63
DE LA LA MESURE FREQUENCE DE EN CLINIQUE avec 26 figures et 5 tableaux FUSION par R. WEEKERS et F. ROLISSEL [26-- IV--'47] ,,La t~che de demain sera de per[ectionner nos proc~d~s d'exploration fonctionnelle de la rdtine; car passer de l'~tape anatomique ~ l'~tape physiologique, c'est faire faire ~ la clinique un immense progr~s". P. BAILLIART Documenta Ophthalmologica, 1938 130

La mesure de la frequence de fusion en clinique

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: La mesure de la frequence de fusion en clinique

DE LA LA MESURE

FREQUENCE DE EN CLINIQUE avec 26 figures et 5 tableaux

FUSION

par R. W E E K E R S et F. ROLISSEL

[26-- IV-- '47]

,,La t~che de demain sera de per[ectionner nos proc~d~s d'exploration fonctionnelle de la rdtine; car passer de l'~tape anatomique ~ l'~tape physiologique, c'est faire faire ~ la clinique un immense progr~s".

P. B A I L L I A R T

Documenta Ophthalmologica, 1938

130

Page 2: La mesure de la frequence de fusion en clinique

V I I .

V I I I .

IX .

PLAN

I. D6f in i t ions . . . . . . . . . . . . . . . . 132

II. E t a t de la ques t ion . . . . . . . . . . . . . 134

1. R e c h e r c h e s p h y s i o l o g i q u e s . . . . . . . . . 134

a. C a r a c t 6 r i s t i q u e s de la source lumineuse . . . . 134

b. F a c t e u r s b i o l o g i q u e s , . . . . . . . . . . 135

2. R e c h e r c h e s en pa tho log i e ocu la i re et n e r v e u s e . 136

III . I n s t r u m e n t a t i o n . . . . . . . . . . . . . . 137

1. E c r a n p lan campim6t r ique . . . . . . . . . 137

2. A p p a r e i l pou r la mesure de la [ r6quence de fusion 139

IV . C h o i x d ' u n e m6 thode . . . . . . . . . . . . 142

1. E c l a i r e m e n t de l '6c ran lumineux . . . . . . . 142

2. L o n g u e u r d ' o n d e de la lumi~re . . . . . . . . 143

3. E c l a i r e m e n t a m b i a n t . . . . . . . . . ' �9 �9 143

4. D i a m ~ t r e d u tes t c l i g n o t a n t en in f luence des v a i s -

seaux r ~ i n i e n s su r la f r6quence c r i t ique de fus ion 143

5. M o d e d ' a p p l i c a t i o n de la m6 thode s t a n d a r d . 148

V . R6su l t a t s chez l ' i nd iv idu no rma l . . . . . . . . 149

1. La no t ion d ' i so f r6quence et les f r6quences c r i t iques

de fus ion m o y e n n e s . . . . . . . . . . . 149

2. In f luence de l ' gge et du d iam~t re pup i l l a i r e su r la

f r6quence de fusion . . . . . . . . . . . 152

V I . A p p l i c a t i o n s de la mesu re de la [ r6quence c r i t ique d e

fusion en c l in ique . . . . . . . . . . . . . 154

1. A m 6 t r o p i e s et a l t6 ra t ions de la t r a n s p a r e n c e des

mi l ieux ocu la i res . . . . . . . . . . . . 155

2. D6co l l emen t r6t inien . . . . . . . . . . . 156

a. a v a n t i n t e rven t ion ch i ru rg ica le . . . . . . . 156

b. ap r~s i n t e rven t ion ch i ru rg ica le . . . . . . . 157

3. N6vr i t e n ico t in ique . . . . . . . . . . . 162

4. G l a u c o m e . . . . . . . . . . . . . . . 168

5. L6s ions des voies op t iques . . . . . . . . . 174

6. Ar t6 r iosc l6 rose . . . . . . . . . . . . . 180

C o m m e n t a i r e s . . . . . . . . . . . . . . . 185

Conc lus ions - - S u m m a r y . . . . . . . . . . 188

B ib l i og raph i e . . . . . . . . . . . . . . . 190

131

Page 3: La mesure de la frequence de fusion en clinique

I. D E F I N I T I O N S .

Lorsque des phases d'excitation lumineuse et des phases d'obscu- ration se suivent sur un rythme lent, le sujet sain per~oit, succes- sivement les p4riodes de lumi~re et d'obscurit4. Si le rythme s'acc41~re, le sensation lumineuse ne subtt plus d'interrup- tion, mais son intensit4 n'est pas constante; elle s'accroit h chaque ~clairement et faiblit h chaque obscuration; la surface ~clair4e ,,papil- lotte" (,,flicker" des auteurs anglais, ,,flimmern" des auteurs alle- mands). Enfin si le rythme des ~clairements et des obscurations devient plus rapide encore, les variations d'intensit4 cessent, la plage observ~e semble 4clair4e par une source lumineuse constante dont l'intensit~ ne subit plus aucune modification. La persistance apparente de la sensation visuelle rend imperceptible, l'extinction de la lumi~re. A c e moment, la ,,fr~quence critique de fusion" est atteinte. Nous la d4finirons de la fa~on suivante.

La [r~quence critique de fusion est le hombre minimum d'4clairements par seconde pour lequel un stimulus lumineux discontinu donne une sensation visuelle continue. La fr~quence critique de fusion mesure donc la persistance apparente de la sensation visuelle consecutive au stimulus.

Les recherches de diff4rents auteurs et les n6tres montrent que route alteration du champ visuel (d4pression d'un isopt~re ou scotome) se traduit par un abaissement de la fr4quence critique de fusion, c'est-~-~dire par un allongement de la persistance apparente de la sensation visuelle. Le patient ~prouve une sensation visuelle continue alors que le rythme des 4clairements est lent et qu'un sujet sain plac~ dans les m~mes conditions pergoit encore alternativement les phases d'4clairement et d'obscuration.

La fr4quence critique de fusion peut ~tre mesur~e par deux pro- c4d4s diff4rents: la m~thode par ralentissement (falling-method) et la m~thode par 4chantillonage (sampling-method); l'une et l'autre out des avantaqes et des inconv4nients. Nous avons adopt4 la m4thode par ,,ralentissement'" et nous proc4dons de la fagon suivante.

Au d4but de la mesure, la fr4quence des ~clairements est lar~te- ment sup~rieure ~ la fr4quence critique de fusion. Elle est alors r4duite progressivement et le malade si~]nale sans d41ai le moment d'apparition du papillottement. Chaque mesure dure cinq secondes. Ce mode de mesure de la fr4quence de fusion ne nous semble pas justifier les critiques qui out 4t~ formul~es: la latence des r4ponses

132

Page 4: La mesure de la frequence de fusion en clinique

du patient n'introduit pas d'erreur appreciable et en cas de doute, il est toujours loisible de proc~der h une v~rification en passant de la non-fusion h la fusion en au0mentant progressivement la fr~- quence des ~clairements.

Diff~rents auteurs pr~r~rent la m~thode en caract~res droits pas en italique par ,,~chantiltonnage'" ou ,,sampling-method (Riddell, 21; Hylkema, 11, 12) dont voici le principe. Le test lumineux inter- mittent est ~clair~ plusieurs lois cons~cutivement pendant un temps tr~s court, une ~ deux secondes. La fr~quence des stimulus est con- stante pendant chacun des ~clairements, mais est modifi~e en plus ou en moins entre chacun d'entre aux. La fr~quence de fusion est d~termin~e par t~tonnements successifs. La ,,sampling-method" a l'avantage d'etre tr~s precise, elle ~vite l'erreur due ~ une r~ponse tardive, mais elle a l'inconv~nient d'etre longue et fatigante; nous n'y recourons qu'exceptionnellement.

Comme l'~tude du champ visuel, la mesure de la fr~quence critique de fusion se heurte parfois ~ des difficult~s.

Au cours des examens, certains sujets h~sitent ~ se prononcer sur l'existence ou l'absence du papillottement quand la fr~quence des ~clairements est voisine de la fr~quence critique de fusion. Ceci r~sulte du fait que, en plus des facteurs physiologiques et pathologi- ques des facteurs psychiques importants interviennent, intelligence, attention, comprehension, crainte.

Le r61e de la fatigue dans le m~canisme du fusionnement est mis en ~vidence par diverses constatations. Riddell (21) a observ~ chez un sujet ayant pass~ une nuit sans sommeil, une chute considerable de la fr~quence critique de fusion et une ~lrande variation dans les r~ponses.

Cependant, en r~gle g~n~rale, la fr~quence critique de fusion peut ~tre mesur~e apr~s quelques brefs essais pr~liminaires com- ment,s d'une explication claire. Elle n'exige pas du patient des qualit~s autres que celles requises pour la mesure du champ visuel.

Le ph~nom~ne d~crit sous le nom d'adaptation locale est une cause d'erreur qu'il importe de connaitre. Voici en quoi elle consiste: une source lumineuse intermittente est observ~e pendant un certain temps h la p~riph~rie du champ visuel. Le rythme des ~clairements est tel que le sujet fusionne. Si le rythme des ~clairements se ralen- tit, le sujet cesse de fusionner pendant un temps tr~s court; puis imm~diatement fusionne ~t nouveau. Le papillottement ne r~apparait et n'est stable que pour une fr~quence d'~clairements anormalement

133

Page 5: La mesure de la frequence de fusion en clinique

basse et inf~rieure h la ff4quence de fusion r~elle. Ce ph4nom~ne est d 'autant plus marqu4 que le test est situ4 plus loin du point de fixation. I1 semble r4sulter d 'une v4ritable accountumance aux stimulus. Ce ph4nom~ne est-il central ou p4rip,h~rique? Les avis sont partag~s. I1 serait central pour Riddell (21), Pollock et May e r (19), et p4riph4rique pour Grani t et yon Ammon (0). Hylkema (11 ), le fair stager en partie dans le syst~me nerveux central.

Pour 4viter l 'erreur due h l 'adaptation locale, nous avons jusqu'ici limit~ nos recherches ~ la partie du champ visuel situ4e ~ moins de 30 degr4s du point de fixation. Le mesure de la fr4quence critique de fusion dans des r4gions plus exeentriques serait cependant utile et nous semble possible par l'emploi d 'une instrumentation appro- pri4e.

II. E T A T D E LA Q H E S T I O N .

1. Recherches physiologiques.

Au cours des 20 derni~res ann4es surtout, les physiologistes ont consacr4 de nombreuses recherches h l '4tude des facteurs qui modi- fient la fr4quence de fusion chez l'individu sain. Celle-ci d4pend non seulement des caract4ristiques physiques de la source lumineuse intermittente, mais encore de facteurs biologiques (litt4rature jusque 1936 dans R. Grani t (7) ; jusque 1939, dans H. Pi4ron (18).

a. C a r a c t 4 r i s t i q u e s d e l a s o u r c e l u m i n e u s e .

Intensit~ lumineuse. I1 existe une relation directe entre I'intensit4 subjective *) de la lumi~re incidente et la fr4quence critique de fusion: plus la sensation subjective est grande, plus la fr4quence de fusion est 41ev4e. Fe r ry et Porter ont trouv4 la relation suivante entre intensit4 subjective (I) et ff4quence, critique de fusion (F ) pour la lumi~re blanche

F - ~ - - k l 9 I - { - k ' Cette loi n 'est valable que pour des intensit4s sup4rieures h 0.25

lux et pour un territoire r4tinien situ4 h l0 ~ du point de fixation. I1

*) L'intensit4 lumineuse du test servant fi mesurer la fr4quence de fusion peut s'exprimer soit par son intensit4 lumineuse pendant la phase d'4clairement, soit par l'intensit4 de la sensation resser/tie par le sujet au moment off la fusion est atteinte. L'int~nsit4 de la sensation subjective se mesure par la loi de Talbot- Plateau (1834--1835). Elle dgpend de la dur4e relative des phases d'4clairement et d'observation. Sices phases sont 4gales, l'intensit4 de la sensation subjective est ~ga!e fi la molt4 l'intensit4 de la source pendant la phase d'~clairement.

134

Page 6: La mesure de la frequence de fusion en clinique

faut de plus que l'&lairement du test et celui du milieu ambiant

soient ~gaux.

Longueur d'onde de la lumi6re dmise. La fr~quence de fusion varie 69alement avec la longueur d'onde de la lumi~re incidente ou mieux avec la luminosit~ de cette lumi~re. Pour des lumi~res monochroma- tiques de m~me luminosit~ la relation entre l'intensit~ de la source et la fr~quence de fusion ob~it ~ l'~quation pr~cit~e. La loi de Ferry et Porter est applicable en employant des constantes appropri6es

/k, k', ,~ ) F ~ k~ Ig I;. -q- k'~

Ce ph~nom~ne trouve son application en photom~trie chromatique. Sur[ace du test. La fr~quence de fusion augmente suivant une

progression arithm~tique si la surface du test augmente en progres- s/on 9~om~trique.

Deux zones r~tiniennes excit~es simultan6ment et voisines l'une de i'autre ont entre elles une interaction si la distance qui les s~pare ne d~passe pas 5 degr6s et si les phases d'&lairement des deux sources lumineuses sont synchrones; on constate alors un abaissement de la fr~quence de fusion. Le m6me ph6nom~ne se produit si une des deux zones est &lair~e par une source lumineuse continue (Hylkema, 11 ). Ce ph6nom~ne r6sulte peut-~tre d'une sommation par les cellules horizontales r6tiniennes. Son ~tude parait susceptible d'apporter certaines lumi~res sur les fonctions real connues de ces cellules.

b. F a c t ~ u r s b i o l o g i q u e s .

Localisation de la rdtine dctairde. En &lairant de fagon intermit- tente des territoires r6tiniens diff6rents, on constate, que toutes autres conditions ~tant identiques, la fr6quence de fusion varie. La nature des 616ments photo-r~cepteurs int~ress~s joue un r61e domi- nant. Dans l'oeil adapt6 h la lumi~re, pour des intensit6s lumineuses fortes, la fr~quence de fusion est plus 6levee dans la r6gion moyen- ne de la r6tine qu'h la fovea ou/ t la p~rip'h6rie; pour des intensit6s lumineuses basses, la fr6quence de fusion est maximum ~t la fovea et d&roit progressivement vers la p~riph6rie du champ visuel. La fr6- quence de fusion n'est pas la m~me dans les moiti6s temporale et nasale de la r~tine, constatation inexpliqu6e jusqu'ici et que nous croyons avoir &laircie. Nous y reviendrons dans la suite.

Adaptation rdtinienne. L'adaptation /t l'obscurit6 abaisse la fr6- quence de fusion; elle modifie et parfois m~me inverse les valeurs

135

Page 7: La mesure de la frequence de fusion en clinique

relatives centrales, moyennes et p~riphdriques que nous avons rap- pel~es pr6c~demment.

Age du sujet et diam~tre pupillaire. D'autres facteurs biologiques, l'~ge du sujet et le diam6tre pupillaire, ont encore une influence sur la fr~quence de fusion. Ces facteurs auxquels nous avons consacr6 des recherches personnelles seront envisag6s ult6rieurement.

Granit et son 6cole ont ~tudi6 chez l'animal le ph~nom~ne de fusi- onnement par une m~thode objective: l'enregistrement des courants d'action de la r~tine et du nerf optique, cons~cutifs h l'excitation lumineuse. Ces recherches ~l~flantes n'ont cependant pas r~ussi /l ~claircir compl~tement le m~canisme par lequel un stimulus discon- tinu peut donner une sensation continue.

2. t~echerches en Pathologie oculaire et nerveuse.

Contrastant avec l'abondante litt~rature publi6e dans le domaine de la physiologie, quelques travaux seulement relatent des mesures de frCquence de fusion en pathologie oculaire et nerveuse. Le pre- mier en date, semble-t-il, celui de Markow remonte h 1901, il n'est que rarement cit6 (17). Nous n'avons pas r~ussi h nous procurer le texte original. Basant ses conclusions sur un materiel important, Markow conclut que la fr~quence de fusion est abaissCe dans le fllaucome, les r~tinites, les chorior~tinites, les affections du nerf op- tique et les alterations de la transparence des milieux oculaires. Malgr~/'imperfection de la technique utilisCe, il pressent l'importan- ce diagnostique de la mCthode.

Deux ans aprCs, Braunstein (3,4) confirma l'existence d'une alt6- ration de fusionnement dans de nombreuses affections des mere- branes profondes de l'oeil et du neff optique.

En 1908, Lohmann (14) signale une modification de la fr~quence de fusion dans ,l'amblyopie.

En 1909, les Von Graefe's ,Archiv fiir Ophthalmologie publient les diverflences d'opinion de Braunstein (3,4) et Hessberg (10) au sujet de l'utilit~ pratique de la mCthode. Braunstein la pr6conise, Hessberg la dr L'opinion de Braunstein qui, nous le vet- tons dans la suite, Ctait justifi6e n'a malheureusement pas pr~valu.

Aucune publication,/l notre connaissance, ne traite de la question de 1909 h 1933. A partir de cette date, plusieurs auteurs scandina- ves, inspires par les recherches physiolo0iques de Granit mesurent

nouveau la fr~quence de fusion en clinique; Ajo et Teraskeli (1)

136

Page 8: La mesure de la frequence de fusion en clinique

~tudient l'achromatopsie et l'amblyopie, Enroth et Werner (5), l'adaptation r~tinienne. Malgr~ l'int~r& suscit~ par ces recherches, l'~mpulsion d~finitive ne semble pas encore @tre donn~e et Ies appli- cations en pathologie oculaire restent isol&s.

Dans l'entretemps, les recherches campim6triques et p~rim~triques, stimul~es par les exigences toujours croissantes du diagnostic neuro- chirurgical progressent rapidement. En 1933, Philips (20) se pose la question de savoir si ralt~ration de la fr~quence .de fusion ne pre- cede pas le scotome quand les voies optiques sont comprim&s. I1 conclut que l'abaissement de la [r~quence critique de fusion peut constituer un sympt6me pr6coce d'une n6oplasie c~r~brale touchant le tractus optique. En 1936, Riddell (21) reprend cette ~tude, 'du m~me point de vue et aboutit h des conclusions analogues.

Plus r&emment encore, Hylkema (12) souligne ]'int&~t de la mesure de la fr~quence de fusion en clinique du double point de vue du physiologiste et du pathologiste.

III. I N S T R U M E N T A T I O N .

Un des buts de notre travail est de comparer syst~,matiquement les donn&s de l'examen campim&rique et de l'examen de la fre- quence de fusion. Nous .d&rirons les instruments que nous avons utilis6s, l'&ran plan .de Bjerrum d'une part, l'appareil pour l'~tude du fusionnement d'autre part.

1. Ecran plan campim~trique.

Les mesures campim6triques auxquelles nous avons soumis tous nos malades sont actuellement entr6es dans la routine d'examen de nombreuses cliniques. La technique de ces mesures diff~re cependant d'un exp~Hmentateur ~ l'autre. La m6thode d'examen que nous avons adopt~e comporte tous ]es perfectionnements que plusieurs chercheurs .de la Clinique ophtalmologique de Li/~ge y ont successi- vement apport~s.

L'~cran plan de Bjerrum est plac~ /l une distance d'un m~tre. I1 est fait d'une ~toffe de laine noire et ne pr~sente de re[lets sous aucune incidence. Douze m&idiens et cinq circonf6rences concentri- ques &helonn~es de 5 en 5 degr~s jusque 25 degr~s sont trac6s au moyen de soie noire peu apparente. Le point de fixation du regard est'constitu6 par un trou de 3 mm. de diam6tre perc~ au centre de l'6cran et derriere lequel se trouve une ampoule ~lectrique rouge; il dolt ~tre ais~ment visible sans ~tre ~blouissant, le choix d'une lu-

137

Page 9: La mesure de la frequence de fusion en clinique

mitre roufle, stimulant sp&ifique des c6nes, assure une excellente fixation. Si l'acuit~ visuelle centrale est mauvaise, on remplace ce point de fixation par un cercle blanc d'autant plus flrand que les fonctions sont plus alt~r~es.

Le campim~tre est &lair~ de fa~on diffuse et uniforme par deux tubes lumineux (Philips T.L., 1 m~tre de long, 220 V., lumi~re flu jour) disposes un peu en arri~re du sujet dans des r~flecteurs verti~ caux, blanc mat. L'intensit~ d'~clairement est r~fllable par interposi~ tion d'~crans perforCs d'un nombre variable de trous (90; 60; 30:, 10; 3; 0,1 lux; cellule photo~lectrique plac~e contre l '&ran et orien- t~e vers les sources lumineuses). Gr~ce ~ ce dispositif la qualit~ de la lumiCre incidente reste identique quelle que soit l'intensit~ de l'&lairement. Nos recherches ont ~t~ faites en fl~nCral avec l'&lai~ rafle de 60 lux, proche de celui recommand~ par le Confirms interna- tional d'Amsterdam (1928) pour les mesures p~rimCtriques.

Les tests dont les diam~tres varient de 0,5 h 15 ram. sont blanc mat; leurs manches sont noirs, garnis de laine. Nous d~signons le test choisi par sa valeur anflulaire. Celle-ci s'exprime conventionnel- lement par une fraction dont le num~rateur est le diam~tre de l'index en millim~tres et le d~nominateur la distance du sujet h I'&ran en millim~tres. (Ex. 3/1000 siflnifie qu'il s'aoit d'un test de 3 turn. de diam~tre d~placr sur un &ran situ~ ~ 1.000 ram. du sujet). L'emploi d'index colorCs ne nous a pas semblr utile.

L'op~rateur est flant~: et v~tu de noir mat. Une immobilisation rifloureuse de visafle du patient au moyen

d'une mentionniCre et d'un appui~t~te est indispensable. L'oeil non examin~ est couvert d'une coquille n'exerqant aucune pression.

Pour Cviter un'e modification de l'~tendue du champ visuel sous /'influence des chan~ements d'adaptation rCtininenne, il est utile, avant la premiere mesure, de faire sCjourner le sujet pendant 10 15 minutes en face de l'&ran de Bjerrum muni de l'~clairement qu'on se propose d'utiliser (Weekers, Roussel, 32).

Les am~tropes portent leur correction pour voir au loin. Il importe de veiller h c e q~ae la monture ne fl~ne pas la perception des tests d~plac~s h 25 deflr~s du point de fixation.

L'examen commence par la recherche de la tache aveuflle avec un test de flrande dimension (10/I000); le scotome est d~limit~ h l'aide d'aifluilles ~ t~te noire. Cette br~ve ~tude pr~liminaire donne, en quelques instants, de pr&ieux renseignements sur le degr~ d'atten- tion du sujet et sur la precision de ses r~ponses.

138

Page 10: La mesure de la frequence de fusion en clinique

Pour ~viter une fatigue excessive les mesures sont interrornpues pendant quelques secondes de minute en minute.

Les isopt~res sont d~lirnit~s en d~pla~ant le test de la p&iph~rie vers le centre. Les scotornes sont abord6s perpendiculairement en passant de la zone sensible h la zone non sensible. La densit~ du scotorne est mesur~e par l'emploi de plusieurs tests, de doam~tres croissants.

2. Appareil pour la mesure de ta fr~quence de fusion (31).

Si malgr~ les avis presque unanirnernent favorables sur la valeur des renseignernents qu'elle est susceptible .de fournir, la rnesure de la fr~quence de fusion n'est pas entree, jusqu'ici, dans l'examen rou- tinier de l'appareil visuel, c'est en partie, parce que l'appareillage est ~ compliqu6 et n'a pas 6t~ mis ~t la ,disjosition du clinisien.

Le simple disque opaque/l secteurs blancs et noirs n'a plus qu'un int6r& historique et doit &re abandonn~ pour l'&ran &lair6 par intermittence. La forme et la surface de cet &ran, l'intensit~ et la qualit6 de la lumi~re doivent pouvoir ~tre modifi&s. Les appareils utilis6s par Riddell (21) et Hylkerna (11) remplissent ces condi- tions, mais ils se pr~tent mal ~ l'exploration du champ visuel; ils sont inamovibles. L'exploration d'un point excentrique de la r~tine n&es- site le d~placement du point de fixation. Cette mani&e de proc~der expose /~ des erreurs; elle ne permet pas le rep&age exact de Fen- droit de la r~tine stimul6 et par consequent rend difficile la compa- raison syst~matique et pr&ise des donn~es de la campim6trie d'une part, de la mesure de la fr~quence de fusion d'autre part. Chaque exploration d'un point excentrique de la r6tine demande une mise au point longue et laborieuse. Aussi les chercheurs qui nous ont pr&6- d6s ont-ils tous limit6s leurs explorations, soit /~ une petite portion du champ visuel (Teraskeli, jusque 10 degr6s du point de fixation, 23) soit ~ quelques points seulement sur l'un ou l'autre rn~ridien (Riddell, 13 points jusque 30 ~ du point de fixation, 21; Hylkema 2 ou 3 points dans le champ visuel, 11 ).

En faisant construire * l'appareil ici d&rit, nous avons cherch6 cr6er un instrument dont la pr&ision rut rigoureuse et dont l'ernploi ais~ et rapide put ~tre introduit dans le schema de l'examen clinique usuel. Cet instrument n'apporte pas au probl~,me une solution d6fi- nitive. I1 est encombrant et cofiteux, mais il constitue de divers points

*) Ateliers Jaspar, Liege Belgique.

139

Page 11: La mesure de la frequence de fusion en clinique

de vue un perfectionnement sur les mod41es ant4rieurs et ouvre la voie/~ de nouvelles r4alisations.

L'appareil se compose d'un cadre m4tallique, carr4, de 1,70 m. de c6t4 et de 0,45 m. de profondeur. Les c6t4s horizontaux de ce cadre portent des rails sur lesquels se d4place de droite g gauche ou de gauche /l droite un bgti vertical haut de 1,70 m., large de 0,27 m. ( f i g . 1 ( I ) .

Le long du bfiti vertical monte ou descend une plate-forme large de 0,18 m: profonde de 0,45 m.

( f i g . 1 (2). La combinaison de la translation horizontale et du d~placement

vertical permet de placer la plate-forme en un point quelconque de la surface carrie d~li,mit~e par le cadre m~tallique.

D'arri~re en avant, la plate-forme porte: I) une source lumineuse 2) un moteur entrainant, d 'une part, une h~lice/l deux pales de

90 degr~s, d 'autre part, une dynamo dite ,,tachym~trique" 3) un filtre affaiblisseur neutre, accessoirement, un filtre mono-

chromatique. 4) un 6cran de verre opale. 5) un diaphragme (fig. 1 (6. 7, 8, 9, 10, 11). La source lumineuse blanche est aliment~e par le courant continu

d'une batterie et ~met un faisceau de rayons parall61es large de 17 cm.

Le moteur fair tourner l'h61ice et la dynamo tachym~trique. Le voltage du courant ~mis par la dynamo est fonction de la vitesse de rotation de l'h~lice et sert ~ la mesure du rythpne des 6clairements. Nous d~terminons, instantan6ment et avec une 9rande pr6cision, des fr~quences d'~clairement variant de 5 ~ 75 par seconde. L'Mlice interrompt deux lois, /l chaque tour, le faisceau luminaux. La duffle des phases d'~clairement ~tant 6gale g celle des phases d'obscuration, l'intensit6 de la sensation lumineuse est r6duite de moiti6 quand la fr6quence critique de fusion est atteinte ou d~pass6e (Loi de Talbot- Plateau).

[In jeu de filtres affaiblisseurs neutres, analogues aux verres de Tscherning fait varier l'~clairement de 65 /l 3 lux, sans modifier la qualit~ de la lumi~re regue par l'ficran de verre opale. S'il en esit besoin, il est possible d'intercaler en plus, un filtre monochromati- que *

*) Wratten filters, Eastman Kodak, Rochester, U.S.A. 140

Page 12: La mesure de la frequence de fusion en clinique

Le diam~tre des diaphragmes varie de 0,87 cm. h 17,40 cm./: une distance de 1 m.; la valeur angulaire de la plage lumineuse varie de 0,5 ~ 10 degres.

l.In point lumineux rouge d'intensit~ et de surface r~glables assure la fixation du regard du sujet au centre du chaihp visuel au moment de la mesure de la fr~quence de fusion /t la p~riph~rie. I1 peut etre d~plac~ et ~teint pour determiner la fr~quence de fusion maculaire.

En plus de l'emploi d'une dynamo tachymdtrique, la caractdristi-

A B C

Figure I.

Appareil pour la mesure de la fr6quexace critique de fusion dans le champ visuel.

A. Vue de profil; B. Vue de face (le rev6tement de l'appareil est enlev/" pour mettre e n 6vidence

les dispositifs assurant le de, placement de l'6cran dans le champ visuel); C. Vue de face (le revetement est en place).

1. B~ti vertical assurant la transla- tion horizontale de l'6cran.

2. Plate-forme assurant l'~l~vation et l'abaissement de l'~cran sur le b~ti vertical pr~citek

3--4. Manivelles de commande. 5. Contre-poids. 6. H~lice /l 2 pales. 7. Moteur.

8, Dynamo tachym~trique, 9. Source lumineuse.

10, Ecran en verre opale. l l . Emplacement du diaphragme, du

filtre affaiblisseur neutre et, ~ventuellement du filtre mono- chromatique.

12. Point de fixation lumineux.

141

Page 13: La mesure de la frequence de fusion en clinique

que principale de notre appareil r~side dans le [ait que le point de [ixation du regard est [ixe, et que, par contre, tout le syst~me optique et m~canique assurant l'~clairement intermittent de l'~cran est mobile et peut ~tre place, par une manoeuvre rapide et simple, en un point d~termin~ du champ visuel jusque 35 degr~s du point de [ixation, lorsque le sujet est plac~ ~ 1 m.

Si nous avons adopt~ ce syst~me, malgr~ les difficult6s inh6rentes sa construction, c'est que nous nous ~tions donn~ comme but prin-

cipal la comparaison syst~matique des donndes de l'examen camp/- m~trique et de l'examen de la fr~quence de fusion.

Cette comparaison s'av6re utile; elle est ais6e avec l'instrument d~crit ici; par contre, elle est difficile et parfois impossible lorsque le test lumineux clignotant est im~mobile et le point de fixation du re- gard mobile.

L'instrument dont nous disposons offre des possibilit~s presque infinies: examen au moyen de grands ou de petits tests, fortement ou faiblement &lair6s, dans une portion importante du champ visuel d'une r6tine adapt~e ~l la lumi~re ou /i l'obcurit6.

IV. CHOIX D 'UNE M E T H O D E .

La fr~quence de fusion au point de fixation et dans le champ vi- suel d6pend des conditions expdrimentales: ,dimensions et &laire- ment du test, Ionfueur d'onde de la lumi~re ~mise, ~tat d'adaptation de la r6tine. Pour que les r~sultats soient comparables d'un malade /l l'autre, il iJnporte donc que les conditions d'examens restent stric- tement constantes. Apr~s des essais nombreux, nous avons adopt6 une m6thode standard qui nous donne satisfaction et que nous avons utilis6e dans plusieurs centaines de cas sans y apporter de modifica- tions. En voici les caract~ristiques:

I. Eclairement de l'~cran lumineux.

II est approximativement de 50--60 lux pendant la phase d'&lai- rement (cellul e photo-~lectrique contre l'&ran de verre opale). La dur~e des phases d'&lairement ~tant ~gale/t celle des phases d'obs- curation, l'&lairement du test lum/neux est donc r~duit de moitid par la rotation de l'h~lice et l'intensit6 de la sensation subjective quand la fr~quence de fusion est atteinte est ~gale/l celle produite par un test lumineux non intermittent dont l'&lairement est de 25 30 lux.

H2

Page 14: La mesure de la frequence de fusion en clinique

2. Longueur d'onde de la Iumi~re.

Nous utilisons comme source lu~ineuse une lampe ~ incandescen~ ce blanche (6V. 15W.) . La lumi~re ~mise est diffus~e par un verre opale.

3. Eclairement ambiant.

Nous mesurons la fr~quence critique de fusion en chambre noire. Le test intermittent est la seule source lumineuse pergue par le sujet. Ce dispositif pr~sente un avantage considerable: de r~duire au maximum les causes de distraction. Le patient peut concentrer toute son attention sur l'apparition du cliflnotement. Etant donn~ que l 'adaptation modifie le fr~quence critique de fusion, il est important de n'effectuer la premiere mesure qu'apr~s accoutumance g l'obscu- rit~. Dans ce but, nous laissons s~journer le patient pendant 10 g 15 gninutes en chambre noire avant de commencer l 'examen. Le court ~clairement par le test clignotant, au moment de la mesure, ne modi- fie pas, de fagon sensible, l 'adaptation r~tinienne.

4. Diam~tre du test clignotant en in[luence des uaisseaux r~tiniens

sur la fr~quence critique de [usion.

I1 d~coule du bref rappel de physioloflie fait plus haut que lors- qu'on explore une portion ~tendue du champ visuel avec un test de di~m~tre constant on observe, en dehors de tout ~tat pathologique, chez l'individu normal, des variations consid~rables de la fr~quence de fusion d'un point ~ u n autre. En voici deux exemples:

La fr~quence de fusion d~croit du centre vers la p~riph~rie (lift. 2). A 15 degr(~s du point de fixation la fr~quence de fusion est plus ~lev(~e dans la moiti~ nasale du champ visuel que dans la moiti~ tem- porale ( f i g. 3).

Ces variations r~sultent surtout, semble-t-il, des dispositions ana- tomiques propres ~ chaque territoire r~tinien: type de cellules photo- r~ceptrices (c6nes ou batonnets), mode d'innervation de celles-ci, calibre des vaisseaux sanfluins situ~s dans la couche des fibres ner- veuses: ce dernier facteur, sur lequel nous avons attir~ ,l'attention pour la premiere lois, m~rite quelques co.mmentaires.

Plusieurs auteurs ont, avant nous, constat~ que, routes conditions de mesure 6tant ~gales, la fr6quence de fusion n'atteint pas le m~me

143

Page 15: La mesure de la frequence de fusion en clinique

Figure 2.

Chute de la fr4quence critique de fusion en fonction de la distance s4parant le test du point de fixation.

(Diam~tre du test: 4 degr4s, 4clairement 50 lux; ~ge du sujet: 35 ans, pupi]le non dilat4e).

32~ 30

Figure 3. Abaissement de la fr~quence critique de fusion dans la

moiti4 temporale du champ visueL

(Diam~tre du test: 3 degr4s, ~clairement 50 lux; gtge du sujet: 35 ans, pupille non dilat4e).

niveau clans les moiti4s temporale et nasale du cl~amp visuel (|itt4ra- ture jusque 1936 dans Riddell, 21; Hylkema, I 1 ). Le fait est confirm4 par l'examen de la figure 3. Nous croyons que la chute de [a fr~- quence de fusion dans la moiti4 temporale du champ visuel r4sulte de la pr4sence dans les couches superficielles de la r4tine de vaisseaux de fort cali'bre et des gaines p4rivasculaires qui les entourent. Ces

144

Page 16: La mesure de la frequence de fusion en clinique

vaisseaux interceptent les rayons lumineux venant de l 'ext4rieur et r4duisent le stimulus qui atteint les 414ments photor4cepteurs

(f i g. 4). C ' e s t / l la m~me cause qu'il faut at tr ibuer les angioscoto- 'rues dont le trac4 dans le champ visuel ~ correspond /t la projection des branches vasculaires les plus larges. Si on d4place dans notre champ visuel un petit index faiblement 4clair4, consti tuant pour notre r4tine un stimulus a peine supraliminaire, cet index cessera d 'etre pergu lorque sa projection dans notre oeil tombera sur une branche de l 'art~re ou de la veine centrale de la r4tine (R. Weeke r s , H u m - blet, 29).

L 'exis tence des angioscotomes et l 'abaissement de la fr4quence de fusion soulignent tous deux la diff4rence de valeur fonctionnelle des moiti4s temporale et nasale de la r4tine. Dans l 'une, des vaisse- aux nombreux et fins assurent l ' irrigation sanguine sans cr4er d 'obs- tacle important /~ la marche des rayons lumineux; dans l 'autre, par contre, des vaisseaux moins nombreux mais plus volumineux projet-

I/,//"4";v'~ ~ ' ~ : ' ~ ; ~//-,/,~z,,- " ' ' k T , / , ' ;,' x ;" -

Figure 4. En noir: projection de la papille optique et des vaisseaux r4tiniens dans le champ

visuel. En blanc: tests utilis4s pour la mesure de la fr4quence critique de fusion en 26

points du champ visuel (voir figure 6). Les angioscotomes r4duisent la surface des tests situ4s dans la molt4 temporale du champ visuel.

1,~ 1 4 5

Page 17: La mesure de la frequence de fusion en clinique

tent des ombres sur les ~l~ments photor~cepteurs. Cette asym~trie ne cr~e aucune g@ne chez le sujet sain, mais c'est ~ elle que nous croyons devoir attribuer ,,l'enclavement de la tache aveugle" (baring of the blind spot) considerS, ~ juste titre comme un sympt6me cam- plm~trique pr~coce de tr~s grande valeur dans diff~rentes affections de la r~tine et du nerf optique. (Traquair, 24; Weekers, Humblet, 29, 30).

I1 r~sulte de ce qui precede qu'il est souvent difficile d'interpr~ter la signification exacte des modifications de la fr6quence de fusion dans le champ visuel d'un malade poss~dant un scotome 6tendu. Ces modifications proviennent de la combinaison de deux facteurs, loca- lisation du point explor~ et alt6ration des fonctions visuelles, dont les effets, selon les cas, s'ajoutent ou se neutralisent. C'est h ces dif- ficult6s que se sont heurt6s tousles auteurs qui ont c'herch6 h mesurer la fr6quence de fusion dans le champ visuel.

C'est pourquoi Hylkema (12) n'explore que deux endroits: l'un au point de fixation et l'autre excentrique. Riddell (21) explore un point central et 12 p6riph6riques avec un test de dia~m~tre constant (2 degr6s): l'interpr~tation de ses r6sultats exige une comparaison avec l'autre oeil; celle-ci allonge l'examen et pour le surplus n'est pas toujours possible.

.Avant d'entreprendre nos recherches en pathologie humaine, nous avons cherch~ ~ ~carter ces difficult~s. Nous a'vons recherch6 des conditions exp~rimentales assurant le fusionnement h Ja m~me fr~- quence d'~clairement dans tout le champ visuel explor~ chez l'indi- vi.du sain (isofr~quence).

La recherche de l'iso[r~quence est bas~e sur la constatation sui- vante. En un point d~termin~ du chamt5 visuel, la fr~quence de fusion augmente avec le diam~tre du test ( f i g . 5). Nous avons modifi~ empiriquement, par des ajustements successifs, le diam~tre des tests utilis~s jusqu'h co~mpensation des variations de la [r~quence critique de fusion r~sultant des dispositions anatomiques ~num~r~es pr~c~demment. Nous avons donc ~t~ amends h choisir de petits tests pour les zones r~tiniennes caract~ris~es par une fr~quence de fusion ~lev~e et inversement de grands tests pour lies'zones r~tiniennes caract~risees par une fr~quence de fusion basse. Ces recherches qui [urent longues et laborieuses nous ont permis d'atteindre le but que nous poursuivions: l'obtention de conditions exp~rimentales assurant l'isofr~quence dans le champ visuel explore.

Dans notre m~thode standard, nous explorons 26 points situ~s

146

Page 18: La mesure de la frequence de fusion en clinique

Figure 5.

Augmentation de la ~r6quence critique de fusion en fonction du diam~tre croissant des tests.

(Diam~tre des tests 1, 3, 10 degr6s, 6clairement 50 lux; Age du sujet 23 ans pupille dilat6e).

Io o

~|ur u tm so ~!lr

iii

Iio,

Figure 6.

Emplacements et diam~tres des tests assurant, chez l'individu 'normal, dans les conditions de mesure

d6crites dans le texte, l'isofr6quence dans le champ visuel. Oeil droit; en noir,

la tache aveugle.

147

Page 19: La mesure de la frequence de fusion en clinique

sur 8 m~ridiens entre 0 et 30 degr6s du point de fixation. La f i g. 6 montre l 'emplacement de ces points et le diam~tre des tests assurant risofr~quence. L'examen de cette figure confirme le fait que nous avons ~tabli pr&~demment /t savoir que ila presence des vaisseaux r~tiniens les plus volurmineux abaisse la fr~quence critique de fusion. En effet pour obtenir l'isofr~quence dans le champ visuel, nous avons du utiliser des tests plus grands dans la moiti~ temporale que dans la moiti~ nasale. Ceci est particuli~rement ~vident it 15 degr~s du point de fixation, aux deux p61es de la tgche aveug'le, au point d'~mergence des plus gros troncs vasculaires ( f i g . 4).

5. Mode d'application de la mdthode standard.

Le sujet est assis it un m~tre de l'appareil. II s~journe l0 it 15 mi- nutes it l'obscurit~. A la fin de cette p6riode d'adaptation, le visage e~t immobilis~ dans le serre-t~te, kin oeil est couvert sans &re com- prim~. La pupille, comme nousile verrons dans la suite est ou n'est pas sous rinfluence d 'un mydriatique. Quelques explications sont fournies au sujet et quelques essais pr~liminaires sont effectu~s. Avant la mesure, la source lumineuse est ~teinte et l'~cran invisible. L'helice tourne it une vitesse d~passant nette~ment celle de fusionne- ment. Pour effectuer la mesure l'6cran est &lair6 et la vitesse de rotation de l'h~lice est r~duite progressivement. Le malade signale, sans d~lai, le moment d'apparition du ,,papillotement" (falling-me- thod). Chaque mesure dure de trois g cinq secondes. On en fair trois en chaque point explor6; en r~gle g6n~rale, elles concordL'n.t parfaitement. Le d~placement du test lumineux d'un point it un autre du champ visuel demande 10 it 20 secondes. Pendant ce temps, le sujet ferme roeil et ne l'ouvre it nouveau que pour la mesure sui- vante. Nous prenons grand soin it ne jamais explorer successivement deux points voisins dans de cha~mp visuel pour qu'une inattention passag~re du sujet ne simule pas un processus pathologique syst& matis6, en abaissant la fr~quence critique de fusion dans un ter- ritoire unique de la r~tine. Une exploration compl6te du champ visuel jusqu'it 30 degr& du point de fixation ne dure que 20 it 30 minutes et est possible chez des malades dont la fati.gabilit6 est grande ou exag~r~e.

Nous ne recouron, s it la ,,sampling method" que si la latence des r~ponses du sujet nous semble anormalement grande. La ,,sampling method" a l'inconv(~nient d'etre Iongue et fatigante.

148

Page 20: La mesure de la frequence de fusion en clinique

V. R E S U L T A T S C H E Z L ' IND IV ID LI N O R M A L .

Avant de nous livrer/~ l'~tude des cas pathologiques, nous avons t e nu / l appliquer la m~thode , ,standard" de mesure de la fr~quence de ~usion /t des sujets normaux.

Nous avons pris au hasard 49 sujets exempts d'alt6ration oculaire ou des voies optiques et ne souffrant d 'aucune affection g~n~rale; leur ~ge varie de 20 /l 70 ans; ils sont rang6s par d~cades succes~ sives en 5 groupes.

l e t groupe: sujets de 20 /t 30 ans; 2/:me groupe: sujets de 30 /t 40 ans; 3~me groupe: sujets de 40 /~ 50 ans; 4~me groupe: sujets de 50 /t 60 ans; 5~me groupe: sujets de 60 /~ 70 ans; Les pupilles de la moiti~ de ces individus n 'ont pas ~t~ modifi~es;

les pupilles de rau t re moiti6 ont ~t~ dilat~es avant l 'examen par instillation d 'homatropine /i 2 %.

Les r~suItats obtenus ont ~t~ consign6s dans deux tableaux (t a b 1 e a u 1, pupille normale; t a b 1 e a u 2, pupille en mydriase) .

1. La notion iso[r~quence et les [r~quences critique de [usion moyennes.

Pour chacun des 26 points explores, nous avons recherch6 Ia moyenne des r~sultats obtenus chez des sujets d 'un m~me groupe. On observe qu'au sein d 'un m~me 9roupe les moyennes varient tr~s peu d'un po in t / t un autre. Lorsque la pupille est normale, le point le plus bas est inf~rieur/~ la moyenne arithm~tique des 26 points de 3; 5,6; 4,3; 5,7 et 5 , 1 % respectivement dans le ler, 2~me, 3~me. 4~me et 5~me groupe; le point le plus haut lui est sup~rieur de 7; 4,6; 16; 6,9 et 4,4 %. Le m~me calcul applique aux r6sultats obtenus apr~s dilatation pupillaire donne:

149

Page 21: La mesure de la frequence de fusion en clinique

o

~i._

o~

o~

~0

o~

+~

0%

0~0

~0

o~

o ~0

Ln

5o

0~

~0

00

~0

0~

0~

00

0~

00

0

~mo~.

B~

a~

,~,

~

8~

'D

~E

E~

Page 22: La mesure de la frequence de fusion en clinique

Tableau 2.

Isofrdquence.

La pupille eat dilat& par l 'homatropine. L'emplacement et le diam~tre du test correspondant ~t chaque lettre sont indiqu~s sur la figure 6.

D6signat lon du ter r i to i re

r~tinien s t imul6

a

b r

d

f g h i

i k 1 m

n

o

p q r

s

t u

v

w

x

ii Z

P. I ~. moyenne

F . F, maximum

V a r i a t i o n en ~ -

I ~. F . minimum

V a r i a t i o n en - -

Groupe 1 20 -30a r t s

moyenne de 5 aujets

43 41 43 43 '}3 44 43 44 41 41 43 42 '13 44 44 43 43 41 42 '}2 44 '}3 44 "t3 43 44

42,8

44 2,8 %

41 4,2 %

Groupe 2 30-40 arts

moyenne de 5 sujets

42 42 43 43 43 43 43 42 42 42 42 43 43 42 43 41 43 43 43 42 43 43 43 43 '14 43

42,6

44 3,3 %

41

Groupe 3 40-50 ans

moyenne de 5 sujets

42 43 44 43 42 42 42 42 42 43 43 42 41 44 42 42 42 42 42 42 43 4'1 44 44 '12 't2

Groupe 4 50-60 ans

moyenne de 5 sujets

40 41 42 40 41 42 41 41 39 40 42 41 39 41 42 40 41 41 40 39 41 40 43 41 42 41

Gr oupe 5 60-70 arts

moyenne de ,~ sujets

" 43 40,8

5,4 %

I 39

38 39 39 39 39 39 39 39 37 37 38 38 39 39 39 39 38 37 38 38 39 39 39 38 37 38

42,6 38,4

44 39 3,3 % 1,5 %

41 37 3,7 % [ 4 ,4% { 3,7 %

I I l

3,7 %

151

Page 23: La mesure de la frequence de fusion en clinique

variation maximum en plus: 2,8; 3,3; 3,3; 5,4 et 1 % ; variation maximum en moins: 3,1; 5,6; 4,3; 3,1 et 5 , 1 % ; respect ivement pour les l er, 2~me, 3~me, 46me, 56me groupes. Si on groupe les 49 sujets normaux et si on fait la moyenne ari th-

m6tique de chacun des 26 points explor6s, on constate que le sch6ma d 'examen propos6 assure r6elle.ment l ' isofr6quence dans la portion du champ visuel situ6e ~ moins de 25 deflr~s du point de fixation. ( f i g . 7).

2. Influence de l'hge et du diamdtre pupillaire sur la frdquence de fusion.

La moyenne des 26 points de chaque cat6gorie montre un abais- sement progressif de la fr6quence de [usion avec l'~fle.

Cet abaissement est plus marqu6 si la pupiile n 'est pas modifi6e

que si elle est dilat6e. ( tableau 3).

�9 , asz"/'-a9,1\

-m,a-zZ6 9;--r-za,2

Figure 7. Isofrequence.

Fr6quence de fusion, en 26 points du champ visuel (valeur moyenne de 49 sujets).

Cette figure montre qne les diam~tres des tests utilis6s assurent effectivement lqsofr~quence dans toute la

portion explor6e du champ visuel. Tableau 3.

Influence de l'gge et du diam~tre pupillaire sur la fr6quence de fusion.

AGE.

20 ~ 30 30 a 40 40 ~ 50 50 a 60 60 ~ 70

Fr6quence de fusion en ecl. par nec.

Pupille norraale (25 suiets}

40.2 39,2 34,4 31.8 31,6

Puptlle d,lat~e (24 sujetsl

42,8 42,6 42,6 40,8 38,4

152

Page 24: La mesure de la frequence de fusion en clinique

S. W e r n e r (33) a 6tudi~ l 'influence du diam~tre pupillaire sur la fr6quence de fusion. I1 arrive g la conclusion que le myosis e t l a mydriase agissent en modifiant la quantit~ de lumi~re p~n~trant dans l'oeil, mais surtout l'~tat d 'adaptation pr~alable de la r~tine. Celui-ci n ' intervient pas dans nos recherches, puisque toutes nos mesures se font apr+s s~jour/ t l'obscurit~. Contrairement g W e r n e r , nous arri- vons h la conclusion que l'~tat d 'adaptat ion r~tinienne n'est que secondatre; la mydriase ~l~ve la fr6quence de fusion en peranettant l 'entr~e dans l'oeil d 'une quantit6 de lumi~re plus 9rande et le myo- sis au contraire abaisse la fr~quence de fusion en r~duisant la va~leur du stimulus lumineux. Rappelons que des pupills ayant respective- ment 2, 4, 6 mm. de diam~tre laissent passer des quantit~s de lumi6re dans le rapport 1, 4, 9. On voit d6jg en comparant les tableaux 1 et 2 que, ~t g~le ~gal, la fr~quence de fusion est syst~matiquement plus ~lev~e lorsque la pupille est dilat~e.

Pour nous mettre dans des conditions exp~rimentales plus ri0ou- reuses, nous avons instill~ de l 'homatropine ~ 2 % dans un oeil (diam~tre pupillaire 5 h 9 ram.) et de la pilocarpine g 1 % dans l 'autre oeil (diama~tre pupillaire 1 /~ 2 ram.) chez 4 sujets normaux. La mesure de la fr~quence de fusion a ~t~ faite en deux points seule- ment: au point de fixation et ~ 15 degr6s dans le quadrant sup6ro- nasal du champ visuel, avec les tests qui assurent l ' isofr~quence (4 degr~s au centre; 5 degr~s dans le quadrant sup~ro-nasal, riO- 6). Le tableau 4 groupe les r6sultats de ces mesures.

Tableau ,t. Influence de la mydriase et du myosis sur la fr6quence critique de fusion au

point de fixation et dans le quadrant sup6ro-nasal du champ visuel.

AGE.

21 21 18 65

Test de qo plac6 au p o i n t de fixation.

Pupille e n mydriase

5 g 9 m m

Pupille e n myosis

1 ~.2 mm

41 39 43 37 40 34 38 30

Test de So place g 15o darts ]e quadrant s u p 6 r o - n a s a l

Pupille en mydriaae

5 ~ 9 m m

42 41 41 38

Pupdle e n myosis

l a 2 m m

[ 33 30 31 28

I Movenne 40,7 I 35,0 I 40,5 I 30,5

La moyenne des fr6quences de fusion apr~s mydriase est sup6 rieure /l celle observ6e apr~s myosis, tant au centre qu'g 15 ~ du point de fixation. La chute de la fr~quence critique de fusion lorsque

153

Page 25: La mesure de la frequence de fusion en clinique

la pupille est tr~s 6troite est variable suivant les endroits explor6s; elle est plus 9rande g 15 ~ du point de fixation (25 %) qu'au centre du champ visuel (14 % ). Le sch6ma d'examen que nous avons pro- pos6 et qui assure, de fagon tr~s satisfaisante l'isofr6quence lorsque la pupille est normale ou dilat~e ne peut donc ~tre appliqu~ g u n pa- tient dont la pupille est soumise fi l'action d'un myotique.

Ces recherches pr61iminaires nous ont surtout permis de jeter quelque lumi~re sur le m~canisme de l'abaissement de la fr~quence de fusion en fonction de l'~ge. Plusieurs auteurs avant nous ont signal~ ce ph6nom~ne, mais aucun/l notre connaissance n'a montr~ que la mydriase le r~duit consid6rablement.

Le tableau 3 prouve que l'abaissement de la frequence de fusion avec l'~ge est plus marque lorsque la pupille n'est pas modifi6e que lorsqu'elle est dilat~e par un mydriatique. La moyenne des fr~quen~ ces de fusion des 26 points explor6s tombe de 40,2 (sujets de 20 30 ans), g 31,6 (sujets de 60 g 70 ans), soit de 21,3 % si la pupille est normale; elle ne tombe que de 42,8 g 38,4, soit de 10,2 % seule- ment apr~s mydriase homatropinique.

La pupille du sujet ~g6 se dilate moins ~ l'obscurit~ que celle du sujet jeune. L'homatropine r6duit consid~rablement les variations du diam6tre pupillaire en fonction de l'gge; elle ne les abolit toutefois pas compl6tement ce qui explique en partie tout au moins la faible variation que nous avons observ6e. D'autres facteurs interviennent encore: la scl6rose cristallinienne et l 'aufmentation d'absorption des rayons lumineux qui en r~sulte et, peut ~tre, des modifications dis- crates r~tiniennes et nerveuses.

VI. A P P L I C A T I O N S DE LA MESLI'RE DE LA F R E Q U E N C E CRITIQUE DE FUSION EN CLINIQU~E.

La mesure de la fr6quence de fusion en pathologie oculaire ~ tr~s peu r6pandue; aucune clinique europ6enne ou am~ricaine ner recourt, h notre connaissance, h cette m6thode pour d~celer les alt6- rations de la r~tine et des voles optiques. S'il enes t ainsi, c'est que la mesure de la fr6quence de fusion 6tait, jusqu'ici d'une application difficile. L'emploi des instruments t~tilis6s par nos pr6d6cesseurs exige un temps tr~s lon 9 et fournit des r6sultats dont l'interpr6tation est malais6e.

L'appareil que nous avons fait construire est d 'unmaniement

154

Page 26: La mesure de la frequence de fusion en clinique

facile et rapide. L'introduction d'une m~thode standard assurant l'isofr~quence dans le champ visuel, chez le sujet sain, permet de d~celer,/a la simple inspection des r~sultats la gravit~ et l'extension du p h ~ n o ~ n e pathologique. Nous limiterons cet expos~ g l'~tude de cinq affections oculaires et nerveuses: d~collement r~tinien avant et apr~s intervention chiruroicale, n6vrite nicotinique, olaucome, l~sio~, des voles optiques, art6rioscl~rose. Au pr6al~ble, nous rappellerons deux faits importants en pratique concernant l'influence des am~tro- pies et des alterations de la transparence des milieux oculaires sur le fusionnement.

I. Am6tropies. - - Alterations de la transparence des transparence des millieux 6cu,laires.

Nous avons appliqu~ notre m~thode d'examen h des sujets atteints d'un trouDle de la r~[raction. Nous sommes arriv6s h la conclusion .que celui-ci ne modifie pas la fr6quence de fusion m~me chez les forts am6tropes, pour autant que les membranes oculaires soient in- tactes. La mesure de la fr~quence de fusion peut donc se faire sans verres correcteurs. Cet avantage est appr6ciable si on songe aux difficult~s auxquelles se heurtent les mesures campim6triques et p6ri- m6triques chez les hyperm6tropes et chez les myopes. Hylkema (12) a fait la m~me constatation chez des sujets hyperm~tropes, aphaques, myopes et chez des sujets normaux rendus am6tropes par le port d'un verre sph6rique positif d'une valeur dioptrique 6levee. Ce fait s'explique ais~ment, car les tests employ~s sont tr~s grands et la nettet~ ou le flou de leur contour est sans influence sur le m~canisme du fusionnement.

D'autre part, nous avons, dans de nombreux cas, mesur~ la fr6~ quence de fusion alors qu'il existait un trouble des milieux oculaires: taie corn~enne, cataracte, alteration vitr~enne. La r~duction de la transparence des milieux oculaires diminue la valeur du stimulus. Par ce m~canisme, elle abaisse la fr~quence de fusion et cela d'autant plus que l'opacification des milieux endoculaires est plus forte. Nous entrevoyons cependant la possi,bilit~ d'explorer, par la fr6quence de fusion, les fonctions r6tiniennes et nerveuses au travers de milieux in6clairables. Cette exploration serait de la plus grande utilit~ dans l'examen pr6op~ratoire des malades atteints de cataracte et dans la recherche d'un d6collement r~tinien au travers d'une h~morragie du vitr6 par exemples. Hylkema (12) a 6bauch~ cette ~tude: une staffs- tique sur 26 cas de cataracte montre que tout abaissement consid6-

155

Page 27: La mesure de la frequence de fusion en clinique

rable de la fr~quence de fusion indique une alt&ation de la r~tine ou des voles optiques et rend tr~s pr~bl6mat.;que le b6n6fice de l'op&ation.

Dans nos conditions exp~rimentales, le trouble des milieux, lors- qu'il est diffus, abaisse la fr6quence de fusion mais respecte l'isoi- fr6quence dans le champ visuel.

2. D~collement de la r~tine.

a. A v a n t i n t e r v e n t i o n c h i r u r g i c a l e .

Le d&ollement de la r~tine ou plus exactement, le clivage de la r~tine amine une inhibition immediate de presque routes les foncti- ons visuelles. Cependant entre le territoire nettement d&ell~ et le territoire non d&oll~ existe souvent une zone de transition parfois br~ve parfois importante of 1 la r~tine est ~ peine soulev~e. Les fonc~ tions y sont alt6r&s sans toutefois ~tre enti~rement suspendues. L'examen ophtalmoscopique le plus attentif ne permet pas toujours de d~limiter exactement cette zone de transition. L'examen subject/[ peut, si l'on utilise des m&hodes ad~quates, [ournir des renseigne- ments utiles. L'h6m&alopie et la m~tamorphopsie semblent consti- tuer les sympt6~mes les plu s pr&oces d'un soul~vement discret de la r~tine. Nous avons montr~ (32) que l'h6m6ralopie, quelle qu'en soit l'origine, d~termine un r6tr&issement du champ visuel lorsque celui- ci est enregistr~ en faible lumi~re. Le recherche du champ visuel ,,~ double contour" dans le d&ollement r~tinien (Amsler, 2) est une applicat/on pratique de cette observation. Voici en quoi consiste cette m6thode d'examen. Chez un sujet atteint de d&ollement r~ti- nien, on enregistre le champ visuel au moyen ,d'un test fortement &lair~. On d61imite ainsi les d6ficits les plus importants cor- respondants au territoire r~tinien fortelment soulev~. On r~p~te en- suite le m~me examen apr~s avoir consid~rablement r~duit l'&laire- ment du test. On observe en r~gle 9/re&ale une extension des zones aveugles correspondant ~h un territoire oil la r&ine n'est que mod~r~ment soulevhe. La recherche du champ visuel ~ double con- tour d~limite exactement et compl&tement le territoire d&oll~.

La fr~quence de fusion permet ou m~me titre que la campim~trie en lumi~re att~nu6e la d~limitation exacte d'un d&ollement m~me discret, car elle est abaiss~e de fagon sensible m~me lorsque le d&ol-

156

Page 28: La mesure de la frequence de fusion en clinique

lement est plan. * Les r4sultats de ces recherches sont importants . car ils sont susceptibles dans certains cas de modifier les indications

et le pronostic de l 'op4ration (f i 9 . 8 ) .

b. A p r 4 s i n t e r v e n t i o n c h i r u r g i c a l e .

La r4cup4ration des fonctiens visuelles d 'une r4tine recoll4e apr~s intervention chirur9icale n 'a fair l 'objet que de quelques t ravaux seulement.

i

Figure 8.

d ; 45 ans; oeil gauche; d4collement r4tinien, plan, inf4ro~temporal; d4sinsertion de III H. ~t VI H.; acuit4 visuelle 5/24.

Campim4trie. Scotome sup6ro-nasal (tests 0,5; 20/1000; 6clairement de l'4cran: 60 lux.).

FrOquence de [usion. D4pression consid4rable clans la partie du champ visuel cor- respondant /~ la partion la plus dense du scotome. D4pression de moyenne importance clans tout le territoire o3 les mesure campim4triques et de l'acuit4 visuelle ne r4v41ent qu'un d4ficit mod4r4.

Sallman et Sveinsson (22) ont montr6 que lorsqu'un d4collement r4tinien est op4r4 pr4cocement, l'acuit4 visuelle et le champ visuel pour le blanc se r4tablissent d~s que la r4tine entre g nouveau en contact avec r4pith41ium pigmentaire. Le sens chromatique r6cup~re avec un certain retard. Le champ visuel pour les tests rouges s'41ar-

*) Lorsque une partie du champ visuel est compl4tement abolie, il importe d'6viter une erreur: il arrive parfois que le patient d~crive correctement la sensation vi- suelle intermittente, puis le moment du fusio'nnement, alors que le test lumineus se trouve dans le territoire d'un scotome absolu. Ce ph4nom4ne est d u g la dif- fraction des rayons lumineux et b. la stimulation, ~ distance d'un territoire r4tinien o3 la sensibilit4 persiste. La fr4quence de fusion enregistr4e ainsi est extr4mement basse: 4 g 5 4clairements par seconde.

157

Page 29: La mesure de la frequence de fusion en clinique

git plus vite que celui pour les tests bleus. L'adaptation g l'obscurit~ de la r~gion recoll~e demeure d6ficiente pendant longte~mps et par- lois d~finitivement.

Lorsque le d6collement est tres ancien, le b~n~fice de l'interven- tion peut ~tre minime ou nul.

Nos recherches effectu~es par des m~thodes campim~triques et par la ~mesure de la fr6quence critique de fusion ont montr~, d'une part, le pouvoir tr~s grand de r6cup~ration des r~tines dont le soule- vement est r6cent; d'autre part la persistance de d6ficits importants lorsque la dur~e du clivage d~passe quelques semaines.

Cette ~tude nous permettra, dans l'avenir, de pr~voir avec plus de precision les r~sultats postop6ratoires et d'en informer les patients auxquels nous proposons l'intervention chirurgicale.

Choix du materiel. Notre but ~tant d'6tudier exclusivement la r~- cup6ration fonctionnetle postop~ratoire des r6tines ayant souffert de d~collement l~tinien, nous avons ~t~ amen6s/l s~lectionner notre ~na- t6riel d'~tude de la fagon suivante: a) nous avons ~limin~ les cas o~ la gu~rison postop~ratoire est im-

parfaite et of 1 il persiste dans une portion plus ou moins 6tendue du territoire r~tinien un soul~vement m~me discret.

b) nous avons 6cart~ tous les cas ot~ existaient, h moins de 30 de- gr~s du point de fixation des l~sions r~tiniennes ou chorogdiennes, vasculaires ou nerveuses, pr~- ou post-op~ratoires. Ces 16sions abaissent par leur seule presence, la position des isopt~res et le fusionnement et emp~chent d'appr6cier la r~cup~ration postop~- ratoire de la r6tine.

c) nous avons du, de toute 6vidence, borner notre choix h des ob- servations off le d~collement r~tinien avait atteint, avant l'op6ra- tion, un territoire situ6 ~ moins de 30 degr~s du point de fixation. C'est en effet sur cette r6gion que portent nos recherches cam- pim~triques e tnos mesures du fusionnement.

La dur6e de la p6riode ~coul6e entre le d6but du d6collement et la date de l'intervention, c'est-g-dire ,,l'gge du d6colle~ment '', varie de quelques jours g 18 mois. Elle est en g6n~rale courte, lorsque le d6collement int~resse la moiti~ sup6rieure de la rfitine et lonflue 10rsque, au contraire, le d~collement est inf~rieur. Dans cette 6ven- tualit~, l'affection d6bute insidieusement et progresse lentement. Beaucoup de malades ne peuvent pr6ciser la date des premiers symp- t6mes; certains ne consultent qu'au moment de l'atteinte de la ma- cula ou de la portion de la r6tine imm~diatement sous-iacente.

158

Page 30: La mesure de la frequence de fusion en clinique

l~sultats. Les r6sultats d6finitifs post-op~ratoires d~pendent es- sentiellement d'un facteur principal: la dur6e, l'~ge du d~collement; la r~cup6ration fonctionnelle est d'autant meilleure que le clivage est plus r~cent.

T o u s l e s sujets dont le d~colle'ment r~tinien date de moins d'un an r6cup~rent de fa~on plus ou moins complete la fonction de fusion des images. La r~cup6ration de la fr6quence de fusion est pr~coce. Nous n'avons pas pu la suivre pendant les deux premieres semaines qui suivent l'op~ration, p6riode pendant laquelle le malade dolt rester alit~. D6s le 18~me jour, le fusionnement s'op~re, mais ~ un rythme bas. Celui-ci s'61~ve progressivement pendant un tools. Pass6 ce d~lai, l'arn6lioration se ralentit ou cesse compl~tement. En r6gle g6n6~ rale, m$me dans les cas les plus favorables, la r~cup6ration n'est pas complete, la mesure de la fr~quence de fusion d~c~le un d6ficit per- sistant que les m~thodes cliniques usuelles sont incapables de r~v~:~ let. Nous aurons souvent l'occasion au cours de cet expos6 d'insister sur l'extr~me sensibilit~ de la mesure de la fr6quence de fusion.

Les d6collements sup6rieurs qui, en r~gle g~n~rale, sont au mo- ment de l'intervention plus r~cents que les d6collements inf~rieurs r~cup~rent la fr6quence de fusion la plus ~lev~e.

D'autres facteurs que l'~ge du d6collement, mais moins importants que celui-ei jouent 6galement un r61e.

I1 semble que la r~cup~ration des .d~collements plans est meilleure que celle des d6collements h poche volumineuse. Peut-~tre persiste- t-il en cas de d~collemnt plan, des ponts de substances constitutes par des franges d'6pith~lium pigmentaire (Maggiore, 15); peut ~tre les ~changes m6taboliques peuvent-ils encore se faire au travers du liquide r6tror~tinien quand celui-ci n'existe qu'en petite quantitY?

Nous avons group~ h titre d'exemple quelques observations. Nous les rangeons en trois categories de gravit~ d6croissante.

ldre cat~gorie. Alterations nettes du champ visuel et de la [r~- quence de [usion. ( f i g. 9).

I1 s'agit de d6collements inf6rieurs tr~s anciens, dont l'~ge n'a pu ~tre d6termin~ avec exactitude. Le soul~vement de la r~tine avant l'op~ration 6tait consid6rable. Apr6s l'op~ration, le d6ficit campi- m~trique reste important: l'isopt~re du test 3/1000 passe/~ moins de 30 ~ du point de fixation, ~ l'endroit correspondant ~ la projection dans le champ visuel de la zone ant6rieurement d4coll4e. C'est ~ Ia longue dur4e du d6collement et/~ l'importance du soul~vement qu'il faut attribuer la chute consid4rable de la fr4quence de fusion. Celle-

159

Page 31: La mesure de la frequence de fusion en clinique

. .

.

Figure 9. Catdgorie I.

C~; 32 ans; oeil droit; ddcollement rdtinien infdr~temporal gudri; l'fige du ddcol- lement est de plusieurs tools; acuitd visuelle au moment de la mesure de la

F. F.: 5/5. Campim~r Ddpression considdrable des isopt~res dans la partie sup~rieure du

champ visuel (tests 0,5; 1; 3/I000). Fr~quence de [usion. Abaissement net dans toute la zone antdrieurement ddcollde.

Moyenne des F. F. de da rdtine non ddcollde (points: a, b, c, d, e. f, g, h, i, j, o, p, p, r, w, x, y, z) ~ 35,3. Moyenne des F.F. de la rdtine an~tdrieurement ddcollde (points: k, 1, m,,n, s, t, u, v) ~ 21,2. Chute de la F.F. darts le territoire antdrieurement ddcolld 14,1 soit 39,9 ~

/- , .

Figure I0. Catdgorie If.

'~'; 60 ans; ddco]lement rdtinien supdro-temporal gudri; ~ge du ddcollement: 20 jours; acuitd visuelle au moment de la mesure de Ia F.F.: 5./9.

Campimd~rie. Ddpression Idgdre des isoptbres dans la rdgion nasale du champ visuel. (tests: 0,5; I; 2/I000).

Frdquence de [usion. Abaissement dans la rdgion nasale du champ visuel. Moyenne des F.F. de la rdtine non ddcollde (points: I, m, n o, p, u, v, w, x) = 29,3. Moyenne des F.F. de la rdtine antdrieurement ddcollde points: a, b, c, d, e, f, g, h, i, ] k, q) ---~ 2~,8. Chute de la F.F. dans le territoire antdrieurement ddcolld ~--- "~,5 soit 15,3 o~).

160

Page 32: La mesure de la frequence de fusion en clinique

ci est abaiss4e dans la z6ne ant~rieurement d4coll~e de 39,9 %. Cette chute d~passe tr~s largement les causes fortuites d'erreur.

2~me cat~gorie. Att~rations discr4tes du champ visuel et d~[icit sensible de la [r~quence de [usion ( f i g . 10).

Le d4collement r~tinien est g4n4rale}:nent sup4rieur. Sa dur4e va}ie de quelques semaines/~ quelques mois.

Le d~ficit du champ visuel au campim~tre de Bjerrum n'est d4ce- lable que par un examen tr~s attentif.

Dans ces cas, m~me lorsqu'elle est pratiqu4e plus d'un an apr~s l'acte chirurgical, la mesure de la fr4quence de fusion d6c~le un d~- licit sensible.

3~me cat~gorie. Pas d'alt~ration ou alteration insigni[iante du champ visuel; d6[icit de la [r~quence de [usion. ( f i g. 11 ).

La r4tine m~me lorsqu'elle est d4coll4e depuis peu de temps pr4- sente encore, plusieurs mois apr4s une intervention chirurgicale r4us-

32 \ Lkt f / 28 \ v ~

.

Figure 11. Cat4gorie III.

C.~.; 55 ans; oeil gauche; d4collement sup4r0-tempoval gu4ri; age du ,ddcollement: 10 jours; acuit4 visuelle au moment de la mesure de la F.F.: 5/5.

Campim4trie. Tr~s 14g~re d6pression de l 'isopt~re du test 0,5/1000. FrOquence de [usion. Chute sensible dans la r4gion inf4ro-nasale. Moyenne des

F.F. de la r4tine non d4coll4e (points: d, e f, 1, m, n, o, p, u, v, w) ~--- 31. Moyenne des F.F. de la r4tine ant4rieurement d4coll4e, (points: a, b, c, 9, 1, i, j, k, q, r. s, t, x) ~ 26,6. Chute le la F .F. dans le territotre ant4rieurement d4co114:4,4 soit 14 ,1%) .

sie, une alteration du fusionnement. Par contre, la r6cup4ration du cha'mp visuel est complete.

La circulation r4tinienne est du type deut~rotritoneuronale, c'est- /~-dire qu'elle n'irrigue que les deuxi~mes et troisi~mes neurones. Les

It 161

Page 33: La mesure de la frequence de fusion en clinique

premiers neurones, c'est-;h-dire les ~l~ments photor6cepteurs sont avasculaires et sont nourris par la lymphe intersticielle issue de la chou:iocapillaire.

La couche des cellules pigmentaires joue des r61es importants et multiples dans la vision: elle arr~te les rayons lumineux, elle em- p~che ]a diffusion de la lumi6re, elle apporte des ~l~ments necessai- res du m6tabolisme des c6nes et des b~tonnets; elle contribue ~ la r~g~n6ration du pourpre r~tinien blanchi par la lumi~re.

I1 r~sulte de ces dispositions anatomiques qu'un clivaoe r~tinien en ~loignant les c6nes et les b~tonnets de l'~pith~lium pigmentaire sus- pend les fonctions visuelles. Cependant, bien que tr~s diff~renci6s, bien que tr~s sensibles h l'anox6mie, les ~l~ments photor~cepteurs

t

conservent pendant plusieurs jours, et m6me pendant plusieurs se- maines des possibilit~s surprenantes de r~cup~ration. Les r6sultats concordants que nous avons obtenus par des mesures campim6tri- ques et des d~terminations de la fr~quence critique de fusion en sont la preuve. I1 semble que les cellules photor~ceptrices trouvent, quand le d~collement est r6cent tout au moins, les 616ments n~cessaires /~ leur nutrition dans le liquide r6tror6tinien. La composition de celui-ci a fair l'objet d'int~ressantes recherches ( W e r e et Fischer, 34). EUe est analogue au d~but h celle de la lymphe. Tardivement, elle s'en diff~rencie et cela d'autant plus que le clivage est plus ancien. Le liquide r~tror~tinien prend une teinte jaun~tre, sa teneur en prot~ines augmente; la survie des c6nes et des b~tonnets devient pr6caire; la r6cup6ration fonctio~nelle est gravement compromise. Dans les cas extr~'mes et tr6s anciens, les d~sordres anatomiques sont visibles l'ophtalmoscope.

Dans l'~tat actuel de la question, la mesure de la fr~quence de fusion est une m6thode de choix pour d6celer la persistance de d~fi- cits fonctionnels discrets, post-op~ratoires des d6collements de la r~tine. D'autres m~thodes semblent susceptibles de fournir des r~sul~ tats analogues, mais sont d'une application clinique plus difficile: la mesure de l'adaptation r~tinienne en diff~rents points du champ visuel, la campim~trie en lumi6re att~nu~e.

3. Nevrite nicotinique (31).

C'est h Traquair que revient surtout le m6rite d'avoir d~crit mi- nutieusement les caract6ristiques du scotome de l'amblyopie tabagi- que: sa disposition centro-caecale ses bords en pente douce, ses

162

Page 34: La mesure de la frequence de fusion en clinique

noyaux de densit~ ~lev~e, ses dimensions variables selon la couleur

du test utilis~ (24).

La portion du champ visuel o/1 les fo~actions sont alt~r~es au 'maxi- mum peut, dans certaines conditions d 'examen etre reconnue par le patient lui-m~me sous [orme d'une ombre fugace. C'est le scotome positif d~couvert par L. W e e k e r s (25).

Enfin M. Humblet et R. Weeke r s ont signal~ dans la n~vrite nico- tinique, une alteration de radaptat ion r~tinienne limit~e ~ une por- t/on du champ visuel entre le point de fixation et la tgche aveugle (30).

I1 r~sulte de cet ensemble de recherches que les d~ficits visuels de l 'intoxication tabagique ont des caract~res precis qui permettent, en g~n~ral, de les identifier avec certitude. On constate cependant, dans la pratique que cette affection est souvent m~connue et que parfois le diagnostic en est pos~ erron~ment. Nous avons observ~ un nouveau sympt6me de la n~vrite nicotinique: l 'allongement de la persistance apparente de la sensation visuelle ou, en d 'autres ,roots, l 'abaissement de la fr~quence critique de fusion. Celui-ci se produit dans la r~gion centro-caecale et pr~sente des caract~res precis qui peuvent suffire ~ poser le diagnostic. Pour le surplus, ce ph~nom~ne est d 'une telle sensibilit~ qu'il permet de d~celer l ' intoxication/~ un stade o~ les moyens usuels d'investigation sont en d~[aut.

l..In seul auteur,/~ notre connaissance, a, dans un seul cas, mesure- la fr~quence critique de fusion dans l 'intoxication par le tabac. I1 a d~cel~ un abaissement au centre du champ visuel et a trouv~ des valeurs normales /l la p~riph~rie (Hylkema, 12).

R~sultats. Notre ~tude porte sur 15 sujets chez lesquels nous avons mesur~ 38 lois la fr~quence de fusion. Assez souvent, en effet, cette mesure a ~t~ pratiqu~e aux deux yeux ou r~p~t~e plu- sieurs lois sur le m~me oeil ~ des stades diff~rents de l'intoxication. Dans chaque cas, les scotomes ont ~t6 recherch6s et 6tudi6s au cam- pim~tre.

De cette 6tude comparative, il r6sulte la conclusion essentielle que voici: il existe une concordance parfaite et constante entre les don- n~es de l 'examen camp:im~trique sur l '6cran de Bjerrum d'une part et la mesure de la fr6quence de fusion. Celle-ci est abaiss6e partout o/1 les fonctions visuelles sont alt~r~es et dans cette zone exclusive- ment. C'est la raison pour laquelle parmi les 26 points explores dans notre routine d'examen, quelques-uns seulement r6v~lent une alt6ra-

163

Page 35: La mesure de la frequence de fusion en clinique

tion du fusionnement. Ce sont ceux dont la position dans le champ visuel correspond au scotome.

Dans la n~vrite nicotinique d~butante, l 'abaissement de la fr~quen- ce critique de fusion se marque tout d'abord dans l'aire centro- caecale (point a e t f, fig. 6).

Dans l'intoxication de gravit6 moyenne, lorsque le scotome est plus ~tendu, fa i r , ra t ion du fusionnement int~resse une zone plus large (points a, b, e, f, g,, fig. 6).

Enfin, lorsque l 'affection est grave et que le scotome est dense et vaste, la d~pression de la fr~quence de fusion in',~resse, elle aussi, une portion importante du champ visuel (points a, b, c, d, e, f, g, h, i, n, et o, fig. 6); elle reste toutefois maximum dans ]a r~gion stricte- ment centrocaecale, touch~e primitivement. (f i g. 12).

I,.,,(37 - 2s ! l s : - ' l o ' "

Figure 12.

C~; 61 ans; oeil; n~vrite nicotinique; fume approximativement un kilog de tabac pour pipe par mois; chute de l'acuit~ visuelle depuis plusieurs mois; examen objectif de rappareil visuel negatif; vision O.D. = 1/10; O.G. ~ 1110. Campim~s scotome centro-caecal ~tendu ,tests blancs: 05; 10/1000). Fr~.quence de [ruslon. D~pression dans la r~gion centrocaecale.

Le tableau 5 montre l 'abaissement de Ia fr~quence critique de fu- sion, en fonction de la gravit~ du cas, en diff~rents points du champ visuel. Ainsi qu'il a ~t~ signal~ ant~rieurement l 'abaissement de la fr~quence critique de fusion est maximum dans la r6gion strictement centrocaecale (points a e t f, fig. 6), moins accus~ au-,dessus et en- dessous de cette r~gion et du cot~ nasal du point de fixation (points b, c, et g). Ii n'int~resse des points plus excentriques (c, d, h, i, n, et o) que dans les cas graves dont l'acuit~: visuelle est inf~rieure ~ 5/10.

En r~91e 0~n~rale, l 'abaissement de la fr~quence critique de fusion

164

Page 36: La mesure de la frequence de fusion en clinique

A C U I T E V I S U E L L E

10/10 (moyenne

6 cas) de

8/10 (moyenne

9 cas)

5/10 (moyenne

6 cas)

3/10 (moyenne

4 cas/

1/10 (moyenne

4 cas)

voir fig. 6). i,

F R ~ Q U E N C E D E F U S I O N ECL,/SEC.

de 22

de

de

de

Moyenne des points a e t f .

30,5

21

19 28

13

Moyenne des points Moyenne des points b, e e t g c, d. h, i, n , o

35,6 36,5

29,6 31,5

26,6 29

23 II

Tableau 5. Abaissement de la fr6quence critique de fusion en fonction de la ~jravit6 du cas, en diff6rents points du champ visuel (pour la signification des lettres a.b.c.

32,5

27

est, malgr6 certaines variations individuelles, proportionneI h Ia gra~

vit6 du cas, c'est-~h-dire ~ la chute de l'acuit6 visuelle et ~ la densit6

du scotome. Chez un m~me sujet, le rel~vement de la fr4quence cri-

tique de fusion correspond toujours ~ une am41ioration des fonctions visuelles tandis que son abaissement traduit une aggravation f i g . 13).

L'abaissement de la fr~quence critique de fusion au cours de l'in-

toxication par le tabac est un sympt6me d'une extreme sensibilit6.

Nous avons examin6 une dizaine de patients ayant cess6 de ruiner

depuis plusieurs tools. La majorit~ de ces sujets avaient une acuit6

visuelle normale. I1 n'6tait plus possible de d6celer chez eux, par les m6thodes les plus fines, un scotome central ou m~me para-cen~

tral. L'alt~ration des fonctions visuelles ~tait inexistante ou se limi-

tait, tout au plus, g une d6g~re dyschromatopsie *. Chez beaucoup

*) Dans cette s6rie d'examens, nkus n'avens pas recherch6 le d6faut d'adaption retinienne dans la r~gio'n centrocaecale. Ce test d'apr~s les recherches de R. Weekers et M. Humblet est 69alement tr~s sensible (30).

165

Page 37: La mesure de la frequence de fusion en clinique

2 9 -

4 Mars 1946. A.V.: 1/I0. Le scotome est d~delable avec les tests 5 et 10/I000, blancs.

9 Mai 1946. A.V.: 8/10. Le scotome est d~celable avec les tests 0,5 et 1/I000 blancs.

it/ I I

1 Juin 1946. 9 Septembre 1946 A.V.: 10/10. Le scotome est relatif et

difficile g d6celer avec le test A.V.: 10/10. Le scotome a diparu. II 0,5/1000, blanc, ne persis,~e qu'une 16g~re dyschroma-

topsie (test 2/1000, rouge) dans la r6gion centrocaecale.

Figure 13. (oeil droit)

Rel~vement progressif de la fr~quence de fusion, am61ioration de l'acuit~ visuelle~ r6duction de la densit6 du scotome, apr~s cessation du tabae.

166

Page 38: La mesure de la frequence de fusion en clinique

eo.

m. I 11"

it i! 39 ,"

x~ Figure ]4.

S6quelle tardive d'une n~vrite nicotinique. Le malade ne fume plus depuis 6 mois. L'acuit4 visuelle est redevenue normale. II n'existe plus aucun scotome centro-caecal (test: 0,5/1000; 4cIairement de ['~cran: 5 lux.). La mesure de la fr~quence critique de fusion r~v41e encore une

alt4ration dans la r~gion centro-caecale. {point: f.).

de ces sujets, nous avons constat~ un abaissement mod~r4 mais cer- tain, de la fr4quence de fusion au point de ~ixation (a) et, plus sou- vent encore, au centre de l'aire centro-caecale (f I, dernier vestige d 'une intoxication apparemment gu4rie (f i g. 14).

Vraquair a insist4, avec raison, sur le fair que, dans la n4vrite nicotinique en vole de gu4rison, les sympt6mes campim~triques dis- paraissent en ordre inverse de leur apparition. C'est ce qui nous amine h croire que le sympt6me le plus durable de l 'intoxication, savoir l 'abaissement de la fr~quence critique de fusion dans l'aire centrocaecale, doit en ~tre le plus pr4coce. Nous n 'avons cependant pas, jusqu'ici, eu l 'occasion de diagnostiquer une n4vrite nicotinique au d~but dont le seul sympt6me eut 4t~ l'alt4ration du fusionnement car, h ce stade, l 'affection ne cr~e aucune g~ne pour le patient. Ce diagnostic pr~coce serait, certes de la plus grande utilitr pour la prevention de l'intoxication, mais n~cessiterait chez tous les fumeurs, des recherches syst4matiques que nous ne pouvons entreprendre actuellement.

Les conclusions suivantes d4coulent de ces recherches.

167

Page 39: La mesure de la frequence de fusion en clinique

La n~vrite nicotinique se caract~rise par un abaissement de la fr~quence critique de fusion, c'est-&-dire par un allongement appa- rent de Ia sensation visuelle. La fr~quence critique de fusion est consid~rablement abaiss~e au point de fixation et dans la r~gion strictement centrocaecale. Cet abaissement int~resse une zone d'au- tant plus ~tendue et est d'autant plus accus~ que le scotome centro- caecal est plus vaste et plus dense.

Chez un m~me sujet, les modifications de la fr~quence de fusion permettent de suivre le d~cours de l'affection et d'en pr~voir l'~vo- lution; l'abaissement de la fr~quence de fusion est un sympt6mle d'aggravation; son re]~vement est un si0ne d'am~lioration.

La chute de la fr~quence de fusion dans la r~gion centrocaecale est un signe d'une extreme sensibilitO. Elle est tr~s accus~e, m~me si les d~ficits campim~triques sont I~gers. Elle peut persister lon9~ temps apr~s la disparition de tout scotome. Bien que nous ne l'ayons pas observ~ jusqu'ici, elle survient, tr~s vraisemblablement ~ u n stade o6 .l'acuit~ visue]le n'est pas encore alt~r~e et off l'examen campim~trique ne montre aucun d~ficit.

II n'est pas certain que l'abaissement de la fr~quence critique de fusion, limit~ ~ la r~gion centrocaecale, soit un sympt6me strictement pathognomonique de la n~vrite nicotinique; sa constatation doit ce- pendant faire penser, en tout premier lieu, & l'intoxication par le tabac.

4, Glaucome.

Les alterations du champ visuel constituent un des sympt6mes cardinaux du glaucome chronique simple. Elles r~sultent d'une isch~- mie de certains territoires r~tiniens. Celle-ci est el]e-m~me la conse- quence de deux facteurs principaux: a) l'angiopathie r~tinienne; b) la compression de l'arbre vasculaire r~tinien. Ce second facteur est inconstant et fait d~faut dans ]e cas d'un glaucome sans hyper- tension (Magitot, 16; R. Weekers, 27).

Le sympt6me campim~trique le plus pr~coce du glaucome chronique semble ~tre l'enclavement de Ia tache aveugle (the baring of the blind spot) (Traquair, 24). Ce ph~nom~ne consiste en une d~pres- sign portant ~lectivement sur certains isopt~res, au niveau .de la tache aveugle seulement. La tache aveugle est ,,enclav~e" dans la d~pression de l'isopt~re. L'un de nous (R.W.) a ~mis l'hypoth~se que l'enclavement de la tache aveugle r~sulte de l'~largissement et

168

Page 40: La mesure de la frequence de fusion en clinique

de la fusion des angioscotomes principaux aux deux p61es de la tache aveu91e.

Lorsque le 91aucome progresse, les an9ioscotomes font pi]ace des neuroscotomes plus denses et plus ~tendus. Ceux-ci ont, en r~91e 94n4rale, une forme caract4ristique; ils naissent aux p61es de la tache aveugle et atteignent en s'61argissant la moiti4 nasale du champ visuel; ils s'y terminent en d4primant les isopt~res internes, moyens et p4riph4riques. Souvent la d6pression nasale des isopt~res est in49ale dans les moiti4s, sup~rieure et inf~rieure, du champ visuel. I1 en r4sulte un ,,ressaut nasal" de l'isopt~re (nasal-step). Les neuroscotomes arciformes du 91aucome suivent le trajet des vaisse- aux r4tiniens temporaux. Jusqu'/~ un stade avanc4 de l'affection, ils respectent les territoires irrigu4s par les vaisseaux r4tiniens maculai- res et nasaux, c'est-g-dire un ilot central et la portion t e~rnporale du champ visuel.

Quelle que soit leur wleur, les m4thodes p4rim4triques et campi- m4triques usuell.es ne r~v~lent pas d'embl~e les premiers d4ficits visuels du 91aucome. C'est la raison pour laquelle plusieurs cher- cheurs ont pr4conis~ l'emploi de m~thodes plus sensibles: campim4- trie en lumi~re att6nu~e, p6rim4trie au moyen de tests de tr~s faible brillance, mesure de l'adaptation r4tinienne.

L'id4e de mesurer la ,,[r~quence critique de fusion'" pour d4celer les d4ficits visuels du 91aucome est ancienne. En 1901, Markow (17) puis en 1909, Braunstein (3), ont tous deux, mis en 4vidence un abaissement de la fr4quence critique de fusion chez le 91aucoma- teux. Hylkema (12) a confirm4 ce fait 4n 1944. Mais les techniques employ4es par ces auteurs ne permettent cependant pas de savoir si l'alt4ration du fusionnement pr6c~de, suit, ou est concomitante des d4ficits campim4triques.

R~sultats. Notre 4tude porte sur 30 cas de 91aucome chronique simple. Nous avons vu ant4rieurement que les dimensions pupillaires modifient la fr4quence critique de fusion. C'est la raison pour la- quelle, nous avons 41imin4 de notre materiel d'4tude, les sujets pr6- sentant un colobome op4ratoire, apr~s enclavement de l'iris, par exemple. Nous avons, par contre, pratiqu4 certains examens sur des sujets ayant subi une cyclodiather~mie non perforante selon L. et R. ~reekers (26). Cette intervention ne modifie pas ou ne modifie 9u~re le diam~tre pupillaire. Pour la m~me raison, nous n'avons pas mesur4 la fr6quence critique de fusion chez des sujets soumis Faction de miotiques. Le myosis non seulement abaisse la fr4quence

169

Page 41: La mesure de la frequence de fusion en clinique

critique de fusion, mais encore modifie les conditions d'examen re- quises pour obtenir l'isofr~quence (tableau 4).

Nous avons ~cart~ tousles patients souffrant, en plus du glauco- me, d'une alteration de la transparence des milieux.

Au moment de la mesure de la fr~quence critique de fusion, la tension ~tait, selon les cas, ~lev~e ou normale. I1 s'agissait, dans cette seconde ~ventualit~, soit de glaucc~mes incomplets sans hypertension, soit de glaucomes dont l'hyperter;sion avait ~t~ neutralis~e par une cyclodiathermie non perforante.

Selon la gravit~ des cas, l'excavation papillaire ~tait absente, mo- d~r~e ou tr~s accus~e.

Pour la facilit~ de I'~tude, nous avons divis~ |es 30 sujets ~tudi~s en quatre groupes de gravit~ croissante. L'importance des d~ficits campim~triques constitue le crit~re de cette classification conven- tionnelle.

Groupe I. Chez les sujets du groupe I, l'examen sur l'~cran noir de Bjerrum ne montre aucun d~ficit. La tache aveugle es t normale, les angioscotomes ont des caract~res physio|ogiques; l'isopt~re du test 1/1000 blanc, ~clairement 60 lux, ne r~v~le ni enclavement de la tache aveugle, ni d~pression nasale.

Le diagnostic de glaucome repose sur l'existence soit d'une hyper- tension intraoculaire, soit d'une excavation g~aucomateuse (glauco- me incomplet; R. Weekers, 27). Ce diagnostic est confirm~ par l'existence d'un glaucome complet ~ l'oeil cong~n~re.

En l'absence de tous d~ficits campim~triques, la mesure de la fr~- quence critique de fusion est soit normale, soit l~g~rement alt~r~e, l'un des p61es ou parfois aux. deux p61es de la tache aveug~le (f i O. 15). Cette constatation d~montre la remarquable sensibilit~ de la mesure de la fr~quence critique de fusion: l'alt~ration du fusionne- ment precede parfois quelque peu le d~ficit campim~trique.

Groupe H. Chez les sujets du groupe II, les d~ficits campim~tri~ ques sont discrets mais certains. Les angioscotomes ont perdu leurs caract~res physiologiques et font place fi des neuroscotomes patholo- giques. A la suite des mesures de R. Weekers et M. Humblet (29), nous ad'mettons qu'un scotome, d~cel~ ~ |'un des p61es de la tache aveugle~ au moyen du test blanc 3/'1000, sur un ~cran noir muni d'un &lairement de 75 lux, est pathologique, lorsqu'il est large de trois degr~s au moins.

Chez ces sujets, la chute de la fr~quence critique de fusion est tr~s apparente, elle est maximum au niveau du d~ficit campim~trique,

170

Page 42: La mesure de la frequence de fusion en clinique

/ / - - ~ i \ _t_//-~x/~\ / ;37 / \ \ 3'6/ /\35",

�9 \ \ z o , ~. ._'-~/ i~

'.:~\ /----~,~._-~ \ ~ .<'\ ,,-~u... :--/" ,. ,,

Figure 15.

Groupe I.

C~; 49 ans. Oeil droit: glaucome, enclavement de l'iris. Oeil gauche: acuitd visuelle 5/5, hypertension moddrde, traitement par la pilocarpine.

Campimd~rie. aucun ddficit: isopt~re, tache aveugle et angioscotomes physiologi- ques (test 1/1000, ~clairement 60 lux.).

Frdquence de fusion: abaissement au pole infdrieur de la tache aveugle. La frd- quence de fusion physiologique serait 33 g 35 dclairements par seconde.

#

w

Figure 16.

Groupe II.

5;'; 67 ans. Oeil droit: excavation papillaire, pas d'hypertension intraoculaire, acuit~ visuelle 5/5.

Campim~frie: petit scotome arciforme inf~rieur dont la portion m~diane est plus dense que les portions p6riphdriques. Ddpression nasale d'ma isopt6re avec ressaut nasal dans la moitid infdrieure du champ visuel. (tests: 1/1000, 1,5/1000 et 3/1000, dclairement 60 Lux.). ,

Fr~quence de [usion. d6pression importante dans presque toute la moitid infd- rieure du champ visuel; d6pression mod~r6e en quelques points de la moiti~ supdrieure du champ visuel. La frdquence de fusion physiologique serait 30 ~ 33 dclairements par seconde.

Oeil gauche: glaucome tr~s avanc6.

171

Page 43: La mesure de la frequence de fusion en clinique

rams elle peut int~resser aussi quoiqu'~t un moindre degr~, des terri- toires ot~ l'exploration sur l'~cran de Bjerrum ne r~vEle aucun d~ficit ( f i g u r e 16).

Groupe IlL Chez ]es sujets du groupe III, les d~ficits campim~tri- ques sont plus importants; ils prgsentent tous]es caract~res classi- ques des scotomes glaucomateux; ils sont arciformes, denses et bien limit6s.

La chute de la fr~quence critique de fusion est consid6rable et

V~_. /-"-5~CZ~ ~ 2~--A"'gI~ l l/,,,/ ~,~-7"7 ~ 32 "30 -!-

Figure 17.

Groupe III. C~; 62 ans. Oeil droit: olaucome sans hypertension in,traoculaire; acuit~ visuelle 5/12 aver

sph~rique -~- 4 dioptries et cylindrique @ 1 dioptrie 90 ~ Campim~trie: scotome arciforme important .dans la mo~ti~ inf~rieure du champ

visuel; ~bauche de scotome arciforme dans la moiti~ sup~rieure du champ visuel (tests: 1,5/1000, 2/1000, 3/1000, ~clairemen,t 6'0 Lux).

FrOquence de ~usion: abaissement considerable dans la moiti~ inf~rienre du champ visuel; abaissement mod~r~ en plusieurs points de la moiti~ sup~rieure du champ visuel. La fr~quence de fusion physiolooique serait: 30 ~ 33 ~dairements par seconde.

Oeil oauche: hypertension intraoculaire, excavation papillaire, olaucome absolu.

souvent d~passe largqraent le territoire du, scotome (f i g u r e 17). Groupe IV. Chez les sujets du groupe IV, les scotomes sont tr~s

denses ou absolus. La mesure de la fr~quence de fusion r~v~le un abaissement considerable clans les territoires off les fonctions sont alt~r~es; eile n'est ~videmment, plus possible l~l off la vision est abo- Iie ( f i g u r e 18).

II r~sulte de ces recherches que la mesure de la fr~quence critique de fusion est une excellente m~thode pour d~celer pr~cocement l'al- t6ration des fonctions visuelles dans le glaucome. Sa sensibilit~ est

172

Page 44: La mesure de la frequence de fusion en clinique

�9 ' , . , : _ " , ,

0 ,..:, la . . -- ?-~/22 ~-. o,:\ 22 I=,..-~"~ ~__- ~"

" 2 ; , ,I ^I 1 �9 ~--~: ~ 8 "-.:--,26 26 ;13, 0,--. O, "

Figure 18. Groupe IV.

(~; 53 ans. Oeil droit: hypertension intraoculaire, excavation papillaire, cyclodiathermie non

perforante. Oeil gauche: hypertension i'ntraoculaire, excavation papillaire, cyclodiathermie

non perforante acuit~ visuelle 5/6. Campim~trie: d~ficits visuels tr~s ~tendus et tr~s denses (tests 111000, 3/1000 et

7,5/1000; ~clairement 60 Lux). Fr~quence de [usion: abaissement considerable atr niveau de tousles points

explor6s, m~me dans les ilots off la campim~trie ne r~v~le pas de d~ficit. La fr~quence de fusion n'est pas mesurable dans les portions les plus denses du scotome. La fr~quence de fusion physiologique serait: 32 "h 34 ~clairements par seconde.

grande. La chute de la fr~quence critique de fusion peut, dans cer-

tains cas, preceder le scotome ou la d~pression de l 'isopt~re, d~ce- lant ainsi la souffrance du tissu nerveux h un stade ofl la campim~- trie ne la met pas en ~vidence. Le fait est important, car c 'est l ' appa- rition d 'un d~ficit v/suel qui, parfois, indique la n~cessit~ d 'une in- tervention chirurgicale.

La mesure de la {r~quence critique de fusion complete souvent les recherches campim~triques. Celles-ci dans certains cas, ne montrent

que les portions les plus denses de scott,me. I1 s 'agit, soit de la por- tion temporale qui prolonge la tache aveugle, soit, plus rarement, de la portion nasale seulement. La signification de ces fragments de scotome peut demeurer obscure. L 'abaissement de la fr~quence criti- que de fusion r~vEle l'a totalit~ du territoire l~s~; il prolonge )usqu'au ressaut nasal l '~bauche du scotome arciforme au p61e de la tache aveugle, ou rat tache h la tache de Mariot te , un scotome nasal isolE.

173

Page 45: La mesure de la frequence de fusion en clinique

5. Lesions des voles optiques.

Cushin 9 reconnaissait volontiers la n~cessit~ de l'examen des fonctions visuelles, en neurochirurgie. I1 attribuait la plus grande importance aux d~limitations du champ visuel faites par son collabo- rateur Walker. La raise en ~vidence d'un scotome ou d'une amputa- tion du champ visuel permet souvent, grace ~ ]a syst~matisation des voles optiques de localiser l'endroit d'une l~sion, l ine ~tude plus approfondie de l'~tendue et de la densit~ du d~ficit peut fournir des indications compl~mentaires sur la nature du ph~nom~ne patholo- gique: compression immediate par une n~oplasie, compression h dis- tance par un tissu interpose, oed~me r~actionnel, isch~mie d'un terri- toire nerveux. Enfin des enregistrements r6p/~t6s, de pr~f6rence par un m~me op~rateur, dans des conditions techniques identiques, des intervalles ,de temps variables, renseignent sur l'~voiution du d6ficit et, par vole de consequence, sur l'~volution de l'affection causale.

Pour obtenir ces renseignements, dont la valeur est inestimable pour le neurochirurgien, l'ophtalmologiste s'est ]usqu'fi present adres- s~ exclusivement ~ la p~rim6trie et ~ la campim~trie. Ces deux m6- thodes quoique excellentes sont parfois en d6faut: lorsqu'un d6ficit visuel est peu dense, il est difficile de le d~limiter avec precision; on peut m~me l'ignorer. Nous nous sommes pos6s la question de savoir si la mesure de la fr6quence critique de fusion n'6tait pas susceptible de compl6ter l'examen p6rim6trique et campim6trique du champ visuel.

Avant nous, Philipps (20) a montr~ que la fusion des images est alt~r~e pr~cocement lorsqu'il existe un obstacle ~ la transmission nerveuse le long des voles optiques.

kin peu plus tard, Riddell (21) s'est attach~ au m~me prabl~me. I1 arrive fi la conclusion que ]a fr~quence de fusion et la p~rim~trie sont des m~thodes d'~gale valeur et que leurs r~sultats sont con- cordants et se compl~tent heureusement. La fr~quence de fusion apporterait des indications utiles sur la densit~ des scotomes, mais ne pourrait en d~limiter avec exactitude les contours.

La mesure de la fr~quence de fusion, telle qu'elle a gt~ faite par Philipps et par Riddell est difficile et longue, elle ne pourrait pr~ten- dre prendre place dans l'examen routinier d'une clinique ophtalmolo- gique, moins encore du praticien. Ces recherches, malgr~ leur tr~s r~el int~r~t, sont malheureusement rest~es sans lendemain. Nous avons cherch~ h am~liorer l'instrumentation de nos pr~curseurs;

174

Page 46: La mesure de la frequence de fusion en clinique

nous avons mis au point une rn~thode d'exarnen plus cornpl~te et ce- pendant plus rapide que la leur, nos r~sultats sont d'une interpre- tation plus facile. Dans sa forrne actuelle, notre rn~thode standard pourrait, sans difficult~s, ~tre utilis~e dans d'autres cIiniques et nous avons l'espoir de la voir se r~pandre. Les renseifnernen,t's qu'elle est susceptible de fournir au neurochirurgien justifient tr~s largement et la d~pense de l'installation et le temps consacr~ g son utilisation.

R~sultats. Notre ~tude porte sur 15 rnalades pr~sentant des 16- sions des vois optiquee de 9ravit~ et de nature diverses; les unes ont ~t~ v6rifi~es par une intervention chirurgicale subs6quente; les autres concernent des cas op6r6s ant6rieurernent. Chez ces 15 sujets, les membranes profondes de l'oeil ~taient normales.

L'exploration carnpim6trique a 6t~ faite g l'aide de l'~cran de Bjerrurn (~clairernent: 60 lux; ~loignernent 1 rn.).

La rnesure de la fr6quence de fusion a ~t~ effectu~e suivant la rn~thode standard. Souvent cependant, nous avons ~t~ amends tt multiplier les rnesures et ~ explorer plus de 26 points pour obtenir des indications cornpl~rnentaires sur les lirnites d'un d6ficit, sur son caract~re h~rnianopique, par exernple.

L'exarnen des r~sultats montre que toute alteration de la conducti- on nerveuse arn~ne une chute de la fr~quence de fusion. Cette con- clusion se v~rifie quelle que soit la localisation de la 16sion: une 16sion r par exernple, peut abaisser la fr6quence de fusion autant qu'une l~sion du chiasma ou du neff optique.

Nous envisagerons successivernent les diff~rents caract~res d'un d~ficit visuel provenant d'une alt6ration des voies optiques: son exis- tence, sa forme, son 6tendue, sa density, ses Iirnites, son ~volution. Nous cornparerons chaque lois, les renseignernents fournis par la rnesure de la fr6quence critique de fusion d'une part, par la carnpi~ rn~trie d'autre part.

Existence d'un d~[icit [onctionnel. Ridell observe que dans 75 % des cas, la p6rirn6trie et la fr~quence de fusion donnent des r~sultats concordants; dans 25 % par contre, il existe une discor- dance. L'analyse de ces discordances est int~ressante: dans 15 % la v~rification anatomique de la 16sion ou l'~volution de la rnaladie donnent raison g la fr~quence de fusion; elles iui donnent tort dans 10 % (21).

Pour notre part, nous avons toujours observ~ une chute de la fr~quence de fusion lorsqu'il existait un d~ficit carnpirn~trique.

175

Page 47: La mesure de la frequence de fusion en clinique

Dans l'~ventualit4 d'un scotome 4tendu, mais peu dense, contras- tant 8 peine avec la portion saine du champ visuel, la recherche sur l '&ran de Bjerrum peut rester n4gative alors que la mesure de la fr4- quence de fusion d&~le l'existence d'un d4ficit certain. La mesure de la fr6quence de fusion est donc une m4thode plus sensible que la campim4trie lorsque le scotome est vaste, mais discret.

Dans le cas contraire, lorsque le scotome est tr~s limit4 et que sa dimension la plus 9rande ne d4passe pas 1 ou 2 degr4s dans le champ visuel, la campim6trie l 'emporte sur la mesure du fusionne- ment. I1 taut, certes, pour le trouver sur l '&ran Bjerrum explorer de tr~s nombreux isopt~res peu 41oifn4s les uns des autres et multiplier les mesures pour chacun des isopt~res, mais ce travail lon 9 et m4ti~ culeux est, en g4n6ral, couronn4 de succ~s. Ce m~me scotome peut ~tre m&onnu par la mesure de la fr4quence de fusion, soit qu'il soit situ4 entre deux zones explor~es, soit qu'il soit inclus en tout ou en partie dans l'une d'elle mais n'alt6re que peu le fusionnement cause de ses dimensions r4duites.

Forme d'un d~[icit [onctionneL La p4ri~ et la campim4trie don- nent des renseignements sur la forme des d6ficits dont la valeur est tr4s flrande pour la localisation du ph4nom4ne parhologique: h4mia- nopsie homonyme ou h4t4ronyme, conflruente ou non, en quadrant; scotome p6ricentral, paracentral, centrocaecal, hemianopique etc ....

La fagon dont Riddell a r4parti, dans le champ visuel, le petit nombre de points off il mesure la fr4quence de fusion emp&he route d41imitation exacte des d4ficits visuels. Notre m4thode standard ex- plore une fraction importante du champ visuel (0 /t 30 degr6s) et dans ce territoire un grand hombre de points (26); celui-ci peu,t encore ~tre augment4; cette m4thode permet, en r4gle g4n4rale de d41imiter le territoire oh les fonctions sont alt4r4es. Souvent nous avons pu d4celer de caract~re h4mianqsiopique du d4ficit (h4mianop- sie compl4te ou en quadrant) en mesurant la fr4quence de fusion de part et d 'autre des m4ridiens vertical et horizontal du champ visuel. L'existence d'une in49alit4 fonctionnelle m~me 1494re, entre les deux moiti4s droite et 9auche ou sup6rieure et inf4rieure du champ visuel ressort de fagon 4vidente, de la mesure de la fr4quence de fusion ( f i g . 19, 20, 21, 22).

En r~gle g4n4rale, il nous parait cependant que, pour l'e.xplora- tion de la forme des d4ficits, la campim4trie est une m4thode sup4- r ieure/ l la mesure de la fr~qpence de fusion.

Etendue d'un d~[icit [onctionnel. La fr4quence de fusion 4tant,

176

Page 48: La mesure de la frequence de fusion en clinique

Figure 19.

18"

Compression des voies optiques au chiasma; tumeur hypophysaire op~r~e.

.~; ans; oeil droit; acuit~ visuelle 5/6. Campim~trie: H~mianopsie temporale plus dense dans le quadrant sup~rieur que

dans le quadrant inf~rieur. (tests: 5,3, 1/1000). Fr~quence de ~usion: abaissement dans tout le champ visuel temporal plus im-

por.tant clans le quadrant sup~ro-temporal que dans la quadrant infEro- temporal.

, r

1

~-" v.18 3;~

~ /'20' 12 \

106.

/ 3 9

Figure 20.

Compression des voies optiques r~trochiasmatiques droites; tumeur intraventriculaire droite oblit~rant le trou de Monroe,

,~: 40 ans; oeil droit; acuit~ visuelle 5/5. Campim~trie: scotome hemianopique inf~rieur gauche (tests: 10, 5, 1/1000). Fr~qaence de [usion: abaissement dans le quadrant inf(~rieur gauche et une partie

du quadrant sup~rieur gauche.

12 177

Page 49: La mesure de la frequence de fusion en clinique

w

Figure 21. L~sion des voies optiques r6trogr droites; angiome

calcifir du lobe parietal droit opr ; 19 ans; oeil droit; acuit6 visuelle 5/5.

Campimr h~mianopsie gauche. L'oeil gauche pr~sente des alt6rations sem- blables. (tests: 3, 1/1000).

Frr de [usion: abaissement dans tout le champ visuel gauche.

Figure 22.

L6sion de la portion post6rieure des radiations optiques et du centre occipital de la vision: blessure par arme h feu.

C~; 46 ans; oeil gauche; acuit6 visuelle 5/5. Campimr h6mianopsie droite, plus dense dans le quadrant inf~rieur que

supr (tests: 20 et 1,25/1000). L'oeil droit prr des alterations semblables.

Fr~quence de [usion: abaissement dans la moiti6 droite du champ visuel, surtout dans le quadrant inf~rieur. Elle est normale dans la moitir gauche du champ visuel.

178

Page 50: La mesure de la frequence de fusion en clinique

nous l'avons vu, une mesure tr~s sensible des fonctions visuelles, revile toute l'etendue des deficits. La campimetrie dont la sensibilite est moindre n'en r~v~le parfois que la portion la plus dense. Dans un de nos cas, par exemple, la campimetrie decelait un deficit en qua- drant alors que la frequence de fusion etait abaissee dans toute la moitie du champ visuel (f i 9.20).

Densite d'un deficit [onctionnel. La mesure de la densite d'un scotome par la campimetrie seule, pr~sente certaines difficultes. Elle exige des enregistrements longs et minutieux au moyen de tests de dimensions croissantes. Au niveau d'un scotome relatif et plus en- core dans une zone ,,criblee" o/1 alternent des territoires faiblement et 9ravement l~ses, les reponses du sujet sont imprecises. Le test est entrevu par intermittence; il est perqu s'il est agite rapidement, il dis- parait quand il est deplace lentement. Par contre, la mesure de la densite d'un scotome par la frequence de fusion est extremement simple. Le test servant de stimulus est 9rand et fortement eclaire; il est pergu sans peine tant que le scotome n'est pas absolu. La den- site du scotome se mesure tr~s aisement par la chute de la fr~quence critique de fusion; le fusionnement s'op~re / t u n rythme d'autant plus has que les fonctions visuelles sont plus alt~r~es. Les variations de la densit~ d'un scotome en differents points du champ visuel, les differences de densite des scotomes atteignant les deux yeux: l'augmentation ou la diminution de la densit~ des scotomes en fonc- t/on du temps se rev~lent par simple comparaison.

Dans certaines cas, la perim~trie donne une idee erronee d~ la densit~ des scotomes. L'exemple suivant le montre. Supposons qu'en deux endroits (& 5 et 30 de9res du point de fixation) d'un scotome etendu, le test 3/1000 ne soit pas visible tandis que le test '~/1000 y soit egalement bien per~u: l'alt~ration des fonctions visuelles n'est cependant pas identique t~ 5 et & 30 degres dans le scotome. Elle est considerablement plus 9rave /l 5 degres qu'a 30 degres, car l'acuite visuelle normale est d'autant meilleure qu'on se rapproche du point de fixation. A 30 degres, le test 4/1000, stimulus minimum perqu est approximativement trois lois plus large seulement que le test liminaire normalement perqu, tandis qu'/t 5 degres, ce m~me test, 4/1000 est 20 lois plus large que le stimulus liminaire physiolo- 9ique.

Caractdres des bords d'un scotome. Ces caract~res sont importants et permettent parfois de faire le diagnostic differentiel entre plu- sieurs affections dormant des deficits en des endroits identiques du

179

Page 51: La mesure de la frequence de fusion en clinique

champ visuel. Les d~ficits d'origine corticale, les destructions trau- matiques des voles optiques ont souvent des bords en pente abrupte: les d~ficits d~butants d'une h~mianopsie bitemporale, les compres- sions par tissus interpos~ ou par oed6me inflammatoire ont souvent par contre des bords en pente douce.

L'exploration des bords d'un scotome par la p6rim~trie exige l'em- pIoi de tests de valeurs lentement progressives et une certaine habi- let~ de la part de l'observateur. La fr~quence de fusion a l'avantage de mesurer facilement la densit~ des d~ficits dans des territoires voisins. Elle s'abaisse brusquement lorsque les bords du scotome sont ,,raides" et lentement lorsque le passage de la r~gion saine /~ la r~gion malade est progressif. ( f i g. 19, 22).

Evolution d'un dd[icit [onctionnel. La com paraison des r~sultats obtenus par la p~rimdtrie/~ diff~rents moments, au cours de 1'evolu- tion d'une affection se heurte aux m6mes difficult6s que la mesure de la densit6.

La mesure de la fr~quence de fusion donne des r~sultats faciles/l interpreter: tout rel~vement de la fr~quence de fusion traduit une am61ioration, tout abaissement de la fr~quence de fusion t~moigne d'une aggravation. Nous suivons, de la sorte, actuellement la r~cup~- ration des fonctions visuelles chez plusieurs malades op6r~s de n~o- plasie intracranienne.

Nous n'avons pas ~puis6 routes les possi.bilit~s que nous offre ia fr~quence de fusion pour l'~tude des d~ficits provenant d'une alt6- ration des voles optiques. Certains auteurs (Hylkema, 11) pr~ten- dent que la fonction de sommation (interaction de 2 zones r6tinien- nes voisines, excit~es simultan6ment) est une fonction essentielle- ment r6tinienne; elle serait abolie dans toute l~sion de la r6tine et par contre subsisterait en cas de 16sions r~trobulbaires. Si ce fait est exact, son 6rude apporterait un nouvel ~l/~ment de localisation du ph~nom~ne pathologique.

6. Artdrioscldrose.

Une m~thode d'exploration fonctionnelle est d'autant meilleure qu'elle est plus sensible, c'est-/~-dire qu'elle permet de d6celer plus pr~cocement une affection d6butante. De ce point de rue, la mesure de la fr~quence critique de fusion est, dans un grand nombre d'affec- tions oculaires et nerveuses, une m~thode excellente et souvent m~me la m6thode de choix. Nous ne voudrions cependant pas terminer l a r~daction de ce travail en laissant supposer que route affection r~-

180

Page 52: La mesure de la frequence de fusion en clinique

tinienne se traduit d'embl~e, d~s la premiere heure, par une altera- tion du fusionnement et, inversement, que route fr~quence critique de fusion normale permet d'exclure, ~ coup stir, l'existence d'un ph6- nom~ne pathologique.

Les m~thodes subjectives: mesure de la fr6quence de fusion, cam- pim~trie, mesure de radaptation r~tinienne fournissent des renseig- nements d'une inestimable valeur dans routes les affections qui ne s'accompagnent pas de sympt6mes ophtalmoscopiques ou qui ne se manifestent que par des sympt6mes ophtalmoscopiques tardifs. D'autres lois, au contraire, les sympt6mes objectifs visibles dans le fond d'oeil pr6c6dent le trouble fonctionnel. C'est Ie cas de l'art~- rioscl6rose. Chez les sujets hypertendus, un examen ophtalmoscopi- que soigneux peut d6celer les signes discrets d'une angiopathie d6~ butante ~ un moment ott l'examen fonctionnel de la r~tine au moyen des m6thodes les plus sensibles ne revile pas encore la souffrance du tissu nerveux. Nous terminerons cet expos~ en relatant les r~sul- tats obtenus par la mesure de la fr~quence de fusion dans l'art~rios- cl6rose. Nous comparerons ces r~sultats, non pas ~ l'examen campi- m~trique qui n'est modifi~ que tardivement, mais ~ l'examen ophtal- moscopique de l'arbre vasculaire r6tinien qui, dans l'hypertension art~rielle, subit des modifications extr~mement prr

Nous esp6rons que les exemples que nous avons choisis: d~colle- ment r6tinien, n~vrite nicotinique, fllaucome, tumeurs c6r~brales, ar- t6rioscl~rose, permettent de se faire une opinion exacte sur les indi- cations tr~s nombreuses de la mesure de la fr~quence critique de fusion, mais aussi sur les limites des possibilit6s de cette m~thode.

Materiel d'~tude et r~suItats. Notre ~tude porte sur dix sujets ~g6s de 30 ~ 70 ans souffrant d'hypertension art~rielle 9~n~rale et pr~sentant des l~sions d'art6rioscl~rose de gravit6 variable. Les su/ets ont 6t~ classes en quatre 9roupes de gravit6 croissante sur la base de l'examen ophtalmoscopique. Notre classification repose sur les m~mes crit~res que celle de Wagener et Keith, crit~res que R. Weekers a r6cemment rappel6s (28).

I1 existe une similitude tr~s 9rande entre l'6tat de la circulation r6tinienne d'une part l'~tat des circulations c~r6brale et r~nale d'autre part. L'examen ophtalmoscopique permet donc souvent de juger de la 9ravit6 de l'art~rioscl~rose et de pr6voir l'efficacit~ d'un traitement chirurfical ~ventuel.

Groupe I. I1 s'agit d'individus en bonne sant~ apparente et ,dont la capacit~ de travail est normale. L'hypertension art6rielle est sou-

181

Page 53: La mesure de la frequence de fusion en clinique

vent d~cel~e, par hasard, au cours d'un examen syst~matique. Elle est parfois pressentie par le m6decin traitant ou par l'ophtalmologiste

cause de c6phal~es discr~tes, mais r~cidivantes. Elle peut ~tre in- constante.

Les modifications r6tiniennes sont minimes et limit6es fi une l~g6re alteration du rapport du diam6tre art6riel et veineux. Les attires sont mod6r~ment r~tr~cies par une exag~ration du tonus de leurs patois; les veines au contraire sont un peu dilat~es par l'enoovgement de la circulation de retour. L'hypertension art~rielle r~tinienne est propor- tionnelle ~ l'hypertension hum~rale (rapport 0.5).

En r6gle g~n~rale, il n'existe pas de sensations subjectives visu- elles spontan~es anormales. Les m~thodes cliniques les plus sensibles ne mettent pas en ~vidence de d~ficit fonctionnel. Le champ visuel est normal, les angioscotomes sont physiologiques. La fr~quence de fusion de ces sujets est tout-g-fait semblable ~ celle de su]ets nor- maux du m~me gge (f i g. 23).

Groupe ll. Les sujets sont en bonne sant~ apparente, mais ils souffrent de c~phal~es fr~quentes. L'hypertension g6n~rale ne pr~- sente plus de r~missions, elle est devenue constante,

Figure 23.

Art6rioscl6rose, groupe I. C5~; 36 ans; oeil droit; pupille dilat6e; acuit6 visuelle 5/5. Campim~trie: normale. Fr~quence de [usion: normale; moyenne: 40,1.

Les modifications r~tiniennes sont plus accentu6es: les art6res sont r6tr6cies et scl6ros6es, les veines sont larges. II existe ga et 1~ des signes de croisement: la colonne sanguine veineuse semble interrom- pue ~ l'endroit de son passage sous une art6re (signe de Gunn). La

182

Page 54: La mesure de la frequence de fusion en clinique

tension art6rielle r6tinienne minima est 61ev6e, mais reste proportion- nelle h l'hypertension art~rielle hum6rale (rapport 0.5).

I1 existe peu ou il n'existe pas de sensations subjectives visuelles spontan6es anormales. M~me ~ ce stade, l'examen fonctionnel le plus attentif ne r6v61e pas encore de d~ficit: le champ visuel et les angios- cotomes sont normaux; la fr6quence de fusion est physiologique ( f i g . 24).

Groupe Ill . L'~tat g~n~ral est moins bon, les c~phal~es sont fr~- quentes et se compliquent de vertiges. L'hypertension est constante et forte. Les lesions art~rielles sont ~tendues et la circulation san- guine s'alt~re.

La r~tine, tissu nerveux tr~s differenci~ et grand consommateur d'oxyg~ne, souffle d'anox~mie. Les signes d'art~rioscl~rose sont ~vidents; les l~sions vasculaires s'accompagnent de l~sions du tissu nerveux: h~morragies et exsudats, foyers de d~l~n~rescence r~ti~ niens. Le rapport tension art~rielle r~tinienne minima et tension ar- t~rielle hum~rale minima est souvent augment~ et d~passe 0.5.

Les sensations subjectives visuelles spontan~es anormales sont nombreuses. Les malades d~crivent .de petites taches noires, m~biles avec les mouvements de l'oeil. Ils sont g~n~s par une pluie de neige ou de suie qui obscurcit une portion plus ou moins ~tendue de leur champ visuel. A c e stade, les d~ficits fonctionnels sont discrets et d&elables seulement par les m~thodes les plus sensibles; ce sont l'h~m~ralopie et l'existence de neuroscotomes d~butants de faible

Figure 24. Art~rioscl~rose, groupe II.

C~; 31 ans; oeil droit; pupille non dilat~e; acuit~ visuelle 5/5. Campim~trie: normale. l:r de [usion: normale; moyenne: 36,8.

183

Page 55: La mesure de la frequence de fusion en clinique

density. La fr6quence de fusion est alt~r~e: eUes est 16g~rement abaiss6e de fa~on uniforme partout dans le champ visuel, mais elle peut ~tre consid6rablement r~duite aux endroits off existent des ex- sudats ou des h~morragies 6tendues (f i g. 25).

Groupe IV. Les malades de ce groupe sont tr~s gravement at- teints. Ils souffrent de c6phal~es, d'insomnies, de nervosit6, d'asth6- nie, de dyspn6e d'effort, de vomissements de vertiges, leur teint est pMe.

L'art6rioscl6rose r6tinienne est tr~s avanc6e et compliqu~e de 16- sions d6g6n6ratives du tissu nerveux (oed~me, stase papillaire, 6toile maculaire), A ce tableau ophtalmoscopique d~j~ charg6 s'ajoutent ~ventuellement les signes ophtalmoscopiques d'une insuffisance r6- hale. Le rapport tension art6rielle r6tinienne minima tension art6~ rielle hum6rale minima d6passe tr~s souvent 0.5.

Les signes subjectifs oculaires sont importants, mais peuvent pas- get/l l'arri~re-plan tant les signes g6n6raux sont graves. Les d6ficits fonctionnels sont consid~rables; l'acuit~ visuelle centrale est abaiss6e si la macula est Ms~e. Les isopt~res moyens et m~me p6riph6riques sont r~tr~cis concentriquement. (Kenel 13, R. Weekers, 25). A c e stade avanc~ d6~-d6sordres vasculaires et nerveux, la recherche de la fr~quence de fusion ne pr~sente plus d'int~r~t. Ainsi qu'il fallait s'y attendre, le fusionnement ne se fair qu'~ un rythme tr~s has f ig. 26).

Fi0ure 25. Art~rioscl~rose, groupe III.

(~; 39 ans; oeil droit; pupille dilat~e, acuit6 visueIle 5/5. Campim~trte: angioscotomes a peine 61argis. Frdquence de [usion: abaissement uniforme; moyenne 30,5; moyenne normale

42,6; chute: 12,1 soit 28,4%.

184

Page 56: La mesure de la frequence de fusion en clinique

L'6tude du fusionnement des images, comme l'~tude du champ visuel, d&~le les premieres alt6rations fonctionnelles r~tiniennes plus tardivement que l 'examen ophtalmoscopique ne montre les 16- sions anatomiques de l 'arbre vasculaire. Cette constatation peut pa- raitre surprenante. Pour l 'expliquer, l 'un de nous (R. W . ) a invoqu~ l'existence, pour la circulation r~tinienne d'un ,,coef[icient de s~cu-

D

1"

15 -

Figure 26. Art6rioscl6rose, groupe IV.

~'; 69 ans; oeil droit; pupille dilat6e; acuit6 visuelle: 5/12. Campim~trie: 61argissement net des angioscotomes. Fr~quence de fusion: abaissement consid6rable plus marqu6 a 30 ~ qu'au centre du

champ visuel. Moyenne: 18.3; moyenne normale: 3&4; chute 20,1 soit 52,3 %.

rit~". Le d~bit sanguin normal dans la r~tine serait sup~rieur au d~bit minimum assurant strictement les besoins m~taloliques tissulaires si actifs que soient ces derniers. La circulation pourrait se ralentir quel- que peu sans alt6ration sensible des fonctions r~tiniennes (28). Les l~sions ophtalmoscopiques de l 'arbre vasculaire sont pr&oces et precedent chronolo0iquement les d~ficits visuels.

Les recherches mentionn6es ici confirment l 'existence d 'un ,,coeffi- cient de s6curit4". La chute de la fr4quence critique de fusion ne survient qu'/l un stade avanc4 de l'art6rioscl4rose, elle n 'apparai t qu'au moment off la r4duction du d4bit sanguin est telle que le ,,coefficient de s4curit4" est d4pass4 et que Ie tissu nerveux est isch4mi4.

VII . C O M M E N T A I R E S .

La mesure de la fr~quence critique de fusion qui fait l 'objet prin- cipal de ce m~moire a pour but essen,tiel le diagnostic p r&oce des

185

Page 57: La mesure de la frequence de fusion en clinique

ph~nom6nes pathologiques alt~rant les fonctions visuelles. En y re- courant, nous cherchons ~ d~celer le real avant qu'il n'ait d~truit irr~m6diablement les cellules photor~ceptrices, les neurones de con- duction ou l'appareil cortical de la vision. En 1938, Bailliart ~crivait: ,,La tglche de demain sera de perfectionner nos proc~d~s d'explora- t/on fonctionnelle de la r~tine".. C'est la t~che que nous avons entre- prise.

Plusieurs auteurs avant nous, Markow, Braunstein, Hessberg, Phi- lipps, Riddell, Hylkema ont pressenti l'int6r~t de la mesure de la fr~- quence critique de fusion en clinique. I]s ont ~tabli un fait important qui a servi de base ~ nos recherches. Toute alt6ration des fonctions visuelles d~termine une chute du fusionnement: le sujet malade ~prouve une sensation lumineuse continue, alors que le sujet sain plac6 dans les m6mes conditions d'examen pergoit encore nettement les alternances de lumi~re et d'obscurit6. Ce ph~nom~ne n'est pas propre aux l~sions des c6nes el: des batonnets pas plus qu'~ Fun ou l'autre neurone des voies de transmission de l'influx nerveux. I1 se manifeste quel que soit l'endroit de la l~sion: cellules photor~ceptri- ces dans le d~collement r~tinien; deuxi~me e~ troisi~me neurones dans la n~vrite nicotinique et dans le glaucome; r~gion chiasmatique dans les tumeurs hypophysaires; bandelettes et radiations optiques dans les tumeurs c~r6brales: centre occipital de la vision clans certains traumatismes cranio-c~r~braux, par exemple. Chaque lois qu'un sti- mulus est affaibli en un point quelconque du trajet de l'influx ner- veux: r~ception, transmission ou perception, la fr~quence critique de fusion s'abaisse.

Les recherches de nos pr~d~cesseurs se sont heurt~es h cliff,rents obstacles; tout d'abord l'enregistrement de la fr~quence de fusion chez le malade. Nous avons pu vaincre cette difficultY. L'appareil que nous avons fait construire est d'un maniement si facile et si ra- p/de qu'il nous a permis d'introduire/l la clinique ophtalmolo~tique de l'liniversit~ de Liege la mesure de la fr~quence de fusion dans la routine d'examens quotidiens. Cependant la solution que nous avons apport~e h ce probl~me n'est pas parfaite; nous connaissons les inconv~nients de l'instrument dont nous nous servons: son en- combrement, son prix de revient ~lev~, la difficult~ d'explorer le champ visuel ~ plus de 30 de~Ir~s du point de fixation; nous esp~rons le perfectionner dans l'avenir.

l ine autre difficult~ p/us importante peut-~tre que celle rc~sultant de l'appareilla~e est l'interpr~tation des r~sultats obtenus chez le

186

Page 58: La mesure de la frequence de fusion en clinique

malade. En adoptant, comme nous l'avons fair, des conditions d'ex- amen assurant chez l'individu sain ,,l'isofrequence" dans toute la portion exploree du champ visuel, l'interpretation des resultats devient aisle. Leur simple inspection permet, en regle generale de d&eler l'existence d'une alteration des fonctions visuelles, de deli- miter son extension et d'apprecier sa gravite.

De fa~on systematique; nous avons compare la valeur relative de la campimetrie et de la frequence de fusion. Ces deux m~thodes apportent des renseignements analogues. Toute alteration des fonc- tions visuelles d&elable sur | '&ran de Bjerrum, scotome ou de- pression d'un isopt~re se traduit par un abaissement de la frequence de fusion. La campimetrie et la mesure de la frequence de fusion ont des avantages propres qui font que ces methodes se compl~tent admirablement.

La campimetrie d~c~le, mieux que la fr~quence de fusion un sco- tome tr~s petit mais dense; la frequence de fusion met en evidence mieux que l'ecran de Bjerrum un deficit ~tendu mais tr~s l~ger.

La campimetrie permet la delimitation exacte d'un scotome; la mesure de la fr6quence de fusion mesure avec precision sa densite.

Appliquee en clinique sur plusieurs centaines de cas pathologi~ ques, la mesure de la frequence de fusion s'est av~ree ~tre une excel~ lente methode d'investigation des fonctions visuelles et parfois m~me la methode de choix. Sa qualite dominante est sa sensibilitd. Grace

elle, nous avons pu d&eler des alterations discr~tes, meconnues sur l'~cran de Bjerrum dans le glaucome d6butant ou lorsque une tu- meur cer6brale exerce une pression l~g~re sur les voles optiques. Dans ces deux affections, nous avons pu d~limiter le scotome tout entier alors que la p~rim~trie n'en revelait qu'un~ partie. La fr~quen- ce de fusion a mis en evidence les sequelles m&onnues d'affections apparemment 9u~ries, a la fin d'une nevrite nicotinique, apr~s r~ap- plication chirurgicale d'une retine d&ollee. Maintenant que notre exp6rience en mati~re de fusion des images est plus grande, nous projetons de rechercher syst~matiquement par la frequence de fusion les premiers sympt6mes de diverses affections. Nous esp6rons depis- ter l'intoxication par le tabac hun stade oil il n'existe aucune alt6ra- tion subjective de la vision per~ue par le malade ou d&elable par les m~thode cliniques actuelles les plus fines.

La mesure de la fr~quence de fusion est, non seulement, une me- thode sensible, mais elle est aussi une methode p r ~ c i s e. Les varia- tions physiologiques sont peu considerables; nous les avons calcu-

187

Page 59: La mesure de la frequence de fusion en clinique

l~es chez 49 sujets normaux. Ces calculs permettent, en presence d'un abaissement m6me discret de la fr~quence de fusion de prendre position pour ou contre l'existence d'un ph6nom~ne patholo~/ique. Nous n'avons pas la pr6tention de d6celer toutes les alterations vi- suelles d6s leur apparition; le passage de l'~tat normal h l'~tat patho- logique peut 6tre lent, mais nous croyons que l'abaissement de la tr~quence de fusion est souvent le premier sympt6me du d~ficit fonc- tionnel.

VII. CONCLUSIONS.

1 ~ L'appareil d6crit sert ~ mesurer Ia fr6quence de fusion en clinique. II permet l'exploration d'une portion importante du champ visuel.

2 ~ Grhce ~ I' ,,isofr~quence", l'interpr6tation des r~sultats est aisle La simple inspection suEfit, en r~gle g6n6rale, ~ d~limiter l'extension du territoire l~s~ et estimer la gravit~ du d~ficit.

3 ~ La mesure de ]a fr~quence de fusion est uiae m6thode pr6cise et sensible. Les variations physioloques enregistr~es chez le sujet normal sont minimes. Les alterations r6sultant d'une l+sion

sont consid~rables. 4 ~ Les differences de fr~quence de fusion entre les moiti~s tem-

porale et nasale du champ visuel sont dues aux differences de calibre des vaissaux r~tiniens situ~s devant les 61~ments photo- r6cepteurs.

5 ~ Les modifications de la frdquence de fusion en fonction des variations du diam~tre pupillaire r~sultent en ordre principal de la quantit~ de lumi~re qui p6n6tre dans l'oeil et en ordre accessoire seulement, de l'adaptation r~tinienne.

6 ~ Les variations de la fr~quence de fusion en fonction de l'gtge r6sultent principalement de la scl~rose irienne et des modifi- cations du diam6tre pupillaire qui en sont la cons6quence.

7 ~ La mesure de ]a fr~quence de fusion permet de d6terminer avant l'op~ration les limites d'un d~collement r6tinien m~me dans/es portions off le soul~vement est discret. Apr6s gu~rison chirurgicale, la mesure de la fr~quence de fusion est la m~tho- de de choix pour ~valuer les d~ficits fonctionnels d~finitifs.

8 ~ La n~vrite nicotinique se caract~rise par un abaissement con- sid~rable de la fr6quence de fusion. Celui-ci est maximum au au point de fixation et dans la rr centro-caecale. I1 int6-

188

Page 60: La mesure de la frequence de fusion en clinique

resse une zone d'autant plus ~tendue que l'intoxication est plus grave et que le scotome centro-caecal est plus vaste,

9 ~ La mesure de la fr~quence de fusion d~c~le pr~cocement les d~ficits visuels chez les sujets 01aucomateux. Elle peut r~v~ler une alteration des fonctions dans un territoire off la campim~- trie ne montre aucun d~[icit.

100. Dans l'~tude des alterations visuelles cons~cutives ~ une l~sion des voles optiques intracraniennes, la mesure de la fr~quence de fusion complete tr~s heureusement la p~rim~trie et parfois m6me, lui est sup~rieure. Chacune de ces deux m~thodes a ses avantages propres. La p~rim~trie sert surtout ~ d~limiter le scotome, la [r~quence de fusion ~ mesurer sa densitY. Lors- que le scotome est petit et dense, la campim~trie est la m~thode de choix; par contre la mesure de la fr~quence de fusion d~- c~le, mieux que l'enre0istrement des isopt~res, les d~ficits ~ten- dus et I~0ers.

11 ~ En cas d'art~rioscl~rose, les d~ficits fonctionnels, quelle que soit la m~thode d'examen h laquelle on recourt, n'apparaissent que tardivement; les l~sions vasculaires visibles h l'ophtalmos- cope, par contre, sont pr~coces.

12 ~ Les am~tropies n'abaissent pas la fr~quence de fusion. 13 ~ Les alterations de la transparence des milieux oculaires de

l'oeil d~terminent une chute de la fr~quence de fusion d'autant plus considerable que l'opacit~ est plus dense.

SUMMARY

1. A description is oiven of an apparatus for the clinical measure- ment of the frequency of fusion.

2. ,,Isofrequency" facilitates the interpretation of result. Simple inspection 9enerally suffices to delineate the area involved, and to estimate the extent of the defect.

3. The measurement of the frequency of fusion gives clear re- sults. Physiological variations are small, whilst the pathological ano- malies produce marked defects.

4. The difference in the frequency of fusion as between the tem- poral and nasal haloes of the visual field results from difference in the calibre of the retinal vessels runnin 9 in front of the photorecep- tive elements.

5. Modifications in the frequency of fusion in reIation to varia-

189

Page 61: La mesure de la frequence de fusion en clinique

tions in the diameter of the pupil are determined mainly by the quan- tity of light entering the eye. Retinal adaption is a subsidiary factor.

6. Modifications in the frequency of fusion in relation to age result largely from sclerosis of the iris, and from consequent changes in the diameter of the pupil.

7. The measurement of the frequency of fusion allows the pre- operative determination of the limits of a retinal detachment inclu- ding that part of the retina which is detached ,but slightly. After surgical cure it is the method of choice for evaluating the areas of persistant functional defect.

8. Tobacco amblyopia is characterised by a considerable reduc- tion in the frequency of fusion. This is at its maximum at the point of fixation in the centro-caecal area. The area involved is directly proportional to the degree of intoxication and to the extent of the centro-caecal defect.

9. Disturbances in frequency of fusion occur early in glaucoma, and may be present when perimetry fails to reveal any defect.

10. The measurement of frequency of fusion supplements use- fully perimetric studies in lesions of the intracranial optic pathways. Whilst perimetry delineates the defect, the measurement of frequen- cy of fusion serves to determine its density. When a scotoma is small and dense perimetry is a method of choice; where the defects are extensive and light measurement of frequency of fusion gives the fuller information. 11. In retinal arteriosclerosis ophthalmoscopically visible lesions give more information than any functional test. The measurement of fusion is no exception.

12. The ametropias do not affect frequency of fusion. 13. Opacification in the ocular media produce a lowerin 9 of fre-

quency of fusion. This is directly proportionate to the degree of opacification.

IX. BIBLIOGRAPHIE.

1. Ajo 31., Teraskeli H., Acta Ophthal. 1937, 15, 374.

2. Amsler M., Klin. Mbl. Augenh. 1939, 104, 515.

3. Braunstein, E. P., Z. Psychol. u. Physiol. 1903, 33 171, 2"tl.

4. Braunstein, E. P., Arch. fiir Ophth. 1909, 70, 233.

5. Enroth, E., Werner, S., Acta Ophthal. 1936, 14, 320.

190

Page 62: La mesure de la frequence de fusion en clinique

6. Evans, 1., Introduction to clinical Scotometrv. New-Haven. U.S.A. 1938.

7. Granit, t~., Acta Ophthal. 1936. suppl. 8.

8. Granit, R. et Therman, ]ourn. Physiol. 1935, 83, 359.

9. Granit, t~. and yon Ammon, Am. Journ. Physiol. 1930, 95, 229.

10. Hessberg, R., Arch. [fir Ophth. 1909, 69, 272 ~ 72, 485.

11. HyIkema, B. A., Acta Ophthal. 1942, 20, 159, 181.

12. Hylkema, B. A., Arch. [fir Ophth. 1944, 146, 110, 241.

13. Kenel, C., Le traitement des 16sions et troubles oculaires dus l'hypertension art6rielle. S. Karger, Bale 1945.

14. Lohmann, W., Arch. fir Ophth. 1908, 68, 395.

15. Maggiore, L., Annali di Ottalmologia 1946, 72, 1.

16. Magitot, A., Trait6 d'Ophtalmologie 1939, 6, 187. Documenta Ophthalmologica 1938, 1, 411.

17. Markow,, Vestnik Opht'hal. 1901, 18, 24, 152, 247. Cit6 par Braunstein, 4.

18. Pieron, H., La sensation visuelle. Trait6 d'Ophtalmologie 1939. 2, 673.

19. Pollock and Mayer, Am. ]ourn. Physiol. 1938, 122, 57.

20. Phillips, G., Brain 1933, 56, 464.

21. Rkldetl, L. A., Brit. ]ourn. Ophth. 1936, 20, 385.

22. Sallmann, L. ~ Sveinsson, K., Arch. ftir Ophth. 1934. 130, 1,

23. Teraskeli, H., Acta Soc. Medic. [enn. Duodecim 1934, 19, 1 cit6 par Granit, 7 et Hylkema, 11 et 12.

24. Traquair, H. M., An Introduction to clinical Perimetry. H. Kimpton, 1942, London.

25. Weekers, L., Arch. d'Ophtal. 1932, 49, 485.

26. Weekers, L. et R., OphthaImologica 1942, 104, 1 et 1945, 109, 212. Acta Ophthal. 1946, 24, 1. Ann. Ocul. 1947, 180, 76.

27. Weekers, R., Ophthalmologica 1942, 104, 316 et 1943, 105, 307. Ann. Ocul. 1947, 180, 10.

28. Weekers, R., Rev. m6d. Liege 1946, 1, 218.

29. Weekers, R. et Humblet, M., Ophthalmologica 1945, 110, 43.

191

Page 63: La mesure de la frequence de fusion en clinique

30. Weekers, t~. et Humblet, M., Bull. Soc. belge Ophtal. 1945, 82. 53.

31. Weekers ]~. et Roussel, F., Ophthalmologica 1946, 112, 305 et 1947, 113, 215. Bull. Soc. belge Ophtalm. 1946, 83, 27.

32. Weekers, R. et Roussel, F., Ophthalmologica 1945, 110, 242.

33. Werner, S., Acta Ophthal. 1936, 14, 28.

34. Were, H. ]. M., Fischer, F. P., Arch. ffir Augenh. 1937, 110, 198 et 390. Ann. Ocul 1938, 175, 807, 813, 817, 823. Ophthalmologica 1940, 99, 291.

Clinique ophtalmologique de l'Universit6 de Liege (Prof. L. Weekers) et Fonds national belge de la Recherche scientifique.

192