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VIGNERON Printemps 2013 127 VIGNERON Printemps 2013 126 LA MAISON À L’ÉTIQUETTE JAUNE FAIT VIBRER LES AMOUREUX DES VINS LIQUOREUX, CET OR ALSACIEN DONT LE MONDE ENTIER SE DÉLECTE. À L’ORIGINE DE LA LÉGISLATION RÉGLEMENTANT LES MENTIONS « VENDANGES TARDIVES » ET «SÉLECTION DE GRAINS NOBLES », LES HUGEL SONT FERMEMENT IMPLANTÉS À RIQUEWIHR DEPUIS PRÈS DE QUATRE SIÈCLES. UNE ÉPOPÉE QUI ÉPOUSE L’HISTOIRE DE L’ALSACE... L’ Alsace dans le sang hugel & fils par orianne nouailhac photos gianni villa

L’Alsace dans le sang hug el fi lsm.vigneron-mag.com/f/numero/sommaire/hugel-fils-219.pdf · rigé les potages Maggi, il n’hésitera pas à adopter les couleurs rouge et jaune

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VIGNERON Printemps 2013127 VIGNERON Printemps 2013126

LA MAISON À L’ÉTIQUETTE JAUNE FAITVIBRER LES AMOUREUX DES VINS

LIQUOREUX, CET OR ALSACIEN DONT LEMONDE ENTIER SE DÉLECTE. À L’ORIGINE DE LA LÉGISLATION RÉGLEMENTANT

LES MENTIONS « VENDANGES TARDIVES » ET «SÉLECTION DE GRAINS NOBLES »,

LES HUGEL SONT FERMEMENT IMPLANTÉS À RIQUEWIHR DEPUIS PRÈS DE QUATRESIÈCLES. UNE ÉPOPÉE QUI ÉPOUSE

L’HISTOIRE DE L’ALSACE...

L ’Alsace dans le sanghugel & fils

par orianne nouailhacphotos gianni villa

racé, une richesse qui explose de part etd’autre d’une ligne droite et élancée, d’unetrame ciselée et parfaite. Hugel bénéficied’un second terroir d’exception, encensédepuis le Moyen Âge : le Sporen, un sol ar-gileux, d’époque géologique jurassiqueavec des dépôts de marnes donnant desargiles riches. On lui doit ces gewurztra-miners au caractère exubérant, puissants etparfumés. Les pinots noirs et gris naissentquant à eux du côté du Rosenbourg. Maisrien n’est véritablement simple lorsqu’ils’agit de géologie et de crus alsaciens. On acoutume de dire qu’ils sont aussi compli-qués à saisir que l’histoire de la région. Pasvraiment une mince affaire…

L’Alsace, chaque Hugel en porte la traceet la passion dans le sang dès la naissance.Membre des très select Primum FamiliaeVini (PFV), onze familles triées sur le vo-let et sélectionnées pour leur histoire,leurs valeurs et leurs vins d’exception, etdes Hénokiens, une association d’entre-prises familiales bicentenaires, la maisonHugel se définit d’abord par son attache-ment viscéral à la transmission, à la fa-

mille : “On a le sens de l’intérêt général, ex-plique Étienne Hugel. Nous sommescondamnés à nous entendre car nous avonsune responsabilité, transmettre ce que nousavons reçu, qui est beaucoup plus fort que nous.Nous avons une vision à long terme. Mongrand-père avait déjà payé d’avance les droits

de succession jusqu’à ma génération !”Dou-zième génération aux commandes,Étienne, Marc et Jean-Philippe se sontdonc partagé la tâche avec intelligence.

Jean-Philippe, fils de Georges, diplôméde l’ESSEC, est le directeur général. “Je nesuis pas un homme du vin, je suis un gestion-naire”, explique-t-il avec cette discrétionqui caractérise tant les Alsaciens. Étienneet Marc, fils d’André, sont la face immer-gée de l’iceberg. Au premier, communica-tif-né, la responsabilité du commerce, del’image et les voyages pour promouvoir lamaison. Au second, le vignoble et l’éle-vage. Et la treizième génération est déjà surles rangs, jeunes pousses encore en forma-tion, prêtes à relever le défi avec la mêmeenvie. “Les réunions annuelles des PFV sontpour beaucoup dans la passion précoce de nosenfants”, estime Étienne Hugel. Rencon-trer les “cousins” du bout du monde, en-fants des plus grands vignerons d’ici etd’ailleurs, leur a sans nul doute fait prendrela mesure de leur chance, de leur privilège.“Ainsi que de l’immense et lourde responsabi-lité qui va avec”, ajoute Étienne.

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Certains lieux se nim-bent de magie sousun manteau blanc.Impossible de résis-ter au charme des

maisons anciennes de Riquewihr sousce voile immaculé. Une véritable cartepostale qui déplace chaque année deuxmillions de touristes dans ce village de1 300 habitants classé parmi les “plusbeaux villages de France”. Pas sûr toutefoisque ces avaleurs de kilomètres, férus depatrimoine, viennent ici pour ce qui estpourtant la plus grande richesse de Rique-wihr : la maison Hugel & Fils, vigneronsdepuis 1639 et pères spirituels de la viti-culture alsacienne qu’ils ont contribué àrefonder après ses heures sombres, à enca-drer et à faire briller aux quatre coins dumonde grâce à leurs sélections de grainsnobles qui rendent fous les amateurs.

On voit, çà et là, le nom de Hugel appa-raître sur les murs de Riquewihr, sur l’im-mense bâtiment de la rue de la Première-Armée, siège des opérations de la maison,au salon de dégustation ouvert à tous non

loin de là ou encore sur les armoiries fami-liales sculptées dans la pierre de la trèsbelle demeure à colombages de la rue desCordiers, construite en 1672 par l’un destout premiers membres de la dynastie. Ri-quewihr et Hugel semblent mêlés aupoint de ne faire plus qu’un : les 30 hec-

tares du domaine – la moitié en grandcru – sont situés sur la commune et la so-ciété familiale est toujours restée implan-tée au cœur même du village, fidèlementet farouchement depuis plus de trois centsoixante-dix ans.

Village ? Un mot à éviter devant AndréHugel, président de la Société d’histoirede Riquewihr et père d’Étienne et Marc,aux commandes de la maison aux côtésde leur cousin Jean-Philippe. “Nous avonsle droit de ville depuis 1320 grâce à nos rem-parts érigés à partir de 1291 !” s’exclameAndré, mémoire vivante et amoureuxtransi de sa “ville”.

En arrière-plan, au-delà des fameuxremparts, un coteau à forte pente est luiaussi blanchi par l’hiver. Il domine le clo-cher des églises et on y capture la ville d’unseul regard. Ce coteau mythique est leSchoenenbourg, terroir grand cru et terred’élection des rieslings. Avec ses marnescalcaires sur une assise de gypse, ses solsde l’Ère secondaire la plus ancienne(Trias) d’origine marine, il confère auxrieslings Hugel une élégance, un caractère

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RIEN N’EST SIMPLE ICI AVEC LA GÉOLOGIE ET LES CRUS. ON A COUTUME DEDIRE QU’ILS SONT AUSSI COMPLEXES QUE L’HISTOIRE DE L’ALSACE.

VIGNERONS À RIQUEWIHR DEPUIS 1639 AVEC HANS ULRICH, LES HUGEL ONTÉGALEMENT PROFONDÉMENT FAÇONNÉ LA VITICULTURE ALSACIENNE.

ÉTIENNE HUGEL MARC HUGEL

lutté pied à pied, cep après cep. “Nousavions déjà la tentation d’être honnêtes, es-time André, et rien n’a changé depuis lors.”Malgré tout, la bataille prendra du temps,beaucoup de temps, et les hybrides repré-sentaient encore un tiers de la productionen Alsace en 1940.

Fils de Frédéric-Émile, Jean marquera àson tour l’histoire de la maison. Marié àune femme de Berlin dont le père avait di-rigé les potages Maggi, il n’hésitera pas àadopter les couleurs rouge et jaune auxvertus marketing. “Si c’est bon pour Maggi,c’est bon pour Hugel” sera le cri du cœur àl’origine de la fameuse étiquette jaune quihabille les bouteilles Hugel depuis 1921.C’est à Jean que l’on doit également les dé-buts de l’exportation dès 1925. Son père,désormais maire de Riquewihr, lui avaitlaissé les affaires et le champ libre.

Jean transmettra le flambeau à ses troisfils, Georges (né en 1922), Jean (1924) etAndré (1929), en devenant maire de Ri-quewihr à son tour. Ils sauront, eux aussi,marquer de leur empreinte la maison fa-miliale et, bien au-delà, le vignoble alsa-

cien. C’est à leur génération que la maisonHugel obtient la reconnaissance officielledes mentions “vendanges tardives” et “sé-lection de grains nobles”.

Car Hugel fut longtemps la seule mai-son alsacienne à réaliser, comme ses voi-sins allemands, des vins botrytisés. “Jusqu’en

1959, les vendanges tardives étaient commer-cialisées sous des mentions germaniques : ‘Aus-lese’, explique Étienne Hugel. À partir de1959, on a traduit les termes allemands.Jusqu’en 1983, nous étions les seuls à produiredes sélections de grains nobles. Dès les années1970, l’INAO a chargé notre famille de rédi-ger un projet de loi pour réglementer les termes‘vendanges tardives’. Aujourd’hui, la loi,adoptée en 1984, en vigueur sur toute la ré-gion, instaure un contrôle des conditions deproduction de ces vins. Il est ainsi stipulé que lachaptalisation est interdite alors qu’à Sau-ternes elle est autorisée. C’est mon oncle Jean etmon grand-père qui ont rédigé le projet de loi.C’est la fierté de notre famille d’avoir mis enplace la législation la plus stricte de toutes lesAOC françaises.”

La législation soumet l’utilisation desmentions “vendanges tardives” et “sélec-tion de grains nobles” à des règles pré-cises : utilisation d’un cépage uniquementionné sur la bouteille – VT et SGNne peuvent s’appliquer qu’à quatre cé-pages : gewurztraminer, riesling, pinotgris et muscat –, déclaration auprès de

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Treizièmes du nom, Jean-Frédéric, filsd’Étienne, Marc-André, fils de Véro-nique, et Christian, fils de Jean-Philippe,sont nés tous les trois en 1989, un trèsgrand millésime pour les vendanges tar-dives et sélections de grains nobles Hu-gel. Jean-Frédéric “travaille” le marchéaméricain, qu’il contribue déjà à dévelop-per, et le voir déguster et commenter levin est un bonheur. Sa sœur Charlotte,étudiante, n’est pas en reste.

Quant à Marc-André, il enchaîneles stages et s’envole pour l’Aus-tralie et le Palatinat. Chacun

éprouve la même fierté pour le travail ac-compli par les générations précédentes,qui ont toujours affiché une exigenceforte même dans les périodes sombres oùle vignoble alsacien était gangrené par lesmaladies et tourné vers la quantité plutôtque la qualité.

Si on trouve trace des Hugel en Alsacedès le XVe siècle, la maison a coutume de da-ter sa naissance à 1639, lorsque Hans Ul-rich Hugel est officiellement reçu “bour-

geois” de Riquewihr et prend la tête de laCorporation des vignerons. Longtempsprospère durant tout le Moyen Âge notam-ment grâce aux voies de communicationdu Rhin qui lui permettaient d’exporter sesvins dans toute l’Europe (600 000 hecto-litres partis hors des frontières durant l’an-

née 1481 !), la viticulture alsacienne décli-nera ensuite, marquée par les aléas del’Histoire : la guerre de Trente Ans (1618-1648), la Révolution française, les cam-pagnes napoléoniennes et la guerre de1870. Les insectes et les maladies achève-ront de ronger les vignes encore deboutet, au début du XXe siècle, la situation estcatastrophique.

En 1902, Frédéric-Émile Hugel (1869-1950), grand-père d’André, arrière-grand-père d’Étienne et Marc, fait construire aucœur de Riquewihr l’exploitation tou-jours en activité. Né sous Napoléon III, ila changé quatre fois de nationalité aucours de sa vie, comme beaucoup d’Alsa-ciens dans cette région déchirée entredeux pays. Après la guerre de 1914-1918,il mène, aux côtés de Pierre Grenier, vi-gneron à Mittelwihr, une véritable croi-sade pour réimplanter les cépages aucœur des terroirs alsaciens. Alors qu’il au-rait été si facile de faire comme les autreset de produire avec ces fameux hybrides,résistants aux maladies et qui formaient lamajeure partie du vignoble alsacien, il a

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CE TONNEAU, LE SAINTE-CATHERINE, EST LE PLUS VIEUX ENCORE ENACTIVITÉ AU MONDE. IL DATE DE L’ANNÉE DE LA MORT DE LOUISXV, 1715.

C’EST À LA MAISON HUGEL QUE L’ON DOIT LA RECONNAISSANCE OFFICIELLEDES MENTIONS «VENDANGES TARDIVES» ET «SÉLECTION DE GRAINS NOBLES».

ANDRÉ HUGEL JEAN-PHILIPPE HUGEL

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DOMINANT RIQUEWIHR, LE SCHOENENBOURG,TERROIR GRAND CRU ETCOTEAU MYTHIQUE, EST

LA TERRE D’ÉLECTION DESPLUS GRANDS RIESLINGS.

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comme Étienne, Marc a été formé par cetoncle charismatique : “Lorsque je suis ar-rivé dans la maison en 1981, il y avait troisgénérations de Hugel en place. Mon arrivéea coïncidé avec le départ de notre œnologue.J’ai souhaité prendre la suite et Jean m’a aidéà me lancer. Deux ans plus tard, m’estimantprêt, il me laissait vinifier seul et repartaitdans ses vignes que jusqu’au bout il ne quit-tera jamais vraiment, jusqu’à la maladie,bien après sa retraite officielle.”

Si le vin est dans le raisin, la vignerevêt une importance fonda-mentale. “Nous n’utilisons plus

d’engrais chimiques depuis vingt-cinq ans,nous laissons vivre nos vignes avec de petitsrendements, inférieurs d’un tiers à la moyennealsacienne – dont les rendements sont, il estvrai, un peu trop élevés”, explique Étienne.“L’Alsace a un climat incroyable, renchéritMarc. Le bio est ici très facile. Abrités par lemassif vosgien, nous avons à Riquewihr unepluviométrie assez homogène, de l’ordre de500 à 700mm par an. Les étés sont chauds etl’arrière-saison sèche, amenant une maturité

douce, longue et continue. L’Alsace est la seulerégion à produire du gewurztraminer en bo-trytisé, l’Allemagne et l’Autriche le font exclu-sivement avec du riesling. Et bien sûr, si nousn’avons pas de sélection de grains nobles tousles ans, le réchauffement climatique en aug-mente la fréquence. Nous en sommes mainte-

nant à quatre années sur cinq.”De quoi ré-jouir les amateurs de ces vins doux et li-quoreux. Mais, à propos, quelle est la re-cette de ce petit miracle de la pourriturenoble ? “On est luthériens, fiers de l’être, on necroit pas aux miracles”, s’amuse Étienne.“C’est une exigence folle, une surveillance dechaque instant, comme le lait sur le feu, pourobtenir ce caractère confit, rôti, aux arômesde kumquat, d’épices”, ajoute Marc. Ensomme, un miracle très calculé.

Outre ses 30 hectares en propre – 40%de riesling , 40 % de gewurztraminer,15 % de pinot gris et 5 % de pinot noir –,Hugel s’approvisionne sur 115 hectaresauprès de plus de 200 viticulteurs aveclesquels la maison travaille parfois de-puis trois générations. La production estde 100000 caisses par an, soit 1,2 millionde bouteilles dont 90 % sont exportéesdans plus de 100 pays. “Nous avons atteint92,3 % pour l’export en 2011”, préciseJean-Philippe. L’image de marque de lamaison à l’étiquette jaune est immensedans certains pays comme le Japon.“Mondialement, nous sommes davantage

l’INAO, interdiction de chaptaliser, titresalcoolémiques minimaux, contrôle aupressoir et dégustation pour l’agrément.

Non contente d’avoir imposé des cri-tères de qualité pour l’ensemble de la ré-gion, la maison Hugel ne cesse de prou-ver, millésime après millésime, sonsavoir-faire unique dans les vins de pour-riture noble, qui atteignent régulière-ment des sommets. La dégustation d’unRiesling Sélection de Grains Nobles2009 va achever de nous en convaincre.Un vin d’une longueur hallucinante,d’une richesse (22° potentiels) excep-tionnelle auquel le dégustateur MichelBettane n’a pas hésité à mettre 20/20,une note assortie de ce commentaire :“Son vieillissement sera éternel.”

Frère de Georges, qui prendra encharge la gestion – tout comme son filsJean-Philippe aujourd’hui – et d’André,qui avait déjà la tête dans les livres d’his-toire, Jean, deuxième du nom, deviendraun personnage emblématique, un vigne-ron vénéré par ses pairs et adoré par sesneveux Étienne et Marc. Étienne se sou-

vient avec émotion de son oncle, décédéen 2009 : “J’ai tout appris à son contact,nous avons énormément voyagé ensemble. Ilnous a pris sous son aile, mon frère Marc etmoi, pour nous transmettre son savoir. Il fai-sait absolument tout, de la vigne à la cave,c’était un vigneron de génie. Tout le monde le

surnommait Jeanny, ‘petit Jean’ en alsacien,et certains avaient poussé l’affection jusqu’àl’appeler Johnny. C’était un régal pour lesjournalistes car il était bavard. Il pouvait vousparler du vin pendant des heures. À sa mort,nous avons reçu des témoignages du mondeentier.”Certains de ces témoignages rap-pelleront que les vins ont ceci d’éternelqu’ils ne meurent jamais tout à fait.“Jeanny” aura ainsi laissé des nectars pourla postérité et notamment son grandœuvre, un Riesling Sélection de GrainsNobles 1976 d’anthologie. “Il porte le ca-ractère du Schoenenbourg, s’exclame Marc.Ce 1976 est sur le patiné, la cire, la menthefraîche, c’est un millésime extrême, une annéechaude avec des vendanges le 19 septembre.”Surprenant nez en effet que ce 1976 quiexhale la menthe fraîche de façon évi-dente. Nectar sublime dont le palais serepaît à l’infini.

Jean était homme de vins mais aussi demots. Ses formules sont restées dans l’es-prit de tous : “Le vin est dans le raisin” ouencore “Un vigneron doit prendre son au-réole tous les matins et l’astiquer”. Tout

CHEZ LES HUGEL, LES FOUDRES SONT UNE AFFAIRE DE FAMILLE. ICI À DROITE LE NUMÉRO9, FABRIQUÉ PAR FRÉDÉRIC-ÉMILE HUGEL EN 1865.

ABRITÉ PAR LE MASSIF VOSGIEN, RIQUEWIHR A UNE PLUVIOMÉTRIEHOMOGÈNE ET UNE ARRIÈRE-SAISON AMENANT UNE MATURITÉ CONTINUE.

MARC-ANDRÉ HUGEL JEAN-FRÉDÉRIC HUGEL

JEAN-CLAUDE ORTLIEB, CHEF DE CULTURE

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connus pour nos gewurztraminers, expliqueÉtienne Hugel. Mais nous pensons que nosrieslings sont nos plus grands vins.”

T rois gammes sont proposées :“Hugel”, “Hugel Tradition” et“Hugel Jubilée”, auxquelles

s’ajoutent les vendanges tardives et sélec-tions de grains nobles. Les deux premièresgammes sont principalement produitesavec les achats de raisins aux viticulteurs(70 % et 30 % de raisin des vignes maisonpour le riesling Hugel, l’inverse pour le ries-ling Hugel Tradition qui atteint 70 % devignes maison). La gamme “Hugel Jubilée”représente quant à elle la quintessence avecdes raisins des grands terroirs de la maisonet un vieillissement prolongé. Et si la moitiéde ses vignes est en zone grand cru, Hugelchoisit de ne pas en faire mention sur sesétiquettes car la classification n’a pas tou-jours fait preuve d’une grande exigence.

Il en va ainsi du Sporen, terroir profondé-ment lié à la famille. “Le Sporen a les parcellesles plus anciennes, certaines depuis cent vingt-cent quarante ans dans notre famille, précise

Marc. Jusque dans les années 1970, le Sporenfaisait 4,84 hectares. Il en fait aujourd’hui23,70. Cherchez l’erreur. Nous en possédons lequart, principalement dans les parcelles d’ori-gine, avant agrandissement et dilution !”

Quant à l’élevage, il est réalisé dans desfoudres très anciens, ce qui évite le boisé

CHOSE CURIEUSE, C’EST AU BOUILLON KUB DE MAGGI QUE L’ON DOITL’ÉTIQUETTE JAUNE ADOPTÉE PAR LA MAISON HUGEL DÈS 1921.

LE CŒUR HISTORIQUE DE RIQUEWIHR.

dans le vin. Chez les Hugel, les tonneauxsont une affaire de famille et les anciensétaient tonneliers autant que vignerons.Parmi les plus remarquables, le n° 9, fabri-qué par Frédéric-Émile en 1865, millé-sime d’anthologie ou encore ce tonneaudatant de l’année de la mort de Louis XV,1715, le plus vieux encore en activité. Dequoi faire briller les yeux d’André, décidé-ment féru d’histoire, qui nous entraînedans son grenier aux merveilles.

Tout en haut du bâtiment de la rue de laPremière-Armée, il a réuni des objets devignerons mais aussi d’autres simplementliés à l’Alsace : tireuses, hottes, filtres,pompes à main, fouloirs, traîneaux, outilsdivers et variés, vieilles serrures, chapeauxdes armées napoléoniennes… Un siècleet plus d’objets du quotidien. On le sentpréoccupé par le devenir de tout celaaprès son départ. “Et qui s’occupera de Riquewihr et de ses vieilles pierres ?” ajoute-t-il dans un soupir. On a envie de le rassu-rer : la famille Hugel ne laissera jamaistomber Riquewihr. Ça fait quatre sièclesque ça dure. e (Bon à savoir, page 140)

ANDRÉ DANS SON MUSÉE DE CURIOSITÉS.

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