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LE CINÉMA DE CLINT EASTWOOD : La vengeance aux deux visages Vu le statut de « star » de Clint Eastwood, l’âge (respectable) de ladite star, et le fait qu’il est maintenant reçu à Cannes, et même dans certaines chapelles tenu pour un « auteur », il était inévitable qu’un jour ou l’autre le grand public ait droit à sa biographie. Qui d’ailleurs, de nos jours, n’a pas droit à sa biographie, dès qu’il ou elle atteint un à semblant d’éphémère gloire ? L’heure est au voyeurisme. Simplement, le grand Eastwood aura dû patienter jusqu’à la soixantaine passée. Qu’importe, c’est désormais chose faite, grâce à Richard Schickel qui, en 1996, a laissé tomber dans la mare médiatico- cinéphilique un pavé de 680 pages (dans sa traduction française de 1997 aux Presses de la Cité du moins, traduction qui, par parenthèse, laisse parfois à désirer : ainsi, on apprend périodiquement que ceci ou cela « souciait beaucoup » un tel ou un tel – passons), sobrement intitulé Clint Eastwood. Quant au contenu, il oscille entre l’écoeurant et l’exaspérant. De « Clint » (Schickel l’appelle Clint, il est non seulement son hagiographe baveux, mais

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LE CINÉMA DE CLINT EASTWOOD   :

La vengeance aux deux visages

Vu le statut de « star » de Clint Eastwood, l’âge (respectable) de ladite

star, et le fait qu’il est maintenant reçu à Cannes, et même dans certaines

chapelles tenu pour un « auteur », il était inévitable qu’un jour ou l’autre le

grand public ait droit à sa biographie. Qui d’ailleurs, de nos jours, n’a pas droit

à sa biographie, dès qu’il ou elle atteint un à semblant d’éphémère gloire ?

L’heure est au voyeurisme. Simplement, le grand Eastwood aura dû patienter

jusqu’à la soixantaine passée. Qu’importe, c’est désormais chose faite, grâce à

Richard Schickel qui, en 1996, a laissé tomber dans la mare médiatico-

cinéphilique un pavé de 680 pages (dans sa traduction française de 1997 aux

Presses de la Cité du moins, traduction qui, par parenthèse, laisse parfois à

désirer : ainsi, on apprend périodiquement que ceci ou cela « souciait

beaucoup » un tel ou un tel – passons), sobrement intitulé Clint Eastwood.

Quant au contenu, il oscille entre l’écoeurant et l’exaspérant. De « Clint »

(Schickel l’appelle Clint, il est non seulement son hagiographe baveux, mais

aussi son ami, voire son Boswell, Clint existe, Schickel l’a vu, qu’on se le dise)

on apprend les choses habituelles sur l’homme (et d’autres qui le sont un peu

moins : ainsi Clint entretient soigneusement son corps, salle de gym pour le

muscle, régime spécial concocté par ses docteurs personnels pour le reste – de

façon sans doute à mourir en bonne santé, ce qui de nos jours relève des bonnes

manières, ou qui sait, de ne pas mourir du tout, de se momifier vivant), un

certain nombre de choses sur la star (qui est une anti-star, car modeste avec ça,

et aussi un peu timide, et il sait préserver son mystère, qui fait partie de son

aura), mais assez peu sur l’oeuvre. Car Schickel, il s’avère, ne connaît pas

grand-chose au cinéma. Selon lui, les thèmes centraux des films de Clint

seraient la violence (vraiment ?) et les problèmes du mâle américain

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postmoderne – allons bon ! Qu’est ce que c’est encore que cette chose-là ?

Apparemment un crétin sans cervelle et beaucoup de muscle, un flingue-phallus

toujours en main, et obsédé par une virilité chancelante qu’il tente de protéger

du regard de Gorgonne de la femme libérée, tout en regrettant le bon vieux

temps où les hommes étaient des mâles adulés par des femmes soumises – bref,

un Américain ? Ah bon – il suffisait de le dire tout de suite.

Car si la violence est bien au coeur de ses films (même un aveugle s’en

rendrait compte) il ne s’agit nullement pour le reste, ou alors très peu, de « mâle

américain ». Et d’emblée mettons les choses au point, concernant l’oeuvre : on

entend ici plus précisément, d’abord bien sûr les films qu’il a réalisés et dans

lesquels il a joué – ce qui exclut déjà Breezy (1973), Vanessa in the Garden

(1985), Bird (1988) et Midnight in the Garden of Good and Evil (1997) – mais

également ceux dont il tenait le rôle principal et qu’il a plus ou moins contrôlés

(en particulier ses films avec Don Siegel et des tâcherons antérieurs ou

subséquents) – ce qui exclut non seulement ses collaborations avec Leone, mais

également Le Streghe (1965), Where Eagles Dare (1968), Paint Your Wagon

(1969), Kelly’s Heroes (1970), City Heat (1984), voire Pink Cadillac (1989) –

ce qui tout de même laisse suffisamment de matériau pour une analyse, tant le

bougre est prolifique (les nombres sanctifient, notait déjà le Monsieur Verdoux

de Chaplin). A savoir :

- films joués mais non réalisés par Clint : Hang’em high (1968), Coogan’s

Bluff (1968), Two Mules for Sister Sarah (1970), The Beguiled (1971), Dirty

Harry (1971), Joe Kidd (1972), Magnum Force (1973), Thunderbolt and

Lightfoot (1974), The Enforcer (1976), Every Which Way but Loose (1978),

Escape from Alcatraz (1979), Any Which Way You Can (1980), Tight Rope

(1984), The Dead Pool (1988), In the Line of Fire (1993), soit 15 films

- films joués et réalisés par Clint : Play Misty for Me (1971), High Plains

Drifter (1973), The Eiger Sanction (1975), The Outlaw Josey Wales (1976), The

Gauntlet (1977), Bronco Billy (1980), Firefox (1982), Honkytonk Man (1982),

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Sudden Impact (1983), Pale Rider (1985), Heartbreak Ridge (1986), White

Hunter, Black Heart (1990), The Rookie (1990), Unforgiven (1992), A Perfect

World (1993), The Bridges of Madison County (1995), Absolute Powers (1996),

True Crime (1998), Space Cowboys (2000), Blood Work (2002), soit 20 films1.

Bref, un total (à ce jour) de 35 films – seul Woody Allen peut se vanter d’un

pareil palmarès. En somme, sur la côte ouest Clint le grand taciturne musclé

tourne plus vite qu’il ne tire, tandis que sur la côte est Woody le petit binoclard

maigrichon tourne plus vite qu’il ne parle. Tout le monde est servi, et que

demande le peuple ?

Violence donc, au coeur de l’oeuvre. Mais cette violence se rattache à un

thème qui d’ailleurs est son corollaire : la vengeance. Et précisons encore : la

vengeance déclinée sur tous ses modes, majeurs et mineurs, ce qui inclut le

réglement de comptes et la revanche, au sens le plus large du terme. La

vengeance, c’est la loi du Talion. Le réglement de comptes n’est qu’une

variante de cette dette du sang. Quant à la revanche, elle implique également

une dette, mais éventuellement aussi une injustice, et surtout une compensation,

un redressement, un rachat. A ceci s’ajoutent bien évidemment les notions de

crime, de culpabilité, de regret, de remords (voire d’obsession), et,

inévitablement celles de justice et d’injustice. Vengeance / réglement de

comptes (obligatoirement) et revanche (éventuellement) impliquent encore un

lien entre agresseur et victime, criminel et justicier (notons que victime et

justicier peuvent se confondre), entre passé et présent, et entre désordre (le crime

et l’injustice impunis) et ordre (le crime enfin puni, l’injustice réparée). Ils

posent également le problème des rapports entre individu et société (institutions

en particulier : police et tribunaux, voire dirigeants politiques), de la morale,

individuelle et collective – les films d’Eastwood ne se préoccupent nullement de

questions religieuses : ainsi, le mystérieux prédicateur de Pale Rider (figure

1 On trouvera, en annexe de cet article, une listedes titres originaux de tous les films mentionnés ici, accompagnés de leur titre français, quand il existe.

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reprise à Leone, chez qui Lee Van Cleef le chasseur de primes-vengeur se

promène accoutré en pasteur ?) ne tend pas précisément l’autre joue, laisse vite

tomber la Bible pour le revolver, et achève le méchant à bout portant. Sans

même parler de Sister Sarah, dont l’habit ne fait pas la nonne, tant s’en faut.

Il y aurait beaucoup à dire sur cette production abondante et très

hétérogène, et surtout fort inégale, ou le pire côtoie le meilleur, et le médiocre

l’excellent. Mais là n’est pas notre propos. On se contentera de remarquer que,

pour un réalisateur épris de réalisme, qui favorise les tournages en extérieurs (ce

qui dans le cas de The Eiger Sanction, tourné sur place, causa la mort d’un

alpiniste – le film étant, de surcroît, épouvantablement nul, oblige à se poser

certaines questions, et par ailleurs peut expliquer la fascination de Clint pour le

John Huston de White Hunter, Black Heart, autre égomaniaque friand de

tournages mouvementés), ses films sont souvent d’un manque de crédibilité

effarant – au point que Schickel lui-même se sent obligé de faire quelques

critiques dans ce sens, concernant en particulier des films tels que Dirty Harry

(où un tueur d’enfant est aussitôt remis en liberté pour « vice de forme » – il a

été un tantinet tabassé par Harry, pour la bonne cause évidemment) et The

Gauntlet (où un vieux car Greyhound et ses deux occupants traversent

impunément (et même au pas) une fusillade qui réduirait en charpie n’importe

quel véhicule, sans parler de son contenu).

Mais revenons à notre sujet. Les films concernés par notre propos

peuvent être sub-divisés en films de vengeance / réglement de comptes d’un

côté, films de revanche de l’autre. On notera sans surprise que généralement les

premiers (les plus nombreux) sont durs, les seconds plus légers. Le thème de la

vengeance intervient dès le premier film américain (Hang’em High) de la

nouvelle star montante Eastwood, après son début de consécration par la

magnifique et sardonique épopée (et par ailleurs le seul film, à ma connaissance,

qui montre la boucherie de la guerre de Sécession comme la première guerre

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moderne de l’Histoire) de Leone, Le bon, la brute et le truand (1966, 1968 pour

la sortie US). Or on notera que le thème de la vengeance est resté assez

marginal dans les premiers films de Leone (il n’est vraiment développé qu’en

1969 dans Il était une fois dans l’Ouest), et même dans Pour quelques dollars de

plus (1965) ne concerne pas le personnage d’Eastwood, mais celui de Lee Van

Cleef : ce qui confirme qu’il s’agit bien là d’un thème, et même d’une obsession,

typiquement eastwoodienne. Cette histoire de vengeance est une réflexion sur le

lynchage et la loi du Talion, où la victime se transforme en justicier. Outre

qu’elle met en place le personnage eastwoodien de presque tous ses westerns

ultérieurs, elle est peu ou prou le prototype, à quelques variantes près, de tous

ses films dans cette catégorie. Il serait superflu de les analyser un par un, aussi

se contentera-t-on de commenter ici les plus intéressants (sinon les plus

révélateurs).

The Beguiled, de Don Siegel, qui enferme un soldat nordiste blessé dans

un pensionnat de jeunes filles sudistes, est sans doute le plus sulfureux de la

série. Car il brouille tous les repères moraux : qui au juste ici est victime, du

soldat séducteur cynique et brutal ou de ces femmes et filles sexuellement

refoulées (ou dépravée : la directrice incestueuse) rancunières et castratrices (la

jambe du soldat coupée) ? Sans compter que le Don Juan malchanceux finit par

y laisser la vie (ce qui paraît-il causa l’échec commercial aux USA de cet

excellent film : un Clint Eastwood ne peut pas mourir à la fin – leçon que

retiendra la star, qui jamais plus ne succombera explicitement à l’écran). Play

Misty for Me (qui raconte une situation quelque peu similaire vécue par le

réalisateur-vedette, selon Schickel) passa plus ou moins inaperçu – ce qui

n’empêcha pas Hollywood de s’en inspirer bien plus tard et en catimini pour

Fatal Attraction (1987).

Dirty Harry (premier d’une série de quatre) ne fait que transposer dans la

police moderne le marginal des westerns aux méthodes expéditives, aux limites

de la légalité, et par ailleurs critique vertement les institutions américaines – The

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Gauntlet ne fera qu’enfoncer le clou, dénonçant la corruption et la collusion

entre police, justice et politique et, au passage, mêlant vengeance et revanche,

quand le flic naïf, mou, alcoolique et raté se transforme en justicier acharné et

fonceur, non sans une bonne dose de masochisme (que l’on retrouvera

sporadiquement jusqu’à Unforgiven). The Outlaw Josey Wales est ici

l’exception qui confirme la règle, prenant le contrepied des autres westerns

eastwoodiens : contre la vengeance, il choisit, sinon la réconciliation, au moins

la paix plus ou moins tacite (entre nordistes et sudistes, entre indiens et blancs).

Tightrope est une sorte d’envers de Dirty Harry (Eastwood décida de déplacer

l’action de San Francisco à la Nouvelle-Orléans, pour éviter tout amalgame) où,

pour la première fois, Eastwood introduit le thème du double, du doppelgänger

et de la nemesis : son flic, adepte du S&M, fréquente les prostituées et présente

une troublante ressemblance avec le criminel (qu’il a jadis fait condamner et qui

revient pour se venger) – In the Line of Fire reprendra ce thème d’une trouble

identité entre flic et criminel, y ajoutant le thème du remords et de la revanche :

le héros, agent de sécurité sur le retour, est hanté de n’avoir pu sauver Kennedy

à Dallas en 1963. De même que, dans A Perfect World, le shérif (joué par

Eastwood) veut sauver le criminel en cavale, qu’il regrette avoir jadis fait

enfermer en maison de correction.

Mais Unforgiven est sans conteste la perle du lot, le chef d’oeuvre

d’Eastwood (dont il relança justement la carrière chancelante à l’époque, et que,

souligne Schickel, Clint traita avec un soin exceptionnel, sur un tournage plus

long que de coutume). Ce western est en fait un anti-western, digne de Little

Big Man (1969) ou de Soldier Blue (1970), ses plus célèbres prédécesseurs –

Dances with Wolves de Kostner (1991) n’étant qu’une pâle copie sentimentale

du premier. Il faut dire que le scénario est d’une splendeur délirante (toute

l’histoire est enclenchée, pour paraphraser un autre film d’Eastwood, par « ce

qui ressemble à un pénis, en plus petit » – pour une fois le thème du mâle

américain pointe le bout de son – nez), la démythification de la légende de

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l’Ouest est aussi féroce que comique (les grands pistoleros d’antan n’étaient que

des abrutis sanguinaires et alcooliques qui tiraient dans le dos, ou se tiraient dans

le pied, ou auraient raté une vache dans un couloir tellement ils étaient nuls, à

moins que leur six-coups ne s’enraye ou ne leur explose dans la main, le fringant

English Bob n’est qu’une baudruche, et le héros improbable de l’histoire, tueur

repenti qui reprend du service, interrogé sur son glorieux passé, réplique qu’il ne

se souvient de rien : il n’a pas dessaoulé de toutes ces années-là). On y retrouve

le thème du double : le justicier dans le fond ne vaut pas mieux que le shérif

sadique joué par Gene Hackman (il passe le héros à tabac avant de torturer à

mort son ami et associé – tout ceci n’est pas sans rappeler One Eyed Jacks,

unique film de Brando sorti en 1962), d’ailleurs ancien collègue rangé des

saloons et reconverti en défenseur de l’ordre, et les prostituées vengeresses ne

sont pas sans rappeler les harpies de The Beguiled. Cerise sur le gâteau, Clint le

subversif s’offre même le luxe de mettre en cause l’Amérique elle-même :

lorsque son justicier-Terminator, juste avant de quitter la ville (pour filer à San

Francisco avec la prime, et s’y reconvertir dans l’affairisme), jure de revenir et

tuer tout le monde si l’on touche encore aux prostituées (un peu paradoxal tout

de même, au vu de leur profession), apparaît derrière lui, dans un éclair, le

drapeau américain – que voilà un noble défenseur de la veuve et de l’orphelin

(pourvu qu’ils aient de quoi payer), des faibles et des opprimés (pourvu qu’il

puisse massacrer à tout va) : toute ressemblance avec, etc..., surtout en cette

période. (Il est cependant à remarquer que l’apparition de la glorieuse bannière

étoilée fut coupée dans la version vidéo du film – il y a des limites à l’anti-

américanisme.) Parions par ailleurs qu’il s’agit là du dernier western

d’Eastwood.

Dans Absolute Powers, il s’en prend directement à la Maison-Blanche,

avec un président libidineux et sadique (joué à nouveau par Gene Hackman)

dont les services de sécurité tentent de mettre un meurtre sur le dos du héros,

sorte d’Arsène Lupin d’outre-Atlantique, qui ne vole que les riches (mais quel

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intérêt à voler les pauvres ?) sans laisser la moindre trace ni la moindre preuve,

une sorte d’anarchiste au grand coeur qui vole plus pour défier une société

hypocrite et pourrie que par lucre (ses vraies passions sont sa fille et le dessin).

Evidemment le cave se rebiffe, et devinez qui va payer ? Pour comble, la fille

du justicier cambrioleur épousera un honnête flic (car apparemment il en reste) !

Cela dit, on peut aussi voir dans ce film une confession autobiographique :

rapports difficiles de Clint à sa première fille (illégitime), le marginal-artiste –

cela signifie-t-il aussi qu’Eastwood la star avoue être un escroc ?

Du dernier polar, Blood Work, on ne parlera point, vu qu’on ne l’a point

vu.

Quelques remarques d’ordre général sur les films de vengeance, avant de

passer à ceux de revanche. Statistiquement, il semble clair qu’Eastwood est en

faveur de la loi du Talion, de la justice personnelle et expéditive (un seul film,

on l’a vu, rejette la vengeance). Ce qui a d’ailleurs déclenché une polémique et

fait traiter la star de « fasciste » (lors de la sortie de Dirty Harry tout

particulièrement). Cela fait-il pour autant d’Eastwood un fanatique de la

gâchette genre Charlton Heston, glorieux président de la National Rifle

Association, cruellement épinglé dans Bowling for Columbine (2002), qui valut

à son réalisateur, le journaliste Michael Moore, l’honneur d’être qualifié

d’« homme dangereux » par le porte-parole de la Maison-Blanche ? Comme le

chantait Brassens, nous vivons des temps bien singuliers. Si l’on compare les

films de vengeance d’Eastwood à, disons, la série des Death Wish avec Bronson,

on constate que le premier est, bien davantage qu’un réactionnaire, un malin –

qui frise un tantinet le démagogue. Ses justiciers sont tous, sans exception, des

porte-flambeau de la « majorité silencieuse ». Et Eastwood, contrairement a

Blair le mal nommé, a (presque) toujours eu du flair : il a touché juste quant à la

psyché américaine.

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Car les Américains ont viscéralement le goût du sang et de la vengeance

(la Bible et le fusil des pionniers). Non pas seulement parce que leur justice (qui

n’en a que le nom) est une véritable pétaudière (exemples : Al Capone qui

tomba pour... fraude fiscale, ou encore feu le fameux « Teflon Don », autre

mafioso intouchable – il n’y a d’ailleurs qu’aux Etats-Unis que la mafia pouvait

ainsi prospérer : c’est par essence une nation de truands et de rapaces (ainsi la

fameuse affaire des « sorcières de Salem n’était en réalité qu’une sordide

histoire d’accaparement de terres – déjà – dont la famille Proctor fit les frais), à

commencer par ses politiciens, « les meilleurs, » selon le comique américain

Will Roger, « que l’argent peut acheter. », et l’on sait comment sont financées

les campagnes électorales là-bas, et sur quel ton et à quel niveau de la ceinture

elles se situent), et de plus se fait à la tête (ou au portefeuille) du client – on en

voit régulièrement l’illustration dans la presse, le procès O.J. Simpson n’étant

que l’affaire récente la plus célèbre. Mais aussi parce que l’Américain, élu du

Tout-Puissant (on en est resté là-bas à l’ancien Testament), est par essence (tout

comme le Big Boss céleste) vindicatif et rancunier. C’est ainsi que désormais

les familles des victimes peuvent assister, en circuit télévisé fermé, à l’exécution

des assassins de leurs proches. De même, en tant que nation (élue), les Etats-

Unis sont comme les Romains (autres fameux impérialistes) : ils ne sont jamais

aussi féroces et impitoyables que lorsqu’ils ont eu chaud ou peur. On peut ainsi

supposer que la bombe atomique sur Nagasaki (qui n’était pas indispensable à la

reddition japonaise) était surtout destinée à venger l’affront de Pearl Harbor. De

même, l’attentat du 11 septembre a libéré tous les bas instincts du grand fauve

Amérique, et du fanatique Bush. Le vieux pistolero d’Unforgiven rend

admirablement compte de cette mentalité de psychopathe bigot (c’est pourquoi

le shérif y est un sadique qui le passe à tabac), et rend à César ce qui est à César.

En outre, typiquement, si les justiciers eastwoodiens ne sont pas des

anges, les vrais salauds, les ordures pures et dures, bref le Mal, sont toujours en

face – qu’il s’agisse de criminels (psychopathes, pervers ou fanatiques) ou des

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institutions (c’est souvent la même chose) – ce qui vise (voire suffit) à le

dédouaner. Soit le justicier commence par être victime, ce qui justifie sa soif de

vengeance, soit, s’il se trouve du côté de la loi, il pallie le laxisme et la

corruption du système : ainsi, rapporte Schickel, Siegel et Eastwood prirent

grand soin de montrer que « Dirty Harry » n’est ni raciste ni fasciste, qu’il est

intègre et fait honnêtement et courageusement, même si un peu brutalement

parfois, un sale boulot (d’où son surnom) dans une Amérique à la dérive – il est

même bon samaritain à l’occasion (il sauve les désespérés qui veulent se

suicider et aide les vieilles dames à traverser la rue), qu’il est contre la justice

expéditive quand ce sont les autres qui l’érigent en dogme (Magnum Force),

qu’il est même féministe sous ses grands airs machos (Sudden Impact). S’il est

cambrioleur (Absolute Powers), c’est en même temps un Robin des Bois version

américaine et un bon papa, bref un voleur fort sympathique dont même un flic

honnête n’a pas à rougir de devenir le gendre.

Or, par ailleurs, et paradoxalement à première vue, cet emblème de la

« majorité silencieuse » est foncièrement un solitaire, un individualiste et un

marginal. Mais le paradoxe n’est qu’apparent : car dans le fond, il incarne les

aspirations secrètes de cette « foule solitaire », et tout particulièrement celle de

river son clou au système (« beat the system »). Ce n’est pas un hasard si le

justicier eastwoodien s’en tire toujours sans une égratignure, ou presque : c’est

dans son genre le superman du pauvre, venu non de la planète Krypton mais

sorti de la foule, le type qui a su dire non, qui refuse toute compromission, dût-il

lui en coûter gros (The Gauntlet), le chevalier moderne, ambivalent certes,

revenu de tout, mais intègre, inflexible sur son code moral – et en ceci il est

l’héritier des « privés » de la grande époque, ceux de Hammett et de Chandler,

litre de whisky en moins, artillerie lourde en plus. Cette image, notons-le, a fini

par déteindre sur, jusqu’à se confondre avec, celui qui l’incarne : l’homme du

peuple parti de rien, le p’tit gars d’en bas qui a su réussir et s’imposer à tous ces

gros pontes arrogants et incapables, cyniques et pourris, tout en restant lui-même

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– ce que démontre le livre de Schickel. Et c’est bien pour cela, en raison de

cette projection infrangible du public, qu’Eastwood peut se permettre toutes les

invraisemblances dans ses scénarios (et Dieu sait s’il y en a), et même de

remettre en cause son image (Tightrope, Unforgiven, True Crime). En fait, il ne

prend guère de risques : étant une icône, une institution presque (le fameux « Go

on, make my day » de Harry immortalisé par un autre histrion, le président

Reagan), il sait très bien jusqu’où ne pas aller. Dans les limites qu’il s’est

judicieusement choisies, son public avalera tout ou presque (il l’a amplement

montré) – sauf peut-être qu’il joue un gay (« mâle américain » oblige) ou,

comme on l’a vu, un perdant (The Beguiled, Honkytonk Man).

Un dernier point : on note une nette évolution, lente mais sûre, dans les

films de vengeance. Il semble qu’avec les années, l’icône eastwoodienne se

calme quelque peu, que le pâle justicier silencieux et énigmatique de l’Ouest

(qui a désormais troqué son cheval contre un hélicoptère) et « Dirty Harry »

cèdent la place à des figures plus sereines, en tout cas moins violentes. Effets du

vieillissement ? Certes, Clint a toujours su fort habilement adapter ses rôles à

son âge. Mais parions que l’avènement du « politiquement correct » de l’ère

Clinton (fellation peut-être exceptée) y est aussi pour quelque chose. Sans

compter que, fortune faite, gloire acquise et Oscars en poche, le révolté n’a plus

tellement de raisons de cracher sur le système : ce serait désormais tout

bonnement cracher dans la soupe.

Venons-en à présent aux films de revanche, autrement dit de vengeance

mode mineur. D’où d’ailleurs bien souvent un ton plus léger, qui tire vers la

comédie. En outre, là où les films de vengeance mettaient parfois en jeu un

aspect revanchard, ceux de revanche peuvent à leur tour inclure une vengeance.

Comme précédemment, on se contentera ici de brièvement commenter les

oeuvres concernées. Le premier est Coogan’s Bluff, une comédie justement : un

shérif de province amené à se frotter aux superflics condescendants de New

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York va leur en remontrer, et leur faire baisser pavillon – à malin, malin et demi.

Dans Two Mules for Sister Sarah, autre comédie, c’est encore plus simple : une

nonne se place sous la protection du beau Clint afin de traverser l’Ouest

sauvage, pour finalement se révéler être une prostituée – en guise de revanche, il

l’épousera (cela veut-il dire qu’elle ne va pas s’amuser tous les jours, ni même

toutes les nuits ?). Dans Thunderbolt and Lightfoot, on trouve à nouveau le

thème du braqueur vétéran au grand coeur, mais aussi le thème de l’initiation de

mentor à disciple (que l’on retrouvera dans The Rookie et Heartbreak Ridge).

Ici la revanche consiste à récupérer un magot introuvable, et à compenser cet

échec par un autre casse (spectaculaire bien entendu) – mais cela finit mal, le

vieux solitaire Thunderbolt perd son seul ami, le jeune Lightfoot.

Dans Every Which Way but Loose et sa suite, Any Which Way You Can,

comédies libertaires, on a à nouveau affaire à un marginal flanqué d’un orang-

outang (c‘est en fait lui le meilleur acteur et la vedette du film) en butte aux

tracasseries policières et qui s’arrange pour river leur clou à ces abrutis

vindicatifs et bornés. Par ailleurs, dédaigné dans le premier volet par la

chanteuse de country music de son coeur, il la conquerra dans le second. Escape

from Alcatraz (basé sur un fait authentique et tourné par Siegel dans la fameuse

prison qui accueillit, entre autres, Al Capone soi-même) est à la fois un

documentaire sur la tristesse carcérale et une histoire de revanche éclatante : les

bagnards évadés ne furent jamais retrouvés. A noter que quelques années plus

tard le même thème inspira un autre film, avec Tim Robbins et Morgan

Freeman, The Shankshaw Redemption.

Avec Bronco Billy et Honkytonk Man (parmi les préférés, paraît-il, de leur

réalisateur), on passe du doux-dingue-amer au sombre. Bronco Billy McCoy,

ancien vendeur de chaussures, est un grand nostalgique du Far-West (version

édulcorée), qui a monté un cirque itinérant un tantinet minable et menacé (par

les autorités une fois de plus) de sombrer, mais qui sera sauvé par une jeune

héritière de New York, lasse du monde superficiel des riches, lorsqu’elle

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découvrira la vraie vie on the road aux côtés du beau Clint. Le film est un

mélange de nostalgie, d’humour et de tendresse envers ces attardés – n’empêche

que Bronco Billy a pris sa revanche sur un monde moderne qui lamine

l’individu. Honkytonk Man est un autre road movie situé durant la Dépression et

qui raconte la fin d’un chanteur de country raté, alcoolique et coureur, qui a

gâché sa vie et, rongé de tuberculose, décide de racheter ce gâchis par une

audition au Grand Ole Opry de Nashville, pour une chanson qu’il vient de

composer. L’audition sera interrompue par une sinistre quinte de toux et le

chanteur Stovall mourra peu après en enregistrant son premier disque, mais la

chanson (qui donne son titre au film) deviendra un hit posthume : Stovall aura

finalement eu sa revanche. A noter que le film fut là encore dédaigné par les

Américains (le beau Clint en tubard agonisant – anathème !), par contre il

contribua à asseoir enfin la réputation d’Eastwood en Europe.

Firefox mérite une mention spéciale, car c’est à la fois un film raté, fait de

bric et de broc (il plagie aussi bien Apocalypse Now que Star Wars que – fort

mal – nombre de films d’espionnage) et une idée de base assez originale : pour

une fois, ce sont les Soviétiques qui ont un super-avion d’avance (le « Firefox »

éponyme) sur les Américains, et ces derniers qui décident de le voler grâce à un

ancien as du Vietnam, pilote traumatisé mais qui (comme par hasard) parle

également le russe à la perfection. L’espion se faufile (sans trop de mal, il faut

dire – mais que fait le KGB ? Apparemment aussi peu que le FBI) en Russie

d’abord, dans la base secrète ensuite, dans le hangar du super-avion enfin, qu’il

vole après avoir assommé le pilote soviétique (un blond décoloré à belle tête de

brute qui ressemble comme un frère au boxeur russe Drago du Rocky IV de

1985), lequel n’apprécie pas et se lance à la poursuite du vicieux impérialiste

dans un second « Firefox » – match aérien qui sera évidemment remporté par le

beau Clint (à qui la combinaison de pilote va comme un gant, il faut bien le

dire).

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Heartbreak Ridge (autre film plus ou moins raté, qui semble par ailleurs

annoncer le Gardens of Stone de Coppola d’un an plus tard qui, soit dit en

passant, est encore pire) est l’histoire d’un vieux sergent-instructeur-dur-mais-

juste (Full Metal Jacket n’est pas loin), rescapé prestigieux de l’assaut meurtrier

de la colline éponyme au Vietnam (défaite humiliante dont il traîne le remords)

et par ailleurs dépassé par la libération de la femme (et surtout de la sienne), qui

prend en main un groupe de recrues récalcitrantes et, scrongneugneu, leur

montre de quel bois il se chauffe, finit par forcer leur respect et à en faire des

hommes, et même des marines, avec en apothéose l’invasion de Grenade (là,

tout de même, c’était à la portée des boys– contre Andorre ou Monaco, par

contre, il n’est pas sûr qu’ils gagneraient si facilement, sans parler de l’Irak). Le

sergent en reviendra ayant lavé l’humiliation passée, récupérera sa femme qui

fond en revoyant son héros et néanmoins époux en grand uniforme de parade, et

prendra une retraite bien méritée – belle revanche sur fond de drapeau et

d’hymne américains. A part ça, on se sait pas trop où le film veut en venir au

juste, à part exhiber abondamment le torse athlétique du viril Clint

(curieusement, il ne montre jamais ses jambes : ce grand échalas aurait-il des

mollets de coq ?).

White Hunter, Black Heart est quant à lui un film fort ambigu, basé sur le

roman à clefs de Peter Viertel, scénariste qui accompagna John Huston en

Afrique pour le tournage d’African Queen – et de ce séjour mouvementé tira ce

roman pas particulièrement tendre à l’égard de Huston (qui cependant, révèle

Schickel, en suggéra la fin). Là encore, on se demande a priori pourquoi

Eastwood a éprouvé le besoin de faire ce film (il est vrai qu’il aime, toujours

selon Schickel, les tournages en pleine nature – dans ce cas, effectivement, il

était servi). Tout d’abord, on s’aperçoit qu’il a nettement adouci le portrait au

vitriol brossé par Viertel, supprimant certaines scènes mais par contre en

rajoutant une qui nous montre Wilson / Huston en anti-antisémite virulent, et

que dans le film, contrairement au livre, ce dernier ne tue pas « son » éléphant

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(côté écolo de Clint ?). De sorte que le résultat n’est ni chair ni poisson, et que

ce qui était explicitement règlement de comptes chez Viertel devient ici timide

égratigure, au pire tourniquet fascination / répulsion. S’il s’agit de revanche,

elle est bien édulcorée.

Avec In the Line of Fire et A Perfect World, on revient au thème du

remords : on l’a dit plus haut, le vieil agent de sécurité du premier culpabilise de

n’avoir su protéger Kennedy à Dallas, le shérif du second d’avoir fait interner

autrefois le criminel en cavale. Et à la figure du doppelgânger : le psychopathe

machiavellique du premier (un ancien agent chassé de la CIA qui veut se venger

en tuant le président) se présente ouvertement comme le double du personnage

d’Eastwood (ils sont tous deux de la maison, après tout), tandis que la relation

fraternelle entre l’évadé et l’enfant qu’il a pris en otage suggère des sentiments

semblables chez le shérif vieillissant, qui du coup cherche à « réparer » son acte

passé en sauvant la vie du criminel – qui sera abattu par un agent fédéral obsédé

de la gâchette, et dont du coup la mâchoire et les testicules pâtiront sévèrement.

The Bridges of Madison County, dont l’essentiel (l’aventure amoureuse

sans lendemain entre le photographe déraciné et la mère de famille campagnarde

transplantée d’Italie) est un flashback enchâssé dans le présent, montre une

revanche (posthume) des sentiments sur le devoir, de la liberté sur le

puritanisme : la révélation posthume par l’épouse infidèle à ses enfants, et son

voeu de dispersion de ses cendres depuis le pont (des premiers et derniers

soupirs, si l’on ose dire) est une sorte de compensation symbolique à son

sacrifice d’alors – et notons par ailleurs que ce sacrifice douloureux, consenti au

nom du devoir certes, le fut aussi afin d’éviter le remords permanent d’une

trahison. La défunte aura gain de cause – et en même temps tout l’épisode

servira de catharsis libératrice à ses enfants. True Crime revient au polar : un

journaliste vieillissant et peu reluisant décide de prouver l’innocence d’un jeune

noir (comme par hasard) enfermé dans le couloir de la mort, attendant son

exécution prochaine, et suspense oblige, le journaliste prend son temps.

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Eastwood (toujours dans le vent) s’attaque à la justice (et surtout son injustice),

aux procès expéditifs dont jouissent les noirs aux Etats-Unis, voire, qui sait, à la

peine de mort (dont G. W. Bush est un maniaque) – nouvelle tentative de

revanche d’un raté, sur le mode altruiste cette fois, et au nom de la Vérité et de

la dignité humaine.

Space Cowboys est lui aussi l’histoire d’une revanche compensatoire,

celle d’une brochette d’ex-pilotes d’essais vieillissants de la NASA qui, dans

leur jeune temps, furent floués d’un voyage dans l’espace (leur rêve, leur

obsession) par la suppression du programme dont ils faisaient partie. Justice

poétique et ironique : on a désormais besoin de leurs services pour empêcher un

vieux satellite soviétique de s’écraser sur terre (le syndrome MIR ? L’influence

du visionnaire Paco Rabanne, toujours au parfum de tout ?), car eux seuls

maîtrisent encore cette technologie dépassée. Le chef de la bande (le viril et

rebelle Clint, évidemment) en profite pour poser ses conditions : ce seront eux

qui effectueront la mission, sinon rien. Les pontes de la NASA sont bien obligés

de céder (« beat the system » là encore). Et voilà nos papys à l’entraînement,

fraudant aux tests comme des potaches et draguant les fringuantes infirmières,

pour enfin embarquer sur une navette spatiale, et roulez carrosse. Sur le

satellite, (mauvaise) surprise : il est bourré jusqu’à la gueule de missiles

nucléaires, ce que ces faux-jetons de Russes avaient bien entendu omis de

préciser. Plus question donc de le laisser dégringoler sur terre. Péripéties,

prétendu suspense : la navette est endommagée par le satellite, qui quant à lui

doit être dirigé vers la lune pour s’y écraser (après le coca dans l’espace, les

détritus sur la lune – c’est du propre). L’un des papys se sacrifiera avec le

satellite (mais, fort opportunément, il se sait atteint d’un cancer en phase

terminale), et le vaillant Clint ramènera à bon port, contre vents et marées

cosmiques si l’on peut dire, l’épave de la navette. Par comparaison, On a

marché sur la lune de Hergé était d’un réalisme insoutenable. Car le film est

tellement bourré de clichés et autres poncifs qu’il en devient franchement kitsch.

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N’empêche – si Clint avait été à bord, on peut être sûr qu’il ne serait rien arrivé

aux deux navettes qui sont bêtement parties en fumée avec leurs occupant(e)s.

Qu’attend donc la NASA pour l’engager comme mascotte et porte-bonheur pour

chacun de ses vols ? Après saint Christophe, saint Clint – d’autant que l’initiale

est la même.

Quant au petit dernier, un polar sur fond de transplantation cardiaque (ou

l’inverse), on ne l’a pas vu, et ça vaut peut-être mieux. Car il semblerait que le

dur aux mâchoires d’acier et aux veines saillantes (sur la couverture de la

biographie de Schickel, il est encore plus effrayant que le Terminator) se

rammollisse avec l’âge d’être grand-père, jusqu’à en devenir larmoyant. Tout

ça finira mal.

Quelques remarques après ce nouveau tour d’horizon. Les films de

revanche sont, bien entendu, nettement moins violents que les films de

vengeance, et par ailleurs celle-ci, quand elle y est présente, se trouve du côté du

criminel (même l’évadé de A Perfect World veut massacrer une famille noire qui

l’avait accueilli, au nom de sa propre enfance gâchée). Et d’ailleurs, sauf dans

les comédies, le méchant ne fait pas de vieux os – ce qui tend à subrepticement

ré-introduire la loi du Talion. Par ailleurs, là encore Eastwood a su

généralement flatter l’ego américain : sur une « terre d’opportunités » (enfin, ça

dépend pour qui), obsédée de « réussite » (matérielle et sociale, il va de soi), de

« démocratie » et de « libertés individuelles » (des leurres bien évidemment), où

chacun a sa chance de devenir président (une vaste blague, mais passons), il y a

toujours une occasion de se rattraper ou de se racheter – contrairement à ce

qu’en pensait Marx, l’Histoire repasse les plats (en Amérique en tout cas), Dieu

et Mammon sont indulgents pour leurs élus (sauf les losers invétérés, là encore,

qui n’en font pas partie – d’où, précisément l’échec cuisant de The Beguiled,

Bronco Billy et Honkytonk Man), dynamisme, optimisme, et surtout American

Dream (qui tiendrait plutôt du cauchemar kafkaïen-kubrickien-fellinien)

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obligent. Mais surtout, on trouve dans certains de ces films plus qu’ailleurs, on

l’a vu, d’autres thèmes significatifs : la culpabilité, le double, la relation père-

fils, et même le féminisme. Autrement dit, le poids du passé, la problématique

du moi face au Mal (or on sait que les Américains, dès les Pères Fondateurs, ont

toujours projeté le Mal sur l’Autre, et c’est bien pourquoi ils ne peuvent se

passer d’un ennemi – ce n’est certes pas ce vertueux G. W. Bush qui prétendra

le contraire), le poids des ans et le désir plus ou moins avoué de paternité (Clint

a une demi-douzaine de rejetons, légitimes et autres, dont il a fait tourner

certains dans ses oeuvres), ainsi que le malaise face à l’Eve future : Eastwood

sait aussi être de son temps. Par ailleurs, la revanche, étant plus acceptable que

la vengeance, permet sans doute à Eastwood de plus ouvertement manifester sa

hargne viscérale vis-à-vis des institutions – et de leur faire une série de pieds-de-

nez (pour ne pas dire de bras d’honneur), ce qui sans doute intéresserait un

psychiatre au plus haut point (à ce sujet, fort intéressante est la révélation de

Schickel selon laquelle la brève incursion politique de Clint comme maire de

Carmel eut pour motif une rancune : la mairie de la ville lui avait refusé un

permis de rénover une bâtisse qu’il y avait achetée, et son élection fut sa

revanche). Clint serait-il vindicatif, et de plus un tantinet mégalomane ? Bref,

un Américain, un pur et dur, dans l’âme ?

Car enfin, que lui a donc fait le système (à part la mairesse de Carmel) ?

Certes, il a dû lutter avec l’ineptie des studios pendant pas mal d’années, mais il

s’en est nettement mieux tiré que bien d’autres. Et, aujourd’hui qu’il est devenu

une icône tant du bon peuple que de l’Establishment, on peut se demander si

cette rébellion n’est pas désormais d’ordre purement commercial, la griffe

Eastwood (si l’on ose dire) en quelque sorte – bref, il faut bien servir la soupe au

public affamé. Egalement, ces films révèlent aussi un certain passéisme chez

lui, une nostalgie du « bon vieux temps » (dont tout le monde sait qu’il n’était

pas si bon que ça – que la République était belle sous l’Empire, comme on dit

chez nous). Bref, ce bon vieux Clint semble virer sentimental sur ses vieux

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jours, et desserrer quelque peu les mâchoires (c’est fatiguant, à la longue, de les

serrer sans cesse) – ce qui ne l’empêche pas de garder son oeil bleu acier sur le

tiroir-caisse.

On pourrait aller encore plus loin, et suggérer à la limite une

métaphysique de la chose. Car, vengeance ou revanche, il s’agit de toute façon

d’une dette à recouvrer (rappelons au passage que le should anglais, modal de

l’obligation idéale, vient, ainsi que guilt, de l’allemand Schuld, dont le sens

moderne de « culpabilité » ne doit pas faire oublier celui, originel, de « dette »).

Or cette dette est d’ordre ontologique, elle relève d’un défaut d’être ou manque à

être, bref d’une aliénation (dans tous les sens du terme), à laquelle seul le

règlement (de compte) pourra (théoriquement) mettre fin, en rétablissant l’être

entamé dans sa plénitude et son intégrité. Et c’est aussi pourquoi le vengeur /

revanchard est par essence un solitaire : cette dette qu’il lui faut recouvrer

auprès d’un autre (cet autre fût-il le monde entier) est aussi dette à régler vis-à-

vis de soi, ou d’un moi idéal, autrement dit plein et intègre – comme quoi, dans

ce genre d’affaire (très personnelle), on ne trouve que des débiteurs. Ce qui en

outre expliquerait pourquoi un film comme The Eiger Sanction ne tient pas la

route, car son protagoniste (universitaire-esthète cum tueur à gages, même si ces

derniers lui servent à acheter des tableaux de maîtres) n’est guère qu’un

mercenaire de la vengeance, une sorte de charognard high brow qui de surcroît

se trompe de proies : erreur sur toute la ligne.

Le compte réglé (la vengeance accomplie, la revanche une fois prise)

suffit-il à rétablir l’intégrité de soi, à effacer la perte, combler le manque à être ?

Rien n’est moins sûr : à preuve, ce goût amer, cette vacuité que laisse

généralement la fin des films de vengeance, ce qui suggère qu’au contraire cette

dernière n’a rien réglé du tout – quant à la comédie, chacun sait bien que c’est

du cinéma, autrement dit de la triche. Sans compter que se re-présente

immanquablement une nouvelle histoire de vengeance ou de revanche (mais

toujours la même, dans le fond), à écrire, raconter, filmer, re-présenter. En

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somme, vengeance ou revanche, il s’agit là d’une vocation, d’une mission, d’un

destin, vertige obsessionnel auquel on n’échappe pas – et c’est sans doute la

grande force d’Eastwood que de l’avoir compris. Alors, le vengeur comme

figure mythique et sombre, à la fois idéale et tragique, ambiguë voire douteuse,

au service de la cité moderne, et plus précisément du spectateur moyen (que

nous sommes tous, bon gré mal gré, de nos existences aliénées, ne serait-ce que

par leur inexpiable médiocrité), un pourvoyeur à la chaîne de catharsis du

pauvre ? Sans doute, si l’on s’en tient au destin global du cinéma d’Eastwood –

et même (et surtout) en regard de ses quelques faux-pas (d’un point de vue

commercial) les plus révélateurs, tels The Beguiled, Bronco Billy et Honkytonk

Man, flamboyants fiascos où le revanchard ressemble un peu trop au loser

intégral pour satisfaire le bon peuple avide de happy endings, et qui ne goûte

guère qu’on lui perturbe ses valeurs en égratignant ses idoles. Ce qui du coup

jetterait une lumière des plus intéressantes sur la psyché du bipède moderne,

sous-variété américaine plus particulièrement.

Cela dit, si vengeance et revanche sont les deux mamelles du cinéma

eastwoodien, il est loin de se limiter à cela – on y trouve même, à l’occasion, les

problèmes du mâle américain moderne. Il est évident que Clint, répétons-le, n’a

pas son pareil pour flairer l’air du temps et surfer sur la vague, quitte à prendre

le train en marche : on le constate dans nombre de ses films (et,

significativement peut-être, pas forcément les meilleurs ni les plus personnels),

ainsi Firefox (ère Star Wars, le film et le parapluie anti-missiles cher à Ronnie),

Heartbreak Ridge (ère post-Vietnam), White Hunter, Black Heart (tiers-monde

et écologie) et Absolute Powers (qui enchérit sur toute une série de films

inspirés par les frasques de Bill Clinton), pour ne mentionner que ces trois-là.

Quant à Space Cowboys, on peut se demander s’il n’a pas été sponsorisé par la

NASA (qui en tout cas y a largement collaboré) dans le but de redorer une

image sérieusement ternie. Ce qui ne lui a pas porté bonheur pour autant.

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Mais il y a, aussi bien, les projets non aboutis – et parmi eux, une

superproduction avortée (là encore pour des questions d’image de la star, et d’un

regain de puritanisme avec l’élection de Carter-la-Vertu à la Maison-Blanche)

sur le coup de main de Bob Denard, le « loup de l’océan Indien », aux Comores

à la fin des années soixante-dix : ce qui tendrait, vu les paramètres du cinéma

eastwoodien, à jeter une lumière trouble sur les entreprises « humanitaires » de

notre fringant Othello hexagonal.

Tout cela fait-il d’Eastwood un « auteur » (comme disaient les jeunes

loups de la vieille Nouvelle Vague, et comme continue de le proclamer Bertrand

Tavernier, grand fan de Clint) ? Si oui, et étant admis que l’incompréhension

du public et / ou de la critique n’est pas l’unique critère, alors un auteur

occasionnel. Car il y a à prendre et à laisser dans son « oeuvre ». A part

d’incontestables réussites, dans les deux registres considérés ici, on peut lui

reprocher nombres de ratages, de scénarios ineptes, invraisemblables ou

outrageusement complaisants (sans parler des nombreux « emprunts » à d’autres

films), et surtout un registre passablement limité, tant comme acteur que comme

metteur en scène. Ce qui l’a mené, inévitablement, à (habilement d’ailleurs)

cultiver son image, voire la figer – pour ne pas dire la statufier, si ce n’est la

scléroser. Car il est faux d’affirmer, comme le fait Schickel, qu’Eastwood a eu

l’audace de remettre en question son image : s’il l’a fait, c’est bien timidement,

et seulement une fois sa statue bien boulonnée. De même pour la subversion

dans ses films : il n’a guère innové en ce domaine. Et surtout, en gardant

toujours l’oeil fixé sur le box-office, ce qui par définition limite les prises de

risque. En témoignent, on l’a vu, The Beguiled et Honkytonk Man : malmener

sa propre icône peut coûter cher, et Eastwood a généralement bien reçu le

message. Un de ses collègues a, paraît-il, dit de lui, que si le génie se mesure au

compte en banque, alors ce type est un génie : malheureusement, le compte en

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banque n’est pas exactement le mètre-étalon pour ce genre de denrée, par

ailleurs fort subjective.

Pour conclure, et éviter tout malentendu. D’abord, personne n’est génial

tous les jours. Ensuite, même un mauvais Eastwood vaut largement la

production moyenne hollywoodienne. Par ailleurs, il est certain qu’il y a une

« touche Eastwood » qui fait qu’on lui pardonne bien des choses, et peut-être,

oui, fait de lui un « auteur », après tout. Enfin, qu’on aurait tort de bouder son

plaisir : étant moi-même fan de ses films, même déçu je me dis toujours, « Sacré

Clint ! Allez, on t’aime bien quand même. », et j’attends le suivant (qui, selon le

vol des caméras dans le ciel et les entrailles fumantes des méchants, devrait

s’appeler Mystic River – encore une histoire de vengeance(s), sur fond

pédophiliaque cette fois – et être présenté à Cannes). Sans compter que –

véritable scandale – c’est le genre d’individu, si poli, si charmant, si discret, si

modeste, qu’il est tout bonnement impossible, le bougre, de lui en vouloir : ce

qui est sans conteste le comble de la duplicité, en tout cas de la vacherie, de sa

part. Well, Clint – many happy returns, and a few more (good) movies, please.

*Films de / avec Clint Eastwood traités dans le présent article   :

Hang’em High / Pendez-les haut et courtCoogan’s Bluff / Un shérif à New YorkTwo Mules for Sister Sarah / Sierra torride (!)The Beguiled / Les proiesPlay Misty for Me / Un frisson dans la nuitDirty Harry / L’inspecteur HarryJoe Kidd / idemHigh Plains Drifter / L’homme des hautes plainesMagnum Force / idemThunderbolt and Lightfoot / Le canardeur (!)The Eiger Sanction / La sanctionThe Outlaw Josey Wales / Josey Wales, hors-la-loiThe Enforcer / L’inspecteur ne renonce jamais

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The Gauntlet / L’épreuve de forceEvery Which Way but Loose / Doux, dur et dingueEscape from Alcatraz / L’évadé d’AlcatrazAny Which Way You Can / Ca va cogner (!)Firefox / idemHonkytonk Man / Honky Tonk ManSudden Impact / Le retour de l’inspecteur HarryTightrope / La corde raidePale Rider / idemHeartbreak Ridge / Le maître de guerreThe Dead Pool / La dernière cibleWhite Hunter, Black Heart / Chasseur blanc, coeur noirThe Rookie / La relèveUnforgiven / ImpitoyableIn the Line of Fire / Dans la ligne de mireA Perfect World / Un monde parfaitThe Bridges of Madison County / Sur la route de MadisonTrue Crime / Jugé coupableSpace Cowboys / idem

Films de ou non, avec ou sans, Cint Eastwood non traités ici   :

Per un pugno di dollari / For a Fistful of dollars / Pour une poignée de dollars (Sergio Leone, 1964 – 68 USA)

Le Streghe / Les sorcières, sketch (Vittorio de Sica, 1965)Per qualche dollari in piu / For a Few Dollars More / Et pour quelques

dollars de plus (Sergio Leone, 1965 – 67 USA)Il buono, il bruto e il cattivo / The Good, the Bad and the Ugly / Le bon, la

brute et le truand (Sergio Leone, 1966 – 1968 USA)Where Eagles Dare / Quand les aigles attaquent (Brian G. Hutton, 1968)Paint Your Wagon / La kermesse de l’Ouest (Joshua Logan, 1969)Kelly’s Heroes / De l’or pour les braves (Brian G. Hutton, 1970)Breezy (Clint Eastwood, 1973)City Heat / Haut les flingues (!) (Richard Benjamin, 1984)Vanessa in the Garden (Clint Eastwood, 1985)Pink Cadillac (Buddy Van Horn, 1989)Bird / idem (Clint Eastwood, 1988)Midnight in the Garden of Good and Evil / Minuit dans le jardin du bien

et du mal (Clint Eastwood, 1997)Blood Work / Créance de sang (Clint Eastwood, 2002)Mystic River / idem (Clint Eastwood, 2003)

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Autres films mentionnés   :

African Queen / La reine africaine (John Huston, 1952)One Eyed Jacks / La vengeance aux deux visages (Marlon Brando, 1962)C’era una volta il West / Once upon a Time in the West / Il était une fois

dans l’ouest (Sergio Leone, 1969)Little Big Man / idem (Arthur Penn, 1969)Soldier Blue / Le soldat bleu (Ralph Nelson, 1970)Star Wars / La guerre des étoiles (George Lucas, 1977)Apocalypse Now / idem (Francis Ford Coppola, 1979)Rocky IV / idem (Sylvester Stallone, 1985)Gardens of Stone / Jardins de pierre (Francis Ford Coppola, 1986)Fatal Attraction / Liaison fatale (Adrian Lyne, 1987)Full Metal Jacket / idem (Stanley Kubrick, 1987)The Shawshank Redemption / Les évadés (Frank Darabont, 1990)Dances with Wolves / Danse avec les loups (Kevin Costner, 1991)Bowling for Columbine / idem (Michael More, 2002)

D. GAUER, MCF,Université de la Réunion(Mars 2003)