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1 La répartition femmes-hommes en politique : sous-représentation, plafond de verre, normes sexuées…et désintérêt ? En septembre 2017, le Parlement Wallon votait à l’unanimité en faveur d’une proposition visant à augmenter le nombre de femmes dans les Collèges communaux de Wallonie : dès les prochaines élections d’octobre 2018, les Collèges qui se formeront dans les communes après le vote devront comporter au moins un tiers de femmes (ou d’hommes, sait-on jamais !) en leur sein. Cette mesure s’ajoute au système de la « tirette », qui oblige non seulement à ce qu’un nombre égal de femmes et d’hommes soit présent sur une même liste électorale, mais aussi à ce qu’ils et elles y figurent en alternance. En janvier dernier, le Parlement bruxellois emboîtait le pas et décidait également que les futurs Collèges communaux de la Région devront compter au moins un tiers d’élu·es de chaque sexe. Décriés pour leur caractère « anti-démocratique », les quotas ne représentent certes pas une solution idéale mais s’avèrent absolument nécessaires si l’on souhaite améliorer la représentativité des femmes en politique – et ne représentent, comme nous le verrons, qu’une première mesure devant être accompagnée d’autres changements de mentalités. En effet, alors que 2018 marque les 70 ans du droit de vote pour les femmes, celles-ci sont toujours sous-représentées actuellement par rapport à leurs collègues masculins qui détiennent majoritairement les rênes du pouvoir aux différents niveaux. La présente publication a pour objectif de présenter les chiffres* de répartition des femmes et des hommes dans le paysage politique de Wallonie et de Bruxelles : on y constate qu’au-delà des différences nettes dans les proportions, le genre de l’élu·e détermine encore souvent les matières dont il ou elle a la charge… Commençons par des schémas simples. Le profil-type d’une commune de Wallonie au niveau politique est composé d’un homme occupant la fonction de bourgmestre, d’une échevine (1,28 en moyenne) pour trois échevins (3,03) et de cinq conseillères communales (5,32) pour neuf conseillers communaux (8,57). Du côté de la Région de Bruxelles-Capitale, le profil-type d’une commune se révèle similaire, avec toutefois un nombre plus élevé de représentant·es et une moyenne légèrement moins défavorable aux femmes : un bourgmestre, trois échevines (3,26) pour cinq échevins (5,0) et douze conseillères communales (11,95) pour 15 conseillers communaux (15,0).

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Larépartitionfemmes-hommesenpolitique:sous-représentation,plafonddeverre,normessexuées…etdésintérêt?

En septembre2017, leParlementWallonvotait à l’unanimitéen faveurd’unepropositionvisantàaugmenter lenombrede femmesdans lesCollègescommunauxdeWallonie :dès lesprochainesélectionsd’octobre2018,lesCollègesquiseformerontdanslescommunesaprèslevotedevrontcomporteraumoinsuntiersdefemmes(oud’hommes,sait-on jamais !)en leursein.Cettemesures’ajouteausystèmede la« tirette»,quiobligenonseulementàcequ’unnombreégaldefemmesetd’hommessoitprésentsurunemêmelisteélectorale,maisaussiàcequ’ilsetellesyfigurentenalternance.

En janvier dernier, le Parlement bruxellois emboîtait le pas et décidait également que lesfutursCollègescommunauxdelaRégiondevrontcompteraumoinsuntiersd’élu·esdechaquesexe.Décriéspourleurcaractère«anti-démocratique», lesquotasnereprésententcertespasune solution idéale mais s’avèrent absolument nécessaires si l’on souhaite améliorer lareprésentativitédesfemmesenpolitique–etnereprésentent,commenousleverrons,qu’unepremièremesuredevantêtreaccompagnéed’autreschangementsdementalités.

Eneffet,alorsque2018marqueles70ansdudroitdevotepourlesfemmes,celles-cisonttoujourssous-représentéesactuellementparrapportàleurscollèguesmasculinsquidétiennentmajoritairement les rênes du pouvoir aux différents niveaux. La présente publication a pourobjectif deprésenter les chiffres*de répartitiondes femmesetdeshommesdans lepaysagepolitiquedeWallonieetdeBruxelles:onyconstatequ’au-delàdesdifférencesnettesdanslesproportions,legenredel’élu·edétermineencoresouventlesmatièresdontilouellealacharge…

Commençonspardesschémassimples.Leprofil-typed’unecommunedeWallonieauniveaupolitiqueestcomposéd’unhommeoccupantlafonctiondebourgmestre,d’uneéchevine(1,28enmoyenne) pour trois échevins (3,03) et de cinq conseillères communales (5,32) pour neufconseillers communaux (8,57).Ducôtéde laRégiondeBruxelles-Capitale, leprofil-typed’unecommune se révèle similaire, avec toutefois un nombre plus élevé de représentant·es et unemoyenne légèrementmoinsdéfavorableaux femmes :unbourgmestre, troiséchevines (3,26)pour cinq échevins (5,0) et douze conseillères communales (11,95) pour 15 conseillerscommunaux(15,0).

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Dans lemilieupolitiquecommedans lasphèreprofessionnelle(lesdeuxse

combinant dans certains cas), les femmes rencontrent davantage d’obstaclesdanslapoursuitedeleurcarrièreetdansl’accessionauxpostesàresponsabilité.Ce phénomène est celui du « plafond de verre », illustrant la décroissanceprogressivedunombredefemmesàmesurequel’onmontedanslahiérarchie.

Les statistiquesconcernant les fonctionsprincipalesoccupéesdans les262communes de Wallonie et les 19 communes de Bruxelles attestent de cedéséquilibre. EnWallonie, seules 15,27% de femmes occupent la fonction debourgmestre,soit40sur262.EnRégionbruxelloise,seules2femmestiennentceposte (à Ixelles et Molenbeek) aux côtés de 17 hommes. La fonction deprésident·eduConseilcommunalsuitàpeuprèslamêmetendance.

Auxniveaux inférieurs, le tauxde femmesestsupérieurmais lesdisparitéssont à nouveau nettement marquées. En Wallonie, on recense 29,70%d’échevines, 38,31%de conseillères communales et 35,88%deprésidentes duCentre Public d’Action Sociale (CPAS). Du côté bruxellois, les écarts sont plusréduits mais sont calculés avec un échantillon bien plus faible : 39,49%d’échevines, 44,34%de conseillères communales et 42,11%deprésidentes duCPAS.

Ànoterqu’auseindesadministrations,desrésultatscontrastéssuivant lesRégions se constatentpour lesdeux fonctionsprincipales :oncomptabiliseeneffet43,13%dedirectricesgénérales(anciennementsecrétairescommunales)enWallonie pour 15,79% à Bruxelles ; et 41,98% de directrices financières(anciennement receveuses communales) et 31,58%. Cependant, la taille del’échantillon pour la Région bruxelloise ne permet pas de concluresignificativement à une réelle différence avec laWallonie. Cela n’enlève rien,toutefois,àlavisiblesous-représentationdesfemmesparrapportsauxhommesdanscesdifférentesfonctions.

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Enparallèleàceplafonddeverretypiquementvertical,unedeuxième

clédelecturedesdisparitésfemmes-hommesenpolitiqueestàchercherdanslarépartitiondescompétenceséchevinalesauseindesCollèges.Lesgenres masculin et féminin sont encore aujourd’hui accolés à desstéréotypes qui encadrent les parcours de vie des personnes et lesenfermentdansdesrôles,dansdesnormessexuéesprédéfinies.Dèsleplus jeuneâge, les enfants apprennentplusoumoins inconsciemmentque les hommes seraient davantage voués à la gestion financière, à laprise de responsabilités pour la chose publique, à s’intéresser à lamécanique ou à l’économie ; les femmes, quant à elles, sont plusfaçonnéesàs’investirdanslasphèredomestique,lamaternité,lagestionduquotidienfamilialouencorelesoinàapporteràautrui.

Cesnormesnesontpasnaturellesmaissocialementconstruites.Lesinfographiesci-contredémontrentque lesresponsabilitéspolitiquesnesontpasrépartiesdefaçonneutremaiss’inscriventpleinementdanscesystèmequirégulenotresociété.Nousavonschoisidenousconcentrersur six domaines de compétence (Finances, Mobilité,Urbanisme/Aménagementduterritoire,Environnement/Développementdurable, Affaires sociales/Action sociale et Petite enfance/Crèches), àsavoir des matières presque systématiquement présentes dansl’ensembledescommunes.Nousyavonsajoutélacompétence«Égalitédeschances»,surlaquellenousreviendronsplusloin.

Il apparaît clairementque l’attributiondes compétencesestgenré.Les Finances, la Mobilité et l’Urbanisme semblent être l’apanage deshommes, qui les détiennent souvent à plus de 80%. Ensuite, lesproportionstendentàs’égaliseretplusencoreàs’inverser,lesfemmesdevenantmajoritairesoupresquepourlaPetiteenfance,l’Actionsocialeet l’Égalitédeschances.Peut-onréellementpenserquecesdifférencessontduesauhasard?

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LacompétenceÉgalitédeschancesnesesituepastoutàfaitsur lemêmepied que les six autres car sa récurrence est en réalité bien plus faible. Elleenglobe généralement l’égalité femmes/hommes mais celle-ci se présenteofficiellement à l’occasion comme une compétence à part entière. En Régionbruxelloise,17communessur19sesontactuellementdotéesd’unecompétence«égalité»,15dénommées«Égalitédeschances»etdeuxplusparticulièrement«Égalitéfemme/homme»(EtterbeeketSchaerbeek).SeuleslescommunesdeGanshorenetWatermael-Boitsfortn’ontpasinscritl’égalitédanslesattributionsdeleurséchevin·es.

Parcontre,enWallonie, lapriseencompteofficielledecettecompétencefaitcruellementdéfaut:onendénombredansseulement61communessur262!Parmi ces dernières, précisons que 37 communes recensent la compétence« Égalité des chances », 22 la compétence « Égalité », une la compétence«Égalitésdeschancesavecviolencesconjugales»(Neupré)etunelacompétence«Égalitéfemmes-hommes»(Huy,auxcôtésd’uneautrecompétence«Égalitédeschances»).Deplus,prèsdelamoitiédecescompétencesnesontpastenuesparun·eéchevine,maisparun·ebourgmestreouun·eprésident·edeCPAS.

Mentionnerl’égalitédeschancesoul’égalitéF/Hdanslesattributionsd’unCollègenesignifiepaspourautantqu’elleestpriseàbraslecorpsauseindelacommune,loindelà.Néanmoins,c’estlepremiersigne–certessuperficielmaispourtant nécessaire – d’un engagement formel d’une commune, engagementqu’ilfautencoreprouverconcrètementtoutaulongdelalégislature.Sanstenircomptedelaqualité(ounon)desactionsmenéesdansces61communes,nouspouvons cependant nous poser la question suivante : est-il normal que 201communes (en Wallonie, et deux à Bruxelles), soit plus des trois quarts, nes’intéressentpasaux thématiquesd’égalitéaupointdenemêmepasen fairementionofficiellement?

Nosparlementssuiventunetendancesimilaire–bienquemoinsmarquée–

àcellesdescommunes,tantauniveaududéséquilibreentrelesfemmesetleshommesquel’accèsauxpostesprincipauxetqu’auxmatièrestravaillées.Toutd’abord, lepourcentagededéputéesdans leshémicyclesestcertesplusélevéquedanslescommunes,maispeineàdépasserles40%.

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Ensuite,nousremarquonsquecestauxneseretrouventpastoutàfaitdistribuésdemanièreplusoumoinséquivalentes.Auniveaudespostesdeprésidence(desparlements,desgroupespolitiques,descommissions/comitésd’avis),cesontleshommesquilestiennentmajoritairement.AlorsqueseulleSénatestprésidéparunefemme,onnotera3femmessur14président·esdecommissionauParlementbruxellois,4sur16auParlementwallon,4 sur 11 au Parlement de laFédération Wallonie-Bruxelles(FWB) et 10 sur 38 au fédéral(Chambre). Seul un étonnantrenversement est à soulignerpour les président·es de groupepolitiqueauParlementdelaFWBpuisque,aucontrairedesquatreautres assemblées, tous lesgroupes(4)sontprésidésparunefemme.

Enfin, arrêtons-nous une

nouvelle fois sur l’impact desnormes sexuées sur lesmatièrestravaillées par les responsablespolitiques, ici du côté desparlementaires. Là encore, il estdifficiledeparlerde coïncidencelorsque l’on s’attarde sur lescompositions des commissionsparlementairesetautrescomitésd’avis, ainsi que sur les thèmesqui y sont traités. Parmi les dizainesde commissions au seindesdifférents parlements, nous avons sélectionné (pourunequestionde lisibilité sur lesgraphiques)unepartied’entreellespourrendrevisiblecetteinfluencedugenresurlesrépartitions.

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Lesdébatssurlesfinances,lesinfrastructuresoulamobilitésemblentmajoritairementdévolusauxhommes;enparticulierlesfinances–afind’être

géréesen«bonpèredefamille»?–,oùl’onnoteraquelacommissionFinancesetBudgetdelaChambreestcomposéede17hommeset…zérofemme.La logique expliquée plus haut se poursuit : le pourcentage de femmes au sein de ces groupes augmente sensiblement (et parfois très fortement)

lorsqu’arriventlesthèmesliésausocial,àl’enfance,l’égalitéF/H,l’éducation…

Il existe toujours des exceptions,

de « bons exemples » de parité ou deprésence de femmes aux plus hautesfonctions. Une commune n’est pasl’autre et il n’aurait pas été opportund’enstigmatiser individuellementetdedistribuer les bons et mauvais points.Dans l’absolu,même si la diversité esthautement recommandable dans tousles cas, un manque de parité dans unCollège communal, par exemple, n’estpas forcément un signe de machismeéhonté. Le problème se situe dans larécurrence : une vue d’ensemble nousmontre que les disparités vontquasimenttoujoursdanslemêmesens!Pourcetteraison,nousvoulonspointerlesinégalitésinhérentesàunsystème–typiquement patriarcal, à savoir celuid’unesociétéorganiséeselondesrèglesimplicites voire explicites de détention

dupouvoirparleshommes–plutôtquedes’attardericisurdessituationsindividuelles.D’unautrecôté,ilnes’agitpasd’unesituationinégalequel’onpeutréparerenunclaquementdedoigts.Celaprendradutempsmaisnousattendons

dèsàprésentdesréactionsdumondepolitique,àsesdifférentsniveaux,faceàcesconstatssansappel.Laparitésurleslistesoulesystèmedequotasnesontquedespremierspasquidoiventêtreconsolidéspard’autresengagementsfondamentauxetdurables.

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Premièrement,ilesttempsdeprendreenconsidérationceschiffres,danslescommunes,lesparlementsetlespartispolitiques,etd’agirenconséquence.Trèssouvent,ilexistebeletbiendesfemmescompétentesdanstouslesdomainesetilfautalorsleurfaireconfiance.Sil’onestimequecen’estpaslecas,ilestalorsnécessairedelesformeretdelesencourageràs’engagerenpolitique,enréfléchissantsérieusementàcequipermetoufreineuntelengagement.Mieuxencore,laprioritéesttoutautantdeformerleshommesetdelessensibiliser,deleurfairejouerunrôleactifdansleregardportésurlesfemmespolitiques.Imposerlamixitédegenren’aguèredesenssiellen’estpaspréparée–àl’AssembléeNationalefrançaise,l’augmentationflagrantedunombredefemmesaétérapidementéclipséparleurinvisibilité,tantlaparoledeshommesreprésentel’écrasantemajorité.Or,sommes-nouspréparé·esàcechangement?Ilnes’agitpasdepromouvoirlesfemmesenpolitiquepourfairelenombreoupourlesformeràagir«commedeshommes»,enperpétuantdesrapportsdedominationinchangés.

Deuxièmement,ilesturgentdeserendrepleinementcomptequelamoitiédelapopulationsubitdesdiscriminationsenmatièredetravail,d’espacespublics,d’émancipation,demobilité…Lesvaguesd’indignationféministesdecesderniersmoisdoiventfairecomprendrequ’ilesttempsderéagiretd’yréfléchir,sanspourautants’arrêterauharcèlementsexuelouàl’inégalitésalariale.D’unepart,ilfautinscrireformellementl’égalitéF/Hetlesdroitsdesfemmescommedesproblèmesdesociététransversauxetprioritaires,etyconsacrerdeséchevinatsetdesministères:ilestessentielquecesthèmesdeviennentincontournableslorsdesfuturescompositionsdeCollègescommunauxenoctobre2018etdeGouvernementsrégionauxetfédéralenmai2019.Iln’estpasnormald’avoirunseulministèredesdroitsdesfemmes(enFWB)etmoinsd’unquartdescommunessepréoccupantofficiellementdesquestionsd’égalité.D’autrepart,ils’agiradeconsulterdirectementlapopulationetlesassociationsafindeconnaîtreleurspositions,leursbesoins,leursdemandes:l’égalitéF/Hpasseaussiparunemeilleureparticipationcitoyenne.

Troisièmement,ilconvientdeliercesdeuxpremierspointsàlathématiqueprimordialedelaconciliationvieprivée/vieprofessionnelle,etpluslargementdel’équilibredestempsdevieauquotidien,grandfreinàl’égalitéentrelesfemmesetleshommesengénéralet,danslecasquinousoccupeici,àlaprésenceaccrueetdurabledefemmesdanslepaysagepolitique.Depuisplusieursannées,notreassociations’emploieactivementàpromouvoirles«politiquestemporelles»,àsavoirlapriseencomptetransversale,dansl’actionpublique,del’articulationdestempsdeviedesindividus.End’autrestermes,ils’agitd’unevéritableprioritéaccordéeàlaconciliationentrevieprivéeetvieprofessionnelle,danstoutesleursdimensions:tempsdetravailrémunéré,tempsdedéplacements,tempsdeviedefamille,tempsdeloisirs,tempsdetâchesdomestiques,tempspoursoi,tempspourl’engagementcitoyenoupolitique….

Cette approche« temporelle», déjà formaliséepardenombreuses villes européennes (viadesdispositifs publicsde type«Bureaudes temps»), se révèlepertinenteetoriginalepourdeuxraisons.D’unepart,letempsconstitueunepréoccupationcommuneàtou·teslescitoyen·nes:nosviessontgénéralementrythméesparlasphèreprofessionnelle,àlaquelleviennents’articulerlesautrestempsdevie.Celareprésenteunéquilibrecomplexe,entretempscontraintsettempschoisis,etpastoujoursaiséàatteindrepourobtenirunequalitédeviejugéesatisfaisante.D’autrepart,l’analyseparlestempsestprofondémentrévélatricedesinégalitésentrelesfemmesetleshommes.Eneffet,alorsquelesfemmessontmassivemententréessurlemarchédutravail(ouplusexactementletravailrémunéré,avecunstatutetunereconnaissanceofficielle),ellescontinuentàassumermajoritairementlestâchesdomestiques,rendantplusdifficileencorepourellesl’articulation,laconciliationdestempsdevie.

Rappelonsparexempleque,statistiquement**,lesfemmesbelgestravaillantàtempspleinpassentenmoyenne4h41supplémentairesparsemaineàs’occuperdestâchesménagèresparrapportauxhommesdanslamêmesituationprofessionnelle.Sansparlerdusoinetdel’éducationdesenfants!Autreexempleaveclesloisirs:enmoyenne,pourlapopulationbelgeàpartirde12ans,lesgarçons/hommesdisposentdeplusde6heuresdeloisirssupplémentaires,parsemaine,quelesfilles/femmes.Ces inégalités« temporelles»nedevraient-ellespas faire l’objetdepolitiquesambitieuses? Lesnormes sexuées, la flexibilité toujoursaccrueetcontraintedestempsdetravailetlescontratsprécairessontdeplusenplusbanalisésetnuisentàl’équilibredelaviepersonnelle,familialeousociale,enparticulierpourlesfemmes.

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Danscecontexte,lespolitiquesd’articulationdestempsfontleparidelaflexibiliténégociéedestempsdetravail(tempschoisis)desfemmesetdeshommesetlamiseenconcordancedestemporalitésproduitespardifférentesinstitutions,c'est-à-direlamiseenplacedeformesderégulationspluscoordonnées,synchronisées,desactivitéséconomiques,sociales,culturelles,etc.Sidesmesures«classiques»deconciliationsurdestempslongs(crédit-temps,congéparental)ontaumoinslemérite d’exister, elles sont insuffisantes voire sous-financées. En effet, les arbitrages, la conciliation entre l'emploi, la vie de famille, sociale et privée, toutparticulièrementàl'arrivéedesenfants,sontdéterminésparlesdifficultésquel'onrencontreàl'échelled'unejournéeoud'unesemaine.Cesontcestempscourtsquiintéressentlesgensauquotidien,surtoutlesfemmesquisubissentencorela«doublejournée».

Àcetégard,lespolitiquestemporelleslocalesmettentsurtoutl'accentsurdesréponsespragmatiquesàdonnerauxdifficultésdesfemmesetdeshommesdanslaviequotidienne,vial'adaptationetlacoordinationdeshorairesdesservicespublics,lafacilitationdesdémarchesadministratives,l'adaptationdeshorairesdesstructuresdelapetiteenfance,l’adaptationdeshorairesderéunionsprofessionnelles(notammentenpolitique),etc.PourSynergieWalloniepourl’égalitéentrelesfemmesetleshommes,lesquestionstemporelles,potentiellementprofitablesàtou·tes,doiventêtreconnectéesauxquestionsdugenre,cesdeuxélémentsétantéminemmenttransversaux.

Ilestabsolumentnécessaired'adopterunepolitiqueglobale,avecuneapprocheintégrée,enremettantaucentredel'actionpubliquelesproblématiquesd'égalitéF/H,d'articulationdestempsetdequalitédeviedescitoyen·nes.Decefait, lacatégoriedutempsdoitimpérativementêtreintroduitedansl’actionpublique,àl’échelledesterritoirescommedesentreprises,desRégionscommedescommunes.

Retrouveznospublications,chiffresetanalysessurlespolitiquestemporellesetl’égalitéF/HsurnotresiteInternet:synergie-wallonie.org.

BaptisteDethierAveclacollaborationd’AurianeCarette

*Lesdonnéesontétérécoltéesentrejuillet2017etfévrier2018surlessitesInternetdescommunes,desparlements,ainsiquedel’UniondesVillesetCommunesde

Wallonie(www.uvcw.be).Depuislors,ilestpossiblequecertainschangementsdanslescompositionsdesCollègesetConseilscommunauxetparlementssoientapparuesetquelesdonnéesn’aientpaspuêtrecomplètementmisesàjour.Cettepotentiellemarged’erreurestcependantinfimeetneremetaucunementenquestionnotreanalyse.Ànoterparailleursqu’unepartiedel’analyseaétéréaliséeenfonctiondesprovincesainsiquedelatailledescommunes:lesrésultatsnenouspermettentpasdeconclureàuneinfluencesignificativedelazonegéographiqueoudenombred’habitant·essurlaplacedesfemmesenpolitique.

**CesstatistiquesproviennentdeladernièreenquêteEmploiduTempsparueen2015:www.time-use.be.Ellesontététraitéesplusendétailsdansplusieursdenospublications.

©Février2018Éditépar:SynergieWalloniepourl’égalitéentrelesfemmesetleshommesasblPrésidente:ReineMarcelisContact:[email protected]