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Mémoire présenté devant l’ENSAE ParisTech pour l’obtention du diplôme de la filière Actuariat et l’admission à l’Institut des Actuaires le 22/02/2017 Par : Ahmed Moudden Titre: Modèle hybride : Modélisation du risque de prime en prévoyance Confidentialité : NON OUI (Durée : 1 an 2 ans) Les signataires s’engagent à respecter la confidentialité indiquée ci-dessus Membres présents du jury de la filière Entreprise : Nom : AXA FRANCE Signature : Membres présents du jury de l’Institut des Actuaires Directeur de mémoire en entreprise : Nom : Tao Zhang Signature : Autorisation de publication et de mise en ligne sur un site de diffusion de documents actuariels (après expiration de l’éventuel délai de confidentialité) Signature du responsable entreprise Secrétariat : Signature du candidat Bibliothèque : Ecole Nationale de la Statistique et de l’Administration Economique (ENSAE) 3, Avenue Pierre Larousse – 92245, MALAKOFF CEDEX, France

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Mémoire présenté devant l’ENSAE ParisTech

pour l’obtention du diplôme de la filière Actuariat

et l’admission à l’Institut des Actuaires

le 22/02/2017

Par : Ahmed Moudden

Titre: Modèle hybride : Modélisation du risque de prime en prévoyance

Confidentialité : NON OUI (Durée : 1 an 2 ans)

Les signataires s’engagent à respecter la confidentialité indiquée ci-dessus

Membres présents du jury de la filière

Entreprise :

Nom : AXA FRANCE

Signature :

Membres présents du jury de l’Institut

des Actuaires

Directeur de mémoire en entreprise :

Nom : Tao Zhang

Signature :

Autorisation de publication et de

mise en ligne sur un site de

diffusion de documents actuariels

(après expiration de l’éventuel délai de

confidentialité)

Signature du responsable entreprise

Secrétariat : Signature du candidat

Bibliothèque :

Ecole Nationale de la Statistique et de l’Administration Economique (ENSAE)

3, Avenue Pierre Larousse – 92245, MALAKOFF CEDEX, France

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3 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Résumé

Face à un monde de plus en plus incertain, la réforme Solvabilité 2 vise à inciter les

entreprises d’assurance à mieux appréhender les risques liés à leur activité dans le but de garantir leur solvabilité vis-à-vis des assurés. Dans le cadre de cette réforme, les assureurs doivent être en mesure de mieux maîtriser leurs risques, et doivent en particulier rester solvables en cas d’évènements bicentenaires se produisant à horizon un an. Dès l’adoption cette directive par la commission européenne en 2007, les assureurs européens ont mis en œuvre des moyens conséquents afin d’accueillir au mieux cette réforme qui n’est entrée officiellement en vigueur qu’au 1er Janvier 2016.

Parmi les particularités de cette réforme figure le choix, laissé à la discrétion de l’assureur, d’appliquer une formule standard fournie par le régulateur ou de développer un modèle interne adapté à son propre profil de risque. AXA France a opté pour un modèle interne qui a été validé par le régulateur. Dans le modèle interne vie d’AXA France, le périmètre hybride désigne les périmètres vie où des techniques non-vie sont utilisées pour la tarification ou le provisionnement. Cela concerne en pratique les contrats de prévoyance non emprunteur. Sur ce périmètre, AXA France a développé un modèle hybride qui distingue deux sources de risque : le risque de prime et le risque de réserve. Le risque de prime correspond au risque de sous-tarification conduisant à des montants de sinistres supérieurs à ceux prévus par la tarification. Ce risque porte sur les sinistres à venir. Le risque de réserve quant à lui correspond au risque de sous-évaluation des réserves au moment du calcul des provisions sur les sinistres déjà survenus. Il s’agit du risque de réévaluation de ces sinistres.

Ce mémoire traite du calibrage du choc bicentenaire pour le risque de prime en prévoyance individuelle et propose d’améliorer la modélisation actuelle de ce sous-module de risque. En effet, le modèle interne d’AXA a été approuvé sous réserve d’un suivi et d’une amélioration continue de celui-ci. Deux garanties différentes de prévoyance sont étudiées dans le cadre de ce mémoire: la garantie décès et la garantie des accidents de la vie, communément appelée GAV.

Pour la garantie décès, un modèle vie a été testé dans un premier temps afin de calibrer le choc associé au risque de mortalité. Ce modèle distingue deux composantes du risque: le risque de process et le risque d'estimation. Le risque de process correspond à l’incertitude sur l’évolution du taux de mortalité, englobant le risque de niveau et de tendance. Le risque d’estimation, autrement appelé risque d’échantillonnage, correspond au risque de fluctuations autour des taux de mortalité théoriques. Après avoir testé ce modèle vie, un modèle non-vie de type fréquence-sévérité a été expérimenté pour modéliser le ratio de sinistralité. Le choix de cette deuxième approche permettrait d’étendre cette méthode de calibrage à d’autres périmètres disposant de moins de données que le périmètre individuel. Par ailleurs, la modélisation des traités de réassurance non proportionnelle est plus simple via cette méthode. Compte-tenu des spécificités de la garantie décès et de ses différences par rapport à une garantie non-vie classique, une segmentation du portefeuille par tranches d'âges et de capitaux garantis a été nécessaire pour la modélisation de la sinistralité du portefeuille.

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Dans le cas de la garantie des accidents de la vie (GAV), une méthode non-vie a été implémentée en raison de ses caractéristiques proches d'une garantie du type IARD. L'objectif de cette approche est d'obtenir une distribution du ratio de sinistralité à horizon 1 an. Pour cela, nous effectuons une segmentation entre les sinistres attritionnels, fréquents à coût faible, et les sinistres atypiques, rares et coûteux. Un retraitement préalable des données de cette garantie est indispensable. En effet, compte-tenu du long développement de la garantie et de la prudence des provisions comptables, une mise à l’ultime de la fréquence et du coût des sinistres ainsi qu’un retraitement « best estimate » ont été nécessaires avant d’ajuster aux deux types de sinistres un modèle de type fréquence-sévérité. Mots clés : Solvabilité 2, modèle interne, choc bicentenaire, risque de prime, ratio de sinistralité, modèle vie, modèle non-vie.

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Abstract Facing an increasingly uncertain world, the Solvency II reform aims to encourage insurance

companies to have a better understanding of the risks associated to their business in order to guarantee their solvency regarding to their insured. As part of this reform, insurers must be able to have a better control of their risks, and must in particular remain solvent in the event of bicentenary events occurring within one year. Since the adoption of this directive by the European Commission in 2007, European insurers have implemented substantial means to accommodate this reform, which has only officially entered into force on 1 January 2016.

One of the particularities of this reform is the choice, left to the discretion of the insurer to apply whether a standard formula given by the regulator or to develop an internal model adapted to its own risk profile. AXA France opted for an internal model validated by the regulator. In the internal “life model” of AXA France, the hybrid perimeter refers to life guarantees where non-life techniques are used for pricing or provisioning. This applies in practice to the non-borrowing Prévoyance policies. On this perimeter, AXA France has developed a hybrid model distinguishing between two sources of risk: premium risk and reserve risk. The premium risk refers to the risk linked to the under-pricing leading to claims which are higher than those stipulated by the tariffs. This risk relates to future claims. The reserve risk is linked to the risk of undervaluation of reserves when calculating provisions for claims which has already occurred. This is the risk of re-evaluation of these claims.

This thesis deals with the calibration of the bicentennial shock for the premium risk of

individual protection pensions and proposes to improve the current modeling of this submodule. Indeed, Axa's internal model has been approuved provided a following up and a constant improvement. Two different guarantees of protection are examined in this thesis: the death benefit and the Life Accident Guarantee commonly called GAV. Concerning the death benefit, a life model was first tested to calibrate the shock associated with the risk of mortality. This model distinguishes two risk components: process risk and estimation risk. The process risk refers to the uncertainty of the mortality rate evolution, including the risk of level and trend. Estimation risk, otherwise referred to as sampling risk, is the risk of fluctuations around the theoretical mortality rates. After testing a life model, a non-life model of frequency-severity type was tested to model the loss ratio. Choosing a second approach would allow to extend this calibration method to other perimeters with less data than the individual perimeter. Furthermore, the modeling of non-proportional reinsurance treaties is simpler via this method. Given the specific features of the death benefit and its differences from a standard non-life insurance policy, a segmentation of the portfolio by ages and guaranteed capital was necessary for modeling the loss ratio of the portfolio.

Regarding the Life Accident Guarantee (GAV), a non-life method has been implemented because of its characteristics which are similar to a non-life guarantee. The objective of this approach is to obtain a distribution of the loss ratio to one year horizon. To do this, we perform a segmentation between attritional claims, frequent at low cost, atypical claims, rare and costly claims. A preliminary reprocessing of the data of this guarantee is

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necessary. Given the long development of the guarantee and the prudence of the accounting provisions, a computation seen at the ultimate of the frequency and the claims cost, and a best estimate restatement were necessary before adjusting a model of frequency-severity type for the two types of claims.

Key Words: Solvency II, internal model, bicentenary shock, premium risk, loss ratio, life model, non-life model.

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Remerciements

Je tiens tout d’abord à remercier Rim Ennajar, responsable du département « Risk

Management Vie individuelle », pour m’avoir permis d’intégrer ses équipes, pour sa confiance et ses conseils. Je remercie Aïcha Souki, manager de l’équipe « Risques techniques vie individuelle », de m’avoir permis de rejoindre son équipe, de m’avoir proposé un sujet stimulant, ainsi que pour ses précieux conseils et remarques pertinentes. Je la remercie aussi pour son implication, elle m’a donné l’occasion de présenter mes travaux devant des équipes variées conduisant à d’enrichissants échanges. Mes remerciements vont également à mon tuteur de mémoire Tao Zhang, pour son encadrement et sa disponibilité permanente tout au long de la réalisation de ce mémoire. Il a su partager avec moi ses compétences de manière pédagogique. Je le remercie pour son soutien technique et moral. Je remercie aussi les équipes actuariat et direction marché prévoyance individuelle pour avoir répondu à mes sollicitations et demandes de données ainsi que pour les échanges fructueux qu’on a menés ensemble. Je remercie par ailleurs les membres du conseil scientifique d’AXA France pour leurs recommandations lors de la présentation de mon mémoire. Enfin, je remercie chaleureusement toute l’équipe RMF Vie individuelle pour leur sympathie ainsi que l’équipe pédagogique de l’ENSAE qui m’a transmis des compétences techniques utiles à la réalisation de ce travail. Je remercie en particulier mon tuteur académique Pierre Picard pour son encadrement lors de la réalisation de ce mémoire.

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Sommaire

Résumé ................................................................................................................................................ 3

Abstract ............................................................................................................................................... 5

Remerciements ................................................................................................................................... 7

Introduction ...................................................................................................................................... 11

1. Partie I : Présentation de l’entreprise ....................................................................................... 12

1.1. AXA France ......................................................................................................................... 12

1.2. Risk Management France ................................................................................................... 12

2. Partie II : Solvabilité 2................................................................................................................ 13

2.1. Présentation de la réforme : de Solvabilité 1 à Solvabilité 2 ............................................. 13

2.2. Les trois piliers de la réforme ............................................................................................. 14

2.3. Pilier I: Le Solvency Capital Requirement (SCR) ................................................................. 15

2.3.1. Définition du SCR ........................................................................................................ 15

2.3.2. Formule standard ou modèle interne ......................................................................... 16

2.3.3. Calcul du SCR en formule standard ............................................................................. 17

2.3.4. Calcul du SCR en modèle interne ................................................................................ 19

3. Partie III : Modèle interne d’AXA en prévoyance: présentation du modèle hybride ............... 21

3.1. Une vision économique du bilan comptable S2 ................................................................. 21

3.2. Structure du modèle interne d’AXA France ....................................................................... 22

3.2.1. Modèle interne global ................................................................................................. 22

3.2.2. Architecture du modèle interne du risque de souscription vie ................................. 24

3.2.3. Périmètre hybride ....................................................................................................... 27

3.3. Modèle hybride : Calibrage du choc Prime ........................................................................ 28

3.4. Modèle hybride : Calibrage du choc Réserve ..................................................................... 30

3.5. Problématique et inconvénients du modèle ...................................................................... 30

3.6. Objectif de l’étude .............................................................................................................. 31

4. Partie IV : Etude de la garantie décès : application d’une méthode vie ................................... 32

4.1. Présentation de la garantie décès ...................................................................................... 32

4.2. Hypothèses de tarification ................................................................................................. 33

4.3. Produit commercialisé par AXA France .............................................................................. 33

4.4. Périmètre de l’étude .......................................................................................................... 34

4.5. Le risque de mortalité défini par le régulateur .................................................................. 34

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4.6. Modèle vie : approche agrégée .......................................................................................... 35

4.7. Modèle vie : approche en deux composantes ................................................................... 38

4.7.1. Présentation du modèle ............................................................................................. 38

4.7.2. Justification du modèle ............................................................................................... 39

4.7.3. Calibrage du choc process ........................................................................................... 39

4.7.4. Calibrage du choc d’estimation .................................................................................. 52

4.8. Synthèse et traduction du choc de mortalité en S/C ......................................................... 53

4.9. Conclusion et limites de l’approche vie ............................................................................. 54

5. Partie V : Etude de la garantie décès : application d’une méthode non-vie ............................ 55

5.1. Justification de l’approche ................................................................................................. 55

5.2. Présentation de la méthodologie IARD générale ............................................................... 55

5.3. Spécificités de la garantie décès ........................................................................................ 56

5.4. Adaptation du modèle IARD à la garantie décès ............................................................... 56

5.4.1. Modélisation de la sinistralité ..................................................................................... 56

5.4.2. Analyse des données du portefeuille .......................................................................... 58

5.4.3. Modélisation des primes ............................................................................................. 61

5.4.4. Simulation du ratio de sinistralité S/P ........................................................................ 62

5.5. Résultats ............................................................................................................................. 63

5.6. Autre méthode de partitionnement : algorithme des k-means ........................................ 64

5.7. Comparaison avec l’approche vie et conclusion ................................................................ 66

6. Partie VI : Calibrage du choc prime pour la garantie GAV : Utilisation d’une approche Non-vie

68

6.1. Présentation de la garantie ................................................................................................ 68

6.2. Modélisation des sinistres .................................................................................................. 69

6.2.1. Modèle IARD collectif en fréquence-coût ................................................................... 69

6.2.2. Formules de Wald ....................................................................................................... 70

6.2.3. Choix du seuil de segmentation .................................................................................. 70

6.2.4. Retraitements des données : mise à l’ultime et correction de l’inflation .................. 75

6.2.4.1. Mise à l’ultime des coûts ......................................................................................... 75

6.2.4.2. Correction des coûts de l’inflation .......................................................................... 80

6.2.5. Modélisation des sinistres attritionnels...................................................................... 83

6.2.6. Modélisation des sinistres atypiques .......................................................................... 87

6.3. Modélisation des primes .................................................................................................... 88

6.4. Simulation du S/P ............................................................................................................... 90

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6.5. Conclusion de l’approche ................................................................................................... 91

Conclusion ......................................................................................................................................... 92

Note de synthèse .............................................................................................................................. 94

Executive summary ........................................................................................................................... 98

Table des figures ............................................................................................................................. 102

Annexes ........................................................................................................................................... 105

Bibliographie ................................................................................................................................... 112

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Introduction Dès l’adoption de la directive Solvabilité 2 par la commission européenne en 2007, les

assureurs européens ont mis en œuvre des moyens conséquents afin d’accueillir au mieux cette réforme qui n’est entrée officiellement en vigueur qu’au 1er Janvier 2016. Face à un monde de plus en plus incertain, cette réforme vise à inciter les entreprises d’assurance à mieux appréhender les risques liés à leur activité dans le but de garantir leur solvabilité vis-à-vis des assurés. Dans le cadre de cette réforme, les assureurs doivent en particulier rester solvables en cas d’évènements bicentenaires se produisant à horizon un an. Pour cela, un besoin en capital calculé en fonction du profil de risque de l’assureur - en formule standard ou en modèle interne - doit être immobilisé. Dans le modèle interne d’AXA France, nous appelons « périmètre hybride » les contrats vie pour lesquels les techniques actuarielles mises en œuvre pour la tarification ou le provisionnement relèvent de la non-vie. Le terme « hybride » reflète l’idée que ces contrats possèdent à la fois des caractéristiques vie et non-vie. Sur ce périmètre, le modèle utilisé pour le calcul du besoin en capital (appelé STEC dans le modèle interne d’AXA pour « Short Term Economic Capital ») est un modèle hybride distinguant entre deux sources de risque : le risque de prime et le risque de réserve. Le choc bicentenaire utilisé pour le calcul du STEC de prime est calibré à partir de la chronique du ratio de sinistralité S/P. Ce modèle est aujourd’hui perfectible puisque la variable S/P englobe plusieurs facteurs de risque qu’elle ne peut refléter de manière suffisamment fine.

Nous traitons dans ce mémoire deux types de garanties de prévoyance individuelle

appartenant au périmètre hybride, et pour lesquelles nous allons proposer une nouvelle approche pour le calibrage du choc bicentenaire relatif au risque de prime. Il s’agit de la garantie décès et la garantie des accidents de la vie communément appelée GAV. Pour ces garanties, nous proposerons soit un modèle vie, basé sur la modélisation d’une variable biométrique, soit un modèle non-vie, basé sur une modélisation en fréquence-sévérité. Nous présenterons dans un premier temps l’environnement dans lequel ce mémoire a été rédigé, puis le contexte réglementaire Solvabilité 2. Ensuite, nous nous attarderons sur le modèle interne d’AXA France et en particulier sur le périmètre hybride afin d’exposer de manière précise la problématique actuelle. Nous entamerons par la suite la partie technique du mémoire en étudiant en premier lieu la garantie décès. Nous testerons pour celle-ci d’abord un modèle vie basé sur la modélisation des taux de mortalité puis un modèle non-vie de type fréquence-sévérité tenant compte des spécificités de la garantie. En second lieu, nous étudierons la garantie des accidents de la vie (GAV) ; après une présentation du produit et un retraitement indispensable des données, une méthode non-vie sera exposée pour cette garantie en raison de ses caractéristiques proches d'une garantie du type IARD. Chacune de ces deux études sera suivie d’une conclusion analysant les résultats obtenus via le modèle, les avantages et limites de celui-ci, ainsi que ses axes d’amélioration.

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1. Partie I : Présentation de l’entreprise

Dans cette première partie, nous présentons brièvement l’environnement dans lequel ce mémoire a été réalisé.

1.1. AXA France

AXA France est la filiale française du groupe AXA, spécialisé principalement dans le secteur de l’assurance. Le groupe, dénommé « AXA » en 1985, est issu de la fusion de plusieurs sociétés d'assurance dont la plus ancienne date de 1817. Le groupe fait partie aujourd’hui des principaux acteurs de marché dans le monde et compte des entités implantées dans 64 pays. AXA France représente la plus importante entité du groupe avec un actif dépassant les 30% de l’actif total du groupe. Ses activités portent sur l’assurance vie (Epargne, retraite et prévoyance), l’assurance dommages, l’assistance, et la banque, regroupant des sociétés anonymes, des mutuelles ainsi que des assureurs en ligne.

1.2. Risk Management France

Le département Risk Management France est rattaché à la direction générale d’AXA France. Le rôle du Risk Management a vu son rôle se renforcer avec la réforme Solvabilité 2. Sa principale mission est de s’assurer que les risques sont identifiés, mesurés, gérés et surveillés. La direction RMF est scindée en cinq départements :

Figure 1-1 Organigramme de la direction Risk Management d’AXA France

J’ai effectué mon année d’alternance au sein du département Vie individuelle et plus précisément au sein de l’équipe « risques techniques » en charge du modèle interne Solvabilité 2.

Risk Managemment

IARD & Risques Opérationnels

Vie Individuelle Vie collectives Risques

Financiers & Banque

Modèles & Valorisations

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13 Modélisation du risque de prime en prévoyance

2. Partie II : Solvabilité 2

2.1. Présentation de la réforme : de Solvabilité 1 à Solvabilité 2

Solvabilité II est une réforme réglementaire régissant le secteur de l’assurance qui est entrée en vigueur le 1er Janvier 2016. Cette réforme a été promue par la commission européenne et adoptée par le parlement et le conseil européens. Son objectif est de mieux adapter les fonds propres exigés des compagnies d'assurance et de réassurance aux risques que celles-ci encourent dans leur activité, ceci afin de garantir aux clients la solvabilité à long terme de la compagnie qui les assure. Il s’agit d’un standard de marché qui vise à harmoniser les règles prudentielles de solvabilité imposées aux assureurs de l’Union Européenne. Jusqu’au 1er Janvier 2016, les entreprises d’assurance étaient soumises aux règles de Solvabilité 1 qui datent de 1970 dont les critiques principales portaient sur un manque de sensibilité au risque, peu d’exigences de gouvernance et un manque de convergence internationale. Les principales différences entre les réformes Solvabilité I et Solvabilité II peuvent être résumées dans le tableau ci-dessous:

Figure 2-1 Tableau récapitulatif des principales différences entre Solvabilité 1 et Solvabilité 2

Solvabilité 1

Capital requis = "Fonction d'indicateurs comptables".

Vision réglementaire et comptable.

Régles propres à chaque pays.

Indicateurs de solvabilité globaux.

Pas de possibilité de développer un modèle interne.

La marge de Solvabilité Réglementaire (MSR) ne reflète en rien les risques portés par l'assureur.

Approche forfaitaire qui ne prend pas en compte les risques de marché : l'exigence de solvabilité est principalement quantitaive.

Solvabilité 2

Capital requis = Fonction des risques souscrits et de la stratégie d'investissement.

Vision économique et "Maret consistent".

Règles harmonisées pour les 30 pays de l'EAA.

Prise en compte de la diversification.

Développement de modèles internes permettant de mieux appréhender le profil de risques.

Des éxigences en capital qui reflétent mieux les risques supportés par l'assureur:SolvencyCapital Requirement (SCR) ; Minimum Capital Requirement (MCR)

Une volonté de placer la gestion des risques au coeur de la gouvernance des assureurs.

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14 Modélisation du risque de prime en prévoyance

2.2. Les trois piliers de la réforme

Solvabilité 2 s'articule autour de trois grands piliers : un premier pilier quantitatif précisant les normes de calcul des principaux éléments du bilan, un second pilier qualitatif définissant les exigences de gouvernance, et un dernier pilier sur les obligations de reporting et de communication financière.

Le premier pilier a pour objectif de définir les normes quantitatives de calcul des provisions techniques et des fonds propres. Des normes d’évaluation pour les actifs et les passifs fondées sur la définition de la juste valeur sont introduites. Les provisions techniques sont évaluées sur la base des valeurs de sortie, en distinguant :

La valeur actuelle probable des flux de trésorerie (Best estimate) et la marge de risque

Les niveaux règlementaires du MCR et SCR sont définis pour les fonds propres:

Le MCR (Minimum Capital Requirement) représente le niveau minimum de fonds propres en dessous duquel l'intervention de l'autorité de contrôle sera automatique. Il représente le niveau de fonds propres en dessous duquel les intérêts des preneurs se verraient menacés si l’entreprise poursuivait son activité.

Le SCR (Solvency Capital Requirement) représente le capital cible nécessaire pour absorber le choc provoqué par un risque majeur (par exemple : un sinistre exceptionnel, un choc sur les actifs...). Il correspond au capital économique pour limiter la probabilité de ruine à un an à 0,5%.

Le deuxième pilier a pour objectif de fixer des normes qualitatives de suivi des risques en

interne et la manière à laquelle l'autorité de contrôle doit exercer ses pouvoirs de surveillance. L’objectif de ce pilier est de montrer à l’autorité de contrôle que l’assureur maitrise ses risques. L'identification des sociétés "les plus risquées" est un objectif et les autorités de contrôle auront en leur pouvoir la possibilité de réclamer à ces sociétés de détenir un capital plus élevé que le celui suggéré par le calcul du SCR ou de réduire leur exposition aux risques. Il encourage les compagnies à adopter une démarche ERM (Enterprise Risk Management) afin qu'elles soient en mesure d'apprécier et de mesurer leurs risques, notamment via l'application du dispositif "Own Risk and Solvency Assessment "(ORSA), autrement appelé l’auto évaluation des risques et de la solvabilité. Dans le cadre de l'application de ce dispositif, les entreprises d'assurance doivent notamment être en mesure d’évaluer l’adéquation de leur profil de risque à leur méthode de calcul du SCR. Dans le cas où l’assureur utilise un modèle interne, il doit être en mesure de fournir une explication de la manière à laquelle ce modèle est utilisé en interne notamment dans la prise des décisions stratégiques, c’est ce qu’on appelle le « Use Test ». Ce pilier définit également quatre fonctions clés chez un assureur :

La gestion des risques Le contrôle interne L’audit interne La fonction actuarielle

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15 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Le troisième et dernier pilier a pour objectif de définir l'ensemble des informations détaillées auxquelles le public aura accès, d'une part, et auxquelles les autorités de contrôle pourront avoir accès pour exercer leur pouvoir de surveillance, d'autre part. L’autorité de contrôle doit disposer des informations suffisantes pour évaluer le système de gouvernance, les activités, les risques, le système de gestion des risques, ainsi que la structure du capital. A ce titre, les entreprises publient un rapport présentant leur situation financière et leur solvabilité.

Figure 2-2 Schéma résumant les 3 piliers de la réforme solvabilité 2

2.3. Pilier I: Le Solvency Capital Requirement (SCR)

En Solvabilité 1, la marge de solvabilité exigée de la part de l’assureur est forfaitaire. Pour un assureur vie par exemple, le minimum de marge à constituer correspond à 4% de la provision mathématique des contrats en fond « Euro » (avec risque de placement) et 1% de la provision mathématique des contrats en « Unité de Compte » (sans risque de placement). Pour la prévoyance, la marge de solvabilité correspondait également à un montant forfaitaire dépendant des capitaux sous risque. Cette approche a fait l’objet de nombreuses critiques notamment un manque de sensibilité au risque face à un monde de plus en plus incertain. Le premier pilier de la nouvelle réforme Solvabilité 2 définit des exigences en capital qui reflètent mieux le profil de risque de l’assureur. Nous présenterons dans cette section la définition du besoin en capital réglementaire ainsi que les différentes approches à disposition de l’assureur pour l’évaluer.

2.3.1. Définition du SCR

Le Solvency Capital Requirement (SCR) se définit par l'exigence de capital cible

correspondant à une probabilité de faillite de 0.5% sur un horizon d’un an (scenario bicentenaire). C’est le montant des pertes économiques qu’un assureur est susceptible d’encourir sur une année basé sur des risques pouvant se produire au moins une fois toute les 200 ans.

Les assureurs peuvent opter pour un mode de calcul du SCR basé sur la formule standard ou le modèle interne complet basé sur leur profil de risque spécifique, ou bien encore pour un mode de calcul hybride le modèle interne partiel (en mixant formule standard et modèle interne).

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16 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Le tableau ci-dessous synthétise les différentes options à disposition des assureurs pour le calcul du besoin en capital :

Données

propres à

l’organisme

Méthode de

calcul propre à

l’organisme

Formule

standard Non Non

USP Oui Non

MIP Oui Oui

(partiellement)

MI Oui Oui

Figure 2-3 Possibilités offertes à l’assureur pour l’évaluation du besoin en capital

2.3.2. Formule standard ou modèle interne

Pour calculer le SCR, l’assureur peut avoir recours principalement à deux méthodes: la Formule Standard fournie par la directive ou un modèle spécifique développé en interne qui est plus adaptée à son propre profil de risques. Le choix de l’application de la formule standard ou le développement d’un modèle interne dépend de la stratégie de l’entreprise. Le schéma ci-dessous illustre les avantages et inconvénients des deux méthodes de calcul:

Figure 2-4 Avantages et inconvénients de la formule standard et du modèle interne

Simplifications

Formule standard

USP

Modèle interne partiel

Modèle interne

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17 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Le modèle interne nécessite un coût de mise en œuvre bien plus important que la formule standard mais permet à l’entreprise d’assurance une modélisation précise reflétant de manière fidèle son profil de risque.

2.3.3. Calcul du SCR en formule standard

La formule standard est conçue selon une architecture modulaire. Pour déterminer le SCR « Solvency Capital Requirement », il est nécessaire de calculer un besoin en capital pour chaque risque identifié. Après avoir calculé les SCR par module de risque, ces besoins sont agrégés via des matrices de corrélations afin de d’obtenir le SCR de base appelé « Basic SCR ». Le SCR de chaque module de risque est lui-même obtenu par agrégation des SCR de ses sous-modules. Enfin, le SCR est la somme du BSCR et du besoin en capital lié au risque opérationnel, diminuée des ajustements liés à la capacité d’absorption des pertes par les impôts différés et par les provisions techniques. Le schéma suivant présente l’architecture des risques intervenants dans la formule standard :

Figure 2-5 Sous modules de risque de la formule standard

SCR

BSCR

Marché

Actions

Spread

Taux

Immobilier

Concentration

Change

Souscription Vie

Rachats

CAT

Frais

Mortalité

Longévité

Invalidité

Révision

Souscription Non-Vie

Primes et réserves

CAT

Rachats

Souscription santré

Santé Sim. Vie

Rachats

Frais

Mortalité

Longévité

Invalidité

Révision

CAT Santé Sim.

Non-vie

Primes et réserves

Rachats

Actifs intangibles

Défauts de contrepartie

Opérationnel Ajustements

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18 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Les effets de diversification sont éventuellement pris en compte dans l’architecture de chaque module, par une agrégation des capitaux via une matrice de corrélation. La matrice de corrélation entre les différents modules de risques est fournie par l’EIOPA (European Insurance and Occupational Pensions Authority) :

Marché Contrepartie Vie Santé Non-Vie

Marché 1 0,25 0,25 0,25 0,25

Contrepartie 0,25 1 0,25 0,25 0,5

Vie 0,25 0,25 1 0,25 0

Santé 0,25 0,25 0,25 1 0

Non-Vie 0,25 0,5 0 0 1

Figure 2-6 Matrice de corrélation entre les modules de risque de la formule standard

Les SCR des sous-modules de risque vie sont également agrégés via une matrice de corrélation. La matrice utilisée pour la formule standard est la suivante :

Mortalité Longévité Incap Inval Frais Révision Rachat CAT

Mortalité 1 -0,25 0,25 0,25 0 0 0,25

Longévité -0,25 1 0 0,25 0,25 0,25 0

Incap Inval 0,25 0 1 0,5 0 0 0,25

Frais 0,25 0,25 0,5 1 0,5 0,5 0,25

Révision 0 0,25 0 0,5 1 0 0

Rachat 0 0,25 0 0,5 0 1 0,25

CAT 0,25 0 0,25 0,25 0 0,25 1

Figure 2-7 Matrice de corrélation entre les sous-modules de risque Vie de la formule standard

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19 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Pour chaque sous-module de risque, le calcul du besoin en capital SCR est obtenu par la différence entre l’Actif Net avant stress et après stress:

SCR = Actif Net avant stress - Actif Net après stress

du SCR en modèle interne

2.3.4. Calcul du SCR en modèle interne Rappelons que le SCR est une Value-at-Risk (VaR) du capital économique avec un niveau de

confiance de 99,5% à un an. Pour calculer le SCR en modèle interne, l’assureur cherche généralement à obtenir pour l’ensemble des risques une distribution de sa situation nette globale à horizon un an. Le modèle interne permet donc d’obtenir une distribution de bilans économiques en fin de première année en intégrant l’ensemble des risques auxquels l’assureur est exposé.

Figure 2-9 Calcul du SCR en modèle interne

ACTIFS

(en valeur de

marché)

Dettes

(en valeur

économique)

Actif Net

Bilan économique scénario central

ACTIFS

(en valeur de

marché)

Dettes

(en valeur

économique)

Actif Net

Actif Net

Actif Net

Besoin en capital

Bilan économique scénario de choc Scénario

de choc

Ex : hausse de la courbe des taux sans risque

Figure 2-8 Calcul du SCR en formule standard

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20 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Afin d’obtenir la distribution du capital économique à horizon un an, une première approche possible est la technique des simulations dans les simulations. Le principe de cette méthode consiste dans un premier temps à modéliser les différents facteurs de risque (taux, actions, spread, mortalité…) de l’assureur à horizon un an dans l’univers réel, c’est-à-dire sous la mesure de probabilité historique. Ainsi, à la fin de la première année, on obtient n scénarios primaires correspond à des réalisations différentes des facteurs de risque. Pour chaque scénario primaire, on évalue le passif de l’assureur en projetant ses engagements à horizon 60 ans en univers risque-neutre sur m scénarios. Rappelons que dans l’univers risque-neutre tous les actifs ont le même rendement, celui du taux sans risque. Les m scénarios secondaires sont calibrés en t=1 de manière « market-consistent » en tenant compte du scénario primaire observé en fin de première année et permettent d’obtenir le passif en vision best-estimate (égale à l’espérance actualisée de ses cash-flows sur les m scénarios secondaires). L’évaluation du passif permet de déduire le capital économique correspondant au scénario primaire considéré. Finalement, on obtient n réalisations du capital économique de l’assureur, ce qui nous permet d’estimer le besoin en capital propre à l’assureur. Au total, il aura fallu un nombre n x m scénarios pour obtenir la distribution du capital économique de l’assureur, cette approche est donc très coûteuse en temps de calcul.

Une seconde approche possible pour l’évaluation du besoin en capital en modèle interne est la technique des portefeuilles répliquant. Cette approche est moins coûteuse en temps de calcul car elle ne nécessite que n scénarios primaires. Le principe consiste à modéliser la sensibilité du passif aux conditions économiques, ce qui nous permet d’obtenir une formule fermée pour l’évaluation du passif sans passer par la simulation de m scénarios secondaires. Dans le modèle interne d’AXA, le STEC marché est calculé par la technique des portefeuilles répliquant. Le SCR de souscription vie est quant à lui calculé via une approche modulaire comme la formule standard, bien que la structure des risques et les chocs soient différents de celle-ci. Le modèle interne vie d’AXA sera détaillé dans la section suivante.

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21 Modélisation du risque de prime en prévoyance

3. Partie III : Modèle interne d’AXA en prévoyance: présentation du modèle hybride

3.1. Une vision économique du bilan comptable S2

Comme mentionné dans la section 2.1, la réforme Solvabilité 2 a transformé le bilan des assureurs d’une vision comptable classique à une nouvelle vision économique où les différents postes du bilan sont comptabilisés par leur valeur de marché. En solvabilité 1, le bilan des assureurs était effectué selon les normes de comptabilité françaises dites « French Gaap » qui ne prenaient pas en compte les plus ou moins-values latentes. Ce bilan devait également couvrir une marge de solvabilité requise (MSR) définie de manière forfaitaire. En solvabilité 2, tous les postes du bilan sont évalués à leur juste valeur et le besoin en capital est déterminé en fonction du profil de risque de l’assureur.

Le bilan S2 de tout assureur est composé principalement à l’actif des actifs financiers et au passif de l’AFR ajouté au passif technique, tous évalués en valeur de marché.

L’AFR « Available Financial Resources » est le montant du capital immédiatement disponible pour honorer les engagements envers les assurés dans un contexte défavorable. Il vient en couverture du SCR, et se compose de :

La NAV « Net Asset Value » qui correspond aux fonds propres de l’assureur évalués en valeur de marché.

ACTIF

SCR

MVM

Provisions

Techniques

NAV

VIF

AFR

Passif Technique

Figure 3-3-1 Bilan S2

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22 Modélisation du risque de prime en prévoyance

La VIF « Value Of Inforce » ou Valeur du portefeuille qui correspond à la valeur actuelle des résultats futurs distribuables à l’actionnaire, générés par le portefeuille de contrats qui évolue en run-off, c’est-à-dire sans affaires nouvelles. Notons que la VIF est nettée du coût de portage des passifs techniques.

L’AFR est calculé comme le Total de l’actif en valeur de marché moins le total des provisions techniques en valeur de marché.

Sous Solvabilité 2, le capital disponible inclut :

Les fonds propres durs Les plus ou moins-values non réalisées sur la totalité des actifs Les marges de prudence dans les passifs Les profits d’investissement futurs Les profits futurs sur la prime non acquise Les profits futurs découlant des contrats d’assurance Vie en portefeuille Le tout réduit d’une marge de prudence sur les passifs appelée MVM (Market Value

Margin) L’AFR peut donc se définir comme la valeur économique de l’entreprise. Par ailleurs, le bilan étant comptabilisé en valeur de marché, l’AFR est sensible aux conditions financières.

Le passif technique correspond au prix qu’exigerait un tiers pour reprendre les engagements de l’assureur. Il se compose de :

Des provisions calculées comme la somme de la meilleure estimation des flux futurs « Best Estimate » ou BEL.

D’une marge pour risque, la MVM « Market Value Margin » qui représente le coût du capital que devrait lever le cessionnaire pour couvrir son exigence de capital jusqu’à l’extinction des passifs. Cette quantité se déduit de la projection du capital requis sous Solvabilité 2.

3.2. Structure du modèle interne d’AXA France

3.2.1. Modèle interne global

Dans le modèle interne d’AXA, le SCR est appelé STEC pour « Short Term Economic

Capital ». Dans la suite de ce mémoire, nous désignerons le besoin en capital par le STEC.

AXA France est une entité du groupe AXA. Dans le cadre de Solvabilité 2, la solvabilité d’une

compagnie d’assurance ne s'apprécie pas uniquement au niveau du groupe mais aussi au niveau

de l’ensemble des organismes lui appartenant. L’autorité de contrôle attend donc que chaque

entité démontre la suffisance de sa solvabilité individuellement et collectivement.

Les besoins en capital des différentes entités du groupe AXA sont consolidés en prenant en

compte l’effet de diversification géographique, puisque les évènements ne surviennent pas tous

au même moment dans tous les pays. Cette diversification est prise en compte pour chaque

risque à l’aide d’une matrice de corrélation.

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23 Modélisation du risque de prime en prévoyance

La structure du modèle interne d’AXA France diffère de la formule standard. Le graphique ci-

dessous présente les différentes briques de risque qui interviennent dans le modèle interne.

Figure 3-3-2 Architecture du modèle interne

Les STEC sont calculés pour les cinq modules de risque (marché, souscription vie, non-vie, crédit et

opérationnel) puis agrégés à l’aide d’une matrice de corrélation.

Nous ne détaillerons pas la méthode de calcul du besoin en capital pour les cinq modules de

risque mais afin de faire le lien avec le principe du calcul en modèle interne exposé dans le

paragraphe 2.3.4, nous présentons succinctement la méthode de calcul du STEC marché d’AXA

France.

Le STEC marché correspond au montant de pertes sur l’AFR résultant des variations de marché à

horizon 1 an qui ne devrait être dépassé que dans 0,5% des cas. La situation nette économique -

qui correspond à la valeur de marché des actifs moins la valeur de marché des passifs - est

recalculée avec 11 000 scénarios de marché (simulations de Monte-Carlo). Un scénario de marché

correspond à un jeu 667 paramètres ou plutôt facteurs de risques, tels que les indices actions, les

taux de change, les courbe des taux, les spreads (selon les ratings), etc… Chacun des 11 000

STEC

Marché

Actions

Spread

Taux

Immobilier

Hedges funds

Private Equity

Change

Volatilité

Inflation

Souscription Vie

CAT

Mortalité

Longévité

Hausse des rachats

Baisse des rachats

Arbitrage

Rachat

massif

Incapacité -Invalidité

Frais

Frais médicaux

Souscription Non-Vie

Primes et réserves

CAT

Crédit

Obligations et dérivés

Réassureurs

Prêts immobiliers

Réassureurs

Opérationnel

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24 Modélisation du risque de prime en prévoyance

scénarios correspond à un jeu de paramètres différents. Le STEC marché correspond au 99,5 %

quantile de la distribution des situations nettes économiques simulées (c’est à dire au 55ème plus

mauvais tirage).

Afin de calculer la situation nette de l’assureur pour chaque scénario, les passifs sont représentés

par une combinaison linéaire d’instruments financiers appelée « portefeuille répliquant » qui

réplique les sensibilités des passifs à différentes conditions de marché.

Le STEC crédit est une mesure du risque de défaut des contreparties d’AXA France, quelles

qu’elles soient. Dans le modèle interne d’AXA, ce risque prend en compte deux sources de

risques : Le défaut d’une contrepartie, il s’agit du risque de défaut et le risque de spread

correspondant à la dégradation de la note (rating interne ou rating des agences de notation) d’une

contrepartie.

En ce qui concerne le module de risque de souscription vie, faisant l’objet de ce mémoire, une

Approche modulaire est utilisée. Il sera exposé de manière plus approfondie par la suite.

3.2.2. Architecture du modèle interne du risque de souscription vie

Dans le modèle interne d’AXA, le risque de souscription lié à l’activité vie individuelle intègre dix sous-modules de risques techniques :

Figure 3-3 Structure du modèle interne vie d'AXA France

Le STEC de souscription vie est calculé avec une approche modulaire comme en formule standard, par agrégation des STEC des différents sous-modules de risque. Le STEC correspondant à chaque sous-module de risque est calculé par la différence entre le capital disponible du scénario central et le capital disponible du scénario choqué correspondant à un scénario extrême et déterministe :

𝑆𝑇𝐸𝐶𝑋 = 𝐴𝐹𝑅𝑏𝑎𝑠𝑒 𝑐𝑎𝑠𝑒 − 𝐴𝐹𝑅𝑐ℎ𝑜𝑐 𝑋

Cette variation est Nette de la réassurance et des effets de participation aux bénéfices. Elle est par contre brute des impôts sur les sociétés. Rappelons que l’AFR correspond à la somme des fonds propres et de la valeur actuelle des résultats futures et les chocs appliqués correspondent par définition à des scénarios bicentenaires

Risque de souscription vie

CAT Mortalité Longévité Hausse des

rachats Baisse des

rachats

Autres comportements

clients

Rachat massif

Incapacité -Invalidité

Frais Frais

médicaux

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25 Modélisation du risque de prime en prévoyance

à horizon un an. Il est également important de préciser que contrairement à la formule standard, ces chocs sont calibrés annuellement dans le modèle interne d’AXA à partir des données propres à l’assureur. En fonction de la branche étudiée (Epargne, prévoyance ou santé), certains risques ne seront pas considérés.

- Le risque CAT (Catastrophe) correspond au risque d’une hausse brutale et homogène des taux de mortalité. Le choc est appliqué à l’ensemble du périmètre épargne et santé individuelle ainsi qu’une partie du périmètre prévoyance. Il correspond à une hausse additive des taux de mortalité à la première année de projection. Dans le modèle interne du Groupe AXA, ce risque est basé sur trois scénarios :

Pandémie Terrorisme Tremblement de terre

- Le risque Mortalité (resp. Longévité) correspond au risque d’incertitude du niveau de la

mortalité dans le futur. Le choc est appliqué comme une hausse (resp. baisse) permanente

et multiplicative des taux de mortalité uniquement pour les contrats ayant un impact

défavorable à l’assureur. Pour le risque de mortalité, nous verrons par la suite que pour

certains produits (prévoyance non emprunteur), nous n’utilisons pas un modèle vie mais

plutôt un modèle hybride scindé en deux sous modules de risque : le risque de prime et le

risque de réserve.

- Le risque Rachats est le risque d’observer des taux de rachats différents des taux attendus.

On peut distinguer deux différents risques de rachats : la hausse et la baisse. Pour la

branche épargne, les deux scénarios peuvent être défavorables à l’assureur. En ce qui

concerne la prévoyance-santé, seule la hausse des rachats entraîne une perte à l’assureur.

Pour chaque groupe homogène de contrats appelés « modelpoint », on doit identifier

lequel des deux scénarios suivants est le plus couteux :

Hausse multiplicative et permanente des taux de rachats

Baisse multiplicative et permanente des taux de rachats

Le STEC « hausse des rachats » est définit comme l’impact de cette hausse sur les contrats

pour lesquels la hausse est la plus coûteuse. Le STEC « baisse des rachats » est défini

comme l’impact de cette baisse sur les contrats pour lesquels la baisse est la plus

coûteuse.

Précisons également que les rachats en assurance vie peuvent s’observer sous les angles

suivants :

Les rachats dits structurels : les clients récupèrent leur épargne de manière

naturelle en suivant une logique fiscale et patrimoniale. Ce type de comportement

de rachats est modélisé en Best Estimate en fonction de l’ancienneté du contrat.

Les rachats conjoncturels ou dynamiques qui sont la conséquence de

l’insatisfaction du rendement du contrat. La modélisation du rachat dynamique se

fait également en Best Estimate.

Les hypothèses de rachats structurels et de rachats dynamiques sont toutes les deux

choquées.

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26 Modélisation du risque de prime en prévoyance

En prévoyance, nous préférons parler de risque de résiliations qui correspond au risque de

sous-estimation du chiffre d’affaires.

- Le risque autres comportements correspond au risque lié aux différents comportements

du client pouvant impacter la marge de l’assureur. Cela concerne typiquement les options

de sortie en rente et les options d’arbitrage (UC vers le fond Euro). Le choc s’applique

comme une hausse permanente du taux d’exercice des options à la main de l’assuré.

- Le risque rachat massif se définit comme le risque de voir se produire une vague de

rachats dans un mouvement de panique. Un rachat massif peut notamment être provoqué

par la peur d’une faillite ou la baisse de la réputation de l’assureur.

- Le risque incapacité-invalidité est lié au risque d’augmentation de la fréquence et de la

durée du maintien. Le choc s’applique comme une hausse permanente et multiplicative

des taux d'incidence ainsi qu’une baisse permanente et multiplicative des taux de retour

en bonne santé. Ce risque concerne uniquement la branche prévoyance. Analogiquement

au risque de mortalité, ce risque est modélisé soit par une approche vie soit par une

approche hybride selon la nature du produit.

- Le risque de frais correspond au risque d’augmentation des frais de gestion des contrats à

cause de l’inflation. Le choc est appliqué comme une hausse permanente et multiplicative

de la masse des coûts.

- Le risque de frais médicaux est spécifique à la branche santé. Il correspond à la dérive de

la consommation des soins médicaux de la part des assurés.

Les STEC des différents sous-modules de risques sont agrégés via la matrice de corrélation

suivante :

CAT Mortalité Longévié OCB Hausse

rachats

Baisse

rachats

Rachat

massif

Incap-Inval Frais Frais

médicaux

CAT 100% 0% 0% 0% 0% 0% 0% 25% 25% 25%

Mortalité 0% 100% -50% 0% 25% 0% 0% 25% 25% 25%

Longévité 0% -50% 100% 25% 0% 25% 0% 0% 0% 25%

OCB 0% 0% 25% 100% 25% 25% 0% 0% 0% 0%

Hausse des

rachats 0% 25% 0% 25% 100% 50% 0% 25% 25% 25%

Baisse des

rachats 0% 0% 25% 25% 50% 100% 0% 0% 0% 0%

Rachat

massif 0% 0% 0% 0% 0% 0% 100% 0% 50% 0%

Incap-Inval 25% 25% 0% 0% 25% 0% 0% 100% 25% 50%

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27 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Frais 25% 25% 0% 0% 25% 0% 50% 25% 100% 25%

Frais

médicaux 25% 25% 25% 0% 25% 0% 0% 50% 25% 100%

Figure 3-4 Matrice de corrélation des sous modules vie du modèle interne

La méthodologie d’agrégation par une matrice de corrélation repose sur l’hypothèse d’ellipticité.

Plus précisément, deux principales hypothèses sont à vérifier:

La variation de l’AFR est linéaire en chacun des facteurs de risque

Les fonctions de distribution des risques sont elliptiques

Des tests sont effectués pour s’assurer de la pertinence de ces hypothèses.

Les coefficients de corrélation utilisés dans l’agrégation sont déterminés par des jugements

d’expert et sont validés par des scénarios dits « Reverse stress scenarios ». Ce sont des scenarios

qui produisent une perte équivalente au STEC dans le cas d’une occurrence simultanée des

différents chocs qui les constituent. L’objectif est de déterminer des combinaisons d’évènements

qui produisent le même montant de pertes que le STEC.

Ces coefficients diffèrent légèrement de ceux de la formule standard. Remarquons aussi que le

module vie du modèle interne d’AXA France couvre tous les risques spécifiés dans la Formule

Standard.

3.2.3. Périmètre hybride

Tout d’abord rappelons que le risque de souscription vie d’AXA France est scindé en dix sous modules de risque :

Figure 3-5 Périmètre hybride du modèle interne

Risque de souscription vie

CAT Longévité Mortalité

Modèle vie Modèle hybride

Risque de prime

Risque de réserves

Hausse des rachats

Baisse des rachats

Arbitrage Rachat massif

Incapacité -Invalidité

Modèle vie Modèle hybride

Risque de prime

Risque de réserves

Frais Frais

médicaux

Modèle vie Modèle hybride

Risque de prime

Risque de réserves

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28 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Parmi les dix sous-modules de risque ci-dessus, trois sont concernés par le modèle hybride. En effet, en fonction de leur nature, les produits d’assurance vie sont traités selon deux approches : modèle vie ou modèle hybride. Le business hybride regroupe les périmètres vie où des techniques non-vies sont utilisées pour la tarification ou le provisionnement des contrats. Cela concerne les produits des branches santé et prévoyance non emprunteur exposés aux trois risques suivants : mortalité, incapacité-invalidité et frais médicaux. Nous distinguons entre deux sous modules de risque sur le périmètre hybride : le risque de prime et le risque de réserve. Le risque de prime et le risque de réserve présentent le même risque sous-jacent qui est la hausse de la sinistralité mais touchent des années de survenances différentes. Le risque de prime correspond au risque de sous tarification conduisant à des montants des sinistres supérieurs aux primes prévus dans la tarification. Ce risque porte sur les sinistres à venir. Le risque de réserve correspond au risque de sous-évaluation des réserves au moment du calcul des provisions sur les sinistres déjà survenus. Il s’agit du risque de réévaluation de ces sinistres. Le graphique ci-dessous illustre la différence entre le risque de prime et de réserve vu à l’année N: Dans le modèle interne d’AXA, le modèle de projection utilisé sur ce périmètre pour l’évaluation des STEC est un modèle déterministe en S/P. Les besoins en capital pour les risques de prime et de réserves sont agrégés à 50%. Nous présenterons dans les deux paragraphes suivants, les modèles utilisés pour le calibrage des chocs primes et réserves.

3.3. Modèle hybride : Calibrage du choc Prime

Le choc prime est calibré à partir de la chronique des ratios de sinistralité S/P observés. Par définition de ratio de sinistralité correspond au ratio sinistres sur cotisations :

𝑆

𝑃=

𝑆𝑖𝑛𝑖𝑠𝑡𝑟𝑒𝑠

𝑃𝑟𝑖𝑚𝑒𝑠 𝑏𝑟𝑢𝑡𝑒𝑠=𝑃𝑟𝑒𝑠𝑡𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛𝑠 + 𝑃𝑟𝑜𝑣𝑖𝑠𝑖𝑜𝑛𝑠

𝑃𝑟𝑖𝑚𝑒𝑠 𝑏𝑟𝑢𝑡𝑒𝑠

Les S/P observés sont les S/P ultimes Best Estimate, vus à aujourd’hui : nous les appellerons S/P

d’inventaire (par opposition aux S/P d’ouverture, vus après un an). Les S/P ultimes intègrent la

charge ultime, qui ne sera connue avec exactitude qu’au bout de plusieurs années.

Année de

survenance

Risque de réserve Risque de

prime

N N+1 N-1 N-2 … N-3

Figure 3-6 Risque de prime et risque de réserve

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29

29 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Plusieurs raisons expliquent ce choix :

Les S/P Best Estimate utilisés par le modèle sont obtenus en faisant une moyenne de ces

S/P ultimes.

Ces S/P sont les principaux indicateurs regardés pour le suivi du portefeuille ou la

tarification de nouveaux produits.

Nous utilisons toute l’information disponible, ce qui améliore la visibilité sur les S/P passés.

On peut remarquer que cette approche admet la limite habituelle de la méthode Chain-Ladder :

les S/C ont des degrés de développement différents (plus d’incertitude sur les S/P récents).

Nous modélisons la chronique des ratios S/P par une loi log-normale. Les paramètres de cette loi,

moyenne μ et écart-type σ, sont estimés empiriquement par la méthode des moments :

�̂� =1

𝑁∑(

𝑆

𝑃)𝑖

𝑁

𝑖=1

�̂� = √1

𝑁 − 1∑((

𝑆

𝑃)𝑖− �̂�)

2𝑁

𝑖=1

𝑁 étant le nombre d’années d’historique disponibles.

La loi retenue est la loi log-normale en raison d’une queue de distribution plus épaisse et de valeurs uniquement positives par rapport à la loi normale. Ce choix est donc prudent par rapport à la loi normale. Par ailleurs, Les résultats des tests (diagrammes QQ-plot) ne rejettent pas l’utilisation de cette loi.

Figure 3-7 Estimation du choc prime par le modèle actuel

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30

30 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Le choc est obtenu par l’écart entre le ratio de sinistralité moyen et le quantile à 99,5% :

𝑐ℎ𝑜𝑐 𝑝𝑟𝑖𝑚𝑒 =(𝑆𝑃)99,5%

(𝑆𝑃)𝑚𝑜𝑦𝑒𝑛

− 1

3.4. Modèle hybride : Calibrage du choc Réserve

Pour le calibrage du choc réserve, nous supposons que les réserves suivent également une loi log-normale. La volatilité des réserves est estimée à partir des triangles des règlements par la méthode de Merz-Wüthrich. La méthode Merz & Wüthrich est souvent utilisée pour calculer la volatilité des réserves à partir des triangles de règlements. Le principe est de mesurer l’incertitude liée aux « Claims Development Result » (CDR), c’est-à-dire la différence entre deux estimations successives du montant de provisions. Pour cela, à partir des triangles et des montants de réserves par année de survenance, on calcule l’écart quadratique moyen (MSEP : mean square error of prediction). Pour une année de survenance donnée, la volatilité des réserves à un an (CoV : coefficient de variation des réserves) est le rapport entre la racine du MSEP et le montant de réserves pour l’année considérée.

L’écart type du risque de réserves est calculé en tenant compte d’une corrélation de 50% entre les années de survenance.

Cette méthode nous donne une formule fermée pour l’estimation du choc réserve :

𝑐ℎ𝑜𝑐 𝑟é𝑠𝑒𝑟𝑣𝑒 =exp (𝑞99,5%(𝑁(0,1)√log(𝜎2 + 1))

√𝜎2 + 1− 1

Le risque de réserve ne sera pas traité dans ce mémoire.

3.5. Problématique et inconvénients du modèle

L’approche hybride distinguant le risque de prime et le risque de réserve a l’avantage d’être robuste et simple à mettre en œuvre car elle est peu gourmande en données. Le triangle des règlements permet de calculer les ratios de sinistralité par année de survenance d’une part, et d’estimer la volatilité des réserves d’autre part. Cependant, la méthode utilisée pour le calibrage du choc prime pourrait être considérée comme peu prudente. En effet, dans le modèle actuel, le choc est estimé sur la base d’une chronique de ratios de sinistralité observés. La volatilité du S/P est donc supposée refléter implicitement toutes les sources de l’incertitude sur la sinistralité future ainsi que les interactions entre ces sources. Au moment du développement du modèle interne, cet indicateur semblait être pertinent et conforme au « Use Test » car il est suivi de près

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31

31 Modélisation du risque de prime en prévoyance

par les directions marché et inventaire. Or, la variable S/P englobe plusieurs facteurs de risque qu’elle ne peut refléter de manière suffisamment fine, notamment les risques spécifiques au volume des primes, à la fréquences des sinistres et au coût moyen sont agrégés. L’approche agrégée en S/P ne saura refléter par exemple une hausse de la sinistralité si le volume des primes augmente également. Finalement, le ratio S/P à lui seul ne constitue pas un indicateur de risque pertinent au regard de l’évaluation d’un choc bicentenaire.

3.6. Objectif de l’étude

L’objectif de ce mémoire est de présenter une nouvelle approche pour le calibrage du choc prime plus rigoureuse et plus fine que l’approche agrégée en S/P. Le plan d’action retenu est de réaliser un calibrage par type de garantie.

Le calibrage effectué peut être basé sur une approche vie ou non-vie mais les chocs retenus devront être traduit en S/P afin de ne pas changer la structure du modèle interne actuel d’AXA. Nous nous intéresserons dans ce mémoire à deux garanties de prévoyance ayants des spécificités différentes, qui sont la garantie décès et la garantie des accidents de la vie, plus communément appelée GAV. Pour la garantie décès nous présenterons dans un premier temps un modèle vie puis un modèle non-vie. Pour la GAV, nous présenterons un modèle non-vie.

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32 Modélisation du risque de prime en prévoyance

4. Partie IV : Etude de la garantie décès : application d’une méthode vie

4.1. Présentation de la garantie décès

La garantie décès consiste à verser une rente ou un capital à un bénéficiaire en cas de

décès de l’assuré. Il existe deux principaux types de contrats proposant une garantie en cas de

décès : le contrat vie entière et le temporaire décès. La garantie peut par ailleurs être soit un

capital soit une rente en faveur d’un bénéficiaire.

Le contrat temporaire décès correspond au versement d’un capital ou d’une rente au bénéficiaire

en cas de décès de l’assuré pendant la durée du contrat :

Le contrat vie entière est quant à lui souscrit pour une durée indéterminée et prend fin avec le

décès de l’assuré.

Notons que la prime versée par l’assuré peut être une prime unique comme illustré sur les

schémas ci-dessus ou périodique. Dans la plupart du temps les contrats souscrits sont annuels à

tacite reconduction et avec une sélection médicale au moment de la souscription.

C si le décès de l’assuré entre k et k+1

Prime

T = 0 T = k T = k + 1

C si décès de l’assuré

T = 0

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33 Modélisation du risque de prime en prévoyance

4.2. Hypothèses de tarification

Les contrats proposant une garantie en cas de décès sont tarifés à partir d’une table de

mortalité en égalisant la valeur actuelle de l’engagement de l’assureur et de l’assuré. Le résultat

de l’assureur dépend fortement des hypothèses de mortalité et de taux.

La réglementation en vigueur impose d’utiliser des tables ainsi qu’un taux technique prudents. La table réglementaire actuellement en vigueur utilisée pour l’estimation des engagements en cas de décès est la TH 00-02, basée sur la population masculine. En effet, le principe de prudence exige de tarifer les contrats en cas décès à partir de la table masculine et les contrats en cas de vie à partir de la table féminine car l’espérance de vie masculine est plus faible.

Les entreprises d’assurance peuvent néanmoins utiliser leurs propres tables d’expérience pour la

tarification de leurs contrats à condition que celles-ci soient certifiées avant leur utilisation.

4.3. Produit commercialisé par AXA France

Le principal produit de prévoyance individuelle offrant une garantie en cas de décès

propose à la fois une couverture en cas de décès, d’incapacité ou d’invalidité. L’assuré peut

néanmoins choisir de se couvrir uniquement en cas de décès, qu’il soit toutes causes ou

uniquement accidentel. L’âge minimum de souscription est 18 ans avec un capital garanti

minimum de 10 000 euros. L’âge limite de souscription est de 70 ans et l’âge de fin des garanties

est de 85 ans. En cas de couplage de la garantie décès avec l’incapacité ou l’invalidité, le montant

du capital minimum peut varier. L’assuré qui se couvre contre le décès peut choisir une garantie

soit en capital soit en rente. Nous remarquons que les assurés qui choisissent le capital sont

représentent près de 99% de notre portefeuille.

Figure 4-1 Nombre de capitaux décès et de rentes

257569

2477 0

50000

100000

150000

200000

250000

300000

Capital décès Rente

Répartition de l'option choisi par les assurés

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34

34 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Le tarif de la cotisation dépend de trois facteurs : l’âge de l’assuré, le groupe tarifaire et le niveau

des garanties souscrites. Chaque année à l’échéance anniversaire, en fonction du nouvel âge tarifé

et des montants garantis atteints. En effet, les montants garantis évoluent chaque année, à

l’échéance anniversaire, en fonction du plafond annuel de la Sécurité sociale (PASS) si l’option

d’indexation a été souscrite. Par ailleurs, si l’assuré est non-fumeur alors il bénéficie d’une

réduction de 20 % sur les cotisations des garanties décès (hors décès en cas d’accident).

Il est important de préciser que la durée de l’adhésion est annuelle, reconductible tacitement.

Notons également qu’il existe d’autres contrats commercialisés par AXA France et proposant une

couverture en cas de décès, mais ceux-ci évoluent actuellement en « run-off » sans souscription

d’affaires nouvelles.

4.4. Périmètre de l’étude

Le calibrage du choc prime pour la garantie décès est restreint au périmètre non

emprunteur et aux contrats « temporaires décès ». En effet Les contrats « vie entière » et les

contrats emprunteurs sortent du périmètre hybride défini par AXA France, ces contrats sont

traités par une approche vie et non en S/P.

Par ailleurs, le calibrage sera réalisé uniquement sur les contrats à capital garanti, qui

représentent la quasi-totalité du portefeuille.

4.5. Le risque de mortalité défini par le régulateur

Le régulateur définit quatre composantes du risque de mortalité : Le risque de niveau : appelé également risque de base, il correspond à l’incertitude autour

des taux de mortalité moyens (i.e best estimate)

Le risque de tendance : dû à l’incertitude de la tendance future des taux de mortalité best

estimate.

Le risque de volatilité : correspond au risque de fluctuations des taux de mortalité autour

de la tendance.

Le risque catastrophe : correspond à un évènement extrême et irrégulier de mortalité. Les

taux de mortalité ont tendance à sauter à des niveaux plus élevés (à cause des épidémies,

catastrophes naturelles…)

Le risque catastrophe étant modélisé dans un sous-module à part, il n’entre pas dans le cadre du

périmètre hybride et son besoin en capital est pris en compte dans le sous module CAT. Par la

suite, nous nous intéresserons uniquement aux risques de niveau, de tendance et de volatilité.

Dans la formule standard, le choc de mortalité applicable aux garanties décès correspond à une

hausse multiplicative des taux de mortalité de 15%.

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35 Modélisation du risque de prime en prévoyance

4.6. Modèle vie : approche agrégée

Dans cette section, nous allons tester une première approche vie dite « agrégée ». Nous

avons vu dans la section 4.2 que les garanties décès sont tarifées à partir de tables d’expériences

certifiées. L’idée de cette approche est d’exploiter les écarts entre les taux de mortalité réalisés

(i.e observés sur notre portefeuille) et les taux de mortalité prédits par les tables d’expérience afin

de calibrer le choc prime.

La table d’expérience d’AXA France est construite et certifiée tous les cinq ans. Elle est basée sur

l’observation de la mortalité du portefeuille au cours des cinq dernières années. Cette table est

construite de sorte à refléter fidèlement les taux de mortalité de notre portefeuille, elle est par la

suite utilisée pour la tarification des contrats.

Dans ce premier modèle, nous supposons que les taux de mortalité des tables d’expérience sont

notre best-estimate, et que l’écart relatif entre le taux de mortalité global observé sur notre

portefeuille et le taux de mortalité théorique prédit par la table suit une loi normale centrée en 0.

Notons 𝑞𝑖𝑟é𝑒𝑙 le taux de mortalité observé sur notre portefeuille de prévoyance l’année 𝑖 et 𝑞𝑖

𝑡𝑎𝑏𝑙𝑒

le taux de mortalité prédit par la table d’expérience l’année 𝑖 :

𝑞𝑖𝑟é𝑒𝑙 =

𝑛𝑜𝑚𝑏𝑟𝑒 𝑑𝑒 𝑑é𝑐è𝑠 𝑙′𝑎𝑛𝑛é𝑒 𝑖

𝑒𝑥𝑝𝑜𝑠𝑖𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑙′𝑎𝑛𝑛é𝑒 𝑖

𝑞𝑖𝑡𝑎𝑏𝑙𝑒 = ∑ 𝑤𝑥

𝐻𝑞𝑥𝐻

𝑥𝑚𝑎𝑥

𝑥=𝑥𝑚𝑖𝑛

+ 𝑤𝑥𝐹𝑞𝑥𝐹

𝑤𝑥𝐻 et 𝑤𝑥

𝐹 désignent respectivement les expositions homme et femme d’âge x de notre

portefeuille.

Par hypothèse, la chronique des écarts relatifs ∆𝑖 suit une loi normale :

∆𝑖 =𝑞𝑖𝑟é𝑒𝑙 − 𝑞𝑖

𝑡𝑎𝑏𝑙𝑒

𝑞𝑖𝑡𝑎𝑏𝑙𝑒 ~ 𝑁(0, 𝑠2)

La variance 𝑠2 est estimée par la méthode des moments ou par la méthode du maximum de

vraisemblance.

Nous supposons que la loi est centrée en 0 pour être en cohérence avec l’hypothèse de table best

etimate. En effet, l’hypothèse d’une espérance non nulle supposerait qu’en moyenne la table ne

reflète pas la réalité du portefeuille, cela contredirait ainsi l’hypothèse fondamentale de table

d’expérience best estimate. Dans notre cas précis, le choix d’une loi centré ou non ne change

pratiquement pas le résultat du choc car les deux chroniques sont très proches l’une de l’autre :

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36 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Cette méthode a été testée sur la base des données observées sur la période 2002-2012 :

Année 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012

q réel 0,33% 0,35% 0,35% 0,28% 0,31% 0,35% 0,34% 0,31% 0,30% 0,38% 0,28%

q prédit table 0,31% 0,33% 0,32% 0,29% 0,30% 0,33% 0,33% 0,31% 0,30% 0,35% 0,30%

delta 6,05% 7,93% 9,52% -5,43% 0,53% 6,17% 3,98% -0,58% 1,98% 8,12% -6,35%

Ecart type 5%

Choc Estimation 14%

Test de la validité de l’hypothèse de normalité :

Afin de valider l’hypothèse de normalité de la chronique des écarts relatifs, nous procédons à

un test d’adéquation.

Le principe général d’un test d’adéquation est le suivant :

Nous disposons initialement d’un n-échantillon i.i.d de loi 𝐹 inconnue :

𝑋1, … , 𝑋𝑛 ~ 𝐹

On se donne une loi 𝐹0 connue et on souhaite tester l’hypothèse :

𝐻0 ∶ 𝐹 = 𝐹0 (ℎ𝑦𝑝𝑜𝑡ℎè𝑠𝑒 𝑛𝑢𝑙𝑙𝑒) 𝑐𝑜𝑛𝑡𝑟𝑒 𝐻1 ∶ 𝐹 ≠ 𝐹0

On se fixe dans un premier temps un seuil de confiance 𝛼, ce seuil correspond à la probabilité

rejeter l’hypothèse à tort.

0,00%

0,05%

0,10%

0,15%

0,20%

0,25%

0,30%

0,35%

0,40%

2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012

Evolution des taux de mortalité réels et prédits par la table d'expérience

q réel

q prédit tableDate de construction de la

table d’expérience utilisée

à partir de 2002

Date de construction de la

table d’expérience utilisée

à partir de 2007

Figure 4-2 Modèle vie agrégé

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37 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Soit 𝑍 une observation de l'expérience statistique, si cette statistique appartient à la zone de rejet

𝑅 du test, l’hypothèse 𝐻0 est acceptée, sinon cette hypothèse est rejetée. Le test est donc une

fonction de la statistique observée :

𝜑(𝑍) = { 𝐻0 𝑠𝑖 𝑍 ∈ 𝑅𝐻1 𝑠𝑖𝑛𝑜𝑛

La valeur limite de 𝛼 pour laquelle le résultat du test bascule est appelé la p-value du test. La p-

value permet de quantifier le niveau de confiance sur l’acceptation de 𝐻0. En pratique, plus la p-

value est élevée, plus l’hypothèse nulle sera acceptée avec confiance.

Il est important de préciser que dans la théorie des tests, accepter une hypothèse ne signifie pas

que cette hypothèse est vraie. « Accepter » signifie seulement qu’on n’a pas la preuve que

l’hypothèse n’est pas acceptable. En toute rigueur, seul le rejet est informatif. En cas

d’acceptation, on préfère dire que l’hypothèse nulle n’est pas rejetée.

Dans notre cas, l’adéquation des données à la loi normale est validée par le test de Kolmogorov-

Smirnov (voir le détail du test en annexe). On obtient une p-value égale à 0,9 ce qui ne nous

permets pas de rejeter notre hypothèse.

Nous pouvons confirmer la validité de notre hypothèse en traçant le graphique QQ-Plot :

Figure 4 -3 QQ Plot des variations annuelles des taux de mortalité

On observe un alignement des quantiles empiriques avec la première bissectrice, l’hypothèse de

normalité est donc bien justifiée.

Nous avons proposé une approche vie simple pour le calibrage du choc prime. Par ailleurs,

le choc de mortalité se traduit immédiatement en S/P puisqu’un choc de mortalité de 14%

entraine également une hausse de la sinistralité de 14%. Par contre, nous pouvons reprocher à

cette approche d’être également « trop agrégée » puisqu’on réduit le risque de mortalité

uniquement au risque d’écartement par rapport à notre best-estimate (table d’expérience), ce qui

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38 Modélisation du risque de prime en prévoyance

néglige les autres sources d’incertitude quant au niveau de la mortalité future. Nous proposerons

par la suite une seconde approche vie qui distingue entre deux sources de risque de mortalité.

4.7. Modèle vie : approche en deux composantes

4.7.1. Présentation du modèle

Dans cette seconde approche, nous nous inspirons d’un modèle développé initialement

par le groupe AXA pour calibrer le choc de mortalité sur le portefeuille d’épargne. Nous

modélisons les taux de mortalité à partir de deux composantes : une composante de process et

une composante d’estimation.

En effet, le risque de mortalité peut être scindé en deux sous modules :

Le risque d’estimation : lié aux écarts entre les taux de mortalité estimés et les taux de

mortalité réels.

Le risque de process : lié à l’évolution des taux de mortalité théoriques permettant de

capter le risque de tendance et de niveau. Les facteurs pouvant impacter le niveau et la

tendance de la mortalité sont par exemple l’amélioration de la qualité de vie ou les progrès

de la médecine.

Les taux de mortalité réels d’un portefeuille de garantie décès peuvent ainsi s’écrire comme la

somme de deux composantes :

𝑞(𝑥, 𝑡) = 𝑞𝑃𝑟𝑜𝑐𝑒𝑠𝑠(𝑥, 𝑡) + 𝜎𝐸𝑠𝑡𝑖𝑚𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛𝜖𝐸𝑠𝑡𝑖𝑚𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛(𝑥, 𝑡)

Où :

𝑞(𝑥, 𝑡) est le taux de mortalité observé dans le portefeuille.

𝑞𝑃𝑟𝑜𝑐𝑒𝑠𝑠(𝑥, 𝑡) correspond au taux de mortalité inobservé basé sur des probabilités réelles, cette

composante permet de prendre en compte l’erreur de process impliquent une évolution de ces

probabilités réelles.

𝜎𝐸𝑠𝑡𝑖𝑚𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛𝜖𝐸𝑠𝑡𝑖𝑚𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛(𝑥, 𝑡) est un bruit gaussien correspondant à l’erreur d’estimation liée aux

fluctuations d’échantillonnage ainsi qu’à la taille du portefeuille et son hétérogénéité.

On suppose par ailleurs que 𝜖𝐸𝑠𝑡𝑖𝑚𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛(𝑥, 𝑡)~ 𝑁(0,1) ainsi la volatilité 𝜎𝐸𝑠𝑡𝑖𝑚𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛 est

homogène sur tout le portefeuille indépendamment de l’âge.

Les erreurs de process et d’estimation sont supposées être indépendantes. Le choc de mortalité

correspondant au scénario bicentenaire est donc obtenu par agrégation des deux chocs en

supposant une corrélation nulle:

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39 Modélisation du risque de prime en prévoyance

𝐶ℎ𝑜𝑐 𝑚𝑜𝑟𝑡𝑎𝑙𝑖𝑡é = √(𝐶ℎ𝑜𝑐𝑃𝑟𝑜𝑐𝑒𝑠𝑠)² + (𝑐ℎ𝑜𝑐𝐸𝑠𝑡𝑖𝑚𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛)²

Le choc process est obtenu en utilisant deux méthodes distinctes : une méthode rétrospective et

une méthode prospective. Le choc retenu correspond par prudence au maximum des deux

approches.

Par la suite, nous présenterons le modèle utilisé pour le calibrage de ces deux chocs ainsi que son

application au portefeuille de prévoyance individuelle d’AXA France.

4.7.2. Justification du modèle

La modélisation du risque de mortalité en deux composantes permet de prendre en

compte les deux principales sources d’incertitude. On distingue ainsi entre :

L’erreur de process correspondante à l’incertitude sur l’évolution du taux de mortalité. Ce

risque est également appelé risque de modèle. Il est non diversifiable.

L’erreur d’estimation, appelé également risque d’échantillonnage, correspondante à

l’incertitude sur l’estimation de la mortalité à cause de la taille et l’hétérogénéité du

portefeuille. Ce risque est quant à lui diversifiable.

4.7.3. Calibrage du choc process

2.1.1.1. Approche rétrospective

Dans cette approche, nous calibrons le choc process à partir de la chronique des taux de

mortalité observés.

Nous supposons que la variation annuelle des taux de mortalité suit une loi normale :

𝑞(𝑡) − 𝑞(𝑡 − 1)

𝑞(𝑡 − 1) ~ 𝑁(𝜇, 𝜎2)

Les paramètres de la loi sont calibrés au global à partir de la chronique de la variation annuelle des

taux de mortalité globaux :

[𝑒𝑣(𝑡)]𝑡𝑚𝑖𝑛≤𝑡≤𝑡𝑚𝑎𝑥 = [𝑞(𝑡)

𝑞(𝑡 − 1)− 1]

𝑡𝑚𝑖𝑛≤𝑡≤𝑡𝑚𝑎𝑥

Le choc process est donc égal au quantile à 99,5% cette loi.

Les paramètres 𝜇 et 𝜎 sont estimés par la méthode des moments dans un premier temps à partir

des q(t) calculés en nombre puis dans un second temps à partir des q(t) calculés en montants. Le

choc retenu correspond donc au maximum des deux calculs.

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40 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Calibrage à partir des taux retraités et « mise en as-if »

Le terme « mise en as-if » correspond au retraitement en fonction de la situation actuelle.

Cette technique est généralement utilisée lorsqu’on étudie des données sous forme de chronique

et qu’on souhaite rendre ces données comparables.

Avant de calibrer les paramètres de notre loi à partir de la chronique des taux de mortalité bruts

observés, nous étudions l’évolution de la structure du portefeuille au cours du temps. Les courbes

ci-dessous présentent l’évolution de différents indicateurs d’exposition sur la période

d’observation :

Figure 4-4 Chronique de l'âge moyen du portefeuille décès

Figure 4-5 Chroniques des indicateurs d'exposition du portefeuille décès

On observe une évolution non négligeable de l’exposition du portefeuille au fil du temps,

notamment une variabilité de l’âge moyen pendant la période d’observation.

43,5

44

44,5

45

45,5

46

46,5

47

47,5

48

20022003200420052006200720082009201020112012

Evolution de l'âge moyen du portefeuille

Age moyen H/F

0,00%

10,00%

20,00%

30,00%

40,00%

50,00%

60,00%

70,00%

Evolution des indicateurs d'exposition

Exposition > 70 ans

Exposition> 60 ans

Exposition < 40 ans

Exposition Hommes

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41 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Afin de tenir compte de cette déformation dans structure du portefeuille, nous avons choisi de

retraiter les taux de mortalité bruts observés. En effet, l’évolution du taux de mortalité global de

notre portefeuille ne reflète pas réellement le risque de mortalité car une déformation du

portefeuille, notamment une hausse de l’âge moyen, entrainera automatiquement une hausse du

taux de mortalité du portefeuille sans pour autant refléter une dérive de mortalité sur notre

portefeuille car, pour un même capital garanti, plus l’assuré est âgé, plus la prime payée est

importante. Nous avons donc choisi de retraiter les taux de mortalité observés sur l’historique en

fonction d’un indicateur de risque choisi parmi une sélection d’indicateurs.

On définit cinq indicateurs de risque :

- L’âge moyen du portefeuille

- L’exposition aux hommes

- L’exposition aux plus de 70 ans

- L’exposition aux plus de 60 ans

- L’exposition aux moins de 40 ans

On calcule le coefficient de corrélation linéaire entre les chroniques de ces indicateurs et celle du

taux de mortalité global observées sur la période 2002-2012 :

Indicateur Corrélation avec q(t)

Age moyen 43%

Exposition > 70 ans 61%

Exposition > 60 ans 62%

Exposition < 40 ans -43%

Exposition Homme -19%

Figure 4-6 Corrélations des indicateurs d'exposition avec le taux de mortalité du portefeuille

Notons que le coefficient de corrélation calculé ici est le coefficient de corrélation linéaire de

Pearson.

Nous remarquons que l’indicateur le plus corrélé au taux de mortalité est le taux des assurés de

plus de 60 ans présents dans le portefeuille. Nous avons donc choisi de mettre es as-if les taux de

mortalité bruts en fonction de cet indicateur.

Les taux de mortalité observés pour les années antérieures à 2012 sont retraités à partir de la

formule suivante :

𝑞(𝑡)𝑎𝑠−𝑖𝑓 =𝐼2012𝐼𝑡 𝑞(𝑡)

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42 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Le graphe ci-dessous montre la chronique des taux de mortalité avant et après la mise en as-if :

Figure 4-7 Chronique des taux de mortalité bruts et retraités

Le calibrage des paramètres de la loi normale à partir des taux de mortalité observés sur la

période 2002-2012 et retraités par la mise en as-if donne un choc process de 19% :

Espérance -1%

Ecart-type 8%

Choc (quantile à 99,5%) 19%

Tests d’adéquation à la loi normale :

Nous testons l’hypothèse de normalité des [𝑒𝑣(𝑡)] (évolutions annuelles du taux de mortalité

du portefeuille) tout d’abord par le test de Kolmogorov-Smirnov (voir annexe pour plus de détails

sur ce test). On obtient une p-value de 0.88, ce qui ne nous permets pas de rejeter l’hypothèse de

normalité utilisée pour le calibrage.

L’hypothèse de normalité est par ailleurs confirmée par les graphiques QQ-Plot, PP-Plot ainsi que

les courbes des fonctions de répartition empirique et théorique :

0,200%

0,220%

0,240%

0,260%

0,280%

0,300%

0,320%

0,340%

0,360%

0,380%

0,400%

2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012

Comparaison des taux de mortalité bruts et retraités

q(t) as if

q(t)

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43

43 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Figure 4-8 Graphiques d'adéquation à la loi normale

2.1.1.2. Approche prospective

Dans l’approche prospective, nous calibrons notre choc process par projection des taux de

mortalité de notre portefeuille à horizon 1 an.

Le modèle utilisé pour la projection est le modèle de Lee-Carter. Nous avons choisi ce modèle

pour la facilité de son implémentation ainsi que pour sa notoriété.

Le modèle de Lee-Carter permet de modéliser le taux de risque instantané 𝜇𝑥𝑡 :

𝒍𝒏𝝁𝒙𝒕 = 𝜶𝒙 + 𝜷𝒙𝒌𝒕 + 𝜺𝒙𝒕

𝑎𝑣𝑒𝑐 𝜇𝑥𝑡 = − ln(1 − 𝑞𝑥𝑡) , 휀𝑥𝑡 ~ 𝑁(0, 𝜎2)

Les paramètres du modèle peuvent s’interpréter aisément :

𝛼𝑥 représente le niveau de la mortalité spécifique à l’âge x.

𝑘𝑡 est la composante temporelle du modèle et représente la tendance générale de la

mortalité.

𝛽𝑥 représente la sensibilité de l’âge x à la tendance générale de mortalité.

휀𝑥𝑡 est un bruit gaussien centré.

L’historique de notre portefeuille de prévoyance individuelle n’étant pas profond, nous

choisissons de calibrer les paramètres du modèle à partir des données de la population nationale

(source HMD) puis de projeter les taux de mortalité de la population nationale à horizon 1 an.

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44 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Ensuite, on détermine les taux de mortalité projetés de notre portefeuille en utilisant une

technique de positionnement par rapport à une table de référence.

La technique du positionnement consiste à supposer qu’il existe une relation simple (par

exemple une relation linéaire) entre les taux de mortalité de notre portefeuille et les taux de

mortalité de la population nationale. En supposant que cette relation reste stable dans le temps,

nous pouvons obtenir la projection des taux de mortalité de notre portefeuille dans le futur à

partir des taux de mortalité nationaux projetés à l’aide du modèle de Lee-Carter.

Nous avons choisi d’utiliser le modèle de Lee-Carter dans l’approche prospective pour sa notoriété

et sa simplicité d’implémentation. Il présente notamment un nombre raisonnable de paramètres

faciles à interpréter. Il faut néanmoins souligner les limites de ce modèle. La sensibilité 𝛽𝑥 de l’âge

x à l’évolution de la mortalité générale est supposé constante dans le temps, ce qui est une

hypothèse forte. Par ailleurs, les effets de cohorte ne sont pas modélisés, il existe des versions

améliorées de ce modèle avec plus de paramètres qui permettent de tenir compte des effets de

cohorte. Dans notre cas, la finalité du modèle est de capter le risque de tendance en projetant les

taux de mortalité à horizon un an, le modèle de Lee-Carter reste donc adapté à notre étude.

Calibrage des paramètres du modèle de Lee-Carter :

Tout d’abord, le modèle de Lee-Carter pose un problème d’identifiabilité des paramètres. En effet,

si on n’impose aucune contrainte aux coefficients, alors en prenant 𝛽′𝑥 = 𝑎𝛽𝑥 et 𝑘′𝑡 = 𝑎−1𝑘𝑡 les

paramètres (𝛼𝑥, 𝛽′𝑥, 𝑘′𝑡) fournissent les mêmes taux de mortalité 𝑞𝑥𝑡 que (𝛼𝑥, 𝛽𝑥, 𝑘𝑡).

Afin que le modèle soit correctement spécifié, nous imposons les conditions d’identifiabilité

suivantes :

∑ 𝛽𝑥

𝑥𝑚𝑎𝑥

𝑥𝑚𝑖𝑛

= 1 et ∑ 𝑘𝑡

𝑡𝑚𝑎𝑥

𝑡𝑚𝑖𝑛

= 0

Les paramètres du modèle (𝛼𝑥, 𝛽𝑥, 𝑘𝑡) sont estimés par la méthode des moindres carrés. Cela

revient à résoudre le problème d’optimisation sous contraintes suivant :

(�̂�𝑥, �̂�𝑥, �̂�𝑡) = 𝑎𝑟𝑔 𝑚𝑖𝑛 (𝛼𝑥,𝛽𝑥,𝑘𝑡) {∑ ∑ (ln 𝜇𝑥𝑡 − 𝛼𝑥 + 𝛽𝑥𝑘𝑡)²

𝑥𝑚𝑎𝑥

𝑥𝑚𝑖𝑛

𝑡𝑚𝑎𝑥

𝑡𝑚𝑖𝑛

}

𝒔. 𝒄 : ∑ 𝛽𝑥

𝑥𝑚𝑎𝑥

𝑥𝑚𝑖𝑛

= 1 , ∑ 𝑘𝑡

𝑡𝑚𝑎𝑥

𝑡𝑚𝑖𝑛

= 0

Ce problème admet une solution unique. Nous n’exposerons pas dans ce mémoire le calcul

théorique permettant d’aboutir aux paramètres.

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45

45 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Afin de calibrer les paramètres du modèle de manière robuste, nous utilisons les données de la

population française générale issues de la base HMD (Human Mortality Database). Cette base

peut être manipulée directement à partir du logiciel R en installant le package « Demography ».

L’historique utilisé est celui des 30 dernières années de la population totale hommes/femmes.

Rappelons que pour la garantie décès le calibrage est effectué sur la base des données à fin 2012,

nous exploitons donc les données observées de 1983 à 2012. Le graphique ci-dessous montre les

taux de mortalité observés de la population française :

Figure 4-9 Evolution des taux de mortalité en France de 1983 à 2012

On observe un niveau de mortalité en baisse au fil du temps, cela est conforme aux attentes du

fait de l’allongement de l’espérance de vie résultant de l’amélioration de la qualité de vie (progrès

de la médecine…). On remarque que les courbes observées sont légèrement accidentées, nous

préférons par la suite utiliser les données lissées. Nous n’entrerons pas dans le détail des

techniques de lissage de table car cela sort du cadre de l’objectif du mémoire. Le graphique ci-

dessous présente les taux de mortalité lissés via la fonction smooth.demogdata() du package

Demography :

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46

46 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Figure 4-10 Evolution des taux de mortalité en France de 1983 à 2012 avec lissage

Nous calibrons les paramètres (�̂�𝑥, �̂�𝑥, �̂�𝑡) à partir des données nationales lissées sur l’historique

1983-2012. Ces paramètres sont estimés à partir de R en utilisant la fonction lca() relative au

modèle de Lee-Carter également disponible dans le package Demography(). Les paramètres

estimés sont présentés dans les graphiques ci-dessous :

Figure 4-11 Paramètres de niveau et de sensibilité du modèle de Lee-Carter

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47 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Figure 4-12 Composante temporelle du modèle de Lee-Carter

Extrapolation de la composante temporelle 𝒌𝒕 :

Afin de projeter la composante temporelle 𝒌𝒕 , nous modélisons ce terme par une série

temporelle du type ARIMA(0,1,0). C’est le modèle le plus couramment utilisé pour la modélisation

des taux de mortalité par le modèle de Lee-Carter.

Ce modèle, également appelé marche aléatoire avec tendance, s’écrit :

𝑘𝑡 = 𝑘𝑡−1 + 𝑐 + 𝜎휀𝑡

𝐴𝑣𝑒𝑐 휀𝑡 ~ 𝑁(0,1) 𝑒𝑡 𝑐 𝑢𝑛 𝑝𝑎𝑟𝑎𝑚è𝑡𝑟𝑒 𝑑𝑒 𝑡𝑒𝑛𝑑𝑎𝑛𝑐𝑒

Les paramètres de la série temporelle sont estimés par la méthode des moments :

�̂� =𝑘𝑡𝑚𝑎𝑥 − 𝑘𝑡𝑚𝑖𝑛𝑡𝑚𝑎𝑥 − 𝑡𝑚𝑖𝑛

�̂�² =1

𝑡𝑚𝑎𝑥 − 𝑡𝑚𝑖𝑛 − 1∑ (𝑘𝑡+1 − 𝑘𝑡 − �̂�)

𝑡𝑚𝑎𝑥−1

𝑡𝑚𝑖𝑛

²

Nous projetons ensuite la composante temporelle du modèle de Lee-Carter à horizon 1 an afin

d’en déduire le quantile à 99,5% et la moyenne notés respectivement �̂�2013𝑐𝑒𝑛𝑡𝑟𝑎𝑙 et �̂�2013

99,5%.

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48 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Figure 4-13 Extrapolation de la composante temporelle du modèle de Lee-Carter

En effet, comme 𝑘𝑡 suit une marche aléatoire :

𝑘𝑡 = 𝑘𝑡−1 + 𝑐 + 𝜎휀𝑡

Nous avons en particulier :

𝑘2013 ~ 𝑁(�̂�2012 + �̂� , 𝜎²)

Une fois la composante temporelle extrapolée, on obtient les taux de mortalité de la population

générale française projetés à horizon un an selon un scénario central et un scénario bicentenaire à

partir de la relation liant le taux de risque instantané au taux de mortalité définie au début de ce

paragraphe.

Hypothèses du positionnement :

Après avoir projeté les taux de mortalité de la population française générale à horizon un an,

nous utilisons la technique classique du positionnement par rapport à une table de référence pour

projeter également les taux de mortalité du portefeuille de prévoyance individuelle d’AXA.

Pour cela nous supposons qu’il existe une relation simple et homogène entre les taux de mortalité

des deux populations à l’année de calcul (ici 2012) et que cette relation restera stable à horizon un

an.

Nous utilisons le modèle de Brass :

𝒍𝒐𝒈𝒊𝒕(𝒒𝒙𝑨𝒙𝒂) = 𝒂 × 𝒍𝒐𝒈𝒊𝒕(𝒒𝒙

𝑭𝒓𝒂𝒏𝒄𝒆) + 𝒃

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49 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Avec :

𝑙𝑜𝑔𝑖𝑡(𝑥) = ln (𝑥

1 − 𝑥)

Les paramètres du positionnement sont calibrés en utilisant les taux de mortalité observés pour

les âges entre 25 et 80 ans. Les assurés de cette tranche d’âge représentent plus de 97% de

l’exposition totale du portefeuille.

Les graphiques ci-dessous présentent la comparaison entre les taux de mortalité du portefeuille

d’Axa et les taux de mortalité de la population française :

Figure 4-14 Taux de mortalité du portefeuille et nationaux en 2012

Figure 4-15 Positionnement par le modèle de Brass du portefeuille par rapport à la population de référence

0

0,01

0,02

0,03

0,04

0,05

0,06

0,07

0,08

18 22 26 30 34 38 42 46 50 54 58 62 66 70 74 78

Tau

x d

e m

ort

alit

é

Comparaison des taux de mortalité du portefeuille aux taux de mortalité nationaux en 2012

qx France

qx Axa

y = 1,1247x + 0,4324 R² = 0,96

-10

-8

-6

-4

-2

0

-8 -6 -4 -2 0

logi

t(q

x) A

xa

logit(qx) France

Positionnement du portefeuille par rapport à la population française

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50

50 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Nous observons un bon ajustement du modèle de Brass à nos données avec un R² de 0,96. Notons

que pour avoir un bon ajustement nous avons retenu uniquement les âges entre 25 et 80 ans.

Cette hypothèse reste raisonnable car cette tranche représente plus de 97% de l’exposition totale.

Test de la stabilité du positionnement :

Afin de projeter les taux de mortalité de notre portefeuille de prévoyance individuelle à

horizon un an nous avons utilisé les taux de mortalité projeté d’une population de référence (i.e la

population française) puis nous avons utilisé la relation de positionnement définie

précédemment. Celle-ci étant calibrée à partir des données de 2012, nous avons donc fait

l’hypothèse forte que cette relation restera stable à horizon un an. Pour justifier cette hypothèse,

nous effectuons un back-test sur les cinq dernières années pour vérifier que les paramètres du

positionnement restent relativement stables dans le temps, ou à minima dans le court terme.

Figure 4-16 Backtest du positionnement par rapport à une table de référence

Nous remarquons que les coefficients du positionnement sont relativement stables au cours de

ces cinq dernières années à l’exception de l’année 2011 qui présente des coefficients s’écartant

légèrement de la moyenne.

Estimation du choc :

A partir de la relation de positionnement présentée dans le paragraphe précédent, nous

projetons les taux de mortalité du portefeuille de prévoyance individuelle à horizon 1 an selon

deux scénarios : un scénario central et un scénario choqué correspondant à un événement

bicentenaire.

On obtient ainsi un choc pour chaque âge x, correspondant entre l’écart relatif entre le taux de

mortalité central et choqué. Nous pouvons ensuite agréger l’ensemble des chocs obtenus en les

pondérant par les expositions par âge.

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51 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Le tracé ci-dessous présente les chocs obtenus par âge :

Figure 4-17 Choc process prospectif

Nous observons un choc plus élevé pour les âges inférieurs à 30 ans. Cela est dû à la volatilité des

taux de mortalité pour ces âges à cause d’un faible nombre de décès observés. L’impact de cette

tranche reste néanmoins très faible à cause de la faible exposition observée sur notre portefeuille.

Le choc process obtenu par la moyenne des chocs pondérée par les expositions (par âge) de notre

portefeuille vaut 9%.

Figure 4-18 Exposition du portefeuille par âge

0%

5%

10%

15%

20%

18 21 24 27 30 33 36 39 42 45 48 51 54 57 60 63 66 69 72 75 78

Choc process par âge x

0,00%

0,50%

1,00%

1,50%

2,00%

2,50%

3,00%

3,50%

18 21 24 27 30 33 36 39 42 45 48 51 54 57 60 63 66 69 72 75 78

Répartition de l'exposition du portefeuille par âge

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52 Modélisation du risque de prime en prévoyance

4.7.4. Calibrage du choc d’estimation

Le risque d’estimation correspond au risque de fluctuations autour des taux de mortalité

best-estimate du fait de la taille et l’hétérogénéité du portefeuille.

Rappelons que les taux de mortalité best-estimate sont estimés sur la base de l’étude d’un

échantillon, correspondant à l’ensemble des individus présents dans le portefeuille à une période

donnée. Ainsi, il est fort probable que la même étude réalisée sur un autre échantillon (par

exemple l’étude du portefeuille à une autre date) conduise à des résultats différents. C’est ce

qu’on appelle l’erreur d’échantillonnage, qu’on modélise dans ce paragraphe.

Nous modélisons le risque d’estimation en supposant que les taux de mortalité best-estimate sont

perturbés par un bruit gaussien centré en 0.

𝑞(𝑥, 𝑡) = 𝑞𝐵𝐸(𝑥, 𝑡) + 𝜎𝐸𝑠𝑡𝑖𝑚𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛𝜖𝐸𝑠𝑡𝑖𝑚𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛 , 𝜖𝐸𝑠𝑡𝑖𝑚𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛~ 𝑁(0,1)

Afin d’estimer la variance d’estimation 𝜎2, nous supposons que tous les individus du portefeuille

ont la même probabilité de décès et que ces décès sont indépendants.

Sur une période d’observation donnée, le taux de mortalité best-estimate �̂� (indépendant du sexe

et de l’âge) s’estime par la somme des décès observés sur la période divisée par l’exposition totale

du portefeuille.

Si on note 𝑁 l’exposition totale et 𝑋𝑖 la variable aléatoire qui vaut 1 si l’individu décède pendant

la période d’observation et 0 sinon, le taux de mortalité best-estimate s’écrit :

𝑞𝐵𝐸(𝑥, 𝑡) = �̂� =∑ 𝑋𝑖𝑁𝑖=1

𝑁

Nous avons pour tout i, 𝑋𝑖 ~ 𝑏𝑒𝑟(�̂�)

Les 𝑋𝑖 étant indépendants, la somme ∑ 𝑋𝑖𝑁𝑖=1 suit une loi binomiale de paramètres (𝑁, �̂�), sa

variance est alors donnée par 𝑁 𝑞 ̂(1 − �̂�).

Si l’exposition est assez grande, le TCL stipule que �̂� est asymptotiquement normal, de

variance 𝜎2.

𝜎2 = 𝑉𝑎𝑟 (∑ 𝑋𝑖𝑁𝑖=1

𝑁) =

𝑣𝑎𝑟(∑ 𝑋𝑖𝑁𝑖=1 )

𝑁²=𝑞 ̂(1 − �̂�)

𝑁

Le choc estimation se déduit par l’écart entre le scénario central et le scénario choqué:

𝑐ℎ𝑜𝑐 𝑒𝑠𝑡𝑖𝑚𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛 =�̂� × 𝑞𝑢𝑎𝑛𝑡𝑖𝑙𝑒99,5%[𝑁(0,1)]

�̂�

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53 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Notons que la variance est inversement proportionnelle au nombre d’individus observés. Plus la

taille de l’échantillon est significative, moins il y aura d’erreurs d’échantillonnage. Il convient donc

de considérer un historique suffisamment étendu pour réduire notre erreur.

L’historique choisi pour le calibrage du choc d’estimation a été restreint à 5 ans afin d’estimer un

taux de mortalité best-estimate proche de notre portefeuille actuel. Par ailleurs, cette période est

cohérente avec les données utilisées lors de la construction des tables d’expérience utilisées pour

la tarification. Celles-ci sont construites de manière périodique tous les cinq ans.

Nous calibrons ainsi le choc d’estimation sur la période 2008-2012 :

Nombre de décès 1343

Exposition 428483

q BE estimé 0,31%

Variance estimée 7,29E-09

Choc 7,02%

Le choc d’estimation obtenu est relativement faible devant le choc process. Cela n’est pas

inattendu car à la différence du choc process, le calibrage du choc d’estimation ne prend pas en

compte la dynamique de l’évolution des taux de mortalité dans le temps.

4.8. Synthèse et traduction du choc de mortalité en S/C

En somme, nous obtenons sur la base des données arrêtées à fin 2012 un choc process

rétrospectif de 19% et un choc process prospectif de 9%, nous retenons ainsi un choc de 19%

correspondant au maximum entre les deux calculs. Le choc d’estimation quant à lui vaut 7%. En

agrégeant les chocs process et estimation en supposant une corrélation nulle, on aboutit à un

choc de mortalité de 21%.

A titre comparatif, le modèle hybride actuel fournit un choc de mortalité aux alentours de

16%, le modèle vie en deux composantes est donc plus prudent. Cela était prévisible car on

modélise plus de sources d’aléa, par ailleurs le risque de process (qui est prépondérant) est évalué

de manière prudente en prenant le maximum des chocs obtenus par deux approches différentes:

prospective et rétrospective.

Rappelons qu’afin de ne pas changer la structure actuelle du modèle interne, les chocs devront

être traduits en S/P. Dans notre cas la traduction en S/P est immédiate puisqu’une hausse

homogène de 21% des taux de mortalité entraine systématiquement une hausse de la sinistralité,

et par conséquent du S/P, également de 21%.

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54 Modélisation du risque de prime en prévoyance

4.9. Conclusion et limites de l’approche vie

Les calculs menés dans cette approche vie se basent sur des taux de mortalité estimés en

nombres puisque les montants des capitaux garantis n’interviennent jamais. Cela n’est pas

choquant puisque les tables d’expériences utilisées pour la tarification sont également estimées

en nombres. De surcroît, pour un âge fixé, le capital garantit est généralement proportionnel à la

prime payé par l’assuré. Cependant, dans la vision STEC, il est important de raisonner en termes

de pertes subies par l’assureur. Il conviendrait donc d’effectuer à la fois un calibrage en calculant

des taux de mortalité en nombres et en montants puis de retenir le calcul le plus prudent.

D’autre part, l’estimation du choc process prospectif fait intervenir un modèle

stochastique de mortalité, cette approche est par conséquent sensible au choix du modèle utilisé. Nous avons choisi le modèle de Lee-Carter pour sa simplicité d’implémentation mais pour plus de prudence, il serait préférable de tester plusieurs modèles de mortalité puis de retenir le modèle le plus défavorable. Dans notre cas, le choc process prospectif est négligeable devant le choc rétrospectif, le choix du modèle prospectif n’aura donc pas d’impact sur le choc de mortalité global.

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55 Modélisation du risque de prime en prévoyance

5. Partie V : Etude de la garantie décès : application d’une méthode non-vie

Dans cette partie, nous allons utiliser une méthode non-vie pour le calibrage du choc prime en différenciant entre le risque de sinistralité et le risque de portefeuille.

5.1. Justification de l’approche

Plusieurs arguments sont en faveur d’une approche de type Non-Vie: L’approche non-vie pourrait être appliquée également à d’autres types de portefeuille ne

disposant pas des données tête par tête contrairement au portefeuille de prévoyance individuelle. Dans un portefeuille de prévoyance collective par exemple, il est généralement difficile d’obtenir une vision précise de l’exposition de l’assureur.

Les contrats sont avec engagements annuels (à tacite reconduction), en similitude avec les garanties IARD.

La modélisation des traités de réassurance non proportionnelle est plus facile.

5.2. Présentation de la méthodologie IARD générale

Dans l’approche IARD générale, nous considérons deux sources de risques : le risque de prime et de risque de réserve. Le risque de prime est scindé en deux sous risques : le risque de sinistralité et le risque de portefeuille. Le risque de portefeuille correspond à l’incertitude quant au niveau des primes dans le futur et peut être décomposé lui aussi en deux sous-risques : le risque de pricing qui correspond à une baisse éventuelle du niveau des primes payées par les assurés, et le risque de rachats synonyme d’une baisse du nombre de contrats dans le portefeuille :

Afin de modéliser le risque de prime, nous modélisons séparément les sinistres et les primes afin d’obtenir une distribution du ratio de sinistralité à horizon 1 an.

Modèle IARD

Risque de Prime

Risque de sinistralité

Risque de portefeuille

Risque de Pricing

Rachat et affaires

nouvelles

Risque de Réserve

Figure 5-1 Structure générale du modèle IARD

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56 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Les sinistres sont modélisés par un modèle fréquence-coût collectif avec distinction entre sinistres attritionnels et atypiques:

𝑆𝑎𝑡𝑡 = ∑ 𝑋𝑖𝑎𝑡𝑡

𝑁𝑎𝑡𝑡

𝑖=1

𝑒𝑡 𝑆𝑎𝑡𝑦𝑝 = ∑ 𝑋𝑖𝑎𝑡𝑦𝑝

𝑁𝑎𝑡𝑦𝑝

𝑖=1

𝑋𝑖𝑎𝑡𝑡, 𝑋𝑖

𝑎𝑡𝑦𝑝 suivent des lois à déterminer et 𝑁𝑎𝑡𝑡 , 𝑁𝑎𝑡𝑦𝑝 suivent des lois discrète. Nous

supposons par ailleurs l’indépendance entre la fréquence et le coût. Les primes sont modélisées à partir de la chronique des écarts entre le chiffre d’affaires réalisés et le chiffre d’affaires budget issu du plan stratégique. Une fois les lois des sinistres et des primes déterminées et calibrées, nous obtenons par des simulations de Monte-Carlo la distribution du ratio de sinistralité à horizon un an. Le choc prime se déduit par de l’écart entre le S/P scénario STEC et le S/P scénario central :

𝑐ℎ𝑜𝑐 𝑝𝑟𝑖𝑚𝑒 =(𝑆𝑃)𝑆𝑇𝐸𝐶

(𝑆𝑃)𝐵𝐸

− 1

Le scénario STEC correspond à une hausse de la sinistralité et une baisse des primes attendues.

5.3. Spécificités de la garantie décès

La garantie décès présente des spécificités qui la rendent différente des garanties IARD

classiques. En effet, les sinistres de la garantie décès sont forfaitaires et non indemnitaires

puisque le montant de la prestation est déterminé en fonction de la prime payée. Cela induit un

faible risque sur le coût des sinistres car les capitaux garantis sont connus d’avance par l’assureur.

Compte-tenu de ces spécificités nous avons choisi d’adapter le modèle IARD général à notre

garantie en ne faisant pas de distinction entre les sinistres attritionnels et atypiques car les deux

résultants du même risque (décès), en privilégiant plutôt une segmentation en classes par

tranches d’âge et de capital garanti. La sinistralité de chaque tranche serait alors modélisée par

une approche fréquence-capital garanti. La modélisation des primes quant à elle restera

inchangée par rapport à l’approche IARD générale.

5.4. Adaptation du modèle IARD à la garantie décès

5.4.1. Modélisation de la sinistralité

Pour modéliser la sinistralité du portefeuille, nous avons choisi une segmentation du portefeuille par tranches d’âge et de capital garanti. L’idée est d’appliquer un modèle en

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57 Modélisation du risque de prime en prévoyance

fréquence-capital garanti en supposant que le risque de sinistralité dépend principalement de la fréquence.

La sinistralité de chaque tranche i peut s’écrire:

𝑆𝑖 = 𝑁𝑖𝐶𝑖

Avec 𝑁𝑖 la fréquence des décès (aléatoire) et 𝐶𝑖 le capital garanti moyen de la tranche

(déterministe). Nous supposons que la fréquence suit une loi de Poisson et que le capital garanti est déterministe. La sinistralité totale du portefeuille s’obtient en sommant les sinistralités de l’ensemble des tranches :

𝑆 = ∑ 𝑆𝑖

𝑛𝑏 𝑑𝑒 𝑡𝑟𝑎𝑛𝑐ℎ𝑒𝑠

𝑖=1

= ∑ 𝑁𝑖𝐶𝑖

𝑛𝑏 𝑑𝑒 𝑡𝑟𝑎𝑛𝑐ℎ𝑒𝑠

𝑖=1

Nous supposons également l’indépendance entre les différentes tranches. L’hypothèse d’indépendance entre les différentes classes découle de l’indépendance entre les différents individus du portefeuille. Supposons que tous les individus d’une même tranche ont la même probabilité de décès 𝑝𝑖 (cette hypothèse est acceptable si la segmentation par tranches d’âge/capital retenue est suffisamment fine), la sinistralité de la tranche 𝑖 comportant 𝑛 individus s’écrit alors :

𝑆𝑖 =∑𝑋𝑘𝐶𝑘

𝑛

𝑘=1

= 𝐶𝑖 ∑𝑋𝑘

𝑛

𝑘=1

𝑋𝑘 est une variable aléatoire binaire valant 1 si l’individu k décès, et 0 sinon. Cette variable suit alors une loi de Bernoulli de paramètre 𝑝𝑖. Ainsi le nombre de décès observé au sein de la classe suit une loi binomiale :

∑𝑋𝑘

𝑛

𝑘=1

~ 𝐵(𝑛, 𝑝𝑖)

Si n est suffisamment grand et 𝑝𝑖 petit, nous avons la convergence de la loi binomiale vers une loi de Poisson :

∑𝑋𝑘

𝑛

𝑘=1

~ 𝐵(𝑛, 𝑝𝑖) 𝐿𝑜𝑖→ 𝑃𝑜𝑖𝑠𝑠𝑜𝑛(𝑛𝑝𝑖)

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58

58 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Nous pouvons donc écrire : 𝑆𝑖 = 𝑁𝑖𝐶𝑖

où 𝑁𝑖 suit une loi de poisson de paramètre λ égal à la moyenne annuelle des décès observés pour cette tranche.

5.4.2. Analyse des données du portefeuille

Nous retenons la base de données correspondant à la période 2002-2012 afin de permettre la comparaison entre les résultats de cette approche avec ceux de l’approche vie présenté précédemment. Toutefois, nous remarquons quelques incohérences dans notre base de données:

1% des capitaux décès (en nombre) sont nuls. 3% des primes (en nombre) sont nulles.

Ces incohérences sont dues en partie à des contrats qui ont perdu des informations sur le

montant garanti et la prime acquise au moment de la migration des bases. Par ailleurs, certains contrats réduits ou rachetés présentent un montant capital décès nul ou très faible, cela est dû à la mise à jour de leurs informations après le changement de situation. Par conséquent, nous supprimons ces observations de notre base de données. Avant d’effectuer la segmentation du portefeuille en tranches, nous réalisons des statistiques descriptives sur les âges et les capitaux garantis :

5.4.2.1. Répartition des âges en entrée et en sortie du portefeuille

0 0 18 2 568

21 096

38 244 42 878

49 689 49 361

44 169

36 372

28 623

22 068

12 147 8 454 7 377

4 488 323 0 0 0 0 0 0 0

0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75 80 85 90 95 100 105 110 115 120

agedeb

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59

59 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Figure 5-2 Répartition des âges en entrée et en sortie du portefeuille

Nous remarquons que la distribution est décalée à droite pour les âges de sortie conformément aux attentes. Il y aurait donc relativement peu d’entrées et sorties du portefeuille.

5.4.2.2. Répartition des capitaux décès

Figure 5-3 Répartition des capitaux décès du portefeuille

Les capitaux décès sont concentrés entre EUR 0 et EUR 50 000 (vision agrégée toutes

années) représentants 75 % du nombre des contrats en portefeuille.

0 0 6 542

9 711

28 190

39 189 42 900

49 902 48 134

44 343

34 496

27 776

17 784

10 010 8 616 5 231

1 043 5 0 0 0 0 0 0

0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75 80 85 90 95 100 105 110 115 120

agefin

71742

23349 21164

32963 39900

29153 30149

11268 13211 8537

37548

17313 11349

19826

368 38

0 <

…<

5 0

00

5 0

00

<…

< 1

0 0

00

10

00

0 <

…<

15

00

0

15

00

0 <

…<

20

00

0

20

00

0 <

…<

25

00

0

25

00

0 <

…<

30

00

0

30

00

0 <

…<

35

00

0

35

00

0 <

…<

40

00

0

40

00

0 <

…<

45

00

0

45

00

0 <

…<

50

00

0

50

00

0 <

…<

60

00

0

60

00

0 <

…<

80

00

0

80

00

0 <

…<

10

0 0

00

10

0 0

00

<…

< 1

00

0 0

00

1 0

00

00

0 <

…<

5 0

00

00

0

5 0

00

00

0 <

…<

25

00

0 0

00

MTGAR

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60

60 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Par ailleurs, on observe une forte volatilité des capitaux sous risque sur la queue de distribution :

DTNAIS DTENTREE DTSORTIE prest MTGAR Primes DC ifemme agedeb agefin

13/09/1992 01/01/2013 30/06/2013 CD 23 000 000 28 935 0 0 20 21

22/09/1984 01/01/2013 30/06/2013 CD 20 000 000 86 084 0 0 28 29

21/04/1965 05/10/2011 01/01/2014 CD 14 350 000 39 127 0 0 46 49

16/11/1961 31/12/2008 01/01/2014 CD 13 200 000 45 937 0 0 47 52

20/05/1989 01/07/2012 01/07/2013 CD 12 000 000 9 763 0 0 23 24

10/07/1958 31/12/2008 01/01/2014 CD 10 750 000 62 568 0 0 51 56

5.4.2.3. Segmentation du portefeuille en classes

Nous constituons des classes par tranches de capitaux décès et par tranches d’âges (112 au

total) ce qui devrait permettre de prendre en compte (du moins en partie) l’effet de corrélation lié à l’âge (les têtes d’une même tranche d’âge sont plus susceptibles de subir un taux de mortalité similaire). A fortiori, les têtes d’une même génération et de capitaux décès similaires (i.e. footballeurs professionnels sous suivi médical renforcé) sont susceptibles d’avoir la même probabilité de décès. Les classes doivent également comporter un nombre d’individus suffisamment élevé pour un calibrage du nombre de décès.

Figure 5-4 Distribution des CSR au sein de chaque tranche

-2 000 000

3 000 000

8 000 000

13 000 000

18 000 000

23 000 000

0

2 000

4 000

6 000

8 000

10 000

12 000

14 000

K :

0 <…

< 5

000

| A

ge :

0 <…

< 30

K :

0 <…

< 5

000

| A

ge :

50 <

…<

60

K :

0 <…

< 5

000

| A

ge :

80 <

…<

100

K :

5 00

0 <…

< 10

000

| A

ge :

40 <

…<

50

K :

5 00

0 <…

< 10

000

| A

ge :

70 <

…<

80

K :

10 0

00 <

…<

15 0

00 |

Age

: 30

<…

< 40

K :

10 0

00 <

…<

15 0

00 |

Age

: 60

<…

< 70

K :

15 0

00 <

…<

20 0

00 |

Age

: 0

<…<

30

K :

15 0

00 <

…<

20 0

00 |

Age

: 50

<…

< 60

K :

15 0

00 <

…<

20 0

00 |

Age

: 80

<…

< 10

0

K :

20 0

00 <

…<

25 0

00 |

Age

: 40

<…

< 50

K :

20 0

00 <

…<

25 0

00 |

Age

: 70

<…

< 80

K :

25 0

00 <

…<

30 0

00 |

Age

: 30

<…

< 40

K :

25 0

00 <

…<

30 0

00 |

Age

: 60

<…

< 70

K :

30 0

00 <

…<

35 0

00 |

Age

: 0

<…<

30

K :

30 0

00 <

…<

35 0

00 |

Age

: 50

<…

< 60

K :

30 0

00 <

…<

35 0

00 |

Age

: 80

<…

< 10

0

K :

35 0

00 <

…<

40 0

00 |

Age

: 40

<…

< 50

K :

35 0

00 <

…<

40 0

00 |

Age

: 70

<…

< 80

K :

40 0

00 <

…<

45 0

00 |

Age

: 30

<…

< 40

K :

40 0

00 <

…<

45 0

00 |

Age

: 60

<…

< 70

K :

45 0

00 <

…<

50 0

00 |

Age

: 0

<…<

30

K :

45 0

00 <

…<

50 0

00 |

Age

: 50

<…

< 60

K :

45 0

00 <

…<

50 0

00 |

Age

: 80

<…

< 10

0

K :

50 0

00 <

…<

60 0

00 |

Age

: 40

<…

< 50

K :

50 0

00 <

…<

60 0

00 |

Age

: 70

<…

< 80

K :

60 0

00 <

…<

80 0

00 |

Age

: 30

<…

< 40

K :

60 0

00 <

…<

80 0

00 |

Age

: 60

<…

< 70

K :

80 0

00 <

…<

100

000

| A

ge :

0 <…

< 30

K :

80 0

00 <

…<

100

000

| A

ge :

50 <

…<

60

K :

80 0

00 <

…<

100

000

| A

ge :

80 <

…<

100

K :

100

000

<…<

1 00

0 00

0 |

Age

: 40

<…

< 50

K :

100

000

<…<

1 00

0 00

0 |

Age

: 70

<…

< 80

K :

1 00

0 00

0 <…

< 5

000

000

| A

ge :

30 <

…<

40

K :

1 00

0 00

0 <…

< 5

000

000

| A

ge :

60 <

…<

70

K :

5 00

0 00

0 <…

< 25

000

000

| A

ge :

0 <…

< 30

K :

5 00

0 00

0 <…

< 25

000

000

| A

ge :

50 <

…<

60

K :

5 00

0 00

0 <…

< 25

000

000

| A

ge :

80 <

…<

100

Nombre d'individus Capital Moyen + SD Capital Moyen - SD Capital Moyen

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61 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Nous remarquons une forte volatilité des capitaux garantis pour les tranches d’âge et de capitaux garantis élevés. L’hypothèse d’un capital garanti moyen déterministe énoncée dans la partie 5.4.1 pourrait être peu prudente. Ainsi, pour la simulation de la sinistralité du portefeuille nous ne retenons plus une approche Nombre x Capital Moyen comme énoncé à la partie 5.4.1 mais plutôt un modèle avec un capital garanti stochastique. La sinistralité de chaque classe s’écrit maintenant de la forme:

𝑆𝑖 =∑𝐶𝑘

𝑁𝑖

𝑘=1

La fréquence 𝑁𝑖 et les capitaux 𝐶𝑘 sont tous les deux stochastiques :

Loi de fréquence retenue pour 𝑁𝑖 : Loi de Poisson de paramètre λ = Nombre de décès observé

Loi de sévérité retenue pour les 𝐶𝑘: Loi Normale (tronquée aux bornes) de paramètres : µ = Capital moyen de la classe σ = Ecart-type du capital de la classe

Nous retenons ici un capital décès stochastique en raison d’un capital décès potentiellement différent d’une tête à l’autre pour une même classe. A contrario, un capital moyen déterministe pourrait sous-estimer l’aléa sur la sinistralité, par exemple dans le cas de décès d’une tête de la classe avec un capital décès plus élevé que la moyenne. Par ailleurs, nous avons choisi dans cette section de ne pas s’attarder sur le choix des lois en considérant des lois standards (loi normale et loi de poisson) puisque l’objectif principal de cette section est de proposer le principe d’une approche IARD adaptée à la garantie décès. Les méthodes statistiques utilisées pour le choix des lois seront utilisées dans la section suivante qui traite de la modélisation IARD intégrale appliquée à la garantie des accidents de la vie.

5.4.3. Modélisation des primes

Les primes sont modélisées à partir de la chronique des écarts entre le chiffre d’affaires réalisés et le chiffre d’affaires budget issu du plan stratégique. Nous supposons que cet écart suit une loi normale :

𝑃𝑟é𝑒𝑙 − 𝑃𝑏𝑢𝑑𝑔𝑒𝑡~ 𝑁(𝜇, 𝜎2)

Si on se place à l’année N, nous aurons besoin de l’historique des primes réelles et des primes budgets pour les années antérieures à l’année N ainsi que le budget de l’année N+1. Le chiffre d’affaire réel de l’année N+1 se déduit alors à partir de la relation suivante:

�̃�𝑟é𝑒𝑙𝑁+1 = 𝑃𝑏𝑢𝑑𝑔𝑒𝑡

𝑁+1 + 휀 , 𝑎𝑣𝑒𝑐 휀 ~ 𝑁(𝜇, 𝜎2)

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62 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Les paramètres de cette loi sont estimés par la méthode des moments à partir de la chronique des écarts observés sur les dernières années :

�̂� =1

𝑁∑𝑃𝑟é𝑒𝑙

𝑖 − 𝑃𝑏𝑢𝑑𝑔𝑒𝑡𝑖

𝑁

𝑖=1

�̂� = √1

𝑁 − 1∑((𝑃𝑟é𝑒𝑙

𝑖 − 𝑃𝑏𝑢𝑑𝑔𝑒𝑡𝑖 ) − �̂�)

2𝑁

𝑖=1

Notons que pour la garantie décès non emprunteur, nous ne disposons pas des chiffres

d’affaires budget à cette maille mais plutôt du chiffre d’affaires budget de l’ensemble de la prévoyance individuelle. Nous estimons donc dans un premier temps de manière simple les primes du budget de la garantie décès non emprunteur au prorata des primes acquises issues de la comptabilité :

𝑃𝑏𝑢𝑑𝑔𝑒𝑡𝑑é𝑐è𝑠 = 𝑃𝑏𝑢𝑑𝑔𝑒𝑡

𝑝𝑟é𝑣𝑦𝑎𝑛𝑐𝑒. 𝑃𝑐𝑜𝑚𝑝𝑡𝑎𝑏𝑙𝑒𝑑é𝑐è𝑠

𝑃𝑐𝑜𝑚𝑝𝑡𝑎𝑏𝑙𝑒𝑝𝑟é𝑣𝑦𝑎𝑛𝑐𝑒

5.4.4. Simulation du ratio de sinistralité S/P

Une fois avoir déterminé et calibré les lois de fréquence et de sévérité pour chacune des 112 classes de notre portefeuille ainsi que la loi du chiffre d’affaires, nous simulons par tirages aléatoires successifs à l’aide du logiciel R le ratio de sinistralité global du portefeuille à horizon un an. Dans la simulation, nous supposons l’indépendance entre la sinistralité de chacune des classes d’une part, et entre la fréquence et le capital garanti d’autre part. Nous supposons également pour la simulation l’indépendance entre le volume des primes et le montant des sinistres. Cette hypothèse simplificatrice est en toute rigueur fausse puisque les sinistres et les primes sont corrélés positivement (une hausse du volume des primes entraîne généralement une hausse de la sinistralité). Dans notre cas, le risque majeur est la dérive de la sinistralité, en d’autres termes l’aléa quant à la valeur du S/P est porté principalement par le numérateur, par conséquent cette hypothèse a peu d’impact sur le résultat. D’un point de vue « régulateur » l’indépendance retenue pour la modélisation n’est pas pénalisante car elle induit de la prudence dans l’estimation du choc bicentenaire. Nous effectuons 10000 simulations pour estimons de manière robuste le choc.

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63 Modélisation du risque de prime en prévoyance

L’algorithme de simulation du S/P de la garantie décès est le suivant :

N <-10000 Pour i=1 jusqu’à N { Tirage d’une réalisation du volume des primes P(i)

Pour j=1 jusqu’à 112 {

Tirage d’une réalisation de 𝑁𝑗

Tirage de 𝑁𝑗réalisations de capitaux garantis

Sinistralité(j) <- somme des 𝑁𝑗 capitaux garantis tirés précédemment } Sinistralité(i) <- somme des 112 Sinistralité(j) S/P <- Sinistralité(i)/P(i) }

5.5. Résultats

A partir des données du portefeuille sur la période 2002-2012, on obtient la distribution du ratio de sinistralité :

Figure 5-5 Distribution du ratio de sinistralité Décès de la méthode IARD

Le choc bicentenaire est déterminé à partir de la moyenne et du quantile à 99,5% empiriques :

S/P scénario central 26%

S/P scénario choqué 33%

Choc 25%

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64 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Notons également que si nous utilisons l’approche initialement proposée avec un capital garanti déterministe et identique pour l’ensemble des assurés d’une même classe on obtient un choc légèrement plus faible :

S/P scénario central 26%

S/P scénario choqué 32%

Choc 23%

Cela est prévisible car nous avons choisi un nombre de classes important (112 au total), ce qui a réduit la volatilité des capitaux garantis d’une même classe.

5.6. Autre méthode de partitionnement : algorithme des k-means

Dans cette partie, nous présentons une autre approche de segmentation du portefeuille

basée sur l’algorithme des centres mobiles appelé « k-means ».

Avec cette méthode, le nombre de classes est fixé à priori. L’objectif de la méthode est de

partitionner en différentes classes des individus en fonction de la distance (convenablement

choisie) qui les séparent. On représente les individus comme des points de l’espace ayant pour

coordonnées des variables quantitatives. On cherche à regrouper autant que possible les individus

les plus semblables - du point de vue de la distance qu’on a définie - tout en séparant les classes le

mieux possible les unes des autres.

Si n est le nombre de classes qu’on souhaite obtenir, l’algorithme de partitionnement est le

suivant :

Etape 1 (initialisation de l’algorithme): on tire au hasard n individus de la population

étudiée, appelés les n centres initiaux.

Etape 2 (constitution des classes): on réparti l’ensemble des individus en n classes en

regroupant autour de chacun des centres initiaux les individus qui lui sont les plus proches

au sens de la distance définie.

Etape 3 (calcul des nouveaux centres): on détermine les centres de gravité des n classes

obtenue à l’étape précédente et on détermine leurs centres de gravité, qui deviennent les

n nouveaux centres de la partition.

Etape 4 : on réitère les étapes 2 et 3 jusqu’à la convergence de l’algorithme, c’est-à-dire

que le découpage en classes obtenu ne soit plus modifié par une itération supplémentaire.

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65

65 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Nous appliquons cet algorithme à nos données en définissant chaque individu par le couple (âge,

capital garanti) et en fixant le nombre de classes à 10 :

Figure 5-6 Partitionnement du portefeuille en dix classes par la méthode des k-means

Dans notre segmentation nous avons utilisé une distance correspondante à la norme euclidienne

sur R². Par ailleurs, les variables « capital garanti » et « âge » sont normalisés afin de leur donner

le même poids lors du calcul de la distance entre les individus. Par ailleurs, afin de rapprocher les

individus ayant des taux de décès similaires, nous n’utilisons pas la variable âge mais plutôt la

variable taux de mortalité, ce dernier correspond au taux de mortalité théorique de la table

d’expérience et dépend uniquement de l’âge. L’idée serait de rapprocher dans le partitionnement

les individus ayant des probabilités de décès voisines.

Les dix centres obtenus formant notre partition sont:

Centre CSR qx

1 17 402 0,86%

2 91 522 0,21%

3 4 155 4,80%

4 175 278 0,27%

5 18 003 0,20%

6 2 012 442 0,37%

7 917 482 0,32%

8 46 813 0,15%

9 9 892 2,34%

10 407 816 0,34%

On observe que les centres obtenus sont dispersés dans le plan conformément au principe de

l’algorithme qui vise à séparer les classes le mieux possible les unes des autres.

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66

66 Modélisation du risque de prime en prévoyance

L’approche en fréquence-sévérité présentée dans cette partie a été ensuite appliquée pour

modéliser la sinistralité de chacune des dix classes constituées. Le volume des primes quant à lui

reste modélisé au global par la même loi du paragraphe 5.4.3. Par tirages successifs, nous

obtenons une distribution du ratio de sinistralité du portefeuille ce qui nous permet de déduire la

moyenne et quantile à 99,5% empiriques.

S/P scénario central 24%

S/P scénario choqué 28%

Choc 17%

Le choc obtenu par cette nouvelle approche de segmentation est plus faible que le choc présenté

par l’approche en 112 classes qu’on a retenue pour la modélisation IARD appliquée à la garantie

décès. Cela n’est pas surprenant puisque le risque de la sinistralité relatif à cette garantie est

porté par la fréquence, or en segmentant notre portefeuille en dix classes au lieu de 112, nous

réduisons en partie la volatilité du nombre de décès annuels observés pour chaque classe

conduisant ainsi à un choc bicentenaire plus faible.

5.7. Comparaison avec l’approche vie et conclusion

A titre comparatif, la méthode vie fournit un choc prime de 21% alors que la méthode IARD

(avec CSR déterministe) aboutit à un choc de 23% pour le même historique (2002-2012). Les deux

approches sont donc cohérentes entre elles avec un peu plus de prudence remarquée dans la

méthode IARD. Cette prudence est expliquée par la différence des mailles de calcul pour ces deux

méthodes.

Dans l’approche vie, le risque de mortalité est porté principalement par le risque de « process »

dont le choc est calibré rétrospectivement à partir de la chronique des taux de mortalité globaux

du portefeuille. L’agrégation des taux de mortalité en un taux de mortalité unique conduit à une

volatilité moindre et par conséquent un choc de prime plus faible que celui obtenu par l’approche

IARD où la fréquence de mortalité est calculée à une maille plus fine (par classe). En effet, plus le

nombre de classes est important, plus la fréquence des décès devient volatile à cause de la faible

taille de l’échantillon observé.

Bien qu’une modélisation vie semble plus proche de la nature du risque sous-jacent,

l’approche non-vie exposée dans cette section peut être bien adaptée à la garantie décès, et

présente des points forts puisque de nombreux arguments sont en faveur de cette approche. En

effet, à l’instar des garanties IARD, les contrats sont avec engagements annuels à tacite

reconduction. De plus, l’approche IARD est susceptible d’être appliquée également à d’autres

portefeuilles pour lesquels les données tête par tête ne sont pas disponibles. Enfin, cette méthode

permet de prendre en compte dans les simulations les traités de réassurance non proportionnelle.

De plus, comme le périmètre de l’étude est la garantie temporaire décès de type décès toutes

causes, donc fortement corrélée à l’âge de la victime (i.e. mortalité non accidentelle), nous en

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67 Modélisation du risque de prime en prévoyance

tenu compte dans l’approche IARD en partitionnant finement notre portefeuille par classes d’âges

et capitaux garantis similaires.

Soulignons tout de même que cette approche présente quelques axes d’améliorations

notamment la méthode de définition des classes. Dans ce mémoire, le nombre de classes ainsi

que leurs bords ont été définis arbitrairement. Nous avons donc proposé dans le paragraphe

précédent une méthode de partitionnement basée sur les centres mobiles. Nous avons ainsi défini

une distance de séparation cohérente avec la nature du risque sous-jacent en représentant dans

le plan chaque individu par son capital garanti et son taux de mortalité théorique.

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68 Modélisation du risque de prime en prévoyance

6. Partie VI : Calibrage du choc prime pour la garantie GAV : Utilisation d’une approche Non-vie

6.1. Présentation de la garantie La « Garantie des Accidents de la Vie » (GAV) est un contrat d'assurance crée et labellisé

par les assureurs en 2000. Les contrats d’assurance labellisés proposent un ensemble de garanties minimum en cas de dommages corporels accidentels importants survenus au cours de leur vie privée, l’assuré qui souscrit à ce contrat bénéficiera ainsi d’un niveau d’indemnisation minimal. Deux types de contrat sont généralement proposés : soit le contrat couvre une seule personne, soit il couvre une famille. La GAV prévoit que les assureurs couvrent au minimum l'incapacité permanente, le préjudice esthétique, le préjudice d'agrément et les souffrances endurées, dès lors que le taux de l'incapacité permanente imputable directement à l'accident est au moins égale à 30%. Par ailleurs, le plafond de garantie ne peut être inférieur à 1 million d'euros par victime.

Le contrat GAV labellisé indemnise au moins les postes suivants lorsqu'ils sont reconnus

comme imputables à l'événement garanti : - les frais de logement adapté (FLA) ; - les frais de véhicule adapté (FVA) ; - l'assistance permanente par une tierce personne (ATP) ; - les pertes de gains professionnels futurs (PGPF) ; - le déficit fonctionnel permanent (DFP) ; - les souffrances endurées (SE) ; - le préjudice esthétique permanent (PEP) ; - le préjudice d'agrément (PA). En cas de décès d'un assuré, les préjudices économiques et moraux subis par les

bénéficiaires sont indemnisés. La GAV prend en charge : - les frais d'obsèques (FO) ; - le préjudice d’affection (PAF) ; - les pertes de revenus des proches (PR) ; - les frais divers des proches (FD). La garantie accidents de la vie est commercialisée chez AXA depuis 2002 sous le nom de

«Protection familiale intégrale». Le contrat offre une garantie contre les évènements accidentels de la vie privée conduisant au décès ou à l’invalidité, en plus d’une protection juridique contre les risques d’internet. L’âge limite de souscription est de 77 ans sans sélection médicale et le montant de l’indemnisation peut s’élever jusqu’à 1 M€. Ce plafond d’indemnisation est majoré chaque année de 100k€ supplémentaires par année d’ancienneté du contrat. Quatre types de formules sont proposés à la souscription:

La formule Solo Confort : Elle assure un seul assuré pour un taux d’invalidité de 5%.

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69 Modélisation du risque de prime en prévoyance

La formule Solo Référence : C’est le contrat socle, elle assure un seul assuré pour un taux d’invalidité de 30%.

La formule Famille Confort : Elle prévoit l’assurance de plusieurs membres de la famille, comme les enfants ou le conjoint pour un seuil d’invalidité de 5%.

La formule Famille Référence : Plusieurs membres d’une même famille sont assurés sur le même contrat pour un seuil de 30% Notons que ce contrat couvre différents risques sous-jacents : décès, invalidité et

protection juridique. Cette garantie est également caractérisée par un développement long puisque les sinistres sont consolidés au bout de cinq ans. Compte-tenu de ces spécificités, nous adopterons un modèle non-vie pour le calibrage du choc prime.

Contrairement à la garantie Décès étudiée précédemment, les sinistres de la Garantie des

Accidents de la Vie sont indemnitaires et non forfaitaires. Le montant de l’indemnisation va donc dépendre de la nature de l’accident et du préjudice subi, qu’il soit corporel ou moral. Une modélisation IARD classique en fréquence-sévérité est donc bien adaptée à cette garantie puisque l’aléa sur la sinistralité est porté, avec une importance égale, par la fréquence et le coût.

6.2. Modélisation des sinistres

6.2.1. Modèle IARD collectif en fréquence-coût

Les sinistres sont modélisés par un modèle fréquence-coût collectif en distinguant entre les pertes attritionnelles et les pertes atypiques. Les sinistres attritionnels représentent les sinistres fréquents à faible coût et les sinistres atypiques représentent les sinistres peu fréquent mais avec des montants de pertes élevés (pouvant déclencher les traités de réassurance non proportionnels). La sinistralité de chaque classe s’écrit :

𝑆𝑎𝑡𝑡 = ∑ 𝑋𝑖𝑎𝑡𝑡

𝑁𝑎𝑡𝑡

𝑖=1

𝑒𝑡 𝑆𝑎𝑡𝑦𝑝 = ∑ 𝑋𝑖𝑎𝑡𝑦𝑝

𝑁𝑎𝑡𝑦𝑝

𝑖=1

𝑋𝑖𝑎𝑡𝑡(𝑟𝑒𝑠𝑝 𝑋𝑖

𝑎𝑡𝑦𝑝) 𝑒𝑠𝑡 𝑙𝑒 𝑐𝑜û𝑡 𝑑𝑢 𝑠𝑖𝑛𝑖𝑠𝑡𝑟𝑒 𝑎𝑡𝑡𝑟𝑖𝑡𝑖𝑜𝑛𝑛𝑒𝑙 (𝑟𝑒𝑠𝑝 𝑎𝑡𝑦𝑝𝑖𝑞𝑢𝑒) 𝑖.

𝐿𝑒𝑠 𝑋𝑖𝑎𝑡𝑡(𝑟𝑒𝑠𝑝 𝑋𝑖

𝑎𝑡𝑦𝑝) 𝑠𝑜𝑛𝑡 𝑑𝑒𝑠 𝑣𝑎𝑟𝑖𝑎𝑏𝑙𝑒𝑠 𝑎𝑙é𝑎𝑡𝑜𝑖𝑟𝑒𝑠 𝑝𝑜𝑠𝑖𝑡𝑖𝑣𝑒𝑠 𝑠𝑢𝑝𝑝𝑜𝑠é𝑠 𝑖𝑖𝑑.

𝑁𝑎𝑡𝑡 (𝑟𝑒𝑠𝑝 𝑁𝑎𝑡𝑦𝑝) 𝑒𝑠𝑡 𝑙𝑎 𝑓𝑟é𝑞𝑢𝑒𝑛𝑐𝑒 𝑑𝑒𝑠 𝑠𝑖𝑛𝑖𝑠𝑡𝑟𝑒𝑠 𝑎𝑡𝑡𝑟𝑖𝑡𝑖𝑜𝑛𝑛𝑒𝑙𝑠 (𝑟𝑒𝑠𝑝 𝑎𝑡𝑦𝑝𝑖𝑞𝑢𝑒𝑠). 𝑁𝑎𝑡𝑡 𝑒𝑡 𝑁𝑎𝑡𝑦𝑝 𝑠𝑢𝑖𝑣𝑒𝑛𝑡 𝑢𝑛𝑒 𝑙𝑜𝑖 𝑑𝑒 𝑃𝑜𝑖𝑠𝑠𝑜𝑛 𝑜𝑢 𝑏𝑖𝑛𝑜𝑚𝑖𝑎𝑙𝑒 𝑛é𝑔𝑎𝑡𝑖𝑣𝑒. Nous supposons l’indépendance entre la sinistralité atypique et attritionnelle ainsi qu’entre la fréquence et le coût. Les termes 𝑆𝑎𝑡𝑡 et 𝑆𝑎𝑡𝑦𝑝 sont appelés des « sommes aléatoires » car le nombre de variables aléatoires 𝑋𝑖 dans la somme les définissant est lui-même aléatoire.

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70 Modélisation du risque de prime en prévoyance

6.2.2. Formules de Wald

Dans ce paragraphe, nous présentons deux formules classiques, dites « formules de Wald » utilisées pour l’estimation des deux premiers moments d’une somme aléatoire :

𝑆 =∑𝑋𝑖

𝑁

𝑖=1

Première formule de Wald :

Soient N une variable aléatoire à valeurs dans N et (𝑋𝑛)𝑛€𝑁∗ une suite de variables aléatoires

réelles positives de même espérance. On suppose de plus que N ⊥ (𝑋𝑛)𝑛€𝑁∗. On a alors :

𝑬(𝑺) = 𝑬(𝑵)𝑬(𝑿)

Deuxième formule de Wald :

Soient N une variable aléatoire 𝐿2 à valeurs dans N et (𝑋𝑛), 𝑛𝜖𝑁∗une suite i.i.d. de variables

aléatoires réelles 𝐿2 . On suppose de plus que 𝑁 et (𝑋𝑛), 𝑛𝜖𝑁 sont indépendants.

Alors, 𝑆 ∈ 𝐿2 et : 𝑽𝒂𝒓(𝑺) = 𝑬(𝑵)𝑽𝒂𝒓(𝑿) + 𝑽𝒂𝒓(𝑵)𝑬(𝑿)𝟐

Deuxième formule de Wald :

Soient N une variable aléatoire L2 à valeurs dans N et (𝑋𝑛), nϵN∗une suite i.i.d. de variables

aléatoires réelles L2 . On suppose de plus que N et (𝑋𝑛), 𝑛𝜖𝑁 sont indépendants.

Alors, 𝑆𝜖𝐿2 et : 𝑉𝑎𝑟(𝑆) = 𝐸(𝑁)𝑉𝑎𝑟(𝑋) + 𝑉𝑎𝑟(𝑁)𝐸(𝑋)2

La démonstration des deux formues de Wald est présentée en annexe.

Remarque : Les deux formules de Wald nous donnent une formule fermée pour l’espérance et la variance de la sinistralité sans passer par des simulations du type Monte-Carlo. Dans notre cas, nous chercherons à obtenir la distribution de la sinistralité totale, et en particulier, un quantile à 99,5%. Les formules de Wald nous permettrons donc de vérifier que l’algorithme de simulation a été correctement implémenté.

6.2.3. Choix du seuil de segmentation

6.2.3.1. Définition de la charge tête par tête Lorsqu’un sinistre est déclaré par un assuré, les gestionnaire provisionne directement un

montant de provision pour sinistre à payer (PSAP) prédéfini, et ce, quelle que soit la gravité du sinistre. C’est ce qu’on appelle une ouverture au forfait, le forfait étant le montant de provision passé dans les comptes. Le forfait est défini chaque année comme le coût moyen, en termes de

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71 Modélisation du risque de prime en prévoyance

charge (PSAP + règlements) des sinistres survenus l’année passée. Par la suite, le sinistre est réévalué à sa juste valeur dans les mois suivants son ouverture. La réévaluation peut être à la hausse ou à la baisse, le sinistre peut également être clôturé sans suite sans règlement de prestation. Pour ce dernier cas de figure, l’assuré déclare un sinistre en pensant être éligible à une indemnisation puis, après l’évaluation d’un expert, il s’avère que le seuil d’invalidité défini par le contrat n’est pas atteint. Pour chaque sinistre individuel, on définit sa charge comme la somme des prestations réglées plus sa PSAP. La répartition de la charge des sinistres nous permettra grâce à la théorie des valeurs extrêmes de déterminer le seuil adéquat de segmentation entre les sinistres attritionnels et atypiques.

6.2.3.2. Quelques éléments de la théorie des valeurs extrêmes

Le but de la théorie des valeurs extrêmes est d’étudier et de modéliser des évènements rares, voir des évènements qui ne se sont jamais réalisés. La TVE fournit des procédures rationnelles pour l’estimation de phénomènes dans les queues de distribution. La difficulté de ce problème réside dans le fait que l’on cherche à étudier des phénomènes rares dont on dispose d’un minimum d’informations puisque la plupart des données sont généralement concentrées dans le centre de la distribution.

Loi asymptotique du maximum de n variables aléatoires :

𝑆𝑜𝑖𝑡 𝑋1, … , 𝑋𝑛 𝑢𝑛𝑒 𝑠𝑢𝑖𝑡𝑒 𝑑𝑒 𝑣𝑎𝑟𝑖𝑎𝑏𝑙𝑒𝑠 𝑎𝑙é𝑎𝑡𝑜𝑖𝑟𝑒𝑠 𝑟é𝑒𝑙𝑙𝑒𝑠 𝑖𝑖𝑑 𝑑𝑒 𝑓𝑜𝑛𝑐𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑑𝑒 𝑟é𝑝𝑎𝑟𝑡𝑖𝑡𝑖𝑜𝑛 𝐹 𝑒𝑡 𝑠𝑜𝑖𝑡 𝑀𝑛 = max(𝑋1, … , 𝑋𝑛) . 𝑂𝑛 𝑎 𝑎𝑙𝑜𝑟𝑠:

𝑃(𝑀𝑛 ≤ 𝑥) = 𝑃(𝑋1 ≤ 𝑥,… , 𝑋𝑛 ≤ 𝑥) = 𝑃(𝑋1 ≤ 𝑥)…𝑃(𝑋𝑛 ≤ 𝑥) = [𝐹(𝑥)]𝑛

Si F n’est pas connue, cette formule a peu d’intérêt. Notre objectif est d’obtenir une expression simple de la loi asymptotique de 𝑀𝑛 indépendamment de F. On définit 𝑥𝐹 le point extrémal de F par :

𝑥𝐹 = sup {𝑥 / 𝐹(𝑥) < 1} On peut alors montrer que 𝑀𝑛 converge en probabilité vers 𝑥𝐹. La distribution asymptotique de 𝑀𝑛 est donc dégénérée. Par conséquent, il est nécessaire de passer par une normalisation pour étudier les comportements asymptotiques du maximum. Nous définissons dans un premier lieu les classes d’équivalence des distributions limites, ou encore appelées distributions du même type : 𝑆𝑜𝑖𝑒𝑛𝑡 𝐹1, 𝐹2 𝑑𝑒𝑢𝑥 𝑓𝑜𝑛𝑐𝑡𝑖𝑜𝑛𝑠 𝑑𝑒 𝑟é𝑝𝑎𝑟𝑡𝑖𝑡𝑖𝑜𝑛. 𝑂𝑛 𝑑𝑖𝑡 𝑞𝑢𝑒 𝐹1 𝑒𝑡 𝐹2𝑠𝑜𝑛𝑡 𝑑𝑢 𝑚ê𝑚𝑒 𝑡𝑦𝑝𝑒 𝑠′𝑖𝑙 𝑒𝑥𝑖𝑠𝑡𝑒 𝑎 > 0 𝑒𝑡 𝑏 ∈ 𝑅 𝑡𝑒𝑙𝑠 𝑞𝑢𝑒: ∀ 𝑥, 𝐹2(𝑎𝑥 + 𝑏) = 𝐹1(𝑥) (Les distributions du même type sont identiques à des facteurs de position et d’échelle près)

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72 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Théorème de Fisher-Tippett : Nous allons énoncer un théorème fondamental de la TVE qui est celui de Fisher-Tippett : 𝑆′𝑖𝑙 𝑒𝑥𝑖𝑠𝑡𝑒 𝑑𝑒𝑢𝑥 𝑠𝑢𝑖𝑡𝑒𝑠 𝑑𝑒 𝑛𝑜𝑟𝑚𝑎𝑙𝑖𝑠𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑎𝑛 ∈ 𝑅 𝑒𝑡 𝑏𝑛 > 0 𝑡𝑒𝑙𝑙𝑒𝑠 𝑞𝑢𝑒:

𝑃 (𝑀𝑛 − 𝑎𝑛𝑏𝑛

≤ 𝑥) → 𝐺(𝑥) 𝑞𝑢𝑎𝑛𝑑 𝑛 → ∞ 𝑜ù 𝐺 𝑒𝑠𝑡 𝑢𝑛𝑒 𝑑𝑖𝑠𝑡𝑟𝑖𝑏𝑢𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑛𝑜𝑛 𝑑é𝑔é𝑛é𝑟é𝑒

𝑎𝑙𝑜𝑟𝑠 𝐺 𝑒𝑠𝑡 𝑑𝑢 𝑚ê𝑚𝑒 𝑡𝑦𝑝𝑒 𝑞𝑢𝑒 𝑙′𝑢𝑛𝑒𝑑𝑒𝑠 𝑡𝑟𝑜𝑖𝑠 𝑑𝑖𝑠𝑡𝑟𝑖𝑏𝑢𝑡𝑖𝑜𝑛𝑠 𝑠𝑢𝑖𝑣𝑎𝑛𝑡𝑒𝑠:

𝐹𝑟é𝑐ℎ𝑒𝑡 (𝛼 > 0):

𝜑𝛼(𝑥) = {0 , 𝑠𝑖 𝑥 ≤ 0exp(−𝑥−𝛼) , 𝑠𝑖 𝑥 > 0

𝑊𝑒𝑖𝑏𝑢𝑙𝑙 (𝛼 < 0):

𝜓𝛼(𝑥) = {exp(−(−𝑥)𝛼) , 𝑠𝑖 𝑥 ≤ 00 , 𝑠𝑖 𝑥 > 0

𝐺𝑢𝑚𝑏𝑒𝑙: Λ(𝑥) = exp(−exp(−𝑥)) , 𝑥 ∈ 𝑅

Les trois distributions ci-dessus sont des cas particuliers de la distribution GEV, dites des extrêmes généralisée. Celle-ci nous permet d’avoir une écriture unifiée :

𝐺(𝑥) =

{

exp(− [1 + 𝜉

𝑥 − 𝜇

𝜎]+

−1𝜉) , 𝑠𝑖 𝜉 ≠ 0

exp (− exp [−𝑥 − 𝜇

𝜎]) , 𝑠𝑖 𝜉 = 0

La distribution de Gumbel correspond à 𝜉 = 0, 𝑠𝑜𝑖𝑡 𝐺𝐸𝑉(0,1,0) = 𝐺𝑢𝑚𝑏𝑒𝑙

La distribution de Fréchet correspond à 𝜉 > 0, 𝑠𝑜𝑖𝑡 𝐺𝐸𝑉 (1,1

𝛼,1

𝛼) = 𝐹𝑟é𝑐ℎ𝑒𝑡(𝛼)

La distribution de Weibull correspond à 𝜉 < 0, 𝑠𝑜𝑖𝑡 𝐺𝐸𝑉 (−1,1

𝛼, −

1

𝛼) = 𝑊𝑒𝑖𝑏𝑢𝑙𝑙(𝛼)

𝜉 est appelé l’indice de queue, il nous fournit une information sur l’épaisseur de la queue de distribution. Le théorème de Fisher-Tippet est l’analogue du théorème central limite. En effet, le TCL s’intéresse à la loi asymptotique de la somme et fait apparaître une loi normale alors que le théorème de Fischer-Tippett fait apparaître une famille de lois limites paramétrées par 𝜉.

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73 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Le graphe ci-dessous montre les densités des trois types de distributions :

Figure 6-1 Distributions des lois GEV classiques

Les dépassements de seuils : Introduction des lois de Pareto généralisées On s’intéresse dans cette partie non plus au maximum d’un échantillon 𝑋1, … , 𝑋𝑛 mais plutôt aux nombre de dépassements du seuil 𝑢𝑛. Le nombre de dépassements s’écrit :

𝑁𝑛 =∑1{𝑋𝑖>𝑢𝑛}

𝑛

𝑖=1

Cela correspond au nombre des observations (𝑋𝑖 − 𝑢𝑛)+ sui sont strictement positives. Ces observations sont caractérisées par la distribution de Pareto Généralisée. La loi de Pareto généralisée 𝐺𝑃𝐷(𝛽, 𝜉) est définie par :

𝐺𝜉,𝛽𝑝 (𝑥) =

{

1 − [1 + 𝜉 (

𝑥

𝛽)]+

−1𝜉, 𝑠𝑖 𝜉 ≠ 0

1 − exp (−𝑥

𝛽) , 𝑠𝑖 𝜉 = 0

Où :

{

𝑥 ≥ 0, 𝑠𝑖 𝜉 ≥ 0

0 ≤ 𝑥 ≤ −𝛽

𝜉, 𝑠𝑖 𝜉 < 0

La loi de Pareto généralisée présente une propriété intéressante qui nous permettra d’obtenir approximativement le seuil de segmentation entre les sinistres attritionnels et atypiques :

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74 Modélisation du risque de prime en prévoyance

𝑆𝑖 𝑋 ~ 𝐺𝐷𝑃(𝛽, 𝜉) 𝑒𝑡 𝜉 < 1 𝑎𝑙𝑜𝑟𝑠:

𝐸(𝑋) =𝛽

1 − 𝜉 𝑒𝑡 𝐸(𝑋 − 𝑥 | 𝑋 > 𝑥) =

𝛽 + 𝜉𝑥

1 − 𝜉

𝐸𝑛 𝑝𝑎𝑟𝑡𝑖𝑐𝑢𝑙𝑖𝑒𝑟, 𝑙𝑎 𝑓𝑜𝑛𝑐𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑥 → 𝐸(𝑋 − 𝑥 | 𝑋 > 𝑥) 𝑒𝑠𝑡 𝑢𝑛𝑒 𝑓𝑜𝑛𝑐𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑙𝑖𝑛é𝑎𝑖𝑟𝑒 𝑒𝑛 𝑥.

𝐿𝑎 𝑓𝑜𝑛𝑐𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑥 → 𝐸(𝑋 − 𝑥 | 𝑋 > 𝑥) 𝑒𝑠𝑡 𝑎𝑝𝑝𝑒𝑙é𝑒 𝑙𝑎 𝑓𝑜𝑛𝑐𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑚𝑜𝑦𝑒𝑛𝑛𝑒 𝑑𝑒𝑠 𝑒𝑥𝑐è𝑠.

6.2.3.3. Choix du seuil par une méthode graphique

Nous disposons dans notre base de données de 15860 sinistres individuels entre 2006 et 2015. On définit la charge finale de chaque sinistre comme la somme des prestations réglées et de sa PSAP.

La fonction moyenne des excès est estimée empiriquement par la formule suivante :

�̂�(𝑥) = 𝐸(𝑋 − 𝑥 𝑋 > 𝑥) = ∑ (𝑋𝑖 − 𝑥)

+𝑛𝑖=1

∑ 1𝑋𝑖>𝑥𝑛𝑖=1

𝑜ù 𝑋𝑖 𝑒𝑠𝑡 𝑙𝑎 𝑐ℎ𝑎𝑟𝑔𝑒 𝑓𝑖𝑛𝑎𝑙𝑒 𝑑𝑢 𝑠𝑖𝑛𝑖𝑠𝑡𝑟𝑒 𝑖

En pratique, nous traçons le nuage de points : {(𝑥, �̂�(𝑥)), 𝑥 = min(𝑋𝑖) , … ,max(𝑋𝑖)}

Le seuil de segmentation retenu est le seuil à partir duquel la fonction moyenne des excès devient linéaire. A partir de l’historique de la sinistralité observée entre 2006 et 2015, nous pouvons tracer la courbe de la fonction moyenne des excès :

Figure 6-2 Fonction moyenne des excès

0

50000

100000

150000

200000

250000

300000

350000

400000

450000

500000

0 200000 400000 600000 800000 1000000 1200000 1400000

Fonction moyenne des excès en fonction du seuil x

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75 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Nous remarquons que la fonction moyenne des excès devient linéaire à partir d’un seuil situé entre 150 000 et 200 000. Rappelons que le seuil correspond à l’abscisse à partir duquel la fonction moyenne des excès devient linéaire. Afin de déterminer le seuil adéquat, nous calculons pour différentes valeurs du seuil le coefficient de détermination R² qui mesure la qualité d’ajustement de la fonction moyenne des excès à une droite :

Seuil 120 000 150 000 180 000 200 000

R2 0,77 0,83 0,87 0,88

Nombre d'atypiques 158 115 89 79

Figure 6-3 Qualité d'ajustement de la fonction moyenne des excès à une droite

Nous remarquons que plus le seuil est élevé, plus le coefficient de déterminations est bon (proche de 1). Or pour estimer de manière robuste la sinistralité atypique, il est indispensable de disposer d’un nombre significatif de sinistres atypiques. Le jugement d’expert est donc nécessaire pour arbitrer entre un bon coefficient de détermination et un nombre de sinistres convenable. Le seuil de 150 000 semble être pertinent avec R² de 0,87 et un nombre d’observations de 115. Par ailleurs, il s’agit du seuil utilisé pour le provisionnement de la garantie et du seuil recommandé par la FFSA. Nous retenons par la suite un seuil de 150 000 pour la segmentation de notre base de sinistres.

6.2.4. Retraitements des données : mise à l’ultime et correction de

l’inflation

6.2.4.1. Mise à l’ultime des coûts

Dans ce paragraphe, nous définissons la charge ultime d’un sinistre. Lorsqu’un sinistre est

déclaré, il est fréquent que le coût estimé initialement soit inférieur au coût final. Cela se produit

notamment lorsque des complications ou des séquelles apparaissent à la suite d’une opération ou

d’un accident. Dans le cas de la GAV, le développement des sinistres est assez long car nous

n’observons une consolidation des sinistres qu’au bout de la cinquième année.

Afin de déterminer la loi des coûts, il est nécessaire de disposer pour l’ensemble des

sinistres de la charge ultime. Dans le paragraphe précédent, nous avons estimé la charge finale

d’un sinistre par la somme de sa PSAP et des prestations réglées. Or, pour les sinistres à faible

coût, la PSAP est déterminée de manière très prudente et forfaitaire par le gestionnaire au

moment de la déclaration du sinistre et n’est donc pas représentative du coût réel du sinistre. La

PSAP des sinistres atypiques est quant à elle déterminée après une étude plus fine et le

gestionnaire a une meilleure connaissance du sinistre.

Dans ce mémoire, le coût à l’ultime des sinistres atypiques sera déterminé en sommant le total

des prestations réglés et la PSAP. En ce qui concerne les sinistres attritionnels, la PSAP comptable

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76 Modélisation du risque de prime en prévoyance

tête par tête sera corrigée. En effet, Solvabilité 2 préconise une vision économique best-estimate

différente de la vision comptable qui intégrait une prudence supplémentaire. Nous calculons dans

un premier temps la provision best-etimate globale des sinistres attritionnels. La provision best-

estimate calculée est nécessairement globale car elle est calculée par une méthode des cadences

à partir du triangle des règlements. Cette provision sera par la suite répartie sur l’ensemble des

sinistres individuels au prorata de leurs PSAP comptable tête par tête. Le coût à l’ultime des

sinistres attritionnels sera finalement obtenu en sommant la PSAP retraitée avec les prestations

déjà réglées.

Pour calculer la provision économique totale des sinistres attritionnels, nous appliquons la

méthode de Chain-Ladder appliquée au triangle des règlements cumulés. Cette méthode est sans

doute la plus répandue pour estimer les provisions des compagnies d’assurance grâce à sa

simplicité et sa robustesse.

La méthode de Chain-Ladder suppose que les exercices se déroulent tous selon une même

cadence. En pratique :

On constitue le triangle de données cumulées :

𝑆𝑖𝑗 =∑𝑥𝑘𝑗

𝑖

𝑘=1

L’hypothèse fondamentale s’écrit :

𝑆𝑖+1,𝑗

𝑆𝑖,𝑗= 𝑓𝑖 , 𝑖𝑛𝑑é𝑝𝑒𝑛𝑑𝑎𝑛𝑡 𝑑𝑒 𝑗

On estime le facteur de développement 𝑓𝑖 par :

𝑓𝑖 =∑ 𝑆𝑖+1,𝑗𝑛−𝑖𝑗=1

∑ 𝑆𝑖,𝑗𝑛−𝑖𝑗=1

, 1 ≤ 𝑖 ≤ 𝑛

Dans le cas de la méthode de Chain-Ladder, le ratio est égal au rapport de la somme de deux

lignes consécutives, en retirant le dernier élément du dénominateur pour avoir le même nombre

d’éléments au numérateur et au dénominateur.

On complète alors le triangle en estimant la partie inferieure:

�̂�𝑖,𝑗 = 𝑆𝑛−𝑗+1,𝑗 ∏ 𝑓ℎ

𝑖−1

ℎ=𝑛−𝑗+1

�̂�𝑛,𝑗 est la charge finale prévisible de l’exercice j.

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77 Modélisation du risque de prime en prévoyance

La PSAP estimée au titre de l’exercice j est :

�̂�𝑗 = �̂�𝑛,𝑗 − 𝑆𝑛−𝑗+1,𝑗

La PSAP totale toutes survenances estimée est égale à :

�̂� = ∑�̂�𝑗

𝑛

𝑗=1

Nous appliquons la méthode de Chain-Ladder à notre triangle des règlements attritionnels. Le

triangle est d’abord épuré des sinistres tardifs (IBNRs). En effet, nous cherchons à déterminer la

juste valeur du coût uniquement des sinistres déclarés, or si on se base sur le triangle des

règlements global, la provision estimée sera d’une part liée aux réévaluations des sinistres déjà

survenus et d’autre part relative à la déclaration de nouveaux sinistres. La répartition de cette

provision (sans épuration préalable du triangle) aura tendance à surestimer le coût moyen des

sinistres déclarés. Le choix de ne pas prendre en compte les IBNRs dans l’estimation de la loi des

coûts est dû à leur prise en en compte lors de la mise à l’ultime de la fréquence (voir le

paragraphe ci-après).

Précisons également que cette approche réduit notre base d’observations car la loi du coût

attritionnel ne sera calibrée que sur les sinistres déclarés pendant leur année de survenance et

non pas sur tous les sinistres observés sur notre historique. Cela ne nuit pas à la robustesse de

notre calibrage car les sinistres déclarés pendant leur année de survenance excèdent 9000

observations.

Nous constituons le triangle des règlements retraité des sinistres tardifs en ne gardant que les

sinistres déclarés pendant leur année de survenance. Ainsi, les règlements décaissés pendant les

années de développement ne correspondent qu’à des réévaluations de sinistres :

Survenance Charge Finale Prévisible Provision par survenance

2006 339 246 0

2007 199 350 0

N N+1 N+2 N+3 N+4 N+5 N+6 N+7 N+8 N+9

2006 19 151 112 629 239 895 338 589 338 589 338 796 339 246 339 246 339 246 339 246

2007 45 484 119 680 175 416 178 341 178 341 178 341 198 210 199 350 199 350 199 350

2008 33 402 187 989 450 992 523 983 564 685 585 696 599 575 606 038 606 038 606 038

2009 86 366 265 925 454 171 561 904 569 989 569 989 569 989 573 800 573 800 573 800

2010 58 801 435 968 768 543 999 775 1 059 106 1 160 919 1 184 653 1 192 574 1 192 574 1 192 574

2011 293 816 1 459 199 2 544 377 2 838 891 3 084 885 3 224 898 3 290 826 3 312 830 3 312 830 3 312 830

2012 631 421 3 414 886 5 353 600 6 108 302 6 505 809 6 801 087 6 940 125 6 986 530 6 986 530 6 986 530

2013 1 013 480 4 543 119 7 489 839 8 661 869 9 225 552 9 644 271 9 841 433 9 907 238 9 907 238 9 907 238

2014 840 751 7 939 822 13 166 120 15 226 389 16 217 268 16 953 319 17 299 904 17 415 580 17 415 580 17 415 580

2015 1 252 321 7 656 106 12 695 652 14 682 301 15 637 772 16 347 521 16 681 722 16 793 264 16 793 264 16 793 264

Année de développement

An

née

de

surv

enan

ce

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78

78 Modélisation du risque de prime en prévoyance

2008 606 038 0

2009 573 800 3 812

2010 1 192 574 31 655

2011 3 312 830 227 945

2012 6 986 530 878 228

2013 9 907 238 2 417 399

2014 17 415 580 9 475 758

2015 16 793 264 15 540 944

Total PSAP 28 575 739

On obtient une provision économique de 28,6 M€ à répartir, au prorata de la PSAP comptable, sur

l’ensemble des 9000 sinistres attritionnels de notre base.

Nous testons la validité des hypothèses de la méthode de Chain-Ladder en réalisant deux tests

graphiques.

Nous effectuant un test graphique en vérifiant que les couples (𝐶𝑖,𝑗, 𝐶𝑖,𝑗+1) 0≤𝑗≤𝑛−𝑗−1 sont

alignées. Le test est validé si le nuage de point forme une droite passant par l’origine.

R² = 0,8201

0

2 000 000

4 000 000

6 000 000

8 000 000

10 000 000

12 000 000

14 000 000

0 500 000 1 000 000 1 500 000

C(i

,1)

C(i,0)

Test pour la première année de développement

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79

79 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Figure 6-4 Tests des hypothèses de Chain-Ladder

Nous nous assurons également de la stabilité des coefficients de développement individuels en

calculant l’ensemble des facteurs de développement individuels :

𝑓𝑖,𝑗 =𝐶𝑖,𝑗+1

𝐶𝑖,𝑗

Nous vérifions ainsi que les coefficients de développement individuels sont à peu près constants

pour chaque année de développement :

Figure 6-5 Coefficients de développement individuels de Chain-Ladder

R² = 0,9996

0

2 000 000

4 000 000

6 000 000

8 000 000

10 000 000

12 000 000

14 000 000

0 2 000 000 4 000 000 6 000 000 8 000 000

C(i

,2)

C(i,1)

Test pour la deuxième année de développement

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80

80 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Nous observons que les coefficients de passage individuels sont relativement stables à l’exception

de la première année de survenance qui présente des coefficients volatiles.

6.2.4.2. Correction des coûts de l’inflation

Après avoir déterminé la charge à l’ultime de l’ensemble des sinistres tête par tête de 2006

à 2015, nous effectuons un second retraitement des coûts afin de tenir compte de l’évolution de

l’inflation au cours de ces dix dernières années. En effet, malgré un niveau d’inflation très faible

pendant ces dernières années, l’inflation cumulée sur plusieurs années peut avoir un effet non

négligeable sur l’évolution du coût moyen des sinistres observés sur notre portefeuille.

Nous avons donc choisi de corriger le coût à l’ultime des sinistres de l’inflation observée de sorte à

obtenir des sinistres « as-if » en 2015.

L’indice utilisé pour la mise en as-if est l’inflation glissante annuelle, égale à la variation annuelle

de l’indice des prix à la consommation:

𝐼(𝑡) =𝐼𝑃𝐶𝑡𝐼𝑃𝐶𝑡−1

− 1

Figure 6-6 Taux d'inflation des dix dernières années

Par manque de données détaillées sur l’ensemble des sinistres, notamment le détail des

règlements individuels par année de développement, le retraitement du coût à l’ultime a été

effectué uniquement à partir de l’année de survenance du sinistre. La charge ultime a donc été

retraitée comme si l’ensemble des règlements ont été payés pendant l’année de survenance du

sinistre. Compte-tenu des taux d’inflation faibles et de l’écoulement des règlements de la

garantie, cette hypothèse reste raisonnable.

0,0%

0,5%

1,0%

1,5%

2,0%

2,5%

3,0%

2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015

Evolution du taux d'inflation

Taux d'inflation

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81 Modélisation du risque de prime en prévoyance

6.2.4.3. Mise à l’ultime de la fréquence observée

Nous disposons dans notre base de données du nombre de sinistres observés par année de

survenance. Or, les années de survenances récentes ne sont pas encore consolidées à cause des

tardifs (IBNR) et les fréquences observées ne sont pas toutes comparables. Une mise à l’ultime

des fréquences est donc nécessaire afin d’avoir une vision consolidée pour l’ensemble des années

de survenance.

Nous utilisons une technique des cadences du type Chain-Ladder pour projeter les fréquences

observées à partir du triangle de nombre de sinistres déclarés par année de survenance et par

année comptable.

Cas des sinistres attritionnels :

Année de dévellopement

N N+1 N+2 N+3 N+4 N+5 N+6 N+7 N+8 N+9

An

née

de

surv

enan

ce

2006 108 23 1 0 2 0 0 1 0 0

2007 115 26 7 5 0 1 0 0 0 2008 143 36 7 5 1 0 2 1

2009 176 47 9 3 0 2 1 2010 323 93 13 5 2 0

2011 743 217 27 9 1 2012 1298 311 35 8

2013 1719 452 42 2014 2532 457

2015 2770

Année de dévellopement

N N+1 N+2 N+3 N+4 N+5 N+6 N+7 N+8 N+9

An

née

de

surv

enan

ce

2006 108 131 132 132 134 134 134 134 134 134

2007 115 141 148 153 153 154 154 154 154 154

2008 143 179 186 191 192 192 194 194 194 194

2009 176 224 233 236 236 237 238 238 238 238

2010 323 416 428 434 436 436 437 437 437 437

2011 743 959 986 995 996 998 1001 1004 1004 1004

2012 1298 1609 1644 1652 1655 1658 1663 1667 1667 1667

2013 1719 2171 2213 2234 2239 2243 2249 2256 2256 2256

2014 2532 2989 3060 3089 3096 3102 3111 3120 3120 3120

2015 2770 3413 3494 3527 3535 3542 3552 3563 3563 3563

Coefficients de passage 1,23 1,02 1,01 1,00 1,00 1,00 1,00 1,00 1,00

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82 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Nous remarquons pour le cas des sinistres attritionnels une cadence de déclarations stable. Les

coefficients de passage sont calculés sur l’ensemble des années de survenance par la formule

suivante :

𝑓𝑗 =∑ 𝐶𝑖,𝑗+1𝑛−𝑗+1𝑖=0

∑ 𝐶𝑖,𝑗𝑛−𝑗+1𝑖=0

Cas des sinistres atypiques :

Pour les sinistres extrêmes, nous appliquons la même méthode de projection utilisée pour les

sinistres attritionnels.

6.2.4.4. Mise en « as-if » de la fréquence

Compte-tenu de la forte croissance du portefeuille au cours de ces dernières années, nous

retraitons les fréquences ultimes au prorata du nombre de contrats dans le portefeuille afin

d’avoir une chronique de fréquences ultimes annuelles comparables.

Les graphiques ci-dessous illustrent la chronique des fréquences attritionnelles et

atypiques avec et sans les retraitements décrits précédemment :

Figure 6-7 Fréquence attritionnelle avec et sans retraitements

0

1000

2000

3000

4000

5000

6000

2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015

Chronique de la fréquence attritionnelle

nb_ult_as if

nb_ult

nb_observé

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83

83 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Figure 6-8 Fréquence atypique avec et sans retraitements

6.2.5. Modélisation des sinistres attritionnels

6.2.5.1. Structure du modèle

Nous modélisons les sinistres attritionnels par un modèle en fréquence-sévérité :

𝑆𝑎𝑡𝑡 = ∑ 𝑋𝑖𝑎𝑡𝑡

𝑁𝑎𝑡𝑡

𝑖=1

𝑋𝑖𝑎𝑡𝑡 𝑒𝑠𝑡 𝑙𝑒 𝑐𝑜û𝑡 𝑑𝑢 𝑠𝑖𝑛𝑖𝑠𝑡𝑟𝑒 𝑎𝑡𝑡𝑟𝑖𝑡𝑖𝑜𝑛𝑛𝑒𝑙 𝑖 𝑒𝑡 𝑁𝑎𝑡𝑡 𝑒𝑠𝑡 𝑙𝑎 𝑓𝑟é𝑞𝑢𝑒𝑛𝑐𝑒 𝑑𝑒𝑠 𝑠𝑖𝑛𝑖𝑠𝑡𝑟𝑒𝑠

𝑎𝑡𝑡𝑟𝑖𝑡𝑖𝑜𝑛𝑛𝑒𝑙𝑠 . Hypothèses :

𝐿𝑒𝑠 𝑋𝑖𝑎𝑡𝑡𝑠𝑜𝑛𝑡 𝑑𝑒𝑠 𝑣𝑎𝑟𝑖𝑎𝑏𝑙𝑒𝑠 𝑎𝑙é𝑎𝑡𝑜𝑖𝑟𝑒𝑠 𝑝𝑜𝑠𝑖𝑡𝑖𝑣𝑒𝑠 𝑠𝑢𝑝𝑝𝑜𝑠é𝑠 𝑖𝑖𝑑.

𝑁𝑎𝑡𝑡 𝑠𝑢𝑖𝑡 𝑢𝑛𝑒 𝑙𝑜𝑖 𝑑𝑖𝑠𝑐𝑟è𝑡𝑒, 𝑠𝑜𝑖𝑡 𝑢𝑛𝑒 𝑙𝑜𝑖 𝑑𝑒 𝑃𝑜𝑖𝑠𝑠𝑜𝑛 𝑜𝑢 𝐵𝑖𝑛𝑜𝑚𝑖𝑎𝑙𝑒 𝑛é𝑔𝑎𝑡𝑖𝑣𝑒. 𝑁𝑎𝑡𝑡𝑒𝑡 𝑋𝑖

𝑎𝑡𝑡 𝑠𝑜𝑛𝑡 𝑠𝑢𝑝𝑝𝑜𝑠é𝑠 𝑖𝑛𝑑é𝑝𝑒𝑛𝑑𝑎𝑛𝑡𝑠. Nous avons ainsi 4 paramètres de loi à estimer :

L’espérance de la fréquence des sinistres attritionnels La variance de la fréquence des sinistres attritionnels L’espérance du coût des sinistres attritionnels La variance de la fréquence des sinistres attritionnels

Ces paramètres sont estimés classiquement par la méthode des moments ou du maximum de vraisemblance.

0

10

20

30

40

50

60

2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015

Chronique de la fréquence atypique

nb_ult_as if

nb_ult

nb_observé

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84 Modélisation du risque de prime en prévoyance

6.2.5.2. Calibrage des lois de fréquence et de coût

6.2.5.2.1. Calibrage de la loi de fréquence

Nous modélisons la fréquence des sinistres attritionnels par une loi de comptage. Nous avons donc le choix entre deux lois : une loi de poisson ou une loi binomiale négative. La loi de poisson est un cas particulier de la loi binomiale négative. Pour une loi de poisson, l’espérance est égale à la variance, ce qui n’est pas le cas pour la loi binomiale négative. Cette dernière permet de prendre en compte l’effet de sur-dispersion. A l’aide du logiciel R nous ajustons les deux lois candidates à notre chronique de fréquence retraitée et nous choisissons celle qui présente la meilleure qualité d’ajustement. Nous traçons les graphiques des fonctions de répartitions théoriques des deux lois ajustées ainsi que celui de la fonction de répartition empirique :

Figure 6-9 Fonctions de répartition empirique et théorique de la loi de fréquence attritionelle

Nous remarquons que la loi binomiale négative s’ajuste mieux à nos données que la loi de poisson. Cela est confirmé par le diagramme QQ-plot :

Figure 6-10 QQ Plot - loi de fréquence attritionnelle

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85 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Nous pouvons également nous convaincre du choix de la loi de fréquence en comparant les critères statistiques AIC et BIC (définis en annexe). Notons que plus la valeur de ces critères est faible, plus le modèle s’ajuste bien à nos données :

Loi AIC BIC

Poisson 1966 1967

Binomiale nég 164 165

Figure 6-11 Critères AIC BIC fréquence attritionnelle

6.2.5.2.2. Calibrage de la loi du coût

En ce qui concerne le coût des sinistres attritionnels, nous choisissons une loi à support

positif adéquate parmi une dizaine de lois candidates. La loi retenue est celle minimisant les critères AIC/BIC et présentant de bons résultats aux différents tests d’adéquation :

Coût attritionnel

Loi AIC BIC Log-vraissemblance

trbeta 305959,8 305990,5 -152975,9

burr 309247,4 309270,4 154620,7

llogis 312950,9 312966,2 -156473,4

lnorm 317665,5 317680,8 -158830,7

paralogis 311976 311991,3 -155986

genpareto 308963,4 308986,4 -154478,7

invburr 306743,2 306766,2 -153368,6

invpareto 313464,5 313479,9 -156730,3

invparalogis 313638,4 313653,7 -156817,2

gamma 309189,1 309204,5 -154592,6

Figure 6-12 Critères d'adéquation - coût attritionnel

Les tests d’adéquation utilisés en complément pour le choix de la loi sont les Test de Kolmogorov-Smirnov, de Cramer-Von Mises et d’Anderson Darling (Le principe des trois tests ci-dessus est expliqué en annexe) :

Statistique de test

Loi Kolmogorov-Smirnov Cramer-Von Mises Anderson-Darling

trbeta 0,23 161,80 773,92

burr 0,22 169,27 850,11

llogis 0,21 182,62 1135,97

lnorm 0,28 321,05 1564,18

paralogis 0,21 158,15 1046,49

genpareto 0,23 182,35 862,65

invburr 0,21 147,54 691,32

invpareto 0,23 249,26 1264,09

invparalogis 0,22 217,58 1217,09

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86 Modélisation du risque de prime en prévoyance

gamma 0,22 173,85 825,45

Figure 6-13 Statistiques de tests - Coût attritionnel

Nous traçons également les fonctions de répartition théoriques des différentes lois et les comparons à la fonction de répartition empirique obtenue à partir de nos données :

Figure 6-14 Fonctions de répartition théoriques et empirique - coût attritionnel

Nous retenons pour la modélisation du coût des sinistres attritionnels la loi de Burr inversée, autrement appelée la loi de Dagum. Cette loi, introduite en 1970 par Camilo Dagum, a été souvent utilisée pour modéliser les revenus des ménages. Sa densité de probabilité est données par :

𝑓(𝑥; 𝑎, 𝑏, 𝑝) =

{

𝑎𝑝

𝑥(

(𝑥𝑏)𝑎𝑝

((𝑥𝑏)𝑎

+ 1))𝑃+1) , 𝑠𝑖 𝑥 > 0

0 , 𝑠𝑖𝑛𝑜𝑛

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87 Modélisation du risque de prime en prévoyance

6.2.6. Modélisation des sinistres atypiques

6.2.6.1. Structure du modèle Nous modélisons les sinistres atypiques également par un modèle en fréquence-sévérité :

𝑆𝑎𝑡𝑦𝑝 = ∑ 𝑋𝑖𝑎𝑡𝑦𝑝

𝑁𝑎𝑡𝑦𝑝

𝑖=1

Nous retenons les mêmes hypothèses que les sinistres attritionnels, mais cette fois-ci le coût des sinistres sera modélisé par une loi de probabilité à queue épaisse.

6.2.6.2. Calibrage des lois de fréquence et de coût

Pour le calibrage des lois de fréquence et de coût des sinistres atypiques, nous adoptons la même démarche que celle utilisée pour les sinistres attritionnels. Dans notre cas, les lois présentant le meilleur ajustement sont la loi beta pour le coût et la loi de poisson pour la fréquence :

Loi AIC BIC

Poisson 70 71

Binomiale nég 71 72

Figure 6-15 Critères AIC BIC fréquence atypique

Coût atypique

Loi AIC BIC Log-vraissemblance

trbeta 3161,4 3172,4 -1576,7

burr 3166,7 3174,9 -1580,3

llogis 3188,4 3193,9 -1592,2

lnorm 3197,5 3203,0 -1596,8

paralogis 3203,4 3208,9 -1599,7

genpareto 3181,1 3189,4 -1587,6

invburr 3176,9 3185,2 -1585,5

invpareto 3223,7 3229,2 -1609,8

invparalogis 3186,7 3192,2 -1591,4

gamma 3203,6 3209,1 -1599,8

Figure 6-16 Critères d'adéquation - coût atypique

Statistique de test

Loi Kolmogorov-Smirnov Cramer-Von Mises Anderson-Darling

trbeta 0,09 0,33 2,22

burr 0,10 0,39 2,51

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88 Modélisation du risque de prime en prévoyance

llogis 0,11 0,47 3,44

lnorm 0,12 0,37 3,12

paralogis 0,14 0,46 3,57

genpareto 0,11 0,33 2,65

invburr 0,11 0,31 2,52

invpareto 0,19 1,32 8,19

invparalogis 0,11 0,35 2,96

gamma 0,14 0,75 4,82

Figure 6-17 Statistiques de tests - Coût atypique

6.3. Modélisation des primes

En ce qui concerne la modélisation des primes, nous avons retenu une approche simplifiée. Nous modélisons les primes à partir de la chronique des écarts entre les primes réelles et les primes budgets issues du plan stratégique. On suppose que l’écart entre les primes réelles et les primes budgets suit une loi normale :

𝑃𝑟é𝑒𝑙 − 𝑃𝑏𝑢𝑑𝑔𝑒𝑡~ 𝑁(𝜇, 𝜎2)

Les primes annuelles du budget sont déterminées dans le cadre de l’exercice budgétaire du plan stratégique. Nous déterminons ensuite les primes réelles par année de survenance en projetant les primes annulées via une méthode du type Chain-Ladder. Les primes à l’ultime sont déterminées à partir de la cadence d’annulation des primes :

Figure 6-18 Triangle d'annulation de primes

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9

2006 4 716 876 -70 056 -4 216 -6 20 -17 0 0 0 0

2007 5 918 107 -71 949 -4 384 -1 237 -634 -42 -123 -160 -4 -

2008 6 857 877 -98 478 -9 426 -1 295 -871 -447 -176 -34 - -

2009 7 743 739 -133 756 -6 052 -185 -628 -329 -123 - - -

2010 12 399 207 -223 228 -14 653 -2 644 -365 -899 - - - -

2011 23 246 826 -93 715 -33 550 -2 811 -1 984 - - - - -

2012 34 563 257 -533 428 -48 334 -4 111 - - - - - -

2013 43 249 608 -745 569 -57 660 - - - - - - -

2014 53 864 626 -838 906 - - - - - - - -

2015 63 505 892 - - - - - - - - -

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9

2006 4 716 876 4 646 820 4 642 604 4 642 598 4 642 618 4 642 601 4 642 601 4 642 601 4 642 601 4 642 601

2007 5 918 107 5 846 158 5 841 774 5 840 538 5 839 903 5 839 861 5 839 738 5 839 578 5 839 574 4 379 681

2008 6 857 877 6 759 399 6 749 973 6 748 678 6 747 807 6 747 360 6 747 184 6 747 149 5 060 360 3 795 270

2009 7 743 739 7 609 983 7 603 931 7 603 745 7 603 117 7 602 788 7 602 665 5 701 935 4 276 449 3 207 337

2010 12 399 207 12 175 979 12 161 326 12 158 682 12 158 317 12 157 418 9 117 909 6 838 355 5 128 764 3 846 573

2011 23 246 826 23 153 111 23 119 561 23 116 750 23 114 766 17 335 262 13 001 226 9 750 809 7 313 104 5 484 828

2012 34 563 257 34 029 829 33 981 495 33 977 384 25 481 146 19 109 964 14 332 229 10 749 051 8 061 785 6 046 339

2013 43 249 608 42 504 039 42 446 379 31 830 627 23 871 198 17 902 560 13 426 691 10 069 905 7 552 426 5 664 319

2014 53 864 626 53 025 720 39 717 435 29 784 186 22 336 482 16 751 576 12 563 468 9 422 495 7 066 869 5 300 151

2015 63 505 892 46 934 597 35 155 049 26 362 844 19 770 665 14 827 304 11 120 289 8 340 123 6 255 090 4 691 317

Année de

survenance

Traingle des primesAnnée d'écoulement

Année de

survenance

Triangle cumulé

Année d'écoulement

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89 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Après voir déterminé les primes réelles par année de survenance, nous calibrons les paramètres de notre loi à partir de la chronique des écarts budget vs réel sur les six dernières années :

Survenance Primes aqcuises Primes budget Ecart

2010 12 157 070 7 856 677 4 300 393

2011 23 113 021 18 637 948 4 475 073

2012 33 972 296 32 973 478 998 818

2013 42 434 480 36 287 815 6 146 665

2014 52 941 735 46 902 779 6 038 956

2015 62 480 346 55 607 042 6 873 304

Variance 4 490 218 441 884

Moyenne 4 805 535

Figure 6-19 Primes réelles et budget GAV

Nous testons également graphiquement l’adéquation des données empiriques à la loi normale :

Figure 6-20 Adéquation des primes à la loi normale

-

10

20

30

40

50

60

70

2010 2011 2012 2013 2014 2015

Evolution des primes réelles vs budget en M€

Primes budget

Primes aqcuises

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90 Modélisation du risque de prime en prévoyance

6.4. Simulation du S/P Après avoir déterminé et calibré les lois de fréquence et de coût des sinistres attritionnels

et atypiques, nous simulons à l’aide du logiciel R la sinistralité totale du portefeuille à horizon un an par une technique de Monte-Carlo. Dans la simulation, nous supposons l’indépendance entre la sinistralité attritionnelle et atypique d’une part, et entre la fréquence et le coût d’autre part. Par ailleurs, nous supposons que le volume des primes est indépendant de la sinistralité. Comme expliqué dans le paragraphe du modèle IARD décès, cette hypothèse simplificatrice est en toute rigueur fausse puisque les sinistres et les primes sont corrélés positivement, une hausse du volume des primes entraîne généralement une hausse de la sinistralité. Dans le cas de la GAV, le risque majeur est la dérive de la sinistralité, donc l’aléa quant à la valeur du S/P est porté principalement par le numérateur, par conséquent cette hypothèse a peu d’impact sur le résultat. De surcroît, l’hypothèse d’indépendance entre le volume des primes et la sinistralité va dans le sens de la prudence dans l’estimation du quantile à 99 ,5% du ratio de sinistralité puisque la hausse de la sinistralité ne sera pas forcément compensée par une hausse du volume des primes.

Rappelons que notre but est d’estimer une quantité appartenant à la queue de la distribution, en particulier le quantile à 99,5%, il est donc nécessaire d’effectuer un nombre important de tirages afin d’avoir une estimation robuste de cette quantité. Nous avons donc choisi un nombre de simulations égal à 10 000. Il est également important de prendre en compte les spécificités contractuelles de la garantie lors de la simulation, en particulier l’évolution du plafond de la garantie. En effet, le montant de l’indemnisation est plafonné à 1 M€ avec 100 k€ supplémentaire par année d’ancienneté du contrat. De plus, à compter du 1er Janvier 2017, la direction marché va plafonner le montant maximal d’indemnisation à 1,6 M€ pour les contrats excédant 6 ans d’ancienneté afin de limiter une éventuelle dérive de la sinistralité. Compte-tenu de ces éléments, nous avons choisi de limiter le coût des sinistres atypiques à 1,6 M€ dans la simulation. L’algorithme de simulation du S/C est le suivant :

N <-10000 Pour i=1 jusqu’à N { Tirage d’une réalisation du volume des primes P(i) Tirage d’une réalisation de 𝑁𝑎𝑡𝑡

Tirage de 𝑁𝑎𝑡𝑡réalisations de coûts attritionnels Tirage d’une réalisation de 𝑁𝑎𝑡𝑦𝑝

Tirage de 𝑁𝑎𝑡𝑦𝑝réalisations de coûts atypiques Sinistralité(i) <- somme des sinistres attritionnels et atypiques S/C <- Sinistralité(i)/P(i) }

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91 Modélisation du risque de prime en prévoyance

En simulant à l’aide de R le ratio de sinistralité du portefeuille sur 10 000 scénarios, nous obtenons une distribution de ce ratio à horizon un an :

Figure 6-21 Distribution du ratio de sinistralité à horizon 1 an

On peut ainsi estimer la moyenne et le quantile à 99,5% empiriques du S/P:

S/P scénario central 44%

S/P scénario choqué 62%

Choc 41%

6.5. Conclusion de l’approche

En conclusion, la modélisation IARD du risque de prime appliquée à la GAV fournit un choc de 41%. A noter que l’historique utilisé pour ce calibrage correspond aux observations des sinistres de 2006 à 2015. Compte-tenu des tests d’adéquation aux lois, cette modélisation a l’avantage d’être robuste tout en étant simple d’implémentation. La phase de traitement des données est également importante, nous avons vu qu’il était indispensable de retraiter les PSAP comptable tête par tête des sinistres attritionnels, jugées trop prudentes, afin d’obtenir une vision des sinistres plus « économique », autrement dit « best-estimate », en adéquation avec la vision préconisé par Solvabilité. Cette modélisation présente tout de même quelques axes d’amélioration, notamment en ce qui concerne la modélisation du risque de portefeuille. Dans ce mémoire nous avons opté pour une approche simplifiée basée sur la chronique des écarts entre les primes réelles et les primes budgets issues du plan stratégique, nous n’avons donc pas distingué entre le risque de « pricing » et le risque de « rachats et affaires nouvelles ». Une modélisation plus fine serait de considérer les variables : prime moyenne, taux de rachats et taux d’affaires nouvelles, puis de modéliser l’évolution du volume total des primes en tenant compte de l’évolution de ces trois variables ainsi que leur interaction éventuelle. Cette approche serait néanmoins très couteuse en données et en temps de calcul, l’approche exposée dans ce mémoire reste ainsi un bon compromis entre robustesse et complexité, et peut être bien adaptée à un calcul fréquent du STEC.

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92 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Conclusion

Ce mémoire a été réalisé dans l’optique de contribuer à l’amélioration du modèle interne

actuel utilisé sur le périmètre hybride, en particulier la modélisation du risque de prime qui

correspond au risque de sous-tarification et porte sur les sinistres à venir. Il propose ainsi des

méthodes pour le calibrage du choc S2 plus fines qu’une approche agrégée en S/P.

Rappelons que le périmètre hybride du modèle interne d’AXA France concerne les garanties vie où

des techniques non-vies sont utilisées pour la tarification ou le provisionnement, typiquement les

garanties de prévoyance non emprunteur. Nous ne traitons pas dans ce mémoire l’ensemble du

périmètre hybride et, pour un enjeu stratégique notre choix s’est porté en priorité sur la garantie

Décès et la Garantie des Accidents de la Vie. Par ailleurs, ces deux garanties de prévoyance

présentent des spécificités différentes rendant les modèles exposés dans ce mémoire aisément

transposables à d’autres garanties de prévoyance.

Pour la garantie Décès, nous avons confronté deux méthodes totalement différentes

aboutissant à des résultats cohérents entre eux. Une première modélisation vie a été développée

avec une approche en deux composantes distinguant deux sources de risque de mortalité : le

risque de process et le risque d’estimation. Nous avons vu que le risque de process,

correspondant au risque d’incertitude quant au niveau et à la tendance de la mortalité, est

prépondérant. A noter que le choc process calibré par cette approche a été estimé de manière

prudente en prenant le choc maximal obtenu par deux méthodes, prospective et rétrospective. La

méthode vie exposée semble être bien adaptée à la nature biométrique du risque sous-jacent et

fournit un choc sur les taux de mortalité facilement traductible en termes de S/P. Bien que cette

méthode fournisse une approche robuste, nous avons par la suite expérimenté pour cette même

garantie une approche non-vie du type fréquence-sévérité en segmentant notre portefeuille par

tranches d’âge et de capital garanti. En effet, une approche non-vie classique ne serait pas bien

adaptée à la garantie Décès car les sinistres sont forfaitaires et non indemnitaire. L’avantage

majeur qu’offre cette méthode est la facilité à modéliser des traités de réassurance non

proportionnelle lors de la simulation des sinistres ainsi que son adaptabilité à un portefeuille pour

lequel peu de données sont disponibles. Cette approche est d’autant plus pertinente que les

portefeuilles Décès sont souvent réassurés au-delà d’un certain capital sous risque.

Pour la Garantie des Accidents de la Vie, nous avons appliqué une approche non-vie

classique en modélisant la sinistralité du portefeuille, en distinguant les sinistres attritionnels,

fréquents à faible coût, et atypiques, rares à coût élevé. La garantie étant cette fois indemnitaire,

le modèle en fréquence-sévérité est adéquat. Après avoir déterminé la frontière de segmentation

à l’aide de la théorie des valeurs extrêmes, la sinistralité de chaque catégorie a été modélisée par

un modèle collectif en fréquence-coût. Par ailleurs, nous soulignons dans cette partie l’importance

du retraitement préalable des données avec une mise à l’ultime de la fréquence et des coûts des

sinistres puisque la garantie présente un développement assez long, où la sinistralité d’une

survenance n’est généralement consolidée qu’au bout de la cinquième année. De surcroît, il a été

nécessaire de corriger les provisions comptables forfaitaires des sinistres attritionnels qu’on a

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93 Modélisation du risque de prime en prévoyance

jugées trop prudentes afin d’obtenir une charge en « juste valeur » cohérente avec la vision « best

estimate » prônée par Solvabilité 2. Le risque de portefeuille a été quant à lui modélisé à une

maille agrégée en exploitant les écarts entre les primes réalisées et les primes budgétisées issues

du plan stratégique. Nous avons proposé comme axe d’amélioration du modèle une modélisation

plus fine du risque de portefeuille en scindant le volume des primes en trois variables distinctes

qui sont : la prime moyenne par assuré, le taux de rachat et le taux d’affaires nouvelles par année.

Le modèle proposé suppose également l’hypothèse forte d’indépendance entre le volume des

primes et le montant des sinistres, il s’agit d’une hypothèse simplificatrice en toute rigueur fausse

mais qui va dans le sens de la prudence ce qui la laisse acceptable.

Bien que dans ce mémoire nous n’avons étudié que deux garanties, les modèles que nous

avons proposés peuvent être appliqués - à des réajustements près - au reste du périmètre

hybride. Pour la garantie santé par exemple, nous pourrions nous inspirer du modèle IARD utilisé

lors de la modélisation de la GAV afin de modéliser la sinistralité en segmentant l’ensemble des

sinistres par type d’actes.

Pour conclure, il n’existe pas de modèle unique pour la modélisation du risque de prime

applicable à l’ensemble du périmètre hybride. En effet, chaque garantie de prévoyance présente

des spécificités qui doivent être prises compte dans la modélisation. Par ailleurs, plus la

modélisation est fine, plus la méthode sera rigoureuse mais coûteuse en données et en temps de

production, il convient donc de trouver un bon compromis entre robustesse et réalisme

d’implémentation.

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94 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Note de synthèse

Contexte

La réforme Solvabilité 2, entrée en vigueur le 1er Janvier 2016, a contraint les assureurs européens à renforcer leur système de gestion des risques. Le pilier quantitatif de la réforme prône une approche prospective et complexe du risque en définissant un besoin en capital à immobiliser déterminé en fonction du profil de risque et de l’exposition de l’assureur. Celui-ci doit en particulier être en mesure de résister à un événement bicentenaire se produisant à horizon un an. Pour cela, l’assureur dispose du choix de calculer son besoin en capital en formule standard ou en modèle interne. AXA France a opté pour un modèle interne qui a été approuvé par l’autorité de contrôle.

Dans le modèle interne d’AXA France, le périmètre hybride désigne les garanties Vie pour lesquelles les techniques actuarielles mises en œuvre pour la tarification ou le provisionnement relèvent de la non-vie. Cela concerne en pratique les contrats de prévoyance non emprunteur et la santé. Sur ce périmètre, le modèle utilisé pour le calcul du besoin en capital est un modèle hybride distinguant deux sources de risque : le risque de prime et le risque de réserve. Le risque de prime correspond au risque de sous-tarification conduisant à des montants de sinistres supérieurs à ceux prévus par la tarification. Ce risque porte sur les sinistres à venir. Le risque de réserve quant à lui correspond au risque de sous-évaluation des réserves au moment du calcul des provisions sur les sinistres déjà survenus. Il s’agit du risque de réévaluation de ces sinistres.

Problématique

Le modèle actuel utilisé pour le calibrage du choc prime se base sur une chronique de ratios de sinistralité S/P observés. Par cette approche, la volatilité de cette chronique est supposée refléter implicitement toutes les sources de l’incertitude sur la sinistralité future ainsi que les interactions entre ces sources. Or, la variable S/P englobe plusieurs facteurs de risque qu’elle ne peut refléter de manière suffisamment fine, notamment les risques spécifiques sur les primes, les fréquences de sinistres et les coûts moyens sont agrégés. Par conséquent, cette approche pourrait être considérée comme peu prudente au regard de l’évaluation d’un choc bicentenaire.

Dans le cadre de l’amélioration continue du modèle interne, l’objectif de ce mémoire est de présenter une nouvelle approche pour le calibrage du choc prime plus fine que le modèle actuel. Le plan d’action retenu est d’effectuer un calibrage par type de garantie. Le modèle proposé peut être basé sur une approche vie (modélisation d’une variable biométrique) ou non-vie (modélisation en fréquence-sévérité) mais les chocs retenus devront être traduit en termes de S/P afin de ne pas changer la structure du modèle interne actuel d’AXA. Ce mémoire s’est focalisé sur deux garanties de prévoyance ayant des spécificités différentes qui sont la garantie Décès et la garantie des Accidents de la Vie, communément appelée GAV.

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95 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Travaux réalisés

Deux études indépendantes ont été réalisées, la première se rapporte à la garantie Décès, la seconde à la GAV.

Etude de la garantie décès :

Pour cette garantie, deux méthodes totalement différentes aboutissant à des résultats cohérents entre eux ont été confrontées.

Modèle vie

Une première modélisation vie a été retenue avec une approche en deux composantes distinguant deux sources de risque de mortalité : le risque de process et le risque d’estimation. Le choix de ce type de modélisation a été motivé par la nature biométrique du risque sous-jacent. Le risque process (prépondérant et non diversifiable) correspond à l’incertitude sur l’évolution du taux de mortalité, englobant le risque de niveau et de tendance. Le risque d’estimation, autrement appelé risque d’échantillonnage, correspond au risque de fluctuations autour des taux de mortalité théoriques.

Choc process :

Le choc process calibré par cette approche a été estimé de manière prudente en prenant le maximum obtenu par une méthode prospective et rétrospective.

Dans l’approche prospective, nous avons utilisé un modèle stochastique pour projeter les taux de mortalité de notre portefeuille à horizon un an. Afin de calibrer de manière suffisamment robuste les paramètres du modèle de Lee-Carter, nous avons exploité les données de la population nationale sur les 30 dernières années puis nous avons projeté les taux de mortalité de notre portefeuille la technique du positionnement par rapport à une table de référence. Cette technique consiste à supposer qu’il existe une relation simple entre les taux de mortalité de notre portefeuille et les taux de mortalité de la population nationale. Ensuite, en supposant que cette relation restera stable dans le temps, dans notre cas à horizon un an, nous pouvons projeter les taux de mortalité de notre portefeuille à partir des taux de mortalité nationaux extrapolés par le modèle de Lee-Carter.

Dans l’approche rétrospective, nous avons exploité la chronique des taux de mortalité globaux du portefeuille. Une loi normale a été ajustée à l’évolution annuelle du taux de mortalité pour obtenir le choc. Compte-tenu de la déformation de la structure du portefeuille au fil du temps, nous avons choisi de retraiter les taux de mortalité bruts observés. En effet, l’évolution du taux de mortalité global de notre portefeuille ne reflète pas réellement le risque de mortalité car une déformation du portefeuille, notamment une hausse de l’âge moyen entrainera mécaniquement une hausse du taux de mortalité du portefeuille sans pour autant refléter une dérive de mortalité. Rappelons que pour un même capital garanti, la prime payée par l’assuré augmente avec l’âge.

Choc estimation :

Le risque d’estimation a été modélisé en supposant que les taux de mortalité best-estimate sont perturbés par un bruit gaussien centré. Afin d’estimer la variance d’estimation, nous avons fait

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96 Modélisation du risque de prime en prévoyance

l’hypothèse forte que tous les individus du portefeuille ont la même probabilité de décès et que ces décès sont indépendants. Cette hypothèse nous a permis d’obtenir une formule fermée pour la variance. Celle-ci est inversement proportionnelle au nombre d’individus observés. En effet, plus la taille de l’échantillon est significative, moins il y aura d’erreurs d’échantillonnage. L’historique choisi pour le calibrage du choc d’estimation a été restreint à cinq ans afin d’estimer un taux de mortalité best-estimate proche de notre portefeuille actuel. Par ailleurs, cette période est cohérente avec les données utilisées lors de la construction des tables d’expérience utilisées pour la tarification.

Modèle non-vie

Après avoir testé un modèle vie, un modèle non-vie de type fréquence-sévérité a été expérimenté pour modéliser le ratio de sinistralité. Le choix d’une deuxième approche a été motivé par deux principales raisons. La première est la possibilité d’étendre la méthode IARD de calibrage à d’autres périmètres disposant de moins de données que le périmètre individuel, la seconde est la facilité à modéliser les traités de réassurance non proportionnels lors de la simulation des sinistres.

[Compte-tenu des spécificités de la garantie décès et de ses différences par rapport à une garantie non-vie classique, une segmentation du portefeuille par tranches d'âges et de capitaux garantis a été nécessaire pour modéliser la sinistralité du portefeuille. Nous avons constitué 112 classes au total ce qui devrait permettre de prendre en compte l’effet de corrélation lié à l’âge. A fortiori, les têtes d’une même génération et de capitaux décès similaires sont susceptibles d’avoir la même probabilité de décès. Les classes doivent également comporter un nombre d’individus suffisamment élevé pour un calibrage du nombre de décès. La sinistralité de chaque classe a ensuite été modélisée par un modèle du type fréquence-sévérité et le volume des primes a été modélisé par une loi normale à partir de la chronique des écarts entre les primes réelles et les primes budgétisées issu du plan stratégique. Pour aller plus loin, nous avons également testé dans cette partie une méthode de partitionnement basée sur l’algorithme des centres mobiles en définissant une distance euclidienne adaptée à la garantie. ]

Etude de la Garantie des Accidents de la Vie :

Dans le cas de la garantie des accidents de la vie, une méthode non-vie a été implémentée en raison de ses caractéristiques proches d'une garantie du type IARD. L'objectif de cette approche est d'obtenir une distribution du ratio de sinistralité à horizon 1 an. Pour cela, nous avons effectué une segmentation entre les sinistres attritionnels, fréquents à coût faible, et les sinistres atypiques, rares et coûteux. La frontière entre les sinistres attritionnels et atypiques a été déterminée à l’aide de la théorie des valeurs extrêmes.

Avant l’implémentation du modèle, un retraitement préalable des données a été indispensable. En effet, compte-tenu du long développement de la garantie et de la prudence des provisions comptables, trois types de retraitements ont été effectués :

- Mise à l’ultime de la fréquence : Le nombre de sinistres observé par année de survenance a été projeté afin d’obtenir une vision à l’ultime. En effet, les années de survenances récentes ne sont pas encore consolidées à cause des tardifs donc les fréquences observées

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97 Modélisation du risque de prime en prévoyance

ne sont pas toutes comparables. La technique utilisée pour la mise à l’ultime est une technique des cadences du type Chain-Ladder.

- Correction de la prudence des provisions comptables : La PSAP tête par tête des sinistres attritionnels a été corrigée en calculant dans un premier temps la provision économique globale en vision Best-Estimate. Cette provision a ensuite été répartie sur l’ensemble des sinistres individuels au prorata de leurs PSAP comptable tête par tête. Le triangle utilisé a été épuré des sinistres tardifs. En effet, nous cherchons à déterminer la juste valeur du coût des sinistres déclarés uniquement, or si on se base sur le triangle des règlements global, la provision estimée sera d’une part liée aux réévaluations des sinistres déjà survenus et d’autre part relative à la déclaration de nouveaux sinistres.

- Correction des sinistres de l’inflation : La charge tête par tête de l’ensemble des sinistres a été corrigée en fonction de l’évolution du taux d’inflation. En effet, malgré un niveau d’inflation très faible pendant ces dernières années, l’inflation cumulée sur plusieurs années peut avoir un effet non négligeable sur l’évolution du coût moyen des sinistres.

Après avoir modélisé la sinistralité attritionnelle et atypique, nous avons supposé une loi sur le volume des primes attendu ce qui nous a permis d’obtenir une distribution du ratio de sinistralité à horizon un an.

Conclusion

En somme, ce mémoire a visé à contribuer à l’amélioration du modèle interne actuel utilisé sur le périmètre hybride, en particulier la modélisation du risque de prime. Nous avons proposé dans notre étude des méthodes pour le calibrage du choc S2 plus fines que l’approche agrégée en S/P.

Pour la garantie décès, nous avons confronté deux méthodes totalement différentes aboutissant à des résultats cohérents entre eux. Bien que la modélisation vie semble être mieux adaptée à la nature biométrique du risque sous-jacent, nous avons testé un modèle du type IARD en partitionnant notre portefeuille par tranches d’âge et de capital garanti. L’une des raisons ayant motivé l’expérimentation d’un tel modèle est la possibilité de prendre en compte les traités de réassurance non proportionnels.

Pour la Garantie des Accidents de la Vie, notre choix s’est porté sur une modélisation non-vie du type fréquence-sévérité en raison de ses caractéristiques apparentées à une garantie IARD. La théorie des valeurs extrêmes nous a permis de modéliser distinctement la sinistralité attritionnelle et atypique. La principale difficulté dans la modélisation de cette garantie a résidé dans le retraitement préalable des données afin de respecter la vision en « juste valeur » préconisée par Solvabilité 2. Enfin, nous n’avons étudié dans ce mémoire que deux garanties de prévoyance (décès et GAV), néanmoins les différents modèles que nous avons proposés peuvent être appliqués - à des réajustements près - au reste du périmètre hybride.

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98 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Executive summary

Context

The Solvency II reform, which entered into force on 1 January 2016, forced European insurers to strengthen their risk management system. The quantitative pillar of the reform advocates a prospective and complex approach of the risk by defining a capital requirement to be determined based on the insurer's risk profile and exposure. In particular, it must be able to withstand a bicentennial event occurring within a year. To do this, the insurer has the option of calculating its capital requirement as a standard formula or as an internal model. AXA France opted for an internal model approved by the supervisory authority. In the internal model of AXA France, the hybrid perimeter refers to the Life guarantees for which the actuarial techniques used for pricing or provisioning are non-life. This applies in practice to the non-borrowing and health insurance contracts. Within this perimeter, the model used to calculate the capital requirement is a hybrid model that distinguishes between two sources of risk: the premium risk and the reserve risk. The premium risk refers to the risk of under-pricing leading to claims higher than those stipulated by the tariffs. This risk relates to future claims. The reserve risk refers to the risk of undervaluation of reserves when calculating provisions for claims that already incurred. This is the risk of claims re-evaluation.

Problem

The current model used for calibration of the prime shock is based on a chronicle of observed S / P loss ratios. By this approach, the volatility of this chronicle is supposed to implicitly reflect all the sources of the uncertainty about the future loss and the interactions between these sources. However, the S / P variable includes several risk factors that can not be adequately reflected, in particular the specific risks on premiums, claims frequencies and average costs are aggregated. Therefore, this approach could be considered unpredictable regarding the assessment of a bicentennial shock.

As part of the continuous improvement of the internal model, the objective of this paper is to present an approach of the calibration of the prime shock finer than the current model. The plan of action adopted is to carry out a calibration by type of guarantees. The model proposed may be based on a life (biometric modeling) or non-life (frequency-severity modeling) approach, but the shocks retained should be translated into S / P terms so as not to change the structure of the AXA's current internal model. This thesis focused on two guarantees of prévoyance with different specificities which are the death guarantee and the guarantee of Accidents of Life, commonly called GAV.

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Work accomplished

Two independent studies have been carried out, the first relates to the death benefit, the second to the GAV.

Study of the death guarantee : For this guarantee, two totally different methods leading to coherent results have been faced.

Life model

A first life modeling was chosen with a two-component approach distinguishing between two sources of mortality risk: process risk and estimation risk. The choice of this type of modeling was motivated by the biometric nature of the underlying risk. The process risk (preponderant and non-diversifiable) corresponds to the uncertainty in the evolution of the mortality rate, including the risk of level and trend. Estimation risk, otherwise referred to as sampling risk, is the risk of fluctuations around the theoretical mortality rates.

Process error:

The choc process calibrated by this approach was estimated in a prudent manner by taking the maximum obtained by a prospective and a retrospective method. In the prospective approach, we used a stochastic model to project the mortality rates of our portfolio over a one-year horizon. In order to calibrate the parameters of the Lee-Carter model sufficiently, we have used the data of the national population over the last 30 years, then the mortality rates of our portfolio have been projected using the positioning technique in relation to a reference table. This technique assumes that there is a simple relationship between the mortality rates of our portfolio and the mortality rates of the national population. Then, assuming that this relationship will remain stable over time, in our case over a year, we can project the mortality rates of our portfolio from the national mortality rates extrapolated by the Lee-Carter model. In the retrospective approach, we used the chronicle of the overall mortality rates of the portfolio. A normal law has been adjusted to the annual change in the mortality rate to obtain the choc. Given the deformation of the portfolio structure over time, we have chosen to restate the observed crude mortality rates. Indeed, the evolution of the overall mortality rate of our portfolio does not really reflect the risk of mortality due to a deformation of the portfolio, in particular an increase in the average age will mechanically lead to an increase in the mortality rate of the portfolio without reflecting a drift of mortality. Recall that for the same guaranteed capital, the premium paid by the insured increases with age.

Estimation error:

The risk of estimation was modeled assuming that best-estimate mortality rates were disturbed by a centered Gaussian noise. In order to estimate variance, we hypothesized that all individuals in the portfolio have the same probability of death and that these deaths are independent. This assumption allowed us to obtain a closed formula for variance. This is inversely proportional to the number of individuals observed. Indeed, the larger the sample size, the fewer sampling errors.

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The history chosen for calibration of the estimation shock was restricted to five years in order to estimate a best-estimate mortality rate close to our current portfolio. Moreover, this period is consistent with the data used in the construction of the experience tables used for pricing.

Non-Life Model

After testing a life model, a non-life model of frequency-severity type was tested to model the loss ratio. The choice of a second approach was motivated by two main reasons. The first is the possibility of extending the IARD calibration method to other perimeters with less data than the individual perimeter, the second is the facility to model non-proportional reinsurance treaties during the simulation of claims. [Given the specificities of the death benefit and its differences regarding a classic non-life guarantee, a segmentation of the portfolio by ages and guaranteed capital was necessary to model the loss ratio of the portfolio. We have made 112 classes in total, which should make it possible to take into account the correlation effect related to age. A fortiori, heads of the same generation and similar death capital are likely to have the same probability of death. Classes must also include a sufficiently large number of individuals to calibrate the number of deaths. The loss ratio of each class was then modeled by a frequency-severity model and the volume of premiums was modeled by a normal law based on the chronicle of the discrepancies between the actual premiums and the budgeted premiums resulting from the strategic plan. To go further, we also tested in this part a method of partitioning based on the algorithm of the mobile centers by defining a Euclidean distance adapted to the guarantee. ]

Study of the GAV:

In the case of life assurance, a non-life method has been implemented because of its characteristics that are similar to a P & C type guarantee. The objective of this approach is to obtain a distribution of the loss ratio at 1 year horizon. This is why, we have made a segmentation between attritional claims, frequent low cost, and severe, rare and costly claims. The boundary between attritional and atypical claims was determined using the extreme value theory.

Prior to the implementation of the model, a preliminary reprocessing of the data was necessary. Given the long development of the guarantee and the prudence of the accounting provisions, three types of restatements have been carried out:

- Seen at the ultimate : The number of claims observed per year of occurrence was projected in order to obtain a vision at the ultimate. Indeed, the years of recent occurrences are not yet consolidated because of the late ones so the frequencies observed are not all comparable. The technique used for the finalization is a technique of the cadences of the Chain-Ladder type

- Correction of the prudence of accounting provisions: The PSAP per head of attritional claims has been corrected by first calculating the overall economic provision in Best-Estimate vision. This provision was then allocated to all individual claims in proportion to their head-to-head PSAPs. The triangle used was purified from late claims. Indeed, we seek to determine the fair value of the cost of claims reported only, and if we rely on the global

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settlements triangle, the estimated provision will be related to the revaluations of the claims that have already occurred and, on the other hand, o the reporting of new claims.

- Correction of inflation claims: The head-on-load of all claims has been adjusted for

changes in the inflation rate. Indeed, despite a very low level of inflation in recent years, cumulative inflation over several years can have a significant effect on the evolution of the average cost of claims.

After modeling the attritional and atypical claims, we assumed a law on the volume of premiums expected, which allowed us to obtain a distribution of the loss ratio to one year.

Conclusion

In short, this thesis aimed to contribute to the improvement of the current internal model used on the hybrid perimeter, in particular the modeling of premium risk. We proposed in our study methods for the calibration of shock S2 finer than the aggregated S / P approach. For the death benefit, we have confronted two totally different methods leading to coherent results between them. Although life modeling seems to be better adapted to the biometric nature of the underlying risk, we have tested a P & C model by partitioning our portfolio by age and guaranteed capital. One of the reasons leading to the experimentation for experimenting of such a model is the possibility of taking into account non-proportional reinsurance treaties. For the Accident Life Guarantee, we chose non-life modeling of the frequency-severity type due to its characteristics related to a P & C insurance. The theory of extreme values allowed us to model distinctly the attritional and atypical claims. The main difficulty in modeling this guarantee resides in the prior restatement of the data in order to respect the "fair value" vision advocated by Solvency 2.

Lastly, we have only studied two prévoyance guarantees (death and GAV) in this thesis, but the different models we have proposed can be applied - to readjustments - to the rest of the hybrid perimeter.

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Table des figures

Figure 1-1 Organigramme de la direction Risk Management d’AXA France .................................... 12

Figure 2-1 Tableau récapitulatif des principales différences entre Solvabilité 1 et Solvabilité 2..... 13

Figure 2-2 Schéma résumant les 3 piliers de la réforme solvabilité 2 .............................................. 15

Figure 2-3 Possibilités offertes à l’assureur pour l’évaluation du besoin en capital ........................ 16

Figure 2-4 Avantages et inconvénients de la formule standard et du modèle interne.................... 16

Figure 2-5 Sous modules de risque de la formule standard ............................................................. 17

Figure 2-6 Matrice de corrélation entre les modules de risque de la formule standard ................. 18

Figure 2-7 Matrice de corrélation entre les sous-modules de risque Vie de la formule standard .. 18

Figure 2-8 Calcul du SCR en formule standard ................................................................................. 19

Figure 2-9 Calcul du SCR en modèle interne ..................................................................................... 19

Figure 3-3-1 Bilan S2 ......................................................................................................................... 21

Figure 3-3-2 Architecture du modèle interne ................................................................................... 23

Figure 3-3 Structure du modèle interne vie d'AXA France ............................................................... 24

Figure 3-4 Matrice de corrélation des sous modules vie du modèle interne ................................... 27

Figure 3-5 Périmètre hybride du modèle interne ............................................................................. 27

Figure 3-6 Risque de prime et risque de réserve .............................................................................. 28

Figure 3-7 Estimation du choc prime par le modèle actuel .............................................................. 29

Figure 4-1 Nombre de capitaux décès et de rentes .......................................................................... 33

Figure 4-2 Modèle vie agrégé ........................................................................................................... 36

Figure 4 -3 QQ Plot des variations annuelles des taux de mortalité ................................................ 37

Figure 4-4 Chronique de l'âge moyen du portefeuille décès ............................................................ 40

Figure 4-5 Chroniques des indicateurs d'exposition du portefeuille décès ..................................... 40

Figure 4-6 Corrélations des indicateurs d'exposition avec le taux de mortalité du portefeuille ..... 41

Figure 4-7 Chronique des taux de mortalité bruts et retraités......................................................... 42

Figure 4-8 Graphiques d'adéquation à la loi normale ...................................................................... 43

Figure 4-9 Evolution des taux de mortalité en France de 1983 à 2012 ............................................ 45

Figure 4-10 Evolution des taux de mortalité en France de 1983 à 2012 avec lissage ...................... 46

Figure 4-11 Paramètres de niveau et de sensibilité du modèle de Lee-Carter ................................ 46

Figure 4-12 Composante temporelle du modèle de Lee-Carter ....................................................... 47

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103 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Figure 4-13 Extrapolation de la composante temporelle du modèle de Lee-Carter ........................ 48

Figure 4-14 Taux de mortalité du portefeuille et nationaux en 2012 .............................................. 49

Figure 4-15 Positionnement par le modèle de Brass du portefeuille par rapport à la population de

référence ........................................................................................................................................... 49

Figure 4-16 Backtest du positionnement par rapport à une table de référence ............................. 50

Figure 4-17 Choc process prospectif ................................................................................................. 51

Figure 4-18 Exposition du portefeuille par âge ................................................................................. 51

Figure 5-1 Structure générale du modèle IARD ................................................................................ 55

Figure 5-2 Répartition des âges en entrée et en sortie du portefeuille .......................................... 59

Figure 5-3 Répartition des capitaux décès du portefeuille .............................................................. 59

Figure 5-4 Distribution des CSR au sein de chaque tranche ............................................................. 60

Figure 5-5 Distribution du ratio de sinistralité Décès de la méthode IARD ...................................... 63

Figure 5-6 Partitionnement du portefeuille en dix classes par la méthode des k-means ................ 65

Figure 6-1 Distributions des lois GEV classiques ............................................................................... 73

Figure 6-2 Fonction moyenne des excès ........................................................................................... 74

Figure 6-3 Qualité d'ajustement de la fonction moyenne des excès à une droite ........................... 75

Figure 6-4 Tests des hypothèses de Chain-Ladder ........................................................................... 79

Figure 6-5 Coefficients de développement individuels de Chain-Ladder ......................................... 79

Figure 6-6 Taux d'inflation des dix dernières années ....................................................................... 80

Figure 6-7 Fréquence attritionnelle avec et sans retraitements ...................................................... 82

Figure 6-8 Fréquence atypique avec et sans retraitements ............................................................. 83

Figure 6-9 Fonctions de répartition empirique et théorique de la loi de fréquence attritionelle ... 84

Figure 6-10 QQ Plot - loi de fréquence attritionnelle ....................................................................... 84

Figure 6-11 Critères AIC BIC fréquence attritionnelle ...................................................................... 85

Figure 6-12 Critères d'adéquation - coût attritionnel ....................................................................... 85

Figure 6-13 Statistiques de tests - Coût attritionnel ......................................................................... 86

Figure 6-14 Fonctions de répartition théoriques et empirique - coût attritionnel .......................... 86

Figure 6-15 Critères AIC BIC fréquence atypique ............................................................................. 87

Figure 6-16 Critères d'adéquation - coût atypique ........................................................................... 87

Figure 6-17 Statistiques de tests - Coût atypique ............................................................................. 88

Figure 6-18 Triangle d'annulation de primes .................................................................................... 88

Figure 6-19 Primes réelles et budget GAV ........................................................................................ 89

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Figure 6-20 Adéquation des primes à la loi normale ........................................................................ 89

Figure 6-21 Distribution du ratio de sinistralité à horizon 1 an ........................................................ 91

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105 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Annexes

Annexe 1 : Démonstration des formules de Wald

Nous énonçons dans un premier temps les deux théorèmes fondamentaux de la théorie de l’intégration que nous avons utilisé pour les passages à la limite dans la démonstration des formules de Wald.

Théorème de convergence monotone : Soit (𝑓𝑛)𝑛𝜖ℕ ≥ 0 une suite de fonctions mesurables positives et croissantes (∀𝑛𝜖ℕ, 𝑓𝑛+1 ≥ 0).

On peut alors passer à la limite dans l’intégrale, i.e.:

𝑙𝑖𝑚𝑛→+∞

∫𝑓𝑛𝑑𝜇𝛺

= ∫ 𝑙𝑖𝑚𝑛→+∞

𝑓𝑛𝑑𝜇𝛺

Théorème de convergence dominée : Soit (𝑓𝑛)𝑛𝜖𝑁.On suppose que la suite converge vers une fonction 𝑓 et qu’il existe

g 𝜖 𝐺1: ∀𝑛𝜖ℕ, |𝑓| ≤ 𝑔. Alors 𝑓𝜖𝐺1 et:

𝑙𝑖𝑚𝑛→+∞

∫𝑓𝑛𝑑𝜇𝛺

= ∫ 𝑙𝑖𝑚𝑛→+∞

𝑓𝑛𝑑𝜇𝛺

= ∫𝑓 𝑑𝜇𝛺

Première formule de Wald :

Soient N une variable aléatoire à valeurs dans N et (𝑋𝑛)𝑛€𝑁∗ une suite de variables aléatoires

réelles positives de même espérance. On suppose de plus que N ⊥ (𝑋𝑛)𝑛€𝑁∗. On a alors :

𝑬(𝑺) = 𝑬(𝑵)𝑬(𝑿)

Démonstration :

Dans cette démonstration, nous utiliserons les deux lemmes suivants :

Lemme 1 : Soit N une variable aléatoire à valeurs dans N ou N∗. On a alors l’égalité suivante :

𝐸(𝑁) = ∑ 𝑃(𝑁 > 𝑛) = ∑ 𝑃(𝑁 ≥ 𝑛)

𝑛€𝑁∗𝑛€𝑁

Lemme 2 : Soient N une variable aléatoire à valeurs dans N et (Xn)n€N∗ une suite de variables

aléatoires réelles. Nous avons l’égalité suivante :

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106 Modélisation du risque de prime en prévoyance

𝑆 = ∑𝑋𝑛 =∑𝑋𝑛

+∞

𝑛=1

1{𝑁≥𝑛}

𝑁

𝑛=1

∀𝑛 ∈ 𝑁∗, soit :

𝑌𝑛 =∑𝑋𝑘1{𝑁≥𝑘}

𝑛

𝑘=1

Par le lemme 2 :

𝑌𝑛 →S

Par le théorème de convergence monotone et le lemme 1 :

𝐸(𝑆) = 𝐸 ( lim𝑛→+∞

∑𝑋𝑘1{𝑁≥𝑘}

𝑛

𝑘=1

) = lim𝑛→+∞

𝐸 (∑𝑋𝑘1{𝑁≥𝑘}

𝑛

𝑘=1

)

= lim𝑛→+∞∑ 𝐸(𝑛𝑘=1 𝑋𝑘) 𝐸 (1{𝑁≥𝑘})

= 𝐸(𝑋) lim𝑛→+∞

∑𝑃(

𝑛

𝑘=1

𝑁 ≥ 𝑘) = 𝐸(𝑋)𝐸(𝑁)

Deuxième formule de Wald :

Soient N une variable aléatoire L2 à valeurs dans N et (Xn), nϵN∗une suite i.i.d. de variables

aléatoires réelles L2 . On suppose de plus que N et (Xn), nϵN sont indépendants.

Alors, SϵL2 et : 𝑉𝑎𝑟(𝑆) = 𝐸(𝑁)𝑉𝑎𝑟(𝑋) + 𝑉𝑎𝑟(𝑁)𝐸(𝑋)2

Démonstration :

On a :

𝑆2 =∑∑𝑋𝑖𝑌𝑗

𝑁

𝑗=1

𝑁

𝑖=1

On pose Zk = XkXk et Z′l = XiYj pour i ≠ j. On a :

𝑆2 =∑𝑍𝑘 + ∑ 𝑍′𝑙

𝑁2−𝑁

𝑙=1

𝑁

𝑖=1

Nous avons pour tout k, l ; E(Zk) = E(X²) et 𝐸(𝑍′𝑙) = 𝐸(𝑋)².

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107 Modélisation du risque de prime en prévoyance

On a alors :

S ∈ 𝐿² 𝑒𝑡 𝐸(𝑆²) = 𝐸(𝑁)𝐸(𝑋²) + (𝐸(𝑁²) − 𝐸(𝑁))𝐸(𝑋)².

Enfin :

𝑉𝑎𝑟(𝑆) = 𝐸(𝑆2) − 𝐸(𝑆)2

= 𝐸(𝑁)𝐸(𝑋2) + (𝐸(𝑁2) − 𝐸(𝑁))𝐸(𝑋)2 − 𝐸(𝑁)2𝐸(𝑋)2

= 𝐸(𝑁)(𝐸(𝑋2) − 𝐸(𝑋)2) + (𝐸(𝑁2) − 𝐸(𝑁)2)𝐸(𝑋)2

= 𝐸(𝑁)𝑉𝑎𝑟(𝑋) + 𝑉𝑎𝑟(𝑁)𝐸(𝑋)²

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Annexe 2 : Mesure de la qualité d’ajustement d’un modèle

Le critère d’information d’Akaike (AIC):

Le critère d’information d’Akaike repose sur un compromis entre la qualité de l'ajustement et la complexité du modèle L’AIC pénalise les modèles ayant un grand nombre de paramètres, limitant les effets de sur-ajustement:

𝑨𝑰𝑪 = 𝟐𝒌 − 𝟐𝒍𝒏(𝑳) 𝑜ù 𝐿 𝑒𝑠𝑡 𝑙𝑒 𝑚𝑎𝑥𝑖𝑚𝑢𝑚 𝑑𝑒 𝑙𝑎 𝑓𝑜𝑛𝑐𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑑𝑒 𝑣𝑟𝑎𝑖𝑠𝑠𝑒𝑚𝑏𝑙𝑎𝑛𝑐𝑒 𝑒𝑡 𝑘 𝑙𝑒 𝑛𝑜𝑚𝑏𝑟𝑒 𝑑𝑒 𝑝𝑎𝑟𝑎𝑚è𝑡𝑟𝑒𝑠 𝑑𝑢 𝑚𝑜𝑑è𝑙𝑒

Le critère d’information bayésien (BIC): Le critère d’information bayésien est un critère dérivé de l’AIC qui prend en compte également

la taille de l’échantillon étudié:

𝑩𝑰𝑪 = −𝟐𝒍𝒏(𝑳) + 𝒍𝒏(𝒏). 𝒌 𝑜ù 𝐿 𝑒𝑠𝑡 𝑙𝑒 𝑚𝑎𝑥𝑖𝑚𝑢𝑚 𝑑𝑒 𝑙𝑎 𝑓𝑜𝑛𝑐𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑑𝑒 𝑣𝑟𝑎𝑖𝑠𝑠𝑒𝑚𝑏𝑙𝑎𝑛𝑐𝑒, 𝑘 𝑙𝑒 𝑛𝑜𝑚𝑏𝑟𝑒 𝑑𝑒 𝑝𝑎𝑟𝑎𝑚è𝑡𝑟𝑒𝑠 𝑑𝑢 𝑚𝑜𝑑è𝑙𝑒 𝑒𝑡 𝑛 𝑙𝑒 𝑛𝑜𝑚𝑏𝑟𝑒 𝑑′ 𝑜𝑏𝑠𝑒𝑟𝑣𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛𝑠

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Annexe 3 : Tests d’adéquation aux lois

Test de Kolmogorov-Smirnov :

Le test de Kolmogorov-Smirnov (KS) est un test d'hypothèse utilisé pour déterminer si un échantillon suit bien une loi donnée connue par sa fonction de répartition continue, ou bien si deux échantillons suivent la même loi. Ce test repose sur les propriétés des fonctions de répartition empiriques : si (𝑋1, 𝑋2, …, 𝑋𝑛) est un échantillon de 𝑛 variables aléatoires indépendantes à valeurs réelles, alors la fonction de répartition empirique de cet échantillon est définie par :

𝐹𝑛(𝑥) =1

𝑛∑𝛿𝑥𝑖≤𝑥

𝑛

𝑖=1

Avec 𝛿𝑥𝑖≤𝑥 = { 1 𝑠𝑖 𝑥𝑖 ≤ 𝑥,0 𝑠𝑖𝑛𝑜𝑛

Il mesure l’écart entre la fonction de répartition théorique et la fonction de répartition observée. 𝐹𝑛(𝑥) est la proportion des observations dont la valeur est inférieure ou égale à x. La statistique du test de Kolmogorov Smirnov est donnée par :

𝑇 = 𝑆𝑢𝑝𝑥∈𝑅|𝐹𝑛(𝑥) − 𝐹0(𝑥)| 𝑇 est la variable de décision du test.

Test de Cramer-Von Mises

Le test de Cramer-Von Mises repose sur la somme des carrés des écarts en valeurs absolue

entre les deux fonctions de répartition. En notant, 𝑆𝑑2 cette somme, la statistique est :

𝑇 =𝑛𝑚𝑆𝑑

2

𝑛 + 𝑚

avec m et n les nombres d’observation des deux groupes. Le test de Cramer-Von Mises est générallement plus puissant que le test de Kolmogorov-Smirnov car il prend en compte plus d’informations. En effet, il prend en compte l’ensemble des différences entre distributions cumulées théoriques et observées à chaque observation, alors que le test de Kolmogorov-Smirnov ne considère que la plus grande de ces différences.

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110 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Test d’Anderson-Darling

Le test d’Anderson-Darling est une variante du test précédent, à la différence qu’il donne plus d’importance aux valeurs extrêmes de la distribution.

Diagramme QQ plot

Etant donnée un n-échantillon 𝑋1, 𝑋2…𝑋𝑛et une fonction de répartition 𝐹𝑟𝑒𝑓 , on veut tester

si l'hypothèse suivante est acceptable :

(𝐻0) « Les 𝑋𝑖 sont distribuées selon 𝐹𝑟𝑒𝑓»

Pour « accepter ou refuser visuellement » cette hypothèse, on peut tracer le QQ-plot : c'est le nuage de points :

(𝑞𝑖/𝑛(𝐹𝑟𝑒𝑓), �̂�𝑛,𝑖/𝑛)𝑖=1𝑛 = (𝑞𝑖/𝑛(𝐹𝑟𝑒𝑓), 𝑋(𝑖))𝑖=1

𝑛

1. Si le nuage de points est « approximativement » aligné avec la droite y = x alors

l'hypothèse est acceptée (on trace aussi la droite y = x sur un QQ-plot) 2. Si les points sont est « approximativement » alignés avec une la droite affine alors

l'hypothèse est vraie à une transformation de centrage et scaling près, généralement on normalise les données).

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111 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Annexe 4 : Autre méthode de mise à l’ultime des sinistres tête par tête

Le schéma ci-dessous présente une autre méthode de mise à l’ultime des sinistres

attritionnels tête par tête à partir du triangle agrégé des règlements retraité des IBNR:

𝑐𝑜𝑒𝑓𝑓𝑖𝑐𝑖𝑒𝑛𝑡𝑠 𝑑𝑒 𝑝𝑎𝑠𝑠𝑎𝑔𝑒 (

𝐶1...𝐶𝑁

)

𝑆𝑘 = 𝑆𝑖𝑗 × 𝐶𝑗 × 𝐶𝑗+1…𝐶𝑁

Chain-Ladder

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112 Modélisation du risque de prime en prévoyance

Bibliographie

Livres :

- YVES ARAGON (2016) : Séries temporelles avec R, EDP Sciences

- CHARPENTIER A. DUTANG C. (2012) : L’actuariat avec R, version numérique

Mémoires et thèses :

- BEN DBABIS M. (2013) : Modèles et méthodes actuarielles pour l'évaluation quantitative

des risques en environnement solvabilité II.

- WENDJA C. (2007) : Construction d’une table de mortalité prospective à partir d’un

échantillon réduit.

- ROMMEL T. (2015) : Analyse actuarielle et étude du risque du produit Garantie des

Accidents de la Vie.

Sites internet :

- Site officiel de la Fédération Française des Sociétés d’Assurance FFSA, www.ffsa.org.

- Ressources actuarielles, www.ressources-actuarielles.net

- Base de données HMD : www.mortality.org

- Site de l’INSEE : www.insee.fr

Publications EIOPA :

- CEIOPS-SEC-40-10, QIS 5 Calibration paper, 15 April 2010.

Documentation interne AXA:

- GRM Life (2014): Solvency II IM technical specifications: Longevity and mortality risks.

Group Risk Management December, 2014

Articles:

- A.J.G. Cairns, D. Blake, K. Dowd, Coughlan, Epstein, Khalaf-Allah (2011): Mortality Density

Forecasts: An Analysis of Six Stochastic Mortality Models. Pensions Institute.

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113 Modélisation du risque de prime en prévoyance

- BEN DBABIS M. (2010): Modélisation stochastique de la mortalité d’expérience et effets de

sélection adverse, Bulletin français d’actuariat, Vol 20, 2010.

Supports de cours ENSAE:

- BARADEL N. (2016): Théorie du risque

- ROBERT C. (2016): Théorie des valeurs extrêmes

- LEVALLOIS F. (2016): Réglementation de l’assurance