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L’Amour fou André Breton Fiche de lecture Document rédigé par Marie-Alice Villaume licenciée en lettres (Université de Lorraine) lePetitLittéraire.fr

L’Amour fou (Fiche de lecture) - lePetitLitteraire.fr · 2013-08-07 · LePetitLittéraire.fr –Fiche de lecture –L’Amour fou 4 UNE RENCONTRE MARQUANTE Breton fait référence

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L’Amour fouAndré Breton

Fiche de lectureDocument rédigé par Marie-Alice Villaume

licenciée en lettres(Université de Lorraine)

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RÉSUMÉ 3

ÉTUDE DES PERSONNAGES 6André Breton

Jacqueline Lamba

Écusette de Noireuil

Les amis d’André Breton

CLÉS DE LECTURE 8Une œuvre surréaliste

L’amour fou

Intertextualité, photographies et référencesUn montageDes références

PISTES DE RÉFLEXION 11

POUR ALLER PLUS LOIN 12

2L’Amour fouFiche de lecture –LePetitLittéraire.fr –

André BretonÉcrivain surréaliste français

• Né en 1896 à Tinchebray• Décédé en 1966 à Paris• Quelques-unes de ses œuvres :

Les Champs magnétiques, avec Philippe Soupault (1920), récitNadja (1928), romanL'Amour fou (1937), récit

André Breton est un romancier, poète et essayiste, né à Tinchebray, dans l’Orne en 1896. Il est surtout connu pour avoir fondé le mouvement surréaliste. En 1919, il a créé avec ses amis Philippe Soupault et Louis Aragon la revue Littérature, et y publie le premier texte surréaliste, Les Champs magnétiques. En 1924, il publie le Manifeste du surréalisme, qui l’impose comme chef de file de ce mou-vement. Auteur de Nadja (1928) et de L’Amour fou (1937), André Breton a également été membre du Parti commu-niste français de 1927 à 1935. Il est mort à Paris en 1966.

L’Amour fouUn récit surréaliste

• Genre : roman• Édition de référence : L’Amour fou, Paris, Gallimard,

coll. « Folio », 2010, 175 p.• 1re édition : 1937• Thématiques : passion, amour, beauté,

rencontre, objets

Nadja, l’œuvre d’André Breton précédant L’Amour fou, s’achève sur ces mots : « La beauté sera CONVULSIVE ou ne sera pas. » Dans L’Amour fou, récit publié en 1937, l’auteur développe cette phrase et s’exprime sur l’amour en se basant sur sa rencontre avec Jacqueline Lamba. Il explore sa vision de la passion, qu’il nomme « amour fou », à travers fantasmagories, ressentis, instants vécus et réflexions sur le hasard. Il s’agit d’un récit autobiographique.

3L’Amour fouFiche de lecture –LePetitLittéraire.fr –

RÉSUMÉ

QU'EST-CE QUE L'AMOUR ?Le roman débute avec un prolongement à l’ultime phrase de Nadja : « La beauté sera CONVULSIVE ou ne sera pas. » Ce passage fut écrit « quelques jours plus tôt » (p. 63) que la rencontre de Breton avec Jacqueline Lamba, l’inspiratrice de L’Amour fou. Au terme du premier chapitre, il remanie la phrase et écrit : « La beauté convulsive sera érotique-voilée, explosante-fixe, magique-circonstancielle ou ne sera pas. » (p. 26)

Breton évoque une scène fantasmatique, mêlant mysticisme et psychanalyse, et s’achevant sur la vision d’un homme faisant face à un rang de femmes composé de toutes celles qu’il a aimées. L’auteur explique alors sa vision de l’amour comme étant exclusif, mais qui, sujet aux conditions sociales, prend différentes formes.

L’auteur introduit ensuite la notion de passion et de beauté nouvelle, « envisagée uniquement à des fins passionnelles » (p. 12). Après avoir décrit sa vision de la beauté convulsive, révélée à celui qui la ressent par une réaction irrationnelle, Breton raconte son déjeuner du 10 avril 1934 où il s’est amusé de hasards poétiques : le plongeur dit « Ici l’on dîne » à une serveuse, et il entend « Ici, l’Ondine ! » (p. 25).

LE SENS CACHÉ DES CHOSESAu printemps 1934, Breton visite le marché aux puces avec le sculpteur et peintre suisse Alberto Giacometti (1901-1966). Il y découvre certains objets, véritables « trouvailles » (p. 43), dont le sens se dévoile peu à peu :

• un demi-masque de métal, « l’attraction du jamais vu » (p. 42), qui semble pouvoir aider Giacometti à terminer la sculpture sur laquelle il travaille ;

• une grande cuiller en bois « dont le manche […] s’élevait de la hauteur d’un petit soulier faisant corps avec elle » (p. 43), qui interpelle Breton à cause du manque, ressenti depuis longtemps, d’une sculpture du soulier perdu de Cendrillon qu’il a demandée à Giacometti de produire, ce que ce dernier n’a jamais fait. Il a d’ailleurs voulu ce soulier à cause d’une phrase dont il s’était souvenu au réveil : « le cendrier-Cendrillon » (p. 46). Dans le 1er P.S., il ajoute d’autres sens et associations d’idées concernant le potentiel érotique de la cuiller.

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UNE RENCONTRE MARQUANTEBreton fait référence à une enquête de la revue Minotaure qui interrogeait les participants sur « la rencontre capitale de [leur] vie » (p. 27) et leur demandait leur avis sur le rôle que jouait le hasard dans cette rencontre. Il s’agissait d’analyser  les concours de circonstances, et de percevoir les liens existant entre ces circonstances et la rencontre, ce qu’il appelle « le magique-circonstanciel » (p. 32).

L’auteur affirme qu’une telle recherche sur l’objectivité du hasard va bien au-delà d’une simple enquête et doit faire l’objet d’une analyse plus poussée. Il annonce alors que c’est ce qu’il va faire dans L’Amour fou en racontant sa rencontre avec Jacqueline Lamba. Il s’agit d’analyser son désir car celui-ci est le dénominateur commun de tous les hasards et de toutes les coïncidences.

Breton évoque le caractère « révélatoire » (p. 61) de la rencontre, déclenchant une « panique » (p. 60).

Lorsqu’il rencontre une femme « scandaleusement belle » (p. 63) le 29 mai 1934, le temps semble comme suspendu dans l’attente. Il l’appelle « la femme qui venait d’entrer » (p. 65) encore au moment où elle sort du café où il l’observait. Le présent semble aboli : il est à la fois dans le temps passé, parce qu’il repense sans cesse à la rencontre, et dans l’avenir, car il se projette avec elle (il imagine que ce qu’elle est en train d’écrire lui est destiné et parle d’espoir). Finalement, ses fantasmes se réalisent : elle lui écrivait bien, tout ce qu’il avait imaginé était vrai.

Il se rapproche d’elle lors d’une promenade nocturne dans Paris et perd confiance en lui, se demandant pourquoi il mérite un tel honneur. Il est pris d’un vertige angoissant, mêlé de doutes et de certitudes. Il ne voit plus la frontière entre ses fantasmes et le caractère concret de la rencontre, jusqu’à ce qu’il évoque la tour Saint-Jacques, symbole érotique qui l’aide à retrouver ses esprits et sa masculinité.

Breton reçoit alors la fulgurante révélation de la dimension prophétique d'un poème intitulé Tournesol, qu'il a écrit en 1923 : il y voit sa rencontre annoncée avec Jacqueline Lamba. Il l’épouse le 14 aout et part avec elle aux iles Canaries. Ce voyage est l’occasion pour lui de décrire l'exubérance sensuelle du paysage volcanique foisonnant d'espèces végétales. Il exprime métaphoriquement la jouissance amoureuse du couple, en harmonie avec les grandes forces primitives de la nature : il évoque les plantes vivaces, les nuages et des références mythiques.

Il utilise l’image de la plante sempervivum pour décrire le principe de l’amour fou : vivace et qui ne meurt jamais, même dans les pires conditions. Il fait l’analogie avec la feuille de papier et l’écriture surréaliste :

Ʒ Autrement gênant est de s’arracher à la contemplation de cette espèce autochtone, je crois, de sempervivum qui jouit de la propriété effrayante de continuer à se développer en n’importe quelles conditions et cela aussi bien à partir d’un fragment de feuille que d’une feuille : froissée, piquée, déchirée, brûlée, serrée entre les pages d’un livre à tout jamais fermé, cette écaille glauque dont on ne sait s’il convient en fin de compte de la serrer contre son cœur ou de l’insulter, se porte bien. Elle tente, au prix de quels révoltants efforts, de se reconstruire selon les probabilités détruites qui sont les siennes. (p. 107-108)

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Par ailleurs, l’ascension du pic du Teide à Tenerife constitue le symbole de leur amour grandissant : « C’est la première fois que j’éprouve devant le jamais vu une impression de déjà vu aussi complète » (p. 131-132), dit-il. Pour exprimer le caractère unique et rare de ses sentiments, il utilise cette fois l’image d’un retama, un genêt blanc : c’est le seul arbuste que l’on croise encore à une telle hauteur.

UN AMOUR QUI S'ESSOUFFLELe 20 juillet 1936, le couple marche sur une plage bretonne, paysage plat qui contraste avec les hauteurs du pic de Teide. C’est le décor symbolique et sinistre de l’apparition de la lassitude, de l’usure de l’amour et de la séparation. Breton insiste toutefois sur le fait que ce n’est que provisoire et que l’amour fou triomphe toujours : « De par le don absolu qu’il a fait de lui-même, il est tenté d’incriminer l’amour là où c’est seulement la vie qui est en défaut. » (p. 149)

La plage se situe aux environs de Fort-Bloqué, nom porteur de sens : retour du sentiment de panique. Le couple passe devant une villa qui semble être dans un halo : c’est la maison de Michel Henriot, un criminel qui a tué sa femme, non pas pour toucher son assurance vie, mais parce qu’il ne pouvait plus supporter ses refus de rapports charnels. Il était éleveur de renards argentés. Jacqueline avait justement emmené avec elle, pour ce séjour, deux livres dont les titres faisaient référence au renard. Breton analyse cette situation troublante de coïncidences.

Enfin, Breton adresse une lettre à sa fille qui se termine par ce vœu : « Je vous souhaite d’être follement aimée. » (p. 176) Il lui confie ses réflexions sur l’amour fou : « Ce que j’ai aimé, que je l’aie gardé ou non, je l’aimerai toujours. » (p. 171) Il lui explique qu’elle en est l’heureux résultat, inattendu :

Ʒ Vous vous êtes trouvée là comme par enchantement, et si jamais vous démêlez trace de tristesse dans ces paroles que pour la première fois j’adresse à vous seule, dites-vous que cet enchantement continue et continuera à ne faire qu’un avec vous, qu’il est de force à surmonter en moi tous les déchirements du cœur. (p. 168)

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ÉTUDE DES PERSONNAGES

Les personnages de L’Amour fou sont des personnes réelles puisqu’il s’agit d’un récit autobiographique.

ANDRÉ BRETONC’est à la fois le narrateur et le personnage principal de L’Amour fou. Écrivain et chef de file du mouvement surréaliste, il signe ici un monologue agrémenté de pensées, de descriptions, de ressentis, et d’analyses de situations et de signes entourant sa rencontre avec Jacqueline Lamba. Il se place en position d’attente, aux aguets d’une potentielle rencontre et du hasard : c’est ce qui importe le plus pour lui. Il analyse son vécu avec une rigueur presque scientifique empruntée à la psychanalyse et cherche à comprendre ses désirs profonds.

JACQUELINE LAMBAElle n’est jamais citée par son nom dans L’Amour fou, mais est désignée par les pronoms « elle », « celle » et « tu ». Elle n’est présente dans l’œuvre qu’à travers le regard, le point de vue et les réflexions d’André Breton. Leurs chemins se croisent au café Cyrano de la place Blanche, le 29 mai 1934. Elle est en train d’écrire et il imagine qu’elle lui écrit. Plus tard, il apprend que c’était effectivement le cas : elle avait découvert ses écrits par le biais de son cousin et était intéressée par sa démarche surréaliste. Elle est décrite par Breton comme « scandaleusement belle » (p. 63). Ce dernier vit leur rencontre comme une révélation de « l’amour fou » :

Ʒ Mon amour pour toi n’a fait que grandir depuis le premier jour : sous le figuier impérial il tremble et rit dans les étincelles de toutes ses forges quotidiennes. Parce que tu es unique, tu ne peux manquer pour moi d’être toujours une autre, une autre toi-même. À travers la diversité de ces fleurs inconcevables, là-bas, c’est toi changeante que j’aime en chemise rouge, nue, en chemise grise. (p. 119)

Elle épouse André Breton quatre mois après leur rencontre et donne naissance à leur fille, Aube, en 1935.

ÉCUSETTE DE NOIREUILIl s’agit de la fille d’André Breton et de Jacqueline Lamba, Aube, à qui est dédiée la lettre à la fin de L’Amour fou. Elle n’a alors que 8 mois et son père lui « souhaite d’être follement aimée » (p. 176). Écusette de Noireuil est l’anagramme d’écureuil de noisette. Ce surnom fait référence à la « nuit du tournesol », lorsque Breton a rencontré sa mère, qui lui a laissé « le souvenir d’un écureuil tenant une noisette verte » (p. 66).

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LES AMIS D’ANDRÉ BRETONBreton accorde un rôle important à l’amitié dans sa quête de compréhension du désir. On attribue en effet plus de sens aux rencontres lorsqu’on est accompagné : elles semblent moins accidentelles, moins hasardeuses. Il développe cette idée dans le chapitre 3, lors de sa visite du marché aux puces avec Giacometti :

Ʒ J’observe en passant que ces deux trouvailles que Giacometti et moi nous faisons ensemble répondent à un désir qui n’est pas un désir quelconque de l’un de nous mais bien un désir de l’un de nous auquel l’autre, en raison de circonstances particulières, se trouve associé. […] Je serais tenté de dire que les deux individus qui marchent l’un près de l’autre constituent une seule machine à influence amorcée. (p.45)

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CLÉS DE LECTURE

UNE ŒUVRE SURRÉALISTELe surréalisme est un mouvement artistique et littéraire théorisé par Breton dans le Manifeste du surréalisme en 1924. Les écrivains surréalistes cherchent à accéder aux pensées brutes présentes dans l’inconscient, sans faire intervenir la raison et sans finalité esthétique ou morale. Pour ce faire, ils recourent, entre autres, à l’écriture automatique (cela consiste à écrire sans réfléchir et sans se corriger à posteriori de manière à mettre sur papier des pensées inconscientes) et à l’analyse des rêves. On ressent dans leur démarche l’influence de la psychanalyse, découverte au début du xxe siècle par Freud.

Dans L’Amour fou, Breton adopte une démarche d’analyse surréaliste :

• il note et décrit avec précision son état émotionnel lors de chaque situation :

Ʒ Je ne me rappelle pas avoir éprouvé de ma vie si grande défaillance. Je me perds presque de vue […]. Je me sens avec effroi conduire [la conversation] à sombrer malgré moi dans l’artificiel. J’en suis réduit à m’arrêter de temps à autre pour immobiliser devant moi le visage que je ne puis supporter plus longtemps de voir d’offrir le profil, mais cette démarche enfantine ne me rend, à vrai dire, qu’une très courte assurance. (p. 67-68)

• il pratique l’écriture automatique comme en témoigne l’exemple du poème Tournesol (p. 80-81) ;• il archive ses rêveries et ses fantasmagories comme le montre, par exemple, la phrase de réveil

« le cendrier Cendrillon » (p. 46) ;• il observe presque cliniquement chaque détail et prête une attention particulière à la

signification des formes des taches sur les murs ou aux nuages parce qu’ils sont révélateurs du désir de chacun. Il évoque par exemple ses rêveries au sujet des nuages qu’il observe pour dire son désir pour Jacqueline Lamba :

Ʒ Me voici dans le nuage, me voici dans la pièce intensément opaque où j’ai toujours rêvé de pénétrer.  […] Je suis dans les nuages cet homme qui pour atteindre celle qu’il aime est condamné à déplacer une pyramide faite de son linge. (p. 129-131)

Il analyse ensuite toutes ses notes à posteriori pour accéder aux pensées brutes : il fournit par exemple des explications du poème Tournesol (p. 81-94) et ses différentes hypothèses concernant les trouvailles au marché aux puces (p. 51-57, en deux P.S. ajoutés en 1934 et 1936).

Pour lui, rien n’arrive vraiment par hasard. Il attribue du sens à chaque détail. Le hasard est défini par Breton comme « la rencontre d’une causalité externe et d’une finalité interne » (p. 28). Le hasard n’est donc pas pensé comme étant accidentel : il a une origine, il est issu de notre désir profond, inconscient. Breton parle alors de hasard objectif. Pour identifier le hasard objectif,

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Breton conseille de considérer chaque détail comme étant révélateur du désir de chacun : « Toute vie comporte de ces ensembles homogènes de faits d’aspect lézardé, nuageux, que chacun n’a qu’à considérer fixement pour lire dans son propre avenir. » (p. 127)

Breton attribue donc un sens réel à ses pensées issues du rêve et de l’inconscient : elles ne sont jamais sans conséquences dans sa vie.

L’exemple de la rencontre de l’amour fou témoigne très bien à la fois de sa conception du hasard objectif et de sa démarche surréaliste : il analyse avec rigueur et objectivité les signes annonçant cette rencontre. Il voit ainsi dans la cuiller en bois qu’il a trouvée au marché aux puces des indices sur l’érotisme qu’il découvrira avec Jacqueline Lomba plus tard. Il retrouve également le poème Tournesol qui fait référence à des détails qu’il vivra pendant la nuit de leur rencontre de longues années après sa rédaction par écriture automatique. Pour lui, il s’agit de hasards objectifs : son désir de connaitre l’amour fou était déjà présent depuis longtemps et s’était même déjà manifesté. Il a pu s’en apercevoir par la suite grâce à sa démarche, qui consistait à noter tous les détails paraissant hasardeux dans son existence pour les mettre plus tard en perspective.

L’AMOUR FOUAu fil du roman, Breton découvre et définit peu à peu l’amour fou : il s’agit selon lui de l’association de la communication des cœurs (cela signifie que lorsque deux amants croient en leur amour simultanément, il devient réel : ainsi nait le sentiment d’espérance) et de l’amour charnel.

Il définit également la beauté convulsive, indispensable à la naissance de l’amour fou : elle est un objet de désir d’une valeur et d’une rigidité qu’il compare au cristal, elle est créatrice d’un sentiment irrationnel. Cette beauté est caractérisée par plusieurs éléments : « La beauté convulsive sera érotique-voilée, explosante-fixe, magique-circonstancielle ou ne sera pas. » (p. 26) On retrouve dans cette définition un va-et-vient entre rêve et réalité, entre sentiments ressentis et objectivité nécessaire à l’analyse.

Il réfléchit aussi à la notion d’exclusivité et de monogamie dans l’amour. Pour Breton, l’amour est sujet aux conditions sociales. Il dit qu’on parle habituellement d’amour unique, mais que, concrètement, au cours d’une vie, on ressent plusieurs fois le sentiment amoureux envers différentes personnes : « L’esprit s’ingéni[e] à donner l’objet de l’amour pour un être unique alors que dans bien des cas les conditions sociales de la vie font implacablement justice d’une telle illusion. » (p.  10) Il développe l’idée que l’on découvrirait petit à petit l’amour à travers les personnes pour lesquelles on éprouverait successivement des sentiments : « L’être aimé serait alors celui en qui viendrait se composer un certain nombre de qualités particulières tenues pour plus attachantes que les autres et appréciées séparément, successivement, chez les êtres à quelque degré antérieurement aimés. » (p. 12) On resterait alors fidèle à l’amour, tout en le vivant à travers plusieurs êtres.

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INTERTEXTUALITÉ, PHOTOGRAPHIES ET RÉFÉRENCES

Un montage

L’Amour fou est composé d’un montage entre plusieurs textes et des photographies. Les cinq pre-miers chapitres ont été écrits de manière individuelle et publiés dans différentes revues avant que Breton n’ait l’idée de les assembler. Les deux autres chapitres ont été ajoutés exprès pour ce livre.

Breton préfère utiliser des photographies des objets dont il parle dans ses livres pour les montrer aux lecteurs, plutôt que de les décrire d’une manière imprécise et subjective. « Je regrette de n’avoir pu fournir, comme complément à l’illustration de ce texte, la photographie d’une locomotive de grande allure qui eût été abandonnée durant des années au délire de la forêt vierge » (p. 15, au sujet de la beauté convulsive), explique-t-il.

Des références

Breton fait également référence à de nombreux textes, notamment à ceux de Hegel (p. 61-62) et de Lautréamont (p. 24).

Il mentionne aussi des mythes et des légendes de l’imagination collective pour expliquer les situations qu’il décrit (car cela parle au lecteur), mais également pour les mettre en perspective : Alice au pays des merveilles, Orphée, Roméo et Juliette, Vénus et Diomède.

Enfin, il recourt à l’ésotérisme, qui consiste à accéder aux choses intérieures et secrètes de l’être en utilisant des symboles : il fait de nombreuses métaphores reliant son état émotionnel à la nature (citons par exemple l’ascension du pic de Teide pour symboliser sa relation avec Lamba, les figures de l’étoile et du cristal pour décrire l’amour, les références au tarot de Marseille, etc.). Il évoque aussi l’alchimiste Nicolas Flamel (p. 86) et la déesse grecque de la discorde Éris (p. 143).

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PISTES DE RÉFLEXION

QUELQUES QUESTIONS POUR APPROFONDIR SA RÉFLEXION…• « La beauté convulsive sera érotique-voilée, explosante-fixe, magique-circonstancielle ou ne sera

pas. » (L’Amour fou, p. 26). À la lumière de cette déclaration, tâchez de définir l’esthétique surréaliste.• À votre avis, dans quel(s) but(s) André Breton utilise-t-il des références mythiques ?• Qu’est-ce que le hasard objectif selon Breton ?• Quelle est l’influence de la découverte de l’inconscient par la psychanalyse sur le travail

d’André Breton ?• Définissez le concept d’amour fou selon André Breton.• L’Amour fou est ponctué de références précises et de photographies, comme l’était Nadja.

Quelles sont leurs fonctions ?• L’Amour fou est un montage combiné de plusieurs textes indépendants, écrits et/ou modifiés

à des moments différents. De plus, les anecdotes sont racontées en deux temps : en ressenti immédiat, puis par des retours réfléchis sur les situations. Analysez la temporalité dans l’œuvre d’André Breton.

• Commentez les métaphores du désir dans L’Amour fou.• « L’imaginaire est ce qui tend à devenir réel. » (André Breton, Le Revolver à cheveux blancs).

Commentez cette citation en vous appuyant sur L’Amour fou.

12L’Amour fouFiche de lecture –LePetitLittéraire.fr –

POUR ALLER PLUS LOIN

ÉDITION DE RÉFÉRENCE• Breton A., L’Amour fou, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 2010.

ÉTUDE DE RÉFÉRENCE• Ligot M.-T., L’Amour fou, Paris, Gallimard, coll. « Foliothèque », 1996.

SUR LEPETITLITTÉRAIRE.FR• Fiche de lecture sur le Manifeste du surréalisme d’André Breton• Fiche de lecture sur Nadja d’André Breton

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de la nuit

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de la Manche

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Claudel• La Petite Fille de

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Coelho• L’Alchimiste

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Dai Sijie• Balzac et la Petite

Tailleuse chinoise

De Vigan• No et moi

Dicker• La Vérité sur l’affaire

Harry Quebert

Diderot• Supplément au Voyage

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Énard• Parlez-leur de batailles,

de rois et d’éléphants

Ferrari• Le Sermon sur la

chute de Rome

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