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L'ANALYSE ÉCONOMIQUE DES LEVIERS DE PERFORMANCE SCOLAIRE Françoise Larré , Jean-Michel Plassard De Boeck Supérieur | « Innovations » 2013/2 n°41 | pages 179 à 205 ISSN 1267-4982 ISBN 9782804180416 DOI 10.3917/inno.041.0179 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- https://www.cairn.info/revue-innovations-2013-2-page-179.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour De Boeck Supérieur. © De Boeck Supérieur. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) © De Boeck Supérieur | Téléchargé le 16/06/2022 sur www.cairn.info (IP: 65.21.228.167) © De Boeck Supérieur | Téléchargé le 16/06/2022 sur www.cairn.info (IP: 65.21.228.167)

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L'ANALYSE ÉCONOMIQUE DES LEVIERS DE PERFORMANCE SCOLAIRE

Françoise Larré, Jean-Michel Plassard

De Boeck Supérieur | « Innovations »

2013/2 n°41 | pages 179 à 205 ISSN 1267-4982ISBN 9782804180416DOI 10.3917/inno.041.0179

Article disponible en ligne à l'adresse :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------https://www.cairn.info/revue-innovations-2013-2-page-179.htm--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

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L’ANALYSE ÉCONOMIQUE DES LEVIERS DE PERFORMANCE

SCOLAIRE Françoise LARRÉ

Centre d’Etude et de Recherche Travail Organisation Pouvoir (UMR 5044)Université Toulouse 2 - Le Mirail

[email protected]

Jean-Michel PLASSARDCentre de Recherche en Management

Université Toulouse 1 - [email protected]

La question de la performance est aujourd’hui au cœur des débats qui agitent l’école. D’une part, le système éducatif doit faire la démonstration de sa capacité à assurer une formation de qualité capable de répondre aux exigences de productivité, d’innovation et d’évolution technologique que recèle la mondialisation. D’autre part, le système éducatif n’échappe plus à l’obligation de rendre des comptes au citoyen/contribuable ; il doit être en capacité de fournir un état du rapport qualité/coût en éducation. De ces deux constats (interne et externe) résulte la nécessité, voire l’obliga-tion, d’étalonner, d’évaluer, de mesurer la performance, mais aussi et peut être surtout de pouvoir et de savoir identifier les leviers de performances c’est-à-dire les facteurs susceptibles de conduire à une amélioration des résultats des écoles et des établissements. En la matière, la littérature éco-nomique se révèle extrêmement riche mais aussi extrêmement disper-sée. Les leviers de performance y sont abordés mais ils le sont selon des approches très différentes : soit dans une conception de l’éducation repré-sentée sous la forme d’une fonction de production, soit dans le cadre du marché du travail des enseignants, soit enfin dans le cadre d’une logique incitative.

La représentation en termes de fonction de production avec l’enseignant, considéré comme facteur de production, fait émerger un certain nombre de variables qui pourraient s’avérer décisives en matière de performance : taux d’encadrement, caractéristiques des enseignants, combinaison optimale des facteurs, effet maître, effets de pairs, etc. sont à la base d’une littérature

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particulièrement riche et variée et pose enfin la relation entre l’enseignant et l’efficacité interne du système éducatif. Pourtant, cette relation demeure encore insuffisamment expliquée ; selon Hanushek (1981, 1986, 1996), la part de la variance du rendement scolaire attribuable à la variance des fac-teurs considérés est généralement faible. Et l’influence des facteurs extra scolaires (les caractéristiques personnelles de l’élève, la famille, le milieu, etc.) n’est que rarement saisie. Lorsqu’elle l’est, elle n’apparaît pas non plus significative. La question est d’autant plus délicate qu’elle porte des enjeux forts en termes de politique publique.

Les analyses en termes de marché, notamment à travers la recherche des déterminants de l’offre d’enseignants, permettent d’isoler un certain nombre de variables susceptibles d’expliquer le comportement d’offre des ensei-gnants : salaire, salaire relatif, conditions de travail, satisfaction au travail, perspective de carrière, nature et contenu du travail, pilotage et management scolaire, etc. Même si les études sur ces questions restent peu nombreuses et éparses, elles apportent néanmoins également un éclairage opportun sur les questions d’incitation et de performance. Les conditions organisationnelles par exemple, sont étudiées en relation avec le turn-over sur le marché, l’or-ganisation du temps de travail est mise en lien avec l’attractivité de la pro-fession et le management scolaire est corrélé au recrutement. Ces éléments peuvent être utiles pour saisir les leviers de performance scolaire. En outre, les analyses en termes d’offre font état d’un certain nombre de facteurs sus-ceptibles d’inciter les enseignants à rentrer dans le métier, mais également d’inciter les enseignants à être performant dans l’exercice de leur travail. Complémentaire à des approches telle que la « New Economics of person-nel » (Lazear, 1998) qui ont tendance à surpondérer le poids des incitations monétaires, elles mettent en avant un ensemble d’éléments non monétaires susceptibles d’offrir un potentiel incitatif et d’expliquer la performance. Elles montrent également l’importance du pilotage et du management scolaire en la matière. De ce point de vue, elles mettent en avant certains éléments organisationnels propres au système éducatif, qui peuvent constituer des in-dices utiles pour identifier les leviers de performance et en éclairer les méca-nismes organisationnels.

Enfin, les analyses portant sur la régulation du système éducatif mettent l’accent sur d’autres leviers de performance comme la mise en concurrence, le choix scolaire, l’autonomie locale, le pilotage à distance, la contractua-lisation, l’accountability, la culture du résultat, les standards et le benchmar-king. Les facteurs de performance ne sont alors plus tant recherchés dans les ressources internes des établissements et des écoles que dans la capacité des autorités à mettre en œuvre des mécanismes incitatifs afin d’influencer les logiques des acteurs.

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A partir d’un examen de la littérature, nous proposons donc de rassem-bler les apports de ces différents pans de la littérature afin de dresser un état de l’approche économique de la performance scolaire à partir de l’identifi-cation des variables susceptibles d’expliquer cette performance. Bien que la dimension économique ne décrit qu’un aspect des choses et ne prétend pas épuiser une réalité complexe, ce travail présente un grand intérêt au regard des enjeux qui y sont associés. Car aujourd’hui, les questions d’efficacité in-terne des systèmes éducatifs et des modes pertinents de régulation tendent à prendre le pas sur les débats récurrents relatifs aux taux d’encadrement, à la taille et à la constitution des classes, à l’effet maître, etc. Cette évolution est perceptible à travers la littérature selon que les facteurs étudiés de per-formance scolaire portent tour à tour, sur l’enseignant et ses caractéristiques (section 1), son environnement professionnel (section 2) ou le mode de régulation en vigueur (section 3).

L’ENSEIGNANT : FACTEUR DE PERFORMANCE SCOLAIRE

La fonction de production est un moyen classique de traiter la question de la performance scolaire en relation avec les inputs engagés dans le pro-cessus de production. Dans une optique initiée par le rapport Coleman et al. (1965), l’enseignant figure à côté de l’élève, de sa famille, des inputs maté-riels et des pairs de l’élève comme un facteur de production particulièrement important d’un processus, matérialisé encore aujourd’hui, dans la plupart des cas, par un face à face pédagogique. Ainsi, la recherche intensive sur les fonctions de production éducative a permis de montrer l’existence d’un effet performance lié à l’enseignant sans pouvoir déterminer pour autant les caractéristiques d’un profil type. Les recherches se sont également intéres-sées à l’utilisation qui est faite de l’enseignant en combinaison avec les autres inputs.

Les caractéristiques de l’enseignant

Parmi les facteurs de production, l’input enseignant a fait l’objet d’une at-tention analytique particulière car il constitue une des principales variables du système pouvant faire l’objet d’un contrôle, de nombreuses variables déci-sives dans le processus de production étant extérieures au système éducatif (Larré, Barrère, 2004). Les études (Kane, Staiger, 2008 ; Nye et al., 2004) montrent que l’enseignant a un impact significatif sur les acquisitions de ses élèves, impact évalué (selon les études) entre 7 % et 21 % de la variance des

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acquisitions des élèves. Elles parviennent cependant difficilement à détermi-ner si cet impact est associé à des caractéristiques objectives de l’enseignant ou s’il renvoie à des différences d’implication et de motivation.

En termes d’indicateur, la question de la qualité d’un enseignant est géné-ralement posée par l’analyse économique à l’aune des seuls résultats scolaires de ses élèves. Un bon enseignant, soulignent Eide, Goldhaber et Brewer (2004) est un enseignant qui montre une capacité à faire croître les acquis scolaires de ses élèves (growth in student achievement). L’analyse économique définit donc clairement l’indicateur de qualité, mais il n’existe en revanche pas de consensus sur la « meilleure » façon de le mesurer. De même, en termes de variables explicatives, de nombreuses études (Cusset, 2011) dé-montrent que les enseignants constituent bien un facteur important dans le processus d’apprentissage de l’élève, mais elles peinent à faire ressortir des caractéristiques d’enseignants systématiquement reliées à de bons résultats scolaires. Les nombreux travaux démontrant l’importance de « l’effet maître / classe » et de « l’effet maître », respectivement au niveau des classes du collège et du cours préparatoire, ne parviennent pas véritablement à imputer cet effet à des variables de qualité.

La formation, l’ancienneté dans la profession et l’origine sociale des enseignants font partie des principales caractéristiques visibles examinées (Jarousse et al., 1999). Mingat (1991), ne trouve pas d’effets significatifs, sur le résultat des élèves, de caractéristiques facilement repérables telles que le sexe, le statut de l’enseignant, le type d’établissement où il exerce (col-lège ou lycée), le passage ou non par une école de formation professionnelle pour les enseignants du premier degré. Un survey de résultats aux Etats-Unis concernant cet « effet enseignant » donne des résultats très proches (Hanushek, 2002). Mais, une étude récente (Bressoux, Kramaz, Prost, 2009), basée sur des données françaises de 1990-1991, montre « que les élèves des nouveaux enseignants formés en École normale ont des scores en mathématiques, toutes choses égales par ailleurs, supérieurs de 0,25 écart-type à ceux des nouveaux enseignants non formés » (Cusset, 2011). L’effet formation n’est cependant pas totalement avéré car les résultats pourraient également s’expliquer par le parcours de formation antérieur des candidats. Quant à savoir si cet effet formation est durable, l’étude de Bressoux (1990) montre que la formation initiale ne semble pas expliquer les différences d’efficacité des enseignants expérimentés. Si ce résultat est confirmé, on pourrait alors parler d’une es-pèce de dilution de la formation initiale dans le temps ou d’une substitution de l’effet formation par un effet ancienneté. Les analyses (Bressoux, 1990, 1994, 1996) montrent en effet que l’ancienneté dans la profession exerce un effet positif mais souvent limité et non linéaire. En moyenne, les enseignants voient leur capacité à faire progresser les élèves croître dans les cinq ou six

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premières années d’activité, mais au-delà de ce seuil, les années d’exercice ne sont plus accompagnées de gains d’efficacité significatifs.

La littérature américaine très dense sur la question des effets des caractéris-tiques des enseignants sur les progressions scolaires et qui a porté une grande attention aux variables ancienneté dans la profession et niveau de diplôme des enseignants ne s’avère guère plus convaincante car peu consensuelle. (Rivkin et al., 2005). La question de savoir si les enseignants ostensiblement plus qualifiés « produisent » de meilleurs élèves reste une question ouverte. Cela ne constitue pas véritablement une surprise. La forte disparité des résul-tats enregistrés sur les effets des caractéristiques « visibles » des enseignants renvoie en effet aux même difficultés que celles rencontrées à l’occasion de la mesure de l’effet taille de la classe sur les résultats scolaires (biais de sélec-tion, mesures, etc.). On peut y ajouter la difficulté de proposer une définition claire d’un maitre efficient et la dépendance de cette définition au contexte. Et on ne sait pas non plus, au-delà d’une évaluation par leur impact global, si l’hétérogénéité constatée ou latente des « effets maîtres » renvoie plutôt, et selon quelle proportion, à des inégalités de compétences pédagogiques ou à des différences d’implication. En outre, d’autres variables pourraient influen-cer la qualité des enseignants, comme, par exemple, l’origine des maîtres1.

En termes de politique éducative, l’existence de cet effet-maître recèle des enjeux fondamentaux. Dans un cadre anglo-saxon concurrentiel, l’exis-tence de cet « effet maître » suggère que la tâche des managers des écoles est d’identifier, de garder et de motiver les enseignants les plus talentueux (Neal, 2002). Dans le cadre français, la reconnaissance de l’« effet maître » comme principal facteur de différenciation des apprentissages constitue un sujet délicat, car il conduit d’une part, à reconnaître la prééminence de l’en-seignant dans le fonctionnement de la classe et d’autre part, à mettre à mal le mythe de l’homogénéité du corps enseignant (Jarousse et al., 1999).

Les caractéristiques de l’utilisation de l’enseignant

La représentation de l’éducation en termes de fonction de production avec l’enseignant considéré comme facteur de production conduit à tenter de déterminer si cet input particulier est utilisé de manière optimale, c’est-à-dire à poser la question de la combinaison productive optimale. Les variables associées à l’enseignant dans cette combinaison ont donc été étudiées.

1. Les maîtres d’origine modeste auraient tendance à être plus efficaces et les enseignants pédagogiquement les plus efficaces seraient aussi plus « égalisateurs » au plan des résultats (Jarousse et al., 1999).

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Enseignants et taux d’encadrement

Une première question est celle du taux d’encadrement. L’input ensei-gnant est, en effet, concerné au premier chef par la question controversée des effets du taux d’encadrement sur la réussite scolaire. Réduire la taille des classes apparaît comme une politique simple mais très onéreuse, tandis que son efficacité semble aller de soi pour l’ensemble du corps enseignant. Pour-tant, les exemples des États-Unis et de la France, deux pays où la taille de la classe a été réduite, par une politique volontariste ou mécaniquement par la démographie, s’avèrent de fait assez ambiguë. Le bilan des études d’évalua-tion de cette stratégie (Meuret, 2001) se révèle aussi très mitigé au sens où les plus petites classes n’obtiennent pas toujours de meilleurs résultats. Mais, les études sur ce domaine ont longtemps peiné à s’affranchir des nombreux biais potentiels pouvant perturber les estimations des effets de la taille de la classe sur les résultats scolaires. Le bilan dressé par Hanushek (2001) à partir d’une analyse très large de la littérature couvrant 277 études apparaît en effet très mitigé. Dans 14 % des cas, une relation positive et significative entre la taille de la classe et les résultats scolaires est détectée, alors qu’une relation significative et négative ressort aussi dans 14 % des cas. Cela signifie donc que pour 72 % des études, la relation entre la taille et la réussite scolaire s’avère non significative. Pour Borland et al. (2005), le caractère inconstant de la relation est imputable essentiellement à l’existence de nombreux biais : erreurs de mesure, absence de contrôle des effets de la famille ou de l’apti-tude de l’élève, non prise en compte du caractère endogène de la taille de la classe, spécification incorrecte de la relation fonctionnelle entre la taille de la classe et la réussite scolaire, etc.

A cet égard, les études récentes, qui font usage de méthodes plus précises pour isoler l’effet propre de l’effectif, apparaissent plus favorables aux réduc-tions d’effectifs et vont à l’encontre d’une littérature jusqu’ici relativement pessimiste (Angrist, Lavy, 1999). Piketty (2004) estime « qu’une réduction d’un élève de la taille de classe de CE1 conduit à une augmentation d’au moins 0,7 point du score moyen obtenu par les élèves défavorisés aux épreuves d’évaluation de mathématiques de début de CE2 ». Il en conclut qu’une politique de ciblage des moyens forte (mais pas irréaliste), avec une taille de classe moyenne de 18,0 en Zep et 24,2 hors Zep, permettrait de réduire d’environ 40 % « l’écart entre les scores obtenus en Zep et hors Zep aux évaluations de mathématiques de début de CE2 (écart qui est d’environ 9 points, ce qui est considérable) ». Cependant, le fait que les effets de la taille sur la réussite scolaire ne sont ni linéaires ni monotones conduit à penser que le concept de taille optimale de la classe est variable selon le contexte et qu’il n’existe pas de taille minimale universelle (Borland, op. cit.).

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En outre, comme le montre la note de synthèse de Cusset (2011), les effets positifs attendus d’une réduction de la taille de la classe sont moindres que ceux attendus d’une augmentation de l’efficacité des enseignants. L’étude exploitant les données expérimentales du projet STAR indique, en effet, qu’une augmentation d’un écart-type de l’efficacité des enseignants permet-trait d’élever les résultats des élèves en lecture de 0,26 écart-type. La même étude estime que la réduction de la taille de la classe se traduirait par une augmentation des résultats des élèves de 0,15 écart-type.

Enseignants et autres facteurs matériels

Une autre question est de savoir si cet input particulier, qu’est l’ensei-gnant, est utilisé de manière optimale et notamment s’il n’est pas « suruti-lisé » par rapport aux autres facteurs. Comme pour les autres inputs, l’input enseignant renvoie en effet à une efficience des choix qui recommande que les divers facteurs soient combinés de façon optimale dans la fonction de production, efficience technique2 et efficience allocative se révélant toutes deux importantes.

A partir de données internationales, Pritchett et al. (1999) suggèrent que la fonction de production s’avère trop fortement reliée à l’input enseignant au sens où l’analyse coût-efficacité d’un gain de réussite semble beaucoup plus faible pour l’enseignant que pour d’autres inputs. Mais de façon géné-rale, le mix approprié des facteurs renvoie aux relations de complémenta-rité des facteurs non totalement encore maîtrisées, en raison des outputs en dehors du contrôle de l’école.

L’application du principe d’efficacité exige que chaque facteur soit consi-déré à la fois individuellement et comme complément ou substitut aux autres facteurs. L’analyse s’est alors penchée de façon traditionnelle sur certaines élasticités de réactions spécifiques entre acteurs du processus pédagogique. La technologie de l’éducation mobilise des moyens matériels et humains. Le choix efficient des inputs impose que les facteurs soient utilisés de façon optimale dans la fonction de production. Afin de savoir comment les diffé-rents inputs peuvent être combinés, les élasticités de substitution peuvent être calculées. Gyimah-Brempong, Gyapong (1991), à partir de données du district de Michigan ont utilisé une fonction de coût translog pour ob-tenir des estimations des élasticités de substitution entre certains inputs : inputs enseignants, services des supports d’instruction et services logistiques non pédagogiques (administration inclue). Les estimations portent sur les

2. L’efficience technique s’établit à partir de la combinaison d’input pour un niveau donné d’iso-quant (Bartel, 1991).

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élasticités partielles de substitution des facteurs au sens d’Allen, c’est-à-dire des élasticités qui indiquent comment l’utilisation d’un facteur de production varie lorsque le prix d’un autre facteur change. Le fait qu’elles se révèlent à la fois toutes significatives et de valeur positives plaide en faveur d’une hypo-thèse de substitution des facteurs entre eux3. Des résultats analogues sont obtenus par Chang et Tuckman (1986) pour des élasticités de substitution associées à des catégories d’enseignants du supérieur ventilés par statuts.

Enseignant et effets de pairs

L’enseignement peut être individualisé mais dans le cadre d’un processus pédagogique traditionnel, il prend place à l’intérieur d’une classe de sorte qu’un effet « groupe de pairs » est susceptible d’intervenir et d’influencer les résultats scolaires individuels. Les effets « groupe de pairs » mettent donc en scène de façon indirecte l’action de l’enseignant.

L’effet « groupe de pairs » est le dernier facteur apparu dans la littérature de la fonction de production. Les travaux très nombreux et récents sur le domaine portent sur la question de savoir comment les groupes de pairs sont composés et sur la manière dont ils interviennent dans le processus de pro-duction notamment lorsque la réussite individuelle dépend de l’aptitude de l’individu et de celle de ses pairs (Glewe, 1997).

Dans le processus de production qui s’élabore au sein de la classe, le rôle de l’enseignant est particulièrement central. Notamment ce dernier consti-tue la principale ressource rare dédiée à l’instruction des élèves que ceux-ci doivent se partager. Plus précisément, si le temps de l’enseignant peut être considéré en partie et sous certains aspects comme un bien collectif pour l’ensemble des élèves de la classe, ce dernier peut être soumis à des effets de congestion (Lazear, 1995) associés à l’hétérogénéité des élèves.

Dans cette optique, les effets de pairs pourront avoir des conséquences défavorables pour un individu particulier. Il peut en être ainsi notamment pour les « élèves plus doués » pouvant être pénalisés par la présence d’élèves « moins doués » qui provoque un effet de congestion en raison d’une plus grande absorption du temps rare de l’enseignant à leur profit et au détriment du reste de la classe. L’existence de ce type d’effets plaide en faveur d’un re-groupement par niveau. L’argumentaire est généralement complété par l’hy-pothèse selon laquelle l’homogénéité favorise la progression des étudiants à

3. À partir de ces élasticités on peut déduire l’élasticité directe de la demande de travail des enseignants par rapport au salaire. Les deux études convergent pour suggérer que si la demande de travail des enseignants est décroissante par rapport au salaire, elle se révèle faiblement élas-tique au salaire au moins à court terme.

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leur rythme tandis que les modes d’enseignement peuvent être adaptés plus facilement aux besoins du groupe rendant l’enseignement plus intéressant et la pédagogie plus aisée. Mais on sait aussi que le débat reste très ouvert et que les arguments en faveur de l’hétérogénéité sont aussi nombreux. Les plus souvent mis en avant concernent i) le fait que les enfants de plus faible aptitude peuvent apprendre plus efficacement lorsqu’ils sont en contact avec des élèves plus brillants et ii) l’existence d’un effet de stigmatisation engen-dré par le regroupement par niveaux. Par ailleurs, au niveau global, il n’est pas certain que dans le passage d’un modèle de mixité à un regroupement par niveaux, ce que perdent les uns soit supérieur à ce que gagnent les autres. Les questions d’efficacité viennent ici interférer avec les problèmes d’équité.

Enseignant et interaction avec les autres acteurs

Le processus d’apprentissage est un processus complexe mobilisant plu-sieurs acteurs et impliquant de nombreuses interactions. Généralement les effets élèves et les effets familiaux, considérés comme plus importants que les effets maîtres, sont analysés séparément. Mais, cela ne dispense pas de tenter de saisir les interactions entre l’enseignant et les autres acteurs, renvoyant, là encore, aux questions de complémentarité et de substitution abordées pré-cédemment. L’enseignant y voit son rôle mis en exergue dans une dimension partenariale avec l’élève pour la première question et avec les parents pour la seconde question (Epstein, 1986, 2001).

Le thème de la substitution domine généralement dans l’analyse des inte-ractions et de la coopération entre élèves et enseignants. Becker (1982) a été un des premiers à avoir identifié le problème des substitutions d’inputs comme la difficulté majeure rencontrée dans la mesure des effets des inter-ventions spécifiques de l’école sur les résultats scolaires. En 1987, Correa et Gruver ont étendu l’analyse théorique dans le cadre d’un modèle de jeu inte-ractif et de coopération entre étudiants et enseignants. Le modèle montre comment le degré relatif de substitution entre la fonction d’utilité de l’étu-diant et la fonction de réussite détermine si un étudiant répond positivement ou négativement consécutivement à un effort plus important ou à de plus fortes exigences de l’enseignant. La réussite scolaire est envisagée comme une fonction de l’effort de l’étudiant et de l’effort de l’enseignant, variables qui sont aussi introduites dans les fonctions d’utilité des deux acteurs afin de déterminer ensuite l’effort de chacun. Une des applications du modèle est de montrer que les pratiques de certification peuvent être utilisées comme un instrument pédagogique destiné à limiter les effets de substitution c’est-à-dire destiné à éviter que l’étudiant ne substitue son effort à l’effort de l’ensei-gnant (Monmarquette, Mhseredjan, 1989).

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Parents et enseignants peuvent eux aussi entrer théoriquement dans une relation de substitution ou de complémentarité au sens défini précédem-ment. Xu et Gulisino (2006) ont analysé cette relation au niveau préscolaire et suggèrent que cette dernière n’a de chance de se transformer en relation de complémentarité que dans le cadre d’une relation de partenariat efficace. Par ailleurs, la qualité de cette relation partenariale dans laquelle s’engage l’enseignant doit être interprétée aussi comme un indice satisfaisant de la qualité de l’input enseignant. Ce sont notamment les aspects comportemen-taux des enseignants, le rôle des enseignants dans l’établissement et le main-tien d’une bonne relation enseignant-parents qui vont déterminer le passage d’un enseignant qualifié à un enseignant de qualité. De fait, ils montrent une relation positive et significative entre un indicateur composite de ce parte-nariat et les résultats scolaires.

Une autre question, qui a fait l’objet d’une littérature moins dense, met directement l’accent sur l’introduction des nouvelles technologies au cœur du processus pédagogique, renvoyant, là encore, aux questions de complé-mentarité et de substitution abordées précédemment. L’enseignant y voit son rôle mis en exergue dans une dimension technologique (Eicher et al., 1982 ; Cuban, 1986 ; Kozman, 1991 ; Rumble, 2004).

L’ENVIRONNEMENT PROFESSIONNEL DE L’ENSEIGNANT : FACTEUR DE PERFORMANCE SCOLAIRE

Des données sur les facteurs de performance peuvent également être re-cherchées dans les analyses de l’offre de travail des enseignants. Les débats sur la politique de rémunération adéquate pour attirer et retenir les enseignants ont d’ailleurs fortement orienté les recherches vers l’étude de la relation entre la rémunération et l’offre de travail. C’est au demeurant un modèle microéco-nomique très standard qui a généralement servi de référence pour étudier cette relation, la fonction d’offre ayant notamment pour arguments les salaires des enseignants et les gains alternatifs (Hanusheck et al., 2001). Mais les variables non pécuniaires, liées à l’environnement professionnel, sont également sus-ceptibles d’influencer à la fois l’offre de travail et la performance scolaire.

Performance scolaire et variables pécuniaires

Une question lancinante et récurrente est de savoir si une politique de hauts salaires permet d’une part, de recruter de meilleurs enseignants et d’autre part, d’encourager les enseignants en place à un travail plus

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important. Depuis déjà longtemps, la question a fait l’objet de traitements empiriques qui consistent à mettre en relation salaires des enseignants et qualité des enseignants. Si Dolton et Marcenaro-Guitierrez (2011) sur la base des données de l’OCDE, trouvent qu’en moyenne les pays les mieux classés en termes de performance scolaire sont également ceux qui paient le mieux leurs enseignants, en général, les études américaines trouvent une relation assez modeste en se situant dans le cadre d’un marché national des enseignants (Antos et al., 1975 ; Ballou, 1996 ; Ehrenberg et al., 1994) ou en se plaçant au niveau d’un district particulier (Chambers, 1985). Au vu de ces résultats et compte tenu des faiblesses réelles de l’étude de Dolton et al. (2011), on peut penser que les considérations non pécuniaires jouent un rôle plus fort que dans les autres professions (Baugh et al., 1982).

Cependant, à la suite d’un relèvement des salaires dans le secteur public, Figlio (1997) enregistre, tant au niveau des grandes métropoles qu’au niveau de leurs districts, une relation très significative entre les salaires de départ et la qualité des maîtres mesurée par des variables académiques (sélectivité du collège et expertise dans une matière scientifique), indiquant que l’élasticité de l’offre de qualité de travail est positive à l’intérieur des marchés locaux des enseignants. En d’autres termes, dans le contexte américain où le secteur pu-blic peut pratiquer une gestion individualisée et non uniforme (selon les dis-tricts) des rémunérations, l’auteur trouve une relation significative entre les salaires des enseignants d’un district et la probabilité que ce district recrute des enseignants « qualifiés ». En revanche, la relation disparaît à l’occasion de tests identiques pratiqués sur le secteur plus syndicalisé des districts sco-laires (Figlio, 2002)4. Faut-il voir, dans cette absence de relation, une inter-prétation « rugueuse » dans la droite ligne des travaux de Ballou (op. cit.), selon laquelle les administrateurs du secteur public syndicalisé feraient peu de cas de la qualité des maîtres (mesurée par des critères purement d’excel-lence académique), ce type de comportement pouvant alors être à l’origine des performances médiocres des élèves de leur établissement ? Cette absence de relation s’explique-t-elle par une sélection et un recrutement plus orien-tés dans ce secteur sur des diplômes « pédagogiques », qui viendraient se substituer à des diplômes disciplinaires ? Faut-il y voir, in fine, un artefact sta-tistique engendré par de multiples biais de sélection ? Les données, de l’aveu même de l’auteur, ne permettent pas de départager les diverses conjectures.

Bien entendu, toutes ces études se heurtent au problème des critères uti-lisés pour mesurer la qualité des enseignants, critères souvent discutables car généralement très orientés par les objectifs implicites de la politique

4. Dans une perspective proche, Hoxby (1996) observe également une moindre efficacité des districts scolaires américains où l’activité des syndicats d’enseignants est la plus forte.

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d’éducation considérée comme souhaitable. Parallèlement à la rémunéra-tion, l’offre et l’implication dans le travail peuvent également être influen-cées par les salaires relatifs, c’est-à-dire par le rapport entre les salaires des enseignants et les opportunités de gains associées aux autres professions5. Les résultats établis par Dolton (1990) pour la Grande-Bretagne suggèrent que les salaires relatifs (et leur différentiel de taux de croissance) influencent fortement le choix des diplômés dans leur décision de devenir enseignant. Les opportunités de gains extérieurs semblent ainsi avoir un impact sur les transitions vers l’entrée ou la sortie et donc sur la durée de vie du métier d’enseignants (Dolton et al., 1995 ; Murname et al., 1989). Les gains externes, qui varient selon les disciplines, créent des coûts d’opportunité différents, à l’origine d’éventuelles pénuries enregistrées en mathématiques ou en sciences (Murname et al., 1989). Cet argument sera repris par Southwick et al. (1997) pour expliquer la faiblesse du système éducatif secondaire américain en matière de transmission de compétences scientifiques. Des salaires unifiés conduisent à rémunérer les enseignants de toutes les disciplines en fonction uniquement de leur niveau d’éducation ou de leur ancienneté professionnelle, c’est-à-dire indépendamment des coûts d’opportunité qui eux, sont fortement liés à la discipline enseignée. Des gains alternatifs beaucoup plus élevés pour les scientifiques auraient déclenché, via un effet de « sélection adverse » sur le marché du travail des enseignants du secondaire, une baisse de la qualité des professeurs de mathématiques et de sciences aux Etats-Unis, qui pourrait être à l’origine du déclin des résultats scolaires enregistré dans ces matières. Ces conclusions doivent cependant être nuancées car d’autres études, notamment celles conduites par Hanushek et al. (1995), sur les choix effectués en amont, c’est-à-dire au moment de la préparation aux métiers d’enseignants par les étudiants, montrent que l’influence des salaires relatifs apparaît faible, à la fois globalement et par discipline. Selon cette étude, même si les gains relatifs des enseignants varient considérablement sur le territoire américain, ils n’ont pas un impact important et significatif sur la décision des étudiants de s’engager dans une formation au métier de l’enseignement.

Performance scolaire et variables non pécuniaires

Au-delà des considérations pécuniaires, d’autres facteurs sont suscep-tibles d’influencer l’offre de travail des enseignants et, en conséquence, la performance scolaire.

5. On peut déduire de cette perspective que la conjoncture est un autre facteur qui affecte l’offre d’enseignant. L’étude de Dolton et al. (2003), qui examine l’influence du cycle économique sur le marché de l’enseignant, conclut que la situation économique globale a un impact significatif sur l’offre.

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Il y a tout d’abord les conditions de travail qui, dans toutes les professions, sont associées à la satisfaction au travail. Les indicateurs des conditions de travail des enseignants sont nombreux. Il peut s’agir de la taille de la classe6, du nombre de classes à enseigner, du nombre de matières à enseigner, de la charge de travail, des caractéristiques des élèves, mais également de la sécurité, de la qualité de l’environnement et du matériel ou encore du degré d’autonomie offerte et de la flexibilité offerte (possibilité de quitter l’emploi durant une période donnée, pour raisons familiales par exemple, et d’y revenir). Si les critères sont nombreux (encore notre liste n’est-elle pas exhaustive), les études sur le sujet sont, en revanche, peu nombreuses. La question de l’influence des conditions de travail sur la performance scolaire est pourtant pertinente lorsque face à une pénurie d’enseignant ou dans un objectif de maîtrise des coûts, les propositions avancées peuvent être d’augmenter la charge de tra-vail des enseignants ou la taille des classes. Dans ce contexte, il est important de savoir comment les enseignants pourraient répondre à de telles mesures, notamment de savoir si ces mesures se traduiraient par une élévation des taux de départ (ce qui conduirait alors à une augmentation de la demande de nou-veaux enseignants) et/ou par une diminution de la performance.

Une des rares études sur le sujet est celle conduite par Mont et Rees (1996) à partir de données concernant le personnel enseignant de l’Etat de New-York. Les résultats montrent que deux variables principalement sont positivement corrélées avec le turn-over : la taille de la classe, le nombre et les matières à enseigner. Les taux les plus élevés d’abandon de poste sont en effet observés chez les enseignants qui, soit enseignent dans des classes ayant un effectif supérieur à la moyenne, soit enseignent des matières différentes de celles correspondant à leur certification disciplinaire. Dans ces condi-tions, l’efficacité des mesures évoquées ci-dessus apparaît indéterminée, du moins les gains attendus de ces mesures doivent-ils être mis en balance avec les coûts liés au turn-over qu’elles peuvent engendrer. En revanche, l’étude de Mont et Rees montre que, après contrôle de la taille moyenne de la classe, le nombre de classes à enseigner n’est pas corrélé au taux de départ.

Plus récemment et toujours dans les écoles américaines, Stinebrickner (1999) conclut à l’influence significative du ratio élèves / enseignant sur la satisfaction au travail de l’enseignant, même si cette influence est moindre que celle exercée par le salaire.

Dans la même perspective, nous avons également signalé que les mo-bilités d’enseignants dépendent plus des caractéristiques des élèves des

6 Pour Grissmer et al., (1993), la réduction de la taille de la classe peut davantage être inter-prétée comme un indice de qualité de vie de l’enseignant que comme une mesure de politique scolaire destinée à améliorer les performances des élèves.

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établissements (caractéristiques ethniques et faiblesse des niveaux scolaires) que des aspects financiers. Un tel constat met en garde contre le risque d’une future pénurie d’enseignants pour les écoles publiques aux États-Unis, la situation pouvant être particulièrement sévère pour les zones défavori-sées (Hanushek, 2001). En France, il renvoie particulièrement à la situa-tion des enseignants en zone difficile. Les études (Bénabou, Kramarz et Prost, 2005) sur les ZEP (Zone d’Education Prioritaire) montrent un taux de rotation à la hausse des personnels enseignants7 que la prime offerte ne réussit pas à endiguer8. D’une part, le différentiel modeste ne permet sans doute pas de compenser des conditions de travail difficiles. D’autre part, les enseignants les plus motivés et compétents ne sont pas forcément in-téressés par une compensation financière. Il semble en effet avéré que le choix de certains enseignants pour les ZEP relève davantage de l’adhésion à l’idéologie républicaine de l’intégration que de considérations pécuniaires ou de bonification9.

Le pilotage et le management scolaire apparaissent également comme des critères déterminants de la performance scolaire. Les responsabilités conférées, l’autonomie professionnelle, les conditions organisationnelles, la qualité de la relation avec le ou les responsables de l’établissement, le sou-tien dont peut bénéficier l’enseignant sont autant d’éléments qui peuvent avoir une influence sur la performance. Ingersoll (2001a et 2001b), à par-tir des données de recensements de l’administration du département amé-ricain d’éducation, étudie l’effet des conditions organisationnelles sur le turn-over des enseignants. Il montre, en particulier, qu’un support inadé-quat de l’administration scolaire, des problèmes disciplinaires et une faible influence des enseignants sur les décisions de l’école contribuent à aug-menter le turn-over. Dans une contribution plus récente (2003), le même auteur établit une corrélation positive entre l’organisation du temps de

7. C’est dans les ZEP que l’on compte le plus d’enseignants de moins de 35 ans, de non-titulaires et de sortants d’IUFM. Leur manque d’expérience peut constituer un handicap mais leur dyna-misme et leur acuité didactique liée à une bonne formation peut constituer un atout.8. Depuis 1991 en effet, les professeurs de ZEP perçoivent une « prime ZEP » (indemnité de sujé-tion spéciale) d’un montant de 1097,04 euros par an, et depuis 2004, ils peuvent, après cinq ou huit ans de présence en ZEP, bénéficier d’un bonus leur donnant droit à une plus grande mobilité professionnelle (affectation à caractère prioritaire justifiant une valorisation). L’investissement global du ministère représente un coût annuel de 110 millions d’euros soit 1 % du budget de l’Éducation nationale. 9. Précisons que le problème des ZEP ne se réduit pas au turn-over des enseignants, mais aussi à la multiplication des établissements classés en ZEP (elle concerne environ 20 % des écoliers ou collégiens) qui a contraint l’Éducation nationale à une stratégie de saupoudrage, tendant à diluer les moyens humains et matériels, et ainsi à faire perdre de son efficacité au dispositif.

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travail à l’école et l’efficacité et le degré de satisfaction des enseignants. Les travaux de Mulford (2003) concernent l’influence du management scolaire sur la motivation et l’autorité conférée aux enseignants. L’auteur conclut à un impact significatif des formes de management de l’établissement sur le recrutement et la rétention des enseignants, ainsi que sur l’autonomie dont ils disposent, sur l’intérêt qu’ils portent à leur travail et sur leur effi-cacité. Il soutient que les responsables d’établissement doivent introduire un management participatif, protéger les enseignants contre les pressions externes excessives et soutenir le développement de l’établissement en dé-veloppant les capacités des enseignants de leur établissement. Le rapport de Cuisinier et Berthé (2005) établit, pour la France, une corrélation entre les résultats des élèves et la qualité globale du pilotage des collèges (com-pris comme le management pratiqué par l’équipe de direction en lien avec les autorités académiques, les moyens d’enseignement affectés et l’impli-cation de l’équipe enseignante, l’intensité de la vie scolaire, les moyens financiers octroyés et la qualité de la gestion). Les auteurs concluent que « dans l’ensemble, plus le pilotage est de qualité, plus les performances sont éle-vées, à l’exception notable des collèges classés en ZEP, dont les résultats restent globalement faibles » (p. 27).

LES NOUVEAUX MODES DE RÉGULATION : FACTEUR DE PERFORMANCE SCOLAIRE

Les politiques éducatives mises en œuvre ces dernières années dans de nombreux pays sont le fruit d’un dosage subtil de mécanismes relevant du modèle centralisé, du modèle de quasi-marché et du modèle de l’Etat éva-luateur. Les réformes menées s’inspirent de ces deux derniers modèles dans des combinaisons variées entraînant des évolutions plus ou moins radicales. Qualifié par Ranson (2003) de « management contractuel et performatif », ce Nouveau Management Public (Ball, 2008) se veut vecteur de perfor-mance scolaire.

Mise en concurrence, choix scolaire et autonomie locale : vouchers et quasi-marché

Le modèle dit de quasi-marché traduit la mise en place d’une compétition entre établissements scolaires. Les dispositifs mis en œuvre sont à géométrie très variable. Ils peuvent concerner la mise en concurrence des établisse-ments publics entre eux, la mise en concurrence des établissements publics avec les établissements privés et enfin, aux Etats-Unis par exemple, la mise

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en concurrence de l’ensemble avec les écoles à charte10 (charter school), nou-veau type d’établissement en pleine expansion depuis 15 ans et répondant aux principaux objectifs du programme No Child Left Behind Act (2002). Quel que soit le type d’établissement concerné, ces dispositifs de quasi-mar-ché reposent sur deux piliers communs (Vandenberghe, 1999).

Le premier est celui du libre choix de l’école par les élèves. La désignation alternative de ce dispositif sous le vocable de school choice attire l’attention sur cet aspect central qui implique le transfert partiel, de l’État vers les fa-milles, de la fonction d’évaluation et de régulation du système. Les usagers-clients ont en effet un pouvoir de contrôle important sur les écoles à travers la possibilité de «voter avec leurs pieds», c’est-à-dire, la possibilité d’exercer leur option de sortie, si l’école ne les satisfait pas.

Le deuxième pilier est celui d’un financement public à l’élève selon lequel l’établissement reçoit des fonds publics pour chaque enfant inscrit. Ainsi, un établissement attirant beaucoup d’élèves bénéficiera de moyens plus impor-tants qu’un établissement recevant peu d’élèves. Ce système de quasi-mar-ché se différencie donc du pur marché économique du fait qu’il ne suppose pas d’échange monétaire entre client et fournisseur. Il s’en rapproche en revanche lorsque le financement des établissements se fait non pas à travers les subventions étatiques versées directement par l’Etat aux établissements, mais à travers le système des « chèques éducation » (education voucher ou school voucher), système imaginé par Milton Friedman (1955) dans lequel les parents payent eux-mêmes et directement l’établissement sous forme de « bon scolaire » ou de « chèque éducation »11.

Pour compléter le dispositif, l’Etat mettra en place une « agence » d’in-formation ayant pour mission d’informer les parents sur l’efficacité et l’ef-ficience des établissements. Les parents, correctement informés, pourront alors faire leur choix de façon rationnelle et c’est cette rationalité des choix qui doit inciter les établissements à opter pour des stratégies attractives, né-cessaires pour attirer et retenir les élèves. Ce système doit donc inciter les

10. Les écoles à charte sont des entités autonomes qui opèrent sur la base d’une charte ou d’un contrat établi entre un individu ou un groupe et l’autorité responsable (conseil scolaire, district ou État). La charte précise le projet d’école, les résultats scolaires à atteindre et leur évalua-tion, le plan de gestion et le respect des exigences de l’État. En général, une école à charte est dispensée, au moins partiellement, de la réglementation relative au curriculum, aux méthodes pédagogiques, à l’achat de biens et de services, à l’engagement du personnel. En échange, elle est tenue responsable de la performance des élèves. Pour recevoir des fonds du gouvernement fédéral, les États doivent d’abord adopter une loi qui sert de cadre de référence pour leurs écoles à charte (Rondeau, 1997, p. 6).11. Le Danemark, la Suède, le Chili (Bravo et al., 2008), les États-Unis (Hatcher, 2004 ; Rouse, Barrow (2009), le Royaume-Uni, (Hatcher, 2004) utilisent ces systèmes de vouchers.

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établissements à développer des initiatives, à prendre en compte les attentes des parents en élargissant leur offre éducative et à améliorer la qualité édu-cative de leur travail.

Peu de dispositifs ont suscité autant de débats et de polémiques concer-nant leurs effets globaux12. Au plan de l’efficience technique, les partisans du dispositif mettent en avant généralement le cercle vertueux touchant les établissements scolaires de tout statut confrontés à des incitations suscitées par la liberté du choix scolaire (Hoxby, 2003). Les contempteurs du dispo-sitif, en revanche, avancent qu’à l’examen, aucune étude ne fournit claire-ment une information précise sur l’impact des quasi-marchés en tant que tels13 : la productivité plus forte du secteur privé reste une question empirique ouverte (Altonji et al., 2005), alors que le libre choix et la concurrence ne constituent pas forcément un moyen disciplinant suffisant pour assurer l’effi-cience (Mac Millan, 2004). En outre, certaines études soulignent l’iniquité du dispositif (Vandenberghe, 2001 ; Burgess et al., 2004) et montrent que les quasi-marchés accentuent le degré de ségrégation selon le niveau écono-mique et ethnique des élèves. La prise en compte des effets de pairs (Lazear, 2001) vient également relativiser des argumentaires selon lesquels le système de vouchers est toujours efficace (équitable) ou toujours systématiquement inefficace (inéquitable)14 (Epple, Romano, 1998 ; Epple et al., 2004).

Quant à l’impact de la concurrence sur la performance des enseignants, la question est de savoir si l’introduction progressive des mécanismes de mar-ché conduit à l’augmentation de la productivité et si tel est le cas, de savoir si cette augmentation de la productivité est liée à l’amélioration de la qualité des enseignants entrés dans la profession. Hoxby (2002), à nouveau, fournit des éléments de réponse à cette question. Utilisant des micro-données et un

12. Voir notamment les premiers grands débats sur la question, ouverts par Levin et West, débats relayés par le numéro spécial de la revue Education Economics : Special issues : School Choice, vol.5, n°3, décembre 1997. Voir aussi la polémique développée récemment entre Hoxby et Rothstein à la suite de la publication de l’article de Hoxby (2000). 13. Ajoutons également que la majorité des études portent sur les États-Unis qui n’ont pas de quasi-marché scolaire fonctionnant à grande échelle, les élèves américains du primaire et du secondaire relevant à plus de 85 % des écoles publiques (locales). 14. Vandenberghe (2002) propose une piste pour limiter la discrimination dans un contexte de quasi-marché : utiliser la formule de financement des écoles pour les inciter à réviser leur stratégie de recrutement. « Plusieurs approches sont imaginables. Une d’elles consiste à introduire dans la formule de financement à l’élève en plus d’une partie fixe (identique pour tous les élèves) une partie variable selon le profil socioéconomique de l’élève. Au plus l’élève a un profil favorable, au moins importante est cette composante. Cette formule fait penser à la discrimination positive telle qu’elle se pratique déjà chez nous. Elle introduit une nuance de taille toutefois car elle nous fait passer d’une discri-mination positive marquée par des seuils de rupture (être ou ne pas être en discrimination positive) à une discrimination positive dont les effets se diffusent potentiellement de manière beaucoup plus continue » (Vandenberghe, 2002).

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échantillon étendu, c’est-à-dire couvrant l’ensemble des États-Unis de 1970 à 2000, Hoxby (2002) estime que les résultats au test fédéral NAEP (Natio-nal Assessment of Educational Progress) des élèves d’une région présentant le maximum de choix d’école sont de 3,1 à 5,8 rang centile15 plus élevés que les résultats d’élèves dans une région présentant moins de choix. La preuve la plus évidente, selon elle, provient de l’analyse de trois réformes récentes : l’instauration de vouchers dans les écoles du Milwaukee, d’écoles à charte dans le Michigan et d’écoles à charte dans l’Arizona. Dans chacun des cas, l’auteur estime que les écoles publiques traditionnelles faisant face à une concurrence (de la part des écoles à charte ou suite à la mise en place d’un système de vouchers) ont une meilleure productivité que celles n’étant pas soumises à cette concurrence. Plus important encore, elle note qu’un des moyens qui a permis de faire augmenter la productivité, est la mise en place d’un système de rémunération différent qui a attiré les meilleurs éléments vers l’enseignement.

Dans la même perspective, Rapp (2000) étudie la question de savoir si la concurrence, induite par la possibilité de choix, augmente l’effort des ensei-gnants. L’auteur teste alors l’influence de la possibilité de choix sur le com-portement des enseignants des écoles publiques. A partir des données du département américain de l’éducation scolaire, il aboutit à des résultats miti-gés dans la mesure où il ne réussit pas à établir une relation absolue entre le degré de concurrence entre établissements et l’effort de l’enseignant. Quelles que soient les options observées (lieu de résidence déterminant, choix sco-laire, concurrence avec le secteur privé) l’auteur ne trouve aucun effet sta-tistique significatif sur le temps passé par l’enseignant dans l’emploi et hors de la classe. Cependant, quand un choix intra district est mis en place et est utilisé, il apparaît que les enseignants passent beaucoup plus de temps dans leur emploi.

Pilotage à distance, contractualisation, accountability, culture du résultat, objectifs standards, benchmarking

Le deuxième modèle de régulation portant les nouvelles formes de per-formance scolaire est le modèle dit de l’Etat évaluateur selon lequel l’Etat développe des instruments de contrôle à distance des établissements, instru-ments basés sur une évaluation externe des résultats obtenus par les établis-sements et les enseignants. A la base de ce mode de pilotage, on trouve le modèle contractuel de l’agence. Rappelons que selon ce modèle, le Principal (l’Etat) établit avec l’agent (l’établissement et/ou l’enseignant) un contrat

15. Le rang centile est le rang d’un élève si on le positionnait dans un groupe de cent élèves.

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dont le contenu (droits, devoirs, primes ou pénalités financières, formes de contrôles) doit orienter l’action de l’agent de telle façon que cette action soit conforme aux intérêts ou aux objectifs poursuivis par le principal. A la base de ce contrat, l’idée est qu’il est plus efficace et moins coûteux d’inciter l’établissement et/ou l’enseignant à atteindre certains objectifs en lui pro-mettant une récompense s’il les atteint (et une sanction s’il ne les atteint pas) plutôt que de tenter de l’obliger autoritairement à atteindre ces objectifs dans une logique bureaucratique. Selon l’analyse économique, la perspective de la récompense et de la sanction conduit l’agent à intégrer dans sa fonction d’utilité, comme étant de son intérêt propre, le fait d’agir conformément aux objectifs du principal. Il utilisera alors au mieux les marges de manœuvre dont il dispose pour développer des actions et mettre en œuvre des innova-tions qui lui permettront d’atteindre les objectifs définis contractuellement.

La décentralisation et le pilotage par les résultats devraient aussi per-mettre plus de flexibilité du système éducatif et une imputabilité véritable, et au final, mettre fin aux excès de la bureaucratie. De l’ensemble de ces attendus devrait résulter une amélioration de la performance des élèves, selon le principe des incitations. Des objectifs précis (formulés en termes de résultats), l’imputabilité, la reddition des comptes, les récompenses et les sanctions associées doivent augmenter la productivité et l’efficience.

Les politiques éducatives en cours intègrent de plus en plus l’évaluation externe, mais celle-ci n’est pas utilisée de manière homogène par les diffé-rents pays qui y ont recours. De même, la relation établie entre l’Etat et l’éta-blissement et/ou l’enseignant peut être plus ou moins formelle et la redistri-bution des fonctions entre les acteurs plus ou moins élargie. Associées à ce modèle de contractualisation, on trouve donc de nombreuses expressions qui témoignent de cette diversité des pratiques. Les notions de standards, de tests, d’usagers, d’accountability, de régulation externe, de pilotage par l’input (rem-plaçant un pilotage par l’output), de benchmarking, de culture du résultat, etc. renvoient toutes au même modèle économique, mais appliqué différemment selon les caractéristiques sociétales et culturelles des pays et les traditions idéologiques et institutionnelles à la base des systèmes éducatifs nationaux.

Les dispositifs d’accountability combinent évaluation et incitation en met-tant la première au service de la seconde. L’évaluation constitue un enjeu important pour le fonctionnement du système via deux types d’usages com-plémentaires. Le premier, l’effet de miroir, met l’accent sur les effets internes d’une évaluation qui consiste à alimenter la réflexion des acteurs de l’éta-blissement et qui, via les modifications des pratiques, peut ou doit permettre d’améliorer le fonctionnement et les résultats du système. Le second, l’effet externe, alimente la connaissance et la réflexion des usagers et des parte-naires de l’école et procure une émulation entre établissements.

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Analyser l’impact de l’accountability sur les performances s’avère être une tâche ardue (Hanuschek, Raymond, 2004) pour de nombreuses raisons : hétérogénéité des dispositifs qui peuvent couvrir la totalité d’un État ou seu-lement certains districts scolaires, échantillons limités d’États participant à des tests nationaux, changements de règles, etc. Outre les études portant sur des dispositifs ponctuels, existent aussi quelques analyses visant à montrer les effets globaux du dispositif sur le niveau et la distribution des résultats sco-laires. Meuret et al. (2001), à partir d’une analyse d’expériences étrangères, concluent que la gestion autonome des écoles peut conduire à des fonction-nements efficaces, particulièrement dans le cadre d’une gestion « profes-sionnelle » ou « communautaire » des établissements. L’étude très générale de Carnoy et Loeb (2002) met en regard les politiques d’accountabilty des différents États américains et l’évolution des performances des élèves, per-formances mesurées par le test NAEP, passé par des échantillons d’élèves de tous les États. Les auteurs observent que plus les systèmes d’accounta-bilty sont développés et rigoureux, plus les performances se sont améliorées. Une influence positive des tests sur les résultats des élèves est également observée par Bishop (1999), Wussman (2000) et Belfield (2000). Au plan de l’équité, Carnoy et Loeb (2002) constatent que les performances des élèves des minorités ont augmenté davantage encore que celles des Blancs, celles observées au niveau secondaire davantage que celles observées au niveau primaire. L’étude menée par Hanuschek et Raymond (2004) apparaît en revanche nettement moins optimiste en matière d’équité. Selon leurs résul-tats, les dispositifs semblent aussi avoir un effet positif sur la réussite scolaire moyenne, effet également variable selon les publics scolaires ; mais cette fois-ci, ce sont les élèves hispaniques qui progressent le plus et les élèves noirs qui progressent le moins. Ces résultats, qui donnent du crédit à la thèse pessimiste selon laquelle l’accountability pourrait creuser les écarts, traduisent simplement, selon les auteurs, le fait qu’il est très rare qu’une seule politique contribue à satisfaire plusieurs objectifs.

Un autre aspect important du dispositif concerne les modalités via les-quelles s’opère l’impact de l’accountabilty. Pour Hanushek et Raymond (2003, 2005), l’effet évaluation / publication d’information domine large-ment l’effet incitation proprement dit (et ses conséquences en termes de récompenses ou de sanctions). Une conclusion exactement inverse est avan-cée par Bishop et al. (2001) qui déduisent de leurs recherches que le « bâton s’avère plus efficace que la carotte » au sens où les sanctions pour performances insuffisantes semblent avoir plus d’effets que les récompenses pour bonnes performances. Enfin, contrairement aux deux études mentionnées, Harris et Herrington (2006) ne trouvent pas d’effets propres à la publication d’indica-teurs et soutiennent que les effets positifs de l’accountability sur la moyenne

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des résultats doivent être imputés essentiellement à l’existence d’examens de sorties, dont les implications ont été mises en exergue par la littérature des standards (Costrell, 1994) et la littérature institutionnelle (Wosmann, 2000). Le débat reste donc ouvert en ce qui concerne l’efficacité des dispo-sitifs d’accountability.

CONCLUSION

L’analyse économique des facteurs de performance scolaire reste très dis-persée et incomplète, témoignant de la difficulté à établir de façon fiable ce qui relie les différents facteurs identifiés et le niveau des résultats scolaires. Le recueil de meilleures données sur les résultats scolaires permettra proba-blement d’établir des liens plus étroits entre les facteurs de performance et les résultats pour les élèves. Néanmoins, nous pouvons tirer quelques ensei-gnements de ce tour d’horizon.

Tout d’abord, l’identification d’une grande variété de facteurs de perfor-mance que l’on peut, en première analyse, classer en deux catégories. La première regrouperait les facteurs susceptibles de soutenir la motivation et l’effort de l’enseignant (reconnaissance, prestige, liberté pédagogique, sa-laire, stabilité de l’emploi, carrière, retraite, intérêt pour les élèves, exercice d’une responsabilité…), tandis que la seconde regrouperait les conditions nécessaires pour que cet effort supplémentaire se traduise par un accroisse-ment de la performance scolaire (pilotage des établissements, management scolaire, responsabilités conférées, influence des enseignants sur les décisions de l’établissement, taille des classes, taux d’encadrement, taille des établis-sements, sécurité, qualité de l’environnement, support pédagogique, condi-tions matériels, caractéristiques des élèves, charge de travail, responsabilités, reconnaissances des compétences, confiance, autonomie, flexibilité...).

Ensuite, la mise en évidence, dans l’analyse économique, d’une rupture concernant la problématique. Tout en restant dans une logique de recherche de performance, les travaux ressortant du Nouveau Management Public vont s’interroger différemment sur les facteurs de performance. Il ne s’agit plus alors d’identifier des facteurs de performances réels ou potentiels mais de déplacer les leviers de la performance en déplaçant le pouvoir vers les usagers ou clients et la responsabilité vers les établissements scolaires (le rôle des pouvoirs publics consistant à créer le cadre de cette responsabilisation). Il y a là une rupture fondamentale avec les analyses en termes de fonction de production et d’offre.

Enfin, un enseignement majeur selon lequel la recherche de performance ne peut relever d’un principe unique et exclusif et passe par la capacité à

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combiner différents facteurs, par la complémentarité et la cohérence des mécanismes mis en place. Ces notions de complémentarité et de cohérence ont alimenté la réflexion sur la cohérence des choix stratégiques et organisa-tionnels des entreprises (Milgrom, Roberts, 1994), sur l’analyse des prix de transfert entre divisions d’une même firme (Holmström, Tirole, 1991) et sur la gestion des ressources humaines (Ichniowski et al., 1997). Elles peuvent probablement, de la même façon, utilement alimenter la réflexion en éco-nomie de l’éducation, évitant ainsi les pièges d’une conception mécaniste de la performance.

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