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28 CCE International — n° 551 — août/septembre 2010 Dossier coordonné par Madeleine Barbier Decrozes et Didier Guérin, CCE Fiable, efficace, rassurant quand tout semble incertain, le marché australien fait figure d’exception en ces périodes troublées. C’est l’un des rares pays riches où croissance économique et stabilité politique marchent d’un même pas. C’est aussi une terre traditionnellement accueillante aux entreprises. Les projets y fourmillent mais les particularités aussi. Visite guidée. L’Australie surfe sur la crise MARCHÉS Australie

L'Australie surfe sur la crise / sept-oct 2010

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28 CCE International — n° 551 — août/septembre 2010

Dossier coordonné par Madeleine Barbier Decrozes et Didier Guérin, CCE

Fiable, efficace, rassurant quand tout sembleincertain, le marché australien fait figured’exception en ces périodes troublées. C’est l’un des rares pays riches où croissance économique et stabilité politique marchent d’un même pas. C’est aussi une terre traditionnellement accueillante aux entreprises.Les projets y fourmillent mais les particularitésaussi. Visite guidée.

L’Australiesurfe surla crise

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En premier lieu, la récession a été évitée en 2009. Certes, avec une nuance tech-nique : il n’y a eu qu’un seul trimestre de croissance négative au début del’année. Cela n’a pas empêché l’économie d’enregistrer sa dix-neuvièmeannée consécutive d’expansion avec une confortable augmentation du Pib

de 2,7 %. Le cycle devrait continuer en 2010 avec une croissance de 3 % et3,75 % l’année prochaine. Quant au chômage, il devrait passer en dessous des5,3 % actuels.Pourtant si la crise a été évitée en 2009, cela ne fut pas à faible coût. En effet,les autorités de Canberra ont réagi vite et fort, en produisant un solide plan derelance de 52 milliards de dollars australiens (36 milliards d’euros), soit envi-ron 2,5 % du Pib : un peu moins que celui de la Chine (3 %), mais beaucoupplus que le plan français (0,75 %).Il faut dire que l’Australie avait les moyens, car sa dette extérieure avait été éli-minée, suite à plusieurs années d’excédent budgétaire. Le plan de relance a toutchangé : déficit budgétaire et endettement sont revenus, mais dans des normesenviables pour les pays de l’OCDE. La part de la dette publique devrait monterà 18 % du Pib cette année (contre 84 % en France et 125 % en Grèce) et le défi-cit budgétaire se situera à 6 % du Pib (contre 8 % en France et 12,7 % en Grèce).Le retour à l’excédent budgétaire est prévu pour 2013.Par ailleurs, un compromis se fait avec une inflation nominale et sous-jacentequi se maintient entre 2 et 3 %, un taux que la banque centrale australiennen’a pas l’intention de laisser déraper. C’est ainsi que les 22 millions d’Australiensont vu les taux d’intérêt augmenter six fois en huit mois pour arriver à un tauxde base de 4,5 % en mai dernier.Alors, comment expliquer ce miracle australien ? Une réponse sommaire tienten un mot : la Chine, dont l’inexorable appétit en matières premières vient senourrir dans le « Lucky country ». Mais, la réalité est plus subtile.L’Australie n’aura cependant pas droit au rang de meilleur élève de la classesans avoir résolu de lourds problèmes : une fiscalité encore élevée, un endette-ment des ménages record et une pollution par tête d’habitant la deuxième dumonde après les Etats-Unis.La section Australie des conseillers du Commerce extérieur de la France vouspropose d’examiner à partir d’expériences vécues les performances et challengesdu pays down-under.Bonne lecture. �

Didier Guérin, CCE,président CEO, Media Convergence Asia-Pacific©

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Le bon élève de la classe du G20

« Quelle crise ? »Telle fut la réaction d’un banquier français à Sydney

à la suite de la publication d’un rapport récentde Citigroup annonçant que l’Australie sera le premier

pays à sortir de la crise financière. En effet,les performances de l’économie australienne

ont de quoi apporter plus qu’un soupçon de jalousieaux autres membres du G20.

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Australie

« Un marché en croissance, rentable,solvable et surtout lisible »

Interview de Didier Mahout, président de la section des CCE, dg Australie et Nouvelle-Zélande BNP Paribas

CCE International : L’Occident sort en trèspetite forme de la crise alors que l’Australieaffiche une santé insolente. Pourquoi ?Didier Mahout : Les choses sont, ici, effec-tivement assez différentes de ce qui prévauten Occident. A vrai dire, l’Australie n’est pasvéritablement entrée dans la crise. Elle a leprivilège de n’avoir connu qu’un seul tri-mestre de, très légère (-0,8 %), récession éco-nomique pendant toute la période de crise :le quatrième trimestre 2008. Au cours del’année 2009, qui fut l’année cyclonique pourl’économie mondiale, l’Australie a affiché une

progression de son Pib de 1,5 %. Celle qui futl’annus horribilis au plan mondial fut la dix-neuvième année consécutive de croissancede l’Australie. Je vois deux grandes raisonsà cet état de fait, la première tient à la naturedu système bancaire australien, la secondeau basculement du pays vers l’Asie. Les quatregrandes banques locales1, sur lesquelles repo-sent tout le système bancaire, sont restéesassez domestiques et ont, de ce fait, été peuexposées aux risques internationaux et trèsmarginalement exposées au marché améri-cain. Ici on ne parle pas de subprime, ni deproduits toxiques…

CCE : Ni de produits sophistiqués ?D. M. : Oui, ces banques sont relativementpeu sophistiquées, en tout cas, elles l’étaientpeu au début d’une crise dont elles ont jus-tement tiré profit pour essayer de diversifier

leurs produits, notamment en récupérant descadres de grandes banques étrangères obli-gées de réduire leur masse salariale.

CCE : L’aspirateur à talents a beaucoup fonctionné ?D. M. : Enormément et les quatre banqueslocales sont les grandes gagnantes de la crise.Les banques internationales jusque-là pré-sentes en Australie ont toutes, à des titresdivers, rectifié leur dispositif mondial, y com-pris sur le marché australien. Les Américainsont très rapidement réduit significativementleur présence et certaines de leurs banquesont définitivement quitté l’Australie.L’aspirateur à talents a alors fonctionné dedeux façons : les banques locales ont récu-péré les personnels des banques étrangèresen difficulté mais il a aussi fonctionné, et defaçon typiquement australienne, avec leretour au pays de bon nombre d’Australiensqui travaillaient à l’étranger. En revenant, ilsont fait bénéficier leur pays des compétencesacquises dans les grandes banques interna-tionales de Londres et New York en particu-lier. Le pays n’a donc pratiquement pas connula crise financière mondiale du fait de cettefaible exposition de son système bancairemais sa bonne santé économique tient aussià une autre réalité : lentement mais sûrement,l’Australie est en train de basculer d’un envi-ronnement économique occidental à un envi-ronnement économique vraiment asiatique.Le phénomène prend différentes formes : ilpasse par une intensification des échangescommerciaux avec les pays de la zone et sin-gulièrement la Chine, qui a entrepris un vastemouvement pour s’assurer des ressourcesnaturelles à long terme. Chine qui double sesmouvements commerciaux par des mouve-ments financiers d’investissements directs et s’assure ainsi de façon capitalistique lecontrôle des ressources dont elle a besoin.Elle rachète des mines, parfois dans la diffi-culté, on l’a vu avec Rio Tinto, mais pendantque politiques et grand public se focalisentsur quelques dossiers médiatiques de ce type, comme les terres rares, des centainesd’opérations « sous le radar » se réalisentbeaucoup plus discrètement. Les Chinois

Lentement mais sûrement, l’Australie est en train de basculer

d’un environnement occidental à un environnement économique

vraiment asiatique

Didier Mahout, président de la section Australie des CCE.

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1) Commonwealth Bank of Australia (CBA), WestpacBanking Corporation (Westpac), National Australia Bank(NAB), et Australian and New Zealand Bank (ANZ).

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savent parier à très long terme et entrerde façon beaucoup plus discrète maistout aussi efficace dans les secteursqu’ils convoitent en prenant, parexemple, des participations largementminoritaires à des stades très jeunes de mines en cours de développement.Ces investissements chinois restentaujourd’hui tout à fait minoritaires, ilsreprésentent probablement beaucoupmoins de 5 % du stock des investisse-ments étrangers en Australie, mais leur proportion dans les flux d’IDE de cesdix-huit derniers mois est bien plussignificative.Ils sont donc appelés à augmenter rapi-dement, en tenant bien évidemmentcompte du seuil de sensibilité politique.Cela dit, les Australiens sont extrême-ment pragmatiques et leurs besoins dedéveloppement, tant au plan des res-sources naturelles que des infrastructuressont absolument gigantesques. Le retarddu pays en matière d’infrastructures a étéévalué à un peu moins de 800 milliardsde dollars australiens (environ 540 mil-liards d’euros). Ils portent sur tout ce quitouche à l’exploitation et au transportdes matières premières mais aussi àl’explosion urbaine attendue. On s’attendà un accroissement de 60 à 70 % de lapopulation qui ferait passer la popula-tion australienne des actuels 22 millionsd’habitants à 40 millions vers 2050. Dansun pays où la population est essentielle-ment urbaine et concentrée dans sixgrandes agglomérations1 ce basculementdémographique changera complètementla donne.

CCE : Revenons à la crise, commentl’Australie, dont les centres de gravitébasculent, a-t-elle réagi ?D. M. : Même si le terme de crise n’estpas adapté à la situation, disons que

l’Australie a abordé cette phase plus dif-ficile avec, à sa disposition un nombred’outils économiques impressionnantsquand on compare les marges demanœuvre qu’avaient les pays occi-dentaux. Le pays affichait un endette-ment public quasi nul (alors quel’Europe en est parfois à des 100 voire120 %), un budget structurellement enéquilibre et un niveau de taux d’intérêtqui tournait en début de crise aux alen-tours de 7,5 %, ce qui donnait une largepossibilité d’abaissement des taux avec,comme corollaire l’augmentation immé-diate du pouvoir d’achat et de la capa-cité à consommer des particuliers. Enmoins d’un an, la banque centrale aeffectivement ramené son taux de réfé-rence de 7,25 % à 3 puis à 4,5 %. Cedifférentiel de 4,25 % alourdissait lepoids du crédit immobilier qui pèse surchaque ménage australien, son allége-ment a augmenté d’autant et immédia-

tement sa capacité à consommer, ou àépargner. Le gouvernement a, de plus,dès octobre 2008, c’est-à-dire au len-demain de la faillite de Lehman, missur pied un double mécanisme de pro-tection du système bancaire en offrantsa garantie aussi bien sur les dépôtsque sur les emprunts à l’étranger. Lesbanques australiennes se sont de ce faittrouvées tout à coup dotées d’un tripleA pour emprunter sur les marchés inter-nationaux. En parallèle l’Etat a lancé unpackage de stimulation économiquemassif, avec des projets d’infrastructurescolossaux et des injections directes deliquidités : chaque foyer australien a,par exemple, reçu un chèque de plu-sieurs milliers de dollars qui se sontimmédiatement investis dans la consom-mation. Il avait les moyens de le faire,quand tous les engagements de ce planseront réalisés, on s’attend à un picd’endettement de… 15 % de son Pib.

CCE : Comment réagissent les entreprisesfrançaises face à cette multiplication de projets ?D.M. : La présence française est déjà trèsimportante ici : plus de 300 entreprisesimplantées employant plus de 80 000personnes et réalisant un chiffred’affaires de près de 15 milliards d’euros.Elles bénéficient des avantages du pays :une excellente productivité du travail,

Quelques conseils pratiques• Ne pas se fier à l’apparente facilité, suivre les opérations australiennes de près. Etudier et

prendre le temps de rencontrer les professionnels.• Distribution : tenir compte des distances et de la diversité. Les poches de consommation

sont dispersées et les différences de mentalité tangibles. Les formules de franchise sont largement utilisées.

• Environnement juridique : l’Australie est un pays de Common Law où la jurisprudence supplante le code civil écrit. Le contrat est la référence essentielle des relations juri-diques. Cependant, des codes, comme celui du commerce et de la franchise (Trade Practices Act) fixent un cadre qui peut parfois soumettre les termes du contrat à interprétation.

Didier Mahout 1) Cinq villes côtières – Sydney, Melbourne,Brisbane, Perth, Adelaïde – et Canberra.

Plantu, Le Monde, 26 mai 2010.

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la croissance d’une population au pou-voir d’achat élevé et un environnementpeu risqué et favorable à l’entreprise.L’Australie arrive seconde au classementréalisé par la Banque mondiale des paysoù il est le plus facile de lancer uneaffaire et troisième pour la facilité àobtenir un crédit.

CCE : L’éloignement de sa base voussemble-t-il un risque gérable ? Mêmepour une PME ?D.M. : C’est un risque pour toutesociété, et donc en particulier pour lesPME. C’est un coût également. Mais le« profil sûr » de l’Australie en tant quepays compense. Pour une PME,l’Australie doit être perçue pour cequ’elle est : un marché en croissance,rentable, solvable –ici il n’y a pas deproblème de règlement, gros souci desPME exportatrices- et surtout lisible.Contrairement à ce qui se passe dansd’autres environnements opaques àl’international, ici, les règles sont claireset compréhensibles pour une entreprise,même PME ayant déjà une expérienceau Royaume-Uni ou aux Etats-Unis, parexemple. En revanche, le caractère insu-laire impose une approche et une pré-sence locales. Une implantation physiqueest indispensable. En fait, on pourraitreprendre à propos de l’Australiel’argument publicitaire utilisé en sontemps par Canada Dry : « ça a le goût del’Europe, cela ressemble à l’Europe, maisce n’est pas l’Europe ». Les PME qui ontfranchi ce pas font la différence.

CCE : Dernière question, être implantéen Australie permet-il d’être plus pré-sent en Asie ?D.M. : Servir de hub à l’Asie fait cer-tainement partie des ambitions del’Australie, mais l’Asie est vaste.L’Australie peut certes en être un pointd’entrée, elle peut jouer le rôle de posted’observation, on peut aussi la privilé-gier pour tous les services à l’industrie,notamment pour l’exploitation de res-sources naturelles mais elle reste éloi-gnée. Sydney est à 9 heures de vol deHongkong, à peine moins que Paris,mais on y est dans la même zonehoraire ce qui permet de travailler defaçon beaucoup plus efficace qu’endécalage permanent. �

Propos recueillis par MadeleineBarbier Decrozes

Matières premières

Un pays plein de ressources

« L’Australie a un pied à New York et un pied en Chine »déclarait récemment Bill Evans, le chef économiste de la

Westpac Banking Corporation. En effet si, grâce à l’appétitinsatiable de la Chine pour ses matières premières, le paysse tire plutôt bien de la terrible crise économique mondiale,

il reste très dépendant des marchés internationaux pourfinancer sa croissance.

P reuve en est la chute vertigineusede la bourse de Sydney durant larécente crise de la dette grecque oul’augmentation du coût de finance-

ment des emprunteurs australiens surles marchés internationaux. L’économieaustralienne reste néanmoins très vigou-reusement tirée par l’effort d’urbanisationde la Chine et de l’Inde. Quelque 600millions de Chinois vont déménager des campagnes vers les villes dans lesvingt prochaines années et ce fluxmigratoire, exceptionnel dans l’histoirede l’humanité, va générer des besoinsen énergie et en matières premières abso-lument colossaux. Quelle aubaine pourl’Australie qui regorge de ressourcesnaturelles : 40 % des réserves d’uraniummondiales, 37 % des réserves de nickel,

26 % des réserves de plomb, 18 % desréserves de zinc, plus d’importantesréserves de minerai de fer, de bauxite,de charbon, de gaz naturel, d’or, d’argentet de diamant. Grâce à la richesse de sonsous-sol, l’Australie mérite bien son sur-nom de « Lucky Country ».

Un fournisseur richement dotéet « bien sous tout rapport »Le gaz naturel en particulier attire beau-coup l’attention en ce moment. Ilabonde dans le pays. Ses réserves repré-sentent plus de deux cents fois laconsommation domestique annuelle. Leméthane est une énergie fossile proprequi émet en moyenne 70 % moins degaz carbonique que le charbon, le car-burant le plus utilisé dans presque toute

Le défi de l’Australie : gérer le développement économique créé par le boom de lademande pour ses matières premières.

© BRUCE LONG/NEWSPIX

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l’Asie. Les grands groupes mondiaux etaustraliens ne s’y sont pas trompés. Lesprojets d’investissement en gaz naturelliquéfié (GNL) pour exportation versl’Asie s’élèvent aujourd’hui à plus de220 milliards de dollars australiens etdevraient créer environ 55 000 emploisdans les trois prochaines années. Ceschiffres impressionnants ne feront quegonfler les statistiques des ressourcesnaturelles qui représentent déjà 7,1 %du PNB, génèrent 14,2 % du total desprofits des entreprises commerciales etpèsent presque 50 % des exportationsdu pays.L’Australie bénéficie en outre d’uneimage de pays stable et d’une main-d’œuvre hautement qualifiée. En prèsde vingt ans, l’Australie n’a jamais man-qué une seule livraison de GNL à sesclients japonais et coréens. Un fournis-seur « bien sous tout rapport » comparéà ses concurrents asiatiques, moyen-orientaux ou africains qui ne présen-tent pas toujours les mêmes garantiesde transparence et de stabilité. De plus,ses concurrents directs, tels l’Indonésieou la Malaisie, commencent à prendredes mesures limitant leurs exportationsde charbon ou de gaz naturel pour enconcentrer l’utilisation à leur proprebesoin en forte croissance. Le défi del’Australie n’est donc pas de trouver lemoteur de sa croissance future mais biende gérer le développement économiquecréé par ce boom de la demande pourses matières premières.

Défi : gérer l’abondanceDéjà la pénurie de main-d’œuvre et lemanque criant d’infrastructures pous-sent les indicateurs de capacitéd’utilisation vers leur maximum et exa-cerbent les risques d’inflation. La banquecentrale vient d’augmenter son taux debase six fois depuis octobre 2009 dansl’espoir d’éviter une surchauffe del’économie. Le risque est de casser unereprise qui reste fragile dans un contextemondial encore très incertain. Avec untaux de chômage en baisse à 5,3 % etqui continue de se diriger vers le pleinemploi, l’Australie manque cruellementde main-d’œuvre pour développer sesmines, construire ses ports et compléterson réseau de voies ferrées qui lui per-mettraient de répondre à la demandemondiale pour ses matières premières.Ce développement rapide pose aussi le

problème de ses rapports avec la Chine.En février 2010, la Chine est devenue lepremier partenaire commercial del’Australie, place qu’avait occupée leJapon depuis 1967. Cette importancecroissante de la Chine dans l’importationde matières premières s’accompagned’une accélération d’acquisitions chi-noises dans les sociétés minières aus-traliennes. L’opinion publique est enémoi. Les Australiens, bien conscientsde la richesse exceptionnelle de leursous-sol, rechignent à perdre le contrôlede leur poule aux œufs d’or. L’exemplele plus marquant reste la prise de parti-cipation avortée de l’AluminiumCorporation of China (Chinalco) dansRio Tinto1. On craint que cette histoirequi a fait grand bruit ne laisse des tracesimportantes entre ces deux pays qui ontpourtant tant besoin l’un de l’autre.Enfin le débat politique australien s’estlui aussi tourné sur les ressources natu-relles. Là encore, bien conscients de leurposition unique à la croisée d’unedemande asiatique exceptionnelle etd’une richesse souterraine pléthorique,les Australiens sont soucieux d’utiliserau mieux l’exploitation de leurs res-sources non renouvelables au profit desgénérations futures. Comment utilisercette précieuse manne financière pourenfin doter le pays des infrastructuresqu’il mérite.Après une lutte féroce entre l’industrieminière et le gouvernement qui a coûtéson poste au Premier ministre KevinRudd, les deux parties ont trouvé un

compromis sur l’introduction d’un nou-vel impôt sur les « super profits » dessociétés minières et pétrolières destiné àfinancer le régime des retraites et laconstruction d’infrastructures. Il est vraique le bénéfice opérationnel des socié-tés minières est passé de 5,8 milliards dedollars australiens en 2001-2002 à32,1 milliards en 2006-2007 et que lesprévisions de croissance sont exponen-tielles. Cela n’a pas empêché la profes-sion de réagir violemment. Les ressourcesnaturelles ont besoin d’énormes capi-taux pour se développer mais ceux-ci sedirigent toujours là où ils sont les bien-venus : dans les pays fiscalement stableset transparents. Voila qui pourrait êtrele prochain grand défi australien. �

Patrick Cocquerel, CCE,directeur exécutif département

industries et matières premières,Westpac Institutional Bank

O C E A N

I N D I E N

O C E A N

P A C I F I Q U E

Nouvelle-Calédonie

SINGAPOUR

CANBERRA

PAPOUASIE-NOUVELLE-GUINEE

ILES SALOMON

VANUATU

FIDJI

AUSTRALIE

NOUVELLE-ZELANDE

CAMBODGE PHILIPPINES

ETHIOPIE

DJIBOUTI

ERYTHREE

AFGHANISTAN

PAKISTAN

IRAN

ARABIE

SAOUDITE

IRAQSYRIE

THAILANDE

MYANMAR(BIRMANIE)

SRI LANKA

CHINEBHOUTAN

BANGLADESH

KOWEIT

TAIWAN

JAPONCOREE DU SUD

INDONESIETIMOR-ORIENTAL

NEPAL

LAOSVIET-NAM

INDE

TADJIKISTANTURKMENISTAN

OMAN

YEMEN

SOMALIE

E.A.U.

MALAISIE

FRANCE

CANBERRA

SydneyBrisbane

MelbourneAdelaïde

Perth

Les pr incipales v i l les

1) Début 2009, Chinalco propose de voler ausecours de Rio Tinto, frappé par la crise mon-diale en insufflant dans le groupe minier anglo-australien les quelque 12 milliards de dollarsqui renforceraient sa participation, la faisantpasser de 9 % à 15, voire près de 50 %. Volte-face de Rio Tinto qui préfère se rapprocher deson compatriote BHP Billiton. Six mois plustard, en pleines négociations annuelles entrefournisseurs et consommateurs mondiaux sur leprix du minerai de fer, le patron de Rio TintoShanghai et trois de ses collaborateurs étaientarrêtés, puis condamnés « pour espionnage ».

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34 CCE International — n° 551 — août/septembre 2010

Agriculture

Une mutation orchestrée

Pour autant, l’agriculture demeureun secteur dynamique de son éco-nomie. Au sens large, prenant en compte productions animales et

végétales, sylviculture et pêche-aqua-culture, elle contribue à hauteur de 2,6 %au Pib australien, avec une valeur deproduction de 29,8 milliards d’euros en2009. Les principales productions agri-coles sont la viande bovine (16,7 % dutotal australien), le blé (12,8 %), le lait,l’orge et quelques autres céréales, laviande ovine, la laine (avec 400 000tonnes l’Australie génère 36 % de la pro-duction mondiale), la canne à sucre etla vitiviniculture qui assurent cependantmoins de 2 % de la valeur du secteur.Côté transformation, l’agroalimentairereprésente 19 % de la production del’industrie manufacturière du pays.

Premier exportateur mondial de laine,l’Australie est aussi le deuxième expor-tateur de viande bovine, après le Brésil,et de viande ovine après la Nouvelle-Zélande. En 2009, ses exportations agricoles et agroalimentaires ont atteint20,8 milliards d’euros, soit 14 % environ des exportations totales de marchandises. Près de 60 % de cesexportations concernent des produitsagricoles bruts, tandis que la plus grandepartie de ses importations alimentaires(8,2 milliards d’euros en 2009) porte sur des produits transformés et la ten-dance se renforce. Premier fournisseur,l’Asie, qui assure près du tiers du mar-ché (31,4 %), suivie de l’Union euro-péenne à 27 (28,3 %) et des pays del’Alena (13,5 %).Tandis que les importations françaises

de produits agricoles bruts australiensexplosaient l’an dernier, passant de 24 à 59 millions d’euros, nos exporta-tions de ces mêmes produits, en légèreprogression (11,3 %), n’atteignaientmême pas les 7 millions d’euros. Le phé-nomène est inverse pour les produitstransformés : nos importations dimi-nuent (38,7 millions d’euros) tandis quenos exportations progressent, atteignant130,7 millions d’euros. Ce qui n’a pasempêché les livraisons de vins françaisde chuter (-30,4 % en 2009) passant à42,9 millions d’euros. Petite consola-tion, les exportations de chocolat etconfiseries françaises augmentaient de3,8 % pour atteindre 14,5 millionsd’euros.Même si les importations de produitsagroalimentaires sont soumises à descontrôles sanitaires parfois excessifs etsi les décisions de Biosecurity Australiapeuvent, dans certains cas, manquer detransparence, l’accès au marché austra-lien est néanmoins relativement aisé pourmaintes denrées alimentaires. Sur le plan tarifaire, la protection dans le domaine agricole est quasiment nulle.Pour autant deux points irritants subsis-tent qui affectent nos exportations à des-tination de l’Australie : une taxe (WineEqualisation Tax) de 29 % est prélevéesur le vin et des droits compensateurssont imposés sur le brandy français.

Dans une population nationale pourtant en forte hausse, la main-d’œuvre agricole reste insuffisante.

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Australie

Confrontée à des contraintesenvironnementales

de plus en plus sévères et à la baisse de

la population agricole,l’Australie n’est plus tout à fait The Lucky

Country du XIXe siècle où il était possible de faire sa fortune

« sur le dos de ses moutons ».

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5

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VitivinicultureCanne à sucre

Laine(36 % de la prod. mond.)

Viande ovineOrge et autres

céréales

LaitBléViande bovine

16,7 %

2,1 Mt 20,9 Mt 93,8 MhL 12,4 Mt 650 kt 400 kt 4,6 Mt 1,6 Mt

12,8 %

8,7 %

6 % 5,4 %3,9 %

2,1 % 1,9 %

Principales productions agricoles (% de la valeur totale des productions)

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Ces chiffres ne sauraient faire oublierles menaces qui pèsent sur l’agricultureaustralienne. Elles sont principalementde trois ordres. Tout d’abord la menacedu changement climatique, aggravantla pénurie d’eau et la dégradation dessols. Ensuite, bien que la populationaustralienne soit en pleine croissance – les actuels 22 millions d’Australiensdevraient être 36 millions à l’horizon2050 – la main-d’œuvre rurale est insuf-fisante et les rendements agricoles enbaisse. Autant d’éléments qui poussentle gouvernement australien à réviserprogressivement sa politique agricole.Celle-ci est davantage axée surl’accroissement de l’efficacité de la pro-duction grâce à une meilleure gestiondes ressources, l’innovation et les inves-tissements et très peu sur les soutiensdirects aux producteurs (6 % des reve-nus seulement).

Innovation & InvestissementsétrangersLes efforts d’innovation s’orientent versla biotechnologie. Le coton, l’œillet, lecolza et la rose bleue sont les seules cul-tures génétiquement modifiées (GM)dont la commercialisation est autoriséeen Australie actuellement. La surfacecultivée en colza GM au Victoria et enNouvelle-Galles-du-Sud a quadruplé enun an pour recouvrir, en 2009, 40 000hectares, avec une production de prèsde 50 000 tonnes. Dans l’Etat duWestern Australia qui vient récemmentde lever son interdiction des culturesGM, ce sont 250 producteurs qui se sontempressés de planter 30 000 hectares decolza GM cette saison.Compte tenu de l’étendue du territoireet du potentiel offert dans le secteuragricole, de plus en plus d’investisseursétrangers s’intéressent au rachatd’exploitations australiennes – dont lasuperficie peut parfois dépasser celle duterritoire belge – dans une optique deproduction destinée à l’exportation. Legouvernement a à l’égard des investis-seurs étrangers une attitude très ouverte.Seules les acquisitions par des étrangersde 15 % ou plus d’une entreprise agri-cole évaluée à plus de 154 millionsd’euros nécessitent l’approbation dugouvernement. �

Eric Noitakis, conseiller économique,ambassade de France en Australie

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16,8 %15,7 %

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Prod. laitiers (hors fromage)

LaineVinsBléViande bovine

Les grandes exportations 2009(% du total des exportations des produits

agricoles et agroalimentaires)

0 5 10 15 20U. E. 8,2 %

Etats-Unis 9,4 %

Chine 10 %

Moyen-Orient 11,1 %

Japon 16,3 %

Asie du Sud-Est 19 %

Les grands clients(% du total des exportations des produits

agricoles et agroalimentaires)

0 5 10 15 20 25 30 35

Alena 13,5 %

U. E. à 27 : 28,3 %

Asie 31,4 %

Les grands fournisseurs(% du marché australien)

EmploiCherche main-d’œuvre… désespérément ?Avec un marché du travail tendu à faire rêver les Occidentaux en cette délicatesortie de crise, l’Australie se retrouve, pour certains secteurs, en situation depénurie de main-d’œuvre. Un quasi plein emploi réjouissant mais que les entre-prises doivent gérer vite et habilement.

Fin 2011, le taux de chômage devrait être redescendu au niveau d’avant la crise financière,à peine plus de 4 %. Au pire moment, entre juillet 2008 et août 2009, il « culminait » à 5,8 %.Mi 2010, il était revenu à 5,3 %, soit moins 616 000 demandeurs d’emploi ! La reprise économique, notamment avec les grands projets d’infrastructures et les mines, un marchédu travail australien fortement dérégulé depuis 20 ans et le plan de stimulus fiscal mis en place par le gouvernement sont responsables de la situation. Une étude menée mondia-lement en 2010 par Manpower montre que l’Australie est sixième au classement des paysmanquant de main-d’œuvre qualifiée, derrière le Japon, le Brésil, l’Argentine, Singapour etla Pologne. Les pénuries sont particulièrement sensibles dans les métiers techniques :ingénieurs, techniciens de bon niveau, personnel médical, électriciens, mécaniciens, etc.L’immigration ne suffit pasUne immigration de plus en plus sélective, basée sur la formation et le savoir-faire profes-sionnel du candidat à l’émigration aurait dû aider les entreprises à combler leurs besoinsen main-d’œuvre qualifiée. Malheureusement, le jeu de la politique locale amène régulière-ment le gouvernement en place à prendre une position dure et à limiter les entrées d’immigrants,surtout en cette année d’élections. Reste la sous-traitance, largement utilisée pour rempla-cer les talents manquant à l’entreprise. L’esprit « entrepreneur » des Australiens et la simpli-cité administrative pour se lancer à son compte (micro compagnie) encourage cette pratique.C’est une solution efficace pour un certain nombre de fonctions de l’entreprise, comme lapaye, la logistique…Les ressources humaines sont bien évidemment totalement tributaires de cet état de fait,un employeur en Australie doit donc en tenir compte. Chaque fois qu’un besoin se fait jour,il doit choisir entre un recrutement ou l’externalisation de la fonction. Plus généralement, pourfidéliser les personnels occupant les postes clé il est indispensable de se tenir informé desévolutions salariales et des divers systèmes d’intéressement ou plans de progression. Petitedouceur dans ce paysage aride : les charges patronales sont, en Australie, bien inférieuresà ce qu’elles sont en France (voir article sur l’environnement juridique).Même si l’insolente santé économique de l’Australie est définitivement une bonne nouvelle,un retour aussi rapide à une situation de plein emploi doit être géré habilement et rapide-ment afin de trouver des solutions pratiques et efficaces.Corinne Bot, CCE, PDG Polyglot Group Pty Ltd

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Source : Mission économique

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Australie

Consommation

Petit, riche, sophistiquéLe marché test par excellence

Les habitudes du consommateur australienont bien changé au cours des vingt der-nières années. Tout d’abord, il s’est enri-chi, en 15 ans, de 1991 à 2006, son

pouvoir d’achat a augmenté de plus de 43 %.Aujourd’hui, il dépasse d’au moins 15 % celuidu français, par exemple. Dans le mêmetemps, son approche traditionnellementanglo-saxonne des produits « ostentatoires »a fait place à un comportement plus asia-tique : son indifférence aux produits qui« donnent de la face », reflétant une positionsociale ou financière supérieure s’est lente-ment transformée en intérêt. Du modèleanglais ou canadien, héritage du passé, il s’estrapproché des habitudes de ses nouvellespopulations, locale ou touristique, originairesd’Asie. Le virage s’est amorcé il y a une ving-taine d’années, la demande pour les pro-duits de luxe, donc principalement importés,

portant d’abord sur les voitures, puis les pro-duits « sur soi », comme l’habillement, lesmontres, les bijoux ainsi que les produits de beauté et de séduction (cosmé-tiques/parfums). La plupart des marques deluxe sont désormais présentes en Australie.En parallèle, la consommation de vin, localet importé, s’est aussi développée dans cepays traditionnellement porté sur la bière.La production nationale ne couvrant géné-ralement pas l’ensemble de leurs besoins, les Australiens sont réceptifs aux produitsimportés. L’évolution des habitudes et la réactivité des acheteurs ont fait de ce petitmarché -22 millions d’habitants- un marchétest plein d’enseignements. Exigeant, de plusen plus sophistiqué et informé des tendanceseuropéennes, le consommateur australienaime les nouveautés ainsi que les produitsalternatifs, c’est un early adopter, friand denouvelles technologies.L’impact grandissant des phénomènes demode alimentés par les médias et la publicitéjouent actuellement en faveur des produits« authentiques », tout ce qui véhicule uneimage liée à l’environnement et à la santé sevend bien. Ainsi, la demande de produits alimentaires frais et bio augmente et les marchés de l’environnement et des produitsliés aux économies d’énergie sont en crois-sance. Alimentation, boissons, services finan-ciers, soins pour le corps et la forme, produitstouristiques, sont parmi les mieux placésactuellement.

Des habitudes de pays richeLa consommation des ménages représenteplus de la moitié du Pib australien, 55,5 %,en ligne avec ce qui se passe dans les pays industrialisés de longue date, elle est de 56,9 % en France, par exemple. Sa répar-tition s’est aussi rapprochée de celle qui

Le pouvoir d’achat du consommateur australien est supérieur de 15 % à celui du français.

Riche, avec un Pib par habitant de près de 39 000 dollars US (en parité depouvoir d’achat), le consommateur australien est aussi dépensier. Une aubaine

pour les exportateurs, notamment de produits haut de gamme.

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La publicité estomniprésente,en 2009,l’investissementpublicitaire par habitant a atteint481 dollars US.Il est de210 dollars en France

prévaut dans les sociétés évoluées et aisées :la partie consacrée à l’alimentation a beau-coup baissé (10,9 %, par comparaison lesFrançais y consacrent encore 13,5 % de leursdépenses) tandis que les sommes consacréesaux loisirs et la culture augmentent. LesAustraliens ont donc dépassé la consomma-tion strictement utilitaire et achètent de plusen plus pour se faire plaisir, sans besoin particulier. Comme, malgré un rapide retourde la croissance, le consommateur reste sensible au prix, son schéma est souvent« j’attends les soldes… et je m’endette ». Cerecours très fréquent au crédit, à rapprocherde celui des ménages américains mais tota-lement différent de celui des ménages chinois qui privilégient toujours l’épargne etle long terme, peut mener au surendettement,surtout chez les jeunes. Le taux d’endettementdes ménages est l’un des rares indicateurséconomiques régulièrement préoccupant.Dans ce contexte, la publicité est omnipré-sente, tant à la télévision, à la radio que dansles magazines et le secteur du détail rivalisede trouvailles pour attirer le client. Rapportéeà la tête d’habitant, le poids de cette publi-cité est certainement un des plus élevés dumonde dit « développé » et il ne cesse de gran-dir. En effet, l’année dernière, les investisse-ments publicitaires par habitant sont mon-tés, en Australie, à 481 dollars US, contre210 dollars en France1.Autre phénomène récent pour le commercede détail dans les grandes villes : le déplace-ment en proche banlieue, limité jusque récem-ment aux achats d’alimentation, il prévautdésormais pour les achats de produits demarques, voire de luxe. Ce type de consom-mateurs se risque désormais dans des centrescommerciaux excentrés, sans âme, mais quioffrent des avantages interdits en centre villenotamment les facilités de parking, un équi-libre entre boutiques et lieux de restaurationou de loisirs, comme les cinémas. En fin desemaine, des centres comme ceux de BondiJunction à Sydney ou Chadstone à Melbournene désemplissent pas. Pour les jeunes ce shop-ping grignote petit à petit les plages horairesréservées traditionnellement aux sports. Mêmesi les loyers sont élevés, les marques trouventlà une nouvelle clientèle qui a déserté le quar-tier commerçant du centre ville.Autre évolution, semblable à la tendancemondiale mais avec une vigueur toute par-ticulière dans un pays aussi vaste, le déve-loppement rapide du commerce en ligne. Ilvaut pour tous les produits et services, sansexception, d’ici 2020, le e-commerce devraitreprésenter près de la moitié des achats de

biens de consommation. Le tourisme est trèsconcerné, les Australiens étant de grandsvoyageurs et, vu l’éloignement, adeptes deslongs courriers, on estime que d’ici quelquesannées 70 % des vols « simples » (allers-retours sur une destination) seront achetéspar Internet.Même si sa population est très loin desmasses que représentent ses énormes voisins,Inde et Chine notamment, le marché austra-lien recèle d’évidentes pépites, essentielle-ment liées à la croissance du pouvoir d’achatet à l’évolution des habitudes de consom-mation. Intéressant pour tout exportateur ildevient essentiel dès que l’on aborde les pro-duits à forte valeur ajoutée. �

Maxime Elgue, CCE,directeur des opérations, Autore

Le commerce en ligne se développe à grande vitesse.

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1) Source : GroupM « Worlwidemedia & marketing forecasts »Summer 2010.

PIB par habitant(Parité pouvoir d’achat en dollar US)

Source : La Banque Mondiale

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Le rejet par le sénat du projet de loivisant à créer un marché du carbonepour l’Australie a certes conduit legouvernement à en reporter la mise

en place à l’horizon 2013, néanmoins ladétermination reste intacte. Ce projet aus-tralien de marché de quotas d’émissionsde gaz à effet de serre est l’un des plusavancés avec ceux du Canada (2012), des Etats-Unis (2012) et du Japon(2011/2012). Dans sa version actuelle, ilcouvre environ 75 % des émissions aus-traliennes et permettrait, à l’aide d’unsystème d’échange de quotas d’atteindreen 2020 des réductions d’émissions com-prises entre 5 % et 15 % par rapport auxémissions de l’année 2000. Si, comme

son modèle européen, le marché austra-lien de quotas prévoit de plafonner lesémissions « autorisées » de gaz à effet deserre, de telle sorte que les entreprisesvertueuses pourront vendre leurs quotasen surnombre aux entreprises ayantdépassé les leurs, il en diffère sur de nom-breux autres points. Quelques diver-gences : un objectif à 2020 de -5 % parrapport à 2000 pour l’Australie et de -20 % par rapport à 2005 pour l’Unioneuropéenne ; 75 % des émissions de gazà effet de serre concernés avec 1 000 sitescouverts pour l’Australie et 52 % avec12 000 sites pour l’Union européenne.

20 % de l’électricité issued’énergies renouvelables d’ici 2020En parallèle, le gouvernement australiens’est doté d’un nouvel objectif qui pré-voit qu’à l’horizon 2020, 20 % del’électricité devra être issue d’énergiesrenouvelables. Selon le gouvernement,cet objectif pourra quasiment être atteintaux deux tiers grâce aux nouveaux inves-tissements réalisés en Australie en utili-sant les capacités de génération éolienneset géothermiques. Avec un milliard dedollars d’investissement dans le secteurdes énergies renouvelables en 2009,l’Australie se situe au quatorzième rangdes pays du G20. L’investissement directétranger (IDE) sera un des principauxmoteurs du développement du secteur.

En 2007, le Royaume-Uni dominait lesinvestisseurs européens avec près de50 % des IDE dans les services et pro-duits environnementaux (uktradeinvest).L’Australie héberge aujourd’hui parmi lesplus grandes capacités de parcs éoliensavec Waubra Wind Farm (192 MW) etattire de nombreux investisseurs et opérateurs étrangers (Acciona, InvestecBank, Mitsui & Co, Union Fenosa). Enavril 2009, les parcs éoliens représen-taient 13 % des projets de productiond’électricité.Ainsi si le report du projet australien demarché de quotas de gaz à effet de serreporte un coup à brève échéance auxréductions d’émissions en se privantd’un levier puissant, il n’en reste pasmoins que le pays est toujours trèsmobilisé sur l’essor des technologiespropres et de sa production d’énergierenouvelable exploitant un potentielnaturel à ce jour peu valorisé. L’atteintedes objectifs nationaux ne se fera qu’àtravers une forte mobilisation des inves-tisseurs étrangers. C’est pour les entre-prises françaises une opportunité dedéveloppement à considérer car ellessont actuellement sous représentées dansce secteur en Australie.�

Frédéric Papon, Manager ClimateChange and Sustainability, Ernst &Young et Christophe Hoareau, CCE,

Executive Director, Ernst & Young

Environnement

Les promesses des énergies renouvelables

Le gouvernement australien s’est fixé deux objectifs clés à atteindre en 2020 : réduire de5 % à 15 % ses émissions de gaz à effet de serre et porter à 20 % la part des énergies

renouvelables dans la consommation australienne.

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Les 3 programmes du Clean Energy • Energie solaire (Solar Flagships Program) : 1,6 milliard de dollars sur six ans• Séquestration et stockage du carbone (CSC Flagship Program) : 12,4 milliards de dollars sur

neuf ans• Centre pour les énergies renouvelables (Australian Centre for Renewable Energy) : 465 millions

de dollars pour la supervision de l’exécution des programmes.

L’éolien, en croissance, attire beaucoupd’investisseurs étrangers.

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Les secteurs du biomédical, du dia-gnostic, des équipements médicaux,de l’agriculture et de l’agroalimentaireoffrent de nombreuses possibilités aux

investisseurs internationaux. L’Australie,récemment classée devant les États-Unis,Singapour, l’Inde, l’Allemagne et le Japon,se distingue notamment dans desdomaines tels que les tests cliniques (oùune récente enquête de l’association pro-fessionnelle AusBiotech la place en têtedes pays leaders), la découverte de nou-veaux génomes présents dans le milieunaturel australien et la recherche sur lescellules souches. On compte désormaisplus de 1 100 entreprises spécialisées en biotechnologie en Australie. 460 d’entre elles sont impliquées dans le développement d’outils thérapeutiques etde diagnostic, les autres dans celuid’appareillages et dans l’agriculture.Quelque 40 000 emplois directs découlentdu secteur biotechnologique et pharma-ceutique dans le pays, sans compter lesmilliers d’emplois directs dans le secteuragricole et ceux indirects dans desdomaines tels que les essais cliniques, larecherche médicale…Les succès de l’Australie en la matière sontrégulièrement salués (neuf Australiens ontvu leur travail dans des domaines relatifsà la médecine récompensé par un prix

Nobel) et le pays s’est doté d’infrastructuresde première importance, dont le synchro-tron de Melbourne.

Des infrastructures de R & Dparmi les meilleures au mondeCet équipement de 220 millions de dol-lars australiens devrait encore accélérerles recherches scientifiques et industriellesdans le pays qui a participé activement àdes découvertes essentielles. Parmi elles,le premier vaccin contre le cancer du colde l’utérus, l’élaboration de l’implantcochléaire ou encore la synthèse des acidesgras Omega3. La présence de six univer-sités de renom associées à des hôpitauxuniversitaires conduisant des programmes

de tests cliniques de large envergureconfère à l’Australie une expertise mon-dialement reconnue dans le domaine dela recherche biomédicale. Avec 154 molé-cules actuellement en cours de tests cli-niques, dont une proportion significative(58 %) est en phase II et III, l’Australieexerce aujourd’hui un poids non négli-geable sur l’industrie pharmaceutiquemondiale. En 2007, le nombre de tests cli-niques en cours en Australie a augmentéde plus de 200 %. Sur l’ensemble de cestests, 68 % étaient conduits en partena-riat avec des organisations étrangères. Uneétude réalisée auprès de 27 entreprisesmembres d’Ausbiotech montre que cesdernières ont dépensé 794,1 millions dedollars en R & D en 2010.Etat de fait rassurant pour les investis-seurs, la législation australienne en matièrede propriété intellectuelle, est l’une des plus efficaces au monde en ce quiconcerne le dépôt et la protection des bre-vets. Le gouvernement australien a, deplus, mis sur pied des programmes d’aideà l’innovation adaptés à chacune desphases du processus de R & D et prévoitdivers soutiens à la R & D, dont des exo-nérations d’impôts. La France et l’Australiefont toutes deux partie du top 10 des paysen développement rapide sur le segmentdes biotechnologies mais les coopérationsbilatérales sont encore rares.�

Bruno Gutton, CCE, General ManagerCommercial East West Trades, ANLContainer Line Pty Ltd (Melbourne)

Biotechnologies

Opportunités à saisirLes opportunités qu’offre l’Australie, située dans une zone

en croissance accélérée, sont démultipliées dans unsecteur en plein développement, les biotechnologies.

Promesses en chiffres• Le secteur biotechnologique et pharmaceutique rapporte en moyenne 12 milliards de dollars par

an en Australie.• L’État du Victoria estime que la capitalisation boursière des dix premières entreprises

biotechnologiques est passée de 7,5 milliards de dollars en 2001 à 21 milliards en 2008.• Fin 2008, la capitalisation boursière des dix premières entreprises spécialisées dans

l’appareillage médical s’élevait à 11,4 milliards de dollars.• Grâce à des découvertes majeures en 2009, on estime que les 40 premières entreprises

australiennes (sauf les trois premières) ont doublé leur cours de bourse et leur capitalisation boursière.

• L’augmentation en capital du secteur est passée de 180 millions de dollars en 2008 à 673 millions en 2009.

L’Australie joue un rôle important dans des découvertes de premier plan.©

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C ’est une évidence. Le présidentSarkozy a changé la communica-tion politique en France. En effet, lechef de l’Etat a incontestablement

augmenté ses contacts directs avec lapresse par rapport à ses prédécesseurs,dont la fréquentation des médias se limi-tait en général à une ou deux conférencesde presse par an. Il intervient plus sou-vent. Il a même été jusqu’à lever légère-ment le voile de sa vie personnellependant sa campagne électorale, ce quiaurait été impensable pour les précédentsoccupants du palais de l’Elysée.Les politiques australiens sont encorebien plus proches des gens de médias.Qu’il — ou elle — soit issu du parti tra-vailliste ou de la coalition libérale, lePremier ministre est omniprésent dansles médias australiens. Les rencontresavec les journalistes sont quotidiennes.Le chef du gouvernement australienapparaît au journal télévisé des cinqchaînes nationales plusieurs fois parsemaine (pas plus de 90 secondes) et sesconférences de presse ont une fréquencequasi-hebdomadaire. Ce n’est pas nou-veau. C’est comme cela que la pressefonctionne en Australie. Le contact desmédias avec les acteurs politiques est unenorme quotidienne. Cette réalité n’est pas

sans conséquences dans la communica-tion des entreprises australiennes et dela création — ou destruction — de leurimage dans le public.

Ne jamais chercher à éviter la presseD’abord, la presse est née libre enAustralie. A la différence de la France — qui a longtemps connu une pressed’opinion, voire une presse de combat —les premiers journaux australiens sontapparus au début du XIXe siècle, en sui-vant le modèle britannique. C’était lapériode de la naissance du YellowJournalism à Fleet Street avec les grandstitres entraînant les gros tirages, l’habitudes’est transmise en Australie. Plus récem-ment, Rupert Murdoch – dont le groupecontrôle plus de 70 % des quotidiens ven-dus en Australie – a poussé davantagecette tendance au sensationnalisme de lapresse locale. Enfin, les réductions de coûts— et des effectifs de journalistes — depuisdix ans n’a fait qu’accentuer et générali-ser cette constance des médias australiensqui peuvent apparaître comme les plusarrogants et les plus féroces au monde.Les journalistes australiens ont l’habituded’un accès immédiat et permanent auxsources d’information. Les hommes poli-

tiques australiens ont appris à naviguerdans ce climat. Les hommes d’affairesaussi. Ils savent que la décision de com-muniquer ne leur appartient pas. Si l’oncherche à éviter la presse australiennelorsqu’elle vient à vous, on invite les piressuppositions et de graves risques d’image.Il n’y a pas de nuance. Tout est blanc ou noir. On est héros ou bandit. Tout vatrès vite.Les exemples cuisants ne manquent pas. Plusieurs groupes australiens ont subides dommages considérables en essayantde dissimuler la réalité de leurs difficul-tés ponctuelles. Personne ne peut espérerêtre épargné. Les essais nucléaires fran-çais dans le Pacifique ont été — jusqu’àleur cessation en 1996 — une caused’égratignure quasi quotidienne enversnon seulement la France, mais les pro-duits et les marques françaises (et mêmesi Mururoa est situé à 7 000 kilomètresde Sydney). Les choses ont évolué depuiset les Australiens — qui sont historique-ment attachés de longue date à notrepays — viennent en France en grandnombre : 400 000 visiteurs par an. Lesmédias australiens sont donc uniques aumonde. Il suffit de l’accepter, de s’y pré-parer et de les gérer. �

Didier Guérin, CCE, PDGMedia Convergence Asia-Pacific

Communication

Attention, presse très libre !

Témoins actifs des bons et mauvais moments des people, la presse fait le siège de lamaison d’un artiste et homme d’affaires en délicatesse avec le fisc.

Multipliez par dix la stratégie de communication introduite à l’Elysée par Nicolas Sarkozyet vous aurez une bonne idée de la situation en Australie.

Didier Guérin, CCE.

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SPF Diana, division de Diana Ingrédients,spécialisée dans les ingrédients pourl’industrie agroalimentaire, fabrique desarômes destinés aux aliments pour ani-

maux de compagnie. Très vite, son PDG,Jean-Pierre Rivery a compris que son déve-loppement devait inéluctablement passer parl’international. Il s’est donc installé auxAmériques (Etats-Unis, Brésil et Argentine).Au tournant du siècle, appuyé par la Mircebqui deviendra Bretagne international, il regar-de vers l’Australie. Rapidement la décisions’impose, c’est là qu’il ouvrira sa quatrièmeimplantation à l’étranger.L’Australie, ce n’est un secret pour personne,est un véritable grenier agricole, qui exportede façon importante bon nombre de ses den-rées, mais aussi accueille un grand nombrede multinationales agroalimentaires qui trans-forment et valorisent ces denrées. C’est le casdu secteur des aliments pour animaux decompagnie où les deux géants du secteur(Mars et Nestlé) sont implantés pour, non seu-lement servir un marché local conséquent –1,6 milliard de dollars australiens (700 mil-lions d’euros) – qui pèse à lui seul 2,5 % dumarché mondial, mais aussi exporter, en par-ticulier vers l’Asie. L’Australie représente eneffet 46 % des 890 000 tonnes d’alimentspour animaux de compagnie produits chaqueannée par l’ensemble de l’Asie Océanie.

Toujours plus australienDans l’industrie agroalimentaire, être prochede ses matières premières est une garantie defraîcheur et donc de qualité, c’est aussi unmoyen d’optimiser ses matières premières.L’implantation australienne donnait aussi un

signe fort au marché. « Pour accroître noschances de succès, se souvient Jean-PierreRivery (CCE depuis 2007) nous avons recher-ché un partenaire local en vue d’une asso-ciation forte avec l’industrie. Notre choix s’estporté sur le numéro deux de la volaille aus-tralienne – Bartter Entreprise – qui disposaitnationalement de huit abattoirs de volaillece qui nous permettait une installation rapideet efficace. » En 2001 SPF Diana Australiaconstruit une ligne de production et un bâti-ment à Beresfield NSW sur le site même del’un des abattoirs de Bartter Entreprise,devenu depuis Baiada Poultry. Les premiersproduits sortis de l’usine de Beresfield marquent le début du succès. Pour mieuxcomprendre un marché local en constantdéveloppement (+4 % par an), SPF DianaAustralia « s’australianise » au maximum :matières premières, personnels et partenariats.Aujourd’hui, SPF Diana Australia a rattrapéson concurrent principal pourtant installébien avant lui. Dix ans après sa création, avec15 personnes, la société devenue leader dumarché australien des facteurs d’appétenceassure 5 % de l’activité de sa division « mère »,SPF Diana. �

Florence Motte, CCE,directeur général, SPF Diana Australia

Réussite

En dix ans, le challenger est passé leader

Eté 2000, le monde a les yeux tournés vers Sydney et sesJeux olympiques. Depuis quelques poignées de mois, une

PME agroalimentaire bretonne, SPF Diana vit elle aussiau rythme de l’Australie. Mais plus que la déroute de

Marie-José Pérec ou la victoire de Cathy Freeman,l’entreprise vibre pour l’implantation qu’elle prépare au

nord de Sydney, dans la Nouvelle-Galles du Sud.

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Florence Motte, dg SPF Diana Australie

SPF DianaFabricant d’arômes utilisés dans la nourriture pouranimaux de compagnie.• Fin des années 1980 : création de l’activité arômeau sein de Diana Ingredients, PME bretonne spécialisée dans les ingrédients agroalimentaires.• 1997 : création de SPF Diana, division petfoodde Diana Ingredients, dans la région de Vannes.• 2000 : SPF Diana est implantée au Brésil, enArgentine et aux Etats-Unis.• 2010 : présence industrielle dans 11 autres pays(Australie, Espagne, Royaume-Uni, Colombie,Japon, Chine, Mexique, Hongrie, Thaïlande,Chili, Afrique du Sud).• 78 % de son activité est réalisée à l’international.• Effectifs : 550

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Petit retour en arrière : 1989, BrunoMascart qui profite d’une année sab-batique pour boucler son premier tourdu monde, découvre du même coup le

potentiel d’affaires que représentel’Australie pour les entreprises françaiseset l’API PME, structure d’accompagnementdes PME à l’international créée en sontemps par la CGPME. Il pose son sac etcommence, dans ce cadre, à entrouvrir lemarché australien à des PME françaises.En 1991, la CGPME ferme ses antennesAPI PME. Bruno Mascart crée Altios etouvre son premier bureau, « à l’austra-lienne » : dans son garage. Pendant septans, Sydney restera la seule antenne decette société « française » mais sans exis-tence légale dans l’hexagone puisquecréée par un Français directement àl’étranger. Il faudra attendre l’arrivée deson premier associé, David Gérard, unV.I.E. (on les appelait CNSE à l’époque, ilseffectuaient ainsi leur service militaire)qui ouvrira en 1997 le premier bureau enFrance, à Nantes, resté depuis siège du groupe. En vingt ans, Altios a biengrandi avec l’arrivée de deux nouveauxassociés, Patrick Ferron, en 1999 et BorisLechevalier, en 2003 (tous deux sontaujourd’hui CCE). Elle s’implante dès 1999en Chine et aux Etats-Unis, à Lyon aussi,puis en Inde et au Brésil à partir de 2005.Son chiffre d’affaires consolidé en 2010tournera autour de 6 millions d’euros, sonplus gros marché est, sans surprise, laChine, talonnée par l’Australie, suivie d’un peu plus loin par les Etats-Unis, leBrésil, et l’Inde. A la fin de l’été, Parisaura, enfin, son bureau Altios et deuxnouveaux bureaux seront ouverts enRussie et au Mexique.

Tout est possible et Altios s’adapteSydney, l’implantation historique, assure20 % du chiffre d’affaires global du groupe.A partir de ses bureaux, plus de 500 mètrescarrés situés au cœur du centre-ville, Altioshéberge plus de 15 entreprises françaises.

Certaines de ces sociétés sont hébergéesphysiquement, matériel et personnel,d’autres le sont exclusivement sur les plansadministratif et juridique : « aujourd’huiquatre des PME dont nous nous occuponssouhaitent ce type de service, sans per-sonnel dans nos locaux, soit que leur struc-ture australienne n’en ait pas besoin, soitque leurs employés soient trop nombreuxpour être hébergés dans notre centred’affaires » souligne Bruno Mascart quiajoute : « certaines sociétés travaillent avecnous depuis dix ans, nous gérons pour euxdes filiales, à travers lesquelles elles réali-sent des chiffres d’affaires de 3 à 4 mil-lions de dollars australiens par an ». Et deciter des entreprises comme FillonTechnologies, équipementier automobile,dont Altios gère la filiale australienne. Laplupart des sociétés qu’Altios héberge phy-siquement peuvent avoir des structureslégères, comme un V.I.E., venu en éclai-reur, que la société d’accompagnementcoache. D’autres clients, déjà bien implan-tés sur le marché, font appel à Altios lors-qu’ils souhaitent renforcer leur présence.C’est le cas de la chaîne d’information spor-tive Euro Sport ou de Ferrari, le spécialistedes textiles à base de PVC pour le bâti-

ment. Sans oublier les sociétés ayant rem-porté quelques marchés importants et quiutilisent le centre d’affaires pour donner àleurs futurs bureaux le temps d’atteindrela maturité qui leur permettra de voler deleurs propres ailes. C’est le cas de Netgem,la success-story du moment. Netgem, leader de l’IP télévision (dont la Neufboxde SFR) qui vient de créer une filiale enAustralie lui permettant d’honorer le groscontrat signé avec Telstra, le « SFR aus-tralien » a en effet choisi les décodeurs detélévision numérique de Netgem, les T-Box, pour couvrir le pays. Sans oublier,non plus, quelques grandes marques delingerie (Princesse tam.tam, Lejaby, ChantalThomass) avec leurs maillots de bain, oude l’art de la table, dont Le JacquardFrançais… marques auxquelles Altios offreaussi un show room. Quelques nouvellessociétés devraient s’ajouter à la liste avantla fin de l’année.L’Australie offre de telles opportunitésactuellement que, pour Bruno Mascart,toute entreprise affichant déjà plus d’unmillion d’euros de chiffre d’affaires ou enréalisant plus de 20 % à l’internationalpeut y réussir si elle est bien entourée. Dansquels secteurs ? Dans la dynamiqueactuelle, quasiment tous sont concernés,avec quelques secteurs de prédilections liésaux activités des mines et des services,mais aussi des télécommunications suiteau NBN (National Broadband Network)énorme projet de réseau public Internet àhaut débit couvrant 90 % du pays1… sansoublier les autres opportunités dévelop-pées dans ce dossier. �

M. BD

Altios

Le porte-avions des PMEAvec une première implantation en Australie, il y a vingt ans, Altios international est devenu

le premier acteur privé français de l’accompagnement d’entreprises à l’international.

500« Altios Australie a contribué àl’implantation et au développement deplus de 500 PME » Bruno Mascart

1) Voir Infrastructures : floraison de grandsprojets page 44.

Bruno Mascart dans le show room d’Altios.

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RENCONTRE

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Australie

L ’Australie est traditionnellement unedestination privilégiée pour lesinvestissements étrangers dans larégion Asie-Pacifique. Les entreprises

européennes — et françaises en parti-culier — y sont très présentes. Avec prèsde 300 filiales qui emploient environ75 000 salariés, la France arrive au sep-tième rang des investisseurs étrangers.Ses entreprises sont donc particulière-ment bien placées pour suivre les nom-breux projets d’infrastructures financéspar les deux paliers de gouvernement :Commonwealth (fédéral) et des Etatsfédérés, ainsi que par le secteur privé.

Les besoins sont énormesLes dix-huit années de la croissance aus-tralienne sont essentiellement dues à lademande extérieure, notamment chi-noise en produits miniers et agricoles,et à une consommation domestique sou-tenue. Les sites miniers n’ont donc cesséde se multiplier et de se développer, lesexportations — minières mais aussi deproduits agricoles bruts — ont considé-

rablement augmenté sans que, dans lemême temps, les investissements adéquats dans les infrastructures detransports ferroviaires et portuaires nesoient réalisés. Face aux goulotsd’étranglements observés dans ces sec-teurs les gouvernements — fédéral etfédérés — ainsi que les entreprises pri-vées se sont lancés dans un effort derattrapage, partiellement en cours de réalisation, et qui s’étalera sur prèsd’une décennie.Même situation d’engorgement dans les infrastructures urbaines où un retardidentique a été observé. L’immigrationne cesse de gonfler une population enpleine expansion. Passer des actuels22 millions d’habitants aux 36 millionsattendus en 2050 exige des investisse-ments massifs en matière de transportsurbains et trans-urbains, d’approvision-nement en eau potable et d’assai-nissement. Toutes les grandes villes australiennes, par exemple, se sont, ousont sur le point de se doter d’unités de dessalement de l’eau de mer, four-

nies la plupart du temps par Degrémontet Veolia.Un ambitieux projet d’investissementde 43 milliards de dollars australiens(30 milliards d’euros) est au cœur du débat politique actuel. Il s’agit d’un réseau Internet à très haut débit (1 gigabit par seconde) de couverture deplus de 90 % du territoire (NationalBroadband Network), introduit par leprécédent gouvernement travailliste deKevin Rudd. Après l’échec d’un appel de candidature avec un opérateur privé, le financement devrait revenir à l’Etat fédéral, ce qui suscite l’opposition de la coalition libérale. S’il est approuvé — même modifié — ce chantier devraitêtre porteur d’opportunités pour lesentreprises françaises.

Et les moyens importantsPour répondre aux besoins de mise à niveau de ses infrastructures, le gouvernement a créé InfrastructureAustralia, chargée de développer etmoderniser les infrastructures dans les

Infrastructures

Floraison de grands projetsDix-huit années

d’une croissanceininterrompue et de gros

retards dans lesinvestissements ont généré

une situation exceptionnelle.Dans un grand nombre

de domaines les goulotsd’étranglement sont si

pénalisants qu’il est devenuurgent de construire

les infrastructuresindispensables. D’où une

floraison de projets,le plus souvent

de grande ampleur.

Près d’une décennie de grands travaux sera nécessaire pour rattraper le manqued’infrastructures et venir à bout des différents goulots d’étranglement.

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domaines des transports, de l’eau, del’énergie et des communications. Il aaussi inscrit au budget 2008-2009 unepremière tranche de 20 milliards de dol-lars australiens (14 milliards d’euros) aufonds créé sur mesure, le BuildingAustralia Funds, géré par InfrastructureAustralia et destiné à financer partiel-lement des projets d’infrastructuresnationaux.D’autre part, 2,3 milliards de dollars aus-traliens du Nation Building and JobsPlan (30 milliards d’euros destinés àsoutenir l’économie à la suite de la crisefinancière) sont destinés aux projetsd’infrastructures routières et ferroviaires.

Les entreprises françaises suivent déjà de gros projetsd’infrastructuresAlors que l’énorme projet télécoms NBNn’en est qu’à sa phase préliminaire deconception, avec essais à l’échelle locale,Alcatel Lucent s’est positionné auprèsdu constructeur, John Holland, pour lafourniture des composants techniqueset de la fibre. Dans un autre secteur sen-sible, l’énergie, surtout dans une zoneen pleine effervescence, Total participeavec le japonais Inpex à l’explorationdu champ de gaz naturel liquéfié off-shore Ichthys. L’Australie, qui connaîtde nombreuses sécheresses, se tournevers les usines de dessalement. Le der-nier projet en date, le VictorianDesalination Project, d’une valeur de2,45 milliards d’euros vient d’être rem-porté par le consortium Aquasure com-posé du français Degrémont et del’australien Thiess. Une usine, la TugunDesalination Plant a été construite parun consortium incluant Veolia. D’autresprojets, notamment en South Australiaet dans le Queensland sont actuellementà l’étude. Du fait de la taille de ce pays,les infrastructures routières, ferroviaireset portuaires représentent un investis-sement considérable. Dans le domaineferroviaire le consortium réunissantKeolis (filiale de la SNCF) et l’australienDowner EDI a remporté le contrat degestion du réseau de tramway deMelbourne, le plus long au monde.Montant du contrat : 105 millionsd’euros par an sur une durée initiale dehuit ans. Alstom suit par ailleurs les pro-jets d’acquisition de tramways et autreséquipements ferroviaires roulants pourla ville de Melbourne. Dans l’Etat du

Queensland la construction d’un tram-way pour la ville de Gold Coast devraitdébuter en 2011, coût : 700 millionsd’euros. Trois consortiums incluant desentreprises françaises (Alstom, Keolis,Veolia et Thales) ont participé à l’appeld’offres. Dans le BTP, BouyguesTravaux Publics a livré le 4 juillet 2010en alliance avec Macmahon etSeymourWhite Contractors le « GoBetween Bridge » à Brisbane pour unmontant de 210 millions d’euros.

Bouygues TP ainsi que Razel figurentsur la liste restreinte des sociétés invi-tées à soumissionner dans le cadre duprojet de construction d’un tunnel de5,7 kilomètres à Brisbane, toujours. Coûtestimé : 1,3 milliard d’euros.�

Eric Noitakis, conseiller économique,ambassade de France en Australie

et Laurent Peguret, CCE, Bouygues TP

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Ubifrance 7 octobre

« journée Australie »

Ouverte par Anne-Marie Idrac, secré-taire d’Etat au Commerce extérieuret David Ritchie ambassadeurd’Australie en France, cette ren-

contre co-organisée par les CCEF etUbifrance sera animée par une douzained’intervenants responsables ou ex-responsables d’entreprises en Australie,dont les CCE de la section et moi-même.Vous retrouverez ainsi, entre autres inter-venants, Didier Mahout, Roger Daix(Thales), Philippe Maddy, HemisphereConsulting, Michel Henri Carriol, pdgTrimex, Rémi de Cambiaire, Exco-Krestonet Corinne Bot, Polyglot Group ainsi queJean Pierre Rivery, CCE Bretagne, pdgSPF Diana.Un des paradoxes australiens, tel que jel’observe depuis maintenant près d’unan1, est le suivant. L’Australie est proba-blement l’économie la plus dynamiquede l’OCDE. Celle-ci n’a quasiment pasconnu la crise, ses marges de manœuvrebudgétaires font pâlir d’envie toutes leséconomies industrialisées et les oppor-tunités d’affaires générées par le rebondde la consommation et les projetsd’infrastructures sont très intéressantes.Last but not least, le cadre des affairesest parmi les plus lisibles du monde etles entreprises françaises qui y opèrent

y font en général de bonnes affaires. Pourautant, nos parts de marché (dont nousn’avons pas à rougir par rapport à lasituation dans la région Asie du Sud Esten général), ne sont sans doute pas à lahauteur de ce potentiel. Que nous disentnombre de PME qui n’ont pas encoretenté l’aventure ? « L’Australie c’est loin, nous n’y pensons pas forcément,mais si vous nous démontrez que nouspouvons y faire des affaires facilement et si vous pouvez nous aider à moindrecoût, nous sommes prêts à tenterl’expérience ». C’est bien là tout l’enjeude la journée Australie.�

Stephan Dubost,directeur Australie Ubifrance

Renseignements : Natalie Verne — Tél. : 01 40 73 36 97

E-mail : [email protected]

http://www.ubifrance.fr/programme-france/001PRG-

14031 + profiter-du-dynamisme-de-l-australie-mode-

d-emploi.html

1) L’Australie est un « pays Ubifrance » depuisle 1er septembre 2009, date à laquelle laMission Economique de Sydney a été« dévolue » à l’Agence. 10 personnes (dont 7 experts sectoriels) accompagnement lesentreprises françaises et notamment les PME,dans leur projet export en Australie.

Pour aider les entreprises françaises à découvrirl’exceptionnel potentiel de l’Australie, Ubifrance consacre, le

7 octobre prochain, un de ses « points pays » à l’une deséconomies les plus dynamiques des pays de l’OCDE. Son

thème : « Profiter du dynamisme australien : mode d’emploi ».

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Australie

T raditionnellement actives dans ledomaine des financements de projetsou des financements d’acquisition, lesbanques étrangères ont su profiter de

la mise en place d’un système de fonds depension obligatoire destiné à l’ensemble desemployés australiens, qui a permis en moins

de vingt ans d’alimenter une gigantesqueréserve financière. Ces fonds, 850 milliardsd’euros1 en mars 2010, constituent un puis-sant support pour un marché d’actions quiest un des plus actifs de la zone.Malgré la déréglementation et cette pré-sence des banques étrangères, le système

bancaire australien reste caractérisé par unetrès forte concentration.

La puissance des « quatre piliers »Afin de favoriser la compétition bancaire,le gouvernement a en effet mis en place en1990 une politique dite « des quatre piliers »qui interdit les fusions entre les quatre plusgrandes banques. Celles-ci – CommonwealthBank of Australia (CBA), Westpac BankingCorporation (Westpac), National AustraliaBank (NAB), et Australian and New ZealandBank (ANZ) – contrôlent aujourd’hui plusde 65 % des actifs bancaires du pays. Sicette disposition visait à préserver l’espaceconcurrentiel, elle n’a pas empêché cesquatre géants d’accroître leurs parts de mar-ché, en consolidant des acteurs régionaux,comme le démontrent les acquisitions en2008 de St George par Westpac ou deBankWest par CBA.Ces quatre banques présentent un profil de banque commerciale universelle et fournissent un large éventail de services à

Finance

Un système bancaire plus concentré que jamais

Peu nombreuses surle marché australien

en 1980, lesbanques étrangères

se sont d’abordmultipliées sur cequi est devenu un

marchéextrêmement

concurrentiel etsophistiqué, avant

que les contrecoupsde la crise

n’entraînentquelques replis.

Jusque-là essentiellement domestiques, les banques australiennes ont échappé à la crise des subprimes.

Les quatre plus grandes banquesaustraliennes contrôlent plus

de 65 % des actifs bancaires du pays

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travers un réseau couvrant l’ensembledu territoire australien. Elles ont tou-tefois conservé une orientation essen-tiellement domestique, seules deuxd’entre elles se sont ouvertes surl’étranger : ANZ, qui développe unestratégie de présence pan asiatique etNAB, qui a établi des positions (assezmodestes) au Royaume-Uni et auxEtats-Unis. Les banques australiennesont ainsi évité toute exposition auxproduits financiers toxiques et large-ment échappé aux difficultés rencon-trées par leurs homologues occiden-tales durant la crise financière actuelle.

Elles ont ainsi toutes préservé leurnotation AA attribuée par Standard & Poors, ce qui les positionne parmiles quinze banques les plus solides au monde.Malgré la bonne résistance del’économie australienne à la récentecrise financière, 2009 a marqué unrecul des banques étrangères, souventfrappées par les restructurations mon-diales de leurs groupes. Les acteurslocaux, en pleine santé, en ont encoreprofité pour renforcer leurs équipes etpénétrer toujours plus avant le mar-ché. Plus concentré que jamais, le mar-ché australien recèle cependant debelles opportunités de développementpour les grandes banques étrangères.Avec 1,7 % du Pib mondial, le pays estla troisième puissance économique dela région Asie-Pacifique. Sa forte crois-sance (3,6 % contre 2,5 % pour l’OCDEen moyenne des 15 dernières années),la stabilité politique d’un membre duG20 noté triple A et la proximité del’Asie font de l’Australie un des paysdéveloppés les plus attractifs pour lesinvestisseurs étrangers.�

Didier Mahout, CCE, Country HeadAustralie et Nouvelle-Zélande,

BNP Paribas

Un environnementjuridique sûr et attractifLe système de Common Law, voisin du système juridiquebritannique dont l’australien est historiquement dérivé,offre une bonne protection aux acteurs économiques.Beaucoup plus « libéral » que les systèmes d’Europecontinentale, ce système de droit non écrit nécessite

néanmoins une certaine vigilance.

• Accorder le plus grand soin aucontrat : traditionnellement, le droitfrançais écrit a mis en place desmesures de protection qui s’imposentaux cocontractants. A l’exception dudroit de la consommation (dont le droitde la franchise), le régime de CommonLaw australien ne prévoit que très peude règles écrites protectrices des par-ties. En conséquence, une attention par-ticulière doit être portée au contrat, seulmoyen de se protéger des risques. Cesderniers sont donc volumineux et doivent être rédigés ou revus avec soin.A titre d’exemple, il n’existe pas enAustralie de protection légale du loca-taire commerçant qui ne bénéficie pasde la « propriété commerciale ». Toutmaintien dans les lieux devra être orga-nisé contractuellement, notammentavec la mise en place d’options derenouvellement.• Savoir préférer le droit australien :« libéral », il est assez attractif pour lesacteurs économiques qui peuvent le caséchéant bénéficier d’une situation juri-dique plus favorable que dans leur paysd’origine. Il est donc souvent préférablede soumettre les relations juridiques audroit australien. Par exemple, uncontrat d’agent commercial en Francenécessitera le paiement par le com-mettant d’une indemnité en cas de rup-ture. Une telle obligation n’existe passous le droit australien. Il sera doncconseillé à la société mettant en placeun agent en Australie de soumettre lecontrat d’agent au droit local.• Implantation, mieux vaut créerune société : c’est, avec la succursaleet le bureau de représentation, la formela plus usuelle d’implantation. La créa-tion d’une société est simple, rapide et

peu coûteuse ; en revanche l’enregis-trement d’une succursale est long etrelativement lourd. Cela est notammentdû aux nombreux documents traduitset certifiés à fournir. Sauf raison spé-cifique, notamment fiscale, on préfé-rera la création d’une société.• Droit du travail, charges sociales :souplesse et légèreté : le droit du travail australien est très souple aubénéfice des employeurs, particulière-ment les PME. Les charges sociales(obligatoires) sur les rémunérations du travail sont très réduites : 9 % dusalaire pour une retraite par capitali-sation (obligatoire), 1,5 % pour la cotisation d’assurance santé et (envi-ron) 2 % pour l’assurance accident dutravail (Worker’s Compensation).• Fusions & acquisitions : un mar-ché très mature et dynamique avec, un grand nombre de transactions réa-lisées chaque année. Le cadre juridiquede l’investissement étranger est assezsouple et uniquement contraignantpour certains secteurs dits sensibles ou pour des opérations supérieures à 231 millions de dollars australiens.De même il existe un contrôle de laconcurrence organisé par l’Austra-lian Competition and ConsummerCommission (ACCC), qui reste cepen-dant dans la norme des autres pays de l’OCDE. La fiscalité raisonnable inhérente aux opérations de cession detitres de sociétés constitue un environ-nement favorable. De même qu’une fiscalité généralement neutre des distributions de dividendes vers lessociétés mères françaises. �

Mathieu Hanaut, CCE, avocat associé, cabinet Jones Day à Sydney

1) 1 257 milliards de dollars australiens — Source :Australian Prudential Regulation Authority (APRA)

Elles figurent parmiles quinze banques

les plus solides du monde

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Australie

Fusions & acquisitions

Le champion de la zone Asie-PacifiqueMalgré ses22 millions

d’habitants, la tailledu Benelux, et

une capitalisationboursière qui

n’atteint pas les 2 %du total global,l’Australie s’est

hissée au cinquièmerang mondial des

fusions &acquisitions devantla France et l’Inde.

Le marché australien des fusions & acqui-sitions est le plus actif de toute la régionAsie-Pacifique. Plusieurs raisons expli-quent cette performance : d’une part,

72 % de la valeur des transactions annon-cées en 2009 provient des secteurs liés auxressources naturelles (énergie, mines, infra-structures), toujours fertiles. D’autre part,l’Australie représente un point d’entrée anglo-saxon pour la zone Asie. Enfin, un systèmefinancier robuste (où les quatre grandesbanques australiennes ont pu pallier le« retrait » des banques américaines et bri-tanniques), un environnement légal moder-ne et accueillant pour des investisseursétrangers, ainsi qu’une stabilité politique sontautant d’atouts pour le marché australien.Accor illustre bien cette réalité : en 1991, legroupe hôtelier s’était établi en Australie avec

le complexe de Darling Harbour (Novotel,Mercure et Ibis). En l’an 2000, Accor rache-tait la chaîne d’hôtels All Seasons, dont lamarque s’étendra jusqu’à Paris. Aujourd’hui,150 hôtels portent l’une des marques dugroupe en Australie. D’autres français profi-tent de ces opportunités : on peut ainsiprendre l’exemple de Legrand (matériel élec-trique) qui a, en 2007, racheté HPM, numérodeux de l’appareillage électrique en Australieet Nouvelle-Zélande.Il y a donc une vraie opportunité sur le marché australien du M & A1 pour les entre-prises étrangères en quête de croissance. « Ici, les fusions-acquisitions sont perçuescomme une part importante de la stratégiedes entreprises » rappelle Scott Bok, co-directeur de Greenhill, célèbre conseil enfusions & acquisitions.Enfin, il faut noter que malgré un dynamismeet une culture business propre à « un deal »,il est important de respecter les principes fon-damentaux de création de valeur par acqui-sition, à savoir un fit2 stratégique et culturel,ainsi que des synergies réalisables et réali-sées rapidement.�

David Thevenon, CCE, Managing Partner,Value Line Consulting

Complexe Darling Harbour. Aujourd’hui, 150 hôtels portent la marque du groupe Accor en Australie.

1) M & A : Mergers & Acquisitions (fusions & acquisitions)2) Une correspondance, adéquation.

Fusions et acquisitions 2009

Rang mondial Pays cible Valeur des transactions

annoncées (Mds US$)Part du marché

mondial (%)1 Etats-Unis 1 063 29,4 %2 Royaume-Uni 319 8,8 %3 Chine 224 6,2 %4 Japon 221 6,1 %5 Australie 157 4,3 %11 France 82 2,3 %16 Inde 63 1,7 %

Total Monde 3 621 100 %

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Fiscalité

Le jeu compliqué des comparaisonsPour le particulier ou pour l’entreprise, l’Australie dispose d’un système fiscal moins lourd et plus simple à gérer que le système français. Il reste cependant difficile d’établir des comparaisons point par point, en fonction de la diversité

des impôts et taxes ainsi que de leurs champs d’application.

En France, le nombre d’impôts ettaxes, tout confondu, s’élève à prèsd’une centaine, en Australie on en relève une trentaine. A titre

d’exemple, une PME française de dixsalariés établira annuellement entre 60 à70 déclarations (fiscales et sociales), soitune moyenne de 5 à 6 par mois, alour-dissant d’autant le coût de la gestionadministrative. En Australie, une PMEde taille identique établira environ unetrentaine de déclarations par an1.Il n’en reste pas moins que les principesd’imposition sont similaires dans lesdeux pays : les revenus sont établis parnature (immobilier, salaires…) et leconcept de revenus mondiaux prévaut.Les revenus imposables ne divergent pasdans leur nature (ainsi les plus valuessont taxables dans les deux pays) maisplutôt dans leur modalités de détermi-nation du revenu taxable et de taxation.Il n’existe pas, par exemple en Australied’exonération des plus-values immobi-lières après quinze années de détentionpour les particuliers, ni de taux spéci-fiques d’imposition.

Politique fiscale : quelques différences• Le système fiscal australien privilégiel’imposition sur les revenus des entre-prises et des particuliers ainsi que sur laconsommation (Goods & Services Tax — GST), équivalent de la TVA. Ilnéglige complètement l’imposition surle capital. Il n’existe pas d’ISF (impôt desolidarité sur la fortune), ni de droits desuccession.• L’Australie finance son système desécurité sociale (Medicare) et de cou-verture chômage (Centerlink) par l’impôt,

contrairement à la France où ces deuxprestations font l’objet de budgets dis-tincts de celui de l’Etat et de finance-ments spécifiques gérés par des orga-nismes paritaires.• Le financement des retraites se fait parune cotisation obligatoire minimale del’employeur de 9 % du salaire versé. Letaux peut être supérieur et est un élé-ment de la rémunération (package).• Le salarié ne paie pas de cotisationssociales mais l’Australie pratique la rete-nue à la source, l’employeur prélève surson salaire, pour le fisc, l’impôt dû enfonction de sa rémunération.• Une des principales différences résidedans la notion du foyer fiscal. Chaquemembre du foyer fiscal est un contri-buable indépendant disposant d’un iden-tifiant fiscal, (Tax File Number ou TFN),devant établir sa propre déclaration derevenus et étant imposé indépendam-ment de son conjoint. Il n’existe pas dequotient familial et les niches ou les possibilités fiscales de déductions derevenus ou de réduction d’impôts sontbien moindres qu’en France (pasd’abattement de 10 %).L’impôt sur le revenu en vigueur enAustralie apparaît moins favorable, à

première lecture, que celui applicable enFrance mais on voit aussi, notammentà partir de tableaux comparatifs, commecelui publié ci-dessous, qu’en France lequotient familial et l’abattement de 10 %en réduisent le poids. Cela dit, si on tientcompte des autres impôts applicablesaux personnes physiques en Francecomme l’ISF, la tendance s’inverse. Ilconvient donc d’avoir une approcheaussi large que possible, d’intégrerd’autres impositions sur la personne,comme l’ISF, voire dans une certainemesure, les taxes locales (bien plus éle-vées en France qu’en Australie) pouravoir une appréciation plus comparable.Notons enfin que le système favorise laconstitution de retraites complémentaires(superannuation), il permet après uneimposition forfaitaire de 15 % dessommes placées, une exonération desrapports et des revenus distribués lorsquele contribuable prend sa retraite.�

Rémi de Cambiaire, CCE,expert comptable et

commissaire aux comptes, Kreston Australia International

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1) En Australie, l’exercice fiscal va du 1er juillet au 30 juin.

IR : l’absence de foyer fiscal

Exemple comparé du poids de l’IR pour un couple avec 2 enfants mineurs, puis sansenfants, pour un revenu net imposable de 50 000 euros pour chaque conjoint

IR France IR Australie

Couple Epoux + Epouse

Coupleavec2 enfants

11 430 € 22 892 €

Couple sansenfant

16 032 € 22 892 €

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