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La Revue d'ArchéoPortail numéro 9

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Revue d'ArchéoPortail numéro 9

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LL''ÉÉDDIITTOO''

>>> Frédérick ANQUETILprésident d'ArchéoPortail

En cette année 2010, nous continuons avec les Expositions univer­selles, dont la prochaine édition se tiendra début mai à Shanghai et cedurant 6 mois. Néanmoins, cette exposition se veut plus moderne quecelles de la fin du XIXème et du début du XXème siècle.

En effet, alors que par le passé cet événement avait pour but demontrer les évolutions technologiques du temps et la puissance des na­tions, il cherche désormais à répondre à une problématique plus globalede manière à réfléchir ensemble à des solutions concrètes.

Ainsi, le thème de Shanghai Expo 2010 se porte sur l'harmonie ur­baine et ce qui en découle au niveau du confort de vie. Problématique ilest vrai majeure en cette période d'effervescence écologique.

C'est toute la fierté chinoise qui se dégage de cette nouvelle Expo­sition. Néanmoins, cette nation avait déjà brillé lors des éditions pré­cédentes à travers des pavillons exotiques aujourd'hui disparus. Disparusphysiquement, mais recréés numériquement grâce au talent de LaurentAntoine "Lemog".

Ce nom n'est plus inconnu pour les lecteurs de La Revued'ArchéoPortail puisque vous avez pu découvrir dans le précédent numé­ro un dossier consacré à sa minutieuse restitution 3d de l'Exposition uni­verselle de Paris 1900.

Le dossier que Lemog a rédigé pour vous va de nouveau vousfaire remonter le temps à la découverte de la Chine ancienne durant lesExpositions universelles des siècles passés.

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>>> L'ÉDITO'

>>> ACTUALITÉS INTERNATIONALES­ Le Salon International du Patrimoine Culturel 2009

>>> DOSSIERla Chine dans les Expositions universelles à Paris (1867 ­ 1900)­ Introduction : L'Exposition universelle de Shanghai 2010­ La Chine à Paris en 1867­ La Chine à Paris en 1878 au Champs­de­Marsdans la Rue des Nations­ La Chine à Paris en 1878 sur les pentes du Trocadéro­ La Chine à Paris en 1889 au Champs­de­Mars allée de Suffren­ La Chine à Paris en 1889 au Champs­de­Mars,Histoire de l'Habitation de Charles Garnier­ La Chine à Paris en 1900 au Trocadéro

>>> L'ANNUAIRE DES ADHÉRENTS

SOMMAIRE

>> 07>> 10

>> 13>> 16>> 18

>> 21>> 23

>>> 29

>>> 01

>>> 03>> 03

>>> 06

Illustration couverture : Laurent Antoine Lemog

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ACTUALITÉ INTERNATIONALE

LE PATRIMOINE DES RELIGIONS ET LESNOUVELLES TECHNOLOGIES

Le salon met à l’honneur des ébénistes,des tailleurs de pierre, des doreurs pour ne ci­ter que quelques uns des artisans qui étaientprésents lors de la manifestation. Pour parfairela réflexion sur ce thème, des conférencesétaient d’ailleurs de la partie en abordant dessujets divers(1) et en mettant notamment l’ac­cent sur les nouvelles technologies qui repré­sentent un atout majeur de valorisation desbiens cultuels. Par exemple, Art Graphique etPatrimoine, pour qui "le virtuel est une mise envaleur du réel", choisit entre autre de valori­ser la cathédrale d’Amiens(2) en proposantplusieurs prestations numériques et interac­tives pour la manifestation "Amiens, la cathéd­rale en couleurs". Tout d’abord, le moulagenumérique associé à des prises de vue quipermet d’obtenir, après assemblage desscans, un fichier 3D, texturé, qui peut dès lorsfaire l’objet d’une exploitation multimédia(3) etconstituer par ailleurs un enregistrement géo­métrique précis de l’objet. Une première resti­tution en 3D des sculptures a pu être effectuéeavec leur texture réelle de pierre, avant d’ap­pliquer des textures rétablissant la polychro­mie du XIIIème siècle.

Quant aux bornes interactives, la con­sultation favorise l’approche ludique et didacti­que d’un contenu varié : images 3D, animation2D, iconographie, textes. Le visiteur peut ap­profondir, s’il le souhaite, les notions de son

choix : de spectateur, il devient alors acteurde sa propre découverte. Mis ainsi en valeur,le patrimoine bâti religieux attire d’autres visi­teurs tout en préservant les biens cultuels.

Du 5 au 8 novembre dernier, le Carrousel du Louvre a ouvert ses portes à la quin­zième édition du Salon International du Patrimoine Culturel, décliné cette année sous lethème du patrimoine des religions. C’est l’occasion d’y découvrir des associations, deséditeurs, des écoles ou encore des entreprises travaillant au service de la préservationpatrimoniale. Au delà d’une culture orale et écrite qui a dépassé les frontières, les reli­gions, sous toutes leurs formes, se posent en héritage commun international par leur pa­trimoine bâti. Au niveau national, le plan de rénovation des cathédrales mis en place parle ministère de la culture entre au cœur de cette problématique.

LE SALON INTERNATIONALDU PATRIMOINE CULTUREL2009

Scan de la statue du Beau Dieu d’Amienset son application muséographique.

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Autre initiative, celle de Pèlerin, un jour­nal qui a créé en 1990 le concours "Un patri­moine pour demain" avec un triple objectif :sensibiliser les français à leur patrimoine deproximité, encourager tous ceux qui œuvrentpour la préservation du patrimoine local, régio­nal, culturel et religieux des villes et villagesfrançais et enfin épauler les associations et lescommunes dans leurs projets de restauration.A une époque où la décentralisation entraînela décharge de l’Etat en matière de conserva­tion et de préservation du patrimoine culturelet une raréfaction des subventions nationales,Pèlerin a, en 19 ans, versé 1 400 000€, aidé àsauver de l’oubli près de 310 œuvres d’art etédifices et récompensé 266 lauréats dans laFrance entière. Cette année, lors de la remisedes prix, la rédaction du journal a décidé dedécerner deux prix spécifiques ; celui du "Pa­trimoine et des nouvelles technologies" au dé­partement du Loiret et celui du "Patrimoine etenvironnement" au département du Gers. Leprix spécial en région Centre a été décernéplus spécifiquement à l’entreprise Showa­round(4) de William Grand. En effet, cetteagence propose des photographies panora­miques et réalise pour ses clients la visite vir­tuelle d’un lieu, à 360°, comme s’ils étaient surplace. Cette technique permet de se promenerlibrement dans une trentaine de villes fran­çaises, grâce une série de prises de vuesréunie en panoramiques qui intègrent aussison, vidéo et fiches interactives.

Ces deux exemples, Art Graphique etpatrimoine et Pèlerin, font partie d’un en­semble d’initiatives multiples prises pour proté­ger au mieux un patrimoine qui, sans aides,pourraient se dégrader et à terme, être détruitfaute d’entretien régulier. Si les édifices lesplus prestigieux ne sont pas les plus concer­nés par cette problématique, les chapelles etmonuments moins importants pourraient enfaire les frais. L’exposition "Les cathédrales enhéritage, un défi pour les métiers du patri­moine" présentée par le Ministère de laCulture et de la Communication jusqu’au moisde décembre au Domaine national du Palais­Royal, est là pour nous le rappeler.

"LES CATHEDRALES EN HERITAGE, UNDEFI POUR LES METIERS DU PATRI­MOINE"

Invitation à découvrir en images uneaventure qui a mobilisé architectes, artisteset artisans à travers les siècles, l’expositionnous démontre qu’aujourd’hui les édificesreligieux, sous toutes leurs formes, tiennentune place essentielle dans notre mémoirecollective.

Entretenues et restaurées par le Minis­tère de la Culture et de la Communication,les 86 cathédrales qui jalonnent le territoirefrançais, ont su traverser le temps grâce ausavoir faire des entrepreneurs du patrimoine.En 2008, l’Etat a investi plus de 30 millionsd’euros, en partenariat avec les collectivitésterritoriales de certaines régions. Doté d’une

"Les cathédrales en héritage".Extrait du tract de présentation de l’exposition.

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pagne savent mettre en perspective les en­jeux multiples du patrimoine. D’une trèsgrande richesse, il rayonne sur un plan inter­national et contribue d’une part à la conserva­tion de ses biens et, d’autre part, à lapérennité de nombreuses entreprises tra­vaillant à la protection du patrimoine culturel,quel qu’il soit.

La prochaine édition du Salon Interna­tional du Patrimoine Culturel se tiendra du 4au 7 novembre 2010 au Carrousel du Louvreà Paris. Le thème portera sur "Le patrimoineméditerranéen".

Pour accéder à ce média :http://www.patrimoineculturel.com/Francais/Accueil/accueil.html

>>> Laurie COPPIN

_____(1) L’association REMPART organisa une conférenceintitulée : "Les chantiers REMPART, des bénévolespour la sauvegarde du patrimoine" et traitait desthèmes suivants : La réhabilitation du couvent deshommes à Tusson en Charente, la restauration de mo­numents funéraires des cimetières Montmartre et duPère Lachaise à Paris, la réalisation de vitraux sur plu­sieurs édifices religieux en Poitou­ Charentes, Bour­gogne ou Lorraine ou encore la restauration depeintures murales de chapelles et d’églises romanesde Bourgogne.(2) Pour plus de détails : La cathédrale d’Amiens encouleurs (in : ) Archéoportail n°4, p.6­7.(3) Manipulation de l’objet 3D par une borne interac­tive, film 3D, …(4) http://www.showaround.fr, galeries.

enveloppe de 100 millions d’euros, le voletculture du Plan de Relance, engagé en dé­cembre 2008 par le Gouvernement, permettrale lancement de 27 opérations de restaurationde monuments historiques, parmi lesquelles47 opérations concerneront 44 cathédralespour un montant de 21 millions d’euros.

Ces "lieux de mémoire" que repré­sentent les cathédrales attirent le regard etmarquent les esprits par leur place toutd’abord dans le paysage urbain et touristique,puis par leur fonction spirituelle qui pendantdes siècles ont abrité la religion chrétienne,pierre angulaire de notre société actuelle àbien des égards. L’exposition permet de voya­ger au cœur du territoire français de Quimperà Bayonne, en passant par Albi, Autun ou en­core Strasbourg. Pas à pas, les cathédralesrévèleront tous leurs secrets de construction àtravers un parcours original. Le visiteur est in­vité sur les toits, au plus près des flèches,charpentes et gargouilles, et contemple un en­vironnement habituellement regardé depuis leparvis. Les photographes se sont attachés àisoler les détails (rosaces, sculptures, vitraux,crêtes) pour rendre visible toute la richessedes cathédrales. Ainsi, savoir admirer et ap­précier ces vaisseaux de pierre c’est aussicomprendre les gestes et les savoirs faire quifaçonnent, entretiennent et sauvent notre pa­trimoine. Les chantiers actuels de restaurations’inscrivent dans une longue et riche traditionde métiers d’art et d’artisanat qui fait de cesprofessionnels du patrimoine les héritiers di­rects des premiers bâtisseurs. Architectes,maçons, tailleurs de pierres, peintres et sculp­teurs restaurateurs, couvreurs, ferronniers,maîtres­verriers, doreurs : un ensemble de 13corps de métiers différents et de nombreusesentreprises de restauration des monumentshistoriques sont engagés dans cette aventuremêlant tradition et innovation technique.

D’une dimension européenne et de dé­veloppement durable, le Salon International duPatrimoine Culturel et l’exposition qui l’accom­

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Le 1er mai prochain, l’Exposition universelleShanghai 2010 ouvrira ses portes aux 70 millions de vi­siteurs attendus durant les six mois que durera cet évè­nement planétaire. D’une superficie de 5,28 km², elleest située sur les deux rives du fleuve Huangpu, au suddu Bund et de l’ancienne concession française. Elle ac­cueillera jusqu’au 31 octobre 2010 192 pays et 50 or­ganisations internationales.

Encore une fois, un thème très actuel a étéchoisi :"Meilleure ville, meilleure vie", thème de la villeharmonieuse que chaque nation participante aura àcoeur d’interpréter et de développer par l’intermédiairede cinq sous­thèmes :­ le métissage des différentes cultures dans la ville ;­ la prospérité de l’économie urbaine ;

­ l’innovation techno­scientifique dans la ville ;­ le remodelage des communautés urbaines ;­ l’interaction entre la ville et la campagne.

Le site même de l’exposition devra être le sym­bole de la "ville harmonieuse" à travers "l’harmonieentre l’homme et la nature", "l’harmonie entre leshommes" et bien sûr, "l’harmonie entre le passé et lefutur".

INTRODUCTIONL'Exposition universellede Shanghai 2010

La Chine et la ville de Shanghai ont mis tousles atouts de leurs côtés pour que cet évènement aitun retentissement mondial aussi important que celuides Jeux Olympiques de Pékin en 2008.

Comme il se doit, la France sera présente àcette manifestation et c’est avec beaucoup de fiertéqu’elle fut le premier pays à avoir répondu favorable­ment à l’invitation de la Chine. Le Pavillon de laFrance a été choisi parmi 47 projets. C’est en mars2008 que fût retenu le projet de l’architecte JacquesFerrier, d’un bâtiment emblématique et innovant, refletdu dynamisme de la France, mais aussi de son art devivre.

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Afin de coller au thème général de l’exposition,il sera la preuve d’un mariage réussi entre le développe­ment durable et la culture.

Pour ce faire, le concepteur a inventé leconcept de Pavillon de la Ville Sensuelle afin de donnerà notre pays une identité d’équilibre créatif et dyna­mique au service d’une France à la fois traditionnelle etmoderne.

Près de 10 millions de visiteurs y sont attendus,à qui on promet une expérience inoubliable.

Pour beaucoup de chinois, c’est un immensehonneur que d’être le pays organisateur d’un tel évè­nement. C’est donc avec encore plus de fierté et debonheur qu’ils sont prêts à recevoir les millions de visi­teurs venus des quatre coins de la planète. L’espacede six mois, les regards du monde entier seront dirigésvers eux.

Une majorité de chinois pensent que c’est lapremière participation de la Chine à une Expositionuniverselle. Bien sûr, il n’en est rien et cette présencefut bien réelle depuis les premières expositions duXIXe, que ce soit de manière officielle ou pas.

C’est la COFRES (Compagnie Française pourl’Exposition de Shanghai) qui est en charge de laconstruction du Pavillon et de son animation.

La Chine, quant à elle, pays hôte, attirera tousles regards grâce à son immense pavillon, la « Cou­ronne Orientale », situé dans la nouvelle zone de Pu­dong, sur la rive orientale de la rivière Huangpu. Tout derouge vêtu, une structure de 45 000 m², il mettra en ve­dette les 31 provinces et régions de la partie continen­tale de la Chine. Sur une hauteur de 63 mètres, 56consoles symboliseront les groupes de 56 minorités eth­niques de la nation chinoise.

A l’issue de l’exposition, les 160 000 m² de lazone du pavillon chinois seront convertis en musée del’histoire et de la culture chinoise.

La Chine etles Expositions universelles

©Jacques Ferrier architectures/image Ferrier Production

© Coll. Laurent Antoine LeMog

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La perche tendue ne pouvait me laisser indiffé­rent. En effet, pourquoi ne pas profiter de l’événementShanghai Expo 2010, du fait que la Chine nous ac­cueille avec tant d’égards, pour, sous la forme d’un pe­tit clin d’oeil historique en guise de remerciement,montrer à notre hôte, de quelle manière la Chine fut re­présentée dans les principales Expositions universellesen France ?

De plus Shanghai avait jadis été surnommée le« Paris de l’Orient », le parallèle était trop beau et jeme décidais à étudier en détail ces participations chi­noises, lors de nos Expositions universelles pari­siennes du XIXe.

La première Exposition universelle en Franceeu lieu en 1855. Elle n’avait pas encore les caracté­ristiques des expositions que nous connaissons bien.On y trouvait un bâtiment principal, le Palais del’Industrie, et quelques bâtiments annexes, une ro­tonde, une galerie des machines et une exposition desBeaux­Arts, mais pas encore de pavillons de nationsétrangères, même si certains produits exotiquesétaient quand même présentés. Je ferais donc l’im­passe sur cette exposition, pour commencer cettenouvelle aventure par l’Exposition de 1867 à Paris,suivie de celles de 1878, 1889 et 1900.

Pour être totalement honnête, seule l’Exposi­tion universelle de 1900 fut une participation officiellede la Chine, ce qui ne veut pas dire que les présencesprécédentes ne soient d’aucun intérêt, ni mêmequ’elles soient la preuve d’un désintéressement de lapart des gouvernants chinois. On parlera uniquementd’opportunités manquées ou de choix tardifs, ce quenous verrons un peu plus en détail dans les pagessuivantes. Toujours est­il que le visage de la Chineétait bien présent à Paris lors de ces Expositions uni­verselles. Il faut préciser qu’en cette fin de XIXe, l’exo­tisme était très à la mode, que les culturesextra­européennes étaient d’un intérêt certain, à touspoints de vue ! J’en veux pour preuve le succès desnombreux magazines de récits de voyages del’époque, contant des extraordinaires aventures àl’autre bout du globe.

Le public était d’ores et déjà conquis et lesadeptes très nombreux, il était impossible que la Chineet sa si riche culture millénaire ne fasse pas bonne fi­gure dans ces évènements universels en France !

Je vous propose de découvrir maintenant, dequelle manière ces quatre incontournables Expositionsuniverselles à Paris avaient présenté la Chine auxfrançais, ainsi que quelques images extraites du Projetde Film restituant ces pavillons en images de synthèse3d.

Miroir exact, caricature ou légendes, le but demon projet n’est pas d’étudier et de juger, mais denous replacer dans la peau du visiteur d’alors, et d’enapprécier les aspects ludiques, culturels et artistiques.

La Chine à Paris© Coll. Laurent Antoine LeMog

© Coll. Laurent Antoine LeMog

© Coll. Laurent Antoine LeMog

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C’est dès juin 1863 que fut proposée l’idéed’une Exposition qui soit plus «universelle» que les pré­cédentes, qu’elle comprenne les oeuvres d’arts, les pro­duits industriels de toutes les contrées, et en général,les manifestations de toutes les branches de l’activitéhumaine. La décision d’une Exposition universelle en1867 fut prise par l’empereur Napoléon III en 1864 quinomma son cousin le prince Napoléon Directeur de laCommission Impériale pour l’Organisation de l’Exposi­tion, et l’ingénieur Frédéric Le Play Commissaire géné­ral. Le site principal retenu fut le Champ­de­Mars et sasurface régulière de 46 hectares.

Autour d’un immense palais, sorte de Coliséemétallique de 490 mètres sur 380, surnommé le PalaisOmnibus, fut créé de toute pièce un incroyable parcpaysager, dans lequel étaient disséminés une centainede petits pavillons nationaux et industriels.

Ce parc était découpé en quatre zones géogra­phiques. L’exposition chinoise se trouvait dans le «Quart Anglais » à droite de l’allée principale menant duquai d’Orsay à l’entrée du Palais, entre l’exposition

Tunisienne et le Palais du Bardo qui lui, avait survécu àl’exposition jusqu’à un incendie en 1991, et le ParcEgyptien *.

Le but avait été de recréer ici, une véritable ha­bitation chinoise dans toute sa réalité saisissante afind’initier l’européen à la vie d’un peuple encore peuconnu. Cette volonté faisait partie du programme del’exposition qui était de réunir et de fondre dans unmême lieu toutes les industries et civilisations.

La Chine à Parisen 1867

* le film de la restitution 3d du Parc Egyptien de l’Exposition universelle de1867 sera présenté à l’exposition aux Archives nationales à Paris, du 31 marsau 28 juin 2010.

© Coll. Laurent Antoine LeMog

© Coll. Laurent Antoine LeMog

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Alors que de nombreuxpays orientaux avaient été très en­thousiastes à cette idée, la Chinese montrait quelque peu frileuse.

Qu’importe, un passionnéde la Chine, artiste, savant ethomme du monde connaissant par­faitement à la fois la langue et lesmoeurs se proposa d’organiser àses frais une exposition chinoise.

L’offre du marquis D’Her­vey de Saint­Denis fut très viteacceptée et les dix­huit mois jus­qu’à l’ouverture de l’exposition nefurent pas de trop pour se procureren Chine tout ce qui constituerait lecontenu du pavillon.

Dans sa tâche, le marquisD’Hervey de Saint­Denis fut assistépar M. De Meritens, responsable del’Administration des Douanes duCéleste­Empire.

Il fut réunit une très complète collection desplus beaux produits de l’industrie chinoise, et mêmedes objets provenant des manufactures impériales quipourtant ne fabriquent que pour l’empereur.

Le contenu était en passe d’être réuni, il fallaitaussi que le contenant soit à la hauteur de leurs ambi­tions.

Le marquis D’Hervey deSaint­Denis allait puiser son inspi­ration dans l’histoire de la Chine,et notamment dans un de ses tra­giques épisodes, le sac du Palaisd’été d’octobre 1860. Dans l’incen­die qui s’ensuivit fut sauvée par leColonel Dupin la collection com­plète des dessins et des plans desdifférentes installations du Palaisd’été. C’est dans cette précieusesource que le marquis D’Herveyde Saint­Denis pu faire le choixd’un kiosque thé, nommé ainsiparce que l’empereur s’y rendaitchaque jour pour prendre le thé.Chaque détail de cet édifice avaitpu renaître grâce au talent del’architecte Alfred Chapon, et don­ner naissance à ce Jardin Chinoisde l’Exposition de 1867.

On entrait dans le parc enpassant sous un portique jaune etrouge au toit recouvert de paillehachée. Deux petites cabanes enbambou et en paille, tapissées en

nattes de Chine servaient de guichet. Le jardin étaitplanté d’arbres et de fleurs rapportées de Chine etétait entretenu par deux vigoureux gaillards de la pro­vince de Tche­Kiang (Zhejiang).

Une allée en pente douce conduisait aupavillon principal de forme rectangulaire couvert depeintures étranges aux couleurs éclatantes. Le toitétait également recouvert de paille hachée, et surmon­té de deux dauphins gigantesques.

Au rez­de­chaussée, dans un kiosque vitréétait installé le bazar tenu par un négociant chinoisinstallé à Paris. Sous le nom de musée chinois étaientréunis les objets les plus rares et les collections lesplus précieuses exposées par les différents collection­neurs.

Au premier étage se trouvaient un café et unrestaurant, sans cloison mais avec des vitrages recou­verts de stores bleus. Le cuisinier paraît­il, n’avait passon pareil pour apprêter le riz !

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Ce pavillon n’avait pas d’escalier intérieur, on ymontait par un escalier en bois jaune et noir, qui desser­vait également le petit kiosque latéral ou se trouvaitinstallé le magasin de thé. Sur le toit, épanouit, en guisede girouette, se trouvait un poisson rouge et vert, orne­ment fort apprécié en Chine.

Le public aimait énormément l’art chinois quiconsiste à mettre en opposition des couleurs hardies ettranchantes, et de les fondre dans un ensemble au finalplein d’harmonie.

Au rez­de­chaussée du kiosque se trouvait ledébit de thé, dont le principal sujet d’étonnement était la

présence de deux jeunes filles chinoises, A­Tchoë et A­Naï... des « chinoises authentiques » comme on pou­vait le lire à l’époque !

Au fond du jardin s’élevait un théâtre, oùchaque soirée étaient données des représentationsthéâtrales exclusivement chinoises.

La décoration était plaisante, notamment le toitformé de tuiles vernies jaunes et vertes surmonté luiaussi de deux gigantesques dauphins. Les spectateursétaient assis dans le jardin, ou sur la plate­forme ducafé.

Le jardin chinois avait été conçu pour attirerl’attention des curieux et était la reproduction vivanted’une très grande civilisation et pourtant si peu connue.

© LeMog 3d

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Pour sa troisième Exposition universelle, laFrance avait vu encore plus grand, du Champ­de­Marsaux pentes du Trocadéro, elle couvrait une superficiede 75 hectares. C’est en 1874 que le Maréchal Mac­Mahon, nommé Président de la République voulut prou­ver à toutes les nations que la république était un gou­vernement de paix et de concorde, et que la France,vaincue dans les combats, avait reconquis par son tra­vail et son industrie la position qu’elle occupait en 1867,objet d’envie et de jalousie pour les autres pays.

La Chine à Parisen 1878 dans la Rue des Nations

Toujours au Champ­de­Mars, le Palais principala cette fois­ci la forme d’un immense rectangle de 660mètres sur 310 ! L’intérieur du Palais était découpé en

différentes galeries et le centre était consacré auxbeaux­arts et au Pavillon de la Ville de Paris.

Galerie et principale artère de ce palais, la Ruedes Nations étaient un alignement de plusieurs di­zaines de façades typiques des pays exposants, elleoccupait tout un côté de l’édifice. C’est ici que noustrouvons une des deux présences chinoises à l’Exposi­tion universelle de 1878 où chacune de ces façadesdissimulait perpendiculairement à la Rue des Nations,la galerie d’exposition des produits du pays concernés.Située entre les façades de l’Espagne et du Japon, lafaçade chinoise représentait l’entrée d’une demeure of­

ficielle ou d’une maison demandarin. Le bâtiment, ungrand rectangle de couleur ar­doise, quadrillé de blanc étaitsurmonté d’un couronnementen bois découpé assez fantai­siste, à double toiture relevéesur ses angles. Deux ouver­tures, fermées par des claire­voies en bois découpé,peintes en bleu clair, figu­

raient les fenêtres. Au grand étonnement de nombreuxvisiteurs, il n’y avait pas de porte aux formes demi­rondes et tourmentées, mais une porte droite et raide

© Coll. Laurent Antoine LeMog

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comme celle de nos maisons occidentales, aveccomme seule différence, sa couleur rouge vif ! Elle étaitparsemée de petits cylindres en saillie et constellée desapèques ou monnaies chinoises percées au centred’un trou carré. Les sapèques étaient dorés, donnant àl’ensemble un aspect tout à fait caractéristique. Au­des­sus de la porte les caractères chinois signifient Empiredu Milieu.

On se félicitait à l’exposition de l’emploi du staff,mélange d’étoupes plâtrées qui permettait l’obtention dedécors et de moulages si variés, et dont les chinoisétaient passés maîtres dans l’art de le fabriquer et del’utiliser, et de voir que son utilisation entre cache­misèreet trompe l’oeil n’était pas le seul apanage d’architectes« biens de chez nous ».

Le commissaire de l’exposition chinoise notaitdans son rapport du 1er novembre 1877 que celle­ci au­ra un éclat tout particulier et que le gouvernement de

Pékin ne reculait devant aucune démarche ni aucunedépense pour occuper les places importantes qui luiavait été concédées. Tous les produits exposés prove­naient de Chine.

Quelques mots sur l’exposant chinois. On ledécrivait comme étant industrieux, patient et intelli­gent. Il ne lui avait pas fallu beaucoup de temps pourcomprendre et assimiler les usages et habitudes del’Exposition.

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Tous les matins, armé de sonplumeau, il donnait les ordres et mettaitla main au travail, le jour, c’était un marc­hand consommé. A son air attentif, au re­gard malicieux de ses yeux, on devinaitqu’il entendait et qu’il comprenait, si cen’est tout, du moins la plus grande partiede la conversation. Il suffisait de vouloiracheter, il répondait tout de suite ; indi­quer seulement l'objet, il le trouvait...;pour tout cela, c'était un français, unmarchand empressé ; mais si on marc­handait..., il ne comprenait plus; même

en parlant chinois comme un professeur du Collège deFrance, il saisissait encore moins et c'était avec uneobstination en quelque sorte gouailleuse qu'il montraitle prix affiché, et quand, de guerre lasse, on achetaitou renonçait, il fermait la vitrine d'un air indifférent etvous saluait d'un bonjour assez formulé.

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La Chine à Parisen 1878 sur les pentes du Trocadéro

Comme nous avons pu le voir précédemment,la Chine était présente en deux lieux de l’Exposition de1878, sous la forme d’une exposition méthodique dansles galeries du Palais du Champ­de­Mars, mais égale­ment dans une seconde zone de l’Exposition, sur lespentes du Trocadéro, tout près du nouveau Palais,construit pour l’occasion.

Quelques mots sur ce Palais, qui a quandmême fait partie du paysage parisien pendant près de59 années, pour faire place pour l’Exposition de 1937au Palais de Chaillot que nous connaissons au­jourd’hui.

Oeuvre de l’architecte Davioud et de l’in­génieur Bourdais, ce Palais du Trocadéro était d’unstyle très éclectique, à la fois d’inspirations mauresqueet néo­byzantine. Les expositions rétrospectives setrouvent dans les ailes du Palais, dans la partiecentrale une immense salle des fêtes et salle deconcert, équipée d’un orgue signé Cavaillé­Cohl, pre­mier orgue de concert installé en France.

Cette partie centrale était encadrée par deuxtours initialement destinées à être les plus hauts bel­védères de Paris, culminant à près de 95 mètres parrapport au niveau de la Seine. Jamais équipés des as­censeurs prévus, elles ne furent d’aucune utilité.

C’est en contrebas de l’aile ouest que noustrouvons le parc chinois, longeant la rue Le Nôtre, à lagauche des pavillons de l’Egypte et de la Perse.

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Quand on gravissait la pente plus raide qui yconduisait, et que l’on était arrivé sur le plateau élevéqui servait d’assise au palais du Céleste­Empire, on setrouvait alors en face d’une porte conduisant à une courextérieure dans laquelle le public pouvait défiler en bonordre. A l’entrée, deux mâts se dressaient, portant à mi­hauteur deux sortes de hunes ou sièges mobiles où au­rait pu se placer une vigie, gardienne fidèle du palais.

Au milieu de la cour, un kiosque charmant àdouble toit superposé, de chacun desquelss’échappaient huit pointes recourbées gracieusementen l’air, comme pour poignarder le ciel. Au fond de la

cour se trouvait fermé par une barrière le salon deréception de l’ambassade chinoise, dont le mobilierétait tout en laque noire incrusté de nacre. Cet ameu­blement au style chinois le plus pur fut offert en cadeauà Mme la Maréchale de Mac­Mahon.

Le pourtour extérieur de ce pavillon était occu­pé par des boutiques formant bazar où d’authentiqueschinois vendaient au public des produits non moins au­thentiques venus en droite ligne de l’Empire du Milieu.Les boîtes sculptées étaient nombreuses, on y trouvaitégalement en vente un journal chinois, le Shun­Pao,au prix de 50 centimes.

...une seule chose semblait manquer à l’avisdes observateurs : quelques jolies chinoises de Pékinou de Canton afin que cette exposition fut complète.

Construit et démonté à Pékin, puis remontépièce par pièce au Trocadéro, ce palais était unspécimen accompli de l’architecture chinoise.

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La Chine à Parisen 1889 au Champs­de­Marsallée de SuffrenPour nous tous, l’Exposition universelle de

1889 à Paris est l’Exposition où fut érigée la Tour Eiffel,ou plutôt la Tour de 300 mètres comme on l’appelait àl’époque, mais aussi celle du centenaire de la Révolu­tion française.

C’est aussi l’Exposition qui étendit sa superficieà l’Esplanade des Invalides, le tout réparti sur 85 hec­

tares. Un concours avait été ouvert à tous et 107 pro­jets avaient été envoyés. Ce nombre était finalementassez restreint car tous les concurrents devaient proje­ter une exposition mettant en valeur la Tour Eiffel. Leverdict de la commission fut rendu le 26 mai 1886.Trois projets furent primés sur dix­sept sélectionnés :1° celui de Dutert ; 2° celui de Sauvestre et Eiffel ; 3°celui de Formigé, qui ont servi au plan définitif.Comme Gustave Eiffel avait assez à faire avec sa tour,on adjoint Monsieur Bouvard, architecte de la ville deParis à MM. Formigé et Dutert.

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La Chine, en 1889 était représentée à deuxemplacements de l’Exposition, mais une seule de cesréalisations faisait office de Pavillon de la section chi­noise.

Déjà, ce pavillon n’avait rien de comparableavec ceux de 1867 ou 1878. Le gouvernement chinoisne pouvait prendre part officiellement à l’Exposition de1889 car tous ses crédits avaient été absorbés par lanécessité de remédier aux misères causées par le dé­

bordement du fleuve Jaune. Il est à noter qu’à cha­cune de ses précédentes participations, la Chine avaitdonné une subvention de 4 à 500 000 francs aux ex­posants. Cette fois­ci, il lui était donc impossible defaire de même face aux désastres occasionnés parune calamité sans exemple depuis un siècle.

Pourtant, désireux de témoigner de sa bonnevolonté à l’égard du gouvernement de la RépubliqueFrançaise, le cabinet chinois avait donné ordre auxsous­intendants des douanes de tous les ports ouvertsau commerce d’encourager les négociants ou indus­triels qui voudraient prendre part à l’Exposition. Il leurétait accordé franchise des droits à l’exportation pourtous les objets destinés à figurer au Champ­de­Mars.

Malgré ces facilités, les maisons chinoises hé­sitaient à cause de la barrière de la langue, del’absence de chambres de commerce et de comitésorganisateurs, ainsi que face aux frais de déplace­ment. Devant tant d’hésitations, le représentant de laChine à Paris ne crut pas devoir s’engager à faire ré­server une place.

C’est au début de l’année 1889 que quelquesriches négociants de Canton, encouragés par le suc­cès et les récompenses obtenues à l’Exposition deBarcelone en 1889 s’adressèrent à la délégation deChine à Paris, pour demander un emplacement, maisil était trop tard. Tout était pris, mais après de nom­breux pourparlers, l’exposition chinoise se vit attribuerun petit terrain de 300 m², situé sur l’avenue de Suf­fren, encaissé entre les galeries industrielles duChamp­de­Mars et le Pavillon de la Grèce.

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Il s’agissait maintenant pour les retardatairesde faire vite. Pour gagner du temps, ils s’adressèrent àun architecte français, qui éleva avec beaucoup de goûtun pavillon en bois, très couleur locale, d’un intérieurassez simple, dont la décoration extérieure fut achevéeau moyen de garnitures en bois sculptés et de couleur,envoyées de Chine.

Ce bâtiment, un peu composite, représentaitassez bien, avec son toit surmonté de trois tours, uneaile d’un monastère bouddhiste. Ce n’était pas l’idéalmais c’était tout ce qu’il était possible de faire jusqu’au5 mai.

La petite section chinoise comprenait quinzeexposants, dont quatre seulement figuraient au cata­logue.

A l’intérieur, c'était, d'abord un pêle­mêled'étoffes, de meubles, d'ivoires, de bambous, de petitsbibelots de toutes matières, de toutes formes et detoutes couleurs; les marchandises n'étant pas expo­sées par classes et groupes, l'oeil incertain ne savaitd'abord où se porter. Cela ressemblait assez à l'art in­cohérent qui jette au hasard tous les tons de sa pa­lette. Mais pour le connaisseur, ce désordre apparentn'était pas une gêne, au contraire. Au plaisir de voir, sejoignait celui de chercher et de découvrir quelquechose de personnel.

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La Chine à Parisen 1889 au Champs­de­MarsHistoire de l'Habitationde Charles GarnierEffectuons un retour vers le quai d’Orsay, vers

l’Histoire de l’Habitation de Charles Garnier, où se trou­vait la maison chinoise, plus ludique que véritable ex­position.

Cette Histoire de l'Habitation de 1889 fut aussiplébiscitée qu'elle fut critiquée. Autant fut­elle ap­préciée du plus grand nombre de visiteurs, car elleétait intéressante et amusante, alors que la majeurpartie des articles faisaient état d'une réalisation trèsapproximative, très loin du cours magistral aux ré­férences sûres.

Mais le but n'était certainement pas là, même si onpeut facilement se mettre à la place des spécialistes,qui restèrent forcément sur "leur faim" !

Dans cette reconstitution, Charles Garnier

avait eu pour but de montrer quel avait été le dévelop­pement successif de l’humanité à travers les âges, enreproduisant les types caractéristiques des habitationsque les hommes s’étaient successivement construites.Il avait préparé son oeuvre pendant deux années, par­tant du principe que l’habitation pouvait être considé­rée comme un miroir reproduisant fidèlement laphysionomie vrai de l’habitant.

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Deux sections principales avaient été imagi­nées. La première concernait les habitations de lapériode préhistoriques et comprenait notamment lesabris dans les grottes, les cités lacustres et les huttes.La seconde section des habitations de la période histo­rique comportait cinq subdivisions:

1) les types des civilisations primitives,2) les civilisations nées des invasions Aryas,3) les civilisations romaines en occident,4) les civilisations romaines en orient,5) les constructions des différents peuples.

C’est dans cette dernière subdivision que noustrouvons cette maison chinoise de l’Histoire de l’Habita­tion. Hélas, n’étant pas un véritable pavillon d’Exposi­tion, les informations sont assez rares. Toutefois,Charles Garnier la décrit non pas dans un article surl’Exposition, mais dans son ouvrage sur l’Histoire de

l’Habitation, à la suite d’un long article sur les maisonschinoises en général, qui se termine par quelqueslignes sur cette maison au quai d’Orsay, comme met­tant en oeuvre de nombreux éléments de l’architec­ture de la Chine, et représentant le type le plusfréquemment employé. La construction et la décora­tion reproduisaient des documents positifs gagesd’une exactitude parfaite.

On peut donc considérer cette réalisationcomme une synthèse des maisons chinoises ty­piques.

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La Chine à Parisen 1900 au Trocadéro1900... l’Exposition universelle française par

excellence... carrefour des siècles, elle représente lasynthèse du siècle passé qui a vu tant de progrès !

Inaugurée le 14 avril 1900 par le PrésidentLoubet, ce fut également la plus grande desExpositions de Paris, pas moins de 112 hectares enplein coeur de Paris, des Palais des Champs­Elyséesaux Champ­de­Mars, en passant par l’esplanade desInvalides, les rives de la Seine et les pentes duTrocadéro, ausquels il faut également ajouter les 104hectares de l’annexe de Vincennes. C’est l’Expositionde la démesure, terminant le XIXe siècle en apothéoseet promettant la paix pour celui à venir !

En six mois, elle a accueilli plus de 50 millionsde visiteurs et 83 000 exposants.

Avant de se replonger dans le thème, je vouspropose déjà une visite rapide de cette exposition.

Gigantesque, l’exposition comporte pas moinsde 136 entrées, dont la plus connue est celle de laPlace de la Concorde. Porte monumentale ou PorteBinet, du nom de son architecte, René Binet.Flanquée de deux minarets, cette porte constituée detrois grandes arches de 45 mètres de hauteur étaitsurmontée par une statue féminine, symbole de lafemme moderne, la Parisienne, oeuvre du sculpteurMoreau­Vauthier.

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Le Palais de l’Industrie, célèbre vestige de lapremière exposition française de 1855 avait été démolipour faire place au Grand Palais et au Petit Palais. LePont Alexandre III , symbole de l’entente franco­russe aégalement été réalisé à l’occasion de cette exposition.

De l’autre côté de la Seine, on découvrait lesPalais symétriques des Manufactures Nationales, suivispar ceux du Mobilier et des Industries diverses, et desArts décoratifs.

En longeant ensuite les berges de la Seine, ondécouvrait sur la rive gauche les 24 pavillons de la Ruedes Nations.

Passé le pont de l’Alma, on découvrait l’im­mense Palais des Armées de Terre et de Mer, dont lapasserelle DeBilly permettait de rejoindre la rive droiteà la sortie aval du Vieux Paris, reconstitution du Parismédiéval du XIVe au XVIIIe siècle, conçu et réalisé parAlbert Robida.

Nous arrivons ensuite au Champ­de­Mars oùla Tour Eiffel s’était refaite une beauté pour l’occasion.On trouvait encore de part et d’autre du Champ­de­Mars de nombreux grands palais avec au fond, lesdeux cheminées monumentales de la Galerie des Ma­chines de 1889 précédée par le Palais de l’Electricité etle château d’eau, qui se transformaient en dentelles lu­

mineuses la nuit venue.

Bien sûr, dans cette visite éclair, j’aurais omisdes dizaines de pavillons plus petits, ou attractions del’Exposition, qui pourtant avaient tenu des places capi­tales de part leur intérêt et leur fréquentation.

Mais la visite n’est pas terminée, il nous fautencore traverser le pont d’Iéna, élargi pour l’occasionet nous diriger vers le Trocadéro.

En 1900 au Trocadéro, c’était l’exotisme quiprimait, on se dirigeait vers les fontaines du Trocadé­ro, avec sur la droite, les hautes constructions del’Asie Russe. Dans cette section très importante où

étaient reconstitués de nombreux édifices russes, laCompagnie Internationale des Wagons­Lits avaitinstallé un train composé de wagons de luxe. Partantde la Gare de Moscou reconstituée près du Kremlin, il

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conduisait les voyageurs à la gare de Pékin en passantpar Vladivostok et Irkoutsk. Un panorama mouvant sedéroulait devant les yeux des spectateurs et montraiten vingt­cinq minutes tous les points intéressants deces pays que l’on mettait quinze jours à traverser enréalité. Ces wagons­restaurants pouvaient contenir unecentaine de convives, permettant de faire ce voyage,tout en appréciant les mets d’une délicate cuisine.

A l’arrivée, on trouvait également un restaurantchinois en gare de Pékin.

Comme vous avez pu le comprendre, la Chineau Trocadéro se trouvait derrière l’Asie Russe, dans lecreux du bras Est du Palais du Trocadéro. La disposi­tion originale avait été combinée par les commissairesgénéraux des deux pays, le prince Tenicheff pour laRussie et M. Vapereau pour la Chine.

Pour faire grand et beau, on avait reproduitdans ce parc chinois ce qu’il y avait de plus imposantet de plus poétique aux yeux de tout habitant de l’Em­pire du Milieu : la résidence impériale. Le temps et l’ar­gent dépensés à cette reproduction prouvaient la

bonne volonté de ceux qui l’avaient exécutée.

La majestueuse porte qui servait d’entrée à lasection chinoise avait demandé plus d’un an de travail;elle était une imitation scrupuleuse de la fameuseporte de Confucius, même si elle paraissait un peutrop neuve et propre !

Après le passage sous cette porte, on pouvaitdécouvrir à droite un pavillon à double toit de tuilesvertes supporté par un péristyle rouge formant galerie.A l’intérieur de ce pavillon, se trouvaient regroupés desmannequins représentant des types des différentesclasses sociales.

Dans le bâtiment principal, dénommé le GrandPalais et qui était la reconstitution de la Porte de Pékinsurmontée d’un kiosque connu sous le nom dePavillon des Tambours, on voyait dans une sorte de

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sous­sol des objets usuels assez bizarres évoquant lavie chinoise dans ses détails journaliers.

On y avait également groupé les multiples pro­duits de l’agriculture chinoise, dont le riz était le plus

important. On ne pouvait pas quitter cette salle sans unregard vers un corps étendu dans un cercueil, avecses plus beaux habits, symbole du grand respect quientoure les morts en Chine.

Au premier étage on entrait dans la vie intimedes chinois, des statuettes évoquaient des scènes de

la vie courante. Une salle voisine était consacrée auxproduits de luxe. Si l’on montait plus haut dans cepalais, on arrivait au restaurant chinois, situé en te­rasse où l’on pouvait déguster biches de mer et nidsde salangane, conjointement au bifteck aux pommes;puis on trouvait un théâtre chinois.

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Dans le parc se trouvaient deux autresconstructions, expositions de céramiques artisanales etdes collections de céramiques impériales anciennes. Il

se trouvait également quelques échoppes accoléesau creux formé par le bras du Palais du Trocadéro,que je n’ai pas traité dans le cadre de ce projet de re­constitution, par manque de documentation. Le peude luminosité et le manque de recul expliquent égale­ment la pénurie de photographies.

Le parc chinois était des plus charmant avecsa végétation choisie et ses bassins en espaliers. Ildevait assurer un dépaysement total en plein coeurde Paris, en cette Exposition universelle de 1900.

Ce parc chinois de l’Exposition universelle de 1900marque la fin d’un projet, et surtout l’aboutissement d’uneaventure de longue haleine, faite du plaisir qui consiste à re­donner vie à ce qui n’est plus, mais aussi parcemée d’écueil,quand la documentation fait défaut.Près d’une année aura été nécessaire à la réalisa­tion de ce film, composé de six séquences qui correspondentaux six réalisations chinoises présentes à ces quatre Exposi­tions universelles de Paris au XIXe.Des centaines de gravures, de photographies et delivres auront été réunis pour ainsi témoigner, de ces participa­

tions. Grâce à la magie de l’image de synthèse 3d, et decentaines d’heures de travail, ces constructions auront pu re­naître, dans leurs formes et leurs couleurs, sans oublier d’yrecréer une atmosphère, qui elle aussi est le reflet de cequ’étaient ces Expositions universelles à Paris.Preuve est aujourd’hui faite que la Chine y étaitbien représentée, que son patrimoine et son peuple étaientbien mis en valeur, afin de mieux nous les faire connaître.

>>> Laurent ANTOINE "Lemog"

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Exotiques Expositions...Les Expositions universelleset les cultures extra­européennes,France, 1855 ­ 193731 mars ­ 28 juin 2010aux Archives nationales, Hôtel de Soubise àParis

Près de 200 documents exceptionnels(plans, gravures, photographies, affiches,textes, etc.), tirés principalement des fondsdes commissariats des Expositions univer­selles conservés aux Archives nationales, in­vitent à découvrir comment les Expositionsuniverselles ou internationales organisées enFrance entre 1855 et 1937 ont contribué à fa­çonner le regard occidental sur l’altérité et par­ticulièrement sur les mondes dits exotiques.

Deux vidéos de restitutions réaliséespar Lemog permettent de s'immerger dansl'univers des Expositions universelles (Parcégyptien de 1867 ­ Rue des Nations 1900).Du lundi au Vendredi de 10h à 12h30 et de14h à 17h30.Samedi et dimanche de 14h à 17h30.Fermée le mardi et les jours fériés.Plein tarif : 3€Tarif réduit : 2,30€

Le Vieux Paris d'Albert Robidaà L'Exposition universelle de 1900 à Pariset sa restitution 3dJeudi 27 mai 2010 à 19hConférence au Musée de Montmartre

Lemog vous dévoilera tout d'Albert Ro­bida, visionnaire qui réalisa pour l'Expositionuniverselle de 1900 une reconstruction d'unquartier médiéval de la ville de Paris.Métro : Lamarck ou AbbessesRéservation obligatoire au 01.49.25.89.39Capacité d'accueil : 40 personnesAdhérents de l'associationdu Vieux Montmartre : 10€Autres : 15€

Pour en savoir plus...Vous avez été envoûtés par l'univers des Expositions universelles ? Vous vous êtes

pris d'intérêt pour les travaux de Lemog et souhaitez avoir plus d'informations ? Çatombe bien, deux manifestations les mettent à l'honneur :

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membre : Virginie Allardstatut : correspondante localecourriel : [email protected] : Evreux (27)profession : attachée de conservation du

pat., Musée des instruments àvent, la Couture­Boussey.

membre : Frédérick Anquetilstatut : président ; infographiste ;

correspondant localcourriel : [email protected] : Evreux (27)profession : guide­conférencier / adj. du

patrimoine Ville de Gisors.membre : Laurent Antoinestatut : correspondant localcourriel : [email protected] : Bezannes (51)profession : infographiste 3d.membre : Christian Ayraultstatut : infographistecourriel : [email protected] : Colombiers Rochelle (17)profession : artiste peintre / sculpteur /

infographiste.membre : Clémence Ayraultstatut : trésorière ; infographiste ;

correspondante localecourriel : [email protected] : La Rochelle (17)profession : enseignante.membre : Marie­Laure Billodeaustatut : correspondante localecourriel : [email protected] : Matha (17)profession : agent d'accueil office de

tourisme pays de Matha.membre : Michel Billodeaustatut : non actifcourriel : aucunville : Fontaine­Chalendray (17)profession :agriculteurcéréalieren

retraite.

membre : Anne Chapeletstatut : correspondante localecourriel : [email protected] : Rochefort (17)profession : agent d'accueil Capitainerie.membre : Audrey Charrierstatut : correspondante localecourriel : [email protected] : Saintes (17)profession : professeure des écoles.membre : Jean­Michel Charrierstatut : correspondant localcourriel : charrierjean­[email protected] : Saintes (17)profession : professeur des écoles.membre : Emmanuelle Colladostatut : infographistecourriel : [email protected] : Villenave d'Ornon (33)profession : fouilleuse archéo. Inrap.membre : Laurie Coppinstatut : correspondante localecourriel : [email protected] : Paris (75)profession : archiviste ­ documentaliste.membre : Georges Durandstatut : non actifcourriel : [email protected] : Lagord (17)profession : secrétaire adj. association

Archéaunis.membre : Julie Gaboritstatut : correspondante localecourriel : [email protected] : Angliers (17)profession : enseignante.membre : Alexis Grolaudstatut : non actifcourriel : [email protected] : Paris (75)profession : ingénieur informatique.

L'ANNUAIRE DES ADHÉRENTS

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membre : Julien Lagardestatut : secrétaire ; infographiste ;

correspondant localcourriel : [email protected] : Toronto (Canada)profession : enseignant.membre : Emilie Lefebvrestatut : non actifcourriel : [email protected] : Hyères (83)profession : adjointe du patrimoine.membre : Anne Nadeau­Dupontstatut : correspondante localecourriel : [email protected] : Escalquens (31)profession :assistanted'édition

électronique, INHA.membre : Micheline Pasquetstatut : correspondante localecourriel : [email protected] : Gagny (93)profession : retraitée.membre : Marina Pellerinstatut : correspondante localecourriel : [email protected] : Rochefort (17)profession : adjointe à l'archiviste.

membre : Jean­Paul Pichardstatut : correspondant localcourriel : aucunville : Saintes (17)profession : Professeur de Lettres et

critique musical.membre : Anne Renard­Ayraultstatut : correspondante localecourriel : [email protected] : Colombiers (17)profession : documentariste / écrivaine.membre : Arel Tallonstatut : correspondant localcourriel : [email protected] : Rochefort (17)profession : assistant d'exploitation.membre : Jean­Guy Vigierstatut : non actifcourriel : jean­[email protected] : Pouffonds (79)profession : exploitant apiculteur.

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