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La tapisserie française dans la deuxième moitié du XVIIème siècle - Charles Le Brun, Tenture de l’Histoire d’Alexandre –Le triomphe d’Alexandre/ Jules Romain, Tenture des sujets de la Fable – l’Amour et Psyché au bain - « Dans un grand siècle, tout est grand » (M. Cousin) I. Introduction La tapisserie représente une de principales manifestations de l’art décoratif, un ornement de grand luxe. Généralement, suite à un choix de thème, les lissiers conçoivent un ensemble de tapisseries, connu sous le nom de tenture. Au cours des époques le rôle de la tapisserie a bien changé, selon la situation socio-politique des pays, selon les goûts et les intérêts des gens. Pendant le Moyen Âge, les tapisseries servaient, le plus souvent, à décorer les murs froids des églises et des couvents. Après les endroits sacrés, les tapisseries ont gagné les habitations et, même, la rue grâce à leur caractère mobile. Ainsi, les grands seigneurs pouvaient transporter ces ouvrages d’un château à l’autre. Ils pouvaient également les présenter pendant les cérémonies officielles. Pendant les XVI - XVII siècles, les tapisseries sont devenues des compléments indispensables des intérieurs. Elles étaient recherchées à la fois pour le faste des décors qu’elles créaient et pour la douce humanité qu’elles introduisaient dans les maisons de l’aristocratie. En participant au décor de toutes les cérémonies officielles des ducs, la tapisserie a acquis un nouveau rôle, extrêmement important pour son évolution ultérieure. En effet, les tentures, narrant des épisodes glorieux tirés de la mythologie répondaient au désir d’exaltations des vertus des princes, des commanditaires de ces ouvrages. Les tentures mettaient en scènes leur pouvoir, célébraient la personne princière et sa lignée. De plus, il faut souligner les liens qui se sont établis entre la tapisserie et l’économie des différentes régions. La constitution de grandes collections (comme est, par exemple, celle des rois de France) a été bien liée à une volonté politique ayant des implications économiques importantes qui visaient principalement, la diffusion d’une production nationale dans les régions voisins. C’est cet enjeu économique qui a déterminé le souverain français, Henri IV, d’interdire, par le mandement du

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La tapisserie française dans la deuxième moitié du XVIIème siècle - Charles Le Brun, Tenture de l’Histoire d’Alexandre –Le triomphe d’Alexandre/ Jules Romain, Tenture des

sujets de la Fable – l’Amour et Psyché au bain -

« Dans un grand siècle, tout est grand » (M. Cousin)

I. Introduction

La tapisserie représente une de principales manifestations de l’art décoratif, un ornement de grand luxe. Généralement, suite à un choix de thème, les lissiers conçoivent un ensemble de tapisseries, connu sous le nom de tenture. Au cours des époques le rôle de la tapisserie a bien changé, selon la situation socio-politique des pays, selon les goûts et les intérêts des gens. Pendant le Moyen Âge, les tapisseries servaient, le plus souvent, à décorer les murs froids des églises et des couvents. Après les endroits sacrés, les tapisseries ont gagné les habitations et, même, la rue grâce à leur caractère mobile. Ainsi, les grands seigneurs pouvaient transporter ces ouvrages d’un château à l’autre. Ils pouvaient également les présenter pendant les cérémonies officielles. Pendant les XVI - XVII siècles, les tapisseries sont devenues des compléments indispensables des intérieurs. Elles étaient recherchées à la fois pour le faste des décors qu’elles créaient et pour la douce humanité qu’elles introduisaient dans les maisons de l’aristocratie. En participant au décor de toutes les cérémonies officielles des ducs, la tapisserie a acquis un nouveau rôle, extrêmement important pour son évolution ultérieure. En effet, les tentures, narrant des épisodes glorieux tirés de la mythologie répondaient au désir d’exaltations des vertus des princes, des commanditaires de ces ouvrages. Les tentures mettaient en scènes leur pouvoir, célébraient la personne princière et sa lignée. De plus, il faut souligner les liens qui se sont établis entre la tapisserie et l’économie des différentes régions. La constitution de grandes collections (comme est, par exemple, celle des rois de France) a été bien liée à une volonté politique ayant des implications économiques importantes qui visaient principalement, la diffusion d’une production nationale dans les régions voisins. C’est cet enjeu économique qui a déterminé le souverain français, Henri IV, d’interdire, par le mandement du 11 septembre 1601, l’importation des tapisseries étrangères « à bocages » et « à verdures » en France. Son principal but était de protéger et d’augmenter une production nationale insuffisante. En revanche, il a fait appel aux tapissiers flamands les plus célèbres. Il leur donna de grands privilèges (comme logement gratuit, la dispense des tailles, gardes) afin de développer l’industrie nationale française. Louis XIV a également donné une impulsion considérable à l’épanouissement de cet art, en créant en 1667 la manufacture royale des meubles de la Couronne (connue comme la Manufacture des Gobelins). Ainsi, il est évident que le rôle de la tapisserie a crû progressivement. Servant, à l’origine, aux décors des églises, elle est devenue un attribut obligatoire de toute maison riche et, même, l’objet de la propagande royale, « le reflet tissé » de la condition d’un pays.

II. Contexte historique Le XVII siècle a connu l’éclat de la nation française. La France, sous le règne de Louis XIV, a considérablement marqué l’Europe entière et est devenue un modèle dans l’art et la littérature. La tapisserie française, intégrée dans ce contexte historique favorable pour la France, a connu un grand essor pendant la deuxième moitié du XVII siècle. Son développement s’est inscrit dans l’unique et le grand but de Louis XIV de « rendre le pays entier supérieur à tout autre (…) riche en arts et fécond en biens de toute sorte,

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n’ayant besoin de rien et dispensateur de toutes choses aux autres États » (Marcantonio Giustiniani, ambassadeur de Venise à Paris) Grâce à la formation des ateliers de tapisserie non isolés, mais bien groupés et réunis en manufactures et aux subventions de la Couronne, les tentures ont commencé à se multiplier vite dans le royaume. Ce fut Nicolas Fouquet, surintendant des finances, à l’époque de Mazarin, qui a créé en 1658 la manufacture de Maincy. La manufacture était dirigée par Charles le Brun, le futur peintre de Louis XIV et elle a constitué le noyau de la Manufacture royale de Meubles de la Couronne établi à Paris après la chute de Fouquet. En 1662, à l’instigation de Jean-Baptiste Colbert, successeur de Fouquet, Louis XIV a fondé la Manufacture Royale des Gobelins. La manufacture a été installée dans l’hôtel de la famille des Gobelins. Il faut noter qu’en 1667, après un édit royal, la manufacture a reçu le nom de Manufacture royale des Meubles de la Couronne. Le nom reflétait le nouveau statut, l’importance acquise par l’institution. Dès lors la manufacture a fait fusionner les ateliers des faubourgs Saint-Marcel, Saint Germain et Maincy. La manufacture ne se composait pas simplement des métiers de haute et de basse lice, elle devait assurer l’ameublement complet des résidences royales. Colbert a élaboré un programme vaste selon lequel les lissiers, orfèvres, sculpteurs, graveurs, menuisiers et fondeurs devaient concourir au but commun de la réalisation des grands ensembles destinées à l’enrichissement des demeures royales. Les privilèges et les exemptions ont demeuré identiques aux avantages qu’Henri IV a accordé, au début de siècle, aux lissiers flamands établis en France. Les ouvriers étaient logés avec leur famille dans les dépendances de l’hôtel des Gobelins ou dans les maisons voisines. Les étoffes (soit laine et soie soit fils d’or et d’argent) étaient directement fournies par le roi qui en retenait la valeur sur le prix des tapisseries achetées par lui. Le roi payait les tapisseries d’après un tarif établi à l’avance. En effet, la manufacture devenait progressivement le moyen de consolidation du pouvoir royal, de mise en valeur de l’histoire politique nationale. En ce qui concerne les tapisseries, elles servaient, bien entendu, au décor des demeures royales, mais, également aux cadeaux du monarque. La gloire du roi se manifestait sur la plupart d’entre elles soit directement, soit par l’intermédiaire des épisodes glorieux des vies des héros antiques ou des dieux de l’Olympe. Elles mettaient en valeur le règne de Louis XIV et vantaient les mérites et les vertus du roi. Il faut souligner que la thématique suivie par la tapisserie de la deuxième moitié du XVIIème siècle s’inscrivait dans le style rayonnant de l’époque, surnommé le style Louis XIV. Son nom prouve, encore une fois, le rôle absolu détenu par le roi en France. Le style Louis XIV a été une apothéose de la monarchie moderne, de la majesté. Tous les arts étaient empreints d’une relative grandeur. Toutes les parties convergeaient vers la personnification de la royauté triomphante. On se trouvait devant quelques choses de gigantesque. La description faite à Louis XIV par l’historien français Jules Quicherat est très suggestive dans ce contexte « il ne sut jamais apprécier dans les œuvres d’art que l’éclat et la symétrie, deux choses qu’il fallait pousser à l’extrême pour lui plaire ». L’élément théâtral, un certain pathétisme primaient dans la vie réelle de l’aristocratie. Tout était exagérer, l’apparence prenait le pas sur l’authenticité. L’état-même se confondait avec la personne du souverain. Le roi était perçu comme le symbole de l’unité nationale, longtemps rêvée. En conséquence, l’intérêt pour la grandeur, pour la somptuosité s’est traduit en les dizaines des teintures tissées aux Gobelins. Les tapisseries réalisées aux Gobelins pendant la deuxième moitié du XVII siècle constituent vraiment la synthèse du goût et de la mentalité de l’aristocratie de l’époque ; du pouvoir royal. Unes des plus célèbres tentures conçues, à la Manufacture des Gobelins, dans le cadre du programme complet défini dès 1662, sont : L’Histoire d’Alexandre et Les Sujets de la Fable. L’analyse comparative de ces deux tentures permettra d’observer l’évolution du goût dans les décennies de la deuxième moitié du XVII siècle.

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III. La commande Comme on l’a marqué ci-dessus, le souverain Louis XIV a été le commanditaire direct de ces ouvrages. La tenture de l’Histoire d’Alexandre, tissée d’après cinq grands tableaux réalisés par Charles le Brun, a particulièrement servi au désir du roi de prouver sa gloire, son destin extraordinaire. Les épisodes de l’épopée d’Alexandre réunis dans cette tenture fournissaient une parallèle avec le règne de Louis XIV. Malheureusement, les documents qui ont accompagné cette tenture ont entièrement disparu si bien qu’il est assez difficile de déduire les intentions du roi et de Colbert lorsqu’on a décidé la mise sur métier de la série. Il semble qui les tissages d’Alexandre ont commencé aux Gobelins bien avant l’achèvement des grands tableaux auxquels le Brun a travaillé plus de dix ans, entre 1661 et 1673. Par exemple, le Brun a fait figurer Le Passage du Granique, une des pièces de la tenture d’Alexandre, dans le fond de la tapisserie La visite du roi aux Gobelins (en 1667) visant à montrer les meilleurs productions de la manufacture. Il a même été dit que les cinq tableaux de Le Brun ont été peints pour composer le décor d’une grande galerie ou d’une vaste salle sans autre précision. Mais c’est difficile à admettre que de tels ouvrages, d’un aussi grand format, ont été conçus sans avoir une idée claire du lieu à décorer. Toutefois, la tenture d’Alexandre a eu un grand succès à la cour, étant tissée au moins huit fois, pendant une dizaine d’années. Avant 1684, le souverain a donné une suite complète à or à son frère Philippe d’Orléans. Quatre suites à or ont été inscrites à l’inventaire du Mobilier de la Couronne avant 1684, et trois autres suites entre 1685-1687. Il faut ajouter une suite sans or tissée entre 1685-1686 pour Mademoiselle de Montpeusier, cousine du roi. La tenture a été également exposée à divers occasions. Elle a été utilisée lors des grandes cérémonies de la Couronne, dans les résidences royales, à l’occasion de réceptions de princes et d’ambassadeurs. Une des pièces de la tenture a été même accrochée à l’entrée du chœur de la cathédrale de Reims au cours de la cérémonie du sacre de Louis XV le 25 octobre 1722. Les acquisitions de Louis XIV, lors du dernier tiers du XVII siècle, ont essentiellement été des œuvres italiennes. Après la mort de Colbert, ce fut Louvois qui a obtenu la fonction de surintendant à la manufacture des Gobelins, en 1683. Il s’est radicalement écarté des nouveautés introduites par Colbert et Charles le Brun, en renouant avec une certaine tradition artistique de la Haute Renaissance italienne du XVI siècle. Les tentures avec de thèmes mythologiques ont regagné d’intérêt. Les ornements gracieux ont remplacé l’esthétique trop allégorisante de Charles le Brun. Dès le début de 1684 on a lancé aux Gobelins les deux grandes tentures des Sujets de la Fable qui reproduisaient les compositions des principaux mètres italiens : Raphaël et Jules Romain. Il faut mentionner qu’une des séries des Sujets de la Fable a reproduit les fresques créées un siècle auparavant par Jules Romain pour le palais du Té à Mantoue. Les décors pour ce palais ont été commandés par le noble italien, Frédéric Gonzague. Le palais du Té est considéré le chef-d’œuvre le plus connu de Jules Romain, un modèle du maniérisme international. À l’époque de la Renaissance, ses décors étaient innovateurs. Ils présentaient un mélange du sérieux et du fantastique, du contenu moral et du mythe. Entre 1526-1528, Romain a peint entièrement la Salle de Psyché, grande salle destinée aux fêtes et aux réceptions. C’est là que l’artiste italien a inclus les fresques de l’histoire de Psyché. Romain a traité avec une grande liberté le sujet d’amour. Cet ouvrage n’a guère eu de caractère politique, de propagande royale, au contraire, il visait un espace privé, détendu.

IV. L’artiste

L’architecte et l’historiographe français André Félibien remarquait, en parlant de l’ouvrage de Charles le Brun : « un usage persuasif de la représentation et de l’expression des passions ».

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Charles le Brun, sous la direction duquel, on a tissé aux Gobelins les tentures comparées ci-dessous, a été le principal artiste qui a influence l’épanouissement du grand style français. Il a pris en mains l’art royal français, en lui offrant : une force ornementale, puissance décorative, une réalité architecturale, uniques dans l’histoire de l’art. L’esthétique développée par le Brun a parfaitement répondu au programme royal centré sur la célébration de la gloire, le culte de l’homme divinisé. L’artiste a manifesté de très tôt sa passion pour l’art, notamment pour la peinture. Grâce au soutien de son protecteur le Chancelier Séguier, en 1633, le Brun a commencé de travailler à l’atelier de Simon Vouet. Il faut noter que Vouet a eu un rôle décisif pour l’évolution de la peinture et la tapisserie-même. En tant que premier peintre du roi Louis XIII, il a réalisé les principales décors pour les demeures royales (les palais du Louvre et du Luxembourg), Les tapisseries d’après Vouet se distinguaient par : l’ampleur, l’aération de leurs compositions, la gaieté des couleurs, les perspectives théâtrales. Il a bien combiné dans ses ouvrages le domaine de la composition historiée et des motifs purement décoratifs. Sans aucun doute, tous ces traits de l’art du maître se sont reflétés dans les ouvrages de Charles le Brun. La collaboration avec Nicolas Poussin, a également influencé l’esthétique de Le Brun. En 1642, ils ont voyagé ensemble à Rome, étant attirés tous les deux par l’antiquité, l’art italien et leurs grands peintres. En effet, le Brun affirmait souvent que, parmi ses maîtres, étaient Raphaël, Pierre de Cortone et, même Jules Romain. Il ne faut pas oublier que le Brun a repiqué de nombreuses figures de la célèbre tenture de l’Histoire de Scipion, crée par Jules Romain. La réputation de Charles le Brun a bien crûe après qu’il a travaillé à la décoration du château de Vaux-le-Vicomte, appartenant à Nicolas Fouquet. Afin d’apporter une utile contribution à la décoration de son château, Fouquet a établi un atelier de tapisserie au village de Maincy qui a été placé sous la direction artistique de Charles le Brun. Le Cardinal Mazarin s’est intéressé à lui et l’a présenté au roi Louis XIV. Ainsi, à partir de 1661, le souverain a confié à Le Brun les travaux de décoration au château de Versailles. En 1663, ayant le soutien et la confiance de Colbert et du roi, l’artiste a été nommé directeur de la Manufacture des Gobelins, titre décisif pour sa carrière. De plus, en 1664, le Brun est devenu le premier peintre du roi et a été anoblie. Comme les historiens de l’art le soulignent, l’artiste, épris de la pompe et de la magnificence, est devenu « le traducteur officiel de la splendeur royale », « le régulateur du goût ». La tapisserie lui a permis de prouver son talent voué à la décoration somptueuse. Parmi ses tentures les plus célèbres, il faut citer : Saisons, Éléments, l’Histoire du roi, l’ Histoire d’Alexandre. Par exemple, l’Histoire du roi est vue comme une des tentures les plus accomplies de la production des Gobelins, comme le symbole des fastes militaires et civils de Louis XIV tandis que la tenture les Mois commémore les plaisirs et les divertissements de la cour royale. À cause du changement de la hiérarchie au sein de la manufacture des Gobelins, tous les chefs d’ateliers étaient placés sous l’autorité de Le Brun. C’était lui qui donnait l’idée, fournissait le modèle, contrôlait le travail, corrigeait. Le dessein est devenu l’œuvre authentique de l’artiste. On essayait de ne plus copier des modèles plus anciens. En revanche, Le Brun laissait aux lissiers toute liberté pour la transposition colorée. En effet, les tapisseries tissées d’après ses tableaux offraient un coloris plus vif et chaud, incomparablement plus riche que ses peintures. Le Brun s’est entouré de plusieurs peintres exécutants, parmi lesquels on peut citer  : Baudrin, Yvart, Lefebvre, Valdor, Verdier. On peut constater qu’il y avait une division très claire des tâches entre ces artistes : certaines peignaient les architectures, les ornements, les paysages tandis que les autres peignaient les groupes de silhouettes, les grandes figures, les portiques et les animaux.

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VI. L’œuvre a. Forme générale. Décors - La tenture de l’Histoire d’Alexandre

Comme on l’a déjà noté ci-dessus, pendant la deuxième moitié du XVII siècle on observe une multiplication des tentures narrant les épisodes glorieux des vies des héros antiques, des grands défenseurs de la foi chrétienne. Ces épisodes servaient de support à la célébration de la personne princière et de sa lignée. La tenture de l’Histoire d’Alexandre s’inscrit parfaitement dans cette tendance. Elle se situe entre l’héritage des modèles traditionnels (par son thème et son style) et l’avenir de la manufacture qu’elle inaugure. En 1661, avant même la fondation de la Manufacture royale des Gobelins, Charles Le Brun a exécuté à Fontainebleu le premier tableau de cette série, dédié au roi et intitulé « La Famille de Darius ». Étant placé en 1663 à la manufacture des Gobelins, Le Brun a ajouté d’autres épisodes signifiants de l’histoire du héros antique : les Batailles et le Triomphe d’Alexandre. En effet, cette suite se compose de cinq tableaux principaux : La Bataille du Granique ; La Bataille d’Arbelles ; La Bataille de Porus ; La Famille de Darius et Le Triomphe d’Alexandre. Charles Le Brun a consacré plus de dix ans (1661-1672) à concevoir les cinq tableaux monumentaux. Il a fait presque 250 dessins afin de préparer ces œuvres. Ce détail témoigne de l’intérêt personnel que l’artiste a porté à ce travail colossal. Lors de l’exécution des cartons, les scènes des batailles ont été divisées en trois panneaux : le centre et deux ailes latéraux si bien que la tenture se compose d’onze pièces au total. Grâce à son succès, la tenture a été tissée, pendant une douzaine d’années, au moins huit fois aux Gobelins. La tenture en laine et en soie, rehaussé d’or a été tissée aux Gobelins, dans les ateliers de Jean Jans père et fils et d’Henri Laurent. Il faudrait insister sur la forme de bordures qui représente une innovation à l’époque. Ce fut Vouet qui a donné une forte valeur décorative à cet élément de la tapisserie. On voit apparaître des bordures opulentes, bien plus larges qu’avant, traitées en camaïeu. On peut observer de telles bordures sur les pièces de la tenture d’Alexandre. Par exemple, en analysant le Triomphe d’Alexandre on constate les larges bordures des côtés, à thermes des femmes, en couleur de bronze avec des festons de fleurs et les chiffres du roi. Dans la partie supérieure la bordure prend la forme d’un élément architectural, la corniche au milieu de laquelle apparaît un trophée d’armes du roi. Dans la partie inférieure de la pièce on retrouve aussi un élément original qui distingue la tenture, transmet la conception artistique de Le Brun. Au milieu de la bordure d’en bas, il y a une inscription en lettres d’or sur un fond bleu, c’est une devise en latin « SIC VIRTUS EVEHIT ARDENS » (Ainsi par la vertu s’élèvent les héros). Il faut noter que Le Brun a associé des devises pareilles à toutes les pièces de la suite. On peut citer d’autres exemples : -Il est d’un roi de se vaincre soi-même (Famille de Darius) -La vertu surmonte tout obstacle ( La Bataille du Granique) En effet ces devises confèrent à l’essence guerrière de la tenture, une dimension philosophique. L’artiste surprend plus les vertus morales du souverain que celles militaires. Ainsi ce cycle des tapisseries devient une parabole du pouvoir idéal, symboliquement plus fort. La scène représentée dans le Triomphe d’Alexandre s’inscrit évidemment dans le programme général de la tenture, servant à la glorification du roi. Elle suggère l’entrée éclatante du héros macédonien dans Babylone, après la conquête de Perse. Alexandre entre triomphalement dans la capitale légendaire. Il est débout sur un char somptueux, traîné par deux éléphantes, escorté de cavaliers. En citant la légende, on apprend que Bagophanès, le gardien de la ville avait jonché tout le parcours du vainqueur de guirlandes des fleurs. On remarque les esclaves qui portent les présents précieux du souverain.

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L’artiste a également mis l’accent sur les éléments architecturaux. Dans l’extrémité gauche de la tapisserie il y a une statue de femme, caractéristique pour l’époque hellénistique. Au fond, on observe des jardins suspendues, des monuments grecques, parmi lesquels un temple (ressemblant au Parthénon). La scène évoque la richesse, la magnificence du souverain. Elle est très vive, imposant. Un historien, en parlant de cette tapisserie remarquait: « de furieuses mêlées, de cortèges triomphaux, qui s’ordonnent et s’équilibrent sans confusions ». Malgré la richesse et la grandeur de la tenture de l’Histoire d’Alexandre, pendant le dernier tiers du XVII siècle, il y a eu un changement rapide de style, de registre du discours politique et esthétique. La tapisserie même s’est vu radicalement changer. La tenture des Sujets de la Fable, qu’on va analyser parallèlement en fait la preuve.

a. Forme générale. Décors. - La tenture des Sujets de la Fable À la fin du XVII siècle la production des Gobelins a été marquée par un considérable changement d’esthétique, dû notamment aux doutes et aux bouleversements intellectuels qui ont touché la conscience européenne. Paul Hazard dans son livre La crise de la conscience européenne : 1680-1715, a bien mis en évidence l’épuisement de la modernité, le désir des gens de retour aux sources. Le choix des thèmes pour la création artistique représente un essai de réponse à ces inquiétudes. On constate un certain retour en arrière. Les artistes ont repris les chefs d’œuvre de la Renaissance. Ils les ont revalorisés. Louvois, nommé directeur des Gobelins en 1683, a décidé de remplacer l’esthétique trop allégoriste et fastueux avec des ornements gracieux, avec un style plus doux et léger. En effet, sa politique s’est inscrite dans la situation générale du royaume ruiné après les longues guerres. On n’osait plus entreprendre de grands travaux, de glorifier le monarque. Le royaume avait épuisé ses sources d’énergie. Il devait s’orienter vers un nouveau chemin. À la Manufacture royale, Louvois s’est reporté sur les principaux artistes de la Renaissance italienne  : Raphaël et Jules Romain, en faisant remettre sur métier la tenture des Triomphes des dieux, ainsi que deux séries des Sujets de la Fable (1686), réalisées à partir de desseins de ces deux maîtres italiens. La tenture des Sujets de la Fable, d’après les desseins de Jules Romain, compte huit pièces, tissées en laine et soie et rehaussées d’or. Les pièces présentent différentes scènes de l’histoire d’Amour et Psyché  : Le Festin de Psyché à droite ; Le Festin de Psyché à gauche ; Le Couronnement de Psyché ; Amour et Psyché au bain ; La Danse des Nymphes ; La Musique de la Danse de la gauche ; La Danse des bergers et bergères ; La Musique de la Danse de la droite. La tenture révèle le nouvel intérêt pour des thèmes où la faune et la flore jouent le premier rôle. On ne représente plus de glorieux héros antiques, des scènes amples, majestueux. Les Sujets de la Fable suggèrent, plus particulièrement, le désir de revenir à des ensembles libérés de préoccupations historique. On valorise plus la nature, les émotions et les sentiments. En analysant la tapisserie Amour et Psyché au bain, on constate les éléments du nouveau style introduit dans la manufacture. Les bordures deviennent plus ornementales. Elles sont en mosaïques par petits carrés d’or. Aux coins d’en haut il y a deux harpies et aux coins d’en bas il y a deux Amours assis sur deux globes. Au milieu de la bordure de bas on observe également les chiffres du roi. Le reste de la bordure est rempli de petits personnages, des enfants, dont certains en grotesque, avec ornements, animaux, rinceaux au naturel. La richesse des couleurs, le dynamisme du mouvement des étoffes pleines de reflets changeants attirent vivement l’attention. Il n’y a plus d’éclat, de certaine violence du mouvement dans la scène. On retrouve Amour et Psyché au milieu d’un paysage fermé par des rochers et des arbres. Les deux héros sont entourés de sept petits Amours qui versent l’eau et les essuient. Au premier plan, à droite, il y a une table recouverte d’étoffes et de fleurs, portant

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un grand vase d’orfèvrerie. À gauche, il y a l’arc et le carquois de l’Amour appuyés à un coffret. La scène émeut grâce à sa sérénité, à sa simplicité. Il faut remarquer que la symétrie excessive disparaît. Elle ne s’accorde plus à la nouvelle esthétique, aux revers de la politique dont les gens se rendent compte. Les lignes s’assouplissent, les contours s’amollissent. Les formes deviennent s’arrondissent. On combine les rinceaux de feuillages avec des guirlandes. La tenture des Sujets de la Fable inaugure un esprit nouveau qui rejette la cérémonieuse grandeur. Le nouveau décor est léger, frais, joyeux. La tenture constitue le reflet d’une société qui cherche à se laisser vivre le plus joyeusement du monde.

b. Iconographie - La tenture de l’Histoire d’Alexandre Le sujet de la tenture l’Histoire d’Alexandre n’était pas du tout nouveau lors de son tissage à la Manufacture des Gobelins. L’image d’Alexandre a nourri l’idéal chevaleresque de l’Europe médiévale, bien avant de devenir un élément de la propagande politique à la cour de Louis XIV. C’est Philippe le Bon qui a fait décorer une partie de son hôtel parisien sur le thème de l’histoire d’Alexandre. Il a acheté encore en 1459 une tenture représentant ce sujet. À la fin du XVI siècle, on retrouve une suite des tapisseries tissée dans les ateliers d’Audenarde, illustrant la Vie d’Alexandre le Grand. Par essence, les lissiers n’ont fait que renouveler une image destinée à nourrir une vision collective. La figure d’Alexandre fait partie d’une longue liste des héros idéalisés (entre autres : Ulysse, Roland) que les gens se sont créés au cours de l’histoire. En représentant ces personnages, les artistes avaient la possibilité de projeter les vertus de leur temps, de rendre un édifiant de leur époque. Alexandre était un idéal humain investi de plusieurs vertus : victorieux, bâtisseur, conquérant, amoureux. Son image était légendaire. Mais, c’est qu’est plus important dans cette analyse c’est le fait qu’on a souvent associé la figure d’Alexandre avec celle de Louis XIV. Il faut mentionner que dès sa jeunesse, le monarque a été perçu comme un symbole du soleil. Bien avant d’avoir remporté des victoires, d’obtenir la gloire, Louis XIV est devenu un mythe. En effet, aimant beaucoup l’art, plus particulièrement le ballet, le roi a dansé dans plusieurs ballets. D’habitude, il a joué des rôles du soleil ou d’Apollon (comme, par exemple, dans Le Ballet de la Nuit). Par ailleurs le soleil était un symbole de la dignité royale, de la monarchie absolue. En 1665, il a même interprété le rôle d’Alexandre dans Le Ballet de la naissance de Vénus. C’est évident que ces détails de la vie du roi ont servi comme une clé pour l’interprétation de l’œuvre de Le Brun. C’est le roi même que l’artiste voulait représenter dans sa teinture. La figure de Louis XIV se confonde avec celle d’Alexandre. Le « triomphe » d’Alexandre est, en même temps, celui de Louis XIV. La scène du triomphe d’Alexandre répond au caractère guerrier du règne du Roi Soleil.

b. Iconographie - La tenture des Sujets de la Fable Dès l’Antiquité, le mythe de Psyché a été transmis tout au long des siècles bien qu’on a progressivement changé sa signification selon les contextes historiques et les modes. À l’origine, Psyché était représentée comme un papillon ou une femme aux ailes. Elle symbolisait l’âme, la partie immortelle de l’homme, le siège de l’intelligence et de la morale. Plotin identifiait Psyché à l’Aphrodite céleste. Son mariage avec Amour signifiait la contemplation de l’intelligence par l’âme ou, dans d’autres interprétations, l’union de l’âme à l’amour divin. Les néo-platoniciens y voyaient même une promesse d’un bonheur éternel. C’est grâce à l’ouvrage d’Apulée, « Les Métamorphoses », que le mythe s’est diffusé jusqu’à l’époque moderne. La fable de Psyché s’est ouverte sur un manifeste esthétique, sur une réflexion sur la beauté.

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Au XVII le goût de la culture française pour l’histoire de Psyché et l’Amour s’est développé, ce sujet devenant un des thèmes centraux de la tapisserie. Certains ont même insisté sur l’origine royale de l’héroïne, dans un moment d’éclat de la monarchie absolue. La réalisation de la tenture de Sujets de la Fable d’après Romain, aux Gobelins coïncide avec celle de la tenture de Sujets de la Fable d’après les dessins de Raphaël. La fabrication simultanée de ces deux suites reflète l’intérêt porté à ce sujet. La tapisserie l’Amour et Psyché au bain qu’on y analyse, en particulier, a retrouvé sa source d’inspiration dans la fresque Le bain de Mars et Vénus, réalisée par Romain pour la salle de Psyché au palais du Té à Mantoue. Les deux ouvrages ont le même cadre mythique, exotique, la même disposition des personnages. Les deux constituent des représentations idéalisées de l’amour et de la sensualité. Toutefois, on peut constater que Psyché a perdu toute trace de spiritualité. Dans ces représentations elle n’a plus rien d’avoir avec la représentation transmise par l’interprétation allégorique traditionnelle. Psyché devient plutôt une belle et riche héritière accomplissant un rituel mondain. On observe ainsi une lecture simplifiée, plus frivole de l’iconographie traditionnelle. L’histoire d’amour présentée dans les huit pièces ne vise plus la célébration d’une personnalité. En fait elle traduit artistiquement la capacité des gens de donner libre cours à leurs passions, la sensualité. VII. Commentaire

La place de deux tentures dans l’histoire d’art a. La tenture de l’Histoire d’Alexandre

Selon Le Brun, ses principaux maîtres ont été Raphaël et Jules Romain. La tenture d’Alexandre en fait la preuve. On constate certaines similitudes entre l’ouvrage de Le Brun et la tenture de l’Histoire de Scipion l’Africain (datant de XVI siècle), créée par Jules Romain. En effet, Le Brun a repiqué plusieurs figures de la tenture de Romain. Il faut noter que les répétitions et les empruntes se sont enchaînées dans l’histoire de cette tenture. Pendant la première moitié du XVIII siècle, à l’atelier d’Aubusson, on a tissé une série de l’Histoire de Joseph. Malgré la thématique religieuse, on peut retrouver curieusement dans la pièce le Triomphe de Joseph un cavalier ressemblant à celui du Triomphe d’Alexandre. L’explication de cette similitude s’avère simple. À Aubusson, les cartonniers empruntaient des figures de diverses provenances pour constituer une même scène.

b. La tenture des Sujets de la Fable À la fin du règne de Louis XIV, la tenture des Sujets de la Fable a été une des tentures qui a lancé un nouveau goût, une nouvelle vision dans l’art décorative française. Avec ce tissage a apparu la volonté de se libérer des grands sujets historiques, de représenter des sujets plaisants. La couleur a pris désormais plus d’importance. On observe une nouvelle attraction pour des sujets exotiques, pour des décors avec une végétation luxuriante. Suite aux Sujets de la Fable, on a tissé la tenture des Indes, évoquant la nature exubérante de Brésil et de l’Amérique de Sud. Une autre tenture, Le Triomphe de Flore impressionne par ces riches arceaux de treillage fleuris. Ainsi on peut constater facilement l’abîme qui s’est creusé, en quelques décennies, entre les thématiques et le style des tapisseries de la cour française. La tapisserie perdait progressivement son caractère pompeux, élogieux afin de devenir un art aimable, léger ; un art du plaisir.

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La Manufacture des Gobelins à l’aube du XVIII siècle Malgré les pièces célèbres qu’elle a fournies, pendant plusieurs décennies, la Manufacture des Gobelins a été fermée en 1694. Suite aux bouleversements politiques et économiques, la manufacture était dans l’impossibilité de payer le personnel. Bien que Jans et Lefebvre aient proposé de réformer le tiers de leur total, cela n’a pas suffi si bien qu’on a congédié tous les ouvriers. L'interruption des travaux aux Gobelins a été de courte durée. Lorsque Jules Hardouin Mansard a été nommé, en 1699, surintendant des bâtiments, arts et manufactures du royaume, les Gobelins, retrouvèrent toute leur activité. Sous l'administration de Mansard, et sous celle du duc d'Antin, son successeur (1708 à 1736), à part les fruits de la guerre (tenture en 8 pièces, composé sur des tapisseries données à Mazarin par D. L. de Haro), nous retrouvons des modèles précédemment exécutés: l'histoire de Psyché, les Actes des apôtres; la tenture du Vatican, les arabesques de Raphaël, les mois, les saisons, les éléments, les enfants jardiniers, les batailles d'Alexandre et la tenture des Indes. La seule tenture fabriquée aux Gobelins sur de nouveaux modèles, pendant l'administration du duc d'Antin, fut celle des chasses de Louis XV, d'après Oudry, qu'on chargea d'en suivre l'exécution. À l’achèvement du règne de Louis XIV, en 1715, la Manufacture des Gobelins regroupait plus de 134 tentures rehaussées d’or et 181 tentures en laine et en soie. En une cinquantaine d’année, la manufacture est devenue la plus importante collection royale d’Europe. De plus, elle était comparée à une « grande école d’art décoratif », qui a réussi à donner au goût français une importante influence pendant plus d’un siècle, partout dans l’Europe.

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Guffrey Jules, Histoire de la tapisserie – depuis le Moyen Âge jusqu’à nos jours, Tours, 1886

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Tapisserie royale, http://www.tapisserie-royale.com/index.php?p_id=75

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