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1 Jérôme Neutres Président du comité scientifique et culturel de la Villa du temps retrouvé La Villa du temps retrouvé Document intermédiaire Projet scientifique et culturel I- Le contexte : la Villa Bon-Abri, Cabourg et les fantômes de Proust II- Le projet : une maison proustienne qui évoque l’âge d’or de Cabourg et de la Côte Fleurie, son ambiance et sa société à la Belle Epoque III- Objectifs et moyens : un espace muséographique toujours renouvelé, mélange de period rooms et d’immersion audiovisuelle, en partenariat avec un réseau de musées et de collections IV- Un lieu de culture et de rêverie, à destination de tous les publics

La Villa du temps retrouvé...Le site de l’espace culturel Bruno Coquatrix à Cabourg présente l’avantage d’être un établissement connu du territoirerégional, aux normes

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Jérôme Neutres Président du comité scientifique et culturel de la Villa du temps retrouvé

La Villa du temps retrouvé

Document intermédiaire Projet scientifique et culturel

I- Le contexte : la Villa Bon-Abri, Cabourg et les fantômes de Proust II- Le projet : une maison proustienne qui évoque l’âge d’or de Cabourg et

de la Côte Fleurie, son ambiance et sa société à la Belle Epoque III- Objectifs et moyens : un espace muséographique toujours renouvelé,

mélange de period rooms et d’immersion audiovisuelle, en partenariat avec un réseau de musées et de collections

IV- Un lieu de culture et de rêverie, à destination de tous les publics

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V- Un lieu inscrit dans le rayonnement culturel et touristique du territoire I- Le contexte : redéfinir les missions de la Villa Bon-Abri ;

renforcer l’infrastructure culturelle de Cabourg et de sa région ; donner sens aux fantômes de Proust

I-1 Offrir aux visiteurs de Cabourg une infrastructure culturelle de qualité muséale, et une plateforme d’informations et d’histoire(s) sur l’âge d’or de la ville et de sa région à la Belle Epoque, avec Marcel Proust comme figure tutélaire.

La Ville de Cabourg a souhaité développer l’idée d’un musée consacré à la culture de la Belle Epoque et à l’imaginaire de Marcel Proust, qui serait installé dans les murs de l’établissement public de la Villa Bon-Abri (aujourd’hui Espace culturel Bruno Coquatrix) et devrait ouvrir ses portes en novembre 2019, date anniversaire de l’obtention du Prix Goncourt par Marcel Proust pour A l’ombre des jeunes filles en fleurs, chapitre d’A la recherche du temps perdu dont une partie évoque la région de Cabourg au début du XXème siècle.

La population locale et la clientèle touristique de Cabourg et de sa région, constituent des catégories de publics à la fois déjà sensibles aux thématiques de la Belle Epoque et de l’univers proustien (thèmes fondamentaux et récurrents dans la vie et la culture locales, comme le montrent les enseignes de restaurants et centres commerciaux…), et en demande potentielle d’activités culturelles, encore peu nombreuses.Le projet de la « Villa du temps retrouvé » diversifiera l’offre d’équipements culturels de la région, et proposera un objet muséal inédit au plan national, qui ne sera pas vraiment un « musée » mais plutôt une « maison d’œuvres », qui présentera des contenus de qualité muséale dans une configuration plus vivante et spectaculaire. L’institution se distinguera aussi par son sujet, peu traité ailleurs dans son ensemble : la double thématique de la côte normande à la Belle Epoque (âge d’or de la région, et espace-temps où se retrouvent toutes les cultures de la Belle Epoque) et de l’œuvre de Marcel Proust. En effet, la thématique Marcel Proust – Belle Epoque dans le paysage muséal national et international (cf. Analyse marketing du projet de Musée Belle Epoque Marcel Proust à Cabourg, Ville de Cabourg)ne sont pas très exploitées au sein des musées nationaux et internationaux.

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La seule institution dédiée à Marcel Proust est la Maison de Tante Léonie à Illiers-Combray, ville qui, elle aussi, possède un fort lien historique avec l’auteur.On note que dans la région normande, aucune structure ne propose d’exposition ou d’immersion au cœur de ces thématiques. A Paris, quelques sites proposent des aperçus de la capitale à la Belle Epoque. La Belle Epoque est aussi un peu représentée à l’international - un musée en Belgique et des expositions temporaires au MET, au Musée des Beaux-Arts de Montréal, en Italie.

Le site de l’espace culturel Bruno Coquatrix à Cabourg présente l’avantage d’être un établissement connu du territoire régional, aux normes de sécurité et d’accessibilité nécessaire à l’accueil du public ; et d’être aussi une demeure d’intérêt patrimonial, d’une taille propice à accueillir un projet muséal de qualité.

I-2 Le schéma de rénovation et d’aménagement de la Villa Bon-Abri : d’un centre polyvalent à une maison-musée :

La Villa Bon-Abri a été édifiée dans les années 1860. L’édifice présente à l’origine la physionomie d’une maison de maître s’organisant autour d’un corps de logis orienté au sud, augmenté de communs, à l’est et au nord. La Fondation du Patrimoine rappelle le caractère architectural particulier du bâtiment. Constitué d’un appareillage de briques rouges et ocres, son avant-corps central polygonal relève de la typologie des maisons de plaisance. Elle est actuellement recouverte d’un enduit qui reprend les motifs décoratifs et lucarnes à la normande. Elle est complétée d’un avant-corps polygonal en pierre de Caen, édifié 14 ans plus tard. De 1948 à 1963, elle devient une pension de famille et porte le nom de « Villa Bon Abri ». Une façade arrière est créée sur le parc, enfermant une cour, couverte ultérieurement. L’édifice est racheté par l’Etat, en 1963, puis par la ville de Cabourg entre 1974 et 1975, pour abriter le Centre National des Villes Jumelées, appelé « Maison des Cités Unies ». Entre 1998 et 2006, son intérieur est entièrement réhabilité et aménagé en espace culturel accueillant des concerts, des conférences et des expositions, ainsi que des associations tels que l’école de musique, l’école de danse et de yoga. En 2006, l’espace culturel est inauguré, en hommage à Bruno Coquatrix, Maire de Cabourg de 1971 à 1979.

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Le projet de rénovation et d’aménagement de la villa Bon Abri consiste à transformer l’actuel centre polyvalent en « maison-musée » aux normes de contrôle climatique en vigueur dans les musées, notamment. Nous renvoyons sur ce sujet à l’étude ci-jointe de Bruno Donzet.

Cette « maison-musée », par ses qualités architecturales, permettra au visiteur une expérience inédite, à la recherche du Cabourg de 1900, en contemplant « dans leurs murs » des œuvres, des objets, des contenus littéraires et historiques, de cette époque.

I-3 : Donner corps et sens au fantôme de Proust, figure tutélaire de Cabourg

« Ayant appris qu'il y avait, à Cabourg, un hôtel, le plus confortable de toute la côte, j'y suis allé. Depuis que je suis ici, je peux me lever et sortir tous les jours, ce qui ne m'était pas arrivé depuis six ans. » Voilà ce qu'écrit Marcel Proust à Mme de Caraman-Chimay durant l'été 1907, qui est également l'année où il commence l'écriture d’A la recherche du temps perdu. Selon Jean-Yves Tadié, biographe et exégète de Marcel Proust, « c’est au Grand Hôtel que tout commence ». Marcel Proust a résidé dans la station balnéaire sept étés de suite, entre 1907 et 1914. A l’Ombre des jeunes filles en fleurs, 1919, son premier grand succès (Prix Goncourt), a en partie pour cadre de narration le site imaginaire de Balbec, qui est la synthèse proustienne de la région de la Côte Fleurie. Balbec est le nom de lieu le plus cité dans l'œuvre de Marcel Proust.

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J.-E. Blanche, Portrait de Marcel Proust

Balbec est une ville imaginaire décrite comme une station balnéaire située en Normandie, qui ressemble à Cabourg et s’en inspire en partie. On y compte entre autres un grand hôtel, une digue à la mer et la résidence du peintre Elstir. « Je demandais à Brichot s’il savait ce que signifiait Balbec. « Balbec est probablement une corruption de Dalbec, me dit-il. [...] Or donc, continua Brichot, bec en normand est ruisseau [...] C’est la forme normande du germain Bach [...]. Quant à dal reprit Brichot, c’est une forme de Thal, vallée [...]. » »1

Marcel Proust et la thématique de la Belle Epoque constituent des sujets historiquement liés à l’image de la ville et qui contribuent à sa renommée internationale. Le sujet s’étend à toute la région : Proust en Normandie, c’est aussi la cathédrale de Bayeux, celle de Caen, l’église de Dives; les lieux où il séjourna : le manoir des Frémonts et les Roches-Noires à Trouville-sur-Mer et le Grand-Hôtel à Cabourg ; son ami et portraitiste Jacques-Emile Blanche vit à Offranville, après avoir longtemps séjourné à Dieppe ; c’est aussi Honfleur où Boudin sut rendre dans ses tableaux la beauté des ciels normands que Proust décrit.

1 M. Proust, À la recherche du temps perdu, volume III de l’édition de la Pléiade, 1988, page 327 et 329 (Sodome et Gomorrhe III, II).

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II- Le projet : une maison proustienne qui évoque l’âge d’or de Cabourg et de la Côte Fleurie, son ambiance et sa société à la Belle Epoque

II-1 un musée proustien, davantage qu’un musée sur Proust La Villa du Temps retrouvé, projet muséal de la Ville de Cabourg, proposera

au visiteur l’expérience d’un voyage dans le temps, pour découvrir et comprendre l’âge d’or de la côte Fleurie à la Belle-Epoque. Marcel Proust, qui séjourna à Cabourg les étés de 1907 à 1914 où il écrivit des pages fondamentales d’A la recherche du temps perdu, en sera la figure tutélaire, guide et inspirateur des contenus et de l’ambiance du musée.

Un musée non pas sur Proust, mais avec Proust. Marcel Proust est la figure tutélaire du musée, sa clé d’entrée et le prisme à travers lequel on propose de traiter de la région de Cabourg et de la côte Fleurie à la belle époque. “Dans le nom de Balbec, comme dans le verre grossissant de ces porte-plume qu’on achète aux bains de mer, j’apercevais des vagues soulevées autour d’une église de style persan...”2

J.-E. Blanche, Rouleaux près de Dieppe, coll. particulière.

« Balbec » est pour Proust un espace-temps symbolique de la Belle-Epoque,

2 Marcel Proust, A la recherche du temps perdu, Du côté de chez Swann , Nom de pays: le nom (partie 3)

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c’est-à-dire d’un temps entre deux mondes, entre deux siècles, empreint de cette nostalgie du temps perdu qui se construit pendant cette période de transition : « On y sent la véritable fin de la terre française, européenne, de la Terre antique. Et c’est le dernier campement de pêcheurs, pareils à tous les pêcheurs qui ont vécu depuis le commencement du monde, en face du royaume éternel des brouillards de la mer et des ombres. » C’est en ce sens, aussi, que Marcel Proust a immortalisé le Cabourg du début du siècle dernier en renommant la station balnéaire du nom de Balbec. Dans A l'ombre des jeunes filles en fleurs, notamment, l'auteur dépeint la vie qui occupe le Grand Hôtel et la promenade qui longe la plage, qui est l’espace parfait pour « radiographier » la société de l’époque et ses mutations, et la disparition d’un certain monde. « Cette salle à manger de Balbec, apparaissait nue, emplie de soleil vert comme l'eau d'une piscine. A quelques mètres de celle-ci, la marée pleine et le grand jour élevaient, comme devant la cité céleste, un rempart indestructible et mobile d'émeraude et d'or… »

II-2 Cabourg à la Belle Epoque : la radiographie d’une société entre deux

siècles, et l’invention du tourisme balnéaire

A l’image de l’Angleterre, la future Côte fleurie prend son essor à Trouville dès la fin du XIX° siècle. Avec l’arrivée du chemin de fer, « outil magique », Cabourg à son tour devient une station balnéaire prisée. L’accueil d’une clientèle aisée le temps de l’été nécessite l’ouverture de nouveaux équipements. Les estivants débarquent des trains parisiens dans des gares nouvellement construites et logent dans des hôtels de luxe. Dans son tableau « L’Hôtel des Roches Noires à Trouville », Monet représente la façade imposante et majestueuse de ce palace et la chaussée sur laquelle se promènent de riches vacanciers sous des drapeaux claquant au vent. Les établissements de divertissement se multiplient. Des casinos au style parfois flamboyant accueillent la haute société. Le casino de Dieppe est construit dans un style mauresque. Une salle de spectacle à la façade décorée d’arabesques, l’Eden Casino, est associée au casino de Trouville. Ces casinos, temples du jeu (billard, cartes, baccara), offrent des spectacles divers (concerts, bals, opérettes) à côté des salles de restaurant. Dans son tableau « Concert au casino de Deauville » en 1865, Boudin représente les reines de la mode de l’époque issues de la bourgeoisie et de l’aristocratie dans une ambiance de fête impériale.

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La Belle Epoque est caractérisée par un développement industriel et technologique sans précédent. Par l’émergence du cinéma et de la photographie, mais aussi de la musique mécanique et de la communication technique.

Le rapport à la Belle Epoque est proustien par définition, puisque la « Belle Epoque », concept aux dates très flexibles (de 1900 à 1914 dans son cadre le plus étroit ; de 1870 à 1930 dans son spectre le plus large) est en fait une remémoration, une rétrospection inventée par les historiens dans les années 1940 pour évoquer avec souvent nostalgie ce « temps perdu », période d’avancées technologiques et industrielles, et de développements culturels extraordinaires, qui a disparu avec la Première Guerre Mondiale.

La Belle Epoque est un temps suspendu entre deux siècles, entre deux guerres, entre deux mondes, un temps déjà moderne mais pas encore contemporain, qui avait Paris pour centre du monde l’hiver, et la côte Fleurie normande pour centre des étés. C’est à un voyage sous une forme inédite dans ce monde qu’invite la Villa du temps retrouvé.

Enfin cette époque nous parle beaucoup de la nôtre, en ce qu’elle en livre les prémices. La vitesse, le règne mécanique, … La Belle Epoque, c’est encore aujourd’hui ? La salle d’expositions temporaires pourra être le lieu d’une mise en perspective de la Belle Epoque avec notre monde contemporain, à travers le regard d’artistes et de créateurs qui s’inscrivent dans un rapport à cette histoire.

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II-3 La rencontre avec des artistes et des œuvres de premier plan, injustement oubliés ou négligés

Le visiteur, à travers un parcours permanent, sera plongé dans le décor d’une

villa bourgeoise de Cabourg à la Belle Epoque, dont l’atmosphère sera évoquée par une scénographie qui comprendra un mobilier, une décoration, des objets, des ambiances sonores, musicales et olfactives, et une sélection de tableaux marquants de cette période.

La vie extérieure de Cabourg et de la côte Fleurie à l’époque de l’invention des bains de mer (la région qui constitue le « Balbec » de Proust), sera évoquée par un dispositif audiovisuel immersif composé à partir de films d’actualités de l’époque, d’archives photographiques et films, d’autochromes, et de fictions historiques tournées dans la région.

Les salons entièrement décorés à la mode de la Belle Epoque présenteront un accrochage des peintres les plus importants de la période, avec des œuvres sélectionnées selon leur pertinence par rapport à l’histoire de la région, ou leur familiarité avec l’univers de Marcel Proust. On pourra trouver ainsi des portraits de personnalités qui ont fréquenté la région (et ont inspiré certains personnages de Proust), peints par Jacques-Emile Blanche, Albert Besnard, Louise Breslau, Antonio de la Gandara ; mais aussi des paysages de la côte peints par Ernest-Ange Duez, Berthe Morisot, ou des impressionnistes. L’enjeu : donner à voir les visages des imaginaires et de la culture des années 1900. Ces tableaux proviendront de prêts négociés avec des musées et des collections privées, avec une rotation semestrielle ; la sélection sera donc évolutive et les publics auront toujours du nouveau à découvrir au musée.

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Ernest Ange Duez, Sur la falaise, 1881 Une bibliothèque rassemblera les ouvrages les plus populaires de cette époque.

Un système de médiation numérique permettra d’écouter, de lire, et de voir, de nombreux développements pédagogiques au fil des salles, qui concerneront l’histoire, la géographie, la littérature et les arts, dans la région normande à la Belle-Epoque. On y apprendra notamment pourquoi Marcel Proust et tant de personnalités artistiques et littéraires, ont élu résidence dans la région à cette époque ; ce qu’ils y recherchaient et ce qu’ils y ont trouvé. Ce sera une façon de se transporter aussi dans la sociabilité de cette époque, ses codes et ses mœurs ; et dans sa sociologie, marquée par d’importantes différences de classes.

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III- Moyens, fonctionnement et objectifs : un espace

muséographique toujours renouvelé, en partenariat avec un réseau de musées et de collections

III-1 Le système de fonctionnement : un musée sans collections, et un accrochage évolutif sur la base de longs prêts.

L’idée générale est de mettre en place « un musée sans collection ». C’est-à-dire un espace de qualité muséale, présentant un contenu pédagogique rigoureux, et des œuvres et objets d’intérêt patrimonial et artistique avéré, mais sans pour autant constituer une collection propre au musée. L’intérêt de ce statut est double : 1/ pouvoir présenter des chefs-d’œuvre par une stratégie de prêts venant de grands musées et collections ; 2/ ne pas enfermer le musée dans un accrochage figé, et permettre un renouvellement régulier, gage de la vitalité du centre et de son attractivité notamment pour les publics locaux et régionaux. En outre, l’ambition éventuelle de constituer une collection se heurterait à des obstacles budgétaires et des choix limités quant aux œuvres et objets.

Après de nombreux entretiens et contacts, plusieurs musées et grands collectionneurs d’art de cette époque, ont d’ores et déjà confirmé leur intérêt dans un partenariat qui permettrait une rotation bisannuelle d’œuvres, empruntées pour une durée de 6 à 9 mois. L’objectif est donc réalisable.

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Ce système d’exposition permanente évolutive réclame cependant la nécessité

impérative d’installer dans les salles d’exposition une hygrométrie répondant aux standards muséaux.

Une salle de réserve avec un contrôle climatique aux normes, pour stocker les œuvres entre accrochage et démontage, si possible de plain-pied, doit être prévue dans le programme d’aménagement.

L’obtention du label « Musée de France » faciliterait, à long terme, la négociation des prêts avec les grands musées.

La visite du musée comprendrait : - Une exposition permanente évolutive, comprenant des « period rooms » et une

salle audiovisuelle immersive - Une exposition temporaire - Une centre d’interprétation « hors douane » sur l’histoire de la maison, et

d’autres maisons significatives de Cabourg. - Une petite librairie-boutique - Des jardins aménagés, avec herbier, jeux d’époque, café…

L’objectif est de proposer au visiteur un temps de visite d’environ 1h à 1h30.

III-2 Une équipe resserrée, et une gouvernance sous la houlette d’un comité scientifique et culturel

Constitué par la mairie de Cabourg, un comité scientifique et culturel préside à la conception intellectuelle du projet, composé de personnalités du monde muséal et culturel, dont des dirigeants du Musée d’Orsay, de la Sorbonne, du CNRS, de la réunion des musées nationaux-Grand palais, des musées de Rouen, de l’IMEC… Le comité (CSC) est chargé de valider toutes les étapes de la conception et de la réalisation du musée, ainsi que sa programmation d’expositions (permanente/temporaire) et sa programmation culturelle en marge des expositions (conférences, rencontres, etc.). Le comité CSC est dirigé par un directeur artistique et scientifique qui sera aussi en charge de la communication du projet, et de ses relations institutionnelles.

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Un commissaire général est en charge de la réalisation de l’exposition

permanente et de la programmation des deux premières expositions temporaires. Il suivra aussi le travail de scénographie des scénographes.

Un régisseur sera en charge de la régie des œuvres et objets, et de la supervision du montage/démontage.

Un directeur d’exploitation du musée (agent sous contrat avec la Ville) sera en

charge du management de l’équipe de surveillance, et de la contractualisation éventuelle de l’équipe de médiation, d’ateliers scolaires etc. Ainsi que de la commercialisation des entrées et de la gestion et du développement des ressources propres (mécénat, privatisations du musée, locations d’espaces pour réception…).

On peut imaginer la création d’une association des amis de la Villa du temps

retrouvé, plateforme pour aider à la levée de fonds privés (mécénat) notamment, et pour soutenir et développer la communication du projet.

III-3 Le parcours de visite à la recherche de Cabourg et la côte fleurie à la Belle époque sur les traces de Marcel Proust

III-2-1 : une salle immersive pour plonger dans le paysage du Balbec 1900

Une fois son ticket de visite en mains pour suivre le parcours d’expositions de la Villa du temps retrouvé, le visiteur pénètre d’abord dans un espace d’environ 75 m2, où un dispositif audiovisuel immersif nous plonge dans le « Balbec » de 1900. A partir d’une sélection de films d’actualités de l’époque (Pathé, Lumière), d’autochromes (les frères Lumière ont beaucoup produit dans cette région), de photographies, et d’extraits de fictions tournées dans la région évoquant cette période et ce contexte (ex : A la recherche du temps perdu réalisé par Nina Companeez).

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Dans cette première salle immersive, un dispositif sonore constitué à partir d’enregistrements de l’époque (paroles d’habitants, sons de ville et des bords de mer, extraits de discours, de lecture, de chansons, musique…) renforcera le caractère immersif et permettra de plonger dans le parler de cette époque, ses textes et sa musique, savante et populaire. La Belle Epoque est une période fascinée par la magie de l’enregistrement.

Extrait de la chanson « Les plaisirs de la plage », de Paul Marinier, interprétée par Félix

Mayol (Enregistrement de 1905 pour la compagnie Odéon) :

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III-2-2 : un salon de Cabourg à la belle époque

Dans ses salons (rez de chaussée et premier étage), sur une surface d’environ deux fois 150 m2, on trouvera un accrochage d’œuvres picturales marquantes de la Belle Epoque. "La baie de Balbec ... c’était le golfe d’opale de Whistler dans ses harmonies bleu argent " (Le côté de Guermantes). A la recherche du temps perdu est l'un des romans les plus visuels de la littérature, et abonde en références picturales. Odette de Crécy frappe Swann par sa ressemblance avec une figure peinte à fresque par Botticelli ; d'un personnage secondaire, une certaine Mme Blatin, Proust va même jusqu'à écrire que " c'est exactement le portrait de Savonarole par Fra Bartolomeo " ; le jeune narrateur, à bord d'un train le menant à Balbec, ne cesse de "courir d'une fenêtre à l'autre (...) pour rentoiler les fragments (de son) beau matin écarlate et versatile et en avoir une vue totale et un tableau continu "… Le personnage d'Elstir est directement inspiré des peintres James Whistler et Paul Helleu. Notre accrochage permettra au visiteur de découvrir des œuvres et des peintres que la postérité et les musées ont parfois remisés au second plan, mais qui témoignent pourtant en profondeur de la culture et de la société de la Côte Fleurie à l’époque de Proust.

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« Blanche a vécu dans le monde de Proust » 3 nous dit François Mauriac de

son ami Jacques-Emile Blanche. La peinture de Jacques-Emile Blanche raconte un « temps perdu » qui croise celui de l'œuvre de Proust et l'illustre en partie. « Jacques-Emile Blanche peint les roses bouffantes, ruchées, que madame Swann fixait à son corsage », écrit Colette.4 Acteur et témoin du monde, ses portraits apparaissent aujourd'hui comme des fantômes plastiques d'A la Recherche du temps perdu, où l’on reconnaît les modèles du Baron de Charlus, de Madame Verdurin, d’Odette de Crécy, des Swann et des Guermantes… L’exposition permanente fera une place de choix à ce témoin capital du monde proustien, des arts et des lettres de la Belle Epoque, et de la région normande.

J.-E. Blanche, Portrait d’Igor Stravinsky, Musée d’Orsay, dépôt Cité de la musique

3 Ibidem. 4 Colette, Comedia, 26 décembre 1942 (article)

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J.-E. Blanche, Portrait de Jean Cocteau dans le Jardin d'Offranville, musée de Rouen On proposera au sein des salles d’exposition une ambiance olfactive, composée spécialement à partir d’essences de parfums utilisées à cette époque. Des contenus numériques disséminés au fil du parcours permettront l’insertion de contenus historiques liés à la Belle Epoque, à l’histoire de Cabourg et de la Côte Fleurie, à l’émergence du tourisme balnéaire, à l’art et à la littérature de cette période, et, bien sûr, à la présence et à l’œuvre de Proust. La scénographie visera une évocation parfaite du décor et mobilier d’une demeure « proustienne » de Cabourg et ses environs à la Belle Epoque. On s’inspirera notamment du travail réalisé à la Fondation Pierre-Bergé Yves Saint Laurent en 2012 pour l’exposition proustienne : « Du côté de chez Jacques-Emile Blanche ; Un Salon à la Belle Epoque ». Lien vidéo de cette exposition : https://www.youtube.com/watch?v=IyhYjjVr-ow

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« Du côté de chez Jacques-Emile Blanche ; Un Salon à la Belle Epoque », Fondation Pierre Bergé-Yves Saint Laurent, 2012

III-2-3 : une bibliothèque du temps de Marcel Proust

On trouvera dans cette bibliothèque, en accès libre, des ouvrages des écrivains à succès de l’époque : Paul Bourget, Anatole France, Maurice Barrès, Anna de Noailles, Jacques-Emile Blanche (qui publia plus de 50 livres, dont un essai consacré à Dieppe), Henri Bergson, Robert de Montesquiou (Les Chauves-souris) ; mais aussi des noms que la postérité a mieux conservé dans les rayons de nos bibliothèques contemporaines : Paul Valéry, Jean Cocteau, André Gide, Pierre Louÿs … Cette bibliothèque n’oubliera pas une littérature plus populaire – à commencer par la série Fantômas… Un dispositif numérique permettra aussi d’entrer dans les textes de Proust qui concernent Balbec, et dans la correspondance de l’écrivain lorsqu’il séjourna notamment à Trouville et Cabourg.

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J.-E. Blanche, Portrait d’Henri Bergson, musée de Rouen

III-2-4 : un programme d’expositions temporaires inédit

Dans un espace distinct d’environ (« L’atelier d’Elstir »), cependant partie intégrante du parcours général du musée, seront proposées des expositions temporaires.

Une exposition temporaire, dans un musée, doit à la fois servir de levier d’attraction pour des publics qui connaissent déjà le musée, et fournir aussi le lieu de développement de sujets complémentaires à l’exposition permanente.

En cohérence avec les attentes des équipes municipales, la ligne éditoriale des expositions temporaires opérera un certain contraste avec les contenus du parcours « permanent » consacré à l‘atmosphère et à la culture proustienne de la côte normande à la Belle-Epoque, et donc aux arts d’une « haute » société.

• D’une part pour bien distinguer les deux espaces, avec des contenus sans confusion possible et des traitements différents.

• D’autre part, pour (re)trouver dans les salles temporaires (de 70 à 150 m2 selon les deux versions possibles du programme architectural), une évocation d’autres facettes culturelles de la Belle-Epoque et de la région.

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Car Proust, Blanche, Cocteau, La Gandara, Besnard, Fortuny… ne représentent pas toute la vie culturelle de la Belle-Epoque. Cette période voit également naître une culture populaire largement diffusée, phénomène dont le succès va croître avec l’avènement du cinéma. A la manière de ceux qui peuvent aimer de nos jours à la fois l’opéra et le rock, il était courant de lire à la Belle Epoque à la fois Proust et Fantômas, d’admirer la peinture de Whistler et d’aller au cinématographe.

La Villa du Temps retrouvé fera donc la part belle aux formes plus populaires de la culture de l’époque, toutes aussi passionnantes. Cette ligne de programmation constituera un levier d’attractivité destiné à des publics plus familiaux qui fréquentent ou vivent à Cabourg ou sur la région.

La durée de ces expositions pourrait être d’au plus 6 mois. Leur scénographie résolument plus contemporaine que le traitement « décor/period room » du parcours dit « permanent », associerait systématiquement une autre institution, spécialisée ou experte sur le sujet traité.

Quelques pistes pour des sujets d’expositions temporaires :

- Fantômas, naissance du super-héros (série de livres et films à grand succès pendant toute la belle Epoque ; affiches, projections d’extraits de films ; extraits de livres ; etc.), en partenariat avec la BNF.

- Les débuts du tourisme vus par le cinématographe des Frères Lumière (bains de mer, montagne, thermes, pèlerinages…), en coopération avec l’Institut lumière, Lyon.

- Sarah Bernhardt, premier « monstre sacré » (l’expression est inventée par Cocteau pour désigner la comédienne)

- Méliès, en coopération avec la Cinémathèque Française

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IV- Un lieu de culture et de rêverie, à destination de tous les

publics La Villa du Temps retrouvé doit pouvoir satisfaire la curiosité de publics très

cultivés, amateurs d’art, d’histoire et de littérature, tout en offrant un dispositif capable d’attirer des publics plus diversifiés, notamment familiaux.

IV-1 Un espace hors-douane consacré à l’histoire de la Villa Bon-Abri

et aux grandes demeures cabourgeaises

Les visiteurs pourront entrer s’ils le souhaitent dans la Villa du Temps retrouvé sans être obligés pour autant de visiter les salles d’expositions. Dans le prolongement de l’espace d’accueil-librairie, un premier espace d’environ 30 m2, « Cabourg 1900 », permettra de découvrir une petite exposition qui évoque à la fois l’histoire de la Villa Bon-Abri, et l’histoire de certaines demeures cabourgeaises significatives.

Cette salle aura un accès direct sur le jardin nord de la Villa.

IV-2 Des jardins réaménagés en symbiose avec les thématiques du musée Les jardins accueilleront un café aux couleurs de la belle époque (jardin devant la maison, orientation sud), ainsi qu’un herbier proustien planté sous une serre et un espace de jeux d’époque (croquet, balançoires, manège). Une librairie-boutique proposera un assortiment lié à la thématique du musée.

Un espace pédagogique pour groupes, conférences, ateliers scolaires, permettra de développer au sein du musée l’accueil de publics diversifiés, notamment de scolaires et d’associations de la région.

IV-3 Une programmation événementielle tout au long de l’année Des conférences animées notamment par les membres du Comité Scientifique

et Culturel de la Villa du temps retrouvé ou encore des concerts et des lectures viendront nourrir la vie de cette Maison-Musée. Un calendrier de manifestations sera en ce sens mis en œuvre en parallèle des expositions.

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IV-4 Une centre de ressource pour les publics universitaires L’espace de consultation du deuxième étage de la Villa accueillera

régulièrement des résidents. Des chercheurs en grandes écoles ou encore en université viendront pousser la réflexion du thème et nourriront le patrimoine « vivant » des « aventures » embrassées par la Belle-Epoque. Des partenariats pourront ainsi être créés avec de célèbres écoles et universités régionales et parisiennes.

V- Un lieu inscrit dans le rayonnement culturel et touristique du territoire

Ce lieu sera à la fois un point étape et un point de départ pour de nombreux

circuits de valorisation culturels et touristiques à l’échelle locale, nationale ou encore internationale. Parmi eux :

• La Route Proustienne incubée par le Ministère de la Culture et de la Communication

• Le Cluster Belle-Epoque piloté par la Ville de Cabourg en partenariat avec Atout France

• Les Maisons des Illustres

Sans oublier les circuits liés à la connaissance des Villas d’exception de la Côte Fleurie ou encore la pratique des loisirs de la Belle Epoque (Golf, Course de chevaux, Bains de mer…)