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1 LACAN LeDésir 1958-59

Le Désir

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Séminaire VI, edited by J.-A. Miller.

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LACAN

LeDsir1958-591

Ce document de travail a pour sources principales : - Le dsir et son interprtation, sur le site Gaogoa (au format texte). - Le dsir et son interprtation, sur le site E.L.P. (stnotypie au format image). - Le dsir et son interprtation : trois fascicules au format thse universitaire . Les rfrences bibliographiques privilgient les ditions les plus rcentes. Les schmas sont refaits. N.B. : - Ce qui sinscrit entre crochets droits [ ] nest pas de Jacques LACAN. Pour que saffiche lalgbre lacanienne , il faut la police de caractres spcifique, dite Lacan , disponible sur la page daccueil du superbe site de Pascal GAONACH : Gaogoa.-

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TABLE DES SANCES

Leon 1 Leon 2 Leon 3 Leon 4 Leon 5 Leon 6 Leon Leon Leon Leon 7 8 9 10

12 Novembre 58 19 Novembre 58 26 Novembre 58 03 Dcembre 58 10 Dcembre 58 17 Dcembre 58 07 Janvier 59 14 Janvier 59 21 Janvier 59 28 Janvier 59 04 Fvrier 59 11 Fvrier 59 04 Mars 59 11 Mars 59 18 Mars 59

Leon Leon Leon Leon

16 17 18 19

08 Avril 59 15 Avril 59 22 Avril 59 29 Avril 59 13 Mai 59 20 Mai 59 27 Mai 59 03 Juin 59 10 Juin 59 17 Juin 59 24 Juin 59 01 Juillet 59

HAMLET (4) HAMLET (5) HAMLET (6) HAMLET (7)

Leon 20 Leon 21 Leon 22Ella SHARPE (1) Ella SHARPE (2) Ella SHARPE (3) Ella SHARPE (4) Ella SHARPE (5) HAMLET (1) HAMLET (2) HAMLET (3)

HAMLET (8)

Leon Leon Leon Leon

23 24 25 26

Leon 11 Leon 12 Leon 13 Leon 14 Leon 15

Leon 27

Sigmund Freud : ber die Allgemeinste Erniedrigung des Liebeslebens (1912) Sigmund Freud : Das Unbewute (1915) Ella Sharpe : Dream analysis, Chapter V, Analysis of a single dream Ernest Jones : The dipus-Complex as an explanation of Hamlet's mystery William Shakespeare : Hamlet William Shakespeare : La nuit des rois.

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12 Novembre 1958

Table des sances

Nous allons parler cette anne du dsir et de son interprtation. Une analyse est une thrapeutique, dit-on, disons un traitement, un traitement psychique qui porte divers niveaux du psychisme sur : - d'abord a a t le premier objet scientifique de son exprience ce que nous appellerons les phnomnes marginaux ou rsiduels, le rve, les lapsus, le trait d'esprit, j'y ai insist l'anne dernire, - et sur des symptmes d'autre part si nous entrons dans cet aspect curatif du traitement sur des symptmes au sens large, pour autant qu'ils se manifestent dans le sujet par des inhibitions, qu'elles sont constitues en symptmes et soutenues par ces symptmes. - D'autre part, ce traitement modificateur de structures, de ces structures qui s'appellent nvroses ou neuro-psychoses que FREUD a d'abord en ralit structures et qualifies comme neuro-psychoses de dfense. La psychanalyse, intervient pour traiter divers niveaux avec ces diverses ralits phnomnales en tant qu'elles mettent en jeu le dsir. C'est nommment sous cette rubrique du dsir comme significatifs du dsir que les phnomnes que j'ai appels tout l'heure rsiduels, marginaux, ont t d'abord apprhends par FREUD, dans les symptmes que nous voyons dcrits d'un bout l'autre de la pense de FREUD.4

C'est l'intervention de l'angoisse, si nous en faisons le point cl de la dtermination des symptmes, mais pour autant que telle ou telle activit qui va entrer dans le jeu des symptmes est rotise, disons mieux : c'est--dire prise dans le mcanisme du dsir. Enfin que signifie mme le terme de dfense propos des neuro-psychoses, si ce n'est dfense - contre quoi ? contre quelque chose qui n'est pas encore autre chose que le dsir. Et pourtant cette thorie analytique au centre de laquelle il est suffisant d'indiquer que la notion de libido se situe, qui n'est point autre chose que l'nergie psychique du dsir, c'est quelque chose - s'il s'agit d'nergie - dans quoi je l'ai dj indiqu en passant, rappelezvous autrefois la mtaphore de l'usine certaines conjonctions du symbolique et du rel sont ncessaires pour que mme subsiste la notion d'nergie. Mais je ne veux pas ici, ni m'arrter ni m'appesantir cette thorie analytique donc repose tout entire sur cette notion de libido, sur l'nergie du dsir. Voici que depuis quelque temps, nous la voyons de plus en plus oriente vers quelque chose que ceux-l mmes qui soutiennent cette nouvelle orientation, articulent eux-mmes trs consciemment au moins pour les plus conscients d'entre eux ayant emprunt FAIRBAIRN, parce qu'il l'crit plusieurs reprises, parce qu'il ne cesse d'articuler ni de l'crire, nommment dans le recueil qui s'appelle Psychoanalytic Studies of the Personality que la thorie moderne de l'analyse a chang quelque chose l'axe que lui avait donn d'abord FREUD en faisant ou en considrant que la libido n'est plus pour nous pleasure-seeking comme s'exprime FAIRBAIRN, qu'elle est object-seeking . C'est dire que Monsieur FAIRBAIRN est le reprsentant le plus typique de cette tendance moderne.5

Ce que signifie cette tendance orientant la fonction de la libido en fonction d'un objet qui lui serait en quelque sorte prdestin, c'est quelque chose quoi nous avions dj fait allusion cent fois, et dont je vous ai montr sous mille formes les incidences dans la technique et dans la thorie analytique, avec ce que j'ai cru plusieurs reprises pouvoir vous y dsigner comme entranant des dviations pratiques, quelques unes non sans incidences dangereuses. L'importance de ce que je veux vous signaler pour vous faire aborder aujourd'hui le problme, c'est en somme ce voilement du mot mme dsir qui apparat dans toute la manipulation de l'exprience analytique, et en quelque sorte quelle impression, je ne dirais pas de renouvellement, je dirais de dpaysement, nous produisons le rintroduire. Je veux dire qu'au lieu de parler de libido ou d'objet gnital, si nous parlons de dsir gnital, il nous apparatra peuttre tout de suite beaucoup plus difficile de considrer comme allant de soi que le dsir gnital et sa maturation impliquent par soi tout seul cette sorte de possibilit ou d'ouverture, ou de plnitude de ralisation sur l'amour dont il semble que ce soit devenu ainsi doctrinal d'une certaine perspective de la maturation de la libido. Tendance et ralisation et implication quant la maturation de la libido qui paraissent tout de mme d'autant plus surprenantes qu'elles se produisent au sein d'une doctrine qui a t prcisment la premire non seulement mettre en relief, mais mme rendre compte de ceci que FREUD a class sous le titre du ravalement de la vie amoureuse 1: c'est savoir que si en effet le dsir semble entraner avec soi un certain quantum en effet d'amour, c'est justement et prcisment, et trs souvent d'un amour qui se prsente la personnalit comme conflictuel, d'un amour qui ne s'avoue pas, d'un amour qui se refuse mme s'avouer.1 Sigmund Freud : (1912) Sur le plus gnral des rabaissements de la vie amoureuse in La vie sexuelle, Paris, 1969, P.U.F., pp. 55-65.

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D'autre part, si nous rintroduisons aussi ce mot dsir l o nous dterminons comme affectivit , comme sentiment positif ou ngatif , sont employs couramment dans une sorte d'approche honteuse - si l'on peut dire - des forces encore efficaces, et nommment par la relation analytique, par le transfert il me semble que du seul fait de l'emploi de ce mot, un clivage se produira qui aura par lui-mme quelque chose d'clairant. Il s'agit de savoir si le transfert est constitu, non plus par une affectivit ou des sentiments positifs ou ngatifs que ce terme comporte de vagues et de voils, mais sil s'agit et ici on nomme le dsir prouv par un seul de dsir sexuel, dsir agressif l'endroit de l'analyste, ce qui nous apparatra tout de suite et du premier coup dil. Ces dsirs ne sont point tout dans le transfert, et de ce fait mme le transfert ncessite d'tre dfini par autre chose que par des rfrences plus ou moins confuses la notion positive ou ngative d'affectivit. Et enfin de sorte que si nous prononons ce mot dsir , le dernier bnfice de cet usage plein c'est que nous nous demanderons : Qu'est-ce que c'est que le dsir ? Ce ne sera pas une question laquelle nous aurons ou nous pourrons rpondre. Simplement, si je n'tais ici li par ce que je pourrais appeler le rendez-vous urgent que j'ai avec mes besoins pratiques exprientiels je me serais permis une interrogation sur le sujet du sens de ce mot dsir , auprs de ceux qui ont t plus qualifis pour en valoriser l'usage, c'est savoir les potes et les philosophes. Je ne le ferai pas, d'abord parce que : - l'usage du mot dsir , - la transmission du terme, - et la fonction du dsir dans la posie, est quelque chose que, je dirais, nous retrouverons aprs coup si nous poursuivons assez loin notre investigation.7

S'il est vrai comme c'est ce qui sera toute la suite de mon dveloppement cette anne que la situation est profondment marque, arrime, rive une certaine fonction du langage, un certain rapport du sujet au signifiant, l'exprience analytique nous portera je l'espre tout au moins assez loin dans cette exploration pour que nous trouvions tout le temps : - nous aider peut-tre de l'vocation proprement potique qui peut en tre faite, - et aussi bien comprendre plus profondment la fin la nature de la cration potique dans ses rapports avec le dsir. Simplement, je ferai remarquer que les difficults dans le fond mme du jeu d'occultation que vous verrez tre au fond de ce que nous dcouvrira notre exprience apparaissent dj en ceci par exemple que prcisment on voit bien dans la posie combien le rapport potique au dsir s'accommode mal, si l'on peut dire, de la peinture de son objet. Je dirais : - qu' cet gard la posie figurative j'voque presque les roses et les lys de la beaut a toujours quelque chose qui n'exprime le dsir que dans le registre d'une singulire froideur, - que par contre la loi proprement parler de ce problme de l'vocation du dsir, c'est dans une posie qui curieusement se prsente comme la posie que l'on appelle mtaphysique . Et pour ceux qui lisent l'anglais, je ne prendrai ici que la rfrence la plus minente des potes mtaphysiques de la littrature anglaise : John DONNE2, pour que vous vous y reportiez pour constater combien c'est trs prcisment le problme de la structure des rapports du dsir qui est l voque dans un pome clbre.2 John Donne : Posies, coll. Posies Gallimard, 1992.

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Par exemple The Ecstacy dont le titre indique assez les amorces, dans quelle direction s'labore potiquement sur le plan lyrique tout au moins, l'abord potique du dsir quand il est recherch, vis lui-mme proprement parler. Je laisse de ct ceci qui assurment va beaucoup plus loin pour prsentifier le dsir : le jeu du pote quand il s'arme de l'action dramatique, c'est trs prcisment la dimension sur laquelle nous aurons revenir cette anne. Je vous l'annonce dj parce que nous nous en tions approchs l'anne dernire : c'est la direction de la comdie. Mais laissons l les potes. Je ne les ai nomms l qu' titre d'indication liminaire, et pour vous dire que nous les retrouverons plus tard, plus ou moins diffusment. Je veux plus ou moins m'arrter ce qui a t, cet endroit, la position des philosophes, parce que je crois qu'elle a t trs exemplaire du point o se situe pour nous le problme j'ai pris soin de vous crire l-haut ces trois termes pleasure-seeking , object-seeking en tant qu'elle recherche le plaisir, en tant qu'elle recherche l'objet. C'est bien ainsi que depuis toujours s'est pose la question pour la rflexion et pour la morale, j'entends la morale thorique, la morale qui s'nonce en prceptes et en rgles, en oprations de philosophes, tout spcialement, dit-on, d'thiciens, je vous l'ai dj indiqu. Remarquez au passage en fin de compte la base de toute morale que l'on pourrait appeler physicaliste, comme on pourrait voir en quoi le terme a le mme sens, en quoi dans la philosophie mdivale on parle de la thorie physique de l'amour , au sens o prcisment elle est oppose la thorie extatique de l'amour .9

La base de toute morale

qui s'est exprime jusqu' prsent, jusqu' un certain point dans la tradition philosophique revient en somme ce qu'on pourrait appeler la tradition hdoniste qui consiste faire tablir une sorte d'quivalence entre ces deux termes du plaisir et de l'objet - au sens o l'objet est l'objet naturel de la libido, - au sens o il est un bienfait, en fin de compte admettre le plaisir au rang des biens cherchs par le sujet, voire mme s'y refuser ds lors qu'on en a le mme critre, au rang du souverain bien. Cette tradition hdoniste de la morale est une chose qui assurment n'est capable de cesser de surprendre qu' partir du moment o l'on est en quelque sorte si engag dans le dialogue de l'cole, qu'on ne s'aperoit plus de ses paradoxes, car en fin de compte quoi de plus contraire ce que nous appellerons l'exprience de la raison pratique, que cette prtendue convergence du plaisir et du bien ? En fin de compte, si l'on y regarde de prs, si l'on regarde par exemple ce que ces choses tiennent dans ARISTOTE, qu'est-ce que nous voyons s'laborer ? Et c'est trs clair,les choses sont trs pures dans ARISTOTE. C'est assurment quelque chose qui n'arrive raliser cette identification du plaisir et du bien qu' l'intrieur de ce que j'appellerai une thique de matre ou quelque chose dont l'idal flatteur les termes de la temprance ou de l'intemprance c'est--dire de quelque chose qui relve de la matrise du sujet par rapport ses propres habitudes. Mais l'inconsquence de cette thorification est tout fait frappante. Si vous relisez ces passages clbres qui concernent prcisment l'usage des plaisirs, vous y verrez que rien n'entre dans cette optique moralisante qui ne soit du registre de cette matrise d'une morale de matre, de ce que le matre peut discipliner, peut discipliner beaucoup de choses, principalement comportant relativement ses habitudes, c'est--dire au maniement et l'usage de son moi.10

Mais pour ce qui est du dsir , vous verrez quel point ARISTOTE3 lui-mme doit reconnatre il est fort lucide et fort conscient que ce qui rsulte de cette thorisation morale pratique et thorique c'est que les [pithmia], les dsirs se prsentent trs rapidement au-del d'une certaine limite qui est prcisment la limite de la matrise et du moi dans le domaine de ce qu'il appelle nommment la bestialit. Les dsirs sont exils du champ propre de l'homme si tant est que l'homme s'identifie la ralit du matre l'occasion c'est mme quelque chose comme les perversions, et d'ailleurs il a une conception cette gard singulirement moderne du fait que quelque chose dans notre vocabulaire pourrait assez bien se traduire par le fait que le matre ne saurait tre jug l-dessus, ce qui reviendrait presque dire que dans notre vocabulaire, il ne saurait tre reconnu comme responsable. Ces textes valent la peine d'tre rappels. Vous vous y clairerez vous y reporter. l'oppos de cette tradition philosophique, il est quelqu'un que je voudrais tout de mme ici nommer nommer comme - mes yeux - le prcurseur de ce quelque chose que je crois tre nouveau, qu'il nous faut considrer comme nouveau dans, disons le progrs, le sens de certains rapports de l'homme lui-mme, qui est celui de l'analyse que FREUD constitue c'est SPINOZA4, car aprs tout je crois que c'est chez lui, en tout cas avec un accent assez exceptionnel que l'on peut lire une formule comme celle-ci : Que le dsir est l'essence mme de l'homme

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Pour ne pas isoler le commencement de la formule de sa suite, nous ajouterons : Pour autant qu'elle est conue partir de quelqu'une de ses affections, conue comme dtermine et domine par l'une quelconque de ses affections faire quelque chose .3 Aristote : thique de Nicomaque, Livre VII, Chapitre II, 1. Traduction, prface et notes : Jean Voilquin, d. Garnier 1940 (avec texte grec), ou Flammarion, coll. GF, 1965. 4 Spinoza : Ethique, III, dfinition des affections, Seuil 2010, Coll. Points Essais, bilingue latin-franais.

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On pourrait dj beaucoup faire partir de l pour articuler ce qui dans cette formule reste encore, si je puis dire, irrvl. Je dis irrvl parce que, bien entendu, on ne peut pas traduire SPINOZA partir de FREUD, il est quand mme trs singulier je vous le donne comme tmoignage trs singulier, sans doute personnellement j'ai peut-tre plus de propension qu'un autre, et dans des temps trs anciens j'ai beaucoup pratiqu SPINOZA je ne crois pas pour autant que ce soit pour cela qu' le relire partir de mon exprience, il me semble que quelqu'un qui participe l'exprience freudienne peut se trouver aussi l'aise dans les textes de celui qui a crit le De Servitute humana 5, et pour qui toute la ralit humaine se structure, s'organise en fonction des attributs de la substance divine. Mais laissons de ct aussi pour l'instant - quitte y revenir - cette amorce. Je veux vous donner un exemple beaucoup plus accessible, et sur lequel je clorai cette rfrence philosophique concernant notre problme. Je l'ai pris l au niveau le plus accessible, voire le plus vulgaire de l'accs que vous pouvez en avoir. Ouvrez le dictionnaire du charmant dfunt LALANDE : Vocabulaire Philosophique qui est toujours, je dois dire en toute espce d'exercice de cette nature, celui de faire un Vocabulaire toujours une des choses les plus prilleuses et en mme temps les plus fructueuses, tellement le langage est dominant en tout ce qui est des problmes. On est sr qu' organiser un Vocabulaire , on fera toujours quelque chose de suggestif. Ici, nous trouvons ceci : Dsir (Begerang, Begehrung)

il n'est pas inutile de rappeler ce qu'articule le dsir dans le plan philosophique allemand : tendance spontane et consciente vers une fin que vous imaginez. 5 Spinoza : Lthique, quatrime Partie : De la servitude humaine, ou de la force des affects.

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Le dsir repose donc sur la tendance dont il est un cas particulier et plus complexe. Il s'oppose d'autre part la volont ou la volition en ce qu'elle superpose : la coordination, au moins momentane, des tendances, l'opposition du sujet et de l'objet, la conscience de sa propre efficacit, la pense des moyens par lesquels se ralisera la fin voulue.

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Ces rappels sont fort utiles, seulement il est remarquer que dans un article qui veut dfinir le dsir, il y a deux lignes pour le situer par rapport la tendance, et que tout ce dveloppement se rapporte la volont. C'est effectivement ceci que se rduit le discours sur le dsir dans ce Vocabulaire, ceci prs qu'on y ajoute encore : Enfin selon certains philosophes, il y a encore la volont un fiat d'une nature spciale irrductible aux tendances, et qui constitue la libert.

Je ne sais quel air d'ironie dans ces dernires lignes, il est frappant de le voir surgir chez cet auteur philosophe. En note : Le dsir est la tendance se procurer une motion dj prouve ou imagine, c'est la volont naturelle d'un plaisir (citation de ROQUE).

Ce terme de volont naturelle ayant tout son intrt de rfrence. quoi LALANDE personnellement ajoute : Cette dfinition apparat trop troite en ce qu'elle ne tient pas assez compte de l'antriorit de certaines tendances par rapport aux motions correspondantes. Le dsir semble tre essentiellement le dsir d'un acte ou d'un tat, sans qu'il y soit ncessaire dans tous les cas de la reprsentation du caractre affectif de cette fin.

Je pense que cela veut dire du plaisir, ou de quelque chose d'autre. Quoiqu'il en soit, ce n'est certainement pas sans poser le problme de savoir de quoi il s'agit, si c'est de la reprsentation du plaisir, ou si c'est du plaisir. Certainement je ne pense pas que la tche de ce qui s'opre par la voie du vocabulaire, pour essayer de serrer la signification du dsir, soit une tche simple, d'autant plus que peut-tre la tche vous ne l'aurez pas non plus par la tradition quoi elle se rvle absolument prpare.13

Aprs tout le dsir est-il la ralit psychologique, rebelle toute organisation, et en fin de compte serait-ce par la soustraction des caractres indiqus pour tre ceux de la volont que nous pourrons arriver nous approcher de ce qu'est la ralit du dsir ? Nous aurions alors le contraire de ce qui nous a abandonn la non-coordination - mme momentane - des tendances, l'opposition du sujet et de l'objet serait vraiment retire. De mme nous serions l dans une prsence , une tendance sans conscience de sa propre efficacit, sans penser les mots par lesquels elle ralisera la fin dsire. Bref, assurment nous sommes l dans un champ dans lequel en tout cas l'analyse a apport certaines articulations plus prcises, puisqu' l'intrieur de ces dterminations ngatives, l'analyse dessine trs prcisment au niveau, ces diffrents niveaux, la pulsion , pour autant qu'elle est justement ceci : - la non coordination - mme momentane - des tendances, - le fantasme pour autant qu'il introduit une articulation essentielle, ou plus exactement une espce tout fait caractrise l'intrieur de cette vague dtermination de la non opposition du sujet et de l'objet. Ce sera prcisment ici d'essayer de dfinir ce un peu plus prcisment jusqu'ici n'est arrive cette anne notre but que qu'est le fantasme, peut-tre mme que la tradition analytique le dfinir.

Pour ce qui reste, derniers termes de l'idalisme de la pragmatique qui sont ici impliqus, nous n'en retiendrons pour l'instant qu'une chose : trs prcisment combien il semble difficile de situer le dsir et de l'analyser en fonction de rfrences purement objectales. Nous allons ici nous arrter pour entrer proprement parler dans les termes dans lesquels je pense pouvoir cette anne articuler pour vous le problme de notre exprience, en tant qu'ils sont nommment ceux du dsir, du dsir et de son interprtation.14

Dj le lien interne, le lien de cohrence dans l'exprience analytique du dsir et de son interprtation, prsente en soi-mme quelque chose que seule l'habitude nous empche de voir combien est suggestive dj soi toute seule l'interprtation du dsir, et quelque chose qui soit en quelque sorte li de faon aussi interne, il semble bien, la manifestation du dsir. Vous savez de quel point de vue, je ne dirais pas nous partons, nous cheminons car ce n'est pas d'aujourd'hui que nous sommes ensemble - je veux dire qu'il y a dj cinq ans que nous essayons de dsigner les linaments de la comprhension par certaines articulations de notre exprience vous savez que ces linaments viennent cette anne converger sur ce problme qui peut tre le problme point de concours de tous ces points, certains loigns les uns des autres, dont je veux d'abord pouvoir prparer son abord. La psychanalyse et nous avons march ensemble au cours de ces cinq ans la psychanalyse nous montre essentiellement ceci que nous appellerons : - la prise de l'homme dans le constituant de la chane signifiante , - que cette prise sans doute est lie au fait de l'homme, - mais que cette prise n'est pas cxtensive ce fait, dans ce sens que l'homme parle sans doute, mais pour parler il a entrer dans le langage et dans son discours prexistant. Je dirais que cette loi de la subjectivit que l'analyse met spcialement en relief, sa dpendance fondamentale de langage est quelque chose de tellement essentiel que littralement sur ceci glisse toute la psychologie elle-mme.15

Nous dirons qu'il y a une psychologie qui est servie, pour autant que nous pourrions la dfinir comme la somme des tudes concernant ce que nous pourrons appeler au sens large une sensibilit en tant qu'elle est fonction du maintien d'une totalit ou d'une homostase. Bref, les fonctions de la sensibilit par rapport un organisme. Vous voyez que l tout est impliqu, non seulement toutes les donnes exprimentales de la psycho-physique, mais aussi bien tout ce que peut apporter, dans l'ordre le plus gnral, la mise en jeu de notion de forme quant l'apprhension des moyens du maintien de la constance de l'organisme. Tout un champ de la psychologie est ici inscrit, et l'exprience propre soutient ce champ dans lequel la recherche se poursuit. Mais la subjectivit dont il s'agit - en tant que l'homme est pris dans le langage, - en tant qu'il y est pris, qu'il le veuille ou pas, et qu'il y est pris bien au-del du savoir qu'il en a, c'est une subjectivit qui n'est pas immanente une sensibilit en tant qu'ici le terme sensibilit veut dire le couple stimulus-rponse pour la raison suivante : c'est que le stimulus y est donn en fonction d'un code qui impose son ordre , au besoin qui doit s'y traduire. J'articule ici l'mission, et non pas d'un signecomme on peut la rigueur le dire, au moins dans la perspective exprimentale, dans l'preuve exprimentale de ce que j'appelle le cycle stimulus rponse : on peut dire que c'est un signe que le milieu extrieur donne l'organisme d'avoir rpondre, d'avoir se dfendre. Si vous chatouillez la plante des pieds d'une grenouille, elle assure un signe, elle y rpond en faisant une certaine dtente musculaire mais pour autant que la subjectivit est prise par le langage, il y a mission, non pas d'un signe mais d'un signifiant,

c'est--dire, retenez bien ceci qui parat simple : que quelque chose - le signifiant - qui vaut, non pas comme on le dit quand on parle dans la thorie de la communication : de quelque chose qui vaut par rapport une troisime chose, que ce signe reprsente.16

Encore tout rcemment, on peut lire ceci : avec trois termes, ce sont les termes minimum : - il faut qu'il y ait un rcepteur, celui qui entend, - il suffit ensuite d'un signifiant, il n'y a mme pas besoin de parler d'metteur, il suffit d'un signe et de dire que ce signe signifie une troisime chose, qu'elle reprsente simplement. On la construit fausse [ la thorie de la communication ], parce que le signe ne vaut pas par rapport une troisime chose qu'il reprsente, mais il vaut par rapport un autre signifiant qu'il n'est pas. Quant ces trois schmas le tableau : que je viens de mettre sur

je veux vous en montrer, je dirais non pas la gense car ne vous imaginez pas qu'il s'agit l d'tapes encore que quelque chose puisse s'y retrouver l'occasion d'tapes effectivement ralises par le sujet. Il faut bien que le sujet y prenne sa place, mais n'y voyez pas d'tapes au sens o il s'agirait d'tapes typiques, d'tapes d'volution, il s'agit plutt d'une gnration, et pour marquer l'antriorit logique de chacun de ces schmas sur celui qui le suit. Qu'est-ce que reprsente ceci que nous appellerons D pour partir d'un D ? Ceci reprsente la chane signifiante. Qu'est-ce dire ?17

Cette structure basale, fondamentale, soumet toute manifestation de langage cette condition d'tre rgle par une succession, autrement dit par une diachronie, par quelque chose qui se droule dans le temps. Nous laissons de ct les proprits temporelles intresses, nous aurons peut-tre y revenir en leur temps. Disons qu'assurment toute la plnitude de l'toffe temporelle, comme on dit, n'y est point applique. Ici les choses se rsument la notion de la succession, avec ce qu'elle peut dj amener et impliquer de notion de scansion. Mais nous n'en sommes mme pas encore l. Le seul lment discret, c'est--dire diffrentiel, est la base sur laquelle va s'instaurer notre problme de l'implication du sujet dans le signifiant. Ceci implique tant donn ce que je viens de vous faire remarquer, savoir que le signifiant se dfinit par son rapport, son sens, et prend sa valeur du rapport un autre signifiant d'un systme d'opposition signifiante ceci se dveloppe dans une dimension qui implique du mme coup et en mme temps une certaine synchronie des signifiants. C'est cette synchronie des signifiants, savoir l'existence d'une certaine batterie signifiante dont on peut poser le problme de savoir quelle est la batterie minimale. [ {,,,}, Cf. crits : La lettre vole ] J'ai essay de m'exercer ce petit problme. Cela ne vous entranerait pas trop loin de votre exprience de savoir si aprs tout on peut faire un langage avec une batterie qui semble tre la batterie minimale, une batterie de quatre. Je ne crois pas que ce soit impensable, mais laissons cela de ct. Il est clair que dans l'tat actuel des choses nous sommes loin d'en tre rduits ce minimum. L'important est ceci qui est indiqu par la ligne pointille qui vient recouper d'avant en arrire en la coupant en deux points, la ligne reprsentative de la chane signifiante, c'est savoir la faon dont le sujet a entrer dans le jeu de la chane signifiante.18

Ceci qui est reprsent par la ligne pointille reprsente la premire rencontre au niveau synchronique, au niveau de la simultanit des signifiants. Ici, C c'est l ce que j'appelle le point de rencontre du Code. En d'autres termes : - c'est pour autant que l'enfant s'adresse un sujet qu'il sait parlant, qu'il a vu parlant, qui l'a pntr de rapports depuis le dbut de son veil la lumire du jour, - c'est pour autant qu'il y a quelque chose qui joue comme jeu du signifiant, comme moulin paroles , que le sujet a apprendre trs tt que c'est l une voie, un dfil par o essentiellement doivent s'abaisser les manifestations de ses besoins pour tre satisfaits. Ici, le deuxime point de recoupement M est le point o se produit le Message, et est constitu par ceci : c'est que c'est toujours par un jeu rtroactif de la suite des signifiants que la signification s'affirme et se prcise. C'est--dire que c'est aprs coup que le message prend forme partir du signifiant qui est l en avant de lui, du code qui est en avant de lui et sur lequel inversement lui, le message, pendant qu'il se formule tout instant, anticipe, tire une traite.19

Je vous ai dj indiqu ce qui rsulte de ce processus. En tout cas ce qui en rsulte et qui est marquable sur ce schma, c'est ceci : c'est que ce qui est l'origine sous la forme d'closion du besoin de la tendance comme disent les psychologues qui est l reprsent sur mon schma, l au niveau de ce a qui ne sait pas ce qu'il est, qui tant pris dans le langage, ne se rflchit pas de cet apport innocent du langage dans lequel le sujet se fait d'abord discours. Il en rsulte que mme rduit ses formes les plus primitives d'apprhension de ceci par le sujet : qu'il est en rapport avec d'autres sujets parlants, se produit ce quelque chose au bout de la chane intentionnelle que je vous ai appel ici la premire identification primaire I, la premire ralisation d'un idal dont on ne peut mme pas dire ce moment du schma qu'il s'agisse d'un idal du moi, mais qu'assurment le sujet y a reu le premier seing, signum, de sa relation avec l'Autre. La deuxime tape du schma peut recouvrir d'une certaine faon une certaine tape volutive, cette simple condition que vous ne les considriez pas comme tranches. Il y a des choses tranches dans l'volution, ce n'est pas au niveau de ces tapes du schma que ces csures se trouvent l. Ces csures, comme quelque part FREUD l'a remarqu, se marquent au niveau du jugement d'attribution par rapport la nomination simple. Ce n'est pas de cela que je vous parle maintenant, j'y viendrai dans la suite. Dans la premire partie du schma et dans la seconde, il s'agit de la diffrence d'un niveau infans du discours, car il n'est peut-tre mme pas ncessaire que l'enfant parle encore pour que dj cette marque, cette empreinte mise sur le besoin par la demande, s'exerce au niveau dj des vagissements alternants. Cela peut suffire.20

La deuxime partie du schma implique que mme si l'enfant ne sait pas encore tenir un discours, tout de mme dj il sait parler et ceci vient trs tt. Quand je dis sait parler je veux dire qu'il s'agit, au niveau de la deuxime tape du schma, de quelque chose qui va au-del de la prise dans le langage. Il y a proprement parler rapport pour autant qu'il y a appel de l'Autre comme prsence, cet appel de lAutre comme prsence, comme prsence sur fond d'absence, ce moment signal du fort-da qui a si vivement impressionn FREUD la date que nous pouvons fixer 1915, ayant t appel auprs d'un de ses petits-fils devenu lui-mme un psychanalyste je parle de l'enfant qui a t l'objet de l'observation de FREUD. Voil qui nous fait passer au niveau de cette seconde tape de ralisation du schma, dans ce sens qu'ici, au-del de ce qu'articule la chane de discours comme existante au-del du sujet et lui imposant, qu'il le veuille ou non, sa forme, au-del de cette apprhension, si l'on peut dire innocente de la forme langagire par le sujet, quelque chose d'autre va se produire qui est li au fait que c'est dans cette exprience du langage que se fonde son apprhension de l'autre comme tel, de cet autre qui peut lui donner la rponse, la rponse son appel, cet autre auquel fondamentalement il pose la question que nous voyons, dans Le diable amoureux de CAZOTTE, comme tant le mugissement de la forme terrifique qui reprsente l'apparition du surmoi, en rponse celui qui l'a voqu dans une caverne napolitaine : - Che vuoi ? - Que veux-tu ? La question pose l'Autre de ce qu'il veut, autrement dit, de l o le sujet fait la premire rencontre avec le dsir, le dsir comme tant d'abord le dsir de l'Autre, le dsir grce quoi il s'aperoit qu'il ralise comme tant cet au-del autour de quoi tourne ceci :21

- que l'Autre fera qu'un signifiant ou l'autre, sera, ou non, dans la prsence de la parole, - que l'Autre lui donne l'exprience de son dsir en mme temps qu'une exprience essentielle, - car jusqu' prsent c'tait en soi que la batterie tait l des signifiants dans laquelle un choix pouvait tre fait, mais maintenant c'est dans l'exprience que ce choix s'avre comme commutatif, qu'il est la porte de l'Autre de faire que l'un ou l'autre des signifiants soit l, que s'introduisent dans l'exprience, et ce niveau de l'exprience, les deux nouveaux principes qui viennent s'additionner ce qui tait d'abord pur et simple principe de succession impliquant ce principe de choix. Nous avons maintenant un principe de substitution, car - et ceci est essentiel - c'est cette commutativit partir de laquelle s'tablit pour le sujet ce que j'appelle, entre le signifiant et le signifi, la barre. savoir qu'il y a entre le signifiant et le signifi cette cxistence, cette simultanit qui est en mme temps marque d'une certaine impntrabilit, je veux dire le maintien de la diffrence, de la distance entre le signifiant et le signifi : S/s Chose curieuse, la thorie des groupes telle qu'on l'apprend dans l'tude abstraite des ensembles, nous montre le lien absolument essentiel de toute commutativit avec la possibilit mme d'user de ce que j'appelle ici le signe de la barre, dont on se sert pour la reprsentation des fractions. Laissons cela pour l'instant de ct. C'est une indication latrale sur ce dont il s'agit. La structure de la chane signifiante partir du moment o elle a ralis l'appel de l'Autre, c'est--dire o l'nonciation, le procs de l'nonciation se superpose, se distingue de la formule de l'nonc, en exigeant comme tel, quelque chose qui est justement la prise du sujet, prise du sujet qui tait d'abord innocente, mais qui ici la nuance est l pourtant essentielle est inconsciente dans l'articulation de la parole .22

partir du moment o la commutativit du signifiant y devient une dimension essentielle pour la production du signifi, c'est savoir que c'est d'une faon effective et retentissant dans la conscience du sujet que la substitution d'un signifiant un autre signifiant sera comme telle l'origine de la multiplication de ces significations qui caractrisent l'enrichissement du monde humain. Un autre terme galement se dessine, ou un autre principe qui est le principe de similitude, autrement dit qui fait qu' l'intrieur de la chane, c'est par rapport au fait que dans la suite de la chane signifiante, un des termes signifiants sera ou non semblable un autre, que s'exerce galement une certaine dimension d'effets qui est proprement parler la dimension mtonymique. Je vous montrerai dans la suite que c'est dans cette dimension - essentiellement dans cette dimension que se produisent les effets qui sont caractristiques et fondamentaux de ce qu'on peut appeler le discours potique, les effets de la posie. C'est donc au niveau de la deuxime tape du schma que se produit ceci qui nous permet de placer au mme niveau que le message, c'est--dire dans la partie gauche du schma, ce que le message dans le premier schma, l'apparition de ce qui est signifi de l'Autre s(A) par opposition au signifiant donn par l'Autre S(A) qui, lui, est produit sur la chane, elle pointille puisque c'est une chane qui n'est articule qu'en partie, qui n'est qu'implicite, qui ne reprsente ici que le sujet en tant qu'il est le support de la parole.

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Je vous l'ai dit, c'est dans l'exprience de l'Autre, en tant qu'Autre ayant un dsir, que se produit cette deuxime tape de l'exprience. Le dsir [ d ], ds son apparition, son origine, se manifeste dans cet intervalle, cette bance qui spare l'articulation pure et simple, langagire, de la parole, de ceci qui marque que le sujet y ralise quelque chose de lui-mme qui n'a de porte, de sens, que par rapport cette mission de la parole et qui est proprement parler ce que le langage appelle son tre. C'est entre les avatars de sa demande et ce que ces avatars l'ont fait devenir, et d'autre part cette exigence de reconnaissance par l'Autre, qu'on peut appeler exigence d'amour l'occasion, o se situe un horizon d'tre pour le sujet, dont il s'agit de savoir si le sujet, oui ou non, peut l'atteindre. C'est dans cet intervalle, dans cette bance, que se situe une exprience qui est celle du dsir, qui est apprhende d'abord comme tant celle du dsir de l'autre et l'intrieur de laquelle le sujet a situer son propre dsir. Son propre dsir comme tel ne peut pas se situer ailleurs que dans cet espace. Ceci reprsente la troisime tape, la troisime forme, la troisime phase du schma. Elle est constitue par ceci : c'est que dans la prsence primitive du dsir de l'autre comme opaque, comme obscure, le sujet est sans recours. Il est hilflosigkeit. J'emploie le terme de FREUD, en franais cela s'appelle la dtresse du sujet. C'est l ici le fondement de ce qui, dans l'analyse, a t explor, expriment, situ comme l'exprience traumatique. Ce que FREUD nous a appris aprs le cheminement qui lui a permis de situer enfin sa vraie place l'exprience de l'angoisse, c'est quelque chose qui n'a rien de ce caractre, mon avis par certains cts diffus, de ce qu'on appelle l'exprience existentielle de l'angoisse.24

Que si l'on a pu dire dans une rfrence philosophique que l'angoisse est quelque chose qui nous confronte avec le nant, assurment ces formules sont justifiables dans une certaine perspective de la rflexion. Sachez que sur ce sujet, FREUD a un enseignement articul, positif, il fait de l'angoisse quelque chose de tout fait situ dans une thorie de la communication. L'angoisse est un signal. Ce n'est pas au niveau du dsir si tant est que le dsir doive se produire la mme place o d'abord s'origine, s'exprimente la dtresse ce n'est pas au niveau du dsir que se produit l'angoisse. Nous reprendrons cette anne attentivement, ligne par ligne, l'tude de Inhibition, Symptme, Angoisse de FREUD. Aujourd'hui, dans cette premire leon, je ne peux faire autrement que dj vous amorcer quelques points majeurs pour savoir les retrouver ensuite, et nommment celui-l. FREUD nous dit que l'angoisse se produit comme un signal dans le moi, sur le fondement de l'hilflosigkeit laquelle elle est appele comme signal remdier. Je sais que je vais trop vite, que cela mritera que tout un sminaire je vous parle de cela, mais je ne peux vous parler de rien si je ne commence pas par vous montrer le dessin du chemin que nous avons parcourir.

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C'est en tant donc qu'au niveau de cette troisime tape intervient l'exprience spculaire l'exprience du rapport l'image de l'autre en tant qu'elle est fondatrice de l'Urbild du moi que nous allons en d'autres termes nous retrouver cette anne utiliser dans un contexte qui lui donnera une rsonance toute diffrente ce que nous avons articul la fin de notre 1re anne concernant les rapports du moi idal et de l'idal du moi, c'est en tant que nous allons tre amens repenser tout cela dans ce contexte-l, qu'est l'action symbolique que je vous montre ici comme essentielle. Vous allez voir quelle utilisation elle pourra enfin avoir. Je ne fais pas allusion ici uniquement ce que j'ai dit et articul sur la relation spculaire, savoir la confrontation dans le miroir du sujet avec sa propre image. Je fais allusion au schma dit optique, c'est--dire l'usage du miroir concave qui nous permet de penser la fonction d'une image relle elle-mme rflchie, et qui ne peut tre vue comme rflchie qu' partir d'une certaine position, d'une position symbolique qui est celle de l'Idal du moi.26

Ce dont il s'agit est ceci : dans la troisime tape du schma nous avons l'intervention comme tel de l'lment imaginaire de la relation du moi [ m ] l'autre i(a) comme tant ce qui va permettre au sujet de parer cette dtresse dans la relation au dsir de l'autre. Par quoi ? Par quelque chose qui est emprunt au jeu de matrise que l'enfant un ge lectif, a appris manier dans une certaine rfrence son semblable comme tel . L'exprience du semblable au sens o il est regard, o il est l'autre qui vous regarde, o il fait jouer un certain nombre de relations imaginaires parmi lesquelles au premier plan les relations de prestance, les relations aussi de soumission et de dfaite. C'est au moyen de cela, en d'autres termes, comme ARISTOTE dit que l'homme pense, il faut dire que l'homme pense, il ne faut pas dire l'me pense, mais l'homme pense avec son me. Il faut dire que le sujet se dfend. C'est cela que notre exprience nous montre. Avec son moi, il se dfend contre cette dtresse, et avec ce moyen que l'exprience imaginaire de la relation l'autre lui donne, il construit quelque chose qui est la diffrence de l'exprience spculaire flexible avec l'autre.27

Parce que ce que le sujet rflchit, ce ne sont pas simplement des jeux de prestance, ce n'est pas son opposition l'autre dans le prestige et dans la feinte, c'est lui-mme comme sujet parlant, et c'est pourquoi ce que je vous dsigne ici [S a] comme tant ce lieu d'issue, ce lieu de rfrence par o le dsir va apprendre se situer, c'est le fantasme. C'est pourquoi le fantasme, je vous le symbolise, je vous le formule par ces symboles : S a. Le S ici je vous dirai tout l'heure pourquoi il est barr le S, c'est--dire le sujet en tant que parlant, en tant qu'il se rfre l'autre comme regard, l'autre imaginaire. Chaque fois que vous aurez affaire quelque chose qui est proprement parler un fantasme, vous verrez qu'il est articulable dans ces termes de rfrence du sujet comme parlant l'autre imaginaire. C'est cela qui dfinit le fantasme, et la fonction du fantasme comme fonction de niveau d'accommodation, de situation du dsir du sujet comme tel, et c'est bien pourquoi le dsir humain a cette proprit d'tre fix, d'tre adapt, d'tre coapt, non pas un objet, mais toujours essentiellement un fantasme. Ceci est un fait d'exprience qui a pu longtemps demeurer mystrieux. C'est tout de mme le fait d'exprience, n'oublions pas, que l'analyse a introduit dans le courant de la connaissance. Ce n'est qu' partir de l'analyse que ceci n'est pas une anomalie, quelque chose d'opaque, quelque chose de l'ordre de la dviation, du dvoiement, de la perversion du dsir. C'est partir de l'analyse que mme tout ceci qui peut l'occasion s'appeler dvoiement, perversion, dviation, voire mme dlire est conu et articul dans une dialectique qui est celle qui peut, comme je viens de vous le montrer, concilier l'imaginaire avec le symbolique.28

Je sais que je ne vous mne par un sentier facile, mais tout de suite par poser nos que vais-je arriver faire

pas, pour commencer, si je ne commence pas termes de rfrences, ?

y aller lentement, pas pas, pour vous suggrer la ncessit d'une rfrence, et si je ne vous apporte pas ceci que j'appelle le graphe tout de suite, il faudra tout de mme que je vous l'amne comme je l'ai fait l'anne dernire, peu peu, c'est--dire d'une faon qui sera d'autant plus obscure. Voil donc pourquoi j'ai commenc par l, je ne vous dis pas que je vous ai rendu pour autant l'exprience plus facile, c'est pour cela que maintenant pour la dtendre, cette exprience, je voudrais vous en donner tout de suite de petites illustrations. Ces illustrations, j'en prendrai une d'abord et vraiment au niveau le plus simple puisqu'il s'agit des rapports du sujet au signifiant, la moindre et la premire chose qu'on puisse exiger d'un schma, c'est de voir quoi il peut servir propos du fait de commutations. Je me suis souvenu de quelque chose que j'avais lu autrefois dans le livre de DARWIN6. Le passage qui est cit ici se rfre l'autobiographie de Charles DARWIN sur l'expression chez l'homme et chez l'animal et qui, je dois dire, m'avait bien amus. DARWIN raconte qu'un nomm Sidney SMITH qui, je suppose devait tre un homme de la socit anglaise de son temps, et dont il dit ceci : il pose une question, DARWIN, il dit : J'ai entendu Sidney SMITH dans une soire, dire tout fait tranquillement la phrase suivante : il m'est revenu aux oreilles que la chre vieille Lady COCK y a coup .

En ralit overlook veut dire que le surveillant ne l'a pas repre, sens tymologique.6 Charles Darwin : L'expression des motions chez l'homme et les animaux, d Rivages 2001.

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Overlook est d'un usage courant dans la langue anglaise. Il n'y a rien de correspondant dans notre usage courant. C'est pour cela que l'usage des langues est la fois si utile et si nuisible, parce qu'il nous vite de faire des efforts, de faire cette substitution de signifiants dans notre propre langue, grce laquelle nous pouvons arriver viser un certain signifi, car il s'agit de changer tout le contexte pour obtenir le mme effet dans une socit analogue. Cela pourrait vouloir dire : l'il lui est pass au-dessus, et DARWIN s'merveille que ce fut absolument parfaitement clair pour chacun, mais sans aucun doute que cela voulait dire que le diable l'avait oublie, je veux dire qu'il avait oubli de l'emporter dans la tombe, ce qui semble avoir t ce moment dans l'esprit de l'auditeur sa place naturelle, voire souhaite. Et DARWIN laisse vraiment le point d'interrogation ouvert : Comment fit-il pour obtenir cet effet - dit DARWIN ? Voil, je suis vraiment incapable de le dire. Remarquez que nous pouvons lui tre reconnaissants lui-mme de marquer l'exprience qu'il fait l d'une faon spcialement significative et exemplaire de sa propre limite dans l'abord de ce problme. Qu'il ait pris d'une certaine faon le problme des motions, dire que l'expression des motions y est tout de mme intresse justement cause du fait que le sujet n'en manifeste strictement aucune, qu'il dise cela placidely c'est peut-tre porter les choses un peu loin. En tout cas DARWIN ne le fait pas, il est vraiment trs tonn de ce quelque chose qu'il faut prendre au pied de la lettre, parce que comme toujours quand nous tudions un cas, il ne faut pas le rduire en le rendant vague. DARWIN dit : tout le monde a compris que l'autre parlait du diable, alors que le diable n'est nulle part, et c'est cela qui est intressant, c'est que DARWIN nous dise que le frisson du diable est pass sur l'assemble. Essayons maintenant un peu de comprendre.30

Nous n'allons pas nous attarder sur les limitations mentales propres DARWIN, nous y viendrons forcment tout de mme bien, mais pas tout de suite. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'il y a ds le premier abord quelque chose qui participe d'une connaissance frappante, parce qu'enfin il n'y a pas besoin d'avoir pos les principes de l'effet mtaphorique c'est--dire de la substitution d'un signifiant un signifiant autrement dit, il n'y a pas besoin d'exiger de DARWIN qu'il en ait le pressentiment pour qu'il s'aperoive tout de suite que l'effet en tous cas tient d'abord ce qu'il n'articule mme pas dans le fait qu'une phrase qui commence quand on dit Lady Cock , se termine normalement par ill , malade : j'ai entendu dire quand mme qu'il y a quelque chose qui ne tourne pas rond , donc la substitution, quelque chose quil parat que l'on attend une nouvelle concernant la sant de la vieille dame, car c'est toujours de leur sant que l'on s'occupe d'abord quand il s'agit de vieilles dames est remplac par quelque chose d'autre, voire mme d'irrvrencieux par certains cts. Il ne dit pas, ni qu'elle est la mort, ni non plus qu'elle se porte fort bien. Il dit qu'elle a t oublie. Alors ici qu'est-ce qui intervient pour que cet effet mtaphorique, savoir en tous cas quelque chose d'autre que ce que cela voudrait dire si overlook pouvait tre attendu ? C'est en tant qu'il n'est pas attendu qu'il est substitu un autre signifiant qu'un effet de signifi se produit qui est nouveau, qui n'est ni dans la ligne de ce qu'on attendait, ni dans la ligne de l'inattendu. Si cet inattendu n'avait pas justement t caractris comme inattendu, c'est quelque chose d'original qui d'une certaine faon a tre ralis dans l'esprit de chacun selon ses angles de rfraction propres.31

Dans tous les cas il y a cela : qu'il y a ouverture d'un nouveau signifi ce quelque chose qui fait par exemple que Sidney SMITH passe dans l'ensemble pour un homme d'esprit, c'est--dire ne s'exprime pas par clichs. Mais pourquoi diable ? Si nous nous reportons notre petit schma, cela nous aidera tout de mme beaucoup. C'est cela que a sert, si l'on fait des schmas, c'est pour s'en servir. On peut d'ailleurs arriver au mme rsultat en s'en passant, mais le schma en quelque sorte nous guide, nous montre trs videmment que ce qui se passe l dans le rel, ceci qui se prsentifie, c'est un fantasme proprement parler, et par quels mcanismes ? C'est ici que le schma aussi peut aller plus loin que ce que permet, je dirais, une espce de notion nave que les choses sont faites pour exprimer quelque chose, quen somme se communiquerait une motion comme on dit, comme si les motions en elles-mmes ne posaient pas soi toutes seules tellement d'autres problmes : - savoir ce qu'elles sont, - savoir si elles n'ont pas besoin dj, elles, de communication. Notre sujet, nous dit-on, est l parfaitement tranquille, c'est--dire qu'il se prsente en quelque sorte l'tat pur, la prsence de sa parole tant son pur effet mtonymique. Je veux dire sa parole en tant que parole dans sa continuit de parole. Et dans cette continuit de parole prcisment, il fait intervenir ceci : la prsence de la mort en tant que le sujet peut ou non lui chapper.32

C'est--dire pour autant qu'il voque cette prsence de quelque chose qui a la plus grande parent avec la venue au monde du signifiant lui-mme, je veux dire que s'il y a une dimension o la mort ou le fait qu'il n'y en a plus peut tre la fois directement voque, et en mme temps voile, mais en tout cas incarne, devenir immanente un acte, c'est bien l'articulation signifiante. C'est donc pour autant que ce sujet qui parle si aisment de la mort, il est bien clair qu'il ne lui veut pas spcialement du bien cette dame, mais que d'un autre ct la parfaite placidit avec laquelle il en parle, implique justement qu' cet gard il a domin son dsir, en tant que ce dsir comme dans Volpone 7, pourrait s'exprimer par l'aimable formule : Pue et crve ! Il ne dit pas cela, il articule simplement sereinement que ce qui est le niveau qui nous vaut ce destin chacun notre tour, l pour un instant oubli mais cela, si je puis m'exprimer ainsi, ce n'est pas le diable, et l'au-del a viendra un jour ou l'autre, et du mme coup ce personnage, lui se pose comme quelqu'un qui ne redoute pas de s'galiser avec celle dont il parle, de se mettre au mme niveau, sous le coup de la mme faute, de la mme lgalisation terminale par le Matre absolu ici prsentifi. En d'autres termes, ici le sujet se rvle l'endroit de ce qui est voil du langage comme y ayant cette sorte de familiarit, de compltude, de plnitude du maniement du langage qui suggre quoi ? Justement quelque chose sur quoi je veux terminer, parce que c'est ce qui manquait tout ce que j'ai dit dans mon dveloppement en trois tapes, pour qu'ici le ressort, le relief de ce que je voulais vous articuler soit complet. Au niveau du premier schma nous avons l'image innocente.

7 Ben Jonson : Volpone ou le Renard, Les Belles lettres, 2004, Bilingue.

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Il est inconscient bien sr, mais c'est une inconscience qui ne demande qu' passer au savoir. N'oublions pas que dans l'inconscience cette dimension de avoir conscience , mme en franais implique cette notion.

Au niveau de la deuxime et de la troisime tape du schma, je vous ai dit que nous avions un usage beaucoup plus conscient du savoir, je veux dire que le sujet sait parler et qu'il parle. C'est ce qu'il fait quand il appelle l'Autre et pourtant c'est l proprement parler que se trouve l'originalit du champ que FREUD a dcouvert et qu'il appelle l'inconscient.34

C'est--dire ce quelque chose qui met toujours le sujet une certaine distance de son tre et qui fait que prcisment cet tre ne le rejoint jamais, et que c'est pour cela qu'il est ncessaire qu'il ne peut faire autrement que d'atteindre son tre dans cette mtonymie de l'tre dans le sujet qu'est le dsir. Et pourquoi ? Parce qu'au niveau o le sujet est engag entr lui-mme dans la parole et par l dans la relation l'Autre comme tel, comme lieu de la parole il y a un signifiant qui manque toujours. Pourquoi ? Parce que c'est un signifiant, et le signifiant est spcialement dlgu au rapport du sujet avec le signifiant. Ce signifiant a un nom, c'est le phallus.- Le dsir est la mtonymie de l'tre dans le sujet. - Le phallus est la mtonymie du sujet dans l'tre.

Nous y reviendrons. Le phallus pour autant qu'il est lment signifiant soustrait la chane de la parole, en tant qu'elle engage tout rapport avec l'Autre c'est l le principe limite qui fait que le sujet, dans toute parole et pour autant qu'il est impliqu dans la parole tombe sous le coup de ce qui se dveloppe dans toutes ses consquences cliniques, sous le terme de complexe de castration. Ce que suggre toute espce d'usage, je ne dirais pas pur mais peut-tre plus impur des mots de la tribu 8, toute espce d'inauguration mtaphorique, pour peu qu'elle se fasse audacieuse et au dfi de ce que le langage voile toujours, et ce quil voile toujours au dernier terme, c'est la mort.8 Cf. Stphane Mallarm : Le tombeau dEdgar P

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Ceci tend toujours faire surgir, faire sortir cette figure nigmatique du signifiant manquant, du phallus qui ici apparat et comme toujours bien entendu sous la forme qu'on appelle diabolique, oreille, peau, voire phallus lui-mme, et si dans cet usage bien entendu la tradition du jeu d'esprit anglais, de ce quelque chose de contenu qui n'en dissimule pas moins le dsir le plus violent, mais cet usage suffit soi tout seul faire apparatre dans l'imaginaire, dans l'autre qui est l comme spectateur, dans le petit(a), cette image du sujet en tant qu'il est marqu par ce rapport au signifiant qui s'appelle l'interdit. Ici en l'occasion en tant qu'il viole un interdit, en tant qu'il montre qu'au-del des interdits qui font la loi des langages, on ne parle pas comme cela des vieilles dames. Il le le se y a quand mme un monsieur qui entend plus placidement du monde et qui fait diable, et c'est au point que le cher demande : comment diable, a-t-il fait parler apparatre DARWIN cela ?

Je vous laisserai l-dessus aujourd'hui. Nous reprendrons la prochaine fois un rve dans FREUD, et nous essayerons d'y appliquer nos mthodes d'analyse, ce qui en mme temps nous permettra de situer les diffrents modes d'interprtation.

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John Donne : The Ecstacy Where, like a pillow on a bed, A pregnant bank swell'd up, to rest The violet's reclining head, Sat we two, one another's best. Our hands were firmly cemented By a fast balm, which thence did spring; Our eye-beams twisted, and did thread Our eyes upon one double string. So to engraft our hands, as yet Was all the means to make us one; And pictures in our eyes to get Was all our propagation. As,'twixt two equal armies, Fate Suspends uncertain victory, Our souls which to advance their state, Were gone out hung 'twixt her and me. And whilst our souls negotiate there, We like sepulchral statues lay; All day, the same our postures were, And we said nothing, all the day. If any, so by love refined, That he soul's language understood, And by good love were grown all mind, Within convenient distance stood, He though he knew not which soul spake, Because both meant, both spake the same Might thence a new concoction take, And part far purer than he came. This ecstasy doth unperplex (We said) and tell us what we love; We see by this, it was not sex; We see, we saw not, what did move: But as all several souls contain Mixture of things they know not what, Love these mix'd souls doth mix again, And makes both one, each this, and that. A single violet transplant, The strength, the colour, and the size All which before was poor and scant Redoubles still, and multiplies. When love with one another so Interanimates two souls, That abler soul, which thence doth flow, Defects of loneliness controls. We then, who are this new soul, know, Of what we are composed, and made, For th' atomies of which we grow Are souls, whom no change can invade. But, O alas! so long, so far, Our bodies why do we forbear? They are ours, though not we; we are Th' intelligences, they the spheres. We owe them thanks, because they thus Did us, to us, at first convey, Yielded their senses' force to us, Nor are dross to us, but allay. On man heaven's influence works not so, But that it first imprints the air; For soul into the soul may flow, Though it to body first repair. As our blood labours to beget Spirits, as like souls as it can; Because such fingers need to knit That subtle knot, which makes us man; So must pure lovers' souls descend To affections, and to faculties, Which sense may reach and apprehend, Else a great prince in prison lies. To our bodies turn we then, that so Weak men on love reveal'd may look; Love's mysteries in souls do grow, But yet the body is his book. And if some lover, such as we, Have heard this dialogue of one, Let him still mark us, he shall see Small change when we're to bodies gone.

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L o comme sur un lit un oreiller, Une rive en crue invitait les violettes A reposer leurs testes, Nous nous assmes, l'un l'autre tout entiers. Nos mains taient fermement cimentes Par siccatif rapide, et de l s'exhalaient, subtil; Nos oeillades enfilaient, et tenaient enlacs Nos regards, sur un collier double fil. Ainsi greffer nos mains Restait pour nous unir le seul moyen; Et des images captes dans nos yeux De nostre route les seules lieues. Comme entre deux gales Armes La Fortune, une victoire indcise balance attribuer parfois, Nos asmes qui avaient quitt leurs corps pour leur tat rapprocher, Se tenaient suspendues entre elle, et moi. Et tandis que l, ngociaient nos asmes, Nous, comme gisants restions tendus; De tout le jor nous ne bougemes, De tout le jor, de nous, rien ne fut entendu. S'il en fut un, si raffin par l'amour, Que langage de l'asme il connut, Et que son esprit se fut nourri de bon amour, Non loin de nous se fut tenu, Lui quelle asme parloit, bien qu'il ne put l'apprendre Car les deux pensoient et disoient de mesme, peut-tre put Nouvel lixir prendre, Et repartir bien plus pur qu'il n'stoit venu. Cette Extase, de son index (Dit-on), ce qu'aimons nous dsigne pour sr; Par celle-ci, on voit que ce n'tait pas le sexe; Nous voyons ce qu'avant nous estoit mouvement obscur: Mais comme les asmes contiennent la fois Un mlange de choses qu'elles ignorent, Amour, ces asmes mesles, il les remesle encore, Et chacune ceci, et cela, d'une seule, deux finalement faict.

Tout ce qui toit pauvre et chtif avant Connat regain ,et vigueur. Mais lors doncque l'amour, l'un l'autre opre Telle entr'animation, il obtient le croisement, D'une nouvelle asme, trangre Aux dfauts de ses lments. Lors nous, qui sommes cette novelle asme close, Nous savons de quelle paste nous sommes faicts Car les anatomies qui nous composent Et desquelles nous croissons, ce sont nos asmes, sur quoy rien n'a d'effet. Mais, O hlas! Tant que vivons l'un et l'autre Nos corps, pourquoi les tenons-nous mpris? Bien qu'ils ne soient pas nous-mesmes, ils sont nostres Ils sont la sphre, nous sommes leurs esprits. Nous leur devons reconnaissance Car ce sont eux qu' nous-mesme unis, nous ont d'abord convis Nous donnrent leur vigueur, leurs sens, Et nous sont alliage, non dchets. Sur l'homme, l'influence du paradis ne se peut si bien tendre, Qu'elle improigne l'ayr d'abord; Car l'asme dans l'asme ne se peut rpandre, Qu'elle n'ait avant habit le corps. Comme notre sang besogne faire Des Esprits, que le plus semblable aux asmes il veut; Par ce que de tels doigts sont ncessaires Pour nouer de l'homme le subtile noeud; Ainsi que des purs amants les asmes descendent Jusqu'aux facults et affections, Que peut-tre les sens atteignent et apprhendent, Sinon un grand Prince vgte en prison. Lors, tournons-nous vers nos corps, qu'ainsi le vulgaire Puisse l'amour contempler; Dans les asmes, ont beau s'panouir des amours les mystres, Reste que le corps est son Livre Rvl. Et si quelqu'amant, notre semblance, A compris ce dialogue, d'un seul ja cit, Qu'il nous marque, il verra peu de diffrence Quand en nos corps serons ressuscits.

De violettes un simple transplant, La force, la taille, et la couleur Traduction franaise : Gilles de Seze

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Stphane Mallarm, Le tombeau dEdgar P Tel qu'en Lui-mme enfin l'ternit le change, Le Pote suscite avec un glaive nu Son sicle pouvant de n'avoir pas connu Que la mort triomphait dans cette voix trange ! Eux, comme un vil sursaut d'hydre oyant jadis l'ange Donner un sens plus pur aux mots de la tribu Proclamrent trs haut le sortilge bu Dans le flot sans honneur de quelque noir mlange. Du sol et de la nue hostiles, grief ! Si notre ide avec ne sculpte un bas-relief Dont la tombe de POE blouissante s'orne Calme bloc ici-bas chu d'un dsastre obscur, Que ce granit du moins montre jamais sa borne Aux noirs vols du Blasphme pars dans le futur.

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Sigmund Freud : ber die allgemeinste Erniedrigung des Liebeslebens (1912)1

Wenn der psychoanalytische Praktiker sich fragt, wegen welches Leidens er am hufigsten um Hilfe angegangen wird, so mu er absehend von der vielgestaltigen Angst antworten: wegen psychischer Impotenz. Diese sonderbare Strung betrifft Mnner von stark libidinsem Wesen und uert sich darin, da die Exekutivorgane der Sexualitt die Ausfhrung des geschlechtlichen Aktes verweigern, obwohl sie sich vorher und nachher als intakt und leistungsfhig erweisen knnen und obwohl eine starke psychische Geneigtheit zur Ausfhrung des Aktes besteht. Die erste Anleitung zum Verstndnis seines Zustandes erhlt der Kranke selbst, wenn er die Erfahrung macht, da ein solches Versagen nur beim Versuch mit gewissen Personen auftritt, whrend es bei anderen niemals in Frage kommt. Er wei dann, da es eine Eigenschaft des Sexualobjekts ist, von welcher die Hemmung seiner mnnlichen Potenz ausgeht, und berichtet manchmal, er habe die Empfindung eines Hindernisses in seinem Innern, die Wahrnehmung eines Gegenwillens, der die bewute Absicht mit Erfolg stre. Er kann aber nicht erraten, was dies innere Hindernis ist und welche Eigenschaft des Sexualobjekts es zur Wirkung bringt. Hat er solches Versagen wiederholt erlebt, so urteilt er wohl in bekannter fehlerhafter Verknpfung, die Erinnerung an das erste Mal habe als strende Angstvorstellung die Wiederholungen erzwungen; das erste Mal selbst fhrt er aber auf einen zuflligen Eindruck zurck. Psychoanalytische Studien ber die psychische Impotenz sind bereits von mehreren Autoren angestellt und verffentlicht worden [Funote]M. Steiner (1907) W. Stekel (1908) Ferenczi (1908).. Jeder Analytiker kann die dort gebotenen Aufklrungen aus eigener rztlicher Erfahrung besttigen. Es handelt sich wirklich um die hemmende Einwirkung gewisser psychischer Komplexe, die sich der Kenntnis des Individuums entziehen. Als allgemeinster Inhalt dieses pathogenen Materials hebt sich die nicht berwundene inzestuse Fixierung an Mutter und Schwester hervor. Auerdem ist der Einflu von akzidentellen peinlichen Eindrcken, die sich an die infantile Sexualbettigung knpfen, zu bercksichtigen und jene Momente, die ganz allgemein die auf das weibliche Sexualobjekt zu richtende Libido verringern [Funote]W. Stekel (1908, 191 ff.).. Unterzieht man Flle von greller psychischer Impotenz einem eindringlichen Studium mittels der Psychoanalyse, so gewinnt man folgende Auskunft ber die dabei wirksamen psychosexuellen Vorgnge. Die Grundlage des Leidens ist hier wiederum wie sehr wahrscheinlich bei allen neurotischen Strungen eine Hemmung in der Entwicklungsgeschichte der Libido bis zu ihrer normal zu nennenden Endgestaltung. Es sind hier zwei Strmungen nicht zusammengetroffen, deren Vereinigung erst ein vllig normales Liebesverhalten sichert, zwei Strmungen, die wir als die zrtliche und die sinnliche voneinander unterscheiden knnen. Von diesen beiden Strmungen ist die zrtliche die ltere. Sie stammt aus den frhesten Kinderjahren, hat sich auf Grund der Interessen des Selbsterhaltungstriebes gebildet und richtet sich auf die Personen der Familie und die Vollzieher der Kinderpflege. Sie hat von Anfang an Beitrge von den Sexualtrieben, Komponenten von erotischem Interesse mitgenommen, die schon in der Kindheit mehr oder minder deutlich sind, beim Neurotiker in allen Fllen durch die sptere Psychoanalyse aufgedeckt werden. Sie entspricht der primren kindlichen Objektwahl. Wir ersehen aus ihr, da die Sexualtriebe ihre ersten Objekte in der Anlehnung an die Schtzungen der Ichtriebe finden, geradeso, wie die ersten Sexualbefriedigungen in Anlehnung an die zur Lebenserhaltung notwendigen Krperfunktionen erfahren werden. Die Zrtlichkeit der Eltern und Pflegepersonen, die ihren erotischen Charakter selten verleugnet (das Kind ein erotisches Spielzeug), tut sehr viel dazu, die Beitrge der Erotik zu den Besetzungen der Ichtriebe beim Kinde zu erhhen und sie auf ein Ma zu bringen, welches in der spteren Entwicklung in Betracht kommen mu, besonders wenn gewisse andere Verhltnisse dazu ihren Beistand leihen. Diese zrtlichen Fixierungen des Kindes setzen sich durch die Kindheit fort und nehmen immer wieder Erotik mit sich, welche dadurch von ihren sexuellen Zielen abgelenkt wird. Im Lebensalter der Pubertt tritt nun die mchtige sinnliche Strmung hinzu, die ihre Ziele nicht mehr verkennt. Sie versumt es anscheinend niemals, die frheren Wege zu gehen und nun mit weit strkeren Libidobetrgen die Objekte der primren infantilen Wahl zu besetzen. Aber da sie dort auf die unterdessen aufgerichteten Hindernisse der Inzestschranke stt, wird sie das Bestreben uern, von diesen real ungeeigneten Objekten mglichst bald den bergang zu anderen, fremden Objekten zu finden, mit denen sich ein reales Sexualleben durchfhren lt. Diese fremden Objekte werden immer noch nach dem Vorbild (der Imago) der infantilen gewhlt werden, aber sie werden mit der Zeit die Zrtlichkeit an sich ziehen, die an die frheren gekettet war. Der Mann wird Vater und Mutter verlassen nach der biblischen Vorschrift und seinem Weibe nachgehen, Zrtlichkeit und Sinnlichkeit sind dann beisammen. Die hchsten Grade von sinnlicher Verliebtheit werden die hchste psychische Wertschtzung mit sich bringen. (Die normale berschtzung des Sexualobjekts von Seiten des Mannes.) Fr das Milingen dieses Fortschrittes im Entwicklungsgang der Libido werden zwei Momente magebend sein. Erstens das Ma von realer Versagung, welches sich der neuen Objektwahl entgegensetzen und sie fr das Individuum entwerten wird. Es hat ja keinen Sinn, sich der Objektwahl zuzuwenden, wenn man berhaupt nicht whlen darf oder keine Aussicht hat, etwas Ordentliches whlen zu knnen. Zweitens das Ma der Anziehung, welches die zu

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verlassenden infantilen Objekte uern knnen und das proportional ist der erotischen Besetzung, die ihnen noch in der Kindheit zuteil wurde. Sind diese beiden Faktoren stark genug, so tritt der allgemeine Mechanismus der Neurosenbildung in Wirksamkeit. Die Libido wendet sich von der Realitt ab, wird von der Phantasiettigkeit aufgenommen (Introversion), verstrkt die Bilder der ersten Sexualobjekte, fixiert sich an dieselben. Das Inzesthindernis ntigt aber die diesen Objekten zugewendete Libido, im Unbewuten zu verbleiben. Die Bettigung der jetzt dem Unbewuten angehrigen sinnlichen Strmung in onanistischen Akten tut das Ihrige dazu, um diese Fixierung zu verstrken. Es ndert nichts an diesem Sachverhalt, wenn der Fortschritt nun in der Phantasie vollzogen wird, der in der Realitt miglckt ist, wenn in den zur onanistischen Befriedigung fhrenden Phantasiesituationen die ursprnglichen Sexualobjekte durch fremde ersetzt werden. Die Phantasien werden durch diesen Ersatz bewutseinsfhig, an der realen Unterbringung der Libido wird ein Fortschritt nicht vollzogen. Es kann auf diese Weise geschehen, da die ganze Sinnlichkeit eines jungen Menschen im Unbewuten an inzestuse Objekte gebunden oder, wie wir auch sagen knnen, an unbewute inzestuse Phantasien fixiert wird. Das Ergebnis ist dann eine absolute Impotenz, die etwa noch durch die gleichzeitig erworbene wirkliche Schwchung der den Sexualakt ausfhrenden Organe versichert wird. Fr das Zustandekommen der eigentlich sogenannten psychischen Impotenz werden mildere Bedingungen erfordert. Die sinnliche Strmung darf nicht in ihrem ganzen Betrag dem Schicksal verfallen, sich hinter der zrtlichen verbergen zu mssen, sie mu stark oder ungehemmt genug geblieben sein, um sich zum Teil den Ausweg in die Realitt zu erzwingen. Die Sexualbettigung solcher Personen lt aber an den deutlichsten Anzeichen erkennen, da nicht die volle psychische Triebkraft hinter ihr steht. Sie ist launenhaft, leicht zu stren, oft in der Ausfhrung inkorrekt, wenig genureich. Vor allem aber mu sie der zrtlichen Strmung ausweichen. Es ist also eine Beschrnkung in der Objektwahl hergestellt worden. Die aktiv gebliebene sinnliche Strmung sucht nur nach Objekten, die nicht an die ihr verpnten inzestusen Personen mahnen; wenn von einer Person ein Eindruck ausgeht, der zu hoher psychischer Wertschtzung fhren knnte, so luft er nicht in Erregung der Sinnlichkeit, sondern in erotisch unwirksame Zrtlichkeit aus. Das Liebesleben solcher Menschen bleibt in die zwei Richtungen gespalten, die von der Kunst als himmlische und irdische (oder tierische) Liebe personifiziert werden. Wo sie lieben, begehren sie nicht, und wo sie begehren, knnen sie nicht lieben. Sie suchen nach Objekten, die sie nicht zu lieben brauchen, um ihre Sinnlichkeit von ihren geliebten Objekten fernzuhalten, und das sonderbare Versagen der psychischen Impotenz tritt nach den Gesetzen der Komplexempfindlichkeit und der Rckkehr des Verdrngten dann auf; wenn an dem zur Vermeidung des Inzests gewhlten Objekt ein oft unscheinbarer Zug an das zu vermeidende Objekt erinnert. Das Hauptschutzmittel gegen solche Strung, dessen sich der Mensch in dieser Liebesspaltung bedient, besteht in der psychischen Erniedrigung des Sexualobjektes, whrend die dem Sexualobjekt normalerweise zustehende berschtzung dem inzestusen Objekt und dessen Vertretungen reserviert wird. Sowie die Bedingung der Erniedrigung erfllt ist, kann sich die Sinnlichkeit frei uern, bedeutende sexuelle Leistungen und hohe Lust entwickeln. Zu diesem Ergebnis trgt noch ein anderer Zusammenhang bei. Personen, bei denen die zrtliche und die sinnliche Strmung nicht ordentlich zusammengeflossen sind, haben auch meist ein wenig verfeinertes Liebesleben; perverse Sexualziele sind bei ihnen erhalten geblieben, deren Nichterfllung als empfindliche Lusteinbue versprt wird, deren Erfllung aber nur am erniedrigten, geringgeschtzten Sexualobjekt mglich erscheint. Die in dem ersten Beitrag [Funote]ber einen besonderen Typus der Objektwahl beim Manne, S. 193, oben. erwhnten Phantasien des Knaben, welche die Mutter zur Dirne herabsetzen, werden nun nach ihren Motiven verstndlich. Es sind Bemhungen, die Kluft zwischen den beiden Strmungen des Liebeslebens wenigstens in der Phantasie zu berbrcken, die Mutter durch Erniedrigung zum Objekt fr die Sinnlichkeit zu gewinnen. 2 Wir haben uns bisher mit einer rztlich-psychologischen Untersuchung der psychischen Impotenz beschftigt, welche in der berschrift dieser Abhandlung keine Rechtfertigung findet. Es wird sich aber zeigen, da wir dieser Einleitung bedurft haben, um den Zugang zu unserem eigentlichen Thema zu gewinnen. Wir haben die psychische Impotenz reduziert auf das Nichtzusammentreffen der zrtlichen und der sinnlichen Strmung im Liebesleben und diese Entwicklungshemmung selbst erklrt durch die Einflsse der starken Kindheitsfixierungen und der spteren Versagung in der Realitt bei Dazwischenkunft der Inzestschranke. Gegen diese Lehre ist vor allem eines einzuwenden: sie gibt uns zu viel, sie erklrt uns, warum gewisse Personen an psychischer Impotenz leiden, lt uns aber rtselhaft erscheinen, da andere diesem Leiden entgehen konnten. Da alle in Betracht kommenden ersichtlichen Momente, die starke Kindheitsfixierung, die Inzestschranke und die Versagung in den Jahren der Entwicklung nach der Pubertt, bei so ziemlich allen Kulturmenschen als vorhanden anzuerkennen sind, wre die Erwartung berechtigt, da die psychische Impotenz ein allgemeines Kulturleiden und nicht die Krankheit einzelner sei. Es lge nahe, sich dieser Folgerung dadurch zu entziehen, da man auf den quantitativen Faktor der Krankheitsverursachung hinweist, auf jenes Mehr oder Minder im Beitrag der einzelnen Momente, von dem es abhngt, ob ein kenntlicher Krankheitserfolg zustande kommt oder nicht. Aber obwohl ich diese Antwort als richtig anerkennen mchte, habe ich doch nicht die Absicht, die Folgerung selbst hiemit abzuweisen. Ich will im Gegenteil die Behauptung aufstellen, da die psychische Impotenz weit verbreiteter ist, als man glaubt, und da ein gewisses Ma dieses Verhaltens tatschlich das Liebesleben des Kulturmenschen charakterisiert.

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Wenn man den Begriff der psychischen Impotenz weiter fat und ihn nicht mehr auf das Versagen der Koitusaktion bei vorhandener Lustabsicht und bei intaktem Genitalapparat einschrnkt, so kommen zunchst alle jene Mnner hinzu, die man als Psychansthetiker bezeichnet, denen die Aktion nie versagt, die sie aber ohne besonderen Lustgewinn vollziehen; Vorkommnisse, die hufiger sind, als man glauben mchte. Die psychoanalytische Untersuchung solcher Flle deckt die nmlichen tiologischen Momente auf, welche wir bei der psychischen Impotenz im engeren Sinne gefunden haben, ohne da die symptomatischen Unterschiede zunchst eine Erklrung finden. Von den ansthetischen Mnnern fhrt eine leicht zu rechtfertigende Analogie zur ungeheuren Anzahl der frigiden Frauen, deren Liebesverhalten tatschlich nicht besser beschrieben oder verstanden werden kann als durch die Gleichstellung mit der geruschvolleren psychischen Impotenz des Mannes [Funote]Wobei gerne zugestanden sein soll, da die Frigiditt der Frau ein komplexes, auch von anderer Seite her zugngliches Thema ist.. Wenn wir aber nicht nach einer Erweiterung des Begriffes der psychischen Impotenz, sondern nach den Abschattungen ihrer. Symptomatologie ausschauen, dann knnen wir uns der Einsicht nicht verschlieen, da das Liebesverhalten des Mannes in unserer heutigen Kulturwelt berhaupt den Typus der psychischen Impotenz an sich trgt. Die zrtliche und die sinnliche Strmung sind bei den wenigsten unter den Gebildeten gehrig miteinander verschmolzen; fast immer fhlt sich der Mann in seiner sexuellen Bettigung durch den Respekt vor dem Weibe beengt und entwickelt seine volle Potenz erst, wenn er ein erniedrigtes Sexualobjekt vor sich hat, was wiederum durch den Umstand mitbegrndet ist, da in seine Sexualziele perverse Komponenten eingehen, die er am geachteten Weibe zu befriedigen sich nicht getraut. Einen vollen sexuellen Genu gewhrt es ihm nur, wenn er sich ohne Rcksicht der Befriedigung hingeben darf, was er zum Beispiel bei seinem gesitteten Weibe nicht wagt. Daher rhrt dann sein Bedrfnis nach einem erniedrigten Sexualobjekt, einem Weibe, das ethisch minderwertig ist, dem er sthetische Bedenken nicht zuzutrauen braucht, das ihn nicht in seinen anderen Lebensbeziehungen kennt und beurteilen kann. Einem solchen Weibe widmet er am liebsten seine sexuelle Kraft, auch wenn seine Zrtlichkeit durchaus einem hherstehenden gehrt. Mglicherweise ist auch die so hufig zu beobachtende Neigung von Mnnern der hchsten Gesellschaftsklassen, ein Weib aus niederem Stande zur dauernden Geliebten oder selbst zur Ehefrau zu whlen, nichts anderes als die Folge des Bedrfnisses nach dem erniedrigten Sexualobjekt, mit welchem psychologisch die Mglichkeit der vollen Befriedigung verknpft ist. Ich stehe nicht an, die beiden bei der echten psychischen Impotenz wirksamen Momente, die intensive inzestuse Fixierung der Kindheit und die reale Versagung der Jnglingszeit, auch fr dies so hufige Verhalten der kulturellen Mnner im Liebesleben verantwortlich zu machen. Es klingt wenig anmutend und berdies paradox, aber es mu doch gesagt werden, da, wer im Liebesleben wirklich frei und damit auch glcklich werden soll, den Respekt vor dem Weibe berwunden, sich mit der Vorstellung des Inzests mit Mutter oder Schwester befreundet haben mu. Wer sich dieser Anforderung gegenber einer ernsthaften Selbstprfung unterwirft, wird ohne Zweifel in sich finden, da er den Sexualakt im Grunde doch als etwas Erniedrigendes beurteilt, was nicht nur leiblich befleckt und verunreinigt. Die Entstehung dieser Wertung, die er sich gewi nicht gerne bekennt, wird er nur in jener Zeit seiner Jugend suchen knnen, in welcher seine sinnliche Strmung bereits stark entwickelt, ihre Befriedigung aber am fremden Objekt fast ebenso verboten war wie die am inzestusen. Die Frauen stehen in unserer Kulturwelt unter einer hnlichen Nachwirkung ihrer Erziehung und berdies unter der Rckwirkung des Verhaltens der Mnner. Es ist fr sie natrlich ebensowenig gnstig, wenn ihnen der Mann nicht mit seiner vollen Potenz entgegentritt, wie wenn die anfngliche berschtzung der Verliebtheit nach der Besitzergreifung von Geringschtzung abgelst wird. Von einem Bedrfnis nach Erniedrigung des Sexualobjekts ist bei der Frau wenig zu bemerken; im Zusammenhange damit steht es gewi, wenn sie auch etwas der Sexualberschtzung beim Manne hnliches in der Regel nicht zustande bringt. Die lange Abhaltung von der Sexualitt und das Verweilen der Sinnlichkeit in der Phantasie hat fr sie aber eine andere bedeutsame Folge. Sie kann dann oft die Verknpfung der sinnlichen Bettigung mit dem Verbot nicht mehr auflsen und erweist sich als psychisch impotent, d. h. frigid, wenn ihr solche Bettigung endlich gestattet wird. Daher rhrt bei vielen Frauen das Bestreben, das Geheimnis noch bei erlaubten Beziehungen eine Weile festzuhalten, bei anderen die Fhigkeit, normal zu empfinden, sobald die Bedingung des Verbots in einem geheimen Liebesverhltnis wiederhergestellt ist; dem Manne untreu, sind sie imstande, dem Liebhaber eine Treue zweiter Ordnung zu bewahren. Ich meine, die Bedingung des Verbotenen im weiblichen Liebesleben ist dem Bedrfnis nach Erniedrigung des Sexualobjekts beim Manne gleichzustellen. Beide sind Folgen des langen Aufschubes zwischen Geschlechtsreife und Sexualbettigung, den die Erziehung aus kulturellen Grnden fordert. Beide suchen die psychische Impotenz aufzuheben, welche aus dem Nichzusammentreffen zrtlicher und sinnlicher Regungen resultiert. Wenn der Erfolg der nmlichen Ursachen beim Weibe so sehr verschieden von dem beim Manne ausfllt, so lt sich dies vielleicht auf einen anderen Unterschied im Verhalten der beiden Geschlechter zurckfhren. Das kulturelle Weib pflegt das Verbot der Sexualbettigung whrend der Wartezeit nicht zu berschreiten und erwirbt so die innige Verknpfung zwischen Verbot und Sexualitt. Der Mann durchbricht zumeist dieses Verbot unter der Bedingung der Erniedrigung des Objekts und nimmt daher diese Bedingung in sein spteres Liebesleben mit. Angesichts der in der heutigen Kulturwelt so lebhaften Bestrebungen nach einer Reform des Sexuallebens ist es nicht berflssig, daran zu erinnern, da die psychoanalytische Forschung Tendenzen so wenig kennt wie irgendeine andere. Sie will nichts anderes als Zusammenhnge aufdecken, indem sie Offenkundiges auf Verborgenes zurckfhrt. Es soll ihr dann recht sein, wenn die Reformen sich ihrer Ermittlungen bedienen, um Vorteilhafteres an

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Stelle des Schdlichen zu setzen. Sie kann aber nicht vorhersagen, ob andere Institutionen nicht andere, vielleicht schwerere Opfer zur Folge haben mten. 3 Die Tatsache, da die kulturelle Zgelung des Liebeslebens eine allgemeinste Erniedrigung der Sexualobjekte mit sich bringt, mag uns veranlassen, unseren Blick von den Objekten weg auf die Triebe selbst zu lenken. Der Schaden der anfnglichen Versagung des Sexualgenusses uert sich darin, da dessen sptere Freigebung in der Ehe nicht mehr voll befriedigend wirkt. Aber auch die uneingeschrnkte Sexualfreiheit von Anfang an fhrt zu keinem besseren Ergebnis. Es ist leicht festzustellen, da der psychische Wert des Liebesbedrfnisses sofort sinkt, sobald ihm die Befriedigung bequem gemacht wird. Es bedarf eines Hindernisses, um die Libido in die Hhe zu treiben, und wo die natrlichen Widerstnde gegen die Befriedigung nicht ausreichen, haben die Menschen zu allen Zeiten konventionelle eingeschaltet, um die Liebe genieen zu knnen. Dies gilt fr Individuen wie fr Vlker. In Zeiten, in denen die Liebesbefriedigung keine Schwierigkeiten fand, wie etwa whrend des Niederganges der antiken Kultur, wurde die Liebe wertlos, das Leben leer, und es bedurfte starker Reaktionsbildungen, um die unentbehrlichen Affektwerte wiederherzustellen. In diesem Zusammenhange kann man behaupten, da die asketische Strmung des Christentums fr die Liebe psychische Wertungen geschaffen hat, die ihr das heidnische Altertum nie verleihen konnte. Zur hchsten Bedeutung gelangte sie bei den asketischen Mnchen, deren Leben fast allein von dem Kampfe gegen die libidinse Versuchung ausgefllt war. Man ist gewi zunchst geneigt, die Schwierigkeiten, die sich hier ergeben, auf allgemeine Eigenschaften unserer organischen Triebe zurckzufhren. Es ist gewi auch allgemein richtig, da die psychische Bedeutung eines Triebes mit seiner Versagung steigt. Man versuche es, eine Anzahl der allerdifferenziertesten Menschen gleichmig dem Hungern auszusetzen. Mit der Zunahme des gebieterischen Nahrungsbedrfnisses werden alle individuellen Differenzen sich verwischen und an ihrer Statt die uniformen uerungen des einen ungestillten Triebes auftreten. Aber trifft es auch zu, da mit der Befriedigung eines Triebes sein psychischer Wert allgemein so sehr herabsinkt? Man denke z. B. an das Verhltnis des Trinkers zum Wein. Ist es nicht richtig, da dem Trinker der Wein immer die gleiche toxische Befriedigung bietet, die man mit der erotischen so oft in der Psie verglichen hat und auch vom Standpunkte der wissenschaftlichen Auffassung vergleichen darf? Hat man je davon gehrt, da der Trinker gentigt ist, sein Getrnk bestndig zu wechseln, weil ihm das gleichbleibende bald nicht mehr schmeckt? Im Gegenteil, die Gewhnung knpft das Band zwischen dem Manne und der Sorte Wein, die er trinkt, immer enger. Kennt man beim Trinker ein Bedrfnis, in ein Land zu gehen, in dem der Wein teurer oder der Weingenu verboten ist, um seiner sinkenden Befriedigung durch die Einschiebung solcher Erschwerungen aufzuhelfen? Nichts von alldem. Wenn man die uerungen unserer groen Alkoholiker, z. B. Bcklins, ber ihr Verhltnis zum Wein anhrt [Funote]G. Flrke (1902, 16)., es klingt wie die reinste Harmonie, ein Vorbild einer glcklichen Ehe. Warum ist das Verhltnis des Liebenden zu seinem Sexualobjekt so sehr anders? Ich glaube, man mte sich, so befremdend es auch klingt, mit der Mglichkeit beschftigen, da etwas in der Natur des Sexualtriebes selbst dem Zustandekommen der vollen Befriedigung nicht gnstig ist. Aus der langen und schwierigen Entwicklungsgeschichte des Triebes heben sich sofort zwei Momente hervor, die man fr solche Schwierigkeit verantwortlich machen knnte. Erstens ist infolge des zweimaligen Ansatzes zur Objektwahl mit Dazwischenkunft der Inzestschranke das endgltige Objekt des Sexualtriebes nie mehr das ursprngliche, sondern nur ein Surrogat dafr. Die Psychoanalyse hat uns aber gelehrt: wenn das ursprngliche Objekt einer Wunschregung infolge von Verdrngung verlorengegangen ist, so wird es hufig durch eine unendliche Reihe von Ersatzobjekten vertreten, von denen doch keines voll gengt. Dies mag uns die Unbestndigkeit in der Objektwahl, den Reizhunger erklren, der dem Liebesleben der Erwachsenen so hufig eignet. Zweitens wissen wir, da der Sexualtrieb anfnglich in eine groe Reihe von Komponenten zerfllt vielmehr aus einer solchen hervorgeht , von denen nicht alle in dessen sptere Gestaltung aufgenommen werden knnen, sondern vorher unterdrckt oder anders verwendet werden mssen. Es sind vor allem die koprophilen Triebanteile, die sich als unvertrglich mit unserer sthetischen Kultur erwiesen, wahrscheinlich, seitdem wir durch den aufrechten Gang unser Riechorgan von der Erde abgehoben haben; ferner ein gutes Stck der sadistischen Antriebe, die zum Liebesleben gehren. Aber alle solche Entwicklungsvorgnge betreffen nur die oberen Schichten der komplizierten Struktur. Die fundamentellen Vorgnge, welche die Liebeserregung liefern, bleiben ungendert. Das Exkrementelle ist allzu innig und untrennbar mit dem Sexuellen verwachsen, die Lage der Genitalien inter urinas et faeces bleibt das bestimmende unvernderliche Moment. Man knnte hier, ein bekanntes Wort des groen Napoleon variierend, sagen: die Anatomie ist das Schicksal. Die Genitalien selbst haben die Entwicklung der menschlichen Krperformen zur Schnheit nicht mitgemacht, sie sind tierisch geblieben, und so ist auch die Liebe im Grunde heute ebenso animalisch, wie sie es von jeher war. Die Liebestriebe sind schwer erziehbar, ihre Erziehung ergibt bald zuviel, bald zuwenig. Das, was die Kultur aus ihnen machen will, scheint ohne fhlbare Einbue an Lust nicht erreichbar, die Fortdauer der unverwerteten Regungen gibt sich bei der Sexualttigkeit als Unbefriedigung zu erkennen. So mte man sich denn vielleicht mit dem Gedanken befreunden, da eine Ausgleichung der Ansprche des Sexualtriebes mit den Anforderungen der Kultur berhaupt nicht mglich ist, da Verzicht und Leiden sowie in weitester Ferne die Gefahr des Erlschens des Menschengeschlechts infolge seiner Kulturentwicklung nicht abgewendet werden knnen. Diese trbe Prognose ruht allerdings auf der einzigen Vermutung, da die kulturelle Unbefriedigung die notwendige Folge gewisser Besonderheiten ist, welche der Sexualtrieb unter dem Drucke der Kultur angenommen hat. Die nmliche Unfhigkeit des Sexualtriebes, volle Befriedigung zu ergeben, sobald er den

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ersten Anforderungen der Kultur unterlegen ist, wird aber zur Quelle der groartigsten Kulturleistungen, welche durch immer weitergehende Sublimierung seiner Triebkomponenten bewerkstelligt werden. Denn welches Motiv htten die Menschen, sexuelle Triebkrfte anderen Verwendungen zuzufhren, wenn sich aus denselben bei irgendeiner Verteilung volle Lustbefriedigung ergeben htte? Sie kmen von dieser Lust nicht wieder los und brchten keinen weiteren Fortschritt zustande. So scheint es, da sie durch die unausgleichbare Differenz zwischen den Anforderungen der beiden Triebe des sexuellen und des egoistischen zu immer hheren Leistungen befhigt werden, allerdings unter einer bestndigen Gefhrdung, welcher die Schwcheren gegenwrtig in der Form der Neurose erliegen. Die Wissenschaft hat weder die Absicht zu schrecken noch zu trsten. Aber ich bin selbst gern bereit zuzugeben, da so weittragende Schlufolgerungen wie die obenstehenden auf breiterer Basis aufgebaut sein sollten und da vielleicht andere Entwicklungseinrichtungen der Menschheit das Ergebnis der hier isoliert behandelten zu korrigieren vermgen.

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19 Novembre 1958

Table des sances

Je voudrais poser d'abord les limites de ce que je voudrais faire aujourd'hui. Je veux dire dans cette leon mme, vous noncer ce que je vous montrerai aujourd'hui, et d'abord en abordant l'exemple de l'interprtation d'un rve, ainsi que l'usage de ce que conventionnellement nous appelons depuis quelques temps le graphe . Comme je ne poursuis pas ce discours, si j'ose m'exprimer ainsi, simplement au-dessus de vos ttes, j'aimerais que s'tablisse travers lui une certaine communication, comme on dit. Je n'ai pas t sans avoir cho des difficults que dj vous-mmes la dernire fois c'est--dire un moment o il tait loin d'tre pour tous nouveau avez prouves, et ce que la reposition de ce graphe a constitu encore pour certains. Pour beaucoup mme, il reste, ne disons pas encore maniable puisqu' la vrit, ce qui n'est pas extraordinaire, ce graphe, nous l'avons construit ensemble l'anne dernire, c'est--dire mis au point progressivement, vous l'avez vu en quelque sorte s'difier dans les besoins d'une certaine formulation centre autour de ce que j'ai appel les formations de l'inconscient. Que vous ne puissiez pas, comme certains le remarquent, vous apercevoir que son usage n'est pas encore pour vous univoque, il n'y a pas lieu de s'en tonner puisque prcisment une partie de ce que nous aurons articuler cette anne sur le dsir nous en montrera l'utilit et du mme coup, nous en enseignera le maniement. Il s'agit donc d'abord de sa comprhension.45

C'est cela mme qui semble faire pour un certain nombre diffrents degrs, peut-tre mme moins qu'ils ne l'mettent eux-mmes qui semble faire difficult. propos de ce terme de comprhension je voudrais faire remarquer je vous assure qu'il n'y a l nulle ironie que c'est un terme problmatique. S'il y en a parmi vous qui comprennent toujours, en tout tat de cause et tout inst