraiterlesfemmes,jeneseraipasaussicompréhensifetceserabeaucoupplussalissant…pourtoi!

Tumemenaces?

Jo’éclatad’unrirequimetransperçajusqu’auxos.

Net’a-t-onpasditquelesZonardsnefontjamaisdemenaces?susurra-t-ilenavançantversMikequin’enmenaitpaslarge.Ilsnefontquedespromesses.

IlavaitcrachécesderniersmotsavectantdeconvictionqueMikes’enfuitdanslefonddudispensairecommes’ilavaitlediableauxtrousses.QuoiqueJonasressemblaittoutàfaitàundémonvenudesenferspourmesauver.Pourtant,lorsqu’ilsetournaversmoi,cen’étaitqueJonas,notregrandfrèreJo’.

Çava?Tun’asrien?

Ilm’avaitposécettequestionavectantdedouceurquejecraquai,jemejetaidanssesbrasensanglotant.Ilmeberçacontreluiunmomentavantdemerepousserdoucement.

Prendstesaffaires,jeteramèneàlamaison!

Jenecherchaipasàensavoirplus.Jefilaidansmonbureau,récupéraimesaffairesetrejoignisJonasquim’attendait,appuyécontrelechambranledelaporte.

Commentsefait-ilquetusoislà?lequestionnai-je.

Dicknepouvaitpasvenirtecherchercarilavaitunnouveaurendez-vousavecsonréférentPôleemploi,alorsilm’ademandédelefaireàsaplace,merenseigna-t-il.Etjesuisbiencontentquecesoitmoiquisoistombésurcettescène.

Pourquoi?

ParcequeDickl’auraittué!Onnetouchepasànosfemmes!gronda-t-il.

Ondiraitquetuparlesd’expérience!ironisai-je.

Legarsesttoujoursvivant,maisdoitencoreleregretter!

J’ouvrislaboucheetlarefermaiaussirapidement.LesZonardsétaientdesgarstrèscompliqués,maiscommel’avaitditJonas,onnetouchaitpasàleursfemmes,etj’étaisheureusedecompterparmicesdernières.NousétionsàpeinesortisqueJonass’arrêtabrusquementettournalatêteverslaruequimenaitaucœurduPandémonium.Ilsetroublauninstant,hésitantdetouteévidenceàs’enfonceraucœurdesquartierssud.

Quoi?Qu’est-cequisepasse,Jo’?luidemandai-jetandisqu’ilpassaitnerveusementunemaindanssescheveux.

Ce…cen’estrien,jepense,certainementuneffetdemonimagination.Pendantuninstantj’aicruvoirSashaencompagnied’undesgarsdel’Élite,maisj’aidûmetromper.

Tusais,denombreuxjeunesdesbeauxquartiersviennents’encanaillerici.Ilsviennentacheterleur

drogue,coucheraveclesprostituées,parierdel’argentsurdescombatsderues.Cenesontpasdesanges,luirévélai-je.

Enfait,leplusfouauraitétédevoirSashaavecl’und’eux.Elleméprisetousceuxdel’Élite,merenseigna-t-ildansunsourire,maischangeonsdesujet.Ledispensaireétaitbiencalmecesoir!

Oui,çaarriveparfoisetdemainnousnesauronsplusoùdonnerdelatête,soupirai-je.Cematin,j’aireçuquelquespatientspourdesblessures,pourdespilulesdulendemain,maiscetaprès-midi,lenéant.

J’enaiprofitépourmettredel’ordredanstoutcequiestadministratif.

Tufaisdubonboulot,Dily.

Unevaguedegratitudem’envahitetjesourisàJonasquiglissasonbrasautourdemataille.

Allez,grimpedanstavoiture.Jetesuisavecmamoto!medit-ilenarrivantprèsdemonvéhicule.

Jefisletrajetjusqu’àlaZonesanspouvoirretenirlesfrissonsdepeurquicontinuaientd’assaillirmoncorps.Jamaisjen’auraispenséqueMikepuisseenarriveràdetellesextrémités,surtoutquepasuneseconde,jeneluiavaislaissépenserquej’auraispuêtreintéresséeparuneaventureaveclui.Maislà,iln’étaitpaslui-même,c’était…unebête!JemegaraidevantchezJonasquiretiraitsoncasque.Ilmeregardafixementetposasamainsurmonépaule.

Çava?Tuestoutepâle.

C’estlecontrecoup,çavapasser,lerassurai-jeavantd’exploser.Putain,maistuterendscomptequ’ilaattenduqueDicknesoitpaslàpourm’agresser!Iln’étaitmêmepascenséêtredeserviceaudispensaire,c’étaitletourdeMax.

Cegarsestunlâche,conclutJonasenmeguidantjusqu’àl’entrée.Etcesonteuxlesplusdangereuxalors,unconseil,soisprudente,d’accord?Dicknes’enremettraitpass’ilvenaitàt’arriverquelquechose.

Iln’ensaurarienet…

Ilestdéjàaucourant,mecoupaJonas.Jel’aiappeléavantdequitterleparking.

Jen’euspasl’opportunitéderépondre.Laportes’ouvritsurDick.Ilsemblaitdévastéetjecomprisqu’ilsesentaitcertainementcoupabledem’avoirlaisséeseulealorsqu’iln’avaitpaseulechoix,ayanteurendez-vousavecsonréférentdePôleEmploi.Sonteintétaitpâle,sesmainstremblaientmaisétonnamment,lorsqu’ilmesaisitdanssesbras,jenepensaisplusqu’àunechose:j’étaisensécurité.

CHAPITRE19

Dick

Jelaserraisifortquej’avaispeurdeluifairemalmaisjenepouvaispasm’enempêcher.J’enfouismesmainsdanssescheveuxetlapressaicontremoijusqu’àcequejesentesesseinscontremontorse,sescuissescolléesauxmiennes,sonsoufflesurmapeau.LorsqueJonasm’avaitappelépourmesignalerqueMike,leDocteurMikeDienstal,venaitd’agresserDilyanna,monsangavaitruédansmesveines.

J’auraisvoulumerendresurplaceetlecognerencoreetencorejusqu’àcequ’ilcomprennequeDily

étaitàmoietquelatoucherrevenaitàmedéclareruneguerreouverte…Ilavaitfallutoutelapatienced’OphélieetlaforcedeBoubapourmecontraindreàrestersurplace.Touslesdeuxm’avaientregardécommesij’allaispéteruncâbleàlapremièreoccasion…Ilsn’avaientpastort,j’étaisvraimentsurlepointdefaireunmassacre.

Heureusement,j’avaisentendulamotodeJonas.Ilm’avaitquandmêmefalluquelquesminutesavantdepouvoirmecalmeretouvrirlaporte.Maisàprésent,toutallaitbien,elleétaitdansmesbras,saineetsauve.

Merci,Jo’,murmurai-je,lesmâchoiresserrées.

C’esttafemme!Ellefaitpartiedesnôtresetonseprotègelesunslesautres!dit-ilcalmement.

Jefinisparreculerlégèrementmaisjeneparvenaispasàlalâcher.ElleglissasonbrasautourdematailleetnousrejoignîmesOphéliequiserraitlespoings.

Ilyavraimentdesmecsquisecroienttoutpermis,gronda-t-elleentendantlamainàDilyanna.Vientt’asseoirprèsdemoipendantqueleshommesprennentunpetitremontant.Tuveuxboirequelquechose?

Unthé?Unchocolat?

Non,çava,répondit-elle,c’estjustequejesuisàlafoisabasourdie,choquéeet…

Jet’avaisditquecemecn’étaitpasnet!grondai-jesanspouvoirmeretenir.Iltedéshabillaitduregardet…et…

Calme-toi,Dick!metempéraJonas.

Maismerde!s’écriaDilyanna,est-cequevousm’avezbienregardée?Jen’airiend’unefemmefataleoud’unTopModel.Pourquoidiableest-cequ’ilestattiréparmoi?

Pourlesmêmesraisonsquemoi,murmurai-jeenrelevantsonmentonetenplongeantmonregarddanslesien.Parcequetuesbelle,aussibienàl’extérieurqu’àl’intérieur.Tuesgentille,adorable,féminineet…Etputain,tuescanon,merde!

Elleéclataderire,mêmesiunelarmecoulasursajoue.Jenepusm’empêcherdebaisersabouchedoucement,avecrévérence.Moncœurétaitremplid’ellemaisjenesavaiscommentluidireàquelpointellecomptaitpourmoi.Jamaisjen’avaisressenticettesensation,celled’êtrelamoitiéd’untout,celled’appartenircorpsetâmeàquelqu’un,pourtant,c’estcequej’éprouvaispourDilyanna.Encoreunefois,cefutcommesinousétionsconnectés.Ellerelevalatêteetposaunemainsurmajoueetl’autresurmoncœur.

Uniquementpourmoi,murmura-t-elle.

Jehochailatêteetlenuagenoirquis’infiltraitdansmonespritetdansmoncœursedissipalégèrement.

Allez,viensàlacuisine,onvapréparerlerepaspournosfemmestoutenbuvantunebière.

JesuivisJonasmêmesij’avaisenviederesterencompagniedeDilyanna,maisjenevoulaispasêtrecegenredepetitcopain,jaloux,àtoujoursespionnerlemoindrefaitetgeste.

Qu’est-cequ’onfait?marmonnai-je.

Pourl’instant,ons’assiedetonsedésaltère.Ilseratempsensuitedefaireledîner,réponditJonasensortantdeuxcanettesduréfrigérateur.Etdanslepiredescas,oncommanderadespizzas!

Jenecroispasquecesoitlemenuauquels’attendentOphélieetDilyanna.Et,oùestpasséBouba?

demandai-je,merendantenfincomptedesonabsence.

Partibosser!

J’avalaiunelampéedemabièreetpoussaiunprofondsoupir.

Putain,mec,j’aieulesbouleslorsquetum’asappelé.Jenesaispascequej’aicru,maisbonsang…

Moncœurs’estarrêtépendantunmoment.

Jesuistombéàpic,ça,jeteleconfirme,renchéritJonas.Cemecesttotalementobnubilépartanana!J’étaislà,deboutdevantluiàlemenacer,etiln’enavaitrienàfaire.Laseulechosequileperturbait,c’étaitquetubaisaisDilyannaetqu’ellenevoulaitpasdelui.

Écoute,Jo’,lecomportementqu’ila…jel’aidéjàvuàplusieursreprises…chezlescamés!

Quoi?s’exclama-t-il.Tucroisqu’ilsedrogue?

Jen’ensuispascertain,maislepremierjouroùjel’aivu…C’étaitcommesijecontemplaismonreflet.Entoutcas,sij’airaison,ilsedonnebeaucoupdemalpourmasquersonaddiction.

Onnepeutpasignorerlestracesdepiqûressurlesbras,etcegarsportetoujoursdestee-shirtsà

manchescourteset…

Jenepusm’empêcherd’éclaterderire.

Ohbonsang,Jo’,tuasencoretellementdechosesàapprendre,memoquai-jeavantderependreplussérieusement.Tunetrouvespasdeveinespourtepiqueruniquementdanslesbras,maisdanslescuisses,l’arrièredesgenoux…j’enconnaismêmequisepiquaitdirectementdanslajugulaire…D’autressepiquentenintramusculaire,là,ilspeuventchoisirl’endroitquileurconvientlemieuxmaisceuxdésirantdissimulerleurspetitsvicesàleurfamillelefontprincipalementàl’intérieurdescuisses.Cetteméthodeestassezdouloureuseetpeutprovoquerdesproblèmesdepeau.L’héroïnecommelacokepeutsesnifferégalement,maislà,vul’importancedeshémorragiesnasales,c’estmêmepaslapeined’essayerdelecamoufleretilyalatechniquedu«chasserledragon»quiconsisteàfairechauffertacamedansdupapieraluetenaspirerlafuméeàl’aided’untubeenplastique…Là,tuplanesc’estgarantietpasderisquesd’êtresurprisavectesbrasenlambeaux.

Alorsc’estcequetupenses?medemandaDilyannaquejen’avaispasvueentrerdanslapièce.TucroisréellementqueMikesedrogue?

Jen’ensuispassûràcentpourcent,énonçai-je.CommejeledisaisàJo’,certainsdroguéspeuventtromperleurentourage,maisjemettraismamainàcouperqu’ilacertaineschosesàsereprocher.

Ettoi,dansquellecatégorietesituais-tu?medemanda-t-ellenerveusement.

Audébut,jefumaisdel’herbeetquandj’aicommencélesdroguesdures,j’aisniféunpeudecokeavantdepasseraux«shoots»d’héroïne,danslesveinesdesbras,jen’avaisrienàdissimuler,luirépondis-jecalmement.

Mikem’asignaléquedesdérivésdemorphineainsiquedesdosesdeSubutexontdisparudel’armoireàpharmacie,dit-elleenprenantplacedevantnous.

Queveux-tusavoir,Dily?luidemandai-je.Sij’aireplongé?Sic’estmoiqui…

Maisn’importequoi!s’écria-t-elle.Dick,j’aiconfianceentoi!Situaslemoindredoute,lemoindresouci,tunedoispashésiteràm’enparler,jeserailàpourtoi,ainsiquetesamis!Alorsnon,jenet’accusaispas,jemedemandaissimplementsiMiken’étaitpascoupableets’ilnetentaitpasderejeterlafautesurtoipourt’évincerdutableau.

Cequiseraitparfaitementlogique,reconnutJonas.

Jemesentaismalàl’aised’avoirpensédurantquelquessecondesqueDilyannaaitpumesoupçonner.

Elleétaithonnête,intègre,etjesaisquesielleavaiteudescraintesàcesujet,ellem’enauraitparlé,tentédem’aider,elleneseseraitpascontentéedefairedessous-entendus,ellem’auraitaffrontédeface...Jen’étaisqu’unabruti!J’enétaislàdemesréflexionslorsquejesentissapetitemaindouceetfroideseposersurlamienne.Jen’avaismêmepasremarquéquejel’ouvraisetlarefermaisconvulsivement.

Toutvabien,Dick,merassura-t-elledansunsourire.

Ohbonsang,elleétaitlà,devantmoi,c’étaitellequis’étaitfaitagresseretc’étaitmoiqu’ellerassurait.Quelquechosed’énormegonfladansmapoitrine,commesielleétaitdevenuetroppetitepourmoncœurquiluiétaitprêtàéclater.Soudain,pourlapremièrefois,j’eusenviedeprononcerlesmots,ceuxquecertainsimaginenttabousmaisquipourmoiontbeaucoupdepouvoir.Cettedéclarationquel’onrévèleàl’êtreaiméuniquementlorsqu’onestsûr,caronpeutenressortirencoreplusfort,ouaucontraireêtreirrémédiablementblessé.Ilsétaientlà,surleboutdemeslèvres,maisunrestedecrainte,depudeurm’empêchaitd’ouvrirmaboucheetdeluiconfiertoutcequejeressentaispourelle.

Pourtant,jen’étaispasavaredecesmots,jelesavaisditsàdenombreusesreprisesàMélina,Ophélie,

lesjumelles,ycomprisauxgarçons,maiscessentiments-là,mêmes’ilsétaientfortsetsincères,n’étaientenriencomparablesàcequej’éprouvaispourcettejeunefemme.J’étaispurementetsimplementloved’elle!

J’entrouvrisleslèvres,maisréalisaivitequecen’étaitpaslebonmoment,lebonendroit.Jevoulais,pourlapremièrefoisquejememettraisànu,quecesoituninstantinoubliable,commeonenvoitdanslesfilms,romantiqueàsouhaitavecdesfleurs,desbougies,undînerauxchandelles.Elleméritaittoutçaetbienplusencore.

Eh,Dick,çava?m’interpellaJonasenmedonnantuncoupdecoudedanslescôtes.Ondiraitquetuviensd’avoiruneilluminationoujenesaisquoi!

Onpeutdireçacommeça,monfrère,c’estcommesilesoleilvenaitdemefrapperd’undesesrayons.

Àmoinsquecenesoitlafoudre,ironisaOphéliequimecomprenaitàdemi-mot.Ilparaîtqu’ellefrappeaumomentoùons’yattendlemoinsetquec’esttoujours…renversant!

Jelagratifiaid’unclind’œiltandisqueJonaslevaitlesyeuxauciel.

Eh,c’estreparti!Tuvoiscequej’endureDily,parfoisj’ail’impressiond’êtreinvisible,quecesdeux-làontleurproprelangage,gémit-il.

Oh,monchéri,leplaignitOphélieenroulantjusqu’àlui.Sachequejeparleénormémentdelangues,maiscellequetupréfères,c’estbiencellequ’onutilisedansl’intimité,non?

Dilyannaéclataderire.IlestvraiquepenserqueJonaspuissepasserinaperçuétaitabsolumentrisible,n’était-ilpasl’Alphadelameute?Jecaressaidoucementlesphalangesdemachérielorsquejelasentisseraidir.

Jevaisdevoirpenseràchangerdestylevestimentaire,dit-elleenmordillantseslèvres.

Attends,dequoituparles?demandaOphélieenseredressantdanssonfauteuil.

Jeneportequedesjupes,murmuraDilyannad’unetoutepetitevoix,c’estpeut-êtreàcausedeçaque…

Ahnon!Ça,jet’interdis,rugitOphélie.Cen’estpasparcequ’unefemmes’habilledefaçonfémininequelesmecsdoiventobligatoirementlaprendrepourunesalope.Ellepourraitmêmesevêtird’unsimple

shortàrasdesfessesetd’unbustierqu’elleauraitencoreledroitaurespect!Siunefemmeditnon,c’estnon!Cesontleshommesquidevraientchangerleurfaçondenouspercevoir,maiségalementauxmédiasd’arrêterderabaisserlafemmeaurangd’objetcommedanslespublicitésouautres!Situveuxchangerdestyle,fais-lepourtoi,parpourlesautres!Quantàtonpseudomédecindepacotille,jeseraisàtaplace,j’iraisdéposerplainteàlagendarmerie.LacommissaireCoterellefait…partiedelafamille,alorsn’hésitepasàluiracontercequis’estpassé.Situnelefaispas,ceMikerisquedecroirequ’ilpeutrecommencerentouteimpunitéet…

Ilyauneautresolution,lacoupaDilyanna.

Laquelle?luidemandai-je.

Quejelevirepourfautegrave!énonça-t-elle.

Attends,tupeuxfaireça?luidemandaJonas,ilmesemblaitquevousétiezassociés.

Eneffet,saufquejedétienssoixante-dixpourcentdesparts,MikeetMaxsepartagentlestrenterestantes.J’aihéritéd’unefortunecolossaleàlamortdemagrand-mèreetc’estaveccetargentquej’aiachetéledispensaire,quej’aifaitlesréparations.Toutefois,pouravoirl’autorisationdumaireDavidsonpourl’ouvrir,ilfallaitquejem’associeavecdesmédecins…Maiscequej’aifait,jepeuxledéfaire…

Demainàlapremièreheure,jeluisignaleraiqu’ilestrenvoyé,quejerachètesespartsetques’iln’acceptepasmaproposition,jeferaiappelàmonavocatavantdeporterplaintepourvoletviolencephysique.

Ouah,sijenel’étaispasdéjà,jecroisquejeseraistombéamoureuxd’elleàcemoment-là.EllemesourittendrementetsetournaversJonasetOphélie.

Bon,jevoisquelerepasn’estpasprêt,quediriez-vousd’unvrairepasdansunvrairestaurant?

proposa-t-elle.Vouscroyezqu’AngèleetJaysonontunetablepournous?

Nonseulementunetable,maiscarrémentunesallecomplète!s’exclamaJonasensefrottantlesmains.ÇafaitunmomentquejenemesuispasrégalédesbonspetitsplatsdemoncopainJay.

C’étaitilyadeuxjours,Jo’!luirappelaOphélieensedirigeantversl’entrée.

Oui,c’estbiencequejedis!

J’éclataiderireenlesentendants’engueulergentimentetmelevaiàmontour.Dilyannaentrelaçasesdoigtsauxmiensetsecollacontremoi.Ça,c’étaitlevéritablebonheur

CHAPITRE20

Dilyanna

Jen’euspasl’opportunitédediscuteravecMikenid’exigersadémission.Cedernierm’avaitenvoyéunmessagepourmesignalerqu’ilseraitabsentpourunmomentetqu’ensuitenousdevrionsparler.C’estavecsoulagementquelesjourssuivantsjem’étaismiseautravailencompagniedeMax.Ledispensairenedésemplissaitpasetonpouvaitdirequec’étaitunvéritablesuccès,etmêmesinousavionseuquelquespetitsproblèmesaveccertainspatients,laplupartdutemps,cesdernierssecomportaientcorrectement.

Alors,quepensez-vousdecetterobe?

JemetournaiversMélinaquivenaitdemesortirdemespensées.Elleportaitunerobefinedecouleurblanchequimettaitenvaleuràlafoissonbronzageetsasilhouetteparfaite.

Tuessuperbe,confirmaOphélieavantdesetournerversmoi.Ettoi,tuastrouvéquelquechosequiteplaît?

Jelagratifiaid’unegrimacepourtouteréponse.

Non,j’ail’impressiond’êtreboudinéedanscegenredefringues,marmonnai-je.

Tiens,essaiecepantalon,medit-elleenmetendantunjeandélavé.Jechercheunhautpouralleravecettupeuxêtresûrequetuserassexy.

Ilmesemblaitquetuavaisditpasdepantalon?ironisai-je.

Oui,benj’aichangéd’avisetMélinaestd’accordavecmoi.

Alorssivousenêtestouteslesdeuxconvaincues!m’exclamai-jeenlevantlesyeuxauciel.

Jemechangeaidanslacabined’essayagelorsquelamaind’Ophélie,quitenaitquelquestops,sefaufiladerrièrelerideau.

Personnellement,j’essaieraisceluidecouleurcrème,lesmotifsdecouleurssonttoutsimplementgéniaux,meconseilla-t-elle.

Etc’estvraiqu’ilétaitmagnifique.Enfait,jemeplaisaisbeaucoupdanscettetenue.Lejeanmettaitenvaleurmescuissesetarrondissaitjolimentmesfesses,peut-êtreunpeutrop,maisétrangement,çaneme

dérangeaitpas.Lehautquem’avaittrouvéOphélieétaitravissant.Composédefinesbretelles,ilprésentaitundécolletéenformedecœurdontlapointes’évasaitjusteentremesseins,lesmettantjolimentenvaleur.Ilseresserraitàlataille,avantdes’évaserautourdemeshanches,cachantmonventrerebondi.Pourlapremièrefois,jemesentisàlafoisjolieetsexy.

Ouah,magnifique!s’écrièrentMélinaetOphéliedeconcert.Tues…Ouah!

J’éclataiderireetmemisàtournersurmoi-même.

Alors,çavousplaît?

Turigoles?s’exclamaMélina.TusaisqueDickvacraquer!

Detoutefaçon,lacorrigeaOphélieenriant,DickressembleauloupdeTexAveryquoiqu’elleporte.

Ilalalanguependanteetdelabaveàlacommissuredeslèvres.Jesuiscertainequedansl’intimité,unefoisl’actefini,ilsemetàgenouethurleàlalune,fierdesesexploits.

MélinaetmoirîmesdeconcertavecOphélie.Bond’accord,iln’avaitjamaiseudecomportementlupin,maisc’estvraiqu’ilrespiraitlafiertéàchaquefoisqu’ilm’offraitunorgasmeetilétaittrès,trèsdouépourça.Jemesentisrougiretlesfillesrirentdeplusbelle.

EtsionallaitauRaffaïné?proposaOphélie.J’aienvied’uneframboisine.

Avecunchocomousse,renchéritMélinaenseléchantleslèvresdefaçonsensuelle.

Etunsupplémentdechantilly,ajoutai-jedansungémissement.

Alorsc’estdécidé,onpasseencaisseetonyva!s’écriaOphélieenriant.

Jepivotaipourallermechangerlorsqu’unmouvementàl’extérieurdumagasinattiramonattention.Ungroupedequatrejeuneshommesd’unevingtained’annéessetenaitderrièrelavitrineetmefixaitd’unefaçonsimalsainequ’unfrissonmeparcourut.Ilsétaienttouslesquatrevêtusàl’identique,unjeantroué,untee-shirtgrisornéd’unetêtedemortetunecasquettenoire.Jelesavaisdéjàvuslaveilletraînerprèsduparkingdudispensaire,ilsfumaient,appuyéscontrelemurtoutenobservantattentivementlespatientsquientraientetquisortaient.LorsqueDicketmoiavionsquittéledispensairepourrentrercheznous,ilss’étaientenfoncésdanslaruellequimenaitaucœurduPandémoniumsansunregardenarrière.

Leplusâgémedéshabilladuregard,posasonindexetsonmajeurlégèrementécartésdevantsaboucheentrouverteetremuaentreeuxsalangued’unefaçonsalacequimedonnaunhaut-le-cœur.Bonsang,j’attiraislesperverscommedesmouchesdepuisquelquetemps,toutd’abordMike,àprésentcejeunevoyou…Jemeprécipitaiverslacabineetrefermailerideaud’ungestebrusque.Jem’appuyaicontrelemurdufond,moncœurbattantlachamade,heureused’êtreàl’abri.Jequittaimonjeanetmonhaut,renfilaimalonguejupepourpreetmonhautroseetrejoignislesfillesàl’extérieur.Jefusheureusedeconstaterqu’iln’yavaitplusdetracedecesjeunesetc’estlecœurunpeupluslégerquejesuivisOphélieetMélinachezRaphaëlle,latantedeJayson.Nousnousinstallâmesànotreplacehabituelleetbienviteellevintprendrenotrecommande.

Troisframboisinesettroischocomousses,s’ilteplaît,commandaOphélie,etnelésinepassurla

chantilly!

Jevousramèneça,lesfilles,nousréponditRaphaëlle.Aufait,vousn’avezpasdenouvellesdeSasha?Çafaitbienlongtempsqu’ellen’estpasvenue!Ellenedevaitpaspassersondiplômed’esthéticiennepourbosseravectoi,Mélina?

Enfait,nousnesavonspascequ’elledevient.Depuisqu’elleafichuDickdehors,elleacomplètementcoupélesponts,larenseignaMélina.

Ahc’estvraimentdommaged’enarriverlà,murmura-t-elle.J’espèrepourellequ’ellereviendraàdemeilleurssentiments.

Elletournalestalonsmaissoninterventionavaitjetéunfroidsurnotrepetitgroupe.Pendantunmomentnousrestâmessilencieuses,chacunedenous,plongéedansnospensées.Aucunedenousneréagitlorsqu’elledéposanosmugsetnosfriandisessurlatable.

Dily,commentçasepasseavecDick?medemandasoudainMélina.

Jelaissaiéchapperuncriétranglé,memisàrougiretmetournaiverselle.

Euh…C’estassezpersonnelcommequestion,marmonnai-je,maistoutvabien,ilestgentil,affectueux,serviableet,aulit,c’estvraimentunboncoup.

OphélieetMélinameregardèrentavecstupeur.

Benquoi,c’estvrai,ilmefaitgrimperaurideauàchaquefois,m’énervai-je.Ilestvraimentdoué.

Elless’esclaffèrentdesiboncœurqueleslarmessemirentàcoulersurlesjouesd’Ophélie.

Je…jecroisqueMélinavoulaitsavoirsilefaitdetravaillersiprèsdesquartierssudn’étaitpasunproblèmepourlui,s’iln’avaitpasrenouédecontactsavecd’anciennesrelations…

Ah,ohmonDieu,gémis-je,honteuse.

Eh,tun’aspasàt’envouloir,aucontraire,segaussaMélina,çamefaitplaisirdevoirquesurleplansexuelvousêtesparfaitementcompatibles.

Sinousdevionsl’êtreplus,murmurai-je,toutelavilleenseraittémoin!

Jebusunegorgéedemonchocolat,letempsdereprendrecontenance,etlesregardaidroitdanslesyeux.

Dickvabien.Ilaimetravailleraudispensaire,serendreutile.Nouspensionsavoirbesoindequelqu’unpourl’accueil,maisDickaprisleschosesenmain.C’estluiquireçoitlespatients,illesamènedanslasalled’attente,leuroffreunchocolat,uncafé,discuteaveceuxunmoment.Ilsaittoutdesuitesilessoinsdontilsontbesoinsontd’ordremédicalouuniquementinfirmierous’ils’agitjusted’unbesoindediscuteroud’obtenirunpeuderéconfort.Ils’occupeégalementdetoutcequiestentretien,mêmesiparfoisiloubliequ’ildoitpasserlaserpillièreouderemplirlamachineàcafé…Quantàsavoir

s’ilarenouéavecsesanciensamis,laréponseestnon!Certainsd’entreeuxsontvenus,maisDicks’estcontentédelessalueravantdequitterlapièce.Ilfaittellementattentionpournepasrechuterqu’ilévitetoutcequipourraitluidonnerl’enviederecommencer.Ilnes’approchejamaisdel’armoireàpharmacie,évitelessituationsmettantenscènedesdrogués.Franchement,lesfilles,vousn’avezpasàvousinquiéter,Dickesttrèsprudent,etmoiaussi!Jesaiscequ’ilavécuetjerestevigilante,mêmes’ilnes’endoutepas!

Tun’aspasconfianceenlui?s’enquitOphélieenfronçantlessourcils

Ohsi,c’estdesautresdontjememéfie,larenseignai-je.Cesbeauxparleursquiveulentlevoirsoi-disantpourlesalueralorsquedessachetsdedroguesgonflentleurspoches,ceuxquiveulentluisoutirerdufricenéchangedubonvieuxtempspours’acheterunfixe!Heureusement,çan’estarrivéquedeuxoutroisfois.

Iladelachancedet’avoir,meditMélinaenserrantmamain.

C’estmoiquienai!Jamaisjen’auraiscruunjourtomberamoureuseetlà…Ohmondieu!m’écriai-jeenportantlesmainsàmabouche.

Quoi?Quesepasse-t-il?sursautaOphélieenregardantdegaucheàdroite.

JeviensderéaliserquecequejeressenspourDickestplusqu’unepassade.OhMerde…Jel’aime!

répétai-je,n’ycroyantpasmoi-même.

Ophélieéclataderire.

Ehbien,c’esttoujourslesprincipauxconcernésquisontlesderniersaucourant,segaussa-t-elle.

Biensûrquetul’aimes.Tucroisfranchementqu’ont’auraitaccueillieparmilesZonardssitunefaisaisquet’amuseraveclui?Dilyanna,quandtuleregardes,lalumièrequibrilledanstesyeuxpourraitilluminerunevilleentièreet,crois-moi,l’inverseestvraiégalement.Dickestfoudetoi!

Jelaissaiéchapperunrirelibérateuretc’estdanslabonnehumeurquenousprîmesnotrecollation.

Pourtant,bienvitejeduslesquitter.Ilétaitl’heurepourmoideprendremonposteaudispensaire.Jesaluailesfillesdelamain,grimpaidansmavoitureetfilaiendirectiondusud.Unefoisquejefusgaréesurleparkingdudispensaire,j’épongeailasueurquicoulaitlelongdemestempesetdescendisdemonvéhicule.MoncœursemitàbattreplusviteenrepérantDicknonchalammentappuyécontrelemur,fumantunecigarette,etunevagued’amourmesubmergea.

Pourtant,contrairementauxautresfois,ilneseprécipitapasversmoi.Sonattentionétaitaccaparéeparunpointau-dessusdematêteetjemetournaiafindesavoircequ’ilregardaitsiintensément.C’estalorsquelaterreurm’envahit.Lesquatrejeunesétaientderetouret,cettefois,ilsdéfièrentouvertementDickensifflantaprèsmoi,enmelançantdespropositionsquiauraientfaitrougirlaplusexpérimentéedes

prostituées.JemepressaiversDickquiposasamainaucreuxdemesreinsetposaseslèvresbrièvementsurlesmiennes.

Rentrons,Dick,s’ilteplaît,lesuppliai-jetandisqu’illesfixaitd’unregardmeurtrier.Ilscherchentlabagarre,c’esttout!

Jeleviscrisperlespoings.Toutenluihurlaitdesejeterdanslabataille,pourtant,ilm’entraînaàl’intérieuretmeserralonguement.Puissansunmot,ils’installaàl’accueil,levisagefermé,lesmâchoirescrispées.Lesprochainesheuresallaientêtrelonguessijenefaisaisrienpourarrangerlasituation.

CHAPITRE21

Dick

L’atmosphèreétaitpesante,mélangedetensionetdedanger.Lacanicules’étaitinstalléesurlepaysetlachaleurétaitatroce.Surtoutenapprochantdesquartierssud,commesicettedernièrealimentaitlesfeuxdel’enfer.Maisoutrelachaleurdérangeante,ilrégnaitdanslesenvironscommeunemenacesous-jacentequejenecomprenaispasmaisquimecollaitàlapeau.

Puisilyavaitcettebandequitraînaitauxabordsdudispensaire.Jeneconnaissaispascestypes,maisdepuisquelquesjours,ilsétaientlà,guettantjenesaisquoi,peut-êtreuneopportunitépourvolerdesmédocs,àmoinsquecenesoitqu’unmoyend’effrayerlapopulation.Entoutcas,moi,jenelessentaispasetjelesgardaisàl’œillepluspossible.

Celuiquimesemblaêtrelechefeutunrictusdemoquerieenm’observant,appuyécontrelemur,fumantunebanaleclope.C’estlemomentquechoisitDilyannapourfairesonapparition,superbedanssatenuecolorée.Maisjenebougeaipas,mecontentantdelesdévisager,moncorpsaussiraidequ’unmorceaudebois.C’estalorsquelessifflementsretentirent.Cesfilsdeputessepermettaientdedraguermanana.Etquediredureste,deleursinsinuations,deleurspropositionsquimedonnèrentenviedemeprécipitersureuxetdelesfrapperencoreetencorejusqu’àcequ’ilssoientdansl’incapacitédeprononcerlemoindremot.

Dilyannasejetadansmesbras.Jeglissaiunbrasautourd’elleetposaimeslèvressurlessiennes.Jevoulaisquecesbâtardscomprennentqu’elleétaitàmoi,maisvisiblementcen’étaitpassuffisant.OuilsneconnaissaientpaslesZonards,ouilsétaientsuicidaires,maisilscontinuaientleursréflexionsdeplusenplusgraveleusesetjen’étaispascertaindeparveniràgardermoncalme.

Rentrons,Dick,s’ilteplaît.Ilscherchentlabagarre,c’esttout!

Dilyannadevaitavoircomprisquej’étaisauborddel’explosion.Desenviesdemeurtresseglissaientdansmonespritmaisjeparvinsàcontenirmonagressivitéenlasuivantàl’intérieurdudispensaire.

J’étaistropencolère,tropfurieuxpourm’occuperd’elle.Cequecesgarsavaientditàsonsujet…Jeserrailesdentsàenavoirmaletm’installaiàl’accueilaprèsunedernièreétreinte.Uneboufféed’air

fraisfrappamonvisagebrûlantetjeprisuneprofondeinspiration.Dilyannaavaitfaitinstallerlaclimatisationdansledispensaireetl’accueilétaitaussifraisqu’unréfrigérateur.

Çaira?medemandaDilyannaensoupirant.

J’opinaid’unlégercoupdementon,c’étaitlaseulechosequejepouvaisfairepourl’instant.Pourtant,ellenes’éloignapas.Elleseglissaderrièrelebureau,secollacontremoietposasatêtecontremontorse.C’étaitlapremièrefoisqu’onsepermettaitungesteintimedansledispensaire,lapremièrefoisquenousmêlionsvieprivéeetvieprofessionnellemaiselleenavaitbesoin…etmoiaussi.Jem’enivraidesonparfumsiféminin,desesrondeurs,desadouceuretpetitàpetit,jeparvinsàrecouvrermon

calme,assezpourluicaresserlajoueavectendresse.

Jesuisdésolé,maisdelesentendre…

Cenesontquedescrétins,murmura-t-elleenposantseslèvressurlesmiennes.Ilsveulentserendreintéressants,c’esttout!

Jel’étreignisencoreunmoment,m’accrochantàelle,commes’ilyavaiturgence,commesitoutàcoupunnuagenoirplanaitau-dessusdenotrerelation.

JesuisalléeavecMélinaetOphéliefairelesboutiques,s’exclama-t-elle,etj’aitrouvéunpetit

coordonnésexy…tuvasentomberraide,moncher!

Ça,jedemandeàvoir!

Imagine,dunoir,deladentelle,delatransparenceet…desporte-jarretelles,susurra-t-elled’unevoixrauque.

Putain,Dily…gémis-jeenmetortillantsurmonsiège.

Tuasunproblème?

Àpartlefaitquejebandecommeunâne?Non!maugréai-je.

Pourlapunirdememettredanscetétat,jeglissaimamainsoussajupeetdoucementremontaidesachevilleàsacuisse.

Dick,jet’enprie,mesupplia-t-elleensetendantversmoi.

Désolé,mapuce,maisiltefaudrapatienterjusqu’àcesoir!Despatientst’attendent,murmurai-jeenluiindiquantunedesprostituéesduPandémoniumquinousobservaitenriantsansaucunediscrétion.

Ohmisère,selamentaDilyannaenenfouissantsatêteaucreuxdemonépaule,jesuisconfuse.

Oh,vousembêtezpaspourmoi!s’exclamalafille,j’aitrouvéçatrès…chaud!Ouais!Etsivousvoulez,jepeux…participer!

Alorslà,horsdequestion!s’écriamacompagne.Pastouche!

Jalouse?!ironisalacatin.

Extrêmementpossessive,oui!renchéritDilyannaenmejetantunregardférocecommesij’étaisl’uniqueresponsabledelasituation.

Quantàmoi,jemelaissaiallerdanslefonddemonfauteuil,unsouriresurleslèvres,ressentantcettefiertétoutemasculinequ’éprouventlesmâleslorsquedeuxfemellessedisputentsesfaveurs.JelesabandonnaiàleurdiscussionlorsquejevisMaïté,uneserveused’undesbarsduPandémonium,approcherenhésitantdel’accueil.ElleétaitaccompagnéedesonfilsTimmie.Cedernierétaittoutpourelleetmalgrélefaitqu’ilsvivaientenpleincœurdesenfers,elletentaitpar-dessustoutdeleprotégerde

cetenvironnementnéfaste.

Bonjour,Maïté,lasaluai-jeenallantàsarencontre.

Dick?DickCorbins,c’estvraimenttoi?s’exclama-t-elleenmeserrantdanssesbras.Oh,jesuissicontentedetevoir!Alorsc’estvrai,l’AbbéPierredesZonardsestvenuàtonaide?

Oui,ilm’asauvélavie.Sanslui…admis-je.Maisc’estaussiàtoiquejeledois,situn’avaispasenvoyéSashapourlerencontrer,jeseraissûrementmortd’uneoverdoseàprésent.

Oui,maisjesuisdésoléepourtasœur,j’ignoraisque…

Maman,j’aimal,l’interrompitsonfilsquiétaitblêmeàcausedelasouffrance.

Quesepasse-t-ilavecTimmie?luidemandai-je.

IlseplaintduventredepuisplusieursheuresetaucunmédecinneveutsedéplacerauPandémonium.

Riennechangerajamais,marmonnai-je.Dily,sais-tusiMaxvientaujourd’hui?

Ilnedevraitplustarder,jepense,pourquoi?

Jesuspecteuneappendicite,maisjenesuispasmédecin,luidis-jeenfourrageantdansmescheveux.

Voilàcequenousallonsfaire,énonçaDilyanna.Jevaist’emmenerdanslebureauduDoc’,tuvast’allongeretmoijevaisappelerMax.Quantàvous,poursuivit-elleàl’intentiondelaprostituée,venezavecmoi,jevaisvousdonneruntraitementetquelquesconsignesd’hygièneàrespecter!

TandisqueDilyannagéraittoutcepetitmonde,jenepusm’empêcherderetourneràlaporte.Labandedejeunesétaittoujoursappuyéecontrelemuretquidélimitaitleparking.Ilsfumaient,parlaienthaut,toutenjetantdetempsentempsdesregardsgoguenardsdansmadirection.

Ducoindel’œil,jevisMaïtésedirigerverslasalled’attenteetenressortirquelquesminutesplustard

avecquelqueslivres.Voyantquejenebougeaispas,ellevintmerejoindreetposasamainsurmonépaule.

Cesquatre-làfontpartiedesChicanos,merenseigna-t-elle.IlssontarrivésilyaenvironunanauPandémonium.

Ilsfontdansquoi?luidemandai-je.

Toutcequipeutleurrapporterdufric!Ilsorganisentdesparissurdescombatsderues,serventd’hommedemainsauxgrosdealers,ramassentlesfillespauméespourlesrevendreauxmacs!C’estcegenredegarsquoi!Pourquoi,ilst’inquiètent?

Disonsqueçamefaitunpeuchierdelesvoirtournerautourdudispensaire!Ilsmijotentquelquechose,çac’estsûrmaisquoi?

Teprendspaslatête,Dick.Ilssontsûrementlàpourlesmédocs,tusaiscommentçamarche!Ilsvontsurveillerl’endroitpendantquelquesjoursetaumomentoùvousvousyattendrezlemoins,ilsforcerontleslieuxpourvolercequ’ilspourrontrevendre.

Etmerde!Jepeuxmêmepasdired’appelerlesflics,parcequ’ilsn’ontencoreriententé!

m’énervai-je.

Nefaispasdeconnerie,Dick!gronda-t-elle.Tut’esenfinsortidecettefossequ’estlePandémonium.Nelaissepastacolèreoutapeurt’yrenvoyer.Ceuxquiontpayécesmecsseraientbientropheureuxdetevoirreplonger.

Maïté,quevoulais-tudiretoutàl’heureàproposdeSasha?luidemandai-je,unpeuanxieux.

ElleouvritlabouchemaisfutinterrompueparMaxquiarrivaitprécipitamment.

Bonjour,jesuisledocteurMaximilienBlanchet,vousêteslamamandupetitTimmie,c’estbiença?

…

TandisqueMaxentraînaitMaïtéàl’intérieur,jeretournaidanslasalled’attente.JevérifiaisqueledistributeurétaitencorepleinlorsquejesentislamaindeDilyseposersurmonavant-bras.

Jen’aipaspum’empêcherd’entendretaconversationavecMaïté,chuchota-t-elle.Alorsellet’aaidéàt’ensortir,elleaussi?

Enfait,jepassaismesjournéesdanslebaroùelletravaillait.Elleavumadescenteauxenfersetlorsqu’elleacomprisquejen’allaisjamaism’ensortirtoutseul,elleadiscutéavecSasha.ElleavaitentenduparlerdeJonas.C’estcommeçaqu’elleluiaconseilléd’allerlevoiretqu’ilestentrédansmavie.SansMaïté,sansmasœurquis’esttoujoursbattuepourmoi,sansJonas,jeneseraispluslàaujourd’hui,jen’auraispaseulachancedeteconnaître,departagerlesbonsetlesmauvaismomentsavectoi.

Oh,Dick,murmura-t-elle.

JeneseraijamaisaussiparfaitqueJo’,aussibeauqueLucky,ouencoreaussiintelligentqueLéo.

Maisjepeuxtepromettreunechose,DilyannaDeMayeur,c’estquepersonnenet’aimeraaussifortquejet’aime!

Ellesejetadansmesbras,riantetpleurantàlafois.

Jet’aimeaussi,Dick,ohsitusavaisàquelpoint!

Nousrestâmesenlacésunmoment,lesyeuxfermés,appréciantsimplementlemomentprésent.

Etmerde!grondai-jesoudain.Jem’étaispromisdefaireçabien,avecdesbougies,uneambianceromantiqueetvoilàquejetelâcheçacommeçà,àl’endroitoùl’onbosse.Quelidiot,jesuis!

Dick,lemomentétaitparfait,jelechériraitoutemavieetsachequecetamourquejeressens,làaufonddemoi,c’estpourtoi!Uniquementpourtoi!

Unactevalaitparfoismieuxqu’uneparole…Jel’embrassai!

CHAPITRE22

Dilyanna

ILM’AIMAIT!OhmonDieu,jeneparvenaispasàycroire.Encorequelquesheuresplustard,alorsquecesmotstournaientenboucledansmatête,ilfallaitquejemepincepourréaliserquejen’étaispasentrainderêver,quec’étaitbienlaréalitéetqueDickvenaitbiendem’avouersonamour.J’étaissurunnuage,jeplanaistelunaigleroyalau-dessusdesmontagnesrocheuses,j’étaistoutsimplementaucombledubonheur.

Cesmotsm’avaienttouchéeenpleincœuretlorsqu’ils’étaitplaintdenepasavoirfaitçadanslesrègles,jefusencoreplusémue…Cesmotsmetransperçaienttelleunelameetjesavaisquejamaisjen’oublieraissadéclaration…Ilm’aimait,moi,DilyannaDeMayeuravecmataille42,meskilosentrop,mabonnehumeur,moncaractèreparfoisemporté.Ilm’aimaitavecmesquelquesqualitésetmalgrémesnombreuxdéfauts…Toutcommej’étaisamoureusedelui.

Ilallaitfalloirquenousfêtionsça,àlamaisontouslesdeux,avecunebouteilledechampagne,deschocolats,desbougies,del’encensetlui,totalementnudanslelit!Jefrémisàcettepenséeetmefustigeai.Ilétaitdéjàtardetj’avaisencoredesinstrumentsmédicauxàstériliseravantderentrer.Dicks’étaitinstallédanslapiècedereposetregardaitunmatchàlatéléenattendantquejetermine,lesécouteurssurlesoreillespournepasgênerlespatients.Nousavionstravaillésansrelâcheetnousn’avionsqu’unehâte,prendreunpeuderepos.Àcausedel’absencedeMike,nousfermionsauxalentoursdeminuit,pourrouvrirverssixheures.Heureusement,Maxnousaidaitlepluspossible,maisj’allaisdevoirprendreladécisiond’embaucherdupersonnelsupplémentaire,certainementunautremédecinetunautreinfirmier.

J’enétaislàdemesréflexionsquandj’entendisunbruitdepasdanslehall.

HO,ilyaquelqu’un?

Jemelevaiprécipitammentetmedirigeaiversl’accueil.Unjeunehommehabillédefaçonrecherchéetenaitdanssesbrasunejeunefemmequejereconnusaussitôt.Ils’agissaitdelajeunefemmequim’avaitmiseengardequelquesjoursavantl’ouverturedudispensaire.

Jem’appelleDilyanna,jesuisinfirmière,ques’est-ilpassé?demandai-je.

C’estunedemesfilles,grondalemac.Elleétaitavecunclientlorsqu’ilasortiuncouteau.Elles’estdébattueetaétéblesséeaubras.

Suivez-moijusqu’àlasalledesoins!luiordonnai-jeenleprécédant.

Elleaperdupasmaldesang,maisjepensequ’ils’agitplusd’uneestafilade.Çanécessiteracertainementquelquespointsdesutureet…

Vousêtesmédecin?Infirmier?lecoupai-je.

Non!

Alorslaissez-moifairemonboulot!Àprésent,veuillezsortirquejepuissem’occuperdecettejeunefemme.

Voussavez,ironisa-t-il,toutcequisetrouvesoussarobe,jel’aidéjàvu!

Alorstantmieuxpourvous,maisici,danscettepièce,c’estmoiquicommande!grondai-je.Dehors!

Riennem’horripilaitplusqu’unsouteneurvoulantfairecomprendrequelafilleluiappartenait,qu’elleétaitsa…marchandise.Jelevisladéposersurlacivière,sesaisirdesonmentonetlagratifierd’unbaiseràlafoispossessifetrageur.

Jereviensdansuneheure!mesignala-t-ilavechauteur.Etpaslapeinedefairedesignalementauxflics,cequisepassedanslesquartierssudrestedanslesquartierssud!

Alorsçatombebien,susurrai-je,queledispensairesetrouveàlafrontièreainsicequisepasseàlafrontièreresteàlafrontière.

Cefutmoiàprésentqu’ilsaisitparlementonpourmeforceràleregarder.Jenebaissaipaslesyeuxmaisj’eussoudainl’impressionqueceluiquisetrouvaitenfacedemoin’étaitpasuninconnu.

FaisattentionàtoiDilyanna,tunevoudraispasqu’unecertainephotodetoiréapparaissesurlesréseauxsociaux,non?

Jean-CharlesDelaMarnière!m’exclamai-jeensecouantlatête.Alorsça,sijem’attendaisàuntrucdecegenre.Alorsondonnedansleproxénétismeàprésent?Jecomprendspourquoituneveuxpasquej’appellelesflics,çaferaittrop…désordreauseindel’Élite,pasvrai?Alorsunpetitconseil,non…

deux!Tumelâchesettun’essaiesplusjamaisdemefaireduchantage!

Ouquoi?

Oudèsquetuaurasledostourné,j’appellerailapressepourleurfairepartdeton…investissementdanslesaffairesduPandémonium…Alors?

Salegarce!gronda-t-ilenlevantsamain.

Jicé,çasuffit,marmonnalafille.Laisse-lamesoignerqu’onpuissesetirerd’ici!

Ilfitunpasenarrièreetpointasonindexversmoi.

Jet’aiàl’œil,memenaça-t-il.

Etmoiaussi,crétin!criai-jetandisqu’ilquittaitlapièce.

Jemeprécipitaiverslajeunefemmeetplongeaimonregarddansdesprunellesd’unvertsilimpidequ’onauraitditdujade.

Commentvousappelez-vouset…

Jenesuispasicipourfaireamie/amieavectoi,justepourmefairerecoudrelebrasafinquejepuissemebarrerd’icietreprendremonboulot!

Jepensequepourcesoirlespassessontterminées,luidis-jegentimentenretirantdélicatementsarobequicollaitàlaplaie.

Ça,rétorqua-t-elle,c’estàmoid’enjuger!

Lesangavaitséchéetelleenavaitvisiblementperduengrandequantité.

Iltefaudraitunetransfusionet…

Oharrête,bonsang!Tuprendsunfil,uneaiguille,ettupiques,tusaisfaireça,non?

Laplaieestmalsituée,dis-jeenprenantsurmoipournepasm’énerver.Mepermets-tud’appeleruncollègueafindem’aideràmaintenirlaplaieferméepourquejepuisselarecoudreproprement?

Uncollègue…susurra-t-elleenpassantsalanguesursalèvresupérieure.Hommedonc…Marié?

Non,maisilm’appartient,alorsbaslespattesoujerisquedemetromperetdemuselertajoliebouche.

Ellefitminedelafermeravecunecléetdelajeterpar-dessussonépaule.J’enprofitaipourallerchercherDickquisomnolaitdevantlatélé.

Quesepasse-t-il,mapuce?demanda-t-ilenretirantsesécouteurs.

J’aibesoind’aide,uneprostituéevientdeseprendreuncoupdecouteaudanslebras,etilfautquejelarecouse,luidis-jeensoupirant.

Quefaut-ilquejefasse?s’enquit-ilenselevantetens’étirant.

Quetum’empêchesdecommettreunmeurtre,marmonnai-je.

Quoi?

Laissetomber!

ÀpeinenouseûmesfranchilaportedelasalledesoinsquelafillebonditsursespiedsenregardantDickcommes’ilallaitl’agresser.

Putain,maisqu’est-cequetufichesici?s’énerva-t-elle.

Sa…Sasha?balbutiaDick.Je…jecroisquemonespritm’ajouédestours…Merde,j’aicruqueDilym’avaitditqu’ilyavaituneprostituéeet…

Ellelecoupad’unrirequisonnafauxàmesoreilles.Jen’enrevenaispas,alorscettepesteétaitlasœurdeDick,ma…belle-sœurensomme?Ouah,bienvenuedanslafamille!

Vousréglerezvoscomptesaprès,pourl’instant,ilfautfermerlaplaie!dis-jed’unevoixforteetcalme.

Sasha,jet’enprie,dis-moicequisepasse?lasuppliaDickquiétaitàprésentaussiblancqueledrap.

Oh,tacollèguenet’apasexpliqué?Jefaisaislaretapesurletrottoir,j’ailevéunclient,ilavaitunpeutropbu,ilasortiunelameetm’aplantée,findel’histoire.

Trottoir…client…balbutiaDick!

Çayest!s’exclama-t-elle,rageuse.Iladenouveaugrilléunneurone!Moi,écarterlescuissescontredufric,reprit-elleensemoquantetenluiparlantcommeundébile.Moiêtreuneputain!

Non…non…gémitDickensetirantlescheveux,c’estuncauchemar!

Ohnon,grinça-t-elle.Bienvenuedanslaréalité,frangin,dansmaréalité!

Maistudisaisquetutravaillais,quec’estgrâceàcetargentqu’onavaitpuselouerl’appartchezlesLambdas!

Pauvreabruti,cracha-t-elle.Mamanavaitraison,tun’esriend’autrequ’undébileprofond!

Jevoyaislemondedel’hommequej’aimaiss’écroulerautourdeluietjenepouvaisrienfairepourévitercettecatastrophe,pire,Sashan’avaitdetouteévidencepasfinidecrachersonvenincarellepoursuivit,hargneuse.

PauvreDickensquiatoujourspréférésevoilerlaface.T’es-tuunjourdemandéd’oùvenaitl’argentquejetedonnaispourachetertesdoses?As-tuseulement,danstoncerveaudétraqué,comprisquecen’était

pasnormal,quejenepouvaispassortircefricd’unchapeaucommel’auraitfaitunmagicien?

C’estàcausedetoisij’aicommencéàmeprostituer,àcausedetoisij’ensuislàaujourd’hui…PauvreDickenssifaiblequ’ils’estlaissétenterparlesparadisartificiels…Tuadoraisçahein,planer?Oublierpendantunbrefinstantquenosparentsnet’appréciaientpas,quenotremèret’avaitenhorreur,toi,letaré,ladoublureimparfaited’unfrèrequ’elleavaitmissurunpiédestal.

Stop!Arrête!hurla-t-il,leslarmesruisselantsursesjouesblêmes!

J’avaisseizeanslorsquej’aivendumoncorpspourlapremièrefoisparcequejesavaisqu’iltefallaittoujoursplusd’héroïne,toujoursplusde…sensations…Tusaisl’effetqueçafaitdet’allongersurunlit,d’écarterlescuissespendantqu’unhomme,n’importelequel,s’enfonceentoi…

Bonàprésentçasuffit!criai-jeenvoyantDickserecroquevillersurlesoletsebalancerd’avantenarrière.

Ohnon,cen’estpasfini!éructa-t-elle,follederage,ens’avançantverslui,poingsserrésmalgrésablessure.J’aiquittémesparentspourlesuivredanslaruecarjecraignaispoursavieetqu’est-cequ’ilenafait?J’aienchaînélespassesenleregardantsedétruire,envoyantsonespritseconsumeràpetitfeuaupointqu’iln’arrivemêmepasàfairelesgestesduquotidiensanssespetitesfiches!

Non…non…non…gémissaitDicktandisquemeslarmescoulaientdeconcertaveclessiennes.

Mamanavaitraison,répéta-t-elle.Tun’esqu’unecopiedeDickson,uneimitation,unedoublureimparfaite.C’estluiquiauraitdûvivreettoimourir!

NON!!!!

Cettefois,ils’enfuitsansunregardenarrière,titubantcommeunivrogne.Quantàmoi,jemeretournaietgiflaiSashaàlavoléeavantdemesaisirdemonportable.

Jo’,onaunproblème,Sashaestici,elleestblessée,maiscen’estpasleplusimportant.ElleavuDicket…Merde,Jo’,ilestparti,il….Jenesaispascequ’ilestcapabledefaire!Ellel’adétruit…Jel’aivudanssesyeux,ellel’acomplètementdémoli!

JeraccrochaiunefoisqueJonasm’eutassuréqu’ilpartaitàsarecherche.JemetournaiversSashaetvisqu’ellesanglotaitdoucementmaisjen’avaisaucunepitiépourelle.Cequ’elleavaitditàDickens…

jamaisjenepourraisluipardonner.Sansunmot,jeposaisonbrassurlereborddelatableenmétaletrecousussonbrassansunmot,lesmâchoirescrispées.

Je…jesuisdésolée,murmura-t-elledansunsouffleàpeineperceptible.

Maisça,jen’enaiabsolumentrienàfaire.Tuasblessél’hommequej’aimeetpeut-êtreirrémédiablementetça,tuvois,c’étaitl’erreurànepascommettre!

Tul’aimesréellement?Malgréses…

Situprononceslemot«défauts»,jet’étrangleetjen’aipasbesoindeterappelerquelesZonardsnefontpasdemenaces…

Ilsnefontquedespromesses,répondit-elleenselevant.Mercipour…ça.

Paslapeinedemeremercier,crachai-je,etsiçadevaitsereproduire,passetonchemin,jeseraiscapabledetelaissercreversurlepasdelaporte!

Surcesmots,jeluitournailedosetlalaissaisedébrouiller!Pasdéontologique?Eneffet!Est-cequejem’envoudrais?Sûrement!Est-cequej’agiraisdelamêmefaçondanslesmêmescirconstances…

Sansaucundoute!Maispourl’instant,j’étaistropivrederage.Jemehâtaidetoutrangerlorsquej’entendislavoixdeSashaetcelledeJean-Charles.Lesouteneurdel’ÉliteetlaCatinZonarde!

Pathétique!

Quelquessecondesplustard,laportedel’entréeserefermaitetunsilencebienvenum’enveloppa.

J’étaisplongéesiintensémentdansmespenséesquejesursautaiviolemmentenentendantdubruitdansl’entrée.Jem’yprécipitaidansl’espoirqueDicksoitderetourmaisceuxquim’attendaientn’avaientriendebienveillant,aucontraire.Ils’agissaitdesquatrejeunesquimesuivaientdepuisquelquesjours,quiavaientdéfiéDickquelquesheuresplustôtetquimefixaientcommesij’étaislaproieeteuxleschasseurs.

Jen’avaispasremarquéquedeuxd’entreeuxs’étaientdéplacéssubrepticementpourvenirmecouperlaroute…Jenevoyaisqueleslamesquibrillaientàlalumièredesnéons.

Salut,petiteinfirmière,quedirais-tuqu’onjoueaudocteurtousensemble?Nousavonsdebellesetgrosses…piquousesàt’enfiler.Qu’est-cequet’endis?

J’endisaisqu’ilmefallaithurler,quejesavaisquelajournéeseraitlongueetpourrie,maisaumomentoùj’ouvrislabouche,unemainmebâillonnaetlorsquel’und’euxmefittombersurlesol,maseulepenséefutpourDick…Dickquiallaitencoreunefoissouffrir,j’espéraiseulementquecenesoitpasluiquidécouvriraitmoncorps…

CHAPITRE23

Dick

Jemesentaismaletc’estenvacillantsurmesjambesquejequittailedispensairecommeunlâche.

J’avaisfui,àlafoispourneplusrecevoirtoutcepoisonqueSasham’envoyaitenpleinetronchemaissurtoutpourneplusvoirleslarmesdanslesyeuxdeDily.Jemefaisaishorreur,toutescesrévélationsquem’avaitassenéesmasœurvenaientdememettreKO.

Jen’eusqueletempsdeplongerderrièreunbuissonpourvomirtoutemapeine,mondégoûtdemoi-même.Jerendisàlanatureseptansdemensonges,uneviedesouffrance,unpasséquej’auraisvoulueffacer,unprésentquej’auraisvouluoublier,etunfuturquejen’étaismêmepluscertaind’avoir.Leslarmesruisselaientsansdiscontinuersurmesjoues,lamorvemecoulaitdunez,maisj’étaisendessousdetoutça…Jevenaisdemontrerlepiredemoi-mêmeàlafemmequej’aimais…J’avaistoutperdu…Jen’avaisplusrien…

J’erraiauhasarddesrues,laissantcenuagenoirquimesuivaitautrefoisrecouvrirmespensées,monesprit,prendretoutelaplacedansmoncœur,dansmonâme…J’auraisvouluquecettesouffrancecesse,quejenevoieplusenfermantlespaupièreslevisageravagédeDilyanna,quejen’entendepluslarancœurdanslavoixdemasœur.Ellequej’avaistantaiméeetquej’aimeraistantdétester…

Jenesaispascommentj’arrivaiàcetendroit…Latoursud,cellequiàlabasedevaitservirderelaispourlesantennestéléphoniquesetquin’étaitrestéequ’unblocdebétondénaturantlepaysage,hauted’unevingtainedemètres,d’environquatremètressurquatreetdontlesommetétaitaccessiblepardesdizainesdemarches…Elleavaitétéabandonnéeauprofitd’unautrerelais,mieuxdisposé,sefondantplusdanslepaysageetellen’étaitrestéequ’unersatz,unepâlecopie…Elleetmoinousressemblions,imparfaites,neparvenantpasànousfondredanslamasse,différents…

Ilfaisaitsombreàl’intérieurlorsquejememisàgravirlesmarchesetjetremblaisdefroidalorsquelatempératureextérieuredevaitencorefrôlerlesvingt-deuxdegrés.Iln’yavaitaucunbruit,onauraitditquelesilenceétouffaittouslessonsalentour,mêmelebruitdemespas.Jegrimpaietgrimpaiencorepourfinirparpousserlaportequimenaitsurletoitdelatour.Latour…monumentunpeudeguingoisquetoutlemondecraignaitunjourdevoirs’écroulerlorsd’uncoupdeventunpeuplusviolent,s’écraserausolsansespoirdelevoirunjourrebâticaraprèstout,ilneservaitàrien…Iln’yavaitaucundoute,latouretmoiétionspareils.Jemesentaiscommeçamoiaussi,ballotéaugréduvent,arrachéàmapetitevietranquilleparunouraganappeléSasha.Ellem’avaitdéraciné,arrachédeterre,etj’attendaisleprochaincoupdeventafinqu’ilm’emportesiloinqu’iln’yauraitpourmoiaucunretourpossible.

Jenesaispascombiendetempsjerestailà,deboutàquelquescentimètresdubordalorsquemesjambestremblaient,semblaientmouléesdansducoton…Jesavaisqu’ilnem’enfaudraitpasbeaucouppourmevoirprendremonenvol,pourquej’écartelesbras,m’imaginantvoler,etquejenemetransformeenunecréatureéthérée,sansconsistance…sansvie…Lesautdel’ange…métaphoresidéfinitiveenfindecompte.Jejoignislesjambes,écartaimesbrasaumaximumet,fermantlesyeux,medemandaiunmomentcequejeressentiraissij’essayaisdeprendremonenvol…etm’imaginaiainsidébarrassédetousmessoucis,n’étantplusunfardeaupourpersonne.

C’estalorsquejel’entendis,cesoufflecourtderrièremoi,cehoquetdesurprise,cettecraintedanssavoix.

Putain,Dick,nefaispaslecon…

Jepoussaiunprofondsoupir,nesachantpassijedevaisbénirlesortpourm’avoirenvoyéJonasoulemaudirepournepasm’avoirpermisd’enfinirunebonnefoispourtoutes.Mesbrasretombèrentlelongdemoncorps…

Allez,Dick,viens,parlonstouslesdeux…

Lesmotsqu’ilprononçapercèrentlacouchedenuagesquienveloppaitmoncerveaumaisj’étaisencoreincapabledeparlerpourl’instant.Jeparvinstoutefoisàfaireunpasenarrière,puisunautreavantdemelaissertomberausol,lesjambesrepliéescontremontorse.Jonass’installaàmescôtésetnousrestâmeslàunmoment,observantleslumièresdelavillequidessinaientdedrôlesd’esquissesaveccommefonddetoileuncielsansnuage.

Çacraint,mec!dis-jeenfinentremblant.

Ouais,c’estcequej’aicrucomprendre,secontenta-t-ilderépondre.

Commentsefait-ilquetusoislàetcommentas-tufaitpourmetrouver?

Dilyanna.Ellem’aappelé,ellecraignaitquetunefassesuneconnerieetjemesuisrappelédecetendroitoùtuvenaissouventavant…

Est-cequetusavais?chuchotai-je.

Jenesaispasdequoituparles,Dick,soupiraJonas.

Alorsjeluidéballaitout,monpassé,monaffrontementavecSasha,l’horreursurlevisagedeDilyanna,seslarmescoulantdeconcertaveclesmiennes.Jememisànu,totalementetlentement,lefaitdeparleravecJonaspermitaunuagedesedissiperunpeu…Biensûr,iln’avaitpastotalementdisparu,maisaumoins,jepouvaisalignerdeuxpenséesàlasuite.

Alorslesavais-tu?redemandai-jeunefoisquej’eusterminé.Étais-tuaucourantquemasœurfaisaitlaputainpourmepayermesdoses?

Non,jel’ignorais,mêmesijemesuissouventposélaquestion,avoua-t-il.

Tuvois,c’estpourçaquetuserastoujoursplusintelligentquemoi,parcequetoi,turéfléchis,tuteposesdesquestions,moijenel’aipasfait,àmoinsquelefaitdenepassavoirétaitencoreunefoispourmoiunefaçondemecacherlatêtedanslesable,ainsijenepouvaispasm’envouloir.

Arrête,Dick,nedispasdeconneries.Commenttuauraispusavoir?Sashanousamentiàtous…

Ellenousdisaitqu’elletravaillaitenalternanceavecsescours,pourquoil’aurions-noussoupçonnéed’untrucaussidingue?

C’estàcausedemoi,demoi!grondai-jeenmefrappantletorsedemonpoingfermé.

Cen’estpastoiquil’asmisesurletrottoir!s’énervaJonas.C’estsonchoix,c’estellequiapriscettedécision,cen’estpastoiquileluiasdemandé…

Si,ledétrompai-je.C’estcequisepassaitàchaquefoisquej’étaisenmanque,quejehurlais,quejelasuppliaisdemedonnerunedose,quejevomissaismestripes,qu’ellemenettoyaitcommeunemèrelefaitpoursongosse.Jesuisplusâgéqu’elleetc’esttoujoursellequiaveillésurmoi.Jedéçoistouteslespersonnesquicomptentpourmoi,mamère…Sasha…Dilyanna…

Maisqu’est-cequeturacontesbordel!grondaJonas.D’aprèslepeuquetuviensdemedire,tamèren’estriend’autrequ’uneputaind’égoïste.QuantàSasha,cen’estpastoiquil’obligesàcontinuerdeseprostituer.Çafaitprèsdetroisansquetuasrepristavieenmainalorsnelalaissepasdistillersajalousieetsarancœurdanstesveines.Tuvauxmieuxqueça,monfrère!QuantàDilyanna,jenevoispasdequoituparles.

Elleétaitlà,Jo’,gémis-je.ElleaentenduSashaparlerdemoicommesijen’étaisqu’unhandicapémental.Elleacomprisquec’étaitàcausedemoiqu’elleenétaitarrivéeàseprostituer.Commentpourrais-jelaregarderenfaceàprésent?Elledoitaumieuxavoirpitiédemoi,aupiremehaïret…

Bonsang,cettefillet’aime,Dick.Lorsqu’ellem’aappelé,elleétaitivrederage,jel’aientenduausondesavoix.

Touteslespersonnesquej’aimefinissentparmedétester,murmurai-je,sentantunefoisencoreleslarmescoulersurmesjoues.Mesparents…Sasha…

Dick,mecoupaJonas,Dilyannan’estpascegenredefille,ellesaitfairelapartdeschoses,crois-moi.Ellenet’envoudrapaspourdeserreursdejeunesse.Lapreuve,n’a-t-ellepaspardonnéàOphélie?

Pourtant,elleauraitpuluienvouloir,maisnon,elleatrouvéassezdeforceetd’amourenellepourluipardonner.Crois-turéellementqu’ellevaterejeterparcequetuasfaitpreuvedefaiblesse?

Jenesaispas,murmurai-je,n’osantespérer,decraintedesouffrirunenouvellefois.

Alorsvoilàcequenousallonsfaire,jevaisteramenercheztoiafinquetuaiesuneconversationavectachérieetcommeçatuverrasquej’airaison.

Jehaussailesépaules…Masituationnepouvaitpasêtreplusdésespéréequ’ellenel’étaitdéjà.Pasunmotnefutprononcésurletrajet,maisquelquechoseaufonddemoimetitillaitetjemaudisunenouvellefoismonespritquimejouaitdestours.JefusétonnéenarrivantaulacdevoirquetoutétaitferméetquelavoituredeDilyannan’étaitpasgaréeàsaplacehabituelle.

Quelleheureest-il?demandai-jeàJonasquisortitsonportableenfronçantlessourcils.

Presquequatreheures,marmonna-t-ilenjetantuncoupd’œilautourdelui.C’estbizarre!

Quoi?lepressai-je.

TouslesZonardsm’ontenvoyédesmessagespoursavoirsijet’avaisretrouvé,maisriendeDilyanna.

Moncœursombradansmapoitrine…Ainsi,laplusgrandedemescraintesétaitdevenueréalité…

Dilyannam’avaitquitté…Jeregrettaisoudaindenepasm’êtreenvolépourneplusressentircettesouffrancequi,déjà,metétanisait.C’estlemomentquechoisitJonaspourm’attraperparletee-shirtetmeplaquerviolemmentcontreunarbre.

Arrête!hurla-t-il!Çasuffit!Onvarentrer,tuvasfaireletourdelamaisonpourvérifiersielleestlàounon!Sicen’estpaslecas,appellesesparents!Pendantcetemps-là,j’essaiedelajoindresursonportableet…

Àquoibon?rugis-jeententantdemedébattre.Jesavaisqueçafiniraitcommeçaet…

Dick,faiscequejetedisbordel.Maintenant!

Letondesavoixm’inquiéta,etjelefixaiàmontour,prisdepanique.

Quoi?Qu’est-cequisepasse?Jo’…

Cen’estpasnormalqu’ellen’aitpasappelé.Dick,elleétaitseule,enpleinenuitauPandémonium…

Je…Faiscequejetedis!

Unevaguedeterreurm’envahit.C’étaitçaquimetitillaitdepuismondépartdelatour.J’avaislaissémananaseuleaumilieud’unniddeserpents.J’entraidanslamaisonenhurlantsonnomtoutensachantdéjàqu’elleneseraitpaslà…Pareillorsquej’appelaisonpère.Iln’avaitpaseudenouvelles.JerejoignisJonasetsansmêmenousconcerter,nouspartîmesencourantversledispensaire.Desimagestoutesplushorribleslesunesquelesautrestraversèrentmonesprit.Commentavais-jepufairepreuved’autantd’égoïsmeetlalaisserseule?

Lorsquenousarrivâmesdevantledispensaire,jevislavoituredeDilyannaquiavaitétévandalisée,laportedudispensaireouverte…jemeprécipitaietrepoussaiJonasquitentaitdemeretenir…Jen’avaispasprévulascènequim’attendait…Dilyannarecroquevilléesurlesol,sajuperelevéejusqu’àson

ventre,sontee-shirtmaculédesang,arrachéensonmilieu,sesjolisseinsàlavuedetous…

Jeneréalisaiquejehurlaisquelorsquemagorgesemitàmebrûler…Qui?Quiavaitpufaireunechosepareille?Jemelaissaitomberàgenouxprèsdesoncorpsmartyrisé,n’osantmêmepasvérifiersi…Non,ellenepouvaitpasm’avoirlaissécommeça.Unefoisdeplusjen’avaispasétéàlahauteur.

J’entendisJonaspasserdeuxappels,maisjen’étaisdéjàpluslà…Monespritvenaitdelâcher.

LesUrgences?JonasDrioneau,envoyezuneambulanceimmédiatementaudispensaireàlafrontièredesquartierssud,l’infirmièreDilyannaDeMayeuraétéagressée…

Sophie,c’estJonas,ilfautquetuviennesaudispensaire,lacopinedeDickaétéagressée…Jecrois…Jecroisqu’elleaétéviolée!

CHAPITRE24

Dilyanna

Desbruits…Descris…Deshurlements…Unevoixfamilièrequipercemoninconscience…

L’oubli…

Dessirènes…Desflashsbleus,rouges…Desmainsdoucesquimesoulèvent…Unpouls,jesuisvivante…Jenem’yattendaispas…Peut-êtreaurait-ilmieuxvaluquejenelesoispas.

Ladouleurintolérablequimevrillelecorps…Lasensationdevoler…Onmedéposesurunecivière…Unmasquesurlevisage,uneboufféed’oxygène…Denouveaulasouffrance…Puisl’oubli.

L’impressiond’êtresurungrandhuit…Deslumièresquipercentlaprotectiondemespaupières…Descrisencore…Jecapteunnometjem’yaccroche…Dick…

CHAPITRE25

Dick

Lessecoursarrivèrentrapidementsurleslieux,maisjerestaiprostré,incapablederéagir.JenesavaismêmepassiDilyétaitvivanteoupas.Cequejesavais,c’estqu’ilss’étaientacharnéssurelle,avaientbrutalisésoncorps,sonintimité.

Lessecoursarrivent,murmuraJonasens’accroupissantàmescôtés.

Ilssurgirenteneffet,quelquesminutesplustard,etseprécipitèrentàsescôtés,merepoussantnégligemmentcommesijen’avaispasplusd’importancequ’uncafard…Cequej’étais…uninsecterépugnantprovoquantledésastresursonpassage.

J’aiunpouls!crial’undessauveteurs…

J’auraisvoulularecouvrird’undrappourluiménagerunrestedepudeurmaisjenepouvaispasbouger…Jeneparvenaisqu’àlaregarder,tandisquelessecourslaportaientavecdouceurjusqu’àlacivière.Jelesvissemettreàcourirjusqu’àl’ambulance,yglisserlacivière…

Onvousaccompagne,s’écriaJonasenmerelevantdeforce.C’estsonpetitami!

Vousêtessûrqu’ilestclean?demandal’undesambulanciers.Ilal’aircomplètementàl’ouest!

Écoute,Ducon,rugitJonasquineparvenaitplusàsemaîtriserluinonplus.Cettefille-là,c’estsameuf,pourmoielleestcommeunesœur,commentréagiriez-vousànotreplace?

C’estbon,c’estbon,marmonna-t-il,maislaissez-moifairemonboulot!

Jonasm’aidaàmonteretm’installaprèsdeDilyanna.Jen’osaipasfaireungesteversellenimêmeprononcerlemoindremot.J’étaisau-delàdel’abattement,j’étaisdansuncauchemar…JeperçusvaguementJonasquienvoyaitunmessage,sûrementbattait-illerappelpourquelesZonardsviennentaucentrehospitalier.Bonsang,àforceilsallaientdevoirnousfilerunecartedefidélité.

Jenepusm’empêcherderireàcettepensée.Jo’meregardaitfixement.Jesavaiscequ’ils’imaginait…Quej’allaiscraquer…Mêmemoij’étaispersuadéquejeleferais,letoutétaitdesavoirquand!

Est-cequ’ellevas’ensortir?s’enquitJonas,quiserraitlespoingsencoreetencore.

Jelaissaiéchapperunnouveaurire.Bonsang,était-ilaveugle?Elleétaitbrisée,soncorpsavaitétéprofané,sonâmedevaitsouffrirmillemortsetseulsoncœurnousindiquaitqu’elleétaittoujourslàgrâceauxbip/bipdesmachines…Non,ellenes’ensortiraitpas,toutaumoinspassansdommage…

Jenesuispasmédecin,ilfautattendresonavis,maiselledevrapasseruncheck-upcomplet.

Jonasn’eutpasl’opportunitéderépondre.L’ambulances’introduisitdanslesasréservéauxurgences.

Quelquessecondesplustard,ilscouraientànouveaudanslescouloirs,commes’ilsavaientpeurquelaviedeDilyannanes’échappeplusvites’ilsmarchaient.C’estlàquejeprisconsciencequ’ilsl’emmenaientetquejenel’auraisplusàmescôtés,quejelaperdraisdevueunenouvellefois,qu’elleseraitunefoisdeplusfaceàcesdémons,àcesmonstresquicontinueraientdeviolentersonesprit.

JehurlaisonnomencoreetencoretandisqueJonasutilisaitunefoisdeplustoutesaforcepourmemaîtriser.C’estalorsqu’uneautreétreintemebloqualesbrasenarrièretandisquejemedébattais,l’écumeauxlèvres.JereconnuslapoignedeBouba.Àluiseulilétaitcapabledeneutraliserdeuxvoiretroismecs,pourtant,ileutdesdifficultésàmecontenir.Jonasmetiraviolemmentparlescheveux,cherchantàétabliruncontactvisuelentrenous.Lorsqu’enfinjeclignaidesyeux,jevisqueluiaussisouffrait,pourDilyanna,pourmoi!

Situnetecalmespas,ilsappellerontlasécuritéettemettrontdehors,c’estçaquetuveux?

Jemedébattaisencore,éructantmacolère,marage.

Bordel,Dick,arrête!mesupplia-t-il.

Jenepouvaispas.C’étaitplusfortquemoi!J’avaistoutecettesouffranceenmoiquinedemandaitqu’àsortir,ilfallaitquejelalaisseéchapperavantqu’ellenem’étouffe.

Bouba,emmenons-ledehors!

Meprenantcommeunpaquetdelingesale,BoubaetJonasmesortirentdesurgencesetlorsquenousfûmesàl’écart,jememisàhurler,encoreetencore,donnantdescoupsdepiedsdanslesblocsencimentquidélimitaientleparking,frappantdemespoingscontrelespiliersdebétons…Toutsemélangeaitenmoi,lescrisdeSasha,lespleursdeDilyanna,sonvisage,lesang,cesangquicoulaitpartoutsurmasœur,surlafemmequej’aimais,parcequej’étaisunabruti,unarriéré,parcequejen’étaispascapabledelesprotéger,parcequejen’étaispasvéritablementunhomme,justeungaminimmaturevoulantjouerdanslacourdesgrands.Jonasenétaitun,Jaysonaussi,ilsprotégeaientceuxqu’ilsaimaient…Jen’enétaismêmepascapable!

Jesaiscequeturessens,Dick,murmuraJonas,maistun’espasresponsabledecequis’estpassé.Cesontsesagresseurs,lescoupables.

Jeluiavaisfaitlapromessedelaprotéger,deveillersurelle,surtoutauxabordsdesquartierssud.

Maisnon…Ilafalluencoreunefoisquejenepensequ’àmagueule,quejepleurnichecommeunbébéetquejem’enfuielorsqueSasham’ajetétoutescessaloperiesàlafigure.Alorsquetusaisquoi?Elleavaitentièrementraison,jenesuisqu’unminable.

J’avaisprononcécesmotsavecdifficulté,ladouleuràmagorgeétantsifortequej’étaiscertainde

m’êtrepétéunecordevocalemaisjem’enfichais,jesouffraiscertainementmoinsqueDily…Ungémissements’échappademeslèvres.Commentpourrait-ellemepardonnerunechosequemoi-mêmejenemepardonneraisjamais?

Ilfautquej’appellelesparentsdeDilyanna,ilsdoiventsefairedusouciet…commençai-je.

Donne-moilenuméro,avectavoixdecrapaud,çam’étonneraitqu’ilscomprennentquoiquecesoit.

JeluidonnailenuméroetmetournaiversBouba.Cedernierm’observait,impassible,lesbrascroiséssursonuniformed’agentdesécurité.Jemerendiscomptequ’unefoisdeplus,lesZonardsavaienttoutquittépoursoutenirl’undesleursetj’enétaisàlafoisémuethonteux.JevisJonasraccrocheretilrevintversnous.

Ilssontenroute!Aprèstonappelaffolédetoutàl’heure,ilsontvitecomprisquequelquechoseétaitarrivéàleurfilleetsetenaientprèsdutéléphone.Ilsserontlàdansdixminutes.Enattendant,ilfautqu’onretourneauxurgences.

J’emboîtailepasàJonastandisqueBoubaprenaitplacedel’autrecôté.Pourmemaîtriser,certainement,sijepétaisuncâbleunenouvellefois.Jonaspartitdiscuteravecl’infirmièrequisetrouvaitàl’accueil.Elleluiréponditenmejetantunregardpeuamènemaisjem’enmoquais,jevoulaisjustesavoirsiDilyallaits’ensortir.

Ondoitpatienterensalled’attente,unmédecinviendranousvoirlorsqu’elleaurapassétoussesexamens!

Tucroisqu’ilsluidonnerontundiplôme?grinçai-jetandisqu’ilmeregardait,choqué.Laissetomber!

Jeprisplacesurunsiègequejechoisisdetellefaçonquejepuissevoirquientraitousortaitdesurgences.Jonas,quantàlui,restadebout,marchantdelongenlarge.BienviteOphélieetMélinanousrejoignirent,puiscefurentJaysonetAngèle,lesjumellesetmêmeHappyquisetrouvaitenvilleencemoment.Tousattendaientensilence,sansunmot,lorsquelesparentsdeDilyarrivèrentàleurtour.Ilss’arrêtèrentuninstantsurlepasdelaporte,dubitatifs,avantdepénétrerdanslasalle.Nousavionsdelachance,pourunefoislesurgencesn’étaientpasdébordées,iln’yavaitqu’unseulhommequipatientaitetquitentaitdesefaireaussipetitqu’unefourmi.Jemelevaipouralleràlarencontred’ÉdouardetGrâce,

prêtàfairemonMeaCulpalorsqueGrâcemeserradanssesbras,leslarmescoulantsursesjoues.

Oh,monpetit,commentvas-tu?murmura-t-elleentresespleurs.Tuverras,ellevas’ensortir,c’estunebattante.

C’est…c’estdemafaute,luiavouai-je,lespoingsserrés.Jel’ailaisséeseuleet…et…

J’éclataiensanglotstandisqu’Édouardm’enserraitdansuneétreintevirile.

Toutirabien,fiston,tun’espasresponsable,Dilyannaestunegrandefille,elleconnaissaitlesrisques!Àprésent,veillesurmafemme,jevaisauxnouvelles.

Ilsontditd’attendreet…

Àmoi,ilsmedirontcequej’aibesoindesavoir!dit-ilfroidementavantdesetournerversmesamis.Jenevousconnaispasencoremaismerciàtousd’êtrelà!

IlquittalapiècetandisquejeguidaiGrâceversunechaise.Mélinavintaussitôts’asseoiràsescôtésetluitintlamaintandisquejerestaislà,debout,pétrifié.Jen’enrevenaispasqu’ilsnem’enveuillentpas,aucontraire,ilss’étaientinquiétéspourmoi!Pourtant,lorsqu’Édouardrevintquelquesminutesplustard,jevisàsonvisagequelesnouvellesn’étaientpasbonnes.Commes’ilcraignaitluiaussidelesentendre,l’hommequittalapiècesansdireunmot,nouslaissantentrenous,enfamille.

Voilàcequejesaispourl’instant…mafille…mafilleadescôtésfêléesetdeshématomessurlatotalitéducorps,sarateaaccusédestraumatismesimportantsetlesmédecinsensurveillentavecattentionl’évolutioncarilestpossiblequ’elledoiveensubirl’ablation.Elleaaussiplusieursblessuresàlatête,cequiexpliquesoninconscience,maiselleréagitauxstimuli.Selonlesmédecins,elledevraits’ensortir.

Jeressentispourtantunmalaiseetleregardaifixement.

Vousnenousditespastoutn’est-cepas?croassai-je.

Elle…elle…

Ildéglutitnerveusement,s’approchadesonépouseetdemoietnousenserratouslesdeuxdanssesbras.

Elleaétévioléeàdenombreusesreprises,sonutérusaétéabîméetlesmédecinscraignentqu’ellenepuisseplusjamaisavoird’enfants.Et…et…ilyaaussilefaitqueceuxquiontfaitçanesesontpasprotégés…Elledevrasubirdestests,làilssontparvenusàluifaireprendreunepiluledulendemainparprécaution…maisilyalespectredusidaquiplaneàprésentau-dessusdesatête.

Jehochailatêteetreculaid’unpas,puisd’unautre.Jesavaisquelebonheurn’étaitpasfaitpourmoi…Jen’apportaisqueladésolation,riend’autre…Jequittaisubrepticementl’hôpital,jen’avaispasledroitd’êtrelà…Maplacen’étaitpasparmicesgensbiens,maplaceétaitoùelleauraittoujoursdûêtre…Enenfer!

CHAPITRE26

DILYANNA

Jelesentendaisparlerautourdemoisanspouvoirréagir…Lesmédecins,lesinfirmiers…Violée,lemotavaitétéprononcéetjepouvaisentendrelesintonationscoléreusesdanslavoixdesinfirmières,l’écœurementfaceàcequim’étaitarrivédelapartdesmédecins.Jen’avaispeut-êtrejamaistravailléaveceux,maisjefaisaismoiaussipartiedupersonnelmédical,j’étaisunedesleursetilss’occupaientdemoiavecleplusgrandrespect.

Dick…Sonnomtournaitencoreetencoredansmatête…Dick…Dick…Dick…

Jeplanaiunlongmomentsanspouvoiralignerunepenséecorrecte…L’impressionàlafoisagréableetdésagréabledevoler,quemonâmes’étaitdésincarnéedemoncorps…Jeneressentaisaucunesouffrance,justeuneétrangeimpressiondeliberté…

Dick…Ilnefallaitpasquej’oublieDick…Ilfallaitquejemegravecesquatrelettresdansmonespritpourquejem’accrocheàlui,àl’amourquejeressentaispourlui,qu’iléprouvaitpourmoi…pournepasperdrepied,pournepaslaisserlasouffrancem’envahir,lessouvenirsmebriser…

Dick…Sonsourire,sajoiedevivre…

Dick…Sesmainssurmoncorps,sabouchesurlamienne…

Dick…

Dick…

Dick…

CHAPITRE27

Dick

Jevoulaisquecettesouffrancecesse,nepluspenseràcettejournéedemerde,auxparolesdeSashaquim’avaientdémoli,àcequivenaitdesepasseravecDilyanna,aufaitquejen’étaisqu’unimbécileetquetousméritaientbienmieuxquemoi.Etiln’yavaitqu’unmoyenpourm’ôtertoutesceschosesdelatête,unesolutioninfailliblepoureffacermamémoire…Toutenayantl’impressiond’êtreunlâche,unraté,jem’enfonçaiaupetitmatindanslesquartierssud…Jemeconvainquisquejeneressentaisrien,nidouleur,nitristesse,nihaineenverscesbâtardsquis’enétaientprisàcellequej’aimais.Jemecontentaisdemarcherdroitdevantmoi,latêtebaissée,dehonte?Parcequejenevoulaispasqu’onmerepèredansceslieux?Certainementlesdeuxàlafoismaisjevoulaisatteindrecetétatdebéatitude,l’impressionquetoutétaitbeau,planerdansunkaléidoscopedelumières,demusiquesquejeseraisleseulàpercevoir.

Jetâtailapochearrièredemonpantalonetytrouvaimonportefeuille.J’allaisavoirbesoind’unkitcomplet…Seringue,cuillère,aiguilles,garrot,briquet…Sij’ymettaisleprix,jeseraiséquipépourmaprochainedescenteauxenfers…Jelongeailestrottoirs,oùlesexcrémentsd’animauxsepartageaientlaplaceavecdestracesdesang,signequ’unebagarreavaitéclatéquelquesheuresplustôt.Étonnamment,ilyavaitpeudemondedanslesrues,maisjesavaisoùaller,jel’avaistoujourssu,commesilaproximitédel’héroïnefaisaitchantermonsang…J’étaiscommecesputainsdechiensrenifleurs…Jepouvaisenrepérerlatracerienqu’ensuivantmoninstinct…

Jelerepérai…Silhouetteimmobile,doscontrelemur,jamberepliée,unemaindanslapocheintérieuredesaveste,capucherabattuesursonvisage.Rapidité,efficacité…Unseulmot,uncodepourexpliquercequejevoulais,unepoignéedemain,ouicienl’occurrenceuneétreinteamicale,l’argentchangeaitdemain,lamarchandiseétaitdansmapoche…Jecontinuaid’avancerlentement,commesijenefaisaisriend’autrequedemebalader,maisjelasentaisaucreuxdemapaume.Ellemebrûlait,m’appelait,etmoncœurrésonnaitenrythmeaveccettevoixdansmatêtequimedisait«unshootettuserasdébarrassédecettedouleur».Jelevoulais,detoutesmesforces…Mestripesmehurlaientdem’arrêteretd’injecterenfindansmesveinesceproduitmiraclequim’emmèneraitdansces«paradisartificiels»siprisésparBaudelaire.Saufquemoi,jenecréeraisrien,niessai,nipoèmes…Jen’utiliseraispascesproduitsillicites,maiscombienenvoguechezlesartistes,envuedepermettreàmongéniecréatifdes’exprimerlibrement…Non,sijelefaisais,c’étaituniquementdanslebutd’oublier…

denepluspenser,pournerienressentir…

Jepouvaissentirautoucherlescontoursdelaseringue,delacuillèredanslaquellejedilueraislapoudredansunpeud’eau,lebriquetaveclequeljelachaufferais,legarrotdontj’entoureraismonbrasavantdeserrerpourfairesaillirmesveines.Jefrémisàlapenséequebientôtj’yenfonceraisl’aiguille,

quej’appuieraissurlepistonlentement,permettantauproduitdeserépandredansmoncorps.Ce

«flash»quimeferaitmecambreraussisûrementqu’unorgasmeetenfin…«Laplanète»,cettesensationd’euphorie,dejoie,debonheurquipendantquelquesheuresmeferaitoubliertousmessoucis…

Unsourireétirameslèvres.Ohoui,jepouvaisdéjàlasentir…Maisjetinsuneautrepetitevoixàl’écartquimedisaitquecen’étaitpasunebonneidée,qu’aprèscesentimentdebéatitude,ilyaurait«ladescente»,impitoyable,quimeferaitmesentirencoreplusunemerdequejenel’étaisdéjàdèsquejereprendraisconscienceaveclemonderéel.Maisavant,j’auraisàaffronterlasomnolence,aveclapeurauventredenepasmeréveiller,cesnauséesquim’accompagneraientauretourdemonvoyageextatique,lesvertiges,lesboufféesdechaleurquimedonneraientenviedemefoutreàpoilalorsquelatempératuredemoncorpsseradéjàenbaisse…etcetteatroceimpressionquemoncœurs’arrêteraitalorsqu’enfaitilnefaisaitqueralentir,lentement,doucement.Etlafinduvoyage…

Jem’arrêtaidansuneruelleoùjevomisunenouvellefois,certainementmaculpabilitécettefois,caroui,j’avaisl’impressiondetrahirmesamis,lesZonards…maisaussietsurtoutDilyanna.Ilfallaitquejeparte,quejetrouveunendroitpourmefairecetteinjectionquimepermettraitd’oublier…

Jefismarchearrière,titubantcommeunivrogne,maisici,auPandémonium,c’étaitchosecouranteetons’enfichait.JepassaidevantunbarquejereconnuscommeétantceluioùMaïtétravaillait.JemedemandaisiTimmies’étaitfaitopérer,s’ilétaitdanslemêmehôpitalqueceluioùDilyannaavaitététransportée.Dilyanna…Jem’envoulaisdecequej’avaisfaitouenl’occurrencedecequejen’avaispas

fait…Commentpourrais-jemeregarderdansunmiroiralorsquelafemmequej’aimaisavaitétéviolée,battueetlaisséepourmorte?!

Jelaissaiéchapperuncriderageetdonnaiuncoupdepieddansunecanettevide.C’étaitça,lequotidiendanslesquartierssud:ladéchéance,lapeur,lamortetc’estversellequejemeprécipitaiscarjesavaisqu’ellemetendraitlesbras,sansmecondamner,sansmejuger.J’accélérai,voulantàlafoiséchapperetrejoindreledestinquim’attendait,maislequelétait-ce?Jeneprisconscienced’avoirempruntélechemindudispensairequ’enmetrouvantdevantlaporte.J’auraisdûpartirencourant,meréfugierdansunendroitcalmeetisolépourm’enfilermadose…Maisilfallaitquejerentre,queje…

quejequoi?Quejetentedecomprendre?Quejemefustigeencoreetencore?Quejemerappellequec’estlà,danscetendroitoùnousnousétionsavouénotreamourquelquesheuresplustôt,quecesfumiersavaientvioléetbattumafemme?

Jepoussailaporte,nepouvantm’enempêcher.Ellen’étaitpasferméeettoutétaitencoredanslemêmeétatquequelquesheuresplustôt.C’estavecdétachementquej’avançaidanslehall,mesdoigtscrispéssurlesachetquimebrûlaitleboutdesdoigts.Jefermailesyeuxettentaidemeconvaincrequerienn’avaitd’importancepourmoi,maisc’étaitfaux…J’avaispassédenombreusesheuresici,j’yavaistravaillé,accueillidesgensquiavaientbesoindesoinsousimplementdeparler.J’avaisréapprisàécoutergrâceàJonas…Jonasquiavaitconfianceenmoi,quicroyaitenunesecondechance,quimel’avaitofferteàmoi,ledroguéenmanque…Sansmêmem’enrendrecompte,jemerendisdanslasalled’attente.Lànonplusrienn’avaitétéépargné.Jeramassaiunechaise,latablebasse,rempilailesmagazinesquin’avaientpassouffert,jetailesautresquiavaientétéarrachés.J’enfisdemêmeavecleslivres,uneautrechaise,remissurpiedlabombonneàeau…

Etjecontinuaiainsijusqu’àcequelapiècesoitdenouveaurutilante.Jen’oubliaistoutefoispasladosequipesaitdeplusenpluslourddansmapoche.C’estverslebureaudeDilyannaquejemedirigeai,nevoulantpasresterdanslehall,mesouvenirdesoncorpsblessé,desanuditéofferteàlavuedetous,

desesbeauxcheveuxpoisseuxdesang,desonvisagemartyrisépardespoings,despiedsbottés…

Pourtant,c’étaitlàquejeluiavaisavouémonamour,làquej’avaislaisséparlermoncœur.Mespropresmotsrésonnèrentàmesoreilles,commesij’avaisfaitunbonddequelquesheuresenarrière:«JeneseraijamaisaussiparfaitqueJo’,aussibeauqueLucky,ouencoreaussiintelligentqueLéo.Maisjepeuxtepromettreunechose,DilyannaDeMayeur,c’estquepersonnenet’aimeraaussifortquejet’aime.»

Unsanglots’étrangladansmagorge.Jamaisjen’avaisaiméquelqu’uncommeelle,maisj’avaiseulachancequemonamoursoitpayéderetour.«Dick,lemomentétaitparfait,jelechériraitoutemavieetsachequecetamourquejeressens,làaufonddemoi,c’estpourtoi!Uniquementpourtoi»

Uniquementpourtoi…Dilyannamel’avaitditàplusieursreprises.Certainsavaientleurchanson,moij’avaiscettephrasecommeporte-bonheur…Maisc’étaitavant,avantquejenelatrahisseenlalaissantàlamercidecesmonstres,avantqu’ellen’apprennequejesuisunmonstred’égoïsme,icimêmedanscettepièce.

Jeremarquaiquejevoyaistroubleetqu’unefoisencore,mesémotionsmeblessaient,mefaisaientsouffrir.Jem’installaiàsonbureauetsonsouvenirsefitencoreplusvivace…Dilyannadanssalonguerobebleuesoignantlamaind’unepetitefille…Lesoleilquisereflétaitparlavitredanssesmagnifiquescheveuxsombres…Sonsourire…Sesbaisers…Sessoupirslorsqu’elleatteignaitl’orgasme…

Non…non…gémis-jeensortantfrénétiquementlepaquetdemapoche.

JeledéballaientremblantmaisnepusempêcherDilyannades’incrusterdansmespensées...Dilyannatotalementnuegémissantpourquejem’enfonceenelle,riantlorsquejeluisusurraisàl’oreillequejebaiseraissapetitechattejusqu’àcequ’ellecriegrâce,semoquantdemoienmedemandantpourquoielledevraitappelersamère…J’ignoraisqu’onpouvaitprendreduplaisiraulittoutens’amusant.Puisilyavaitlesrepasquenouspréparionsensemble,moiquipréféraislesalé,ellequiadoraitlesucré…ElleadoraitlesframboisinesdeJayson,accompagnéesd’unchocomousse…Unnouveausanglots’échappademeslèvrestandisquejenouaislegarrotautourdemonbras…Dilyannaquiposaitsabouchesurlamienne,suivaitlecontourdemeslèvresdelapointedelalangue…«Tum’excites,Dickens...».

Jevoyaistrouble,chassaidemonavant-brasleslarmesquicoulaientsurmesjouestoutenversantunepipetted’eauavecl’héroïnedanslacuillère,jelachauffai,mordantsurmalèvreinférieurepournepascraquer…MaisDilyannaétaittoujourslà,avecmoi…«Monrêveseraitd’avoirunemaisonàlacampagneetunchienaussi,j’adoreraisavoirunchien…».

J’yétaispresque,ilfallaitquecettedouleurcesse,quecessouvenirsarrêtentdemehanter…J’aspiraileproduitàl’aidedel’aiguilleetpoussaiunsoupirenappuyantsurlepistonpourretirertoutebulled’air…Jeprisuneprofondeinspirationetenfonçail’aiguilledansmaveine…Çayest…lemomentétaitvenu…Ungeste,unseul…«Jet’aimeaussi,Dick,ohsitusavaisàquelpoint»,«Uniquementpourtoi,Dick…».

Jepoussaiuncriderage,retiraibrusquementlaseringuedemonbrasetenvidailecontenuausolavantdelajeteràtraverslapièce.Puisjecroisaimesbrassurlebureaudemacompagne,yenfouislatêteetsanglotailonguement,commejen’avaisencorejamaispleurédemavie.Unemainseposasurmonépauleetjerelevailatête.Jonasmeregardait,lesyeuxembués.

Jesuisfierdetoi,monfrère!

Elleneméritepasquejel’effacedemamémoire,elleneméritepasça,murmurai-jeenm’agrippantàsamain.

Non,tuasraison…Ellevaavoirbesoindetoi!meconfirmaJonas,vousavezbesoinl’undel’autre.

J’étaisprêtàreplonger,Jo’,siprêt…

Maistunel’aspasfait.L’amourquetuportesàDilyannaaétéplusfortquecettemerde.

Depuisquandétais-tulà?

Depuisledébut,Dick,jenet’aipaslâchéd’unesemelle,merépondit-il.

Pourquoi…pourquoitum’aslaisséfaire?

Parcequejesavaisquetuseraisassezfortpouryrenoncer,parcequejesaisqueDilyannaestplusimportantepourtoiqu’unshootouunfixe,parcequej’aiconfianceentoi!

Etsijen’avaispasétéassezfort?murmurai-je,

Tul’es!Là…etlà…dit-ilenposantsonindexsurmatêteetsurmoncœur.Iln’yaquetoiquinelevoispas…

J’inspiraiprofondémentetmelevailentement.

Mafemmeabesoindemoi,énonçai-jecalmement,ilesttempsquej’ailleàsescôtés.

Alorsallons-y!

CHAPITRE28

Dilyanna

Ilmefallutdutempspourémergerdemoninconscience.J’ensortaisquelquesfois,quelquessecondes,quelquesminutes,maisc’étaitdéjàtroppourmoi...C’étaitlavoixdemesparentsetcelledeDickquimefaisaitleplusréagir.Unmot,uneintonationetjeremontaisàlasurface.Cettefois,çaduraassezlongtempspourquejesuivelaconversationquisedéroulaitdansmachambre.

Tudevraisrentrertereposerunmoment,mongarçon,énonçatranquillementmamère,çafaitquatrejoursquetueslà,quetun’aspasbougé.

Jeneveuxpaslalaisser,Grâce!Etsielleseréveillependantquejesuisparti?

Alorsont’appellera!marmonnalavoixbourruedemonpère.Grâcearaison,ilfautquetuaillesmangerunmorceau,prendreunedouche,dormirunpeu.Àsonréveil,elleaurabesoindetoienpleineforme!

Etilfaudraitquetumettesunpeud’ordredanscettebarbe,letaquinagentimentmamère.Sielleouvrelesyeuxettevoitcommeça,ellevateconfondreaveclePèreNoël.

Sijen’avaispasétéencoredanslebrouillard,nuldoutequej’auraissouriàcettepensée,maissilesparolesparvenaientdefaçonaudibleàmesoreilles,jen’avaispasencorelaforced’ouvrirlesyeux,nimêmedebouger.

GrâceetÉdouardontraison,renchéritunevoixquejereconnuscommecelledeJonas.TuvasfinirparressembleràunSDF.Nonseulementtucommencesàenavoirl’allure,maisl’odeurquiémanedetoiestrepoussante!

Sympa!ronchonnaDick.

Maistusaisquej’airaison!poursuivit-il.Alorsoutuviensdetonpleingré,oujet’yforce.

J’entendisDickbougonner,seslèvreseffleurerlesmiennesd’unbaisersilégerquej’auraispuleconfondreaveclesouffled’unebrised’étéetsespaslourds,traînants,sedirigerverslasortie.

J’aicruqu’ilnepartiraitjamais,soupiramonpère.

Cegarçonl’aime,Édouard,iln’apasquittésonchevetdepuisqu’elleaététransféréedanscette

chambre.

Oui,tuasraison,c’estunbonpetitgars!Mêmesij’aieuunmomentdedoutelorsqu’ilaquittél’hôpitalenapprenantcequ’avaitsubinotrepetitefille.

Ed’,noussavonsparfaitementtoietmoicequ’ilenest…Ilaétéhonnête,ilnousl’araconté.Maisilestrevenupourelle,parcequesonamourpournotrepetitechérieaétéplusfortquesondésird’oublier…

C’estvrai,reconnut-il,etc’esttoutàsonhonneur.Etiladelachancedepouvoircomptersursabanded’amis,jamaisjen’aivudegroupeaussisoudé,Dieusaitpourtantqu’ilssonttousdifférents…

C’estçaquifaitleurforce,etDilyannafaitpartiedesleursàprésent.Ilsserontlàpourellelorsqu’ellereviendraàelleet…

J’entendismamèresemettreàpleurer,monpèrelaréconforteretjem’envoulusdelafairesouffrir.

Maisdenouveaujemelaissaientraînerparlesténèbresavantmêmed’avoirputenterd’ouvrirlesyeux.

*

**

Unedouleuratrocemesortitdemoninconscience,etmevrillalescôtes.Moiquibaignaisdansunebienheureusetorpeur,jecomprisqu’onmesortaitdemoncoconprotecteuretquej’allaisdevoiraffronterlemonderéeldanspeudetemps.Monesprits’éclaircissaitluiaussietlarepriseaveclaréalitémefitmal,aussibienphysiquementquemoralement.Jecommençaisàmesouvenirdecequej’avaissubi,leursmainssurmoncorps,lecouteausousmagorgetandisqu’ilss’enfonçaientenmoiàtourderôlesansunmot,profanantmoncorps…

Unelarmes’échappadesousmespaupières.

OhmonDieu,ellepleure!s’exclamaDickenessuyantdelapulpedupoucel’uniquepreuvedemonchagrin.

Ellecommenceàseréveiller,ditmonpère.Toutirabien,fils,onseralàpourelle.

Dick…Alorsquec’étaitsavoixquim’avaitpermisdetenirlecoup,jen’étaispluscertainedelevouloir

àmescôtés,decontemplerdanssesyeuxlerefletdemonâmedétruite.

Eh,murmura-t-ilenmecaressantlajoue,ouvretesjolisyeux,mapuce,laisse-moiplongermonregarddansletien.

Jefrémisetbougeailégèrementlatêtepourm’éloignerdesamain,maisilpersistaencoreetencorejusqu’àcequemespaupièress’entrouvrentlégèrement.

Oui,c’estça,regarde…Tesparentssontlàaussi,ilsonthâtederetrouverleurfille…

Jebougeailégèrementmamainetmesdoigtsenfrôlèrentd’autres,pluslongs,plusfins,doux,familiers…

Ellevientdemepresserlamain,s’écriamamèreenriantetpleurantàlafois.

Tuvois,tunousrendsheureuxrienqu’aveccespetitsgestes,maiscequiseraitencoreplusmerveilleux,c’estquetusoulèvesenfinlespaupières,lentement,prendstontemps.Nousavonsfermélevoletmécaniqueainsiqueleslumièrespourquetunesoispaséblouie.

Deuxforcesluttaientenmoi…L’unequiavaithonteetquinevoulaitpasqu’ilsmevoientdanscetétat…L’autrequivoulaitlesrassurer,leurdirequej’étaisderetouretquejemebattraispourrécupérerlaviequ’ilsm’avaientvolée.Mescilspapillonnèrent…unefois…deuxfois…etmesyeuxplongèrentdansunbleutroublant…Dick…

Jevisqueluiaussiavaitdeslarmespleinlesyeuxmaisjenevoulaispasqu’ilsefassedusouci.

Lentement,jelevailamainetfrôlaisajoueduboutdesdoigts.Illespressaavecdouceuretydéposaundouxbaiser.

Jevaisappelerlesautrespourqu’ilssachentquetuesréveillée,toutlemondes’inquiètepourtoi,s’écria-t-il,unsouriresurlevisage.

J’attendisquelaporteserefermeetlessanglotsquejeretenaisdepuismonréveils’échappèrentdemeslèvresenmêmetempsqu’ungémissementpathétique.Mamèresepenchaversmoietmeserradanssesbrassansunmot.Jen’avaispasbesoindel’entendre,sadouceuretsachaleurmedévoilaienttoutcequ’elleavaitàmedire.J’entendismonpèreseraclerlagorgeàplusieursreprises,visiblementmalàl’aise.Lorsqu’enfinjemefuscalmée,jetournailatêteverslaporteetvisqueDickétaitrevenuetqu’il

m’observait,àlafoiseffaréetcompatissant.Jemedétournaivivement,jenevoulaispasqu’ilmevoiecommeça,jemesentaissale,immonde…

Unedouche,murmurai-je…j’aibesoindeprendreunedouche…marmonnai-jeenmedébattantdansmonlit,accentuantlesdouleursquejeressentaisdéjà.

Mamèresemitàsangloterdeplusbelleetmonpèrel’entraînadehors,marmonnantqu’ilallaitchercheruneinfirmière.Dicks’approchadoucement,commesij’étaisunanimalblesséetposasamainsurmonbras.

Calme-toiDily,silesinfirmièrestedonnentleuraccord,jet’aideraiàprendreunedoucheet…

Pastoi!grondai-jeenrepoussantmollementsamain.Jeneveuxpasquetumeregardes…

Jemetournaidel’autrecôté,nevoulantpasqu’ilvoieenmoicettevictimequigisaitdansunlit.Ilm’avaitconnueforte,directive,compétitivemême…Ilseretrouvaitdevantunepoupéebrisée.

L’infirmièrevintprendremesconstantes,matempérature,medemandasijesouffrais,sij’avaisbesoindequelquechose.

J’auraisvoululuidirequejevoulaisrepartirdeuxsemainesenarrière,lorsquetoutallaitbiendansma

vie,lorsqueDicketmoiétionsamoureux…Commentpourrait-ill’êtreencorealorsquej’avaisétésalienonpasparunvioleur,maisparplusieurs…Commesilefaitd’ypenseragissaitsurmoncorps,jeressentisuneviolentedouleurdansleventre,commesionm’ouvraitendeux,commesionvoulaitm’écartelerdel’intérieur.

Jevaisluidonnerunlégersédatifpourqu’elledormemaisavantilfautqu’ellemangeunpeu.

Ellevoulaitprendreunedouche,murmuraDickdontlavoixtremblait.

Onverraçaaveclemédecindèsdemain.Pourl’instant,jevaisluifaireporterunpotageetuntoast,ilfaudraessayerdeluifaireavalerunpeudenourriture.

D’accord,approuva-t-il.

Ils’installadanslefauteuil,maisjefermailesyeuxpournepluslevoir,j’avaishonte,hontedenepasavoirréussiàlesrepousser,hontedenepasavoirhurlé,denepasm’êtredébattuedavantage.

Jecomprendsquetum’enveuilles,énonça-t-ilenchuchotant.Tunesaispasàquelpointjemehaismoi-mêmepourcequit’estarrivé.Sijen’avaispasétévexé,sijen’avaispasprislafuitecommejel’aifait,jeseraisrestéavectoietcesfilsdeputesnes’enseraientpasprisàtoi…

Jenet’enveuxpas,luirépondis-je.C’estjustequejenesaismêmepascommenttupeuxencoremeregarderaprèscequej’aifait…

Quoi???s’écria-t-ilenselevantd’unbondetenvenants’agenouillerpoursemettreàmonniveau.

Dily,jet’enprie,regarde-moi,regarde-moivraiment…

Jemeforçaiàlefixer,j’avaismaltellementilétaitbeau,tellementilétaitgentil,attentionné.

Jet’aime,Dily,etencoreplusmaintenant.Dily,tuasfaitcequ’ilfallaitpourresterenvie,j’ignoretoutcequetuassubi,peut-êtrequ’unjourtupourrasenparler,peut-êtrequenon!Peut-êtrevoudras-tuenfouirçadansuncoindetamémoire,outeconfieràunpsy…Maisjem’enmoque,Dily!Jeneveuxpasquetut’imaginesneserait-cequ’uninstantquetumedégoûtesouquejet’enveuilleoupeuimportelesidéesidiotesquitetrottentdanslatête.Laseulechosequejesais,c’estquetuesvivante,unpeucabossée,tonespritenmarmelade,maiscrois-moi,çajeconnais…Tuesunesurvivante,Dilyanna,etnousnousbattronsensemble…

Je…je…balbutiai-je.C’estdifficile,depuismonréveil,jenepensequ’àçaetj’aipeur,Dick,effroyablementpeur!

J’aifailliunefoisàmapromesse,jenefailliraiplus…Tuneserasplusjamaisseule,Dily,oùtuiras,j’irai…

JenerépondispasmaisjetendislamainàDickquil’étreignitdoucement…Jevoulaiscroireenlui…

ennous…Mêmesijesavaisqueceseraittrèsdifficile.

CHAPITRE29

Dick

Putain,c’étaitdur…trèsdur…Depuissonréveil,unesemaineplustôt,Dilyannan’avaitpassouriuneseulefois…Ellerestaitparfoisdelonguesheuresàobserverparlafenêtresansmêmesesoucierquemoiousesparentsétionsdanslapièce.Parfois,lorsquenousluiprenionslamainouquenousavionsenverselleungestetendre,elleseraidissaitviolemment,etonvoyaitqu’elleprenaitsurellepournepasnousrepousser.Elletentaitpourtantdefairebonnefigure,serenseignaitsurlesfleursdeGrâce,surlesmaquettesdebateauxquesonpèreassemblait,surlesloisirsdesZonards,surlesvacancesd’Élouan…

Maisonvoyaitqu’elleseforçaitetçamefaisaitmal…trèsmal…

J’enétaisarrivéaupointdemedemandersimaprésenceàsescôtésneluifaisaitpasplusdemalquedebien.Leplusangoissant,c’étaitlessilencesquiseprolongeaient.Nouspouvionsresterdelonguesheuresenveloppésdansuncalmeinsoutenablejusqu’àcequeDilyannalaisseéchapperunsoupirquiauraittoutaussibienpuêtreunsanglot.C’estlemomentquechoisissaitGrâcepourparlersansinterruptiond’unprogrammeàlatélé,del’actualitéoudetoutautresujetinoffensif.Dilysemblaitécouter,unrictusauxlèvresquipassaitpeut-êtrepourunsourireauregarddesesparents,maispasauxmiens…

Çanepeutplusdurer!m’écriai-jeunjourquenousn’étionsquetouslesdeux.

Dilyannasursautaviolemmentetmefixacommesijevenaisdelasortird’unrêveéveillé.

Quoi?murmura-t-elleenclignantdespaupières.

Iltefautconsulterunpsy!

Voilà,j’avaislâchélesmotsquimebrûlaientlalanguedepuisquelquesjours.Jevoyaisbienqu’ellenes’ensortiraitpastouteseule.Elleplongeaitdansladépressionetj’étaisleseulàlevoir.Ohbiensûr,jeneminimisaispasl’agressionqu’elleavaitsubie,aucontraire,j’avaisbienconsciencedel’horreurquiavaitdûêtrelasienne,maisc’étaitl’apathiedanslaquelleelleétaitplongéequimeterrorisait.Jesavaisquegardertouteladouleurqu’onressentaitensoiétaitdestructeur.J’étaispasséparlàetsiquelqu’unavaiteulamoindreidéedecequej’éprouvaisàl’époqueetm’avaitdonnéceconseil,peut-êtrequejen’auraisjamaisallumémonpremierbédo{4}.

Écoute,poursuivis-jeenvoyantqu’ellem’écoutaitpourlapremièrefoisdepuisl’incident,cequetuasvécu…jenepeuxquel’imaginer,maisjepensesavoircequeturessens…Tonimpuissance,tacolère,tadouleur…Ilyatellementdesentimentsquisebattentlà,danstoncœur,luifis-jeenindiquantsa

poitrinesanslatoucher,quetupréfèrestetaire,depeurdehurlerencoreetencore.Maiscen’estpasbonpourtoi,nipourtesparents,nipourmoi…Onsouffretous,Dily.Tamèreapeurquetunecraques,pourtantellenet’enmontrerienmaisdèsqu’ellesortdecettechambre,c’estellequis’effondre.Tonpèreabeaulasoutenir,luic’estlacolèrequilemaintientdebout.

Ettoi,c’estquoi?demanda-t-elledansunsouffle.

Monamourpourtoi,l’espoirquetuparviennesà…nonpasàeffacercequetuasvécuparcequetun’yarriveraspas,maisàcontinuerd’avancer,unpasaprèsl’autre…Maispourça,ilfautquetutefassesaider.

Maisquemereste-t-il,Dick?Montravail,jenesaismêmepassijeseraicapablederetournerunjouraudispensaire,d’entrerdanslehall,làoù…où…

Ellesetutunmoment,levisagehagard.

Etsiseulementiln’yavaitqueça,poursuivit-elledansunsouffle.Jevoulaisdesenfants,unoudeux…peut-êtreungarçonetunefille…Quemereste-t-ilmaintenant?Jeneseraijamaisunemaman,jenesaismêmepassijepourraiencoreêtreunefemme.Alorsquemereste-t-il?

Elleavaithurlécesderniersmotsensefrappantleventreàcoupsdepoing.Jemelevaietlessaisisdansmesmainsavantqu’elleneseblesseetl’attiraicontremontorse.

C’estdurpourmoiaussi,luimurmurai-jeàl’oreille.Detevoirmouriràpetitfeucommeça,mebriselecœur.Jenesaispascequetuattendsdemoi,Dily,est-cequetusouhaitesmevoiràtescôtés?

Préfères-tuquejetelaissetranquille?

Jereculailégèrementetplongeaimonregardbrillantdelarmesdanslesien.

Laseulechosedontjesoissûràl’heureactuelle,c’estdemonamourpourtoi.Rienn’achangé,jet’aimeaussifortqu’avantsinonplusetlà,jevaistechoquer,jelesais,maisilfautquetusaches…J’aitoujoursenviedetoi,detefairel’amour.C’estpeut-êtreignobledemapartdepenseràdeschosescommeçadansdetellescirconstances,mais…maisc’estainsi,çanonplusçan’apaschangé…

Jelavisseraidiretreculerd’unpas.Jenevoulaispaslablesserouqu’ellecroiequejepourraisluifairedumal.Ellesecoualatêtedegaucheàdroitecommesiellenevoulaitpascroireenmesparoles,commesiellevoulaittoutrejeterenbloc.

Etpourtantc’estvrai,poursuivis-jeenrestantdeboutprèsdesonlit.Hier,lorsquelesinfirmièrest’ontaidéeàteleverpourt’installerdanslefauteuil,tachemises’estrelevéeetj’aivutacuisse,tajoliecuissequej’aimetantcaresser…Tuterappellesquej’aiquittélapiècecommesij’avaislefeuauxfesses?C’étaittoutsimplementparcequej’aicommencéàbander…Oui,Dily,tupeuxmeregarderavectesgrandsyeuxécarquillés,maislesfaitssontlà…Moncorpsréagittoujoursenprésencedutienetpeuimportecequis’estpassé,monamourpourtoiestintact.Maissijedoisêtrehonnêteavectoi,ouiilm’arrived’avoirlahaineenverscesfilsdeputespourcequ’ilst’ontfait,parfoismadouleurestsiintensequejedoisappelerl’undesZonardspourdiscuteravantdefaireuneconnerie…Maistoutn’estquesecondaireparrapportàmessentimentspourtoi.

J’entendisunlégerbruitdanslecouloiretjereconnuslesvoixdeGrâceetd’Édouard.Jeprisuneprofondeinspiration.

Tesparentsarrivent,jevaistelaisserréfléchiràcequejeviensdetedire.Jereviendraiunpeuplustard…situleveuxbien!

Ellehochalatêtemachinalement,maisjevisunepetitelueurbrillerdanssonregard,unetoutepetiteétincelledevie,cequiétaitbienplusquecequ’ellenousavaitoffertcesderniersjours.Jemepenchaiversellelentement,pourluilaisserletempsdemerepoussersielleledésirait,etposaimeslèvressurlessiennes,doucement,avechésitation.Voyantqu’ellenemerejetaittoujourspas,jem’enhardis,pressaiunpeuplusfortmabouchecontrelasienne,maissanslatoucher,seulesnoslèvresétaientreliéesentreellesetlorsqu’elleexhalaunpetitsoupir,cefutcommeuneimmensevictoire.

Jefisunpasenarrière,lagratifiaid’unénormesourireetquittailachambreaumomentoùGrâceetÉdouardypénétraient.LepèredeDilyannametendituncaféqu’ilavaitprisaudistributeuretjequittailesétagespourmedirigerverslasortie.Lecentrehospitalierdenotrevilleneressemblaitenrienauxautreshôpitauxdelarégion.Ilétaitsituéaumilieud’unparcboiséd’unegrandesuperficieetdesjardinsfleurisaccueillaientàlafoislesmaladesetlesvisiteurs.

Jem’installaisurunbancetbuslentementmoncafé.Monregardfutattiréparquelquesenfants,accompagnésd’infirmiers,quis’ébattaientenpleinmilieudelapelouseencompagnied’unchientenuenlaisseparunhommequimesemblaêtreunmédecin.Jemelevai,medirigeaiverslegroupeetlesobservaiunmoment,àlafoiscurieuxetdubitatif.Uneinfirmière,mevoyantlesdévisager,s’approchademoi,lesourireauxlèvres.

Jepeuxvousaider?medemanda-t-elle.

Jechercheàcomprendrecequevousfaites,avouai-je.

Nousutilisonslazoothérapiepourvenirenaideàcesenfants.Ils’agitd’unprogrammedesoinsoud’interventionsqu’unthérapeuteprodigueàsonousespatientsàl’aided’unanimal.

Àquoiçasert?

Aprèsdenombreusesrecherches,merenseigna-t-elle,ilestapparuquelesenfantsoulespersonnesayantdesproblèmespsychologiquessedétendentens’occupantd’unanimal.Ildevientleurconfident,leurprotecteur.Lesanimauxontuneffetapaisantetréconfortantsurl’êtrehumainquiserépercutesursasantémentale.

C’estincroyable,murmurai-jeenvoyantunenfantenfauteuilsemettreàrirelorsquelechiensautasursesgenouxpourluifaireuncâlin.

Nombredepersonneséprouventunesympathiemanifestepourlesanimauxetonconsidèrequeleurprésencediminuelestress,estunsoutienmoralpourlespatientsouleursmaîtres,maisestégalementd’ungrandréconfort,commeenpériodededeuilparexemple…

Doncvouspensezqu’avoirunanimalpeutpermettreàunepersonneeninstabilitépsychologiqueàcaused’undrameoud’unaccidentderecouvrersonmental.

Çapeutaidereneffet,maisilfautquandmêmequecettepersonnesoitsuivieparunpersonnelqualifié.

Jeremerciail’infirmièreetretournaisurmonbanc.J’yrestaiunmomentavantdedéciderdepasseràlaZone.Çafaisaitunmomentquejen’yavaispasmislespiedsetmespotesmemanquaient.Lorsquej’arrivai,jefusétonnédevoirqueseuleOphélieétaitàlamaison.Elledessinaitdanslasalleàmangertoutenchantantàtue-tête.Lorsqu’ellemevit,ellepoussauncridejoieettenditlesbrasafinquejelaserrecontremoi.

Dick,Dick,tum’asmanqué,s’écria-t-elleenriant.Bonsang,çamefaitplaisirdeterevoir.Allez,dis-

moicommentvaDilyanna?

Jeluiaiconseilléd’allervoirunpsy,luidis-jeenm’asseyantàsescôtés.

Attends,tun’aspasétéaussidirect,rassure-moi!demanda-t-elleenmeregardantaveceffroi.

Ehbiensi…

Bonsang,Dick,gémit-elleensefrottantlefront.

Ellem’afaitpenseràtoi,murmurai-je.Lorsqu’ont’atrouvéecheztesparents,immobile,sansprononcerlemoindremot,lesilencequit’enveloppaitcommeunlinceul…C’étaitpareil,Ophie,mêmeencoreplusdifficileparcequej’aicettefilledanslapeau.

Elleasubiunénormetraumatisme,Dick,medit-elledoucement.Jenecroispasquequelquesjourssoientsuffisantspourreprendrelecoursdesaviecommes’ilnes’étaitrienpassé.

Cen’estpascequejeluidemande,m’énervai-je.Jeveuxjustequ’ellecomprennequ’ellen’estpasseule.Quesesparentssontlàpourelle,quelesZonardssontprésentseuxaussietquemoi,jenelalâcheraipas.Bordel,jesaistrèsbienquerienneserapluspareil,qu’elleestsemblableàunebêtesauvageetqu’ilvamefalloirl’apprivoisersijeveuxl’approcherànouveau.Maisjenepourrairiententersiellenereconnaitpasavoirétéviolée,siellesecachederrièreunsilenceflippant.Ilyatantdechosesquimerdent,Putain!Lefaitqu’ellenepeutplusavoirdegosses,cestestsHIVqu’elledoitsubir,sesblessuresquicommencentàdisparaîtremaisquisontpourelleunrappeldel’agression.

Franchement,Dick,jenesaispas…Ettoicommenttesens-tu?

Complètementinutileetimpuissant!Maisj’aieuuneidée.

Jelaluiexpliquaitandisqu’elleécarquillaitdesyeux,àlafoisétonnéeetconsternée.

Jenesaispassijedoist’applaudir,teféliciteroutedonneruneclaquederrièrelatêteentefustigeantdepenserqu’unetellechosepourraittoutarranger,maisj’avouequejesuiscurieuse,merévéla-t-elle.

TucroisqueJo’pourraitm’aider?

Ohcrois-moi,jesuissûrequ’iladoreraça!

Jelaissaiunsourireétirermeslèvres.J’espéraisseulementqueçamarche!

CHAPITRE30

Dilyanna

Pourlapremièrefoisdepuismonhospitalisation,jeparvinsàparleràmamèreàcœurouvert,luiracontantmahonte,mespeurs,mesangoisses.D’entendreDickmediretoutesceschosesavaitouvertunevanneenmoietj’avaislaisséécoulermapeine,macolère,monimpuissancefaceàlasituation.Monpèreavaitquittélapièce,àlafoismalàl’aiseetcompréhensifàl’idéequejeveuillediscuterseuledefemmeàfemme.

JeluiavaistoutracontédemaconversationavecDick,sansrienomettre,pasmêmelapartieoùilavouaitmedésirerencoremalgrémon…malgrémonviol!J’étaismêmeparvenueàéructercemot,avecdifficultécertesmaisilétaitsortidemeslèvresetj’avaiseul’impressiond’êtrelesorcierrouxdanscettesagahyperconnuequandilvomissaitdeslimacesencoreetencore.

ElleavaitsouriàlamentiondeDicketlesmotsqu’elleavaitprononcésmehantaientencorequelquesheuresplustard:«Tusais,mafille,Dickestunbongarçon,sonamourpourtoiestsincèreetils’inquièteréellementàtonsujet,cen’estpasunrôlequ’iljouedansl’espoird’attirerl’attentionsurluietqu’onleplaigne.Ilressenténormémentd’empathieàtonégard,aupointdesouffrirpsychologiquementautantquetoi.Tonpèreetmoiavionstoujourscettehantisedesavoirsitutetrouveraisunhommegentil,attentionné,quitetraiteraitcommeuneprincesse…Dickestcegarçon!

D’autresqueluiseraientpartisencourant,nevoulantpasaffronterl’horreurdecequetuasvécu…

Dickestresté!».

Nousavionsencoreparlépendantunmomentpuisjem’étaisendormie.Àmonréveil,jefusétonnéedevoirquej’étaisseule.C’étaitlapremièrefoisdepuismonagressionquepersonnen’étaitàmonchevet.

J’enprofitaipourmeleverseule.Cenefutpaschoseaisée…Desdouleursmevrillaientencorelescôtesmaissurtoutleventre.Pourtant,jeparvinsàarriverjusqu’àlaminusculesalledebains.Jeprisunelonguedouche…encore…avectoujourslamêmeimpression,cellequelasaletéquis’incrustaitenmoines’eniraitjamais.Pourtant,jefusétonnéederéaliserque…quemêmesimesjambestremblaient,mêmesijesouffraisencore,jemesentaisvivante.

Jejetaiuncoupd’œilaumiroirau-dessusdulavabo.Monvisageavaitrecouvrésonallurehabituelle,sijefaisaisbiensûrl’impassesurlescernesquiombraientmesjouesetsurlapeurquihantaitencoremesprunelles.Jemehâtaidemesécheretdécidaidem’habillerunpeu,mêmesijen’enavaispasréellementenvie,maisjecommençaisàenavoirmarred’êtreenchemisedenuitàlongueurdejournée.

J’enfilaiunleggingetunlongtee-shirtquem’avaitramenésMélina.Toutétaitcouvert,mapoitrine,mesjambesetjemesentis…ensécurité.

Jevenaisjustedemerallongerdansmonlit,unlégervoiledetranspirationau-dessusdeslèvreslorsquelaportes’ouvritsurDick.Ilétaitvêtud’unjeanetd’unblousonencuirqu’ilavaitferméjusqu’au

milieudesontorsealorsqu’àl’extérieurilfaisaitplusdevingt-cinqdegrés.Ilaffichaitunairsatisfaitetunlégersourireflottaitsurseslèvres.Jefronçailessourcilsetmedemandaicequ’ilmijotait.

Ils’installadanslefauteuil,lesjambescroiséesdevantluietposalesmainssursonventre.

Crachelemorceau,Dickens,luiordonnai-jeenposantmatêtesurl’oreiller.Qu’est-cequetuasfait?

Ilselevad’unbond,sedirigeaverslaporte,vérifiaàdroiteetàgauches’iln’yavaitpersonnelorsquej’entendisungémissement!J’ouvrislabouchelorsqueDickmerejoignit,ouvritsonblousonlentementet…

OhmonDieu,murmurai-jeentendantlamainverslapetitebouledepoilsquimeregardait,latêtepenchéesurlecôté.Unchiot!Tuasramenéunbébéchienàl’hôpital?!

Personnenem’avu,dit-il,fierdelui.

Ilposasurmonlitl’animalquisemitàgémir,àremuerlaqueueetàseprécipiterversmonvisagequ’ilsemitàlécherallégrement.Jenepusretenirunlégerrireetleserraicontremoi.J’inspiraiprofondément,ilsentait…lelait…uneodeurdouceâtrequim’apaisaetlorsquejenichaimonnezdanssonpelage,unelarmeroulasurmajoue,pourtant,encemomentprécis,j’étaisheureuse.

Je…jenecomprendspas,murmurai-je.Àquiestcetanimal?

Jepensequ’encemomenttuasplusbesoind’uncompagnonaffectueuxqued’unpetitami.Alorsjeteprésente…Chien!

Chien!m’écriai-jeenriant,ilnepeutpass’appelerChien!

Ça,c’estcertain,maiscommec’estàsonpropriétairedeluidonnerunnom,ilneteresteplusqu’àlebaptiser.

Pourmoi??Ilestvraimentpourmoi?demandai-jeenlecâlinantdoucement.

Oui,c’estunbergerallemandmâle,unefoisquevousserezpassésentrelesmainsd’undresseur,ilseraàlafoistonprotecteur,tondéfenseurettonmeilleurami,medit-ilenserrantlespoings.

Jecomprisalorsqu’ilculpabilisaitparrapportàcequim’étaitarrivé.

Dick,tun’yespourrien,murmurai-je.Je…Cesgarsmesuivaientdepuisquelquesjoursdéjà.Jesuiscertainequ’ilsmesurveillaientetqu’ilsattendaientlemomentoùj’étaisseulepouragir.

Maisilestlàleproblème,grondaDick.JEt’ailaisséeseule,sijen’étaispasparticesoir-lààcausedeSasha…

Ilsauraientquandmêmetrouvélemoyenpourm’agresser…J’étaisdansleurlignedemireet…

Cen’étaitpasunacteisolé,lâcha-t-ilsoudainenselaissanttomberdanslefauteuil.Ont’aditquetesagresseursavaientétéretrouvéslejour-même,cequ’onnet’apasdit,parcontre,c’étaitqu’ilsavaient

étépayéspourlefaire…

Que…Quoi?m’écriai-jeentremblant.Qui…Quipeutbienmedétesteraupointd’organisermonviol?QUI?

J’avaishurlécederniermot.Jen’enrevenaispas!Moiquipensaisavoirétéchoisieauhasardouparcequej’avaisouvertledispensaire,jedécouvraisàprésentqu’iln’enétaitrien,qu’onavaitpayépourquejesubisselepiredesoutrages.

S’ilteplaît,Dick,lesuppliai-je.Quim’afaitça?

Mike,souffla-t-il.C’estluiquiestderrièretoutça!

Mike?répétai-je.Jen’enrevienspas…Pourquoi?

Parcequetul’asrepousséetqu’ilnel’apassupporté,etaussiparcequec’estunjunkie.C’estluiquiavolélesmédocsdanslaréserve,etcen’étaitpaslapremièrefois.Iln’apasdémissionnédesonpostedeMédecinSansFrontières,ilaétégentimentpousséverslasortie,lorsquelesresponsablessesontrenducomptequelesfeuillesdestockétaienttrafiquéesetqu’ilprodiguaitsessoinsenéchangedefricoudefaveurssexuelleslorsquelafilleétait,selonsespropresmots,potable!Ilatoutavouéetattendsonprocès.Cequil’aincitéàte…blesser,c’estlefaitquetumecroyaisinnocentetc’estalorsqu’ilacomprisquejeneseraispassonboucémissaire.Ilneluirestaitqu’unesolutionpourdétournerles

soupçons…Uncambriolagequiauraitmaltournéetunevictimeàdéplorer…

Jen’étaispascenséesurvivre,c’estça?

Non…jesuisdésolé,murmura-t-il.

Toutescesrévélationseurentsurmoil’effetd’unélectrochoc.Aprèsdixjoursàm’êtreapitoyéesurmoi-même,c’étaitlacolèrequipritledessus.Commentunhommequej’admiraispoursonaltruisme,sondévouement,avait-ilpusemontreraussiignoble,aussihorrible?Jem’astreignispourtantàgardermoncalmeetlefaitd’avoirlechiotdansmesbrasquivenaitdes’endormirm’aidaitgrandement.

Approche-toi,murmurai-jeàDickenlevoyantabattu.

Ilseleva,s’assitauborddulit,etjemepenchaiversluipourglissermamainderrièresanuqueetl’attirerversmoi.Ilm’observaitd’unregardàlafoispleind’espoiretd’appréhension.Pourtant,jeposaimeslèvressurlessiennesdansunbaiserqui,j’espérais,luimontraitàquelpointj’étaisheureusedel’avoiràmescôtés.Ilnetentapasdeprendrel’initiative,secontentantderecevoirplutôtquededonner,etjenel’enaimaisqueplus.Ilavaitcomprisqu’ilmefaudraitunmomentavantdepouvoiraccepterdesgestesdetendresseetj’étaisbiendécidéecettefoisàmebattre,carilétaithorsdequestionquejelaisseMikepenserqu’ilavaitgagné.

Dickpoussaunprofondsoupiretrepritsaplacedanslefauteuil,maiscettefois,ilposasatêtesurmonoreilleretlechiotsenichaentrenous.

Commentvais-jepouvoirl’appeler?chuchotai-je.

2016estl’annéedes«M»,merenseignaDick.

Moka?Machoc?

M&M’S?Macaron?Mangue?

Marmelade,Mars,MacFleury?pouffai-je.

Macwrap?

Nouséclatâmesderiredeconcert.Dickcaressadoucementmajoue.

Jet’aimetusais,Dilyanna.Àunpointquetunet’imaginesmêmepas.

Jelelaissaiposerseslèvressurmapommettetoutenpoussantunsoupirdebien-être.

Mabrouk!m’écriai-jesoudain.C’étaitlamascotted’uneémissionavecdesanimauxetc’étaitunbergerallemandcommecetadorablechiot.

Mabrouk…j’aimebien,valida-t-illesyeuxfermés.J’espèresimplementqu’ilparviendraàs’entendreavecMaya!

Maya?!

Jeressentisledarddelajalousiemepiquerauvif.

Humm…J’avaispeurquetonmolossenesesenteseul,alorsjeluiaiprisunepetitecopine…

Bonsang,maistusaislasommedetravailqueçavadonnerdeuxchiensàlamaison?

Eneffet,maisimagine,deuxfoisplusd’amouràdonner,metaquina-t-il.

EtoùestMayaàprésent?luidemandai-je,curieuse.

Jonasl’aemmenéeàlaZone,ilveutvoirsiOphélieseraitprêteàenvisagerd’enavoirun.

Jenerépondisrienmaisjesavaisaufonddemoiquemonamiecraqueraittoutcommejel’avaisfait.

Mespaupièressefermèrentmaisunephraseentenduependantmadéprimemerevintenmémoire.

Dick,pourquoies-tuparticesoir-là?J’aientendumesparentsdiscuterentreeux.Lorsquetuassucequim’étaitarrivé,tuasquittél’hôpital,je…jevoudrais…comprendre…situveuxbien,balbutiai-je.

Jelesentisseraidiràmescôtés.Ilpritmamainquejeluiabandonnaietilinspiraprofondément.

Jesuispartidanslesquartierssudetjemesuisachetédequoimefaireunshoot,m’avoua-t-il.

Raconte-moi,Dick,raconte-moicommenttoutacommencé!luidis-jecalmement.

CHAPITRE31

Dick

«Raconte-moicommenttoutacommencé».J’avaislechoixentredeuxsolutions,m’ensortird’unepirouetteetfairecommesitoutallaitbienoumemettreànuettoutluiraconter,mêmes’ils’agissaitpourmoidemereplongerdansunpassédouloureux.Maiselleavaitledroitdesavoir…

J’avaisunfrère,commençai-jeàvoixbasse.Ils’appelaitDickson.Lorsquejesuisné,ilavaitdixansetfaisaitlafiertédemesparents.Deuxansplustard,cefutletourdeSashadeveniraumonde.Cen’estqu’engrandissantquej’airéaliséquemavien’étaitpassimerveilleusequeça.Jen’aijamaiseudenouveauxvêtements,toutétaitdesecondemain,lesrestesdeDickson.Jenecomprenaispaspourquoiàl’écoleonsemoquaitdemoi,demesaffaires,pourmoi,lefaitquejeflottedansunpulltroisfoistroplargeétaitnormal,pareilsimespiedsétaientrecroquevillésdansdeschaussurestroppetites.Puispetitàpetit,j’aicommencéàréaliserque…quejen’avaisaucuneexistencepropre.Jen’étaisqu’unedoublure.

J’aivécuenentendanttoujourslamêmechose,Dicksonestplusbeauquetoi,plusintelligent.Ilaeuun

«A»,tun’esmêmepasfichud’avoirun«B»…Etc’estunexempleparmitantd’autres.Jen’étaisqu’unabruti,unhandicapémental,jenevalaisrien,jedevaistoujoursprendreexemplesurDickson…

OhmonDieu,c’estaffreux,murmuraDilyanna.Commentunemèrepeut-elleagirdecettefaçon?

J’avaisvécuçatoutemavie,pourmoi,c’étaitnormal,répondis-jed’unhaussementd’épaules.Unjour,jemesuisretrouvéàl’hôpitalàcaused’uneforteréactionallergiqueauxamandes.Lemédecinaétécatégorique,c’étaitunalimentàbannirdemonalimentationsinonjerisquaisd’yrester.Quelquesjoursplustard,mamèreavaitpréparéungâteaupourlequatreheures,unbiscuitauxamandes,parcequec’étaitlepréférédeDicksonetqu’ilétaithorsdequestiondelepuniralorsquej’avaisunorganismeàlaconincapabledesupporterlamoindrenourriture.Jen’aimaispaslejusd’orange,pourtantj’étaisobligéd’enboireparcequeDickson,lui,aimaitça,pareilpourlessaucissesauxchouxquej’aimangéespendantdesjoursetdesjours,lanauséeauborddeslèvres,tandisqueDicksonattendaitquenotremèresortedelapiècepourdonnersonassietteauchienetserendreaufast-foodducoins’enfilerdeshamburgersetdesfrites.Sijefaisaisremarqueràmamèrequejen’aimaispastelaliment,ousiellemettaitunfilmqueDicksondésiraitvoiretquejedemandaispourmettreautrechose,ellememettaitune

gifleetm’insultaitdetouslesnoms,metraitantd’idiot,d’insatisfaitetj’enpasse…

EtavecSashaelleétaitpareille?

Non,Sashaestarrivéeparaccidentetmamèreatoujoursrefusédes’enoccuper,parcontre,elleétaitlapetiteprincessedenotrepère.Maiscedernierétaitrarementàlamaison,iltravaillaitbeaucoupetj’airéaliséàlalonguequ’ilnesupportaitpasl’alcoolismedesonépouse.

Tamèrebuvait?s’exclamaDilyanna,offusquée.

Oui,depuisleplusloinquejem’ensouvienne.C’étaitunapéritif,uneoudeuxbières,unverredevin,undigestif,etce,àchaquerepas…PuisDicksonestmort.J’avaishuitans,ilenavaitdix-huit.Direquemamèreaétédévastéeseraituneuphémisme,jepense…jecroisqu’elles’estarrêtéedevivreàcemoment-làetelleaadoptéuncomportementautodestructeur.C’étaitdesbouteillesdevodkaqu’ellevidaitàlongueurdejournée,comatantsurledivan.Maiselleavaitl’alcoolmauvaisets’enprenaitperpétuellementàmoi,seplaignantquejen’étaisqu’unbonàrien,quejamaisDicksonn’auraitagicommejelefaisais.Pourtant,j’essayais,Dily,jevoulaisqu’ellem’aimeautantquejel’aimais…Jesavaisqu’elleappréciaitparfoisboireunthéàlamentheavecunecuillèredemiel.Unjour,alorsqu’elleseplaignaitqu’ellesesentaitmal,jeluienaipréparéun,elleyagoûté,l’arecrachéausolavantdejeterlatassesurlemurenhurlantquej’essayaisdel’empoisonner,queDicksonsavaitfaireunbonthéetquelàencorejen’étaisqu’unincapable.Alorsj’aireportétoutemonaffectionsurSasha,quielle,avaitbesoindemoi.Peuimportesimespâtesétaienttropcuitesousilesboissonsn’étaientpasassezfraîches,ellemeremerciaitavecunsourireetungroscâlin.

Ettonpère,ilnepouvaitpasignorerquesafemmesedétruisaitàpetitfeu,non?

Ils’estjetéàcorpsperdudansletravail,restantaubureautardlesoir,leweek-end,nousnelevoyionspresqueplusetc’estainsiquej’aigrandi,entouréparl’indifférenced’unpère,lahained’unemèreetd’unepetitesœurquejedevaisgérer.Tusais,poursuivis-je,Dicksonavaitunchien,unadorablelabradorquis’appelaitSable.Maiscommeiln’étaitjamaisàlamaison,c’estmoiquim’enoccupais,ilétaitmonmeilleurami,carsefairedescopainsalorsquenousétionsdansunesituationfamilialedéplorable,cen’estpaslepied.Auretourdel’enterrement,j’aicherchépartoutsansletrouver,lorsquej’aidemandéàmamèreoùétaitSable,ellem’aréponduquejen’étaisqu’unpetitvoleur,queSableétaitlechiendeDickson,paslemien,etquejen’avaispasledroitdel’aimerparcequ’ilnem’appartenait

pas.Elleavaitdemandéàundesvoisinsdel’emmenerdansunrefugependantquenousenterrionsson…

véritablemaître.

Maisc’étaitdelavéritablecruauté!s’exclamaDilyanna,outrée.Pourquoipersonnen’afaitdedéclarationsauxservicesdel’enfance?Lesinfirmièresscolairesdevaientbienserendrecomptedevotreconditiondevie,non?

Nousavionsapprisàmentir,àdévierlessoupçons…Sashaetmoiétionsdevenuslesprosdumensonge.

C’estpourcetteraisonquetuas…craqué?medemanda-t-elle.

Non,j’avaiscadenassémoncœuretàpartSasha,jenelaissaispersonneyentrer,maisilyaeulapubertéettoutcequeçacomporte,lechangementdecorps,d’esprit…Jenepouvaisplusdormirlanuittantquemamèren’étaitpastombéedansunsommeild’ivrogneetjepeuxtedirequ’ellen’yarrivaitqueversdeuxoutroisheuresdumatin.Alleraucollègem’étaittrèsdifficile,carjem’endormaissouventenclasse,maispournepasincriminermesparents,j’aicommencéàjoueraucaïd,mecomportantcommeungrosconaveclesprofs,commeça,letempsqu’ilsétaientsurmondos,ilsnepouvaientpass’imaginerl’enferquenousvivionsàlamaison.Puisilyaeucettescèneeffroyable.

Jeprisuneprofondeinspirationetfermailesyeux.

Jefêtaismesseizeansetcommetoujours,àpartSasha,toutlemondem’avaitoublié.Alors,jenesaispascequim’apris…J’aiempruntélescooterdeDicksonquitraînaitencoredanslegarageetjesuisalléfaireuntour,maisj’ignoraisquel’enginavaitunproblème.J’aieuunaccident…Deuxsemainesd’hostomaisjenem’attendaispasàl’engueuladequejemesuispriseenrentrant.Pourfairebref,jen’étaisqu’unvoyou,pire,unvoleur,parcequej’avaisosém’enprendreauxaffairesdeDickson,ellem’agifléetm’aditquejeneseraistoujoursqu’unecopie,unedoublureimparfaite,etquejen’arriveraisjamaisàlachevilledesonfilspréféré.Elleaajoutéquemevoirluidonnaitlanauséeetquec’étaitpourcetteraisonqu’ellebuvaitetqu’enyréfléchissantbien,Dieuauraitdûluilaissersonfilsetmeprendremoi,parcequ’undébileprofondn’apassaplacesurTerre.

C’esthorrible,ohmonDieu,Dick,jet’enprie,nepleurepas,mesupplia-t-ellealorsquejen’avaismêmepasconsciencequemeslarmescoulaientsurmesjours.

Maisilfallaitquejepoursuive,ilfallaitqu’ellesache…

J’aipétéuncâblecejour-là.Dèsqu’elleaquittél’appartement,j’aivoululafairesouffrirautantqu’ellevenaitdemeblesser.JesuisallédanslachambredeDicksonquiétaitrestéeintacte,personnen’avaitledroitd’yaller,nimêmed’approcherlaporteet…etj’aiexplosé,j’aitoutcassé,arraché,jevoulaiseffacersonsouvenirpourquemamèreréalisequemoij’étaislà…Etc’estàcemoment-làqu’unelatteduplanchers’estsoulevée…Ilyavaitdufric,beaucoupdefric,del’herbeetuncarnet.J’airéaliséalorsquelefilsparfaitétaitundealeretquesurlecarnetétaitaffichélenomdesesclients.J’aiéclatéderireunlongmomentavantdeprendreconsciencedecequej’avaisfait,duchagrindemamèrelorsqu’ellerentrerait,dufaitqu’ellepréféraitmevoirmort…Alorsj’aiemportéladrogue,l’argentdansmachambre,j’aisortiquelquesbillets,misunpeud’herbedansuneenveloppeetj’aiprisladirectiondesquartierssud…Deuxheuresplustard,jefumaismonpremierjoint!

Ettuasmislespiedsdansunengrenagedontilestdifficiledesortir,comprit-ellealors.

Oui,c’estça,soupirai-je.Çaaétéladescenteauxenfers.Lapremièrefoisquejesuisretournéchezmoi,cenefutqu’unesemaineplustard.Jepuaislabeuh,mesyeuxétaientinjectésdesang,maisjemesentaisbien,j’étaissurmonpetitnuage,jevoyaisleslèvresdemamèrebougermaissansentendreunseulmot.C’étaitlepied!JenesaispasquiavaitrangélachambredeDickson,maistoutcequejen’avaispasbriséétaitdenouveauàsaplace,commeunvéritablemémorial.Maisl’ambiancedelamaisonm’avitefaitsortirdema…transe,alorsaulieud’attendreàl’appartementquemamères’endorme,jefonçaiauPandémonium.Çaaduréjusqu’àmesdix-huitans.Là,étonnamment,mesparentssesontrappelésdemonanniversaireetm’ontclaquélaporte.C’estlàqueSashaestintervenue,detouteévidence,monproblèmed’addictionavaitétérepéré.Ellelesasuppliésdemedonnerunechanceetpendantqu’ellelefaisait,jeriais,jenepouvaispasm’enempêcher,alors,j’aipoussémamèresurlecôté,j’airassemblémesaffairesetj’aiquittél’appartement.Uneheureplustard,Sasham’arejoint.Lesdeuxannéesquiontsuivi,jenepeuxpastedireexactementcequejefaisais…Toutestensevelidansunénormebrouillard,jemerappellequej’avaistoujoursdel’argentpourm’achetermadoseetça,c’étaitsuffisant.

Commentt’enes-tusorti?

Sasha!Unjour,jenesaispascequis’estpassé,elleacraqué,elleestalléeparleraveclamamandeTimmiequiluiadonnélenomd’unmecquiaidaitlespersonnesquienavaientbesoin.C’estainsique

Sasham’aentraînéchezJonas.Iln’apaseubesoind’explications,monaspectétaitbiensuffisant.Ilatentédem’aider,maisjenevoulaisrienentendre,j’étaisdéjàtropatteintpourça…Puisunjourquej’étaisunpeumoinsdéfoncéquelesautres,ilm’aentraînédehorsetm’aplongélatêtedansunimmensebaquetd’eau,unefois,deux,trois…Puism’aobligéàmeregarderdansuneglaceenmedemandantcequej’yvoyais…Lesoirmêmej’entraisendésintox!

Jeprésumequeçan’apasétéfacile.

Ohnon,pasdutout,maisJonasmefaisaitconfiance.Ilm’avaitaccueilli,ainsiquemasœur,ilacontinuédeveillersurmoiàmasortie,m’obligeantàtrouverdespetitsboulots.J’yailaisséquelquesneurones,maisaveclerecul,jemedisquejesuisunsurvivant.Jen’aichopénid’hépatite,nileSIDA,jen’avaisencorejamaisbaisé,doncpasdeMaladiesSexuellementTransmissibleset…

Çaaussijesuiscurieuse,commentsefait-ilquetun’asjamaiseudepetitescopines?demandaDilyannaenfronçantlessourcils.Est-cequ’ellessonttoutesaveugles?Tuescanon,gentil,amusantet…

C’estleregardquetuposessurmoiquiestfaussé,luidis-jesincèrement.

Alorstantmieuxpourmoi,soupira-t-elletandisquesesyeuxsefermaient.Dick,tun’aspasreplongé,n’est-cepas?

Non,jenel’aipasfait,avouai-je,mêmesij’avaisl’aiguilledansmaveine,jenesuispasparvenuàappuyersurlepiston.

Pourquoi?

Parcequemonamourpourtoivauttouslessacrificesetquetuesbeaucouptropimportantepourmoipourquejet’oubliedansdesparadisartificiels.

Jesuisfièredetoi…Jet’aime,Dick.

Sesyeuxsefermèrentsurcesderniersmotsetjesentisuneboulegrossirdansmagorge.

Tuvois,chuchotai-jeàMabrouk,c’estpourçaquejemedoisderesterclean,parcequetamaîtresseestmerveilleuseetquemêmesijeneleméritepas,ellem’aime.

CHAPITRE32

Dilyanna

C’estuncauchemarquim’avaitréveilléeàl’aube,j’avaisrevulesvisagesdemesagresseurstandisqu’ilsmeviolaientsauvagement.Jem’étaislevéeetj’avaisreprisunelonguedouche,sachanttrèsbienquecescénarioallaitserépéterencoreetencorependantunmoment.Aujourd’huiétaitlejourdemasortieetjen’avaistoujourspastrouvéderéponseàlaquestionquejemeposaisdepuisquelquesjours.

Oùallais-jepoursuivremaconvalescence?

Avantmonagressionj’avaisplusoumoinsemménagéchezDick,maissijedevaisêtrehonnête,j’avaispeur,peurdemeretrouveravecunhommedanssonintimité,peurquejenepuissepascontrôlermescauchemars,peurquejesoisincapabledesupportersonaffection,sesmarquesdetendresse.J’avaisaussilechoixdecontinueràvivrechezmesparents,maislàencore,jenemevoyaispasleurfairevivremesangoissesauquotidien,mêmesijesavaisqu’ilsleferaientavecplaisir.

J’enétaislàdansmesréflexionslorsqu’Ophéliefitsonapparition.Jelavisfranchirlaporteenmarchearrière,etrireavecl’unedesinfirmières.Jenecomprenaispascommentellepouvaitêtreaussiautonomeetsurtoutsained’espritaprèstoutcequ’elleavaitsubicesderniersmois.

Salut,Dily,j’étaisenvillealorsj’aidécidédepousserunboutjusqu’ici!Prêtepourlegrandretour?

Mouais,répondis-jesansconviction,onvadireçacommeça!

Ohlà,là,unpetitcoupdedéprimecematin?medemanda-t-elleenfronçantlessourcils.Quesepasse-t-il?

Jenesaisplusoùj’ensuis,marmonnai-je.Hierj’étaispersuadéequetoutiraitbien,qu’aujourd’huijerentreraisàlamaisondulacavecDick,quejecâlineraisleschiotspendantquemonhommeprépareraitledîner…

Etqu’est-cequiachangé?

Jemesuisréveilléeenhurlantetenpleurantàcaused’unfichurêveetdepuisjenecessedemeposerdesquestions,demedemandersij’ailedroitd’infligerçaàmesproches,avouai-je.

Dily,tuaslachancequetesparentst’aiment.Ilsfontpartiedel’Élite,sontinvitéspartout,maisc’esttoiqu’ilsfontpasserenpriorité,toujours,medit-elleavecconviction.Tunepeuxpasleurrefuserle

droitdes’inquiéterpourtoi.Moi,mesparentsm’ontenfermée,obligéeàavorter,envoyéeàl’étrangeraveclesJocheti!Aleksanderatentéd’abuserdemoiet,commejemedéfendais,ilaessayédemetuerenjetantsavoituredansunravin,j’aiperdumonenfant,l’usagedemesjambes…Mesparentsn’ontjamaislevélepetitdoigtpourmoi!

Commentt’enes-tusortie,Ophélie?Commentes-tuparvenueàsurmontertoutça?!

Jenevaispastementir,grâceauxZonards.S’ilsn’avaientpasétélà,dansmavie,jecroisquej’auraisfiniparmesuicider,merépondit-ellecalmement.Maiscesmecsetcesfilles-lànesontpasdestendres,tupeuxlesrepousser,lesjeterdehorsenlespriantdeprendrelaporte,ilstrouverontunmoyenderentrerparlafenêtre,ouparlacheminées’illefaut!Ilsnelâchentrien,pirequedeschiensavecleursos…Mélina…Bonsang,j’aiétéaussiinfecteavecellequ’avectoi,peut-êtremêmepire,jel’aihumiliée,frappée,rabaisséeplusbasqueterre,maisellen’ajamaisbaissélesbras,ellem’afaittravaillerencoreetencorejusqu’àcequejeparvienneàmusclermesjambes,mesbras…Àprésent,jevaisàlasalledesportsdeuxfoisparsemaineavecDicketBoubaquisesontmisàlamuscupourmoi,pourcontinueràmepousser.Dickarefaittoutelamaison,etmêmeencoremaintenant,ill’améliorepourmefaciliterlequotidien.EtjeneteparlemêmepasdeLucky…Onm’afaituncoup…uncoupdepute,iln’yapasd’autremotpourqualifierlafaçondontellesontagiavecmoi…Suzie,uneex-ZonardeetSasha,lasœurdeDick,onttentédemedétruire.Suzieparcolère,Sasha…Jenesaismêmepas,parjalousie,parcequeLuckyetmoiétionsprochesmaistouslesprogrèsquej’avaisfaits,enunesoirée,iln’enexistaitplusrien.J’aivoulumourir,Dily,maisLuckyétaitlà,ilnem’apaslâchée…Ilsm’onttousaidée,tous…EtjenepeuxquebénirlecielpouravoirunjourmisJonasDrioneauetlesZonardssurmonchemin.

Jerestaiunmomentsilencieuse,nesachantquefairedecesrévélations.Lecasd’Ophélieétaitdifférentdumien,maisquiétaitleplusàplaindre?Lesséquellesd’Ophélieétaientvisiblesetirréversiblestandisquelesmiennessetrouvaientdansmonâme.

Dickneresterapasàl’écart,medit-ellesoudain.TupeuxdéménageràTombouctousituledésires,maisiltesuivra,ilnesupporterapasdetesavoirloindelui.Ilabeaucoupculpabilisé.Nousavonsparlélongtemps,ils’enveutd’avoirétéfaibleaupointdeselaisseratteindreparlesparolesdeSasha.

Enmêmetemps,l’interrompis-je,elles’estcomportéecommeunevraiegarce.

Jeluiracontaialorstoutcequis’étaitpassécesoir-làjusqu’àcequeDickprennelafuite.

Tuveuxdirequec’estJean-Charlessonmac?s’écria-t-elleavantdeposerunemainsurseslèvres.

Maiscommentenest-ellearrivéelà?Merde,Dickcumulaitlesboulots,elleavaitunjobàmi-temps,financièrementilss’ensortaient!

Jen’enaiaucuneidée.Elleétaitdéjàvenueaudispensairealorsquenousn’étionspasencoreouverts…Elleaététrèsvindicativeausujetdel’Élite,desfillescommemoiquimenaientlesgarsdeson…clanparleurqueue,lesémasculantpsychiquement…

Etpourtantellefaitletrottoirpourundesnôtres,marmonnaOphélie.Jenecomprendspascettefille!

Moinonplus…Pourtant…Merde,j’ail’impressionqu’ellen’estpasheureuse!

Tum’excuseras,maisjen’aipastropenviedeladéfendre,nimêmed’avoirpitiéd’elle.Elleafaitseschoix,desmauvais…Maiscequejeneluipardonneraipas,c’estd’avoirétéaussiabjecteavecDick.Ellen’avaitpasledroit.Dick…Dick,c’estlechouchoudesfilles,c’estnotreconfident,commeunamigay,sansl’être,tuvois.Onpeuttoutluiraconter,pleurerdanssesbras,l’inviteràmangerunmorceau…Non,ellen’avaitpasledroit,répétaOphélieencrispantlespoings.

JeréalisaiàquelpointDickétaitappréciépartoutcepetitgroupeetunevagued’amourm’envahit.

Jel’aimeOphélie,maisj’aipeur,peurdemesréactions,deleblesseraupointdelerenvoyerdanslesquartierssudàlarecherched’unedose,gémis-je.

Ilneleferapas!S’ilnel’apasfaitaprèslascèneavecSasha,aprèst’avoirdécouvertesurlesoldudispensaire,ilneleferaplusjamais!Jenetedispasqu’iln’ypenserapas,qu’iln’aurapasunjour,unmanque,maisilnepasserapasàl’actecarsonamourpourtoietsonamitiépournoussontplusfortsquesonaddiction.

Tucroisenlui,constatai-je.

Oui,medit-ellesimplement.Toutcommejesaisqu’ilserapatientavectoi.Dickestunêtresensible,ilnet’approcheraquelorsquetuserasprête,pasavant,maistuasbesoindelui,Dilyanna,toutcommeilabesoindetesavoiràsescôtés.

Jecroisquel’aided’unpsyneserapassuperflu,tuenpensesquoi?luidemandai-je.

AppelleAngèle!Celuiqu’elleconsulteestautop,enfinpourunpsy!ironisa-t-elle.

Jen’euspasl’opportunitéderépondre.Laportes’ouvritsurlemédecinquivenaitsignermespapiersdesortie.Unevagued’angoissemesaisitdèsqu’ilpartitetjemelaissaitombersurlefauteuil,lesoufflecourt.

Respiredoucement,m’ordonnagentimentOphélie,uneinspirationàlafois.

Je…Jenevaispasyarriver,soufflai-jefortement.

Tuneveuxquandmêmepasrestericiindéfinimentnon??Alorsinspireparlenez,lentement,etsouffleparlabouche.

Jesentisdenouveauuncourantd’airetunjuron…Dick…Ilseprécipitaets’agenouilladevantmoi,prenantmonvisageencoupeentresesmains.

Dily,machérie,regarde-moi,ouic’estça…Jesuisvenutechercher,moncœur.Boubanousattendenbas…C’estluiquivanousrameneràlamaison.Aufait,jenet’aipasraconté…Tusaiscequ’afaitMabrouck?Iladormidansnotrelitcettenuit.Jen’aipaseulecœurdel’enchasser,ilétaittropmignonavecsesgrandsyeuxtouttristes…

Et…EtMaya?

Ohtuverrais,elleestsiobéissante.Elleasonpetitpanierdanslesalon,pasloindelatéléetelle

regardelesémissions,penchantsapetitetêteàgaucheàdroite,commesiellecherchaitàcomprendrece

quisepassesoussesyeux.

Merci,Dick,murmurai-jeenréalisantquelacriseétaitpassée.

Tuvois,mapuce,mechuchotaOphélietandisqueDicks’éloignaitdequelquespas,tuasbesoindelui.

J’opinaid’unsignedetête.Ophélieavaitraison.SiDickn’avaitpasétélà,jenesaispassijeseraisparvenueàreprendrelecontrôle,mêmesielle-mêmeavaitétéd’ungrandsecours.

Dick,ramène-moiàlamaison,énonçai-jecalmement.

Jevaisd’aborddéposertesaffairesàlavoitureetjerevienstechercher.

Ilsesaisitdemonsacdevoyageetdelatroussedetoilettequiétaitposéesurledessusetquittalapièceaprèsavoirfrôlémeslèvresd’unbaisersilégerquej’euspresquel’impressiondenepaslesentir.

Tuessûredetoi?s’enquitOphélie,unlégersourireétirantseslèvres.

Oui,luirépondis-jeavecassurance.Tuasvucommentilagérélasituation?Ilestrestétotalementzen,ilnes’estpasénervé,n’apaseudemouvementd’exaspération.C’estcequ’ilmefaut…

Jetel’avaisdit,Dickestunamour.

Jeluipressailamainetmelevailentement.

Sortonsdecettechambre,parcequesij’yresteencoreunjourdeplus,jevaisfinirparneplusvouloirensortir.

J’avançaiverslasortielorsquemesjambessemirentàtrembler.

Bordel,jurai-je,j’ail’impressiond’êtreuncondamnésurlepointd’êtrelibérédeprison.J’ailatrouilledecequisepasseraàl’extérieur,duregarddesgens,deneplussentircesmursautourdemoi,quipourtantmeprotégeaient.

Eh,medit-elleenmedonnantuncoupdecoude,imagine-toidanslapeaudecetaulard,àtonavis,qu’est-cequ’ilferaitenpremier?

Mangerunbonrepasetbaiser,m’écriai-jeavantdeposerunemainsurmabouche.Ohmerde,jenesuispascenséediredetelleschoses…

Tuvois,tuviensdéjàdefaireunpasverslaguérison,s’esclaffa-t-elle.

Jeréalisaiqu’Ophélien’avaitpeut-êtrepartort,sijeparvenaisàpenseràdetelleschoses,alorsc’estquejem’ensortiraisetc’estenprenantuneprofondeinspirationquejefranchislaporte.

CHAPITRE33

Dick

Seremettred’unviolestdifficile…trèsdifficile.Etjepeuxdirequ’enfairel’expériencequandçavoustouchepersonnellement,ben…çacraint!CesderniersmoisnefurentpasseulementdouloureuxpourDilyanna,maisaussipoursesproches:sesparents…moi!

Certainspourraientpenserqueseulelavictimeabesoindesereconstruireaprèsuneagressionetbienlàaussi,c’estfaux,parcequ’ilyatouslesà-côtésauxquelsonnepensaitpasetquiviennentvouspercuterdefront.

Lesdeuxpremiersmois,Dilyannaseréveillaitensursaut,hurlantoupleurantquecesoitàtroisheuresouàcinqheuresdumat’.Elleserejetaitenarrière,serecroquevillaitsurelle-mêmeensebalançantd’avantenarrière,évitantmonregard…Danstoutautrecas,sicen’eutétéqu’unsimplecauchemar,jel’auraisprisedansmesbras,lacâlinantjusqu’àcequ’ellesepelotonnecontremoietquejeluifasseoubliercemauvaisrêvedefaçonsensuelle.Là,lorsqueçaarrivait,jenepouvaisquemelever,luipréparerunetisanequejeluidéposaisentresesmainsglacéesetattendrequ’ellesecalme.Ellebuvaitalorslentement,lecorpsparcourudefrissons,attendantquelachaleurdubreuvageypénètreetlaréchauffe.Commes’ilressentaitsonmal-être,Mabrouks’approchaitalorsengémissant,etelleleserraitfortcontreelle,cherchantdanscettepetitebouledepoilsleréconfortquej’étaispourtantprêtàluioffrir.

Maiselleneserendormaitpas,secontentantdecontemplerleplafonddesesbeauxyeuxtristes.Parfois,mamainfrôlaitlasienneetelletressaillaitviolemmentavantdem’autorisertoutefoisàpressersesdoigtsavecdouceur.

Pourtant,ellefaisaitdesefforts,m’autorisantàposermeslèvressursabouche,àluitenirlamain,àl’étreindredoucement,maisjevoyaisqu’àdenombreusesreprises,elles’obligeaitànepasmerepousser,etçamefaisaitmal.Etellenepouvaitmanquerdelevoirdansmesyeuxetçalapeinaitelleaussi,rendantcecercleencoreplusvicieux.Petitàpetitpourtant,cescauchemarssedissipèrent,nerevenantlaperturberqu’unefoisparsemaine,puisunefoistouslesquinzejours,avantderevenirenforcependantplusieursjoursd’affilée,lalaissantàchaquefoisdansunétatdepaniquesiintensequ’ilmefallaittoutemapatienceettoutmonamourpourl’aideràreprendrepied…

Demême,ilafalluunpetitmomentavantquejenemerendecomptequeDilyannaavaitpeurdesortir,qu’ellenesesentaitensécuritéqu’entrelesmursdelamaisondulac.Ellen’avaitpasmisunpieddehorsetàchaquefoisquejeluiproposaisderendrevisiteauxZonards,elleinsistaitpourquecesoiteuxquiviennent,m’expliquantqu’ellepréféraitlesinviteraulac,maispasàl’extérieurparcequ’ilfaisaittropchaud,ouparcequ’onseraitembêtéspardesmoustiques.Jamaisjen’avaisréaliséqu’ellen’avaitpasmislenezdehorsdepuisqu’elleétaitrentréedel’hôpital.Làaussi,j’avaisdûfairepreuvedepatienceet

d’originalitéafinqu’elleacceptetoutd’aborddes’installersurlaterrasse,puissurunechaiselongueauborddulac.Maisellenevoulaitpasyallerseule,alorsleschiensetmoil’accompagnions,puispetitàpetitjem’éloignais,jouantàproximitéavecMaya,l’abandonnantàlagardedeMabrouckquisemblaitavoirparfaitementcompriscequisepassaitetquinelalâchaitpasd’unesemelle.Aufildesjours,elleyrestaitdeplusenpluslongtempspourfinirparpasseruneaprès-midicomplèteàbronzerausoleiltandisquedelafenêtredelacuisine,jechialaisdebonheur.

Puisilyavaiteucettepetitevictoireenaoût,lorsqu’elleavaitacceptédeserendreenvillechezsonpsy.Elleavaittremblépendanttoutletrajet,regardantàgaucheàdroite,commesilesimplefaitdesortirallaitfairesurgirtouslesdétraquéssexuelsducoin.Leretourfutpluspaisible,était-celafatigue?À

causedesparolesdupsy?Entoutcas,elles’étaitcolléecontremahanche,attendantquejeglissemonbrasautourdesatailleetc’estenlacésquenousétionsrentrés.C’estlàaussiqu’elleadécidéquenousdevionsavoiruneconversation!

J’avoueavoirflippéàmort,carc’estbienconnu,unefillequiaunetelleexigence,c’estparcequ’elledécidedevousquitterouqu’elleveutsemarier…Maisnon,cen’étaitriendetoutça,DilyvoulaitseulementmedonnerunpeuplusdelibertéetquejereprenneletravailaudispensaireavecMaxquiétaitdébordé.J’avaisbeaucoupd’appréhension,j’avaispeurdelalaisserseule,peurderetourneràproximitéduPandémonium,peurderetrouvermesanciensdémons.Maiselleavaitinsisté,arguantlefaitqu’ilfallaitàprésentqu’ellefassedeseffortsparelle-mêmeetqu’ilétaittempspourelled’avancer.

Celle-là,jenel’avaispasvuvenir,alorsc’estmoiquirendisvisiteaupsy.J’avaistellementdequestionsàluiposer,tellementd’inquiétudesàpartager.Nousavonsdiscutépendantdeuxlonguesheures,jeluiaifaitpartdemonimpuissancefaceàladouleurdeDilyanna,macolèreenverssesbourreaux,devantseslarmes,colèrequepourtantjeluicachaispournepaslablesser…Puismaplusgrandepeur,celledecommentappréhenderlesexeaprèsunetelleagression,lacraintequ’ellenetransposeleursvisagessurlemienetqu’elleneveuilleplusquejel’approcheetaussi…etaussimafaiblessefaceàcequis’étaitpasséetquimepoussaitparfoisàvouloirsortirunjointouàmefaireunshoot,justepouroublier…

Ilm’aalorsrassuré,medisantquetoutcequejeressentaisétaitnormal,qu’àprésentDilyannadevraitfaireunénormetravailsurelle-mêmeetquemaprésenceluipermettaitdes’appuyersurmoicommeunebéquille,alorsqu’ilétaittempspourelledepasseràlarééducation.LesZonardspromirentdeveillersurellependantmonabsence…

C’estcommeçaquedébutseptembre,jereprisletravail,toutenm’inquiétantpourelleaupointdelabombarderdemessagesdèsquej’avaisunmomentdelibre.PetitàpetitMaxmedonnaitdeplusenplusderesponsabilitéssibienquequelquessemainesplustard,ilmeproposaitdesuivreuneformationpourdeveniraide-soignant.Ilétaittoutàfaitprêtàm’aidersijedécidaisdemelancer.Ceseraituneformationdedixmois…Jeluiavaispromisd’yréfléchir.Enattendant,jetravaillaisaveclui.Àdenombreusesreprises,despatientsmedemandèrentdesnouvellesdeDilyannaetdeuxfoisj’étaismêmerentréàlamaisonavecdespetitsprésents;unbouquetdefleurs,uneboîtedechocolats…cequil’avaitfaitfondreenlarmesdansmesbras.

LeDocteurValenceavaitégalementinsistésurlefaitqueDilyannaétaitàprésentsemblableàunanimalsauvageetquepourl’apprivoiser,ilmefaudraitfairepreuved’énormémentdepatienceetsurtoutnepasbaisserlesbras.Avantdefairelemoindregesteenverselle,ilfallaitquejeleluidiseafinqu’ellepuisses’ypréparer.Jel’avaisregardé,incrédule.«Ouvrelabouchechériequej’yfourremalangue»,

«Jevaistepeloterlenichondroitpendantquejetesucerailegauche»…Non,sansblague,ilycroyaitréellementàcetteconnerie.Dilyannaétaitforte,malgrécequ’enpensaitValence.

Aussi,décidai-jedelaconquériràmafaçon…Lesoirmême,jel’avaisinvitéeàregarderunfilmet,pourlapremièrefois,m’installaidetellesortequ’ellesoitnichéeentremescuisses,sondosplacécontremontorse,c’étaituneromanceunpeufleurbleue,maisquiconvenaitparfaitementàlasituation…Sielles’étaitraidielepremierquartd’heure,voyantquejenebougeaispas,jem’étaisenhardienposantmamainàplatsursonventre…Denouveauelles’étaitstatufiée…avantdesedétendreetdeprofiterdurestantdufilm.Jem’enétaistenulà,etj’enavaisfaitdemêmelelendemain,lesurlendemain,jusqu’àcequ’ellesachequejeneferaisrienqu’elleneveuille.

Puis,petitàpetit,mesgestessefirentplusaudacieuxetunmoisplustard,elleacceptaitquejetouchesesseins,au-dessusdumaillotcertes,maisjevoyaisbien,auxréactionsdesoncorps,qu’ellen’étaitpasindifférente…Puislesbaiserssesontintensifiés,mescaressessontdevenuesplusintimes,pluspersuasivesetsiparfoisellesebraquait,laplupartdutempsellelesacceptaitetmême,detempsentempslesdemandait…

Tumesemblesbienloin,Dick,toutvabien?

Maxm’observait,soucieux,maisjelegratifiaid’unsourire.

Çava,murmurai-je.J’ail’impressionqueleplusdurestderrièrenous!

Alorsc’estparfait.Onterminelà,pourcesoir!Jecroisqu’ilvageleretj’aihâtederentrerchezmoi!

Nousnousregardâmestouslesdeux,exaspérés.Nousétionsàl’approchedesfêtesdeNoëletledispensairenedésemplissaitpas,pourtantMaxetmoiavionshâtedefinir,moipourretrouverDilyetMaxpourretrouverDevon,soncompagnon.Maisdetouteévidenceunnouveaupatientvenaitd’arriver.

J’yvais,soupirai-je.J’espèrequeceseraledernierpourquejepuisserejoindreDily.Ellememanque.

Àmoiaussi,merévélaMax.Çafaitsixmoisàprésent,tucroisqu’ellepourradépasserçaunjour?

Entoutcas,j’œuvrepour!

Jemeretournaibrusquementenentendantsavoix.Dilyannaétaitlà,levisagelivide,lesjambestremblantesetpourtant,elleétaitmagnifique.C’étaitlapremièrefoisqu’elleremettaitlespiedsaudispensairedepuissonviol.Jeremarquaiqu’ellen’étaitpasseule.OutreJonasquisouriaitcalmement,Mabrouckl’accompagnaitetrestaitposémentassisàsespieds,véritablegardeducorps.

Dily,quefais-tulà?Tuvasbien?m’écriai-jeenmeprécipitantverselle.

Çava,merépondit-elleencaressanttendrementmajoue,çafaitpartiedemathérapie,revenirsurles

lieuxdel’agression.Jen’yseraispasarrivésansJo’.

Jen’aifaitqueteservirdechauffeur,luirépondit-ildansunsourire,maissivousêtesprêts,jevous

ramènetouslesdeuxàlamaison.Jaysonnousapréparéunrepaspré-Noëlafinquenousgoûtionsauxplatsqu’ilvaproposeràl’aubergepourleréveillon.

Onpeutterejoindreplustard?demandaDilyannaenseretournantversmonami.IlfautquejediscuteavecDick.

Bon,c’estlemomentpourmoidemettreégalementlesvoiles,s’écriaMaxenapprochantdeDilyanna.Jesuiscontentdetevoiretj’espèrequetuvasbientôtreprendreletravail,n’oubliepasquetufaisdusuperboulot.

J’ypense,Max,sérieusement,maisilfaudraaccepterMabrouck.

Sansproblème,luirépondit-ilenbaisantsajoue.

Jenepusreteniruneexclamationdejoieenvoyantqu’ellenel’avaitpasrepoussé,mieux,qu’ellel’avaitserrécontreellequelquessecondes.J’attendisqu’ilsoitpartiainsiqueJonaspourverrouillerderrièreeux.

Tuveuxvraimentqu’ondiscuteici?demandai-je.

Oui,allonsdanslasallederepos.

Dilyannasebaissa,retiralalaissedeMabrouckettandisqu’ildéambulaitdanssonnouvelenvironnement,m’entraînaverslasallederepos.Jem’installaidanslefauteuiltandisqu’elleprenait

placesurlecanapé,enfacedemoi.Elletrituraitsonlongpullenlaineetjevisqu’elleétaitmalàl’aise.

Jevoudraism’excuser,commença-t-elle,melaissantsansvoix.

Jerestaiainsiquelquesecondes,laboucheouverte,avantd’éclater.

Maispourquoitut’excuses,putain?Tun’asrienàtefairepardonner,merde!

Touscesmoisdepatience,detristesse,c’estàmoiquetulesdois,tesnuitssanssommeilàcausedemesinsomnies,lefaitquejenevoulaispastelaissermetoucher!

Maisnecomprends-tupasquejememoquedetoutça?m’écriai-je.Bonsang,Dily,jet’aime,c’estlaseulechosequisoitimportante.Est-cequej’aieulahaine?Oui!Est-cequej’auraisvoulutrouvermoi-mêmetesvioleurspourleurmettreunebranlée?EncoreOUI!Est-cequejesouffraisdetevoirainsi?OhmonDieu,oui.Est-cequej’auraisvouluêtreàunautreendroit,avecuneautrepersonne?LaréponseestNon!Dily,pourmoi,rienn’achangé,tuestoujoursaussibelle,j’aitoujoursautantenviedetefairel’amouret…

Alorspourquoin’as-tupasessayédemebaiser?

J’ouvrislaboucheetlarefermaiavecl’impressiond’êtreunpoissonéjectédesonbocalpourladeuxièmefoisenquelquesminutes.

Que…quoi?

Ehbienoui,s’énerva-t-elle.TUdisquerienn’achangé,pourtanttun’asjamaisessayéd’allerplusloin!Est-cequejetedégoûte?Est-cequelorsquetumetouches,tum’imaginesaveceux?

Dilyanna,ohmonDieu,c’estréellementcequetupenses?

Jemelevaietmarchaidelongenlargedanslapièceavantdem’affalerdansmonsiège.

Commenttedirecequejeressenspourtoi?murmurai-je,lesyeuxpleinsdelarmes.Monamourpourtoiestsigrandquejesuisobligéderepousserlesparoisdemoncœurpourqu’ilpuisses’épanouir.

Lorsquetuentresdanslapièce,mêmesidehorsilfaituntempsdemerde,c’estcommesilesoleilvenaitdeselever,j’ail’impressionquelalumièrequit’accompagnemeréchauffeenpermanence.Àl’inverse,lorsquetut’éloignes,j’ailesentimentden’êtreentouréquedeténèbres.Maisjeneferaipasl’erreurdeteplacersurunpiédestalcartun’espasparfaite.Tupeuxavoiruncaractèredecochon,tunesaispascuisineretenplustufousunbordelmonstredanslasalledebain,maiscesdéfautsfontpartiedetoi.Etsituveuxquejesoispluscash…Sachequetumefaistoujoursautantd’effet,jebandetoujoursautantentaprésence,etça,tuasdûleconstatercesdernièressemaines,maistuassubiungravetraumatisme,etmêmesijerêvedem’enfoncerentoi,defairetoutesceschosesqu’onfaisaitavant,sachequejen’enferairientantqueTUnem’auraspasmontréquetuesprête!Enattendant,laseulechosequejepeuxtedire,c’estquemamaindroiteestmiseàrudeépreuveetqu’ilmefauttroisàquatreséancesparjourafindeparveniràmelibérerdemonobsession.Alors,satisfaite?

Jevisqu’elleétaittouterougeetenressentisunecertainesatisfaction.

J’aiperdusixmoisdemavie,sixmoisqu’onm’aarrachésdanslasouffrance,danslacolère…C’estterminé,ilesttempsquejereprennemavieenmain,dit-ellecalmement.Dansquelquesjours,nousallonschangerd’annéeetjeveuxeffacercesderniersmoismaisavant,toietmoiavonsdeschosesàrégler,pourlaissercesmauvaismomentsderrièrenous.

Dequoiparles-tu?demandai-je,soupçonneux.

Dick,jeveuxqu’onessayedereprendreuneviesexuelleactive…

Ooohhhhputain!gémis-jeenmesentantdéjàdurcirdansmonjean.

Etjeveuxégalementquetutelibèresdetonpassé,jeneveuxplusquetutevoiescommeunedoublureouunecopiedetonfrère.Dick,murmura-t-elleensemordillantlalèvreinférieure,j’aifaitdesrecherchesetj’airetrouvélatracedetamère.Ellenousattenddemain!

CHAPITRE34

Dilyanna

JenefusmêmepasétonnéequeDickneviennepasdormiravecmoi.Jesavaisqu’ilétaitencolère,lapreuve,mêmependantlerepaschezJonas,iln’avaitpasprononcéunmot.Ils’étaitcontentédemeregarderavecsonregardhantéenmedemandant«Pourquoi?».Jeluiavaisréponduquenousn’avionspaslechoix,quesinousvoulionsvraimentconstruireunavenirensemble,nousdevionsfairetablerasedupassé.Ilavaitsecouélatêteets’étaitinstallésurlecanapé,Mayanichéesursesgenoux.

Jem’étaiscouchéeseule,lecœurlourdmaissachantquec’étaitlaseulesolution.Lerejetdesamèreétaitpourluiuntraumatismeaussiimportantquemonviol,etilnepouvaitpasl’ignorer.Lorsquej’avaiseuSidonie,lamèredeDickautéléphone,elleétaitrestéecalme,posée,etunefoisquejeluiavaisfaitpartdenosproblèmes,elleavaitacceptédenousrencontrerquoiquej’aiepudiscernerdansletondesavoixqu’ellen’étaitpasvraimentheureusedelasituation,maisjememoquaispasmaldesesétatsd’âme,moi,cequim’importait,c’étaitceuxdeDick.

Noussommesbientôtarrivés,murmurai-jeenposantunemainsursonavant-bras.

Nousétionsarrêtésàunstopetjelaissaierrermonregardsurlesboutiquesquilongeaientlagranderoute.

Pourquoimefais-tuça?medemanda-t-ild’unevoixsitristequejenepusm’empêcherdetressaillir.

Riendebonnesortiradecetterencontredetoutefaçon.

Peut-êtremaisilesttempsd’affrontertamère,toutcommej’aiaffrontémapeurhierenvenantaudispensaire.

Jel’entendismaugréeretretinsunpetitsourire.Commesielleavaitperçulatristessedesonmaître,Mayasenichacontreluietposasonmuseausursonépauleavantdeserendormir.

Elleestincroyable!m’écriai-je,maisjelacomprends,tuestrèsconfortable.

Ilsetournaversmoietjevisuneétincellebrillerdanssesprunelles.

Jen’aipasoubliétaproposition,susurra-t-il,donccrois-moi,tuaurastoutàfaitl’opportunitédevérifiermon…confort!

Jepiquaiunfardpendantqu’ils’esclaffait.Aumoins,n’était-ilplusfâché.

C’estlà!énonçai-jeenmegarantdevantunepetitemaisondeplain-pied.Tuesprêt?

Sijetedisquenon,onpourraretourneràlamaisonetbaisercommedesbêtes?medemanda-t-il,faussementsérieux.Non?C’étaitbiencequejepensais!

Ildescenditdevoitureetj’enfisdemême,suivieparnoscompagnonsàquatrepattes.Detouteévidence,Dickn’avaitpasenviedefaired’effort,maisj’avouequejelecomprenais.Ils’étaitvêtud’unjeantrouéetd’unblousonencuirdéfraîchiquisentaitlacigaretteetl’huiledemoteur.C’estmoiquiappuyaisurlasonnette,cequeDickn’avaitvisiblementpasenviedefaire,ettandisquenousattendions,ilallumaunecigaretteenmelançantunregarddedéfi.Jemecontentaideleverlesyeuxauciel.

Laportes’ouvritenfinsurunedamed’unecinquantained’années,habilléed’unleggingnoiretd’ungrandpullenlainevraisemblablementfaitmain.Sescheveuxblondsétaientcoupésaucarréetelleétaitlégèrementmaquillée.

Jepeuxfairequelquechosepourvous?demanda-t-elled’unevoixdouce.

Maisavantquejen’aiepurépondre,Dickpritlaparole.

C’estpasici,poupée,ons’esttrompédecrèche,éructa-t-ilenmodeZonard.MaDaronneétaitunealcooliquequipassaitsesjournéesetsesnuitsdansunpyjamaenpilou,lestifstoujoursgrasetunehaleinedechacal.

Dickson?murmura-t-elle,choquée.

Ahbensi,c’estbienici!Ouah,quelluxe!s’écria-t-ilenentrantdanslamaisoncommes’ilétaitchezlui,sansmêmeattendred’yêtreinvité.Direqu’autrefoisquandnousrentrionsàlamaisonçapuaitlewhisky,laclopeetlabombeanti-odeurqu’onutilisepourcouvrirlesodeursdechiotte!Aufait,moic’estDickens,maistun’esjamaisparvenueàfaireladifférence.

Bonjour,MadameCorbins,jem’appelleDilyanna,meprésentai-jeenluitendantmamain.

Maisjen’eusaucuneréponse.ElleétaitbientropoccupéeàregarderDickenscommesic’étaitunrevenant.Lorsquejelasuivis,jefixai,effarée,Dickquis’étaitaffalédansledivan,lespiedssurlatablebasse,laissantlescendresdesacigarettetombersurlecuirimmaculé.Illaissaéchapperunsifflementstrident,attirantl’attentiondenosdeuxchienset,d’ungestedudoigt,lesobligeaàm’encadrer,cequ’ilsfirentdesuite.

Alorspourlesprésentations,voiciSidonie,cellequim’adonnélavie,maisaucunamour,segaussa-t-il,etelle,c’estDily,manana,ajouta-t-ilavecfierté.

Je…je…Bonjour,murmura-t-elle,nesachantdécidémentpascommentgérerlasituation.Jevousenprie,mademoiselle,asseyez-vouset…

Maisoui,chérie,posetonjolipetitcul!MaDaronnevasefaireunplaisirdenousoffrirquelquechoseàboire,c’estsaspécialité!

J’aiducafé,dusoda,du…

Allons,Sidonie,riendeplusfort?Unwhisky,unevodka?Jecroisquec’étaittaboissonpréférée,la

coupaDickenécrasantsonmégotsurlatable.

Jenel’avaisjamaisvuaussiexaspérant!Maismêmesijesavaisqu’ilagissaitainsipourseprotéger,ildevaitaumoinssemontrerplusintelligent.

Dick,arrêtes’ilteplaît,luidemandai-jegentiment.

Oui,c’estvrai,arrêtonslesfrais!gronda-t-ilsoudainenreposantsespiedsausoletens’adressantdirectementàsamère.Jamaisonn’auraitdûveniricidetoutefaçon.Lapreuve,tun’asmêmepasétéfichuedemereconnaître,maisçaatoujoursétécommeça,n’est-cepas?Allez,Dily,ons’envaet…

Enfait,jevoudraisbienunsodasipossible,demandai-jepoliment.

Dicksecoualatête,exaspéré.Jeprofitaidudépartdesamèredanslacuisinepourm’installersursesgenoux.

Arrête,Dick,tuasbesoind’avoirdesréponses,nefaispastonEnfantdeSatan,luichuchotai-jeencaressantsajoue.

Sij’enétaisréellementun,voilàcequejeferais,bougonna-t-il.

Ilplaquasabouchesurlamiennedansunbaiserquin’avaitriendetendre,maistoutdepossessif.Jemeraidisunmomentlorsqu’ilglissasamainsousmajupemaisbienviteledésirmontaenmoietjelaissaiungémissementsortirdemeslèvres.CefutluiquimitfinànotreétreinteetjeretrouvaimonDick,celuidetouslesjours,attentionnéet,sansaucundoute,horrifiédecequ’ilvenaitdefaire.

Hé,çava,murmurai-jeenl’embrassantdoucement.Toutvabien,jen’aieuaucuneréminiscence,juste

unevagueappréhension.

Jemesuiscomportécommeunsalaudet…Tuasvucequejedeviensàsoncontact.Jet’enprie,seplaignit-il,rentronsàlamaison.

Nousn’avonspasconduitdeuxcentskilomètrespourrien,répondis-je,et…

Unfracasdeverrem’interrompitetjemetournaiversSidoniequinousfixait,horrifiée.J’imaginaialorsl’imagequenouspouvionsdonner,moiàmoitiéallongéesurlecanapé,lamaindeDicktoujourssousmajupe,nosregardsbrillantsdeconvoitise.

Tuvoiscequej’aifaitpartafaute,s’énerva-t-ellealors.Çanetedérangeraitpasdetetenircorrectement?JamaisDicksonn’auraitagiainsiavecunefille.Illesrespectait,lui!

Jemeredressaid’unbond.Etmerde!

Là,jenepeuxtecontredirelà-dessuspuisquetonfilschériétaithomo!Çat’enboucheuncoin,hein?

Okay,unpartout,laballeaucentre!Maisqu’est-cequim’avaitprisd’avoircetteidéecomplètementconne?Moiquipensaisqu’ilsallaientpouvoiravoiruneconversationcivilisée,j’étaisbienloindu

compte.MonregardpassadeSidonieàDick,puisinversement.Dicklafixaitfroidement,sansunmot.

Commentas-tusuquetonfrèreétaitgay?m’enquis-je,curieuse.

Delamêmefaçonquej’aisuquec’étaitundealer,enfouillantdanssesaffaires,enposantdesquestionsauxpersonnesquileconnaissaientdetouteévidencebienmieuxquesapropremère,répondit-il.

Mensonge,hurla-t-elle.Tun’astoujoursétéqu’unmenteur,unminable,un…

Sansunmot,Dicksortituncarnetnoirenmoleskinedel’intérieurdesonblouson.

Tusaiscequec’est?medemanda-t-il.C’estlejournalintimedemonfrère.Ilacommencéàl’écrireàl’âgedeneufans…Ettoutcequej’aidécouvertàsonsujetétait…assezhorrible,maislepire,c’estquemamèreétaitaucourantdetout,n’est-cepas?

Jejetaiuncoupd’œilverselleetvisqu’elleavaitpâlietqu’elleregardaitaveceffarementlecahierqueDickfeuilletait.C’estd’unevoixtremblantequ’ilsemitàlire.

Février1992

Mamères’imaginequejesuisparfait…Labonneblague,jepeuxdirequ’elleaétésurprisedemevoirrevenirlevisageensangdel’école!Ouijem’étaisbattupourunecigarette,cequemamèreaapprisparledirloquin’avaitpus’empêcherdefayoter!Lecon!

Janvier1993

Çayest,j’aidixans,etunpetitfrère.Mamèrel’aappelépresquecommemoi,c’estgrotesque,iln’yaqu’unseulDickmaisaumoins,ellevamelâcherlagrappe.

Février1993

Hébiennon,jesuistoujoursparfait…j’enaimarre!

Là,repritcalmementDick,surplusieursannées,ilseplaintdel’étouffementdenotremère,desafaçondel’avoirmissurunpiédestal,c’estensuitequeçadevientintéressant.

Mars1998

C’estpaspossible,mamèren’apasdevie,elleadeuxmiochesàtorcher,depuisquelapisseuseestvenueaumondeetpourtantelleveuttoutsavoirdemesamis,demesnotes,del’école…«Ellevitsavieparprocuration»pourraittoutàfaitluiconvenir…Etlepire,ya-t-ilunefillequim’intéresse?

Jecommenceàavoirhorreurdetoutescesgonzesses,qu’ellesaientdesseinsoupas,jevaispeut-êtremefairepédé,jecroisqueçapourraitmeplaire!

Juillet1998

J’aiinvitéJordanàlamaison…C’estmonmec,oui,jefaissurcecarnetmoncomingoutetjem’enfous!Jesaisquelespetitssontpaslà,faudraitpasqu’ilsvoientcequejem’apprêteàfaire…parcequeçayest,c’estlegrandjour,jevaismetapermonpremiermec!

Troisheuresplustard

Jesuissurunpetitnuage,finalementjesuisbiengay.SentirlabitedeJordandansmonculm’atellementfaitjouirquej’aihurlé…sifortquemamèreaouvertlaporteetdécouvertsonfilssiparfait,àquatrepattessurlelit,laqueuedeJordantoujoursenfoncéedanssonfondement.

Deuxheuresencoreplustard

J’aienviedemourir,jenesaisplusquoifairepourqu’ellemelâchelagrappe,elleconsidèrequenousavonsunsecretetqu’iln’appartientqu’ànous,etjenesuispasencoreretombédeceputaindepiédestal…

Juillet1999

Ilfautquej’oublie,j’accepteunjoint,lebonheurpourquelquesheures…BonanniversaireDickson,tuasseizeansetcematintamèret’amontéunputaindegâteaudanstachambreavecdeuxbougiesquiformaientlechiffre16…pathétique!

Février2000

Jesuispasséunniveauplushautdansmadéchéance,j’aidécidédedealer…çamerapportedufric,jem’achètequelquesgrammesaupassageetàmoilabellevie…Dèsquej’aiassezdethunes,jequittecebledetjefileauxStates,leplusloinpossibledemareum…Jeluiaiditcash....ellesaitpourladrogue,ellesaitquejedeale…Jesuistoujoursparfait…

Tuvois,Sidonie,murmuraDickenserrantlespoings.Tuasdétruittesdeuxfils,l’unparcequetul’aimaistrop,l’autreparcequetunel’aimaispas.

LevisagedeSidonierestaimpassible,maislorsqu’elleselaissatomberdanslefauteuilquej’avaisquitté,jesusqu’onauraitdroitàdenouvellesrévélations.J’espéraisqueDicksoitassezfortpourlesentendre.

CHAPITRE35

Dick

LamaindeDilyannaseglissadanslamienneetjeretinsunfrisson.J’allaisenfinsavoirpourquoimamèrenem’avaitjamaisaiméetçamefichaitlatrouille.DilyposasatêtesurmonépaulelorsqueSidoniecommença.

J’avaisseizeanslorsquejesuistombéeamoureusedetonpère,malheureusement,luinemevoyaitpas,iln’avaitd’yeuxquepourGillie,unesuperbebruneavecunepoitrineénormeetdesfessesàtomber…Elleaussil’aimaitbeaucoupmaissafamilleétaitassezstricteetunjourquenousétionsàunefête,quetonpèreavaitunpeubu,jel’aientraînéàl’étageetjel’aichaufféjusqu’àcequenouscouchionsensemble.Lelendemain,ilétaitfuraxetj’aicomprisqu’ilétaitréellementamoureuxdecettepétasse.Maisnotreétreinteavaiteudesconséquences,jesuistombéeenceinte.Aulieudeluienparler,jel’aiditàsamèrequiaaussitôtdécrétéqu’ilprendraitsesresponsabilités.Lelendemain,ilestarrivéchezmoi,m’ajetéunebagueàlafigureenmetraitantdesalope…Jel’aimaistoujours…Ons’estmarié,iln’aplusvoulumetoucher,Dicksonestnéetj’aireportétoutmonamoursurlui.

Jenecomprendspas,murmuraDily,commentavez-vousputrahircethommedelasorte?

Àl’époque,jel’aimais…j’aicesséderessentirdel’amourpourluiàlanaissancedeDickson,révéla-t-elle.Jen’aiplusjamaisaiméquelui…

Mêmesijelesavais,cesmotsmefirentautantdemalqu’uncoupdepoignard.

Sivoussaviezquevousn’aimeriezpasvosautresenfants,pourquoienavez-vouseuetcommentpuisque,selonvosdires,votremarinevoustouchaitplus?insistaDilyanna.

Lorsquej’airéaliséqueDicksongrandissaitetqu’ilcommençaitàrevendiqueruneindépendancequejerefusaisdeluioffrir,j’aicomprisqu’ilmefallaitunautrefils,unecopiedeDickson,quejepourraisaimeravecautantdeforceetquimecomblerait…J’aidonnédesaphrodisiaquesàmonmariquin’apaspus’empêcherdemesauter,maisjeneressentaisplusrienpourlui.Pendantqu’ilmeprenait,jepensaisauprochainrepasdeDickson,àsapoésiequ’ildevaitréciter…Puisjesuistombéeenceinte,Arthurm’adétestéeencoreplus.Maisjem’enmoquais,mapetitedoubluregrandissaitdansmonsein…Pourtant,quandj’aiaccouchéetqu’ilsl’ontposésurmonventre,murmura-t-elleenjetantunbrefregardversDick,jen’ai…rienressenti,niamournihaine,ungrandvideémotionnel.Jetentaisdetrouverdessimilitudesdanssestraitsavecceuxdemonange,mais…rien,àpartlesyeux,unecopiebousillée,unedoublureimparfaite…Alorsjemesuismiseàboire,pouroubliercette…erreurdelanaturequej’essayaisenvaindefaireressembleràsonfrère,lefaitquemonpetitDicksonmerepoussaitpetitàpetit.Etj’ai

reportélafautedecerejetsurDickens,c’étaitluileresponsablealorsj’aicommencéàlehaïr.

Maisjen’étaisqu’unenfant,m’écriai-jetandisqueleslarmesruisselaientsurmesjoues.Commentpouvais-tumedétesterautantalorsquemoijet’aimaistant?!

Tun’étaispasDicksonetplustugrandissais,plusj’enavaisconscience.

VousneditesriensurSasha…lacoupaDilyanna.

Ah…elle…uneerreur,uneseuleaprès-midi,unplanculaveclefacteurquiassuraitl’intérim,ilavaitenviedebaiser,jevoulaisoublier…Sashaestarrivée.Findel’histoire.Arthuratoujourssuqu’iln’étaitpassonpère,maisill’aaimée,àsafaçon,jusqu’àcequesarouterecroisecelledeGillie…

Maismoi,maman,insistai-je,commentas-tupumejetertoutescesméchancetésàlafigure?

Parcequejenesupportaispastonairdechienbattuquandtumeregardais,teseffortspourquej’en

vienneàt’aimeralorsquej’enétaisincapable…Puismonfils,monbébé,estmort,etjesuismorteaveclui.Moncœurestenterrélà-basaucimetièreetjen’attendsquelemomentoùlamortviendram’étreindrepourallerlerejoindre.

Pauvremalheureux,marmonnaDily,mêmedanslamortelleveutlehanter!

Mais,iln’étaitpasparfait,poursuivis-jeentremblantviolemment.Tulesavais,ilsedroguait,ilrevendaitcettemerdequituedesados,cettemerdequil’atué,lui!Etpourtant,mêmeencoremaintenanttuledéfends,tuluitrouvesdesexcuses,tandisquelorsquec’estmoiquiaipriscettesaloperiecommeunappelausecours,tum’asflanquédehors!

Putain,maisquandest-cequetuvascomprendre?Moncœurn’étaitfaitquepouraimeruneseulepersonne.Dicksonauraitpuêtreunvioleur,untueurensériequejel’auraisaimétoutautant…Toi…

Sasha…etmêmetonpère,vousnereprésentiezrienàmesyeux!

Dilylaissaéchapperunhoquet,neparvenantpasàcomprendrecommentunemèrepouvaitfaireautantdedifférencesentresesenfants.

J’aitoutessayé,murmurai-je.Chaquecadeauquenousdevionsfaireàl’école,jem’appliquaispourqu’ilsoitleplusbeau…pourtoi.Mêmesij’avaisdesdifficultésaveclespoésies,lesseulesquejeparvenaisàretenirétaientcellespourlafêtedesmères.Lorsquejemepromenaisetquejevoyaisunchampdefleurssauvages,j’encueillaispourtelesoffrir.J’attendaisquetut’endormespourposerunplaidsurtesépaules,lematinjepréparaistonpetitdéjeuneravantdepartirencours,pourquetumangesunpeu,parcequej’avaispeurqu’unjourjerevienneàlamaisonpourdécouvrirquetuavaisdisparu,commeunfantôme.Jen’aimaispaslorsquetumehurlaisdessus,lorsquetumecriaisquej’étaisnulouquej’étaistaré,maisjelesupportaisparcequesitulefaisais,çavoulaitdirequetuétaisvivanteetquetut’intéressaisuntantsoitpeuàmoi.J’aimêmeétéheureuxàlamortdeDicksonenmedisantqu’enfintuallaisremarquermaprésenceetquejepourraistenirlapremièreplacedanssoncœur,alorsj’aicontinuéencoreetencoreàfairedesefforts,maiscen’étaitjamaissuffisant.POURQUOIN’ÉTAIT-CEJAMAIS

SUFFISANT?hurlai-jealors.Moncœuràmoiétaitassezgrandpourtousvousaccueillir,maisvousn’avezjamaisvouludemoi,nipapa,nitoi…Surtouttoi!Commentcrois-tuquejemesenteàl’idéequejamais,jamaistun’aséprouvéneserait-cequ’uneonced’amourpourmoi?

Jen’ensaisrien,murmuraSidonie,etàdirevrai…jem’enfous!

Cefutunenouvelleclaque,horrible.J’entendisDilyannaàmescôtéspousserungémissementétranglé.

Jelaconnaissaisassezpoursavoirqu’elledevaitpleurerpourmoi,pourcegossequeSidonien’avaitjamaisaimé…Quantàmoi,j’étaisredevenucemioche,quêtantlamoindremietted’attention,d’amour.

Jemelevai,passaipar-dessuslatablebasseetmejetaiàgenouxdevantmamèrequimeregardaitimpassible.Jen’avaismêmepasconsciencedeslarmesquiruisselaientsurmesjoues.Jeluisaisislamain,laportaiàmeslèvres,àmajoue.

Maman,gémis-jepathétiquement.

Arrêtedetedonnerenspectacle,persifla-t-elle.Tuastoujoursétéunedéception,unêtrepsychologiquementinstable.Montreaumoinsunpeudedignité.Maisregarde-toi,àsupplierpourobtenirmonamour,deslarmesdecrocodileroulantsurtonvisage,lamorveaunez!

Elleretirasamaind’ungestebrusque,unemouededégoûtsurlevisagetandisquejerestailà,agenouillédevantelledansuneposturedesupplication.

Commentpeux-tumefaireça?insistai-je,n’as-tupasuneoncedecompassion?

Jevoulaisun…unclonedetonfrère,quelqu’undeparfaitàmesyeux,jen’aieuqu’unepâleimitationpleurnichardeetmentalementdérangée!

Çasuffitàprésent,onenaassezentendu!

LavoixdeDilyannaclaquasèchement.Elleseleva,rappelanoschiensd’unclaquementdedoigts,sepenchaversmoi,glissaunbrasautourdematailleetm’aidaàmerelever.Jetitubaicontreelle,ivredechagrin.

Ladernièrequis’estpermisedeparlerdecettefaçonàDick,grondaDily,s’estprismamainsurlagueuleetc’étaitvotrefilleSasha!Alorscroyez-moi,Sidonie,jen’hésiteraipasàfairedevotrevieunenfersivousnecessezpasd’insulterDickcommevouslefaites.Vousditesquevotrefilsadesproblèmesmentaux,maisc’estvousquidevriezêtreenferméedansunasile.C’estvotreespritquiestdérangé,aussiétroitquevotrecœur…Ah,non,c’estvrai,vousn’enavezpas,àmoinsqueceluiquevousayezeuàlanaissanceaitsouffertd’undysfonctionnement.

Jenevouspermetspas,s’énervamamèreenselevantd’unbond.

Vousm’excuserez,maisjen’enaipasfiniavecvous!poursuivitDilyanna,àprésentivrederage.

Vosréactionsetvotreamourinconditionnelpourvotrefilsdécédésontmalsains.Vousavezdespenséesmoralementincestueusesetçam’écœure.Vousn’aimezpasDickens,ehbien,jedoisdiretantmieux,parcequec’estvotresoi-disantamourquiatuéDickson.Heureusement,Dickestbienplusquevousnepouvezlepenser,mêmes’ilavécusansuneoncedetendresse,c’estunhommeadmirable,attentionné,sensibleetaimant,toutcequevousn’êtespas!SachezàprésentqueDickadesamisquil’aimentetqui

nevoientpasenluiunedoublure…Ilsvoientenluiunêtrehumainàpartentière,unfrère!Moi,lorsquejeleregarde,jevoismonavenir,c’estl’hommequej’aime,quim’aimeetjesuisfièredelui,ilestuniqueetj’aipitiédevous,parcequeDickauraitpuvousdonnerbeaucoupplusquevousnepossédezactuellement.Jevoussouhaite…rien!Uneviecomplètementvidecommecellequevousavezetqui

vousconvient.Aurevoir,Sidonie,auplaisirdeneplusvousrevoir!

Jemelaissaiguiderjusqu’àlasortieavecunepenséequimetrottaitdanslatête.Lavieétaitbieninjuste,maDilyannaquinepourraitpeut-êtrepasavoird’enfantsàcausedesonviolauraitfaitunemamanparfaite,alorsquelamiennen’étaitvisiblementpasfaitepourêtremère.Lacolèremontaitenmoi,defaçonsubite,atroce…Unevéritablebombesurlepointd’exploseretdèsquenousfranchîmeslaporte,jesusqu’ilfallaitqueçaéclate,quejelaissesortirtoutecetterage.

SansattendreDilyanna,jemedirigeaiversunarbreetmemisàfrapper,àfrapperetàfrapperencore.

Plusriennecomptaitquecettehargnequejedevaisévacuer,monamourpourmamère,pourmonpère…

Cesvingt-troisannéesàmedemandercequej’avaisfaitpourmériterunetellehaine,unetelleindifférence.Etjecontinuaidetaperavecplusdeconviction,neprenantpasgardeauxhurlementsdeDilyannalorsquelesangjaillitdemesphalangeséclatées.

Jeneprêtaipasattentionauxclaquementsdeportières,auxjurons,auxcris.Ilfallaitquejecogneetquejecogneencorepourmesortirdel’espritmonpasséetpouvoirenfinmeconcentrersurl’avenir.

C’estalorsqu’unemainseposasurmonépauleetjestoppainet,lecorpscomplètementraidi,lesoufflecourt,leslarmess’échappantsansdiscontinuerdemesyeux.J’avaisreconnucettepoigne,celled’unami,d’unhommequisecomportaitmêmeenpèreparfoisalorsqu’iln’étaitpasbeaucoupplusvieuxquemoi.

Jemedétendisetlorsqu’ilmefitpivoterpourmeserrerdanssesbras,jesanglotaicontresontee-shirt,letrempantdemespleurs.Jonas,monroc,monfrère…

Rentronsàlamaison,murmura-t-illorsquej’eusfinidetrempersonmaillot.Tun’asplusrienàfaireici,c’estuneaffaireclassée…

Jelevailatêteetregardaiincréduleceuxquisetrouvaientlà…Jayson,Angèle,Léa,Éva,Ophélie,MélinaquiréconfortaitDilyannaserréedanssesbras,Bouba,HappyetmêmeLéo…ÀpartLuckyetSasha,iln’enmanquaitaucun…JecomprisalorsqueDilyannalesavaitavertisdenotrevisiteàmamèreetqu’ilsétaientlàdepuisledébut,setenantdansl’ombre…Jepoussaiunprofondsoupiretopinaid’unsignedetête.Jonasentouramesépaulesdesonbras,etdansuneformationquasi-militaire,lesZonardsm’encadrèrentjusqu’àlavoiture.JemesaisisdelamaindeDilyannaenpassantprèsd’elleetelles’empressad’entremêlersesdoigtsauxmiens.Jenejetaiaucunregardderrièremoi,cen’étaitpaslapeine.Mafamilleétaitlà,avecmoi,c’étaitcellequej’avaischoisie,quim’avaitchoisi,etl’amourquinousliaitétaitsincèreetindéfectible.

ÉPILOGUE1

Dilyanna

Dickavaitfaitl’effortdemettresonpasséderrièreluietàprésentc’étaitàmoidelefaire.J’avaisrévéléàDickquejevoulaisreprendreuneviesexuellenormaleetjemesentaiscapabled’essayer.NousavionspasséleréveillondeNoëlàl’auberged’AngèleetJayson,touslesZonardsréunis,làoùj’avaisfaitlaconnaissancedeDickquelquesmoisplustôtetj’avaisdécidéquecesoirseraitparfaitpourfêternos…retrouvailles.J’enavaisparléauxfillesetelless’étaientcotiséespourm’offrirencadeauunenuisettesexy.Jelesavaisremerciéesd’unsourire,mêmesimoncœurbattaitlachamade,quemesjambestremblaientetquemesmainsétaientmoites…Maisjedevaisenpasserparlà,pourmoiaussiregarderversl’avenir,surtoutqu’aveclacomplicitédemesparents,j’avaisfaitunefolie,j’espéraisseulementquetoutsepassebien.

J’étaisdanslasalledebainsetjetremblaisdetousmesmembres.Jemedévisageaidanslemiroiretlaissaiéchapperungémissement.Jen’étaispassûred’yarriver.J’enfilaimonénormepeignoirenépongeetmeprécipitaidanslachambre.Jenedevaispaspenser…jedevaisagir…DickseraitlàdansquelquesminutescarilsortaitMalbroucketMayaavantdemerejoindre.Pourunefois,jeluiavaisdemandéàcequeleschiensdormentdanslesalonetjesavaisqu’illeferait.

Avantdeperdretoutmoncourage,jeretirailepeignoiretlejetaisurunechaiseetm’allongeaisurlelit.Toutenmoicriaitdemecouvrirdelacouette,demepelotonnerdedansetdeneplusensortir,maismavolontéétaitplusfortequemapeuretrienquevoirleregarddeDicklorsqu’ilpénétradanslapièce,çaenvalaitlapeine.

Ohputain,tuviensdem’achever,gronda-t-ilenmedéshabillantmentalement.Dily,tuessûre?

Vraimentsûre?Parcequ’onpeutattendre,tusais…

Non,c’estunnouveaudépartpourtoi,pourmoi…ilfautqu’onlefasse,aujourd’hui!

Passanscertainesprécautions,marmonna-t-ilenfouillantdansuntiroir.

Ilensortitunepairedemenottes,sedéshabillarapidement,nelaissantquesonboxerets’approchademoi.Ilpritplaceàmescôtésetdureversdesdoigts,caressadoucementmonentrejambe.

Eh,petitechatte,murmura-t-il,c’estmoi,Dick,sachequejeneteveuxaucunmal,alorssituveuxbienouvrirtajolieportepourmelaisserentrer,jeseraileplusheureuxdeshommes.

Jeleregardaihébétéepuislefouriremeprit.Iln’yavaitqueluipourdédramatiserlasituation.Il

s’allongeasurlelit,semenottaàlatêtedelitetmeregardafixement.

Jesuisprêt,faisdemoicequetuveux,s’exclama-t-ilavecemphase.Jesuistonsex-toygéant!Mesmainssontattachéesdoncjenepourraipastetoucher,jesuisétendusurlematelas,doncc’esttoiquit’ycollesettufaistoutleboulot…Tuveuxcontinuer,tulefais,tunelesenspas,alorsonarrête...Bonbiensûr,n’oubliepasdemedétacher,lacléest…Merde,jenesaisplusoùestlaclé!

Jem’esclaffaiànouveau,heureusequ’ilsoitparvenuàmedétendreassezpourquejem’installeàcalifourchonsurseshanches.Illaissaéchapperunsifflement.

Ouah,lavache,situasdécidédemetorturer,sachequetuyparviensàmerveille,jesuissurlepointdefaireuninfarctuset…

Dick?

Mmmmquoi?gémit-iltandisquej’ondulaisau-dessusdelui.

Ferme-la!luiordonnai-jeenposantleslèvressurlessiennes.

Etillefit…Enfin,sionexceptaitlesjurons,lesgémissementsetlescrisd’extasequis’échappèrentdesabouche.Unlongmomentplustard,unefoisDickdétaché,jepleuraidoucementdanssesbras,deslarmesdejoies,delibération…Moiaussijevenaisdetireruntraitsurmonpassé…

Dick

Dilyannaétaitpelotonnéecontremoi,enpleurs,maisjesavaisquec’étaitparcequ’elleyétaitarrivée,elleétaitparvenueàtenirsesdémonsàdistanceetmefairel’amourcommeunevéritabledéesse,medonnantduplaisiretenprenantégalement.Jemesentissoulagéetheureux,enfin,j’allaispouvoirluioffrirlecadeauquej’avaistoutspécialementchoisipourelle.Unedemanded’engagementàlongterme,carjesavaisquej’étaisprêt.

Etsionallaitaupieddusapinouvrirnosprésents?luidemandai-jeinnocemment.

J’allaisteproposerlamêmechose.

Nousnouslevâmes,entortillésdanslacouette,etnousdirigeâmesverslesalon.Ilnerestaitquedeuxcadeauxàouvrir,ceuxquelescoupless’offraientdansl’intimité.Lesautresavaientétédéballésàminuit,àl’aubergemaisceux-làétaientspéciaux.Dilyannametenditlemien,ensemordillantnerveusementlalèvre.Unpaquetrectangulaire,plat…Jel’ouvrisetvisundossier…jelafixai,monregardallantdeson

visageauxphotosquis’étaientéchappésdufichier…uncorpsdeferme,unterrainimmense,desdépendances…

Je…jenecomprendspas,murmurai-je,lecœurbattant.

Tuterappelleslerêvequetufaisais…unefermeàretaper,ungrandterrain,unbarbecue,deschiens…Avecmonpèrenousavonsprospectéautourdelaville,etnousavonstrouvécebâtimentquiétaitàvendreetlasuperficieauxalentoursestassezappréciable…Iln’yaqu’unseulproblème,uneimmensetourabandonnéequidénaturelepaysageetqu’ilnousfaudraabattre,ajouta-t-ellesérieusement.

CeciesttoncadeaudeNoël,alors…JoyeuxNoël,Dick!murmuraDilyannaenposantseslèvressurlesmiennes.

Jelarepoussaitoutefoisdoucementetsortisunepetiteboîtedesouslesapin.Jem’agenouillaidevantelleetluiprésentailaboîteouverte,lagorgeserrée.

Dilyanna,meferais-tul’immensehonneurdedevenirmafemme?

Ellerestaunmomentbouchebée,lesmainssurseslèvres,leslarmesauxyeuxetsejetadansmesbras.

Oui,oui,ohPutainqueoui,jeleveux!s’écria-t-elleenm’embrassantpartoutsurlevisage.

C’estlesmainstremblantesquejeglissailabagueàsonannulaire.Unanneauquilaliaitàmoi,quifaisaitd’ellemafiancée,mapresquefemme.Elleleregardaunlongmomentetjevisbrillerdanssesyeuxcettemêmelumièrequim’avaitsortidesténèbres.

Jet’aime,Dilyanna.

Uniquementpourtoi,merépondit-elleenriant.Uniquementpourtoi!

J’éclataiderireàmontour.Jen’étaispeut-êtrepasparfait,maisj’avaistrouvélafemmequimeconvenait,cellequim’aimaitpar-dessustout!Etpeuimportequej’oubliedemettremeschaussettesàl’endroit,oùquejenemerasequ’unjoursurdeux,notreamourétaitplusfortquetoutetpourlapremièrefois,enplongeantmonregarddanslesien,jen’eusplusl’impressionden’êtrequ’unedoublureimparfaite,maiscelled’êtreunêtreunique,parfait…

ÉPILOGUE2

Sasha

JeprisunelonguerasadedevodkaorangeetcognaicontreleverredeSuziequiétaitdéjàivre.Nousfêtionslanouvelleannéeetmoi,jebuvaispouroublier.J’avaisfaiténormémentdemalautourdemoicesderniersmois,toutavaitcommencéavecLucky,puisavecOphélie,puislesautres…Sanscomptermonfrère...

Unevaguederemordsm’envahittandisquejerepensaisàlafaçondontjel’avaistraité,àlagifleassenéeparsacompagne…Ahnon!Safuturefemme,carmonfranginavaitdécidédefairelesautdanslegrandbain,ilvoulaitsemarier…carrément…Etjenepouvaism’empêcherderessentirunepointedejalousie.Luis’enétaitsorti,pasmoi…Maisavais-jeréellementessayé?

Suziefrottasoncorpsàdemidénudécontrelemienetjenepusm’empêcherderépondreàsesavancesenluioffrantmeslèvres,c’estcequeJean-Charlesattendaitdenous,quenousfassionsnotreshowpourincitersesamis,sesrelationsàconsommer,drogues,alcool.LamaindeSuziesefaufilasousmamini-jupeetunevaguedechaleurm’envahit…MesyeuxplongèrentdansceuxdeJean-Charlesquilevasonverredansmadirectiontoutensecaressantl’entrejambe.D’ungesteautoritaire,ilnousmontratouràtourSuzieetmoidel’indexavantd’indiquerl’étage.

Iln’avaitpasbesoind’entrerdanslesdétails,ilnousvoulaittouteslesdeuxenmêmetempsetseulDieusavaitquelleperversitéilavaitencoreinventée.JedonnaiuncoupàSuzieenluiindiquantnotremac.Ellelefixaintensémentavantdepassersalanguesursabouched’unefaçonsensuelleavantdem’embrasserlonguement.Jen’auraispasdûéprouverdeplaisir!Uneputesimule,neressentrien,maiscen’étaitpasmoncas,j’aimaistoutcequ’onmefaisait,pireencore…j’enréclamais.

SuzieetmoirejoignîmeslachambredeJean-Charlesetellem’entraînaderechefsurlelit,mecaressant,metouchantlesseins,lesfesses…laradiosemitenmarcheetunechansonretentitdansleshaut-parleurs.JemefigeaietrepoussaiSuziequimefixaitgoguenarde.Jecomprisquec’étaitellequiavaitmislachaîne-hifienmarche…Lucky…Savoixquiretentissaitdanslapiècemetroublaittoujoursautant…J’écoutaissesparoles,samusique…C’estalorsquejevisJean-Charlesdansl’encadrementdelaporte…Ilmefixaitfroidement,arrachasachemise,saceinture…etlafitclaquercontresapaume.

Ilrevientbientôt…

Qui?murmurai-jeensachanttoutefoisdequiilparlait!

LebeauLucien,cracha-t-il.Ilseraderetourenvilledansquelquessemainesmaisn’oubliepasque

tum’appartiens.

Jem’allongeaisurleventreetlaissaiJean-Charlesmefrappersèchementlesfessesdesaceinture…

Jepoussaiungémissement,nonpasdedouleurmaisdedésiretlorsquelabouchedeSuzieseposasurmonintimité…j’oubliaijusqu’àmonproprenom…seulceluideLuckytournaitenboucledansmonesprittandisquejelaissaiexplosermonplaisir…

LesEditionsSharonKena

www.leseditionssharonkena.com

3ruedelasource-57340Morhange

dépôtlégal:mars2017

N°ISBN:978-2-8191-0139-0

Photographiedecouverture:Depositphotos

Illustrationdecouverture:FeatherWenlock

{1}DroguedesubstitutionpourleshéroïnomanesencoursdesevrageaussiappeléBuprénorphine.

{2}Produitsimilaireàlabuprénorphinemaisnepeutêtreprescritqueparuncentredesoinspécialiséàl’inverseduSubutexquilui,peut-êtreprescritparunmédecintraitant.

{3}L’Actiskenanestundérivédelamorphine.

{4}Autrenompourjointoupourpétard

couverture

Tabledesmatières

PROLOGUE

CHAPITRE1

CHAPITRE2

CHAPITRE3

CHAPITRE4

CHAPITRE5

CHAPITRE6

CHAPITRE7

CHAPITRE8

CHAPITRE9

CHAPITRE10

CHAPITRE11

CHAPITRE12

CHAPITRE13

CHAPITRE14

CHAPITRE15

CHAPITRE16

CHAPITRE17

CHAPITRE18

CHAPITRE19

CHAPITRE20

CHAPITRE21

CHAPITRE22

CHAPITRE23

CHAPITRE24

CHAPITRE25

CHAPITRE26

CHAPITRE27

CHAPITRE28

CHAPITRE29

CHAPITRE30

CHAPITRE31

CHAPITRE32

CHAPITRE33

CHAPITRE34

CHAPITRE35

ÉPILOGUE1

ÉPILOGUE2

DocumentOutlineTabledesmatièresPROLOGUECHAPITRE1CHAPITRE2CHAPITRE3CHAPITRE4CHAPITRE5CHAPITRE6CHAPITRE7CHAPITRE8CHAPITRE9CHAPITRE10CHAPITRE11CHAPITRE12CHAPITRE13CHAPITRE14CHAPITRE15CHAPITRE16CHAPITRE17CHAPITRE18CHAPITRE19CHAPITRE20CHAPITRE21CHAPITRE22CHAPITRE23CHAPITRE24CHAPITRE25CHAPITRE26CHAPITRE27CHAPITRE28CHAPITRE29CHAPITRE30CHAPITRE31CHAPITRE32CHAPITRE33CHAPITRE34CHAPITRE35ÉPILOGUE1ÉPILOGUE2