20
L’amour universel La méthode yogique du Bouddha Maitréya

L’amour universel - vajra-yogini.com 01-39.pdf · L’amour universel 6 Introduction de l’édition américaine 7 nous avions aussi un système qui permettait à ceux qui n’avaient

  • Upload
    hadat

  • View
    215

  • Download
    1

Embed Size (px)

Citation preview

L’amour universelLa méthode yogique du

Bouddha Maitréya

L’amour universelLa méthode yogique du

Bouddha Maitréya

Traduction française de Michelle Le Dimnaassistée de Philippe Penot et Nadine San Gérotéo

Universal LoveThe Yoga Method of Buddha Maitreya© 2008 Lama Thubten Zopa Rinpoche © 2008 Lama Yeshe Wisdom Archive PO Box 356 • Weston, MA 02493, USAwww.LamaYeshe.com

© 2009 éditions Vajra Yogini pour tous les pays francophones81500 Marzens (France)Tél : 33 (0)5 63 42 00 06, télécopie : 33 (0)5 63 58 03 48www.vajra-yogini.com

ISBN : 2-911582-72-1EAN : 9782911582721

Photos de couverture Lama Yéshé : Carol Royce-WilderMaitréya : Maitreya ProjectMaitréya à Toushita p. 1 : dessin de Lama Thoubtèn Zopa RinpochéPhotos intérieures sauf mention : Carol Royce-WilderMaitréya p. 142, 158 : Maitreya ProjectPhotos p. 4, 100, 129 : Michel HenryMise en page : Omorfia 81500 Marzens (France)

Toute reproduction, même partielle de cet ouvrage pour un usage autre que strictement privé, par tous les moyens y compris la photocopie, doit être soumise à l’autorisation préalable et écrite de l’éditeur.

5

IntroductIon de l’édItIon amérIcaIne

Nous sommes ravis d’enrichir notre collection de livres de Lama Yéshé ainsi que la série de ses commentaires tantriques1 édités par Wisdom Publications en publiant

cette méthode yogique de Maitréya, méthode que Lama Thoubtèn Yéshé enseigna en 1981, à l’Institut Maitréya en Hollande2.

Le Bouddha Maitréya était très cher au cœur de Lama Yéshé. Tout en donnant ce commentaire sur la méthode de yoga, Lama enseigna aussi deux des cinq textes réputés de Maitréya : le Dharmadharmata-vibhanga (« Discrimination entre existence et essence ») et le Madyan-tavibhanga (« Distinguer la voie du milieu des extrêmes »). Et bien sûr, Lama est à l’origine du Projet Maitréya qui envisage la construction en Inde d’une statue de Maitréya haute de 152 mètres ; vous trouverez de plus amples informations à ce sujet à la fin de l’ouvrage.

Nous avons donc été enchantés que le Projet Maitréya nous com-missionne pour publier ce livre. Au terme du premier jet, nous avons réalisé que publier le seul commentaire de Lama rendrait le livre rela-tivement inaccessible à ceux qui ne sont pas familiers des tantras ; aussi avons-nous décidé d’y ajouter quelques-unes des conférences d’introduction données par Lama en 1975 aux Etats-Unis. Désormais le livre a de quoi satisfaire chacun et il introduit mieux le lecteur non averti aux enseignements uniques de Lama sur le tantra.

1. L’Espace du Tantra, La Béatitude du Feu Intérieur et Devenir le Bouddha de la Compas-sion, publiés en français aux éditions Vajra Yogini, et Becoming Vajrasattva, the Tantric Path of Purification, Wisdom Publications. 2. L’un des centres de la FPMT en Hollande, voir www.maitreya.nl

N

L’amour universel

6

Introduction de l’édition américaine

7

nous avions aussi un système qui permettait à ceux qui n’avaient pas l’initiation de se joindre à un groupe de retraitants qui pratiquait le yoga d’une déité ; ils ne pouvaient pas en revanche faire la pratique individuellement. »

Merci donc à Wendy Cook et Jennifer Barlow pour leurs sugges-tions éditoriales aimables et précieuses. J’espère que vous apprécierez les enseignements de Lama dans ce livre, serez inspirés pour appro-fondir votre pratique, trouverez un maître aussi pleinement qualifié que Lama, et que vous atteindrez l’éveil, votre potentiel ultime men-tal et spirituel, pour le bien de tous les êtres.

RemerciementsNous devons une immense reconnaissance à nos amis et sympathi-

sants qui ont rendu possible l’existence et le fonctionnement de Lama Yeshe Wisdom Archive ; à Lama Yéshé et Lama Zopa Rinpoché pour leur bonté dont nous serons toujours redevables ; à Peter et Nicole Kedge ainsi qu’à la vénérable Ailsa Cameron pour leur travail initial sur les archives ; au vénérable Roger Kounsang, assistant infatigable de Lama Zopa, pour sa bonté et sa considération ainsi qu’aux sym-pathisants qui nous soutiennent : Barry et Connie Heshey, Joan Hal-sall, Roger et Claire Ash-Wheeler, Claire Atkins, Thoubtèn Yéshé, Richard Gere, Doren et Mary Harper, Tom et Suzanne Castles, Lily Changements et Hawk Furman.

Nous sommes aussi pleins de reconnaissance à l’égard de tous ceux qui sont devenus membres des Archives ces dernières années.

Nick RibushDirecteur de Lama Yeshe Wisdom Archives

Cependant, comme Lama a pris la peine de le souligner au départ : « … un mot d’avertissement aux intellectuels. Lire des enseignements tantriques de votre propre chef, sans le pouvoir de l’initiation appropriée, n’est qu’un passe-temps intellectuel ; c’est seulement par une pratique correcte sous la direction de maîtres qualifiés et expérimentés que vous pouvez évoluer au-delà de l’in-tellect, au-delà de la pensée conceptuelle, vers la sagesse authen-tique d’un être pur et spontané. Je n’essaie pas ici de me rendre mystérieux ou exclusif ; je veux simplement dire que si vous pen-sez pouvoir comprendre les méthodes de yoga tantrique par la simple lecture de livres, vous vous faites des illusions ; vous agis-sez comme une personne en phase terminale qui se soigne avec les mêmes méthodes qui l’ont précédemment rendue malade1. »

Autrement dit, une simple approche livresque du tantra ne nous donne pas la qualification requise pour le pratiquer. Il nous faut pour cela initiation et directives qualifiées. Se pose alors la question : pour-quoi publier des livres sur le tantra ? Il est vrai que par le passé, pareils enseignements restaient secrets et inaccessibles aux non-initiés. Les choses sont différentes aujourd’hui. Tant de livres sur le tantra ont été publiés par tant de maîtres non qualifiés qu’une autorité, et non la moindre, Sa Sainteté le Dalaï Lama, a dit que les enseignements que l’on aurait autrefois gardés secrets, devaient désormais être publiés afin de réparer les erreurs commises par des auteurs inauthentiques.

Cela dit, Lama a bien précisé aux étudiants de Maitréya : « Dans le futur, en mon absence ou celle d’autres enseignants, je pense qu’il serait bon que l’Institut Maitréya organise des retraites sur cette méthode de yoga. Personnellement, je pense aussi que ceux qui n’ont pas reçu l’initiation pourraient très bien se joindre à de telles retraites. Puisque nous sommes à l’Institut Maitréya, nous pouvons faire en sorte qu’exceptionnellement ces personnes puissent pratiquer Mai-tréya sans être initiées. Il en résulterait nombre de bienfaits. Au Tibet,

1. Extrait de Becoming Vajrasattva, Wisdom Publications, prologue : Intellectuels, attention ! p. 5.

Première partieIntroduction au bouddhisme

11

1. Qu’est-ce Que le bouddhIsme ?

Il est difficile de dire : « Le bouddhisme est ceci, il doit donc être comme cela » ; ou de le résumer de façon simpliste car les gens ont une grande diversité d’avis sur la question.

Toutefois, je peux dire que le bouddhisme n’est pas ce que la plupart considèrent comme étant une religion.

Tout d’abord, en étudiant le bouddhisme, nous nous étudions nous-mêmes : la nature de notre corps, notre parole et notre esprit, l’ac-cent principal étant mis sur la nature de l’esprit et la façon dont il fonctionne au quotidien. Le thème principal ne traite de rien d’autre que ce qu’est le Bouddha, ce qu’est la nature divine ou ce genre de choses.

Pourquoi est-il tellement important de connaître la nature de notre esprit ? Mais parce que nous voulons tous le bonheur, le plaisir, la paix et la satisfaction. Or ces expériences ne proviennent pas des crèmes glacées, mais de la sagesse et de l’esprit. Voilà pourquoi nous devons comprendre ce qu’est l’esprit et comment il fonctionne.

Une caractéristique du bouddhisme, c’est qu’il est très simple et pratique car il explique avec logique comment la satisfaction pro-vient de l’esprit et non d’une espèce d’être supranaturel auquel il nous faudrait croire.

Je comprends que vous puissiez avoir du mal à accepter cette idée parce qu’en Occident, dès la naissance, on insiste très fortement sur la croyance que la source du bonheur réside en dehors de vous dans les objets extérieurs. Vos perceptions et consciences sensorielles s’orien-tent donc avec un quasi-fanatisme vers le monde sensoriel et vous en

I

L’amour universel

12

Qu’est-ce que le bouddhisme ?

13

mental intérieur ; les deux sont corrects mais chacun d’eux peut, selon l’attitude mentale, être positif ou négatif. Il n’existe rien de tel qu’une positivité absolue, totale, dotée d’existence éternelle ou qu’une négativité absolue, totale, dotée d’existence éternelle. Les actions positives ou négatives se définissent surtout par la motivation qui les suscite, et non par les actions elles-mêmes. Ainsi, il importe vraiment d’éviter les vues extrêmes ; car l’atta-chement émotionnel extrême aux objets sensoriels : « Cet objet est bon ; il me rend heureux » n’a d’autre issue que la mala-die mentale. Ce que nous devons plutôt apprendre, c’est à rester au milieu, entre ces deux extrêmes que sont l’exagération et la sous-estimation.

Cela ne signifie pas renoncer à tout. Vous n’avez pas à vous débar-rasser de tous vos biens. Mais cet attachement émotionnel extrême à tout objet extérieur ou intérieur, qui vous rend mentalement malade, voilà ce que vous devez abandonner. La médecine occidentale a peu de réponses pour ce type de maladie. Il n’y a rien que vous puissiez prendre ; c’est très difficile à guérir. Quant aux psychologues, psy-chiatres, thérapeutes…, je doute qu’ils puissent résoudre les problè-mes d’attachement. La plupart d’entre vous en ont probablement fait l’expérience. L’attachement et le manque de sagesse-connaissance qui le sous-tend sont le vrai problème.

Si les professionnels de santé occidentaux ne peuvent traiter l’atta-chement avec efficacité, c’est qu’ils ne savent pas étudier la réalité de l’esprit. L’attachement a pour fonction d’apporter frustration et souf-france. Nous le savons tous ; ce n’est pas bien difficile à saisir ; à vrai dire, c’est même plutôt simple. Mais le bouddhisme a une méthode qui révèle la psychologie de l’attachement et sa façon d’œuvrer au quotidien. Cette méthode est la méditation.

Se préoccuper avec excès de son confort et de ses plaisirs, motivé par les exagérations de l’attachement, conduit automatiquement à la haine de l’autre. Ces deux sentiments incompatibles que sont l’attachement et la haine, s’affrontent naturellement dans votre

arrivez à priser les objets des sens par-dessus tout, y compris votre vie. Cette vision extrême qui surévalue les choses matérielles est une idée fausse, le résultat d’une pensée irréaliste, illogique.

C’est pourquoi, si vous voulez paix, bonheur et joie véritables, vous devez réaliser que bonheur et satisfaction viennent de l’inté-rieur, et cesser cette quête extérieure tellement obsessionnelle. Vous ne trouverez jamais le vrai bonheur de ce côté. Qui y parvient ?

Tout au long de leur évolution, les humains n’ont jamais trouvé de vrai bonheur dans le monde extérieur, même si la technologie scienti-fique moderne a l’air de penser qu’elle détient la solution au bonheur humain. C’est une conception totalement erronée. Bien sûr que la technologie est bonne et nécessaire, mais à condition d’en user avec habilité. La religion n’est pas contre la technologie, pas plus que le développement extérieur est contre la pratique religieuse, même si l’on trouve effectivement des religieux extrémistes qui s’opposent au développement matériel et aux progrès scientifiques, et des non-croyants qui s’opposent aux croyants. Tous ces fanatiques ont tort.

Cependant, laissez-moi d’abord poser une question. Dans le monde, où peut-on trouver quelqu’un sans aucune croyance ? Qui parmi nous est vraiment non-croyant ? En questionnant ainsi, je ne fais pas forcément référence à la croyance conceptuelle. La per-sonne qui dit : « Je ne crois pas » se juge supérieure intellectuelle-ment, mais il vous suffira pour lui rabattre le caquet de lui adres-ser deux questions toutes simples : « Qu’est-ce que vous aimez ? Qu’est-ce que vous n’aimez pas ? » Elle va vous sortir une centaine de préférences et aversions. « Pourquoi aimez-vous ces choses ? Pourquoi n’aimez-vous pas les autres ? » Pareilles questions expo-sent immédiatement chacun de nous à être croyant.

Quoi qu’il en soit, pour vivre en harmonie, nous devons équilibrer le développement intérieur et extérieur. Ne pas y parvenir suffit à entraîner conflits intérieurs et agitation mentale.

Le bouddhisme ne trouve donc aucune contradiction à pré-coniser développement scientifique extérieur et développement

L’amour universel

14

Qu’est-ce que le bouddhisme ?

15

ne serez pas affectés quand elles changeront ; et il en résultera pour votre esprit équilibre et paix. Chaque fois que votre esprit est équili-bré et paisible, vous avez sagesse et contrôle.

Peut-être pensez-vous : « Ah oui, le contrôle ! Le bouddhisme n’est qu’une question de contrôle. Qui désire ce contrôle ? C’est un truc himalayen et non occidental. » Mais selon notre expérience, le contrôle est naturel. Quand vous possédez la sagesse qui sait com-ment fonctionne l’esprit incontrôlé et d’où il vient, le contrôle sur-vient naturellement.

Tout le monde a le même potentiel pour contrôler et développer son esprit. Race, couleur ou nationalité ne fait aucune différence. De même, tous peuvent connaître la paix mentale et la joie. Grande est la capacité humaine, et précieuse si vous l’utilisez avec sagesse ; mais si vous l’utilisez avec une ignorance et un attachement émotionnel, vous gâchez votre vie. Par conséquent, faites attention. L’enseigne-ment du Bouddha insiste fortement sur la nécessité de comprendre l’imagination hallucinée de l’esprit ordinaire. Les projections émo-tionnelles et les hallucinations qui naissent de perceptions irréalistes sont de fausses conceptions ; et tant que votre esprit reste pollué par les fausses conceptions, vous serez toujours frustré.

L’esprit clair et pur connaît la joie simultanée. Il est facile de s’en ren-dre compte. Quand votre esprit est contrôlé par un attachement extrême d’une part, une haine extrême d’autre part, examinez-le pour voir pour-quoi vous saisissez le bonheur et pourquoi vous éprouvez de l’aversion. Quand avec la logique vous examinerez vos objets d’attachement et de haine, vous verrez que la raison fondamentale de ces émotions contra-dictoires est en fait identique : l’attachement émotionnel projette un objet hallucinatoire ; la haine émotionnelle projette un objet hallucina-toire. Et dans les deux cas, vous croyez en ces hallucinations.

Comme je l’ai dit précédemment, il ne s’agit pas d’un « Oh oui, je crois » intellectuel. à ce propos, le simple fait de prétendre croire en quelque chose ne signifie pas que ce soit le cas. Cependant, la croyance s’enracine profondément dans le subconscient, et tant que

esprit. Du point de vue bouddhique, un esprit qui connaît ce genre de conflit est malade et déséquilibré.

Aller à l’église ou au temple une fois par semaine ne suffit pas pour traiter la chose ; vous devez examiner votre esprit à longueur de journée, chaque jour, et demeurer constamment conscient de la façon dont vous parlez et agissez. Nous avons pour habitude de blesser les autres inconsciemment. Afin d’observer les actions de notre esprit inconscient, nous avons besoin d’acquérir une puissante énergie de sagesse, mais c’est plus facile à dire qu’à faire. Être constamment conscient de ce qui se trame dans l’esprit demande du travail.

La plupart des gens, religieux et non religieux, s’accordent sur le fait que l’amour bienveillant dirigé vers autrui est important. Com-ment développer l’amour bienveillant ? D’abord, nous devons com-prendre pourquoi et comment les autres souffrent, déterminer ce qu’est pour eux le meilleur type de bonheur et la façon dont ils peu-vent l’acquérir. C’est cela qu’il nous faut examiner. Mais nos émo-tions sont influencées par [ce que nous pensons être] le meilleur pour nous-mêmes. Nous projetons nos attachements sur les autres. Nous pensons qu’ils ont les mêmes goûts que nous, que la faim et la soif constituent l’essentiel de leurs problèmes, que donc la nourriture et l’eau sont la solution. Le problème humain n’est pas la faim et la soif ; c’est la conception erronée et la pollution mentale.

Il est donc très important de clarifier votre esprit. Si vous y parve-nez, les hauts et les bas de l’existence ne vous dérangeront plus ; peu importe ce qui arrive au dehors, votre esprit restera paisible et joyeux. Si vous vous laissez trop entraîner à regarder ce monde de hauts et de bas, vous finissez par suivre le mouvement à votre tour : « Oh, c’est tellement bon ! Oh, c’est tellement mauvais ! » Si le monde extérieur est votre seule source de bonheur, ses fluctuations naturelles perturbent sans cesse la paix de votre esprit et vous ne pouvez jamais être heu-reux, quelle que soit la durée de votre vie. C’est impossible.

Mais si vous comprenez que c’est la nature du monde d’avoir des hauts et des bas, et que vous prévoyez que les choses fluctuent, vous

L’amour universel

16

Qu’est-ce que le bouddhisme ?

17

donc de découvrir notre supermarché intérieur. Cela nous sera bien plus utile et nous mènera à un esprit équilibré et égal.

Comme je l’ai déjà signalé, le bouddhisme peut donner l’impres-sion qu’il vous demande de renoncer à tous vos biens parce que l’at-tachement est mauvais ; mais le renoncement n’est pas un abandon physique. Vous allez chaque jour aux toilettes, ce qui ne signifie pas que vous y soyez attaché ; vous n’êtes pas attaché à vos toilettes, n’est-ce pas ? Vous devez avoir la même attitude avec toutes les choses matérielles dont vous vous servez : accordez-leur une valeur raisonnable et non excessive, en fonction de leur utilité dans votre existence humaine.

Si un gamin qui s’élance follement sur un terrain dangereux pour avoir une pomme, trébuche, tombe et se casse la jambe, nous pen-serons que c’est folie d’exagérer ainsi la valeur d’une pomme, de compromettre son bien-être pour réaliser un minuscule objectif. Mais à vrai dire, c’est ce que nous faisons ! Nous exagérons la beauté des objets de désir et produisons à leur égard un attachement extrême, ce qui nous empêche de percevoir notre véritable potentiel. C’est une attitude dangereuse car nous sommes exactement ce gamin qui risque sa sécurité pour une pomme. Regarder les objets avec un attachement émotionnel et poursuivre cette vision hallucinée nous font anéantir à coup sûr notre potentiel pur.

Le potentiel humain est considérable mais nous devons utiliser notre énergie avec habileté ; nous devons savoir comment orienter nos vies dans la bonne direction. C’est extrêmement important.

Maintenant au lieu de me contenter de parler, laissez-moi tenter de

répondre aux questions que vous pourriez avoir. Question : Comment rendre mon esprit conscient afin qu’il soit

équilibré et que mon action soit habile ? Ce que vous devez faire en premier, c’est reconnaître comment

fonctionne votre esprit déséquilibré : comment il survient, quelles

vous restez sous l’influence de l’attachement, vous êtes un croyant. La croyance ne s’ancre pas forcément dans quelque chose de surnatu-rel ou d’irrationnel. Il existe de nombreuses façons de croire.

Selon la psychologie bouddhique, pour obtenir l’amour et la com-passion envers tous les êtres, vous devez d’abord développer l’équa-nimité, le sentiment que tous les êtres sont égaux. Ce n’est pas une attitude radicale du genre : « J’ai un bonbon, je dois le couper pour le partager avec tous les autres », c’est plutôt quelque chose à travailler dans votre esprit. Un esprit déséquilibré est un esprit malsain.

Egaliser les êtres n’est pas quelque chose qui se fait extérieure-ment ; c’est impossible. L’égalité préconisée par les bouddhistes dif-fère totalement de celle dont parlent les communistes ; la nôtre est l’égalisation intérieure qui découle de l’entraînement de l’esprit.

Quand votre esprit est égal et équilibré, vous pouvez produire un amour bienveillant pour tous les êtres de l’univers sans discrimina-tion. Si vous possédez la bonne méthode, ce n’est pas difficile. Quand une bonne méthode et une bonne sagesse se rejoignent, il est aisé de résoudre les problèmes.

Mais nous, humains, souffrons d’un manque de sagesse-connaissance. Nous recherchons le bonheur là où il n’existe pas ; il est ici mais nous allons voir ailleurs. En réalité, c’est très simple. Paix, joie et bonheur véritables résident en vous, et si vous méditez correctement, si vous examinez la nature de votre esprit, vous pouvez découvrir à l’inté-rieur bonheur et joie éternels. Ils sont toujours avec vous ; ils sont une énergie mentale et non pas l’énergie matérielle extérieure qui toujours tourne court. Cette énergie mentale associée à une bonne méthode et une bonne sagesse est illimitée et constamment avec vous. C’est incroyable ! Et c’est ce qui explique la puissance des humains.

Les matérialistes pensent que les gens tirent leur puissance des immeubles ou autres édifices extraordinaires qu’ils construisent mais tout cela, à vrai dire, vient de l’esprit humain. Sans la capacité de l’esprit humain, pas le moindre supermarché extérieur ! Au lieu d’accorder une valeur extrême aux supermarchés habituels, essayons

L’amour universel

18

Qu’est-ce que le bouddhisme ?

19

l’esprit induit par votre projection du « je» tel que votre ego l’inter-prète : « Que suis-je ? Qu’est-ce ? Est-ce une forme ? A-t-il une cou-leur ? Non. Alors, qu’est-ce que c’est ? » La seule conclusion à laquelle vous puissiez arriver, c’est qu’il n’existe nulle part, ni à l’extérieur ni à l’intérieur ; et la vision qui accompagne automatiquement cette expé-rience est celle de la vacuité. à ce moment-là, vous accédez par-delà la pensée. Avant cela, votre esprit était empli de « Je suis ceci donc j’ai besoin d’une maison ; je suis cela donc j’ai besoin d’une voiture ; je suis l’autre donc j’ai besoin d’aller au supermarché. » Tous vos « Je suis ceci, cela » viennent de pensées émotionnelles contradictoires qui anéantissent totalement votre paix intérieure...

Question : Vous êtes donc au-delà de la pensée et il y a le vide, la

vacuité ?Oui, c’est la vacuité ou « shounyata » dans la terminologie sanscrite.

Mais la vacuité ne signifie pas le néant. Elle renvoie à une absence de conceptualisation de l’ego : « Je suis Thoubtèn Yéshé », plus grand que Los Angeles mais complète hallucination ! Quand nous réalisons que c’est totalement inexistant, que c’est une simple projection de l’esprit, de l’ego, l’expérience de shounyata survient soudainement ; à ce moment-là, la pensée est absente.

Maintenant, « pas de pensée » ne signifie pas que vous soyez gagné par une espèce d’inconscience. Beaucoup croient que c’est ce que cela veut dire mais c’est un point de vue dangereux. Atteindre l’au-delà de la pensée signifie éliminer le type de pensée « ceci, cela » dua-liste qui produit le conflit habituel et non pas perdre connaissance.

Question : Le bouddhisme a-t-il des exercices physiques sembla-

bles au taï-chi ou au yoga pour tonifier le corps aussi bien que l’es-prit ? Existe-t-il des exercices physiques qui fassent partie intégrante du bouddhisme ?

Les exercices physiques, c’est bien, mais les exercices mentaux, c’est mieux ! c’est plus puissant. Néanmoins, nous faisons certains exercices

sont les causes qui le poussent à être ainsi, à quoi il réagit, etc. ; et comment vos conceptions erronées créent la vue que vous perce-vez. Cette reconnaissance vous permet de placer votre esprit dans une atmosphère de clarté. Une fois que vous comprenez votre esprit déséquilibré, il se clarifie.

L’approche bouddhique de la négativité n’est pas dans l’évite-ment mais dans la confrontation directe et l’examen : pourquoi existe-t-elle, quelle est sa réalité, etc. ? Nous pensons que c’est la meilleure base pour détruire l’esprit négatif, ce qui est beaucoup plus logique et scientifique que de simplement l’éviter en fuyant ailleurs ou en essayant de n’avoir que des pensées positives. Cela ne suffit pas. Aussi quand les problèmes surgissent, au lieu de fuir, regardez-les bien en face. C’est très utile, c’est la voie bouddhique.

Si vous fuyez les problèmes, vous ne pouvez jamais vraiment en établir les racines. Vous enfouir la tête dans le sable ne sert à rien. Vous devez déterminer d’où vient le problème et comment il surgit. Le moyen pour découvrir l’esprit clair et net est de comprendre la nature de l’esprit qui manque de clarté, surtout ses causes. Si vous avez un buisson d’épines qui pousse à la porte et vous écorche cha-que fois que vous entrez et sortez, l’élaguer ne suffira pas à résoudre définitivement votre problème ; vous devez le déraciner. Alors il ne vous embêtera jamais plus.

Question : Vous avez évoqué le fait d’aller au-delà de la pensée.

Pourriez-vous, je vous prie, parler de cette expérience ?C’est possible. Quand, tout à coup, vous réalisez que l’image halluci-

née de soi projetée par votre ego n’existe pas telle qu’elle apparaît, vous pouvez vous retrouver avec une expérience automatique de vacuité, une vision de shounyata. Mais tant que l’image de vous-même : « Je suis Thoubtèn Yéshé, je suis ceci, je suis cela, je dois donc avoir ceci, je dois avoir cela. » continue de se débrider, vous êtes incapable d’aller au-delà de la pensée. Il vous faut analyser ce type de pensées avec la sagesse-connaissance habile et analytique. Scrutez minutieusement

L’amour universel

20

Qu’est-ce que le bouddhisme ?

21

Question : Quand je lis les philosophies zen ou asiatiques en géné-ral, elles semblent toutes dire la même chose.

Oui, si vous étudiez les différentes religions plus en profondeur, avec une compréhension correcte, vous leur trouverez les mêmes qua-lités ; mais si vous ne les examinez qu’en surface, vous aurez plutôt tendance à juger : « Cette religion est bonne ; celle-là est mauvaise. » C’est une piètre appréciation. Ce que vous devez regarder, c’est l’ob-jectif de chaque religion (chaque religion en a un) et la façon dont cet objectif peut se transformer en expérience.

Il s’agit cependant de savoir si les adeptes d’une religion donnée savent en mettre les idées à exécution ; c’est souvent le problème. Les gens peuvent penser que les idées de telle religion sont bonnes mais ils n’ont pas la clé de la méthode ; ils ne savent pas comment transformer ces idées en expérience.

Question : Êtes-vous donc en train de dire que votre façon de met-

tre vos idées en action est meilleure que les autres ?Non, je ne dis pas que ma façon de faire est la meilleure et que les

autres ont tout faux. Je dis que la plupart d’entre nous manquons de connaissance. Par exemple, vous pouvez dire : « Je suis bouddhiste » mais si vous vérifiez votre degré de compréhension de la religion, le degré de cohésion entre vos actes et ses principes, même si vous dites « Je suis bouddhiste », vous ne l’êtes pas.

Je ne pense pas à quelqu’un en particulier ; je parle de chacun d’entre nous. La chose la plus importante à connaître est donc la méthode : com-ment faire descendre de nobles idées au niveau pratique, dans notre vie.

Question : Lama, auriez-vous quelque chose à dire concernant les

problèmes relationnels que rencontrent les gens mariés ?Oui, bien sûr que j’ai quelque chose à dire ! Le point principal est

que les gens mariés ne se comprennent pas mutuellement et que ce manque de compréhension conduit à une piètre communication et aux problèmes. De plus, très souvent, les jeunes gens se marient pour des

dont le but premier est de faciliter l’assise méditative. Il nous arrive de faire une retraite dans une petite pièce pendant des mois d’affilés et, en pareille occasion, nous faisons aussi des exercices physiques de yoga. Toutefois, nous insistons habituellement sur le fait que, quelles que soient les actions engagées par notre corps, notre parole et notre esprit, ce qui prime c’est l’attitude mentale. Le bouddhisme met toujours l’ac-cent sur la nécessité de comprendre la nature de l’esprit.

Question : Comment peut-on se débarrasser des pollutions men-

tales ?En réalisant la manière dont l’esprit est pollué, l’origine de cette

pollution et la profondeur de ses racines. Si vous savez cela, vous pou-vez vous en débarrasser ; si vous ne le savez pas, vous ne le pouvez pas. Par conséquent, le Bouddha a toujours insisté sur la compréhen-sion comme étant l’unique chemin de libération ; autrement dit, l’uni-que voie pour atteindre la libération passe par la compréhension.

Question : Si tout est si simple et Dieu si parfait, pourquoi a-t-il

créé toutes les négativités et souffrances que nous rencontrons dans le monde aujourd’hui ?

Peut-être est-ce vous qui avez créé toutes ces mauvaises choses que vous imputez à Dieu. Notre esprit crée lui-même la situation incontrô-lée qui est la nôtre. Toute la souffrance que nous voyons dans le monde aujourd’hui n’a pas été créée par Dieu mais par l’esprit négatif.

Question : Comment puis-je échapper au cycle de la mort et de la

renaissance ?En reconnaissant et en détruisant la cause qui vous y fait tourner.

En fait, si vous êtes libre de l’attachement émotionnel, le cycle de la mort et de la renaissance n’existe plus. Une fois que vous avez coupé l’attachement émotionnel, la cause, il n’existe plus la moindre raison pour que vous fassiez à nouveau l’expérience de situations incontrô-lées, le résultat. En bref : tranchez l’attachement.

L’amour universel

22

Qu’est-ce que le bouddhisme ?

23

tes les autres religions sont fausses. Ce n’est pas ce qu’il a voulu dire. « Seule voie » signifie que la seule voie pour atteindre la liberté intérieure passe par la réalité qu’il a enseignée. En tous cas, c’est mon interprétation. Jésus disant « seulement ma voie » n’implique pas qu’il répande une vision dogmatique. Il parle de la réalité abso-lue comme étant la seule voie vers Dieu. Si vous réalisez cela, vous pouvez atteindre la liberté intérieure ; si vous suivez votre esprit hal-luciné, pollué, bourré de conceptions fausses, vous ne le pouvez pas. Voilà comment j’interprète les mots de Jésus. Je pense qu’ils sont parfaits. Beaucoup de gens ont une interprétation très dogmatique de ce qu’il a dit mais cela tient à leur seul esprit pollué. Nous avons donc à être prudent quand nous pensons comprendre les vues des autres religions. Bien des fois une vue religieuse pourrait être parfaite mais notre esprit limité se met à penser : « Ceci veut dire ci, cela veut dire ça » et tout compte fait, nous abaissons quelque chose de profond à notre niveau personnel mondain.

Question : Est-ce qu’essayer de planifier et d’organiser ma vie

au lieu de simplement laisser les choses arriver est une expression d’attachement ?

Pas nécessairement. Vous pouvez organiser votre vie avec sagesse. Comment ? D’une part, en essayant de la rendre bénéfique à autrui plutôt qu’en recherchant simplement votre plaisir personnel. Quand votre vie est intégrée, que vous êtes une personne avisée et bien infor-mée qui offre aux autres de belles vibrations paisibles, c’est tellement profitable ! Ce n’est pas de l’attachement. Le bouddhisme dit que l’on peut utiliser sa vie et les objets sensoriels sans attachement, si on leur accorde une valeur raisonnable et qu’on les utilise au profit de l’humanité. Nous avons à la fois besoin de méthode et de sagesse. Vous pouvez manger une glace sans confusion ni attachement ; il existe un moyen de transformer les plaisirs ordinaires en chemin vers la paix intérieure et la joie.

raisons très superficielles et temporelles. « J’aime son allure, j’aime son apparence, marions-nous. » Aucun examen n’est fait quant à la personnalité intérieure de l’autre ou à ce que sera la vie commune. Incapables de voir la beauté intérieure de l’autre, nous le jugeons sur son apparence ; dénués de sagesse-connaissance, nous ne compre-nons pas les qualités intérieures essentielles de notre conjoint. Bien sûr, relations et mariages sont pour la majorité fondés sur l’ego, ce n’est donc pas une surprise si souvent ils ne marchent pas.

Par conséquent, il est important qu’un couple marié base son mariage sur la communication mentale plutôt que physique, et que tous deux s’efforcent sincèrement de se comprendre et de s’aider mutuellement. Un mariage basé sur des critères superficiels aura de grandes chances de craquer. Ah les petits détails ! Le mari dit « Mets cela ici », sa femme répond « Non, je veux que ce soit ici », et une énorme dispute s’ensuit… pour rien ; c’est tellement ridicule ! Le mettre ici ou le met-tre là, où est la différence ? Quelle étroitesse d’esprit et pourtant, nous nous séparons pour ces détails ridicules.

Question : Dans notre culture, certains disent que Jésus est Dieu.

Comment voyez-vous Jésus Christ ?Je vois Jésus comme un saint. Si vous comprenez par-delà les mots

ce qu’il a enseigné, c’est fantastique ! Mais nous ne comprenons même pas littéralement ce qu’il a dit. Bien que le saint Jésus nous ait dit que nous devions aimer tout le monde, nous continuons de choisir d’aimer un atome et d’haïr le reste. C’est tout l’opposé de ce qu’il a dit. Si vous comprenez vraiment ce que Jésus a enseigné, c’est très profitable, et particulièrement efficace dans les cas de maladies mentales.

Question : Jésus a aussi dit : « Je suis la seule voie. C’est par moi seul que vous pourrez atteindre Dieu. »

Il a dit ça et c’est juste ; mais gardez-vous d’interpréter cela dans le sens que seuls ses enseignements sont corrects et que tou-

L’amour universel

24 25

2 . le but de la médItatIon

Nous méditons pour connaître le fonctionnement de notre esprit, non pour changer d’idées ou de philosophie, ni pour nous lancer dans quelque aventure orientale. Nous

méditons pour étudier l’énergie de base que nous possédons déjà, notre énergie physique, verbale et mentale : Quelle est-elle ? D’où vient-elle ? Pourquoi fait-elle ce qu’elle fait ? Il ne s’agit pas d’une recherche extérieure mais d’une recherche de notre propre esprit qui en vaut vraiment la peine.

étudier notre propre nature intérieure, la réalité de notre esprit et de notre vie n’est pas un simple engagement religieux. Nous ne pou-vons nier que nous possédons corps, parole et esprit, nous en faisons constamment l’expérience ; nous vivons au sein de leur champ éner-gétique. Alors étudier notre énergie pour en comprendre la véritable nature est vraiment très précieux.

De plus, cet examen de la nature de l’esprit n’est pas quelque chose qui serait nécessaire aux jeunes et ne le serait pas aux plus âgés ; les vieux ne peuvent pas davantage nier l’existence de leur corps, parole et esprit. Dans la mesure où l’esprit indiscipliné est commun aux jeunes et aux vieux, jeunes et vieux doivent l’étudier. En fait, toute personne dont l’esprit incontrôlé crée agitation, conflits et frustra-tions, se doit de regarder très attentivement ce qui se passe. Ce type de recherche s’avère d’une incroyable utilité pour les jeunes comme pour les vieux.

étudier l’esprit n’exige pas d’opérer un changement extrême dans ses habitudes, sa façon de travailler, de manger ou de dormir. Cepen-dant, l’esprit incontrôlé s’associe intimement aux activités de la vie

Question : Pouvez-vous dire quelques mots sur la réincarnation ?La réincarnation est très simple, il s’agit d’une énergie mentale.

Votre énergie physique est épuisée au moment de la mort et l’énergie de votre conscience se sépare du corps pour aller dans une autre forme, c’est tout. Voilà l’explication simple. L’énergie mentale et l’énergie physique sont différentes. La science moderne a quelques difficultés avec ça. Elle accepte qu’il y ait une différence entre les énergies men-tale et physique mais le bouddhisme l’explique avec plus de clarté. N

L’amour universel

26

Le but de la méditation

27

leur propre thérapeute. Les patients qui ont des problèmes mentaux doivent réaliser la nature de leur mal ; ils pourront alors y appliquer la solution adéquate. Si la cause effective de leurs problèmes reste cachée, ils ne peuvent en aucun cas les résoudre. Nous devons réali-ser la nature de nos problèmes personnels.

Et puis méditer ne signifie pas s’asseoir dans un coin à ne rien faire ; vous pouvez méditer tout en étant physiquement actif. Bien qu’ayant le corps en mouvement, vous pouvez simultanément être tout à fait conscient et éveillé pour observer comment votre esprit communique avec le monde sensoriel et interprète les objets qu’il perçoit, etc. C’est aussi de la méditation.

Habituellement, quand nous marchons dans la rue, communiquons avec les autres, etc., nous laissons inconsciemment des empreintes sur notre esprit, empreintes qui mûriront ultérieurement en problè-mes. C’est ce que nous appelons le karma. La plupart du temps, nous n’avons pas conscience de ce que nous faisons ; c’est le problème majeur. La méditation peut nous réveiller et nous éviter de nous assoupir sur le chemin durant notre vie. Nous croyons être éveillés quand nous travaillons, dialoguons avec les autres, etc., mais à un certain niveau, nous continuons de dormir. Si vous regardez derrière les apparences, vous verrez.

Vous pouvez ainsi découvrir à quel point il est précieux de com-prendre le fonctionnement de votre esprit incontrôlé, de vous disci-pliner grâce à la sagesse appropriée et de voir que c’est exactement ce dont vous avez besoin, quel que soit votre âge. Par la compréhension, la maîtrise vient avec aisance et naturel.

L’esprit qui manque de contrôle et de discipline s’oppose par nature à la sagesse-connaissance et au bonheur. Cette nature est insatisfaction. Quand vous maîtrisez votre esprit grâce à la sagesse, vous créez l’espace nécessaire pour découvrir la paix et la joie. Votre vie devient alors paisible et joyeuse, protégée en quelque sorte des hauts et des bas du monde extérieur. Vous appréciez la vie et arrêtez d’accuser les facteurs extérieurs quand les choses vont de

quotidienne et provoque les conflits que nous connaissons tout le temps. Il est donc essentiel que nous comprenions la réalité de notre esprit et la nature de nos attitudes mentales ; c’est plus que nécessaire.

L’esprit ressemble au générateur central qui fournit l’électricité à une ville entière ; c’est une énergie mentale qui détermine si les actions de notre corps, de notre parole et de notre esprit sont positives ou négatives, causes de bonheur ou de souffrance.

Toute l’énergie de notre corps, de notre parole et de notre esprit vient de l’esprit. C’est pourquoi le bouddhisme souligne toujours l’importance de connaître sa nature essentielle et la façon dont elle produit aussi bien un comportement maîtrisé que non maîtrisé.

Que nous conseille le bouddhisme pour étudier l’esprit ? La méthode consiste à méditer. Nous recevons des enseignements sur la nature de l’esprit en général et, partant de cette base, nous passons à l’expérience sur notre propre esprit ; nous étudions sa nature au travers de notre vécu.

Peut-être découvrons-nous, surpris, que la méditation nous permet de maîtriser de petites choses que nous ne pouvions maîtriser aupara-vant. Cela nous encourage à aller de l’avant. Nous réalisons que loin d’être médiocres, nous avons des capacités et un potentiel fantasti-ques. Arrêtons de penser : « Je suis nul ; je ne suis capable de rien, » et de nous appuyer sur les autres pour qu’ils fassent tout à notre place. Pour le bouddhisme, faible est l’esprit qui compte sur les autres.

Ce que le bouddhisme tente donc vraiment par la philosophie, la psychologie et la méditation, c’est de nous faire devenir notre propre thérapeute ; ainsi, quand les problèmes surgissent, nous pouvons les identifier et les résoudre par nous-mêmes. Telle est réellement l’essence de ce que le Bouddha a enseigné. Tout ce qu’il a enseigné visait un seul objectif : nous permettre d’obtenir la sagesse-connaissance dont nous avons besoin pour comprendre notre vie quotidienne en comprenant le fonctionnement de notre esprit.

Les psychologues occidentaux tentent aussi de résoudre les pro-blèmes de leurs patients mais sans faire en sorte qu’ils deviennent

L’amour universel

28

Le but de la méditation

29

travers : « Je suis malheureux parce que la société fait le yoyo. Je suis malheureux du fait de ma situation. »

En fait, vous avez des tas de raisons d’être heureux mais votre fai-blesse de caractère n’envisage pas qu’il vous soit possible de l’être. La sagesse-connaissance est un antidote à la faiblesse de caractère ; elle soulage votre dépression et apporte la réponse à tous vos problè-mes. La sagesse-connaissance est la voie vers la liberté intérieure, la libération et l’éveil.

Par la méditation, vous pouvez donc découvrir comment l’esprit égoïste de l’attachement engendre toutes les maladies mentales et la frustration ; comment un changement d’attitude peut vous assainir l’esprit, donner un but et un sens à votre vie. Changez de comporte-ment ; quittez l’inquiétude excessive, la préoccupation excessive de soi : « Peut-être que je vais tomber malade, peut-être que ceci, peut-être que cela », pour consacrer, grâce à l’entraînement de l’esprit, toute votre vie au bien d’autrui. L’attachement et la préoccupation de soi relèvent de l’obsession. L’esprit obsédé est forcément étroit. L’esprit étroit conduit toujours aux problèmes.

Dans les enseignements du mahayana, il est un esprit qu’on nomme bodhicitta qui implique un changement d’attitude ; au lieu d’être obsédé par notre plaisir personnel : « J’ai chaud, j’ai froid, j’ai ceci, j’ai cela », nous nous préoccupons avec compassion du plaisir des autres êtres et consacrons tout ce que nous faisons à leur plus grand profit. Ce genre d’attitude apporte automatiquement détente et joie à l’esprit ; tout ce que nous faisons devient joyeux et nous y trouvons un but bien plus élevé.

Autrement, nous ne voyons que les objets d’obsession de notre soi fantasmé. Quand telle est notre vision, nous devenons très facilement malheureux et déprimés. Dépression et bonheur ne viennent pas de l’extérieur mais de la direction que nous donnons à notre esprit ; pas du changement dans notre vie mais du changement dans notre moti-vation. La motivation qui sous-tend une action est beaucoup plus importante que l’action elle-même.

Concernant les actions, nous ne pouvons dire : « Faire ceci est tout à fait mauvais ; faire cela est tout à fait bien. » Ce qui détermine si une action est bonne ou mauvaise, c’est notre motivation pour la faire.

Aussi ne demandons pas aux autres : « Comment est-ce que je me dépatouille ? » ; regardons plutôt en nous pour voir quel genre d’esprit inspire nos actions quotidiennes. Travailler avec attachement à notre bonheur personnel sur la base d’un soi imaginaire apporte toujours frustrations et conflits à l’esprit ; consacrer au contraire tout ce que l’on fait au bien d’autrui apporte automatiquement à l’esprit détente, joie et énergie intense.

Les Occidentaux accordent trop d’importance à l’action physique. Beaucoup par exemple pensent agir religieusement quand ils donnent de l’argent aux pauvres ou à des causes méritoires, or ce n’est souvent qu’une simple manœuvre de l’ego. Leur don, au lieu de devenir un antidote à l’insatisfaction et l’attachement, engendre un simple surcroît d’insatisfaction et d’égocentrisme ; il n’a donc rien à voir avec la reli-gion. Ces personnes utilisent simplement le concept religieux qui prône le don pour se persuader qu’ils font un don ; mais pour le bouddhisme, la charité ne repose pas sur ce que l’on donne mais sur son pourquoi et son comment. La vraie charité repose sur la motivation : donner sans attachement ni espoir d’obtenir quoi que ce soit en retour. Pareil don libère automatiquement l’esprit. Donner avec l’espoir d’obtenir quel-que chose en retour relève par nature du conflit.

Nous devons donc vérifier avec soin nos actions supposées reli-gieuses pour nous assurer qu’elles apportent effectivement des bien-faits et ne causent pas de confusion supplémentaire pour les autres et nous-mêmes. Pour nous assurer que nos actions deviennent positives, en les faisant, nous méditons sur la nature ultime de la réalité ou ce que l’on nomme parfois le « cercle des trois1 » : [le manque d’exis-tence véritable] du sujet, de l’objet et de l’action. C’est le moyen de faire que chacune de nos actions soit une véritable cause de libération de la souffrance.1. Pour plus de détails, voir p. 36.

L’amour universel

30

Le but de la méditation

31

Question : Le tantra était-il le plus élevé des enseignements du Bouddha Shakyamouni ?

Oui, sans aucun doute, mais les principaux pratiquants à qui il a donné ces enseignements tantriques étaient ceux qui possédaient habi-leté, intelligence et sagesse-connaissance pour transformer le poison en médicament. Si vous n’avez pas cette sagesse, le tantra peut s’avé-rer dangereux alors, s’il vous plaît, soyez prudent. Il y a toutefois un moyen de développer progressivement votre esprit afin d’arriver à vous qualifier pour pratiquer le tantra ; simplement ce n’est pas quel-que chose dans lequel vous pouvez sauter à pieds joints.

Question : J’ai vu chanter des moines tibétains. Comment le chant

influence-t-il l’esprit ?Chanter est une forme d’apprentissage pour prendre conscience

des objets sensoriels. Nos sens n’ont souvent aucune conscience de ce que sont en fait les objets sensoriels. Un objet se tient là, notre esprit le voit mais nous y projetons ensuite quelque chose de sup-plémentaire ; quelque chose qui à vrai dire ne s’y trouve pas. Nous disons alors : « C’est bien » ou « c’est mal. » Par le chant, notre perception sensorielle ordinaire se transforme en énergie de sagesse bienheureuse dans une pleine conscience de ce qu’est l’objet senso-riel, ici le son. C’est donc une forme d’apprentissage.

Question : Cela ouvre-t-il de plus en plus la conscience ?Oui, c’est juste. Cela vous permet de voir la réalité des objets sen-

soriels que vous observez plutôt que les hallucinations projetées par votre ego. En fait, quand vous voyez des moines faire une poudja et chanter, cela peut sembler un rituel vide mais leurs actions exté-rieures ne sont que symboliques ; intérieurement, ils méditent. Nous avons tous besoin d’apprendre à faire cela. De plus, ces pratiques viennent habituellement de la tradition tantrique du bouddhisme. De quoi s’agit-il ? Les gens ordinaires estiment couramment que certai-nes choses sont négatives, mauvaises pour leur esprit ; mais comme

Examiner la nature de notre attitude mentale en vaut vraiment la peine ; surtout si nous le faisons avec l’intention de changer l’attache-ment au bien-être de notre soi imaginaire en pensées d’être bénéfique aux autres. Pour être bénéfique aux autres, il n’est pas nécessaire de faire quoi que ce soit de physique, il nous suffit de tourner notre esprit dans cette direction. Cela nous apporte une grande joie à l’esprit, un sentiment de chaleur au cœur, et clarifie notre objectif de vie. Nous pensons toujours que la source des sentiments chaleureux réside hors de nous-mêmes mais elle ne pourra jamais se trouver à l’extérieur. Sentiment chaleureux et insatisfaction viennent de notre esprit ; c’est là que nous devons les rechercher.

Maintenant je pense que j’en ai assez dit. Avez-vous des questions ? Question : Vous avez parlé de retourner l’esprit, de changer notre

considération des choses. Si je connais la tristesse ou quelque état d’esprit négatif que je n’aime pas, comment puis-je procéder ?

Quand un problème se présente à l’esprit, il provient de quelque chose que vous avez fait dans le passé. Hier, par exemple, votre ami peut vous avoir fait une remarque qui a froissé votre réputation et y repenser aujourd’hui vous tracasse. Ce genre de problème est sim-ple à arrêter. D’abord votre attachement s’accroche très fort à votre réputation et, pire, vous croyez que le fait d’être bon ou mauvais dépend de ce que disent les autres. Mais à vrai dire la responsabilité d’être bon ou mauvais est vôtre. Qu’un autre vous qualifie de bon ou mauvais ne vous rend pas bon ou mauvais ! Vous êtes responsa-ble. Et puis, la remarque d’hier s’en est déjà allée, alors pourquoi se faire du souci ? De toute façon, ce n’est qu’un exemple. Vous devez savoir qu’il suffit que quelque chose vous dérange pour que soient en cause l’attachement, l’aversion ou l’ignorance, un man-que de sagesse-connaissance forte, et qu’en conséquence, il existe une solution. Il existe des antidotes pour chacun de ces trois esprits malsains.

L’amour universel

32

Le but de la méditation

33

ce que vous voulez est accessible et par quels moyens ; posez-vous la question de savoir ce que vous pouvez faire pour atteindre votre but. C’est une démarche beaucoup plus pratique.

Nous remarquons parfois que certains, pour qui les choses ne fonctionnent pas dans le monde matériel, se tournent vers la philoso-phie ou la méditation tout en amenant la saisie mondaine dans leurs recherches spirituelles. évidemment, cette démarche ne marche pas non plus.

J’encourage donc toujours à méditer sur un mode méthodique. C’est la façon satisfaisante de procéder. Vous êtes sûr de ce que vous faites, vous acquérez de l’expérience et tout se présente à vous de façon intégrée.

Bien sûr, nous avons nombre de méthodes spécifiques. Tantôt, nous utilisons la concentration sur un mantra et l’écoute de notre son inté-rieur. Toutefois, en général, plutôt que s’impliquer dans une activité physique excessive, il vaut mieux s’asseoir, se détendre et examiner sa motivation. C’est très puissant, bien plus puissant que de regarder la télévision.

Question : Il nous est demandé de contrôler nos sens. Cela signi-

fie-t-il que, si j’ai une rose à la main, je ne doive pas la sentir ? Qu’entendez-vous par changer ou par contrôler ses sens ?

Vous n’avez pas à rejeter la rose pour gagner en contrôle ; vous pouvez simplement apprécier le parfum de la rose d’une manière rai-sonnable, sans le surévaluer. Si par exemple, vous cueillez une rose en vous disant : « Tant que j’ai cette fleur, ma vie a du sens. Si je la perds, je suis mort », c’est déraisonnable ! Vous exagérez la valeur de la fleur que vous fondez sur une vision hallucinée de celle-ci. La vision raisonnable serait de reconnaître qu’elle est impermanente ; sa nature est de venir et de s’en aller. Quand vient pour elle le temps de disparaître, vous êtes d’accord. Vous ne pleurnichez pas : « Ma fleur est morte, ma vie est finie. » Cela illustre la façon dont nous créons des problèmes dans notre esprit. C’est très intéressant. évidemment,

je viens de le mentionner, ceux dotés d’une sagesse-connaissance puissante, habile et intelligente, et qui ont accès aux méthodes tantri-ques peuvent transformer en positif ce qui est potentiellement néga-tif. C’est une sorte d’alchimie qui change le poison en médicament.

Question : Nous diriez-vous quelque chose sur le rôle des femmes

qui recherchent l’éveil, s’il vous plaît ?Dans leur recherche de l’éveil, hommes et femmes sont identi-

ques. Les femmes ont le même potentiel d’éveil que les hommes, la même capacité à entraîner leur esprit. Leur capacité à développer un contrôle puissant sur l’esprit et atteindre l’éveil est équivalente. Nous ne pouvons, en aucune façon, dire que les femmes sont inférieures aux hommes et incapables d’agir. D’ailleurs, au Tibet, on trouvait de nombreuses femmes lamas1.

Question : Qu’entendez-vous par contrôler son esprit et comment

y parvient-on ?On y parvient en comprenant la nature de son esprit et en pratiquant

la méditation. Mais le contrôle arrive par étapes et non d’un seul coup. Vous commencez par faire l’expérience d’un jour de contrôle. Si vous trouvez qu’il en résulte plus de bonheur et de souplesse, vous vous dites, pourquoi pas deux jours ? Puis une semaine, deux semai-nes, et ainsi de suite. Développer le contrôle tout doucement est la façon de procéder. N’espérez pas atteindre de hauts objectifs par le simple fait d’y penser ou d’y aspirer avec force, tout en gardant un faible niveau mental. Ce n’est pas ainsi que cela fonctionne. Progres-ser avec lenteur mais régularité voilà la façon d’atteindre ses objec-tifs spirituels.

Que vous soyez religieux ou pas, ce qui compte n’est pas de sim-plement vous accrocher à des objectifs idéalistes mais d’examiner si

1. Lama Thoubtèn Yéshé lui-même a été reconnu par Nénung Pawo Rinpoché comme étant la réincarnation d’Aché Jampa, une grande méditante qui était la supérieure du monastère de Chi-mé Lung Gompa, monastère qui comprenait une centaine de nonnes.

L’amour universel

34

Le but de la méditation

35

Question : Si je comprends bien, il y a en nous des mondes positif et négatif, et nous avons le devoir de réaliser le positif plutôt que le négatif.

Ce que je dis, c’est que nous pouvons positiver notre esprit, apprécier la vie et éviter de nous mettre dans de mauvaises situa-tions et des conflits. Voilà le mode de vie réaliste. Nous devons utiliser notre énergie physique, verbale et mentale pour continuer à subvenir à nos besoins humains, être satisfait et éviter toute pour-suite excessive. L’esprit « j’ai besoin de ceci, j’ai besoin de cela » n’a aucune limite.

Question : La bodhicitta est-elle le plus beau ou le plus important

aspect du bouddhisme ?Oui, on pourrait dire cela. Ceux qui ont réalisé la méditation sur

la bodhicitta voient tous les êtres de manière égale dans le sens où aucun d’entre eux n’apparaît classé en proches objets d’attachement ou en distants objets de haine. Ils ont le même ressenti à l’égard de tous les êtres, qu’ils soient humains, animaux, insectes, etc. Y exercer son esprit relève de la plus haute importance.

La norme consiste toujours à choisir une personne – ce qui équivaut à ne choisir qu’un atome parmi tous les atomes dans l’univers – et à s’y accrocher : « Oh ! Tu es mon meilleur ami, je ne peux vivre sans toi » avec grand attachement, surestimation et saisie. Si vous vous accrochez à un atome avec cette saisie extrême, vous établissez automatiquement les autres atomes comme objets de haine ou d’indifférence. Ce genre d’esprit déséquilibré engendre inévitablement conflit et frustration.

Afin de développer l’amour universel et la compassion, vous devez donc ressentir de l’équanimité pour tous les êtres. Cela rend votre esprit très sain. Le Bouddha lui-même disait que l’on ne devait s’attacher à rien, même pas à la réalisation de l’éveil. Car si c’est le cas et qu’une personne dise que l’éveil n’existe pas, vous paniquez. C’est votre problème !

Souvent, quand vous êtes attiré par telle religion ou philosophie spi-rituelle, vous en exagérez d’emblée les qualités et vous y cramponnez :

nous ne pensons pas consciemment : « J’aime ceci. Tant que je l’ai, la vie vaut la peine d’être vécue. » Mais au-delà des mots, enracinée au profond de nous, nous avons de fait cette philosophie de la vie. Il se passe des tas de choses dans notre esprit en-deça du niveau conscient. Et c’est ce que nous devons examiner et observer en cours de médita-tion. Mais pour revenir à la rose, vous pouvez la sentir et l’apprécier ; évitez juste d’exagérer son importance et de vous y attacher.

Question : Lama, quelle est la meilleure défense contre la douleur

mondaine infligée par les autres lorsque vous recherchez la sagesse et que cela vous rend vulnérable face à cette douleur ? Par exem-ple, si quelqu’un tente de vous exploiter financièrement en affaires, devez-vous vous défendre ou rester passif ?

Cela dépend de la situation. Si vous êtes aisé et que quelqu’un vous dépouille de quelques dollars, au lieu d’en faire toute une his-toire, peut-être pouvez-vous simplement laisser tomber, voire même vous réjouir qu’il ait gagné un peu d’argent. S’il s’agit d’une grosse somme, à nouveau tout dépend de combien cela vous affecte. Une possibilité pour évaluer les dégâts est de penser au temps qu’il vous reste à vivre. Bien sûr, cela nous est toujours impossible à connaître mais supposons que vous vous donniez cinq ans, avez-vous assez pour ce laps de temps ? Si c’est le cas, alors quelques milliers de dollars ne feront pas une grande différence. Peut-être même ne vivrez-vous pas aussi longtemps, alors deux pauvres milliers de dollars valent-ils la peine de vous stresser ? Un examen vous montrera que vous ne pouvez jamais être sûr du temps qu’il vous reste à vivre.

Il arrive que les gens oublient les vraies valeurs. Ils se font des mil-lions de dollars, bien plus d’argent qu’ils ne pourront jamais dépenser en une vie de centenaire, pour au final mourir jeunes et inquiets pour l’argent qu’ils laissent derrière eux ! Si vous devez vous inquiéter, assurez-vous de le faire pour une raison valable. Il y a des choses plus importantes que l’argent.

L’amour universel

36

Le but de la méditation

37

Question : Est-ce qu’alors, ce serait charité que de ne pas donner d’argent à cette personne ?

Oui, en effet. La charité du Bouddha est une méthode psychologi-que pour éradiquer l’attachement et amener à la réalisation de la paix intérieure. Nous pouvons en voir le fonctionnement. Si vous donnez en comprenant la nature ultime de l’objet que vous donnez et du cer-cle des trois, donateur, bénéficiaire et don, il n’y a aucun danger de réaction négative. Le problème vient de ce que nous donnons toujours avec l’espoir d’obtenir quelque chose en retour. Psychologiquement, c’est un grand problème. Donnez donc en étant attentif.

Question : Que pensez-vous des enseignements du Christ ?Ses enseignements sont excellents. Il a enseigné ce que signifie

l’amour vrai, les défauts de l’égoïsme et quantité de choses posi-tives. Il méditait aussi. N’allez pas croire que la méditation est un truc réservé aux Orientaux. En méditant sur l’amour du Christ, nous pouvons transcender l’attachement et l’égoïsme. Il a aussi insisté sur l’oubli de soi pour se concentrer davantage sur le bien d’autrui. Il fut un grand exemple pour nous tous.

Question : Jésus et Bouddha ont-ils enseigné la même chose ?Non, leurs enseignements sont différents car ils s’adressaient à des

gens différents. Chaque personne nécessite un enseignement qui cor-responde à son niveau d’esprit ; un même enseignement ne convient pas à tout le monde. Vous ne pouvez donc pas déclarer dogmatique-ment que les enseignements de Jésus couvrent tous les besoins et que ceux de Bouddha sont inutiles ; ou à l’inverse, que seuls les ensei-gnements de Bouddha sont corrects et que ceux de Jésus sont faux. Tout dépend du niveau de développement des étudiants ; certains qui ne sont pas encore prêts pour un type d’enseignement peuvent l’être pour un autre et seul un maître avisé peut dire ce qui convient à telle personne. Même au sein du bouddhisme, le Bouddha a enseigné des milliers de méthodes différentes. Vous ne pouvez dire celle-ci

« Oh ! C’est fantastique, c’est vraiment bien ! » Cela peut s’avérer très dangereux car si l’on vous dit que votre religion n’est pas bonne, c’est la panique. C’est l’esprit malsain à l’œuvre ! Peu importe la religion, philosophie, psychologie ou autre à laquelle vous adhérez, si l’on vous dit qu’elle n’est pas bonne et que vous paniquiez, c’est votre problème !

Par conséquent, le Bouddha a dit que nous ne devrions même pas nous attacher au concept de réalisations suprêmes et d’éveil, sans compter les objets sensoriels. Il a aussi dit que nous ne devrions pas croire ce qu’il enseigne pour la seule raison qu’il l’a enseigné mais examiner minu-tieusement ses paroles avec notre propre sagesse-connaissance pour voir si les enseignements nous conviennent ou pas. Cette responsabilité est nôtre ; nous ne devons pas être des bouddhistes avec une foi aveugle !

Question : Pourriez-vous, je vous prie, en dire un peu plus sur le

« cercle des trois » que vous avez évoqué tout à l’heure ?Je disais que notre pratique de la charité, par exemple, se situe

essentiellement dans notre esprit : la charité est sagesse ! Dans le bouddhisme, la charité ne signifie pas seulement donner quelque chose à quelqu’un. Cela arrive souvent, nous entendons que donner est important mais, ne sachant pas le faire correctement, nous nous trompons en faisant la charité. Alors, au lieu de résoudre notre atta-chement et notre insatisfaction, donner devient une simple source de conflit supplémentaire. Nous donnons et nous regrettons : « Oh, je n’aurais pas dû me séparer de cet objet, maintenant j’en ai besoin ! » Ce n’est pas de la charité ! La charité parfaite s’accomplit avec une motivation pure et une conscience de la nature ultime, ou vacuité, des trois : vous, le donateur, le bénéficiaire du don et l’acte de donner.

Question : Doit-on aussi vérifier que ce que l’on donne est approprié ?Oui, c’est un élément intéressant aussi. Par exemple si vous don-

nez de l’argent à quelqu’un qui va se saouler avec, vous lui faites du mal au lieu de lui rendre service. Ce n’est qu’un exemple simple, il y en a d’innombrables.

L’amour universel

38

Le but de la méditation

39

avez à vous poser. Si vous avez la sagesse intérieure de diriger toute votre énergie dans le canal adéquat, parfait. Mais si ce n’est le cas et que vous en êtes toujours à douter et hésiter, il s’agit d’états d’esprit négatifs que vous ne devez pas suivre. Dans ce cas, vous avez besoin d’un maître extérieur expérimenté. Mais bien sûr, vous devez examiner avec grand soin les qualifications de votre guide potentiel avant de décider de vous fier à ses conseils ; faites même une analyse attentive pour vérifier tout ce qu’il vous dit. Si vous pensez que votre avis personnel est meilleur, alors suivez-le. C’est un chemin de responsabilité personnelle.

est juste, les autres sont incorrectes ou superflues ; elles sont toutes nécessaires à certains. C’est la raison pour laquelle on trouve tant de parfums de glaces différents ! L’esprit des gens est différent. Vous ne pouvez prétendre que la vanille est bonne et tous les autres parfums, mauvais.

Question : Le bouddhisme n’établit-il pas de rapport avec un Dieu

extérieur, un sauveur extérieur ? Le bouddhisme insiste sur le fait que vous êtes votre principal sau-

veur. Ni Dieu, ni le Bouddha n’est responsable de vos actions posi-tives et négatives, c’est vous qui l’êtes ! Vous devez donc examiner votre esprit et votre motivation avant de passer à l’acte ; car une fois qu’il est accompli, c’est trop tard.

Question : Est-il possible de faire l’expérience d’un maître ou

guide intérieur ?Oui. Si vous êtes capable d’une conscience intense, vous pou-

vez obtenir des conseils ou des réponses à vos questions, mais pré-sentement, quelle est la part de la journée où vous êtes pleinement conscient et éveillé ? Une heure ? Moins sans doute. Bien que vous puissiez faire de petits progrès par moments, vous êtes donc incons-cient la plupart du temps. Toutefois, cela laisse une énorme place à l’amélioration. Comme vous le savez, il est possible d’être plei-nement conscient jour et nuit, alors au lieu de vous tracasser, faites ce qu’il faut pour acquérir pareille conscience. Si vous pouvez être pleinement conscient et agir correctement sur une base de sagesse, tout ce que vous ferez sera parfait.

Question : Quel est donc le rôle d’un maître extérieur ?Cela dépend des individus. Un maître extérieur peut ne pas être

indispensable. Si vous êtes déjà à un stade avancé pour avoir prati-qué lors de vies précédentes nombreuses, peut-être n’avez-vous pas besoin de maître extérieur dans cette vie. C’est une question que vous