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Les recherches en partenariat - septembre 2011 LA PROMOTION AU STATUT DE CADRE DES PROFESSIONS INTERMÉDIAIRES Recherche en partenariat Céreq/Apec menée par Jean-Paul Cadet et Martine Möbus ANALYSE QUANTITATIVE ENQUÊTES EN ENTREPRISE

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Recherche en partenariat Céreq/Apec menée par Jean-Paul Cadet et Martine Möbus

A NA LY SE QUA NT I TAT I V EENQUÊT ES EN ENT REP RI SE

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Cet ouvrage a été créé à l’initiative de l’Apec, Association pour l’emploi des Cadres, régie par la loi du 1er juillet 1901 et publiésous sa direction et en son nom. Il s’agit d’une œuvre collective, l’Apec en a la qualité d’auteur.

L’Apec a été créée en 1966 et est administrée par les partenaires sociaux (MEDEF, CFDT CADRES, CFE-CGC, UCI-FO, UGICA-CFTC,UGICT-CGT).

Toute reproduction totale ou partielle par quelque procédé que ce soit, sans l’autorisation expresse et conjointe de l’Apec, eststrictement interdite et constituerait une contrefaçon (article L122-4 et L335-2 du code de la Propriété intellectuelle).

La promotion au statut de cadre des professions intermédiairesRecherche en partenariat Céreq / Apec.Équipe de recherche Céreq : Jean-Paul Cadet, Martine MöbusÉquipe Apec de suivi des recherches en partenariat (Pôle Recherche et Développement - Département Études et Recherche) :Hélène Alexandre, Caroline Legrand, Gaël Bouron, Raymond Pronier.

Septembre 2011

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SOMMAIRE

PRÉSENTATION GÉNÉRALE n

PRÉSENTATION DU CÉREQ n

SYNTHÈSE DES PRINCIPAUX RÉSULTATS n

ANALYSE QUANTITATIVE n

Introduction 9

Les données sur les cadres d’entreprise 10

L’évolution de l’accès promotionnel à la catégorie cadre 15

Les traits saillants de l’évolution de l’accès promotionnel 16

Les caractéristiques de l’accès promotionnel à la catégorie cadre 21

L’effet sectoriel sur l’accès promotionnel à la catégorie cadre 26

Hiérarchie intersectorielle de l’accès promotionnel 26

Modèles des pratiques de cadrage 32

Conclusion du cadrage statistique 39

LES ENQUÊTES EN ENTREPRISE n

Introduction 41

Comment s’effectue le passage au statut de cadre en entreprise ? 42

Une ascension hiérarchique au sein d’une entreprise

Une mobilité interne vers une fonction de « cadre expert »

Une « confirmation professionnelle » après une période probatoire

Une gratification

Une requalification fonctionnelle

Une mobilité externe, assortie ou non d’une formation

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À quoi tiennent les passages au statut de cadre ? 54

Pour les entreprises, la promotion cadre reste souvent un outil de gestion utile 54

Pour les salariés, la promotion cadre reste souvent un projet attractif 67

Quels sont les critères et les conditions des passages au statut de cadre ? 63

Le poids prépondérant des critères de « compétence » et d’implication 63

L’intervention du supérieur hiérarchique 66

Le volontariat et l’investissement du salarié comme conditions majeures 68

Le rôle relatif des diplômes et de la formation 70

CONCLUSION GÉNÉRALE n

ANNEXES n

Annexe 1 : Tables de correspondance 79

Annexe 2 : Présentation du matériau des enquêtes en entreprise 80

BIBLIOGRAPHIE n

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PRÉSENTATION GÉNÉRALE

En 2007, le département Études et Recherche de l’Apec a lancé un premier appel à projets auprès des laboratoireset centres de recherche. Cette démarche désormais renouvelée chaque année vise à renforcer les liens avec les milieuxde la recherche en développant des partenariats sur des thématiques intéressant l’Apec, les partenaires sociaux etles clients de l’Apec.Chaque recherche porte sur des sujets différents et l’apport de l’Apec varie selon les projets : apport financier pouroptimiser des travaux en cours, appui technique pour des enquêtes sur Internet, …L’objectif est de construire de véritables partenariats dans des logiques de complémentarité d’expertises : leschercheurs apportent leurs expertises pointues et spécialisées pour approfondir les sujets et étudier des méthodologiesspécifiques, le département Études et Recherche de l’Apec apporte lui une connaissance approfondie de l’emploicadre développée depuis plus de quarante ans.

Le partenariat entre l’Apec et le Céreq a été signé en 2008. Son objectif était l’étude du rôle de la promotion internedans l’accès au statut de cadre, étude qui a été intégrée dans l’Enquête sur les Professions Intermédiaires en Entreprise(E.P.I.E) qui démarrait alors.

Depuis plus de trente ans, le rôle de la promotion interne dans l’alimentation de la catégorie cadre est mis en évidencedans l’enquête sur les recrutements que le Département Etudes et Recherche de l’Apec réalise chaque année auprèsdes entreprises.Outre ce suivi statistique, le Département a réalisé et conduit des études à plusieurs reprises.En 1990, le préambule de l’enquête commandée au CEFI (Centre d’Etudes sur les Formations d’Ingénieurs) analysaitainsi la perception du cadre promu :« Le stéréotype du jeune cadre dynamique, sortant d’une grande école d’ingénieurs ou de commerce, cadre dès son entréedans la vie active et lancée d’emblée dans une carrière qui ne peut être qu’une « success story » est si prégnant que laseule image qu’on puisse lui opposer est celle du cadre autodidacte dont la promotion est la récompense d’une longuefidélité à la même entreprise. Ainsi, la promotion interne apparaît-elle comme un mode subalterne d’accès au statut cadre,une session de rattrapage pour ceux qui ont manqué leur examen d’entrée dans la vie professionnelle2».En 1990, les faits étaient donc là : les enquêtes statistiques (celles de l’INSEE, mais aussi celles de l’Apec) mettaienten évidence l’importance quantitative de la part des cadres issus de la promotion interne (près de la moitié descadres en poste dans les entreprises du secteur privé). Pour autant, ce groupe semblait ne pouvoir exister qu’en « creux », sa marginalisation sociale semblant vouloir précéder sa future marginalisation quantitative.

Quinze ans plus tard (juin 2005), le séminaire « Savoirs et carrières : que nous apprennent les cadres autodidactes etpromus ? » organisé par les chercheurs du GDR Cadres refaisait pourtant les mêmes constats : d’une part, une idéereçue voulait que l’accès au statut de cadre par la promotion ait pratiquement disparu au profit des « jeunes diplômés » ; d’autre part, des statistiques têtues, qui montraient que tous les cadres n’étaient pas desdiplômés Bac +4/+5, et que nombre d’entre eux –sans être pour autant « autodidactes » – étaient devenus cadresbien après leur insertion, la proportion des « promus » étant toujours la même…

En janvier 2007, le séminaire d’échanges organisé par le Département Etudes et Recherche de l’Apec réaffirmait « La place et le rôle de la promotion interne dans l’accès aux postes cadres3».L’invitation à ce séminaire commençait ainsi :« Alors que de nombreux indicateurs sociaux conduisent à l’idée d’un « ascenseur social » en panne, les entreprises n’encontinuent pas moins de recourir à la promotion interne de leurs salariés.Procédure quasi emblématique de cette pratique, la promotion au statut de cadre se pratique toujours, et ne semble pasen voie de disparition si l’on en juge les données statistiques récentes de l’Apec et certaines de ses études qualitatives en

©Apec - Les besoins en compétences dans les métiers de la recherche à l’horizon 2020 3

1. Centre d’Etudes et de Recherche sur les Qualifications.2. L’accès au statut cadre par la promotion interne. Apec/CEFI, 1991.

n LES PARTENARIATS DE RECHERCHE

n LE PARTENARIAT AVEC LE CÉREQ1

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3. La promotion interne et les cadres. Séminaire d’échanges Apec/GDR Cadres. Apec, 2008. Voir également : Parcours de cadres issus de la promotioninterne, Apec, 2007.

4. En effet, « 60 % des techniciens, 54 % des contremaîtres et agents de maîtrise et 57 % des autres professions intermédiaires aimeraient accéderau statut de cadre » : voir Les cadres vus par les non-cadres : Apec, 2009.

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires4

PRÉSENTATION GÉNÉRALE

cours. Cependant, les indicateurs pour mesurer cette forme de promotion sont multiples et demandent à être replacés pluslargement dans les processus de mobilité dans la société française. Plus globalement, le département Etudes et Recherche del’Apec souhaite replacer le thème de la promotion interne parmi d’autres problématiques : évolution des pratiques des entreprisesdans le contexte international ; rôle de la formation continue ; projections des besoins et des ressources en « nouveaux » cadres. »

L’objectif explicite de ce séminaire était de mettre en évidence les convergences entre les résultats obtenus par leschercheurs et les données et analyses produites par l’Apec. D’une certaine manière, on peut considérer que la démarchedes partenariats de recherche s’est inscrite dans la continuité logique de cette première rencontre formalisée et que,tout aussi logiquement, le partenariat avec le Céreq s’imposait…

La recherche réalisée par le Céreq apporte un regard entièrement renouvelé sur ce sujet.C’est la même dynamique qui est observée, mais d’un autre point de vue, lequel confirme trois idées :• d’une part, le passage de non-cadres vers des postes cadres est une dynamique très présente dans le tissu économique ;• d’autre part, devenir cadre est sinon une aspiration générale4, du moins une aspiration forte à la confirmation du

rôle de l’expérience dans la reconnaissance professionnelle.• enfin, toute tentative de modélisation qui voudrait dessiner un « standard » des évolutions professionnelles et des

carrières, quels que soient les métiers, les secteurs et les entreprises, est vouée à l’échec.

Les résultats obtenus sont importants, mais il faut insister aussi sur les méthodes qui ont permis leur émergence.L’étude des données de la statistique publique est éminemment précieuse. Leur examen approfondi et systématique,ainsi que leur mise en perspective grâce aux séries longitudinales mettent en lumière les tendances lourdes desévolutions sociales et professionnelles : l’approche diachronique apparaît comme un révélateur essentiel aussi bien despermanences que des évolutions, ce changement d’éclairage mettant littéralement en lumière des phénomènes que lebesoin d’actualité élude parfois. Le Département Etudes et Recherche de l’Apec est bien sûr satisfait de voir que cesrésultats correspondent dans leurs grandes lignes à ceux obtenus dans ses propres enquêtes, mais cette plongée à lafois élargie et scrupuleuse démontre aussi que faire parler les données et les chiffres est un travail complexe, maisstimulant, et surtout nécessaire à toute investigation qualitative. Car les données qualitatives recueillies dans le cadre des nombreux « terrains » de l’enquête EPIE apparaissent ainsid’autant plus riches et solides.Avant d’en évoquer les résultats, il faut insister sur le montage même de cette enquête : un objectif, une méthode,une grille et un suivi systématique des équipes mobilisées, bref un montage impressionnant dont on aimerait qu’ilconstitue un modèle de référence. Les problèmes n’ont évidemment pas manqué, ne serait-ce que la crise économique qui a pu frapper certaines desentreprises sollicitées. Par ailleurs, les difficultés méthodologiques d’une telle approche pouvaient paraître nombreuses.Que voyons-nous dans les entreprises, les bureaux et les usines ? Qu’entendons-nous quand un DRH, un chef d’entreprise,un technicien ou un syndicaliste nous parle, que retenons-nous et comment restituons-nous ces échanges ? Si l’on litbien la synthèse de toutes ces observations, rien n’était donné d’avance, car si le « terrain » parle, c’est dans ce qu’ildit et ce qu’il faut entendre et comprendre que se fait le travail de recherche : il faut encore d’autres échanges, il fautune mise à distance, du temps, des comparaisons, des rapprochements méthodiques pour qu’enfin une pensée « de cequi a été dit » apparaisse. Deux idées ressortent clairement. Le premier enseignement est méthodologique. En effet, si chacune des catégoriessocio professionnelles présentes dans les entreprises (cadres, professions intermédiaires, employés, ouvriers) nécessitedes enquêtes et des recherches spécifiques, il est tout aussi nécessaire de les étudier dans leur positionnement relatifet dans la dynamique de leurs relations, tant sur le plan quantitatif que qualitatif. En outre, cette dynamique ne répondpas à l’évidence à une seule logique, à une norme de gestion unique, commune à toutes les entreprises, quels quesoient leur taille, leur secteur, leur histoire et leur évolution économique.Le deuxième enseignement concerne les résultats eux-mêmes. Les enquêtes tant quantitatives que qualitatives concluentsur une certaine stabilité du rôle de la promotion interne dans l’accès à la catégorie cadre. Cette stabilité est néanmoins

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©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires 5

PRÉSENTATION GÉNÉRALE

à relativiser. D’une part, les caractéristiques des populations promues ont pu évoluer au cours des années, le vivier des« potentiels » cadres se transformant. D’autre part, les enquêtes montrent bien toute la diversité des passages à lacatégorie cadre, notamment selon le secteur d’activité, ce qui rend inappropriée toute analyse trop générale sur cettequestion. Il faut enfin s’interroger sur ce constat de la stabilité des tendances lourdes, alors que les caractéristiquesde la population active ont fortement évolué. Cette interrogation concerne tout particulièrement le rôle des nouvellesgénérations dans les entreprises et, en amont, de la politique des diplômes au regard des conditions concrètes de lamobilité professionnelle.

Le Département Etudes et Recherche de l’Apec

Rapports publiés dans la collection Apec Les recherches en partenariat

La division internationale du travail dans les services informatiques : Off shore et politiques des ressources humaines dansles grandes SSII, recherche menée par le LISE (Laboratoire Interdisciplinaire pour la Sociologie Economique, Unité Mixtede Recherche du CNRS et du CNAM)

Les modes de gestion des cadres en difficulté, recherche menée par l’Institut de Recherche en Gestion et Economie(IREGE) de l’Université de Savoie.

Le rapport des cadres à l’entreprise, recherche menée par le CRM (ex LIRHE) de l’Université Toulouse 1.

À paraître prochainement :L’impact des technologies de communication sur les cadres, recherche menée par le GRePs.

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6 ©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires

PRÉSENTATION DU CÉREQ

Placée sous la responsabilité scientifique de ChristopheGuitton, alors chef du département Travail, Emploi etProfessionnalisation du Céreq, l’équipe a été constituée dedeux chargés d’études du département :

• Martine Möbus, chargée d’études spécialisée dansl’analyse statistique et la comparaison internationale, apris en charge l’analyse quantitative. Pour ce faire, ellea bénéficié de la collaboration d’Anne Delanoë et FlorenceRyk.

• Jean-Paul Cadet, chargé d’études spécialisé dans l’analysedu travail et des pratiques de gestion des ressourceshumaines, a eu en charge l’analyse qualitative. Il s’estappuyé sur les enquêtes en entreprise menées dans lecadre du dispositif EPIE (Enquête sur les ProfessionsIntermédiaires en Entreprise) par plusieurs chercheurs etchargés d’études (voir liste des entreprises enquêtées etdes enquêteurs en annexe).

PRÉSENTATION DE L’ÉQUIPE

Implanté à Marseille, le Centre d’études et de recherchessur les qualifications (Céreq) est un établissement publicqui dépend du ministère de l’Education nationale, de laJeunesse et de la Vie associative, ainsi que du ministèredu Travail, de l’Emploi et de la Santé. Expert majeur dansle domaine de la relation formation-emploi depuis quaranteans, le Céreq assure trois missions :

• Mener des études et des recherches sur les qualifications(évolutions, conditions de leur acquisition par laformation ou l’exercice d’une activité, conditions d’accèsaux emplois, conditions de la mobilité professionnelle etsociale)

• Evaluer les formations, les dispositifs et politiquespubliques mis en œuvre

• Formuler des avis et des propositions, relatifs auxpolitiques de formation et d’enseignement

Les effectifs du Céreq et de son réseau comprennent 120personnes, dont une grande majorité de personnels d’étudeset de recherches.

Un réseau de centres associés (des laboratoiresuniversitaires situés dans la plupart des régions en France)fournit un adossement scientifique aux axes de travail duCéreq.

Cinq types de publications diffusent les résultats des étudeset recherches du Céreq :

• Bref (texte de synthèse sur un sujet précis) ;

• Nef (étude sur un thème) ;

• Relief (rapport ou actes de colloque) ;

• Net.Doc (working paper) ;

• Formation Emploi (revue) ; ouvrages.

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7©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires

SYNTHÈSE DES PRINCIPAUX RÉSULTATS

Ce rapport rend compte d’une étude menée par le Centred’études et de recherches sur les qualifications (Céreq)en partenariat avec le département Etudes et Recherchesde l’Association pour l’Emploi des Cadres (Apec), portantsur l’alimentation de la catégorie cadre à partir de l’accèspromotionnel.

Cette étude émane d’une enquête plus vaste du Céreq surles professions intermédiaires (agents de maîtrise,techniciens et assimilés) en entreprise, conduite entre2008 et 2011. Cette enquête a pour objectifd’appréhender et de comprendre comment ces professionspositionnées de fait à la charnière entre lesouvriers/employés et les cadres au sein des entreprisessont gérées : travail et position socio-hiérarchique,alimentation des emplois, formation –professionnalisation, gestion des carrières.

Elle se focalise sur un sujet de réflexion récurrent : l’accèsau statut de cadre par la voie promotionnelle, sonévolution au regard du recrutement des jeunes cadresdiplômés, ses logiques et ses modalités d’organisation.En outre, cette étude vise à identifier et à analyser lespossibilités de promotion au statut de cadre offertes auxsalariés des catégories intermédiaires, soit la populationla plus concernée aujourd’hui par ce type de promotion.

La première partie, élaborée et rédigée par Martine Möbus,avec le concours d’Anne Delanoë et Florence Ryk, livretout un ensemble de données statistiques de cadrage etprocède à leur analyse approfondie. Deux aspects majeursservent de fil conducteur : l’évolution des modalitésd’accès à la catégorie cadre et l’hétérogénéité de leursformes. Le premier aspect conduit à mesurer d’abordl’évolution de l’accès promotionnel, puis lescaractéristiques des publics concernés. Le second aspectse réfère à l’hétérogénéité des pratiques d’accès à lacatégorie cadre selon les entreprises. L’appartenance del’entreprise à un secteur d’activité est retenue commefacteur explicatif des différences existantes.

La seconde partie, réalisée par Jean-Paul Cadet, exploiteet analyse les investigations effectuées en entreprisedans le cadre de l’enquête menée sur les professionsintermédiaires. L’approche est cette fois d’ordre qualitatif.Les différentes formes de « passage cadre » pour lesprofessions intermédiaires en entreprise sont dans unpremier temps identifiées. Puis, l’analyse portesuccessivement sur les logiques et les conditions quiprésident aujourd’hui aux promotions au statut de cadrepour ces professions en entreprise.

Appréciés globalement sur le plan statistique, les modesd’alimentation de la catégorie cadre dans lesentreprises demeurent inchangés. L’équilibre entrel’appel aux débutants (recrutés comme cadres au sortirdu système scolaire) et la voie promotionnelle estmaintenu. Ces résultats infirment les hypothèsesrécurrentes suivant lesquelles l’accroissement de l’offrede diplômés du supérieur conduirait à produire l’extinctionprogressive de la voie promotionnelle. Ils suggèrentqu’une bonne partie du renouvellement des cadres dansles entreprises obéit à d’autres logiques que celle de larelation directe entre l’école et le système productif.

Les enquêtes qualitatives montrent à leur façon la vitalitéde l’accès promotionnel au statut de cadre pour lesprofessions intermédiaires en entreprise, en révélanttoute sa diversité. En interne, les salariés peuvent nonseulement être promus cadres en évoluant vers un métierde manager ou d’expert, mais aussi parfois sans changerà proprement parler de fonction. Dans ce cas, ils se voientconfirmés dans leur fonction actuelle, ou gratifiés de parleur expertise professionnelle, ou encore requalifiéscompte tenu de la professionnalisation de leur fonction.Les salariés peuvent également accéder au statut decadre via une mobilité externe, assortie le cas échéantd’une formation qualifiante.

Ces enquêtes permettent surtout de comprendre pourquelles raisons s’opèrent toujours des promotions austatut de cadre. Elles donnent à voir les logiques desentreprises et des salariés, qui continuent à donner sensà ces promotions et traduisent par conséquent leurperpétuation. Pour les entreprises, la promotion cadredemeure un outil utile à la gestion du travail et aumanagement des ressources humaines. Allocation depostes disponibles, satisfaction d’exigences en matièrede compétences, souci de disposer de personnels cadresdévoués, politique de reconnaissance, action sur lamotivation et la fidélisation des personnels : telles sontles logiques, non exclusives l’une de l’autre, qui animentles entreprises dans leurs pratiques promotionnelles. Pourles salariés, la promotion cadre reste un projetenvisageable, même si beaucoup de salariés rechignentaujourd’hui à évoluer vers des emplois de cadre, enparticulier de nature managériale. Ce projet peut dès lorss’inscrire aussi bien dans une optique de développementprofessionnel que dans une perspective d’évolution decarrière.

Si l’importance relative de l’accès promotionnel à lacatégorie cadre n’a pas été altérée, les caractéristiquesde cet accès se transforment. Les carrières longues,c’est-à-dire les parcours professionnels commencés au bas

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n LE CONTEXTE DE LA RECHERCHE

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©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires8

SYNTHÈSE DES PRINCIPAUX RÉSULTATS

de l’échelle hiérarchique sur un emploi d’ouvrier oud’employé pour atteindre celui de cadre, deviennent plusrares. L’accès promotionnel à la catégorie cadre estégalement marqué par une élévation sensible du niveaude formation initiale des promus. Sans disparaître, la part de cadres « autodidactes » (c’est-à-dire dépourvusde diplômes de l’enseignement supérieur) perdprogressivement en importance et les titulaires de BTS/DUTaccusent la plus forte progression parmi les cadres promus.Une telle évolution repose moins sur le changement despratiques de promotion que sur la transformation du profildes viviers. C’est ce que met en évidence le clivage desprofils de promus selon la classe d’âge au sein d’une mêmecohorte. Ces disparités contrastent avec l’homogénéité desrecrutements directs de débutants au poste de cadre dansles entreprises.

L’examen des modalités des promotions cadres pour lesprofessions intermédiaires en entreprise confirme dans unecertaine mesure cette analyse. Il révèle le poidsprépondérant des critères de « compétence » etd’implication dans les différentes décisionspromotionnelles. Le rôle du diplôme dans les passages austatut de cadre est pour sa part à relativiser. Si le niveauet le type de certification ne sont pas à exclure et jouentmême parfois comme des critères déterminants, ils nepeuvent pas pour autant être considérés comme lesprincipaux critères s’imposant partout d’évidence et sansnuance. De fait, l’élévation sensible du niveau de formationinitiale constatée chez les salariés promus dans la catégoriecadre semble traduire bel et bien avant tout l’évolutiongénérale du profil de formation de la population activeplutôt que la généralisation d’une politique de gestion descarrières qui privilégierait systématiquement le diplôme ausein des entreprises.

L’analyse des différents mécanismes promotionnels àl’œuvre invite aussi à insister sur le rôle majeur tenu parles supérieurs hiérarchiques et les salariés eux-mêmes.Sur fond d’individualisation et de décentralisation de laGRH, les premiers interviennent au niveau des promotionsinternes, de plus en plus à l’appui de la pratique supposéeobjective des entretiens d’évaluation. Les seconds, à toutle moins ceux qui souhaitent accéder au statut de cadre,n’hésitent pas à afficher au travail des comportements enphase avec ce que l’on attend a priori des cadres, à semontrer entreprenants et revendicatifs pour négocier leurpromotion, à s’engager dans des formations qualifiantes…

Toutefois, le rôle de la formation continue dans lespassages cadre doit aussi être nuancé. Certes, l’effortde formation des entreprises apparaît aujourd’huiimportant, notamment pour accompagner les salariéspromus aux fonctions de cadre manager. Cependant, iln’assure le plus souvent de rien, et ne peut éluder leprocessus sélectif en lui-même, qui s’opère en partieindépendamment.

Quant à la prise en compte du secteur d’activité, elle faitd’abord ressortir la complexité de la mesure de l’accèspromotionnel. En effet, le classement des secteurs diffèreselon le point de vue adopté - destinée des non-cadres ouprovenance des cadres. De fait, la proportion de promusparmi les cadres n’est pas nécessairement en phase avecles probabilités de devenir cadre. Ces probabilitésdépendent fortement de la structure des emplois de chaquesecteur par catégorie socioprofessionnelle. Plus laproportion de cadres est élevée, plus sont importantes lesprobabilités de le devenir. Cet effet mécanique est surtoutvisible dans les services hautement qualifiés auxentreprises. De son côté, la proportion de promus parmiles cadres traduit davantage la pondération entrerecrutements directs de débutants et accès promotionnels,très variable selon le secteur.

En second lieu, l’analyse sectorielle fait ressortir lesdisparités d’accès à la catégorie cadre selon l’activitééconomique. Le secteur apparaît ainsi comme undéterminant de la pérennité des pratiquespromotionnelles, celles-ci constituant le mode quasi-exclusif de renouvellement de la catégorie cadre danscertaines activités. Des formes de cohérence sectorielle sedégagent dans les modalités d’accès à la catégorie cadre,en interaction avec les pratiques de promotion interne àl’entreprise, l’ancienneté et le niveau de diplôme des cadres.Plusieurs modèles d’alimentation de la catégorie cadre sedistinguent entre deux pôles, d’une part, l’appel auxdiplômés des grandes écoles ou du 3e cycle, d’autre part,la promotion du cadre autodidacte.

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5. Ce volet de l’étude a été réalisé dans le cadre de la convention de partenariat entre l’Apec et le Céreq6. Pour reprendre le terme utilisé par Mallet (1993) et adopté dans la suite du texte. 7. Le choix du secteur comme indicateur d’hétérogénéité des pratiques n’est pas exclusif. D’autres caractéristiques comme la taille auraient pu être

retenues.

Les modalités d’accès au groupe des cadres font l’objetd’un intérêt constant et de débats récurrents comptetenu du prestige dont jouit ce groupe dans la sociétéfrançaise, de l’importance accordée à la mobilité socialeet du rôle attribué à la formation initiale pour l’obtentionde ce statut. Paradoxalement, peu de travaux empiriquesde portée générale nous renseignent sur ces différentesmodalités, en particulier sur l’acquisition du statut decadre en cours de carrière (Grelon, Gadéa, Pochic, 2005).Le manque de vision globale sur la structure et l’évolutionde l’accès au groupe des cadres tient principalement aufait que le vocable désigne aussi bien des salariés desentreprises, des agents des trois fonctions publiques etdes professions libérales dont la provenance et le parcoursprofessionnel se distinguent fortement les uns des autres.

La présentation qui suit n’a pas l’ambition de traiterl’ensemble de ces catégories mais de faire le point surles conditions d’accès à l’une d’entre elles, les cadressalariés des entreprises et ce dans une perspectiveparticulière. L’analyse se situe en effet au sein d’uneétude plus vaste, dédiée aux professions intermédiaires- techniciens, agents de maîtrise et assimilés. L’objetspécifique de cette partie de l’étude est d’identifier lespossibilités de promotion offertes à ces catégories desalariés dans les entreprises5. L’étude statistique est doncmoins ciblée sur la mobilité sociale des individus oul’identité d’un groupe que sur l’accès à un niveau dequalification professionnelle et sur les pratiques desentreprises en matière de recrutement. Les cadres desentreprises, quels que soient leur fonction et leur diplôme,sont définis en fonction de leur position dans les grilles

de classification. De même sont considérés comme cadrespromus tous ceux qui sont parvenus à ce niveau declassification en cours de carrière. L’observationstatistique des modalités d’accès à la catégorie cadredans les entreprises a été menée en parallèle avec uneanalyse qualitative réalisée à partir d’entretiens.

Deux aspects majeurs de l’accès promotionnel aux emploisde cadre dans les entreprises servent de fil conducteur àl’analyse statistique : l’évolution des modalités d’accèset l’hétérogénéité de leurs formes. Le premier aspect atrait à la question controversée de la disparition de l’accèspromotionnel à la catégorie cadre. L’hypothèse, maintesfois formulée, de la substitution des jeunes diplômés auxsalariés promus et, en corollaire, celle de la fin du cadre« autodidacte » est en débat. L’analyse revient sur cettequestion, en mesurant d’abord l’évolution de l’accèspromotionnel puis les caractéristiques des publicsconcernés par les pratiques de cadrage6 des entreprises.Le deuxième aspect développé se réfère à l’« espacehétérogène » des entreprises à l’intérieur duquel s’inscritl’accès à la catégorie cadre (Boltanski, 1982).L’appartenance de l’entreprise à un secteur d’activité estici retenue comme facteur explicatif de la persistance desclivages existants dans l’accès à la catégorie cadre7. Avantde traiter ces deux questions, quelques données serontprésentées sur l’évolution de l’ensemble de la catégoriecadres d’entreprises.

ANALYSE STATISTIQUE

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires 9

n INTRODUCTION

Sources utilisées, délimitation du champ et mesure de l’accès promotionnel Sources et champL’analyse statistique repose sur des enquêtes effectuées auprès des individus : enquêtes Emploi et FormationQualification professionnelle de l’INSEE ; enquête Génération du Céreq.

Le champ retenu dans ces trois enquêtes est identique. Il s’agit à la date de l’enquête des actifs occupés, salariés desentreprises (y compris les entreprises publiques). Sont exclus les indépendants et les titulaires et contractuels des troisfonctions publiques.

La catégorie cadre correspond à l’ensemble des individus recensés au poste 3 de la nomenclature des professions etcatégories socioprofessionnelles (PCS) (niveau agrégé), compte tenu de la délimitation du champ aux salariés desentreprises. Soit en effectifs redressés selon l’enquête Emploi de 2008 : 2 652 054 cadres des entreprises.

Correspondances des intitulés : voir annexe 1, page 79

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Mesures de l’alimentation de la catégorie cadre à partir de l’accès promotionnel Plusieurs mesures de l’alimentation de la catégorie cadre à partir de l’accès promotionnel ont été effectuées.

• Les données de l’enquête FQP de l’INSEE offrent la possibilité de construire deux indicateurs : - la part de salariés devenus cadres au cours des cinq années précédant l’enquête rapportée aux effectifs de cadres et

comparée à celle des cadres débutants (élèves, étudiants cinq ans auparavant) ;- la part de cadres ayant débuté leur vie professionnelle dans une catégorie socioprofessionnelle inférieure.

Dans certains cas, les résultats de deux dernières enquêtes FQP(1993 et 2003) ont pu être rapprochés, ce qui permet deles comparer à dix ans d’intervalle. • Les données de l’enquête Emploi de l’INSEE permettent de mesurer la part de cadres issus de la promotion interne à

l’entreprise à partir d’une question sur la catégorie socioprofessionnelle à l’entrée dans l’entreprise. • Les données de l’enquête Génération du Céreq auprès des jeunes sortis en 1998 du système éducatif et interrogés

7 ans plus tard permettent de mesurer la part de jeunes cadres salariés des entreprises en 2004 qui ont débuté dans lavie active dans une catégorie socioprofessionnelle inférieure.

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

50 %

100 %

150 %

200 %

250 %

Cadres

Professions intermédiaires

Ensemble

Employés et ouvriers

ÉVOLUTION EN INDICE DES EFFECTIFS SALARIÉS DES ENTREPRISES, (1985 = Indice 100)

Source : INSEE Enquête Emploi - Calculs Céreq (chiffres PSB à partir de 1994)Champ : salariés des entreprises (hors fonctions publiques et autres agents de l'État)

Une telle croissance se répercute sur la structure desemplois des entreprises par catégorie socioprofessionnelle.Les cadres représentent actuellement en moyenne 17 % deseffectifs des entreprises. Cette part a pratiquement doublédepuis 1985 (9 %). Si cette croissance se poursuit, la part

des cadres et celle des professions intermédiaires(techniciens et maîtrise), également en développement,constitueront bientôt la moitié des effectifs des entreprises.

n LES DONNÉES STATISTIQUES SUR LES CADRES D’ENTREPRISE

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires10

ANALYSE STATISTIQUE

La question de l’alimentation de la catégorie cadre dansles entreprises a d’autant plus d’intérêt que cette catégoriede salariés est en forte croissance sur longue période. De

ce point de vue, l’écart avec les autres groupessocioprofessionnels n’a cessé de se creuser.

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L’essor de la catégorie continue a bénéficié surtout auxsecteurs des services qui regroupent actuellement près destrois quarts des cadres des entreprises. La part des cadrestravaillant dans les secteurs des services est passée de 69 % en 1995 à 73 % en 2008. Leur distribution dansl’ensemble des secteurs montre la prépondérance des

services hautement qualifiés aux entreprises (conseils,informatique, ingénierie, publicité, R&D) dans lesquelstravaillent plus d’un cadre sur cinq. Entre 1995 et 2008,les effectifs de cadres dans ces secteurs ont été multipliéspar deux.

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

Cadres

Professions intermédiairesEmployés et ouvriers

9%

21%

17%

25%

0 %

20 %

40 %

60 %

80 %

100 %

ÉVOLUTION DE LA STRUCTURE D'EMPLOIS DES ENTREPRISES PAR GROUPE SOCIOPROFESSIONNEL, 1985-2008

Source : INSEE Enquête Emploi - Calculs Céreq (chiffres PSB à partir de 1994)Champ : salariés des entreprises (hors fonctions publiques et autres agents de l'Etat)

Hôtel-r

estau

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Santé

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Sect.

finan

cier

Cons

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&D0 %

5 %

10 %

15 %

20 %

25 %

DISTRIBUTION DES CADRES DANS LES SECTEURS D'ACTIVITÉ EN 2008

Note de lecture : 22,2 % des cadres des entreprises travaillaient en 2008 dans les secteurs des services hautement qualifiés aux entreprises (conseils, informatique, ingénierie, R&D).Source : INSEE - Enquête Emploi - Calculs Céreq

Parmi les cadres salariés des entreprises, c’est le groupe desingénieurs et cadres techniques qui s’est développé le plusfortement. Il comprend les ingénieurs et cadres d’étude,recherche et développement des différentes spécialités

mais également les ingénieurs et cadres de fabrication,d’exploitation, de maintenance, du contrôle qualité, de lalogistique et les cadres technico-commerciaux.

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires 11

ANALYSE STATISTIQUE

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Ingénieurs et cadres techniques

Ensemble des cadres salariés

Cadres administratifs,commerciaux et autres

100 %

150 %

200 %

250 %

1985-87 1988-90 1991-93 1994-96 1997-99 2000-02 2003-05 2006-08

ÉVOLUTION EN INDICE DES EFFECTIFS DE CADRES DANS LES ENTREPRISES, 1985/87- 2008 (1985/87 = 100)

ÉVOLUTION DE LA RÉPARTITION INTERNE DE LA CATÉGORIE CADRES DANS LES ENTREPRISES

Source : INSEE Enquête Emploi - Calculs Céreq (chiffres PSB à partir de 1994)Champ : salariés des entreprises (hors fonctions publiques et autres agents de l'État). Enquête emploi INSEE.

Les années ont été regroupées 3 par 3 pour lisser les résultats

Cadres administratifs, commerciaux et autres Ingénieurs et cadres techniques d’entreprise

1985-87 1988-90 1991-93 1994-96 1997-99 2000-02 2003-05 2006-080 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %

70 %

80 %

Source : INSEE Enquête Emploi - Calculs Céreq (chiffres PSB à partir de 1994)Champ : salariés des entreprises (hors fonctions publiques et autres agents de l'État). Enquête emploi INSEE.

Les années ont été regroupées 3 par 3 pour lisser les résultats

La part relative des ingénieurs et cadres techniquesreprésentait le tiers des effectifs de l’ensemble de la

catégorie au milieu des années 1980, elle se situeactuellement à 42 %.

Leur forte progression est surtout visible dans les secteursdes services où leurs effectifs font plus que doubler entre1995 et 2008 (+208%), du fait de l’essor des serviceshautement qualifiés aux entreprises. En conséquence, les ingénieurs et cadres techniques sont à présentmajoritairement actifs dans les services et non plus dansl’industrie. Cette évolution repose en partie sur les besoinsde qualifications techniques liés au développement destechnologies de l’information et de la communication.

1995 2008

Industrie 44,7% 38,8%

Construction 7,1% 6,6%

Services 48,2% 54,6%

Ensemble 100,0% 100,0%

Répartition des ingénieurs et cadres techniques entreindustrie, services et construction (1995-2008)

Source : Enquête Emploi- Calculs Céreq

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires12

ANALYSE STATISTIQUE

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Actuellement, un cadre d’entreprise sur trois est une femme,contre un sur cinq en 1985. Les femmes représentent prèsde la moitié des cadres administratifs/commerciaux etautres (information, art, social, santé), mais leur part au

sein du groupe des ingénieurs et cadres techniques demeurefaible alors que ce sont eux qui connaissent l’expansion laplus forte depuis trois décennies.

Ensemble des cadres Cadres administratifs, commerciaux et autres Ingénieurs et cadres techniques

1985 1990 1995 2000 2008 1985 1990 1995 2000 2008 1985 1990 1995 2000 20080 %

20 %

40 %

60 %

80 %

100 %

Hommes

Femmes

ÉVOLUTION DE LA RÉPARTITION DES CADRES DES ENTREPRISES PAR SEXE 1985-2008

Source : INSEE Enquête emploi - Calculs Céreq - Salariés hors fonctions publics et autres agents de l'État

Professions intermédiaires, employés, ouvriers

1985

<25 ans

25-29 ans

30-34 ans

35-39 ans

40-44 ans

45-49 ans

50-54 ans

55-59 ans

60 ans et +

<25 ans

25-29 ans

30-34 ans

35-39 ans

40-44 ans

45-49 ans

50-54 ans

55-59 ans

60 ans et +

Cadres0 %

5 %

10 %

15 %

20 %

25 % 2008

0 %

5 %

10 %

15 %

20 %

STRUCTURE D'ÂGE DES CADRES COMPARÉE À CELLE DES PROFESSIONS INTERMÉDIAIRES, EMPLOYÉS ET OUVRIERS 1985-2008

Source : INSEE - Enquête emploi - Calculs Céreq

Les cadres d’entreprise n’ont pas connu le mêmevieillissement que l’ensemble des autres catégories desalariés. De ce fait, l’écart entre l’âge des cadres et celui

des autres catégories de salariés tend à se réduire sauf pourles moins de 25 ans en raison de l’entrée plus tardive descadres sur le marché du travail.

Deux catégories de diplômés ont une importance croissantedans la population des cadres d’entreprise : les diplômés

de l’université, notamment les 3e cycles, et les titulairesde BTS /DUT.

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires 13

ANALYSE STATISTIQUE

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Leur progression est visible aussi bien dans leur part relativeparmi les cadres que dans la croissance de leurs effectifs.La part des 3e cycles passe de 8 % à 18 % entre 1985 et2008 tandis que celle des sortants d’écoles d’ingénieurs et

autres écoles est stable, de l’ordre d’un peu du plus quartdes effectifs. De leur côté, les titulaires de BTS-DUTreprésentent 18 % des cadres d’entreprises en 2008 contre12 % en 1985.

V et VI

Bac

Bac + 2

2e cycle univ.

3e cycle univ.

Grandes écoles 0 %

20 %

40 %

60 %

80 %

100 %

1985 1990 1995 2000 2008

28%

20%

12%

9%

8%

23%

26%

18%

14%

9%

10%

23%

21%

14%

19%

11%

13%

23%

16%

12%

19%

14%

14%

25%

13%

15%

18%

12%

18%

23%

RÉPARTITION DES CADRES D'ENTREPRISES PAR NIVEAU DE DIPLÔME 1985-2008

Source : INSEE - Enquêtes Emploi - Calculs Céreq

Si toutes les catégories de diplômés, à partir dubaccalauréat, bénéficient de l’expansion de la catégoriecadre, la croissance numérique des LMD et des BTS/ DUTest nettement plus affirmée : entre 1985 et 2008, lapopulation de cadres des entreprises titulaires de LMD a

pratiquement quintuplé, celle des cadres titulaires deBTS/DUT a presque quadruplé tandis que les effectifs de lacatégorie dans son ensemble ont été multipliés par deuxet demi.

2e et 3e cycles universitaires

Écoles d’ingénieur et autresEnsemble

CAP/BEP maxi

BTS/DUT ou éqivalent

Baccalauréat

100 %

200 %

300 %

400 %

500 %

1985 1990 1995 2000 2005 2008

Source : INSEE - Enquêtes Emploi - Calculs Céreq

ÉVOLUTION EN INDICE DES EFFECTIFS DE CADRES D'ENTREPRISES PAR NIVEAU DE DIPLÔME 1985=100

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires14

ANALYSE STATISTIQUE

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Sur longue période, la catégorie des cadres salariés desentreprises, a connu une très forte croissance absolue etrelative, sans commune mesure avec celle des autresgroupes socioprofessionnels. L’essor de la catégoriebénéficie surtout aux secteurs des services qui regroupentactuellement près des trois quarts des cadres desentreprises. Les services hautement qualifiés aux entreprises(conseil, informatique, ingénierie, publicité, recherche etdéveloppement) occupent à eux seuls plus d’un cadre surcinq. Ces évolutions ont eu, entre autres conséquences, derapprocher la catégorie des cadres d’entreprises des autresgroupes socioprofessionnels : la différence d’âge tend às’estomper et la part de femmes s’élève bien que saprogression ne soit pas proportionnelle à la croissance dela catégorie, compte tenu du fait que celle-ci reposedavantage sur la demande de profils techniques.

Le renouvellement et l’essor de la catégorie ont eu desrépercussions sur sa composition par niveau de diplôme.Au-delà de l’élévation constante de ce niveau, d’ailleursmanifeste pour tous les salariés, deux groupes de diplômésont connu une évolution remarquable et supérieure à cellede l’ensemble de la catégorie : les diplômés d’un 3e cycleuniversitaire et les BTS/DUT. La part relative de diplômésdes grandes écoles, tout en gardant la première place, estquant à elle restée stable.

L’ensemble de ces éléments et, en particulier, l’évolutiondu profil de formation de la catégorie ravive la questionde l’alimentation de la catégorie cadre d’entreprise. Eneffet, si progressivement les salariés les moins diplômés(de niveau baccalauréat et infra) sont évincés, lephénomène d’« homogénéisation » (Eckert, Epiphane, 2003)des profils de cadre est encore loin de se réaliser. D’unecertaine manière, la part croissante d’emplois de cadresdans les entreprises induit une plus grande ouverture,favorable non seulement à la diversification des profilsmais encore à la pluralité des voies d’accès à la catégorie.Par ailleurs, le processus de distanciation de la catégoriepar rapport à la fonction d’encadrement (Amossé, Delteil,2004) et sa définition différenciée selon les branches sontautant de facteurs contribuant au maintien voire audéveloppement de son hétérogénéité.

C’est dans ces deux directions que la question del’alimentation de la catégorie cadre des entreprises seraanalysée à l’appui des statistiques.

La question de l’accès promotionnel à la catégorie cadreapparaît de manière récurrente dans les analyses et sonévolution fait l’objet de résultats parfois contradictoires(voir encadré 2). Qu’elle soit abordée sous l’angle de lamobilité professionnelle ascendante des individus ou souscelui des politiques de cadrage des entreprises, cettequestion est souvent traitée à partir d’une grille de lectureprivilégiée, celle de la substitution des jeunes diplômés auxsalariés promus et, en corollaire, de la disparition du cadre« autodidacte ».

En 1973, Michel Cézard, pointant l’importancequantitative de l’accès des salariés appartenant au groupedes professions intermédiaires8 à la catégorie cadre,l’analysait comme la conséquence de pénuries antérieuresde cadres diplômés et envisageait la réduction future decette forme de mobilité ascendante du fait del’accroissement structurel des diplômés du supérieur.

En 1985, Luc Boltanski, mettant en parallèle l’évolutiondu nombre de cadres et celle des diplômés du supérieurentre 1960 et 1974, notait que l’accroissement plus queproportionnel du nombre de diplômés n’avait pas faitobstacle au maintien d’un nombre important de cadresautodidactes.

En 1993, Louis Mallet, s’interrogeant sur l’évolution despratiques de promotion des entreprises, évoquait unesorte de « course-poursuite », engagée depuis les années1950, entre la croissance du nombre de cadres et lacroissance des diplômés du supérieur pour expliquer lalente progression de ces derniers dans l’encadrement desentreprises.

En 2006, Manuela Baraton, observant la diminution deschances de devenir cadre par promotion, rattachait cephénomène à la croissance des recrutements de débutantsdiplômés du supérieur.

Comme le constatent Gadéa et Pochic (2009) : «...les cadresissus de la promotion et les diplômés accédant au statut decadre dès leur premier emploi apparaissent le plus souventà la fois comme des catégories discrètes, mutuellementsubstituables et radicalement hétérogènes, voireantagoniques ». Ces auteurs, s’interrogeant sur l’imagetraditionnelle accolée au cadre promu, sur la réalité actuellede l’antagonisme entre débutants et promus et sur lesraisons invoquées pour expliquer leur coexistence, plaidentpour « une meilleure connaissance des diverses fractions qu’ilest possible de distinguer parmi les cadres ».

n L’ÉVOLUTION DE L’ACCÈS PROMOTIONNEL À LA CATÉGORIE CADRE

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires 15

ANALYSE STATISTIQUE

8. Les professions intermédiaires étaient alors intitulées « cadres moyens » et les cadres « cadres supérieurs ».

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De son côté, la part de débutants (étudiants ou élèves cinqans auparavant), classés cadres au moment de l’enquête,inférieure à celle des promus, est également relativementstable : 13,1 % en 2003 contre 12,5 % en 1993.

Dans les deux cas, le nombre de débutants et de promus aaugmenté dans des proportions assez comparables etsuivant la croissance de la catégorie :

La probabilité d’accès à la catégorie cadre est égalementrelativement stable et même légèrement plus favorable en2003 qu’en 1993 : près d’un salariés sur 10 ayant débutécomme profession intermédiaire, employé ou ouvrierdéclarait être cadre en 2003 (9 % en 2003 contre 7 % en1993).

ANALYSE STATISTIQUE

16 ©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires

L’analyse qui suit prend en compte ces différents constatsdans une perspective particulière. D’une part, elle estcirconscrite à la fraction des cadres qui sont salariés desentreprises, les distinguant ainsi des cadres agents destrois fonctions publiques dont le recrutement et la carrièreobéissent à d’autres logiques. D’autre part, l’analyse estdavantage axée sur les pratiques de cadrage des entreprisesque sur les perspectives de mobilité sociale des individus,

même si les deux aspects sont étroitement liés. L’évolutiondes pratiques de cadrage dans leur globalité sera d’abordprésentée. On s’intéressera par la suite à l’accèspromotionnel à travers les profils des salariés qui accèdentà la catégorie cadre en cours de vie active, afin d’observerles changements concernant la nature de l’accèspromotionnel à la catégorie cadre au-delà de son volume.

9. Les promus sont ici tous les salariés qui sont issus d’une catégorie socioprofessionnelle inférieure à celle de cadre, que cette promotion ait eu lieuen interne ou à l’occasion d’un changement d’entreprise.

Cadres en 2003

Cadres en 1993

020 % 40 % 60 % 80 % 100 %

Cadres Professions intermédiaires, employés/ouvriers

Cadres Professions intermédiaires, employés/ouvriers

CSP* À L'ENTRÉE DANS LA VIE ACTIVE DES SALARIÉS CLASSÉS CADRES : COMPARAISON ENTRE 1993 ET 2003

Source : INSEE FQP 1993 et 2003 - Calculs Céreq

Source : INSEE FQPP 1993 et 2003 - Calculs Céreq

Source : INSEE FQP 1993 et 2003 - Calculs Céreq

Total Cadres

Cadresdébutants

Cadres promus

1993 1 516 184 190 055 284 115

2003 2 183 633 286 611 397 918

Δ + 667 449 + 96 556 + 113 803

Progression + 44% + 51% + 40%

LES TRAITS SAILLANTS DE L’ÉVOLUTION DE L’ACCÈS PROMOTIONNELStabilité de l’accès promotionnel entre 1993 et2003

À dix ans d’intervalle et d’un indicateur à l’autre (regardrétrospectif portant sur l’ensemble de la vie active ou limitéaux cinq années précédentes), la part de « promus »9 dansla catégorie cadre est stable et s’avère supérieure à celledes débutants.

Ainsi, en 2003 comme en 1993, 60 % des cadres desentreprises, toutes générations confondues, ont débuté leurvie active dans une catégorie socioprofessionnelle inférieure(profession intermédiaire, employé ou ouvrier). De même,en 2003 comme en 1993, près d’un cadre sur cinq était classécinq ans auparavant dans une catégorie socioprofessionnelleinférieure : la part de cadres passés de professionintermédiaire, employé ou ouvrier à cadre entre 1998 et2003 s’élevait à 18,2 % et à 18,7 % entre 1988 et 1993.

*Catégorie Socio Professionnelle

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ANALYSE STATISTIQUE

17©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires

Qu’il soit mesuré en termes de provenance ou de destinée,l’accès promotionnel à la catégorie cadre dans lesentreprises est marqué par la stabilité : six cadres sur dixont débuté dans une catégorie socioprofessionnelleinférieure et un peu moins d’un salarié sur dix ayant débutécomme profession intermédiaire, employé ou ouvrier est

devenu cadre par la suite. Les ratios respectifs de débutantset promus devenant cadres n’ont pas non plus été modifiés.

Les entreprises, examinées dans leur globalité, continuentdonc à conjuguer, dans des proportions pratiquementinchangées, le recrutement direct de débutants et l’accèspromotionnel aux postes de cadre.

FQP 1993 FQP 2003

Probabilité d’être promu cadre après avoir débuté comme profession intermédiaire, employé ououvrier 7%* 9%

Probabilité d’être classé cadre en ayant été profession intermédiaire, employé ou ouvrier 5 ansauparavant 3% 4%

Probabilité d’être classé cadre en ayant été étudiant cinq ans auparavant 13% 13%

* Note de lecture : En 1993, 7 % des salariés qui déclaraient avoir débuté leur vie comme profession intermédiaire, employé ou ouvrier étaient devenus cadres.

Le taux de mobilité professionnelle ascendante : des résultats en apparence contradictoiresDeux notes publiées par l’INSEE en 2006, portant sur des périodes relativement semblables, fournissent des élémentscontradictoires sur la question de l’accès promotionnel à la catégorie cadre. - Dans une analyse reposant sur des données de panel issues des fichiers DADS et comparant deux périodes (1978-1989

et 1989-2001), Manuela Baraton (« De la difficulté à devenir cadre par promotion ») conclut à un recul de la mobilitéascendante, en particulier en ce qui concerne l’accès des professions intermédiaires à la catégorie cadre : 36 % des cadresobservés en 1989 étaient professions intermédiaires en 1978, contre 31 % des cadres observés en 2001 qui étaientprofessions intermédiaires en 1989.

- De son côté, Olivier Monso (« Changer de groupe social en cours de carrière »),en exploitant les données de l’enquêteFQP à trois dates (1985-1993-2003), conclut à l’élévation de la mobilité ascendante des professions intermédiaires dansla catégorie cadre entre 1980 et 2003 : 8 % des salariés qui étaient professions intermédiaires en 1980 sont devenuscadres cinq ans plus tard et 11% des salariés qui étaient professions intermédiaires en 1998 sont cadres en 2003.

Le caractère contradictoire de tels résultats peut tenir à plusieurs biais :- le champ des enquêtes : dans un cas (M. Baraton), il s’agit des salariés des entreprises du secteur marchand, hors

agriculture, santé et Education ; dans l’autre cas (O. Monso), c’est l’ensemble de la population active occupée de 30 à 54 ans qui est prise en considération ;

- la source : dans le premier cas (M. Baraton), les données reposent sur des déclarations administratives d’employeurs,dans le second (O. Monso), il s’agit des déclarations d’individus interrogés en face à face ;

- la méthode : M. Baraton exploite des données issues d’un panel d’individus présents en début et fin de période, tandisqu’O. Monso traite les réponses à des questions rétrospectives (‘profession exercée cinq ans auparavant’) ;

- l’indicateur calculé : les chiffres produits par M. Baraton repose sur la provenance des cadres, ceux d’O. Monso sur ladestination des professions intermédiaires.

En outre, les biais dus aux erreurs de chiffrement de la catégorie socioprofessionnelle d’une année à l’autre dans le panelDADS ou les biais de mémoire induits par une interrogation rétrospective dans FQP (Monso, Thévenot, 2008) ont étérappelés. La mémoire étant sélective, on peut néanmoins penser que les individus ont un souvenir plus précis de lacatégorie à laquelle ils appartenaient en début de vie active ou cinq auparavant que, par exemple, des stages de formationcontinue qu’ils ont suivis.Ces précisions techniques peuvent partiellement expliquer les résultats divergents sur l’évolution de l’accès promotionnel àla catégorie cadre entre la fin des années 1970 et le début des années 2000. La caractérisation de l’accès promotionnel àla catégorie cadre à travers des données sur le niveau de formation, la classe d’âge, le sexe et le secteur peut informerdavantage que sa mesure au sens strict.

PREMIER CONSTAT :

Source : INSEE FQP 1993 et 2003 - Calculs Céreq

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Recul de l’accès promotionnel des employés etouvriers

Si, toutes générations confondues, 37 % des cadres desentreprises, interrogés en 1993, ont débuté dans la vieactive comme employés ou ouvriers, ils n’étaient plus que

29 % en 2003. L’accès à la catégorie cadre en cours de vieprofessionnelle privilégie progressivement les salariés quiont commencé leur carrière dans un emploi de niveauintermédiaire : technicien, agent de maîtrise ou assimilé.

De même, les probabilités de devenir cadre pour les salariésdébutant dans une catégorie intermédiaire, nettementsupérieures à celles des employés et ouvriers, se sontencore accrues. En moyenne, un quart des salariés des

entreprises interrogés en 2003 ayant débuté commetechnicien, agents de maîtrise ou assimilé est devenu cadredans le courant de sa vie professionnelle.

Cadres

Professions intermédiaires

Employés/ouvriers

Cadres en 1993 Cadres en 20030 %

5 %

10 %

15 %

20 %

25 %

30 %

35 %

40 %

CSP À L'ENTRÉE DANS LA VIE ACTIVE DES SALARIÉS CLASSÉS CADRES : COMPARAISON ENTRE 1993 ET 2003

Source : INSEE Enquête FQP 1993-2003 - Calculs Céreq

1993 2003

Probabilité pour un salarié ayant débuté comme employé ou ouvrier de devenir cadre 5% 5%

Probabilité pour un salarié ayant débuté comme technicien, agent de maîtrise ou assimiléé dedevenir cadre 20% 25%

Moyenne 7% 9%

Probabilité de passage dans la catégorie cadre selon la CSP d’origine

Si l’importance relative de la voie promotionnelle à lacatégorie cadre demeure inchangée, les carrières longues,commencées au bas de l’échelle hiérarchique, régressent.

Les cadres ayant commencé leur parcours comme employésou ouvriers tendent à devenir plus rares.

DEUXIÈME CONSTAT :

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires18

ANALYSE STATISTIQUE

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Surreprésentation constante des jeunes salariésparmi les promus

Ce sont les jeunes salariés qui sont proportionnellement leplus représentés parmi les promus à la catégorie cadre : 38 % des cadres promus entre 1988 et 1993 et 35 % entre

1998 et 2003 avaient moins de 30 ans en début de période.Le recul de leur part entre les deux enquêtes, au profit desalariés plus âgés, en particulier des quadragénaires, esttrop faible pour être interprété comme un changement detendance.

Prolongement d’une série sur les ingénieurs/cadres techniques et cadres administratifs/commerciaux En 1991, une étude réalisée pour le compte de l’APEC (1) recensait, à partir des données de l’enquête FQP de 1985, les modesd’accès aux deux sous–catégories embléma tiques des cadres d’entreprise : cadres administratifs et commerciaux d’une partet ingénieurs et cadres techniques d’autre part.

Le prolongement de ces données par celles des enquêtes FQP de 1993 et 2003 permet d’établir l’évolution suivante :

• D’une part, un plus grand renouvellement des deux sous-catégories, surtout en ce qui concerne les cadres administratifset commerciaux : pour ces derniers, près d’un tiers des effectifs est formé en 2003 de salariés qui appartenaient à uneautre catégorie cinq ans plus tôt contre 25 % en 1985 ; pour les ingénieurs et cadres techniques les taux équivalentss’élèvent à 30 % en 2003 contre 22 % en 1985.

• D’autre part, une augmentation non négligeable des mobilités ascendantes, notamment en provenance des professionsintermédiaires : respectivement 16,5 % en 2003 contre 13,7 % en 1985 pour les cadres administratifs et commerciauxet 17,8 % en 2003 contre 15,2 % en 1985 pour les ingénieurs et cadres techniques. 

Cadres admin et com

Cadres administratifs et commerciaux

FQP 1985 FQP 1993 FQP 2003 FQP 1985 FQP 1993 FQP 2003

Autres

Ing et cadres techn

PI

Ing et cadres techn

Autres

Cadres admin et com

PI

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %

70 %

80 %

Ingénieurs et cadres techniques

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %

70 %

80 %74,5

70,4

PI 13,7PI 16,6 PI 16,5 PI 15,2

PI 21,6PI 17,8

62,3

77,7

61,8

69,3

(1) Source : « L’accès au statut de cadre par la promotion interne », 1991, CEFI/APEC. Source : INSEE FQP: Etude APEC pour FQP 1985; Etude Céreq-Apec pour FQP

Source : INSEE Enquête FQP 1993-2003 - Calculs Céreq

PROVENANCE DES INGÉNIEURS ET CADRES : COMPARAISON 1980/1985, 1988/1993 ET 1998/2003(ACTIFS OCCUPÉS AUX DEUX DATES)

Cadres en 1993

Moins de 30 ans 5 ans auparavant

40-49 ans 5 ans auparavant50 ans et +5 ans auparavant

30-34 ans 5 ans auparavant

35-39 ans 5 ans auparavant

Cadres en 20030 %

5 %

10 %

15 %

20 %

25 %

30 %

35 %

40 %

Source : INSEE FQP: Etude APEC pour FQP 1985; Etude Céreq-Apec pour FQP 1993 et 2003

SALARIÉS PROMUS AU POSTE DE CADRE AU COURS DE 5 ANNÉES SELON LA CLASSE D'ÂGE INITIALE (COMPARAISON 1988-1993 ET 1998-2003)

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires 19

ANALYSE STATISTIQUE

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ANALYSE STATISTIQUE

20 ©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires

En outre, l’accroissement des probabilités de promotion dessalariés les plus jeunes (Baraton, 2006) sembleraitconfirmé. Mesurées sur cinq années, ces probabilités ontaugmenté entre 1993 et 2003 pour les moins de 30 ansalors qu’elles sont restées stables pour les plus de 30 ans.

La forte proportion de jeunes salariés parmi les « cadrespromus  » mérite d’être mise en relation avec la partimportante de débutants qui accèdent à la catégorie cadre

après plusieurs années de vie active. Près de la moitié (46 %) des cadres des entreprises de 2004 sortis du systèmeéducatif en 1998 ont débuté dans une catégoriesocioprofessionnelle inférieure : profession intermédiaire,employé/ouvrier (Enquête Génération Céreq). L’examenultérieur des caractéristiques de ces jeunes donnera unevision plus précise des circonstances de leur passage dansla catégorie cadre (voir infra).

Une part importante de l’alimentation de la catégorie cadrepar la voie promotionnelle repose sur les salariés les plusjeunes qui constituent un vivier particulier (faux débutantsou faux promus ?). L’accès promotionnel à la catégoriecadre en début de vie active peut être considéré commele reflet d’une pratique de sélection différée de la part desentreprises. Il reste à établir si cette pratique estvéritablement nouvelle.

Érosion progressive de la part du cadre« autodidacte» parmi les promus

Si l’on retient la définition du cadre autodidacte retenuepar Michel Cézard (1973), « cadre n’ayant pas de diplômed’enseignement supérieur », sa représentation parmi lespromus tend à reculer. Alors que les deux tiers despromotions au poste de cadre en 1993 concernaient dessalariés ayant au plus le baccalauréat, en 2003 ils n’enreprésentent plus que la moitié. Par ailleurs, le rééquilibrageau bénéfice des diplômés du supérieur fait apparaître lacroissance de la part des Bac +2 dans les promotions.

En outre, les salariés qui ont au plus le baccalauréat ont2 % de chances d’être promus cadres contre respectivement22 % et 12 % pour les diplômés du supérieur de niveau I,II et les Bac +2, ces proportions étant stables d’une enquêteà l’autre.

TROISIÈME CONSTAT :

L’accès promotionnel à la catégorie cadre est marqué parune élévation sensible du niveau de formation initiale despromus. Une telle élévation ne fait-elle que reproduirel’évolution générale du profil de l’ensemble des salariés ou

traduit-elle un changement réel des pratiques de promotiondes entreprises ? Un examen plus fin des profils des promuspermettra de le déterminer.

QUATRIÈME CONSTAT :

Cadres promus en 1993 Cadres promus en 20030 %

20 %

40 %

60 %

80 %

100 %

VI

V

IV

III

I, II

VI

V

IV

III

I, II

SALARIÉS PROMUS CADRES AU COURS DES 5 ANNÉESPRÉCÉDANT L'ENQUÊTE PAR NIVEAU DE DIPLÔMEINITIAL* (COMPARAISON 1993 - 2003)

Source : INSEE Enquête FQP 1993-2003 -Calculs Céreq

*Voir annexe p.79

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Les jeunes salariés, dont on a vu qu’ils représentent plusdu tiers des promus cadres, se démarquent fortement del’ensemble des promus par leur profil de formation. Près destrois quarts d’entre eux sont diplômés du supérieur, contre37 % pour les plus de 35 ans. Par ailleurs, ce sont lesdiplômés de BTS/DUT (niveau III) qui sont le plusreprésentés parmi les jeunes salariés promus cadres  : 36 % des promotions concernent ce niveau de diplôme.

L’observation du clivage entre les générations de salariéspromus à une date donnée ne révèle pas nécessairementdes changements dans les pratiques de promotion desentreprises10. D’une part, elle reflète l’évolution globale duniveau de diplôme des salariés. D’autre part, quelle que soitl’époque considérée, la décision de promotion accorde unpoids différent selon l’âge et l’ancienneté aux savoirs etcompétences acquis par la formation et/ou l’expérience. Ilparaît donc assez logique que le niveau de formationformelle varie en fonction de l’âge des salariés promus,même en cas de continuité des politiques. Par leur profil,les jeunes salariés promus cadres se rapprochent davantagedes débutants directement recrutés sur un poste de cadreque des promus les plus anciens.

ANALYSE STATISTIQUE

21©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires

Moins de 30 ans en 1998 Plus de 30 ans en 19980 %

20 %

40 %

60 %

80 %

100 %

Bac au plus

Niveau III

Niveau I, II

Bac au plus

Niveau III

Niveau I, II

PROFIL DES SALARIÉS PROMUS AU POSTE DE CADRE AU COURS DES 5 ANNÉES PRÉCÉDANT L'ENQUÊTESELON L'ÂGE (ENQUÊTE FQP 2003)

Source : INSEE Enquête FQP 1993-2003 - Calculs Céreq

n LES CARACTÉRISTIQUES DE L’ACCÈS PROMOTIONNEL À LA CATÉGORIE CADRE

UN PROFIL DE FORMATION MARQUÉ PAR LA CLASSE D’ÂGE DES PROMUS

La comparaison des profils des jeunes cadres (moins de 35ans) selon leur mode d’accès à la catégorie (recrutementdirect ou accès promotionnel) fait ressortir des différencesassez nettes entre les deux groupes :

d’un côté, les débutants forment un groupe au profil trèshomogène, composé à 90 % de diplômés du supérieur,répartis à part à peu près égale entre les sortants de 2e/3e

cycles universitaires et les sortants des grandes écoles ;

d’un autre côté, les jeunes cadres promus ont un profilnettement plus diversifié, mettant en évidence troiscatégories d’importance à peu près équivalente : lesdiplômés du supérieur court (BTS, DUT), les diplômés de2e et 3e cycles (universités et grandes écoles confondues)et les « autodidactes » (Bac au plus).

Ces chiffres révèlent des pratiques de promotion de jeunessalariés associant le reclassement de débutants diplômésdu supérieur, surtout issus des filières universitaires (LMD),et la mobilité ascendante de jeunes techniciens supérieurs(Bac +2), voire de bacheliers. L’examen ultérieur de cespratiques par secteur d’activité économique permettra demieux caractériser leur diversité (voir II infra).

Les données sur la situation en 2004 des sortants dusystème éducatif en 1998 (Céreq-Génération) corroborentces résultats pour ce qui concerne le profil des débutantsrecrutés directement sur un emploi de cadre, à la nuanceprès que les sortants des grandes écoles sont sous-représentés dans l’enquête sur les sortants par rapport auxdonnées de l’enquête FQP.

DES PROFILS DE PROMUS PLUS DIVERS QUE CEUX DES DÉBUTANTS

10. La comparaison des deux enquêtes (1993 et 2003) aurait donné la possibilité d’observer d’éventuels changements. Cependant, la taille del’échantillon de FQP 1993 ne permet pas de croiser diplôme et âge des promus.

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Étudiants en 1998 recrutés comme cadres

Promus cadres depuis 1998

0 %

20 %

40 %

60 %

80 %

100 %

Bac + 2Bac au plus

Grandes écoles

I,II Université

Bac + 2

Bac au plus

Grandes écoles

I,II Université

En revanche, pour les sortants qui ont été promus cadresaprès avoir occupé un premier emploi dans une catégoriesocioprofessionnelle inférieure, la part des diplômés de 2e

et 3e cycles du supérieur (universités et grandes écolesconfondues) est nettement plus importante dans l’enquêteGénération que dans les données de l’enquête FQP. Cedécalage s’explique par le fait que les populations des deux enquêtes sont différentes : dans un cas (FQP), ils’agit de jeunes actifs occupés ayant moins de 30 ans en1998 mais qui peuvent avoir déjà accumulé plusieursannées d’expérience professionnelle, a fortiori s’ils sontrelativement moins diplômés et donc entrés plus tôt sur lemarché du travail ; dans l’autre cas (enquête Génération),il s’agit de débutants en 1998.

Il apparaît néanmoins clairement que trois catégories dediplômés se détachent parmi les cadres promus au cours de

leurs premières années de vie active : les BTS/DUT, lestitulaires d’un diplôme universitaire de niveau maîtrise etceux qui ont au plus le baccalauréat. Au final, les cadres desentreprises qui se sont insérés 7 ans plus tôt dans la vie activeprésentent un profil très hétérogène comparé à celui desdébutants qui ont été recrutés directement comme cadres.

Ces résultats font ressortir une facette de l’accès à lacatégorie cadre dans les entreprises qui remet en questionla distinction classique entre cadres diplômés et cadresautodidactes. En réalité, ce qui distingue les cadresdébutants des cadres promus ne se réduit pas à uneopposition en termes de niveau mais tient davantage à lagrande homogénéité du profil des débutants recrutéscomme cadres en regard de la variété de profil des cadrespromus, indice du recours à une combinaison de critèresdans les pratiques de promotion.

Sortants 1998 cadres au 1er emploi

Sortants 1998 devenus cadres

0 %

20 %

40 %

60 %

80 %

100 %Bac + 2

Grandes écoles

I,II Université

Bac + 2

Bac au plus

Grandes écoles*

* non significatif

I,II Université

NIVEAU DE DIPLÔME DES JEUNES CADRES EN 2003SELON LEUR MODE D'ACCÈS À LA CATÉGORIE (MOINS DE 30 ANS EN 1998)

NIVEAU DE DIPLÔME DES SORTANTS DU SYSTÈMEÉDUCATIF EN 1998 CADRES AU 1ER EMPLOI OU DEVENUS CADRES ENTRE 1998 ET 2004

Source : Céreq - Génération 1998 réinterrogée 7 ans plus tardSource : INSEE - Enquête FQP 2003 - Calculs Céreq

Cadres au 1er emploi PIEO au 1er emploi classés cadres en 2004 Ensemble des sortants 1998 classés cadres en 2004

0

10

20

30

40

50

3e cycle

Écoles

Licence

Maîtrise

BTS DUT

Infra IIIx x

3e cycle

Maîtrise

Écoles

Infra III

BTS DUT

x x

x = non significatif

NIVEAU DE DIPLÔME DES SORTANTS 1998 CADRES EN 2004, RECRUTÉS COMME CADRES AU 1ER EMPLOI OU REVENUSCADRES ENTRE 1998 ET 2004

Source : Céreq - Génération 1998 réinterrogée 7 ans plus tard

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires22

ANALYSE STATISTIQUE

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La situation privilégiée dont bénéficient les sortants desécoles d’ingénieurs et de commerce par rapport aux sortantsd’université lors du recrutement dans les entreprises n’a riend’un phénomène nouveau. Il s’inscrit au contraire dans lacontinuité de pratiques anciennes : « … entre 1960 et1975, les entreprises ont continué, comme par le passé, àrecruter une grande partie de leurs jeunes cadres à la sortiedes écoles de commerce (ou de gestion) et des écolesd’ingénieurs (d’où sont issus, selon les différentes sources,de 30 % à 50 % des cadres) dont les effectifs ont certesaugmenté durant la période mais beaucoup moins vite etbeaucoup moins fortement que ceux, considérablementplus élevés, des universités » (Boltanski, 1985).

Toutefois, l’augmentation des effectifs de cadres a surtoutprofité aux diplômés universitaires de 3e cycle dont la parta le plus augmenté dans les recrutements de débutants,égalant presque celle des sortants des écoles d’ingénieur.À contrario, les débutants de niveau licence ou maîtriseont vu leur part fortement régresser dans les recrutementsdirects de cadres. C’est précisément cette catégorie dediplômés du supérieur qui forme la grande majorité despromus cadres : ils représentent 57 % des promus ayantmoins de 20 ans d’ancienneté professionnelle et 73 % despromus ayant plus de 20 ans d’ancienneté.

<20 ans d’ancienneté

>20 ans d’ancienneté

<20 ans d’ancienneté

>20 ans d’ancienneté

<20 ans d’ancienneté

>20 ans d’ancienneté

Diplôme d'ingénieur DEA, DESS, Doctorat Licence, maîtrise

TAM

Empl/ouvriers

Cadres

0 %

20 %

40 %

60 %

80 %

100 %

CSP DES DIPLÔMÉS DU SUPÉRIEUR LORS DE LEUR 1ER EMPLOI SELON LE TYPE DE DIPLÔME ET L'ANCIENNETÉ PROFESSIONNELLE

Source : INSEE - FQP 2003 - Calculs Céreq

Toutes générations confondues, les probabilités pour undiplômé du supérieur, au-delà du Bac +2, de débuter sa vieprofessionnelle sur un emploi de cadre varient sensiblementselon le type de filière et le niveau de diplôme. Ainsi, lessortants d’écoles d’ingénieurs ont 84 % de chances d’êtrerecrutés comme cadres dès le premier emploi tandis que,pour les titulaires d’un doctorat, d’un DEA/DESS ouéquivalent, ces chances tombent à 57 % et pour lestitulaires d’une licence et d’une maîtrise, à 24 %.

Par ailleurs, l’évolution de l’accès direct à la catégoriecadre que permet la comparaison des diplômés selon leurancienneté professionnelle (moins de 20 ans d’ancienneté,

plus de 20 ans d’ancienneté11) est également marquée parla filière suivie dans l’enseignement supérieur. Ainsi, pourles diplômés des grandes écoles et pour les 3e cyclesuniversitaires, les chances d’être recrutés directementcomme cadres se révèlent très stables : selon la génération,elles oscillent entre 84 % et 86 % pour les ingénieursdiplômés et entre 57 % et 59 % pour les 3e cycles. Enrevanche, pour les titulaires de licence et maîtrise, lesprobabilités de débuter comme cadres, déjà faibles parmiles plus anciens (34 %), ont nettement décliné : 21 % pourceux qui ont moins de 20 ans d’ancienneté professionnelle.

STABILITÉ DES CHANCES D’ACCÈS DIRECT DES DIPLÔMÉS DEGRANDES ÉCOLES ET DE 3ÈME CYCLE

11. L’échantillon ne permet pas de faire des catégories d’ancienneté professionnelle plus fines.

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires 23

ANALYSE STATISTIQUE

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12. 6 % des femmes qui ont débuté comme professions intermédiaires, employées ou ouvrières déclarent être cadres d’entreprise en 2003.

20 ans d’ancienneté et plus

Moins de 20 ansd’ancienneté

Diplômés d’école d’ingénieur 39,6% 41,6%

Diplômés de 3e cycle universitaire 24,5% 36,6%

Licence, maîtrise 35,9% 21,8%

Ensemble 100,0% 100,0%

Répartition des diplômés du supérieur (LMD) recrutés comme cadres à l’entréedans la vie active selon le diplôme et l’ancienneté professionnelle

Source : INSEE - FQP 2003 - Calculs Céreq

Moindres probabilités d’être recrutée comme cadre

Il ressort en premier lieu des données, quels que soientl’enquête et l’indicateur utilisés, que les femmes ont moinsde probabilités d’accéder à la catégorie cadre que leshommes. Ce qui est vrai pour le premier emploi occupé sevérifie pour la mobilité professionnelle ascendante en coursde vie active.

Ainsi, pour les salariés des entreprises observés en 2004et qui sont sortis du système éducatif en 1998, 11 % desjeunes hommes et 8 % des jeunes femmes ont débuté surun poste de cadre.

Le profil de formation (niveau et spécialité de diplôme)contribue à expliquer cet écart. En termes de spécialités,quelle que soit leur catégorie socioprofessionnelle, lesjeunes hommes salariés des entreprises ont trèsmajoritairement un diplôme relevant d’une disciplinescientifique ou industrielle (59 %) et les jeunes femmes undiplôme dans une discipline tertiaire (66,5 %). De même,si globalement une part nettement plus importante desjeunes femmes de l’échantillon est diplômée del’enseignement supérieur (44 % contre 36 % pour les jeuneshommes), en revanche la part de jeunes hommes diplômés

de 3e cycle ou d’une grande école est un peu plus élevée(11 % contre 9 %). Or c’est à ce niveau et davantage dansles disciplines scientifiques et industrielles que se situe laquasi-totalité des recrutements de cadres débutants.Cependant, à profil identique (sortants de grandes écoles dans une discipline scientifique ou technique), les hommesont plus de probabilités d’avoir été recrutés comme cadres àla première embauche que les femmes (85 % contre 70 %).

Et moindres probabilités d’accéder à la catégoriecadre en cours de vie active

Toutes générations confondues, une femme sur vingt a eul’opportunité, après avoir débuté sur un emploi deprofession intermédiaire/employée ou ouvrière, de passerdans la catégorie cadre, alors que près d’un homme sur dixest dans ce cas. Cet écart se retrouve, de manière moinsprononcée, lorsque sont considérés les passages cadres aucours des cinq années précédant l’enquête ou pour lessortants de 1998 observés en 2004 et ayant débuté dansun emploi de profession intermédiaire, d’employé oud’ouvrier.

FEMMES : LA « DOUBLE PEINE »

FQP 1993 FQP 2003

Hommes 9% 11%

Femmes 5% 6%12

Probabilités d’être devenu cadre en ayant débuté dans uneCSP salariée inférieure

Source : INSEE – Enquête FQP – Calculs Céreq

FQP 1993 FQP 2003

Hommes 4% 5%

Femmes 3% 3%

Probabilités d’être devenu cadre au cours des 5 annéesprécédentes

Source : INSEE – Enquête FQP – Calculs Céreq

Génération 1998 interrogée en 2004

Hommes 10%

Femmes 7%

Probabilités pour les sortants de 1998 d’être passés cadresentre le premier et le dernier emploi observé

Source : Céreq – Génération 1998 observée en 2004

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires24

ANALYSE STATISTIQUE

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Parallèlement à ce qui est observé pour les recrutementsdirects de cadres, les femmes promues cadres sont dansl’ensemble plus diplômées que les hommes promus :

en 2003, 61 % des femmes devenues cadres depuis ledébut de leur vie active étaient diplômées du supérieur(contre 45 % pour les hommes) ;

en 2004, 81 % des jeunes femmes sorties en 1998 dusystème éducatif devenues cadres entre le premier et ledernier emploi observés étaient diplômées du supérieur,contre 75 % des hommes.

Il apparaît à travers ces chiffres que le cadre « autodidacte »est plus représenté chez les hommes que chez les femmespour lesquelles une grande partie des promotionss’apparente davantage à des reclassements : 40 % dessalariées promues ont un diplôme du supérieur au moinségal à la licence (contre 20 % pour leurs homologuesmasculins). Par ailleurs, dans cette catégorie, 80 % desfemmes sont diplômées dans une discipline tertiaire contre66 % chez les hommes.

On pourrait entrevoir dans ces résultats la confirmation del’hypothèse de Luc Boltanski selon laquelle seraientmaintenues des formes d’exclusion des femmes despositions d’autorité et de pouvoir.

Hommes Femmes 0 %

20 %

40 %

60 %

80 %

100 %3e cycle et grandes écoles

Licence, Maîtrise

Niveau III

Niveau IV et infra

3e cycle et grandes écoles

Licence, Maîtrise

Niveau III

Niveau IV et infra

NIVEAU DE DIPLÔME INITIAL DES SALARIÉS DEVENUSCADRES APRÈS AVOIR DÉBUTÉ DANS UNE CSP DENIVEAU INFÉRIEUR

Source : INSEE - FQP 2003 - Calculs Céreq

Dans l’ensemble, quelle que soit sa provenance, le « cadreencadrant » tend à perdre en importance au profit du cadreexpert. Un peu plus de la moitié des cadres déclaraient avoirune fonction d’encadrement en 2003 contre 68 % dix ansplus tôt. Ce résultat corrobore le constat établi en 1998suivant lequel de moins en moins de cadres encadrent(Amossé, Delteil, 2004).

Parmi les cadres, ceux qui le sont devenus en cours de vieactive sont néanmoins plus fréquemment en situationd’encadrer que ceux qui sont cadres depuis l’entrée enactivité. L’écart a même tendance à se creuser, surtout dufait du net recul de la prise en charge de fonctionsd’encadrement parmi ceux qui débutent comme cadres : - 20 points entre 1993 et 2003.

Cet écart peut avoir deux explications : l’ancienneté et lesfonctions exercées antérieurement. D’une part, les cadrespromus ont une plus grande ancienneté que les autres etils sont d’autant plus anciens lorsqu’ils exercent unencadrement. Or, comme l’ont constaté Amossé et Delteil,le recul des fonctions d’encadrement des cadres intervientsurtout en début de carrière, pour les cadres qui ont moinsde dix ans d’ancienneté professionnelle  : «  Alorsqu’auparavant les responsabilités hiérarchiques pouvaientintervenir relativement tôt dans la carrière des cadres,aujourd’hui l’opportunité d’encadrer une équipe ou de

UN CERTAIN CLIVAGE DES FONCTIONS ATTRIBUÉES SELON LE MODED’ACCÈS

1993 20030

10

20

30

40

50

60

70

80

Cadres dès le 1er emploi Cadres promus

PART DE CADRES AYANT UNE FONCTION D'ENCADREMENTSELON LE MODE D'ACCÈS, ÉVOLUTION 1993-2003

Source : INSEE Enquête FQP 1993-2003 - Calculs Céreq

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires 25

ANALYSE STATISTIQUE

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diriger un service se présente davantage en milieu decarrière ». D’autre part, les cadres qui ont débuté dans unecatégorie socioprofessionnelle inférieure accèdent souventà la catégorie cadre du fait des capacités qu’ils ontdémontrées dans l’animation d’équipes.

L’évolution des types de fonctions exercées par les cadresselon l’accès à la catégorie – direct ou promotionnel –renforce ces constats. Le recul des fonctions de cadresliées à la production, l’exploitation et la forte poussée desfonctions liées aux études, méthodes, recherche et

développement contribuent à expliquer la perte de vitessedes fonctions d’encadrement des cadres. Cette évolution metégalement en évidence la polarisation des fonctionsattribuées aux cadres recrutés directement sur l’expertise(études, méthodes, recherche). Pour les cadres issus de lapromotion, plus souvent en charge des fonctionsadministratives et commerciales, la répartition des activitésest plus équilibrée, l’évolution privilégiant le domainecommercial.

Cadres dès le 1er emploi

1993

Prod, instal, maint.

Log., compta, gestion

Commercial Etudes R&D

Formation, santé

Cadres promus0 %

5 %

10 %

15 %

20 %

25 %

30 %

35 % 2003

Prod, instal, maint.

Log., compta, gestion

Commercial Etudes R&D

Formation, santé

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

RÉPARTITION DES CADRES PAR FONCTION SELON LE MODE D'ACCÈS

Source : INSEE - FQP 1993 et 2003 - Calculs Céreq

L’impact de l’appartenance sectorielle sur les modes degestion de l’emploi, des recrutements et des carrières dansles entreprises a été mis en évidence par de nombreuxtravaux déjà anciens13. Son analyse, appliquée à laconstruction de la qualification des cadres, conduit à considérer l’« effet sectoriel » comme un des facteursexplicatifs de l’hétérogénéité et de la segmentation de lacatégorie (Leroux, 2005).

La recherche d’un effet sectoriel sur le mode d’alimentationde la catégorie cadre dans les entreprises s’inscrit dans cetteperspective. Dans un premier temps, un classement dessecteurs d’activités économiques sera dégagé sur la basede leur plus ou moins grande ouverture à l’accèspromotionnel à la catégorie cadre. À l’issue de ce panorama,plusieurs modèles archétypiques des pratiques de« cadrage » seront distingués.

Le classement des secteurs selon l’importance de l’accèspromotionnel à la catégorie cadre dépend de l’angle de vueadopté. En effet, la proportion de cadres qui ont débutédans une catégorie socioprofessionnelle inférieure (« table

de provenance ») n’est pas nécessairement en phase avecles probabilités de devenir cadre pour les salariés classésprofessions intermédiaires, employés ou ouvriers en débutde vie active (« table de destinées »).

n L’EFFET SECTORIEL SUR L’ACCÈS PROMOTIONNEL À LA CATÉGORIECADRE

HIÉRARCHIE INTERSECTORIELLE DE L’ACCÈS PROMOTIONNEL

13. Ces travaux, plus spécifiquement consacrés à l’industrie (Eymard-Duvernay F. 1981, Grando J.M., 1983) ou à l’insertion des jeunes (ClémenceauP., Gehin J.P. , 1983, Moncel N. 1997), ont été insuffisamment renouvelés.

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires26

ANALYSE STATISTIQUE

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Dans plusieurs secteurs tels que le commerce/réparationautomobile, l’immobilier, les transports, la construction, lecommerce de gros et le secteur financier, la part de cadresayant débuté dans la vie active comme ouvriers, employésou professions intermédiaires est nettement supérieure àla moyenne intersectorielle.

À l’opposé, les services hautement qualifiés aux entreprises(conseil, expertise, informatique, publicité etc.) et lespostes et télécommunications figurent en queue de pelotonpour la part de promus parmi les cadres. Les secteursindustriels - biens de consommation et industrieagroalimentaire, biens d’équipement et biens intermédiaires -ont, quant à eux, des valeurs assez proches de la moyenneintersectorielle.

Dans le premier cas, pour des secteurs comme laconstruction, le commerce/réparation automobile, lestransports -, dans lesquels quatre cadres sur cinq sont issusde la promotion (provenance), l’accès promotionnel peutêtre considéré comme le mode privilégié de recrutementdes cadres. Pourtant, ces cadres ne représentent qu’une trèsfaible part de l’ensemble des salariés qui ont débuté dansune catégorie socioprofessionnelle inférieure, part situéeen-deçà de la moyenne intersectorielle (destinée). Il y adonc très peu d’« élus ».

Dans le deuxième cas, en particulier dans les serviceshautement qualifiés aux entreprises (conseil, expertise,informatique, publicité etc.), pour lesquels les recrutementsdirects de cadres sont privilégiés par rapport à la promotion,les cadres promus représentent néanmoins près d’un tiersdes salariés qui ont débuté comme techniciens, employésou ouvriers (31 %).

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"PROVENANCE" : PART DE CADRES AYANT DÉBUTÉ DANS LA VIE ACTIVE DANS UNE CATÉGORIESOCIOPROFESSIONNELLE INFÉRIEURE PAR SECTEUR D'ACTIVITÉ (2003)

Source : INSEE - PQP 2003 - Calculs Céreq

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"DESTINÉE" : PART DE CS INFÉRIEURES AYANT ACCÉDÉ À LA CATÉGORIE CADRE PAR SECTEUR D'ACTIVITÉ (2003)

Source : INSEE - FQP 2003 - Calculs Céreq

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ANALYSE STATISTIQUE

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Cette proportion place les services hautement qualifiésaux entreprises en tête de la hiérarchie intersectoriellepour les probabilités de devenir cadre. Dans des proportionsnettement moins élevées, les postes et télécommunicationset l’industrie des biens d’équipement14 présentent desconfigurations proches.

Dans un troisième cas de figure, rassemblant plusieurssecteurs comme l’immobilier et le commerce de gros, maissurtout le secteur financier, une certaine cohérence entrela provenance des cadres et les probabilités de promotionpeut être observée, avec des taux supérieurs à la moyenneselon les deux modes de calcul. Non seulement les cadresde ces secteurs proviennent très majoritairement de lafilière promotionnelle mais les probabilités de devenir cadreà partir de la voie promotionnelle sont relativement élevées.

À l’opposé, les cadres de la santé, du social, de la formation,de la culture et du sport15 sont toujours situés au bas dela hiérarchie intersectorielle, qu’il s’agisse de leurprovenance ou des probabilités des catégoriessocioprofessionnelles inférieures de le devenir.

De telles configurations et leurs apparents paradoxesnécessitent, pour être explicités, que soient prises encompte d’autres dimensions. Les probabilités d’accès à lacatégorie cadre dépendent d’abord largement de laproportion de cadres dans la structure des emplois parcatégorie socioprofessionnelle. Mais le degré d’anciennetédans l’entreprise, l’importance accordée à la promotioninterne, le niveau de diplôme initial des cadres sont autantde facteurs interagissant pour révéler les politiques derecrutement et de carrière mises en œuvre dans chaquesecteur.

Une corrélation étroite entre la part de cadres et lesprobabilités de promotion

La part de cadres dans la structure des emplois variefortement d’un secteur à l’autre. Or, plus cette part estélevée, plus les probabilités d’y accéder en cours de vieactive sont importantes. C’est ce que fait apparaître laproximité du classement sectoriel issu des deux graphiques(graphique destinée et graphique part de cadres).

Ainsi, les services hautement qualifiés aux entreprises sedistinguent-ils par une part de cadres très nettementsupérieure à la moyenne (45 % contre 17 % en moyenneen 2008) et les probabilités les plus élevées d’accéder à lacatégorie en cours de vie active. Il n’est donc pascontradictoire que se retrouve dans ce secteur la proportionla plus élevée de techniciens, employés et ouvriers devenuscadres bien que les cadres promus y soient relativementmoins représentés par rapport à la moyenne intersectorielle.

Le secteur financier et, dans une moindre mesure, les posteset télécommunications, les biens d’équipement et lecommerce de gros présentent également une partrelativement importante de cadres, combinée à desprobabilités d’accès à la catégorie parmi les plus élevées.

À l’opposé, la faible présence des cadres dans laconstruction, le commerce de détail, le commerce /réparation automobile et les services opérationnels auxentreprises explique qu’une proportion très faible d’anciensouvriers, employés ou techniciens soient cadres dans cessecteurs.

14. Certains secteurs, tels que l’énergie, l’hôtellerie-restauration et les services personnels et domestiques, n’ont pas pu être inclus dans ce classementdu fait de leur faible nombre de cadres, compte tenu de l’échantillon de l’enquête FQP.

15. Ils seront désignés par la suite par le terme « services socioculturels »

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PART DES CADRES DANS LA STRUCTURE DES EMPLOIS PAR CS SELON LE SECTEUR EN 2008

Source : INSEE - Enquête Emploi 2008 - Calculs Céreq

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ANALYSE STATISTIQUE

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Une répartition différenciée des cadres débutants etpromus

Une vision plus fine de l’alimentation de la catégorie cadresur une période de cinq ans peut être apportée pourquelques secteurs importants. Elle a pour objectif depréciser la place respective du recours au recrutement dedébutants et à la promotion dans le renouvellement de lacatégorie. En moyenne, entre 1998 et 2003, un peu moins

du tiers des effectifs de cadres ont été renouvelés. Cetteproportion est variable selon le secteur, elle est par exempleplus importante dans les services hautement qualifiés auxentreprises et plus faible dans le commerce. Mais c’estsurtout dans le mode de renouvellement de la catégorie queles pratiques sectorielles se différencient les unes desautres.

Services hautement qualifiés

aux entreprises

Culture, santé, social, formation,

sports, assoc.

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Promus cadres entre 1998 et 2003

Etudiants en 1998 cadres en 2003

RENOUVELLEMENT DES CADRES : RELATION ENTRE PROMOTION ET RECRUTEMENT DE DÉBUTANTS PAR ORDRE CROISSANTDE PART DE PROMUS ENTRE 1998 ET 2003

Note de lecture : parmi les cadres du commerce en 2003, 22 % occupaient une catégorie socioprofessionnelle inférieure et 7 % étaient étudiants cinq ans plus tôtSource : INSEE - FQP 2003 - Calculs Céreq

En moyenne, la part des promotions dépasse de quelquespoints celle des recrutements de débutants (18% contre15%). Cet avantage relatif plus ou moins prononcé estvisible dans tous les secteurs, sauf dans les serviceshautement qualifiés aux entreprises où la part de débutantscadres recrutés est nettement supérieure à celle des promus,ce qui corrobore les résultats précédents. À l’opposé, la partde promus dans les secteurs du commerce dépasselargement celle des débutants (22 % contre 7 %).

L’impact spécifique des pratiques de promotioninterne à l’entreprise L’accès à la catégorie cadre en cours de vie active estétroitement lié aux pratiques de promotion interne àl’entreprise, celles-ci en étant une composante.

La distribution des secteurs selon l’importance des pratiquesde promotion interne à l’entreprise confirme et affine lesobservations sur l’ensemble de l’accès promotionnel. Dansles services hautement qualifiés aux entreprises et dans lessecteurs socioculturels, la faiblesse de la promotion interneà l’entreprise contribue à expliquer la part peu élevée decadres issus de la mobilité ascendante (voir graphiqueProvenance p.27).

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires 29

ANALYSE STATISTIQUE

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PART DES CADRES ISSUS DE LA PROMOTION INTERNE PAR SECTEUR EN 2008

Source : INSEE - Enquête emploi - Calculs Céreq

Mesure de la promotion interne à l’entreprise Dans l’enquête Emploi de l’INSEE, on demande aux individus s’ils occupent le même poste ou la même fonction qu’à leurentrée dans l’entreprise. Dans la négative, les individus doivent indiquer leur catégorie socioprofessionnelle à l’entrée dansl’entreprise. Le rapprochement entre les deux CS permet de mesurer la promotion interne.

Toutefois, ce taux est probablement sous-estimé. Dans certains cas, des salariés peuvent accéder à une catégoriesocioprofessionnelle supérieure sans changer de poste, ni de fonction. On peut néanmoins considérer que ces cas sontmarginaux.

De même, dans les postes et télécommunications, lestransports et le secteur financier, les taux élevés depromotion interne à la catégorie cadre déterminent labonne place de ces secteurs en matière d’accèspromotionnel. Les raisons de ce classement ne sont pas pourautant identiques. Dans les transports et les postes ettélécommunications, la part élevée de promotion internetient en grande partie aux activités dominées par le poidsdes entreprises publiques (postes, transport ferroviaire,transport aérien) qui ont une part de cadres issus de lapromotion interne nettement supérieure à la moyenne.

La bonne situation du secteur financier doit êtrerapprochée, de son côté, des politiques de carrière dansles entreprises de ce secteur, caractérisées par la prégnancedu modèle de marché interne qui, malgré l’évolution desmodes de recrutement, demeure vivace en comparaisondes autres secteurs. Transports Poste et Télécom

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Entreprise publique Entreprise privée

PART DES CADRES ISSUS DE LA PROMOTION INTERNESELON LE TYPE D'ENTREPRISE DANS LES TRANSPORTS ETLES POSTES ET TÉLÉCOMMUNICATIONS

Source : Enquête Emploi 2008 - Calculs Céreq

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires30

ANALYSE STATISTIQUE

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Une ancienneté dans l’entreprise cohérente avec lespratiques de promotion interne

Ces différents résultats sont confirmés par la prise encompte de l’ancienneté des cadres dans l’entreprise. Dansles services hautement qualifiés aux entreprises, la part plusrestreinte de cadres les plus anciens renvoie à l’importancedes échanges avec le marché externe (recrutements de

cadres débutants ou mobilité interentreprises). À l’opposé,les secteurs dans lesquels sont présentes des entreprisespubliques (Transports, Postes et Télécommunications) etle secteur financier comptent parmi ceux qui ont la partla plus importante de cadres ayant l’ancienneté la plusélevée.

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10 ans et + 5 à <10 ans <5 ans

ANCIENNETÉ DES CADRES DANS L'ENTREPRISE PAR ORDRE CROISSANT DE CADRES AYANT 10 ANS D'ANCIENNETÉ ET PLUS

Source : INSEE - Enquête emploi 2008 - Calculs Céreq

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3e cycle et Grandes écoles Licence maîtrise Bac + 2 Bac Niveaux V et VI

NIVEAU DE DIPLÔME DES CADRES PAR SECTEUR EN 2008 (PAR ORDRE CROISSANT DE DIPLÔMÉS DU SUPÉRIEUR AU-DELÀDE BAC+2)

Source : INSEE - Enquête emploi - Calculs Céreq

Des diplômés du supérieur d’autant plus nombreuxque la part de promus est limitée

La répartition des cadres par niveau de diplôme selon lesecteur semble assez cohérente avec les pratiques decadrage observées.

Les services hautement qualifiés aux entreprises sedétachent avec une part de cadres diplômés du supérieurnettement plus élevée que dans la moyenne des secteurs(83 % contre 72 %). Cette proportion est en outre dominéepar les diplômés de grandes écoles et du troisième cycleuniversitaire (54 % contre 42% en moyenne).

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires 31

ANALYSE STATISTIQUE

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La prépondérance des titulaires des grandes écoles et 3èmescycles est également visible dans le secteur des biensd’équipement/industrie automobile qui partage avec lessecteurs de la culture, santé/social, formation une part decadres diplômés du supérieur plus élevée que la moyenne.Ce groupe de secteurs « socioculturels » se distinguecependant par une part de cadres du niveau de la licenceou maîtrise nettement plus importante. Ces trois premierssecteurs qui ont en commun d’avoir une part de cadrespromus inférieure à la moyenne intersectorielle, enparticulier ceux issus de la voie interne à l’entreprise, setournent donc davantage vers le marché externe et lesdébutants diplômés pour recruter leurs cadres.

Au pôle opposé se situe le secteur du commerce/réparationautomobile dont la grande majorité des cadres a au plusle niveau de baccalauréat (68 %). Dans ce secteur, plus de80 % des cadres sont issus de la mobilité ascendante. Lessecteurs de l’immobilier, des transports et de la constructionfont partie, dans des proportions moindres, de la mêmeconfiguration : une part de cadres issus du rang parmi lesplus élevées et une proportion de cadres diplômés dusupérieur inférieure à la moyenne intersectorielle. Enrevanche, ces secteurs se différencient dans les modalitésde l’accès promotionnel. Dans les transports, cet accèsrepose sur la promotion interne à l’entreprise tandis que,dans la construction et l’immobilier, il semble davantagefavorisé par la mobilité interentreprises.

De fait, il existe deux configurations sectorielles permettantd’identifier des pratiques de cadrage suffisamment nettespour pouvoir constituer un modèle : les services hautementqualifiés aux entreprises et le secteur financier. Ces deuxcas sont d’autant plus intéressants à faire ressortir qu’ilsse distinguent fortement l’un de l’autre et constituent deuxpôles au sein des activités de services, sachant que celles-ci représentent actuellement le gros des recrutements decadres.

Le premier pôle, qualifié de « tertiaire innovant », nonseulement pour son taux d’innovation mais également pourson organisation faiblement procédurale (Dieuaide, 2008),regroupe les activités de conseil, ingénierie et informatique.Le deuxième, couvrant les activités financières (banques

et assurances), a certes connu de profondes mutationséconomiques et sociales au cours des trente dernièresannées mais n’en demeure pas moins marqué par un modede gestion assez traditionnel, en comparaison du premierpôle.

Les autres secteurs sont plus difficilement classables, soitparce qu’ils ont des valeurs très proches de la moyenne,soit parce que leur part de cadres est tellement réduite qu’ilest difficile d’identifier des pratiques concernant leurrecrutement, soit enfin parce qu’ils constituent des agrégatstrop hétérogènes pour qu’un type de pratiques puisse êtredégagé. Des rapprochements avec les deux modèlessélectionnés seront néanmoins envisagés.

Ce modèle auquel correspondent les cadres des serviceshautement qualifiés aux entreprises - conseil, informatique,ingénierie, publicité - est incontestablement le plusatypique en matière d’accès à la catégorie cadre lorsqu’ilest comparé à la moyenne intersectorielle.

Il se singularise par une proportion de cadres nettementsupérieure à l’ensemble des autres secteurs (47 % contre15 %)16, également sensiblement plus jeunes (39 % demoins de 35 ans contre 27 %) et plus diplômés. 61 % del’ensemble des cadres sont diplômés de niveau I-II contre47 % en moyenne intersectorielle. 86 % des cadresdébutants dans ces activités ont un diplôme de grande

école ou de 3ème cycle contre 77 % en moyenne. La part decadres issus d’une catégorie socioprofessionnelle inférieurey est la plus faible (51 % contre 60 %). Mais, du fait del’importance en volume et en valeur relative de la catégoriecadre, les probabilités de le devenir à partir d’une catégoriesocioprofessionnelle inférieure en cours de vie active sontplus importantes qu’ailleurs (30 % contre 10 % pourl’ensemble des secteurs). Ces probabilités sont d’autant plusimportantes lorsque seuls ceux qui ont débuté dans uneprofession intermédiaire sont pris en compte. Ainsi, prèsd’un salarié sur deux du secteur déclarant avoir débutécomme technicien est devenu cadre par la suite.

n MODÈLES DES PRATIQUES DE « CADRAGE »

LA PRIMAUTÉ DE L’EXPERTISE TECHNIQUE

16. Pour assurer la cohérence des données des graphiques, les chiffres cités ne sont pas les plus récents, sauf mention explicite de la date.

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires32

ANALYSE STATISTIQUE

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Moyenne intersectorielleSecteur

% de promus ayant >10 ans de vie active % de cadres dip.>bac+2 en 2003

% de promus de niv. Bac +2 ou infra % débutants de niv. I

% d'ETAM / Ouvriers devenus cadres % de cadres ayant débuté comme ETAM / Ouvriers

% de promus de <35ans % de cadres de <35 ans en 2004

% de cadres en 2003

% de cadres ayant débuté comme Technicien/PI

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68%

SERVICES HAUTEMENT QUALIFIÉS AUX ENTREPRISES

Source : INSEE - FPQ 2003 et Enquête Emploi 2004 - Calculs Céreq

Les caractéristiques des cadres issus de la promotionconfirment leur spécificité : ils sont, comme dans l’ensemblede la catégorie, plus jeunes, moins anciens et plus diplômésque la moyenne des promus. 25 % des promus ont moinsde 35 ans contre 20 % en moyenne. Un cinquième despromus a moins de 10 ans d’ancienneté professionnellecontre 15 % des promus tous secteurs confondus. Ce secteurse caractérise également par une plus faible anciennetédans l’entreprise de ses cadres : la majorité d’entre eux amoins de 5 ans dans l’entreprise en 2008 (51 % contre 37 % en moyenne) et seulement 28% y sont depuis plusde 10 ans (contre 44% en moyenne). Aussi la part decadres issus de la promotion interne est-elle nettement plusmodeste que pour la moyenne des secteurs (14 % contre23 %). La proportion de diplômés du supérieur parmi lescadres promus y est de dix points plus élevée que celle dela moyenne intersectorielle (59 % contre 49 %). Cette partélevée est en outre dominée par les diplômés de niveauau moins égal à la licence. Cependant, la catégorie dediplômés la plus représentée parmi les promus est celle destitulaires d’un BTS/DUT, indice de l’importance accordée àla technicité des profils et à la filière de formationdavantage qu’à la durée d’études.

La prépondérance des profils techniques est d’ailleursmanifeste tant parmi les cadres débutants que parmi lescadres issus de catégories socioprofessionnelles inférieures.70 % des sortants du système éducatif en 1998, recrutésdirectement comme cadres dans les services hautementqualifiés aux entreprises, sont classés ingénieurs et cadrestechniques, contre 41 % dans l’ensemble des autressecteurs. 58 % des cadres promus sont ingénieurs et cadrestechniques contre 38 % en moyenne dans les autressecteurs. La supériorité numérique des ingénieurs et cadrestechniques est constante et elle progresse : 54 % descadres en 1995, 62 % en 2008.

La préférence des entreprises de ce secteur pour lesqualifications techniques, généralement attribuée audéveloppement des technologies de l’information et de lacommunication, est également interprétée comme lademande de profils polyvalents « … aptes à développer uneapproche globale de l’activité… ». « Or les cadres ayant uneformation initiale technique (en particulier ceux issus desécoles d’ingénieurs qui forment de plus en plus à la gestionet au management) sont plus à même d’acquérir uneformation commerciale ou gestionnaire… que les cadrescommerciaux ou administratifs pour qui l’acquisition inversedes qualifications techniques s’avère beaucoup plusproblématique » (Dieuaide, 2008).

L’ensemble des cadres, promus ou non, déclarent nettementplus souvent que dans les autres secteurs les études, larecherche/développement ou les méthodes comme fonctionprincipale  : respectivement 59 % de l’ensemble et 44 % des promus contre 31 % et 23 % en moyenneintersectorielle, même si les promus se voient attribuer enplus grand nombre des activités de gestion, de commercialou de maintenance. Les cadres des services hautementqualifiés aux entreprises se distinguent aussi par unemoindre prise en charge des fonctions d’encadrement : 42 % d’entre eux déclarent encadrer contre 54 % des cadresen moyenne. Comme dans l’ensemble des secteurs, uneproportion plus importante de cadres promus assure cesfonctions : 51 %. Cependant, à la différence des autressecteurs, ce sont proportionnellement les plus diplômés despromus qui exercent le plus souvent des fonctionsd’encadrement dans les services hautement qualifiés auxentreprises : 64 % des cadres promus encadrants sonttitulaires d’un diplôme du supérieur contre 55 % des cadres promus non encadrants. Ces chiffres s’élèventrespectivement à 45 % et 54 % en moyenne intersectorielle.

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires 33

ANALYSE STATISTIQUE

Page 36: LA PROMOTION AU STATUT DE CADRE DES … · Comment s’effectue le passage au statut de cadre en ... assortie ou non d ... la promotion interne apparaît-elle comme un mode subalterne

Les femmes sont plus représentées parmi les cadres issusde catégories socioprofessionnelles inférieures (34 %) queparmi les cadres qui ont débuté dans la catégorie (21 %),résultat qui, une fois encore, tranche avec la moyenneintersectorielle (respectivement 31 % et 29 %). Lespromues sont également nettement plus diplômées queleurs homologues masculins : 44 % d’entre elles ont aumoins le niveau licence, contre 27 % des hommes promus,sachant que les femmes de ce niveau de diplôme sont troisfois plus souvent classées professions intermédiaires ouemployées que les hommes (36 % contre 13 %). Si lespromues sont relativement plus diplômées, elles prennent

moins souvent en charge des fonctions d’encadrement : 44 % des promues – soit l’équivalent de l’ensemble descadres de sexe féminin - encadrent alors que c’est le casde 56 % des cadres promus masculins (contre 45 % del’ensemble des cadres). Tandis que l’ensemble des femmescadres sont plus représentées que les hommes dans lesfonctions administratives (gestion, comptabilité) (31 %contre 13 %) et exercent moins souvent de fonctionsd’études/ R&D (48 % contre 62 %), les femmes cadrespromues sont encore davantage polarisées sur ces fonctionsadministratives (39 %).

Ce modèle qui privilégie l’attachement à l’entreprise et lacarrière, trouve sa meilleure illustration dans le secteurfinancier. Celui-ci partage avec les services hautementqualifiés aux entreprises une part de cadres nettementsupérieure à la moyenne. Elle équivaut à plus du doublede la part moyenne (33 % contre 15 %). Au-delà de cetteproximité avec les services hautement qualifiés auxentreprises, le secteur financier s’en écarte dans son moded’alimentation de la catégorie cadre.

Plusieurs caractéristiques des cadres du secteur financieren donnent une indication. Ils sont de manière constanteplus âgés que dans la moyenne des secteurs. Les moins de35 ans représentent actuellement à peine un quart de lacatégorie, contre 27 % dans l’ensemble des secteurs et 41 % dans les services hautement qualifiés aux entreprises.De même, ils ont un niveau de diplôme équivalent à celuide la moyenne des secteurs : 49 % d’entre eux ont undiplôme du supérieur équivalent au moins à la licence,contre 47 % dans l’ensemble et 61 % pour les serviceshautement qualifiés aux entreprises. En outre, la part decadres diplômés de 3e cycle et des grandes écoles y estrelativement moins élevée (respectivement 37 %, 41 % et54 %).

En revanche, la part de cadres ayant débuté dans unecatégorie socioprofessionnelle inférieure est nettementplus importante dans le secteur financier. Elle s’élève à 71 % contre 60 % pour la moyenne des secteurs. En outre,les carrières longues y sont privilégiées puisque la part decadres du secteur financier issus de la catégorie employésest majoritaire parmi les promus (40 %). Les probabilitésde devenir cadre en cours de vie active sont également plusélevées que dans la moyenne des autres secteurs : 26 %des salariés du secteur qui déclarent avoir débuté leur vieprofessionnelle comme profession intermédiaire ou employésont devenus cadres alors qu’ils sont 10 % dans l’ensembledes secteurs. Cependant, les cadres issus de la promotiondans le secteur financier sont sensiblement plus diplômésque l’ensemble des cadres promus tous secteurs confondus.Le tiers d’entre eux (contre le quart en moyenneintersectorielle) a acquis en formation initiale un diplômedu supérieur au moins égal à la licence. Ceci montre demanière assez nette que l’élévation du niveau de diplômerequis pour être recruté dans le secteur financier et lerelatif rajeunissement de ses effectifs, toutes catégoriesconfondues, n’ont pas pour autant fait disparaître lespratiques d’alimentation de la catégorie cadre à partir de la promotion. Pour ce qui concerne les métiersspécifiquement bancaires, la filière promotionnelle, adosséeà un important dispositif de formation continue certifiante,est d’ailleurs affirmée par les acteurs de la branche commeune voie instituée et délibérément encouragée (FBF, 2009).

LA VOIE PROMOTIONNELLE INSTITUÉE

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ANALYSE STATISTIQUE

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% de promus ayant >10 ans de vie active % de cadres dip.>bac+2 en 2003

% de promus de niv. Bac +2 ou infra

% d'ETAM devenus cadres % de cadres ayant débuté comme ETAM

% de cadres de <35 ans en 2004

% de cadres en 2003

% de cadres ayant débuté comme Technicien/PI

29%

26%66%

49%33%

85%

27%

71%

Moyenne Secteur

SECTEUR FINANCIER

Source : INSEE - FPQ 2003 et Enquête Emploi 2004 - Calculs Céreq

17. La faiblesse des effectifs des secteurs correspondants limite le nombre des indicateurs disponibles

L’ensemble de ces données constituent autant d’indicesconfirmant la spécificité du mode d’alimentation et de lacarrière de l’encadrement dans le secteur financier. Cettespécificité est renforcée par le poids de la promotion interneà l’entreprise, et associée à une forte ancienneté enentreprise. En 2008, plus de la moitié des cadres du secteurfinancier exercent depuis plus de 10 ans dans la mêmeentreprise et 40 % d’entre eux sont issus de la promotioninterne, tandis que ces proportions s’élèvent àrespectivement 43 % et 23 % dans l’ensemble des secteurset 28 % et 14 % dans les services hautement qualifiés auxentreprises.

L’affirmation de la voie promotionnelle comme moded’alimentation de la catégorie cadre a également des effetssur les fonctions prises en charge. À la différence de ce quiest observé dans l’ensemble des autres secteurs, les cadrespromus du secteur financier ne se distinguent pas dans leursfonctions des autres cadres. Cette indifférenciation estparticulièrement nette en ce qui concerne la prise en chargedes fonctions d’encadrement. Qu’ils soient promus ou non,un peu plus de la moitié des cadres du secteur financiersont en position d’encadrement. De même, les cadres serépartissent à parts identiques, quel que soit leur mode derecrutement, entre les deux fonctions regroupant l’essentielde l’activité : commerciale et gestionnaire.

L’absence de distinction des fonctions attribuées selon lemode d’accès à la catégorie tient également aux critèresde définition des cadres dans ce secteur. Ces critèresreposent moins sur la nature des fonctions ou du métierexercé que sur la complexité des dossiers traités ou descompétences mises en œuvre. Ainsi, dans la banque, unchargé de clientèle ou un responsable d’agence peut

indifféremment être technicien ou cadre. Son niveau declassification dépend du volume et/ou de la qualité de laclientèle gérée.

Les femmes, relativement plus représentées parmi les cadresdans le secteur financier (40 % contre 34 % en moyenneen 2008), sont également plus jeunes et plus diplôméesque leurs homologues masculins. En revanche, elles sedistinguent peu de ceux-ci en ce qui concerne leur moded’accès à la catégorie, que l’on considère l’entrée dans lavie active ou le recrutement dans l’entreprise.

Entre ces deux pôles, trois configurations méritent d’êtrementionnées pour les modèles d’alimentation qu’ellesreprésentent, même si leurs contours sont moins définisque les deux pôles précédemment décrits17. La premièreconfiguration correspond au modèle prévalant dans lessecteurs industriels. Son intérêt est d’offrir un fort clivagede la catégorie cadre selon son mode d’accès. À l’opposéde ce modèle se situe un ensemble de secteurs tertiairesregroupant les activités culturelles, sportives et éducativesdont la particularité réside dans la proximité des profils descadres débutants et cadres promus. La dernièreconfiguration, illustrée par les secteurs du commerce degros et de la construction, est celle qui se rapproche le plusde la représentation traditionnelle du cadre autodidactepromu.

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ANALYSE STATISTIQUE

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Les secteurs industriels dans leurs trois grandescomposantes, biens de consommation, biens d’équipementet biens intermédiaires, ne se distinguent pas de lamoyenne intersectorielle pour ce qui concerne l’importancede l’alimentation de la catégorie cadre par la voiepromotionnelle. Ces secteurs présentent néanmoins l’intérêtd’opérer une segmentation prononcée des populations decadres selon leur voie d’accès à la catégorie. Cette dualitéles rapproche aussi bien des services hautement qualifiésaux entreprises que du secteur financier. Le cas des biensd’équipement et de l’industrie automobile étant le plusreprésentatif, il sera pris en exemple.

Le secteur des biens d’équipement se caractérise d’abordpar une part de cadres comparable à la moyenne (16 %)mais nettement inférieure à celle des services hautementqualifiés aux entreprises et du secteur financier. En termesde structure d’âge et d’ancienneté, il est plus proche dusecteur financier : une faible proportion de cadres de moinsde 35 ans et une ancienneté professionnelle sensiblementélevée, surtout en ce qui concerne l’ancienneté dansl’entreprise. D’un autre côté, le secteur des biensd’équipement se rapproche des services hautement qualifiésaux entreprises en ce qui concerne le profil de formationde ses cadres : une part de diplômés du supérieur (LMD)nettement plus élevée que celle de la moyenneintersectorielle et, parmi ceux-ci, la quasi-exclusivitéaccordée aux diplômés de grandes écoles et du 3e cycleuniversitaire.

LA VOIE DUALE : INGÉNIEUR DIPLÔMÉ ET TECHNICIEN PROMU

La part de cadres de l’industrie des biens d’équipementayant débuté dans une catégorie socioprofessionnelleinférieure est proche de la moyenne mais légèrementinférieure (56 % contre 60 %). La filière promotionnelle secaractérise par une surreprésentation de salariés qui ontcommencé leur vie professionnelle au niveautechnicien/agent de maîtrise. L’accès promotionnel estégalement marqué par une part de BTS/DUT parmi lespromus très nettement supérieure à la moyenne (41 %contre 24 % dans l’ensemble des secteurs). Si cettecaractéristique est rapprochée de l’exclusivité réservée auxsortants de grandes écoles et de 3ème cycle universitairepour les recrutements de cadres débutants (83 % desrecrutements contre 76 % pour la moyenne des secteurs),une nette segmentation des deux populations de cadresselon leur provenance se dessine.

La répartition des fonctions attribuées aux cadres des biensd’équipement selon leur parcours antérieur fournit uneillustration supplémentaire d’une telle segmentation. Laquasi-totalité des cadres, quelle que soit leur provenance,sont des ingénieurs et cadres techniques. La moitié d’entreeux a des fonctions d’encadrement, les cadres promus étantrelativement plus souvent appelés à exercer ces fonctions(55 % contre 50 %). Les cadres promus assurent égalementplus souvent des fonctions commerciales et moins souventdes fonctions d’études, R&D.

% de promus ayant >10 ans de vie active % de cadres dip.>bac+2 en 2003

% de promus de niv. Bac +2 ou infra

% de cadres ayant débuté comme ETAM

% de cadres de <35 ans en 2004% d'ETAM/Ouvriers devenus cadres

% débutants niv. I

% de cadres en 2003

% de cadres ayant débuté comme Technicien/AM/PI

16%

50%

83%

31%

56%

35%

10%

82%

87%

Moyenne Secteur

INDUSTRIE DES BIENS D'ÉQUIPEMENT ET AUTOMOBILE

Source : INSEE - FPQ 2003 et Enquête Emploi 2004 - Calculs Céreq

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ANALYSE STATISTIQUE

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Cette configuration présente l’intérêt de se rapprocher leplus du modèle classique de l’ascension du cadreautodidacte existant dans les représentations communes.Il s’agit d’un ensemble d’activités où la population cadreest plus âgée et plus ancienne que dans la moyenne dessecteurs. Les cadres y assurent plus souvent des fonctionsd’encadrement que dans l’ensemble des autres activités. Lagrande majorité d’entre eux ont débuté dans la vie activedans une catégorie socioprofessionnelle inférieure. Ilsprésentent un niveau de formation nettement inférieur àcelui de la moyenne des cadres. Deux secteurs peuventillustrer cette configuration : le commerce de gros et laconstruction.

Dans le commerce de gros, la part de cadres dans lastructure des emplois est supérieure à la moyenneintersectorielle mais de manière moins prononcée que dansle secteur financier. Il s’en rapproche cependant par sespratiques de cadrage faisant une grande place à l’accèspromotionnel. Les cadres y sont moins jeunes et moinsdiplômés que la moyenne  des secteurs. Les trois quarts d’entre eux ont débuté dans une catégoriesocioprofessionnelle inférieure et les probabilités de devenircadre en cours de vie active sont également plus élevéesque dans la moyenne des autres secteurs. La quasi-totalitédes cadres promus (92 %) a plus de 10 ans d’anciennetéprofessionnelle et est relativement moins diplômée quedans l’ensemble des secteurs.

LA PRIMAUTÉ DE L’EXPÉRIENCE

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ANALYSE STATISTIQUE

% de promus ayant >10 ans de vie active % de cadres dip.>bac+2 en 2003

% de promus de niv. Bac +2 ou infra % de cadres de <35 ans en 2004

% d'ETAM/Ouvriers devenus cadres % de cadres ayant débuté comme ETAM /Ouvriers

% de cadres en 2003

% de cadres ayant débuté comme Technicien/PI

92%

83%15%

33%

76%

28%

18%

Moyenne Secteur

COMMERCE DE GROS

Source : INSEE - FPQ 2003 et Enquête Emploi 2004 - Calculs Céreq

Bien qu’il présente une part très faible de cadres, le secteurde la construction offre une configuration plutôt originale.Les diplômés du supérieur au-delà du Bac +2 parmi lescadres y sont moins représentés que dans l’ensemble dessecteurs (42 % contre 53 % en moyenne en 2008). La partde cadres issus d’une catégorie socioprofessionnelleinférieure y est nettement plus élevée : 77 % contre 60 %.La moitié d’entre eux ont débuté comme technicien.

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% de promus ayant >10 ans de vie active % de cadres dip.>bac+2 en 2003

% de promus de niv. Bac +2 ou infra % de cadres de <35 ans en 2004

% d'ETAM ou ouvriers devenus cadres

% de cadres en 2003

% de cadres ayant débuté comme Technicien/AM/PI

% de cadres ayant débuté comme ETAM ou ouvrier

86%

90% 4%

39%77%

22%5%

22%

Moyenne Secteur

CONSTRUCTION

Source : INSEE - FPQ 2003 et Enquête Emploi 2004 - Calculs Céreq

À ce modèle correspondent des secteurs regroupant lesactivités culturelles, sportives et éducatives ne relevant pasdu secteur public18. Ces activités se caractérisent par untaux de cadres élevé, équivalant au double de celui de lamoyenne des secteurs. Ces cadres présentent plusieurssignes distinctifs. Ils sont sensiblement plus diplômés quel’ensemble de la catégorie tous secteurs confondus : 57 %d’entre eux ont un diplôme du supérieur au moins égal àla licence contre 47 % en moyenne intersectorielle. Laparticularité de leur profil tient en outre à la part trèsmajoritaire de titulaires d’un diplôme universitaire deniveau licence/maîtrise dans leurs rangs : 42 % contre18% tous secteurs confondus. Contrairement à la structurepar sexe des cadres dans l’ensemble des activitéséconomiques, les femmes cadres sont majoritaires : 58 %contre 31 % en moyenne. Dernier signe distinctif, ilsexercent peu de fonction d’encadrement : seuls 15 % d’entreeux encadrent, contre 43 % de l’ensemble des cadres enmoyenne.

La part de cadres promus est inférieure à la moyenne maiscette part relativement modeste se combine avec desprobabilités de devenir cadre plus importantes que dans lamoyenne des secteurs. En outre, les cadres promus sontnettement plus diplômés que dans les autres secteurs : lamoitié d’entre eux ont un diplôme de deuxième ou troisièmecycle du supérieur, ce qui correspond au double de la partdes cadres promus en moyenne intersectorielle. Ils ne sedistinguent pas par leur profil des autres cadres : 41 %d’entre eux ont une licence ou une maîtrise.

Du fait de la part importante de diplômés du supérieurparmi les cadres promus et de la proximité de leur profilavec l’ensemble de la catégorie, cette configuration serapproche de celle des services hautement qualifiés auxentreprises. Elle s’en écarte cependant par la structured’âge et d’ancienneté de ses cadres.

LE PROFIL UNIVERSITAIRE

18. Les secteurs de la santé et du social ont été exclus de ce groupe, compte tenu du rôle qu’y joue la réglementation des professions dans l’alimentationdes différentes catégories socioprofessionnelles.

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ANALYSE STATISTIQUE

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% de promus ayant >10 ans de vie active % de cadres dip.>bac+2 en 2003

% de promus de niv. Bac +2 ou infra % de cadres de <35 ans en 2004

% d'ETAM devenus cadres

% de cadres en 2003

% de cadres ayant débuté comme Technicien/PI

% de cadres ayant débuté comme ETAM

81%

52%19%

31%47%

57%32%

28%

Moyenne Secteur

CULTURE, SPORT, ÉDUCATION/FORMATION

Source : INSEE - FPQ 2003 et Enquête Emploi 2004 - Calculs Céreq

Considérés dans leur globalité, les modes d’alimentation dela catégorie cadre dans les entreprises demeurentinchangés. L’équilibre entre l’appel aux débutants et lavoie promotionnelle est maintenu. Ces résultats infirmentune fois encore les hypothèses récurrentes suivantlesquelles l’accroissement de l’offre de diplômés dusupérieur produit à terme la disparition de la voiepromotionnelle. Cela signifie qu’une bonne partie du

renouvellement des cadres dans les entreprises obéit à uneautre logique que celle de la relation directe entre l’écoleet le système productif. Logique répondant à desconsidérations d’ordre technique et/ou sociopolitique ?Les limites du travail statistique sont ici atteintes et seulesles enquêtes en entreprise sont susceptibles d’apporter unéclairage sur la nature des arbitrages réalisés dans lesentreprises à ce sujet.

n CONCLUSION DU CADRAGE STATISTIQUE

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ANALYSE STATISTIQUE

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19. Cf. Martine Möbus, avec le concours d’Anne Delanoë, Les professions intermédiaires dans les entreprises. Techniciens, agents de maîtrise etassimilés. Cadrage statistique, Nef, n°39, Céreq, janvier 2009.

Pourquoi et comment les salariés passent-ils au statut decadre en entreprise ? Tel est le questionnement quigouverne le volet qualitatif de l’étude du Céreq surl’alimentation de la catégorie cadre à partir de l’accèspromotionnel.

Ce questionnement est étroitement lié aux résultatsproduits par le volet quantitatif. Ce dernier montre, entreautres, que l’accès promotionnel à la catégorie cadreperdure de nos jours, bien qu’il tende à changer de nature,avec notamment une élévation du niveau de formationdes personnels qui en bénéficient et l’érosion progressivede la figure classique du « cadre autodidacte », c’est-à-dire du cadre dépourvu de diplôme de l’enseignementsupérieur. En outre, le volet quantitatif révèle la fortehétérogénéité de l’accès promotionnel au sein desentreprises, en prenant le secteur d’activité commeprincipal facteur explicatif.

Le volet qualitatif entend poursuivre et compléter letravail amorcé, en décelant les différentes manièresd’accéder à la catégorie cadre en entreprise et ens’interrogeant sur les logiques et les modalités à l’œuvre.Autrement dit, par quels biais s’effectuent les promotionsmenant à la catégorie cadre ? Quel est le sens qui leurest attribué en entreprise et qui leur permet de se produireet de se maintenir dans la durée ? Quels sont les critèreset les conditions de ces promotions ? En particulier,comment le niveau et le type de diplôme agissent-ils etse combinent-ils aux autres critères ?

La catégorie cadre est appréhendée ici comme la positionrenvoyant au statut de cadre au sein des grilles declassification des entreprises.

Par ailleurs, le volet qualitatif se centre sur le « passage-cadre » des professions intermédiaires (agents de maîtrise,techniciens, professions intermédiaires administratives etcommerciales, personnels infirmiers et paramédicaux) enentreprise. Il s’appuie sur une enquête réalisée par leCéreq et son réseau de centres associés en région entre2008 et 2011 sur ces professions, appelée EPIE (Enquêtesur les Professions Intermédiaires en Entreprise) etportant sur leurs modalités de gestion : travail effectué,position au sein des organisations du travail et des grilles de classification des entreprises, formation-professionnalisation, alimentation des emplois, gestiondes carrières (voir l’encadré page 42 et la liste desentreprises enquêtées et des équipes en annexe page 79).

Cette étude de l’alimentation de la catégorie cadre parle prisme des professions intermédiaires apparaîtappropriée. En effet, comme le suggère le voletquantitatif, le passage à cette catégorie s’effectuedésormais de plus en plus par le biais de ces professions,lesquelles ont vu constamment croître leurs effectifs etleur place dans les structures de qualifications ces vingtdernières années19. Pour sa part, la proportion de cadresayant débuté leur vie active en tant qu’ouvriers ouemployés ne cesse de reculer.

Dans un premier temps, sont identifiées les différentesformes prises par le passage au statut de cadre enentreprise. La focale est mise sur l’événement quereprésente ce passage cadre, ce qui permet d’en révélertoute la diversité.

En second lieu, on s’interroge sur les logiques despassages cadre. En d’autres termes, à quoi tiennent cespromotions ? L’analyse porte sur les entreprises, qui ontleurs raisons d’aménager encore de nos jours de tellespromotions, mais aussi les personnels des catégoriesintermédiaires, qui continuent de développer des projetsd’évolution allant en ce sens.

Enfin, les critères et les conditions des passages au statutde cadre sont décelés. Les principaux critères utilisés enentreprise pour justifier des promotions cadre sontrepérés. On s’intéresse notamment au rôle du niveau etdu type de diplôme, au regard des autres critères à l’œuvre(« compétence », «  implication »… ). De même, lesmodalités de gestion des promotions sont examinées, endistinguant ce qui relève de l’action des entreprises etce qui dépend de celle des salariés.

LES ENQUÊTES EN ENTREPRISE

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires 41

n INTRODUCTION

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L’enquête EPIE (Enquête sur les Professions Intermédiaires en Entreprise)Dans le cadre de son programme d’activités quadriennal (2008-2011), le Céreq réalise une enquête en entreprise sur lesprofessions dites « intermédiaires » (techniciens, agents de maîtrise et personnels assimilés). Cette enquête est motivéepar le constat de l’insuffisante connaissance de ces emplois, en comparaison des nombreux travaux menés sur les ouvriers,les employés et les cadres. Elle a pour objectif de répondre aux interrogations respectives du système éducatif et desentreprises sur les formations et les diplômes qui préparent à ces métiers, et plus largement d’étudier les pratiques et lesmodalités de gestion de ces catégories. Le questionnement général vise à dresser un état des lieux de la situation et de ladynamique des professions intermédiaires en entreprise  : travail et position sociale, formation-professionnalisation,alimentation des emplois, gestion des carrières.Cette enquête mobilise une trentaine d’intervenants : des chercheurs (sociologues, économistes et spécialistes des sciencesde gestion), des chargés d’études du Céreq et de son réseau de centres associés, des membres de l’Anact (Agence nationalepour l’amélioration des conditions de travail). Elle s’appuie sur un cadrage statistique et une revue de littérature effectuésau préalable, mais aussi et surtout sur des entretiens réalisés dans des entreprises de divers secteurs d’activité (industrieautomobile, commerce de gros, transport urbain…), choisies pour couvrir au mieux la diversité des emplois de niveauintermédiaire (cf. annexe). Plus précisément, les entretiens ont été menés sur 28 « terrains » (un terrain comporte parfoisplusieurs entreprises) et auprès de nombreux responsables d’entreprise (dirigeants, responsables RH, encadrementopérationnel) et salariés occupant les emplois étudiés : souvent des emplois relativement bien fournis en effectif dans lesentreprises concernées, ou alors jugés stratégiques ou « sensibles ».Au total, l’enquête EPIE représente 22 monographies portant sur un ou quelques emplois de niveau intermédiaire (sixterrains n’ont pas débouché sur l’élaboration d’une monographie). Un ouvrage collectif est envisagé parmi les valorisationsà venir de cette enquête.Sur la base d’un partenariat établi avec l’APEC à partir d’octobre 2008, un zoom est effectué sur la question du passage-cadre pour les professions intermédiaires en entreprise dans le cadre d’EPIE. C’est ce zoom qui nourrit le volet qualitatifde l’étude de l’alimentation de la catégorie cadre à partir de l’accès promotionnel. Conçu en coopération avec l’APEC, ilvise à repérer et à analyser les logiques et les processus qui autorisent et organisent cette alimentation. Qu’est-ce quipermet de comprendre une telle alimentation aujourd’hui ? Quelles en sont les déterminants et les conditions au sein desentreprises ? Notamment, pour quelles raisons une entreprise va-t-elle préférer promouvoir en interne un salarié d’unecatégorie intermédiaire en qualité de cadre plutôt que de recruter directement un jeune diplômé sur le marché du travail ?Et dans quelle mesure les salariés des catégories intermédiaires ont-ils eux-mêmes envie de passer cadres ? D’autre part,comment la promotion au statut de cadre pour ces salariés est-elle organisée et gérée au sein des entreprises ? Enparticulier, que suppose-t-elle pour les membres des catégories intermédiaires qui souhaitent en bénéficier ?

Au sein de la plupart des entreprises enquêtées, les métiersétudiés donnent à voir la possibilité d’un passage au statutde cadre pour les personnels qui les exercent. En effet,certains salariés des professions intermédiaires en viennentà franchir la frontière qui les sépare de la catégorie cadreet à accéder par conséquent à cette catégorie.

Cependant, ce franchissement prend différentes formes. Sil’on se centre sur l’événement précis que constitue pourun salarié le passage au statut de cadre, on s’aperçoit à lalecture des monographies qu’il peut s’accompagner ou nond’un changement d’emploi, de métier ou d’employeur. C’estce constat d’une grande diversité de situations que nous

aimerions exposer, étayer, illustrer dans cette premièrepartie, en proposant une typologie des différentes formesd’accès promotionnel au statut de cadre pour les professions intermédiaires et en repérant leurs principalescaractéristiques intrinsèques  : fonctions de cadreconcernées ; implications en termes de contenus de travail ;degré de sélectivité…

n COMMENT S’EFFECTUE LE PASSAGE AU STATUT DE CADRE ENENTREPRISE ?

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires42

LES ENQUÊTES EN ENTREPRISE

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Pour un salarié d’une profession intermédiaire, le passageau statut de cadre peut d’abord coïncider avec uneascension au sein de l’espace hiérarchique de sonentreprise. Il est alors promu en interne à une fonction de« cadre encadrant » ou de « cadre manager », tout enaccédant en même temps (ou très peu de temps après, enraison d’un délai d’ordre purement administratif) au statutde cadre. Ce type de promotion cadre est le plustraditionnel, celui qui vient le plus spontanément à l’espritau regard de l’histoire de la catégorie.

Le passage au statut de cadre sous cette forme est celuiqui est le plus rencontré au sein des entreprises enquêtées.Il se vérifie aussi bien dans des entreprises industriellesque dans des entreprises du secteur tertiaire, même si cesdernières semblent davantage concernées. Il est vrai quel’industrie reste pénétrée par la figure classique etprégnante de l’ingénieur, laquelle continue à tracer unefrontière consistante avec le monde de la maîtrise et destechniciens. Les services se caractérisent quant à eux parun brouillage beaucoup plus marqué entre les différentescatégories socioprofessionnelles, autorisant a priori davantagede mobilités de l’une à l’autre.

Le passage cadre par la voie d’une ascension hiérarchiquepeut bénéficier a priori à toutes les catégoriesintermédiaires. Il peut profiter à des agents de maîtriseayant déjà une expérience probante en matièred’encadrement de proximité, comme à des techniciens oudes personnels assimilés, dépourvus pour leur part, demanière significative ou en tout cas de manière reconnue,d’une telle expérience. Deux exemples peuvent illustrercette forme d’accès promotionnel au statut de cadre danstoute sa diversité professionnelle et contextuelle :

Au sein d’une caisse primaire d’assurance maladie, les« animateurs d’équipe », de catégorie maîtrise et chargésd’encadrer des employés et des techniciens, quideviennent « responsables d’unité » et ce faisant cadres :soit un exemple d’encadrants non cadres promus eninterne au statut de cadre via une ascension au sein dela hiérarchie de l’entreprise (cf. encadré ci-dessous).

Dans des entreprises du secteur aéronautique, lestechniciens qui accèdent à un poste de chef d’atelier etpar la même occasion au statut de cadre : il s’agit cettefois d’un exemple de promotion interne à un emploi decadre manager pour des personnels non encadrants à labase (cf. encadré page 45).

UNE ASCENSION HIÉRARCHIQUE AU SEIN D’UNE ENTREPRISE

20. D’après une monographie de Thierry Colin, Benoît Grasser, Lionel Jacquot et Ewan Oiry.

Les animateurs d’équipe promus au poste de responsable d’unité au sein d’une caisse primaire d’assurance maladie20

Au sein d’une caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) disposant d’un effectif d’un peu plus de 610 salariés, les« animateurs d’équipe » forment le principal vivier pour alimenter l’emploi de « responsable d’unité » (RU), de catégoriecadre.Avec un statut de catégorie intermédiaire, les animateurs encadrent chacun une petite équipe de techniciens et assistentleur supérieur hiérarchique direct, un RU, dans la détermination et le suivi des objectifs d’une unité de travail (i.e. unservice). Ils correspondent donc aux n-1 des RU, lesquels ont pour principale mission de concourir à la réalisation desobjectifs fixés par la direction de la CPAM en assurant le fonctionnement optimum d’une unité.De fait, les RU sont dans leur majorité d’anciens animateurs de la structure, ayant donc fait leurs armes dans lemanagement dans cette fonction, et ayant été promus ensuite au rang de cadres.Ce mode d’alimentation privilégié de l’emploi cadre de RU renvoie à la forte culture de promotion interne qui règne au seinde la CPAM. Il permet aux personnels qui en bénéficient d’accéder à de nouvelles perspectives de carrière.Le passage du métier d’animateur d’équipe à celui de RU n’a pourtant rien d’automatique. Il demeure au contraire assezsélectif.En outre, tous les animateurs ne veulent pas devenir RU. C’est le cas en particulier des plus âgés, souvent rétifs. Lesexigences liées à la conciliation entre vie personnelle et vie professionnelle les conduisent à ne pas souhaiter s’investirdavantage dans la vie professionnelle, afin d’éviter de connaître la « pression du cadre ». Ils se posent également desquestions sur le rapport entre leur identité professionnelle et le métier de RU.La sélection des RU parmi le vivier interne des animateurs d’équipe s’opère d’abord et avant tout à partir des compétences« relationnelles » et des comportements qui leur sont reconnus : capacité à nouer des liens, des alliances, capacité àparticiper à des projets, loyauté envers la direction…

•••

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires 43

LES ENQUÊTES EN ENTREPRISE

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Même s’il convient toujours de faire la preuve de ses compétences sur le terrain, le diplôme possède sans conteste uneinfluence. En effet, la chance qu’ont les agents entrés au sein de la CPAM au cours des années 1990 - 2000 avec au moinsun diplôme de niveau Bac +2 d’obtenir le statut de cadre et d’exercer la fonction de RU est plus élevée que celle despersonnels embauchés au cours des années 70 - 80, avec un bac au plus. Il faut toutefois noter une inflexion récente. Afin de diversifier et d’enrichir les cultures et les pratiques professionnellesdes personnels encadrants dans un contexte de « modernisation » de la gestion des organismes de sécurité sociale, unelicence professionnelle (« Management opérationnel dans la protection sociale ») a été mise en place en partenariat avecquelques universités. Si cette licence est ouverte aux animateurs titulaires d’un Bac +2 ou reconnus comme tels au titrede la VAE, elle représente surtout une nouvelle voie d’entrée directe dans les emplois de management de la CPAM pour desjeunes y accédant par la voie de la formation initiale.

Plus généralement, les passages au statut de cadrecorrespondant à une ascension au sein de la lignehiérarchique des entreprises s’apparentent pour lespersonnels des professions intermédiaires à des promotionsà des postes ou des fonctions de niveau n+1 dans lesorganigrammes. Autrement dit, les agents de maîtrise, lestechniciens, les personnels commerciaux, administratifs…assimilés, concernés par ces passages cadre, en viennentà exercer la profession du cadre manager qui les encadraitauparavant : soit en remplaçant ce dernier, soit en étantaffecté sur un poste identique dans une autre entité ou unautre service de l’entreprise.

Il s’agit d’une profession de manager de premier niveau dequalification en référence à l’ensemble de l’emploi cadreau sein de l’entreprise. Pour les agents de maîtrise promus, cette profession relèvera plutôt de ce qu’on appelle en général dans les entreprises l’« encadrementintermédiaire », activité située entre encadrement deproximité et direction, et supposant le managementd’encadrants de proximité. Pour les autres personnelspromus, ce sera davantage une profession renvoyant à l’encadrement de proximité. Donnons quelquesexemples d’emplois de ces deux types d’encadrement :

Pour l’encadrement intermédiaire  : «  responsable deterritoire »21, pour les « responsables d’agence » d’unoffice public d’habitat ; « responsable de groupe », pourles « responsables d’unité » d’une usine de production demoteurs d’automobile ; « chef de secteur », pour les« gérants » d’une entreprise de restauration collective…

Pour l’encadrement de proximité : « responsable généralde paie », pour les « responsables de paie » d’un cabinetd’expertise comptable  ; «  chef des ventes  » ou « directeur d’agence », pour les technico-commerciauxd’une entreprise de commerce de gros en matérielélectrique…

Il faut noter aussi que les salariés grimpant de cette façondans la hiérarchie de l’entreprise réalisent une ascensiondans le cadre de leur filière professionnelle d’appartenanceou de référence. Ils connaissent donc une promotion qui

s’apparente avant tout à une progression dans le cadre d’un« métier », ou plus exactement dans le cadre d’une famillede métiers.

Autre constat  : le passage-cadre sous la forme d’uneélévation au sein de l’encadrement de l’entreprise apparaîtle plus souvent assez sélectif. Certes, il existe desprofessions intermédiaires considérées comme des« tremplins pour passer cadre » ou des étapes dans desparcours de progression professionnelle. C’est le cas parexemple des adjoints chefs de rayon d’un hypermarché,appelés normalement à gravir un jour ou un autre l’échelondirectement supérieur en devenant chef de rayon et cadreen même temps. En outre, il est des entreprises où lamajorité des cadres managers est clairement issue du rang.En témoigne le cas d’une entreprise de commerce de grosen produits frais et surgelés, pour laquelle la majeure partiede ses responsables de vente (qui ont le statut de cadre)sont d’anciens délégués commerciaux ayant été « sur laroute », à la rencontre des clients (des restaurateurs pourl’essentiel).

Cependant, là où il est envisageable, pareil passage-cadren’a jamais rien d’automatique. Il se révèle la plupart du temps limité, allant parfois jusqu’à se réduire à une peau de chagrin, réservé à quelques personnelsreprésentant « la crème de la crème » parmi les professionsintermédiaires. Par ailleurs, les situations où existe uneforte culture de promotion sociale et où nombre de cadresmanagers sont puisés dans le vivier interne des catégoriesintermédiaires ne signifient en aucun cas l’absence d’uneforte sélectivité. Les effectifs forcément moindres de cadresmanagers au sein des structures d’entreprise, par rapportà ceux des professions intermédiaires qu’ils encadrent,limitent de fait les probabilités de passer cadre. Lespolitiques et pratiques d’entreprise consistant à recourir aumarché externe, voire à embaucher directement des jeunesdiplômés de l’enseignement supérieur pour alimenter aumoins une partie des postes de cadre, contribuent aussi àcette limitation.

21. Les citations en italique sont issues des monographies, des notes rédigées dans le cadre du projet EPIE ou des exposés réalisés à l’occasion duséminaire organisé par le Céreq entre 2008 et fin 2010 pour conduire ce projet.

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22. D’après une monographie de Marie-Laure Buisson et Martine Gadille.23. D’aucuns parlent aussi de « cadres techniques ».

Les techniciens de l’industrie aéronautique promus en interne au poste de chef d’atelier22

« Je suis rentré dans une petite entreprise pour faire de la maintenance. Après un an, on m’a proposé de devenir chefd’atelier. Un métier pas aussi facile que je ne le pensais, par rapport à quand j’étais en dessous. Aujourd’hui, je me sensbien, je suis payé à ma juste valeur, et je servirai cette entreprise du mieux que je pourrai car ils ont su me donner machance. Là où je suis, je suis payé à ma juste valeur. J’ai acquis une énorme expérience professionnelle, ce qui est trèsbien pour mon âge. Je gagne le double du smic, à cinq minutes du travail  ». Ce témoignage recueilli auprès d’unresponsable de la maintenance d’une PME, ayant le statut de cadre et auparavant technicien de maintenance dans la mêmeentreprise montre l’existence de mobilités promotionnelles vers les fonctions d’encadrement pour les techniciens del’industrie aéronautique.Certes, les possibilités de promotion cadre ne sont pas légions. En particulier, les différentes figures de techniciens danscette industrie (techniciens méthodes, logistique et approvisionnement, support client, essais, qualité, production,électronique…) sont souvent supposées manquer de compétences et de légitimité en management pour pouvoir exerceravec efficacité la fonction de chef d’atelier dans ses différentes variantes (responsable de maintenance, responsablecontrôle qualité, responsable fabrication…), contrairement aux ingénieurs, lesquels sont censés être en mesure d’encadrerdès leur embauche. En outre, comme on peut l’observer au sein du pôle de compétitivité investigué, structuré autour d’uneentreprise de grande taille donneuse d’ordres et d’une myriade de PME sous-traitantes, les possibilités de mobilité verticalediffèrent largement selon les structures. Si les PME cherchent souvent à alimenter leurs emplois de responsable par le biaisde la promotion interne, leurs structures offrent de fait beaucoup moins de perspectives que le donneur d’ordres.Les enjeux de la promotion cadre restent néanmoins criants. Il s’agit notamment de répondre à l’important manque dereconnaissance ressenti par les techniciens, qui s’estiment souvent mal payés et peu considérés au regard des exigencesd’implication et d’autonomie que requiert de plus en plus leur activité. La promotion à une fonction de cadre est ainsiconçue comme un moyen d’endiguer le risque d’un turn-over trop conséquent parmi cette population. D’autre part,l’industrie aéronautique a de plus en plus à gérer le départ à la retraite de nombreux cadres.Les promotions internes aux fonctions de cadre se justifient par ailleurs au regard de l’expérience acquise dans l’entreprise(connaissance des outils et modes de production, première sensibilisation au management d’équipe…). Ces promotionssont donc loin de s’effectuer au vu du simple critère du diplôme. Concernant les profils de formation des promus, on observetoutefois que la voie technologique (BTS et DUT) et le supérieur font une percée, relativement à la filière professionnelle(CAP, Bac Pro). Cette percée est avant tout à comprendre comme la résultante de la politique de recrutement du donneurd’ordres et de ses principaux sous-traitants, axée en priorité sur l’embauche de titulaires de BTS, DUT et licencesprofessionnelles pour pourvoir aujourd’hui leurs postes de technicien et répondre au mieux de leur point de vue auxexigences contemporaines du secteur (normes durcies en matière de qualité, de délai, forte pression des services achatsdes clients…).

Le passage au statut de cadre pour les professionsintermédiaires peut également prendre la forme d’unemobilité fonctionnelle en interne de nature promotionnelle.Cela revient à évoluer vers une fonction de « cadre nonencadrant » ou de « cadre expert »23, dans laquelle iln’exercera pas (ou plus) directement une responsabilité demanagement d’équipe, mais des missions supposées requérirune « expertise » – c’est-à-dire un degré de technicité, uneautonomie professionnelle, un type ou un niveau deresponsabilité – suffisamment importante pour êtrereconnue parmi l’emploi cadre de l’entreprise.

Là encore, cette deuxième forme de passage cadre faitcoïncider changement d’emploi et accès au statut. Il traduitla diversification croissante de la catégorie cadre au fil du

temps, du fait du développement continu de la figure ducadre expert au côté de celle, plus traditionnelle, du cadremanager.

Au niveau du matériau monographique, la promotion austatut de cadre par cette voie apparaît moins fréquente quela première forme identifiée. Elle semble bénéficier enpriorité aux professions intermédiaires non encadrantes(techniciens, commerciaux, personnels administratifs… ).De même, elle semble davantage toucher les entreprises degrande taille, lesquelles offrent plus de possibilités pourséparer, en termes fonctionnels, les tâches d’expertise etd’encadrement. En revanche, elle apparaît aussi biendéveloppée dans les entreprises industrielles que dans lesentreprises de services.

UNE MOBILITÉ INTERNE VERS UNE FONCTION DE « CADRE EXPERT »

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Un cas identifié en entreprise illustre très bien cette formed’accès au statut de cadre. Il se rapporte aux technico-commerciaux d’une entreprise de commerce de gros enmatériel électrique. Ceux-ci ont en effet la possibilitéd’évoluer vers une fonction d’expertise classée en internedans la catégorie cadre (cf. encadré ci-dessous).

Les promotions au statut de cadre dont il est question icicoïncident avec des mobilités vers des fonctions d’expertou de spécialiste. Classifiées au sein de la catégorie cadreau premier niveau de qualification, ces fonctionscorrespondent le plus souvent à des emplois relevant de lamême filière professionnelle que ceux occupés

antérieurement par les salariés bénéficiaires despromotions. Par exemple, le vendeur de véhicules pourparticuliers d’un concessionnaire devient cadre quand il envient à exercer la fonction de « vendeur sociétés », denature à la fois plus spécialisée et plus exigeante. Autreexemple, le technico-commercial de l’entreprise decommerce de gros en matériel électrique connaît le mêmetype d’évolution, en accédant au métier de « responsablede développement », dont la mission consiste à promouvoirsur l’ensemble d’une zone une famille de produits donnée(éclairage, sécurité-communication, courants faibles… )auprès de la clientèle et des personnels de l’entreprise.

Les technico-commerciaux d’une entreprise de commerce de gros en matériel électrique promus au poste de responsable de développement24

Qu’ils soient « sédentaires » (ils travaillent en agence et font du commercial via le téléphone) ou « itinérants » (ils sont« sur la route » et vont à la rencontre des clients), les technico-commerciaux de cette entreprise ont la possibilité d’évolueren interne vers un emploi de cadre expert, appelé «  responsable de développement  » ou également «  promoteur-prescripteur ». Il s’agit d’un emploi de spécialiste de la filière commerciale, dépourvu de responsabilités en matièred’encadrement. Intervenant sur un territoire relativement vaste (deux à trois régions), le titulaire de cet emploi a en chargeune famille spécifique de produits (ex : éclairage, sécurité-communication, courants faibles…). Sa mission est d’animertoute l’activité technico-commerciale de cette famille : organisation d’animations en agence ; négociation et conduite degrosses affaires ; gestion des relations et des partenariats avec les fabricants ; formation des personnels des agences…Cette possibilité d’évoluer vers cette fonction d’expertise est liée à la taille importante de l’entreprise et à son organisation,qui vise à couvrir au mieux tout le territoire. Active dans le commerce de gros de matériel électrique, électronique etélectroménager auprès des professionnels de l’industrie, de l’habitat et du bâtiment tertiaire, cette entreprise compte 5 500salariés, 480 agences ou points de vente, ainsi que 11 centres logistiques. Ce n’est d’ailleurs pas la seule perspective depassage cadre qu’elle propose à ses personnels technico-commerciaux, loin de là. Ces derniers peuvent aussi être promusà des fonctions de management de proximité ou des fonctions d’expertise plus transverses (formation, achats…).La possibilité d’une évolution vers un poste de responsable de développement est à rapporter à cette intention plusgénérale de l’entreprise de faire de la mobilité interne une pratique structurante de sa gestion des ressources humaines.À travers les différentes perspectives promotionnelles envisageables, l’enjeu réside dans la fidélisation des personnelscommerciaux les plus expérimentés ou les plus prometteurs. Le taux de turn-over oscille à vrai dire entre 8 et 10 % enmoyenne, ce qui n’est pas négligeable.D’ailleurs, semblable évolution vers un poste de responsable de développement est à même de séduire bon nombre decommerciaux, restés techniciens dans l’âme et souhaitant davantage approfondir un domaine technique particulier que deprogresser vers une activité managériale de directeur d’agence ou de chef des ventes. Tel est par exemple le projet poursuivipar l’un des technico-commerciaux sédentaires interrogés  : pas vraiment intéressé par le management commercial, ilenvisage d’évoluer à terme vers une fonction de responsable de développement, notamment pour prendre une part activeà l’expansion d’une nouvelle famille de produits, autour de la domotique.Force est néanmoins de reconnaître le nombre relativement limité de postes de responsable de développement et doncd’opportunités à saisir. Une situation qui aiguise la concurrence entre les différents salariés a priori intéressés. De plus,une évolution vers une telle fonction suppose très souvent une mobilité géographique, soit un mouvement qui ne convientpas forcément à tous les salariés.

24. D’après une monographie de Jean-Paul Cadet et Samira Mahlaoui.

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Les fonctions d’expert faisant l’objet de promotions cadrepeuvent aussi s’apparenter à d’autres emplois, en particulierdes emplois de nature transversale. Ces emplois sont trèsdivers, bien qu’ils renvoient le plus fréquemment à desfonctions support : responsable achats (entreprise derestauration collective), formateur-métier (entreprise decommerce de gros en matériel électrique), cadre au servicemarketing (ibidem), cadre à la direction du patrimoine(GIE dans le secteur du logement)… En général, cesemplois ne sont pas rattachés aux unités opérationnelles.Ils sont localisés au sein des sièges ou des directionsrégionales des entreprises. Du coup, ils offrent auxprofessions intermédiaires beaucoup moins d’opportunitésd’accès promotionnel que les autres emplois de cadreexpert. En outre, compte tenu de leur nature, ils sontouverts à plusieurs modes d’alimentation, internes ouexternes à l’entreprise.

Par ailleurs, l’accès aux emplois de cadre expert n’est pasépargné non plus par la sélection. À la limite, celle-ci serévèle plus aiguisée que celle qui prévaut pour l’accès auxemplois de cadre manager. En effet, les possibilitésd’évolution vers des fonctions d’expertise ou transversalespour les professions intermédiaires ne paraissent jamaislégion au sein des organisations. Cette observationcontraste en partie avec les initiatives ou les discoursactuels des entreprises en matière de gestion des carrières,visant à promouvoir les filières d’expertise et les mobilitéstransversales. Elle invite en tout cas à ne pas surestimerl’importance effective de ces filières et de ces mobilitésdans les trajectoires promotionnelles.

Au sein des entreprises, le passage au statut de cadren’entraîne pas toujours un changement d’emploi ou demétier à part entière, au moment précis où ce passageintervient. En effet, les salariés des professionsintermédiaires peuvent être promus à ce statut tout encontinuant à exercer la même activité, au moins dans sesgrandes lignes. Cela est dû à la dissociation qui existesouvent en entreprise entre gestion fonctionnelle et gestionstatutaire, ou plus simplement entre emplois et statuts.Cette forme de promotion interne à la catégorie cadrerenvoie également au positionnement des professionsintermédiaires dans les organisations, par définition à lacharnière entre le monde des cadres et celui des non cadres.Un tel positionnement induit presque inévitablement desemplois traversés par la frontière cadres/non cadres.

Un premier passage cadre sous cette forme consiste, pourun salarié de catégorie intermédiaire, à être promu à cestatut dans son entreprise après quelques années d’exercicedans une fonction, qui ressemblent à une périodeprobatoire : deux, trois, quatre, cinq ou six ans, selon lescas repérés. Ce salarié avait au préalable occupé cettefonction en ayant un statut d’agent de maîtrise, detechnicien ou assimilé. Auparavant, il avait été recruté parl’entreprise en qualité de débutant dans le métier concerné,via une embauche sur le marché du travail ou une promotioninterne.

De fait, l’accès au statut de cadre intervient en différé parrapport à cette embauche ou cette promotion. Il prend lestraits de ce qu’on peut appeler une «  confirmationprofessionnelle » car le salarié qui bénéficie de cet accèsse voit pour ainsi dire « confirmé » dans sa fonction. Le

passage cadre constitue pour lui, peu ou prou, unereconnaissance de sa professionnalité naissante, unemontée en compétences admise en interne.

Plusieurs monographies présentent des accès au statut decadre de ce type. C’est d’ailleurs, au sein du matériau, laforme de passage cadre la plus fréquente après celleconsistant à évoluer vers un emploi de cadre manager.

Cette forme différée de passage au statut de cadre sembleconcerner davantage les services que l’industrie, c’est-à-direlà où, soulignons-le à nouveau, les positionnements et lesfrontières statutaires sont plus brouillés et donc davantagesujets à des distorsions par rapport à la hiérarchie desemplois.

L’exemple des directeurs de restaurant d’une entreprise derestauration rapide est tout à fait éclairant. Précédemment« managers » puis directeurs-adjoints au sein de cetteentreprise, avec un statut d’agent de maîtrise, ils n’accèdentpas tout de suite au statut de cadre quand ils sont nommésdirecteur à proprement parler. Le passage-cadre intervientseulement après qu’ils aient fait leurs preuves à ce postede directeur, selon les modes d’évaluation en vigueur dansl’entreprise. Il s’apparente donc bel et bien à une sorte deconfirmation professionnelle (cf. encadré page 48).

UNE « CONFIRMATION PROFESSIONNELLE » APRÈS UNE PÉRIODEPROBATOIRE

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Les directeurs de restaurant d’une entreprise de restauration rapide25

Salariés d’une entreprise franchisée à un groupe américain de restauration rapide et comptant 630 salariés et 11 sites ausein d’un département, les directeurs de restaurant représentent une catégorie traversée par la frontière cadres/non cadres.En effet, certains ont ce statut, les autres non (ils sont alors positionnés parmi la maîtrise). L’obtention du statut de cadrefait suite à un processus de professionnalisation dans la fonction.Ce choix de distinguer des cadres et des non cadres parmi les directeurs de restaurant signe la volonté de l’entreprise dedéterminer des niveaux de responsabilité différents dans la fonction. Si l’activité des uns et des autres consiste à optimiserla performance économique d’un restaurant, le degré de responsabilité varie selon le fait qu’ils soient cadres ou non.Contrairement à un directeur non cadre, un directeur cadre peut être amené à gérer deux restaurants simultanément(quand il s’agit par exemple de soutenir les premiers mois d’un directeur débutant dans un restaurant) ou à jouer pendantquelques mois un « rôle de mercenaire pour redresser un restaurant ». De plus, seuls les directeurs cadres assurent laformation et le suivi des directeurs débutants et directeurs adjoints. Enfin, leurs responsabilités sont totales, alors quecelles des directeurs non cadres et des directeurs adjoints sont partagées avec un directeur de marché (le n+1). « En termesde contenu du travail et de responsabilité, le statut de cadre ne change rien si ce n’est que vous êtes vraiment leresponsable direct du restaurant. […] Les directeurs adjoints et non cadres sont plus chapeautés par le directeur demarché. S’ils commettent une erreur, ils prennent moins que le directeur de marché qui est le responsable direct. Quandun directeur a le statut de cadre, sa responsabilité change. C’est lui qui va au front même s’il y a toujours un directeur demarché » (directrice adjointe de restaurant).Pour devenir un directeur de restaurant au statut de cadre, tout un cheminement en interne s’impose. Il faut d’abord avoirété parmi les rares « managers » (premier niveau hiérarchique au sein des restaurants) promus sur un poste transitoirede directeur-adjoint. Ensuite, il faut avoir été nommé directeur à l’issue d’une période de formation d’un an, incluant lesuivi d’un cursus ad hoc, l’obtention d’un titre spécifique, une mise en situation aux côtés d’un directeur cadre et unaccompagnement assuré par un directeur de marché. Enfin, il faut avoir été reconnu comme suffisamment performant,autonome, respectueux des standards et de la hiérarchie, dévoué à l’entreprise dans la fonction de directeur pour accéderau statut de cadre.À noter aussi la formation qui est proposée aux directeurs promus au statut de cadre et dispensée à l’université du groupeaméricain, aux Etats-Unis. Il s’agit d’une formation d’une semaine qui prend davantage des allures de récompense et derite de passage que les traits d’une pratique effective de construction de compétences : « Donc là on n’apprend pas, onne se forme pas, ce n’est pas une construction de compétences, de connaissances, c’est purement un rite de passage ».

25. D’après une monographie d’Emilie Bargues.

Il faut mentionner une variante de cette forme de passagecadre pour les professions intermédiaires. Dans ce cas defigure (sans doute moins répandu), la promotion interneau statut de cadre semble à prime abord s’accompagner d’unchangement d’emploi dans l’espace social de l’entreprise.Mais, à y regarder de plus près, cette promotion prendaussi la forme d’une confirmation professionnelle. En effet,l’emploi de provenance, classé parmi les catégoriesintermédiaires, présente suffisamment de points communsavec l’emploi de destination, de catégorie cadre, pour êtreconfondu avec ce dernier. Opérée par l’entreprise, ladistinction entre ces deux emplois relève plus en fait dela fiction gestionnaire que de la réalité professionnelle. En

particulier, l’emploi de provenance est conçu avant toutcomme une catégorie transitoire vouée à alimenter lafonction cadre de destination. Le passage de l’un à l’autrene signifie nullement un changement de métier ou d’activitéproprement dit. Au plus, il induit une progressivité entermes de tâches remplies et de compétences mises enœuvre.

On peut évoquer à ce propos l’exemple des « développeurs »d’une société de services en ingénierie informatique (SSII)qui sont appelés à devenir « ingénieurs – développeurs »après deux ou quatre ans en fonction (cf. encadré page 49).

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Les développeurs d’une SSII26

Les « développeurs » sont de jeunes techniciens de niveau Bac +2/Bac +3 (BTS/licence professionnelle), travaillant ausein d’une SSII (Société de service et d’ingénierie informatique) créée en 1994 et s’inscrivant aujourd’hui dans une logiquede croissance mesurée (185 salariés, dont 166 cadres). La particularité de ces techniciens, chargés de programmer, detester et d’intégrer des applications informatiques à partir de spécifications prédéfinies par un chef de projet, est qu’ils ontvocation à ne pas rester longtemps à ce niveau de qualification dans l’entreprise. Après deux à quatre ans à leur poste, ilsaccèdent en principe à une fonction d’« ingénieur-développeur » et passent par la même occasion au statut de cadre.Ce passage peut être assimilé à un acte de confirmation professionnelle, compte tenu justement de la dimension transitoireconférée intentionnellement à l’emploi de développeur. Celui-ci est en fait conçu par l’entreprise comme un point depassage. Il est mis en place pour accompagner la pratique de cette PME consistant à recruter une population moinsqualifiée que les ingénieurs informatique, le profil type du secteur, mais qu’elle peine à attirer en nombre suffisant enraison de leur importante pénurie sur le marché du travail. Cet emploi de développeur n’a donc pas vraiment un sens bienspécifique au sein de l’organisation du travail. Si l’ingénieur étude et développement va jusqu’à la réalisation despécifications et la conception de solutions, la frontière entre les deux emplois n’est pas nette. Les développeurs ne sontd’ailleurs pas identifiés par leurs collègues ingénieurs comme des « techniciens », et la différence de statut reste flouepour le collectif : « On fait le même boulot. Ce qui change, c’est la qualification, le statut et le salaire ». Aussi, le passageau statut de cadre est avant tout vécu ici comme la reconnaissance d’une montée en compétences en début de carrière.L’accès à la fonction d’ingénieur et du même coup à la catégorie cadre s’inscrit par ailleurs dans un parcours deprofessionnalisation faisant l’objet d’une contractualisation entre les salariés concernés et l’entreprise. Ce parcours secaractérise par sa visibilité. Il s’appuie sur une « feuille de route » qui formalise les grandes étapes pour passer de lafonction de développeur à celle d’ingénieur étude et développement. Sont notamment identifiés : les différents typesd’activité à maîtriser, les formations à suivre à l’extérieur ou à réaliser sur le lieu de travail… Le parcours en question sefonde aussi sur le rôle majeur attribué aux managers de proximité. Ceux-ci ont vocation à se montrer au plus près desjeunes développeurs pour contribuer efficacement à leur professionnalisation et en fin de compte à leur passage cadre.

26. D’après une monographie de Patrick Conjard et Christian Jouvenot.

Les emplois qui permettent d’aménager d’une manière oud’une autre des processus de confirmation appartiennentplus au monde des cadres qu’à celui des professionsintermédiaires. Ils sont en général traversés par la frontièrecadres/non cadres au début de l’espace de carrière qu’ilsconstituent. Ils offrent aux débutants un moment de « pré-cadrage », au cours desquels ces derniers vont pouvoir seformer et se distinguer en interne avant de passer au statutde cadre à proprement parler et d’accéder ainsi à unecertaine forme de reconnaissance.

Ces emplois sont aussi bien des emplois de manager quedes emplois d’expert :

Exemples d’emplois de manager : les directeurs d’agenced’une banque, les directeurs de restaurant de l’entreprisede restauration rapide, les « responsables de groupe » d’uneusine de construction de moteurs pour automobiles.

Exemples d’emplois d’expert : les visiteurs médicaux d’unlaboratoire pharmaceutique, les conseillers clientèleentreprises de la banque, les « conseillers commerciauxvéhicules » d’une succursale de vente et après-venteautomobile, les développeurs de la SSII, les « technicienssystème » d’une autre SSII.

Dans ces différents emplois, le passage cadre apparaîtbeaucoup moins sélectif que les deux formes exposéesprécédemment. En effet, il est presque jugé « naturel » queles débutants aient vocation à « grandir » sur le planprofessionnel et à se voir confirmés dans leur fonction,après une période plus ou moins fixée selon les cas, c’est-à-dire en regard d’une condition d’ancienneté plus ou moinsformalisée.

Toutefois, un mécanisme sélectif reste à l’œuvre. Commenous aurons l’occasion de la repréciser au sein de latroisième partie, c’est au cours de cette période, de natureprobatoire, que les titulaires d’emploi doivent démontrerleur employabilité et leur capacité à occuper durablementet avec efficacité leur poste. Ceux qui deviennent cadressont pour ainsi dire ceux qui ont réussi, aux yeux de leuremployeur, cette démonstration. De plus, dans certainscas, le passage cadre n’est en aucune façon automatiqueet lié explicitement à une condition d’ancienneté. Au total,cette forme de progression révèle à quel point quantitéd’entreprises entendent continuer à faire de la catégoriecadre un statut qui se mérite.

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D’autres salariés de professions intermédiaires deviennentcadres par gratification dans des entreprises qui leurreconnaissent par ce biais une expertise ou une compétencedistinctive à leur poste. Dans cette manière d’accéder austatut de cadre, ils ne changent pas non plus d’emploi oude métier à proprement parler. Ils restent au contraireaffectés à leur poste. Mais contrairement à ce qui a étéévoqué précédemment, ils bénéficient plutôt de cettepromotion interne en fin de parcours ou de carrière dansleur métier. Nombre d’entre eux se trouvent proches dudépart à la retraite et voient dans cette promotionl’obtention de leur « bâton de maréchal ». Auparavant, ilsavaient un statut de catégorie intermédiaire (agents demaîtrise, techniciens… ).

Pareille promotion représente le plus souvent pour eux lapossibilité d’une nouvelle évolution de carrière. Jusqu’alors,la plupart se trouvaient ou se sentaient « bloqués » en lamatière, sans pouvoir ou vouloir en même temps évolueren interne vers un emploi de cadre manager ou expert.Egalement, cette forme de passage cadre signe à nouveaul’existence d’emplois parcourus par la frontière cadres/noncadres au sein des entreprises. Mais la frontière étant cettefois tracée en général à la fin de la carrière salarialedessinée par ces emplois, nous avons affaire ici à desemplois appartenant plutôt à la sphère des professionsintermédiaires qu’à celle des cadres.

D’ailleurs, l’accès au statut de cadre par gratification oureconnaissance d’un haut niveau d’expertise professionnellesemble se faire beaucoup plus rare que l’accès par voie deconfirmation. L’enquête EPIE a permis d’identifier seulementquatre cas de ce genre dans trois entreprises. Ils concernenttous des emplois commerciaux :

Le vendeur véhicules particuliers d’une petite concessionautomobile ;

Le technico-commercial d’une société de commerce degros en matériel électrique ;

Le « délégué commercial » et de « télé-commercial »d’une entreprise de commerce de gros en produits fraiset surgelés : ces emplois nous serviront ici d’illustration ;ils permettent à présent aux titulaires les plusexpérimentés de passer à une position d’« expert » etd’embrasser ainsi le statut de cadre (cf. encadré page 51).

C’est pour les professions commerciales, il est vrai, que lafrontière cadres/catégories intermédiaires est la moinsétanche, la plus poreuse ou brouillée.

D’autre part, le passage cadre via une gratification secaractérise par une forte sélectivité, beaucoup plus marquéeen tout cas que celle ayant trait aux passages cadre parconfirmation. Dans les professions intermédiaires a prioriconcernées, il y a peu d’élus à cette forme promotionnelleen entreprise. Elle est réservée à vrai dire aux personnelsparvenus au bout de leur espérance d’avancement dans leurmétier et surtout considérés comme les plus experts ou lesplus expérimentés parmi leurs pairs.

Notons encore que cette forme de passage cadre impliqueparfois une évolution partielle du contenu d’activité prisen charge par le salarié. Même s’il ne change pas de métieret de poste de travail, le salarié promu cadre de cettefaçon peut être invité à exercer de nouvelles activités,supposées aller de pair avec son nouvel état de cadre : desactivités de conseil, de transmission et de formation,sachant qu’il est censé ne plus vraiment apprendre et seperfectionner dans sa fonction. Ainsi, le délégué commercialde l’entreprise de commerce de gros en produits frais etsurgelés qui passe à une position d’expert dans son métieret au statut de cadre est-il conduit à prendre en chargedes nouvelles missions en plus de son activité ordinaire dereprésentation : du conseil lors de la composition descatalogues saisonniers et des campagnes de promotion, dela formation interne (du tutorat notamment). Cet ajout deresponsabilités n’est pas sans lien avec la manière de sereprésenter la condition de cadre et l’expertiseprofessionnelle qui va avec au sein de l’entreprise. Alorsque le salarié promu ne change pas d’emploi, on a là unindice de l’attachement de nombreuses entreprises aumaintien d’une barrière, même minimale ou purementsymbolique, entre les cadres et les autres personnels.

UNE GRATIFICATION

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Les commerciaux d’une entreprise de commerce de gros en produits frais et surgelés promus à la position d’expert27

Dans cette filiale d’un groupe britannique employant en France 2 000 salariés, spécialisée dans le commerce de grosalimentaire de produits frais et surgelés auprès des professionnels de la restauration (traiteurs, restaurants, chaînes derestauration, cantines d’école ou d’hôpital…), les commerciaux (tant les «  délégués  », itinérants, que les «  télé-commerciaux », qui usent du téléphone) ont désormais la possibilité d’accéder au statut de cadre sans changer de fonction,via une promotion à la position d’« expert ». Ce prolongement de l’espace de carrière vise à reconnaître ceux qui parmi les commerciaux confirmés sont jugés commeles plus performants et impliqués : « Le passage à la position d’expert, c’est une reconnaissance du parcours, sur le modedu retour » (responsable des ventes). Cette position permet aussi d’offrir une autre évolution à des commerciaux confirmésqui se sentent bloqués en termes de carrière ou pour lesquels la seule perspective de passer à un poste de manager et doncde changer de métier ne convient pas. Elle induit une augmentation salariale, mais aussi l’accès à des avantages commela mise à disposition d’une voiture de fonction au-delà des heures de service.Cette position d’expert s’inscrit dans un projet plus global de revalorisation des métiers commerciaux qui a pour objectifde dynamiser les carrières des personnels, de renforcer leur fidélité à l’entreprise et de limiter ainsi le turn-over, relativementimportant. Ce projet s’est notamment traduit par la mise en place d’une nouvelle grille de classification, qui prévoit troisgrades correspondant à des niveaux de compétence différents dans la maîtrise des métiers commerciaux et reliés auxgrandes catégories statutaires : « junior » (employé), « confirmé » (employé et agent de maîtrise à partir d’un échelonintermédiaire), « expert » (cadre). Des anciennetés minimales sont fixées pour réguler les progressions : ainsi, il faut aumoins dix ans pour qu’un confirmé puisse avoir une chance d’évoluer vers la position d’expert et épouser par conséquentle statut de cadre.Un tel mode d’accès à la catégorie cadre ne suppose donc pas un changement de métier. Il s’apparente à une gratificationou à une reconnaissance d’expertise. Il est d’ailleurs loin de concerner automatiquement tous les personnels susceptiblespar ancienneté d’y prétendre. Il implique au contraire une vraie sélection. Les « experts » sont ceux qui obtiennent lesrésultats les plus probants en termes de chiffre d’affaires et de taux de marge, et qui font ainsi preuve du meilleur « savoir-faire », tout en étant évalués très favorablement sur le plan du « savoir être ». Sont particulièrement appréciés leurattachement à l’entreprise, leur comportement responsable, engagé, sérieux à son égard. De fait, la promotion à la positioncadre d’expert ne se limite guère à une affaire de savoir-faire reconnu. Elle suppose aussi une implication durable en faveurde l’entreprise.Si elle n’entraîne pas un changement de métier, cette position d’expert n’est toutefois pas sans aucun effet sur les attendusen termes d’activités. En effet, en plus de son activité ordinaire de commercial, l’expert est tenu de conseiller l’entreprisedans la composition des catalogues (types de produit et de recette à proposer) et le montage des opérationspromotionnelles. On attend aussi de lui qu’il fasse de la formation en interne, en particulier qu’il s’investisse dans ledomaine du tutorat des jeunes recrues.

27. D’après une monographie de Jean-Paul Cadet et Samira Mahlaoui.

UNE REQUALIFICATION FONCTIONNELLELe cinquième type de passage au statut de cadre pour lesprofessions intermédiaires s’apparente à nouveau à unepratique de promotion interne sans changement d’emploi.Il prend la forme d’une « requalification fonctionnelle »,c’est-à-dire d’une reconnaissance d’un emploi dequalification intermédiaire au niveau cadre.

Cette fois, la visée est clairement collective, puisque ce sonttous les titulaires de cet emploi, quelles que soient leurancienneté, leurs compétences et leurs performances, quipassent au statut de cadre. Contrairement à la promotioncadre sous la forme d’une gratification, la requalificationne vise pas seulement les personnels les plus experts oules plus expérimentés, arrivés au bout de leur « carrière

métier », sinon en fin de carrière. De même, à l’opposé dela promotion sous la forme d’une confirmation, elle nevient pas couronner des parcours individuels deprofessionnalisation dans le cadre d’une fonction de « pré-cadrage ». Elle a pour objet un emploi donné. Elle est doncappelée à bénéficier à tous les personnels qui exercent cetemploi aujourd’hui et qui l’exerceront demain.

Les promotions internes au statut de cadre par ce biais sontsans doute marginales. Au vu du matériau monographique,elles sont en tout cas moins fréquentes que les autresformes promotionnelles identifiées.

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Elles semblent avant tout concerner le monde des serviceset celui des professions intermédiaires administratives etcommerciales (y compris les professions d’encadrement).Nous l’avons déjà mentionné : ce sont des mondes sectorielset professionnels pour lesquels la frontière cadres – noncadres reste floue et autorise ainsi des modifications plusaisées de tracé, via notamment des requalifications.

En guise d’illustration, on peut évoquer les chefs de rayond’un hypermarché. Autrefois positionnés parmi la maîtrise(professions intermédiaires), ils se sont retrouvés propulsésau rang de cadres à la suite d’un accord d’entreprise signépour faciliter en interne la mise en place des 35 heures (cf.encadré ci-dessous).

Soulignons, en complément, que les requalificationsd’emplois intermédiaires en emplois de cadre peuventinfluer derechef sur les contenus d’activité. Dans ce cas,

les populations salariées qui bénéficient d’une tellerequalification voient leur activité se modifier quelquepeu, avec notamment la prise en charge de nouvellesattributions, alors même qu’elles exercent toujours le mêmeemploi. Si l’on reprend l’exemple des chefs de rayon devenustous cadres depuis quelques années au sein de leurhypermarché, on observe qu’ils ont été amenés, en lien aveccette promotion statutaire, à exercer d’autres activités etplus globalement à travailler d’une autre manière.Davantage de responsabilités, d’autonomie, de gestioncommerciale leur ont été attribuées, comme si le passagecadre justifiait en soi cet ajout. Ainsi, on a là encore lesigne que ce passage persiste à marquer tellement lesesprits dans nombre d’endroits qu’il reste associé à uneévolution au moins minimale du contenu du travail, quandbien même il ne s’accompagne guère d’un changementd’emploi.

Les chefs de rayon d’un hypermarché28

Depuis une dizaine d’années, les chefs de rayon de cet hypermarché de 460 salariés ont obtenu le statut de cadre.Auparavant, ils faisaient partie des professions intermédiaires (agents de maîtrise).Cette requalification est liée pour l’essentiel à la mise en place des 35 heures. Pour permettre leur passage au forfait etdonc le maintien d’une disponibilité hebdomadaire au travail allant au-delà de 35 heures par semaine, les chefs de rayonsont ainsi passés au statut de cadre.Dans une certaine mesure, ce passage au statut de cadre visait aussi à accompagner une professionnalisation de lafonction. À preuve : quand ils ont été promus au statut de cadre, les chefs de rayon se sont vus attribuer davantaged’autonomie et de responsabilité en matière de gestion commerciale. Néanmoins, c’est peut-être aussi ce passage cadre ensoi qui a favorisé cette évolution de l’activité, le statut de cadre supposant dans les esprits la prise en charge d’un certaindegré de responsabilité.Par ailleurs, force est de reconnaître que cette requalification de la fonction de chef de rayon a contribué à générer duflou entre les catégories agent de maîtrise, professions intermédiaires et cadres. De fait, « à l’image de l’habit qui ne faitpas le moine, dans cette entreprise, le titre ne fait pas le cadre ». Certes, le chef de rayon est désormais statutairementconsidéré comme un cadre, mais en réalité, dans l’organisation sociale et hiérarchique de l’entreprise, il continue àreprésenter le lien intermédiaire, la transition entre les employés et les autres cadres supérieurs et donc à occuper encoredans les esprits une profession intermédiaire.Les chefs de rayon, qui ont pourtant le statut de cadre, font partie des professions intermédiaires pour le DRH. Les raisonsprincipales relevées sont : « Ils sont sur le terrain pour encadrer au quotidien, […] et ils font le lien entre les cadressupérieurs et les employés ».Du côté des chefs de rayon, ceux-ci peinent globalement à se reconnaître comme des cadres à part entière, puisqu’ilstendent à relier ce positionnement statutaire aux fonctions de l’encadrement supérieur, qui commence au niveau du chefde secteur, leur n+1. « Le chef de rayon est cadre mais on n’a pas l’impression d’être cadre dans l’entreprise, il y a unblocage au niveau chef de secteur » (chef de rayon).Ajoutons que selon le DRH, le passage au statut de cadre des chefs de rayon a entraîné la quasi disparition de l’activitéd’encadrement de proximité qu’ils exerçaient auparavant, compte tenu de leur recentrage sur des activités de gestioncommerciale. Etant donné l’importance que représente cette activité d’encadrement de proximité pour le fonctionnementquotidien de l’hypermarché, il a donc fallu recréer une catégorie intermédiaire en mesure d’exercer pareille activité, à savoirla catégorie des adjoints chefs de rayon, définie comme faisant « le relais entre le responsable de rayon et son équipe ».

28. D’après une monographie de Christine Guégnard.

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29. D’après une monographie d’Alain Chevance et deux autres de Sophie Divay.

La sixième forme possible d’accès au statut de cadre pourles professions intermédiaires ne constitue plus unepromotion au sein d’une entreprise. Elle suppose pour lessalariés une mobilité externe ou un changementd’entreprise, ponctué ou médiatisé le cas échéant par uneformation qualifiante ou une validation des acquis del’expérience (VAE). Ils deviennent précisément cadres quandils accèdent à leur nouvelle entreprise.

Selon les monographies, ce type de passage au statut decadre est susceptible de concerner bon nombre depersonnels occupant des emplois de qualificationintermédiaire :

Des infirmières qui deviennent « cadre de santé » ;

Des vendeurs d’automobiles qui deviennent « chef desventes » ;

Des « conseillers commerciaux services » (réceptionnairesd’atelier après-vente automobile) qui deviennent « chefde service après-vente » ;

Des « superviseurs logistiques » qui deviennent cadremanager dans tout type d’activité ;

Des techniciens de SSII qui deviennent ingénieur ;

Des «  responsables paie  » d’un cabinet d’expertisecomptable qui deviennent cadre administratif enentreprise ;

Etc.

Cette forme de passage cadre est loin d’être négligeable,comme le montrent régulièrement les enquêtes de l’APEC :à peu près un quart de l’ensemble des promotions au statut.

Elle comprend des cas de « reclassement », c’est-à-dire despassages au statut de cadre pour des jeunes diplômés deniveau master, occupant dans un premier temps, à titreprovisoire, des emplois de non cadre. Mais elle renvoieaussi à des trajets d’ordre plus promotionnel si l’on peutdire, impliquant des salariés plus âgés et moins diplômés.

Dans cette contribution, nous ne pourrons pas approfondirtrès en détail la description et l’analyse de cette forme depassage au statut de cadre. En effet, hormis lesmonographies qui portent sur les infirmières et lespersonnels paramédicaux, les données collectées sont troppauvres ou insuffisantes. De fait, à l’exception de la figurelimite du cadre de santé, nous n’avons pas étudié desprofessions de cadre, mais des professions intermédiaires.Pour cerner les possibilités de passage cadre via la mobilitéexterne, nous nous basons pour l’essentiel sur quelquesdiscours de responsables d’entreprise et de salariés relatantrespectivement des pratiques d’embauche et des projetséventuels de mobilité.

Par conséquent, l’analyse des logiques et des modalités decet accès promotionnel à la catégorie cadre sera à peinetraitée dans les parties suivantes, ces dernières étantdavantage consacrées aux différentes formes de promotioninterne.

Toutefois, le cas des infirmières qui accèdent à la fonctionde cadre de santé en changeant d’établissement de soins,et après avoir suivi la formation les ayant menées au titrecorrespondant, illustre parfaitement cette forme de passagecadre par l’entremise d’une mobilité externe (cf. encadréci-dessous).

UNE MOBILITÉ EXTERNE, ASSORTIE OU NON D’UNE FORMATION

Les infirmières qui deviennent cadres de santé à la suite d’une mobilité externe29

La possibilité de ce parcours promotionnel a été constatée au sein d’un petit hôpital du secteur public, de deux cliniquesdu secteur privé et d’un centre régional de lutte contre le cancer (de statut privé), à travers notamment des entretiensavec des cadres de santé en poste et des infirmières qui envisagent de le devenir.De fait, la fonction de cadre de santé constitue la principale voie de progression professionnelle des infirmières. Environune infirmière sur dix accède à cette fonction au cours de sa carrière. Et beaucoup d’entre elles sont justement amenéesà changer d’établissement en cette occasion.Les modalités d’accès à la fonction de cadre de santé sont en partie explicatives. Aujourd’hui, l’exercice de cette professionde soin est réglementé. Depuis 2001, un diplôme spécifique est obligatoire pour accéder à un poste de cadre de santé ausein de la fonction publique hospitalière. Ce diplôme est de même de plus en plus exigé par les établissements privés, étantdonné la montée des exigences de sécurité et de qualité et le développement des procédures de certification qui lesconduisent à s’aligner sur les pratiques et les règles du public. Aussi, pour devenir cadre de santé, une infirmière se doitaujourd’hui de préparer et de réussir le concours d’accès à une « école des cadres », de suivre ensuite la formation et dedécrocher le diplôme correspondant. C’est-à-dire effectuer un parcours long, coûteux et incertain que tous lesétablissements de soin ne sont pas prêts de financer, en tout état de cause pour l’ensemble de leurs personnels infirmiersa priori intéressés.

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Dans certaines structures, il faut dire que les perspectives de promotion vers des postes d’encadrement se révèlent limitées,sinon inexistantes. La taille réduite des établissements, mais aussi la pratique managériale, fréquente, qui consiste à nepas souhaiter recruter en interne les cadres de santé, invitent ainsi des infirmières désireuses d’évoluer à envisager et àentreprendre une mobilité externe.En même temps, la situation globale du marché du travail des cadres de santé favorise de telles initiatives personnelles.En effet, à l’image de l’emploi d’infirmière, la fonction de cadre de santé se caractérise par une importante pénurie depersonnels qualifiés. Les établissements de soin sont en difficulté pour répondre à leurs besoins en la matière. D’autantque ces besoins se sont sensiblement accrus ces trente dernières années, au rythme de l’augmentation du nombre de lits,de services, de personnels soignants à encadrer, des extensions et des modernisations de toute sorte dans lesétablissements. La pénurie de cadres de santé contribue dès lors à élargir la marge de manœuvre des infirmières potentiellement intéresséesau détriment des employeurs. Elle pousse en tout cas nombre d’entre elles à se lancer dans un projet d’ascensionsocioprofessionnelle vers la fonction de cadre de santé, et ceci même quand elles ne bénéficient d’aucun soutien financierde la part de leur employeur et qu’elles doivent démissionner de leur poste pour suivre la formation dispensée à l’école descadres.

Les passages au statut de cadre pour les professionsintermédiaires se maintiennent significativement enentreprise. Nous venons d’en voir toute la diversité, àtravers une typologie qui témoigne indirectement de leurvitalité.

Il s’agit maintenant de comprendre pour quelles raisons onobserve ce maintien des promotions au statut de cadre, etplus généralement quelles sont les logiques qui présidentà de telles promotions. Autrement dit, dans une perspectived’analyse compréhensive, qu’est-ce qui leur donne sens ausein des entreprises et qui permet ainsi leur réalisation etleur poursuite ?

Les logiques en question sont repérées et présentées selonle double point de vue des responsables/gestionnairesd’entreprise et des salariés des professions intermédiaires.Le passage d’un salarié au statut de cadre est en effet àconsidérer comme le résultat de l’interaction entre lespréoccupations d’une entreprise et les attentes propres àce salarié.

Il est difficile d’établir une hiérarchie claire entre ceslogiques – en tout cas, le matériau de l’enquête EPIE nele permet pas aisément. De plus, tant pour les salariés quepour les entreprises, elles n’apparaissent pas exclusivesl’une de l’autre.

n À QUOI TIENNENT LES PASSAGES AU STATUT DE CADRE ?

POUR LES ENTREPRISES, LA PROMOTION CADRE RESTE SOUVENT UN OUTIL DE GESTION UTILELes passages cadre pour les professions intermédiaires semaintiennent et se vérifient dans les entreprises parcequ’ils font encore sens pour leurs dirigeants et leursgestionnaires. Ces promotions s’imposent en fait comme des « outils de gestion » au service de plusieurs logiquesplus ou moins liées entre elles et se rapportant à deuxregistres complémentaires : l’organisation du travail et lemanagement des ressources humaines.

Bien entendu, cette idée que la promotion au statut decadre reste utile aux entreprises de plusieurs façonséventuelles ne signifie pas que toutes les entreprises yadhèrent pour alimenter leur catégorie cadre, ni d’ailleurs

qu’elles la privilégient ou l’emploient forcément pourpourvoir tous les métiers correspondants. Ainsi, l’une desentreprises enquêtées à l’occasion du projet EPIE exclutainsi complètement le recours à cette pratiquepromotionnelle30. En outre, les entreprises peuvent en userpour certaines fonctions de cadre, tout en faisant appel aurecrutement externe pour d’autres fonctions. Enfin,l’alimentation des emplois de cadre de premier niveau dequalification emprunte très souvent en même temps auxtrois voies envisageables : promotion, recrutement dejeunes diplômés de l’enseignement supérieur, recrutementde salariés expérimentés et dotés déjà du statut de cadre.

30. Cette entreprise, spécialisée dans la distribution de produits surgelés auprès de particuliers, a fait le choix d’établir une distinction étanche entreses personnels cadres et non cadres. Pour les professions intermédiaires de cette entreprise, et plus spécifiquement pour les « chefs de service clientèle »et les « superviseurs des ventes » (les deux métiers étudiés), il n’y a aucun passage cadre prévu en interne. Ces professions sont puisées pourl’essentiel au sein des équipes d’employés et gérées depuis l’unité investiguée, en région. Quant à la population cadre, elle est recrutée à l’extérieuret gérée par le siège, au niveau national.

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Pourvoir des postes

La première logique renvoie à une préoccupation basiqueen matière d’organisation du travail : pourvoir des postes(de cadre) qui se trouvent vacants. Cette logique a traitaux passages cadre par ascension hiérarchique, par mobilitéfonctionnelle en entreprise et par mobilité externe.

La promotion cadre est tout bonnement considérée icicomme un outil au service de la gestion quantitative desemplois. Elle figure comme un levier pour alimenter enquantité nécessaire les fonctions de cadre manager ouexpert.

Cette utilité de la promotion cadre se manifeste surtoutlorsque l’entreprise se confronte à des tensions ou despénuries importantes sur le marché du travail des cadres,et qu’elle n’est pas de surcroît la mieux placée sur le planconcurrentiel pour y faire face. Elle peine alors à recruterdes cadres expérimentés ou de jeunes diplômés de niveaumaster pour satisfaire ses besoins à ce niveau dequalification, et se tourne volontiers vers la solutionpromotionnelle, en interne ou via l’embauche de salariésclassés auparavant parmi les catégories intermédiaires.

Les passages au statut de cadre pour les professionsintermédiaires sont également dynamisés par le contextedes départs massifs à la retraite de la génération du baby-boom. Ce contexte engendre des besoins importants depersonnels dans certaines professions cadres, notammentdans le domaine crucial du management. Pour parer à cettesituation, des entreprises font appel significativement à lapromotion (essentiellement interne). C’est le cas parexemple de la caisse primaire d’assurance maladie.Confrontée à de nombreux départs à la retraite pour safonction cadre de responsable d’unité, elle y remédie engrande partie en actionnant le levier de la promotioninterne de salariés qui occupent la fonction non cadred’animateur d’équipe (située un cran en dessous au seinde l’organigramme).

Les entreprises engagées dans des trajectoires de fortecroissance interne ou d’expansion à un rythme soutenu sonttentées, pareillement, d’avoir recours à la promotion desalariés de professions intermédiaires pour pourvoir leurspostes de cadre, en développement sensible. Elles sontsusceptibles, en effet, de rencontrer des difficultés pourrecruter à temps et en nombre suffisant des cadresexpérimentés sur le marché externe. Dans une certainemesure, elles préfèrent reporter leur effort de recrutementsur les niveaux de qualification moindres (techniciens,maîtrise, employés, ouvriers). Ce comportement est parexemple vérifié au sein d’une SSII qui connaît unecroissance fulgurante de son activité et de ses effectifsdepuis quelques années. Ne cessant de renforcer le nombrede ses managers, notamment dans les secteurs dynamiquesde l’infogérance et de la maintenance informatique, elleopte en grande partie pour la promotion interne de

techniciens (appelés « techniciens systèmes ») diplômésà Bac +2 pour alimenter ces postes.

Pour souligner l’importance accordée à cet usage de lapromotion cadre pour pourvoir des postes, ajoutons qu’ilinspire des politiques de création de viviers au sein dediverses entreprises, de grande taille en particulier.Effrayées par le risque d’être en difficulté pour alimenteren nombre suffisant leurs fonctions de cadre, surtout quandelles se heurtent à une concurrence acharnée sur le marchédu travail, ces entreprises recrutent délibérément pourleurs emplois de niveau subalterne (notammentintermédiaire) des personnels diplômés au niveau BTS etplus pour disposer ainsi à terme d’un vivier mobilisable.

Dans une optique de gestion prévisionnelle, certaines vontjusqu’à concevoir et à aménager des emplois de naturetransitoire, ayant vocation à servir de sas pour lespersonnels qui les occupent avant une évolution vers unefonction de cadre. Ce type de stratégie est clairement àl’œuvre au sein de l’autre SSII investiguée. Comme nousl’avons vu dans la première partie, cette société a inventéun emploi de « développeur », qu’elle alimente par lerecrutement de jeunes titulaires de Bac +2 ou de licenceprofessionnelle, afin de faire face au marché du travail trèsconcurrentiel des ingénieurs de ce secteur. Elle positionneclairement cet emploi comme un point de passage assezrapide à la fonction d’« ingénieur-développeur ». Les jeunesdéveloppeurs accèdent en principe à cette fonction deuxà quatre ans à la suite de leur embauche, après avoirété confirmés dans leur professionnalité naissante. Neserait-ce que d’un point de vue quantitatif, ils forment doncbel et bien un vivier interne.

Satisfaire des exigences en matière de compétences

Le projet de satisfaire au mieux des exigences decompétences correspond à une autre logique renvoyant àune préoccupation en matière d’organisation du travail.Cette logique traduit en grande partie tout l’intérêt quenombre d’entreprises peuvent trouver dans les promotionsau statut de cadre. Elle se situe cette fois sur le registrequalitatif de la gestion des emplois et opère de manièrecomplémentaire par rapport à la logique précitée maisaussi, dans bien des cas, de manière autrement plusdéterminante.

Pour être appropriés et exercés avec professionnalisme,bon nombre d’emplois de cadre sont censés requérir unesolide expérience professionnelle et par conséquent ne paspouvoir être alimentés par le recrutement direct de jeunesde niveau master. Certaines fonctions d’expertise, de natureopérationnelle ou plus transversale, se trouventparticulièrement concernées. Citons en guise d’exemple leconseiller clientèle entreprise ou patrimoine d’une banque,qui est toujours en principe un ancien conseiller clientèle

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particuliers ayant souhaité approfondir un domaine jugéplus complexe, ainsi que le formateur-métier interne,recruté de préférence parmi les professionnels d’un métierdonné et doté par conséquent de la connaissance préalablenécessaire pour réaliser avec efficacité ses prestations.

La plupart des emplois de cadre manager sont supposésexiger une telle expérience antérieure pour être assurés aumieux. En ce domaine, il peut s’agir d’une premièreexpérience en matière managériale pour les agents demaîtrise qui exercent une fonction d’encadrement deproximité. Il peut s’agir aussi, plus largement, de tout unparcours professionnel, suffisamment long et riche pourpermettre l’acquisition de l’« étoffe » a priori nécessaire àla prise en charge d’une fonction de management, surtoutpour les personnels des professions intermédiairesdépourvus d’expérience d’encadrement à proprement parler(techniciens, commerciaux, administratifs, infirmières… ).Cette étoffe est à la fois d’ordre cognitif, personnel ettechnique. Elle se nourrit d’une connaissance avérée dumonde du travail, de ses rouages et de ses exigences. Ellese caractérise aussi par une estime de soi et des capacitésrelationnelles éprouvées en situation et prédisposant à laprise en charge d’une fonction d’autorité  : charisme,leadership… Elle renvoie enfin à la maîtrise d’unetechnicité dans un domaine spécifique, la nouvelle fonctionmanagériale visée (un emploi d’encadrement de proximitéou intermédiaire) demandant le plus souvent ce pré-requisd’aspect technique pour être assumée correctement.

Très souvent, l’expérience jugée indispensable pour tenirau mieux les postes de cadre est vue dans sa composanteorganisationnelle, c’est-à-dire au regard des connaissanceset des compétences développées au sein d’une entrepriseparticulière, autour de ses structures, outils, techniques,systèmes de relations spécifiques. Dans ce cas de figure,les entreprises auront tendance à préférer alimenter leursemplois de cadre par le biais de la promotion interne,plutôt que de faire appel à des cadres expérimentés ou àd’autres salariés de professions intermédiaires sur le marchéexterne du travail. Connaissant de fait les personnelsqu’elles décident de promouvoir, leurs qualités, leurscompétences comme leur potentiel, elles peuvent leur fairedavantage confiance. Ces entreprises cultivent d’ailleurs,de manière plus ou moins explicite, la pratique des parcoursprogressifs de professionnalisation et de carrière en interne.À titre d’illustration, on peut évoquer le cas del’hypermarché investigué. Pour pourvoir les postes de chefde rayon (classés à présent parmi les cadres), il y a en effetpeu d’embauches directes, car on estime nécessaire depasser auparavant « par tous les postes [de l’entreprise] pourapprendre à gérer les problèmes et éviter les erreurs »(directeur des ressources humaines).

Disposer de cadres dévoués et impliqués en faveur del’entreprise

La troisième logique est pour l’essentiel une variante de lalogique précédente. Si quantité d’entreprises promeuventtoujours des salariés à des fonctions de cadre, c’est parcequ’elles cherchent à disposer à ce niveau de qualificationd’une main-d’œuvre non seulement compétente mais aussidévouée et impliquée en leur faveur.

De fait, on se limite là à la promotion interne et à deséléments qui continuent à entourer l’imaginaire de lafonction cadre et ce que l’on peut en attendre en entreprise.

L’entreprise qui se reconnaît dans une telle logique nommeà des fonctions de cadre des « valeurs sûres », c’est-à-diredes personnels qu’elle considère comme «  motivés  »,« engagés », « disponibles », « loyaux » à son égard, etpour lesquels elle est donc encline à accorder toute saconfiance. Alors que le recrutement externe ne peut guèrelui assurer la même garantie potentielle, elle s’attend à ceque les personnels promus perpétuent et accentuent leurimplication quotidienne dans leur nouvelle fonction decadre. Elle espère d’ailleurs qu’ils lui soient reconnaissants,en lui faisant preuve d’un plus grand dévouement encore.

Ce pari se vérifie surtout au niveau des promotions aux fonctions de cadre manager, pour lesquelles les attentes d’implication personnelle et de loyauté sonttraditionnellement très fortes. Entre autres exemples, onpeut évoquer l’entreprise de commerce de gros en produitsfrais et surgelés, qui, pour alimenter ses emplois cadres de« responsable trafic » et « entrepôt », localisés au sein deses unités logistiques, puisent de préférence parmi les« superviseurs logistiques », de rang inférieur sur le planhiérarchique et de catégorie maîtrise. Ce choix estclairement présenté comme un moyen d’assurer au mieuxla loyauté et l’engagement des responsables trafic etentrepôt vis-à-vis de l’entreprise, au même titre que leurcompétence.

Par ailleurs, des requalifications entraînant un passage austatut de cadre peuvent aussi être animées par cetteintention de disposer de personnels cadres impliqués. C’estle cas, dans une certaine mesure, des opérations qui ontété conduites au début de la décennie 2000 pour « digérer »le passage aux 35 heures. Les promotions cadre liées à cesopérations ont eu pour principale vocation de faire ensorte que les personnels bénéficiaires puissent continuerà travailler au-delà de 35 heures par semaine, via le systèmedes forfaits-jours, qui est une caractéristique de la conditioncadre. Ces promotions ont particulièrement visé lespersonnels commerciaux, c’est-à-dire des salariés à qui ondemande en général une grande disponibilité sur le plandes horaires. Rappelons ici l’exemple des chefs de rayon del’hypermarché enquêté, lesquels sont devenus tous cadresà la suite d’un accord d’entreprise ayant porté sur la miseen place des 35 heures. Dans une optique de flexibilisation,il s’agissait clairement de se donner les moyens de préserver

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leur disponibilité sur le lieu de vente, en les faisant passer« au forfait ».

Reconnaître une professionnalisation ou le « mérite »d’un salarié

Outre leur contribution à l’organisation du travail, lespassages au statut de cadre peuvent aussi avoir un intérêtplus managérial pour les entreprises, en permettant dereconnaître et de donner à voir en interne des processusde professionnalisation ou des salariés « méritants ». Dansce cas, ils se réduisent de fait à des promotions internes,mais cette fois, aussi bien sans changement d’emploi(confirmations, gratifications, requalifications) qu’avecpareil changement (ascensions hiérarchiques, mobilitésfonctionnelles).

Cette logique de la reconnaissance joue pleinement quandl’entreprise cherche à récompenser un salarié de catégorieintermédiaire en lui octroyant le statut de cadre. Tel est lecas par excellence des passages cadre par gratification. Lesentreprises proposent ce genre de promotion en tantqu’« outil » ou levier pour reconnaître des personnels quise distinguent par un haut niveau d’expertise et uncomportement exemplaire à leur poste. Ce levier estd’autant plus intéressant à actionner quand il permet derécompenser des salariés qui ne souhaitent pas ou qui sontsupposés ne pas pouvoir évoluer vers des emplois de cadremanager. L’entreprise de commerce de gros en matérielélectrique gratifie par exemple du statut de cadre certainsde ses technico-commerciaux itinérants (TCI) parmi lesplus huppés en termes d’expérience et de technicité. « Cesont des gens d’un certain calibre qui ont fait leur preuve.Ils ne veulent pas évoluer vers des postes de managementou n’en ont pas forcément l’aptitude. Ils se plaisent beaucoupsur leur poste, mais ils pourraient sentir que l’évolution decarrière est terminée pour eux. Là, on leur dit que ce n’estpas terminé, en les passant cadres. Sur la zone, il y en a quatre sur les soixante TCI » (responsable ressourceshumaines).

Dans une certaine mesure, l’intention de reconnaître le méritede certains salariés nourrit aussi les promotions internes austatut de cadre qui s’accompagnent d’une évolution vers uneautre fonction. Ce projet de « faire retour » pour récompenserdes performances, des compétences ou des investissementsprofessionnels semble plus particulièrement à l’œuvre ausein des PME, sans doute plus imprégnées de « justiceorganisationnelle » que les grandes entreprises, de mêmequ’au sein des firmes confrontées à un sentiment marqué demanque de reconnaissance chez leurs personnels de catégorieintermédiaire. Ainsi, pour ce directeur d’une petiteconcession automobile, la pratique de la promotion cadreconsiste à « faire évoluer les personnes jugées compétenteset impliquées  » vers les emplois de chef de service(responsable vente véhicules d’occasion, responsable ventevéhicules neufs, responsable d’atelier) dans une optique de

reconnaissance. Par ailleurs, au sein de l’industrieaéronautique, on constate des efforts croissants pourproposer aux techniciens – une catégorie pour laquelle laproblématique de la reconnaissance est aiguisée dans cesecteur – des possibilités d’évolution promotionnelle versdes fonctions d’expertise ou transversales arrimées à lacatégorie cadre.

L’acte de reconnaissance que constitue l’octroi du statut decadre à un salarié se retrouve encore dans la plupart despassages cadre par « confirmation ». Dans ce cas, lesentreprises visent plus ou moins implicitement à signifieraux salariés la réussite de leur intégration et de leurprofessionnalisation dans le cadre de leur fonction, aprèsleur atteinte d’un certain niveau de compétence (ex :maîtriser son activité à un niveau de « confirmé ») ou deperformance (ex : réaliser un montant déterminé de chiffred’affaires). Elles leur signalent pour ainsi dire cetteprogression, de manière à la fois matérielle et symbolique.Alors que nous avons déjà affaire, là, à des emplois decadre de premier niveau de qualification, elles entendentmaintenir une forme de frontière entre cadres et non cadres,en évitant de « brader » ce statut et en faisant en sortequ’il continue à se mériter. On voit bien ce phénomène avecles «  conseillers commerciaux véhicules  » (CCV) d’unesuccursale vente et après-vente automobile. Les CCV quidébutent (le plus souvent de jeunes commerciaux recrutéssur le marché du travail) ont le statut d’agent de maîtrisependant une période probatoire de durée variable : quatreans au plus. Ensuite, ils passent dans la catégorie cadre, envertu du positionnement statutaire attribué à ce métier ausein de la succursale. Cette promotion au statut de cadrequi n’implique pas en tant que tel un changement d’activitémarque une étape importante dans le parcours de l’individu.L’entreprise lui reconnaît sa professionnalisation, c’est-à-direle fait qu’il ait fait ses preuves dans son métier de CCV.

Enfin, l’opération de reconnaissance peut prendre les traitsd’une professionnalisation d’envergure plus collective,s’apparentant à la requalification d’une fonction au niveaucadre. Dans ce type d’opération, les entreprises admettentet signalent l’importance stratégique que revêtent pourelles certains emplois, la spécificité des compétences (leurrareté, leur construction difficile… ) et des conditionsd’exercice (la grande disponibilité requise, l’importanteautonomie à assumer… ) liés à ces emplois, via unerevalorisation statutaire. Le plus souvent, une tellerequalification fonctionnelle intervient à la suite d’uneévolution sensible du contenu d’activité. Les tâches à remplirou les responsabilités à assumer étant jugées plus complexesou plus riches, on assiste à une réévaluation ou à unenouvelle « pesée » de cet emploi, justifiant le passage austatut de cadre. Ce processus est par exemple observé ausein d’une mutuelle, où interviennent plusieurs professionsintermédiaires administratives en phase de développement.Pour assurer leur professionnalisation et tenir compte del’évolution de leurs activités, la direction procède

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régulièrement à des requalifications entraînant pour leurstitulaires un passage cadre. Ce fut le cas, entre autres, dela fonction d’assistant en gestion des ressources humaines.

Soulignons également le cas particulier des promotionscadre par requalification qui se produisent dans la sphèredes organisations fortement imprégnées par le modèle dela gestion publique et administrative du personnel de parleur activité et leur histoire, et engagées aujourd’hui dansun processus de « modernisation » de leur gestion desressources humaines. Dans une perspective de valorisationet de reconnaissance, cette modernisation se traduit parune volonté de mettre davantage en lien les emploisoccupés, les compétences réellement mises en œuvre etles positions de carrière offertes. Elle donne ainsi souventlieu à des requalifications et à la mise en place de nouveauxsystèmes de classification. On peut donner l’exemple del’entreprise publique de distribution de courrier, qui connaîtun important changement de statut au début des années90 et la conception d’une nouvelle grille de classifications.La carrière des «  organisateurs-courrier  » s’en trouve alors modifiée. Les organisateurs qui possèdent le gradele plus élevé – «  vérificateur de la distribution et del’acheminement » – passent notamment cadres, alors qu’ilsavaient auparavant un grade de catégorie intermédiaire.

Agir sur la motivation et la fidélisation des personnels

L’utilité du maintien de la voie promotionnelle dans lesentreprises dans le registre du management des ressourceshumaines ne se limite certainement pas à la possibilité derécompenser ou de reconnaître des parcours ou desprocessus de professionnalisation en interne. Cette utilitése mesure aussi et surtout dans le rôle attribué auxpromotions cadre en entreprise pour favoriser la motivationet la fidélisation des personnels. Les actes dereconnaissance posés par les entreprises à l’occasion de cespromotions apparaissent d’ailleurs le plus souvent calculéségalement dans cette double perspective managériale.

Quelle que soit leur forme, les promotions internes austatut de cadre sont clairement pensées et organiséescomme outils de motivation. L’accès à la catégorie cadrepar gratification agit ainsi complètement en ce sens. Il peutrarement se comprendre comme une récompense purementgratuite, sans autre considération gestionnaire qu’unereconnaissance sur le simple mode de la rétribution. Enrègle générale, l’entreprise le conçoit aussi pour maintenir,relancer, accroître l’engagement professionnel des salariésconcernés, souvent arrivés en fin de carrière professionnelleou se sentant bloqués dans leur parcours.

Le directeur de la petite concession automobile a promupar exemple un vendeur automobile, Jean, au statut decadre avec cette visée, outre le fait qu’il souhaitât aussile récompenser. Titulaire d’un BEP en gestion, Jean était

entré dans la profession en 1976. La possibilité de devenircadre commercial représentait pour lui un couronnementde son long parcours dans le métier. « J’ai un vendeur quiest devenu cadre par ancienneté. Il ne l’était pas, c’est moiqui l’ai mis, parce qu’à la limite, il le méritait. [… ] C’étaitplus une gratification car je n’ai pas bougé son salaire. Parcontre, je l’ai mis cadre. De par son entretien individuel, jesavais par son chef de service qu’il le souhaitait. Donc pourlui, ce fut une reconnaissance de ses compétences. Il a 55ans, moi cela ne me coûte pas plus cher, lui il est contentd’être cadre. Si c’est un moteur de motivation, il ne faut passe poser de questions » (directeur).

Pareillement, la promotion cadre est censée favoriser lafidélisation. En effet, les entreprises misent sur la fidélitédes personnels des professions intermédiaires qui enbénéficient, notamment ceux qui menaçaient de partir siaucune perspective de carrière ne se dessinait pour eux.L’accès promotionnel au statut de cadre est donc un moyenmobilisé non seulement pour éviter des désengagementsau travail mais aussi pour prévenir des risques de turn-over.Cet enjeu de fidélisation de la main-d’œuvre promue visetout particulièrement des populations techniciennes etcommerciales, très concernées par le phénomène du turn-over.

Il inspire par exemple les responsables de l’entreprise decommerce de gros en produits frais et surgelés quand ilsdécident de créer une position d’expert pour les personnelscommerciaux, adossée à la catégorie cadre. Cette créationintervient à vrai dire dans un contexte qui n’est pas desplus favorables du point de vue de la rotation du personnel.À l’image du secteur du commerce de gros et de la filièreà laquelle appartient l’entreprise (l’agro-alimentaire), lessalaires et la visibilité sur les perspectives d’emploi sontrelativement faibles. Le turnover des commerciaux apparaîtpar conséquent non-négligeable, surtout dans les régionsles plus dynamiques sur le plan du marché du travail. Ainsi,l’édification d’une nouvelle position d’expert assorti austatut de cadre a-t-elle pour principal objectif de favoriserla fidélisation de ces personnels. Inscrite dans une nouvellegrille de classification, cette position d’expert offre uneperspective inédite de carrière aux commerciaux les plusconfirmés. Elle leur propose la possibilité d’une autreévolution promotionnelle que le seul projet classique depasser à un poste de manager et donc de changer de métier,voire de secteur géographique.

Il faut noter que les entreprises ne visent pas seulementà maintenir la motivation des salariés promus et à garantirleur fidélisation dans les années à venir. Offrant despromotions au statut de cadre à des personnels de catégorieintermédiaire, elles ciblent aussi dans une certaine mesureleurs pairs. En donnant à voir ces promotions dans touteleur exemplarité, elles espèrent susciter chez ces derniersl’espoir d’une évolution analogue à terme et assurer d’unecertaine manière leur implication durable au travail. Elless’évertuent d’autant plus à aménager et à « mettre en

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scène » de telles promotions qu’elles font face à un turnoverimportant des professions intermédiaires, et qu’elles leressentent comme un problème (en raison par exemple detensions importantes observées sur le marché du travail deces professions).

Parfois, les entreprises souhaitent même soutenir leurattractivité. Proposant des possibilités de passage cadre etfluidifiant ainsi leur marché interne, certaines aspirent àattirer de la main-d’œuvre pour réussir notamment àalimenter leurs postes de qualification intermédiaire. Ontrouve par exemple cette intention au sein de labanque étudiée. L’existence d’opportunités d’évolutionassez rapides vers l’emploi de directeur d’agence estclairement présentée comme un moyen d’attirer de la main-d’œuvre débutante et expérimentée pour pourvoir lesemplois de conseiller clientèle. Cette banque ne pouvantoffrir les meilleurs salaires sur le marché, elle joue lesperspectives d’évolution offertes contre la politique derémunération plus avantageuse des principaux réseauxbancaires pour garantir son attractivité à ce niveau dequalification intermédiaire.

Enfin, notons également que la recherche de motivationet de fidélisation via la promotion cadre peut se doublerd’une préoccupation plus générale en matière de

pacification. Dans ce cas, l’entreprise se montre sensibleà une réalité sociale très souvent constatée : le fait queles personnels en place tendent à légitimer fortement lapromotion, aux dépens du recrutement externe. L’entreprisefait alors le choix de respecter une pratique bien admisedans le corps social interne. Elle favorise du coup la « paixsociale » et par extension la motivation et la fidélisationde ses personnels.

Nul doute que ce souci d’accommodement social anime lesentreprises enquêtées qui maintiennent aujourd’huid’importants flux promotionnels. Citons à titre d’exemplele constructeur automobile ayant fait l’objet de quatreséries d’investigations dans le cadre de l’enquête EPIE (ausein d’un centre technique de recherche et développement,d’une usine de construction de moteurs, d’une usine demontage et d’une succursale vente et après-vente). Avec300 à 400 personnels ETAM (Employés, Techniciens, Agentsde maîtrise) qui passent cadres chaque année, ceconstructeur se caractérise par une culture très ancrée depromotion sociale qui ne peut que l’inciter à faire persistercette pratique, sous peine d’aller à l’encontre de qui estfortement légitimé par les personnels.

POUR LES SALARIÉS, LA PROMOTION CADRE RESTE SOUVENT UN PROJET ATTRACTIFDécidés et organisés par les entreprises, les passages cadrepour les professions intermédiaires n’en sont pas moinsvécus par des salariés. Or, ces promotions gardent aussi toutleur sens pour nombre d’eux. Elles restent considérées parces salariés comme des projets envisageables pour répondreà plusieurs logiques non exclusives l’une de l’autre ets’inscrivant dans une optique de carrière ou dedéveloppement professionnel.

Là encore, cela ne veut pas dire, loin s’en faut, que tousles salariés souhaitent forcément et obstinément êtrepromus au statut de cadre, en particulier quand cettepromotion consiste à évoluer vers une fonction de cadremanager. Il est clair, au contraire, que de nombreux salariésse montrent récalcitrants par rapport à une telle perspectiveou s’y refusent même catégoriquement. C’est du reste uneobservation réalisée sur plusieurs terrains d’investigationde l’enquête EPIE. Au sein de la troisième partie, nousaurons l’occasion de revenir en détail sur les raisons quiamènent ces salariés à adopter de telles attitudes.

Faire reconnaître une expérience, un parcours, un engagement

Pour nombre de salariés, le passage au statut de cadre estconçu et visé dans une logique de carrière et plusparticulièrement dans une optique de reconnaissance. Au

sein des catégories intermédiaires, il règne à vrai dire uneforte demande de reconnaissance. Et l’accès au statut decadre, qu’il s’accompagne ou non d’une mobilité, restejustement perçu comme l’un des moyens d’y répondre, dufait même que ce statut demeure assimilé à un repère decarrière signifiant aux yeux de la plupart des salariés.

Cette quête de reconnaissance fait écho au projetd’entreprises de reconnaître des salariés en les faisantévoluer vers des emplois de cadre ou en leur octroyant le statut (cf. supra). Elle se vérifie quand les salariéssouhaitent valoriser un diplôme ou un niveau de diplôme(un Bac +4 ou +5 surtout) acquis en formation initiale ouen formation continue, mais aussi lorsqu’ils entendentbonifier une expérience professionnelle, qui traduitnotamment un parcours spécifique au sein d’uneorganisation ou un engagement appuyé en sa faveur. Ausein du matériau EPIE, c’est d’ailleurs cette forme dedemande de reconnaissance qui figure le plus nettement.

Une telle demande est puissante car elle va jusqu’à nourriret justifier des projets d’évolution vers des emplois decadre manager ou expert en interne. Si des salariés fontmontre de pareils projets, c’est entre autres parce qu’ilssouhaitent faire reconnaître leur parcours antérieur, leursefforts consentis jusque-là, leurs performances obtenuesou leurs compétences mises en œuvre. Vivant une

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déconnexion croissante entre implication dans le travail etreconnaissance sociale, les techniciens des industriesaéronautique et automobile adoptent ainsi souvent cetteposition. On peut également citer l’exemple des technico-commerciaux de l’entreprise de commerce de gros enmatériel électrique. Pour plusieurs d’entre eux, ce n’estpas tant leur niveau de formation, le BTS, qui doit lesamener « naturellement » vers le statut de cadre et lesemplois correspondants, mais bel et bien leurinvestissement et leur compétence déployés sur la duréeen faveur de cette entreprise.

L’intention de faire reconnaître une expérience est toutefoisencore plus prononcée quand l’enjeu réside dans le fait depasser au statut de cadre en interne sans changer defonction.

Dans la mesure où les salariés anticipent la possibilitéd’une requalification fonctionnelle, cette perspective lesintéresse en règle générale. Elle figure comme une preuvede reconnaissance de leur activité et de leursresponsabilités « de cadre », assumées jusqu’ici sans enavoir le statut et la rémunération.

De même, le passage cadre dans les emplois traversés parla frontière avec les non cadres est considéré comme unesource importante de rétribution et de légitimationprofessionnelles. Dans les cas où ce passage prend la formed’une gratification, les salariés sont forcément sensibles àcette manière de reconnaître et de distinguer leur hautdegré d’expertise à leur poste. Ils en viennent donc souventà en faire un projet à poursuivre immédiatement ou àterme. Dans les situations où le passage cadre s’apparentedavantage à un acte de confirmation d’une professionnaliténaissante, les salariés en font une étape marquante deleur parcours-métier, signant une reconnaissance de leurmontée en compétences à leur poste, sinon une rétributionde leurs efforts réalisés. C’est donc un aspect sensible deleur socialisation professionnelle et organisationnelle quise trouve en jeu, et qui constitue de ce fait un objectif àatteindre.

Par exemple, au sein de l’usine de production de moteursde véhicules automobiles, les responsables d’unité (chefsd’équipe en travail posté) qui sont devenus responsablesde groupe (chefs d’atelier en horaire de journée) accèdentau statut de cadre après cinq à sept ans dans leur nouvellefonction. Cet événement est alors vécu comme un justeretour de leur important tribut. En épousant la fonctionde responsable de groupe, ils ont dû construire de nouvellescompétences, assumer des responsabilités plus lourdes,accroître leurs horaires de travail (« on attend de vous deshoraires de cadre ») et opérer de nouveaux arbitrages entrevie professionnelle et vie privée au détriment de cettedernière. Ces salariés n’étant pas promus immédiatementcadres, ils n’ont pas vu de suite leurs nouvellescontributions se traduire sur leur fiche de paye. Aucontraire, ils ont subi au cours des premières années unediminution de leur rémunération. Passés en horaires de jour,

ils ont perdu les primes de nuit liées à leur précédenttravail posté. « Moi, quand je suis passé de RU à RG, ladifférence de salaire fut très faible, puisque je ne suis paspassé tout de suite cadre et que j’ai perdu mes primes denuit. Alors c’est vrai, j’ai une meilleure qualité de vie, maisil m’a fallu quand même quatre ou cinq ans pour récupérermon salaire précédent ». Aussi, la promotion cadre s’imposebel et bien pour le responsable de groupe comme unesanction positive des nombreux efforts endurés.

Le souci de reconnaissance via l’accès au statut de cadreanime également de nombreux projets de mobilité externe.Ces projets cherchent alors à valoriser et à mettre à profitune expérience ou des compétences acquises dans lafonction occupée actuellement, mais qui ne peuvent l’êtrepour une raison ou une autre en interne. Ils se portentplutôt vers des entreprises du même secteur ou de la mêmefilière d’activité dans lesquelles cette expérience aura apriori plus de chances d’être reconnue. Ils se manifestentsurtout, d’autre part, lorsque des tensions dues à des pénuries de main-d’œuvre existent entre l’offre et la demande d’emploi sur les marchés du travail des cadres visés. Certains « conseillers commerciaux service »(réceptionnaires classifiés agents de maîtrise) de lasuccursale de vente et après-vente automobile lorgnentainsi vers des emplois cadres de chef après-vente d’autresconcessions ou réseaux concurrents. Ils anticipent unedifficulté pour progresser au sein de leur entreprise. Ils ontconscience en même temps des exigences et de l’importantevaleur formatrice de leur fonction (gestion d’une relationde service « tendue » avec les clients, approfondissementde la dimension commerciale, développement d’uneremarquable capacité d’auto-organisation…). Ils entendentdonc faire reconnaître cette expérience et s’en servir commetremplin pour aller se valoriser et « se vendre » à l’extérieuren qualité de cadre.

Bénéficier de nouveaux avantages et d’une progression en termes de carrière

Du point de vue des salariés, le passage au statut de cadredans ses différentes formes peut également être assimiléavant tout à un gain de carrière. Jouxtant la catégoriecadre, les professions intermédiaires restent en effetpeuplées de salariés avides de progresser et d’obtenir à plusou moins long terme pareil gain. Le plus souvent, lesdemandes de reconnaissance liées au passage cadre sedoublent d’ailleurs de la recherche d’un gain en termes decarrière.

Le statut de cadre résonne encore en lui-même comme unélément attractif. Certes, ce statut a sans doute perdu deson prestige, avec sa diffusion et sa tendance à labanalisation : on pense notamment au développement dela figure du « petit cadre », celle-là même qui renvoie à lafois aux emplois d’évolution pour les professionsintermédiaires et aux fonctions traversées par la frontière

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entre cadres et non cadres. De plus, nombre de salariés nefont pas du statut de cadre un objectif de carrière en soi,l’accès à ce statut devant accompagner, un jour ou unautre, leur évolution professionnelle plus globale. Mais cestatut reste jugé attrayant au regard des avantages qu’ilest censé procurer. Plusieurs salariés mettent en particulieren avant les avantages liés à la retraite. Alors que lathématique de la retraite et de ses difficultés récurrentesde financement fait fureur dans la société, ils se montrenttrès sensibles à ces avantages. Anticipant le risque depensions réduites à terme, et ce même s’ils sont encorerelativement jeunes, ils souhaitent accéder au régime plusfavorable qui s’adresse aux cadres. Certains salariés (surtoutdes commerciaux, potentiellement bénéficiaires) briguentquant à eux les avantages en nature parfois associés à lacondition de cadre en entreprise : bénéficier au-delà desheures de service d’une voiture de fonction, d’un téléphoneportable…

Par ailleurs, la promotion au statut de cadre intéresse bonnombre de salariés en ce qu’elle entraîne en général uneélévation de la rémunération. Moindre (et parfois mêmeinexistant) pour les promotions sans changement defonction, ce gain salarial est surtout significatif pour cellesqui coïncident avec une évolution vers un emploi demanager ou d’expert, à l’interne comme à l’externe. Il signedès lors le maintien d’une différence sensible entre noncadres et cadres.

On peut évoquer à titre d’illustration le cas des superviseurslogistiques de l’entreprise de commerce de gros en produitsfrais et surgelés. Ils assument d’importantes responsabilités– ils encadrent une équipe postée d’employésréceptionnaires, de préparateurs-commandes ou dechauffeurs-livreurs. Pourtant, ils n’obtiennent pas unecompensation financière ou un différentiel de salairesuffisamment important au regard des personnels employéset ouvriers qu’ils encadrent. Aussi, beaucoup d’entre eux,après trois à cinq ans à leur poste, aspirent à évoluer eninterne vers un poste cadre de responsable entrepôt ouresponsable trafic, correspondant pour eux à une positionde n+1, et significativement mieux rémunérée. «  Lesuperviseur va vouloir avoir le retour de son investissement.Donc il va prétendre à plus, en souhaitant devenir responsableentrepôt ou responsable trafic et passer à la catégoriesupérieure. Il y a une vraie différence lorsqu’on accède à cespostes. C’est vraiment le niveau au-dessus qui fait ladifférence » (responsable de formation).

Incarnant parfois l’entrée dans un nouveau monde, lepassage cadre peut également être convoité dans le sensoù il contribue à ouvrir ou rouvrir des perspectives decarrière pour les personnels qui en bénéficient. Là encore,ce sont les promotions avec changement de fonction quise trouvent essentiellement concernées. Les bénéficiairesvoient alors se dessiner de nouvelles évolutionsenvisageables à partir de leur nouvelle fonction de cadre,alors même qu’ils se sentaient auparavant un peu à l’étroit,

sinon bloqués dans leur parcours de carrière. Par exemple,les animateurs d’équipe de la caisse primaire d’assurancemaladie sont pour partie dans cette situation. Quand ilsenvisagent de devenir responsables d’unité, ils s’attendentà ce que cette fonction de cadre leur permette de bénéficierde nouvelles perspectives de carrière.

Ce sont surtout des personnels encore relativement jeuneset titulaires d’un diplôme Bac +2 qui adoptent des projetsde progression socioprofessionnelle et envisagent ainsi depasser au statut de cadre. Ces personnels tendent en effetà faire de leur emploi de qualification intermédiaire unesimple étape dans leur parcours professionnel. Ils sedistinguent à ce propos de leurs collègues, plus âgés,moins diplômés, et pour lesquels leur situation, parmi lescatégories intermédiaires, correspond davantage àl’aboutissement d’un long parcours promotionnel,commencé souvent aux plus bas niveaux de qualification.

Parmi ces jeunes salariés soucieux d’évoluer sur le planpromotionnel, on trouve par exemple certains« responsables de ligne » (REL) d’une entreprise publiquede transport urbain. Diplômés pour la plupart au niveauBac +2, ils ont connu avant d’être embauchés dans cetteentreprise des expériences dans d’autres entreprises dusecteur privé. Ils sont entrés directement comme« régulateur de ligne » (de niveau technicien) et mêmeparfois comme REL-adjoint ou REL. Après plusieurs annéessur le poste de REL, ils se posent alors la question de leurdevenir professionnel dans l’entreprise. La plupart aspirentà accéder au statut de cadre via notamment une ascensionau sein de l’encadrement de l’entreprise, et n’hésitent plusà menacer de la quitter si elle ne répond pas de façonsatisfaisante à leurs vœux en matière de déroulement decarrière. Ils s’opposent ainsi à la majorité des REL en poste.Moins diplômés et souvent proches de l’âge de départ à laretraite, ceux-là ont fait toute leur carrière dans l’entreprise,en grimpant progressivement ses différentes marches :employés d’abord comme machinistes (conducteurs debus), ils ont été ensuite régulateurs de ligne, puis REL-adjoint et enfin REL. Contrairement aux précédents, ilsn’envisagent plus de poursuivre leur progression en passantau statut de cadre.

Plus généralement, le fait que le salarié de catégorieintermédiaire ait le sentiment d’être bloqué en termes decarrière le conduit aussi souvent à souhaiter passer cadre,et ce, que ce soit par le biais d’une évolution dans sonentreprise ou par l’entremise d’une mobilité externe. Parmimaints exemples recensés, on peut citer celui d’uncommercial de l’entreprise de commerce de gros en produitsfrais et surgelés. Parvenu à l’échelon ultime de sa catégorie,ce commercial perçoit une rémunération fixe plus élevéeque ne le prévoit la grille salariale – il était autrefoisrétribué à ce niveau plus généreux dans son ancienneentreprise, une PME rachetée depuis par son entrepriseactuelle. Il se retrouve ainsi bloqué en termes de carrièrealors qu’il est encore dans la force de l’âge (la quarantaine),

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ce qui tend à le démotiver. Pour se relancer, il aspire à unpassage cadre en qualité de manager ou (surtout) d’expert,dans son entreprise en priorité mais aussi à l’extérieur lecas échéant. 

« Aujourd’hui, je stagne. [… ] Il n’y a plus d’augmentationpossible à ce jour, hormis les primes sur les objectifs. [… ]Maintenant, peut-être que mon salaire de base est tropélevé. Je ne sais pas. Aujourd’hui, je n’ai plus d’augmentationet je n’en attends pas ! [… ] C’est dommage par rapport àla motivation, à tout, ce qui est normal. [… ] Je souhaitedevenir cadre en tant que manager ou alors en tant quecommercial. Cadre commercial, il y en a, mais très peu.J’aimerais une fonction de cadre, mais pour apprendre àd’autres ce dont je suis vraiment capable. C’est-à-direconseiller culinaire sur la route, approche du client, en tantqu’expert. [… ] Passer cadre pour accroître marémunération  ? Cela va de soi, mais c’est aussi de lareconnaissance. [… ] Moi j’ai 44 ans. Admettons que jereste ici jusque 60 ans. Comment je vais continuer à memotiver si mon salaire de base reste bloqué ? [… ] Vous necessez de monter, et puis à un moment donné, on vous dit :« Stop, vous restez là maintenant ». [… ] J’ai été contactépar d’autres sociétés, directement concurrentes, plusieurs fois.En pesant bien le pour et le contre, ça pourrait être unepossibilité pour évoluer. En résumé, je suis là depuis 19 ans.J’ai eu une très belle progression. Et depuis cinq ans, c’estterminé. Et c’est dommage que ça se soit arrêté à 40 ans ».

Accéder à des responsabilités de nature nouvelle ouplus complexe

Le passage au statut de cadre pour les professionsintermédiaires ne s’inscrit pas seulement dans une logiquede carrière. Il peut obéir également à une logique dedéveloppement professionnel, en permettant notammentau salarié d’accéder à des responsabilités nouvelles ou pluscomplexes. Aussi, plusieurs salariés envisagent-ils de faitde passer cadre avec cette intention complémentaire enmatière de développement professionnel.

Là encore, il est plus question ici de promotions avecchangement de fonction, même si les autres formes depromotion peuvent également attirer en ce qu’ellesimpliquent parfois aussi l’appropriation de nouvellesactivités ou responsabilités, comme on l’a vu au sein de lapremière partie.

Les salariés peuvent souhaiter avoir accès à desresponsabilités plus importantes, notamment en matièred’encadrement. Ils se représentent alors de façon positivele rôle des cadres managers, en valorisant d’ailleurs plusdes dimensions comme l’aide à la décision stratégique, laconception d’outils ou de procédures, la gestion de projets,l’organisation, que celle se rapportant au travaild’encadrement à part entière. Tel est le cas par exempled’un salarié d’une mutuelle, responsable adjoint d’unservice, qui souhaite à terme pouvoir évoluer en interne

vers un emploi de cadre. Pour lui, « être dans la créationde projets », « être force de proposition vis-à-vis de ladirection » sont les principaux intérêts associés à un emploide cadre dans sa structure.

À l’heure où l’on parle souvent d’une crise de vocationpour les emplois du management (cf. infra), il n’est pasinintéressant d’observer qu’il y a encore des salariés attirésa priori par le travail d’encadrement. Pour la plupart, cesont des personnes ayant le « goût de l’organisation ». Ellesont envie de prendre en charge des équipes et despersonnels pour atteindre des objectifs de performancemais aussi parfois pour mettre en place de nouvellesorganisations du travail aptes à corriger desdysfonctionnements ou à améliorer l’existant, selon leursconvictions ou en tirant partie de leur vécu. Anticipant pourainsi dire leur devenir potentiel, ces personnes en viennentd’ailleurs à développer souvent, dans leur fonction présente,des attitudes analogues aux postures attribuées aux cadresmanagers : prise de recul par rapport au quotidien, prised’initiatives, leadership…

Outre le management, les salariés peuvent aussi désirerapprofondir un domaine technique particulier. C’esttypiquement le cas lorsqu’ils entendent s’orienter vers unemploi de cadre expert. Ils envisagent alors de se spécialiserou d’améliorer leur technicité, tout en ayant le projet deprogresser en termes de carrière. Pour eux, ce peut être toutà la fois une opportunité d’évoluer vers un domaine qu’ilsconsidèrent comme étant plus en phase avec le contenuet le niveau de leur formation initiale, un moyen detransmettre leur savoir-faire (par exemple, en devenantformateur-métier au sein de leur entreprise) ou bien unefaçon de développer un aspect particulier de leur métier,comme la focalisation sur une clientèle particulière, jugéeplus difficile à traiter (ex : passer de particuliers à desprofessionnels) ou plus stratégique (ex : prendre en chargedes grands comptes).

À titre d’exemple, on peut mentionner le cas de deuxtechnico-commerciaux de l’entreprise de commerce de grosen matériel électrique, pour qui une évolution vers unposte de cadre expert s’impose comme un projet privilégié.D’un côté, Stéphane, technico-commercial sédentaire,souhaite avant tout devenir responsable de développementcar il souhaite approfondir un domaine particulier plutôtque partir de suite vers une responsabilité dans le domainede l’encadrement commercial. Ce domaine particulier, il l’ad’ailleurs déjà en tête. Il aimerait beaucoup participer audéveloppement d’un nouveau type de produits autour dela domotique. De l’autre, Antoine, technico-commercialitinérant, énonce, entre autres, le projet d’évoluer vers unposte de technico-commercial axé industries, localisé dansune cellule spécifique de l’entreprise. Ce poste est censéle rapprocher davantage des automatismes et du génieproductique, soit des domaines liés à sa formation initiale,le BTS automatismes industriels.

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Notons également que le projet de prendre en charge denouvelles responsabilités, jugées plus intéressantes ou pluscomplexes, implique un certain goût pour les défis et leschallenges. En effet, en souhaitant évoluer vers uneposition de cadre dans l’entreprise, les salariés sont prêtsà prendre les risques associés à une telle position. Cettepropension à la prise de risque se vérifie surtout à proposdes emplois de cadre manager. Ces emplois exigent de faitque leurs titulaires s’engagent sur les résultats d’une équipeou d’un collectif, et non plus uniquement sur des

performances individuelles. Les salariés en viennent àdépendre, d’une manière ou d’une autre, des compétenceset des comportements de chacun des membres de l’équipeplacée sous leur responsabilité. De plus, les managersoccupent de plus en plus des sièges éjectables au sein des organisations. En cas de mauvais résultats de leuréquipe, leur situation devient hautement précaire. Leuremployabilité dans l’entreprise peut aller jusqu’à être remiseen cause.

Suite au repérage des logiques des entreprises et dessalariés des professions intermédiaires qui permettent decomprendre l’aménagement et la perpétuation desdifférentes formes de passage au statut de cadre enentreprise, il s’agit à présent de voir comment elles sedécident, s’aménagent et se préparent concrètement. Bref,quels sont les critères et les conditions des passages cadreen entreprise pour les professions intermédiaires ?

En premier lieu, l’analyse peut porter sur les principauxcritères qui fondent ces passages cadre. Comment sont-ilsjustifiés en priorité et sur quelles bases les personnels quien bénéficient sont-ils sélectionnés avant tout ? Quelle estla vision du cadre (de ses responsabilités, postures… ) quitransparaît alors ?

En second lieu, sur fond général de décentralisation de lagestion des ressources humaines et de responsabilisationdes salariés dans la gestion de leur carrière, il importe dese polariser sur le rôle joué successivement par lessupérieurs hiérarchiques et les personnels eux-mêmes dansla construction des passages au statut de cadre. Commentinterviennent précisément les premiers ? Qu’est-ce quesuppose le fait de passer cadre pour les seconds ?

Enfin, il est intéressant de réfléchir à la place du diplômeet de la formation continue dans les passages au statut decadre. Le niveau et le type de certification sont-ils devenusaujourd’hui des critères déterminants ? Et jusqu’où laformation conditionne-t-elle les promotions cadre ?

n QUELS SONT LES CRITÈRES ET LES CONDITIONS DES PASSAGESAU STATUT DE CADRE ?

LE POIDS PRÉPONDÉRANT DES CRITÈRES DE « COMPÉTENCE » ETD’IMPLICATIONConformément aux logiques poursuivies par les entreprises,les critères autour de la « compétence » (métier, aptitudeau management) et de l’implication professionnellel’emportent en général sur toute autre considération pourjustifier les passages au statut de cadre en entreprise. Enparticulier, ils s’imposent le plus souvent sur le simplecritère d’ancienneté.

Les promus sont supposés « compétents » dans leurmétier d’origine

Le poids de la « compétence » s’apprécie expressément auniveau des passages cadre qui engendrent a priori lescompétitions ou les sélections les plus acérées entre lespersonnels des professions intermédiaires, c’est-à-dire àl’occasion des promotions susceptibles de les mener auxemplois de cadre à part entière ou bien de signifier poureux une gratification à leur poste.

Il fallait s’en douter : tous les personnels promus cadre, ausein d’une entreprise ou par le biais d’une mobilité externe,

ont été habilités ou reconnus comme « compétents »,« expérimentés » ou « performants » dans leur précédentemploi de qualification intermédiaire. Les mobilités versdes fonctions de cadre expert requérant unapprofondissement ou une spécialisation de la technicitéexercée donnent de fait une place prépondérante à lacompétence. Mais les évolutions vers les emplois de cadremanager ne sont pas non plus en reste, et ce quand bienmême elles concernent des personnels non encadrants.L’accès promotionnel à ces emplois est toujours réservé àdes salariés considérés comme de bons, sinon d’excellentsprofessionnels à leur fonction, atteignant une qualité detravail significativement supérieure à la moyenne de leurspairs.

L’appréciation ou l’évaluation de cette compétence puisepour l’essentiel dans les deux grandes dimensionsclassiques du professionnalisme en entreprise : la maîtrise,sinon l’excellence technique, qui se traduit par un niveauélevé de savoir-faire (ou de compétences au pluriel), etl’efficacité professionnelle, qui renvoie à la capacité du

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salarié à atteindre ses objectifs. Partant, la significationprécise donnée à ces deux dimensions et leur pondérationlors des passages cadre dépendent des différentescatégories intermédiaires et des systèmes d’appréciation dupersonnel propres à chaque entreprise. Par exemple, lescommerciaux seront davantage évalués à l’aune de leursrésultats opérationnels (annuels ou mensuels), en termesde chiffre d’affaires ou de taux de marge réalisé, que lesautres catégories intermédiaires, lesquelles seront plusjugées pour leur part au regard de leurs savoir-fairedéveloppés en situation de travail.

L’ancienneté intervient assez peu dans ce jugement oucette habilitation en termes de compétence. Si le tempspassé par un salarié dans un emploi de qualificationintermédiaire ou une entreprise donnée contribueinéluctablement à la construction de sa compétence, il nesera jamais considéré comme un indicateur justifiant à luiseul le passage à une fonction de cadre manager ou expert.

On retrouve ce rôle majeur accordé à l’excellence techniqueet à la performance dans les promotions internes au statutde cadre par gratification. Certes, l’ancienneté semble làavoir un peu plus d’importance. En effet, les personnels« gratifiés » accèdent au statut de cadre alors qu’ils en sontarrivés au stade ultime de leur évolution de carrière dansleur fonction. Ils possèdent les coefficients les plus élevéset ne peuvent plus compter sur une progression en termesd’échelons. Souvent, ils parviennent eux-mêmes au termede leur carrière et voient se profiler l’horizon de la retraite.Cependant, cet impact de l’ancienneté apparaît factice, oudu moins largement secondaire. Les salariés qui deviennentcadres par gratification font l’objet d’une sélection souventâpre. Ils n’accèdent en aucune façon à ce statut de manièreautomatique. Ils doivent au contraire le mériter au regardde leur compétence, de leur expertise ou de leurs résultats,selon les pratiques d’évaluation en vigueur dans leurentreprise.

Les promus sont jugés a priori aptes à exercer leurnouvelle fonctionLe critère de compétence prend aussi les traits d’uneaptitude présumée quand la promotion au statut de cadres’accompagne d’une ascension hiérarchique ou d’unemobilité fonctionnelle. Les bénéficiaires sont en effetcensés avoir le potentiel nécessaire à l’exercice de leurnouvel emploi de cadre, grâce notamment à leur expérienceantérieure.

Prenons le cas des promotions internes aux fonctions decadre manager. Les salariés candidats à ces promotionsdoivent démontrer une prédisposition ou une aptitude aumanagement pour être retenus.

Cette aptitude peut être considérée à partir d’uneexpérience concrète de management pour les personnelsde la maîtrise qui encadrent déjà, et pour qui la promotiondans la filière managériale présente donc une certaine

continuité professionnelle. Ces personnels sont dès lorsjugés selon leur capacité effective à encadrer dessubordonnés, à « diriger et conduire efficacement une équipevers la réussite », à « écouter, soutenir et développer lescollaborateurs » placés sous leur responsabilité, à se faireavec loyauté le «  relais de la direction sur son projetpolitique », à « transmettre et à former »… On pronostiqueensuite leur potentiel quant à l’hypothèse de monter d’uncran dans l’entreprise et de prendre des responsabilitésd’encadrement de niveau supérieur.

Une telle aptitude au management est de fait beaucoup plusdélicate à appréhender pour les personnels qui n’exercentpas régulièrement ou à titre central une activitéd’encadrement de proximité (commerciaux, administratifs,techniciens… ), et pour lesquels la promotion au poste decadre manager correspond donc à un véritable changementde métier. Cette aptitude ne peut être dans ce cas que trèshypothétique. Les entreprises tentent toutefois de la repérerà partir de certaines capacités et qualités révélées,démontrées par les salariés dans le cours du travail, etcensées être au cœur des exigences de l’activitémanagériale, comme par exemple la capacité à « nouer desliens, des alliances, à participer à des projets », l’« aisancerelationnelle », la propension à se montrer « leader » ausein d’une équipe, etc.

Les promus sont censés être fortement impliqués eninterneLes passages au statut de cadre en entreprise via unchangement de fonction ou une gratification concernentégalement des salariés considérés comme fortementimpliqués, et donc enclins à adopter l’attitude que l’on prêteordinairement aux cadres en activité.

Ce critère d’implication gouverne particulièrement lespromotions aux fonctions de cadre manager. Dans ce cas,le salarié « promouvable » est perçu comme un élémenttrès engagé dans son activité. Il se montre avant toutdisponible en termes horaires et obéit ainsi à un attributordinaire du cadre en France. Il fait « plus que son travail »en ne comptant pas ses heures. De même, il est censé avoirdiverses attitudes au travail rappelant l’image classique quel’on se fait du cadre. Selon les différentes entreprisesinvestiguées, il fait preuve de « rigueur », d’« initiative ».Il se révèle en mesure de « coopérer », de « situer son postedans l’environnement de l’entreprise », de « faire preuve deténacité, de réactivité et d’anticipation ». Il recherche « enpermanence des résultats pérennes visant à l’améliorationde la performance de l’entreprise ». Il a le « goût deschallenges » et apprécie le changement. Il n’hésite pas à« prendre du recul », à « se remettre en cause » et à « suivredes formations ».

Surtout, ce salarié est supposé impliqué en faveur de sonentreprise au-delà de son engagement dans sa fonction. Ildoit avoir la réputation de développer un « rapport positif

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à l’entreprise », d’être « attaché » à elle, d’être « loyal enversla direction ». À travers ces exigences, on retrouve lesattentes classiques que les entreprises ont à l’égard de leurscadres, notamment leurs managers. De telles exigencesmontrent aussi que le passage au statut de cadre enentreprise est encore loin de se réduire à une simple questionde compétence ou de potentiel. Il implique également ladimension « attitudinale », et en particulier le rapport à lavie de l’entreprise, à sa direction. Il suppose souvent uncomportement dévoué à l’entreprise, sinon une allégeanceou une « docilité » vis-à-vis d’elle, comme on l’observe parexemple au sein d’entreprises du secteur aéronautique quien ont fait un critère tacite de promotion cadre31.

Les passages cadre par gratification peuvent exiger pareilleimplication professionnelle et organisationnelle. Reprenonsici l’exemple des commerciaux de l’entreprise de commercede gros en produits frais et surgelés. Leur « savoir-faire »(mesuré principalement en termes de chiffre d’affaires etde taux de marge réalisés) est un facteur majeur pour queles plus confirmés d’entre eux aient une chance d’atteindrela position de cadre expert. Mais la dimension du « savoir-être  » joue aussi un rôle primordial. En principe, uncommercial ne peut devenir expert que s’il obtientl’évaluation la plus favorable pendant trois ans sur unensemble de critères qualitatifs présentés comme des« valeurs essentielles », tout en continuant à avoir desrésultats probants. Plus généralement, il doit être perçucomme un salarié exemplaire, faisant preuve d’attachementà l’entreprise, de responsabilité, de motivation et de sérieuxà son égard. La gratification ne se limite donc pas à uneaffaire de savoir-faire reconnu mais implique aussi unesorte de rapport engagé à l’entreprise. On retrouve là,derechef, un élément de la frontière classique établie entrepersonnels cadres et personnels non cadres. Il ne suffit pasd’être « bon » pour devenir cadre ; il faut aussi être loyalet engagé à l’égard de son entreprise. Et cette observationprend d’autant plus d’acuité dans cet exemple que le salariépromu ne change pas de métier en devenant cadre.

La promotion par confirmation ne se limite pas nonplus à une question d’anciennetéLa promotion interne au statut de cadre par voie deconfirmation n’exclut pas non plus la référence aux critèresde compétence et d’implication.

Comme nous l’avons déjà laissé entendre au sein de lapremière partie, l’ancienneté a de fait un rôle plusconséquent dans ce type de passage cadre. Fréquemment,la promotion cadre est explicitement reliée à un certaintemps passé dans le poste. Les salariés exerçant depuis xannées peuvent prétendre à une telle promotion. Grâce à

cette ancienneté, ils sont censés avoir atteint le niveau deperformance ou de technicité requis dans leur métier. Ona souvent là une règle d’ancienneté propre aux systèmesde classification. Les visiteurs médicaux d’un laboratoirepharmaceutique accèdent ainsi au statut de cadre aprèssept ans d’ancienneté dans leur profession. Cette promotionpar l’ancienneté n’implique pas forcément une évolution del’activité, comme par exemple le fait de se spécialiser surune famille particulière de médicaments ou sur un créneaude clientèle spécifique comme les hôpitaux.

Pourtant, l’ancienneté apparaît rarement comme la seuledimension considérée. Souvent, des salariés se voientconfirmés dans leur fonction en passant au statut de cadresans avoir respecté à la lettre le critère énoncé en matièred’ancienneté ou en ayant devancé des pairs détenteursd’une ancienneté un peu plus importante que la leur. Dansces situations, l’ancienneté n’est donc pas le seul critèrequi compte. D’autres critères relevant du «  mérite  »(progression des résultats, appropriation du métier,confirmation de certaines qualités professionnelles oucomportementales, motivation manifestée au travail… )complètent, sinon supplantent le critère d’ancienneté.

D’ailleurs, l’ancienneté donne couramment à voir la capacitéd’employabilité démontrée par le salarié. Dans les fonctionscommerciales en particulier, c’est bien parce que les salariésen phase de professionnalisation se sont montréssuffisamment « talentueux » et « performants » dans leurentreprise qu’ils parviennent à atteindre l’ancienneté apriori requise pour passer parmi le personnel cadre. Lapériode probatoire ou transitoire au cours desquels ilsétaient positionnés statutairement parmi les catégoriesintermédiaires représente une période au cours de laquelleils ont joué leur sort et leur devenir dans l’entreprise.

Dans certains cas, l’ancienneté n’a même aucune prisedirecte sur les décisions en matière de promotions au statutde cadre. Citons le cas exemplaire de l’entreprise derestauration rapide. Pour que les directeurs de restaurantpuissent atteindre la position «  cadre  », pas plusl’ancienneté que les activités elles-mêmes ne se révèlentdéterminantes. Cette promotion par confirmationprofessionnelle dépend exclusivement de l’évaluation desperformances de l’individu, de ses qualités en matière derespect des standards et de la hiérarchie, de sondévouement à l’entreprise. Ainsi, si un minimumd’ancienneté se révèle de fait indispensable à l’obtentiond’une évaluation favorable, le temps passé dans le posteen tant qu’agent de maîtrise n’est pas considéré en soicomme déterminant.

31. Dans certaines de ces entreprises, les plus petites, il a ainsi été constaté que la syndicalisation pouvait nuire clairement à la promotion au statutde cadre.

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La nature des compétences et de l’implicationdéployées justifie les requalifications

Les passages cadre de professions intermédiaires par voiede requalification n’ont pas seulement pour originecontextuelle la mise en place des 35 heures. Si de telspassages cadre s’observent, c’est aussi et surtout parce quedes entreprises en viennent à admettre que le type et leniveau de responsabilités exercées dans le cadre desprofessions concernées justifient pareille décisionpromotionnelle. Autrement dit, ces entreprises se mettentà reconnaître que la nature des compétences et del’implication manifestées par les personnels qui exercentces professions motive un passage au statut de cadre.

Certes, ces responsabilités ne sont pas la plupart du tempsexplicitement définies dans les entreprises, et diffèrentsensiblement d’une entreprise à l’autre. Mais il y a au moinsl’idée partagée que le métier visé doit avoir franchi uncertain cap en termes de compétences et de conditionsd’exercice pour mériter un adossement au statut de cadre.

Ce franchissement est signalé par le biais d’un « changementde pesée ». L’entreprise modifie alors la manière dont elleconsidère et positionne le métier en question dans la grilledes classifications, au regard de critères classants (niveaude responsabilité, degré d’autonomie…) et au vu des autresfonctions. Par exemple, ce genre d’opération se produit à intervalles réguliers au sein de la mutuelle étudiée dans la phase qualitative. Composée de plusieurs professions intermédiaires administratives en quête de

professionnalisation, cette mutuelle aménage des passagescadre pour certaines d’entre elles en reconsidérant leurpesée. Tel a été le cas par exemple de la fonction d’assistantressources humaines. La titulaire de cet emploi a bénéficiéd’une promotion au statut de cadre après que l’on eutreconnu la transformation de ses missions et l’accroissementde ses responsabilités au cours des dernières années.

Les changements de pesée se révèlent plus courants au seindes organisations publiques ou fortement imprégnées parla gestion administrative du personnel. Ces organisationssont engagées dans une profonde transformation de leursmodalités de gestion de l’emploi qui les amène à donnerla priorité à la fonction occupée par les agents plutôt qu’àleur grade (obtenu souvent par le mécanisme d’unconcours). Cette transformation implique des réajustementsclassificatoires, et notamment des passages cadre parrequalification. Par exemple, la caisse primaire d’assurancemaladie a mis en place une politique de promotion trèsactive depuis le milieu des années 2000. Cette politiques’est traduite par la volonté de mettre en lien les emplois,les compétences réellement mises en œuvre par les agentset leur position statutaire. Elle a ainsi permis à plusieursagents de niveau « technicien » de passer au statut de cadrecompte tenu de leur fonction. Ceux-ci se sont précisémentvus reconnaître des responsabilités et des compétencesmanagériales de niveau « cadre ».

L’INTERVENTION DU SUPÉRIEUR HIÉRARCHIQUEL’examen des modalités de promotion interne au statut decadre au sein des monographies fait surgir le rôle essentieljoué par la hiérarchie de proximité. Son interventions’inscrit dans le double contexte de l’individualisation etde la décentralisation de la gestion des ressources humainesen entreprise. Elle s’apparente à un phénomène decooptation. Elle entend par ailleurs être de plus en plusobjectivée, à l’appui des entretiens d’évaluation annuels.

Un phénomène de cooptation

On peut parler d’un phénomène de cooptation, dans le sensoù les supérieurs hiérarchiques directs des personnels, destatut de cadre, participent largement au choix de leursfuturs homologues en termes de statut au sein desentreprises.

Ces acteurs ont un impact souvent déterminant lors despassages cadre sans changement de fonction. Dans lessituations où les promotions cadre par confirmation ne sebasent pas seulement sur l’application mécanique d’unerègle d’ancienneté, ce sont eux qui proposent en interneces promotions en regard des systèmes d’appréciation envigueur. Pareillement, quand il s’agit de passer un salarié

au statut de cadre pour le gratifier et reconnaître son hautniveau d’expertise professionnelle dans sa fonction, sesencadrants directs jouent en général le premier rôle dansce processus. C’est principalement grâce à leur évaluationfavorable que le salarié va se voir reconnu, à titre individuel,comme méritant le statut.

La cooptation exercée par les supérieurs hiérarchiques estencore plus évidente quand le passage cadre coïncide avecun changement de fonction, et notamment une évolutionvers un emploi de manager. Dans ce cas, les supérieurshiérarchiques en viennent à élire ou sélectionner une partieau moins des membres de leur catégorie.

Cette élection des salariés par leur « n+1 » représente unvéritable acte de management. Les supérieurs hiérarchiquesinterviennent en « détectant » ou en « repérant » lessalariés à promouvoir, ceux qui disposent a priori du profilrequis pour évoluer au sein de l’encadrement ou des filièresd’expertise de l’entreprise. Parfois, les supérieurs vontmême jusqu’à susciter des vocations chez les salariés ainsi«  détectés  », mais hésitant à se manifester commecandidats à une évolution promotionnelle. Ils cherchentalors à favoriser chez ces salariés l’émergence de projets

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qui vont en ce sens. Ils les sensibilisent aux fonctions decadre visées, par exemple en les associant à des initiativesqui relèvent de ces fonctions ou en les faisant participerà des réunions impliquant des cadres. Le cas échéant, ilsles préparent à leurs prochaines responsabilités, via desformations spécifiques.

Les supérieurs hiérarchiques directs n’ont pas en généralles pleins pouvoirs décisionnaires. Ils se contentent le plussouvent de « proposer » des salariés à promouvoir, en sejustifiant au regard des critères de promotion en vigueurdans l’entreprise. Les décisions sont prises plutôt par lesn+2 ou n+3. Parfois, elles résultent de pronostics favorablesétablis de manière collégiale par les différents niveaux dela hiérarchie, au sein de « comités de carrière » ou decomités de direction, comme cela se pratique par exempleau sein de la succursale de vente et après-vente automobile.En outre, les encadrants font fréquemment appel auxservices RH, pour bénéficier de leurs conseils et de leurposition-relais vis-à-vis des collaborateurs. C’est notammentle cas quand il s’agit d’inciter un salarié à évoluer vers unemploi de cadre expert. La plupart du temps, les supérieurshiérarchiques connaissent en effet beaucoup moins cesemplois du fait de leur localisation dans d’autres servicesou lieux que le leur.

Toutefois, les n+1 des professions intermédiaires possèdentbien une influence importante sur les promotions auxfonctions de cadre en entreprise. Celles-ci se décident leplus souvent à partir de leurs propositions initiales, censéesse fonder sur une connaissance fine des compétences, destalents et des attitudes des salariés. Une telle action deproposition – indissociable du métier de manager – n’estd’ailleurs pas sans risque pour leur crédibilité interne encas d’échec.

À partir de là, cette influence traduit l’importance de deuxéléments dans la gestion des promotions cadre. D’une part,interviennent les représentations que se font les supérieurshiérarchiques des compétences et des qualités requisespour exercer la fonction cadre dans leur entreprise – enparticulier leur propre métier, lorsque c’est lui qui est enjeu dans la promotion32. D’autre part, il y a aussi la qualitédes relations nouées par les supérieurs hiérarchiques avecles salariés. De cette qualité relationnelle dépend en partiela nature, positive ou négative, des jugements des premiersà l’égard des seconds. Sans conteste, la bonne ententeétablie entre le salarié et son n+1 joue ainsi dans un sensfavorable à la promotion, et inversement.

En définitive, le rôle essentiel des supérieurs hiérarchiquesen matière de promotion interne au statut de cadre sembleaujourd’hui admis au sein des organisations, y compris ausein des entreprises publiques ou des organismes géréstraditionnellement en référence aux principes du secteurpublic. Cependant, force est de constater que cette

contribution n’est pas sans poser problème. Le procédé peutcréer des tensions entre salariés des professionsintermédiaires dans le sens où il les met en concurrencesur le plan des relations nouées avec leur responsablehiérarchique. Plus généralement, il souffre souvent auxyeux des personnels d’un manque de transparence, voired’équité. Signe du double processus d’individualisation etde décentralisation de la GRH au sein des entreprises, il sedoit selon les salariés d’être complété par des dispositifsou des procédures encadrant et objectivant au mieux lapratique.

L’entretien annuel comme outil visant à l’objectivation

L’entretien annuel – appelé ici ou là «  entretiend’évaluation  », «  entretien de progrès  », «  entretiend’évaluation et d’accompagnement  »… – est censéconstituer un outil au service des managers de proximitéet destiné à objectiver l’attribution des promotions, dansun contexte où ces promotions sont de plus individualiséeset décentralisées.

Au sein des entreprises enquêtées, cet entretien estaujourd’hui le plus souvent généralisé à l’ensemble despersonnels. Il n’est plus l’apanage de la gestion des cadres.De fait, il n’a pas pour objet unique la gestion des passagescadre. Il a trait plus généralement à l’évaluation desperformances et des compétences, à la fixation des objectifsassignés à chaque salarié en la matière, à l’appréciationde leurs résultats et de leur progression professionnelle, surune durée d’un an la plupart du temps. Il comporte aussiun volet « formation » (besoins, actions à programmer… ),de même qu’un volet « carrières/mobilités ». Conduit parle supérieur hiérarchique direct du salarié, il complète sonévaluation en situation, en se basant sur des critères etune procédure qui se veulent clairement énoncés et doncconnus de tous.

C’est dans le cadre de la dimension « carrières/mobilités »que la question des promotions internes au statut de cadreest abordée. Les managers utilisent le moment de l’entretienpour évaluer les promotions envisageables. Ils s’en serventaussi pour prendre connaissance des souhaits et des projetsde leurs collaborateurs allant en ce sens, repérer lesréticences éventuelles de ceux qui ont a priori le profil oule potentiel, inciter ces derniers à modifier leurs intentionsà plus ou moins long terme…

En général, les salariés reconnaissent à présent l’utilitéglobale de l’entretien annuel en matière d’évaluation et deprofessionnalisation. Dès lors qu’ils en expérimentent lapratique depuis au moins quelques années, et qu’ils aienteu donc le temps de s’y accoutumer et de mieux comprendreses objectifs, ils ne s’opposent pas à cette pratique. Au

32. Dans une certaine mesure, ils peuvent être tentés de proposer des salariés en qui ils se reconnaissent, et donc de favoriser une sorte de reproductionsociale de la catégorie cadre.

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contraire, ils ont tendance à la considérer comme un momentprivilégié d’échange avec leur supérieur, au cours duquel ilspeuvent lui faire connaître leurs projets et souhaits (parexemple, se porter candidat à un emploi de cadre), discuteravec lui des conditions et des modalités pour les réaliser.

Réceptifs aujourd’hui à l’égard de l’entretien annuel et deson intérêt pour la gestion de leur parcours de carrière, les

salariés relativisent toutefois son caractère supposé« objectif ». Pour eux, l’entretien annuel n’est certainementpas en mesure en lui-même de contrebalancer le poids quepèse la qualité de la relation nouée avec le n+1 dansl’attribution des promotions et la probabilité de passercadre. La prétention de cet outil à l’objectivation s’entrouve ainsi érodée.

LE VOLONTARIAT ET L’INVESTISSEMENT DU SALARIÉ COMMECONDITIONS MAJEURESLes enquêtes effectuées en entreprise donnent aussi à voirdes salariés particulièrement actifs dans la gestion de leurpassage au statut de cadre. Cela concerne à coup sûr lespromotions qui s’effectuent par le truchement d’unemobilité externe, mais aussi celles qui s’opèrent au seindes entreprises. Pour passer cadre, il faut le plus souventen avoir le projet, l’envie ou le souhait. Si cette intentionest logiquement au rendez-vous dans le cas des passagescadre sans changement de fonction, elle n’est pas forcémentpartagée par tous les salariés quant aux autres types depassage cadre. De plus, un certain investissement personnelest le plus souvent requis pour que les salariés puissentfaire prévaloir leur projet, le justifier ou le réaliser. Cetinvestissement passe par un réel « activisme » dans lagestion de leur parcours de carrière, l’adoption d’attitudeset de comportements au travail en phase avec ce que l’onattend habituellement des cadres, ou l’engagement dansdes formations spécifiques.

Indispensable envie d’évoluer vers un emploi decadre

Un critère a toute son importance pour les promotionsinternes aux fonctions de cadre : le souhait ou la motivationdu salarié. Le plus souvent, le principe du volontariat régiten effet l’organisation de ces promotions. Pas question decontraindre un salarié à évoluer vers une fonction de cadre.Il faut au contraire qu’il en ait l’envie ou le désir.

Ce critère de motivation est d’autant plus essentiel que lessalariés des catégories intermédiaires ne souhaitent pastoujours connaître pareille progression au sein de leurentreprise. En particulier, ils sont loin de se presser tousau portillon des emplois de cadre manager des entreprises.C’est d’ailleurs l’un des résultats originaux produits parl’enquête EPIE que de constater cette difficulté à attirernombre de personnels vers ces emplois. D’aucuns enviennent même à parler d’une «  crise de la vocationmanagériale ».

Plusieurs raisons expliquent cette désaffection relative vis-à-vis des fonctions de cadre et plus spécifiquement cettecrise vocationnelle. Tout d’abord, la promotion à une tellefonction n’attire pas toujours car elle ne se caractérise pas

à tous les coups et de façon immédiate par un gain salarial.L’agent de maîtrise ou le technicien posté perd par exempleses primes de nuit quand il est promu cadre en horaires dejour. De même, en devenant chef des ventes, le commercialperformant risque de gagner moins que lorsqu’il tirait unelarge partie de sa rémunération de ses résultats. Sauf à êtreattiré par le travail managérial ou à viser une meilleurequalité de vie, via des horaires plus conventionnels ou unerémunération plus fixe et régulière, ils sont donc tous deuxsusceptibles de ne pas souhaiter s’orienter vers une fonctionde cadre.

Ensuite, le passage dans une telle fonction n’agrée pas àtous les salariés quand il suppose une mobilitégéographique. Nombre d’entre eux sont très attachés àleur lieu de résidence pour différents motifs (implantationfamiliale, activité du conjoint, réseaux amicaux, identitérégionale… ). Ils n’entendent donc pas être mobiles sur leplan géographique, quand bien même cette mobilitéconditionne leur progression. On observe cela chez le constructeur automobile enquêté, lequel considère la «  motivation du collaborateur pour la mobilitégéographique » comme un critère formel de promotion austatut de cadre. Apparemment, beaucoup de salariés de cegroupe renoncent à une telle évolution en raison de cecritère. Cette même attitude est souvent constatée à proposdes passages cadre qui consistent à évoluer vers des emploisde nature transversale. Ce type d’emploi étant plutôtlocalisé au sein des sièges ou d’unités de regroupementterritorialisé (ex : une direction régionale d’entreprise), tousles personnels a priori intéressés sont loin d’accepter lamobilité géographique associée à pareille évolution.« Après, il faut être mobile. C’est la problématique. Il y ades fonctions qui sont concentrées chez nous à Lyon, àParis. Toute la partie marketing est à Paris. Tout ce qui estopérationnel est en région. Il y a aussi tout ce qui estachats. Ça va donc dépendre de la mobilité de la personne »(directeur commercial d’une entreprise de commerce enmatériel électrique).

Enfin, de nombreux salariés rejettent l’hypothèse d’unepromotion interne à une fonction cadre pour diversesraisons ayant trait au contenu et aux exigences d’une tellefonction. Certains ne veulent pas renoncer à leur métier, à

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sa technicité ou à ses conditions d’exercice. D’autresappréhendent la complexité et les responsabilités liées auxfonctions de cadre. D’autres encore ne sont pas du toutattirés par ces fonctions. En ce qui concerne les emploisde cadre encadrant, ils redoutent notamment leur dimensionmanagériale ou bien au contraire leur implication croissantedans le domaine «  gestionnaire  » ou administratif(reporting, suivi des performances… ) au détriment del’encadrement de proximité. La plupart des salariésrécalcitrants quant à la perspective d’un passage à unefonction de cadre anticipent également le risqued’importantes nuisances pour la qualité de leur vie extra-professionnelle.

Par exemple, les salariés interrogés au sein d’un GIE dusecteur du logement sont souvent sur cette longueurd’onde. Occupant des emplois intermédiaires de « chargéde clientèle », de « contremaître » ou de « responsabletechnique », ils ne souhaitent pas sacrifier la qualité deleur vie hors-travail en épousant une fonction de cadre. Parailleurs, ils rechignent à s’éloigner de leur travail actuel,lequel leur permet de disposer d’une importante autonomieau quotidien et de nouer d’excellentes relations d’équipeet auprès des locataires. Plusieurs salariés craignent ausside ne pas être à la hauteur en tant que cadres : « Dans lafonction cadre, il y a un certain niveau de réflexion,d’analyse… On demande au cadre de prendre du recul surson activité, d’être force de proposition. Le cadre doit fairedes propositions au niveau organisationnel ou systémique.Ce n’est pas au même niveau ».

L’affichage de nouveaux comportements au travail

Pour les salariés, la promotion interne aux fonctions decadre ne se réduit guère à une question de volontariat oud’envie. Afin d’avoir une chance d’être concernés, lessalariés adoptent très souvent un comportement actif. Ilstentent en particulier de favoriser et de préparer leurpromotion en affichant de nouvelles manières d’agir etd’être au travail, a priori conformes à ce qu’il est attendudu personnel cadre dans leur entreprise (du moins au vude ce qu’ils en comprennent). Le but est de se faireremarquer à leur avantage par la hiérarchie de proximitéet de se distinguer favorablement par rapport aux collègues,concurrents potentiels. Il s’agit de « sortir du lot et demontrer que l’on est performant » (technicien de l’industrieaéronautique).

Cette stratégie de distinction passe par l’adoption d’unpositionnement de profil de cadre avant l’heure. Les salariésconcernés n’hésitent pas à prendre en charge de nouvellesresponsabilités ou à afficher un comportement typique decadre. Ils font ainsi preuve d’une disponibilité accentuéeen termes d’horaires. Pour eux, il s’agit là d’une condition

minimale pour gagner la confiance de la hiérarchie et« franchir le palier supérieur ».

Ces salariés font aussi volontiers montre d’un rapport positifet engagé à leur entreprise, en donnant à voir uneintégration à ses logiques et contraintes de fonctionnement(en termes de qualité, de délais, de productivité, deconcurrence… ). Certains s’investissent dans des projetstransversaux ou des missions spécifiques, plus ou moinsponctuelles ou durables (à l’étranger, dans d’autres servicesou dans d’autres établissements… ) et s’ajoutant à leuractivité quotidienne. Tel est le cas par exemple destechniciens de conception d’un centre techniqueautomobile, désireux de progresser dans l’échellehiérarchique grâce à ce type d’investissement.

Bref, les salariés s’efforcent ici d’affirmer et de mettre enscène une sorte de continuité entre leur postureprofessionnelle de « pré-cadre » et la fonction de cadrequ’ils visent en guise de projet d’évolution. Cette formed’investissement préparatoire est d’ailleurs souventappréciée par les entreprises car elle signe l’existence d’uneambition en termes de carrière, laquelle est perçue commeun attribut classique de la « cadre attitude »33.

Se montrer actif pour accéder effectivement austatut de cadre

Le passage au statut de cadre en tant que tel exigeégalement des salariés une activité de revendication et denégociation à part entière. On le voit à propos despromotions internes, dans le sens où elles demandentparfois une intervention des salariés pour être effectives.Même si les supérieurs hiérarchiques directs jouent un rôlecrucial, les salariés doivent souvent se montrer actifs etentreprenants pour assurer leur nomination en qualité decadre. De ce point de vue, ils gèrent donc en partie eux-mêmes leur carrière, en interaction avec leur organisation.

S’agissant des promotions menant à des emplois de cadre,il est demandé en général aux salariés de savoir tout à lafois repérer, saisir les opportunités qui se présentent eninterne, se positionner de manière claire et affirmativequand une occasion surgit, négocier avec la hiérarchiepour être sélectionné. Parfois, l’enjeu peut être aussi defaire reconnaître ou valoriser un diplôme de niveau Bac +5acquis par la voie de la formation ou de la VAE.

Le propos suivant, qui évoque la promotion d’un superviseurlogistique à un poste de responsable entrepôt (de statutde cadre) au sein de l’entreprise de commerce de gros enproduits frais et surgelés, témoigne de cette action dusalarié : « Il s’est investi lui-même dans son rôle de chefd’équipe. Il a su analyser les opportunités qu’il pouvaitdécrypter à plus ou moins long terme, les postes existants,

33. Force est pourtant de reconnaître que pareille stratégie de distinction peut aussi contribuer à aiguiser la concurrence avec les autres salariés et àcréer ainsi des tensions nuisibles à la cohésion et au fonctionnement collectif.

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les opportunités qui pourraient s’offrir à lui. Il a su saisirsa chance en s’investissant et en se positionnant  »(responsable dépôt, n+2 du superviseur et n+1 duresponsable entrepôt).

Là encore, cette autonomie des salariés dans la gestion deleur passage cadre est recherchée en règle générale par lesentreprises. Ces dernières ne vont pas forcément leurproposer une promotion s’ils se montrent totalement passifsdans la gestion de leur carrière. Elles demandent du resteaux salariés de faire connaître clairement leurs intentionset leurs projets en matière d’évolution promotionnelle, enparticulier lors des entretiens annuels.

Les promotions au statut de cadre sans changer de fonctionau sein de l’entreprise supposent également des salariésloin d’être inactifs. C’est tout à fait clair au sujet despromotions par requalification fonctionnelle. Les salariéssemblent jouer un rôle important pour faire advenir etadmettre une telle requalification. Avec le concoursprobable de leurs organisations syndicales, ils contribuentlargement aux décisions prises en ce sens.

Même les passages cadre par confirmation professionnellepeuvent impliquer une action revendicative de la part dessalariés. Ceux-ci sont notamment conduits à demander leurpromotion cadre quand elle tarde à venir. On peut citerl’exemple d’un technicien d’une des deux SSII étudiées.Celui-ci a dû lui-même faire valoir son droit à passer cadre.Il avait été amené à prendre en charge de nouvellesfonctions techniques à la demande du client où ilintervenait, ainsi que de nouvelles responsabilitésd’encadrement. Il avait vu son salaire s’accroître et dépasser30 000 euros par an, à savoir le seuil prévu pour justifierle positionnement cadre au sein de cette entreprise. Maisil était resté à un niveau de qualification inférieur à cepositionnement. Cela ne pouvait plus durer. Il devait doncse manifester pour être promu. « Ça s’est fait en deuxétapes, ce passage à cadre. J’avais d’abord eu desaugmentations régulières en rapport avec ce que je faisaischez mon client. J’ai été voir ensuite mon commercial etje lui ai dit  : «  J’ai fait mes preuves, je veux uneaugmentation conséquente ». L’entreprise a alors décidéque j’étais un profil qu’elle souhaitait garder, et j’ai eu ceque je voulais »34.

Cette activité des salariés est encore plus nette au sujetdes passages au statut de cadre qui s’effectuent par le biaisd’une mobilité externe. Si des entreprises entendentquelquefois favoriser ou accompagner pareilles trajectoirespromotionnelles, ces dernières restent bien sûr pourl’essentiel l’affaire des salariés. Pour les réaliser, ils doiventen effet se mettre à rechercher un emploi de cadre tout encontinuant à exercer leur activité présente. Ils doiventaller « se faire reconnaître » et « se vendre » auprès de

recruteurs potentiels, avec discrétion si possible, pour nepas éveiller les soupçons de leur employeur. Ils doiventencore savoir saisir les opportunités qui s’offrent à eux,c’est-à-dire démissionner quand ils trouvent un emploicorrespondant à leurs attentes ou lorsqu’une entreprise ouun « chasseur de têtes » se présente à eux pour leur enfaire directement la proposition. Enfin, ils sont amenés ànégocier le montant de leur salaire.

L’engagement éventuel dans une formation

Par ailleurs, les salariés qui ont le projet de devenir cadresont enclins à s’impliquer dans les formations censées lesaider dans cette perspective. Lorsque le passage cadres’apparente à une promotion à une nouvelle fonction, lessalariés sont en général demandeurs de formations pouraccompagner et favoriser au mieux leur prise de fonction.Dans les situations où la formation intervient avant leurnomination, ils tendent à la concevoir de manièrestratégique. Même si elle n’assure de rien le plus souvent(cf. infra), elle reste pour eux un moyen adapté pouratteindre leur objectif de progression professionnelle,susceptible en tout cas d’ajouter une corde à leur arc pourfaire prévaloir leur projet d’évolution, notamment eninterne.

Cette conception stratégique de la formation traduitl’attirance de nombreux salariés pour les formationsdiplômantes. Quand bien même elles sont financées par lesentreprises, ce sont d’ailleurs le plus souvent des salariésqui sont à l’initiative de ces formations. Il faut dire qu’ellesconduisent à des certifications susceptibles de favoriser leurmontée en qualification, en particulier sur le marchéexterne. On peut citer l’exemple de ces nombreuxtechniciens du secteur aéronautique qui s’engagent dansdes formations diplômantes menant au titre d’ingénieur, envue de quitter leur entreprise pour d’autres sociétés etd’accéder ainsi à des postes plus prestigieux ou plus élevésdans la hiérarchie sociale des emplois.

Insistons tout particulièrement ici sur les exigences dedisponibilité  qu’imprime le suivi de ces formationsdiplômantes. Les mêmes techniciens du secteuraéronautique s’impliquent ainsi dans des formations quidurent trois ans, parfois en partenariat avec leur entreprise.Dans le cadre de ces cursus, ils sont amenés à suivre descours le vendredi et le samedi, et à fournir un gros travailpersonnel, tout en exerçant leur métier les autres jours dela semaine.

Les personnels infirmiers et paramédicaux qui souhaitentévoluer vers un poste de cadre de santé, de surcroît àl’extérieur de leur établissement où ils officient, illustrentégalement cet important engagement en matière deformation. En effet, ces personnels doivent suivre une

34. Pour ainsi dire, les salariés luttent pour leur reconnaissance en tant que cadre en interne. Force est pourtant d’admettre que ce n’est pas pour euxune action aisée et de tout repos, à l’image de tout effort visant à obtenir une augmentation salariale ou une promotion. Certains salariés ontainsi le sentiment lassant et peu agréable de devoir « réclamer » ou « se vendre » pour être entendus.

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formation qualifiante de longue durée et ne sont pas assurésde son financement, notamment de la part de leuremployeur. Il faut parfois qu’ils anticipent plusieurs annéesà l’avance et qu’ils fassent ainsi preuve de persévérance etde patience pour bénéficier de cette formation, comme lemontre le témoignage de ce manipulateur enélectroradiologie d’un centre de lutte contre le cancer :« J’ai fait un dossier pour être financé pour l’école descadres parce qu’en fait chez nous, c’est assez long pour lesfinancements. C’est le privé. Donc j’ai fait une demande auFongecif, et mon dossier n’a abouti qu’au bout de cinqans ».

Le candidat à une évolution vers un poste de cadre de santése confronte parfois à une indifférence institutionnelletrès marquée, ce qui l’oblige à s’impliquer encore davantagepour mener à bien son projet. On peut mentionner le casexemplaire de la cadre de santé de l’hôpital enquêté. Sonpassage au statut de cadre s’est opéré à la suite d’unedécision personnelle, non soutenue par son employeur surle plan financier, ni même encouragée par ses supérieurshiérarchiques. Elle a donc dû s’organiser elle-même poursubvenir à ses besoins pendant la durée de ses études, oùelle ne percevait plus de salaire. Si elle avait réussi àmettre un peu d’argent de côté avant d’entrer à l’école descadres, ce fut en travaillant le week-end, dans le privé,

parallèlement à son dernier emploi d’infirmière.L’indifférence institutionnelle à l’égard de son projet l’apoussé en fait à ne compter que sur elle-même. Elle adémissionné de son poste d’infirmière et s’est arrangée deses nouvelles conditions matérielles. Grâce aux privationsauxquelles elle a consenti pendant la formation et le soutiende sa famille, elle est parvenue à subvenir à ses besoinspendant les neuf mois d’école où elle était privée de salaire.

Ajoutons que la VAE est une autre perspective envisageablepour réaliser une montée en certification susceptible d’aiderdes salariés à être promus cadres, notamment par le biaisd’une mobilité externe. L’idée est parfois évoquée (parexemple par les techniciens d’une SSII, avides d’évoluer ausein du secteur, par le biais de mobilités). Il faut dire quela VAE peut être un excellent outil de reconnaissanceindividuelle d’un parcours, mis au service d’une progressionen termes de carrière. Mais force est de constater la faibleutilisation de ce dispositif par les salariés dans lesentreprises enquêtées. Outre la réticence propre auxentreprises (cf. infra), cette situation semble liée au peud’empressement des salariés à s’engager dans une démarchequ’ils continuent à connaître peu et qu’ils anticipent commelourde et difficile à mener, au regard des avantages qu’ilsestiment pouvoir en tirer concrètement.

LE RÔLE RELATIF DES DIPLÔMES ET DE LA FORMATIONDans ce contexte d’individualisation et de décentralisationde la GRH, où l’on fait la part belle aux critères decompétence et d’implication, il est intéressant des’interroger sur la place des diplômes et des formations dansles passages cadres des professions intermédiaires enentreprise. Au vu de l’enquête EPIE, cette place apparaîtsouvent réelle. Aujourd’hui, le niveau et/ou le type decertification influent fréquemment, d’une manière ou d’uneautre, sur les passages au statut de cadre. De plus, lesentreprises sont nombreuses à organiser des formationspour favoriser et accompagner ces évolutionspromotionnelles. Cependant, le diplôme reste loin d’êtresystématiquement un critère décisif. Pour leur part, lesformations mises en place par les entreprises ne préjugentla plupart du temps de rien. Aussi, le rôle des diplômes etde la formation est-il à relativiser et à nuancer.

L’influence souvent avérée du diplôme

Le diplôme – la spécialité visée mais aussi plus généralementle niveau de formation qu’il incarne – semble souvent avoirun impact sur les trajectoires promotionnelles menant austatut de cadre. Plusieurs enquêtes effectuées (par exemplecelles portant sur la caisse primaire d’assurance maladie, surla mutuelle…) soulignent cet impact du diplôme sur lespromotions cadre en entreprise. Dans ces environnements

organisationnels, les salariés diplômés de l’enseignementsupérieur (à partir du Bac +2) ont beaucoup plus de chancesd’être promus en interne à une fonction de cadre que leurscollègues moins diplômés, ou a fortiori qui n’ont pour seulesqualifications leurs compétences acquises sur le tas. Leurniveau de certification paraît donc favoriser grandement leurpromotion.

Le diplôme s’impose d’ailleurs comme un critère depromotion à part entière, ou du moins comme une conditionhautement facilitatrice dans certains cas. Ainsi, l’accès àun poste d’ingénieur dans l’industrie reste en principeconditionné par l’obtention du titre correspondant. Lesorganisations qui ont été marquées par la culture desconcours compte tenu de leur appartenance au secteurpublic ou de leur proximité institutionnelle avec ce dernieront également tendance à maintenir, peu ou prou, le rôlequ’elles attribuent classiquement au diplôme. Par exemple,au sein de l’entreprise publique de transport urbain, il estdemandé aujourd’hui un diplôme universitaire de niveauBac +5 aux agents de maîtrise qui souhaitent passer cadrevia un concours interne.

Dans certaines entreprises, le diplôme occupe une véritableplace dans les pratiques de promotion aux fonctions decadre. Il est alors considéré comme un signal en matièrede potentiel, de prédispositions ou d’implication. Parfois,il va même jusqu’à permettre la création de viviers. Les

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entreprises alimentent tout ou partie de leurs catégoriesintermédiaires avec des jeunes salariés diplômés del’enseignement supérieur. Elles conçoivent dès lors cescatégories comme des tremplins au statut de cadre etsegmentent la gestion des personnels concernés au regardde ce critère du diplôme. La banque investiguée recruteainsi des titulaires de master. Ils occupent dans un premiertemps un poste de conseiller clientèle, mais ont vocationà évoluer assez rapidement vers un poste de directeurd’agence. De ce point de vue, ils sont gérés trèsdifféremment des jeunes titulaires d’un Bac +2, lesquelscommencent comme chargés d’accueil et se stabilisentensuite pour la plupart au poste de conseiller clientèle. Danscet exemple, on peut du reste se demander si la nominationdes jeunes titulaires d’un master à la fonction de directeurd’agence (qui annonce à terme le passage cadre, aprèsconfirmation) correspond toujours à une «  vraie  »promotion.

Dans le cas des professions réglementées, la certificationest clairement une condition indispensable. En témoignent,comme nous l’avons déjà mentionné, les modalités d’accèsà la fonction de cadre de santé pour les infirmières ou lesautres personnels paramédicaux, qui se sont durcies avecla création récente d’un sésame nécessaire, le diplôme decadre de santé. Alors que les surveillantes d’antan étaientpromues à l’ancienneté, ce diplôme est aujourd’hui devenuofficiellement obligatoire depuis la parution du décret dedécembre 2001 concernant le statut du corps de santé dela fonction publique hospitalière. Ce texte visantexpressément le secteur public, les établissements privésne sont pas totalement soumis aux dispositions de cetexte. Toutefois, la montée des exigences en matière desécurité et de qualité, notamment imposées au travers desprocédures de certification incitent les dirigeants decliniques à s’aligner sur les pratiques et les règles du public.

Enfin, au-delà de la simple expérience acquise, le niveauou le type de certification possède certainement uneinfluence significative sur les passages au statut de cadresignifiant une mobilité externe. Ce critère fonctionne sansdoute ici plus que jamais comme mode de signalement d’unecompétence ou d’un potentiel.

Un réel effort de formation de la part desentreprises

Les entreprises consentent de réels efforts en matière deformation pour accompagner les passages au statut decadre. Pour l’essentiel, ces efforts sont destinés à appuyerdes promotions internes, conduisant en particulier à desfonctions de cadre manager.

On assiste notamment à une prise de conscience croissanteà l’égard de l’importance de la formation des managers etde leur professionnalisation. Cette prise de conscience semanifeste surtout dans les contextes de fortes mutationstechnologiques ou organisationnelles, où l’avènement de

nouvelles représentations et pratiques managériales se faitjour. Elle se rencontre aussi tout particulièrement au seindes grandes entreprises, là où l’enjeu est d’inventer,d’appliquer et de maintenir une conduite managérialecohérente à tous les échelons hiérarchiques.

Il faut dire que le besoin de formation et deprofessionnalisation des salariés promus ou« promouvables » n’est pas mince. L’appropriation d’unefonction managériale pour ceux qui n’encadraient pasauparavant représente ainsi un défi extrêmement délicat.Elle suppose que le salarié parvienne à se faire reconnaîtreen tant que cadre manager dans son entreprise et à seconsidérer lui-même comme tel. Même s’il le souhaite,cette légitimation – auprès des personnels à encadrer, dessupérieurs hiérarchiques et des nouveaux pairs – et cetteauto-reconnaissance – encline aux doutes et auxatermoiements personnels – n’adviennent jamaisautomatiquement. Les différents membres du milieu detravail ne sont pas forcément disposés à reconnaîtred’emblée le salarié. Qu’il provienne d’un autre service oude leurs propres rangs, les subordonnés risquent notammentde lui refuser leur légitimité. Le salarié doit pour sa partvivre une reconversion, passer d’un métier reposant sur unetechnicité spécifique à un métier d’encadrement. Quandbien même il désire cette reconversion, il se confronte àun changement qui le conduit à renoncer au moinspartiellement à son identité professionnelle. En outre, entant que nouveau membre de la ligne hiérarchique, il doits’emparer d’un rôle inédit : celui de relais ou de porte-parolede l’entreprise ou de la direction. On devine amplement quece nouveau rôle n’est pas aisé à assumer du jour aulendemain.

Le plus souvent, les entreprises proposent aux salariéspromus des stages, des modules, des sessions, desséminaires, destinés à les aider à s’adapter à leur nouveauposte de travail ou à leur nouvelle position. Par exemple,le département des ressources humaines de l’entreprise detransport urbain organise un dispositif transversal deformation qui s’adresse en général à tous les salariés quiaccèdent à un nouveau statut, et en particulier à ceux quipassent de la maîtrise à la catégorie cadre. Pour cesderniers, le cursus comporte un module obligatoire  :« Acquérir une vision globale de l’entreprise, de ses enjeuxet de sa stratégie », ainsi que des modules optionnels :«  Les responsabilités de l’encadrement au sein del’entreprise », « Le management d’équipe », « Les ressourceshumaines au sein de l’entreprise  », «  L’économied’entreprise ».

La formation mise en œuvre peut aussi prendre la formede pratiques plus intégrées au travail et à son organisation.Le salarié susceptible d’être promu se trouve alors« parrainé » par un futur homologue et mis en situation àses côtés. Il fait donc l’apprentissage de sa nouvellefonction en se confrontant de suite à sa nouvelle activité.Le salarié de catégorie intermédiaire non encadrant peut

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également être affecté à des postes ou sur des missionstransitoires d’encadrement pour l’aider à se frotter aumanagement. Il exerce dès lors une fonction de « second »,d’« adjoint au chef de service », de « directeur-adjoint »… ,susceptible de lui servir non seulement de formationintégrée au travail mais aussi de trépied pour son évolutionà venir vers un poste de cadre manager.

Certaines entreprises tentent d’aller plus loin en matièrede formation en concevant et en mettant en place devéritables parcours de professionnalisation, s’inscrivantdans la durée et s’efforçant de lier formation formelle etformation par la pratique. Ces parcours définissent descibles professionnelles, c’est-à-dire ce que les entreprisesconsidèrent être comme les bons niveaux deprofessionnalité à atteindre pour exercer tel ou tel métier.Ils formalisent aussi les modalités d’accès à ces niveaux etles éventuelles étapes intermédiaires, en termes d’acquisà faire valoir et de formations à suivre. Ils s’organisent sousla forme d’« alternance-maison » et impliquent directementles encadrants des salariés. Les «  parcours métier  »aménagés par la banque exemplifient parfaitement cettelogique de parcours. Leur principe est que les salariésconcernés (des conseillers clientèle particuliers) accèdentaux postes de directeur d’agence, de conseiller clientèleentreprises et de conseiller clientèle patrimoine. Tout enétant déjà en fonction, ils s’engagent dans un parcours deformation qui peut durer jusqu’à un an. Mis en place depuis2008, ces parcours métier sont structurés par modules etniveaux (« initiation », « perfectionnement », « expertise »).Ils sont obligatoires. Les modules, le niveau se négocienten revanche en fonction de l’expérience professionnelle dusalarié.

Les parcours de formation sont parfois diplômants –notamment dans les entreprises qui considèrent lacertification comme un atout pour le passage cadre. Dansce cas, elles mobilisent des dispositifs nationaux ou debranche qui s’imposent à eux, ou alors créent leurs propresdispositifs en lien et en partenariat avec des universités,des établissements ou des organismes qui délivrent desdiplômes de l’enseignement supérieur ou des titreshomologués aux mêmes niveaux. Elles s’engagent aussiplus souvent en co-investissement avec des salariés, lacertification restant davantage demandée par le personnelque la simple formation interne à base de stages.L’entreprise de distribution de courrier a par exemple misen place un parcours diplômant pour des agents appelés àdevenir des cadres managers. Intitulé « Responsable enmanagement d’unité et de projet », ce parcours s’organisesur une durée de 12 à 18 mois. Il comprend l’élaborationd’un mémoire et d’une soutenance devant un jury devalidation externe. Il vise la délivrance d’un titre homologuéau niveau II (Bac +4) et reconnu par le ministère du travail.

La validation des acquis de l’expérience (VAE) est sansdoute un autre dispositif mobilisable par les entreprises,à la place ou en complément de la formation. Force est

néanmoins de constater la faible utilisation de ce dispositifpar les entreprises enquêtées. Cette situation semble liéeà leur réticence à financer ou faciliter des démarches quisont de nature qualifiantes et susceptibles ainsi d’entraînernon seulement des revendications salariales qu’elles nesouhaitent ou ne peuvent pas satisfaire, mais aussi desdémissions.

Un rôle à relativiser

En dépit de tout ce qui vient d’être évoqué, le rôle desdiplômes et des formations dans les passages cadre desprofessions intermédiaires est à relativiser.

Le niveau de certification possède un impact loin d’êtrepartout déterminant. Il n’intervient pas à proprement parlerdans les promotions cadre sans changement de fonction.Au mieux, quand il s’agit de confirmer un salarié dans safonction de cadre, il a déjà agi en amont, au moment durecrutement, mais de fait en tant que condition nonsuffisante. Dans le cas des passages cadre avec changementde fonction, il apparaît le plus souvent secondaire parrapport aux critères qui ont trait à la compétence et àl’implication manifestées en situation. Ainsi, chez leconstructeur automobile, il est prévu qu’un salarié ayantobtenu un diplôme de niveau Bac +5 puisse accéder austatut de cadre prévu par la convention collective de lamétallurgie, mais à la double condition qu’il respecte toutun ensemble d’autres critères autrement plus décisifs(« motivation du collaborateur », « niveaux de performanceet perspectives d’évolution », « compétences managérialeset comportementales », « compétences professionnellescomplémentaires ») et qu’il exerce de façon effective desresponsabilités associées au statut de cadre.

Dans certains cas, le niveau de qualification acquis àl’extérieur de l’entreprise n’intervient absolument pas dansle passage cadre. L’entreprise de restauration rapide illustrece cas de figure. Ses « managers » ne peuvent envisagerune évolution progressive vers la fonction de directeur derestaurant en ne comptant que sur leur « mérite », tel qu’ilest apprécié en interne, sans pouvoir à aucun momentfaire prévaloir leurs titres scolaires ou autres.

Enfin, comme nous l’avons déjà évoqué, si les salariés lesplus diplômés ont globalement plus de chances d’êtrepromus que les autres, c’est lié aussi dans une certainemesure à leurs prétentions et ambitions, plus relevées.

Aussi, le diplôme n’est-il pas le seul élément à prendre encompte dans la promotion cadre des professionsintermédiaires en entreprise. Les différents mécanismespromotionnels à l’œuvre s’appuient le plus souvent sur descombinatoires complexes de critères, faisant la part belleaux compétences, à l’implication professionnelle dessalariés et aux appréciations spécifiques de la hiérarchiede proximité. Par conséquent, on peut en déduire quel’élévation sensible du niveau de formation initiale descadres promus, constatée statistiquement, tend à traduire

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surtout l’évolution générale du profil de l’ensemble dessalariés de la population active plutôt qu’une montéesystématique des exigences de diplôme pour accéder à lacatégorie cadre par la voie promotionnelle de la part desentreprises. On a là aussi une relativisation de la thèsecouramment admise de l’emprise des diplômes sur lestrajectoires sociales des individus. S’ils pèsent sans contestede tout leur poids dans les processus d’insertionprofessionnelle, ils jouent ensuite un rôle qui se doit pourle moins d’être nuancé, notamment dans le fonctionnementet la régulation des marchés internes du travail.

Dans la même veine, les formations mises en place par lesentreprises ne déterminent guère, en règle générale, lespassages cadre. Force est d’ailleurs de noter que laformation n’est pas en principe mobilisée en tant que telledans le cas des promotions sans changement de fonction.Ainsi, elle ne concourt en aucune mesure aux promotionsinternes sous forme de gratification. Il faut dire que dansce cas de figure, les salariés ont au plus quelques activitésadditionnelles (conseils techniques, formation…) à prendreen charge, mais qui ne requièrent pas une adaptation viaune formation. Elles s’apparentent à des extensions de leurmétier et ne s’effectuent d’ailleurs qu’à titre ponctuel.

En outre, quand il y a bel et bien une formation mise enplace, elle intervient la plupart du temps après lanomination du salarié à son poste ou sa position de cadre.Il exerce déjà sa nouvelle fonction quand il part enformation. Aussi, la formation dans ce cas n’a-t-elle qu’unrôle très mineur dans l’opération promotionnelle. Elle vienten support de la professionnalisation de l’individu à sonnouveau poste. Cette pratique fréquente est jugée commodepour éviter de proposer des formations aux salariés qui neseraient pas en définitive promus, ou alors dans des délaisraisonnables. Dans cette façon de procéder, il y a d’autrepart l’idée que la formation a plus d’impact si elle estorganisée après que le salarié se soit confronté à sanouvelle situation professionnelle. Il faut qu’il ait goûté àsa nouvelle activité, à ses difficultés, à ses enjeux, à sespotentialités, pour qu’il profite au mieux de la formation.

Dans les cas (plutôt minoritaires) où la formation a lieuavant la promotion, il y a toujours une présélection quis’opère au préalable. Seuls les salariés jugés a priori par lahiérarchie « méritants » ou bien prédisposés à exercer unemploi de cadre pourront bénéficier de la formation. Cettepratique de présélection se vérifie notamment au niveaudes formations diplômantes de niveau II ou I, organiséesou financées par les entreprises au bénéfice de salariés. Ilest clair que ces entreprises ne les proposent pas à tousles salariés désireux de s’y engager. Il y a inévitablementune sélection effectuée, ne serait-ce que pour des raisonsde coût et de disponibilité. Pour pouvoir s’engager dansces formations, il faut nécessairement obtenir unevalidation de la hiérarchie, qui annonce ou préfigure la

sélectivité propre au passage cadre. À nouveau, seuls lessalariés considérés comme suffisamment « méritants » surle plan professionnel ou ayant « le potentiel » pour devenircadre seront concernés.

Fréquemment, la formation suivie au préalable par le salariéne préjuge de rien quant à son éventuel passage au statutde cadre. Ce passage reste tributaire d’une décisionhiérarchique, prise indépendamment du suivi de laformation, lequel n’offre donc aucune garantiepromotionnelle. Au plus, les conditions de déroulement dela formation influencent cette décision hiérarchique, parexemple en permettant de tester des aptitudes et desmotivations (en particulier pour les activités demanagement). Mais cette décision apparaît le plus souventcomme un processus autonome.

Les parcours diplômants ne représentent même pas unegarantie de promotion en tous lieux. Décrocher un diplômesusceptible d’être reconnu au niveau cadre – tel un diplômede niveau Bac +5 – par l’intermédiaire d’une formationfinancée par une entreprise n’assure ainsi de rien. Parexemple, les techniciens d’un centre technique automobilequi accèdent au titre d’ingénieur par le biais d’une formationdiplômante ne sont pas du tout sûrs de voir leurs effortsreconnus par leur entreprise, en grimpant dans lahiérarchie : « La formation diplômante n’est pas reconnuepar le constructeur, même si l’entreprise rembourse laformation. Il n’y a pas vraiment de reconnaissance. Donc,c’est un plus pour devenir cadre, mais ce n’est pas parce qu’ona un diplôme d’ingénieur qu’on devient forcément ingénieuret qu’on passe forcément cadre ».

Dans les entreprises qui proposent semblables parcoursdiplômants, on observe même que des salariés peuventaccéder à un poste de cadre manager sans passer par cesformations, qui ne fonctionnent donc pas comme des filtresincontournables. Par exemple, si la banque étudiée permetchaque année à deux ou trois salariés de préparer le diplômede branche de l’Institut des Techniques Bancaires en vuede les promouvoir à plus ou moins long terme à un postede directeur d’agence, la possession de ce diplôme debranche reste facultative pour connaître cette forme deprogression professionnelle en interne.

LES ENQUÊTES EN ENTREPRISE

74 ©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires

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Le bilan statistique a montré que, dans l’ensemble, lesmodes d’accès à la catégorie cadre dans les entreprisesn’ont pas subi de transformations radicales au cours dela période considérée et que les parts respectives dedébutants et de promus demeurent identiques. Ladisparition annoncée de la voie promotionnelle à lacatégorie cadre du fait de la substitution de débutantsdiplômés aux promus n’est pas confirmée par les chiffres.Une observation similaire portant sur la pérennité du«  cadre de promotion  » a conduit à la formulationd’hypothèses explicatives (Bouffartigue, 2005). Dans leprolongement des constats faits sur l’utilité politique dumaintien de la voie promotionnelle dans les entreprises(Boltanski, 1982), ont été évoqués le rôle indispensablede l’expérience professionnelle dans l’acquisition decertaines compétences, notamment pour assurer lafonction d’encadrement ou encore l’intérêt que peut avoirl’entreprise à « entretenir des flux promotionnels, outilsde motivation au travail et de pacification ». Ces élémentsd’explication ne s’appliquent d’ailleurs pas exclusivementaux cadres, ils sont également mentionnés pourinterpréter la vitalité de l’accès promotionnel auxcatégories de techniciens et de maîtrise dans descontextes nationaux différents (Drexel, Méhaut, 1992).Ils font ressortir de toute évidence la nécessité d’enquêterdans les entreprises pour comprendre la nature desarbitrages entrant dans les décisions de recrutement descadres.

Un autre enseignement, tiré de l’analyse des chiffres, atrait à la perte de sens de l’opposition traditionnelleentre débutants et promus dans les entreprises. Si l’accèspromotionnel n’est pas menacé, le cadre autodidacte esten voie de disparition, sauf à lui donner une autredéfinition. Certes, le volume et l’importance relative del’accès promotionnel à la catégorie cadre n’ont pas étéaltérés mais les caractéristiques de cet accès setransforment. Les parcours professionnels, commencésau bas de l’échelle hiérarchique sur un emploi d’employéou d’ouvrier pour atteindre celui de cadre, deviennent plusrares. De même, la part de cadres n’ayant pas de diplômede l’enseignement supérieur perd progressivement enimportance tandis que les titulaires de BTS/DUT accusentla plus forte progression parmi les promus. Davantagequ’un changement des modalités de promotion, cetteévolution reflète la transformation du profil des viviersde futurs cadres dans les entreprises, manifeste lorsqu’ilssont répartis par classe d’âge. De ce point de vue, la miseen perspective du profil des débutants et des promus faitressortir l’hétérogénéité de ces derniers et leur clivageselon la classe d’âge au sein d’une même cohorte. Lesarbitrages faits par les entreprises se révèlent

extrêmement stables, confirmant plusieurs constats faitspar Boltanski en 1982 : sélection des « bons diplômes »pour les recrutements de cadres débutants et attributiondu titre de cadre obéissant à une logique relativementautonome par rapport à la logique purement scolairepour la voie promotionnelle. À la fermeture de l’espacedes recrutements de débutants s’oppose l’ouverture del’espace des promotions.La prise en compte du secteurd’activité révèle la complexité de la mesure de l’accèspromotionnel tout en mettant en évidence son impactsur les modalités d’accès à la catégorie cadre. En effet,selon le point de vue adopté - destinée des non-cadresou provenance des cadres -, les secteurs sont ordonnésdifféremment. L’importance de la part de cadres promusn’est pas nécessairement en phase avec les probabilitésde devenir cadre. Ces probabilités, qui illustrent ladestinée des non-cadres, dépendent fortement de lastructure des emplois de chaque secteur par catégoriesocioprofessionnelle. De manière mécanique, plus laproportion de cadres est élevée, plus sont importantesles probabilités de le devenir. Cet effet mécanique estsurtout visible dans les secteurs hautement qualifiés auxentreprises. De son côté, la part de cadres promus traduitdavantage la répartition des modalités de recrutemententre débutants et promus, très variable selon le secteur.Le commerce, les transports et la construction privilégientl’accès promotionnel tandis que les services hautementqualifiés aux entreprises font davantage appel auxdébutants. Cependant, peu de secteurs présententsimultanément des probabilités élevées de devenir cadreet une part importante de cadres promus. Le secteurfinancier est emblématique de ce cas de figure.

Les pratiques de promotion interne à l’entreprise,l’ancienneté et le niveau de diplôme des cadres au seinde chaque secteur contribuent à la représentationcohérente des pratiques d’alimentation de la catégorie.Ainsi, dans des secteurs dominés par des entreprisespubliques ou proches du secteur public, la part élevée decadres promus coïncide avec l’importance de la promotioninterne et la forte ancienneté dans l’entreprise. De soncôté, la part de cadres diplômés du supérieur est plusélevée dans les secteurs où la part de promus est faible.

Si l’importance relative de l’accès promotionnel à lacatégorie cadre n’a pas été altérée, les caractéristiquesde cet accès se transforment. Les carrières longues, c’est-à-dire les parcours professionnels, commencés au bas del’échelle hiérarchique sur un emploi d’ouvrier oud’employé pour atteindre celui de cadre, deviennent plusrares. L’accès promotionnel à la catégorie cadre estégalement marqué par une élévation sensible du niveau

CONCLUSION GÉNÉRALE

©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires 75

n LES ENSEIGNEMENTS DU BILAN STATISTIQUE

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de formation initiale des promus. Sans disparaître, la partde cadres «  autodidactes  » perd progressivement enimportance et les titulaires de BTS/DUT accusent la plusforte progression parmi les cadres promus. Une telleévolution repose moins sur le changement des pratiquesde promotion que sur la transformation du profil des viviers.C’est ce que met en évidence le clivage des profils depromus selon la classe d’âge au sein d’une même cohorte.Ces disparités contrastent avec l’homogénéité desrecrutements directs de débutants au poste de cadre dansles entreprises.

La prise en compte du secteur d’activité s’avère éclairantesur au moins trois registres. Elle fait d’abord ressortir lacomplexité de la mesure de l’accès promotionnel. En effet,le classement des secteurs diffère selon le point de vueadopté - destinée des non-cadres ou provenance des cadres.De fait, la proportion de promus parmi les cadres n’est pasnécessairement en phase avec les probabilités de devenircadre. Ces probabilités dépendent fortement de la structuredes emplois de chaque secteur par catégoriesocioprofessionnelle. Plus la proportion de cadres estélevée, plus sont importantes les probabilités de le devenir.Cet effet mécanique est surtout visible dans les serviceshautement qualifiés aux entreprises. De son côté, laproportion de promus parmi les cadres traduit davantagela pondération entre recrutements directs de débutants etaccès promotionnels, très variable selon le secteur. Lessecteurs du commerce, des transports et de la constructionprésentent les cas privilégiant l’accès promotionnel sanspour autant offrir des probabilités élevées de devenir cadres.De fait, peu de secteurs associent des probabilités élevéesde devenir cadre et une proportion importante de promusparmi les cadres. Le secteur financier est représentatif dece cas de figure.

En deuxième lieu, l’analyse sectorielle fait ressortir lesdisparités d’accès à la catégorie cadre selon l’activitééconomique. Le secteur apparaît ainsi comme undéterminant de la pérennité des pratiques promotionnelles,celles-ci constituant le mode quasi-exclusif derenouvellement de la catégorie cadre dans certainesactivités. Des formes de cohérence sectorielle se dégagentdans les modalités d’accès à la catégorie cadre, eninteraction avec les pratiques de promotion interne àl’entreprise, l’ancienneté et le niveau de diplôme des cadres.Plusieurs modèles d’alimentation de la catégorie cadre se

distinguent entre deux pôles dont l’un représente l’appelaux diplômés des grandes écoles ou du 3e cycle et l’autrela promotion du cadre autodidacte. Deux configurationssont plus particulièrement examinées. Leur ligne de clivagerepose sur la pondération différente accordée au profil etau parcours du candidat lors de l’accès à la catégorie. Dansle premier cas, qui correspond à l’ensemble des secteursdes services hautement qualifiés aux entreprises, lacompétence technique est déterminante. La part dedébutants dans les recrutements est plus importante quedans les autres activités. La catégorie cadre est relativementhomogène en termes d’âge et de diplôme. L’accèspromotionnel résulte davantage des opportunités offertespar le volume des recrutements de cadre que d’une volontépolitique de fidélisation d’une catégorie de salariés. Dansle deuxième cas, illustré par le secteur financier, le parcoursprofessionnel, qui inclut la formation au métier, demeureun critère central d’accès à la catégorie. Le maintien de lavoie promotionnelle, plus développée et volontariste quedans les autres activités, s’accompagne d’une élévationsensible du niveau de diplôme du vivier et d’une plusgrande ouverture à l’offre de formation externe. Dans lesmétiers noyau de l’activité, les fonctions attribuées auxcadres promus ne se différencient de celles des autrescadres, assurant une certaine homogénéité du groupe.Empruntant aux deux configurations, les pratiquespromotionnelles dans les secteurs industriels s’en éloignepar le maintien d’un plus grand clivage à l’intérieur de lacatégorie cadre, matérialisé par la coupure entre ingénieurdiplômés et techniciens promus. Leurs fonctions respectivesmettent en évidence ce clivage.

En dernier lieu, la comparaison intersectorielle permetd’entrevoir les logiques en développement dans lespratiques promotionnelles. De toute évidence, l’expansiondes activités de services hautement qualifiés aux entreprisesqui occupent près d’un cadre sur quatre, marque l’évolutiondes pratiques. L’accroissement du nombre de cadres et lamontée en puissance de profils techniques, plus expertsqu’encadrants, laissent supposer que l’effet mécanique liéau volume d’alimentation de la catégorie et les besoins decompétences prennent une part plus importante dans lesdécisions de promotion que les considérations d’ordresociopolitique telles que la fidélisation des salariés ou lecontrôle social dans les entreprises.

CONCLUSION GÉNÉRALE

76 ©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires

De leur côté, les enquêtes effectuées dans le cadre duprojet EPIE, et plus spécifiquement le zoom opéré sur lepassage cadre montre toute la diversité, et par extensionla vitalité de l’accès promotionnel à ce statut pour lesprofessions intermédiaires en entreprise. En interne, les

salariés peuvent non seulement être promus cadres enévoluant vers un métier de manager ou d’expert, mais aussiquelquefois sans changer à proprement parler de fonction.Dans ce cas, ils se voient confirmés dans leur fonctionactuelle, ou gratifiés de par leur expertise professionnelle,

n LES ENSEIGNEMENTS DES ENQUÊTES EN ENTREPRISE

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ou encore requalifiés compte tenu de la professionnalisationde leur fonction. Les salariés peuvent également accéderau statut de cadre via une mobilité externe, assortie le caséchéant d’une formation qualifiante. Cette porosité de lacatégorie cadre par rapport aux professions intermédiairessigne leur proximité dans l’échelle sociale et la perméabilitédes frontières qui les séparent, bien que la sélectivitémarquée des promotions aux fonctions de cadre, les actesmême de confirmation et de gratification, et la rareté desopérations de requalifications contribuent à maintenir enmême temps l’existence de telles frontières.

Ces enquêtes en entreprise permettent surtout decomprendre pour quelles raisons s’opèrent toujours despromotions au statut de cadre pour les professionsintermédiaires. Elles donnent à voir les logiques desentreprises et des salariés, qui continuent à donner sensà ces promotions et traduisent par conséquent leurperpétuation.

Pour les entreprises, la promotion cadre demeurefréquemment un outil utile à diverses actions ayant traità la gestion du travail et au management des ressourceshumaines. Allocation de postes disponibles, satisfactiond’exigences en matière de compétences, souci de disposerde personnels cadres dévoués, politique de reconnaissance,action sur la motivation et la fidélisation des personnels :telles sont les logiques, non exclusives l’une de l’autre, quianiment les entreprises dans leurs pratiquespromotionnelles.

Pour les salariés, la promotion cadre reste souvent unprojet tout à fait attractif, même si beaucoup de salariésrechignent aujourd’hui à évoluer vers des emplois de cadre,en particulier de nature managériale. Ce projet peut dèslors s’inscrire aussi bien dans une optique de développementprofessionnel que dans une perspective d’évolution decarrière. Nombreux sont les salariés des professionsintermédiaires qui aspirent à une reconnaissance de leurimplication ou de leur parcours antérieur, via l’obtentiondu statut de cadre, sous une forme ou une autre. En général,ils demeurent également sensibles aux différents gains queprocure l’accès à ce statut (avantages intrinsèques,augmentation salariale éventuelle, ouvertures en termes decarrière). Certains entendent par ailleurs accéder à denouvelles responsabilités professionnelles, plus complexesou plus riches en termes de pouvoir d’agir.

L’examen des modalités des promotions cadre pour lesprofessions intermédiaires confirme d’autre part le poidsprépondérant des critères de compétence et d’implication.Pour l’accès aux fonctions de cadre, les salariés retenus sonttoujours considérés comme faisant partie des personnelsles plus compétents dans leur métier d’origine, mais aussicomme étant aptes à prendre en charge leur nouvellefonction. En ce qui concerne les promotions internes, lesbénéficiaires sont également censés être fortementimpliqués, dans leur activité comme en faveur de leur

entreprise. Intervenant pour ainsi dire en différé, lespromotions cadre par confirmation ne se résument pas nonplus, la plupart du temps, à une simple questiond’ancienneté. De même, les processus de requalification sejustifient en général au regard des compétences et de lanature de l’implication exigées dans le cadre des fonctionsconcernées.

L’analyse des différents mécanismes promotionnels àl’œuvre invite aussi à insister sur le rôle majeur tenu parles supérieurs hiérarchiques et les salariés eux-mêmes. Surfond d’individualisation et de décentralisation de la GRHaccrues, les premiers interviennent au niveau despromotions internes, de plus en plus à l’appui de la pratiquesupposée objective des entretiens d’évaluation. L’impact deleur intervention est tel qu’on est en droit de parler d’unphénomène de cooptation. Il vaut mieux bien s’entendreavec son supérieur hiérarchique direct pour avoir unechance d’être promu à une fonction ou une position decadre. Les salariés qui souhaitent accéder au statutcorrespondant sont d’ailleurs très loin d’être passifs. Ilsn’hésitent pas ainsi à afficher au travail des comportementsen phase avec ce que l’on attend a priori des cadres, à semontrer entreprenants et revendicatifs pour négocier leurpromotion, à s’engager dans des formations, notammentqualifiantes…

Le rôle du diplôme et de la formation dans les passages austatut de cadre est néanmoins à relativiser. Si le niveau etle type de certification ne sont pas à exclure et constituentparfois des critères déterminants, ils ne peuvent pas pourautant être considérés comme les principaux critèress’imposant partout, et sans nuance. De même, si l’efforten matière de formation est aujourd’hui important au seindes entreprises, notamment pour accompagner les salariéspromus à des fonctions de cadre manager, il ne peut éluderle processus sélectif en lui-même, lequel s’opère en partieindépendamment de cet effort de formation. De fait,l’élévation sensible du niveau de formation initialeconstatée chez les salariés promus dans la catégorie cadresemble traduire avant tout l’évolution générale du profilde formation de la population active plutôt que lagénéralisation d’une politique de gestion des carrières quiprivilégierait systématiquement le diplôme au sein desentreprises. Par ailleurs, même si la ressource « formation »est de plus en plus mobilisée, elle ne peut pas non plusêtre considérée comme le sésame obligé de tous lespassages cadre en entreprise.

CONCLUSION GÉNÉRALE

77©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires

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Plusieurs prolongements seraient maintenant intéressantsà envisager pour avancer dans la compréhension du passagecadre en entreprise.

Concernant les formes prises par le passage cadre pour lesprofessions intermédiaires, les enquêtes réalisées enentreprise ont contribué à en révéler toute l’hétérogénéité.À présent, il serait sans doute utile d’avoir une idée plusprécise du poids que représentent les différentes formesidentifiées, via par exemple l’organisation d’une enquêtepar questionnaire ciblée sur les salariés devenus cadres parle biais d’une promotion. De même, dans la mesure où lespassages cadres qui s’effectuent via la mobilité externe ontété les moins bien appréhendés dans le cadre de l’enquêteEPIE, il serait intéressant de se polariser sur cette formede «  promotion externe  » par le biais de nouvellesinvestigations auprès des individus concernés mais aussi auprès des entreprises qui s’y adonnent. Plutôt que les jeunes titulaires d’un diplôme de niveau Bac +5 qui cherchent à se reclasser après une période provisoire de « déclassement », le regard pourrait être toutparticulièrement porté vers les salariés plus expérimentéset donc vers des trajectoires correspondant avantage à de« vraies promotions ».

S’agissant des logiques qui donnent sens aux promotionsau statut de cadre, une analyse visant à les hiérarchiserserait à présent des plus profitables pour une meilleureconnaissance de ces promotions. En particulier, quellessont les logiques d’entreprises qui pèsent aujourd’hui le plus ? Celles qui renvoient à une préoccupation en matièred’organisation du travail, ou celles qui relèvent d’uneintention en matière de management RH ? À ce niveaud’analyse, il serait encore opportun de prolonger la réflexionsur la concurrence qui existe potentiellement entrepromotion interne, recrutement externe de salariésexpérimentés ou embauche de jeunes débutants, enmettant la focale sur les emplois de cadre de premier niveaude qualification et leurs modes d’alimentation. Notamment,qu’est-ce qui détermine précisément le recours préférentielà l’une de ces voies dans les entreprises, ainsi que lesévolutions/ruptures constatées au fil du temps ? Il serait par ailleurs intéressant de mettre davantage en lien les promotions cadres observables avec les modesd’organisation et de management  des entreprisesconcernées. Au-delà de la taille et du secteurd’appartenance, la variable organisationnelle n’est-elle pasune dimension à considérer également au premier chefpour mieux comprendre l’hétérogénéité des pratiques àl’œuvre ?

Pour ce qui est des salariés, on a pu être frappé par lesréticences rencontrées chez certains salariés à propos dela promotion cadre, et ce alors même que cette perspectived’évolution reste convoitée, d’une manière ou d’une autre,par de nombreux autres salariés. À été notamment évoquéeune « crise de la vocation managériale ». Il apparaît doncaujourd’hui intéressant d’explorer plus en détail ceshypothèses, en se demandant si elles renvoient bien à unphénomène nouveau ou qui se manifeste avec une acuitécroissante, et par la même occasion, de considérer commentles entreprises tentent d’y faire face.

Enfin, relativement aux modalités des passages au statutde cadre en pratique au sein des entreprises, il conviendraitde réinterroger plus finement au moins deux dimensionsqui ressortent des enquêtes conduites sur le terrain. D’unepart, au vu du rôle primordial des supérieurs hiérarchiquesdirects dans ces promotions, il serait sûrement intéressantd’examiner plus en profondeur leurs représentations àl’œuvre. En particulier, dans quelle mesure leur propretrajectoire antérieure influence-t-elle ces représentations ?D’autre part, puisque la formation reste un outil trèsfréquemment mobilisé pour au moins accompagner lespassages cadres, on pourrait utilement s’interroger sur lescontenus précis des actions mises en place ou employéespar les entreprises. Entre autres, quelles sont les imagesdu cadre et de ses activités véhiculées par ces formations ?

CONCLUSION GÉNÉRALE

78 ©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires

n LES PROLONGEMENTS ENVISAGEABLES

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79 ©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires

n

ANNEXES

Table de correspondance des secteurs

Hôtel-restaur. Hôtellerie-Restauration

Rép. auto Réparation automobile

Énergie Énergie

Immobilier Immobilier

Éduc/formation Éducation/Formation

Services opérationnels Services opérationnels

Loisirs, cult., sport Loisirs, culture, sport

Construction Construction

Comm. Détail Commerce de détail

Transports Transports

IAA/Biens conso Industrie agro-alimentaire/Biens de consommation

Biens interméd. Biens intermédiaires

Santé, social, assoc. Santé, social associatif

Comm. Gros Commerce de gros

Biens équipt. Biens d'équipement

Sect. financier Secteur financier

Conseil, R&D Conseil, Informatique, Ingénierie, Recherche et Développement

PTT Postes et télécommunications

Correspondance des codes Niveaux de formation utilisés (Nomenclature nationale des niveaux de formation,fixée en 1969 par la Commission statistique nationale)

Niveau VI Années intermédiaires du premier cycle de l’enseignement secondaire.

Niveau V bisAnnées terminales du premier cycle (troisièmes), années intermédiaires du second cycleprofessionnel court : certificat d'aptitude professionnelle (C.A.P.), brevet d'études professionnelles(B.E.P.)

Niveau V Années terminales du second cycle court (C.A.P./B.E.P.), ou années du diplôme.

Niveau xx Années intermédiaires du second cycle long : secondes et premières générales et technologiques,première année de préparation des baccalauréats et brevets professionnels.

Niveau IV Années terminales des seconds cycles longs. Sortants de l’enseignement supérieur sans diplôme.

Niveau IIIDiplôme sanctionnant les deux premières années d'études supérieures (diplôme universitaire detechnologie (D.U.T.), brevet de technicien supérieur (B.T.S.), diplôme d'études universitairesgénérales (DEUG), écoles de formations sanitaires ou sociales, etc.).

Niveaux I etII

Diplôme de second ou troisième cycle universitaire (licence, maîtrise, diplôme d'études supérieuresspécialisées (D.E.S.S.), diplôme d'études approfondies (D.E.A.), Doctorat) ou diplôme de grandeécole

ANNEXE 1

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ANNEXE 2

80 ©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires

Le matériau de l’enquête EPIE correspond pour l’essentielà des monographies rédigées par l’équipe de chargésd’études et de chercheurs impliquée dans cette enquête.Au nombre de 22, ces monographies portent sur desentreprises de divers secteurs d’activité et plusparticulièrement sur la manière dont elles gèrent un ou

plusieurs métiers renvoyant aux catégories intermédiaires.Le matériau est complété par des notes ou des comptes-rendus réalisés à l’issue d’autres investigations enentreprise n’ayant pas débouché sur la rédaction d’unemonographie.

Monographies réalisées

n PRÉSENTATION DU MATÉRIAU DES ENQUÊTES EN ENTREPRISE

Unités investiguées (avec référence au secteur d’activité)

Petite (moins de 250 salariés) ou Grande entreprise (plus de 250 salariés)

Dénomination des métiers étudiés (avec mention de la catégorieintermédiaire)

Auteurs

GIE spécialisé dans lagestion de logementssociaux

Petite

• Chargé de clientèle (professionadministrative)

• Contremaître (maîtrise)• Responsable technique (maîtrise)

N. Bosse & W. Cav

Société de services en ingénierieinformatique I

Petite • Développeur (technicien) P. Conjard & C. Jouvenot

Société de services en ingénierieinformatique II

Grande• Technicien système (technicien)• Technicien d’exploitation

(technicien)F. Lozier

Hypermarché Grande • Adjoint chef de rayon (maîtrise) C. Guégnard

Concessionnaireautomobile Petite

• Coordinateur technique(technicien)

• Conseiller service réceptionnaire(profession commerciale /technicien)

• Assistante commerciale (professioncommerciale / professionadministrative)

• Vendeur automobile (professioncommerciale)

C. Guégnard

Cabinet d’expertisecomptable Petite • Responsable paie (technicien) A. Moysan-Louazel

Entreprise de transportsen commun Grande • Responsable ligne locale (maîtrise) A. Gillet

Succursale vente etaprès-vente automobile Grande

• Conseiller commercial véhicules(profession commerciale)

• Conseiller pièces de rechangeitinérant (profession commerciale)

• Conseiller commercial service(profession commerciale /technicien)

J-P. Cadet, S. Mahlaoui

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ANNEXE 2

81©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires

Unités investiguées (avec référence au secteur d’activité)

Petite (moins de 250 salariés) ou Grande entreprise (plus de 250 salariés)

Dénomination des métiers étudiés (avec mention de la catégorieintermédiaire)

Auteurs

Usine de constructionautomobile Grande

• Responsable d’unité (maîtrise)• Technicien d’optimisation des postes

(technicien)• Technicien logistique ou

d’approvisionnement (technicien)

T. Colin, B. Grasser, L. Jacquot, E. Oiry

Usine de production de moteurs Grande

• Responsable d’unité (maîtrise)• Technicien d’appui pôle technique

(technicien)

T. Colin, B. Grasser, L. Jacquot, E. Oiry

Regroupement defranchises d’une chaînede fast-food

Grande

• Manager (maîtrise)• Directeur-adjoint de restaurant

(maîtrise)• Directeur de restaurant (maîtrise)

E. Bargues

Banque Grande

• Chargé d’accueil commercial(profession commerciale)

• Conseiller clientèle particuliers(profession commerciale)

E. Brun-Hurtado, C. Guitton

Pôle d’une entreprise decommerce de gros dematériel électrique,électronique etélectroménager

Grande

• Technico-commercial sédentaire(profession commerciale)

• Technico-commercial itinérant(profession commerciale)

J-P. Cadet, S. Mahlaoui

Sept entreprises d’unpôle de compétitivitéspécialisé dans ledomaine aéronautique

Six petites, une grande

• Différentes figures du technicien del’industrie (technicien)

• Différentes figures de l’agent demaîtrise de l’industrie (maîtrise)

M-L. Buisson, M. Gadille

Entreprise du commercede gros de produitssurgelés et frais

Grande

• Délégué commercial (professioncommerciale)

• Télé-commercial (professioncommerciale)

• Superviseur logistique (maîtrise)

J-P. Cadet, S. Mahlaoui

Laboratoirepharmaceutique Grande • Visiteur médical (profession

commerciale) J-P. Cadet

Entreprise du secteur du logement social Grande

• Chargé de secteur (technicien /profession commerciale)

• Responsable d’agence (maîtrise)

T. Colin, B. Grasser, L. Jacquot, E. Oiry

Centre de lutte contre le cancer Grande

• Infirmière (profession de santé)• Technicien de laboratoire

(technicien)• Technicien manipulateur

d’électroradiologie médicale(technicien)

A. Chevance, T. Corbel

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ANNEXE 2

82 ©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires

Unités investiguées (avec référence au secteur d’activité)

Petite (moins de 250 salariés) ou Grande entreprise (plus de 250 salariés)

Dénomination des métiers étudiés (avec mention de la catégorieintermédiaire)

Auteurs

Deux cliniques Grandes • Infirmière (profession de santé) S. Divay

Hôpital Grande • Infirmière (profession de santé) S. Divay

Mutuelle Grande

• Différentes professionsintermédiaires administratives(professions administratives /maîtrise)

N. Bosse, C. Durieux, L.Baraldi

Caisse primaired’assurance maladie Grandes • Animateur d’équipe (maîtrise) T. Colin, B. Grasser,

L. Jacquot, E. Oiry

Entreprisesinvestiguées (avec référence au secteur d’activité)

Petite (moins de 250 salariés) ou Grande entreprise (plus de 250 salariés)

Dénomination des métiers étudiés (avec mention de la catégorieintermédiaire)

Auteurs

Entreprise dedistribution de courrier Grandes

• Encadrant courrier (professionadministrative / maîtrise)

• Organisateur courrier (professionadministrative)

D. Brochier & N. Quintéro

Papeterie Grande• Responsable de groupe (maîtrise)• Technicien de maintenance

(techniciens)G. Podevin

Entité de l’industriechimique

Petite (appartientnéanmoins à un groupe)

• Agent de maîtrise de quart(maîtrise)

• Agent de maîtrise de jour (maîtrise)• Chef d’équipe au conditionnement

(maîtrise)

D. Brochier

Centre de rechercheautomobile Grande • Technicien de conception

(technicien) D. Brochier

Entité du secteur de ladistribution de produitssurgelés auprès departiculiers

Grande • Chef de service clientèle (maîtrise)• Superviseur des ventes (maîtrise) C. Granié

Entreprise de larestauration collective Grande

• Chef gérant (maîtrise)• Chef de production (maîtrise)• Chef de cuisine (maîtrise)

J. Rose

Investigations ayant simplement donné lieu à des notes, comptes-rendus ou exposés

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83©Apec - La promotion au statut de cadre des professions intermédiaires

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84 ©Apec - Les besoins en compétences dans les métiers de la recherche à l’horizon 2020

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* p r i x d ’ u n a p p e l l o c a l

ISBN 978-2-7336-06193

Les recherches en partenariat

Association Pour l’Emploi des Cadres51, boulevard Brune – 75689 Paris Cedex 14

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