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De l'Antiquité De l'Antiquité à l'ère numérique à l'ère numérique : Histoir Histoir e et a e et av enir enir des dr des dr oits d'auteur oits d'auteur PAGES 6 ET 10 3:HIKLKJ=XUXUUU:?m@h@q@g@a; M 01093 - 2766 - F: 3,00 E Il est incontournable Il est incontournable en en Afghanist Afghanist an : an : K arzai, arzai, la bête noir la bête noire d'Obama d'Obama PAGE 9 SOCIÉTÉ SOCIÉTÉ ÉTRANGER ÉTRANGER Le dernier livre Le dernier livre de François-Marie de François-Marie Algoud : Algoud : Maur Maurr as plus as plus que jamais vi que jamais viv ant ant PAGE 14 COMBA COMBAT DES IDÉES DES IDÉES JOURNÉE DE LA FEMME LE 8 MARS : JOURNÉE DE LA FEMME LE 8 MARS : L'IDÉOL L'IDÉOL OGIE DU "GENDER" OGIE DU "GENDER" p. 16 16 3 s N° 2766 63 e année Du 5 au 18 mars 2009 Paraît provisoirement les premier et troisième jeudis de chaque mois www.actionfrancaise.net 2 0 0 0 « Tout ce qui est national est nôtre » L’ACTION FRANÇAISE J ack Lang, on s'en souvient, a sauvé en juillet dernier un Nicolas Sarkozy au bord de la noyade, en votant, seul parmi les socialistes, la réforme consti- tutionnelle qui avait tant de mal à passer. Depuis lors, on susurrait de ci de là que l'ancien ministre de la Culture de François Mitterrand pourrait être appelé par le pré- sident reconnaissant à entrer dans le gouvernement. "Jack", de son côté, restait plutôt si- lencieux. Il se faisait désirer comme une cocotte... Se pro- clamant toujours socialiste, il n'avait guère de raisons d'at- tendre quoi que ce fût de son parti devenu une pétaudière, tandis que certains le voyaient déjà ambassadeur de France aux Nations Unies... Rose et rouge En attendant peut-être New York, voici qu'il s'est laissé en- voyer par le président de la Ré- publique à... La Havane ! Il semble bien connaître le pays et ses dirigeants et n'être point du tout gêné que Raul Castro, frère du moribond Fidel, maintienne à bout de bras un régime à l'ago- nie gardant encore dans ses pseudo - goulags un certain nombre de "dissidents". Il est donc allé là-bas pour, selon un com- muniqué de l'Élysée « explorer avec les autorités cubaines les modalités d'une reprise du dia- logue politique et de la coopé- ration entre la France et Cuba ». Certes la France a tout inté- rêt à entretenir de bonnes rela- tions politiques, économiques et culturelles avec l'Amérique du centre et du sud et de contre- carrer sur ces terres latines l'in- fluence massive des États-Unis. Toutefois quand on sait le style de France que représente Jack Lang, notamment dans le domaine de la culture, et le plai- sir que ne cachent pas ses amis de gauche de voir ses « talents » (dixit Martine Aubry) ainsi utili- sés, on se demande quel bien il peut apporter aux Cubains, si ce n'est de conforter un régime qui n'est plus qu'un méchant et dou- loureux vestige du communisme dont la population attend sur- tout d'être débarrassée. Envoyer un cheval de retour rose prendre langue, si l'on peut dire, avec de rouges débris po- litiques : on pouvait trouver des visages plus jeunes et plus pro- metteurs pour inaugurer une po- litique de coopération avec les Tropiques. MICHEL FROMENTOUX OUVERTURE Jack, Fidel et Nicolas... En attendant peut-être New York, Jack Lang part exercer ses "talents" à Cuba, où Raul Castro maintient un régime à l'agonie. LA PÉRILLEUSE RÉFORME TERRITORIALE Régions de France ou d'Europe ? L'ÉLU DES CONS... Georges Frêche, président du conseil régional de Languedoc Roussillon, ancien maire de Montpellier, professeur hono- raire à l'université de cette même ville, a toujours été ré- puté pour celui qui met les pieds dans le plat. En ces temps où le politiquement cor- rect paralyse les politiciens de tous bords, ce genre d'olibrius est trop rare pour que nous hésitions à nous réjouir de l'entendre. « J'ai toujours été élu par une majorité de cons » a-t-il ré- cemment déclaré devant ses étudiants. Et de se flatter d'aimer les "cons", à qui l'on peut tenir n'importe quel dis- cours, qui gobent tout du mo- ment que l'on reste au ras des pâquerettes, et qui prennent l'élu pour un as dès que par chance il arrive à faire croire que ce qui survient ressemble à ce qu'il avait prévu... Voilà un expert en démocratie. Nous donnerions tout Aristote, tout Montesquieu, tout Bonald et même tout Maurras pour entendre un autre homme po- litique parler si justement. Seul semble l'égaler Lénine, qui déclarait en substance – je cite de mémoire - que lorsque l'on parle à une foule de mil- liers de personnes il faut par- ler comme à un enfant de sept ans, quand on parle à des cen- taines de personnes il faut parler comme à un adolescent, quand on parle à deux ou trois personnes on peut tout juste parler en adulte. Voilà de qui et de quoi vit la démocratie et avec qui, avec quoi l'on se commet en atta- chant de l'importance aux jeux électoraux... M.F. PAGE 3 GE 3

L’ACTION FRANÇAISE2 0...l'un des actionnaires, Spir Com-munication, et cités par l'AFP. Le capital de l'entreprise est dé-tenu à parts égales par le norvé-gien Schibsted et

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Page 1: L’ACTION FRANÇAISE2 0...l'un des actionnaires, Spir Com-munication, et cités par l'AFP. Le capital de l'entreprise est dé-tenu à parts égales par le norvé-gien Schibsted et

De l 'Ant iqu i té De l 'Ant iqu i té à l 'è re numér iqueà l 'è re numér ique ::

HistoirHistoire et ae et avvenir enir des drdes droits d'auteuroits d'auteur

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Le dern ier l iv re Le dern ier l iv re de François-Mar ie de François-Mar ie A lgoud :A lgoud :

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■■ C O M B AC O M B A TT D E S I D É E SD E S I D É E S

JOURNÉE DE LA FEMME LE 8 MARS :JOURNÉE DE LA FEMME LE 8 MARS : L'IDÉOLL'IDÉOLOGIE DU "GENDER" OGIE DU "GENDER" pp.. 1616

3 s ❙ N° 2766 ❙ 63e année ❙ Du 5 au 18 mars 2009 ❙ Paraît provisoirement les premier et troisième jeudis de chaque mois ❙ www.actionfrancaise.net

2000« To u t c e q u i e s t n a t i o n a l e s t n ô t re »

L’ACTION FRANÇAISE

Jack Lang, on s'en souvient,a sauvé en juillet dernier unNicolas Sarkozy au bord de

la noyade, en votant, seul parmiles socialistes, la réforme consti-tutionnelle qui avait tant de mal à passer.

Depuis lors, on susurrait deci de là que l'ancien ministre dela Culture de François Mitterrandpourrait être appelé par le pré-sident reconnaissant à entrerdans le gouvernement. "Jack",de son côté, restait plutôt si-lencieux. Il se faisait désirercomme une cocotte... Se pro-clamant toujours socialiste, iln'avait guère de raisons d'at-tendre quoi que ce fût de son

parti devenu une pétaudière,tandis que certains le voyaientdéjà ambassadeur de France auxNations Unies...

Rose et rouge

En attendant peut-être NewYork, voici qu'il s'est laissé en-voyer par le président de la Ré-publique à... La Havane ! Ilsemble bien connaître le pays etses dirigeants et n'être point dutout gêné que Raul Castro, frèredu moribond Fidel, maintienne àbout de bras un régime à l'ago-nie gardant encore dans sespseudo - goulags un certainnombre de "dissidents". Il est donc

allé là-bas pour, selon un com-muniqué de l'Élysée « exploreravec les autorités cubaines lesmodalités d'une reprise du dia-logue politique et de la coopé-ration entre la France et Cuba ».

Certes la France a tout inté-rêt à entretenir de bonnes rela-tions politiques, économiques etculturelles avec l'Amérique ducentre et du sud et de contre-carrer sur ces terres latines l'in-fluence massive des États-Unis.

Toutefois quand on sait lestyle de France que représenteJack Lang, notamment dans ledomaine de la culture, et le plai-sir que ne cachent pas ses amisde gauche de voir ses « talents »

(dixit Martine Aubry) ainsi utili-sés, on se demande quel bien ilpeut apporter aux Cubains, si cen'est de conforter un régime quin'est plus qu'un méchant et dou-loureux vestige du communismedont la population attend sur-tout d'être débarrassée.

Envoyer un cheval de retourrose prendre langue, si l'on peutdire, avec de rouges débris po-litiques : on pouvait trouver desvisages plus jeunes et plus pro-metteurs pour inaugurer une po-litique de coopération avec lesTropiques.

MICHEL FROMENTOUX

❏ OUVERTURE

Jack, Fidel et Nicolas...En attendant peut-être New York, Jack Lang part exercer ses "talents" à Cuba, où Raul Castro maintient un régime à l'agonie.

LA PÉRILLEUSE RÉFORME TERRITORIALE

Régions de France ou d'Europe ?

L'ÉLU DES CONS...

Georges Frêche, président du

conseil régional de Languedoc

Roussillon, ancien maire de

Montpellier, professeur hono-

raire à l'université de cette

même ville, a toujours été ré-

puté pour celui qui met les

pieds dans le plat. En ces

temps où le politiquement cor-

rect paralyse les politiciens de

tous bords, ce genre d'olibrius

est trop rare pour que nous

hésitions à nous réjouir de

l'entendre.

« J'ai toujours été élu par une

majorité de cons » a-t-il ré-

cemment déclaré devant ses

étudiants. Et de se flatter

d'aimer les "cons", à qui l'on

peut tenir n'importe quel dis-

cours, qui gobent tout du mo-

ment que l'on reste au ras des

pâquerettes, et qui prennent

l'élu pour un as dès que par

chance il arrive à faire croire

que ce qui survient ressemble

à ce qu'il avait prévu...

Voilà un expert en démocratie.

Nous donnerions tout Aristote,

tout Montesquieu, tout Bonald

et même tout Maurras pour

entendre un autre homme po-

litique parler si justement.

Seul semble l'égaler Lénine,

qui déclarait en substance – je

cite de mémoire - que lorsque

l'on parle à une foule de mil-

liers de personnes il faut par-

ler comme à un enfant de sept

ans, quand on parle à des cen-

taines de personnes il faut

parler comme à un adolescent,

quand on parle à deux ou trois

personnes on peut tout juste

parler en adulte.

Voilà de qui et de quoi vit la

démocratie et avec qui, avec

quoi l'on se commet en atta-

chant de l'importance aux jeux

électoraux...

M.F.

PPAAGE 3GE 3

Page 2: L’ACTION FRANÇAISE2 0...l'un des actionnaires, Spir Com-munication, et cités par l'AFP. Le capital de l'entreprise est dé-tenu à parts égales par le norvé-gien Schibsted et

❚ ÉCONOMIE & MÉDIAS

❚ 2 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2766 – du 5 au 18 mars 2009

Directeur de 1965 à 2007 : Pierre Pujo (✟)Directeur de la publication : M.G. PujoRédacteur en chef : Michel FromentouxRédacteur graphiste : Grégoire DubostPolitique : Guillaume Chatizel, Jean-Philippe Chauvin,Michel Fromentoux, Nicolas Hainaut,Stéphane PiolencÉtranger : Charles-Henri Brignac, Guy C. Menusier, Pascal NariÉconomie : Henri LetigreEnseignement, famille, société : Stéphane Blanchonnet, Jean-Pierre Dickès, Michel Fromentoux, Aristide Leucate, Frédéric WinclerCulture : Monique Beaumont, Anne Bernet, Renaud Dourges, Gaël Fons,Norbert Multeau, Jean d’Omiac,François Roberday, Alain WaelkensHistoire : Yves Lenormand, Laure Margaillan, René Pillorget, Francis VenantArt de vivre : Pierre ChaumeilChroniques : François Leger, Jean-Baptiste MorvanMédias : Denis AboutAbonnements, publicité, promotion : Monique Lainé

10 rue Croix-des-Petit10 rue Croix-des-Petits-Champs-Champs s 75001 Paris75001 Paris

Tél. : 01 40 39 92 06 - Fax : 01 40 26 31 63

wwwwww.actionfrancaise.net.actionfrancaise.netredaction@[email protected]

[email protected] 1166-3286

» CRISPATION

Évalués par leurs pairs, les utili-sateurs d'Ebay (le principal sited'enchères en ligne) se voient at-tribuer une étoile de couleur va-riable, censée illustrer laconfiance qu'on peut leur accor-der. Momentanément, ils se trou-vaient affublés d'une "étoilejaune". Expression à la connota-tion douloureuse, dont un inter-naute a réclamé la suppression.En remplacement, Ebay distribuedorénavant des "premièresétoiles" sur sa plateforme fran-çaise. Cette anecdote, rapportéepar 20minutes.fr le 20 février,est peut-être le symptôme d'unecrispation renforcée par les pro-vocations de Dieudonné, l'affaireWilliamson et la recrudescencedes tensions israélo-palesti-niennes.

» PARITÉ

Diffusé chaque dimanche matinsur TF1, Auto-Moto séduirait deplus en plus de femmes, selonles chiffres de Médiamétrie citéssur le blog de Jean-Marc Moran-

dini. Le 22 février, l'émission seserait accaparé 22,5 % des télé-spectateurs de quatre ans etplus, et 21,2 % des femmes dequinze à quarante-neuf ans. Unemanifestation anecdotique desprogrès de la "confusiondes sexes" ?

» CSA

Le matraquage en faveur du mé-tissage s'appuiera bientôt sur un"baromètre de la diversité à latélévision". Des études semes-trielles seront réalisées pendantdeux ans, et les premiers résul-tats communiqués en juillet pro-chain. Le Conseil supérieur del'Audiovisuel a annoncé le 19 fé-vrier sa décision de lancer un ap-pel d'offre en ce sens.

» LIGNIÈRES

France 5 a diffusé le 14 févrierun reportage de 52 minutesconsacré à Lignières. Un villagedu Berry qui accueillit à plu-sieurs reprises l'université d'étéde l'Action française, dans lapropriété du prince Sixte-Henri

de Bourbon Parme. On reconnaîtquelques visages, des royalistestantôt avenants, tantôt méfiantsà la vue des caméras... Interrogéà l'entrée du château, un pas-sant se montre bienveillant àl'égard de l'AF : son grand-pèreen était membre ! S'inscrivant dans une série intitu-lée En campagne, ce documen-taire brosse le portrait touchantde vieillards un peu "paumés",auxquels succède une jeunesseparfois étouffée. Une figure sedémarque : celle d'une villa-geoise attachée à sa terre en dé-pit de son apologie du métissage. Des Ligniérois ont déploré « lavolonté des reporters d'accorderde longs temps de parole à despersonnes localement connuespour leurs idées atypiques ».Rendant compte de leur colèrele 18 février, La Nouvelle Répu-blique du Centre-Ouest évoque« un travail d'auteur qui n'a pasla prétention d'être objectif. Aucontraire, c'est la subjectivité duregard qui lui donne tout sonsel... » L'émission est visiblepour 2,99 euros sur le site francetvod.fr.

» BÉNÉFICE

20 Minutes France a dégagé sespremiers bénéfices en 2008 :0,7 millions d'euros, contre uneperte de 1,7 million l'année pré-cédente. Le succès du quotidiengratuit éponyme, distribué à Pa-ris depuis mars 2002, explique cerésultat positif : les activités pa-pier ont rapporté 3,2 millionsd'euros (0,3 millions en 2007),compensant le déficit accru desactivités Internet. Des chiffrescommuniqués le 18 février parl'un des actionnaires, Spir Com-munication, et cités par l'AFP. Le capital de l'entreprise est dé-tenu à parts égales par le norvé-gien Schibsted et le français Sipa(l'éditeur de Ouest France), viales sociétés Sofiouest et SpirCommunication (25 % chacune). Cette annonce est une illustra-tion des mutations à l'œuvredans le paysage médiatique. Elledonne à réfléchir, à l'heure où legouvernement tente de sauve-garder un modèle économique del'audiovisuel submergé par lavague numérique (voir p. 6).

G.D.

DÉBITEUR DE CONFIANCEL'augmentation des dettes pu-bliques suscite des interroga-tions quant aux capacités definancement des États. Tousles émetteurs de titres n'inspi-rent pas la même confiance ;constatant la divergence crois-sante de leurs taux d'empruntau sein de la zone euro, cer-tains prédisent son éclatement.Interrogé par Jean Quatremer,Philippe Mills, directeur del'Agence France Trésor, encharge de la dette négociable,n'affiche aucune inquiétude.Un revirement intervenu outre-Rhin contribue à rassurer lesmarchés : le 18 février, le mi-nistre allemand des Finances,Peer Steinbrück, a affirmé quesi certains pays rencontraientdes difficultés avec leurs paie-ments, Berlin leur viendrait enaide. « Au 31 décembre 2008,la dette publique négociablefrançaise s'établissait à1 017 milliards d'euros », pré-cise Philippe Mills. « Le faitque [sa] détention [...] soittrès diversifiée en termes d'in-vestisseurs et d'origine géogra-phique indique que la Francen'est pas dépendante d'une ca-tégorie d'investisseurs et queses conditions de financementsont à la fois sûres et bonmarché du fait du jeu de laconcurrence. » La Francecompterait parmi les quatorzemeilleurs débiteurs mondiauxselon l'agence Moddy's. D'oùl'enthousiasme de Jean Quatre-mer : « Même endettée, laFrance fait des envieux dans lemonde. »

G.D.

* Cf bruxelles.blogs.liberation.fr

Dans ce qu'il est désormaisconvenu d'appeler "l'affairePérol", force est de consta-

ter que la plupart des commen-taires et des critiques portent bienplus sur la forme que sur le fondde l'opération.

L'État et le secteurbancaire

Certes le parachutage d'unproche collaborateur de NicolasSarkozy – François Pérol, secré-taire général adjoint de l'Élysée– à la tête d'un futur grand groupebancaire issu de la fusion de laCaisse d'épargne et des Banquespopulaires apparaît comme unenouvelle manifestation du népo-tisme républicain en général etdu fonctionnement clanique duchef de l'État en particulier. Mais,il est bien plus raisonnable d'ana-lyser la totalité des enjeux de cedossier au lieu de se joindre naï-vement au concert de la dénon-ciation stérile de "l'hyperprési-dence". Cette partition estd'ailleurs orchestrée, au centrecomme à gauche, par ceux qui,sous d'autres gouvernements, ontparu amplement se satisfaire dece genre de pratique.

Le cas Pérol ne doit pas doncmasquer le débat essentiel qui estla relation, cruciale en cette pé-riode de crise, entre l'État et lesecteur bancaire. À cet égard, lapuissance publique est pleinementlégitime dans sa volonté de nom-

mer l'un de ses commis à la têtedu nouvel ensemble financier. Eneffet, la fusion entre la Caissed'épargne et le groupe Banquespopulaires, décidée à l'automne,s'est nettement accélérée sous

l'impulsion de l'Élysée. L'entréede l'État dans ce montage s'ac-compagne de l'injection de 5 mil-liards d'euros d'argent public, sousforme de dette et d'actions depréférence convertibles en ac-tions ordinaires d'ici trois à cinqans. L'État pourra ainsi à termeobtenir 20 % du capital.

En contrepartie, il semble nor-mal qu'il pèse dans la gouvernancedu futur établissement. En plusdu choix de la présidence, il dis-posera de quatre administrateurs

sur les dix-huit que comptera ledirectoire du groupe et, surtout,il veillera aux destinées du co-mité de nomination et de rému-nération, qui désignera les pa-trons des Caisses régionales.

Dans le cadre de cette natio-nalisation partielle, l'opération depantouflage – terme désignant leplacement de hauts fonctionnairesà la tête de structures parapu-bliques ou d'entreprises privées –montée au profit de François Pé-rol apparaît bien moins scanda-leuse que certaines ayant fleurià la faveur des privatisations. Laplus fameuse d'entre elles estcelle réalisée, en 1993, par leconseiller d'Édouard Balladur,Jean-Marie Messier, en devenant

PDG de la Générale des Eaux justeaprès en avoir supervisé le pas-sage au privé. Atteint par la fo-lie des grandeurs, il la transformaen Vivendi et la mena à la ruine.

À l'évidence, le contexte dela fusion bancaire à venir est trèsdifférent. Le premier objectif estde consolider deux banques fra-gilisées par de lourdes pertes en2008 (2 milliards d'euros pour laCaisse d'épargne et 468 millionspour les Banques populaires). Lesecond enjeu est de réorienter enprofondeur le pilotage de leur fi-liale commune, la banque de fi-nancement et d'investissementNatixis, qui a été, sur la place pa-risienne, l'un des établissementsles plus touchés par la crise dessubprimes, avec une perte de2,8 milliards d'euros l'an passé.

Comment contraindre les banques

Enfin, le troisième aspect decette fusion, de loin le plus im-portant et qui n'est pas encoreacquis, concerne la capacité del'État à influer réellement sur lapolitique du futur groupe et, pluslargement, sur l'ensemble du sec-teur bancaire.

Malgré les aides publiques quileur ont été accordées à l'au-tomne, les banques françaisesn'ont manifestement pas rouvertle canal du crédit et, de ce fait,ajoutent des difficultés à la criseen asphyxiant des entreprisessaines mais qui ont un besoin vi-tal d'avance de trésorerie. Le coupde force réalisé par Nicolas Sar-kozy sur la Caisse d'épargne et lesBanques populaires est-il un pre-mier pas destiné à contraindre lesbanquiers à apporter leur contri-bution au sauvetage de l'écono-mie française ? Nous ne pouvonsque l'espérer.

PATRICE MALLET

❏ FUSION BANCAIRE

La pantoufle de la discordeLa nomination du secrétaire général adjoint de l'Élysée à la tête d'un grand groupe bancaire fait scandale. Au-delà de la polémique, y a-t-il une place pour l'intérêt national ?

La puissance publique est légitime dans sa volonté de nommer l'un de ses commis à la tête du nouvel ensemble issu de la fusion entre les Caisses d'épargne et les Banques populaires.

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POLITIQUE ❚

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2766 – du 5 au 18 mars 2009 3 ❚

❚ NOTRE SOUSCRIPTION POUR L'AF

Périodiquement nos répu-bliques ressentent le besoinde redessiner la France. La

tâche n'est jamais sans péril :avant même que M. Édouard Bal-ladur remette ce jeudi 5 mars lerapport sur la réforme territorialeélaboré par les onze membres dela commission qu'il préside, lesréactions allaient bon train àdroite comme à gauche car cer-tains fiefs électoraux risquent detomber....

En fait depuis la Révolutiondite française, la France est enguerre permanente contre son his-toire et sa géographie. De laFrance d'Ancien Régime dontM. Balladur reconnaît lui-mêmedans l'introduction de son rapport(en citant sans le nommer FrantzFunck-Brentano) qu'elle était« hérissée de libertés » dans unediversité de statuts où les Fran-çais voyaient, reconnaît M. Bal-ladur, « la condition même, sinonle symbole, des libertés locales ».Il est facile de critiquer l'enche-vêtrement des circonscriptionsd'alors : elles avaient surgi commela vie, dans le foisonnement. Uneremise en ordre s'imposait auXVIIIe siècle, et le roi lui-mêmela voulait. N'oublions pas que lesbases des grands services publicsont été posées sous Louis XV (en-registrement, Contributions di-rectes, Régie, Eaux et Forêts,Ponts et Chaussées...), touteschoses que la Révolution allaitdémolir « et que Napoléon n'au-rait qu'à relever pour faire figurede créateur », a écrit PierreGaxotte.

Départementset régions

M. Balladur préfère louer lesassemblées « issues de la Révo-lution » pour « leur mode d'or-ganisation du territoire à la foisunitaire et centralisé ». Il oubliede dire que l'on a alors échappéde peu à la division du pays enquatre-vingts carrés d'égale su-

perficie ! Mirabeau et Barnaveremirent un peu de finesse danscette géométrie et l'on eut lesdépartements, créés pour uni-formiser la France tel un glaciset anéantir les vieilles provincesnées de l'Histoire, avec leurs cou-tumes, leurs langues, leurs dia-lectes, qui étaient autant de liensaffectifs, mais qui empêchaientla progression des "Lumières"...Les départements ont dès lorsquadrillé la France comme une

armure sans âme et si peu propreà toucher les cœurs qu'en 1914-1918, les soldats parlaient de l'Ar-tois, des Flandres, de l'Alsace etnon des départements dans les-quels ne pouvait pas s'enracinerl'amour de la patrie. Le mal n'aque trop gagné les Français si peusensibles au patriotisme des pe-tites patries entretenant lagrande que, selon un sondage duFigaro du 26 février, 51 % d'entreeux seraient prêts à larguer leurscompatriotes de Guadeloupe etde Martinique, comme ils ontabandonné il y a cinquante ansles Français d'Algérie...

Les technocrates se rient detoutes les affections, ils ne pen-sent qu'uniformisation et effica-cité. La Ve République superposa

les régions, devenues en 1982 col-lectivités territoriales de pleindroit. L'idée semblait plutôtbonne, mais on s'obstina à cal-quer les contours des régions surceux des départements qui biensouvent ne respectent ni l'histoireni la géographie. Qui plus est, sil'on donna à certaines le nom denos anciennes provinces, on enaffubla d'autres de noms aussi stu-pides que, par exemple, "Centre"ou "Rhône-Alpes", qui camouflent

mal des assemblages hétéroclites.La région, ainsi coupée dessources historiques, fut, écrit ÉricZemmour dans le Figaro Magazinedu 28 février « un rêve d'élites.Jamais les populations locales nes'y sont attachées. » D'autantmoins, ajouterons-nous, que, lesystème électif étant ce que l'onsait, les élus régionaux songentplus à se hausser dans la politiquepoliticienne qu'à se pencher surles questions locales...

Du coup, les Français semblentavoir découvert des mérites auxdépartements (voir la querelle desplaques d'immatriculation). N'est-ce pas aussi qu'ils craignent, si laseule division régionale subsistait,de se voir privés de certains ser-vices de proximité ? Il n'en reste

pas moins que les départements,sauf dans certains cas comme ce-lui de l'Ardèche qui recoupepresque exactement l'ancien paysde Vivarais, paraissent bien sur-annés. Maurras, de son temps, mi-sait sur l'arrondissement qu'il es-timait plus propre à « former etgrouper les élites locales » ca-pables d'œuvrer avec désintéres-sement. En avance sur son temps,il voyait même les conseils d'ar-rondissements fédérer les com-munes, sous le contrôle, mais nonle gouvernement, de dix-sept pré-fets de région (L'Action Française,30 septembre 1926).

Grenouillagespartisans

M. Balladur a peut-être luMaurras... Sa proposition de sup-primer les cantons et de laisserdans le cadre des départementsse former des circonscriptions infradépartementales et des syndicats de communes noussemble répondre aux besoins mo-dernes des campagnes et des pe-tites villes.

En revanche son désir de ra-mener de vingt-deux à quinze lenombre des régions est dangereuxdans le contexte actuel. Celles-ciauraient alors une taille "euro-péenne"... L'on devine le dangerpour l'unité nationale, car entre"grandes" régions de France etd'ailleurs des relations se tisse-raient sans que le contrôle du pou-voir central s'exerce librement.

Il manque aux membres de lacommission territoriale le senti-ment que c'est dans le cadre dela nation, communauté historiquede destin, que doivent s'épanouirles collectivités locales, de mêmeque la santé des membres parti-cipe de la santé du corps.

Cela dit, il est bon de vouloirredéfinir les compétences et lesressources des régions et des dé-partements (jusqu'à présent bienenchevêtrées), de même que dede favoriser les regroupements

volontaires et les modificationsde limites des régions et des dé-partements. Il ne faut pas qu'uneréforme territoriale tombe d'enhaut, sans que les intéressés ycontribuent. Mais vu les intérêtsélectoralistes et partisans qu'unetelle réorganisation ne manquerapas de mettre en cause, nous sou-haitons bien du plaisir à ceux quis'y attelleront.

Le fait de désigner dans unemême élection conseillers géné-raux et conseillers régionaux au-rait au moins l'avantage de ré-duire les occasions de campagnesélectorales, mais ne suffira pas àgarantir la vie locale des miasmesde la politique politicienne.

Le gigantisme que manifestel'idée de créer un Grand Paris ainsique onze grandes métropoles(Lyon, Lille, Bordeaux, Marseille,Toulouse, Nantes, Nice, Stras-bourg, Rouen, Toulon, Rennes) neva guère dans le sens des possi-bilités que donnent aujourd'huiles moyens de communication delaisser les personnes vivre, s'ins-truire et entreprendre, sur le lieuoù ils vivent. Qu'attendre de cesmégapoles inhumaines qui s'en-toureront d'un réseau d'autoroutestoujours plus envahissant ?

Quel État ?

Ne soyons pas dupes : les ar-rière-pensées partisanes vont gui-der de longs débats. Pour empê-cher que les mandats locaux de-viennent des contre-pouvoirs oudes féodalités servant de marche-pied à des ambitions nationaleset que la vie à tous les échelonsde la nation ne soit que compé-tition incessante entre les partis,il faudrait d'abord, dans le cadred'une vraie réforme territoriale,réinsérer chaque Français dansses communautés naturelles fa-miliale, professionnelle, géogra-phique, celles-ci devenant la based'un suffrage universel organiséet d'une représentation du paysréel en toutes ses activités et sesparticularités. Les élus seraientalors mieux portés à servir qu'àse servir, d'autant que cette or-ganisation ne pourrait qu'aller depair avec un pouvoir protecteurdes libertés parce que fort et in-dépendant, et incarnant la sou-veraineté du bien commun par-delà les générations. Le roi ca-pétien réorienterait la commissionBalladur.

MICHEL FROMENTOUX

❏ RÉFORME TERRITORIALE

Régions de France ou d'Europe ?Édouard Balladur veut redessiner la France, quadrillée comme une armure sans âme. Il est bon de vouloirredéfinir les compétences des collectivités locales. Mais les arrière-pensées partisanes vont guider delongs débats, qui nécessiteraient l'arbitrage royal pour assurer une représentation organique de la nation.

■ L'Action Française 2000, le journal del'Action française, a besoin de l'aide detous ses amis.

Adhérer à nos idées, l'empirisme orga-nisateur, la défense en politique du seul in-térêt national pour le bien de tous, le na-tionalisme intégral, en se contentant de lirele journal au numéro ne suffit pas. Se dire"d'Action française", c'est, en toute logique,d'abord s'abonner, et contribuer ainsi à lapérennité du journal en lui donnant les

moyens de vivre.Nous insistons auprès denos amis qui négligent encore de le faire.Pour l'AF, c'est vital.

Nous lançons aujourd'hui la souscription2009. Comme tous les journaux d'opinion,tant que nous n'aurons pas assez d'abonnés,la souscription nous est indispensable puisquenous n'avons l'aide ni de l'État ni de quelquescapitalistes. Nous avons besoin d'un mini-mum de 35 000 euros sur l'année pour équi-librer notre budget et garantir notre indé-pendance.

Pour les abonnements comme pour lasouscription, vous pouvez toujours étalervotre participation tout au long de l'annéepar un prélèvement bancaire automatique.Demandez-nous le formulaire.

Avec toute notre reconnaissance.

MARIELLE PUJO

* Prière d’adresser vos dons à Mme Geneviève Cas-telluccio, L'Action Française 2000, 10 rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris.

Pour que l'A.F. puisse vivre

Page 4: L’ACTION FRANÇAISE2 0...l'un des actionnaires, Spir Com-munication, et cités par l'AFP. Le capital de l'entreprise est dé-tenu à parts égales par le norvé-gien Schibsted et

Dans une France qui redoutede connaître en 2009 uneaggravation du taux de chô-

mage, les agriculteurs peinent àrecruter. C'est l'un des messagesque la profession a voulu faire pas-ser à l'occasion du Salon de l'Agri-culture qui s'est ouvert le 21 fé-vrier à la Porte de Versailles à Pa-ris. Faisant face au papy boom,près de 50 % des entreprises agri-coles vont changer de main dansles huit ans qui viennent.

Réorientationdes aides

La profession a lancé une cam-pagne de communication desti-née à attirer les jeunes vers lesmétiers de l'agriculture et à com-battre les idées reçues. L'agri-culture veut notamment rappe-ler qu'elle peut offrir de véritablesperspectives de carrière et de sa-laire. Et qu'au-delà des métiersdirectement liés à la production,elle propose une large palette demétiers. Ce sont par exemple5 000 emplois qui sont à pourvoirdans le domaine du machinismeagricole et de l'agro-équipement.

Mais si l'agriculture peine à re-cruter, c'est sans doute en partieà cause de la dévalorisation de

l'image de ces professions. Lesagriculteurs eux-mêmes sont-ilsen mesure de dire de quoi serafait leur avenir ? Selon le minis-tère de l'Agriculture, 77 % de leurrevenu en 2006 ont été alimen-tés par des subventions publiques,et la perspective de la réformede la Politique agricole commune,programmée en 2013, est unesource de vives inquiétudes pourtoute la filière.

Déjà, l'annonce du projet deloi de modernisation de l'agricul-ture et de l'agroalimentaire quidoit préparer à cette réforme n'apas manqué de secouer le mondeagricole. À l'ouverture du salon,le ministre Michel Barnier a indi-qué que 18 % des aides directesreçues par les agriculteurs, soit1,4 milliard d'euros, seraient « ré-orientées » d'ici 2010, notammentpour soutenir l'élevage, les ré-gions de montagne, l'agriculture

biologique et la production de pro-téines. Les céréaliers, principauxbénéficiaires des aides euro-péennes, verront diminuer d'au-tant celles dont ils bénéficient.

Matières premièreset spéculation

Montrés du doigt depuis desannées, ils s'attendaient à unetelle redistribution. Mais leur in-quiétude est d'autant plus grandeque le marché mondial des cé-réales est de moins en moins ré-gulé. À l'exception du marché dublé tendre, la Commission euro-péenne prévoit de réduire l'inter-vention au strict minimum, lais-sant les céréaliers aux prises avecles cours mondiaux. Or les prixdes matières premières agricolessont soumis à une très grande vo-latilité et le blé peut, en quelquesmois, passer de 130 à 220 euros

la tonne, ce qui fragilise la ges-tion des exploitations, spéciale-ment celles de petite taille.

D'autant que ces cours ne sontplus seulement soumis à la tradi-tionnelle loi de l'offre et de la de-mande. De plus en plus, c'est surdes "marchés à terme" que l'ons'échange non plus des tonnes deblés, mais des promesses de ré-colte. Les agriculteurs eux-mêmesy engagent une partie croissantede leur production. Ainsi lenombre de contrats à terme en-registrés sur le marché françaisEuronext est-il passé de 210 000à 970 000 entre 2003 et 2005. Pourles agriculteurs, il s'agit moins despéculer que de tenter de sécuri-ser leurs prix futurs. Mais ces mar-chés sont perturbés par la dérivespéculative de grands négociantset de fonds de pension qui ont enpartie contribué à la récenteflambée des prix alimentaires.

Déjà contraints de vivre desaides européennes plutôt que dela vente de leur production, unepartie des agriculteurs pourraientdemain se trouver confrontés àdes marchés spéculatifs dont lecontrôle leur échappe. Dans cecontexte, la réforme de la Poli-tique agricole commune, qui ten-dra à réduire les aides et les in-terventions de l'Union européenne,peut légitimement inquiéter lemonde agricole. Ce qui n'aiderapas, dans les années à venir, àtrouver de jeunes recrues ennombre suffisant.

GUILLAUME CHATIZEL

❚ ASPECTS DE LA FRANCE

❚ 4 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2766 – du 5 au 18 mars 2009

❏ AGRICULTURE

Le doute avant la relèveLe monde agricole offrira, dans les années à venir, de véritables perspectivesd'emploi. Peut-il séduire des jeunes, dans l'inquiétude de la réforme de la PAC ?

Onze années ont passé de-puis l'assassinat du préfetClaude Érignac le 6 février

1998 sans que le véritable cou-pable n'ait encore été identifié etcondamné par la justice française.Onze années que Mme Érignac es-père que justice soit faite pourson mari tandis que l'institutionjudiciaire demeure incapable deproduire un dossier d'instructionsolide, respectant les principauxtenants de la procédure pénale.

Incurie d'État

Après cinq années d'un pro-cès, déjà suspendu à deux re-prises, dans lequel le présidentde la cour d'assises Didier Wa-cogne omet de lire le courrier d'untémoin important, et où un avo-cat de la partie civile reconnaîtnaïvement que d'autres membresdu commando seraient encore encavale, n'a t'on pas l'impressionde revivre un scandale judiciairecomparable à celui d'Outreau ? Eneffet, l'engouement et la viola-tion précipitée de la présomptiond'innocence de la part de NicolasSarkozy (à l'époque ministre del'Intérieur ), lors de l'arrestationde Colonna le 4 juillet 2003 prèsde Propriano, auront sans aucundoute poussé les services de po-lice et de la DNAT (Division na-tionale antiterroriste) à négligercertaines pistes de l'enquête ainsiqu'à conclure hâtivement à la cul-pabilité du berger de Cargèse.

Les conséquences de cette in-curie d'État sont doubles : les ré-centes révélations de Didier Vi-nolas, ex-directeur du cabinet dupréfet Érignac, mettent le doigtsur la probable culpabilité de sus-pects jamais inquiétés par la jus-

tice française dans l'attentatcontre la gendarmerie de Pietro-sella le 4 septembre 1997, durantlequel a été dérobée l'arme quiservira pour le meurtre du préfetde Corse, et les témoignages deMarie-Ange Contart, Joseph Co-lombani et Jean-Pierre Versini dé-mentent toute ressemblanced'Yvan Colonna avec l'assassinqu'ils ont pu voir à l'œuvre le 6 fé-

vrier 1998. Enfin, pour ne rien ar-ranger des incohérences du pro-cès, un balisticien mandaté parla défense affirme sans détourque le tireur mesurait plus de1,85 mètres quand Colonna me-sure 1,70 mètres. Preuve du fan-

tasme des plus hautes autoritésd'État sur la culpabilité de Co-lonna : jamais aucune reconsti-tution en présence du médecinlégiste et du balisticien, tous deuxdésignés par le juge d'instruction,n'a été organisée alors que cetteformalité est de mise pour chaquecrime crapuleux !

Chose scandaleuse, les avo-cats de la défense et des parties

civiles ont en mémoire l'acquit-tement de Jean Castela et Vin-cent Andriuzzi le 22 février 2006après sept années de prison, suiteà leur condamnation en juillet2003 à trente ans de réclusion cri-minelle. Cette décision de justiceest tout à fait envisageable pourColonna, mais ne résoudra en rienle problème de la vérité sur l'af-faire Érignac, si ce n'est qu'elleéviterait d'emprisonner un inno-cent et qu'elle susciterait un nou-veau scandale politico-judiciairequi mettrait un peu plus en branlel'institution.

La politisation du procès

Le mal est pourtant déjà fait :les deux indices qui ont amené àconclure à la culpabilité de Co-lonna ne sont que la dénonciationpar l'un des membres du com-mando, Didier Maranelli, et lafuite du berger durant plus dequatre ans, celle-ci n'étant aucu-nement une preuve à charge maisun simple indice. Enfin, pourmieux entretenir un sentiment deconfusion et de tension, ChristianLambert, ancien patron du RAID,dément avoir reçu des informa-tions sur les deux suspects pro-venant de la part de Didier Vino-las, le qualifiant de « casse-piedobsédé par le drame du 6 février1998 ». Le mystère reste intact...

La politisation du procès or-chestrée avec talent par Colonna,

qui s'en prend directement à Ni-colas Sarkozy en affirmant êtrecondamné avant d'être jugé, han-dicape un peu plus le travail desjuges et risque de déteindre surune opinion publique de plus enplus éprise de sympathie pour le"martyre corse", victime d'un ap-pareil d'État fumeux qui veut àtout prix appliquer la théorie dubouc émissaire pour maintenirl'ordre public et préserver l'"unitérépublicaine" !

Quand Sarkozy reçoit la fa-mille Érignac en affirmant qu'ilfera condamner Colonna, quandil limoge un juge en Alsace, li-cencie un préfet dans la Mancheet un autre en Corse, commentne pas supposer que cet hysté-rique pulsionnel commande à lajustice une condamnation arbi-traire pour apaiser les tensionspartisanes et éviter une nouvelleaffaire Dreyfus ? Alors quand YvanColonna lance au président de lacour d'assises de Paris, Didier Wa-cogne : « Je vous ai dit au débutque ce procès était sous in-fluence. Vous avez répondu quenon. J'affirme que vous êtes enmission pour me faire condamnerau nom de la raison d'État, alorsque je suis innocent », on éprouveune certaine envie de signer lalettre de soutien du footballeurÉric Cantona pour Colonna...

ANTOINE MELLIES

❏ JUSTICE

Colonna : ces témoignages qui fâchentPrésomption d'innocence bafouée, témoignages ignorés, reconstitutions non ordonnées... Yvan Colonna est-il la victime d'une "raison d'État" républicaine ? Onze ans après l'assassinat du préfet Érignac, les carences de l'instruction judiciaire laissent planer le doute.

Yvan Colonna, militant indépendantiste corse, clame son innocence sur des tee-shirts et cartes postales.

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ASPECTS DE LA FRANCE ❚

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2766 – du 5 au 18 mars 2009 5 ❚

■ Quand ces lignes paraîtront,la situation se sera-t-elle apai-sée en Guadeloupe ? Il resterade toute façon longtemps destraces des événements du moisdernier, devant lesquels le gou-vernements a été lent à réagir,tandis que le secrétaire d'État àl'Outre-mer, Yves Jégo, se mon-trait fluctuant... Nous avons re-cueilli des propos éclairants denotre ami le professeur ÉdouardBoulogne qui vit à la Guade-loupe. Nous en publions ici delarges extraits.

En Guadeloupe et Martinique,françaises depuis 1635. lepeuplement est hétérogène,

composé de Blancs originaires dela métropole, dès l'origine (pourla plupart des descendants d'en-gagés, et quelques familles aris-tocratiques) ; de Noirs, descen-dants d'africains importés commeesclaves par le moyen du com-merce triangulaire, la Traite, jus-qu'à l'interdiction de celle-ci ;d'indiens (des Indes) depuis 1852,pour pallier les problèmes de maind'oeuvre, qui se sont établis dansles îles, où ils composent une eth-nie parfaitement assimilée ; dessyro-libanais et des émigrés ita-liens depuis un siècle, etc. De larencontre de tous ces groupes sontissus les métis. La représentationbinaire "blancs/noirs" est fausse.

Les soubassementsd'une crise

L'esclavage a été aboli défi-nitivement en 1848. Les îles sontdemeurées des colonies jusqu'à laloi de départementalisation de1946, départementalisation à peu près achevée en 2009, bienque dans la pratique, il reste desdysfonctionnements, des habi-tudes, et des mentalités, héritéesdu passé.

La crise en cours depuis le21 janvier a éclaté à l'initiativedu collectif Liyannaj Kont Pwofi-tasyon LKP (c'est-à-dire Associa-tion contre l'exploitation), qui fé-dère une cinquantaine de syndi-cats et d'associations, dont le plusinfluent est la très musclée (etpolitiquement indépendantiste)

UGTG (Union générale des tra-vailleurs guadeloupéens) dont l'ac-tuel président, Élie Domota, estaussi le président de Liyannaj. Sarevendication la plus importante,est l'élévation, « immédiate » detous les salaires d'au moins200 euros (net).

Certes, la situation des dé-partements d'outre-mer suscitel'envie de tout l'arc antillais. Maisla grande cherté de la vie en Gua-deloupe (et en Martinique) est in-contestable. Il y a à cela descauses objectives. D'abord le han-dicap de l'insularité (la Guade-loupe est à 6 700 kilomètres deParis). Il y a aussi des abus de po-sition dominante, et la recherchedu gain maximum, sans suffisam-ment de considération pour lebien commun, de certains sec-

teurs de la grande distribution,ou du raffinage et de la distribu-tion d'essence, dont le monopoleest réservé à une société, la SARA.Il y a aussi la survivance de taxesdatant de l'époque coloniale.

Cette cherté de la vie est re-connue officiellement, notam-ment par la surrémunération des

fonctionnaires (de 40 % par rap-port à leurs homologues de laFrance métropolitaine) qui créeune société à deux vitesses, lesfonctionnaires nantis, et lesautres, du secteur privé ; parl'abattement, également, de 30 %sur les revenus imposables parrapport au reste de la France.

Il faut ajouter que les pro-ductions traditionnelles des îles,la fabrication et l'exportation dusucre et du rhum, sont en trèsgrande régression, confrontées àla concurrence des pays d'Amé-rique centrale, du Sud, oud'Afrique. Mais il y a de grandespossibilités de développement dutourisme qui pourrait devenir l'in-dustrie salvatrice, si elle était suf-fisamment voulue par les Gua-deloupéens dans leur ensemble.

La Guadeloupe (comme laMartinique) ne veut pas l'indé-pendance. Les partis politiquesséparatistes n'ont jamais obtenula confiance de l'électorat. Ce quicomplique la situation présente,c'est l'ambiguïté du LKP et de sonleader (séparatiste), fort habileagitateur, bon connaisseur destechniques de manipulation desmasses. Élie Domota joue sur leséléments du mécontentement.

Il s'appuie sur une organisationsyndicale, puissamment organi-sée, qui utilise des arguments mus-clés, allant jusqu'à la limite duterrorisme : quadrillage des quar-tiers dans les villes et même dansles campagnes, menaces et coups,etc. Il s'appuie aussi sur une pa-tiente infiltration des milieux mé-diatiques. Il dispose de relais in-fluents et actifs dans l'Éducationnationale, où toute activité estarrêtée depuis trente-cinq jours.

Guerre raciale

On répète partout que la Gua-deloupe est en grève générale.En fait il n'en est rien. La Gua-deloupe est empêchée de tra-vailler, parce que les stations d'es-sence sont contrôlées par le LKP,parce que les militants de ce col-lectif obstruent les routes par desbarrages, et par des groupes demilitants violents et excités.

Les dirigeants du collectif ten-tent aussi d'allumer une guerreraciale. Les Antillais ne sont pasplus racistes que d'autres. Maisl'histoire fait que chez eux unesensibilité particulière existe dansle domaine des rapports interra-ciaux. Les esclaves ont été desNoirs, et il subsiste chez beau-coup une susceptibilité, compré-hensible, sur ce terrain psycho-logique, un ressentiment latentque des spécialistes de l'actionsubversive tentent d'utiliser auprofit de leurs ambitions. D'où laprudence avec laquelle les auto-rités doivent gérer le maintien del'ordre public, et les droits des ci-toyens, à travailler, à circuler li-brement, à s'exprimer librement,à être informés honnêtement.

D'APRÈS ÉDOUARD BOULOGNE

Pour en savoir plus,

visiter son blog

www.lescrutateur.com

» AVORTEMENT

L'espace Bernanos organisait undébat le 4 février. À la diffé-rence des épiscopats américain,espagnol, italien, pourquoi l'É-glise de France semble-t-ellepeu mobilisée contre l'avorte-ment ? Les intervenants, M. Der-ville et le curé de Saint-Louisd'Antin, ne répondirent que par-tiellement. Sans quoi ils auraientdû mettre en cause nosévêques... Un membre de l'assis-tance rappela que s'ils avaientréagi en 1974, la loi n'aurait pasété votée. Cette abstention futdue, paraît-il, à Mgr Guy Riobé,évêque d'Orléans. Aujourd'hui,observa le curé, tous les catho-liques ne condamnent pas l'avor-tement. À qui la faute, sinon auclergé conciliaire qui n'enseigneplus les commandements ? Il

ajouta : « Pastoralement, on apour mission de tenir une lignemais on ne sait pas où elle passeet comment la tenir. »

Y.L.

» GENDER

L'exposition "Homme-Femme :de quel sexe êtes-vous ?" setiendra du 7 mars 2009 au 3 jan-vier 2010 au Musuem-Aquariumde Nancy. Entre autres parte-naires, cités par Le Salon Beige :l'Association lesbienne, gay, bi-sexuelle et transsexuelle et leCentre de ressources sur legenre, qui « militent pour lathéorie du genre, plus perni-cieuse que le marxisme et des-tructrice de la famille ». Le Pe-tit théâtre de la médiathèque deNancy accueillera des manifesta-tions à destination des enfants

de moins de cinq ans. Inquié-tante illustration de l'influenced'une idéologie décryptée enpage 16 de ce numéro.

» PREMIÈRE

C'est une première : la HALDE atransmis aux parquets compé-tents des dossiers montés aprèsune opération de "testing immo-bilier". En novembre dernier,quinze agences et particuliersd'Île-de-France ont été piégés partéléphone. Deux juristes se fai-saient passer pour des locatairespotentiels, explique Michel Ler-nout, procureur de la Républiqueadjoint à Évry, dans les colonnesdu Parisien (27 février). « L'unavait un nom à consonance afri-caine, avec un accent. Tous lesdeux présentaient des situationsidentiques. [...] Ils demandaient

à effectuer une visite... » Resteà savoir si la suspicion et la cul-pabilité entretenues par ces mé-thodes sont une réponse adaptéeaux préjugés racistes ; ne sont-elles pas, elles aussi, une me-nace pour la cohésion sociale ?

» L'AFFAIRE

Contestant son éviction du Col-lège interarmées de Défense, Ay-meric Chauprade n'a pas obtenusa réintégration par le tribunaladministratif de Paris, saisi enréféré. Le site Internet du Pointcite un extrait du jugement in-tervenu le 28 février : « Euégard au faible nombre d'heuresd'enseignement dispensées paran par M. Chauprade, la mesurene porte pas une atteinte graveà son niveau de revenu. »

G.D.

❏ OUTRE-MER

Choses vues en GuadeloupeLa grande cherté de la vie en Guadeloupe (et en Martinique) est incontestable.Une situation exploitée par les agitateurs du LKP. Quadrillant les quartiers,infiltrant les milieux médiatiques, ils veulent allumer une guerre raciale.

» ARRANGEMENTS

Sur son blog, Gérard Collomb,le maire de Lyon, raconte lafolle nuit au cours de laquellele PS a désigné ses têtes deliste aux européennes. L'ab-sence de débat d'idées rivaliseavec les petits arrangements,confirmant que si les partisont vampirisé la démocratie,quelques notables ont vampi-risé les partis où l'adhérent estinvité à se taire. Et après cetexercice de copinage, les lea-ders invoquent "les intérêts su-périeurs du parti" pour étouf-fer les restes de raison...

» AJUSTÉE

Décidément en pleine forme,Gérard Collomb explique com-ment « une trouvaille séman-tique » a permis de réconcilierpartisans du protectionnismeet du libre échange. Le PS mè-nera la campagne européenneen défendant une « politiquede juste échange », c'est-à-dire « une politique euro-péenne commercialeajustée ». Ça ne veut pas diregrand chose, mais on espèrejuste que les électeurs ajuste-ront bien leur vote...

» SEGUELA

Jacques Séguéla, conseiller desprésidents de gauche commede droite, vient de gagner saplace au Panthéon de la vulga-rité consumériste en déclarantque si on n'a pas une Rolex àcinquante ans c'est qu'on araté sa vie. Inutile, sansdoute, de tenter de lui expli-quer qu'il peut exister d'autresvaleurs. Au moment où le chô-mage promet d'exploser, lesFrançais apprécieront cetteprovocation "bling-bling".

» SILENCE

Trop occupés à parler des der-nières vacances de SégolèneRoyal en galante compagnie,la plupart des médias ont àpeine relevé cetteinformation : deux anciens pa-trons de la diplomatie fran-çaise, tous deux anciens Pre-miers ministres et membre del'UMP, s'interrogent sur le re-tour de la France dans le com-mandement intégré de l'Otan.Dominique de Villepin etAlain Juppé ont-ils été invitéssur les chaînes de télévisionpour s'en expliquer ? Non, visi-blement, c'est en silence qu'onbrade l'intérêt national.

» VOLAILLE

Après le fameux « Casse-toipauvre con » de l'an dernier,Nicolas Sarkozy devait impé-rativement réussir sa visite auSalon de l'Agriculture. Pour ga-rantir le succès, la fédérationUMP de Paris avait mobilisédes militants et l'État mobiliséune cinquantaine de policiersen civil. Un peu artificiel maistellement efficace !

GUILLAUME CHATIZEL

À la limite du terrorisme...

Page 6: L’ACTION FRANÇAISE2 0...l'un des actionnaires, Spir Com-munication, et cités par l'AFP. Le capital de l'entreprise est dé-tenu à parts égales par le norvé-gien Schibsted et

❚ ASPECTS DE LA FRANCE

❚ 6 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2766 – du 5 au 18 mars 2009

Maintes fois reporté, en dé-pit de l'urgence décrétéepar le gouvernement, l'exa-

men par l'Assemblée nationale duprojet de loi "Création et Inter-net" devait débuter le 4 mars. Cetexte prévoit d'élargir les com-pétences de l'Autorité de régula-tion des mesures techniques(ARMT) : rebaptisée Haute Auto-rité pour la diffusion des œuvreset la protection des droits sur In-ternet (HADOPI), elle orchestrerala riposte contre les abonnés à In-ternet complices d'une violationde la propriété intellectuelle.

En contrepartie, producteurset distributeurs se sont engagésà rendre plus attractive leur offredématérialisée : la suppressiondes verrous numériques (DRM) em-pêchant le transfert des fichiersd'un appareil à l'autre est uneavancée significative ; un rema-niement de la "chronologie desmédias" est également envisagé,dans un premier temps pourrendre les films accessibles enligne sans délai après leur sortieen DVD ou Blue-ray.

Adresses IP

Cela conformément aux re-commandations de la mission Oli-vennes, qui avait préparé la si-gnature des accords de l'Élysée le23 novembre 2007. L'essentiel dudispositif est connu depuis lors.Saisie par les ayant droits - qui ar-pentent d'ores et déjà la Toile àla recherche des fraudeurs -, l'HA-DOPI pourra adresser un ou deuxavertissements aux abonnés misen cause, éventuellement parcourriel, au moins une fois parlettre recommandée selon le sou-hait du Sénat. Tant qu'une sanc-tion n'aura pas été prononcée, cesmises en demeure ne seront sus-ceptibles d'aucune contestation.En cas de récidive, la Haute Au-torité pourra exiger des fournis-seurs d'accès à Internet (FAI) lasuspension des connexions, pourune durée de trois mois à un an.Les clients n'en resteront pasmoins redevables à leur égard.S'ils ont souscrit une offre coupléeavec le téléphone et la télévision,ils devront continuer à bénéficierde ces services : une casse-têtetechnique pour les FAI. Avant lasignature de tout nouveau contrat,ceux-ci auront l'obligation de vé-rifier qu'aucune sanction ne pèsesur le souscripteur.

Ce sont donc les abonnés à In-ternet, et non les "pirates" eux-mêmes – passibles de trois ans deprison et 300 000 euros d'amendepour contrefaçon -, qui seront vi-sés par l'HADOPI, parce qu'ils sontcensés veiller, selon l'exposé desmotifs, à ce que leur connexion« ne fasse pas l'objet d'une utili-sation qui méconnaît les droitsde propriété littéraire et artis-tique ». À moins que les députésretiennent un amendement dé-

posé en ce sens, les accusés neseront pas informés de la naturedes "piratages" commis via leurabonnement. On imagine les dis-putes qui surviendront dans lesfamilles sanctionnées, dont lesmembres se renverront mutuel-lement la faute, ignorant qu'un

voisin se sera connecté à leur ré-seau sans fil, ou qu'un inconnuaura usurpé leur adresse IP...

Identifiant chaque point d'ac-cès au réseau mondial, lesadresses IP feront l'objet d'unecollecte constituant des preuvesà la fiabilité contestée : mêmedes imprimantes pourraient êtreaccusées de piratage ! Or, la loirendra d'autant plus nombreux lesinternautes cherchant à brouillerles pistes... « Alors que certainsparlementaires opposés au texteprédisent que cette loi multi-pliera les réseaux chiffrés et pri-vés, il semble [...] que la réalitéles ait déjà rattrapés », observeRichard Ying. « [Le] ministre entient toutefois compte comme lemontre le dossier de presse dis-tribué à l'occasion du MIDEM2009 : "Bien entendu, [...] cer-tains internautes parviendronttoujours [...] à dissimuler leursadresses IP ou à recourir à d'autresmoyens sophistiqués pour échap-per à des sanctions éventuelles.[...] Ce que recherche en fait leprojet de loi, c'est de faire chan-ger les esprits grâce à une cam-pagne pédagogique et préventivemassive. Peu importe, de ce pointde vue, qu'une minorité de gensparticulièrement astucieux yéchappent. »

Le ministre de la Culture,Christine Albanel, affichait sonoptimisme dans un communiquédiffusé le 11 février : « Il ressorten effet d'une récente étuded'opinion que 90 % des personnesaverties cesseraient de pirater àréception du deuxième mes-sage. » Une proportion appelée àdiminuer progressivement, étantdonné la débrouillardise des in-

ternautes. D'autant que les "pi-rates" les plus actifs sont proba-blement les plus avertis. Si le té-léchargement était enrayé, deslogiciels se proposeraient sansdoute d'automatiser l'enregistre-ment de reproductions légales.Vraisemblablement, le gouverne-

ment ne parviendrait durablementà ses fins qu'en plaçant chaqueordinateur sous surveillance.

Aussi les polémistes dénon-cent-ils volontiers une dérive to-talitaire. La charge pesant sur lesFAI pourrait les pousser tout dou-cement sur la voie du filtrage, quis'imposera inévitablement sur lesréseaux publics. Prenant la CNILà témoin, La Quadrature du Netsouligne que l'HADOPI pourra,« sans contrôle de l'autorité ju-diciaire », obtenir la copie desinformations de connexion « col-lectées à l'origine à des fins delutte contre le terrorisme ». Ca-toneo s'insurge sur Royal Artille-rie : « Nous allons rejoindre,

grâce à l'ancien patron d'un hy-permarché culturel qui débite lamédiocrité à torrents, le club despays policiers du web avec laChine, l'Iran, le Vietnam, Singa-pour et... la Syrie, car pour "pro-téger la création", la professionexige que l'on scanne en masse.

[...] Du monde, beaucoup demonde aux pupitres de flicage enFrance ! [...] Réclameront-ils desképis pour faire peur dans la webcam ? »

« Avec l'estimation de "3 000lettres recommandées d'avertis-sement par jour" de Christine Al-banel, le coût des envois de cour-riels et de recommandés sera de9,3 millions d'euros, qui ne sontplus dans le budget de fonction-nement de l'HADOPI », plafonnéà 6,7 millions d'euros (RichardYing). Autant d'argent alimentantla perfusion d'un modèle écono-mique submergé par les nouvellestechnologies. Le gouvernements'appuie sur le postulat que « la

consommation illégale est au-jourd'hui une source de destruc-tion de valeur » qui « compro-met la diversité des œuvres etconstitue une menace pour la vi-talité de la création, donc pourl'identité de la France et de l'Eu-rope » (rapport Olivennes). Or, ilest « difficile d'établir "le coûtdu partage illégal de fichiers" »,selon le Groupe de travail surl'économie de l'information del'OCDE, dont l'étude Contenus nu-mériques haut débit - La musiqueest citée par La Quadrature duNet. « Cette difficulté est reflé-tée dans les résultats des étudessur la question et dans les cri-tiques méthodologiques dont[elles] ont pu faire l'objet. [...]La plupart des études confirmentque ces deux phénomènes opè-rent en même temps – selon lesutilisateurs : le partage non au-torisé de fichiers conduit certainsà augmenter leur consommationet d'autres à la réduire. »

Bouleversement

« Aujourd'hui, plus d'un Fran-çais sur deux a accès à I'Internethaut débit. » Forts de ce constat,les rédacteurs du projet de loi ob-servent que « bien plus qu'un phé-nomène de société, c'est un véri-table tournant qui constitue, pourla diffusion de la culture, unechance extraordinaire, sans pré-cédent depuis l'invention de l'im-primerie ». Ont-ils saisi toute lamesure de ce bouleversement ?Le 23 novembre 2007, le prési-dent de la République s'était vantéde « faire prévaloir le droit légi-time des auteurs et de ceux quicontribuent à leur expression, surl'illusion et même sur le mensongede la gratuité ». Cela sonne faux,à l'heure où 20 Minutes annonceses premiers bénéfices, tandis quela Toile regorge de services ac-cessibles sans contrepartie di-recte : messagerie, stockage,suites logicielles, et même écouteen toute légalité de plusieurs mil-lions de titres sur Deezer !

« Répondant à l'argument dela gratuité destructrice de parti-sans de la loi, des adversairesavancent des exemples de réus-sites économiques issues d'un té-léchargement gratuit »,

» PIRATES, DEALERS ?

Généreux "partageurs" selonFramablog, les internautes pra-tiquant le téléchargement illégalsont des "pirates" aux yeux dugouvernement (le terme apparaîtdans l'exposé des motifs du pro-jet de loi), voire des "dealers"pour le producteur Luc Besson(Le Monde, 15 février). Sont-ilsseulement des voleurs au re-gard du droit ? Aucune appropriation fraudu-leuse de la chose d'autrui ne leurest reprochée ; ils sont en faitcoupables de contrefaçon. Lapropriété littéraire et artistique,ou propriété intellectuelle, n'estpas assimilable à la propriététout court ! Deux types de droitslui sont associés : le droit moralest censé garantir le respect des"œuvres de l'esprit" ; inaliénable,il ne peut être cédé, à la diffé-

rence des droits patrimoniaux,assurant le contrôle de l'exploita-tion par reproduction (DVD) oureprésentation (projection).Outre les droits d'auteur, il existeles "droits voisins", dont bénéfi-cient notamment les interprètes.Me Eolas nous éclaire sur le su-jet, exemples à l'appui, dans unbillet posté sur son blog le 20 fé-vrier (www.maitre-eolas.fr).

» PITOYABLE

Spécialiste autoproclamé desnouvelles technologies, FrédéricLefebvre, porte-parole de l'UMP,a fait étalage de sa médiocritédans les colonnes de 20 Minutesle 17 février. Soutenant Luc Bes-son dans sa croisade contre le"piratage", il demande « unecommission d'enquête parlemen-taire » sur « les sites de vidéosen streaming » ; une « pre-

mière bêtise » selon Me Eolas,qui rappelle, le 18 février,qu'une telle commission ne peutse constituer qu'en vue d'étudier« des faits déterminés », et nonune thématique générale. Re-prochant à la société Iliadd'avoir hébergé un site sans envérifier le contenu, le députédes Hauts-de-Seine se voit rétor-quer que seule la responsabilitéde l'éditeur est engagée ; aussipropose-t-il subitement de mo-difier la loi de confiance enl'économie numérique... Inter-rogé plus précisément sur lestreaming, qui permet de vision-ner des vidéos de façon plus oumoins instantanée, il le jugeparticulièrement dangereux, aumotif qu'il offrirait unemeilleure qualité d'image que letéléchargement ; en pratiquec'est l'inverse. Chapeau !

G.D.

❏ HADOPI

La fin de l'eldorado numérique ?Le gouvernement s'attaque au téléchargement illégal sur Internet. À cet effet, la loi "Création et Internet"arrive devant les députés. Une façon de préserver la vitalité de la création et la diversité culturelle ?Beaucoup n'y voient qu'une perfusion consentie à des industriels passés maîtres dans l'art du lobbying.

»»»

L'HADOPI privera les abonnés "pirates" de leur accès à Internet.

Page 7: L’ACTION FRANÇAISE2 0...l'un des actionnaires, Spir Com-munication, et cités par l'AFP. Le capital de l'entreprise est dé-tenu à parts égales par le norvé-gien Schibsted et

ASPECTS DU MONDE ❚

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2766 – du 5 au 18 mars 2009 7 ❚

C'est un Berlusconi au som-met de sa forme politiquequi a reçu M. Sarkozy la se-

maine dernière à Rome. Lors dece 27e sommet annuel, l'Italie aannoncé son retour dans le nu-cléaire civil, abandonné il y a plusde vingt ans. Un accord-cadre, si-gné dans le décor avantageux dela Villa Madame, prévoit le dé-veloppement en commun parEnel, l'électricien italien, et EDFd'au moins quatre centrales nu-cléaires en Italie ; déjà présentà Flamanville, dans le départe-ment de la Manche, Enel prendraune participation de 12,5 % dansle futur réacteur EPR de Penly, enSeine-Maritime.

Revirement

L'Italie avait renoncé au nu-cléaire après la catastrophe deTchernobyl en 1986. Parmi les op-posants à cette énergie figuraitalors, outre les Verts et les grosbataillons de gauche, un certainGianfranco Fini ; aujourdhui, leprésident "postfasciste" de laChambre des députés avoue quece fut une « erreur de jeunesse ».Néanmoins, le choix des futurssites risque de soulever pas malde difficultés avec les populationset autorités locales.

Au terme de leur rencontre,Silvio Berlusconi et Nicolas Sar-kozy se sont plu à souligner, par-fois avec un lyrisme incongru, leuridentité de vues sur les autres su-jets abordés, qu'il s'agisse de lacoopération militaire entre laFrance et l'Italie en Afghanistan,de la nécessité de réformer lefonctionnement de la Commissioneuropéenne jugée trop techno-cratique (avec incidemment unepique contre la "rigidité" alle-mande), ou encore de l'attitude àadopter face à la crise économiqueet financière. Berlusconi, qui pré-side le G8 pour la troisième fois,

accueillera cet été en Sardaigneun sommet des pays les plus richesdu monde ; à cette occasion, leprésident du conseil italien pro-posera un plan original de soutienà l'économie de la Cisjordanie, le-quel prévoit notamment la créa-tion d'un aéroport internationalpour faire venir les touristes oupèlerins chrétiens sur les Lieuxsaints à partir de Bethléem.

Une absenceremarquée

Lors de cette journée franco-italienne prodigue de complimentsréciproques, une personne aurabrillé par son absence, CarlaBruni-Sarkozy dont on sait le rôletrouble dans deux affaires concer-nant d'anciens membres des Bri-gades rouges. L'épouse du prési-dent de la République ne cached'ailleurs pas son hostilité à Sil-vio Berlusconi. Or, ne reculant de-vant aucun sacrifice, Sarkozy aassuré à son hôte qu'il ne parta-geait nullement le sentiment de

l'ex-top-modèle. Et, en rajoutantdans l'éloge, voire l'obséquiosité,il a félicité Berlusconi pour sonrécent succès électoral en Sar-daigne et, d'une manière géné-rale, pour avoir « défié le politi-quement correct, les médias etles lieux communs ».

Voilà qui aura peut-être causésous les lambris de l'Élyséequelques éclats domestiques. Enrevanche, Silvio Berlusconi n'a pasmanqué d'apprécier la louange,lui qui, naguère moqué et snobé,caracole dans les sondages aprèsune campagne de Sardaigne me-née tambour battant et concluepar une victoire éclatante.

« Une orgie de pouvoir », ti-trait le magazine de gauche L'Es-presso au lendemain de cetteélection régionale de la mi-févrieret qui, a priori, ne paraissait pasfavorable à la droite. L'amertumede l'opposition est bien compré-hensible, car cette défaite ducentre gauche, survenant deuxmois et demi après la reconquêtedes Abruzzes par le Peuple de la

liberté (berlusconien), marque unegradation significative dans la droi-tisation de l'opinion italienne. Lecoup est d'autant plus rude pourle Parti démocrate (PD), rassem-blement d'anciens communistesconvertis au marché et de catho-liques de gauche, que son candi-dat, le gouverneur sortant RenatoSoru, était parfois présentécomme l'étoile montante de l'an-tiberlusconisme. Raison pour la-quelle le Cavaliere s'est beaucoupinvesti dans la campagne électo-rale. Et la victoire de son candi-dat, un professeur d'économie sansgrand relief, est d'abord la sienne.

Euthanasie

Après moins d'un an de gou-vernement de droite, et alors quele pays traverse une crise éco-nomique et sociale ponctuée cesderniers temps par des manifes-tations de salariés mécontents,la gauche espérait se refaire unesanté et créer à Cagliari les condi-tions dun redressement national.C'est raté. Le Parti démocrate seretrouve en pleine tourmente.Walter Veltroni, leader peu ins-piré, a démissionné de son posteet « demandé pardon » aux mi-litants déconfits. Un secrétairenational, Dario Franceschini, ve-nant de l'aile démo-chrétienne,a été désigné dans l'urgence enattendant un congrès extraordi-naire prévu en octobre prochain ;auparavant, le PD devra s'effor-cer de surmonter ses contradic-tions internes, notamment sur lesquestions d'éthique, afin d'af-fronter sans trop de cacophonieles élections européennes dumois de juin.

La virulente polémique qui aentouré il y a un mois la mort -provoquée - d'Eluana Englaro, unefemme dans le coma depuis dix-sept ans, a montré l'extrême sen-sibilité des Italiens au drame del'euthanasie. En se faisant alorsl'interprète des positions de l'É-glise catholique, Silvio Berlusconiest d'ailleurs entré en conflit avecle président de la République,l'ex-communiste Giorgio Napoli-tano. Preuve que les principes oc-cupent encore une place centraledans la vie publique italienne.

GUY C. MENUSIER

❏ ITALIE

Berlusconi monte en puissanceÀ l'occasion du 27e sommet franco-italien, Nicolas Sarkozy a combléde louanges le Cavaliere. Malgré la grogne sociale, le chef du gouvernementitalien profite d'une nouvelle déroute de l'opposition.

Silvio Berlusconi : "une orgie de pouvoir"

rapporte Richard Ying. « Leplus célèbre est celui de Radio-head qui a diffusé son nouvel al-bum sans contrainte, laissant auxinternautes le choix d'une rému-nération. Le comanager de Ra-diohead, Brian Message, évoquecette méthode de distribution à"coûts quasi nuls" : "La musiquediffusée ou téléchargée gratui-tement en ligne a une vraie va-leur économique. [...] À partir decette gratuité, il devient possiblede fidéliser le public, de vendredes places de concert, des col-lectors, etc. [...] C'est peut-êtreparadoxal, mais la gratuité faitdésormais partie du business dela musique." De façon similaire,il est fréquent de lire [...] quedes talents musicaux se sont faitconnaître et gagnent leurs reve-nus grâce à des téléchargementset écoutes gratuits. » Selon Ni-colas Sarkozy, « si on laissait faire,il n'y aurait que quelques artistesqui s'en sortiraient - les plusconnus - et [...] les jeunes ar-tistes ne pourraient plus avoir ac-cès à rien du tout ». Beaucouppensent le contraire, alors que lebouche à oreille, aux effets dé-cuplés par la Toile, relativise latoute-puissance du marketing uni-formisateur.

Une alternative

Attachée à son eldorado, lablogosphère s'est enflamméecontre la loi, dénonçant une vio-lation des "droits de l'homme". LeParlement européen s'en est faitl'écho, mais aucune voix ne s'estélevée au Sénat contre l'adoptiondu projet le 30 octobre 2008. Ma-nifestement, les industriels de laculture ont mené un travail delobbying efficace. Leurs opposantsdevront en prendre de la graine.D'autant que leurs propositionssont jugées crédibles par certaines"autorités", telle la Commissionpour la libération de la croissancefrançaise. Selon le rapport Attali,cité par Richard Ying, une poli-tique de « contrôle des usages in-dividuels constituerait un freinmajeur à la croissance. [...] Cesmécanismes introduiraient unesurveillance de nature à porteratteinte au respect de la vie pri-vée et aux libertés individuelles,tout à fait contraire aux exigencesde la création et à la nature réellede l'économie numérique. [...] Larémunération des artistes doitêtre assurée par des mécanismesd'abonnement et par les vrais bé-néficiaires du téléchargement :les fournisseurs d'accès Internet. »Un plaidoyer en faveur de la "li-cence globale" ! Nous y revien-drons dans notre prochain numéro.

GRÉGOIRE DUBOST

PRINCIPALES SOURCES :* Présentation du projet de loi Créa-tion et Internet. Dossier de presse duministère de la Culture et de la Com-munication, 18 juin 2008.* HADOPI, "Riposte graduée" : Une ré-ponse inefficace, inapplicable et dan-gereuse à un faux problème. Dossiermis en ligne par La Quadrature duNet, version 1.0, 9 fevrier 2009.* Le projet de loi "Création et Inter-net" : inadéquat dans la lutte contrele téléchargement illégal. Analyse deRichard Ying (http://richard.ying.fr/),version 1.3, 11 février 2009.

»»»

» CAUCHEMAR

Jean-Marie Le Pen est pressentipour présider la séance d'ouver-ture du prochain Parlement eu-ropéen : à bientôt quatre-vingt-un ans, le chef du Front nationalpourrait bénéficier de l'honneurrevenant au doyen de l'assem-blée. Jacques Delors, Valéry Gis-cacard d'Estaing et quelques per-sonnalités étrangères seraientsollicités pour se porter candidatsafin de nous épargner ce "cau-chemar". « Ce ne serait pas unepremière pour un représentantdu FN », rappelle Ludovic Vi-gogne dans L'Express du 25 fé-vrier : « En 1989, Claude Autant-Lara, élu à Strasbourg à quatre-vingt-huit ans sous cetteétiquette, avait déjà eu ce privi-

lège. Les propos qu'il avait tenusdans l'hémicycle à cette occasionavaient à tel point défrayé lachronique que le règlement en aété changé. Désormais, il est sti-pulé que "seul le président élupeut prononcer un discours d'ou-verture". »

» LIBÉRALISME

En dépit de son euroscepticisme,le président tchèque VaclavKlaus n'est pas une mascotteidéale pour les souverainistesagitant l'épouvantail du "plom-bier polonais". Prenant la paroledevant le Parlement européen le19 février, il a certes réclaméune pratique accrue de la subsi-diarité. Mais il a dénoncé parailleurs le système économique

de l'Union européenne, « celuide l'oppression du marché » ;fustigeant « l'absurdité de l'ingé-rence politique dansl'économie », il lui attribue l'ori-gine de la crise.

» MILICIENS

Confrontée à une recrudescencedes violences sexuelles, l'Italieinstitue des "rondes citoyennes"pour assurer la sécurité. Un dé-cret-loi d'application immédiatea été adopté en ce sens enConseil des ministres le 19 fé-vrier. Les volontaires, recrutésen priorité parmi les retraitésdes forces de l'ordre, ne serontpas armés. Téléphones portableset talkies-walkies assureront laliaison avec les policiers.

« Le gouvernement pense ainsise prémunir contre une dérivevers des associations de justi-ciers privés », précise RichardHeuzé (Le Figaro, 20 février).

» IN MEMORIAM

Libertas a perdu son statut departi européen, et les200 000 euros de subventions quien découlaient. Le Bureau duParlement européen est revenusur sa décision le 18 février.Confrontée à la défection d'unEstonien et d'un Bulgare, la for-mation eurosceptique n'est plusen mesure de revendiquer desélus issus d'au moins sept paysde l'Union, condition nécessaireà l'attribution du statut.

G.D.

Page 8: L’ACTION FRANÇAISE2 0...l'un des actionnaires, Spir Com-munication, et cités par l'AFP. Le capital de l'entreprise est dé-tenu à parts égales par le norvé-gien Schibsted et

❚ ASPECTS DU MONDE

❚ 8 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2766 – du 5 au 18 mars 2009

On les voit – surtout desfemmes – quémander dessignatures au bas de péti-

tions. Les tenues, robes ou pan-talons, sont occidentales. Mais lescheveux sont toujours recouvertsd'un foulard. Jamais ou rarementnoir. Les couleurs varient entremarron, bleu, gris ou jaune. Cesfemmes sont les missionnairesd'une cause. Celle des moudjahi-dines, opposants iraniens au ré-gime des mollahs. Leur histoires'inscrit dans les soubresauts, lesà-coups, les chaos révolutionnaireset religieux qui divisent l'Iran.

Auvers-sur-Oise

Moudjahidines et mollahs ontfait un bout de chemin ensemblecontre le Shah et sa police se-crète, la Savak. Les lignes paral-lèles se sont brisées pour s'en-trecroiser. Attentats, répression,exil. C'est la "Fuite en France"...Massoud Radjavi, leur chef, safemme Maryan ainsi que Beni Sadr,l'ancien président iranien, y sontaccueillis. Le droit d'asile se pra-tique aussi comme une monnaied'échange. Durant quelques an-nées une partie des moudjahi-dines, dont plusieurs dirigeants,s'établissent à Auvers-sur-Oise.Village jusque-là plus connu dansl'histoire de la peinture qu'illus-tré par l'actualité politique. C'estlà, dans le cimetière jouxtant àl'église, que reposent Vincent VanGogh et son frère Théo.

En 1987 les opposants au ré-gime des mollahs font les fraisd'un rapprochement franco-ira-nien. L'Iran avait commandité desattentats à Paris. En "lâchant" lesmoudjahidines on "achetait" la sé-

curité... et du pétrole. CharlesPasqua, ministre de l'Intérieur dugouvernement Chirac, expulseplusieurs dizaines d'opposantsdont Massoud Radjavi. FrançoisMitterrand est président de la Ré-

publique mais les socialistes, eux,sont dans l'opposition. Ils s'insur-gent contre ces mesures d'expul-sion, rejoints par la Ligue desDroits de l'Homme et nombre d'as-sociations humanitaires.

Un pacte avec Saddam

Devenus des errants, une par-tie des moudjahidines trouventrefuge en Irak, après un accordpassé avec Saddam Hussein. C'estainsi que s'établit la base d'Ash-raf, vaste camp situé au Nord deBagdad. Nécessité fait loi, maisle calcul est-il bon ? On peut en

douter. À deux reprises, je mesuis rendu ces dernières annéesen Iran. Lors des premières élec-tions municipales, puis lors de laprésidentielle aboutissant à l'élec-tion de Khatami. L'homme, civi-

lisé et cultivé, tout mollah qu'ilest, passait pour modéré et sé-duisait l'Occident, ce qui n'est pasle cas de son successeur Ahmadi-nejad. L'occasion me fut donnéed'avoir des contacts dans tous lesmilieux, en particulier avec desopposants. Nulle part je n'ai re-cueilli l'expression d'un quel-conque appui aux moudjahidines.L'établissement en Irak, ennemide l'Iran, était, et sans doute de-meure, assimilé à une compro-mission, sinon à une trahison.

Reste que les moudjahidines,hormis les "campeurs" d'Ashraf,retrouvèrent Auvers et le sol fran-çais, ainsi que la protection dont

ils bénéficiaient. Mais Massouddisparut, sans que l'on sache s'ilest encore en vie. Le culte de sapersonnalité demeure. Désormais,celle qui se produit partout estsa femme (sa veuve ?) MaryamRadjavi. À Auvers, le frère de Mas-soud, le docteur Radjavi, joue leshôtes des journalistes et deshommes politiques. Établi enFrance depuis le temps de sesétudes universitaires, l'homme estd'un abord agréable, pratiquantune courtoisie parfaite. Ses com-pagnons et lui-même vivent et su-bissent les aléas de la politiqueinternationale et des relationsfranco-iraniennes.

Plaire aux mollahs

Les moudjahidines se virentinscrits sur la liste des organisa-tions terroristes par les États-Uniset l'Union européenne, ce quin'empêche pas les gouvernementsfrançais, de gauche comme dedroite, de veiller sur leur sécu-rité. Jusqu'au 17 juin 2003, oùmille cinq cents policiers, gen-darmes et CRS déboulèrent à Au-vers-sur-Oise. Portes enfoncées,murs abattus, intérieurs sacca-gés, villas investies Ubu Roi avaitfrappé. À l'Élysée il s'appelaitJacques Chirac ; place Beauvau,son visage était celui de NicolasSarkozy. À condition qu'une des-cente et une enquête fussent né-cessaires et justifiées, il eût suf-fit qu'un officier de police sonneà la porte. On leur eût ouvert etla perquisition se fût opérée sansle moindre incident. Perquisitionqui ne permit de découvrir au-cune arme, aucun plan ourdissantun quelconque complot.

On décèle la manipulation, par ailleurs parfaitement légale,d'importantes sommes d'argent.Quelques cadres du mouvementfurent arrêtés et libérés peu dejours plus tard sur instruction ju-diciaire. Mais six ans après, le dos-sier reste ouvert. Et cela bien quel'Union européenne vienne, le29 janvier dernier, de rayer l'Or-ganisation des Moudjaidines dupeuple d'Iran (l'OMPI) de la listedes groupes terroristes. Depuis sixans le dossier dort. Ceux mis enexamen ont été interrogés pourla forme. Simple interrogatoired'identité sans lendemain. Maiséteindre la procédure classer ledossier mécontenterait l'Iran, cequi pourrait s'avérer préjudiciablepour les intérêts français, ceuxpar exemple du groupe Total, ce-lui-là même dont Pierre Péan af-firme – à tort ou à raison – qu'ilfut si bien servi naguère en Bir-manie par Bernard Kouchner...

Que serait demain, après-de-main, un Iran avec les moudjahi-dines au pouvoir ? Serait-il plus"aimable", plus respectueux desDroits de l'Homme que celui desmollahs ? N'oublions jamais que"la République est belle sous l'Em-pire...." Ce qui n'empêche pas dejuger l'acharnement judiciairefrançais contestable. Paris est enporte à faux, par rapport à l'Unioneuropéenne à défaut de l'être avecWashington. Mais ne faut-il pas yvoir là précisément l'axe franco-américain souhaité par l'Élysée ?

CHARLES-HENRI BRIGNAC

❏ ISLAM

Qui sont les moudjahidines ? Terroristes, résistants, exilés ? Opposants iraniens au régime du Shah puis à celui des mollahs,les moudjahiddines sont méconnus. Ils avaient pourtant bénéficié de l'accueil de la France

pendant quelque temps. Retour sur leur histoire.

IL y a dix jours, un accord d'ar-mistice de longue durée con-cernant Gaza semblait bouclé

grâce à la médiation égyptienneet à des pressions venant de Wa-shington. On disait le Premier mi-nistre sortant Olmert prêt à le si-gner. Le président Moubarak l'amême annoncé. À la dernière mi-nute, Olmert, sans doute sous l'in-fluence des extrémistes israé-liens, exigeant la libération préa-lable du soldat Shalit, y arenoncé, destituant le négocia-teur en chef des arrangementsconclus avec Le Caire !

Olmert a préféré entrer dansl'histoire comme le proche d'unextrémisme voué à l'échec, et noncomme un homme d'État compa-

rable à Begin. Les relations avecl'Égypte se sont donc tendues. LeQatar, la Jordanie et même lalointaine Mauritanie, pays arabesqui entretiennent aussi des rela-tions diplomatiques officiellesavec l'État hébreu, ont immédia-tement rappelé leurs ambassa-deurs. Israël est à nouveau trèsisolé, d'autant que l'allié protec-teur américain montre des signesd'impatience grandissante. Onn'est pas prêt de sortir de l'im-passe, sauf nouvelle surprise.

Désigné Premier ministre, lechef du Likoud Nétanyahou n'a ob-tenu ni l'accord du travaillisteEhoud Barak, ni celui de TzipiLivni pour entrer dans un gou-vernement d'"union nationale".

L'un et l'autre, avec l'appui dis-cret du chef de l'État, Shimon Pé-rès, voudraient reprendre les né-gociations avec les Palestinienssur la base des préconisations dela communauté internationale.C'est-à-dire la création d'un Étatpalestinien.

Droit dans le mur

Or, Nétanyahou s'était engagéà s'y opposer. Pour apaiser Livniet Barak, il a déclaré que son gou-vernement respecterait les ac-cords internationaux passés parl'État hébreu. On ne voit pas com-ment, puisqu'ils prévoient, ainsique la fameuse "feuille de route"américaine, la création d'un État

palestinien viable dans des fron-tières garanties ! Nétanyahousemble donc condamné à gouver-ner avec les partis extrémistes :la formation laïque et ultranatio-naliste Israël Beitenou ou des par-tis religieux. Ce qui le conduit toutdroit dans le mur. Les Américains,comme les Européens, n'excluentplus une reprise des violences dansla région, voire un embrasementgénéral ; ils s'en inquiètent ou-vertement.

Cerise sur le gâteau, ce lundimatin, au moment où nous écri-vons, tandis que doit débuter enÉgypte la conférence internatio-nale sur la reconstruction de Gaza– Américains et Européens devantpayer ce que les Israéliens ont dé-

truit ! –, le gouvernement de Tel-Aviv a déclaré qu'il allait autori-ser de nouvelles colonisations sau-vages en Cisjordanie. Comme pro-vocation, on ne pouvait pas mieuxfaire ! Les plus pessimistes ob-servent que les extrémistesaveugles des deux bords se sontdonné la main pour embraser larégion. Heureusement que le piren'est pas toujours sûr.

P.N.

❏ ISRAËL

Régime de douche écossaiseLe feuilleton politique israélien nous réserve chaque semaine, sinon chaque jour, des surprises qui ne sontpas toujours agréables. Tel le revirement d'Ehud Olmert renonçant aux accords sur Gaza.

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ASPECTS DU MONDE ❚

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2766 – du 5 au 18 mars 2009 9 ❚

La guerre en Afghanistan estdésormais la seule quicompte pour le président Ba-

rack Obama. L'Irak, c'est presquedu passé. Reste à savoir combiende soldats resteront autour deBagdad après la relève des troupesirakiennes. Août 2010 semble pourl'instant la date charnière.

Insolence

Creuset d'un immense bras defer contre les talibans, Al Qaedaet le Pakistan, l'Afghanistan risqued'être le Vietnam de BarackObama. Le conflit dans le Sudtourmente le Pentagone et la po-litique à Kaboul irrite la MaisonBlanche. En particulier, un hommela déçoit : le président Hamid Kar-zai. Personnage central d'un ré-gime archaïque prêt à exploser àtout moment, il fut mis en placepar Washington après la chute destalibans en 2001. Les conseillersde Bush avaient écarté d'un gestela restauration monarchique : troppasséiste. Dommage. Le roi étaitpopulaire et, dans cette mosaïquede tribus, il aurait assuré l'unité.Les Américains préfèrent les ma-rionnettes... Mais certaines renâ-clent, et même critiquent.

Alors, les jours de Karzai sont-ils comptés ? Beaucoup, ici, le

pensent. Un incident révélateuréclata au palais présidentiel deKaboul il y a quelques semaines.Joseph Biden, bientôt vice-prési-dent, se trouvait en visite offi-cielle avec quelques autres séna-teurs. Entre les cuisses d'agneaugrillé et le riz au lait de chèvre,il se pencha vers Karzai pour luidemander non sans sévérité où enétait la corruption en Afghanis-tan – pays champion du mondedans cette catégorie. Karzaihaussa les sourcils et répondit d'unton sec : « Corruption ? Quellecorruption ? » Sidéré, Biden jetasa serviette et déclara que le dî-ner était terminé. La petite dé-légation quitta aussitôt l'immensesalle de réception et reprit le jourmême l'avion pour Washington.

Les griefs furent de nouveauprécisés : prolifération des pots-de-vin qui touche tous les éche-lons de l'appareil administratif etn'épargne ni la police ni l'armée ;

développement du trafic d'héroïnedans un pays couvert de champsde pavot ; absence de progrès éco-nomique malgré les millions dedollars apportés par l'Amérique.

Obama juge Karzai inefficaceet Hillary Clinton, secrétaire d'É-tat, y voit le chef d'un "narco-state". Deux autres raisons plussubtiles en font un homme àabattre. Le président afghan nemanque pas de rappeler que sison pays a pris du retard dans lacontre-guerilla et le développe-ment, c'est à cause de la guerreen Irak qui fut, pendant des an-nées cruciales, la priorité pourGeorge Bush et le Pentagone. L'ar-gument fait d'autant plus mal qu'ilprend les orgueilleux protecteursà leurs propres contradictions. Parailleurs, Karzai dénonce avec vé-hémence le cynisme américain àchaque "bavure" provoquant lamort de civils dans des maisonsdynamitées ou des villages bom-

bardés. L'accusation fait, elleaussi, d'autant plus mal que lesresponsables de la guerre psy-chologique connaissent l'effet dé-sastreux de tels drames.

Irremplaçable

Mais Karzai possède dde sé-rieux atouts. Malgré la corruption,la drogue, la pauvreté, qui a as-suré la transition d'un pays dé-vasté par les talibans vers un paysencore troublé mais en ordre ? Quia coordonné le difficile passagede la dictature coranique àl'amorce démocratique ? Qui a or-chestré la mise en place d'insti-tutions modernes au service d'unÉtat qui semblait figé depuis dessiècles ? Qui s'est entouré d'uneéquipe d'administrateurs dont l'ex-périence serait désormais difficileà concurrencer ? Qui a dû gérerles aides internationales avec desstructures inadaptées ? Karzai

reste indispensable. Les Améri-cains devront compter avec lui.Et puis, n'est-il pas déjà trop tard,à six mois de l'élection présiden-tielle, pour miser sur un autre che-val ? Et par qui le remplacer ? Au-cun autre politicien n'a son expé-rience ni sa ténacité. L'ancien etle nouvel ambassadeurs américainslui sont tous deux favorables.« Peu de chefs d'État, affirment-ils, seraient capables de dirigercomme il le fait tout en étant prisentre la menace d'un attentat etl'offensive d'une rébellion. »

De notre correspondant

aux États-Unis

PHILIPPE MAINE

❏ AFGHANISTAN

Karzai, la bête noire d'ObamaLe président afghan ne se montre pas aussi docile que l'auraient souhaité les Américains. Ils devront pourtant compter avec lui.

Par suite d'un référendumconstitutionnel, qui s'est dé-roulé normalement et dont

la validité n'a pas été contestée,54 % des votants ont décidé quele colonel Hugo Chavez pourraitse représenter à la présidence duVénézuela sans limitation dunombre de mandats. Présidenceà vie ? Peut-être, si tout va bien.Voie ouverte pour briguer un troi-sième mandat en 2012 ? Certai-nement.

Démagogue

Hugo Chavez, bête noire del'administration Bush, "présidentdémagogue" selon l'actuelle di-rection de la Maison Blanche a,une fois de plus, utilisé son anti-américanisme primaire comme ar-gument de campagne. Et ce mal-gré l'arrivée de Barack Obama àla tête des États-Unis, qui béné-ficie d'une excellente image enAmérique latine. Mais cela seuln'explique pas sa popularité, alorsque son bilan est mitigé.

À l'inverse de ce que ses ad-versaires font dire à l'étranger,son régime n'est pas une dicta-ture. Le Vénézuela de Chavezn'est pas l'Iran de ses amis les aya-tollahs et surtout d'Ahmadinejad ;ni Cuba des frères Castro, bienqu'il se dise toujours admirateurde "Fidel". En quelques années, ila pratiquement éradiqué l'anal-phabétisme. De même, en enga-

geant de très nombreux médecinscubains sans emploi dans leurpropre pays, un bon réseau sani-taire a été mis en place sur l'en-semble du territoire vénézuélien.

En revanche, si une redistri-bution des revenus a amélioré leniveau de vie des paysans, la ré-forme agraire (le partage desterres non cultivées) a été unéchec. Les grands propriétairesen ont été expropriés, mais lespaysans, peut-être par manque

de structures d'aide adaptées àleurs besoins, ne les ont pas cul-tivées. Tout reste à faire ou à re-faire. Les nationalisations n'ontpas été un échec total. Toutefois,aptes à satisfaire l'amour-proprede la majorité de la population,elles n'ont pas donné de résultatséconomiques tangibles. Le sec-teur pétrolier, notamment, stra-tégique pour le pays, est en pertede productivité et l'industrie restestagnante.

Le plus grand mal dont souffrele pays est l'insécurité croissante.La criminalité est devenue in-contrôlable malgré les milices pri-vées. La capitale et les grandesvilles en souffrent, mais aussi lacampagne. Le régime semble im-puissant à faire face. La déma-gogie gauchiste apparaît incom-patible avec une politique sécu-ritaire efficace. On connaît ça.En outre, par suite de dépensesinconsidérées, l'inflation, à deuxchiffres, détruit la cohésion so-ciale et anéantit, surtout, le peude bien-être apporté par la "ré-volution bolivarienne" (c'est ainsique Chavez a baptisé sa politique)aux couches les plus défavoriséesde la population.

Rente pétrolière

Or, au moment où Chavez lé-gitime son régime et se donne lesmoyens de durer et de réaliser sespromesses non tenues, la baissegénérale des prix pétroliers ré-trécit singulièrement sa capacitéd'agir. La manne pétrolière lui per-mettant – comme à l'Iran, commeà l'Algérie, pour ne citer que cesdeux pays "amis" de Chavez – demasquer ses échecs. Il va se trou-ver devant un dilemme : suppri-mer les libertés politiques, ins-taurer une dictature dure afin defaire taire les mécontentements,ou faire face à des soulèvementsqui ne vont pas tarder.

Alors, Hugo Chavez, présidentà vie ? Rien de moins sûr finale-ment. Il n'aura pas les moyens deses ambitions, et s'il instaure unedictature militaro-socialiste, ilsera menacé... par un coup d'É-tat. Un référendum ne pourraitrésoudre seul les problèmes d'unpays de la taille et de l'impor-tance du Vénézuela, ni sans douted'aucun autre.

PASCAL NARI

AMÉRIQUE DU SUD

Hugo Chavez, président à vie ?Le président du Vénézuela pourra briguer un troisième mandat. Le moyen detenir ses promesses non tenues ? En dépit des progrès réalisés en matièred'éducation et de santé, son bilan est mitigé. Revue de ses principaux échecs.

Hugo Chavez est président du Venezueladepuis le 2 février 1999.

» ENDETTEMENT

Le 27 février, le Figaro écono-mie signale que le déficit bud-gétaire des États-Unis qua-druple, atteignant 1 750 mil-liards de dollars.Cela fait dugouvernement fédéral l'orga-nisme le plus endetté dumonde. Les guerres en Irak etAfghanistan coûtent très cher.Une telle situation mériteraitla mise en place d'un systèmede tutelle des finances états-uniennes comprenant les prin-cipaux créanciers !(Chine, Ja-pon, Russie, etc.)

» ATTENTAT

Au sujet de l'attentat du Cairesurvenu le 24 février – qui acoûté la vie à une jeune Fran-çaise et blessé plusieurs de sescamarades de Levallois –, leQuai d'Orsay affirme que « laFrance n'était pas visée ». Maisla DGSE révèle que « les tou-ristes français auraient étépistés pendant plusieursjours ». Les poseurs debombes auraient voulu fairepayer à la France la participa-tion de la frégate Germinal aublocus de Gaza. Ce qui nousrenvoie à l'Ecclésiaste cité parBainville « On aura les consé-quences. Celui qui creuse unefosse y tombe ».

PERCEVAL

» ERRATUM

Dans un écho consacré à laBelgique, nous avions écrit quele ministre des Finances avait« gêné » la vente de Fortis àla BNP. Il fallait lire « géré ».Une seule lettre vous manqueet tout est déformé...

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❚ HISTOIRE

❚ 10 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2766 – du 5 au 18 mars 2009

Le progrès technique, unesource de problème ? Si l'onconsidère la question des

droits d'auteur, force est deconstater que les grandes évolu-tions techniques ont obligé (etobligent encore) les États à légi-férer : l'invention de l'imprimerieau XVe siècle a fait naître la no-tion même de droit d'auteur, l'ex-plosion des nouvelles technolo-gies au XXIe a pour corollaire lanécessité de prévoir des sanctionscontre le piratage. Dans le cou-rant du mois de mars sera soumisau vote de l'Assemblée un projetde loi "Création et Internet" (ouloi Hadopi) qui propose notam-ment la création d'une autoritéadministrative qui aurait pourfonction d'appliquer une « ripostegraduée », selon l'expressionconsacrée, contre le télécharge-ment numérique illégal. Il s'agi-rait de sanctionner progressive-ment les internautes contreve-nant aux lois régissant les droitsd'auteur (voir page 6).

Attribution

L'expression même de "droitd'auteur" est récente : elle n'ap-paraît pas avant la deuxième moi-tié du XIXe siècle, même si la no-tion existe juridiquement depuisla fin du XVIe siècle. Au regard desproductions artistiques, la ques-tion de l'auteur intervient doncassez tardivement, du moins danssa conception moderne. Si l'on re-prend les termes du droit françaisqui distingue droit moral (qui re-connaît ad vitam aeternam la pa-ternité d'une œuvre à son auteur)et le droit patrimonial (qui donnel'exploitation exclusive de l'œuvreà son auteur), le premier est an-térieur au second. Si l'on peut dire,on s'est d'abord intéressé à l'at-tribution des œuvres avant de seposer la question de la rétribu-tion. Ainsi, si Corneille était re-connu comme l'auteur de sespièces, dans les faits les droitsd'exploitation lui échappaient auprofit de la troupe qui avait l'ex-clusivité des représentations.

Dans l'Antiquité, le souci del'attribution domine également,à tel point que les Anciens in-ventent des auteurs comme ce

fut le cas pour Homère. Mais leurdémarche ne s'inscrit pas dans laquestion du droit, mais bien plusdans la recherche de l'origine deschoses : dans les passages de LaPoétique d'Aristote traduits en la-tin par Cicéron, le nom latin auc-tor apparaît là où le Stagiriteparle de « découvreur » ; pourparler de l'auteur, au sens mo-derne, le philosophe grec et l'ora-teur latin parlent de « poète »,

c'est-à-dire « celui qui crée ».Cette quête des origines a atteintson apogée et est devenue es-sentielle dans l'Antiquité chré-tienne au moment où a été éta-bli le canon des textes bibliques.Les Pères de l'Église, qui ont hé-rité des méthodes des bibliothé-caires alexandrins, en confron-tant les sources et les versionsdifférentes des textes, ont dû dé-finir ce qui relevait de la Révé-lation et ce qui était apocryphe.Bien plus que l'auteur, ce sont latransmission et les origines d'untexte qui importent pour pouvoirconsidérer un livre comme sacré.

La question se pose encore dif-féremment au Moyen Âge où l'au-teur n'existe pour ainsi dire pas.La Chanson de Roland comme denombreuses branches du Roman

de Renart ou encore les fabliaux,sont des œuvres anonymes. La no-tion de propriété intellectuellen'existe pas. L'artiste met son artau service des autres, au servicedu beau, du bon, du bien ; ensomme il sert son art bien plusqu'il ne s'en sert à des fins per-sonnelles. Certes, les troubadourset les poètes reçoivent des ré-munérations des seigneurs qu'ilsdivertissent, mais à partir du mo-

ment où l'œuvre a été produite,offerte à la lecture, à la récita-tion, elle appartient à la collec-tivité. Et pour autant le plagiatn'existe pas.

La question du droit d'auteurn'apparaît donc qu'à la Renais-sance, au moment où le livre ac-quiert une valeur économiqueavec l'invention de l'imprimerie.Les métiers de l'édition nécessi-tent beaucoup d'argent, la concur-rence naît entre les "libraires".Pour limiter les conflits, le pour-voir royal lance la pratique desprivilèges d'édition. L'ordonnancede Moulins de 1566 fait obligationaux libraires de demander deslettres de privilèges. Une fois ceslettres obtenues, l'imprimeur jouitd'un monopole pour une périodeallant de trois à dix ans. Ensuite,

l'œuvre tombe dans le domainepublic et tout éditeur peut l'im-primer. La mesure, dans un pre-mier temps, favorise les auteurs,qui se voient ainsi rémunérés parleurs éditeurs, mais l'œuvre estpropriété de ces derniers. Il existeaussi, en parallèle des privilègesaccordés aux éditeurs, ceux ac-cordés aux auteurs, comme lemontre l'exemple de la poétesselyonnaise Louise Labé. Certaines

de ses œuvres ont été publiéesà son insu avec des modifications.Elle adresse une supplique àHenri II qui, le 13 mars 1553, luiaccorde le privilège de faire pu-blier son œuvre chez l'éditeur deson choix. Ainsi, si les lois ne re-connaissent pas encore la pro-priété de l'auteur, dans les faitselle existe, comme le montre lamésaventure de Louise Labé.

D'une manière générale, cesont les dramaturges des XVIIe etXVIIIe siècles qui sont à l'originede la conception moderne du droitd'auteur : ils sont les premiers àposer la question du droit d'ex-ploitation. Au moment de la créa-tion d'une pièce, l'exclusivité re-venait à la compagnie qui lajouait, ainsi que l'argent qu'ellepouvait rapporter. De plus, dès la

publication de la pièce, n'importequelle compagnie pouvait la jouersans autorisation et sans rému-nérer l'auteur. On comprend dece fait la nécessité pour Molièred'avoir été à la fois auteur et di-recteur de troupe, on comprendaussi la nécessité du mécénat pourles artistes. Le combat des dra-maturges, en particulier de Cor-neille, permit la création d'un re-venu pour les auteurs drama-tiques : les troupes devaientverser un pourcentage aux au-teurs des pièces qu'elles créaient.La rémunération n'empêcha pasles litiges entre comédiens et au-teurs. Le plus important d'entreeux est "l'affaire des auteurs" quioppose Beaumarchais aux Comé-diens-Français en 1777. Il vientde connaître un grand succès avecla deuxième version du Barbierde Séville, mais la troupe refusede lui verser l'intégralité de sonpourcentage. Le dramaturge dé-cide de fonder la Société des au-teurs dramatiques français pourdéfendre leur droit.

Vide juridique

La Révolution conduit aussi àun certain nombre de change-ments. L'abolition des privilèges,la nuit du 4 août 1789, laisse, ence qui concerne les auteurs et leséditeurs, un vide juridique. En1790, la première tentative de lé-gislation révolutionnaire menéepas Sieyès n'a pas pour but dedonner des droits aux auteurs maisde les rendre responsables deleurs œuvres en tant que pro-priétaires. Nous sommes plus làdans une mesure de police poli-tique que dans la reconnaissanced'une propriété intellectuelle.Cette loi, qui a fait naître descontestations de toutes parts, res-tera à l'état de projet. Il faut at-tendre janvier 1791 pour que soitreconnus dans la législation fran-çaise les droits d'auteur : « Laplus sacrée, la plus légitime, laplus inattaquable, et si je puisparler ainsi, la plus personnellede toutes les propriétés est l'ou-vrage, fruit de la pensée d'un écri-vain », dit Le Chapelier qui pré-sente la loi à la Convention le13 janvier 1791.

Les lois successives (1886,1957, 1985, 1994) sont venuespréciser cette loi initiale : allon-gement de la durée de la pro-tection légale, reconnaissance deslégislations étrangères, adapta-tion aux nouveaux supports qu'ilssoient cinématographiques, ra-diophoniques, audiovisuels et, au-jourd'hui, en 2009 numériques.

SARAH BLANCHONNET

❏ PATRIMOINE

Aux origines des droits d'auteurLa "propriété intellectuelle" s'est construite au fil des siècles, façonnée par le statut des artistes et lesrévolutions techniques : recherche des auteurs dans l'Antiquité, anonymat au Moyen Âge, premiers profitsdes éditeurs à la Renaissance... Retour sur une histoire dont une nouvelle page s'écrit ces jours-ci.

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PREMIÈRE LÉGISLATION

La protection des œuvresLa première décision politique concernant uneœuvre littéraire est celle que prit le tyranPisistrate au VIe siècle avant Jésus-Christ. Il fittranscrire l'intégralité des œuvres attribuées àHomère afin qu'Athènes conservât les épopées quel'on considérait déjà alors comme des éléments dupatrimoine. Un autre tyran, deux siècles, plus tardprit aussi des mesures pour conserver les textes destrois grands tragiques grecs. Tout au long des VIe etVe siècles, les représentations théâtrales ont lieudans le cadre de concours annuels pour lesquels les

dramaturges composent des pièces jouées une foisà cette seule occasion. Or, en 387, à Athènes secrée une nouvelle épreuve, la reprise de vieillestragédies, considérées comme faisant partie dupatrimoine de la cité (c'est-à-dire celles d'Eschyle,Sophocle et Euripide). Ces reprises posentproblème : pour mettre en valeur leur art, lesacteurs ont tendance à modifier le texte despièces. Lycurge, le tyran, cherche à mettre un freinà ces modifications abusives en 339 en conservantaux archives de la cité une copie (qui seradésormais la copie officielle) des trois grandstragiques. Les acteurs doivent dès lorsimpérativement jouer le texte de la copie.

S.B.

Achille sacrifiant à Zeus : manuscrit de l’Iliade de la Bibliothèque Ambrosienne de Milan (Ve siècle)Dans l'Antiquité, le souci de l'attribution domine à tel point que les Anciens inventent des auteurs comme ce fut

le cas pour Homère. Leur démarche s'inscrit dans la recherche de l'origine des choses

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HISTOIRE ❚

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2766 – du 5 au 18 mars 2009 11 ❚

THOMAS MATTHEWS

Le Monde byzantin Flammarion - 170 p. - 23 euros

L'art reste le moyen le plus ré-pandu d'aborder l'empire by-zantin. Encore faut-il en com-prendre les particularismes.Cette étude remarquablementbien faite et très illustrée ré-vèle les secrets des icônes, desmosaïques, de l'architecturereligieuse et civile, mais ausside l'art profane, qui se déve-loppa pendant l'iconoclasme,ainsi que l'héritage byzantin,tant dans le monde orthodoxequ'en Europe, où l'art du por-trait influa considérablementla Renaissance. Un précis pra-tique qui va à l'essentield'agréable manière.

ANNE BERNET

Cette année-là, le dauphinCharles, duc de Normandie,futur roi Charles V, dix-neuf

ans, assumait la tâche de lieute-nant général et gouverneur duroyaume, en l'absence de son pèrele roi Jean II le Bon, fait prison-nier par les Anglais le 19 sep-tembre de l'année précédenteaprès s'être bravement défenduà la bataille de Poitiers, commenous l'avons vu dans la dernièreAF 2000. Nous avons égalementaperçu deux démagogues qui rê-vaient de profiter du malheur dela dynastie pour agiter le peuple :le roi de Navarre, comte d'Evreux,Charles le Mauvais, vingt-cinq ans,qui revendiquait le trône deFrance du chef de sa mère, pe-tite-fille de Philippe le Bel, et ledrapier Étienne Marcel, environcinquante ans, prévôt des mar-chands de Paris et, à ce titre,nanti de pouvoirs économiqueset juridiques, mais aussi mili-taires.

Frêle et timide

Quand le dauphin Charles étaitrevenu de Poitiers, jeune hommefrêle et timide, beaucoup se de-mandaient comment il pourraits'imposer. Il avait dû affronter lesÉtats généraux, plus arrogants quejamais, qui, sous l'instigation dufourbe Robert Le Coq, évêque deLaon, avaient décidé de libérerCharles le Mauvais, que le roi Jeanavait sagement fait arrêter l'an-née précédente. C'est alors quele dauphin, sûr au moins de l'ap-pui des États de Normandie et duLanguedoc, se rendit à Metz pourdemander à son cousin l'empereurCharles IV sa médiation entre laFrance et l'Angleterre en vue dedélivrer le roi son père. Succès

diplomatique réel. Mais quand ilrevint (mars 1357), Paris était sousla coupe d'Étienne Marcel, véri-table dictateur.

Les États, auxquels les repré-sentants de la province se las-saient de participer, rédigèrentalors des ordonnances, puis éta-blirent un conseil avec Marcel etLe Coq en vue de s'emparer dupouvoir exécutif. Se sentant ainsiligoté, le dauphin partit chercherde l'aide en Normandie, mais futbientôt rappelé à Paris par Mar-cel qui voulait l'amadouer. En fait,Charles le Mauvais (dont les liensavec les Anglais n'étaient pas trèsnets), entrait bientôt dans Pariset, dès le 30 novembre, haran-guait la foule au Pré-aux-Clercs,tandis que Marcel faisait sortir deprison les condamnés de droitcommun ! Le dauphin, qui se sou-ciait, lui, d'organiser la défensede Paris contre des foules de mer-cenaires désœuvrés, prit aussi laparole (11 janvier 1358) et har-

diment !, devant la foule desHalles. La lutte entre les deuxCharles (qui, en outre, étaientbeaux-frères) allait tourner audésavantage du Mauvais (dont lesParisiens se méfiaient), mais leton monta, le dauphin ne pouvantévidemment pas accepter qu'onlui imposât une monarchie contrô-lée par les bourgeois de Paris.

Étienne Marcel

Ni Le Coq, ni Marcel, ni leMauvais n'avaient intérêt à ce quela paix fût signée avec l'Angle-terre : dès que des envoyés duroi Jean eurent annoncé à Parisqu'un traité était en projet, letrio infernal lâcha le 22 février3 000 émeutiers sur le palais dela Cité. Le dauphin, terrorisé, futéclaboussé du sang des maréchauxde Champagne et de Clermontabattus dans sa propre chambre,où Étienne Marcel le força à coif-fer le chaperon rouge et bleu (de-

puis lors les couleurs de Paris...).Sentant que l'on voulait faire delui le roi d'une révolution, le dau-phin n'eut plus qu'à s'échapper denuit avec l'aide de deux bateliersde la Seine...

À Compiègne, il convoqua lesÉtats qui désavouèrent la révolu-tion de Paris, tandis qu'ÉtienneMarcel soutenait les chefs d'unejacquerie de paysans ravageantles alentours de la capitale. Poursa part Charles le Mauvais, nommépar Marcel capitaine général deParis et ne voulant pas s'aliénerla noblesse, écrasa cruellementces miséreux à Meaux avant delaisser, à Paris même, une banded'Anglais perpétrer des massacres.Voilà donc Étienne Marcel inca-pable de maîtriser les violencesqu'il avait lui-même engendrées.Il allait offrir la couronne au Mau-vais et plaçait déjà à la PorteSaint-Denis les gardes devant ou-vrir les portes à ce misérableprince, quand le 31 juillet, il futabattu au cours d'une rixe avecun bourgeois, Jean Maillart.

Sagesse royale

Le corps du traitre fut jeté àla Seine, tandis que le dauphin,déjà en route pour le Dauphiné,fit demi-tour et entra solennel-lement dans Paris, veillant à in-terdire toutes formes de repré-sailles. Le temps des partis étaitrévolu. Puis Jean II le Bon revintà Paris et régna jusqu'en 1364.Déjà l'héritier avait montré cequ'il serait quand il deviendraitCharles V le Sage, imposant sasouveraineté contre les Anglais etcontre Charles le (toujours aussi)Mauvais...

La preuve fut ainsi donnée quela sage hérédité monarchique as-surait le triomphe de l'unité na-tionale et cicatrisait les convul-sions révolutionnaires. Quand centtrente-quatre ans plus tard l'onrevivrait à Paris les mêmes scènesd'horreur, les "philosophes" se-raient hélas passés par là pourdonner aux pires exactions la co-loration idéologique et libertairequi paralyserait le roi...

MICHEL FROMENTOUX

❏ CETTE ANNÉE-LÀ

1357 : Scènes de révolutionDe retour à Paris, le futur Charles V trouve une ville sous la coupe d'Étienne Marcel, allié à Charles le Mauvais. Le dauphin interdira toute forme de représailles, préférant cicatriser les convulsions révolutionnaires.

Retour du dauphin à Paris le 2 août 1358

COLLOQUES

» MAURRAS

Dans le cadre de la trilogieL'Action française : culture,société, politique auront lieules mercredi 25mars après-midi,jeudi 26 et ven-dredi 27 marstoute la journéeun série deconférences sur le thème : Lemaurrassisme et la culture.Elles se tiendront au Centred'histoire de Sciences-Po,56 rue Jacob, 75006 Paris.Inscriptions par internet à [email protected]

» PIE XII

Pie XII, un intellectuel dansle siècle : sous ce titre un col-loque organisé par le CercleThomas More sous la prési-dence du profes-seur François-Georges Dreyfusse tiendra le sa-medi 21 marsdans le salon Ho-norat de la Maison Internatio-nale, 17, boulevard Jourdan,de 8 h 30 à 18 heures.

Au programme : Pie XII etl'universalisme de la culturechrétienne, par DominiqueVIAIN, professeur de latin mé-diéval et humaniste (Institutuniversitaire Saint-Pie X) ; PieXII et les nations : réflexionsur l'apport de ce pape aux re-lations internationales, parMe Franck BOUSCAU, profes-seur de droit (Rennes) ; Pie XIIet la culture allemande, parFrançois-Georges DREYFUS,professeur émérite d'histoire (Paris-Sorbonne) ; Pie XII faceaux défis des sciences de sontemps, par David MASCRÉ,docteur en mathématiques eten philosophie ; Le regard dePie XII sur l'art, par le docteurAnne GARANCE ; Pie XII et laquestion du cinéma, par JoëlDAIRE, directeur du patri-moine de la Cinémathèquefrançaise ; Pie XII et PaulClaudel : Une heureuse ren-contre aux profondeurs de lafoi et de l'art, par DominiqueMILLET-GÉRARD, professeur deLettres (Sorbonne).

Inscription obligatoire (20 eu-ros ; moins de vingt-cinq ansou ecclésiastique : 10 euros).Tout renseignement : CercleThomas More, 3 passage Mont-gallet, 75012 Paris ; 06 30 08 73 61 ;[email protected]

Avec Sarah Blanchonnet,Stéphane Blanchonnet,Grégoire Dubost, Michel Fromentoux, Vincent Gaillère, Pierre Lafarge, Aristide Leucate, Alain Raison, Francis Venant

Depuis sa fondation en 1899,l'école d'Action française aproduit un nombre considérabled'ouvrages de critique historique,politique, littéraire, qui,ensemble, constituent un trésor. Trente et un de ces ouvrages ontété sélectionnés pour faire

l'objet d'articles publiés dansL'Action Française 2000 en 2004et 2005. Ont été privilégiés ceuxqui permettent d'approfondir lapensée politique de l'Actionfrançaise en soulignant leuractualité.

À travers les études rassembléesdans ce recueil, le lecteur sefamiliarisera avec JacquesBainville, Augustin Cochin, LéonDaudet, Pierre Gaxotte, PierreLasserre, Charles Maurras, Léonde Montesquiou, Maurice Pujo, lemarquis de Roux, Henri Vaugeois,découvrant ainsi l'originalité dela pensée d'AF.

* Éditions de l’Âge d’homme, 138 p., 20 euros. Disponible à nosbureaux : 22,11 euros franco (chèqueà l’ordre de la PRIEP)

❏ LIVRE

LE TRÉSOR DE L'ACTION FRANÇAISE

Sous la direction de Pierre Pujo

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❚ CULTURE

❚ 12 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2766 – du 5 au 18 mars 2009

» JEAN RASPAIL EN BD

Il en va d'ordinaire de la bande dessinéecomme du cinéma ou de la télévision :rares sont les adaptations qui n'affadissent,lorsqu'elles ne l'ont point honteusementdénaturée, l'œuvre à laquelle elles se réfèrent. Jacques Terpant est l'heureuseexception. En osant le défi detirer une trilogie du roman deJean Raspail, Sept cavaliersquittèrent la ville..., il prenaitun risque considérable tant laprose, l'imagerie et la penséede l'auteur paraissaient difficiles à traduireen dessins sans rien leur ôter de leur force ;ce risque défié s'est mué en une réussite peucommune. Rien n'est altéré ici de la grandeurtragique de l'histoire originelle ; même,d'être ainsi plantés, incarnés, avec une sur-prenante sensibilité, décors et personnagestrouvent une densité nouvelle. Voici donc lecolonel-major comte Silve de Pikkendorff etses compagnons dotés des traits exacts quenous voulions leur voir, et le margrave héré-ditaire, dont la ressemblance avec Jean Raspail n'est pas pour étonner. Voici la Ville,déserte, que ronge un mal insidieux venu

d'ailleurs, coupé d'un univers qui paraît avoircessé d'exister, la neige, les paysages offerts,la fin d'un monde, et des hommes droits etpurs qui ne s'abaissent plus à la folie d'espé-rer, mais vont, par devoir et par fidélité, enquête d‘une vérité fatalement douloureuse.Époustouflante illustration d'un grand livre,qui donne envie de lire la suite comme si l'onignorait cette histoire-là, et son dénouement.

* Jacques Terpant, d'après Jean Raspail : Sept Ca-valiers, tome I, Le Margrave héréditaire. RobertLaffont, 48 p., 12,95 euros.

» MARDI GRAS ET MICARÊME

Que vous trouviez encore ou non le goût etle temps de faire des crêpes aux dates tra-ditionnelles, ou, d'ailleurs, à tout autremoment de l'année, voici deux livres indis-pensables pour vous donner l'envie de sor-tir les poêles ! Goûter les crêpes et les galettes de BertrandDenis et Bernard Enjolras 1 propose, saléesou sucrées, 160 recettes tantôt tradition-nelles, tantôt revisitées, tantôt originalesqui, toutes, vous mettront l'eau à la bouche.En tuiles, en roulés, en cornets, en lasagnes,en timbales, en gouttières ou en amuse-

gueules voici la crêpe de froment ou la ga-lette de sarrasin accommodée de mille façons plus tentantes les unes que les autres,et sans exception faciles à réaliser ; d'autantplus que les accompagnements seront, leplus souvent, achetés tout prêts. Ne boudezpas votre plaisir, et soyez sûr d'étonner vosproches et vos invités !87 recettes de crêpes et galettes de Ray-monde Charlon 2 reste dans une gammemoins recherchée, sans recourir à des ingré-dients coûteux, et met en valeur les recettesrégionales car la Bretagne n'a pas le mono-pole de ce plat savoureux, roboratif, et éco-nomique. Voici donc, en sus des spécialitésbretonnes, la ficelle picarde, l'Eirekuchen alsacienne, le matefaim lyonnais et dauphi-nois, la tartouille auvergnate, les tourtous limousins, les couquebaques du Nord, lescrêpes de maïs du Sud-Ouest, les pascajousde l'Aveyron, les pascades, les bourriols, lesfarinades et les pétarimas, les picoussels,les tartouillats bourguignons et les barbotines. Un vrai festival du terroir !

1 - Ouest-France, 142 p., 15,90 euros.2 - Ouest-France, 125 p., 6,50 euros.

ANNE BERNET

LES FILMS DE MARS» GRAN TORINO

Quand (l'inspecteur) Harry ren-contre Walt, Clint Eastwood,vétéran de la guerre deCorée ! Grincheux, aigri, hantépar son passé militaire, WaltKowalski, qui vient d'enterrersa femme, ne supporte per-sonne. Exceptés sa chienneDaisy, ses bières, ses ciga-rettes, son fusil M-1, son 45automatique et, surtout, savoiture de collection (une GranTorino 1972). Aucun de sescongénères ne trouve grâce àses yeux. Ni ses fils, belles-filles et petits-enfants, quiveulent l'expédier en maisonde retraite, ni ces famillesd'émigrés Hmongs qui ont en-vahi son quartier où il est ledernier "Blanc" à résider. Jusqu'au jour où, après avoirsurpris le Thao Lor, Bee Wang,en train d'essayer de voler savoiture, contre toute attente,il se lie d'amitié avec sa fa-mille. Un Thao qu'il va prendresous son aile, former à la vieet au travail, et protégercontre la violence des ra-cailles. Une violence en em-buscade qui, lorsqu'elle resur-gira, le poussera à se sacrifierpour ses nouveaux amis... Rédemption ! À 78 ans, Clint Eastwood s'esttaillé un (dernier ?) rôle surmesure et réalise ce drame desociété sur la "différence" avecune mise en scène nickel-chrome qui tourne comme unehorloge. Un drame musclé,bouleversant, nostalgique etfunèbre qui prouve une fois deplus que Clint Eastwood estbien le dernier des géants ducinéma américain !

» LA PREMIÈRE ÉTOILE

Les "bronzés" font du ski ! Les"bronzés" en question, ce sontles membres d'une famille an-tillaise vivant dans une cité deCréteil. Jean-Gabriel, LucienJean-Baptiste, marié et pèrede trois enfants, pas trop co-pain avec le boulot, perdchaque jour ou presque le peud'argent qu'il a. Et voilà-t-il pas que, pour sau-ver son couple, et surtout ho-norer la promesse faite à sesenfants, il doit coûte quecoûte trouver l'argent pourpartir à la montagne. À luidonc de faire preuve d'imagina-tion et de système D pour yparvenir et voir son plus jeunefils dévaler les pistes enneigéeset obtenir sa première étoile... Grand prix du festival interna-tional de comédie de l'Alpe-d'Huez, cette comédie fami-liale – excepté un ou deux cli-chés forcément politiquementcorrects – est aussi fraîche quela première neige et aussidrôle qu'un "soleil" dans lapoudreuse. Lucien Jean-Bap-tiste signe un premier filmsympathique qui prouve que lamontagne est belle...

ALAIN WAELKENS

Voici que notre collaboratriceAnne Bernet ajoute à tantde chefs-d'œuvre que nous

aimons Le Mystère du quatrièmearchange 1, un livre de fiction quidispense une magistrale leçon decatéchisme. Dans la ligne de sonEnquête sur les Anges (éd. Perrin1997), elle entend rappeler laplace que tiennent les anges dansla vie des hommes.

Deux vies d'artiste

Un jeune professeur, Michel,est bouleversé par de récentesdécouvertes remettant au jourl'œuvre d'un fresquiste médiéval,Ranulf le Pérégrin, peintre de l'as-semblée angélique et du Christen gloire au milieu des archanges.Ses recherches le font entrer in-timement dans le drame de Ra-nulf se repentant amèrementd'avoir, par souci de gloire per-sonnelle et par esprit de déso-béissance, dévoyé ses talents re-çus de Dieu, et de s'être obstinéà mettre au bas de ses fresquesà côté de son propre nom celui,supposé, d'un quatrième ar-change, bravant ainsi l'Église qui,pour éviter toute déviance dé-moniaque, ne retient que les nomsde Michel, Raphaël et Gabriel.

Or, tandis que le professeurMichel suit en pensée par-delà lessiècles Ranulf sur le rude chemindu mont Saint-Michel, Lucile, unefemme qu'il a toujours aimée sansjamais pouvoir se décider à le luidire, lui lance un appel de dé-tresse. Photographe devenue fa-cilement riche et médiatiquementcélèbre en profitant des visionsapocalyptiques du 11 septembre2001 à New York pour réaliser des

clichés aussi talentueux que mor-bides et obscènes, Lucile croyaitpouvoir tout posséder pour êtrecomblée, mais elle vient d'êtrede justesse arrachée au suicidepar l'ancien trader du World TradeCenter, devenu moine franciscainsous le nom de frère Raphaël.

Tandis que Michel, sur le pointd'achever son livre sur Ranulf voitle frère Raphaël s'efforcer deconvaincre Lucile sur son lit d'hô-pital de changer de vie, s'imposeévidemment la mise en parallèlede ces deux destins d'artistess'étant montrés trop sûrs que leurart leur donnait le droit deconquérir le monde sans souci deleur âme... leur âme dont ilsavaient laissé au Démon toute li-berté de s'emparer et d'y insuf-fler un orgueil démesuré.

Belle occasion pour Anne Ber-net de mettre devant les yeux dulecteur vite fasciné les imagesaussi terribles que splendidesd'avant le commencement destemps, quand Dieu, ayant crééles anges, avait soumis ceux-ci àune stupéfiante épreuve : devoir

reconnaître l'homme, comme luiaussi, l'image de son Créateur.Qui plus est, Dieu, sachant quel'homme serait toujours par sanature matérielle entraîné versle bas, entendait pour l'aider àvivre selon sa nature spirituelle,se faire homme Lui-même, unis-

sant les deux natures en la per-sonne de son Fils, né d'unefemme ! Demander aux anges dese prosterner devant d'aussi vilescréatures, c'était exiger d'eux uneinfinie marque de confiance, defidélité et d'amour. Lucifer, le plusbeau des séraphins, le "porteurde lumière", et un tiers des angesavec lui, n'y avaient pas consenti.Dieu qui ne pouvait que vouloirêtre aimé librement ne les avaitpoint retenus.

Alors, Lucifer conçut le pro-jet fou de se venger et de se dé-clarer Dieu à la place de Dieu !Mais se dressa Michel dont le nommême est un cri d'amour et d'in-dignation : Qui ose se dire sem-blable à Dieu ? Sa lumière ter-rassa Lucifer devenu Satan, êtrede ténèbres insondables, qui

tomba du ciel comme un éclair.« Il avait tout perdu, écrit AnneBernet, mais il lui restait le malqu'il pouvait faire. Dieu lui avaitpréféré l'homme ? Eh bien, il sevengerait sur l'homme. Il détrui-rait l'image de Dieu en lui. »L'homme doit dès lors choisir sonmaître : Dieu ou Satan, mais cedernier est d'ores et déjà vaincupar Celle à qui l'archange Gabrielannonça qu'elle serait la mère duSauveur et dont l'acceptation(Fiat) a pour toujours rendu vainsles efforts de Satan pour empê-cher que Dieu s'unisse à l'homme.

Michel, Raphaëlet Gabriel

Ranulf, puis Lucile vivent aufil des pages la douloureuse ex-périence de s'être comme Adamet Ève trompés de maître. Le pre-mier sera sauvé par saint Michelarchange sur le Mont au péril dela mer, la deuxième, comme ja-dis Tobie suivant l'archange Ra-phaël, sera guidée par un autreRaphaël (dont le nom, symbolede pureté, signifie Dieu guérit,Dieu sauve, Dieu dispense la vie)loin des lieux où « le sexe à toutva et sans amour, la drogue, lesfausses joies et les plaisirs fre-latés » tiennent au même orgueilhumain téméraire que jadisl'acharnement démoniaque à"nommer" un quatrième archange.

Les hommes de ce monde mer-cantile et hédoniste méconnais-sent le rôle des anges dans leurvie. Ils ont grand tort car c'est parces créatures spirituelles que,comme de la felix culpa d'Adamet Ève, d'un mal peut toujourssortir un bien. D'où la portée in-estimable du livre d'Anne Bernetqui instruit, tout en élevant l'âme.À lire et à faire lire surtout - maisnon exclusivement ! - à ceux quise prénomment Michel, Raphaëlou Gabriel...

MICHEL FROMENTOUX

1 - Anne Bernet : Le Mystère du qua-trième archange. Éditions de Paris,114 pages, 14 euros.

❏ ROMAN

Ces anges trop oubliés...Rongés par l'orgueil, deux artistes vivent la douloureuse expérience de s'êtretrompés de maître. Anne Bernet signe le récit de leur rédemption ; elle entendrappeler ainsi la place occupée par les anges dans la vie des hommes.

Page 13: L’ACTION FRANÇAISE2 0...l'un des actionnaires, Spir Com-munication, et cités par l'AFP. Le capital de l'entreprise est dé-tenu à parts égales par le norvé-gien Schibsted et

CULTURE ❚

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2766 – du 5 au 18 mars 2009 13 ❚

Faut-il y voir une preuve d'in-différence, ou une simplemanifestation de l'inculture

de nos contemporains ? Pour beau-coup d'occidentaux, fussent-ilschrétiens et pratiquants, l'exis-tence des églises proche-orien-tales relève de l'incongruité. Ilsont oublié que l'Évangile nous estvenu de Galilée et que c'est dansles provinces de l'Orient romainque se constituèrent les premièrescommunautés chrétiennes. Dansun réflexe anticolonialiste, beau-coup ont fini par s'imaginer quel'islam régna de tous temps surces régions et que les chrétiens,là-bas, ne sont que de scanda-leuses survivances des Croisades.

Cri d'alarme

C'est d'abord à cette mécon-naissance qu'il convient de s'at-taquer, en rappelant l'extrême an-cienneté de ces chrétientés, long-temps majoritaires avant que lestatut pénible de la dhimmitudeet les persécutions poussent cespeuples à embrasser la foi duconquérant arabe et musulman.Voilà ce qu'expose par le menu,sans jamais pourtant être las-sante, Annie Laurent, auteur del'enquête Les Chrétiens d'Orientvont-ils disparaître ?, titre enforme de cri d'alarme pour re-couvrir une réalité plus complexe.

Ce panorama complet, allantde la Turquie à l'Égypte, du Libanà l'Iran, est une découverte deces communautés, coptes, maro-nites, melkites, chaldéennes, sy-riaques, grecques orthodoxes, ca-tholiques romaines..., souvent is-sues des innombrables schismeset hérésies qui déchirèrent lemonde byzantin. Attachées à leursparticularismes, leur autonomie,fières de leur passé, ces églises,réconciliées ou pas avec Rome,n'ont jamais cherché à s'unir, per-dant, même à l'époque moderne,lorsque, dans certains paysadeptes de la laïcité, la politiquecessa d'être interdite aux chré-tiens, tout moyen de faire pres-sion sur le pouvoir et d'obtenirdes garanties. Cette division per-dure en dépit des efforts oecu-méniques, laissant chacune faibleet isolée, en danger.

Esprit de division, mais aussiconséquence de siècles de sou-mission au pouvoir musulman, demaintien dans une situation d'hu-miliation et de dépendance em-pêchant les chrétiens d'agir, fautede savoir s'imposer. Comments'étonner que tant d'entre eux,surtout les plus jeunes, décident

de partir, d'échapper à la préca-rité de leur pays pauvre, et à leurstatut inférieur ? Exception faitedu Liban, où leur nombre restestable quoiqu'en baisse, toutes lesautres communautés ont fondu aucours du XXe siècle, parfois de80 %. L'exil et les rêves matéria-listes auront-ils raison des plusvieilles églises du monde, qui

avaient survécu aux pires mar-tyres ? Ces déracinés, que les oc-cidentaux voient comme "desArabes", non comme des chré-tiens, peuvent-ils trouver leurplace dans des sociétés déchris-tianisées et permissives dont lesmœurs les choquent ? Autant dequestions dont dépend l'avenir,non seulement de ces églises,mais du Proche Orient qui ne peutse passer des chrétiens, et du rôled'ouverture qu'ils ont toujoursjoué dans la région.

Rencontres

Frédéric Pichon a enseignédeux ans à Beyrouth. Lorsqu'il re-gagne la France avec sa famille,il décide de voyager en voiture,s'arrêtant dans des communautéschrétiennes. Une idée que leursamis libanais jugent dangereuse.Une fois entrés en Turquie, où ilne fait pas bon se dire chrétien,les Pichon comprendront ces aver-tissements... Peu rassurés, ils sai-siront à quoi ressemble là-bas lequotidien de nos coreligionnaires.

Voyage chez les chrétiens d'Orientn'est pas un guide touristique,même s'il fait la part belle auxsites les plus vénérés de l'itiné-raire, mais une série de ren-contres, où se côtoient person-nalités religieuses, tel Mgr Labaki,jadis curé de la petite ville mar-tyre de Damour, qui sut, à l'hor-reur, faire répondre le pardon et

la charité, et simples fidèles croi-sés par hasard. Chacun porte, sursa vie, sa foi, son milieu, un re-gard clair et profond, dépourvude rancœur et rempli d'espérance.Cela fait de ce livre sans préten-tion et plein de charme une in-troduction excellente à ce mondecompliqué.

Génocide

Dans les années quatre-vingt-dix, Raphaël Stainville parcourt laTurquie lorsqu'il découvre Adana,ville fort laide où il ne compte pass'éterniser. Mais les religieuses ita-liennes qui le logent en décidentautrement, parce qu'elles ontquelque chose à lui faire lire.Pages de sang est l'histoire du ma-nuscrit oublié d'un jésuite fran-çais, le père Rigal, témoin, en1909, du massacre des Arméniens :témoignage halluciné, horrifié, surun crime commis sous les yeux despuissances occidentales qui nebronchèrent pas, ne prenantmême pas de mesures afin de pro-téger leurs ressortissants mis-

sionnaires, restés en premièreligne ; témoignage brutal, insup-portable parfois, d'une rare den-sité car les victimes, ici, ne sontpas des statistiques mais des êtresbien connus du narrateur. En pa-rallèle, Raphaël Stainville dit sonhorreur, son incompréhension, leregard à jamais changé qu'il portesur les Turcs. Certains lui repro-cheront ce manque de distancia-tion, son incapacité à produire lemanuscrit, disparu depuis ; resteun cri qu'il faut entendre tandisque l'Europe s'interroge sur l'en-trée de la Turquie au sein de laCommunauté.

Cynisme

Pourtant, l'Occident savait,renseigné par ses missionnaires,ses diplomates ; la presse s'indi-gna avec une constance qui ne sedémentit pas entre 1896 et 1919 ;ses associations caritatives, toutesconfessions confondues, intervin-rent sur le terrain en dépit dudanger. Les gouvernements, eux,se montrèrent plus prudents, mé-nageant "l'homme malade de l'Eu-rope", déjà coupable d'atrocitéscomparables en Bulgarie. Puis, aulendemain de la Première Guerremondiale, l'Occident, Amériqueen tête, cessa d'évoquer la ques-tion arménienne et d'exiger la re-connaissance du génocide et lechâtiment des coupables. Dansl'intervalle, les grandes compa-gnies pétrolières s'étaient ouvertles champs pétrolifères de l'Iraket les oléoducs débouchaient surles côtes turques. Le brut noyales cris d'agonie d'un million etdemi d'innocents tués dans lespires conditions pour crime dechristianisme. La Turquie intou-chable s'en autorisa pour nierl'existence des massacres demasse, sans encourir de sanctionsinternationales.

Peter Balakian, historien amé-ricain d'origine arménienne, a ex-ploré l'ensemble des archives dis-ponibles, parvenant à dresser, del'engagement et du désengage-ment de l'Occident, sur fondd'atrocités inqualifiables, un ta-

bleau précis, implacable, irréfu-table, narré avec un sens du ré-cit qu'ont perdu les universitaireseuropéens. Le Tigre en flammesest la mise en évidence d'un cy-nisme qui perdure depuis dès qu'ils'agit du Proche-Orient et de l'ornoir. C'est très instructif, et ter-riblement d'actualité.

Chaos irakien

L'invasion de l'Irak et ce quis'ensuivit l'a démontré. Cepen-dant, là encore, le sort des chré-tiens irakiens n'a guère ému nosgouvernants. Mgr Jean-BenjaminSleiman, archevêque catholiquede Bagdad depuis 2001, a connula fin du régime de Saddam, l'em-bargo, la guerre, et vit toujoursau milieu du chaos. Dans le piègeirakien se veut une réponse auxsottises parfois diffusées par lesmédias occidentaux, et un appelau secours pour sa communautéen but aux violences d'une sociétémusulmane aux abois.

Lucide, parfois sévère enversses paroissiens dont la mentalitésoumise agace ce Libanais, plussévère encore envers ce mondeoccidental incapable de mesurerses responsabilités, Mgr Sleimananalyse avec finesse les causes dudésastre actuel, et les remèdes ày apporter. Encore faudrait-il en-tendre cette voix autorisée.

ANNE BERNET

* Annie Laurent : Les Chrétiensd'Orient vont-ils disparaître ? Salva-tor, 220 p., 20 euros.* Frédéric Pichon : Voyage chez leschrétiens d'Orient. Presses de la Re-naissance, 220 p., 17 euros.* Raphaël Stainville : Pages de sang.Presses de la Renaissance, 235 p.,17 euros.* Peter Balakian : Le Tigre en flammes.Phébus, 510 p., 22,50 euros.* Mgr Jean-Benjamin Sleiman : Dansle piège irakien. Presses de la Re-naissance, 185 p., 16 euros.

❏ LIVRES

La Croix ou le CroissantLa situation politique au Proche Orient a rendu plus délicat que jamais le sortdes chrétientés locales. Mais, si les grands médias ignorent l'ampleurdu phénomène, nombreuses sont les parutions consacrées à ce drame.

BERTRAND DUPONT DE DINECHIN

Héroïque LibanTéqui - 170 p. - 12,80 euros

Souvent regardé comme un classique, in-troduction profitable à l'histoire libanaise,le petit livre du général Dupont de Dine-chin méritait cette réédition. C'est sousun angle providentiel que se dessine ici ledestin de ce minuscule pays et de sa com-munauté chrétienne, l'une des rares dumonde arabe qui assuma pleinement sonhéritage, et le défendit de siècle en siècleles armes à la main, à l'abri de ses mon-tagnes, sans jamais se soumettre à la loidu plus fort, quel que soit le prix à payer.C'est cette fidélité inentamable à la Croix

qui fait de ce peuple, en dépit de ses er-reurs ou de ses fautes, un exemple et uneleçon pour le reste de la chrétienté.

CHIHEB DGHIM

Jésus dans la poésie arabechrétienne et musulmaneÉditions de Paris - 110 p. - 15 euros

C'est un double défi que relève ce petitlivre : présenter l'une des poésies les plusriches du monde, mais aussi des plus diffi-ciles à traduire ; mettre en évidence lesregards croisés de croyants, chrétiens oumusulmans, mais aussi d'agnostiques, surle Christ, fils de Dieu pour les uns, pro-phète pour les autres, modèle pour tous.

Tout cela en rappelant que le Coran impo-sait une certaine interprétation du sujet,et qu'il fallut, exception faite du soufisme,plus libre, attendre l'époque moderneavant que des poètes se permettent desortir de la droite ligne. Poètes libanais,palestiniens, égyptiens, syriens mêlentleurs voix pour une découverte à laquelleil est impossible de demeurer insensible.

ALAIN ABSIRE

François d'Assise et le Sultan Presses de la Renaissance - 340 p. - 8,50 euros

Saint François rêvait de convertir lemonde musulman par la parole d'amour,

ou d'y trouver le martyre. En 1219, il em-barqua pour la Terre sainte et entra dansDamiette afin d'y rencontrer le sultan. Dé-marche folle qui se solda par un étonnantdialogue. François ne convertit point soninterlocuteur mais leur rencontre rappellequ'entre l'Islam et la Chrétienté des Croi-sades, l'estime mutuelle exista. De cet épisode, Absire tire un roman où,excepté le Poverello, les chrétiens n'ontpas le beau rôle, tandis que les musul-mans incarnent tolérance, intelligence,ouverture à l'autre. Il suffit de se penchersur l'histoire des communautés chré-tiennes orientales pour mesurer les limitesde cette vision du passé...

A.B.

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❚ COMBAT DES IDÉES

❚ 14 L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2766 – du 5 au 18 mars 2009

On lit peu Alfred de Musset en ce XXIe siècle. Maislit-on encore les poètes ? Quand on le connaît, onle voit comme le chantre aimable d'amours heu-

reuses et juvéniles ou comme l'amant de George Sandnourrissant ses vers de ses malheurs sentimentaux. Laperversion romantique de l'intelligence et du sentimenta été analysée de manière magistrale par Maurras dansses Amants de Venise. Mais les humains ne sont pas tou-jours faits d'une seule pièce et Musset possédait une per-sonnalité riche et complexe.

Un royaliste oublié

Dans la Revue critique des idées et des livres du25 décembre 1910, Eugène Marsan remarquait que l'au-teur des Nuits et de Lorenzaccio « savait rompre les bar-bares enchantements du romantisme » et qu'il se mon-trait « aux heures où son mauvais génie se reposait, ungentil Français plein de grâces » 1. D'une très forte cul-ture traditionnelle, deuxième prix de dissertation latineau Concours général de 1827, Musset se montrera tou-jours un admirateur des classiques ; condisciple du ducde Chartres au collège Henri IV, il se déclarera toute savie royaliste et sera révoqué par Ledru-Rollin en 1848 desa place de bibliothécaire du ministère de l'Intérieur.Tout cela est évidemment édulcoré, déformé ou passésous silence par les manuels de l'Université républicaine.

Un poème comme celui dont nous allons lire un extraitest ignoré ou incompris, considéré comme un babillageinsignifiant de l'enfant gâté du romantisme.

Sur deux rayons de fer un chemin magnifiqueDe Paris à Pékin ceindra ma république,Là, cent peuples divers, confondant leur jargon,Feront une Babel d'un colossal wagon.Là, de sa roue en feu, le coche humanitaireUsera jusqu'aux os les muscles de la terre.Du haut de ce vaisseau les hommes stupéfaitsNe verront qu'une mer de choux et de navets.Le monde sera propre et net comme un écuelle ;L'humanitairerie en fera sa gamelle,Et le globe rasé, sans barbe ni cheveux,Comme un grand potiron roulera dans les cieux.

Dupont et Durand - Poésies nouvelles

Dans un dialogue en vers, Dupont et Durand, deux ra-tés qui se retrouvent après de longues années de sépa-ration se racontent leur vie. Dupont expose un projet so-cial révolutionnaire qui vise à détruire ce qui existe pourinstaurer sur ces ruines le bonheur universel. En choisis-sant ses mots avec soin, écuelle et gamelle, par exemple,Musset dénonce en se moquant le danger des idéologiesqui peuvent se révéler aussi cruelles qu'elles sont ridi-

cules. Savourons le néologisme humanitairerie que nouspourrions remettre à la mode à l'époque des droits del'homme mis à toutes les sauces. Dupont n'est-il pas unesorte de modèle du pharmacien Homais que campera Flau-bert ? Ce républicain n'est-il pas à l'avance un matéria-liste qui ne s'intéresse qu'à une exploitation de la naturedont Musset discerne les dangers (« usera jusqu'aux os... »)et un mondialiste ?

Politiciens brailleurs

Donnons encore la parole, pour finir, au poète poli-tique que fut Alfred de Musset :

Je ne fais pas grand cas des hommes politiques ;Je ne suis pas l'amant de nos places publiques ;On n'y fait que brailler et hurler à tous vents.Ce n'est pas moi qui cherche, aux vitres des boutiques,Ces placards éhontés, débaucheurs de passants,Qui tuaient la pudeur dans les yeux des enfants.Que les hommes entre eux soient égaux sur la terre,Je n'ai jamais compris que cela pût se faire,Et je ne suis pas né de sang républicain.Je n'ai jamais été, dieu merci, pamphlétaire ;Je ne suis pas de ceux qui font mentir leur faim,Et dans tous les égouts vont s'enfournant du pain.

La loi sur la presse - Poésies nouvelles

GÉRARD BAUDIN

1 - Eugène Marsan (1882-1936) fut écrivain et critique littéraire.Fondateur en 1908 avec Jean Rivain de La Revue critique desidées et des livres, il assurera pendant des années la critiquelittéraire de L'Action Française, sous le pseudonyme d'Orion. Ci-tons son roman Passantes (1923) et son essai Les Cannes de Mon-sieur Paul Bourget ou le bon choix de Philinte (Le Divan,1924).

❏ LES GRANDS TEXTES POLITIQUES

Lucidité d'un poète passionnéFigure du romantisme, Alfred de Musset (1810-1857) était aussi un admirateurdes classiques. Certains de ses poèmes révèlent une critique cinglante des idéologies.

Le troisième tome d'Actualitéet Présence de Charles Maur-ras de François-Marie Algoud

vient enfin de paraître et l'évé-nement fera la joie de tous nosamis ayant lu Un très grand poète(la musique des vers au servicedu beau et du vrai) et L'Altissime(au service de la France et de l'É-glise). Le titre du nouveau est enlui-même tout un programme : LeGrand Siècle de l'Action française- Faits chronologiques marquantsde son histoire et de celle de laFrance de 1859 à nos jours 1.Comme aux précédents, toutFrançais qui se prévaut d'êtremaurrassien et d'Action française(les deux ne font-ils pas qu'un ?)devra lui donner une bonne placedans sa bibliothèque, mais plusencore aura à cœur de le lire etde le faire lire autour de soi, no-tamment aux jeunes générations.

Le siècle de l'Action française

Car un ouvrage de François-Marie Algoud est beaucoup plusqu'un livre. On y sent vibrer l'âmede l'auteur, ou plutôt celle del'ami empressé à vous faire par-tager dans un foisonnement in-ouï (quand on aime on ne comptepas !) de textes, de citations, dephotos, de dessins et d'anecdotes,les enthousiasmes qui ne l'ont ja-mais quitté depuis sa jeunessemilitante, ainsi que ses colères,que rien ne peut encore apaiser,contre un régime politique qui,en dépit des avertissements duMaître, ne cesse de conduire laFrance à la décadence.

Le récent ouvrage (presque500 pages), véritable travail debénédictin, collectionne des mil-liers de faits qui éclairent nonseulement l'histoire de l'Actionfrançaise, mais de la France en-

tière pendant un siècle et demi,car notre ami a le souci de poserdes points de repère avant mêmela naissance de Maurras (1868) etbien après sa mort (1952), demême qu'il explore tout l'horizon

social, politique, religieux, artis-tique de la France contemporaine,soulignant à chaque fois combienla présence, ou trop souvent, mal-heureusement, la mise à l'écartde l'Action française a pesé dansla tournure des événements etdans l'évolution des esprits. Per-mettez à votre serviteur, ayanteu l'insigne honneur de préfacerce nouveau volume, de répéterici que bien vite ces dates qui setélescopent, qu'on les exalte ou

qu'on les déplore, apparaissentcomme les battements de cœurde la France qui veut vivre, quiveut vivre selon son destin de Filleaînée de l'Église et qui n'est pasdécidée à s'en laisser empêcher.

Jamais n'avait été mis aussisystématiquement en évidencecette vérité qu'il faudra bien re-connaître un jour, à savoir qu'iln'est pas un seul méfait, abandonou scandale politique que telleaction ou déclaration de l'Actionfrançaise n'ait prévu, dénoncé,souvent sanctionné au prix du sangde ses militants. Léon Daudet,Jacques Bainville, Maurice Pujo,Henri Vaugeois, Maxime Real delSarte, Georges Calzant, Pierre Ju-

hel, Pierre Pujo sont toujours àl'œuvre au détour de quelquepage, faisant bouillonner le pa-triotisme en plein Quartier Latin,ou défendant le culte de sainteJeanne d'Arc, ou réclamant lamise hors d'état de nuire de mi-nistres corrompus...

Garder l'espérance

Que 1899 ait vu se créer laLigue d'Action française justeaprès les débats catastrophiquesde l'Affaire Dreyfus ; que 1908 aitvu naître L'Action Française quo-tidienne et aussi le comte de Pa-ris futur héritier de la couronnede France ; que 1947 ait vu à lafois surgir le plan calamiteux Lan-gevin-Wallon destiné à soviétiserl'école en France et renaître sousle nom provisoire d'Aspects de laFrance, le journal de l'Action fran-çaise ; que 1968, année de tousles désordres, ait été aussi celleoù le centenaire de la naissancede Maurras a été ardemment mar-qué par des colloques et des ma-nifestations de toutes sortes... ondirait (et les exemples abondent)qu'à chaque élan de la républiquevers l'abîme, le Christ qui aimeles Francs se plaît à suscitercomme un clin d'œil aux Françaispour les amener à se ressaisir...

Au passage François-Marie Al-goud n'hésite pas, avec sa solideérudition et sa chaude expérience

des événements, à tordre le couà bien des idées reçues sur la crisede 1926 (il n'oublie pas le rôle descarmélites de Lisieux et du papePie XII), ou sur les années qua-rante où l'Action française ne s'estjamais compromise avec l'occu-pant (c'est même de ses rangs quesortirent les premiers résistantsdès le 11 novembre 1940).

On voit combien ce gros livreélégant et si vivant, où apparaîtclairement la logique des événe-ments, est avant tout un livred'espérance. Les combats plus ré-cents de l'Action française pourla France, pour sa souveraineté,pour ses départements d'outre-mer, pour la liberté de l'ensei-gnement, pour le respect de lavie..., combats menés pendanttant d'années sous la conduite dutrès regretté Pierre Pujo qui nousa quittés le 10 novembre 2007,sont salués par François-Marie Al-goud qui sait et qui montre quel'Action française n'a nullementfini son temps. On ne saurait trople remercier de tels encourage-ments au soir d'une vie toute don-née à Dieu, à la France et au Roi.

MICHEL FROMENTOUX

1 - Éd.de Chiré, 484 p., 60 euros.

❏ LIVRE

Maurras plus que jamais vivantLe dernier ouvrage de François-Marie Algoud collectionne des milliers de faits,autant de battements de cœur ponctuant l'histoire de l'Action française et de la France entière pendant un siècle et demi.

Il n'est pas un seul méfait, abandon ou scandalepolitique que telle action ou déclaration de l'Action française n'ait prévu, dénoncé...

Page 15: L’ACTION FRANÇAISE2 0...l'un des actionnaires, Spir Com-munication, et cités par l'AFP. Le capital de l'entreprise est dé-tenu à parts égales par le norvé-gien Schibsted et

» PARIS - IDF

❏ PPermanenceermanence - Tous les jours,8 rue du Pélican, de 18 heures à20 h 30 ; le lundi de 16 à20 heures. Collages organiséstous les mardis. Tractages lesmercredis et vendredis matin.Conférence étudiante levendredi à 19 h 30.

❏ Cercle lycéenCercle lycéen - Chaquemercredi à 18 heures auLucernaire, 53 rue Notre-Dame-des-Champs, Paris 6e.

❏ VVersaillesersailles - Cercle d'étude lesamedi 7 mars à 15 h30 :Darwin, dangers et bienfaitsd'un héritage. Au Café franco-belge, place du Marché. [email protected] ; 06 81 82 63 00.

» PROVINCE

❏ GrenobleGrenoble - Cercle PierreBoutang le mercredi 11 mars.Ventes à la criée un dimanche

sur deux. 06 98 63 89 35 ;[email protected]

❏ LLyonyon - Cercle étudiant jeudi12 mars ; 06 45 76 93 55 ;[email protected]

❏ NiceNice - Conférence le vendredi 13 mars à 19 h 30 : Le nationalisme intégral. Undébat autour d'un apéritif et undîner suivront. Veneznombreux ! Brasserie LesHussards bleus, angle rue deFrance et rue Saint-Philippe.

❏ Saint-ÉtienneSaint-Étienne - Cercle Tocqueville le vendredi 6 mars. [email protected] ; 06 88 80 91 99.

» RAPPEL

Les annonces que vous souhaitezvoir publier doivent êtreadressées à [email protected] avant le lundiprécédant la parution d'unnuméro.

L'AF EN MOUVEMENT ❚

L’ACTION FRANÇAISE 2000 n° 2766 – du 5 au 18 mars 2009 15 ❚

HAUTS-DE-SEINE & PARIS 17e - JEUDI 19 MARS

Dîner-débat : Bainville et la restauration de l’histoireAvec Christophe Dickès, auteur du livre Jacques Bainville, les lois de la politique étrangère (Éd. Bernard Giovanangeli)

À 20 heures au restaurant Le Boléro de Ravel, 37 rue Gabriel Péri à Levallois-Perret (métro Anatole France, bus 174)

Participation : 26 euros ; étudiants, lycéens : 17 euros. Inscriptions avant le 12 mars auprès de Mme Geneviève Castelluccio, 46 rue Gabriel Péri, 92300 Levallois-Perret. Chèques à l'ordre de Mme Castelluccio. Renseignements : 01 47 57 05 81

VENDEURS VOLONTAIRES Rejoignez les points de vente deL'Action Française 2000 : jeudiaprès-midi, vendredi en fin de journée, le dimanche.

[email protected]

PARIS - DIMANCHE 22 MARS

Hommage à Henri IV & Banquet camelotLe 22 mars 1594, Henri IV entrait dans Paris. Aujourd'hui encore, la France a besoin d'un roi !

10 h 30 : Rassemblement devant la statue d'Henri IV, Pont-Neuf, Paris

12 h 15 : Banquet camelot

Participation : 20 euros. Renseignements et inscriptions : [email protected]

RÉJOUISSANCE NATIONALE

Mariage du prince JeanÀ l'occasion du mariage de SAR le duc de Vendôme et de Made-moiselle Philomena de Tornos, qui sera célébré le samedi 2 maiprochain en la cathédrale Notre-Dame de Senlis, l'Action françaisesouhaite offrir à l'héritier de la couronne, et à sa future épouse uncadeau qui manifestera l'attachement indéfectible des royalistes àla Famille de France.

J'invite tous les lecteurs de L'Action Française 2000 et tous nos amis à répondre à cet appel et ànous envoyer leurs dons afin que notre participation à cette grande journée de réjouissance na-tionale soit à la hauteur de l'événement.

STÉPHANE BLANCHONNETPrésident du Comité directeur de l'Action française

Adresser vos dons à l'Action française, 10 rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 PARIS, en mentionnantpour le cadeau du prince Jean de France.

Chèques à l'ordre de PRIEP – L'Action française.

❏ SOS-TSOS-TOUTOUT PETITSPETITS - À l'appel du docteur Xavier DOR,manifestation de prière pour le respect de la vievendredi 13 mars à 18 h 30 àproximité du Grand-Orient deFrance (métro Cadet, Paris 9e).www.sos-tout-petits.org

❏ LLEE SSOUVENIROUVENIR DUDU COLONELCOLONEL

JJEANEAN BBASTIENASTIEN-T-THIRHIRYY - Dimanche8 mars : rassemblement à15 heures devant sa tombe aucimetière de Bourg-la-Reine.Mercredi 13 mars : messe àParis, à 18 h 30, église Saint-Nicolas du Chardonnet ; à

Versailles, à 19 h 15, chapelleNotre-Dame des Armées,impasse des Gendarmes ; àMarseille, à 17 heures basiliquedu Sacré-Cœur, avenue duPrado. Jeudi 14 mars : messe àParis, à 11 h 30, église Sainte-Odile, 2 avenue StéphaneMallarmé, 17e.

❏ EENSEMBLENSEMBLE CONTRECONTRE LELE 19 19 MARSMARS

19621962 - Grand rassemblementsamedi 14 mars, à 13 h 30 àValence (Drôme), kiosquePeynet, esplanade du Champ deMars . Renseignements :www.cerclealgerianiste2607.f

» COTISATION 2009

Faire adhérer autour de soi est un acte militant. Les cotisationssont la principale ressource du Centre royaliste d'Action française.Réglez sans tarder votre cotisations 2009, soit à votre délégué local,soit directement au siège, 10 rue Croix-des-Petits-Champs, 75001Paris. Membres actifs : 32 euros ; étudiants et chômeurs : 16 euros(chèques à l'ordre du CRAF).

» AUTOCOLLANTS

Autocollants "La France, le Roi" : 10pour 1.20 euro, 50 pour 6 euros, 100pour 12 euros. Chèques à l'ordre duCRAF, 10 rue Croix-des-Petits-Champs,75001 Paris.

» BOUTIQUE ROYALISTE

Des cravates en soie fleurdeliséessont disponibles au prix de 60 eurosl'unité. Commandes à adresser auCRAF, 10 rue Croix-des-Petits-Champs,75001 Paris (chèques à l'ordre du CRAF).

BOULOGNE-SUR-MER - VENDREDI 6 MARS

Conférence inaugurale sur la monarchieUn repas suivra la conférence.

Renseignements et inscription : 06 62 53 42 73 ou écrire à [email protected]

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❚ COMBAT DES IDÉES

Édité par PRIEP S.A. au capital de 59 880 euros – 10, rue Croix-des-Petits-Champs, 75001 Paris – Imprimerie RPN – 93150 Le Blanc-MesnilNuméro de commission paritaire 0410I86761 – Directeur de la publication : M.-G. Pujo

La France s'apprête à célébrerle 8 mars prochain la Jour-née de la femme. Cet évé-

nement, officialisé par l'ONU en1977 et par la France mitterran-dienne en 1982, doit sa créationà l'Internationale socialiste desfemmes, version féminine de laDeuxième Internationale (fondéeen 1889 par Friedrich Engels), quien lança l'idée en 1910.

Les féministes radicaux, lestenants du Gender-feminism, quiont en horreur la différence dessexes et qui alimentent sans cessela guerre des sexes sur le modede la « lutte des classes », peu-vent à bon droit se réjouir de voirainsi institutionnalisée par desÉtats et des gouvernements,même conservateurs ou "dedroite", une manifestation quel'on doit à une Internationale fon-dée par l'auteur de L'Origine dela famille, de la propriété privéeet de l'État (1884) et célèbre com-pagnon de lutte de Karl Marx.

Fantasme du matriarcat

Bien entendu, tous les fémi-nismes, réformistes, universalistesou différentialistes, ne se situentpas sur la même ligne que ces ul-tras du féminisme du Genre. Cela dit, ce dernier mouvement,proche à la fois du marxisme etdes mouvements lesbiens, est trèspuissant aux États-Unis et son in-fluence ne cesse de gagner du ter-rain en Europe et dans le monde.Dans l'intéressant Lexique destermes ambigus et controverséssur la vie, la famille et les ques-tions éthiques, publié en 2005 parle Conseil pontifical pour la fa-mille, Mgr Oscar Alzamora Revo-redo, ancien archevêque de Limaau Pérou, a notamment démon-tré l'influence de ce mouvementsur la conférence mondiale surles femmes, organisée par l'ONUà Pékin en 1995. Les deux axesprincipaux du féminisme du Genresont la critique du patriarcat pré-senté comme une entreprise dia-bolique d'exploitation de la"classe" féminine et la négationobstinée de toutes les différencesde nature entre les hommes etles femmes. Or, nous allons voirque sur ces deux axes, la théorieféministe radicale est inconsis-tante et, contrairement à ses pré-tentions, en complète oppositionavec les sciences sociales commeavec les sciences naturelles.

On sait aujourd'hui que le ma-triarcat n'a jamais existé que dansles mythes et la littérature. Lescélèbres théories de Jacob Ba-chofen, qui inspirèrent des au-teurs aussi différents que Frie-drich Engels et Julius Evola, re-posent sur des extrapolationsabusives à partir de sourceséparses et essentiellement lé-gendaires ainsi que sur uneconfusion regrettable entre ma-

triarcat d'une part, filiation ma-trilinéaire et régime uxorilocal(cas où le mari vient habiter chezsa femme) d'autre part.

L'ethnologie et la sociologieactuelles l'affirment sans ambi-guïté, au grand dam des préten-dues "études" consacrées par desféministes à ce sujet : si certainessociétés ont accordé plus de placeque d'autres à la femme, notam-ment au sein de la famille, au-cune société historique n'a été

dominée par les femmes. Un ar-ticle de Nicolas Journet, « Le fan-tasme du matriarcat », paru en2005 dans la revue Sciences Hu-maines (hors-série numéro 4), ré-sume assez bien l'état présent dela recherche scientifique sur cettequestion. Or si le matriarcat estun fantasme, le patriarcat, en-tendu comme la domination bru-tale et intéressée des femmes parles hommes, comme un véritable« système d'exploitation » au sensmarxiste, disparaît lui aussi. Àl'illusion, entretenue selon desméthodes gramscistes parfaite-ment maîtrisées par les féministesradicaux, d'une division sexistedu travail, imposée à un momentprécis de l'histoire par une sortede complot universel des mâles 1,une vision plus réaliste des chosesopposera l'existence d'une divi-sion sexuelle des tâches que l'onretrouve dans toutes les sociétéshumaines et dont l'origine est àchercher dans la biologie et laphysiologie.

Des différencesnaturelles

À partir de la puberté, la dif-férenciation sexuelle, déjà pré-sente chez les enfants 2, connaîtun pic et voit les garçons acqué-rir progressivement, sous l'effetanabolisant des androgènes (leshormones mâles), une stature, unpoids, une robustesse du squeletteet, surtout, une masse musculairenettement supérieurs à ceux des

filles. En moyenne, les hommesadultes sont plus grands (de 10centimètres), plus lourds (d'unedizaine de kilos) et plus forts queleurs homologues féminins. Laforce maximale de la femmemoyenne calculée absolument cor-respond à 60 % de la force del'homme moyen, avec des diffé-rences plus sensibles dans lesmuscles de la partie supérieuredu corps que dans ceux de la par-tie inférieure. Même calculée de

manière relative, après correctiondes différences de taille et depoids, la force de la femme resteinférieure (voir sur ce point, parexemple, le Traité de physiologiede l'exercice et du sport de PaoloCerretelli, paru chez Masson en2002 ou le Précis de physiologiede l'exercice musculaire de Per-Olof Astrand et Kaare Rodahl paruen 1994 chez le même éditeur).

Les femmes sont en effet pro-grammées au plan hormonal, envue des grossesses, pour déve-lopper plus de masse grasse etmoins de masse sèche que leshommes. Ceci explique que pourchaque unité de poids corporel,elles possèdent moins de massemusculaire que les hommes. Sil'on ajoute à cette différence, lavulnérabilité de la femme pen-dant ses grossesses, c'est-à-dirependant une part non négligeablede sa vie dans la plupart des so-ciétés traditionnelles, les néces-sités de l'allaitement (dont la mé-decine la plus moderne nous rap-pelle les bienfaits pour l'enfantmais aussi pour la mère, entermes d'espérance de vie et deprévention des cancers), le lienétroit qui unit le nouveau-né à samère (que la physiologie a étu-dié sur le plan hormonal et la psy-chologie sur le plan affectif, n'endéplaise à Simone de Beauvoir),il n'est pas besoin d'être grandclerc ni de recourir à une quel-conque conspiration des mâlespour comprendre pourquoi lachasse et la guerre (donc la po-

litique) ont échu aux hommes etla sphère domestique et affectiveaux femmes dans toutes les cul-tures humaines sans exception.

Cette division sexuelle destâches est synonyme, pour les fé-ministes en général et pour lesféministes radicaux en particu-lier, qui dévaluent systématique-ment la maternité et les tâchestraditionnellement féminines,d'exploitation de la femme parl'homme. On pourrait d'abord leurobjecter que la part dévolue auxhommes n'était pas toujours trèsconfortable (mourir à la guerreou au fond de la mine), ensuiteque les civilisations traditionnellesaccordaient un grand prix et par-fois un grand prestige à la partdévolue aux femmes (Evola rap-porte dans Révolte contre lemonde moderne que, chez les Az-tèques-nahua, les femmes mortesen couches « participaient au pri-vilège de l'immortalité céleste[...] car on estimait qu'il s'agis-sait d'un sacrifice semblable à ce-lui de l'homme qui meurt sur lechamp de bataille »).

Le corset invisible

À l'heure actuelle, quand lesmédias, sous l'influence du sexuel-lement correct, ne présententcomme modèles symboliques auxfemmes que des super women,commissaires de police ou cham-pionnes d'arts martiaux, il n'estpas étonnant de voir que le sta-tut de la femme au foyer n'estplébiscité que par 5 % des jeunesfilles de quinze à dix-huit ans,d'après un sondage commandé enfévrier 2009 par Valérie Létard,secrétaire d'État chargé de la So-lidarité, qui bien entendu s'en fé-licite ! Cette situation révèle toutle paradoxe du féminisme quipousse les femmes à s'identifieraux hommes et à n'imaginercomme forme d'épanouissementque des activités pour lesquelleselles souffrent d'un indéniablehandicap naturel (que l'existenced'épreuves ou de barèmes diffé-renciés aux tests d'aptitude phy-sique dans la plupart des profes-sions traditionnellement mascu-lines n'arrive pas à masquer) enmême temps qu'il entretient sa-vamment le mépris des tâches fé-minines que les femmes réellescontinuent pourtant à exercer leplus souvent. Il en résulte unepression si insupportable pour lesfemmes que les essayistes ElietteAbécassis et Caroline Bongrand

n'hésitent pas à parler à ce sujetdans le livre qu'elles ont co-écritd'un Corset invisible. La mêmeEliette Abécassis, romancière etphilosophe, affirme dans un en-tretien accordé en mai 2007 ausite Evene.fr : « Le plus impor-tant est de prendre en considé-ration les différences naturellesentre l'homme et la femme. Uncertain féminisme a voulu cal-quer la libération de la femmesur le modèle masculin, ce quin'est pas très réaliste. Cette dis-symétrie est aujourd’hui une évi-dence. Il faut la prendre encompte quand on veut libérer lafemme. Il faut revenir à cettedifférence fondamentale. » Elleajoute plus loin, dans le mêmeentretien, au sujet de l'avorte-ment, que le discours féministen'envisage que sous l'angle du droitde la femme à disposer de soncorps et jamais à travers sesconséquences : « Il ne s'agit pasde revenir au temps où l'avorte-ment n'était pas légal et où lesfemmes mouraient dans d’atrocessouffrances [...] Mais l’avorte-ment est un traumatisme pour lafemme alors que pour l'homme ils'agit davantage d'une délivranceface à un enfant qu'il ne voulaitpas avoir. » Dans la mesure où cetauteur se réclame encore du fé-minisme, il faut sans doute voirdans ce type de déclarations unsigne de la crise que connaît cetteidéologie.

Il nous reste à souhaiter queles thèses du féminisme radicalsuscitent en France de plus enplus de réactions comme cellesd'Eliette Abécassis ou encore deClaude Habib dans son excellentlivre Galanterie française, paruchez Gallimard en 2006 et dontnous avons déjà rendu comptedans nos colonnes 3. La France setrouve en effet, à l'égard du Gen-der-feminism, dans une positionpérilleuse : ce mouvement com-mence avec beaucoup de retardsur les autres pays occidentaux ày faire sentir son influence maisil le fait avec d'autant plus de fa-cilité qu'il n'a pas encore rencon-tré chez nous d'opposition déter-minée comme celle que nous nousefforçons d'initier ici.

STÉPHANE BLANCHONNET

❏ GENDER

Impostures féministes Le 8 mars, les féministes radicaux vont profiter de le "Journée de la femme" pour dénoncer un patriarcatdiabolique et nier toute différence de nature entre les sexes. Leur idéologie, inconsistante, se trouveen complète opposition avec les sciences sociales comme avec les sciences naturelles.

1 - Thèse par ailleurs contradictoireavec celle de l'égalité naturelle entreles sexes défendue par ces mêmes fé-ministes puisqu'elle suppose une su-périorité des hommes capables d'im-poser partout le triomphe de ce pré-tendu complot.2 - De nombreuses études scientifiquesrécentes montrent que les différences,

de comportement notamment, sontobservables dès les premières années,ruinant l'explication culturaliste de ladifférence des sexes (voir sur ce pointClaire-Marie Clozel, Pourquoi les pe-tits garçons ne sont pas des petitesfilles, éditions Triptyque, 2007).3 - L'Action Française 2000, n° 2722,du 5 au 18 avril 2007.

Éliette Abécassis et Simone de Beauvoir Deux philosophies opposées