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La normalisation constitutionnelle au Tchad

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N 2-908065-04-5 ISSN 0298-8879

Prix : 35 FF

TRAVAUX ET DOCUMENTS

Responsable de la série : Daniel BACH

LA NORMALISATION CONSTITUTIONNELLE AU TCHAD

par Alain MOYRAND

N° 26 1990

Maître de conférences de droit public à l'Université de Bordeaux 1 Chercheur associé au CEAN

Ancien chef du département des sciences juridiques (1983-1988) Université du Tchad

CENTRE D'ETUDE D'AFRIQUE NOIRE Institut d'études politiques de Bordeaux Domaine universitaire B.P. 101 33405 TALENCE CEDEX - FRANCE Téléphone (33) 56 84 42 82 Télécopie (33) 56 37 45 37

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Depuis l'indépendance, l'évolution politique et constitu- tionnelle du Tchad a été conduite dans le sens du renforcement du pouvoir de l'exécutif qui s'est notamment traduit par l'omnipotence du Chef de l'Etat (1). La concentration des pouvoirs entre les mains du Président de la République a marginalisé l'action du parlement (2) tandis que l'avènement du parti unique (3) a définitivement supprimé toute possibilité de contestation à l'égard de l'action gouvernementale.

Les effets engendrés par un tel système sont toujours désastreux. Le Tchad n'a pas dérogé à cette règle et les fonctionnaires, se sachant à l'abri de tout contrôle, ont commis nombre d'abus, surtout dans les provinces. En l'absence d'institutions capables de prendre en compte les doléances des administrés et d'y apporter satisfaction, les victimes n'avaient plus que la révolte comme solution. C'est ainsi que naquit la rébellion (4). Parmi les divers mouvements de libération nationale qui exploitèrent cette situation, l'un d'eux réussit à prendre le pouvoir. Mais cette conquête se fit au prix de luttes sanglantes et fratricides. En effet, le Tchad est entré en 1964 dans un cycle de violence et la rébellion n'a

. fait que gagner du terrain malgré les interventions successives de l'armée française. Le 13 avril 1975, le Président Tombalbaye est assassiné lors d'un putsch perpétré par des officiers. Mais rapidement le nouveau régime militaire est obligé de composer avec une partie de la rébellion. Le compromis institutionnalisé dans une Charte Fondamentale ne fut que de courte durée. Et de 1979 à 1982, la guerre civile fit rage depuis la capitale jusqu'aux confins du pays.

Au cours de cette dernière période, divers gouvernements d'union nationale se sont succédés. Mais en réalité, ces instances ne contrôlaient tout au plus qu'une portion de la capitale (5). Finalement, le 7 juin 1982, M. Hissein Habre à la tête des Forces Armées du Nord réussit à reprendre le contrôle de la capitale, et progressivement de l'ensemble du pays.

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Chacun garde en mémoire les exploits accomplis par l'armée tchadienne lorsque celle-ci infligea des défaites cuisantes aux troupes libyennes (6). Dans le même temps et grâce à la politique dite de réconciliation nationale, la totalité des mouvements d'opposition acceptèrent de participer aux nouvelles institutions dirigés par M. Hissein Habre. Il n'y a plus guère que M. Goukoumni Weddeie qui, aujourd'hui encore, refuse de reconnaitre le nouveau régime.

L'organisation politique du Tchad était déterminée depuis 1982 par un Acte Fondamental de la République. Texte sommaire (36 articles au total), cette Constitution confiait tous les pouvoirs au Chef de l'Etat. Mais i l avait toujours été convenu que cette Loi Fondamentale n'était que provisoire et qu'elle devrait être révisée le jour où la réconciliation nationale serait achevée. Or, tel était bien le cas depuis 1988. Aussi, fidèle à ses engagements, le Chef de l'Etat a chargé un Comité Constitutionnel (7) d'élaborer le projet de la future Constitution. La composition de cet organe et la procédure retenue pour rédiger la nouvelle Constitution méritent tout particulièrement d'être précisées car il s'agit là de deux éléments qui ont contribué à donner une configuration originale à ce texte.

S'agissant de la composition du Comité Constitutionnel, il faut mentionner le rôle prépondérant qu'ont pu jouer de jeunes juristes, universitaires et hauts fonctionaires, dans la rédaction de la Loi Fondamentale (8). En effet, il apparaît clairement que ceux-ci ont pu imprimer la marque de leur culture juridique. Or, cette culture à été acquise, pour la plupart, dans les universités françaises. Il n'y a donc rien d'étonnant à constater d'une part, que certaines institutions et mécanismes de la Constitution tchadienne s'inspirent du texte français et d'autre part, qu'il y a chez ces hommes un

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profond attachement au respect de la règle de droit, aux droits fondamentaux et aux mécanismes qui permettent de garantir l'exercice des libertés publiques. Les commentateurs étrangers de la Constitution tchadienne auraient tort, nous semble-t-il, de conclure que la part réservée aux droits et libertés des citoyens dans la Loi Fondamentale est destinée à faire bonne figure auprès de l'opinion internationale. S'il est vrai que ce souci fait sans doute partie des préoccupations du Chef de l'Etat, il faut préciser que celui-ci n'a pas joué un rôle prépondérant dans l'élaboration de la Constitution. Ainsi, trente ans après l'indépendance, malgré les crises qu'a connues le Tchad, malgré le non respect des libertés fondamentales par tous les régimes précédents (y compris celui de M. Hissein Habre depuis 1982) il reste parmi les cadres tchadiens des hommes pleins d'espoir dans les valeurs démocratiques et confiants en l'avenir.

En ce qui concerne l'élaboration de la Constitution, on précisera que le Comité Constitutionnel a procédé à une large consultation populaire. Plus précisément, un questionnaire a été mis à la disposition des citoyens afin que ceux-ci puissent exprimer leur point de vue sur les futures institutions du pays. Ainsi, 400 personnes (et pas seulement des "personnalités") ont profité de cette occasion pour faire part de leurs doléances et par ailleurs 3000 individus ont été consultés oralement lors de réunions qui se sont tenues dans les provinces. Certes, compte tenu de l 'état des libertés publiques qui prévaut à l'heure actuelle au Tchad, bon nombre d'individus se sont abstenus de tout commentaire. Il faut par ailleurs souligner le caractère incongru que peut avoir une telle démarche dans un Etat où le taux d'analphabétisme dépasse les 80 %. Il n'empêche que ceux qui ont exprimé leur conception des futures institutions ont influencé d'une manière non négligeable le projet définitif de la Constitution. Enfin, si contrairement aux premières constitutions africaines, la

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nouvelle Loi Fondamentale a été entièrement conçue par des tchadiens, ces derniers ne se sont pas privés de consulter quelques spécialistes français (9), connaisseurs de longue date des institutions politiques du Tchad. Pour le reste, le Comité Constitutionnel a consulté une très ample documentation sur les systèmes constitutionnels étrangers (et tout particulièrement africains).

Au terme de la procédure de rédaction de la Constitution, le projet fut soumis au Conseil National Consultatif (10) et au Comité Central de l'Union Nationale pour l'Indépendance et la Révolution (11) et enfin, conformément à son article 207, soumis au peuple par référendum (12). Cette votation a eu lieu le 10 décembre et comme on pouvait s'y attendre, c'est à une écrasante majorité que la nouvelle constitution a été approu- vée : 99,98 % de oui.

Si on la compare aux précédentes constitutions tchadien- nes, la nouvelle Loi Fondamentale s'en distingue sur bien des points. D'abord par sa longueur. En effet, la Constitution ne comprend pas moins de 213 articles (13). Ensuite, elle n'apparaît pas comme un texte de revanche sur les régimes précédents, même si l'action glorieuse du mouvement de rébellion dirigé par M. Hissein Habre (le FROLINAT) est soulignée discrètement dans le préambule. Au contraire elle est, comme se plaît à le souligner son préambule "résolument tournée vers l'avenir, déterminée à tracer sa propre voie pour un meilleur destin..." (14). Et, ceci ne semble pas être seulement un voeu pieu ; d'autres éléments laissent à penser qu'il s'agit d'un texte qui n'a pas été bâti que pour un Homme, même si pour l'heure c'est M. Hissein Habre qui est à la tête des institutions. Citons par exemple l'article 99 qui dispose que "Le Président sortant bénéficie de toutes les garanties de sécurité personnelle et matérielle et des égards dûs aux

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charges qu'il a eu à assumer". D'autre part, le Comité Constitutionnel a aussi cherché à créer un système qui, tout en respectant la logique du pouvoir africain (le leadership présidentiel), permette à l'organe parlementaire de retrouver une place qu'il avait perdue dès les années 1960. Par ailleurs, l'adoption de cette Loi Fondamentale marque le retour à une vie constitutionnelle normale puisqu'il est mis fin à quatorze ans de régimes de fait et de Textes fondamentaux provisoires.

Enfin, en approuvant par référendum la nouvelle Constitu- tion, le peuple tchadien a dans le même temps confirmé M. Hissein Habre dans sa charge de Président de la République. En effet l 'article 209 de la Constitution précise que "L'adoption de la présente Constitution par le peuple emporte élection du Président de la République en fonction pour un mandat de sept ans" (15). La Constitution a été promulguée le 20 décembre 1989 (cf. décret n° 1036 publié au Bulletin Quotidien n° 23/36 des 21 et 22 décembre 1989, p. 2) et le Chef de l'Etat a prêté serment, conformément à l 'article 75, le 22 décembre.

Les nouvelles Institutions politiques permettront-elles aux Tchadiens de se réconcilier, d'oublier les méfaits de la guerre civile et de réaliser les nombreux projets énoncés dans l'article 1er de la Constitution ? S'il n'est guère possible de prédire l'avenir de ce pays, il est en revanche permis de s'interroger sur l'organisation (II) et le fonctionnement des pouvoirs publics pour apprécier notamment la façon dont s 'agenceront les rapports entre les organes constitutionnels et les modes de résolution des conflits politiques (III). Au demeurant, il conviendra de présenter les principes fondamentaux sur lesquels reposent les nouvelles institutions (I).

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REVUE CANADIAN CANADIENNE JOURNAL D'ÉTUDES DU OF DEVELOPMENT DÉVELOPPEMENT STUDIES

Volume XI N°1 1990

A. LAGANA Highly Educated Labour Surpluses and Educational Planning in Developing Countries: A Case Study of Mexico

L. RIVEROS Recession, Adjustment and the Performance of Urban Labour Markets in Latin America

N. GRIFFON & M. RICHARD Éducation à distance et développement de la communauté en

Colombie S. AHMED Comparison of Haitian and Canadian Managers' Job Needs

and Psychological Profile A. MOUHAMMED An Econome tric Identification of Development Strategies in

Iraq R. LOONEY Oil Revenues and Dutch Disease in Saudi Arabia:

Differential Impacts in Sectoral Growth

Réflexions sur la pratique du développement / Reflections on Development Practices T.DOTTRIDGE Introduction D. BRINKERHOFF Technical Co-operation and Training in Development

Management in the 1990s: Trends, Implications and Recommendations

J.-Ph. THÉRIEN Aide et commerce dans les relations Canada-Tiers Monde P. KRISCHKE Social Movements and Political Participation in Brazil

Abonnements/Subscriptions Canada Étranger

Institutions 40 $Can 45 $Can Individus 25 $Can 30 $Can Étudiants 15 $Can 20 $Can Par avion/Air mail 13 $Can suppl./extra

Édition, ventes et gestion/Edition, Sales and Management Revue canadienne d'études du développement/Canadian Journal of Development Studies

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