88
La vie comme expérience voyage dans les combles de la ville

La vie comme expérience

Embed Size (px)

DESCRIPTION

 

Citation preview

Page 1: La vie comme expérience

La vie comme expériencevoyage dans les combles de la ville

Page 2: La vie comme expérience
Page 3: La vie comme expérience

Image de couverture : Canaletto (Antonio Canal, dit), Caprice avec des ruines, Vers 1742, Londres, The Royal Collection, © HM Queen Elizabeth II 2012

Thibault Le Poncin.

Jean Panien.

2013

Page 4: La vie comme expérience
Page 5: La vie comme expérience

Introduction.......................................................

I / Explorations...................................................

II / Esthétique du déplacement..........................

III / Glanage........................................................

IV / Pharaonisme................................................

V / Epilogue........................................................

p.6

p.14

p.34

p.48

p.58

p.78

Page 6: La vie comme expérience
Page 7: La vie comme expérience
Page 8: La vie comme expérience
Page 9: La vie comme expérience

“Un voyage se passe de motif et se suffit à lui-même. Si on cède à une certaine dérive, si on laisse le voyage à un certain moment décider pour vous, à ce moment-là, on voyage véritablement parce qu’on s’expose. Ce n’est pas une morale du mérite, mais c’est davantage une morale de l’exposition.”

Nicolas Bouvier, Archive de l’Echappée belle, 25 juin 1990

Page 10: La vie comme expérience

10

Page 11: La vie comme expérience

11

Nous aimons les villes. Elles assouvissent notre curiosité, et nous procurent plaisir et sentiment d’aventure. Les territoires en marge, loins du contrôle et de la surveillance des centres-villes, sont naturellement devenus nos terrains de jeux favoris. Nous y développons un plaisir comparable à celui de l’exploration enfantine, en forêt ou à la campagne. Une exploration simple, sans but précis, sinon celui du jeu et de la collecte. Ces situations, d’abord spontanées, se sont au fur et à mesure chargées de sens et d’intensité, jusqu’à marquer notre regard sur la ville, sa pratique et ses potentialités.

En 2010, nous avons emménagé à Paris, dans le dix-neuvième arrondis-sement. Très vite, nos ballades nous ont amenés vers les territoires en friche de la petite ceinture de Paris.Le territoire qui s’offrait à nous semblait infini. Certains lieux exemplaires nous procurèrent de réels moments d’aventure, comme le tunnel sous le parc des Buttes-Chaumont, sombre et interminable.Mais pour la première fois, nos explorations se déroulaient différemment. Le parcours était tracé et linéaire. Le ballaste rendait la marche difficile, nous obligeant à faire de courtes enjambées pour poser le pied sur les traverses. Très vite nous fûmes découragés, et frustrés en pensant à l’im-mensité des terrains encore inconnus.Alors nous avons compris qu’il fallait intensifier l’expérience.

Inspirés par notre goût pour les machines et par plusieurs images qui ont nourri notre imaginaire - la draisine à moteur dans Stalker, Buster Keaton dans Le Mécano de la «General» et The Railrodder, le Pentacycle des artistes plasticiens Vincent Lamouroux et Raphaël Zarka - nous avons commencé à imaginer un outil adapté au territoire de la petite ceinture.Les rails nous offraient l’opportunité de concevoir un objet nous permettant de faciliter notre exploration pour découvrir de nouveaux territoires, mais aussi de transformer le déplacement en expérience ludique.

Page 12: La vie comme expérience
Page 13: La vie comme expérience

13

A partir de là, notre quotidien s’est orienté vers la fabrication de cette machine. L’évolution des dessins, la récupération des matériaux, les rencontres, les différents ateliers, les repérages, la fabrication, l’expérimentation, l’apprentissage de savoir-faire, les explorations, sont autant d’éléments qui font l’histoire de cette expérience.

Nous avons souhaité ici mettre en parallèle au récit de notre projet une série de références qui viennent l’enrichir et l’illustrer.En effet, si cette première démarche fut spontanée, nous nous sommes vite rendus compte qu’elle faisait écho à de nombreux projets de l’histoire de l’art et de l’architecture, qui, observés sous un certain angle, étaient un moyen différent de raconter notre histoire.

L’ensemble de ces “repères” n’est, bien sûr, pas exhaustif. Cette sélection nous permet de mettre en exergue et d’illustrer les événements marquants de notre aventure.

Le récit suivant est découpé en quatre grandes thématiques, chacune étant introduite par une présentation succinte de ces références, en gris. Un lecteur pressé pourra se contenter de lire les textes en noir pour comprendre l’essentiel de la genèse de notre machine.

Page 14: La vie comme expérience
Page 15: La vie comme expérience
Page 16: La vie comme expérience
Page 17: La vie comme expérience

“Notre idée centrale est celle de la construction de situations, c’est-à-dire la construction con-crète d’ambiances momentanées de la vie, et leur transformation en une qualité passionnelle supérieure.”

Guy Debord, Rapport sur la construction des situations.

Page 18: La vie comme expérience
Page 19: La vie comme expérience

19

INTERNATIONNALE SITUATIONNISTE

Dès ses débuts, l’Internationale Lettriste1 avait mis à son programme le dépassement de l’art: devenue indépendante, elle va donc s’attacher à faire de la vie elle-même une forme d’art, dans laquelle la créativité des individus pourra librement se déployer. C’est ce que les jeunes membres de l’IL appellent «construire des situations»: organiser les circonstances de la vie quotidienne de telle sorte que s’y multiplient les expériences les plus intenses. A l’été 1953, notamment grâce à Ivan Chtcheglov, les modalités de ce dépassement de l’art se font plus précises. Il faut non seulement s’essayer à des formes de vie alternatives, mais intervenir sur le milieu urbain qui en est le cadre. Car c’est l’ambiance d’un quartier, sa composition sociale et sa physionomie architecturale qui décident de l’existence qu’on y mène, des rencontres qui s’y produisent. Une méthode d’observation et une nouvelle discipline scientifique sont donc lancées par les membres de l’IL afin d’étudier ces phénomènes et de les transformer: ce sera respectivement la dérive et la psychogéographie.

La dérive se définit comme une technique du passage hâtif à travers des ambiances variées. Le concept de dérive est indissolublement lié à la reconnaissance d’effets de nature psychogéographique, et à l’affirmation d’un comportement ludique-constructif, ce qui l’oppose en tous points aux notions classiques de voyage et de promenade.

1L’Internationale Lettriste va poser les bases du mouvement situationniste après avoir fait scission avec le Lettrisme emmené par Isidore Isou.

Page 20: La vie comme expérience

Stalker, Images de la dérive autour de Rome, octobre 1995

Page 21: La vie comme expérience

21

STALKER

« Il y a [...] probablement dans toute culture, dans toute civilisation, des lieux réels, des lieux effectifs, des lieux qui sont dessinés dans l’institution même de la société, et qui sont des sortes de contre-emplacements, sortes d’utopies effectivement réalisées dans les quelles les emplacement réels, tous les emplacements réels que l’on peut trouver à l’intérieur de la culture sont à la fois représentés, contestés et inversés, des sortes de lieux qui sont hors de tous les lieux, bien que pourtant ils soient effectivement localisables. Ces lieux, parce qu’ils sont absolument autres que tous les emplacements qu’ils reflètent et dont ils parlent, je les appellerai, par opposition aux utopies, les hétérotopies.»

Michel Foucault, « des espaces autres », Dits et écrits (1954-1988)

Stalker se définit comme un “Laboratoire d’art urbain”. Ce groupe italien, formé à Rome en 1993, principalement par des architectes, a concentré son travail non pas sur la participation à l’édification des paysages urbains, mais sur le développement d’une réflexion sur leurs territoires, en pratiquant des “dérives urbaines”. Leur champ d’action constituait les zones non construites en marges des grandes villes (terrains vagues, friches), définies sous le terme de “Territoires Actuels”. Qualifiés “d’amnésies urbaines”, ces territoires de rebut, proches des hétérotopies de Foucault, sont oubliés et rayés des cartes mentales des habitants des villes parce que refoulés de la conscience. Une sorte de ville résiduelle, une cité inconsciente qui vit à côté du quotidien.

Leurs explorations de ces zones délaissées, loins des rues et des quartiers balisés, étaient un moyen de regarder le dépaysement à l’oeuvre. Ces paysages sont ainsi sollicités, non pour les représenter ou témoigner de leurs caractéristiques, mais pour en faire l’expérience et s’abandonner à leurs mouvements, à leurs fluctuations.

Pour les arpenteurs du laboratoire Stalker, il ne s’agit pas de construire l’architecture du devenir mais plutôt d’appartenir, de manière éphèmère, à la ville à l’oeuvre et à son mouvement.

Page 22: La vie comme expérience

Stalker, Planisfero Roma, octobre 1995

Page 23: La vie comme expérience

23

Dans cette optique, les membres de Stalker, réaliseront plusieurs marches dans la seconde moitié des années 90, comme le Tour de Rome, une marche de 70 km effectuée en 4 jours à travers terrains abandonnés, délaissés, et zones en transformation à la périphérie de la capitale italienne. Leur critique radicale consiste en une approche du contexte urbain dénuée de toute volonté de construction. Ne rien ajouter au territoire, ou n’y laisser aucun objet fabriqué ou monument durable est un moyen de se glisser dans ces zones en mouvement. Plus tard, ils réaliseront Sortir de Paris, un parcours de 40 km effectué en une journée, itinérant le long de la petite ceinture jusqu’au périphérique, puis les terrains vagues de Montreuil, les canaux, l’autoroute, et l’aéroport Charles de Gaulle. Ces marches sont une manière d’expérimenter le réel.

Véritables performances, ces traversées sont traduites plastiquement sous la forme de cartes, qui exposent la ville envisagée du point de vue des “Territoires Actuels”. Pour Planisfero Roma, la dérive autour de Rome est représentée sous la forme d’un planisphère, la ville répertoriée figurant en jaune, et les terrains vagues en bleu. Le parcours accompli est représenté par une ligne continue et des pointillés blancs. Cette carte n’est pas représentative, et ne cherche pas à être didactique ou lisible, mais plutôt à désorienter. C’est un diagramme d’une action, unique, comme la performance et l’expérience collective.

Page 24: La vie comme expérience
Page 25: La vie comme expérience

25

EXPLORATIONS

Arpenter les territoires urbains a d’abord été pour nous une activité personnelle et spontanée, dénuée de toute revendication ou démarche artistique. La complexité des villes et de leurs alentours représentent à nos yeux une évidente richesse de situations et d’opportunités. Particulièrement, les territoires en marge et délaissés constituent de véritables vecteurs de sensations. À la recherche d’expériences esthétiques ou sensorielles intenses, que nous ne pouvions plus trouver dans les musées, ces voyages dans les combles de la ville nous ont procuré sentiments de liberté et d’aventure.

Ces parcours nous ont permis à la fois de souligner l’existence de territoires, et de leur attribuer une valeur. Nous avons observé comment le vide ne cesse de se ramifier, dans les terrains vagues, les zones abandonnées infestées de ronces, les sentiers, les embûches, et les trous dans les grillages. Dans ces espaces qui se sont développés indépendamment des théories des architectes, nous avons fait une autre expérience de la ville. Il ne s’agit pas d’une somme d’espaces résiduels, mais d’une ville parallèle, aux dynamiques et aux structures propres, qui doit être également considérée comme une représentation de notre civilisation, plutôt q’un rebut.

Dans le numéro de Potlatch, la revue éditée par l’Internationale Situationniste, Guy Debord écrit : “Il est vain, d’autre part, de chercher à nos théories sur l’architecture ou la dérive d’autres mobiles que la passion du jeu.”

Et c’est bien de ça qu’il s’agit, le jeu. Avant toute prise de décision, avant toute réflexion, le goût du jeu est un point de départ, afin de se procurer des expériences quotidiennes et de donner à la vie une qualité passionnelle.

Page 26: La vie comme expérience
Page 27: La vie comme expérience

27

La petite ceinture de Paris s’est donc naturellement imposée comme un terrain de jeu idéal, en nous offrant une richesse de situations incomparable. Enjamber des barrières, traverser des tunnels sombres et des tranchées profondes, emprunter des passerelles, découvrir des trains abandonnés transformés en habitations de fortune, s’assoir au bord d’un pont enjambant la Seine, prendre de la hauteur,... Autant d’expériences qui nous ont permis de nourrir notre quotidien.

Une des plus grandes qualités de la petite ceinture consiste à proposer une expérience de lieu vide et abandonné, donc propice à un grand nombre de scénarios possibles, et une situation métropolitaine. On est à la fois à l’intérieur et en dehors de la ville. La plupart du temps, on est seuls, et cachés par la végétation ou perdus au fond d’un tunnel. Mais la ville se fait parfois plus présente, le territoire s’élargit, une passerelle enjambe la circulation, et des points de vue sont créés. Un étrange rapport s’opère, la vie urbaine est présente, mais distante, ce qui accentue la situation et l’esthétique de paysage en ruine. C’est à la fois un terrain d’activités, et un observatoire de la ville à l’oeuvre.

La qualité et la diversité des paysages offrent des situations intenses, de l’exotisme en plein coeur de Paris.

pages 28-29 : carte de repéragepages 30-31 : carte de compte rendu d’exploration, représentant le trajet effectué, les territoires explorés, et les vues depuis les rails de la petite ceinture. Les pointillés représentent les tunnels.pages 32-33 : paysages de la petite ceinture

Page 28: La vie comme expérience
Page 29: La vie comme expérience
Page 30: La vie comme expérience
Page 31: La vie comme expérience
Page 32: La vie comme expérience
Page 33: La vie comme expérience
Page 34: La vie comme expérience
Page 35: La vie comme expérience
Page 36: La vie comme expérience
Page 37: La vie comme expérience

“On traverse toujours l’horizon mais il demeure à distance.”

Robert Smithson, Incidents au cours d’un déplacement de miroirs dans le Yucatan.

Page 38: La vie comme expérience

Panamarenko - Essai du Knikkebeen, 1994

Page 39: La vie comme expérience

39

PANAMARENKO

Les oeuvres de Panamarenko sont une invitation au voyage, tant touristique que poétique. Cet artiste et inventeur belge basé à Anvers articule son travail autour de la production de machines, qui incitent à l’évasion vers des destinations inconnues, aux moyens incertains, de par le caractère artisanal de ses créations. Par ce biais, l’artiste ne propose pas une invitation à la passivité, mais plutôt la participation à une aventure.

Ses inventions, comme son premier “Avion” (1967, un vélo de 16 mètres de long équipé de deux hélices) ou le “Pepto Bismo” (1994, une série de petits moteurs à hélices destinés à être portés sur les épaules), dénotent toute une étrange fragilité. Mais ces machines ne sont pas une allégorie, ou un quelconque symbole artistique, ce sont des vraies machines qui doivent transporter son utilisateur. Elles sont dépourvues de toute tension tragique.

Cependant, après ce constat, il est légitime de s’interroger quant à la raison d’être de ces objets, qui, malgré la rigueur de conception et de calculs, peinent à fonctionner. Les avions ne volent qu’à quelques centimètres du sol, voire pas du tout, et la soucoupe volante ne flotte pas sur un invisible champ magnétique, les mêmes erreurs se répétant sans cesse année après année. On est donc en droit de se demander si ces dysfonctionnements sont volontaires, ou si la question sur la fonctionnalité des objets a vraiment un sens, et surtout : Que reste-t-il du rêve, après qu’un acte ait-été posé ? Cette ambivalence est primordiale. Les machines sont réelles, palpables, et en même temps suscitent le mythe et la frustration.

La philosophie de Panamarenko semble être un hymne au geste. Le geste comme indispensable prolongement d’une pensée, d’une réflexion.

Page 40: La vie comme expérience
Page 41: La vie comme expérience

41

PENTACYCLE

Le monorail Paris-Orléans fut un projet de voie expérimentale destinée à accueillir l’Aérotrain de l’ingénieur Bertin dans les années 70. Lors de ses premiers essais en 1974, l’Aérotrain atteignit la vitesse record de 430 km/h, et cette nouvelle ligne devait révolutionner le transport en France. Une impressionnante ligne droite faite de blocs de béton fut donc construite entre Paris et Orléans.

À peine achevé, le projet fut abandonné au profit d’une nouvelle ligne de train à grande vitesse, dont les rails seraient moins nuisibles pour le paysage que l’impressionnante structure en béton. Le monorail sera progressivement mis en marge de toute production industrielle. Véritable ruine moderne, le fragment subsistant aujourd’hui ne mène à rien. Il n’a ni départ, ni fin.

C’est sur cette utopie industrielle que les artistes Raphaël Zarka et Vincent Lamouroux ont développé leur projet de Pentacycle, sorte de vélo disproportionné destiné à circuler sur les dix-huit kilomètres de voie d’essai du monorail à l’abandon.

Le Pentacycle fonctionne comme un vélo, à la force des jambes, et sa raison d’être n’est pas la performance. «Ce qu’il perd en efficacité physique, il le gagne en efficacité suggestive, ou poétique»., et propose un parcours lent et contemplatif, déconnecté du sol.

Les deux artistes sont partis de la voie de l’Aérotrain, et non du véhicule. Cette structure est en même temps un espace clos sur lui-même et un objet dans l’espace. En réponse, leur Pentacycle n’est un véhicule que sur son rail. Ailleurs, ce n’est qu’un fragment.

Page 42: La vie comme expérience
Page 43: La vie comme expérience

43

THE RAILRODDER

The Railrodder est le dernier film muet de Buster Keaton. Ce court-métrage de 24 minutes financé par l’Office National du Film Canadien raconte l’histoire d’un Anglais en visite au Canada, qui va malgré lui traverser le pays d’Est en Ouest, embarqué dans une draisine à moteur qu’il a mis en marche par inadvertance. Au terme de nombreux gags et péripéties, il arrivera finalement à destination sain et sauf, aidé par un mystérieux coffre posé sur le véhicule, dans lequel il trouve tout ce dont il a besoin (manteau en peau d’ours, nourriture, longue vue, nécessaire à thé).

Même si ce film a des allures de film publicitaire, son esthétique simple donne à l’ensemble une ambiance très agréable. On suit avec plaisir et envie Buster Keaton glissant de paysages en paysages, entraîné sur sa draisine lancée à toute vitesse.

Le court-métrage se fait presque tout seul, grâce à la puissance cinématographique des rails. La draisine apparait sur presque tous les plans, et le film entier est un travelling de l’Atlantique au Pacifique.

L’arrivée à destination de Keaton, synonyme de conclusion, donne des envies d’aventures et de sensations.

Page 44: La vie comme expérience
Page 45: La vie comme expérience

45

ESTHÉTIQUE DU DÉPLACEMENT

La petite ceinture de Paris est un territoire au potentiel fort, dont la richesse de scénarios possibles exacerbe l’imagination. Outre d’évidentes qualités relevant de son caractère de paysage abandonné (esthétique, usages), la présence des rails renforce la singularité du lieu. À la fois continuum et dénominateur commun, cet élément s’étirant à perte de vue est une véritable invitation à l’évasion. Contrairement à nos explorations passées, la ligne du parcours était ici physiquement tracée. La liberté du déplacement ainsi limitée, l’usage du lieu a pris une tournure différente. Une exploration plus passive s’est imposée, nous étions pris dans les fluctuations du lieu, où aucun effort d’orientation ou de prise de décision n’était nécessaire.

Attirés par les machines, et probablement en mal d’aventure, ces qualités nous ont assez vite taquinés, jusqu’à nous lier définitivement en nous persuadant de construire un véhicule adapté au lieu. L’intérêt de cette machine résiderait autant dans son utilisation soncrète que imaginaire. Une machine à fiction. Pour la première fois lors de l’une de nos explorations, nous avons pressenti l’opportunité d’intensifier la situation. Le territoire étant relativement étendu, un tel outil nous permettrait en plus de partir à la découverte de nouveaux lieux. Sur les rails, le chemin était tracé, mais la destination inconnue.

Le caractère hautement mythologique du lieu (végétation envahissante, tranchées profondes, tunnels et bâtiments abandonnés) nous obligeait en quelque sorte à l’arpenter à la mesure de son intensité, en nous munissant d’un objet nous permettant à la fois le mouvement et la contemplation. Un art de la célébration du lieu.

Notre chariot n’est pas seulement un outil de compréhension du territoire. Dès le départ, il a été conçu et imaginé comme un objet ludique, dont la simple utilisation suffirait à procurer du plaisir. Objet autonome, le déplacement se fait grâce à un effort physique, multiplié grâce à un système d’engrenages. Le mouvement de la machine devient ainsi palpable, et suffit à créer la satisfaction.

Un grand mât planté dans la machine, actionné dans un mouvement de va-et-vient, lui donne une allure singulière, et en fait un objet reconnaissable.

Page 46: La vie comme expérience
Page 47: La vie comme expérience
Page 48: La vie comme expérience
Page 49: La vie comme expérience
Page 50: La vie comme expérience
Page 51: La vie comme expérience

Des glaneuses, Jean-François Millet

Page 52: La vie comme expérience

Magnetic Shoes, Francis Alÿs, 1994

Page 53: La vie comme expérience

53

MAGNETIC SHOES

Francis Alÿs est un artiste belge, né en 1959 à Anvers, installé à Mexico depuis le milieu des années 1980. Quasiment toute son oeuvre est constitué à partir de son positionnement de piéton dans la ville. Il accomplit des interventions dans l’espace public des villes, principalement dans les grandes villes actuelles, qui ont une dimension de mégalopole et de ville-monde, où se rencontrent d’une part des zones en transition (ou animées par une certaine anarchie) et d’autre part les grands dispositifs de contrôle de flux de personnes et d’informations, où dialoguent le désordre et l’emprise, qui sont un champ de flux et d’énergies contradictoires et interminables. Il intervient d’abord à Mexico, mais aussi à Istanbul, Los Angeles, Sao Paulo, New York ou dans d’autres villes encore, soulignant ainsi le caractère mondial de ce type de développement urbain. Ses actions sont généralement enregistrées, documentées et médiatisées par la vidéo et la photographie.

The Collector (1991-1992), est une série de marches, documentées par des photographies en noir et blanc, au cours desquelles Francis Alÿs a tiré derrière lui un petit chariot constitué d’un aimant sur roulettes dans les rues de Mexico. La manipulation de ce petit chariot nécessite une disponibilité à la rue, une oisiveté, et le fait que la marche soit une activité en soi, ce n’est pas un objet que l’on peut employer sans se rendre disponible pour une marche lente et oisive. Francis Alÿs se positionne en piéton oisif, en touriste à résidence, qui depuis cette place peut produire des actions inédites et de petits accidents modestes, permis par sa situation soustraite aux impératifs formulés par les nécessités économiques et les attentes des instances politiques.

Dans The Collector, comme avec Magnetic Shoes (une marche effectuée par Alÿs en 1994 à La Havane, alors qu’il porte aux pieds des chaussures pourvues de semelles aimantées), l’artiste va récupérer les objets métalliques laissés au sol, se plaçant très explicitement dans la position du chiffonnier, en plus de celle du flâneur, c’est-à-dire de celui qui réemploie, recycle et réutilise ce qui a été abandonné, a été délaissé et mis au rebut, ce dont – typiquement et de fait – la société ne veut plus et ne sait plus quoi faire, ce qu’elle a usé.

Page 54: La vie comme expérience

Penske Work Project, Gabriel Orozco, 1998.

Page 55: La vie comme expérience

55

OROZCO

Gabriel Orozco est un artiste contemporain mexicain, né en 1962. Détaché du travail de l’atelier, il traite dans de nombreuses oeuvres la question du déplacement et de la création in situ. Cette démarche l’amène souvent à la création d’oeuvres minimalistes et spontanées à partir de matériaux révélés par ses actions.

Dans une conférence donnée à Mexico au début de 2001, Orozco fait référence à la page d’un des ses carnets où il écrivait: «L’artiste est d’abord, et avant tout, un consommateur. Les matériaux qu’il consomme et la manière dont il les consomme influent sur l’évolution de son travail. Ce système de consommation est la première technique que l’artiste doit définir. Ayant abandonnée mon atelier, je suis devenu un consommateur de tout ce qui se présente.»

En été 1998, Orozco entame à New-York son Penske Work Project. Il loue une camionette de la société Penske et, durant un mois, parcourt New-York, accompagné d’une petite équipe comprenant notamment Juan Carlos Martin, jeune cinéaste mexicain qui entreprend de le suivre partout pour réaliser un film sur sa pratique quotidienne. Orozco s’arrête à toutes les bennes de déchets pour y collecter des matériaux et exécuter une oeuvre sur place, qu’il charge ensuite dans la camionnette jusqu’à sa livraison finale dans la galerie. Beaucoup de ces déchets sont des matériaux de démolition ou de construction, ou des rebuts industriels: on y trouve des seaux en plastique, d’énormes ventilateurs industriels, de la ferraille, des pans de cloison.

Orozco décrit le processus en ces termes: « C’est une sorte de jeu de conduire cette camionnette dans la ville, et je dois faire une oeuvre avec ce que je trouve, je dois trouver une solution tout de suite, sur place. Je travaille donc pendant un petit moment, parfois trente minutes, parfois deux heures, jusqu’à ce qu’il me vienne un résultat qui me convient, qui me paraît abouti. Alors, je prends un Polaroid pour être certain de m’en souvenir, et j’embarque les matériaux dans la cammionnette. Et je poursuis mon chemin.»

Page 56: La vie comme expérience
Page 57: La vie comme expérience

57

GLANAGE

Le projet a été lancé, pensé et réalisé sans budget. Un important travail de recherches de matériaux a conferé au projet son identité, son esthétique et déterminé ses mécanismes.

Les plans, les formes évoluent au grès des trouvailles. Une première version en tube d’acier d’échaffaudage laisse place à une seconde en bois: les derniers bastaings ramassés, une fois dégauchis et rabottés, nous ferons la structure de l’engin...Ce glanage est devenue pendant un temps une activité à part entière. Véritable projet dans le projet, cette nouvelle pratique de la ville à la recherche de matériaux est devenue dérive, au rythme du chariot sncf et du poids des objets accumulés. Cette pratique obsédante nous a forgé un regard affuté sur la ville et la matière qu’elle nous offre. Découragés parfois par l’inertie qu’elle confère au projet -six mois pour trouver quatre roues-, cette démarche nous pousse à l’inventivité et teste notre réactivité.

Chaque trouvaille est une petite victoire qui marque un pas de plus dans l’avancement du projet, donne sa valeur à l’objet et son sens à l’idée de sa mise en oeuvre.Chaque nouveau matériau nous pousse à nous adapter à de nouvelles techniques et à nous familiariser aux outils de sa transformation.

Page 58: La vie comme expérience
Page 59: La vie comme expérience
Page 60: La vie comme expérience
Page 61: La vie comme expérience

“Il a fallu une époque de profonde décadence de la vie sociale pour que l’art soit enfermé dans les cages des musées. Maintenant, il a pour champ d’action la vie entière.”

Taraboukine, Moscou, 1922

Page 62: La vie comme expérience
Page 63: La vie comme expérience

63

PALAIS IDÉAL

“Le facteur Cheval est psychogéographique dans l’architecture.”Guy Debord, Potlatch n°2, 29 juin 1954

Plus de trente ans de la vie du Facteur (Ferdinand) Cheval lui auront été nécessaires à l’édification de son Palais Idéal à Hauterives, symbole involontaire de l’architecture naïve. Ce Palais baroque, qui détourne les formes de divers monuments exotiques et d’une végétation de pierre, ne sert qu’à se perdre.

Issu d’un milieu profondément rural, sans aucune formation artisanale ou architecturale, et à peine lettré, Ferdinand Cheval a compulsivement bâti un songe, celui d’un “Palais Féerique”, imaginé lors de ses longues tournées à pied dans les environs de Hauterives. C’est une pierre à la forme étrange qui fera basculer son rêve dans la réalité, après l’avoir fait chuté au cours de l’une de ses nombreuses randonnées. Cette pierre, puis d’autres ensuite, collectées les semaines qui suivirent, ont contribué à mettre en forme le palais, qui se nourrira plus tard de références plus exotiques, vraisemblablement puisées dans des cartes postales.

La suite est le récit d’un homme dépassé par son entreprise, qui travaillera sans relâche jusqu’à sa mort avec une incroyable obstination, révélatrice d’une étrange passion restée informulée. Naïvement, le Facteur Cheval aura néanmoins réussi à créer une véritable architecture de dépaysement.

Page 64: La vie comme expérience
Page 65: La vie comme expérience

65

CATEDRAL

En 1963, Justo Gallego Martinez a entamé seul les fondations d’une cathédrale à Mejorada del Campo, une petite ville à proximité de Madrid. 50 ans plus tard, à l’âge de 88 ans, il la construit encore, chaque jour, sauf le dimanche. Son rêve le plus cher est de terminer son oeuvre pour en faire don à l’église catholique.

Justo Gallego est chrétien, sa foi est inébranlable, il a toujours voulu consacrer sa vie au Créateur. C’est pour cette raison qu’il a décidé de devenir moine à l’âge de 27 ans. Il passera 8 années dans le monastère de Santa Maria, d’où il sera exclu parce qu’atteint de tuberculose. Justo y était très apprécié, mais avait la réputation de travailler très dur, et de jeûner trop, au point que la majorité de ses frères se faisaient du souci pour sa santé.

Déçu par l’échec de ce premier chemin spirituel, Justo Gallego se lance dans une entreprise à la mesure de sa foi, une cathédrale, dont la construction représente pour lui une évasion, voire une catharsis pour l’idéal qu’il ne put remplir en tant que moine. Sans aucun plan, ni aucune expérience de construction, il s’inspire de différents livres sur les cathédrales et autres édifices de référénce pour donner naissance à son ouvrage.

Durant ces années, Justo est toujours allé de l’avant. Même si les choses ne se déroulaient pas comme prévu, ou n’étaient pas réalisées parfaitement, il s’en accomodait. Ceci n’est pas l’oeuvre d’un perfectionniste, mais d’un obstiné, dont les mots résument parfaitement sa vision: “L’Homme est capable de bien des choses. Tout le monde est capable de bien des choses. Pour cela, il faut bien sûr avoir un idéal.”

Son histoire et sa façon de penser l’acte de construire, passionnée et d’une extrême simplicité, peut être inspirante pour quiconque soucieux de mener à bien une entreprise personnelle.

Page 66: La vie comme expérience
Page 67: La vie comme expérience

67

LE RETOUR D’AFRIQUE

Ce film réalisé en 1973 par Alain Tanner raconte l’histoire de deux jeunes suisses, Vincent et Françoise, mariés et Genevois. Lui est horticulteur, elle secrétaire, et peu à peu l’ennui et le poids de la routine commencent à se faire sentir. Ils décident alors de vendre tout ce qu’ils possèdent, et commencent à planifier jusque dans les moindres détails un changement de vie radical, un départ en Afrique, où un ami basé en Algérie leur promet du travail.

Cette perspective d’aventure et de nouveautés les réjouit, et par les mots et l’imagination, le jeune couple effectue déjà leur voyage dans les jours qui précèdent leur grand départ, synonyme de passage à l’acte. Au moment de partir, Vincent et Françoise reçoivent un télégramme leur demandant d’annuler leur départ. Tout s’écroule. Ils décident pourtant de poursuivre leur rêve de fuite en vivant caché des autres dans l’appartement vide, ne sortant que la nuit pour subsister à leus besoins., quelque peu envahis par un sentiment de honte. Le film relate cette expérience hors du commun, dans un univers à la fois familier et étranger.

Par ce retournement, Alain Tanner montre l’importance du chemin parcouru, plutôt que la destination, et la force du passage à l’acte, ce moment où l’action spontanée prend le pas sur la réflexion et l’anticipation.

Le film s’ouvre d’ailleurs sur une phrase en voix off:

«Dire des mots peut être un acte en lui-même, cela peut aussi être un substitut à l’action.»

Page 68: La vie comme expérience
Page 69: La vie comme expérience

69

PHARAONISME

Au départ, la volonté de construire une draisine n’était rien de plus qu’une idée, lancée parmi d’autres lors de l’une de nos marches, qui ont à chaque fois cette capacité d’exacerber notre imagination. La raison pour laquelle cette idée particulière, plus qu’une autre, a trouvé une issue concrète nous échappe encore partiellement. Mais un premier dessin a contribué à faire basculer cette idée dans la réalité, entraînant la juste dose d’envie nécessaire au passage à l’acte.

Au fur et à mesure, suite à de nouveaux dessins plus précis et à la collecte de matériaux, le projet devenait de plus en plus concret, jusqu’à devenir inévitable. Ce projet a débuté sur un ton plutôt naïf, mais nous étions sans le savoir en train de jeter les bases d’une entreprise considérable.

Sans aucune compétence mécanique particulière, sinon un goût pour le travail manuel et la fabrication d’objets, nous nous sommes donc lancés dans cette aventure confiants, et impatients du résultat et des sensations que cette machine allait nous procurer. Mais de nombreux obstacles se mirent en travers de notre chemin. Manque de logistique et de budget, difficulté à trouver et stocker des matériaux, quête d’outils et d’espaces de travail, apprentissage de nouveaux savoir-faire, autant d’éléments qui ont transformé ce projet a priori simple en une entreprise longue et chargée de sens, dont le poids allait constituer à la fois un référent et un enseignement pour nos futurs projets.

Loins de nous décourager, nous avons vite compris que le propre du projet allait être sa réalisation. Le but, le résultat du travail n’étant plus l’objet lui-même, mais bien l’expérience et la matière accumulées au cours de ces quelques mois d’expérimentations.

Après plusieurs échecs, et au terme d’une somme considérable d’efforts, une première version bien qu’imparfaite nous permit enfin de nous lancer sur les rails, non sans mal, à la force des bras. Ce fut une expérience réjouissante, et nous avons ainsi pu imaginer de possibles scénarios futurs.

pages suivantes : chronologie des différentes versions du chariot

Page 70: La vie comme expérience
Page 71: La vie comme expérience
Page 72: La vie comme expérience
Page 73: La vie comme expérience
Page 74: La vie comme expérience
Page 75: La vie comme expérience
Page 76: La vie comme expérience

76

Page 77: La vie comme expérience

77

Page 78: La vie comme expérience
Page 79: La vie comme expérience
Page 80: La vie comme expérience
Page 81: La vie comme expérience

81

LA SUITE...

Les imprévisibles aventures et mésaventures de la mise en oeuvre du projet nous ont, pour l’instant, éloignés de nos premières intentions d’explorations et de notre quête d’émotions.

La suite s’exprime ici en quelques croquis.Nous rêvons encore à la traversée des tunnels à toute vitesse sous la lumière aveuglante de feux de détresse, à des déambulations/projections sur les décors de la petite-ceinture,...

Nous jouerons à Mad Max en greffant un moteur au premier châssis, nous installerons un belvédère pour changer les points de vue d’observation et amplifier les sensations,...

Page 82: La vie comme expérience

82

Page 83: La vie comme expérience

83

Page 84: La vie comme expérience

84

FILMS

El loco de la Catedral, James Rogan, avec Justo Gallego, Espagne / Royaume-Uni, 2009, Documentaire, 20 min. Film en ligne: < https://vimeo.com/6311987 >

Pentacycle, Raphaël Zarka, France, 2002, 7 min. Film en ligne : < http://www.dailymotion.com/video/x7pwe9_pentacycle_creation >

Railrodder (the), Gerald Potterton, avec Buster Keaton, Canada, 1965, Comédie, 25 min. Film en ligne : < https://www.nfb.ca/film/railrodder/ >

Retour d’Afrique (le), Alain Tanner, avec François Marthouret et Josée Destoop, France/Suisse, 1973, Comédie dramatique, 105 min.

Page 85: La vie comme expérience

85

BIBLIOGRAPHIE

LIVRES

ANDREOTTI, Libero, Le grand jeu à venir, textes situationnistes sur la ville, Editions de La Villette, collection Textes fondamentaux modernes, 2008, 239 pages.

BAQUÉ, Dominique, Histoires d’ailleurs : artistes et penseurs de l’itinérance, éditons du Regard, 2006, 266 pages.

CARERI, Francesco, Walkscapes : walking as an aesthetic practice, Gustavo Gili (GG), Landscape series, 2002, 203 pages.

COLLECTIFS, Guy Debord présente Potlatch: (1954-1957), Gallimard, Folio, 1996, 304 pages.

DAVILA, Thierry, Marcher, Créer. Déplacements, flâneries, dérives dans l’art de la fin du XXe siècle., Éditions du Regard , collection Arts plastiques, 2007, 191 pages.

DEBORD, Guy, Rapport sur la construction des situations, Mille et une nuits, La Petite Collection, 2000, 62 pages.

DIDI-HUBERMAN, Georges, L’empreinte, centre Georges Pompidou, collection Procédures, 1997, 336 pages.

JOUVE, Jean-Pierre, Le Palais idéal du Facteur Cheval : quand le songe devient la réalité, éditions du Moniteur, collection Les bâtisseurs inspirés, 1991, 303 pages.

LARIZZA, Olivier, La cathédrale, Orizons, collection Littératures, 2010, 202 pages.

LEEN F., et VANDEPITTE F., Panamarenko : La rétrospective !, Ludion, 2005, 236 pages.

MARCOLINI, Patrick, Le mouvement situationniste : Une histoire intellectuelle, L’Échapée, 2012, 337 pages.

MACEL C. et TEMKIN A., Gabriel Orozco, Paris (DL), 2010, 272 pages.

MCDONOUGH, Tom, The Situationists and the City, Verso, 2010, 288 pages.

STALKER, à travers les territoires actuels, éditions Jean-Michel Place, collection In visu, in situ, 2000, 50 pages.

VON SCHAEWEN D. et MAIZELS J. , Mondes imaginaires , Köln, 1999, 335 pages.

WEHR, Anne, Francis Alÿs : the modern procession, Public Art Found, 2003, 112 pages.

Page 86: La vie comme expérience

petiteceinture.tumblr.com

Page 87: La vie comme expérience

“La formule pour renverser le monde, nous ne l’avons pas cherchée dans les livres mais en errant”

Guy Debord, in girum imus nocte et consumir igni, 1978

Page 88: La vie comme expérience