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Michel Miné Daniel Marchand LE DROIT DU TRAVAIL EN PRATIQUE Vingt-troisième édition mise à jour au 14ÞjanvierÞ2011. © Groupe Eyrolles – 1983, 1995, 1996, 1997, 1998, 1999, 2000, 2001, 2002, 2003, 2004, 2005, 2008, 2009, 2010, 2011 ISBN : 978-2-212-54883-9

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Michel MinéDaniel Marchand

LE DROIT DU TRAVAIL

EN PRATIQUE

Vingt-troisième édition mise à jour au 14ÞjanvierÞ2011.

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© Groupe Eyrolles – 1983, 1995, 1996, 1997, 1998, 1999, 2000, 2001, 2002, 2003, 2004, 2005, 2008, 2009, 2010, 2011

ISBN : 978-2-212-54883-9

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ChapitreÞIX

Modification et suspensiondu contrat de travail

L’employeur qui tire profit de l’activité de l’entreprise, en assu-mant aussi des risques, détermine les buts à atteindre et les moyenspour y parvenir. C’est lui qui prend les décisions. Ce pouvoir dedirection s’exerce aussi sur chaque salarié de l’entreprise, pris indi-viduellement. Le contrat de travail place en effet le salarié sous sasubordination juridique. En particulier, l’employeur décide del’affectation, des horaires et du lieu de travail. Ainsi, il peut changerle travail effectué par un salarié, dès l’instant où il correspond à sesqualifications (sauf à exercer une discrimination prohibée, Soc.10Þmai 1999).

Le licenciement n’est pas la seule incertitude de la vie professionnelle.Placé sous l’autorité de l’employeur, le salarié est exposé aux effets desdécisions que celui-ci peut prendre dans l’exercice de son pouvoir dedirectionÞ: changement des attributions ou des conditions de travail,etc. L’employeur, confronté à une conjoncture économique défavorable,peut décider de réduire l’activité de l’entrepriseÞ: les salariés se trouve-ront alors au chômage partiel.

L’étendue et les limites des prérogatives de l’employeur, dans l’exer-cice de son pouvoir de direction, ne font pas l’objet de dispositionslégislatives générales. Elles résultent pour l’essentiel de la jurispru-dence et de quelques dispositions légales particulières.

Des événements de la vie professionnelle comme l’accident du travail,la maladie provoquée par le travail ou la grève, et des événements per-sonnels comme une maladie sans lien avec le travail ou la maternité, quiintéressent la Sécurité sociale, ou encore un congé, entraînent des consé-quences sur la relation de travail.

Pendant ces périodes où le salarié ne fournit aucun travail, le contratde travail n’est pas rompuÞ: il est simplement suspendu. Le salarié estdispensé de fournir un travail, l’employeur de verser un salaire (sauf dis-positions conventionnelles particulières, notamment en matière demaladie ou de maternité).

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Lorsque le salarié reprend son travail, il retrouve son emploi etl’ancienneté qu’il détenait lui reste acquise, mais, sauf dispositionslégales ou conventionnelles contraires, la période de suspension n’estnormalement pas prise en compte pour le calcul de l’ancienneté.

Modification du contrat etdes conditions de travail

Le contrat de travail peut être modifié à l’initiative des parties. Lesalarié doit toujours obtenir l’accord de l’employeur. Dans l’exercice deson pouvoir de direction, celui-ci peut parfois imposer des modifica-tions, mais il ne doit pas dépasser certaines limites.

La jurisprudence distingue la modification du contrat de travail(élément essentiel) et celle des conditions d’exécution du travail.Elle met l’accent sur la nature du changement et non plus sur sonimportance (une appréciation objective remplace une appréciationsubjective).

Selon la jurisprudence de la Cour de cassation (depuis Soc. 10Þjuill.1996), si la modification décidée unilatéralement par l’employeurporte sur un élément essentiel du contrat de travail, le salarié est endroit de la refuser. Si l’employeur maintient sa décision, la rupture ducontrat de travail sera imputable à l’employeur et il s’agira donc d’unlicenciement (exigence de justification notamment). La cause dulicenciement n’est pas le refus du salarié, mais la cause de la proposi-tion de la modification. En revanche, si la modification porte sur unélément des conditions de travail, la décision de l’employeur s’imposeau salarié, sauf exceptions. «ÞLe refus par les salariés du changement deleurs conditions de travail, s’il rend leurs licenciements fondés sur une causeréelle et sérieuse, ne constitue pas à lui seul une faute graveÞ» (Soc. 17 juill.2007).

Par conséquent, il faut distinguer la modification du contrat de travailqui requiert l’acceptation du salarié et le changement des conditions detravail que l’employeur est en droit d’imposer (Soc. 10Þoct. 2000).

Dans tous les cas, qu’il s’agisse des horaires, du lieu de travail, desattributions, voire de la rémunération, il est loisible au salarié d’accep-ter la modification du contrat proposée par l’employeur. Pour ce faire,l’employeur, dans son obligation d’exécution de bonne foi du contrat detravail, doit laisser au salarié un délai de réflexion qui lui permetted’évaluer la portée de la modification proposée et de décider en connais-sance de cause (Soc. 28Þmars 2001).

Si, au contraire, le salarié refuse la modification du contrat de travailque veut lui imposer l’employeur, il doit manifester son refus. La rup-ture du contrat sera alors qualifiée de licenciement, voire de licencie-ment économique. Le juge, saisi par le salarié, pourra lui accorder desdommages-intérêts s’il estime que le licenciement est sans cause réelle

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et sérieuse. Il peut aussi trouver que le licenciement est justifié parl’intérêt de l’entreprise. Le préavis devra être exécuté aux anciennesconditions ou indemnisé s’il n’est pas effectué aux nouvelles conditionsqui ne peuvent être imposées par l’employeur, même pour cette courtedurée (Cass. Ass. plén. 18Þnov. 1994).

Concernant la procédure de modification, afin de permettre d’éclair-cir rapidement la situation et de sécuriser la situation contractuelle del’employeur, il est prévu que lorsque celui-ci envisage la modificationd’un élément essentiel du contrat de travail, pour l’un des motifs éco-nomiques, il en fait la proposition au salarié par lettre recommandéeavec accusé de réception. La lettre de notification informe le salariéqu’il dispose d’un mois à compter de sa réception pour faire connaîtreson refus. À défaut de réponse dans le délai d’un mois, le salarié estréputé avoir accepté la modification proposée (L.Þ1222-6, L.Þ321-1-2).Le silence du salarié vaut acceptation de la modification, mais uneréponse dilatoire vaut refus (Soc. 6Þjuill. 1998).

Le respect du délai d’un mois par l’employeur est une formalité subs-tantielle. Ce délai court à compter de la réception de la lettre, par lesalarié (L.Þ1222-6Þ; Soc. 27Þmars 2008, date de retrait de la lettrerecommandée avec accusé de réception), et «Þexpire à minuit le jour dumois suivant qui porte le même quantième que le jour de la réception de la lettrerecommandée contenant la proposition de modificationÞ» (Soc. 3Þmars 2009).Un licenciement intervenu dans un délai plus court, même prévu danssa lettre de notification de la modification au salarié, rend le licencie-ment sans cause réelle et sérieuse (Soc. 10Þdéc. 2003).

En cas de refus par au moins 10Þsalariés dans le délai d’un mois etde décision par l’employeur de ne pas maintenir les conditions anté-rieures d’exécution du contrat de travail, celui-ci devra mettre enœuvre la procédure de licenciement collectif pour motif économiqueadaptée au cas d’espèce (L.Þ1233-25, L.Þ321-1-3). Cette dispositionest valable pour toute modification pour raison économique, quellequ’elle soit (changement dans les horaires, le lieu, les attributions,etc.), mais pas dans les autres cas. Le délai d’un mois ne s’appliquepas, même en cours de procédure de licenciement économique, lors-que l’employeur exécute son obligation de reclassement à l’égard d’unsalarié, laquelle peut entraîner une modification du contrat de travail(Soc. 13Þavril 1999).

«ÞLe contrat de travail est exécuté de bonne foiÞ» (L.Þ1222-1, L.Þ120-4).Ainsi, caractérise un manquement de l’employeur le fait de cesser defaire bénéficier une salariée d’un moyen de transport lié à sa fonction, cequi «Þl’avait mise dans l’impossibilité de travaillerÞ» (Soc. 10Þmai 2006).Cependant, «Þla bonne foi contractuelle étant présumée, les juges n’ont pas àrechercher si la décision de l’employeur de modifier les conditions de travail d’unsalarié est conforme à l’intérêt de l’entrepriseÞ; il incombe au salarié de démontrer quecette décision aurait été prise pour des raisons étrangères à cet intérêt ou bien qu’ellea été mise en œuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelleÞ»

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(Soc. 3Þoct. 2007). Le salarié n’a plus à établir l’abus de droit ou la légè-reté blâmable de l’employeur.

La jurisprudence s’est notamment développée à propos de change-ments décidés par l’employeur, dans les attributions, la rémunération,l’horaire ou le lieu de travail du salarié.

A. Attributions

L’employeur doit respecter la clause du contrat de travail concernantla qualification professionnelle reconnue au salarié au moment de sonembauche (si le salarié a été recruté comme ouvrier professionnel, il nepeut être affecté à une tâche de manœuvre). La qualification du salariéconstitue un élément essentiel de son identité professionnelle (et de sonétat civil).

«ÞTout travailleur engagé dans la vie professionnelle ou toute per-sonne qui s’y engage a droit à la qualification professionnelle et doitpouvoir suivre, à son initiative, une formation lui permettant, quel quesoit son statut, d’acquérir une qualification correspondant aux besoinsde l’économie prévisibles à court ou moyen termeÞ» (L.Þ6314-1). Lesalarié a droit à la qualification correspondant à ses fonctions réellementexercées (Soc. 21Þmars 1985Þ; Soc. 19Þdéc. 2000, Sté Pyrénées LaboPhoto, revalorisation de la classification de femmes), peu important lesénonciations du bulletin de paie ou du contrat.

Les indications contenues dans le contrat de travail sur la qualifica-tion professionnelle, parfois assez générales, préservent le pouvoir dedirection de l’employeur d’assigner des tâches variées au salarié ou deles changer, dès l’instant où elles correspondent à sa qualification (Soc.24Þavril 2001). Le contrat de travail se borne en général à mentionnerune qualification professionnelle et laisse l’employeur libre d’assignerau salarié toute tâche qui correspond à cette qualification – l’employeurne peut modifier la fonction/qualification, mais peut changer les tâchesattribuées, sauf détournement de pouvoir (pour un cadre dans unesociété d’assurance, Soc. 10Þoct. 2000Þ; pour une ouvrière agricole, Soc.10Þmai 1999).

En règle générale, les conventions collectives préservent le pouvoir dedirection de l’employeur pour tout ce qui touche à l’organisation dutravail et à l’affectation aux emplois. Les conventions collectives contien-nent une classification des emplois, mais, à la différence de ce qui peutêtre observé dans certains pays étrangers, ne posent pas de règles préci-ses selon lesquelles un salarié passera d’un emploi à un autre (en fonc-tion de l’ancienneté ou de l’expérience professionnelle) ou en ce quiconcerne le contenu de ses attributions (description de la fonction,limitation de la polyvalence – art.Þ1129 Civ.).

Il n’existe pas, sauf dispositions conventionnelles ou statutaires parti-culières, un droit à la promotion et au déroulement de carrière. Cepen-dant, une esquisse de ce droit se fait jour. Ainsi, le refus de fairebénéficier le salarié d’une promotion en cas «Þd’abus de l’employeur dans

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l’exercice de sa prérogative de nominationÞ» (Soc. 27Þoct. 2010, Ass. Institutde l’Audiovisuel et des Télécommunications en Europe c/ÞMmeÞY.)donne lieu à réparation, notamment par l’octroi de «Þdommages-intérêtsau titre du préjudice subi en termes de perspectives d’évolution de carrière et autitre du préjudice moral et psychologiqueÞ» (arrêt préc.), (cf. infra VAE).

La classification, qui détermine la rémunération, ne peut pas êtremodifiée par l’employeur sans l’accord du salarié (Soc. 3Þjuill. 2001),sauf modification de la convention collective. En cas de contentieux, lejuge vérifie que la classification retenue correspond aux fonctions réel-lement exercées par le salarié. À défaut, il peut opérer un reclassement(Soc. 7Þfévr. 2007, Soc. 25Þjuin 2007)Þ; mais il ne peut pas ordonner àl’employeur d’accorder une promotion refusée de manière abusive (Soc.7Þmai 2003, réparation du préjudice par seulement l’octroi de dommages-intérêts).

La jurisprudence est nuancée. Il y a modification de la qualificationlorsqu’un directeur, au terme d’une réorganisation de l’entreprise, seretrouve sans personnel à diriger, lorsque l’employée d’une cliniquequi, après avoir eu, comme gouvernante, autorité sur 38Þpersonnes, sevoit proposer un poste de buandière (Soc. 13Þdéc. 1979) ou encore dansle cas d’un directeur général d’une société qui se voit proposer les fonc-tions de directeur commercial, même en conservant les avantages finan-ciers de sa situation antérieure, s’agissant là d’une rétrogradation (Soc.19Þmai 1998). Le critère de déclassement est déterminant.

À l’inverse, dans le cas d’un ambulancier, l’utilisation du téléphoneportable imposée par l’employeur a été considérée comme portantatteinte à un élément essentiel du contrat de travail, car elle s’accompa-gnait d’un accroissement de ses responsabilités (Soc. 2Þfévr. 2000).Concernant un cadre auquel on supprime une astreinte et son éven-tuelle compensation financière, il ne subit pas de modification de soncontrat de travail, car il s’agit d’une sujétion qui n’a pas de caractèresystématique (Soc. 15Þdéc. 2004). La mise au chômage partiel du per-sonnel ne constitue pas, pendant la période d’indemnisation, une modi-fication des contrats de travail (Soc. 18Þjuin 1996).

Cette jurisprudence cherche à cerner le point d’équilibre entre lesprérogatives de la direction, qui doit pouvoir modifier l’organisation del’entreprise, et, en conséquence, les attributions des membres du per-sonnel, et l’intérêt des salariés qui, même si leur rémunération n’ensouffre pas, peuvent être affectés dans leurs conditions de travail, voiremoralement.

L’ordonnance du 30Þmai 2008 transpose la directive du 7Þseptembre2005 concernant le principe de la reconnaissance mutuelle, en vertuduquel un État de l’UE qui subordonne l’accès à une profession régle-mentée ou son exercice à la possession de qualifications professionnellesreconnaît les qualifications acquises dans un autre État de l’UE (sontconcernées de nombreuses professionsÞ: avocat, guide interprète, coif-feur, etc.).

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B. Rémunération

La rémunération d’un salarié constitue un élément du contrat de tra-vail qui ne peut être modifié sans son accord (Soc. 28Þjanv. 1998). Il enest de même du mode de détermination de celle-ci (fixe, variable, avecun intéressement, etc.Þ; Soc. 20Þoct. 1998).

L’accord des intéressés n’est cependant pas nécessaire lorsque l’élé-ment de rémunération résulte d’un usage de l’entreprise quel’employeur peut dénoncer en avertissant, outre chacun des salariésconcernés, les IRP dans un délai suffisant (Soc. 7Þavril 1998). S’il s’agitd’une nouvelle disposition de la convention collective, elle ne peutmodifier le salaire contractuel ni un taux horaire de base (Soc. 3Þjuill.2001), mais elle peut modifier une prime, sans que les salariés puissentse prévaloir d’une modification de leur contrat de travail (Soc. 27Þjuin2000).

Autrement dit, le mode de rémunération contractuel du salarié cons-titue un élément du contrat de travail qui ne peut être modifié sans sonaccord, peu important que l’employeur prétende que le nouveau modeserait plus avantageux (Soc. 30Þmai 2000). «ÞPeu important que le nouveaumode soit plus avantageuxÞ», la modification unilatérale de la rémunéra-tion contractuelle justifie la prise d’acte de la rupture par le salarié (Soc.5Þmai 2010, Sté Cie européenne des peintures Julien).

Le contrat de travail peut prévoir une clause de variation de la rému-nération du salarié dès lors qu’elle est fondée sur des éléments objectifsindépendants de la volonté de l’employeur, qu’elle ne fait pas peser lerisque d’entreprise sur le salarié et n’a pas pour effet de réduire larémunération en dessous des minima légaux et conventionnels (Soc.2Þjuill. 2002). Une clause du contrat de travail ne peut cependant paspermettre à l’employeur de modifier unilatéralement la rémunérationcontractuelle du salarié, même indirectement, en modifiant, par exem-ple, le secteur de prospection d’un représentant de commerce (Soc.16Þjuin 2004).

L’employeur peut supprimer le recours aux heures supplémentaires(sauf stipulations contractuelles contraires).

C. Horaires de travail

Dans le cas le plus général où le contrat de travail est muet sur leshoraires de travail ou le lieu de travail, l’employeur est libre de déter-miner ces horaires ou ce lieu de travail du salarié. Ce sont là des domai-nes où s’exercent les prérogatives de la direction et le salarié est, enprincipe, tenu de se soumettre aux décisions de l’employeur.

Les juges n’ont pas à rechercher si la décision de l’employeur estconforme ou pas à l’intérêt de l’entreprise, la bonne foi de l’employeurétant présumée (Soc. 23Þfévr. 2005). Cependant, si la modification nerépond à aucun motif légitime, l’employeur pourra être condamné pourabus de droit (Soc. 25Þfévr. 2004).

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Des modifications des horaires de travail sont, cependant, regardéescomme des modifications du contrat de travail, au regard de leurimportance. Ainsi, constitue une modification du contrat de travail quele salarié est en droit de refuserÞ:– la transformation d’un horaire à temps complet en horaire à temps

partiel (elle constitue une modification du contrat de travail quirequiert l’accord du salarié, peu important qu’elle ait été prévue dansle contrat de travail initial, Soc. 29Þjuin 1999).

– le passage d’un horaire fixe à un horaire variant sur un cycle de cinqsemaines et comportant une coupure de plusieurs heures dans lajournée (Soc. 14Þnov. 2000).

– le passage d’un horaire continu à un horaire discontinu (Soc. 18Þdéc.2000).

– le passage d’un horaire variable à un horaire fixe (Soc. 24Þjanv. 2007).– la mutation entraînant le passage d’un internat à un établissement de

jour et la perte de primes d’astreinte (Soc. 19Þjuin 2008, MmeÞChabral).La jurisprudence réintroduit ici le critère de l’importance de la

modification.Le salarié peut également refuser d’accepter le changement de son

poste de jour en poste de nuit lorsque le travail de nuit est incompatibleavec des obligations familiales «ÞimpérieusesÞ», notamment avec lagarde d’un enfant ou la prise en charge d’une personne dépendante. Untel refus ne constitue ni une faute ni un motif de licenciement (L.Þ3122-37, L.Þ213-4-3).

Une telle modification ne peut donc être imposée au salarié (Soc. 5Þmars1997). L’employeur peut seulement la proposer au salarié et, en cas derefus, soit retirer son projet, soit engager une procédure de licenciement,mais en aucun cas le refus par le salarié de la modification proposée ne peutconstituer, par lui-même, une cause de licenciement (Soc. 27Þmai 1998).

Même en présence d’une modification des conditions d’exécution ducontrat de travail, l’employeur ne peut prendre acte de la rupture ducontrat en cas de départ du salarié de ce fait (Soc. 24Þjuin 1992).L’employeur peut sanctionner le salarié, éventuellement par un licen-ciement, y compris pour faute grave, mais seulement en présence decirconstances particulières (Soc. 23Þfévr. 2005).

Le contrat de travail peut comporter des dispositions explicites sur leshoraires. Dans ce cas, l’employeur ne pourra modifier, de manièreimportante, unilatéralement l’horaire prévu au contrat, sans l’accordexprès du salarié (Soc. 9Þmars 2005). À cet égard, la signature de relevésd’heures n’est pas suffisante (Soc. 16Þfévr. 1999). Il en va ainsi notam-ment pour les salariés à temps partiel.

Si le salarié refuse, la rupture sera imputable à l’employeur et consi-dérée comme un licenciement. Chaque partie étant libre de mettre àtout moment un terme au contrat, elle peut aussi proposer à l’autre demodifier le contrat, ce qui pourra entraîner la rupture du contrat de tra-vail en cas de refus (Soc. 11Þjuill. 2001).

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Même lorsque rien n’a été prévu dans le contrat sur ce point, ou enl’absence de contrat écrit, l’horaire a pu constituer, pour le salarié,lorsqu’il a conclu le contrat, un facteur déterminant. Malgré le silence ducontrat, l’horaire sera alors considéré par les juges comme un élémentessentiel de celui-ci, que l’employeur doit respecter au même titre que lesdispositions explicites. Ainsi un chauffeur de taxi, lors de l’embauche,avait accepté son emploi parce que son horaire de travail, fixé de 7Þheuresà 17Þheures, était compatible avec ses obligations familialesÞ; sonemployeur, cinq ans après l’embauche, l’affecte à un service où l’horaireest de 10Þheures à 20Þheures. La décision unilatérale de l’employeur adonc modifié un élément essentiel du contrat (Soc. 22Þmai 1975).

Mais souvent, il ne sera pas possible d’établir que l’horaire de travail aconstitué un élément déterminant dans la décision du salarié de conclurele contrat de travail. C’est au moment où l’employeur décide de modifierl’horaire que le salarié découvre l’importance qu’il attachait aux horairesqui lui permettaient de «Þmener une vie familiale normaleÞ».

Même dans ce cas, les juges pourront estimer qu’il y a une modificationd’un élément essentiel du contrat, si le changement présente des inconvé-nients importants pour le salarié. Ils pourront aussi nuancer leur décision etdire que le licenciement a une cause réelle et sérieuse (Soc. 15Þdéc. 2004).

La conclusion d’un accord collectif portant sur la RTT est susceptibled’avoir un impact sur le contrat de travail des salariés et, par suite, surles obligations des entreprises confrontées, le cas échéant, au refus d’unou de plusieurs salariés d’accepter les conséquences de l’accord collectif.De ce point de vue, et pour prévenir les risques d’insécurité juridique,deux règles existent.

D’une part, la seule diminution du nombre d’heures stipulé aucontrat de travail, en application d’un accord collectif de réduction dela durée du travail, ne constitue pas une modification du contrat de tra-vail (L.Þ1222-7, L.Þ212-3).

D’autre part, lorsqu’un ou plusieurs salariés refusent une modifica-tion de leur contrat de travail résultant de l’application d’un accord deréduction de la durée du travail, leur licenciement ne repose pas sur unmotif économique. Il est soumis aux dispositions relatives à la rupturedu contrat de travail pour motif personnel (L.Þ1222-8).

D. Lieu de travail

Le régime juridique applicable est proche de celui qui régit la modi-fication des horaires de travail.

Si le lieu de travail a été indiqué dans le contrat de travail, sauf stipu-lation claire et précise indiquant que le travail s’exerce exclusivementdans le lieu que le contrat mentionne, cette indication est purementinformative et ne constitue pas une clause de sédentarité (Soc. 3Þjuin2003 et 23Þfévr. 2005). Ainsi, désormais, le lieu de travail n’est un élé-ment du contrat que si une clause contractuelle expresse le dit.

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Cependant, même en l’absence d’indications contractuelles, la modi-fication du lieu de travail peut être regardée comme une modificationdu contrat de travail, en cas de modification du «Þsecteur géographi-queÞ» (périmètre nécessitant l’accord du salarié), ce secteur étant àapprécier au regard du niveau hiérarchique et de la fonction exercée parle salarié.

Il a ainsi été jugé queÞ:– «Þle nouveau lieu d’affectation ne relevait pas du même secteur géographiqueÞ»

(vu la distance entre les deux sites et l’augmentation des trajets), «Þlechangement d’affectation constituait une modification de son contrat de travailque la salariée n’était pas tenue d’accepterÞ» (Soc. 21Þdéc. 2006).

– un transfert à Saint-Ouen pour une femme de 55Þans, employéedepuis 1946 dans le centre de Paris, entraînant un allongement detrois quarts d’heure de la durée du trajet et de plus nombreux chan-gements de moyens de transport, constituait une modification ducontrat de travail (Soc. 5Þoct. 1977).

En revanche, le déplacement de l’entreprise à l’intérieur d’un bassind’emploi (de Malakoff à Courbevoie ou de Villeneuve-la-Garenne àSaint-Ouen, en région parisienne, par exemple) constitue un simpleaménagement des conditions de travail qui s’impose au salarié (Soc.20Þoct. 1998 et 8Þfévr. 2005)Þ; ce qui n’est pas le cas d’un transfert deVersailles à Chartres (Soc. 1erÞjuill. 1998).

Sont examinées les contraintes que subit le salarié du fait de sa muta-tion (par exemple, la desserte en moyens de transport de chacun dessites, Soc. 15Þjuin 2004). En revanche, un salarié engagé pour travaillersur des chantiers peut être affecté dans un atelier fixe dans le même sec-teur et ce, même s’il y perd ses indemnités de grand déplacement quine sont en effet pas du salaire, mais des remboursements de frais (Soc.16Þdéc. 1998).

Le déplacement occasionnel imposé à un salarié en dehors du «Þsec-teur géographiqueÞ» habituel, s’il est justifié par l’intérêt de l’entre-prise et quand la spécificité des fonctions du salarié implique unecertaine mobilité géographique, peut effectivement être imposé (Soc.22Þjanv. 2003þ; la mutation temporaire suppose une information pré-cise du salarié, préalable et complète – durée prévisible de la nouvelleaffectation… et doit être motivée par l’intérêt de l’entreprise et justi-fiée par des circonstances exceptionnelles, Soc. 3 févr. 2010, PBR, StéLeader Price Chatou). En revanche, l’employeur ne peut imposer ausalarié de travailler à domicile et d’y installer ses dossiers et instru-ments de travail (Soc. 2Þoct. 2001). Mais il ne peut pas remettre encause une organisation contractuelle du travail permettant au salarié detravailler deux jours par semaine à domicile (Soc. 31Þmai 2006).

Certaines conventions collectives prévoient explicitement que le sala-rié pourra être appelé à travailler sur divers chantiers (travaux publics)ou dans les divers établissements d’une même entreprise (banques). Lesalarié, en concluant son contrat de travail, a souscrit à cette règle.

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Le contrat de travail peut contenir une clause dite de «ÞmobilitéÞ».«ÞUne clause de mobilité doit définir de façon précise sa zone géo-graphique d’application et elle ne peut conférer à l’employeur lepouvoir d’en étendre unilatéralement la portéeÞ» (Soc. 7Þjuin 2006).Et il a été jugé qu’«Þune clause indéterminée ne permettait pas àl’employeur de muter le salarié sans son accordÞ» (Soc. 17Þjuill. 2007).Cette clause ne permet pas à l’employeur d’imposer au salarié un par-tage de son temps de travail entre plusieurs établissements (Soc.20Þdéc. 2006). La clause de mobilité n’autorise pas l’employeur àmuter le salarié sans considération pour son «Þdroit àÞ» une «Þvie per-sonnelle et familialeÞ» (Soc. 14Þoct. 2008, Sté PricewaterhouseÞ; Soc.13Þjanv. 2009, salariée veuve ayant deux jeunes enfants) et est neu-tralisée quand il y a «Þabus de l’employeurÞ» dans la mise en œuvre(Soc. 20Þfévr. 2007).

Si cette clause est régulièrement mise en œuvre par l’employeur, lesalarié doit rejoindre sa nouvelle affectation, faute de quoi il peut êtrelicenciéÞ; «Þle refus, par le salarié dont le contrat de travail contient uneclause de mobilité, de la modification de son lieu de travail, constitue en prin-cipe un manquement à ses obligations contractuelles, mais ne caractérise pas àlui seul une faute graveÞ» (Soc. 23Þjanv. 2008). L’employeur doit toute-fois respecter un délai de prévenance, sans quoi la mutation pourraitêtre refusée par le salarié, car abusive (Soc. 3Þjuin 1997Þ; Soc. 14Þoct.2008, Sté Otis). En dehors de ce cas, le refus de la mutation permetnéanmoins à l’employeur d’exiger l’exécution du préavis dans les condi-tions nouvelles (Soc. 25Þnov. 1997), sauf abus de pouvoir de direction(Soc. 10Þjanv. 2001).

«ÞUn salarié ne peut accepter par avance un changement d’employeurÞ» et parconséquent «Þla clause de mobilité par laquelle le salarié lié par un contrat àune société s’est engagé à accepter toute mutation dans une autre société, alorsmême que cette société appartiendrait au même groupe ou à la même unité écono-mique et sociale, est nulleÞ» (les clauses de mobilité intragroupe sont illi-cites, Soc. 23Þsept. 2009).

Toutefois, une clause de mobilité, voire une clause de domiciliation(Soc. 28Þmars 2006), insérée dans un contrat de travail, ne peut impo-ser au salarié de changer son domicile pour s’installer dans la régionoù il est nouvellement affecté. Il s’agit là d’un choix relevant de la viepersonnelle du salarié, sauf circonstances exceptionnelles liées àl’emploi (Soc. 12Þjanv. 1999, M.ÞSpeelersÞ; 13Þavril 2005, Soc. 15Þmai2007).

La demande de modification du lieu de travail peut également éma-ner du salarié. En cas de demande de mutation sur un poste disponible,formulée par une salariée pour des raisons familiales sérieuses, la déci-sion de refus de l’employeur, ne s’appuyant sur aucune raison objec-tive, porte atteinte de façon disproportionnée à la liberté de choix dudomicile et est contraire à la bonne foi contractuelle (Soc. 24Þjanv.2007).

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Suspension du contrat de travail

Deux motifs principaux de suspension du contrat de travail serontétudiés iciÞ: la maladie et la maternité.

Maladie

La Convention de l’OIT n°Þ158, concernant la cessation de la relationde travail à l’initiative de l’employeur, ratifiée par la France et d’appli-cation directe (Soc. 29Þmars 2006), prévoit que «Þl’absence temporairedu travail en raison d’une maladie ou d’un accident ne devra pas consti-tuer une raison valable de licenciementÞ» (art.Þ6).

A. Accident du travail et maladie professionnelle

1. Suspension du contrat et protection contre la rupture

Le contrat de travail du salarié victime d’un accident du travail, autrequ’un accident de trajet, ou d’une maladie professionnelle, est suspendupendant la durée de l’arrêt de travail provoqué par l’accident ou lamaladie. Le contrat de travail est également suspendu pendant le délaid’attente et la durée du stage de réadaptation, de rééducation ou de for-mation professionnelle que doit suivre l’intéressé. La durée des périodesde suspension est prise en compte pour la détermination de tous lesavantages légaux ou conventionnels liés à l’ancienneté dans l’entreprise(L.Þ1226-7 etÞs., L.Þ122-32-1 et s.).

Au cours des périodes de suspension, l’employeur ne peut résilier leCDI, même en cours de période d’essai (Soc. 12Þmai 2004), que s’il jus-tifie soit d’une faute grave de l’intéressé, soit de l’impossibilité où il setrouve, pour un motif non lié à l’accident ou à la maladie, de maintenirledit contrat (L.Þ1226-9).

La faute peut avoir été commise avant l’arrêt de travail et découverteaprès coup (malversations par exemple) ou pendant l’arrêt de travail(concurrence déloyale).

Toute résiliation du contrat de travail prononcée en méconnaissancede ces dispositions est nulle (L.Þ1226-13, L.Þ122-32-2).

À l’issue des périodes de suspension, le salarié, s’il est déclaré apte parle médecin du travail, retrouve son emploi ou un emploi similaire,assorti d’une rémunération au moins équivalente. Les conséquences del’accident ou de la maladie professionnelle ne peuvent entraîner pour lesalarié aucun retard de promotion ou d’avancement au sein de l’entre-prise (L.Þ1226-8, L.Þ122-32-4).

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2. Inaptitude

Le médecin du travail ne peut constater l’inaptitude du salariéqu’après une étude de son poste et des conditions de travail dansl’entreprise ainsi que de deux examens médicaux de l’intéressé, espacésde deux semaines, accompagnés le cas échéant d’examens complémen-taires (R.Þ4624-31, R.Þ241-51-1). Un recours est possible contre l’avisdu médecin du travail devant l’inspecteur du travail (L.Þ4624-1,L.Þ241-10-1).

Si, à l’issue des périodes de suspension, le salarié est déclaré inapte parle médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédem-ment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités(L.Þ1226-10). Dans les entreprises de plus de 50Þsalariés, le médecin dutravail formule des indications sur l’aptitude de l’intéressé à bénéficierd’une formation destinée à lui proposer un poste adapté.

La proposition de reclassement prend en compte, après avis des DP(rendu après le second examen médical, Soc. 15Þoct. 2002), les conclu-sions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule surl’aptitude du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entre-prise. L’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploiprécédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures tellesqu’une mutation, la transformation de poste ou l’aménagement dutemps de travail. Le reclassement peut être recherché dans une autresociété du groupe dont fait partie l’employeur (Soc. 24Þoct. 1995).

Quand le salarié est reconnu travailleur handicapé, la proposition dereclassement doit tenir compte de l’exigence d’un «Þaménagement rai-sonnableÞ» d’un poste de travail pour permettre le maintien dansl’emploi, sauf si si les «Þmesures adaptéesÞ» pour permettre le maintiendans l’emploi ont un caractère disproportionné (Dir. 27Þnov. 2000,art.Þ5, préc.Þ; L.Þ1133-4 et L.Þ5213-6Þ; Chap.ÞV).

Si le salarié n’est pas reclassé dans l’entreprise à l’issue d’un délai d’unmois à compter de la date de l’examen de reprise du travail ou s’il n’estpas licencié, l’employeur est tenu de lui verser, dès l’expiration de cedélai, le salaire correspondant à l’emploi qu’il occupait avant la suspen-sion de son contrat de travail (L.Þ1226-11). Cette rémunération n’est sus-ceptible d’aucune réduction (Soc. 16Þfévr. 2005). Le salarié déclaré inaptedepuis le 1erÞjuill. 2010 perçoit une indemnité temporaire d’inaptitudeentre la date de la reconnaissance de l’inaptitude et la date de mise enœuvre de la décision de l’employeur de le reclasser ou de le licencier, pen-dant un mois maximum (CSs L.Þ433-1, décret 9Þmars 2010).

Ces dispositions s’appliquent également en cas d’inaptitude à toutemploi dans l’entreprise constatée par le médecin du travail (L.Þ1226-11),même si le salarié a été indemnisé par un régime de prévoyance envigueur dans l’entreprise, bien que ceci puisse conduire à un revenusupérieur à la rémunération habituelle (Soc. 19Þmai 1998).

Si l’employeur ne verse pas le salaire à l’issue du délai d’un mois, lesalarié peut soit solliciter la condamnation de l’employeur en paiement

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des salaires, soit faire constater la rupture du contrat de travail qui seraalors un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Soc. 18Þnov. 2003).

L’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie(L.Þ1226-12)Þ:– de l’impossibilité de proposer un emploi, répondant aux exigences

légales, au salarié. Il lui fait connaître par écrit les motifs qui s’oppo-sent au reclassement.

– du refus par le salarié de l’emploi proposé.S’il procède au licenciement, l’employeur doit respecter la procédure

applicable au licenciement pour motif personnel (L.Þ1226-12, L.Þ122-32-5).

En cas de défaut de visite médicale de reprise par le médecin du tra-vail dans les huit jours, après un arrêt pour cause d’accident du travail,«Þl’employeur ne peut résilier le contrat (…) du salarié, dont le droit à la sécu-rité dans le travail a ainsi été méconnu, que s’il justifie soit d’une faute gravede ce dernier, soit de l’impossibilité (…), pour un motif non lié à l’accident, demaintenir ledit contratÞ» (Soc. 28Þfévr. 2006).

«ÞL’employeur, tenu d’une obligation de sécurité de résultat en matière de pro-tection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l’entreprise, doit enassurer l’effectivité.Þ» Par conséquent, l’employeur commet une faute pri-vant le licenciement pour inaptitude de cause réelle et sérieuse «Þens’abstenant de prendre des mesures qui auraient prémuni la salariée contre laréaction allergique et auraient évité la dégradation de son état de santé antérieu-rement à la reconnaissance de sa maladie professionnelleÞ» (Soc. 2Þdéc. 2009,MmeÞCD c/ÞSté Hinoux Tolub).

3. Indemnités et sanctions

Si le licenciement est justifié, il ouvre droit, pour le salarié, à l’indemnitécompensatrice de préavis et à une indemnité spéciale de licenciement, égaleau double de l’indemnité légale. Ce n’est que si l’employeur établit que lerefus par le salarié du reclassement qui lui avait été proposé est abusif qu’ilsera dispensé de verser ces indemnités (L.Þ1226-14, L.Þ122-32-6).

En revanche, si l’employeur procède au licenciement en méconnais-sance des dispositions relatives à la «ÞréintégrationÞ» du salarié apte, leCPH saisi doit, à la demande du salarié, proposer sa «ÞréintégrationÞ»dans l’entreprise avec maintien de ses avantages acquis (Soc. 11Þjuill.2001). En cas de refus par l’une ou l’autre des parties, le CPH octroie ausalarié une indemnité qui ne peut être inférieure à douze mois de salaireset qui s’ajoute à l’indemnité compensatrice de préavis et à l’indemnitéspéciale de licenciement (L.Þ1226-15, L.Þ122-32-7), mais pas à l’indem-nité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (Soc. 6Þmai 1998).

Ces diverses indemnités sont calculées sur la base du salaire moyenqui aurait été perçu par l’intéressé au cours des trois derniers mois s’ilavait continué à travailler au poste qu’il occupait avant l’accident ou lamaladie (L.Þ1226-16, L.Þ122-32-8).

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Lorsque le salarié victime d’un accident ou d’une maladie profession-nelle est titulaire d’un CDD, l’employeur ne peut rompre le contrat aucours des périodes de suspension du contrat que s’il justifie soit d’unefaute grave de l’intéressé, soit d’un cas de force majeure (L.Þ1226-18 et s.).Cependant, l’arrivée du terme n’est pas modifiée par l’accident du travailou la maladie professionnelle, sauf clause de renouvellement. L’employeurdoit justifier d’un motif réel et sérieux, étranger à l’accident ou à la mala-die. À défaut, il verse au salarié une indemnité correspondant au préju-dice subi, qui ne peut être inférieure au montant des salaires et avantagesque le salarié aurait reçus jusqu’au terme de la période de renouvellementprévue au contrat (L.Þ1226-19 etÞs., L.Þ122-3-5).

B. Maladie non professionnelle

1. Suspension du contrat et protection contre la rupture

La maladie du salarié ne rompt pas le contrat de travail, mais le suspend.

RémunérationLe salarié absent ne perçoit pas de rémunération puisqu’il ne fournit

pas de travail. Cependant, reprenant l’accord national et la loi sur lamensualisation (1978), en application de l’ANI du 11Þjanvier 2008(art.Þ5), la loi du 25Þjuin 2008 prévoit que tout salarié ayant «ÞuneannéeÞ» d’ancienneté dans l’entreprise bénéficie, en cas d’absence autravail justifiée par l’incapacité résultant de maladie ou d’accidentconstaté par certificat médical, et contre-visite s’il y a lieu, d’uneindemnité complémentaire (à l’allocation journalière de la Sécuritésociale), à condition d’avoir justifié dans les 48Þheures de cette incapa-citéÞ; d’être pris en charge par la Sécurité sociale, d’être soigné sur leterritoire français ou dans l’UE (L.Þ1226-1 al.Þ1).

Ces dispositions ne s’appliquent pas aux salariés travaillant à domi-cile, aux salariés saisonniers, aux salariés intermittents ni aux salariéstemporaires (L.Þ1226-1).

Cette indemnité complémentaire est calculée selon les modalités sui-vantesÞ: 90Þ% de la rémunération brute que le salarié aurait perçue s’ilavait continué à travailler, pendant les 30Þpremiers joursÞ; deux tiers decette même rémunération, pendant les 30Þjours suivants (D.Þ1226-1).Ces durées d’indemnisation sont augmentées de 10Þjours par période decinq ans d’ancienneté en plus de la durée d’une année requise pour pou-voir être indemnisé, sans que chacune d’elle puisse dépasser 90Þjours(DÞ1226-2). Lors de chaque arrêt de travail, les durées d’indemnisationcourent à compter du premier jour d’absence si celle-ci est constitutiveà un accident du travail ou à une maladie professionnelle, à l’exclusiondes accidents de trajet, et à compter du septième jour dans tous lesautres cas (période de carence, D.Þ1226-3, décret du 18Þjuill. 2008). Lesconventions collectives contiennent parfois des dispositions plus favo-rables pour les salariésÞ; les CCN, moins favorables que l’ANI, doivent

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être mises en conformité. Ces garanties s’entendent déduction faite desallocations que l’intéressé reçoit de la Sécurité sociale et des régimescomplémentaires de prévoyance (D.Þ1226-5).

Des contre-visites médicales peuvent avoir lieu à l’instigation del’employeur, mais des conclusions négatives du médecin contrôleur nepeuvent avoir pour effet que de priver le salarié des indemnités complé-mentaires de maladie versées par l’employeur – et non de le fairereprendre le travail à une date autre que celle fixée par son médecintraitant (Soc. 10Þoct. 1995) ou de motiver une sanction disciplinaire.Dans ce cas toutefois, le salarié peut saisir le juge des référés, lequelpeut désigner un expert. Si ce dernier confirme la nécessité de l’arrêtprécédemment prescrit, l’employeur ne peut s’abstenir de verser le com-plément des indemnités journalières (Soc. 28Þfévr. 1996). L’employeurest libre de choisir les dates et les heures de la contre-visite dans le res-pect des indications de l’arrêt de travail qui peut autoriser la «ÞsortielibreÞ», le salarié devant dans ce cas informer l’employeur des horaireset des adresses où la contre-visite peut s’effectuer (Soc. 4Þfévr. 2009).

Les contrôles à l’initiative de l’employeur sont distincts de ceux dili-gentés par la Sécurité sociale, qui n’ont aucune influence sur lesdécisions des premiers (Soc. 4Þmai 1999). Cependant, l’expérimenta-tion visant à renforcer la coordination entre les actions du service ducontrôle médical des caisses et les prérogatives des employeurs enmatière de «Þcontre-visite patronaleÞ» est généralisée (LFSS 2010,décret du 24Þaoût 2010 relatif au contrôle des arrêts de travail). Ainsi,le médecin de contrôle (de l’employeur) doit envoyer son rapport à laCaisse nationale d’assurance-maladie dans les 48ÞheuresÞ; une suite doitêtre donnée par la Caisse si l’arrêt apparaît non justifié (suspension duversement des Indemnités Journalières d’assurance-maladie), etc.

Protection de l’emploiLe salarié malade ne peut, en principe, se voir reprocher son compor-

tement pendant que son contrat de travail est suspendu – par exemplel’exercice d’une autre activité, telle la vente sur un stand de brocante(Soc. 21Þmars 2000) ou l’absence de son domicile en dehors des heuresautorisées du fait d’un voyage en Yougoslavie (Soc. 27Þjuin 2000).

Cependant, son obligation de loyauté persiste durant cette période, cequi implique l’obligation de restituer, à la demande de l’employeur, lesdocuments qui sont nécessaires à la poursuite de l’activité de l’entreprise(Soc. 6Þfévr. 2001), sous réserve de ne pas devoir exécuter une prestationde travail (Soc. 25Þjuin 2003). Constitue également un manquement à laloyauté une activité bénévole ou pour son propre compte présentant unlien avec l’entreprise (mécanicien d’un garage réparant une voiture pourson compte avec un autre mécanicien de la société, Soc. 21Þoct. 2003).

Des dispositions conventionnelles prévoient des dispositions protec-trices du contrat de travail du salarié absent pour maladie, par exempleune clause prévoyant que l’employeur ne peut procéder au licenciementdu salarié absent pour maladie tant qu’il n’a pas épuisé ses droits à

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l’indemnisation complémentaire ou avant l’expiration d’un délai varia-ble suivant son ancienneté. Ce délai conventionnel de protection del’emploi doit être respecté (Soc. 14Þnov. 1991), l’absence qui se pro-longe au-delà de cette durée ne constituant pas en soi une justificationd’un licenciement (Soc. 10Þoct. 1995).

Des dispositions conventionnelles, d’apparence plus favorables que laloi, ne peuvent pas faire échec à l’interdiction de discrimination en rai-son de l’état de santé. Ainsi, une CCN ne peut pas prévoir que le salariéabsent pour maladie ne sera pas licencié pour inaptitude, mais sera, lecas échéant, radié des effectifs, après cinq ans d’absence. En effet, «Þlaradiation (…) instituée par (…) la CCN (…) s’analyse en un licenciementfondé exclusivement sur l’état de santé, et donc nulÞ» (Soc. 25Þfévr. 2009,MmeÞBreuil c/ÞCRAM-IdF, CNAMTS et DRASS-IdF).

DiscriminationAucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une

mesure discriminatoire, directe ou indirecte, en raison de son état desanté (L.Þ1132-1, L.Þ122-45). Toute disposition ou tout acte pris àl’égard d’un salarié en méconnaissance des dispositions du présent cha-pitre est nul (L.Þ1132-4, L.Þ122-45Þ; exempleÞ: CA Versailles, 14Þdéc.2010, salariée convoquée à un entretien préalable au licenciement lejour où ses employeurs-médecins suspectent l’existence d’une tumeurcancereuse, licenciement nul), sauf inaptitude constatée par le médecindu travail (L.Þ1133-2).

Cependant, «Þl’interdiction de licencier un salarié (…) en raison de son étatde santé (…) ne s’oppose pas à son licenciement motivé, non par l’état de santédu salarié, mais par la situation objective de l’entreprise, dont le fonctionnementest perturbé par l’absence prolongée ou les absences répétées de l’intéresséÞ; celui-cine peut toutefois être licencié que si ces perturbations entraînent la nécessité pourl’employeur de procéder à son remplacement définitifÞ» (Soc. 13Þmars 2001,Soc. 10Þnov. 1998, Soc. 16Þjuill. 1998). L’employeur doit alors respec-ter la procédure du licenciement pour cause personnelle. L’employeurqui a l’intention de se séparer d’un salarié convoque le salarié à l’entre-tien préalable et peut ainsi s’informer de l’état et des intentions du sala-riéÞ; de plus, ce dernier est informé du risque qu’il court de perdre sonemploi. L’employeur doit verser l’indemnité légale ou conventionnellede licenciement, si le salarié y a droit. Il sera dispensé de verser l’indem-nité compensatrice de préavis, le salarié n’étant pas en état de travailler.

Par conséquent, la possibilité de licencier un salarié malade, en raisonde son absence prolongée ou de ses absences répétées, est exception-nelle. La nécessité du remplacement définitif doit être établie au jourdu licenciement (Soc. 30Þmai 2007). «ÞSeul peut constituer un remplacementdéfinitif un remplacement entraînant l’embauche d’un autre salariéÞ» (Soc.18Þoct. 2007), dont la durée du travail est au moins égale à celle dusalarié malade absent (Soc. 6Þfévr. 2008).

A fortiori, quand l’absence du salarié est la conséquence du comporte-ment de l’employeur, celui-ci ne peut se prévaloir de cette absence pro-longée du salarié pour le licencier (Soc. 11Þoct. 2006, Sté Cora, salarié

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ayant fait l’objet d’un «Þharcèlement moralÞ» de la part de sa hiérar-chie). Il en est de même quand une salariée est déclarée inapte à la suited’un harcèlement sexuelÞ; son licenciement résultant de son refus desubir ces agissements est nul (Soc. 3Þmars 2009, la salariée secrétaire dedirection obtient 50Þ000Þ€ de dommages-intérêts). Comme le ditl’adageÞ: «ÞNul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude.Þ» Ces licen-ciements discriminatoires sont nuls.

Un salarié ne peut pas subir un retard de carrière en raison de son étatde santé ayant entraîné des arrêts de travail (Soc. 28 janv. 2010,SNMCM).

2. Inaptitude

Lorsque, à l’issue des périodes de suspension du contrat de travailconsécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salariéest déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’iloccupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploiapproprié à ses capacités (L.Þ1226-2 etÞs., L.Þ122-24-4).

Quand le salarié est reconnu travailleur handicapé, la proposition dereclassement doit tenir compte de l’exigence d’un «Þaménagement rai-sonnableÞ» d’un poste de travail pour permettre le maintien dansl’emploi, sauf si si les «Þmesures adaptéesÞ» pour permettre le maintiendans l’emploi ont un caractère disproportionné (Dir. 27Þnov. 2000,art.Þ5, préc.Þ; L.Þ1133-4 et L.Þ5213-6Þ; Chap.ÞV).

L’employeur «Þdoit prendre en compte les recommandations du médecin dutravailÞ» (conclusions écrites du médecin du travail et les indicationsqu’il formule sur l’aptitude du salarié à exercer l’une des tâches existan-tes dans l’entreprise «Þet, en cas de refus, faire connaître les motifs qui s’oppo-sent à ce qu’il y soit donné suiteÞ» (L.Þ1226-2Þ; Soc. 14Þoct. 2009, PBR, StéPointÞPÞ; Soc. 23Þsept. 2009, Soc. 20Þsept. 2006).

L’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploi précé-demment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles quemutations, transformations de postes de travail ou aménagement du tempsde travail. «ÞDans l’hypothèse où le salarié conteste la compatibilité du poste,auquel il est affecté avec les recommandations du médecin du travail, il appartientà l’employeur de solliciter à nouveau l’avis de ce dernierÞ» (Soc. 6Þfévr. 2008).

Le médecin du travail peut proposer des aménagements de postes oudes changements d’emploi, notamment en considération de l’âge, de larésistance physique ou de l’état de santé physique ou mentale des sala-riés. Cette règle vaut également pour l’inaptitude psychique, mêmesans suspension du contrat de travail, par exemple en cas d’état dépres-sif (Soc. 28Þjanv. 1998).

En cas de difficulté ou de désaccord, la décision est prise par l’inspec-teur du travail, après avis du médecin inspecteur du travail (L.Þ4624-1,L.Þ241-10-1). C’est la seule voie de recours ouverte à l’employeur ou ausalarié (Soc. 9Þoct. 2001). Le salarié qui conteste l’avis n’a pas à en aver-tir l’employeur (Soc. 3 févr. 2010, Sté Cinéma Le Rialto).

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Le médecin du travail ne peut constater l’inaptitude du salarié à sonposte de travail qu’après une étude de ce poste et deux examens médi-caux de l’intéressé, espacés de deux semaines (R.Þ4624-31, R.Þ241-51-1),ou d’un seul examen dans le cas où le maintien du salarié à son poste detravail entraîne, selon l’avis du médecin, un danger immédiat pour lasanté ou la sécurité de l’intéressé ou celle des tiers (Soc. 4Þjuin 2002,Soc. 30Þmai 2007). L’avis du médecin doit alors indiquer qu’une seulevisite est effectuée et faire état d’un danger immédiat (Soc. 20 janv.2010)Þ; à défaut, le licenciement prononcé pour inaptitude et impossi-bilité de reclassement est nul (Soc. 21Þmai 2008).

Le licenciement prononcé en raison de l’état de santé d’un salarié, dontl’inaptitude n’a pas été constatée dans les conditions réglementaires pré-citées (double examen par le médecin du travail), est nul (Soc. 20Þsept.2006). Il en est ainsi quand les faits reprochés au salarié, licencié pourfaute grave, sont en rapport avec sa maladie (Soc. 28Þjanv. 1998). Un sala-rié souffrant de troubles psychologiques au travail (déficience physiqueou un comportement «ÞanormalÞ») ne peut pas être licencié pour motifdisciplinaire (Soc. 31Þoct. 2006). De tels licenciements sont nuls.

Si le salarié déclaré inapte n’est pas reclassé dans l’entreprise à l’issued’un délai d’un mois à compter de la date de l’examen médical dereprise du travail ou s’il n’est pas licencié, l’employeur est tenu de luiverser, dès l’expiration de ce délai, le salaire correspondant à l’emploioccupé avant la suspension du contrat, et ce même si le médecin du tra-vail a constaté une inaptitude à tout emploi dans l’entreprise (L.Þ1226-4,L.Þ122-24-4).

Le délai d’un mois ne court qu’à partir de la date du second des exa-mens médicaux prévus en cas d’inaptitude (Soc. 28Þjanv. 1998) ou del’examen unique, quand celui-ci est possible (Soc. 6Þfévr. 2008). Danstous les cas, la seule solution est donc de continuer à payer le salarié oude le licencier, la résiliation d’un commun accord du contrat de travailétant ici illégale (Soc. 29Þjuin 1999).

En application de l’ANI du 11Þjanvier 2008, la loi du 25Þjuin 2008prévoit qu’en cas de licenciement, les indemnités dues au salarié autitre de la rupture sont prises en charge soit directement parl’employeur, soit au titre des garanties qu’il a souscrites à un fonds demutualisation (L.Þ1226-4-1).

Désormais, ne constitue pas l’énoncé d’un motif précis de licencie-ment l’inaptitude physique du salarié sans mention de l’impossibilitéde reclassement (Soc. 9Þavr. 2008).

Le choix de l’entreprise de ne pas licencier un salarié déclaré inapte nepeut être contesté par une mutuelle (Soc. 6Þoct. 2010).

3. Autorisations d’absence

Tout salarié atteint d’une maladie grave (au sens duÞ3º et duÞ4º del’article L.Þ322-3 du Code de la Sécurité sociale) bénéficie d’autorisa-tions d’absence pour suivre les traitements médicaux rendus nécessaires

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par son état de santé (thérapies lourdes liées au sida ou au cancer notam-mentÞ; L.Þ1226-5, L.Þ122-24-5). Le Code ne prévoit pas de solutionpour la couverture juridique et financière de ces absences.

Le licenciement est discriminatoire quand il est motivé par un départdu salarié de son poste de travail pour raison de santéÞ: «ÞLe fait de quitterson poste en raison de son état de santé afin de consulter un médecin ne constitue pas,en soi, une faute de nature à justifier le licenciement.Þ» (Soc. 3Þjuill. 2001Þ;Soc. 15 oct. 2003.)

Maternité

La protection de la femme enceinte est assurée pendant le congé dematernité, période de suspension du contrat, mais également avant etaprès cette période. Une femme, du fait qu’elle est ou a été enceinte, nedoit pas faire l’objet d’une discrimination, directe ou indirecte.

A. Recrutement et affectation temporaire

1. Recrutement

L’employeur ne doit pas prendre en considération l’état de grossessed’une femme pour refuser de l’embaucher ou pour rompre son contratde travail au cours d’une période d’essai. La rupture du contrat de tra-vail de la salariée enceinte pendant la période d’essai est nulle (CJCE11Þoct. 2007).

Il lui est en conséquence interdit de rechercher ou de faire recherchertoute information concernant l’état de grossesse de l’intéressée(L.Þ1225-1, L.Þ125-1). La femme candidate à un emploi n’est pas tenuede révéler son état de grossesse (L.Þ1225-2). Lorsque survient un litige,l’employeur communique au CPH tous les éléments de nature à justi-fier sa décision. Lorsqu’un doute subsiste, il profite à la salariée(L.Þ1225-3).

2. Changement temporaire d’affectation

La salariée enceinte peut être affectée temporairement à un autreemploi, à son initiative ou à celle de l’employeur, si son état de santémédicalement constaté l’exige. En cas de désaccord entre l’employeuret la salariée ou lorsque le changement intervient à l’initiative del’employeur, seul le médecin du travail peut établir la nécessité médi-cale du changement d’emploi et l’aptitude de la salariée à occuper lenouvel emploi envisagé. L’affectation à un autre établissement estsubordonnée à l’accord de l’intéressée. L’affectation temporaire ne peutexcéder la durée de la grossesse et prend fin dès que l’état de santé de lafemme lui permet de retrouver son emploi initial. Le changementd’affectation n’entraîne aucune diminution de rémunération (L.Þ1225-7, L.Þ122-25-1). Lorsque la salariée reprend son travail à l’issue du

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congé de maternité et si pendant sa grossesse elle a fait l’objet d’unchangement d’affectation, elle est réintégrée dans l’emploi occupéavant cette affectation (L.Þ1225-8).

3. Risques particuliers

L’employeur propose à la salariée qui occupe un poste de travaill’exposant à des risques déterminés (R.Þ1225-4Þ; agents toxiques pourla reproduction, benzène, plomb, etc.) un autre emploi compatible avecson état lorsqu’elle est en état de grossesse médicalement constatée etlorsqu’elle a accouché, compte tenu des répercussions sur sa santé ou surl’allaitement, durant une période n’excédant pas un mois après sonretour de congé postnatal (L.Þ1225-12 etÞs., L.Þ122-25-1-2).

La proposition d’emploi est réalisée au besoin par la mise en œuvrede mesures temporaires telles que l’aménagement de son poste de tra-vail ou son affectation à un autre poste de travail. Elle prend encompte les conclusions écrites du médecin du travail et les indicationsqu’il formule sur l’aptitude de la salariée à exercer l’une des tâchesexistantes dans l’entreprise. Ces mesures temporaires n’entraînentaucune diminution de la rémunération. Si l’employeur est dansl’impossibilité de lui proposer un autre emploi, il lui fait connaîtrepar écrit, ainsi qu’au médecin du travail, les motifs qui s’opposent àcette affectation temporaire. Le contrat de travail de la salariée estsuspendu avec garantie de rémunération composée de l’allocationjournalière de Sécurité sociale et d’un complément à la charge del’employeur (L.Þ1225-14).

4. Travail de nuit

La salariée en état de grossesse médicalement constatée ou ayantaccouché qui travaille de nuit est affectée sur sa demande à un poste dejour pendant la durée de sa grossesse et pendant la période du congépostnatal (L.Þ1225-9).

Elle est également affectée à un poste de jour pendant la durée de sagrossesse lorsque le médecin du travail constate par écrit que le postede nuit est incompatible avec son état. Cette période peut être prolon-gée pendant le congé postnatal et après son retour de ce congé pourune durée n’excédant pas un mois lorsque le médecin du travailconstate par écrit que le poste de nuit est incompatible avec son état.L’affectation dans un autre établissement est subordonnée à l’accordde la salariée. Le changement d’affectation n’entraîne aucune diminu-tion de la rémunération.

Lorsque l’employeur est dans l’impossibilité de proposer un autreemploi à la salariée travaillant de nuit, il lui fait connaître par écrit,ainsi qu’au médecin du travail, les motifs qui s’opposent à cette affecta-tion. Le contrat de travail est alors suspendu jusqu’à la date du début ducongé légal de maternité et éventuellement durant la période complé-

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