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Muller, Rhéologie, Vol. 11, 1-12 (2007) 1 L'apport des modèles d'émulsions en rhéologie des systèmes polyphasés R. Muller Laboratoire d’Ingénierie des Polymères pour les Hautes Technologies UMR 7165 Ecole de Chimie, Polymères et Matériaux, Université Louis Pasteur 25, rue Becquerel, 67087 Strasbourg cedex 2 Résumé : On discutera l’apport des modèles rhéologiques d’émulsions pour l’étude des systèmes macromoléculaires bi- phasiques, et plus particulièrement du modèle de Palierne (1991) qui prend en compte un comportement viscoélastiques des phases ainsi que des propriétés interfaciales complexes. On montrera en particulier qu’à l’aide de tels modèles il devient possible de caractériser une rhéologie d’interface à partir de mesures en volume, à condition que la morphologie soit connue. On illustrera également l’intérêt que peuvent présenter des mesures de déformation de gouttes in situ pour élaborer à la fois des modèles aux grandes déformations et une stratégie pour un meilleur contrôle de la morphologie dans des systèmes complexes. Mots-clé : Modèles d’émulsion, Viscoélasticité linéaire, Rhéométrie dynamique, Mélanges de polymères [Abridged English version on last page] 1. Introduction Jusqu’à il y a une quinzaine d’années, la plupart des auteurs qui se sont intéressés à la rhéologie des émulsions ont cherché à établir une loi de comportement prenant en compte l'orientation et la déformation des gouttes dispersées, avec comme objectif de décrire les propriétés non linéaires de ces systèmes, comme le comportement rhéofluidifiant en cisaillement ou les différences de contraintes normales. Le problème général est rendu très complexe par le couplage entre la rhéologie et la morphologie, qui est susceptible d’évoluer pendant l’écoulement. Les premiers travaux d'Einstein [1, 2] et de Taylor [3, 4] considéraient des inclusions, solides ou liquides, sphériques et indéformables pour lesquelles le comportement de l’émulsion reste newtonien. Fröhlich et Sack [5] pour des particules élastiques puis Oldroyd [6, 7] pour des gouttes visqueuses ont montré qu’en prenant en compte la déformabilité des inclusions, la loi de comportement devient viscoélastique. Frankel et Acrivos [8] puis Choi et Schowalter [9] ont obtenu de telles lois pour des émulsions diluées ou semi-diluées formées de phases newtoniennes. D’une écriture complexe, ces lois de comportement présentaient de plus de nombreuses limitations comme par exemple l’hypothèse de phases newtoniennes. En fait, leur utilisation est restée limitée jusqu’à ce que l’on se rende compte de l’intérêt particulier que présentent pour ce type de système les mesures en régime oscillatoire aux petites déformations [10] qui entrent dans le cadre de la viscoélasticité linéaire. En effet, pour ce type de sollicitation la morphologie à l'équilibre n’est pas modifiée par la mesure rhéologique et peut être caractérisée avant ou après l’essai [11]. Dans le même temps, le développement d’un modèle général d’émulsions viscoélastiques par Palierne [12, 13] a constitué une avancée remarquable. Limité à la viscoélasticité linéaire, mais prenant en compte la viscoélasticité des phases, ainsi qu’une rhéologie interfaciale complexe, ce modèle, couplé à des mesures de rhéométrie dynamique, a ouvert la voie à un large champ d’investigation, dépassant celui de la rhéologie des mélanges de polymères fondus. Après avoir qualitativement décrit les phénomènes impliqués et fixé quelques ordres de grandeur, on rappellera brièvement la forme du modèle de Palierne et on montrera qu’il comporte comme cas particuliers les principales lois d’émulsion et de mélange à l’état solide de la littérature. On passera ensuite en revue les principaux domaines dans lesquels il a été appliqué au cours des dernières années.

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Muller, Rhéologie, Vol. 11, 1-12 (2007) 1

L'apport des modèles d'émulsions en rhéologie des systèmes polyphasés

R. Muller Laboratoire d’Ingénierie des Polymères pour les Hautes Technologies UMR 7165

Ecole de Chimie, Polymères et Matériaux, Université Louis Pasteur 25, rue Becquerel, 67087 Strasbourg cedex 2

Résumé : On discutera l’apport des modèles rhéologiques d’émulsions pour l’étude des systèmes macromoléculaires bi-phasiques, et plus particulièrement du modèle de Palierne (1991) qui prend en compte un comportement viscoélastiques des phases ainsi que des propriétés interfaciales complexes. On montrera en particulier qu’à l’aide de tels modèles il devient possible de caractériser une rhéologie d’interface à partir de mesures en volume, à condition que la morphologie soit connue. On illustrera également l’intérêt que peuvent présenter des mesures de déformation de gouttes in situ pour élaborer à la fois des modèles aux grandes déformations et une stratégie pour un meilleur contrôle de la morphologie dans des systèmes complexes. Mots-clé : Modèles d’émulsion, Viscoélasticité linéaire, Rhéométrie dynamique, Mélanges de polymères

[Abridged English version on last page]

1. Introduction Jusqu’à il y a une quinzaine d’années, la plupart des auteurs qui se sont intéressés à la rhéologie des émulsions ont cherché à établir une loi de comportement prenant en compte l'orientation et la déformation des gouttes dispersées, avec comme objectif de décrire les propriétés non linéaires de ces systèmes, comme le comportement rhéofluidifiant en cisaillement ou les différences de contraintes normales. Le problème général est rendu très complexe par le couplage entre la rhéologie et la morphologie, qui est susceptible d’évoluer pendant l’écoulement.

Les premiers travaux d'Einstein [1, 2] et de Taylor [3, 4] considéraient des inclusions, solides ou liquides, sphériques et indéformables pour lesquelles le comportement de l’émulsion reste newtonien. Fröhlich et Sack [5] pour des particules élastiques puis Oldroyd [6, 7] pour des gouttes visqueuses ont montré qu’en prenant en compte la déformabilité des inclusions, la loi de comportement devient viscoélastique. Frankel et Acrivos [8] puis Choi et Schowalter [9] ont obtenu de telles lois pour des émulsions diluées ou semi-diluées formées de phases newtoniennes.

D’une écriture complexe, ces lois de comportement présentaient de plus de nombreuses limitations comme par exemple l’hypothèse de phases newtoniennes. En fait, leur utilisation est restée

limitée jusqu’à ce que l’on se rende compte de l’intérêt particulier que présentent pour ce type de système les mesures en régime oscillatoire aux petites déformations [10] qui entrent dans le cadre de la viscoélasticité linéaire. En effet, pour ce type de sollicitation la morphologie à l'équilibre n’est pas modifiée par la mesure rhéologique et peut être caractérisée avant ou après l’essai [11].

Dans le même temps, le développement d’un modèle général d’émulsions viscoélastiques par Palierne [12, 13] a constitué une avancée remarquable. Limité à la viscoélasticité linéaire, mais prenant en compte la viscoélasticité des phases, ainsi qu’une rhéologie interfaciale complexe, ce modèle, couplé à des mesures de rhéométrie dynamique, a ouvert la voie à un large champ d’investigation, dépassant celui de la rhéologie des mélanges de polymères fondus.

Après avoir qualitativement décrit les phénomènes impliqués et fixé quelques ordres de grandeur, on rappellera brièvement la forme du modèle de Palierne et on montrera qu’il comporte comme cas particuliers les principales lois d’émulsion et de mélange à l’état solide de la littérature. On passera ensuite en revue les principaux domaines dans lesquels il a été appliqué au cours des dernières années.

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2 Muller, Rhéologie, Vol. 11, 1-12 (2007)

2. Orientation et relaxation de forme d'une goutte au sein d’une matrice L'orientation en régime permanent d'une goutte initialement sphérique placée dans un écoulement à taux de cisaillement constant résulte de l'équilibre entre la contrainte de cisaillement ηm γ& dans la matrice, qui tend à déformer la goutte, et une contrainte interfaciale de l'ordre de α/R, qui tend à restaurer sa forme sphérique d’équilibre. ηm est la viscosité de la matrice, R le rayon à l'équilibre de la goutte et α la tension interfaciale. On définit le nombre capillaire Ca comme le rapport adimensionnel de ces deux contraintes:

αγη RCa m&

= (1)

Pour des liquides newtoniens, Taylor [4] puis Grace [14] ont montré que les régimes de déformation dans différentes géométries d’écoulement dépendaient de Ca et du rapport des viscosités de la phase dispersée et de la matrice p:

m

dpηη = (2)

un régime stationnaire n’existant que si Ca est inférieur à une valeur critique Cac, fonction de p. Dans ce cas, la déformation D de la goutte vaut:

(p)CaBLBLD f ×=

+−

= (3)

où L et B sont les grands et petits axes de l’ellipsoïde (Fig. 1).

R

Figure 1. Déformation d'une goutte initialement sphérique

dans un écoulement de cisaillement.

2.1 Temps de relaxation caractéristique En considérant que la déformation d'une goutte doit être fonction du rapport d'un temps caractéristique de l'écoulement (1/γ& ) et d'un temps caractéristique de relaxation λd, ce dernier prend la forme:

)( pgRmd ×=

αηλ (4)

où g(p) est une fonction du rapport de viscosités proche de l’unité. Un rapide calcul montre alors que

pour un système où ηm ≈ 105 Pa.s, α ≈ 10-2 N/m et R ≈ 5 µm, valeurs typiques d’un mélange de polymères fondus, le temps de relaxation λd est de l'ordre de 50 s. Lorsque cette valeur est suffisamment grande par rapport au temps de relaxation propre des phases, la relaxation de forme des inclusions se manifeste par un plateau spécifique apparaissant à basse fréquence sur la courbe du module dynamique élastique G'(ω). On a pu vérifier par ailleurs, par des mesures optiques, que ce temps correspondait bien à la relaxation de forme des gouttes [15, 16].

2.2 Module associé

Dans le cas d'une déformation uniaxiale ε appliquée rapidement (Ca >> 1) à une émulsion isovisqueuse (p = 1), on peut aisément se convaincre que la variation d'aire interfaciale ∆A contribue directement au module élastique macroscopique : aux temps courts, le milieu se comporte comme un milieu homogène et la déformation des gouttes dispersées est alors égale à celle imposée. La variation d'aire pour une goutte sera donc:

22

58 επ RA =∆ (5)

On peut en déduire la variation d'énergie interfaciale par goutte α ∆A et celle par unité de volume :

2

3

22

56

345

8 εφα

π

φεαπRR

R =× (6)

où φ est la fraction volumique de phase dispersée. L’expression (6) peut être identifiée à une énergie mécanique élastique par unité de volume '

∞E ε2/2 où '∞E est un module élastique instantané. Ici :

Φ≈=∞

g

mηR

φα 5

12 ' (7)

On trouverait, pour les valeurs numériques précédentes, un module associé à la relaxation de forme des gouttes de l'ordre de 400 Pa, valeur mesurable avec une bonne précision compte tenu de la sensibilité des rhéomètres actuels.

3. Quelques modèles d’émulsions

On s'intéresse à une dispersion d’inclusions sphériques à l'équilibre dans une matrice. Comme indiqué précédemment, l'essai le plus couramment utilisé en viscoélasticité linéaire est un écoulement oscillatoire à faible amplitude: sous l'effet de la déformation sinusoïdale appliquée, les inclusions de la phase dispersée se déforment périodiquement et

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Muller, Rhéologie, Vol. 11, 1-12 (2007) 3

cette variation de forme contribue à la contrainte sinusoïdale mesurée. Suivant le rapport de viscosités (ou de modules) des phases et suivant la taille des inclusions, leur déformation n'est pas nécessairement égale en amplitude et en phase à la déformation imposée.

Les modèles d'émulsion permettent de préciser cette dépendance ainsi que la contribution de la déformation de l'interface aux propriétés rhéologiques du mélange.

3.1 Modèle de Taylor Dans le modèle de Taylor [3], le mélange est supposé dilué (φ << 1), les phases newtoniennes et les gouttes indéformables, ce qui équivaut à considérer une tension interfaciale infinie. Il existe cependant un écoulement à l'intérieur des gouttes qui vérifie la continuité des vitesses à l'interface. Le modèle prédit dans ce cas que le mélange se comporte comme un liquide newtonien de viscosité :

⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛++

+=22251

pp

m φηη (8)

On s'attend à ce que ce modèle ne puisse être appliqué que dans la limite des très faibles fréquences, où les deux phases deviennent newtoniennes et où Ca → 0. Pour des gouttes très visqueuses (p → ∞), il n'y a plus d'écoulement à l'intérieur des gouttes et on retrouve la loi d'Einstein η = ηm(1 + 2,5 φ) pour une suspension diluée de sphères dures.

3.2 Modèle d’Oldroyd Le cas d'un mélange dilué de phases newtoniennes mais où les gouttes sont déformables a été considéré par Oldroyd [6]. En viscoélasticité linéaire, ce modèle est équivalent à un modèle de Jeffreys (amortisseur η2 en parallèle avec un élément de Maxwell : ressort G1 en série avec un amortisseur η1) caractérisé par un temps de relaxation λ1 et un temps de retard λ2, et dont la viscosité complexe s’exprime comme :

( )1

221

*

11 )(

λωλωηηωη

ii

++

+= (9)

Au premier ordre en concentration, le modèle d'Oldroyd fournit l'expression suivante des 3 paramètres:

2225121 ⎟⎟

⎞⎜⎜⎝

⎛++

+=+pp

m φηηη (10)

( )( )

( ) ( )( )( )

1321619

103 1

532

1616161921 ⎟⎟

⎞⎜⎜⎝

⎛++

+−

+++

=pp

ppppR m φ

αηλ

(11)

( )( )

( ) ( )( )( )

1321619

5 1

532

16161619 22 ⎟⎟

⎞⎜⎜⎝

⎛++

++

+++

=pp

ppppR m φ

αηλ

(12)

Il faut surtout noter ici qu'un modèle d'émulsion qui prend en compte la déformabilité des gouttes prédit un comportement viscoélastique de l'émulsion, même lorsque les phases sont purement newtoniennes.

On vérifie par ailleurs que la viscosité limite donnée par le modèle d'Oldroyd est identique à celle du modèle de Taylor et que les temps caractéristiques sont bien de la forme (4) avec de plus une dépendance en concentration.

Lorsque l'on s'intéresse aux mélanges de polymères, plusieurs hypothèses effectuées dans le cadre du modèle d'Oldroyd ne sont plus valides. En effet dans beaucoup de cas : - les deux phases sont elles-mêmes viscoélastiques ; - la dispersion en taille des gouttes n'est pas monodisperse ; - la concentration en phase dispersée est importante ; - la présence d'un copolymère aux interfaces confère à celles-ci des propriétés rhéologiques complexes.

3.3 Modèle de Palierne Le modèle de Palierne [12], largement utilisé depuis une dizaine d'années, en particulier pour les mélanges de polymères, étend celui d'Oldoyd aux mélanges concentrés dont les phases sont viscoélastiques, en prenant de plus en compte une polydispersité en taille et en composition (plusieurs types de phases dispersées dans une même matrice). Par ailleurs, dans la forme la plus complète du modèle, l'interface est caractérisée par des modules surfaciques de dilatation et de cisaillement fonction de la fréquence, qui peuvent rendre compte de la présence d'un agent émulsifiant comme un copolymère. L'hypothèse fondamentale du modèle reste que les domaines dispersés sont sphériques à l'équilibre et que les déformations sont faibles. Le modèle de Palierne est donc uniquement applicable en viscoélasticité linéaire.

Dans sa forme simplifiée, où n'existe qu'un type de phase dispersée et où l'interface est caractérisée par une tension interfaciale α constante, le modèle de Palierne exprime le module complexe du mélange G*b(ω) = G'b(ω) + i G"b(ω) à une fréquence donnée

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4 Muller, Rhéologie, Vol. 11, 1-12 (2007)

ω en fonction des modules complexes G*m(ω) de la matrice et G*d(ω) de la phase dispersée pris à la même fréquence :

∑∑

+=

),(21),(31

)(*)(*ii

ii

mb RHRH

GGωφωφ

ωω (13)

avec :

)(40)1619)(32(

)25(4)1619)(( ),(

******

******

md

i

mdmd

md

i

mdmd

i

GGR

GGGG

GGR

GGGGRH

++++

+++−= α

α

ω

(14)

L'expression (14) montre que, pour chaque rayon de goutte Ri, on peut calculer le paramètre H à une fréquence donnée ω si l’on connaît d'une part les modules complexes (soit G' et G") des deux phases à cette même fréquence et d'autre part la tension interfaciale. Si la morphologie à l'équilibre est connue, on connaît également la fraction en volume φi des gouttes de phase dispersée de rayon Ri. L'expression (13) montre que l'on peut dès lors calculer le module complexe du mélange sans aucun paramètre ajustable.

Il est intéressant de noter qu'un certain nombre de modèles connus peuvent être retrouvés comme cas particulier du modèle de Palierne.

Lorsque les gouttes sont supposées indéformables (α → ∞) et que les phases sont newtoniennes (G*m = i ωηm, G*d = i ωηd), le mélange redevient purement visqueux :

Cst)1(10

25 ),( =+

+=

ppRH iω (15)

et :

ωηω i )(* =bG avec ⎟⎟⎟⎟

⎜⎜⎜⎜

++

++

+=

55251

5525

231

pppp

m

φ

φηη (16)

La relation (16) est la généralisation du modèle de Taylor (8) aux concentrations finies. On peut également vérifier qu'on retrouve bien le modèle d'Oldroyd (Eqs. (9) à (12)) en effectuant un développement au premier ordre en concentration des relations (13) et (14), en prenant toujours G*m = i ωη m, G*d = i ωηd et α finie.

Les hypothèses de départ du modèle de Palierne n'empêchent pas de l'appliquer dans le cas où une ou les deux phases seraient solides et non liquides: on retrouve effectivement le modèle de Fröhlich et Sack

[5] pour des sphères élastiques dans une matrice visqueuse, le modèle de Kerner [17] pour des sphères élastiques dans une matrice élastique et le modèle de Dickie [18] pour des sphères viscoélastiques dans une matrice viscoélastique :

)(232)(332)()(

****

******

mdmd

mdmdmb GGGG

GGGGGG−−+−++

=φφωω (17)

Pour retrouver les modèles de Kerner et de Dickie, la tension interfaciale est négligée dans les relations (13) et (14), et la déformation est supposée s'effectuer à volume constant (ν = 0,5) dans les relations de Kerner et Dickie.

3.4 Confrontation avec l’expérience Malgré une apparente complexité des équations, le modèle de Palierne est particulièrement simple à utiliser. En effet, pour calculer les modules dynamiques G'(ω) et G"( ω) d'un mélange dans une certaine plage de fréquence, il suffit de connaître: - les modules dynamiques des deux constituants dans la même plage de fréquences, - la morphologie du mélange (ou le rayon moyen en volume), - la tension interfaciale.

Par ailleurs, on a pu vérifier [13] qu'on pouvait avec une bonne approximation remplacer dans les relations (13) et (14) la distribution réelle en tailles {φi, Ri} par une distribution monomodale avec le rayon moyen en volume Rv :

),(21),(31)()( **

v

vmb RH

RHGGωφωφωω

−+

= (18)

∑∑=

i

ii

v

RR

φφ

(19)

ce qui résulte du fait que les gouttes de plus gros diamètre contribuent davantage au module complexe du mélange. L'accord avec l'expérience que l'on peut ainsi obtenir est illustré sur les Figures 2 et 3 pour des mélanges de polyoxyéthylène (POE) à l'état fondu dans du PDMS où le rayon moyen en volume a pu être précisément déterminé en récupérant les gouttes de POE solidifié après l’essai, et pour lequel la tension interfaciale était connue (α ≈ 6 mN/m). On constate un très bon accord, largement confirmé par ailleurs dans la littérature [19-21], sur tout le domaine de fréquence, le modèle prenant en compte à la fois la viscoélasticité propre aux phases et la contribution élastique provenant de la relaxation de forme des gouttes dispersées. Bien qu’initialement

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Muller, Rhéologie, Vol. 11, 1-12 (2007) 5

M atrice

G’

G’’

Figure 2. Modules dynamiques G' et G" de mélanges

PDMS/POE 92,5/7,5 et 85/15 à 70°C. Symboles: valeurs mesurées, traits pleins: valeurs calculées à partir des Eqs.

(13) et (14), traits pointillés: matrice.

Matrice

Mélanges

Figure 3. Représentation Cole-Cole de la viscosité

complexe en échelles linéaires des données de la Figure 2.

développé pour décrire le comportement de mélanges de polymères à l’état fondu, le champ d’application du modèle d’émulsions viscoélastiques a été étendu avec succès à d’autres systèmes comme les polymères cristaux liquides [22], des fluides alimentaires [23] ou des matériaux hybrides organiques/inorganiques [24].

4. Détermination des propriétés interfaciales à partir de mesures rhéologiques

On a vu comment un modèle d’émulsion permet de calculer les propriétés viscoélastiques linéaires à partir des propriétés des phases, de la morphologie et de la tension interfaciale. Si, inversement, le module complexe a été mesuré en fonction de la fréquence pour un mélange dont la morphologie et les propriétés viscoélastiques des phases sont connues,

la tension interfaciale peut en principe être déterminée par ajustement de sa valeur dans les relations (13) et (14), comme le montre la simulation sur la Figure 4. Cette méthode est de plus en plus utilisée en complément ou à la place des méthodes classiques, généralement plus délicates à réaliser à haute température (goutte pendante, tournante, rétraction de fibre, instabilité filamentaire) [20, 25-27]. De même, une estimation de la morphologie (ou du moins le rayon moyen en volume) peut être obtenue si la tension interfaciale est connue [28].

α=1 α=2

α=5 α=20

Figure 4. Simulations des modules G' et G" de mélanges à partir du modèle de Palierne. Les phases sont des liquides

de Maxwell à un temps de relaxation (λm = λd = 0,1s) R = 1µm, φ = 0,2, ηm = ηd = 106 Pa.s, α en mN/m.

Cette détermination de α ou de Rv à partir de mesures en viscoélasticité linéaire est cependant soumise à la condition que le plateau à basses fréquences sur G' associé à la relaxation de forme soit mesurable : il doit en particulier apparaître dans un domaine de fréquences accessible expérimentalement et dans lequel il n'est pas masqué par la relaxation des phases. Le module qui lui est associé doit être par ailleurs suffisamment élevé. Les simulations de la Figure 5 montrent clairement que ces conditions imposent des limites, en particulier pour des inclusions plus visqueuses que la matrice et donc peu déformées (typiquement, p doit rester inférieur à 10).

Certaines études [29, 30] ont montré que lorsqu'un copolymère dibloc A-B est rajouté à un mélange A/B, un mécanisme de relaxation secondaire vient s'ajouter à celui de la relaxation de forme avec des temps caractéristiques nettement supérieurs. La

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6 Muller, Rhéologie, Vol. 11, 1-12 (2007)

Figure 6 montre schématiquement les spectres de relaxation pour un tel système.

p=100

p=10

p=1 p=0,1

Figure 5. Simulations des modules G' et G" de mélanges à partir du modèle de Palierne. Les phases sont des liquides

de Maxwell à un temps de relaxation (λm = λd = 0,1s) R = 1µm, φ = 0,2, ηm = ηd = 106 Pa.s, α en mN/m.

λ d

λ β

Lo

g(H

)

L o g ( τ )

λ d

λ β

Lo

g(H

)

L o g ( τ ) Figure 6. Spectre de relaxation H(τ) pour un

homopolymère (trait plein) et un mélange A/B sans (tirets) et avec (pointillés) copolymère dibloc.

L'existence d'un deuxième mécanisme de relaxation (λβ) distinct de celui de relaxation de forme (λd), correspond clairement à la présence de copolymère à l'interface. La position et l’amplitude de ce pic basse fréquence dépend de la concentration en copolymère : plus la concentration en copolymère augmente, plus le temps de relaxation caractéristique λb diminue et plus l’amplitude du pic augmente.

Le modèle de Palierne dans sa forme complète [13] considère que l'interface possède un module de

dilatation comprenant une composante constante (la tension interfaciale) et une composante complexe β' dépendant de la fréquence et permettant de rendre compte de la cinétique de diffusion d'un copolymère situé à l'interface (effet Marangoni). De plus, un copolymère de longueur de blocs suffisante peut s'enchevêtrer et conférer à l'interface une résistance au cisaillement, le module de cisaillement interfacial associé β" étant également une fonction complexe de la fréquence. Certains résultats expérimentaux comme ceux représentés sur la Figure 6 ont ainsi pu être modélisés en incluant dans le modèle de Palierne un module de cisaillement interfacial β"0 réel et indépendant de la fréquence. L'ajustement de α et β"0 aux courbes expérimentales a montré que la tension interfaciale diminuait avec la concentration en copolymère (ce qui est couramment admis), alors que le module de cisaillement interfacial augmentait (ce qui pouvait également être attendu) [29].

L’intérêt que présente une caractérisation par voie rhéologique de la présence de copolymère aux interfaces s’explique par la perspective de mieux contrôler la coalescence et donc la morphologie de mélanges immiscibles [28, 31, 32] et a suscité de nombreux travaux au cours des dernières années, en particulier dans des systèmes où ces copolymères sont obtenus in situ par greffage [33].

La mise en évidence des relaxations secondaires caractéristique du copolymère à l’interface reste cependant très délicate et nécessite des systèmes modèles pour lesquels les relaxations des phases, des gouttes et de l'interface peuvent être clairement séparés. Très peu de résultats expérimentaux fiables sont ainsi disponibles à ce jour. Il n'en demeure pas moins que dans le cadre du modèle de Palierne, l’étude par viscoélasticité linéaire de mélanges hétérogènes pourrait être une voie prometteuse pour caractériser la rhéologie d'interfaces complexes.

5. Déformation de gouttes en écoulement

Dans la limite de la viscoélasticité linéaire (petites déformations), on peut calculer la déformation d’une inclusion initialement sphérique lorsque la matrice dans laquelle elle est noyée est soumise à une déformation connue loin de la goutte. Ce résultat permet alors en principe de remonter aux propriétés interfaciales à partir d’une mesure expérimentale de la déformation d’une inclusion sous écoulement. De nombreux travaux tant théoriques qu’expérimentaux ont été publiés dans ce domaine [34-38], dont une présentation exhaustive dépasserait le cadre de cet article.

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Muller, Rhéologie, Vol. 11, 1-12 (2007) 7

Nous nous limiterons, en repartant du modèle linéaire d'émulsion le plus général (modèle de Palierne), à donner l’expression de la déformation εd(t) d'une goutte dans une matrice soumise à une déformation imposée ε(t) pour un régime harmonique à la fréquence ω. La Figure 7 représente schématiquement cet essai pour la déformation uniaxiale d’une goutte de diamètre D0 à l’équilibre.

déformation de la goutte

(1+εd) D0déformation de la matrice

loin de la goutte

(1+ε) L0

Figure 7. Déformation uniaxiale d'une goutte noyée dans

une matrice subissant elle-même une déformation uniaxiale.

Le modèle permet d’exprimer aisément le rapport de la déformation complexe de la goutte εd

exp[i(ω t+δ)] sur celle de la matrice ε exp[iω t] :

( )( )( ) ( )******

***

*

*

40161932

16195 mdmdmd

mdmd

GGR

GGGG

GGG

++++

+= αε

ε

(20)

La déformation de la goutte varie sinusoïdalement au cours du temps mais est en général différente en amplitude et déphasée par rapport à celle de la matrice. Pour des phases newtoniennes, cette expression devient :

( )( )( )

⎟⎠⎞

⎜⎝⎛

+−=

⎟⎟⎟⎟

⎜⎜⎜⎜

+++

+−

+=

∞ ωτ

αη

ωεε

iA

pppRip m

111

1161932

401

1132

5 *

*d

(21)

Pour un écoulement à taux de déformation constant, on obtient la déformation de la goutte au cours du temps en prenant la transformée de Fourier du résultat précédent :

⎟⎟⎠

⎞⎜⎜⎝

⎛−=

•ττεεt

d eAt 1)(

⎥⎦

⎤⎢⎣

⎡++

+−−

++

= ))32)(1619(

2220exp(1216161619

ppp

RtR

pp

m

m

ηα

αηε&

(22)

La relation (22) fait clairement apparaître deux comportements limites : aux temps longs (typiquement très supérieurs au temps de relaxation de forme de la goutte [5]), la déformation tend vers une limite :

αηεε R

pp m

d

&2 16161619

++

=∞ (23)

Ce résultat est l'équivalent en élongation de la relation obtenue par Taylor [4] en cisaillement :

16161619

++

=+−

ppCa

BLBL (24)

On note ici que le modèle de Palierne prédit toujours l'existence d'une forme d'équilibre stable de la goutte en écoulement, quelle que soit la valeur du nombre capillaire. Ce résultat provient des hypothèses de linéarité du modèle et ne correspond à l'expérience que pour des valeurs de Ca inférieures à Cac, soit typiquement 0,5 en cisaillement pour p voisin de l'unité.

Aux temps courts (typiquement très inférieurs au temps de relaxation de forme λd), la déformation de la goutte et la déformation imposée ( tεε & = ) sont affines:

325 +

=p

td εε & (25)

Une conséquence intéressante de la relation (25) est la variation avec p du rapport des déformations goutte/matrice. On remarque que les deux déformations ne sont égales que lorsque p = 1 (un système isovisqueux où les effets de tension interfaciale sont négligeables se déforme de façon homogène). Lorsque la goutte est plus visqueuse que la matrice (p > 1), elle se déforme moins qu'elle (εd < ε). De façon plus inattendue, une goutte moins visqueuse que la matrice (p < 1) se déformera davantage, avec une limite de 5/3 pour le rapport des déformations lorsque la viscosité de la goutte tend vers zéro. Ce résultat a été vérifié expérimen-talement pour des mélanges de polymères en écoulement élongationnel uniaxial jusqu'à des déformations de l'ordre 400 % [39-41].

Une autre méthode en plein développement consiste à augmenter l'amplitude des oscillations de déformation dans un essai dynamique sinusoïdal. On sort ainsi du domaine viscoélastique linéaire, tout en

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8 Muller, Rhéologie, Vol. 11, 1-12 (2007)

limitant la déformation maximale subie par l'échantillon (amplitude γ0 de la déformation de l'ordre de quelques unités), contrairement à ce qui se passe dans un écoulement permanent. Dans le cas particulier des mélanges de polymères, on pourrait ainsi concevoir un essai où l'amplitude de la déformation ne conduirait pas aux phénomènes de rupture et de coalescence, ce qui permettrait de travailler avec une morphologie constante et connue pendant tout l'essai, mais serait tout de même suffisante pour faire apparaître des effets non linéaires.

De façon générale, lorsque dans un essai oscillatoire l'amplitude de la déformation dépasse le seuil correspondant à la linéarité, la réponse en contrainte reste périodique mais n'est plus sinusoïdale. On montre facilement qu'elle peut se mettre sous la forme d'une série de Fourier où n'interviennent que les harmoniques impaires [42]. On caractérise alors la réponse non-linéaire du matériau par la valeur des rapports d'intensité des harmoniques sur celle de la fondamentale (I3/I1, I5/I1 ...) en fonction de l'amplitude de la déformation. Cette méthode est encore appelée rhéologie par transformée de Fourier (FT-R) puisque la transformée de Fourier de la réponse en contrainte conduit à une suite discrète de pics aux fréquences ω, 3 ω, 5 ω ... Il s’agit d’une méthode particulièrement riche et prometteuse, puisqu’elle sollicite le matériau hors du régime linéaire tout en conservant la morphologie.

Des mesures de contrainte et de déformation de gouttes en cisaillement en régime harmonique ont ainsi été réalisées à la fois aux petites [43] et aux grandes déformations [44]. Contrairement au cas d’une déformation élongationnelle, des divergences par rapport au modèle d’émulsion apparaissent pour des grandes déformations en cisaillement. Une des origines possibles pour ces différences pourrait être un glissement à l’interface, phénomène souvent évoqué dans les mélanges de polymères mais jusqu’ici jamais mis en évidence de façon indiscutable [45]. Le glissement serait favorisé lorsque la contrainte à l’interface est essentiellement une contrainte de cisaillement, et peu probable dans une déformation en élongation où la contrainte à l’interface est essentiellement une contrainte de traction ou de compression [46]. Des mesures de déformation de goutte couplées à un modèle d’émulsion constitueraient une approche élégante pour apporter une réponse à la question de l’existence d’un glissement sur des interfaces liquide-liquide.

5. Perspectives et limitations

Elles concernent tout d’abord l’étude de morphologies plus complexes, correspondant davantage à celles de matériaux industriels. On peut citer le cas particulier d’une morphologie de type "salami" où des domaines sphériques A sont dispersés dans une matrice B, chaque domaine A contenant lui-même des inclusions sphériques B. Il s’agit par exemple du cas classique du polystyrène choc. Cette situation peut parfaitement être décrite en régime linéaire puisqu’il suffit d’évaluer les propriétés des inclusions principales A contenant des sous-inclusions B par une première application du modèle d’émulsion, puis d’évaluer les propriétés de la matrice B contenant les inclusions principales en appliquant une seconde fois le modèle [47].

Une des hypothèses fondamentale des modèles d’émulsion n’est par contre plus vérifiée lorsque la morphologie devient de type co-continue. Expérimentalement [48, 49], on observe en général pour de telles morphologies une loi de puissance à basse fréquence plutôt qu'une relaxation classique caractérisée par un temps terminal (G' ∼ ω2 G’' ∼ ω1 à basse fréquence). Qualitativement, cette loi de puissance a été attribuée à la coexistence dans une morphologie co-continue de domaines ayant des rayons de courbure à toutes les échelles. Une autre spécificité des morphologies co-continues est qu'elles sont susceptibles d'évoluer spontanément par coalescence vers une séparation de phases macroscopique.

La modélisation des propriétés rhéologiques de morphologies plus complexes et de leur évolution sous écoulement, procède nécessairement d’une approche entièrement différente. Dans le modèle de Doi-Ohta [50], la loi de comportement décrit l’évolution au cours du temps de l’aire interfaciale et d’un tenseur caractéristique de l’orientation de l’interface. On peut également mentionner les travaux de Lee et Park [51] qui ont pris en compte dans un modèle de type Doi-Ohta des effets propres à la viscoélasticité des phases.

Enfin, une autre limitation des modèles d'émulsion apparaît lorsque l'on augmente la concentration des domaines dispersés dans une matrice et susceptibles de s'agréger entre eux. Les polymères renforcés aux chocs, où l’on a dispersé dans une matrice polymère des particules de latex caoutchoutiques sur lesquelles on a greffé en surface des chaînes de même nature que la matrice, constituent un exemple typique de ce type de système.

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Muller, Rhéologie, Vol. 11, 1-12 (2007) 9

Les relations (13) et (14) permettent de calculer mathématiquement les propriétés d'une émulsion, même lorsque φ → 1. Un tel calcul n'a pourtant pas de sens physique car seules les interactions hydrodynamiques qui s'exercent entre particules voisines à travers la matrice sont prises en compte par le modèle. Le cas où les particules forment des agrégats sort donc complètement du cadre des modèles d'émulsion, et en particulier de celui du modèle de Palierne [19].

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[Abridged English version]

Introducing the Palierne model into the rheological studies on polymer blends has represented a major breakthrough in our understanding of the structure-properties relationships of these systems. As a matter of fact, this model allows to account rigorously for the viscoelastic nature of the phase polymers, for finite concentration effects, particle size distribution and interfacial tension. For uncompatibilized blends, the agreement with linear viscoelastic data has been found very satisfactory and allows one to use dynamic mechanical measurements in the melt for the determination of interfacial tension or morphological parameters. The experimental method is easy and there is no requirement for special conditioning of the blend samples. For compatibilized blends, recent data demonstrate that rheological data can be sensitive to interfacial relaxation phenomena, like variations of local concentration of compatibilizer due to drop deformation, or the existence of a surface shear modulus at the interface. Emulsion models also give predictions for the deformation of phases during steady or time-dependent flows. The most striking result is that data in uniaxial elongational flow at relatively high particle deformation are in very good agreement with linear models like those of Taylor or Palierne. Large amplitude dynamic shear experiments are a promising alternative to account for non-linear effects of the drop deformation processes, by keeping a good control of the blend morphology. The case of aggregating particles, or systems with very small interparticle distances where direct interactions between dispersed particles may occur, does not fall within the assumptions of the Palierne emulsion model.

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