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N°43 – juillet 2018 – Lettre d’information Patrimoines en Paca – DRAC / MET 1 Le Domaine du Rayol - Les Jardins Alain Menseau, responsable des jardins et de la conservation du Domaine du Rayol Un jardin de paysages Le Jardin des Méditerranées propose un voyage à travers des paysages s’inspirant des régions du monde de climat méditerranéen. Ces régions sont : le sud-ouest et le sud de l’Australie, le sud-ouest de l’Afrique du Sud, le Chili central, la région côtière de la Californie, le bassin méditerranéen (des Canaries au nord de l’Iran). La biodiversité des régions méditerranéennes est remarquable. En effet, seulement 5% de la surface de la planète contient 50 000 plantes vasculaires, soit environ 20% du total des plantes connues. Pour compléter ce tour du monde, sont invités des paysages aux caractéristiques proches du climat méditerranéen, mais divergents essentiellement par le régime de pluies : des climats avec orages estivaux, tels l’Amérique subtropicale, l’Asie subtropicale, la Nouvelle-Zélande, ou bien un climat plus désertique, telle l’Amérique aride. Enfin, le Jardin des Méditerranées se poursuit en mer avec le Jardin marin. Jardin d'Afrique du Sud 1 Le jardin d’Afrique du Sud évoque les paysages méditerranéens du Fynbos de la péninsule du Cap, marqués par les Protéas, les bruyères et les restio, ainsi que les formations végétales du Karoo, caractérisées par le mimosa à grandes épines et de nombreuses plantes succulentes, comme les Aloès. Apparenté au maquis des régions méditerranéennes, le Fynbos est l’une des formations végétales que l’on retrouve dans le paysage d’Afrique du Sud. La végétation du Fynbos atteint rarement plus de 3 à 4 mètres de hauteur. Elle se développe sur des sols de sable de quartz. Ces sols sont pauvres en matière organique. Les végétaux caractéristiques sont, pour la plupart, des arbustes de la famille des Protéacées, des Éricacées (avec les bruyères) et des Restionacées (qui ressemblent aux joncs des régions de Méditerranée). La strate herbacée fait la part belle aux plantes à bulbes et à rhizomes, comme les Iris, les Watsonias, les Lys et Amaryllis. Les feux dans le Fynbos sont un phénomène récurrent. Toutes les espèces sont adaptées à ce phénomène. La famille botanique des Protéacées est essentiellement représentée dans l’hémisphère Sud. Les Protées sont des plantes typiques du Fynbos sud- africain. La King Protea, Protea cynaroides, devient même l’emblème du drapeau d’Afrique du Sud. Les Protées sont pollinisées principalement par des oiseaux appelés souïmangas, plus rarement par divers scarabées ou encore par des rongeurs.

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N°43 – juillet 2018 – Lettre d’information Patrimoines en Paca – DRAC / MET 1

Le Domaine du Rayol - Les Jardins Alain Menseau, responsable des jardins et de la conservation du Domaine du Rayol Un jardin de paysages Le Jardin des Méditerranées propose un voyage à travers des paysages s’inspirant des régions du monde de climat méditerranéen. Ces régions sont : le sud-ouest et le sud de l’Australie, le sud-ouest de l’Afrique du Sud, le Chili central, la région côtière de la Californie, le bassin méditerranéen (des Canaries au nord de l’Iran). La biodiversité des régions méditerranéennes est remarquable. En effet, seulement 5% de la surface de la planète contient 50 000 plantes vasculaires, soit environ 20% du total des plantes connues. Pour compléter ce tour du monde, sont invités des paysages aux caractéristiques proches du climat méditerranéen, mais divergents essentiellement par le régime de pluies : des climats avec orages estivaux, tels l’Amérique subtropicale, l’Asie subtropicale, la Nouvelle-Zélande, ou bien un climat plus désertique, telle l’Amérique aride. Enfin, le Jardin des Méditerranées se poursuit en mer avec le Jardin marin. Jardin d'Afrique du Sud

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Le jardin d’Afrique du Sud évoque les paysages méditerranéens du Fynbos de la péninsule du Cap, marqués par les Protéas, les bruyères et les restio, ainsi que les formations végétales du Karoo, caractérisées par le mimosa à grandes épines et de nombreuses plantes succulentes, comme les Aloès. Apparenté au maquis des régions méditerranéennes, le Fynbos est l’une des formations végétales que l’on retrouve dans le paysage d’Afrique du Sud. La végétation du Fynbos atteint rarement plus de 3 à 4 mètres de hauteur. Elle se développe sur des sols de sable de quartz. Ces sols sont pauvres en matière organique. Les végétaux caractéristiques sont, pour la plupart, des arbustes de la famille des Protéacées, des Éricacées (avec les bruyères) et des Restionacées (qui ressemblent aux joncs des régions de Méditerranée). La strate herbacée fait la part belle aux plantes à bulbes et à rhizomes, comme les Iris, les Watsonias, les Lys et Amaryllis. Les feux dans le Fynbos sont un phénomène récurrent. Toutes les espèces sont adaptées à ce phénomène. La famille botanique des Protéacées est essentiellement représentée dans l’hémisphère Sud. Les Protées sont des plantes typiques du Fynbos sud-africain. La King Protea, Protea cynaroides, devient même l’emblème du drapeau d’Afrique du Sud.

Les Protées sont pollinisées principalement par des oiseaux appelés souïmangas, plus rarement par divers scarabées ou encore par des rongeurs.

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Le Jardin d'Australie

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Le jardin d’Australie, au nord du Domaine du Rayol, surplombe le vallon. Cette parcelle évoque différents paysages : le Mallee, paysage de brousse sempervirente, parfois épineuse, dominé par les eucalyptus, les mimosas et de nombreuses Myrtacées et Proteacées, et le Kwongan, paysage de landes verdoyantes, dominé par les « Black boys ». Les paysages sont influencés par un facteur déterminant : le feu. Cette évolution est allée si loin que certaines espèces disparaîtraient sans le passage du feu.

Au Domaine du Rayol, les espèces d’eucalyptus évoquant le Mallee sont de petites espèces à lignotuber (c’est-à-dire avec une partie du tronc enterrée). Ils sont capables de se régénérer, par rejets, après un incendie. C’est pour cette raison que ce paysage est dominé par des arbrisseaux et arbustes, poussant avec de nombreuses tiges, directement du sol.

On trouve une cinquantaine d’espèces de mimosas, et de nombreux Callistemons et Melaleucas. Plus loin, on retrouve la silhouette caractéristique des Black boys, les pelouses d’Anigozanthos ou pattes de kangourou et les Protéacées australiennes, telles que les Grevilleas, les Banksias, les Hakeas…

Le Jardin de Californie

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Dans le jardin de Californie, on retrouve un paysage de maquis californien, que l’on nomme plus communément le Chaparral. Ce paysage est une formation végétale soumise à une aridité importante et aux incendies. Le Chaparral est peuplé d’arbustes, tels que des Heteromeles, des Leucophyllum, des Prunus ilicifolia, des céanothes. On y retrouve également des arbres xérophiles (adaptés à la sécheresse) tels que le pin de Coulter ou le cyprès de Monterey. Cette flore est sensiblement identique à celle du pourtour méditerranéen. De nombreux vicariants,

c’est-à-dire des plantes qui ressemblent énormément aux plantes indigènes du maquis méditerranéen, composent ce paysage. En effet, la flore du jardin de Californie possède beaucoup d’affinités avec celle du pourtour méditerranéen. Ces deux dernières sont les descendantes d’une flore commune à l’Amérique et à l’Eurasie. Elle date d’avant la séparation des plaques américaine et européenne, il y a quelque 60 millions d’années. Au fur et à mesure que la pluviométrie se réduit, on trouve d’autres formations végétales, plus sèches, plus désertiques : le désert du Mohave et le désert de Sonora. Ici dominent les Hesperaloe, les yuccas, les cactées, cactus cierges et opuntias, et les ocotillos. Enfin, dans les canyons du désert surgissent de beaux palmiers : les palmeraies de washingtonias. Lors des pluies printanières, avant la grande sécheresse estivale, s’étendent des prairies où fleurissent les eschscholtzias, les lupins, qui se renouvellent chaque année par graines. Trois plantes dominent ce jardin : Leucophyllum frutescens, Hesperaloe parviflora et Romneya coulteri.

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Le Jardin du Chili d'altitude et le Jardin du Chili méditerranéen

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Le Chili est un pays qui s’étale sur 4 000 km de long. Son climat est très diversifié. Seul le Chili central possède un climat méditerranéen. Plusieurs formations végétales sont évoquées au Domaine du Rayol : la lande à Puyas, le paysage de savane, ou espinal, dominé par des Acacia caven, la palmeraie des terres intérieures, avec le palmier à miel, Jubaea chilensis, et les prairies d’alstroemères. Tout d’abord, la lande à Puyas, ou « Matorral » côtier d’altitude, est composée de nombreuses espèces épineuses dont le Puya. De la famille des Broméliacées, comme les ananas, les Puyas tapissent le sol de la parcelle sous forme de touffes. Leur floraison en juin est spectaculaire, allant du bleu métallique au vert fluorescent, selon les espèces. Par ailleurs, les Puyas s’associent aux Cactus Quisco nommé Echinopsis chilensis. Ces cactus aux grandes épines peuvent atteindre jusqu’à 10 mètres de haut. Toujours dans la vallée centrale du Chili, le surpâturage ou l’exploitation de bois ont fini par créer un paysage de savane, « l’Espinal ». Il est dominé par un mimosa : l’Acacia caven, petit arbre épineux, à très fines feuilles et aux fleurs jaunes. Ces paysages sont peu denses, ouverts. Enfin, on aperçoit, dans le Jardin du Chili méditerranéen, quelques palmiers dans les vallons frais. C’est la palmeraie des terres intérieures. Il s’agit là des palmiers à miel, Jubaea chilensis On retrouve aussi des prairies d’alstroemères du Chili, que l’on appelle aussi « Lys des incas ». Leurs fleurs, tant appréciées par les fleuristes, éclosent dans de vives couleurs au printemps.

Le Jardin des Canaries

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Ce jardin nous fait découvrir la diversité du climat méditerranéen. Trois paysages canariens sont évoqués : tout d’abord, le maquis côtier, appelé Malpaïs. C’est l’étage aride situé au niveau de la mer, un paysage minéral soumis à un fort ensoleillement. On y trouve principalement les euphorbes. Puis vient le second paysage évoqué, c’est le bosquet thermophile, apparenté à l’étage méditerranéen aux Îles Canaries. Les grands dragonniers dominent ce paysage. Enfin, le Pinar, paysage d’altitude, où domine le pin canarien. Ce dernier paysage est très résistant au passage du feu, après lequel des jeunes pousses se développent sur le tronc carbonisé. Les cistes y sont aussi présents.

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Les Îles Canaries jouissent d’un climat clément toute l’année. Grâce aux alizés, vents doux et humides, elles sont restées à l’écart des glaciations et ont conservé une flore relique des époques tertiaires. Ceci explique le caractère de gigantisme de nombreux végétaux aux Îles Canaries. Comme par exemple l’asperge géante, Asparagus pastorianus, mais aussi le Sonchus congestus, proche du pissenlit, qui peut atteindre 1,5 mètre et forme du bois à sa base. Entre l’été et le reste de l’année, le jardin des Canaries change de physionomie. Pour résister aux étés chauds et secs du climat méditerranéen, de très nombreuses plantes rentrent en léthargie. Elles usent alors de différents stratagèmes pour se protéger de cette sécheresse, en se cachant dans le sol ou en perdant leurs feuilles par exemple. Enfin, les végétaux se montrent particulièrement vagabonds sur cette parcelle. Ici et là, des Echiums, des Euphorbes, des Dragonniers, des Marcetellas se ressèment spontanément. Les jardiniers du Domaine du Rayol favorisent ce mouvement des végétaux. Ils ne coupent que très tardivement les fleurs fanées pour permettre la formation et la dispersion des graines. Le Jardin méditerranéen

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L'ensemble méditerranéen est l'une des plus grandes aires de biodiversité : elle inclut un espace très vaste incluant le Maroc (sauf extrême-sud), l’Algérie (nord), la péninsule ibérique (sauf le nord), la France (extrême-sud), l’Italie (sauf le nord), les zones côtières de l’ex-Yougoslavie, la Tunisie (est et nord), les zones côtières de la Libye et de l'Égypte, la Grèce, la Turquie (régions ouest et sud), Chypre, le Levant (Syrie nord et ouest, Liban, nord d'Israël). Il abrite entre 25 000 et 30 000 espèces de plantes, soit 8% des végétaux supérieurs du globe. Elle est considérée comme l'un des hauts lieux de diversité dans le monde. Les plantes rencontrées, venant du

bassin est-méditerranéen, sont : le Pin bassin est-méditerranéen, sont : le Pin parasol, le Caroubier, le Palmier de Crète, l’Arbousier de Chypre, le Laurier noble, le Cyprès toujours-vert, le Zelkova de Sicile, l’Acanthe molle et la Grande Pervenche ; venant d’Afrique du nord et d’Espagne : l’Iris d’Alger, le Fragon à langues, la Scille du Pérou et la Scille maritime, l’Othonopsis à feuilles de giroflée, le Laurier-rose, le Palmier dattier, le Genêt à feuilles de lin ; et en bord de mer : la Barbe de Jupiter, l’Euphorbe arborescente et le Lys de mer, et bien d’autres encore…

Le maquis

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Le maquis est une formation végétale qui s’établit sur sols acides, soit en terrain siliceux comme ici dans les Maures, soit en terrain d’origine volcanique comme dans l’Esterel. On retrouve ce type de végétation tout autour de la Méditerranée, en Corse, en Turquie, à Chypre, en Cyrénaïque libyenne, au Maroc, etc. La végétation est constituée de plantes résistantes à la sécheresse, adaptées au passage périodique du feu et à l’abroutissement. La végétation est essentiellement à feuillage persistant, toujours verte. Les hivers doux permettent une croissance en automne et au printemps, périodes de l'année les plus favorables pour observer les floraisons. Les petites feuilles sont coriaces, épineuses ou duveteuses, souvent aromatiques, et dégageant, dès qu'il fait chaud, un parfum agréable d'huiles

essentielles et de résines. L’adaptation au feu est une caractéristique essentielle du maquis. Elle s’est acquise depuis

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la fin du Tertiaire, voici 2,6 millions d’années. Il n’y a pas ici de climax, c’est un équilibre dynamique où interviennent les passages du feu et les cycles de sécheresse. Un maquis âgé de plus d’un siècle n’est pas en état d’équilibre vers un climax : il est bien au contraire en déséquilibre et est devenu fragile à la sécheresse, il attend le feu… Les plantes rencontrées indigènes sont : le chêne vert, le chêne-liège favorisé par l’homme, le pin d’Alep, le pin maritime, l’arbousier et la bruyère arborescente, le calicotome épineux, le pistachier lentisque, la filaire à feuilles étroites, la myrte, le romarin, la lavande des Maures, les cistes à feuilles de sauge et de Montpellier, et la salsepareille pour les plus caractéristiques. Jardin d'Asie subtropicale

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Voilà un jardin invité : le jardin d’Asie subtropicale. Encaissé dans le vallon, il permet d’évoquer les paysages de contrées lointaines et pourtant familières. Ces plantes viennent de Chine, de Corée, de Taïwan et du sud du Japon. Quelques-unes viennent de l’aire indo-malaise. Ces régions ont un régime de mousson d’été. Installée depuis un siècle, la bambouseraie est le cœur de ce paysage. La zone du puits forme un havre de fraîcheur avec les lianes, la glycine Wisteria sinensis et le figuier de Chine Ficus pumila qui grimpent dans la canopée des chênes verts. Une cascade artificielle – elle fonctionne en circuit fermé depuis la vieille citerne alimentée par la seule petite

source du Domaine – permet d’améliorer l’hygrométrie durant l’été. A l’ombre des chênes verts poussent des Nandina appelés bambou céleste, l’arali à papier Tetrapanax, un tapis d’iris frangé du Japon à la floraison blanc-rose fabuleuse, l’Alpinia zerumbet proche du gingembre, des palmiers « céleri » Caryota au feuillage surprenant, et le Loropetalum, superbe pendant sa floraison comme un nuage de confettis blancs.En tournant autour du puits, une clairière abrite un camphrier Cinnamomum camphorum (dont on extrait, par distillation du bois et des feuilles, le camphre et l’huile essentielle de ravintsara) et des bananiers du Japon Musa basjoo. Un original bosquet de Cyca revoluta occupe une clairière ensoleillée, entourée de bambous nains Sasa, de petits palmiers Trachycarpus et de gros palmiers éventail Livistonia, d’un « parasol chinois » Firmiana simplex et du Rhaphiolepis umbellata à la floraison délicate. L’été, des fragrances d’épices citronnées embaument l’atmosphère. Elles viennent du poivre de Sichuan Zanthoxylum, et du citronnier épineux Poncirus.

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Jardin d'Amérique subtropicale

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Le Jardin des Méditerranées « invite » la végétation tropicale des Amériques en composant un paysage mixant des plantes provenant de deux régions situées de part et d’autre de l’équateur : de l’hémisphère Sud, la région englobant le nord de l’Argentine, l’Uruguay, le Paraguay et le sud du Brésil, et de l’hémisphère Nord, la moitié sud du Mexique et toute l’Amérique centrale. C’est un jardin arrosé. C’est d’ailleurs le seul espace du Domaine du Rayol où l’herbe restera verte en été, où fleuriront des arbustes pendant la période estivale. De la zone Argentine, viennent les abutilons, l’érythrine crête-de-coq à la floraison rouge sang surprenante, le Tipuana tipu, arbre à la floraison jaune magnifique en début d’été, l’arbre-bouteille Chorysia aux fleurs roses parfumées, le palmier abricot Butia aux fruits comestibles et le palmier plumeux Syagrus. Dans la zone Mexique, sont présentes des plantes de la forêt humide : le Lantana très parfumé, le Duranta à odeur de vanille, le séneçon géant Telanthophora avec ses énormes capitules jaunes, la mauve Malvaviscus, l’arali blanc Oreopanax, et le bambou du Mexique Otatea au feuillage fin et retombant. On peut aussi trouver le pin de Montezuma : le pin sacré du dernier empereur aztèque, Montezuma, battu par Cortez et ses conquistadores. Les grandes nolines du Domaine du Rayol datent du début du XXe siècle. Elles ont été plantées par Alfred Courmes, le premier propriétaire du

Domaine. Elles sont bien adaptées à la sécheresse et présentent cet aspect scénique luxuriant. Certaines se ressèment spontanément au jardin. Ce sont des vrais arbres de cinq mètres de haut. Leur écorce est aussi liégeuse que celle du chêne-liège, leur permettant de résister au feu. Une nolinaie, forêt extraordinaire de nolines, est en train de naître au cœur jardin… Jardin de Nouvelle-Zélande

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Au cœur du vallon du Domaine du Rayol qui mène à la Maison de la Plage, s'écoule un ruisseau temporaire. Dans ce vallon encaissé, s'invitent des paysages de Nouvelle-Zélande, le pays des maoris. Le creux du vallon évoque les forêts subtropicales humides et luxuriantes de l’île nord de la Nouvelle-Zélande. On découvre les fougères arborescentes, les fougères ponga Cyathea au tronc fin, les fougères wheki Dicksonia au gros tronc. L’atmosphère semble figée en des temps géologiques reculés, quand les dinosaures du Jurassique couraient dans des futaies de fougères. Un peu plus loin, un beau bosquet de gros palmiers nikau Rhopalostylis sapida s’impose. Certains déjà fleurissent, avec à leur pied, les harakeke Phormium tenax aux inflorescences étranges. Sur les flancs du

vallon, deux kauris Agathis australis ont commencé leur longue vie. Ils sont issus de la germination de graines venant du plus vieux kauri de Nouvelle-Zélande nommé Tāne Mahuta. Situé dans la forêt de Waipoua, il est âgé d’environ 2 500 ans.

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Puis, une prairie de graminées en touffes – tussock grassland – caractérise les zones plus arides de l’est de la Nouvelle-Zélande, avec peu de précipitations et balayées par les vents de foehn. Ces prairies en touffes sont composées localement de plusieurs espèces de graminées (genres Chionochloa et Poa) et de Carex. Le paysage a été ici élaboré avec une autre espèce, le Stipa tenuifolia. Le résultat est bluffant. Cette prairie est entourée du manuka Leptospermum scoparium à la floraison carmine massive, des kowhai Sophora microphylla, des massifs de koromuko Hebe sp, dominés par les troncs torturés des tikouka Cordyline australis. Au-dessus, règne un gros pohutukawa Metrosideros excelsa, magnifique pendant sa floraison pourpre au début de l’été. Le Jardin d'Amérique aride

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Ce jardin est voisin du climat méditerranéen de Californie. Il s’agit d’un paysage constitué de plantes succulentes et de cactées, poussant dans des climats arides du sud-ouest des États-Unis (Arizona, Nouveau-Mexique, Texas, Nevada), et du nord-ouest du Mexique (Chihuahua, Durango, Sonora, Zacatecas). Ces régions sont soumises à un climat caractérisé par une longue saison chaude et sèche ainsi que de faibles précipitations (inférieures à 400 mm). La végétation représentée est dominée par 2 familles botaniques, les Asparagaceae et les Cactaceae. Les Asparagaceae sont présentes avec des agaves, des furcreas, des yuccas, et des dasylirions. Les Cactaceae sont présentes avec des opuntias (figuiers de barbaries ou raquettes), des cactus cierges et des cactus en boule. Les cactus se sont particulièrement bien adaptés à la sécheresse, stockant l’eau dans leurs tiges et réduisant au minimum les surfaces d'évaporation. Ce sont aussi des plantes très « épineuses ». Le stockage de l’eau se traduit par un épaississement de la tige, et par l'apparition des côtes, qui permettent, un peu comme sur un accordéon, la dilatation et la rétraction du corps de la plante au gré des périodes de pluies et de sécheresse. La réduction des surfaces d'évaporation se traduit par la disparition des feuilles, et un épaississement de l'épiderme. Les épines permettent une protection contre les animaux, la captation de la rosée, et une protection de l'épiderme contre les ardeurs du soleil, du vent desséchant et du froid d'altitude.

Elles vivent sur des sols très drainants, sur flancs de montagne rocailleux, faiblement végétalisés. Ils sont facilement acclimatables sur la Côte d’Azur, sur un coteau en exposition plein sud (un adret dirait-on dans les Alpes), bien drainant. On recouvre le sol d’une litière minérale formant la rocaille, attirant la chaleur la journée et la restituant la nuit .

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Le Jardin marin

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Le jardin est aussi… marin. La mer est même l’ultime paysage du Domaine du Rayol. Ici, dans le jardin marin, contrairement aux jardins terrestres, le jardinier n’intervient pas. Le même vocabulaire est pourtant utilisé par les guides-animateurs du sentier marin pour évoquer ce paysage : la prairie de posidonie, la grotte du congre, le parterre d’oursins, la passe des nacres… On découvre dans ce jardin marin différents biotopes : les fonds sableux, l’herbier de posidonie, les fonds rocheux, la pleine eau. On voit sur nos plages la laisse de mer qui est présente tout au long de l’année. Essentiellement constituée de

feuilles de posidonies et d’une multitude de débris naturels, comme le bois flotté, des algues, des coquillages, elle permet le piégeage du sable et peut former des banquettes. Ces banquettes, mixant laisse de mer et sable, sont de véritables remparts contre l’assaut des vagues en hiver. Elles protègent les plages de l’érosion et retiennent le sable, enrichissant ainsi la plage et permettant à des plantes pionnières de s’installer. La laisse de mer est aussi un garde-manger et un refuge pour une multitude d’animaux détritivores, formant la base d’une chaîne alimentaire. Des arthropodes, des crustacés, des oiseaux et des mammifères vont venir se nourrir ici. La laisse de mer s’accompagne régulièrement de déchets d’origine anthropique - plastique, polystyrène, verre - apportés essentiellement par les cours d’eau, mais aussi par la mer ou abandonnés sur place. Par souci d’offrir une plage « propre », on est tenté de nettoyer mécaniquement la plage. C’est une perte de biodiversité et cela facilite l’érosion. Il faut privilégier un nettoyage manuel des plages, ce que réalisent déjà de nombreuses collectivités du Var. Le potentiel écologique de la laisse de mer est ainsi préservé.

Légendes des illustrations

1- La protea cynaroides, ou King protea, emblème de l’Afrique du Sud © Domaine du Rayol

2- Les mimosas australiens illuminent le jardin en hiver © Domaine du Rayol

3- Jardin de Californie, évocation du désert de Mohave, très fleuri au printemps © Domaine du Rayol

4- La floraison spectaculaire des puyas sur la parcelle du Chili d’altitude © Domaine du Rayol, Nicolas Mouny

5- Le jardin des Canaries au printemps et ses dragoniers caractéristiques © Domaine du Rayol

6- Vue sur la Pointe du Figuier et le jardin méditerranéen © Domaine du Rayol

7- Le maquis © Domaine du Rayol

8- Vue sur le jardin d’Asie subtropicale, qui reste frais en été © Domaine du Rayol, Chloé Arregoces

9- Jardin d’Amérique subtropicale, naissance d’une nolinaie © Domaine du Rayol

10- Jardin de Nouvelle-Zélande, fougères arborescentes © Domaine du Rayol

11- La rocaille du jardin d’Amérique aride © Domaine du Rayol

12- La baie du Figuier, jardin marin © Domaine du Rayol, Chloé Arregoces