LA POLICE COMMUNAUTAIRE AU CAMEROUN : LE CAS DE LA SÛRETE NATIONALE

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    UNIVERSITE DE YAOUNDE II  PRESIDENCE DE LA REPUBLIQUE DU CAMEROUN 

    THE UNIVERSITY OF YAOUNDE II  PRESIDENCY OF THE REPUBLIC OF CAMEROON 

    INSTITUT DES RELATIONS INTERNATIONALES

    DU CAMEROUN

    ECOLE INTERNATIONALE DES FORCES DE SECURITE 

    INSTITUTE OF INTERNATIONAL RELATIONS

    OF CAMEROON 

    INTERNATIONAL SCHOOL OF SECURITY FORCES 

    BP 1637 YAOUNDE  BP 4018 YAOUNDE

    Mémoire présenté et soutenu publiquement en vue de l’obtention du Diplômede Master en Relations Internationales

    OPTION : Sécurité Internationale

    PAR :

    DESIRE BESSALA

    LA POLICE COMMUNAUTAIRE

     AU CAMEROUN : LE CAS DE LA

    SÛRETE NATIONALE

    Sous la direction du : Dr REMY MBIDAMBIDA

    Chargé de cours à l’IRIC 

    Sous la supervision du : Pr JOSEPHVINCENT NTUDA EBODE

    Enseignant à l’université de Yaoundé II 

    ANNEE ACADEMIQUE : 2014-2015 

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      i

    Je dédie ce travail à :

      Mme veuve EKOBONO née Agathe MESSINA, maman, les mots me manquent pour te

    rendre hommage ainsi qu’à ton feu mari, pour  tout ce que vous avez fait pour moi ;

      Roméo BESSALA, Lionnel BIDZANGA, Leïla BESSALA, Armel BESSALA, Linda

    BESSALA, Arielle BESSALA, Junior BESSALA, Rodrigue BESSALA, Sarah

    BESSALA, Rosamond BESSALA, mes chers enfants, puisse le modeste niveau

    intellectuel atteint par votre père vous servir de balise pour parvenir aux faîtes

    académiques

    DEDICACE

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      ii

    Au moment où notre séjour à l’Institut des Relations Internationales du Cameroun s’achève,

    nous voulons exprimer notre gratitude à tous ceux qui, de près ou de loin, ont contribué à son

    succès, notamment :

      Le Professeur JOSEPH VINCENT NTUDA EBODE qui, en dépit des nombreuses

    sollicitations dues à son rang, a assuré la supervision de notre mémoire ;  Le Docteur REMY MBIDA MBIDA qui, avec la minutie et la rigueur reconnues aux

    universitaires, a dirigé notre travail de bout en bout ;

      Le Délégué Général à la Sûreté Nationale, Mr Martin MBARGA NGUELE qui nous a

    accordé le privilège d’être admis à l’Ecole Internationale des Forces de Sécurité et par

    ricochet à l’IRIC et a mis le budget de l’Etat à contribution à cet effet ;

      Les enseignants et personnels d’appui de l’EIForceS et de l’IRIC qui n’ont ménagé

    aucun effort pour la réussite de notre formation.

       Nos camarades de promotion dont le soutien moral, pendant des moments difficiles, a

    été pour nous une source de réconfort.

    REMERCIEMENTS

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      iii

    ABV : Auxilliaires Volontaires de la Police AMIS : Mission de l'Union Africaine au SoudanASEAN : L'Association des Nations de l’Asie du Sud-EstCADDEL : Conférence Africaine de la Décentralisation et du Développement CDS : Comités Départementaux de Sécurité CFA : Communauté Financière d’Afrique CMS : Comité Municipal de Sécurité CNS : Conseil National de Sécurité CNSS-SN : Comité National Sectoriel de Sécurité pour la Sûreté Nationale CRS : Comités Régionaux de Sécurité CSG : Comité de Sécurité du Groupement CSQ : Comité de Sécurité du Quartier  CZS : Comité Zonal de Sécurité D.E.A : Diplôme d'Etude Approfondie DCO : Développement et Changement Organisationnels DGSN : Délégation Générale à laSûreté Nationale DSCE : Document de Stratégie pour la Croissance et l’Emploi.EIForceS : Ecole Internationale des Forces de Sécurité 

    Elecam : Elections Cameroon EMSP : Entreprises Militaires et de Sécurité Privée GIC : Groupements d’initiatives communes GSO : Groupement Spécial d'Opération IRIC : Institut des Relations Internationales du Cameroun LEA : Ligue des États Arabes NTIC : Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication OEA : L'Organisation des États Américains ONG : Organisations non Gouvernementales 

    ONU : Organisation des Nations-Unies OSCE : Organisation pour la Sécurité et la Coopération en EuropePPC : Poste de Police communautaireQPC : Quartier de Police CommunautaireRDA : République Démocratique d’Allemagne SARA : Scanner, Analyser, Répondre, Apprécier.ZPC : Zone de Police Communautaire.

    LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS

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      iv

    Figure 1 : Maillage de la Police Communautaire au niveau national

    Figure 2: Structure des effectifs d’une unité opérationnelle de la Sûreté Nationale selon l’article 7 du décret n°2012/540 du 19 novembre 2012 portant organisation de la DélégationGénérale à la Sûreté Nationale

    Figure 3: Maillage de la police communautaire au niveau d'un arrondissement à prédominance urbaine

    Figure 4: Maillage de la police communautaire au niveau d'un arrondissement à prédominance rurale

    LISTE DES FIGURES

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      v

    L’objet de l’étude porte sur la recherche de l’approche policière la plus idoine pourrelever les défis d’évolution quantitative et surtout qualitative de la criminalité auxquels leCameroun est actuellement confronté.

    Pour ce faire et en s’inspirant des exemples de l’Europe, l’Amérique, l’Asie, l’ ONU etde certains pays africains où, dans les mêmes circonstances, la police communautaire mise au

     point par Robert Peel a été expérimentée avec beaucoup de succès, la problématique de

    l’appropriation de cette approche communautaire par la Sûreté Nationale a été retenue comme filconducteur avec deux présuppositions : l’internalisation des principes de Peel est mitigée et leCameroun est un contexte favorable à l’épanouissement de la police communautaire. 

    A travers l’examen de la doctrine d’emploi de la Sûreté Nationale, de son organisation,de la nature de ses acteurs, de ses stratégies et de ses modes d’action, la première présuppositiona été confirmée. La deuxième l’a également été grâce à l’analyse d’une part, des indicateursnationaux tels l’existence d’une vision stratégique de la police communautaire, la promotion dela démocratie, de la décentralisation et de l’esprit associatif ainsi que les limites patentes dusystème sécuritaire de la police d’ordre en vigueur  ; d’autre part, des indicateurs internationaux àl’instar de l’actualité du concept de sécurité humaine, la sublimation des droits de l’Homme et laglo balisation de l’information.

    Au-delà de ces indicateurs favorables, les multiples avantages sécuritaires et non-sécuritaires à en tirer et dont les détails ont été exposés, constituent une raison supplémentaired’internaliser la police communautaire au Cameroun et notamment à la Sûreté Nationale. Cetteinternalisation, vivement recommandée en addition de la police d’ordre, passe par un processussubdivisé en mesures administratives et opérationnelles dont les modalités ont été indiquées.

    Mots clés :

      Police communautaire

      Sûreté Nationale.

    RESUME

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      vi

    The purpose of this study focuses on the search for the most suitable police approach tothe challenges of quantitative and especially qualitative evolution of criminality to whichCameroon is currently facing.

    To do this and drawing inspiration on examples from Europe, America, Asia, the United Nations and some African countries where, in the same circumstances, the community policingdeveloped by Robert Peel was tested with great success, the issue of the adoption of thecommunity approach by the National Security was retained as a catalyst with two

     presuppositions: the internalization of Peel’s principles is mitigated and Cameroon is a favorabledevelopment environment for Community Policing.

    Through the examination of the employment doctrine of the National Security, itsorganization, the nature of its actors, its strategies and its modes of action, the first assumptionwas confirmed. The second was also thanks to the analysis on the one hand, of nationalindicators such as the existence of a strategic vision of community policing, the promotion ofdemocracy, decentralization and a spirit of association as well as the patent limits of the securitysystem of order police in force; secondly, international indicators like the advent of the conceptof human security, the sublimation of human right and the globalization of information.

    Beyond these positive indicators, multiple security and non-security benefits exist, the

    details of which were exposed, constituting an additional reason to internalize community policing in Cameroon and in particular at the National Security. This strongly recommendedinternalization, in addition to order police, passes through processes subdivided intoadministrative and operational measures whose modalities have been indicated.

    Key words:

      Community policing 

     

     National security 

    ABSTRACT 

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      vii

    DEDICACE ..................................................................................................................................I REMERCIEMENTS ...................................................................................................................II 

    LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS ...............................................................................III LISTE DES FIGURES................................................................................................................IV RESUME .....................................................................................................................................V ABSTRACT ...............................................................................................................................VI SOMMAIRE ............................................................................................................................. VII INTRODUCTION GENERALE .............................................................................................. 1 

    PREMIERE PARTIE : PARADOXE ENTRE UN CONTEXTE INDIQUE ET UNEINTERNALISATION MITIGEE DE LA POLICE COMMUNAUTAIRE .......................... 18 

    CHAPITRE PREMIER : UNE INTERNALISATION MITIGEE DE LA POLICE COMMUNAUTAIRE ................................................................................................................... 20 

    SECTION I : DOCTRINE ET ORGANISATION……………………………………  20

    SECTION II : ACTEURS, STRATEGIES ET MODES D’ACTION DE LA SÛRETÉ NATIONALE……………………………………………………………………………….  26 

    CHAPITRE DEUXIEME : UN CONTEXTE INDIQUE POUR LA POLICECOMMUNAUTAIRE……………………………………………………………………………3

    4SECTION I : DES INDICATEURS INTERNATIONAUX ................................................ 34SECTION II : DES INDICATEURS NATIONAUX .......................................................... 40 

    DEUXIEME PARTIE: AVANTAGES ET PROCESSUS D’INTERNALISATION DE LAPOLICE COMMUNAUTAIRE ...................................................................................................1 

    CHAPITRE TROISIEME: AVANTAGES INDENIABLES DE L’INTERNALISATION DELA POLICE COMMUNAUTAIRE AU CAMEROUN ............................................................... 53

    SECTION I : LES AVANTAGES SECURITAIRES .......................................................... 53SECTION II: LES AVANTAGES NON-SECURITAIRES ............................................... 59 

    CHAPITRE QUATRIEME: LE PROCESSUS D’INTERNALISATION DE LA POLICECOMMUNAUTAIRE AUCAMEROUN………………………………………………………..65

    SECTION I: DES MESURES ADMINISTRATIVES ........................................................ 65SECTION II: LES MESURES OPERATIONNELLES : FONCTIONNEMENT TYPED’UNE UNITE TACTIQUE DE POLICE COMMUNAUTAIRE ....................................... 73 

    CONCLUSION GENERALE ................................................................................................. 74

    SOMMAIRE

    http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447162http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447162http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447162http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447163http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447163http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447163http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447164http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447164http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447164http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447164http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447164http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447164http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447164http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447164http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447164http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447164http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447164http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447165http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447165http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447165http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447165http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447165http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447165http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447165http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447166http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447166http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447166http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447167http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447167http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447167http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447168http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447168http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447168http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447170http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447170http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447170http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447170http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447170http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447179http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447179http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447179http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447179http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447186http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447186http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447186http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447186http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447186http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447193http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447193http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447193http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447193http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447193http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447186http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447186http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447181http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447179http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447179http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447170http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447168http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447167http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447166http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447165http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447164http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447163http://c/Users/Acer/Desktop/m%C3%A9oire%20version9%20mars.docx%23_Toc399447162

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      1

    I - CONTEXTE ET OBJET DE L’ETUDE 

    La sécurité occupe une place capitale dans la vie de l’Homme. Jean Jacques Rousseau,

    évoquant la nature humaine, affirme que « Sa première loi est de veiller à sa propre

    conservation… » 1. C’est dire à quel point le besoin sécuritaire remonte à l’existence humaine et

    est unanimement accepté comme une nécessité. En revanche, la manière de satisfaire ce besoin

    indispensable a suscité, au cours de l’histoire, des approches variées. 

    Les westphaliens, depuis qu’il a été consacré en 1648 comme l’entité de regroupementhumain la plus achevée et donc le sujet par excellence de l’ordre international , estiment que

    l’Etat  est le meilleur garant de la sécurité. La sécurité est par conséquent une fonction

    essentiellement régalienne de l’Etat à qui le monopole de la violence a été reconnu pour assurer

    le bon ordre pour l’intérêt général.

    La police qui en découle est une police d’ordre dont le paradigme est de garantir le bon

    ordre par tous les moyens notamment la coercition. David Bayley scande à ce sujet que « … dans

    le monde moderne, police désigne en général des personnes employées par un Gouvernementqui sont autorisées à utiliser la force physique afin de maintenir l’ordre et la sécurité publics.  »2.

    Les privatistes se situent à l’opposé des Westphaliens. Sans remettre en cause le rôle

    régalien de l’Etat  en matière de sécurité, ils estiment que la police d’ordre est principalement

    orientée vers la sécurité des institutions étatiques et de ceux qui les incarnent ; négligeant ipso

    facto les besoins particuliers des groupes de personnes voire des individus. Bien plus, l’Etat peut,

    dans certaines circonstances, être soit débordé, soit dans l’incapacité d’assumer ses

    responsabilités sécuritaires. En conséquence, ils préconisent les initiatives privées pour renforcer

    la sécurité individuelle ou de groupes.

    La police qui en résulte est privée. Son paradigme est clientéliste et elle est assurée par

    des individus, des groupes d’individus ou des entreprises plus ou moins importantes. Il s’agit là

    d’un phénomène en plein essor compte tenu du caractère de plus en plus diversifié, pointu et osé

    de l’insécurité dans le monde contemporain. 

    1 Rousseau 1762, p. 6.

    2 Bayley 1983, p. 1120 ; 2003, p. 51.

    INTRODUCTION GENERALE

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    10/107

      2

    Dans un article de sa page d’accueil consacré aux entreprises militaires et de sécurité

     privées (EMSP), Malcolm Lucard, rédacteur en chef du magazine du Mouvement International

    de la Croix Rouge et du Croissant Rouge, parle de croissance exponentielle. L’auteur  déclare que

    « …ce secteur en pleine mutation… a connu une croissance foudroyante au cours des dernières

    décennies et … le volume d’affaires dépasserait aujourd’hui les 100 milliards de

    dollars. »1.Prenant le cas de l’Irak, le magazine affirme qu’ « Après l’invasion et l’occupation de

    l’Irak par les Etats-Unis en 2003, on estime que plus de 100 000 sous-traitants privés ont été

    employés, dans les rôles allant de la surveillance des convois à l’appui logistique, en passant

     par le renseignement, les postes de contrôle et bien d’autres fonctions. »2.

    La dernière approche est promue par les communautaristes. Elle se situe dans la logique

    de la gouvernance sécuritaire. Autrement dit, l’Etat, dans l’exercice de ses attributionssécuritaires régaliennes, coopère avec des acteurs non-étatiques pour s’attaquer aux causes de 

    l’insécurité et les résoudre durablement. Maurice Chalom et autres constatent à ce propos que

    « … les services de police sont appelés à adopter une attitude proactive incluant dans leur

    mandat la consultation et la participation de la collectivité… »3.

    La police générée par cette approche est Communautaire et ses paradigmes sont la

     prévention et la coopération. Elle encourage une très grande implication de la communauté dans

    la gestion des problèmes de sécurité auxquels elle peut être confrontée. Née au XIXème siècle

    notamment en 1829 en Angleterre, cette approche s’est ra pidement propagée en Europe, en

    Amérique, en Asie voire en Afrique. L’ONU a même intégré cette approche en 2004 dans ses

    activités dans le cadre des réformes consécutives au rapport Brahimi4 qui ont permis la création

    de la Division de la Police Civile au sein du Département des Opérations de Maintien de la Paix.

    Le Cameroun dont la naissance de la police moderne, matérialisée par la création du

     premier commissariat à Douala, remonte en 19255, ne s’est pas soustrait à l’adoption généralisée 

    de l’approche de police d’ordre par la quasi-totalité des pays africains avant ou aux lendemains

    des indépendances. Quatre vingt neuf ans plus tard et au regard de la percée universelle de la

    doctrine de la police communautaire, le Cameroun en général et la Sûreté Nationale en

     particulier, l’ont-t-ils internalisée ? Avant d’analyser les éléments de réponse à cette question, il

    convient de définir les concepts clés de notre étude.

    1 Lucard, 2012, P. 3.

    2 Id., p. 3.3

     Chalom et al, 2001, p. 22.4 Groupe d’étude sur les opérations de paix de l’ONU, 2000. 

    5 Pondi, 1988, p. 88.

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      3

    II - DEFINITION DES CONCEPTS

    II-1- La police communautaire 

    Selon le réseau de recherche sur les opérations de paix de l’’université de Montréal au

    Canada, « La police communautaire, aussi appelée police de proximité, présente une approche

     plus préventive et décentralisée que celle trad itionnellement réactive. Faite ‘’   par et pour la

     population’’  , elle vise à rendre les services policiers plus transparents et redevables envers la

     société, notamment en accentuant les services rendus par l’institution et en diminuant son

    caractère répressif. »1.

    Cette définition appelle plusieurs observations. En terme nominatif, elle ne fait aucune

    différence avec la police « communautaire », de « proximité » et leur traduction anglaise de

    community policing. Elle distingue deux types d’acteur s : la population et l’institution policière

    elle-même. Elle relève une structuration décentralisée et note que son paradigme est plus

     préventif que répressif à l’inverse de la police traditionnelle, c’est-à-dire la police d’ordre. Enfin,

    elle introduit la notion d’évaluation. 

    En revanche, le rapport de la 14e session plénière du conseil de l’Europe du 17 avril

    2007 sur le thème : police de proximité : les pouvoirs locaux et régionaux garants d’un nouveau partenariat , estime qu’il existe une nuance entre la version anglo-saxonne de la police

    communautaire appelée community policing  et la police de proximité. Cette nuance réside dans

    la formulation de la sécurité. La formulation de la police de proximité est exclusivement

    institutionnelle tandis que celle de la police communautaire est inclusive puisqu’elle associe la

     population. En effet, le rapport affirme que : « le community policing tend vers ‘’ une police de

    la communauté avec la communauté’’  et coproduit la sécurité avec les habitants, tandis que la

     police de proximité, dans un objectif de restauration du lien social privilégie un traitement strictement institutionnel des problèmes.»2.

    Bien plus, le même rapport intègre la police municipale dans les approches

    communautaires de la sécurité et va plus loin en militant pour le renforcement du rôle des

    collectivités dans le partenariat sécuritaire avec la population : « parallèlement aux évolutions de

    la police d’Etat, les autorités locales ont  depuis plus longtemps intégré le modèle de l’ilotage

    1 ROP 2013, p. 17.

    2 Conseil d’Europe, 2007, pp. 20 – 21.

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    comme une référence de l’action des polices municipales.»1. C’est dire que la différence

    fondamentale entre la « police municipale » et la « police d’Etat » se situe au niveau de leur

    organisation mère, la première dépend de la collectivité décentralisée tandis que la seconde est

    une institution de l’Etat. 

    De tout ce qui précède, on déduit qu’en dépit des nuances qui peuvent exister entre

    elles, les polices de proximité, municipale et communautaire partagent les mêmes

    caractéristiques qui sont : la prévention, le partenariat et le rapprochement des structures de la

     police vers les populations. Ces caractéristiques correspondent à certains principes de la police

    communautaire fondée en 1829 par le Ministre anglais de l’Intérieur, Robert Peel et qui ont été

    consignés dans un document baptisé « Metropolitan Police Act  » et sont au nombre de neuf :

     

    Prévenir le crime et le désordre, plutôt que les réprimer par la force militaire et par la

    sévérité des peines prévues par la loi.

       Ne jamais perdre de vue que, si la police veut être en mesure de s’acquitter de ses

    fonctions et de ses obligations, il faut que le public approuve son existence, ses actes et

    son comportement et qu’elle soit capable de gagner et de conserver le respect du public. 

       Ne jamais perdre de vue que gagner et conserver le respect du public signifie aussi

    s’assurer la coopération d’un public prêt à aider la police à faire respecter la loi.

     

     Ne jamais perdre de vue que, plus on obtiendra la coopération du public, moins il sera

    nécessaire d’utiliser la force physique et la contrainte pour atteindre les objectifs de la

     police.

      Obtenir et conserver l’approbation du public, non en flattant l’opinion publique, mais en

    servant toujours de façon absolument impartiale la loi, en toute indépendance par rapport

    à la politique et sans se soucier de la justice ou de l’injustice du fond des différen tes lois;

    en proposant ses services et son amitié à tous les membres du public, sans considération

     pour leur richesse ou leur position sociale; en étant courtois et amical en n’hésitant pas àse sacrifier quand il s’agit de protéger et de préserver la vie. 

       N’utiliser la force physique que dans les cas où la persuasion, les conseils et les

    avertissements se sont révélés inefficaces pour assurer le respect de la loi ou rétablir

    l’ordre; et, dans une situation donnée, n’utiliser que le minimum de force physique

    nécessaire pour atteindre les objectifs de la police.

    1 Conseil d’Europe, 2007, pp. 32 – 33.

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      Toujours maintenir avec le public des relations qui soient de nature à concrétiser la

    tradition historique selon laquelle la police est le public et le public la police, les policiers

    n’étant que des membres du public payés pour s’occuper, à temps complet, en vue du

     bien-être de la communauté, de tâches qui incombent à chaque citoyen.

       Ne jamais perdre de vue la nécessité de s’en tenir strictement aux fonctions qui sont

    celles de la police et de s’abstenir d’usurper, même seulement en apparence, les pouvoirs

    de l’appareil judiciaire pour venger les individus ou l’État et pour juger autoritairement

    de la culpabilité et de punir les coupables.

       Ne jamais perdre de vue que le critère de l’efficacité de la police est l’absence de crime et

    de désordre et non la manifestation visible de l’action de la police pour parvenir à ce

    résultat.1 

    Dans le cadre de cette étude, nous considérerons la police communautaire  comme une approche

    déconcentrée ou décentralisée de la sécurité qui place la prévention et la participation des

     bénéficiaires au centre de ses activités de lutte contre la petite et moyenne délinquances.

    Autrement dit, la police communautaire est la police du peuple par le peuple et pour le peuple

    avec l’aide de professionnel pour parodier la définition classique de la démocratie.

    II-2- La Sûreté NationaleCe concept désigne au moins trois considérations qui méritent d’être davantage

    élucidées: un corps de Fonctionnaires, une structure de l’administration publique appelée la

    Délégation Générale à la sûreté nationale et un ensemble de missions sécuritaires. 

    II-2-1- La Sûreté Nationale comme corps de métier 

    Selon cette acception, la sûreté nationale est, au Cameroun, une force régulière au coté

    d’autres forces. L’article 2 du décret  présidentiel n° 2012/539 du 19 Novembre 2012 portant

    statut spécial du corps des fonctionnaires de la Sûreté Nationale énonce en effet que « Le corps

    des fonctionnaires de la Sûreté Nationale, force régulière, est chargé, concurremment avec

    d’autres forces :-d’assurer le respect et la protection des institutions, des libertés, des personnes

    et des biens… ». Ce corps des fonctionnaires, doté d’un profil de carrière, d’un régime

    disciplinaire et d’un code de déontologie, est constitué de quatre cadres, dans l’ordre

    décroissant : 

    1 Ministère de la Sécurité Publique, 2000, p. 4.

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      Les commissaires de police (commissaire divisionnaire, commissaire principal et

    commissaire) ; 

      Les officiers de police (officier principal, officier de deuxième grade et officier de

     premier grade) ; 

      Les inspecteurs de police (inspecteur de police principal, inspecteur de police de

    deuxième grade et inspecteur de police de premier grade) ; 

      Les gardiens de la paix (gardien de la paix principal, gardien de la paix de deuxième

    grade et gardien de la paix de premier grade). 

    Paul PONDI abonde dans le même sens en affirmant que «… le législateur camerounais a choisi

    l’appellation de "Sûreté Nationale" pour désigner l’ensemble des forces de police.»1 Notamment

    « … le Corps des Fonctionnaires chargé de l’application des lois et règlements.»2

    .

    II-2-2- La Sûreté Nationale comme structure de l’Etat 

    La Sûreté Nationale ici est un service rattachée à la présidence de la République et

    relevant de l’autorité du Chef de l’Exécutif. Cette structure de l’Etat est appelée Délégation

    Générale à la Sûreté Nationale. Elle a été créée par le décret présidentiel N°2012/540 du 19

     Novembre 2012 portant organisation de la Délégation Générale à la Sûreté Nationale. L’article 2

    (1) affirme en effet que « la Sûreté Nationale est un corps de commandement et d’administration placé sous l’autorité du président de la république qui en est le chef suprême. ». Pour son

    fonctionnement, la Délégation Générale à la Sûreté Nationale dispose d’un cabinet, d’une

    administration centrale subdivisée en directions et des services extérieurs placés sous la

    coordination de dix délégués régionaux ayant rang de directeur de l’administration centrale.

    Parlant de l’importance de la place de cet organe au sein de l’administration de l’Etat

    notamment aux lendemains de l’indépendance du pays, Paul PONDI déclare que «… la première

    Sûreté Nationale fut rattachée directement au président de la république, mais resta une

    direction de service, modeste par ses effectifs et ses moyens, mais riche en responsabilités. »3.

    1

     Pondi, 1988, p. 17.2 Id., p. 16.

    3 Pondi, 1988, p. 47.

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    II-2-3- La Sûreté Nationale comme ensemble de missions sécuritaires

    La Sûreté Nationale désigne enfin un ensemble de missions sécuritaires stratégiques

    définies par l’Etat. Il s’agit, selon l’article 3 du décret no2012/540 du 19 novembre 2012 portant

    organisation de la Délégation Générale à la Sûreté Nationale, de : 

      assurer le respect et l’exécution des lois et règlements ; 

      concourir à l’exercice de la police administrative et de la police judiciaire ; 

      concourir à la défense nationale. 

    Pour nous, appréhender le concept de Sûreté Nationale dans son aspect mission passe

     par la considération que la criminalité a des causes (immédiates ou lointaines), et des

    manifestations. De même, il existe respectivement des solutions et des mesures palliatives pourgérer ces deux dimensions au niveau de la police.

    Dans cette optique, on peut dire de manière exclusive que la Sûreté Nationale a pour

    missions, sur l’ensemble du territoire, l’étiologie et la prophylaxie de la criminalité dans le but

    de la résoudre durablement tandis que la sécurité en gère les manifestations pour développer la

    quiétude subjective et objective des individus ou des groupes.

    De manière inclusive, les missions de la Sûreté Nationale et de la sécurité se confondentet vont des causes aux solutions de la criminalité en passant par les manifestations et leurs

     palliatifs. En clair, il s’agit à la fois des missions préventives et curatives. 

    Au total, le concept de Sûreté Nationale désigne un corps de métier, une administration

    et des missions qui peuvent être exclusives ou inclusives. La police communautaire et ses

    variantes relèvent de la Sûreté Nationale dans son sens exclusif et constituent une dimension de

    la sécurité et de la Sûreté Nationale dans leur sens inclusif.

    En conséquence, au terme de cet exercice de définition des concepts, notre sujet de

    réflexion peut être reprécisé de la manière suivante : la Sûreté  Nationale, qu’elle soit prise

    comme corps de métier, une administration publique ou un ensemble de missions, satisfait-elle

    les exigences de la gouvernance sécuritaire édictées par Robert Peel à savoir, entre autres :

      la prévention ;

      la coopération;

     

    une organisation décentralisée et déconcentrée;  la petite et moyenne délinquance comme objet ;

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      l’imputabilité ?

    III - INTERET DE L’ETUDE 

    L’intérêt de notre étude se décline en trois modalités: académique, scientifique et

     professionnel.

    Au plan académique, l’étude vise la satisfaction des exigences universitaires  pour

    l’obtention d’un Master en relations internationales, option sécurité internationale : la soutenance

     publique d’un mémoire sur un thème donné. En effet, parallèlement à nos études à l’Ecole

    Internationale des Forces de Sécurité de Yaoundé (EIFORCES), nous nous sommes inscrits à

    l’Institut des Relations Internationales du Cameroun (IRIC). Cette étude est donc le

    couronnement de notre séjour dans cette institution.

    Au plan scientifique, l’étude est une contribution à la réflexion sur la police

    communautaire au Cameroun. Nous avons en effet été frappés, pendant nos recherches, par le

    contraste entre l’abondance internationale de la documentation sur la question et sa rareté au plan

    national. C’est le lieu pour nous d’émettre le vœu  que notre modeste travail aiguise la curiosité

    des chercheurs pour l’approfondissement de l’analyse de ce thème sécuritaire dans notre pays en

    vue de son opérationnalisation poussée.

    Au plan professionnel, notre étude est une invite des autorités de la Sûreté Nationale à

    donner une égale importance à la police communautaire autant que celle qui est actuellement

    accordée à la police d’ordre. Cette pr éoccupation nous hante depuis notre séjour au Darfour,

    entre le 07 novembre 2006 et le 11 mai 2009, dans le cadre des opérations de maintien de la paix

    dans cette région du Soudan. En effet, membre successif de la Mission de l’Union Africaine au

    Soudan (AMIS) et de la Mission des Nations Unies et de l’Union Africaine au Darfour, nous

    avons été fascinés par la mise en œuvre de l’approche communautaire avec sa coproduction de lasécurité, l’immersion dans la société… Lentement, le rêve de voir cette approche suffisamment

    internalisée dans notre pays s’est développé et s’est cristallisé. Cette étude est donc une tribune

    supplémentaire pour nous, pour une plaidoirie en vue d’une plus grande intégration de

    l’approche communautaire dans les activités de la Sûreté Nationale. 

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    IV - LA REVUE DE LA LITTERATURE

    Elle est thématique  par souci, autant que possible, d’exhaustivité  des idées sur la

    question au contraire de l’approche par auteur qui nous semble limitative. Au terme de noslectures, nous sommes parvenus au constat selon lequel les préoccupations des auteurs sur la

     police communautaire - en dépit des variances liées, entre autres, à la géographie physique et

    humaine  –  se recoupaient. Ces préoccupations, de manière schématique, tournent autour de la

    description de l’environnement sécuritaire qui précède l’adoption de l’appr oche de police

    communautaire, les origines de ce modèle et ses principes, ses stratégies et modes d’action, ses

    formes et ses acteurs, les obstacles à son implantation et ses limites.

    IV-1-Description de l’environnement sécuritaire pré-police communautaire 

    C’est un environnement marqué par la désuétude du modèle sécuritaire en vigueur,

    généralement la police d’ordre. Il lui est reproché, entre autres, de privilégier la sécurité des

    institutions du pays et de ceux qui les incarnent au détriment de celle des populations ; de se

     borner à appliquer aveuglement les lois et règlements ; de faire exclusivement une formulation

    institutionnelle de la politique sécuritaire ; de ne pas à rendre compte de son efficacité… Cette

    attitude de la police d’ordre la rend très répressive, l’éloigne de la société qu’elle est censéeservir , engendre une augmentation de la criminalité et développe le sentiment d’insécurité. Les

    auteurs que nous avons lus s’accordent sur cette description.

    Décrivant l’environnement pré-police communautaire en France, Caroline Ober

    déclare : « Toutefois, malgré les efforts entrepris par les autorités publiques, le taux de

    croissance de l’offre publique de sécurité ne réussit guère à rattraper celui, bien supérieur, de la

    demande. D’une part, on observa une augmentation quantitative et qualitative de la délinquance

    urbaine et acquisitive. D’autre part, de nouveaux comportements répréhensibles, les incivilités,apparurent au fil des années. Des dégradations en tout genre, des agressions verbales, des

    menaces ou même des violences légères pourrissaient le quotidien d’autrui. Ces « mini

    infractions » n’étant, jusqu’alors réprimées , elles créaient un sentiment d’impunité chez l’auteur

    et une exaspération de la part d e ceux qui en étaient victimes. Aussi, la nécessité de s’adapter à

    un nouveau paysage de l’insécurité s’imposait, le but étant d’apporter une réponse préventive et

    durable, plutôt qu’une réponse à postériori et ponctuelle. »1.

    1 Ober, 2002, p. 8.

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    Dans la même optique, la monographie du ministère américain de la Justice affirme que 

    «Policing strategies that worked in the past are not always effective today. The desired goal, an

    enhanced sense of safety, security, and well-being, has not been achieved. Practitioners agree

    that there is a pressing need for innovation to curb the crises in many communities. Both the

    level and nature of crime in this country and the changing character of American communities

    are causing police to seek more effective methods. Many urban communities are experiencing

     serious problems with illegal drugs, gang violence, murders, muggings, and burglaries.

    Suburban and rural communities have not escaped unscathed. They are also noting increases in

    crime and disorder . »1. 

    IV-2- Origine et principes du modèle de police communautaire 

    La paternité du modèle de la police communautaire est unanimement reconnue au

    Ministre anglais de l’Intérieur, Robert Peel  par la quasi-totalité des documents que nous avons

    lus. C’est en effet en 1829 que ce membre du Gouvernement a rassemblé les neuf principes de

    son approche sécuritaire et les a consignés dans un document baptisé « Metropolitan Police

     Act  ». Le service de la prévention de la criminalité canadien, dans son projet de politique

    ministérielle sur l’approche de police communautaire publié énonce : « Sir Robert Peel

    établissait déjà, en 1829, les principes à la base d’une police réellement communautaire, cette

    approche, connue aussi sous le vocable de « police professionnelle de type communautaire »,a

    connu son essor au cours des quinze dernières années, notamment en Amérique du Nord et dans

     plusieurs pays européens dont la Belgique et l’Angleterre. »2.

    Résumant les idées principales de la police communautaire, Jean-Louis Loubet Del

    Bayle reconnait, en passant, l’auteur de cette approche sécuritaire : « En fait, cette réflexion

    regroupe sous ce terme, d’une manière un peu systématique, un certain nombre d’idées sur les

    rapports de la police avec la société, sur les rapports de la police avec le public, qui avaient été

     plus ou moins mises en avant lors de la création de la police métropolitaine de Londres en 1829

     par Robert Peel.».3 

    A l’origine, ce dernier a défini neuf principes. Chaque pays, dans l’opérationnalisation

    de cette doctrine, met l’accent sur certains principes au détriment des autres. Toutefois, au fil du

    temps, une constance a semblé se dégager autour de quatre pour caractériser la police

    1

     Bureau of Justice Assistance, 1994, p. 3.2 Service de la Prévention de la Criminalité en coll. avec le CIPC, 2000, p. 5.  

    3 Loubet Del Bayle, 2008, p. 102.

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    communautaire : le maillage territorial, le partenariat, la prévention et l’évaluation de l’efficacité

    de la police

    A ce sujet, le rapport de la 14e session plénière du Conseil de l’Europe recense « … une

    nouvelle lecture du territoire, la recherche d'un rapprochement avec les habitants, uneconception plus proactive des interventions policières, et la valorisation d'une approche

     partenariale. »1.

    Pour leur part, Maurice Chalom et autres reconnaissent que dans le cadre de la police

    communautaire, « … les services de police s’engagent dans des réformes qui convergent vers un

    mandat de nature préventive et proactive dans le but d’agir efficacement sur la criminalité et de

    cogérer la sécurité. »2.

    La politique canadienne en matière de police communautaire retient quatre principes de

     base à savoir : « Le rapprochement avec les citoyens … Le partenariat avec d’autres

    institutions… L’approche de résolution de problèmes… Le renforcement des mesures

     préventives. »3.

    IV-3- Stratégies et modes d’action de la police communautaire 

    Cette rubrique brille par une confusion entre les principes, les stratégies et les modesd’action. Caroline Ober, analysant la réforme française de police de proximité, distingue sept

    « … nouveaux modes de travail … »4 Par opposition implicite aux anciens qui sont au nombre de

    cinq. Parmi les anciens modes, elle cite la territorialisation, le contact permanent avec la

     population, la polyvalence de la fonction du policier de proximité, la responsabilisation du

     policier de proximité afin de valoriser sa fonction et un service rendu de qualité. Dans le cadre

    des nouveaux modes de travail, elle évoque le recueil de la demande de sécurité, la gestion par

    objectifs, la résolution du problème, le travail en équipe, la communication interne et externe,

    l’évaluation de la police de proximité et l’esprit de service public. 

    Le rapport 1999-2006 de l’Association Internationale des Chefs de Comité de Police

    Communautaire5 a recensé quatre stratégies :

      La résolution des problèmes et la prévention ;

    1 Conseil d’Europe, 2007, p. 13. 

    2 Chalom et al, 2001, p. 10.

    3

     Ministère de la Sécurité Publique, 2000, pp. 19 – 23.4 Ober, 2002, p. 5.

    5 Association Internationale des Chefs de Comité de Police Communautaire, 2007, pp. 10 –  28. 

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      L’engagement de la communauté ;

      Le partenariat ;

      Le développement et le changement organisationnel.

    Par contre, Jocelyne Lavoie et Jean Panet Raymond1  retiennent trois stratégies ellesmêmes subdivisées en une kyrielle de modes d’action qu’il n’est pas nécessaire d’évoquer ici.

    Ces stratégies sont :

      La sensibilisation ;

      La mobilisation ;

      Les moyens de pression.

    IV-4-Formes et acteurs de la police communautaire 

    Les formes de police communautaire sont variées. On distingue, selon le choix des

     pays, la police communautaire, la police de voisinage, la police de quartier, la police de

     proximité… Le document de politique ministérielle du Canada, intitulé Vers une Police plus

    Communautaire est clair sur la question : « … il n’existe pas de modèle universel de police

    communautaire, mais plutôt une variété de modèles répondant aux spécificités et aux besoins de

    chaque pays, voire de chaque ville, mais qui renvoient tous au concept de community policing,

    tel qu’il s’est développé principalement aux États-Unis et en Grande-Bretagne. »2.

    Le Conseil de L’Europe abonde dans le même sens  : «… Police de quartier, police

    communautaire, police de proximité, police de base, police de contact, etc. Il n’existe donc pas

    de modèle homogène. »3. En dépit de l’unanimité qui se dégage autour de la multiplicité des

    formes de police communautaire, il nous semble plus pertinent de procéder à une catégorisation

    à base du maillage territorial, le degré de participation des bénéficiaires à la formulation des

    solutions sécuritaires, l’organisation -mère de la police et la nature des méthodes d’intervention. 

      Sur la base de l’organisation-mère, on distinguera la police d’Etat et la police

    municipale ;

      Le degré de participation des bénéficiaires à la formulation des solutions sécuritaires

    discriminera la police de proximité, si la formulation est exclusivement institutionnelle ;

    et communautaire si elle est inclusive ;

    1

     Lavoie et Panet Raymond, 2011, pp. 161 – 229.2 Ministère de la Sécurité Publique, 2000, p. 11.

    3 Conseil d’Europe, 2007, pp. 19 – 20.

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      13

      Le maillage territorial est fonction de la nature plus ou moins affinée de la zone

    d’intervention de base, on peut inclure ici : la police de quartier, d’ilotage, de voisinage,

    de contact… 

      La méthode d’intervention peut être une démonstration de force physique et même létale,

    on parle de la police répressive ou par contre persuasive, volontaire et non létale, c’est la

     police préventive.

    Les acteurs de la police communautaire sont à l’image de ses formes c’est-à-dire variés.

    La loi anglaise de 1998, adoptée pour renforcer la police communautaire, distingue comme

    acteurs, la police, les institutions publiques, les organismes du milieu et la population : « Cette

    loi prévoit diverses dispositions destinées à faciliter la recherche des solutions permanentes aux

     phénomènes de criminalité et de désordre, entre autres en conférant une base légale àl’établissement de partenariats entre la police, les institutions publiques et les organismes du

    milieu… »1.

    Maurice Chalom et autres ne sont pas loin de la même énumération mais y procèdent

    avec détails. Ils comptent la police, les élus locaux, les associations des citoyens, les gens

    d’affaires, les syndicats, les populations, les planificateurs urbains, les services publics et

     privés : « … le partenariat avec les collectivités au sens large (élus locaux, associations de

    citoyens, gens d’affaires, syndicats, planificateurs urbains) et l’ensemble des institutions ou

     services publics et privés. »2. Au total, les acteurs de la police communautaire sont d’une part

    étatiques ou municipaux ; d’autre part, non étatiques. 

    IV-5- Les limites de la police communautaire 

    La police communautaire n’est pas une panacée contre la criminalité. Que ce soit au

    canada, aux Etats-Unis, certaines difficultés à l’implantation de cette approche sont constantes. Il

    en est ainsi:

      Des résistances intra-policières au changement ;

      De l’appropriation approximative du concept de police communautaire ;

      De l’impatience à parvenir à la réalisation des objectifs de la police communautaire ;

      De l’insuffisance des ressources humaines et matérielles….. 

    1Ministère de la Sécurité Publique, 2000, p. 14.

    2 Chalom et al, 2001, p. ii.

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    Le document de politique ministérielle du Canada scande à ce sujet : « De plus, les

    inévitables résistances aux changements organisationnels qu’implique l’implantation de cette

    approche ont constitué un obstacle important dans plusieurs corps policiers. »1.

    Jean Paul Brodeur renchérit « Les approches dites de proximité sont donc loin decorrespondre à la description angélique qui en a été faite lors de leurs lancements. A l’extrême,

    elles semblent même pouvoir être potentiellement dangereuses pour les libertés individuelles et

    collectives. »2.

    A ces limites, s’ajoutent les difficultés liées à l’hétérogénéité du cadre de travail de la

     police communautaire que W. Skogan résume en ces termes « Une action policière qui s’appuie

     sur la concertation est difficile là où la population est fragmentée en races, classes et modes de

    vie différents. Si, au lieu de rechercher des intérêts dans cette diversité, la police travaille

     principalement avec les individus de son choix, la police ne sera plus neutre. Il est aisé pour les

     policiers de centrer la police communautaire sur l’assistance aux personnes avec lesquelles ils

    ont des affinités et avec celles qui partagent leurs vues. Les priorités locales qu’ils signalent

    alors seront celles d’une partie de la communauté et non de la communauté tout entière»3.

    V - DELIMITATION DU SUJET

    Au Cameroun, la police, entendue dans son sens « … de la réglementation régissant

    l’organisation de la société ; »4 ou « celui de l’activité de surveillance et de répression exercée

     pour l’application des règlements ; »5 pour parler comme Paul Pondi, est une activité confiée à

     plusieurs organes de l’Etat ou à divers corps de métier. On y retr ouve la douane, les eaux et forêt,

    les impôts, la gendarmerie, la sûreté nationale… Aussi, convient-il de délimiter notre sujet dans

    l’espace, le temps, la nature du corps de métier et l’objet. 

    Délimitation du sujet par l’espace. Géographiquement, notre étude a pour cadre le Cameroun,

     pays d’Afrique centrale ayant pour capitale politique Yaoundé, peuplé de vingt millions

    d’habitants et de deux cent quarante ethnies. Subdivisé en dix régions, cinquante huit

    départements, trois cent trente trois arrondissements. Les langues officielles sont le français et

    1 Ministère de la Sécurité Publique, 2000, p. 25.

    2 Brodeur, 2003, p. 257.

    3

     Skogan, 2003, p. 334.4 Pondi, 1988, p. 15.

    5 Id. p. 15.

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      15

    l’anglais, l’économie est basée sur le libéralisme communautaire, le   régime politique est

     présidentialiste.

    Délimitation du sujet par le temps. Comme nous l’avons dit plus haut, la police moderne au

    Cameroun se situe en 1925, date de création du tout premier commissariat de police. Toutefois, ilest très facile d’affirmer que le Cameroun n’étant pas à ce moment indépendant, ne pouvait pas

    décider de l’orientation de sa police. Aussi allons-nous nous intéresser principalement à la police

    actuelle du Cameroun et, d’une manière marginale ; remonter jusqu’à l’indépendance, du moins

    du Cameroun oriental.

    Délimitation du sujet par la nature du corps de métier. Plusieurs corps de métier sont chargés

    de la police au Cameroun. La Gendarmerie Nationale ou police à statut militaire et la Sûreté

     Nationale ou la police à statut civil s’occupent de la police générale. A coté de ces deux

    généralistes, existent des administrations investies des pouvoirs spéciaux de police à l’instar des

    Eaux et Forêts, de l’Agriculture, de la Douane…Il y a même la police municipale en cours

    d’organisation. Notre étude se limitera à la Sûreté Nationale.

    Délimitation du sujet par l’approche sécuritaire. Deux approches dominent le travail de la

     police, tout au moins la police d’Etat : la police d’ordre et la police communautaire. C’est la

    deuxième qui constitue notre sujet d’étude. 

    VI - LA PROBLEMATIQUE

    La doctrine de la police communautaire a certes été mise en place au 19ème siècle, plus

     précisément en 1829, mais depuis les années 1970, elle a été vulgarisée universellement à la

    faveur des insuffisances de la police d’ordre. Le Conseil de L’Europe affirme à propos que « …

    le constat peut cependant être dressé d’une saisie de l’ensemble des systèmes policiers

    occidentaux par la problématique de la proximité. Aux Etats-Unis, les premiers projets de policecommunautaire émergent dans les années 1980… »1.

    La question centrale de notre étude est donc de savoir si le système policier

    camerounais en général et la Sûreté Nationale en particulier ont été affectés par la propagation

    universelle de la police communautaire. Autrement dit, quelle est la place de la doctrine de la

    police communautaire dans les activités de la Sûreté Nationale au Cameroun?

    1 Conseil de l’Europe, 2007, pp. 20 – 21.

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    Cette question principale appelle une autre qui, bien que subsidiaire, semble être un

     préalable à la première: l’internalisation de la doctrine de la police communautaire est-elle

    nécessaire au Cameroun en général et singulièrement à la Sûreté Nationale ? En d’autres termes,

    est-il opportun d’envisager l’intégration de la doctrine de police communautaire dans les

     pratiques policières au Cameroun ?

    VII - LES HYPOTHESES

    De notre question centrale résulte l’hypothèse principale suivante :

      L’internalisation de la police communautaire à la Sûreté Nationale est mitigée. En clair,

    la doctrine de la police communautaire occupe une place marginale dans les activités de

    la Sûreté Nationale.

    Dans le même ordre d’idée, la question subsidiaire induit l’hypothèse ci-après :

      Le contexte sociopolitique et sécuritaire ainsi que les avantages à en tirer rendent

    l'internalisation de la police communautaire opportune au Cameroun. Autrement dit, la

    doctrine de la police communautaire a un contexte de vulgarisation propice au Cameroun

    en général et à la Sûreté Nationale en particulier.

    VIII - CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIE

    En ce qui concerne le cadre théorique, Jean Marie Berthelot1 a, dans sa typologie des

    schèmes d’intelligibilité, identifié les schèmes :

      Causal

      Fonctionnel

     

    Structural

      Herméneutique

      Actanciel

      Dialectique.

     Notre étude s’inscrit dans une perspective à la fois structuraliste et fonctionnaliste.

    Structuralisme de Claude Lévi-Strauss, parce que nous allons examiner la structure de la Sûreté

     Nationale pour vérifier si elle favorise l’intégration de la doctrine de police communautaire.

    1 Berthelot, 1990, pp. 62 – 85.

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    C’est avec le même objectif que nous allons passer en revue le fonctionnement actuel de la

    Sûreté Nationale, d’où le fonctionnalisme promu entre autres, par Bronislaw Malinowski.

    Quant à la méthodologie, ainsi que nous l’avons relevé plus haut, la conception de la doctrine de

    la police communautaire remonte à 1829 en Angleterre. Depuis cette date, elle a fait le tour du

    monde avec des fortunes diverses selon les pays. En conséquence, les méthodes qui nous

    semblent idoines pour étudier la place de cette doctrine dans les activités de la Sûreté Nationale

    sont historiques et comparatives.

    En effet, comme le soutient Hervé Couteau-Bégarie, la méthode historique, bien que

    fondamentalement inductive, est avant tout descriptive : « … la méthode historique… Au premier

    degré,…  se borne à être descriptive, elle fournit des exemples, des modèles… La méthode

    historique est fondamentalement inductive : les conclusions générales doivent se dégager des

     faits eux-mêmes. »1.

    En d’autres termes, au-delà de la doctrine de la police communautaire elle-même, les

    activités de la Sûreté Nationale seront, en filigrane, examinées à l’aune de son expérimentation

    ailleurs avant que les conclusions sur sa place et ses retombées positives au Cameroun ne soient

    tirées.

    La collecte des données sera assurée par des instruments divers à l’instar de la

    consultation des documents, l’observation directe, les entretiens. 

    IX - PLAN

     Notre étude se déploie en deux parties subdivisées chacune en deux chapitres. La première

     partie est intitulée Paradoxe entre un contexte indiqué et une internalisation mitigée de la police

    communautaire. Elle se propose, dans son premier chapitre baptisé une internalisation mitigée de

    la police communautaire, de démontrer, dans la configuration actuelle de la Sûreté Nationale,

    que la doctrine de police communautaire y occupe une place marginale en dépit, et c’est le

    second chapitre, d’un contexte indiqué. 

    La deuxième partie porte le titre : les avantages et le processus d’internalisation de la police

    communautaire. Dans son premier chapitre, les avantages de la police communautaire, cette

     partie montre le bénéfice que la Sûreté Nationale tirerait d’une intégration accrue de l’approche 

    de police communautaire. Le dernier chapitre, le processus d’internalisation de la police

    communautaire, balise la voie à suivre pour adopter cette approche réformiste.

    1 Couteau-Bégarie, 2003, pp. 24-25. 

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    PREMIERE PARTIE :

    PARADOXE ENTRE UN CONTEXTEINDIQUE ET UNE

    INTERNALISATION MITIGEE DE

    LA POLICE COMMUNAUTAIRE 

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      19

    Cette partie se propose, par la vérification de nos hypothèses principale et secondaire, d’une

     part, d’établir le niveau d’appropriation de la doctrine de police communautaire par la Sûreté

     Nationale ; d’autre part, d’évaluer les possibilités de succès qu’offre l’environnement

    camerounais à la mise en œuvre éventuelle de la police communautaire.

    Cette partie est subdivisée en deux chapitres respectivement intitulés :

     

    Une internalisation mitigée de la police communautaire  Un contexte indiqué pour la police communautaire.

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      20

    En s’inspirant de la doctrine de police communautaire de Robert Peel et de son

    expérimentation dans plusieurs pays, on se rend à l’évidence que le caractère communautaire de

    la police peut se lire à travers l’existence d’une orientation claire de la politique sécuritaire (la

    doctrine), une organisation appropriée des services (maillage territorial affiné), la nature des

    acteurs impliqués (étatiques et non-étatiques), les stratégies (de prévention) et les modes d’action 

    (participatifs). Ces paramètres seront confrontés à la Sûreté Nationale, les deux premiers

    constituant la première section et les trois derniers la deuxième, pour apprécier son niveau

    d’imprégnation de la police communautaire.

    SECTION I : DOCTRINE ET ORGANISATION

    Les premiers paramètres que nous allons soumettre à l’épreuve de la structure et des

    fonctions de la Sûreté Nationale sont la doctrine d’emploi et l’organisation de ce corps de métier

    avec pour objectif de vérifier son degré communautaire et sa fidélité aux principes de Robert

    Peel.

    PARAGRAPHE 1 :Une doctrine de police communautaire quasi-inexistante

     

    Le ton avait été donné par l’initiateur de l’approche communautaire de la police, Ro bert

    Peel. Pour marquer l’entrée en vigueur de la nouvelle doctrine, l’intéressé n’avait pas trouvé

    mieux qu’un « acte métropolitain »1. Depuis cette date, la pratique qui consiste à prendre un acte

     juridique ou une orientation politique à cette fin s’est généralisée au point de devenir un

    indicateur de l’adoption de l’approche communautaire à la police. 

    Au Canada, c’est par une orientation politique intitulée « Politique Ministérielle : Vers

    une police plus communautaire »2  publié en décembre 2000 que le Ministère de la Sécurité

    Publique a jeté les nouvelles bases de « … la manière de dispenser les services de police au

    Québec »3 appelée police communautaire. 

    1

     Service de la Prévention de la Criminalité en coll. Avec le CIPC, 2000, p. 4.2 Ministère de la Sécurité Publique, 2000, p. ii.

    3 Id. p.5.

    CHAPITRE PREMIER : UNE INTERNALISATION MITIGEEDE LA POLICE COMMUNAUTAIRE 

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      21

    En Belgique, c’est la circulaire CP1 du SPF Intérieur du 27 mai 2003 concernant la

    définition de l’interprétation du community policing  applicable au service de police intégré1 que

    la réforme de la police de proximité s’est mise en place. 

    En France, la réflexion sur la police de proximité, bien qu’amorcée depuis 1998 voire1995, a été couronnée par la loi d’orientation du 29 août 2002 qui consacre la réforme sur la

     police de proximité2.

    En revanche, au Cameroun, aucun texte spécifiquement dédié à la police

    communautaire ne figure dans la réglementation et la législation, notamment relatives à

    l’encadrement juridique des activités de la police. Dans ce chapitre, trois textes émergent : la loi

    no  la loi no 90/54 du 19 décembre 1990 relative au maintien de l’ordre, la loi no 90-47 du 19

    décembre 1990 relative à l’Etat d’Urgence et le décret no 2012/540 du 19 novembre 2012

     portant organisation de la Délégation Générale à la Sûreté Nationale.

      La loi no 90/54 du 19 décembre 1990 relative au maintien de l’ordre. Dans la forme, cette

    loi qui abroge celle no 59-33 du 27 mai 1959 sur le maintien de l’ordre public, est

    constituée de huit articles étalés sur quatre chapitres.

    Dans le fonds, elle donne une idée de l’orientation politique de la sécurité au Cameroun,

    notamment à la Sûreté Nationale : la répression. Plus précisément, elle accorde aux autorités

    administratives, des pouvoirs, entre autres, de réquisition des forces, des personnes et des biens ;

    de restriction de la liberté ; réglemente l’usage des armes au cours des opérations de maintien de

    l’ordre et définit le cadre juridique de punition des infractions à ses dispositions. L’article 6

    stipule : « Les infractions aux dispositions de l’article 3 alinéa1et 4 ci-dessus sont punies des

     peines prévues par l’art icle 275 du code pénal . ».

    Cette loi, en dépit de son orientation répressive, n’est applicable qu’en temps de paix

    ou, pour emprunter sa propre terminologie de l’article 1, « en temps normal  ». C’est dire qu’en

    temps de crise, l’orientation répressive est plus accentuée et ce ne sont pas les lois en la matière

    qui nous démentiraient.

      La loi no 90-47 du 19 décembre 1990 relative à l’Etat d’Urgence par exemple, donne des

     pouvoirs étendus tant aux autorités de police qu’aux forces de police, renforçant de ce

    fait, le caractère répressif de l’orientation sécuritaire camerounaise. A titre d’illustration,

    1 Conseil d’Europe, 2007, p. 28. 

    2 Ober, 2002, p. 7.

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    concurrence rude et une imagination fertile des approches et modes d’action capables de

    conduire aux meilleurs résultats possibles. C’est ici qu’intervient l’approche communautaire

     pour créer une adéquation entre les besoins sécuritaires des populations et les solutions apportées

     par les services de sécurité.

    En France, Caroline Ober 1 distingue une organisation à cinq strates :

      La direction centrale de la sécurité publique fixe au niveau national, les orientations

    générales ; 

      Les directions départementales assurent l’organisation et le contrôle de la mise en œuvre

    de la police de proximité ; 

      Les districts qui couvrent la zone urbaine et périurbaine et où sont installés les

    commissariats centraux, jouent le rôle de coordination ; 

    Le secteur est une entité territoriale chargée de la préparation, du commandement et de

    l’évaluation de la mission de police de proximité ;

      Le quartier est la ligne d’exécution des attributions de la police de proximité.

    En dépit de cette multiplicité organisationnelle, les analystes s’accordent sur deux

    exigences qui caractérisent le cadre d’épanouissement de la police communautaire : ladécentralisation et le rôle prépondérant de l’unité de base du dispositif. Cette dernière est la

    véritable cheville ouvrière de la doctrine de police communautaire. C’est en effet cette unité de

     base qui identifie les composantes sociologiques de sa zone de compétence, ses acteurs, les

     besoins sécuritaires, les solutions concertées, assure le contact régulier … Bref, elle assure

    l’immersion sociale de la police. Quelle que soit la forme organisationnelle adoptée, celle-ci doit

    mettre un accent particulier sur la place et le rôle de cette structure de base. Son appellation

    importe peu, ce sont les responsabilités, le degré d’initiative, le professionnalisme… qu’on lui

    reconnait qui facilitent l’impact de la police communautaire. 

    A titre d’illustration, au Japon, cette unité de base est dénommée Koban. Maurice

    Chalom et autres, évoquant cette structure japonaise, estime qu’il s’agit d’un « Système de police

     japonais qui, composé de mini-postes de police communautaires et orienté vers la résolution des

     problèmes, allie le caractère indispensable de l’interaction étroite entre les citoyens et les

     policiers, vus avant tout comme des membres à part entière de la collectivité. »2. Dans le même

    1 Ober, 2002, p. 14.

    2 Chalom et al, 2001, p. i.

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    sillage, Bessel, analysant l’organisation en Allemagne de l’Est, constate que «  Le pays entier fut

    divisé en mini-districts d’à peu près 3500-4000 habitants, ce qui donnait, pour toute la RDA,

    environ 4700 ABV. [Auxiliaires Volontaires de la police] »1.

    L’importance de l’unité de base est la confirmation que la structuration du dispositif dela police communautaire est davantage fonctionnelle qu’organique. Toutefois, elle a besoin

    d’être adossée, et c’est la deuxième exigence, sur la décentralisation. Ce système a plusieurs

    avantages dont a besoin la doctrine de police communautaire pour mieux s’exprimer  : souplesse,

    une plus grande autonomie, la multiplicité des expertises. Voici ce qu’en pensent Maurice

    Chalom et autres : « Dans les pays où la fonction policière est décentralisée … plusieurs types de

    mécanismes d’échange et de concertation peuvent être envisagés. »2.

    En revanche, la centralisation ou jacobinisme a pour principe de base, l’unicité de

    l’autorité et réduit les organes déconcentrés en relais d’exécution sans grande marge de

    manœuvre. Maurice Chalom et autres sont certains que «  Dans les pays où la fonction policière

    est centralisée à l’échelle nationale, il est plus difficile d’établir des mécanismes de liaison et de

    concertation entre la police et les collectivités locales. »3.

    Au total, bien que la nécessité d’adapter la police à son milieu (géographique, humain,

    culturel, sécuritaire…) explique la  disparité organisationnelle ; il convient de souligner qu’un

    cadre décentralisé qui affine autant que possible et valorise son unité de base, est propice à

    l’épanouissement de la police communautaire. 

    En examinant l’organisation de la Sûreté Nationale mise en place par le décret

     présidentiel no 2012/540 du 19 novembre 2012 portant organisation de la Délégation Générale à

    la Sûreté Nationale, on aboutit à trois constats : le pouvoir est très administratif et centralisé ; le

    métier de policier est exercé par une technocratie qui étend ses compétences à tous les échelons

    géographiques pour appliquer, de manière uniforme, des stratégies formulées au niveau central ;l’existence des unités chargées de traduire en acte l’orientation répressive de la Sûreté Nationale.

    Le premier constat est clairement énoncé dans l’article 2 « La Sûreté Nationale est un

    corps de commandement et d’administration placé sous l’autorité du Président de la République

    qui en est le chef suprême. ». L’article 5(2) démontre avec plus de précision le jacobinisme de la

    Sûreté Nationale : « Elle exécute les missions qui lui sont confiées par les autorités

    1

     Bessel, 1999, p. 228.2 Chalom et al, 2001, p. 41.

    3 Id. p. 40.

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     gouvernementales dans le cadre de leurs compétences respectives, en se conformant aux

    directives du Président de la République. La Sûreté Nationale agit sur l’initiative de son Chef de

    Corps ou de ses différents responsables, dans le strict respect de leurs attributions . ».

    Le deuxième constat se manifeste dans la nature du personnel et la territorialisation desstructures notamment la direction de la sécurité publique. Celle-ci, au-delà des services centraux

    qui en dépendent, est représentée au niveau régional par la division de la sécurité publique, le

    groupement de la voie publique ; les commissariats centraux sont placés dans les grandes

    agglomérations, les commissariats de sécurité publique sont généralement situés dans les

    arrondissements ainsi que les postes de sécurité publique.

    Toutefois, depuis quelques années, on observe, dans certaines zones des villes de

    Douala, de Yaoundé… des containers ou autres locaux où exercent un nombre plus ou moins

    important de fonctionnaires de la Sûreté Nationale sans que ces structures relèvent forcément de

    l’organigramme de la Délégation Générale à la Sûreté Nationale. Ces postes de police qu’on

    retrouve par exemple à Bata-nlongkak, au marché de Madagascar et à la poste centrale à

    Yaoundé, participent de la volonté de la hiérarchie de la Sûreté Nationale de rapprocher la police

    de la population et sont même appelés police de proximité.

    Cependant, ces postes de police qui rappellent les koban japonais, les ABV Est-

    allemands et les ilots français en matière de police communautaire, focalisent leur action dans le

    domaine artificiel de l’Etat pour y relayer l’orientation répressive de la sécurité au Cameroun.

    Même la police administrative qui y est menée, qui se réclame préventive, prévient, non la cause

    de l’insécurité mais les manifestations. Mieux, elle n’est pas préventive mais dissuasive. La

    solution qui en résulte ne résout pas durablement le problème puisque la cause reste intacte, la

    solution n’est pas concertée... On ne saurait donc parler de police de proximité ici encore moins

    communautaire.

    Le troisième constat qui a trait aux unités répressives se manifeste par l’existence du

    commandement central des groupements mobiles d’intervention au niveau central et du

    groupement mobile d’intervention à la région. Ces unités constituent le bras séculier de l’Etat

     pour faire régner l’ordre en temps de paix ou de crise. L’article 16 (1) qui définit les attributions

    de la structure centrale précise, en temps normal, qu’elle est chargée de « renforcer l’action des

    autres forces et unités territoriales de police pour le maintien de l’ordre préventif, la protection

    des personnes et des biens… ».

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    En somme, malgré une territorialisation poussée qui reste à affiner davantage,

    l’organisation de la Sûreté Nationale est  beaucoup plus jacobine et est surtout au service du

     paradigme répressif. Elle s’identifie plus à la police d’ordre qu’à la police communautaire. Qu’en

    est-il des acteurs, des stratégies et des modes d’action ?

    SECTION II : ACTEURS, STRATEGIES ET MODES D’ACTIONDE LA SÛRETÉ NATIONALE

    PARAGPHE 1 : Des acteurs étatiques 

    La nature des acteurs qui assurent la délivrance des services de sécurité est un indiceimportant pour en déterminer l’approche. L’approche de police communautaire s’inscrit dans la

    gouvernance sécuritaire c’est-à-dire, intègre des acteurs non-étatiques et étatiques divers.

    Décrivant le déploiement de la police communautaire le SEESAC distingue deux types

    d’acteurs. D’un coté les acteurs de l’organisation-mère de la police –  l’Etat pour notre cas –  « a)

     from the side of the police CBP requires an organisational strategy that ensures that everyone in

    the police organisation translates the philosophy into practice. »1. De l’autre coté, les acteurs

    non-étatiques regroupant des personnes morales et physiques «b) from the side of the

    community…  Within different communities there will be different structures (organisations,

    associations, groups, both statutory and voluntary) that are already well established and that

    can be used (tapped into) to harness community safety and partnership. »2. 

    La publication du Bureau d’Assistance Judiciaire (BJA) du Département Américain de

    la Justice fait la même distinction tout en allongeant la liste des acteurs non-étatiques : « Local

    government officials, social agencies, schools, church groups, business people — all those who

    work and live in the community and have a stake in its development. »3. 

    Au-delà de la typologie des acteurs notamment les non-étatiques, il convient de relever

    l’importance de leur rôle qui est loin d’être figuratif. Ils participent à la formulation des

    stratégies et solutions aux problèmes de leur sécurité ou tout au moins sont très proches de ceux

    qui en ont la charge. La publication du BJA sus-évoquée affirme que ces acteurs non-étatiques

    1

     SEESAC, 2003, p. 4.2 SEESAC, 2003, p. 4.

    3 BJA, 1994, P. 13.

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     partagent la «responsibility for finding workable solutions to problems that detract from the

     safety and security of the community.»1. 

    Au Cameroun par contre, les acteurs étatiques ou mieux, les professionnels de la Sûreté

     Nationale ont le monopole de l’action sécuritaire de ce Corps de métier. Ils exercent leurs prérogatives en technocrates et de manière exclusive en dépit des appels sporadiques à la

    collaboration de la po pulation. Pour mieux comprendre l’ampleur du problème, il est à relever

    d’une part que les effectifs de la Délégation Générale à la Sûreté Nationale sont essentiellement

    constitués des professionnels tant au niveau des services centraux que des déconcentrés ; d’autre

     part, selon les témoignages de plusieurs commissaires de sécurité publique dont ceux des 7e, 8e et

    12e  arrondissements de Douala, aucun cadre formel et permanent de concertation avec les

     populations n’existe pour examiner régulièrement les problèmes de sécurité locaux et y apporterdes solutions consensuelles.

    Tout au plus, nous a-t-on dit, le Comité de Coordination, créé par l’instruction

     présidentielle no 22/PRF du 22 novembre 1969 portant organisation des Comités de

    Coordination auprès des chefs des circonscriptions administratives, se réunit périodiquement

     pour discuter des questions de sécurité. Cependant, en examinant sa composition prévue dans

    l’instruction présidentielle no 06/CAB/PR du 21 mars 1978 modifiant et complétant celle ci-

    dessus citée, force est de reconnaitre qu’aucune personne de la société civile en est membre.  A

    l’échelon d’un arrondissement par exemple, voici la composition que prévoit l’alinéa 43 du titre

    IV :

      « Le Sous-préfet ou Chef de District, Président

       Le Commandant militaire local

       Le Commandant local de Gendarmerie

       Le Représentant local de la Sûreté Nationale. ».

    Dans la même optique, au niveau d’un arrondissement par exemple, le Comité Local de

    Sécurité mis en place par l’instruction présidentielle no 005/CAB/PR du 24 Aout 1987 portant

    sur les veilles en vue de la sécurité de la Nation a, dans son Etat-major, une composition

    similaire que celle susvisée. On peut en effet lire : « Un Etat-major comprenant autour de

    l’Autorité Administrative compétente, les responsables … des services de défense ou de sécurité

    ou leurs représentants. ».

    1 Id. 1994, p. 13.

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    Il est donc loisible de conclure que les acteurs de la sécurité à la Sûreté Nationale sont

     purement étatiques et dispensent leurs services unilatéralement aux populations. Cette vision

    n’est pas celle de la doctrine de la police communautaire. Le statut étatique des acteurs n’a-t-il

     pas une incidence sur les stratégies utilisées pour dispenser la sécurité par la Sûreté Nationale ?

    PARAGRAPHE 2 : Des stratégies réactives 

    Comment répondre efficacement aux défis sans cesse croissants posés par l’insécurité ?

    A cette question, la doctrine de police communautaire apporte une réponse préventive.

    Autrement dit, il faut analyser la criminalité afin d’en déterminer les causes et les résoudre

    durablement pour réduire l’insécurité. On parle de stratégie de prévention pour désigner

    l’ensemble des actions contre la délinquance et la violence orientées vers la résolution de leurs

    sources.

    Maurice Chalom et autres affirment à ce propos que « Pour élaborer des solutions

    durables qui vont au-delà des réponses traditionnelles, il faut… promouvoir le recours aux

     stratégies de prévention de la criminalité qui permettent de réduire la délinquance et la violence

    et d’accroitre le sentiment de sécurité.»1.

    C’est ainsi que les communautaristes ont développé diverses stratégies, entre autres :

    l’approche  de la police d’expertise communément appelée « problem solving ».  Cette

    méthode fonctionne comme une intervention médicale. Elle ne considère qu’il ya problème que

    lorsqu’au moins un incident sécuritaire de même nature se produit au moins deux à trois fois.

    Dès lors, cette approche s’en saisit pour procéder au diagnostic, élaborer les solutions

    généralement alternatives aux procédures pénales de concert avec la communauté et les

    administrer graduellement en fonction de leur efficacité jusqu’à endiguer le mal.

    A titre d’exemple, des femmes qui, dans une zone donnée, se font régulièrement violer

    au cours de la recherche du bois de chauffe, la police d’ordre attendra que le cas lui soit signalé

    et se contentera d’aller faire les constatations d’usage, d’amener  la victime à l’hôpital et d’ouv