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ÉditionoriginaleparueauxÉtats-Unisen2012sousletitreHerBestFriend’sBrother,parT.J.Dell.
PubliéparAmazonCrossing,AmazonMediaEUSARL
5,ruePlaetis,L-2338,LuxembourgDécembre2015
Copyright©Éditionoriginale2012parT.J.Dell
Tousdroitsréservés.
Copyright©Éditionfrançaise2015traduiteparAntoineBargel
Conceptiondelacouverturepar:bürosüdoMünchen,www.buerosued.de
ISBN:9781503952522
www.apub.com
TABLESDESMATIÈRES
PROLOGUECHAPITREUNCHAPITREDEUXCHAPITRETROISCHAPITREQUATRECHAPITRECINQCHAPITRESIXCHAPITRESEPTCHAPITREHUITCHAPITRENEUFCHAPITREDIXCHAPITREONZECHAPITREDOUZECHAPITRETREIZECHAPITREQUATORZECHAPITREQUINZECHAPITRESEIZECHAPITREDIX-SEPTCHAPITREDIX-HUITCHAPITREDIX-NEUFÉPILOGUEÀPROPOSDEL'AUTEUR
PROLOGUE
«Mmm…Délicieux,»ditTonyMarchettiense fourrantuncookieauxpépitesdechocolatdanslabouche.
Il rafla les deux qui restaient dans l’assiette et les glissa dans la poche de poitrine de sachemise.
« ’erci’ibby, » marmotta-t-il en sortant par la porte vitrée, laissant une traînée de miettesderrièrelui.
LevisagedeLibbyMcKays’illuminad’ungrandsourire,quipersistaunlongmomentaprèsque Tony eut disparu. Libby savait que ses cookies étaient délicieux. Et que les préférés de Tonyétaient ceuxauxpépitesdechocolat.LamèredeLibbyétaitpâtissièreet elle lui avait transmis sessecretsdefabrication.CelafaisaitdeuxansqueLibbyétaitamoureusedeTony.Uneéternité,quandona9ans.
LibbyavaitrencontréMélanieMarchettileurpremierjourdeCE1.Quatrejoursplustard,unvendredisoir,LibbyetMélanieétaientenpyjamadevantlatélévision,occupéesàsefairedestressestoutenpiochantdansungrandboldepop-corn,quandlaportedelacuisineavaitclaqué.Libbyavaittourné la tête et vu apparaître un garçon couvert de boue des pieds à la tête.Celui-ci s’étaitmis às’extrairedesonmaillotdefootballenjouantdescoudes,puis ilavaitutilisé l’intérieurdumaillotpour s’essuyer le visage. La boue avait laissé place à un doux regard brun.Des cheveux noirs enbataille lui tombaient sur le visage. Il avait enlevé ses chaussures et les avait emmenées dans labuanderie de la familleMarchetti.Lorsqu’il était réapparu, il portait un jeanpropre et un tee-shirtblancimmaculé.Sonvisageetsescheveuxétaienthumides,commes’ils’étaitcontentédes’aspergeraurobinet.Toutceciavaiteulieuenàpeuprès45secondes.Et,pendant45secondes,Libbyavaitfixélascèneduregard,labouchegrandeouverte,enretenantsonsouffle.
«C’estquitacopine,TêtedeNatte?»Legarçonavaitfaitletourducanapé,étaitvenutireruncoupsecsurlescheveuxtressésavec
soindeMélanieavantdeselaissertomberdansunfauteuilenfacedesdeuxamies.LescheveuxdeMélanieétaientexactementdelacouleurqueLibbyauraitaiméavoir–unblondpâlepresqueargenté.Libbylesavaitminutieusementarrangésenunelonguetressequiluitombaitsurlanuque.Quantàsespropresbouclesnoires,ellesformaientdeuxtressesfaitesàlava-vite.Pasvraimentdesnattes,maistoutdemême,Libbylesavaitdiscrètementdéfaites,détestanttoutàcoupcettecoiffurepuérile.
«Nem’appellepascommeça!»avaitrépliquéMelenlançantunepoignéedepop-cornendirectiondesonfrère.
Celui-cis’étaitpenchéenavantenouvrantgrandlabouchepouressayerd’attraperlesgrainsdemaïs.
«Ilenfautdeuxpourfairedesnattes!Libby,voiciTony,monfrère.Ilm’appelletoutletempscommeça,mêmesijen’aipaseudenattesDEPUISLAMATERNELLE!»
Elleavaitcriécesderniersmotsensetournantverssonfrère.«Oui,maisc’étaittouslesjours,àlamaternelle,»avaitditTonyengloussant.Puisilavaitbalayédelamainlesgrainsdepop-cornquisetrouvaientsursont-shirtetilétait
sortidelapièced’unpaslent.Et c’était tout cequ’il avait fallu àLibbypour tomber amoureuse.Ellen’enavait riendit à
Mel.Elleavaitsafierté,aprèstout.EtpuisTonyavait11ans–ilétaitaucollège!Dès cette première semaine d’école, Mel et Libby étaient devenues inséparables. Elles
déjeunaient ensemble à la cantine et faisaient leurs devoirs ensemble chezMel après les cours.Lesamedi,ellesjouaienttantôtdanslegrandjardindeMelettantôtdansleparcenfacedel’immeubledeLibby.Lapremièresemainedejanvier,ellesavaientfêtéleuranniversaireensembleàlapatinoire.En fait, l’anniversaire deMel était en décembre, mais elle avait bien voulu attendre, car de toutemanière personne n’a envie d’aller à une fête d’anniversaire juste avant Noël. En juin, quand lafamilleMarchettiavaitpasséunesemaineàlaplage,ilsavaientinvitéLibbyàsejoindreàeuxet,enjuillet,quandLibbyetsamèreavaientpasséunlongweek-endàWilliamsburg,Melétaitdelapartie.Biensûr,lasemainepasséeàlaplageavaitaussieul’avantagedemettreànouveauLibbyenprésencedeTony.
Rienn’avaitchangé l’annéesuivante, si cen’estqueMeletLibbyavaientdûendurer le faitd’êtredansdesclassesdifférentes.Maiselleséchangeaient toujours leurssandwichesà lapausedemidi, et elles regardaient toujours la Petite Sirène tous les week-ends, et Libby était toujoursamoureusedeTony.Et ilenfutainsiàmesureque lesannéespassaient,LibbyetMélaniedevenanttoujoursmeilleuresamiesetaussiprochesquedeuxsœurs.
CHAPITREUN
«Elleestrouge.»Libbyfaisaitfaceaumiroirtripledelacabined’essayage.Elleavaitmaintenant16ansetelle
commençait à bien aimer ce qu’elle voyait dans la glace. Ses cheveux étaient toujours d’un brunsombre et banal,maisMel avait passé l’été précédent à s’entraîner à faire des teinturesmaison, etLibby récoltait les fruits de ces efforts sous la forme de reflets noirs de qualité presqueprofessionnelle.Deplus,aucoursdel’annéepassée,sasilhouettes’étaitnettementépanouie.Grandeet svelte, Mel était plus élégante mais, secrètement, Libby préférait ses propres courbes. La roberougeenserraitsapoitrineabondanteettombaitjustecommeil fautsurlarondeurdeseshanches;cettemêmerobeauraitsemblévideportéeparsonamie.
«Çanesefaitpasdeporterdurougeàunmariage.»Libbysetournalégèrementpouradmirerlamanièredontl’étroitfourreaus’entrouvraitpour
révélerunedeseslonguesjambes.«C’estunmariagequialieuàNoël,Lib.Jenepensepasquelarègles’applique.Enplus,elle
n’estpasvraimentrouge,plutôtbordeaux.»Melsoupirad’unairmélodramatiqueetselaissatombersurunechaise.«Tunepeuxpassérieusementsongerànepaslaprendre.Elleestfaitepourtoi.Siquelqu’un
d’autrelaportait,tupourraisluifaireunprocès!—Cen’est pasnonplusunepièceunique ; il y en a touteune rangéed’autres entièrement
identiquesquiattendentdeviderleportefeuilled’autresfillesquemoi.»Libbyavaitl’habitudedesexagérationsdeMel,maiselleconsidéraittoutdemêmequec’était
sondevoirdefairesortirsonamiedesesmagazinesdemodeetdelaramenersurterredetempsentemps.
«Etmêmesicen’estpasdelahautecouture,leprixn’estquandmêmepasnégligeable.»Libbyfitlagrimaceenmontrantl’étiquetteetensongeantaunombredefournéesdecookies
qu’illuifaudraitpréparerpourcouvrirleprixdecetterobe.Mêmesicen’étaitpasdésagréabledetravailleraucafé-pâtisseriepleindecharmequetenait
samère.Libbyadoraitfairedesgâteaux,etc’étaitcertainementmieuxqued’êtrevendeuseaucentrecommercialcommeMel.Cequi lui rappelaque lapausedéjeunerdeMelétaitpresque terminéeetqu’il fallait qu’elle sedécide si ellevoulait profiter, sans l’ombred’un scrupule, de la réductionàlaquellesonamieavaitdroitentantqu’employéedumagasin.
«Jedevraispeut-êtreréessayerlarose?»Elletenditlamainverslarobedesoiréequ’elleavaitchoisiedanslerayondessoldes.
«Hors de question. C’est une cérémonie d’adultes et cette robe conviendrait à une fête depetitefille!»
Melinspiraprofondémentetreprit,d’untonqu’ellecroyaitsansdoutedétaché:«Tonyarrivecesoir.Jenetel’avaispasdit?Iladécidéqu’ilavaitbesoind’unepauseaprès
sesexamens,finalement.Etçal’embêtaitderaterlemariaged’Olivia,danstouslescas.»Libbysentitsonestomacseconvulser.«Jecroyaisqu’ilavaittrouvéunpetitboulotpourlesvacancesd’hiver.— Oui, c’est vrai. Dans un journal, comment est-ce que ça s’appelle… La Gazette… Les
Nouvelles…Oh, peu importe. Il ne commence que lundi et les parents lui paient le billet d’avion,alorsilarrivecesoir,ilrestedemainpourlemariageetilrepartdimancheaprès-midi.»
Enfait,c’étaitLaDépêchedeTrenton.TonyavaitlouéunstudiopascherdansleNewJerseypourdeuxmois, le loyerallait luiprendrepresque tout son salaire,mais il était tellementheureuxd’avoirce jobqu’ilauraitétéprêtàyperdre.C’étaitpourcette raisonqu’ilavaithésitéàveniraumariagedesacousine.Ilavaitpeurquelebilletd’avionnelemettesurlapaille.Mais,biensûr,Libbyn’allaitpassemettreàcorrigerMel.D’autantmoinsqueMélanien’étaitpasprécisémentaucourantdufaitqueLibbyetsonfrèreavaientétéencontactdernièrement.Enfin,encontact…cen’étaientquedebrefse-mailsetquelquesconversationsnocturnessurmessagerieinstantanée.
Riendebiensérieux.Ildevaitsimplementsesentirunpeuseulloindechezlui,etcommesonorgueildemâle l’empêchait sansdoutedeparler tropsouventàsapetite sœur,Libbysedisaitquec’étaitsûrementunefaçonderesterconnectéàTaylorsville.C’étaitunesipetitevillequ’ellen’avaitmêmepassapropregazette.Iln’avaitdoncguèred’autremoyendeseteniraucourantdesnouvelleslocales.
Cela étant, il n’y avait pas grand-chose à raconter. Deux ou trois fois par semaine, elleressentait une pointe d’excitation en ouvrant ses e-mails et en trouvant un message [email protected]îtederéception.Cen’étaitengénéralquetroisouquatrelignes.Ilracontaitquelquechosed’amusantquiluiétaitarrivécejour-là;dernièrement,ilseplaignaitquesesexamensétaientplusdifficilesque l’annéeprécédente. Il luiposaitparfoisdesquestions surcequ’elle faisaità l’écoleouà lapâtisserie.Unefois, il luiavaitenvoyéunMMSavec laphotod’ungars en train d’utiliser un rasoir électrique dans le métro et la légende : « On ne voit ça qu’àNewYork!»C’étaitlaseulefoisoùilluiavaitenvoyéunmessagesursontéléphoneetelleregardaitcette photo stupide à peu près douze fois par jour.L’image la faisait tant sourire qu’elle devait seretenirdelaregarderquandelleétaitavecMel.Pardeuxfois,lorsqu’elles’étaitconnectéeàsaboîtemailtardlesoir,TMarchettiavaitapparudansunefenêtredechatenhautdel’écran.Lesdeuxfois,ilsavaientbavardépendantplusd’uneheure.Elletrouvaitfaciledeparleraveclui;surtoutenligne,carellenedevaitpas se retenirde tomberdans lespommesàchaque foisqu’il souriait, etcelaévitaitqu’ilyaittropdesilencesgênantsdanslaconversation.
Tonyétaitendeuxièmeannéeà l’universitéColumbiaàNewYork.Libbysavaitqu’ilvenaitd’opterpourlejournalisme.Ellepensaitquecelaluiconvenaitbien;Tonyétaitàl’aiseaveclesmots.Quandilsétaientenfants,c’étaittoujoursluiquiracontaitlesmeilleureshistoiresàfairepeur.
«Etilvientavecnous,aumariage?»Libbysentitsonvisagerougiretelleseconcentraintensémentsurl’ourletdelarobequ’elle
essayait.C’étaithumiliant,denepassavoiraffecterunairdétachécommeMellefaisaitsibien.«Iln’amènepasdecopine,sic’estcequetuveuxdire.»Melpartitd’ungrandsouriredansledosdeLibby,sourirequelemiroirreflétatroisfoisà
cettedernière,enuneimagehorrifiante.«Ilestgrandtempsqu’ilserendecomptequetun’esplusunepetitefille,etcetterobedevrait
clairementluienvoyerlemessage.
—Nesoispasridicule,Mel,»ditLibbyenrougissantetendécidantenmêmetempsd’acheterlaroberouge.
Onn’étaitjeunequ’unefois,pasvrai?EtellepourraitfairedesheuressupplémentairesàlapâtisseriependantlapériodedeNoël.
«Arrête.Çafaitdesannéesquetunepensesqu’àlui.Mêmesijenecomprendspaspourquoi—tuasvusachambre?Ondiraitundépotoir!
—Jen’aipasl’habitudedepasserdutempsdanslachambredetonfrère,»lançaLibbydepuisl’intérieurdelacabineoùelleremettaitsesvêtementsàlahâte.
Cen’étaitpastoutàfaitvrai,maisilyadeschosesqu’ilestpréférabledegarderpoursoi–surtoutlorsqu’onestamoureusedufrèredesameilleureamie.
«Laroberouge.Tuasraison,elleestparfaite,etavectaréduction,jepeuxmel’offrir.—Super.Jesuisquasimentsûrequemapausedéjeunerestfiniedepuisquatreminutes.»Mel tendit le bras pour que Libby lui donne la robe en sortant de la cabine, et elles se
dirigèrentensembleverslacaisse.«Cen’estpasquejesoisraviequeçan’aitpasmarchéavecCory,maisbon,jesuiscontente
d’alleràcemariageavectoi,»ditMelenprenantsameilleureamieparlebras.Meletsonpetitami,Cory,s’étaientséparésaprèsqueMelavaitdéjàréponduqu’elleviendrait
accompagnée aumariage, et c’était pour cela queLibby, appelée à la rescousse, devaitmaintenants’achetercetterobesibelleetquidisait«jenesuisplusunepetitefille».
«Jesuiscontentequetuviennes,tusais.Jenesaispascequetutrouvesàmonnigauddefrère,maisilseraitmieuxavectoiqu’avecmademoisellecolrouléetlunettesœil-de-chat.
—Quoi?»Malgré ses années d’entraînement qui lui permettaient en général de suivre le fil parfois
fantasquedesidéesdeMel,cettefois,Libbyséchait.«ÀThanksgiving,jesuisalléevoirTonyàNewYork,histoiredefairedescoursesdeNoël.
J’aidûm’acheterplusdechosespourmoiquepourtousmescadeauxréunis,maisçavalaittroplecoup.J’auraisdûretournerprendrecettepairedebottes,parcontre…
—Mel!—Oui,excuse.Quandjesuisalléelevoir,ilyavaitunefille,Stéphanie,quitraînaittoujours
aveclui.Ilsontpasmaldecoursencommun,apparemment.Elleportaittoutletempsdescolsroulés.Ilne faitpassi froidqueça, àNewYork, et elle avait des lunettesœil-de-chat.Pasdes lunettes desoleil rétro super mignonnes, non. C’étaient de vraies lunettes de vue des années 1950, genre tut’attendaisàcequ’ellespendentauboutd’uncordon!»
Bon, les remarques sur les lunettes, c’était tout Mel. Personnellement, Libby était plutôtindifférente au genre de lunettes que préféraient les autres,mais une fille ?Qui était souvent avecTony?Etilneluienavaitpasparlé…elles’enseraitsouvenue!
«Donc ils sont ensemble,mais pas aupoint qu’elle l’accompagne àunmariage, ni qu’ellepasseleweek-endavecluienCarolineduNord,ni…»
Libby s’interrompit. C’était trop horrible. Tony. Une fille. Des lunettes œil-de-chat. Tout àcoup,ellesetrouvaentièrementd’accordavecMel,ceslunettesdesannées1950étaientcomplètementringardes.
«Jenesaispas.J’aieul’impressionqu’ilsétaientsortisensembledeuxoutroisfois,maiscen’estpascommes’ilétaitfouamoureux.Etilvaadorercetterobe.Tusais,Oliviaetluin’ontjamaisété trèsproches.Jenecroispasqu’ilétait très tristederater lemariage,mais l’autre jour je luiaiparlédeCory–etjeluiaiditquetuallaism’accompagneràsaplace.Ethop.Ilrevientpourleweek-end.Çadonneàréfléchir.»
MaistoutceàquoiLibbyréfléchissaitenmarchantverssavoitureavecsessacsdecourses,
c’étaitlamisscolrouléavecseslunettesœil-de-chat.Stéphanie.Mêmesonprénométaitringard.Enréalité,Libbyavaitunetantequis’appelaitStéphanieetellen’avaitjamaistrouvéquoiquecesoitàredire à ce prénom.Mais elle n’était pas objective, à l’époque –maintenant elle était l’objectivitéincarnée.Quandmême,iln’yavaitpasdequois’inquiéter.EllesavaitqueTonysortaitsouvent;qu’ilavaiteudescopines.Certainesd’entreellesétaientmêmevenuesdînerchezlesMarchettidessoirsoùLibbyétaitprésente.Maismaintenant,est-cequ’elleavaiteu tort,cesderniers temps,depenserqueTonyetelleétaientdevenusplusprochesqu’avant?L’annéeprécédente,quand ilétaitenpremièreannéed’université,ilneluiécrivaitpasd’e-mails.Etpuisilyavaiteutoutescesnuitspasséesdanssachambre.
L’été passé, quand la mère de Libby avait été invitée à donner un cours de pâtisserie enPennsylvaniependantdeuxsemaines,LibbyavaitpasséquatorzejoursderêvechezlesMarchetti.Et,si elle ne s’était pas réjouie quandMel avait attrapé une sérieuse gastro qui l’avait alitée les cinqderniersjours,elleavaittoutdemêmeacceptéavecempressementlapropositiondeTony,quiavaitproposédedormir sur le canapédu salon et de lui laisser sa chambre, pour qu’elle ne risquepasd’êtreinfectéeàsontour.
Tony avait fait unpetit effort de rangement, et bien sûrmadameMarchetti avait changé lesdraps,maisc’étaittoutdemêmesachambre.Sonlit.Sonespace.Rienqu’enyrepensant,Libbyavaitlachairdepoule.LemardioùMelavaitcommencéàsesentirmal,lanouvelleorganisations’étaitmiseenplaceetLibbyétaitinstalléedanslachambredeTonydès19heures.Ilétaittroptôtpoursecoucher,mais,pourlapremièrefoisdepuishuitans,elles’étaitsentiemalàl’aisedanslelogisdesMarchetti.Lesalonétait transforméenchambre temporairepourTony,etcelane lui laissaitguèred’options.Elles’étaitdoncmiseenpyjama,avaitempruntéunlivredanslabibliothèquefamilialeets’étaitinstallée,unpeunerveuse,surlelitdeTonypourylireenattendantquelesommeillagagne.
Elle avait failli ne pas entendre les premiers coups frappés à la porte.Mais des coups plusfortsavaientretenti.
«Libby?Tunedorspasdéjà?»LavoixdeTonyluifaisaittoujoursbattrelecœurd’excitation,maiselleseforçaàrépondre
calmement.«Non.Entre.Tuessûrqueçanetedérangepas?dit-elleenindiquantl’endroitoùelleétait
assise.—Bien sûr que non, dit Tony en faisant la grimace et en secouant la tête.On te l’a dit un
milliondefois.Çanemedérangepasdedormirsurlecanapé–mamanneveutpasquej’aielatéléici et, à la fac, j’aipris l’habitudedem’endormiravec l’émissiondeLetterman. Jemedisais justequ’ilétaitencoretôt.Depuisquejeteconnais,jenecroispast’avoirvuetecoucheravantminuit.
—C’estqu’engénéralj’aidesrituelssecretsettrèsimportantsàaccomplir…»Libbycommençaitàsedétendre,serendantcomptequeparleràTonydanssachambreeten
pyjaman’étaitpasaussiétrangequ’ellel’avaitimaginé.Saufqu’elleneportaitpasdesoutien-gorgeet, récemment, c’était quelque chose qui avait commencé à se voir. En frissonnant nerveusement,Libbyregardaautourd’elleàlarecherched’unmoyendesecouvrirdiscrètement.
Tonyavaitdûlavoirfrissonner,carilpritunsweatàcapuchebleusurunportemanteauetleluijeta.
«Tiens…ilpeutfairefrisquet,lesoir.»Ilsedétournaquelquessecondessousprétextederedresserlecadrequicontenaitsondiplôme
delycée.«Merci.»Libbyseglissadanslesweatenhumantunmélanged’eaudetoiletteetdelessive–unparfum
quiévoquaitdistinctementTony.
Lorsqu’ellelevalesyeux,celui-cilaregardaitunpeubizarrement.«Ilestpropre.Jel’aimisquelquesinstantshier,maisseulementpourallerjusqu’àlaboîteà
lettres,ilestpropre.—Okay,okay,ilestpropre.»Libby en vint presque à se demander si c’était lui qui était le plus nerveux, mais c’était
probablementsonimaginationquiluijouaitdestours.TonyhaussalesépaulesetfitapparaîtreunevieilleboîtedeMonopolyqu’iltenaitsouslebras.« Je me disais qu’on pourrait faire une partie. Il est peut-être temps qu’on développe nos
propresrituelssecrets.»Il avait dit cette dernière phrase d’un ton taquin et, bien que le cœur de Libby menaçât
d’exploser,ilscommencèrentàsesentirplusàl’aisetouslesdeux.Tonys’assitentailleuraupieddulitetinstallaleplateaudejeudevantlui.
Ilsjouèrentpendantdesheures,sanscesserdediscuter.C’étaitlapremièrefoisqueLibbyavaituneconversationunpeulongueavecTonysansqu’unautremembredelafamilleMarchettinesoitprésent. Et ils parlèrent de bien des choses.D’abord, ils débattirent des stratégies qui faisaient leschampions deMonopoly : les terrains verts ou les bleus (les verts, bien sûr), les compagnies deservicesoulesgares(lesgaresétaientpréférables,àconditiond’avoirlesquatre).Puisilsabordèrentdenouveauxsujets,leurvie,lescours,lafac.Libbyavouaqu’elleavaitessayéd’intégrerl’équipedepom-pomgirlsendébutd’annéeetTonyéclataderire.
«Tuseraisatroce,commepom-pomgirl.—J’étaispassimauvaisequeça,»murmuraLibbycommepourelle-même.Ellepensaitpouvoirsautersurplaceenfaisantlacoquetteaussibienquequiconqueet,deplus,
ellesavaittrèsbienqueTonyétaitsortiavecEllenKirkpatrickpendantplusieursmois,enterminale,etEllenétaitlaplusenthousiastedespom-pomgirls.
«Nefaispaslatête,Libby,ditTonyengloussantetensecouantlatête.Touslesans,tuviensicivoirleSuperBowl,touslesanstumefaisexpliquerlesrèglesdufootaméricain,ettouslesanstut’endors avant que j’aie terminé ! Et c’est le match le plus excitant de l’année. Impossible que tutienneslecoupàsuivreunmatchdelycéetouslesvendredisdelasaison.Impossible.
—Tuassansdouteraison,ditLibbyensemordantlalèvreetencalculantleprixdePacificAvenue.Jepenseessayerl’athlétismeàlaplace.J’aimebiencourir.»
Tonys’immobilisaunmomentetlaregardalentementdespiedsàlatête.«Ouais.»Savoixétaitunpeuplusrauquequed’habitude.«Çanem’étonnepas.Tuasdesjambesdecoureuse.»Lesimplesouvenirdecet instantoù ilavaitposé lesyeuxsurses jambesétenduessur le lit
suffisaitencoreaujourd’huiàlafairerougir.Detempsentemps,Tonyluisouriait.Commelorsqu’elleluiavaitditqu’ellesesouvenaitdes
histoiresqu’ilracontaitquandilsétaientenfants,etqu’ellepensaitquelejournalismeétaitunebonnevoiepourlui.Cen’étaitpluslesourirehabitueldeTony,heureuxetsatisfait,maisunnouveausourirespécial Libby. Quand elle ne parvint plus à contenir ses bâillements, ils regardèrent l’heure qu’ilétait:lematinétaitdéjàlàetTonyavaitmanquésonémissiondepuislongtemps.
«Onditquec’estmatchnul?Ouoncomptequialeplusd’argent?»TonyeutunsourireruséetLibbydevinaexactementcequ’iltentaitdefaire.«Pasquestion,monsieurMarchetti!J’aitroiscouleurspleines!Tuaspeut-êtreunpeuplus
d’argent,maisencorequelquestoursetceseramoi!Pasmoyen–onfinirademainsituveux.— Et comment je sais que tu ne vas pas tricher pendant la nuit ? » dit Tony d’un air
d’indignationexagérée.
Ilsavaientdoncécritprécisément la listede leurspropriétéset lasommed’argentpossédéeparchacun,allantmêmejusqu’àapporterleplateaudejeudanslegarageetàverrouillercedernier.Unefoislaporteferméeàclé,etcettedernièreglisséesolennellementsouslaportedemonsieuretmadameMarchetti (pourplusde sécurité), leurhilarité avait été telle (enprenant encompte le faitqu’ilétaitàprésentpresquedeux2heuresdumatin)qu’ilsn’avaientpusereteniretavaientexploséderire.
Anthony Marchetti, gloussant comme une collégienne ! Libby ne pouvait s’empêcher desourireenyrepensant.
Ilsavaientreprisleursouffle,puisTonyl’avaitraccompagnéejusqu’àsachambre,etpendantun interminable moment, une certaine tension était réapparue. Une tension excitante. Arrivée à laportedelachambre,elles’étaitretournéepourluidirebonnenuitetavaitconstatéqu’iln’étaitqu’àquelquescentimètresd’elle.Unbrasposécontrelecadredelaportepar-dessusl’épauledeLibby,ilétaitpenchéverselle,siprèsqu’ellepouvaitpresquesentirsonhaleine.Illuivintàl’espritqu’ensecourbantunpeuversluiellepourraitsentirsontorsemusclécontresapoitrine.Aprèshuitétéspassésensembleàlaplage,elleavaituneassezbonneidéeduphysiquedeTony.
«C’étaitsympa.Tusais,Libby,jecroisquec’estlapremièrefoisqu’onjouecommeçatouslesdeux.Ondevraitremettreçabientôt.»
Savoixétaitchaudeetrauque.Est-cequ’ilétaitentraindeflirteravecelle?Non,cen’étaitpaspossible—maistoutdemême,quelquechoseavaitchangé,toutàcoup.
«Onpourrafinirlapartiedemain,etonjouetoutletempsauScrabbleàlaplage.»Le Scrabble était le passe-temps préféré desMarchetti pendant les vacances. Tony eut l’air
surprisuninstant,puissonsourireréapparut.Maiscen’étaitpluslesourirespécialLibby,c’étaitsonsouriredetouslesjours.
«Bonnenuit,Lib.»Tonyse redressa, tendit lebraspourouvrir laportederrièreelle, fitdemi-tourets’éloigna
dans lecouloir.L’espaced’un instant fantasmé,elleavaitcruqueTonyallait l’embrasser.Mêmesielleétaitépuisée,elleavaitmistrèslongtempsàs’endormircettenuit-là.Elleavaitbienfaillinepasseréveilleràtempspourlepetit-déjeunerpréparéparmadameMarchetti.
Lanuitd’après,Tonyavaitapportélefauteuildebureaudesonpère,plutôtquedes’asseoirsur le lit.Lachambreenavait l’air encorepluspetite etLibby se sentitpresque tristed’êtreassiseseulesurlelit.
« Je ne dois plus avoir l’âge de rester toute la nuit assis sans dossier, » plaisanta Tony ens’installant.
Pendantunebrèveseconde,ellecrutlevoirregarderd’unairderegretl’endroitoùils’étaitassislaveille.
LapartiedeMonopolyavaitduréencoretroisnuits.Tonyparvenaitàresterdanslejeuàcoupd’échangesstupidesetdemanœuvresdésespérées.Entoutehonnêteté,Libbylelaissaitfairepourquelapartiedureplus longtemps ; ildevait sûrements’en rendrecompte,maiscelanesemblaitpas ledéranger.Detempsentemps,savoixbaissaitd’uneoctaveetillataquinaitdecettenouvellemanièrequilarendaittoutechose,maisl’instantoùelleavaitsentisonhaleinenes’étaitpasreproduit.Ellenes’étaitplusdemandé«est-cequ’ilvam’embrasser»aumomentdesedirebonnenuit.Chaquesoir,ilsrangeaient le plateaude jeu comme s’il s’était agi de la partie deMonopoly la plus importantedel’histoire du Monopoly et, chaque soir, Libby restait éveillée bien trop tard dans la nuit, à seremémorertoutcequ’ilss’étaientditetchacundeleurssourires.
Levendredisoir,Tonyavaitenfinadmis,àcontrecœur,sadéfaiteauMonopoly.Ilétaittemps,puisqueleséjourdeLibbychezlesMarchettiseterminaitlelendemain.
«Libby?»
Tonyinspiraprofondément.«Libby,c’estvraiquetuaimaisleshistoiresquejeracontaisquandonétaitpetits?—Jenesaispassic’estlemotjuste–tasœuretmoionétaitterrifiéespendantdessemaines
aprèscoup…Mais…ouais.Ellesétaientbien.— Tu sais que je les écrivais aussi ? Et pas seulement quand on était petits, j’en ai écrit
plusieursaussipendantquej’étaisaulycée.Jetrouvequeçaseraitsympa,d’écrirequelquechosequeles gens lisent pour de vrai. Pas seulement un article de journal qu’on recycle le lendemain,maisquelquechosequelesgensgardentsuruneétagèreetrelisentdetempsentemps.
—Unlivre.Tony,tuparlesd’écrireunlivreetjetrouvequec’estfantastique.»Libbyeutungrand sourirepleinde joie, car elle savait queTonyétait en traindepartager
quelquechoseavecelle,etaussiparcequ’ellesavaitqu’ilétaitcapabled’écrireunlivremerveilleux.Tonyluirenditsonsourire.UnsourirespécialLibby.«Ouais,unlivre.J’aienvied’écrireunlivre.»Ilpoussaunlongsoupir.«Jecroisquejepourraislefaire.Unrecueildenouvelles,oupeut-êtrequejetenterailetout
pour le tout et que j’essaierai d’écrire un roman. Un thriller. C’est sympa, un bon thriller, tu netrouvespas?»
Il avait parlé sans s’arrêter etLibby s’était tellement laissée envahir par l’excitationqu’elles’étaitjetéedanssesbrasens’exclamant:
«Fais-le,Tony.Tentetout,çavaêtresuper!»Unesecondeplustard,elleavaitréalisécequ’elleavaitfait.Et,despiedsàlatête,elleavait
sentisoncorpss’éveiller.Lentement,presqueenhésitant,lesbrasdeTonys’étaientreferméssursataille.Il l’avaitàpeinetouchéeaudébut,puistoutàcoupil l’avaitserréefortcontrelui.Sesmainss’étaientouvertescontreledosdeLibbyetavaientpressésapoitrinecontrelasienne.Elleavaiteuenvied’ouvrirlesmainscontresondosàluietdesentirlesmusclesqu’ellesavaits’ytrouver,pourlesavoir longuementobservés.Mais,uninstantplustard, ilavaitposélesmainssurseshanchesetl’avaitdélicatementécartéedelui.
«Merci,Lib.»Sanslaquitterdesyeux,ilavaittendulamainverssonbureauetenavaitsortiunvieuxcahier
àspirale.« Tu pourrais peut-être lire celles-ci. Juste pour me dire si elles sont bien. Vraiment, j’ai
besoind’unavissincère.»Tonyluitenditlecahier.«Lesplusrécentessontàlafin.Jesaisqu’ilyadesfautesd’orthographe,mais…»Ilparlaitpourneriendire,enrougissant.TonyMarchettiquiperdaitsonhabituelleconfiance
enluidevantelle!C’étaitclairementundesmeilleursmomentsdesavie.«Pascesoirvuquejenepourraissûrementpasdormiraprès,maisdèsquelesoleilseralevé,
jeseraitrèsheureusedeleslire.—Mais…personned’autren’estaucourant,tuvois?Paslapeined’enparleràMel.—Biensûr!Jen’enparleraiàpersonne.»Elleavaittrouvévexantqu’ilcroienécessairedelepréciser.Ils’agissaitbiensûrdequelque
chosedepersonneletellen’auraitjamaisimaginéenparleràquiconque.«Jelesaisbien,Lib.Jetefaisconfiance.»Il s’étaitpenchédélicatementetavaitpresséses lèvrescontresonfront.Sonfront !Comme
uneenfant!Maisc’étaittoutdemêmeunbaiseretelles’étaitsentiepleined’espoir.Sesnouvellesétaientvraimentbien–maintenantqueLibbyétaitassezvieillepournepasfaire
decauchemarslesnuitssuivantes.C’étaitcommecelaqu’ilsavaientcommencéàs’écrire.Elles’étaitmiseàluiécrireune-mailàchaquefoisqu’elleterminaitl’unedesnouvelles,etilluiavaitrépondu.Une fois terminée ladernièrenouvelle, ellen’avaitpaseuenvied’arrêterde lui écrire.Et il le luiauraitsansdoutefaitcomprendresi,desoncôté,ilenavaiteuassez?
C’étaitidiot.Ellen’avaitpasderaisondesemettreàdouterd’elle-même.Ilsn’avaientjamaisétéaussiproches.Elleétaitlameilleureamiedesapetitesœurdepuislongtemps.Etmaintenantelleétait aussi sonamieà lui.Même si elledésirait de tout soncœurdevenirdavantagequ’une simpleamie,c’étaitdéjàquelquechose.Cen’étaitpaslemomentdedouter.Etlaroberougeétait…parfaite.
CHAPITREDEUX
C’étaitsansdoutetrop?Non.Elleétaitsplendide.LibbyseregardaitdanslegrandmiroirdelachambredeMeletellenesavaitquoipenser.ElleavaitpasséplusdetempsàsepréparerqueMel,alorsquecelle-ciétaitdemoiselled’honneur!MaisMels’étaitcontentéed’enfilersonéléganterobefourreau couleur or, de placer quelques épingles à cheveux stratégiques et de semettre un peu demaquillageavecundoigtédeprofessionnelle.Endeuxminutes,ellesemblaittoutdroitsortied’undesesmagazinesdemode.Libby,enrevanche,avaitpasséplusd’uneheureàs’impatienter tandisqueMeltirait,épinglait,torturaitsesbouclesjusqu’àcequ’ellesaientl’airdes’écartersanseffortdesonvisage,saufquelques-unesquis’étaientéchappées.Melluiavaitaussifaitsonmaquillage.Leproduitfini qu’elle examinait à présent dans le miroir avait l’air bien plus intense que ce à quoi elles’attendait,maiselledevaitreconnaîtrequelerésultatétaitspectaculaire.Libbyfaisaitplusd’unmètresoixante-dixetelleévitaitengénéraldeporterdes talons,maisMelavaiteuraisond’insisterpourqu’elleportedepetitstalonsaiguilles–etpuisTonyétaitassezgrand,plusd’unmètrequatre-vingt.
«Non, c’est trèsbien.EtTonyvaadorer, »ditMel enapparaissantdans lemiroirderrièreLibby.
EllesavaittoujoursdevinercequeLibbypensait.«Oui, c’est bien. Je vérifiais juste que tout est en place, » se défendit inutilementLibby en
s’écartantdumiroir.Ladiscussionfutinterrompue,àsongrandsoulagement,partroiscoupsfrappésàlaporte.«Vousêtesprêtes?Bonsang, sionnepartpas toutdesuite,onvaêtreen retard !» lança
Tonyàtraverslaporte.Mel était censée arriver en avance à l’église pour prendre des photos et Tony les
accompagnait pour queMel puisse quitter la cérémonie en limousine avec les autres demoisellesd’honneur.Donc,mêmesiellesn’étaientpasvraimentenretard,ilétaiteneffetsansdoutetempsd’yaller.
«T’emballepas,frérot!criaMeltoutentendantunsacàmainenperlesàLibbyetenglissantsaproprepochettesoussonbras.
—Onatoutletemps,maisallons-y!»Melouvrit laporteets’engageadanslesescaliers.Libbyhésitauninstantdansl’embrasure.
C’était la première fois qu’elle voyait Tony en costume cravate. Ses cheveux d’habitude négligésétaientcoupéscourtet,mêmesid’habitudeelleaimaitlevoirécarterlesmèchesdesesyeux,làelledevait reconnaître que ce nouveau style lui donnait l’air… eh bien, d’un adulte. D’un adulteincroyablementsexy.Libbyprituninstantpoursemaîtriseretnepaslaissersalanguependrehorsde
sabouche.Tonyluijetaunregardetémitunpetitsifflement.«LibbyMcKay…C’estqu’onagrandi…»Vraiment,ilvenaitjustedelasiffler?Commentétait-ellecenséerépondre?Etpourquoiest-
cequ’iln’arrêtaitpasdelaregarder?«Tuesprête,Lib?»TonyluitenditlebrasetLibbycompritqu’ilattendaitqu’elleavance,biensûr.Sansriendire,
carelleavaitpeurquesavoixlatrahisse,LibbypassalamainsouslecoudedeTonyetlelaissalaconduirejusqu’àlavoiture.
Àl’église,Melfutréclaméepourlaséancephoto,cequilaissaLibbyetTonyseulspendanttroisquartsd’heureavantlacérémonie.IlregardalespiedsdeLibbyetdit:
«Tupeuxmarcheravecceschaussures?MainStreetestàdeuxpas,onpourraitallervoirlesvitrinesdeNoël.»
ExagérémentheureusequeTonyaitpenséàquelquechoseàfaireavecelle–mêmejusteunepromenadesurMainStreet,Libbyrépondit:
«Jepeuxmarcher,maislechâlen’estpasvraimentadaptéàlasaison.»Etelleserralemincechâlesursesépaulespourexprimerlefaitquelefonddel’airétaitfrais.Tony hocha la tête d’un air pensif, puis sans unmot, il enleva sonmanteau en laine et le
déposasurlesépaulesdeLibby.«Allons-y.»IlluieffleuraledospourlaguiderversMainStreet.Ils marchèrent d’abord en silence. Ils ne se touchaient pas, car Libby était engloutie par
l’immensemanteaudeTony,maisilsmarchaientcôteàcôte,assezprochestoutdemêmepourqueLibbysente l’eaudetoilettedeTony.Aprèsquelquesminutesd’unsilencedépourvudegêne,Tonydit:
«Alors,tupensestoujoursàl’athlétismepourceprintemps?— La sélection se fait après les vacances d’hiver. Je m’entraîne presque tous les jours au
YMCA.Cequejepréfère,c’estledemi-fond.Jem’entraînesurtoutsurlemile,maisjefaisaussidusprint.
—EtMels’entraîneavectoi?Ouquelqu’und’autre?Çaseraitbienquetuaiesuncoachavecunchronomètre.JesaisqueSamTuckerétaitplutôtfortenathléquandj’étaisaulycée.»
SamTuckerétait en terminaleet il faisaitpartiede l’équiped’athlétisme.Libby fut surprisequeTonysesouviennedelui,vuqu’ildevaitêtreensecondequandTonyétaitenterminale.SametLibbyétaientsortisensembledeuxoutroisfois,ycomprispourlafêtedefind’année,quelquesmoisplustôt.
«Engénéral j’yvais tôt lematin,et tusaisbienqueMelneseréveillequepour leschosesimportantes…commelessoldes.Maisj’aiunvieuxchronoetjepeuxmedébrouillertouteseule.
—Alors,tunecourspasavecSam?—Euh…non.»Pourquoiest-cequ’ilsparlaientdeSamTucker?Çanecollaitpasavecleplaisird’êtreentête-
à-têtequeressentaitLibbyuninstantplustôt.Tonyhochalatêteetregardasamontre.«Ondevraitprobablementyallersionveutavoirdebonnesplaces.»TonypassaunbrasautourdelatailledeLibbyetlafitpivoterpourreprendrelecheminde
l’église.«Hé,petit!Lèvelesyeux!»Unhommesortantd’unmagasinleursouriaitenmontrantquelquechoseau-dessusd’eux.Et
biensûr,suspenduàuneenseignedemagasin,setrouvaitunbouquetdegui.LebrasqueTonyavaitinnocemmentpasséautourdesatailleuninstantplustôtsefitlourdet
chaud.IlattiraLibbycontreluietpenchasonvisagesurlesienenmurmurant:«JoyeuxNoël,Libby.»Il appuya légèrement ses lèvres contre les siennes et leur imprimaunmouvement tendre et
lent.Ce fut un baiser plutôt chaste.Libbymanquait de point de comparaison,mais c’était fait sansinsister,etsanslalangue.Néanmoins,ellesentitunechaleurluienvahirleventreetirradierdanstoutsoncorps.Elleauraitvouluqueceladuretoujours,maisquelqu’unpoussaunlongsifflementetTonys’écarta.
«Onferaitbiendesedépêcher.»Tony fourra sesmains dans ses poches et partit d’un pas vif, en restant légèrement devant
Libby tout le long du chemin. Libby se demandait si quelque chose n’allait pas.Quant à elle, elletrouvait que le baiser avait été parfait – mais, encore une fois, elle manquait cruellementd’expérience.
Ilavaitconscienced’êtreimpoli.Maisilcontinuaàmarcherdevantelle.Plusviteilsauraient
rejoint les invités dumariage,moins il aurait demal à garder sesmains pour lui.En attendant, ilserrait les poings au fond de ses poches – juste au cas où. La situation était grave. Libby était lameilleureamiedesapetitesœuret,sionavaitsulespenséesqui luivenaientà l’esprit, ilseseraitsans doute fait arrêter.Mais, dans la robe qu’elle portait ce soir, il avait dumal à convaincre soncorpsqu’ellen’avaitque16ans.Certes,récemment,ils’étaitmisàimaginerqu’ilspourraientformerunjolicouple,maispasavantquelquesannées.Leursquatreansdedifférencenecompteraientplusquandilsauraientvieilliunpeu.Elleétaitpresqueuneenfant,bonsangdebonsoir!Biensûr,ilétaitplus jeunequeçaquand il avait commencéà fairebienplusquedesbaisers sous legui,maispeuimporte. Est-ce qu’elle savait au moins à quoi elle ressemblait dans cette robe ? Elle était uneprovocation ambulante. La robe couvrait plus de peau que lesmaillots de bain dans lesquels il lavoyait depuis des années, et d’ailleurs plus aussi que ce tout petit pyjama qui l’avait torturé l’étéprécédent.Maispourtantelleétaittellementplus…disonsefficace.
Ilsatteignirentlesmarchesdel’égliseetTonyralentitpourattendreLibby.«Ondiraitqu’onestàl’heure.—Largement.»Libbysemblaitunpeuagacée.Maisilleméritaitsûrement,vucommentils’étaitcomportésur
lecheminduretour.Libbysoulevalégèrementl’ourletdesarobepourgrimperlesmarches.Etcetterobescandaleuses’ouvritetrévélaunelonguejambeparfaite,jusqu’àlacuissefermeetmince.Tonyréprimaungrognement.
Cette robe n’aurait pas dû être en vente auxmineurs. C’était déjà étonnant qu’elle ait eu letempsd’entrouverune,maisalorsuneàcepoint…Uneidéeeffroyablesefitjourdanssoncerveau.Elle n’avait été invitée au mariage qu’à la dernière minute. Peut-être n’avait-elle pas eu le tempsd’acheterunerobeneuve.Etlafêtedefind’annéeétaitencorerelativementrécente.C’étaitpeut-êtrelarobequ’elleavaitportéecesoir-là.Meln’avaitpasarrêtéderaconteràquelpointLibbyetSamétaient élégants. Peut-être Libby avait-elle acheté cette robe de sirène à l’intention de SamTucker.Cette idée lui fit l’effetd’uncoupdepoingà l’estomac.SamTuckeret savoiturenoireauxvitresteintées…Quandunadolescentavaitdesvitresteintéessursavoiture,iln’yavaitqu’uneseuleraisonpossible.
LaseuleidéedeSamTuckerregardantLibby,saLibby,danscetterobe,rendaitTonyfouderage.
«Jet’aiditquetarobeestsuperbe?»ditTonyensepenchantàl’oreilledeLibby.Ilsvenaientdes’asseoirsurunbancdel’égliseetattendaientquelacérémoniecommence.«Tu as sifflé enmevoyant, ditLibby sans pouvoir retenir un sourire taquin. Je dirais que
j’avaiscompris.Jenem’étaisjamaisfaitsiffler,tuvois.»Tonydécida de ne pas parler du fait qu’un quart d’heure plus tôt un inconnu l’avait sifflée
pendant qu’il l’embrassait sous le gui. Il inspira profondément et fit une nouvelle tentative. Il étaitsoudaind’uneimportancecapitalededéterminersiLibbyavaitportécettemagnifiquerobepourSamTucker.
«OnpeutdirequeMelaeudelachancequetutrouvesunerobesirapidement.Outul’avaispeut-êtredéjàavant,pourlafêtedefind’annéeparexemple?
—Euh,çaauraitétéunpeutropsexypourlafêtedefind’année.Melm’aaidéeàlachoisirpasplustardqu’hier,enfait,ellem’afaitprofiterdesaréductiond’employée.
—Ah,super.»L’airpleinementsatisfait,Tonysedétenditetétenditlebrassurledossierdeleurbanc.Lemariage futsplendide.Et, si l’onavaitdemandéàLibby lesdétailsde lacérémonie,elle
n’auraitpassuquoidire.Defait,illuiétaitimpossibledepenseràquoiquecesoitd’autrequ’aubrasde Tony posé derrière elle, et à ses doigts qui frôlaient de temps en temps son épaule nue etenvoyaientdesdéchargesd’électricitédanstoutsonsystèmenerveux.
Taylorsvillenecomptaitquepeud’endroits àmêmed’accueillirunévénementunpeuchic,
mais il y avait un bel hôtel en centre-ville avec une grande salle de réception, et c’est là qu’ils serendirentaprèslacérémonie.Melétaitbiensûrdanslalimousineaveclesmariésetleurstémoins,cequilaissaLibbyetTonyseulsdanssavoiture.Etcetteétrangeimpressiondeformeruncouplerevints’installerchezLibby.Libbyn’avaitconnuquepeuderendez-vousgalants,maisdetoutemanièrelessujetsdeconversationn’étaientpaslesmêmesentreTonyetelle,quiseconnaissaientdepuistoujours.Cependant,ilsnerestèrentpassansriendirepourautant.Ilsétaienttoujoursàl’aisel’unavecl’autre.Etmêmequandilsnedisaientrien,cen’étaitjamaisgênant.
«J’aidécidédecommenceruneanthologiedemesnouvelles.J’aiquelquesidées;avecunpeudetravail,mêmelesplusanciennesdevraientpouvoirdonnerquelquechose.»
Ils parlaient des ambitions d’écrivain de Tony. Il évoquait avec passion son professeurd’écriture créative et le groupe d’écrivains en herbe auquel il s’était joint et où il recevait descritiques extrêmement utiles. Libby écoutait en souriant. Elle aimait quand Tony était comme ça :pleind’excitationetdeprojets,sûrdelui.C’étaitbiensonTony.
«Maisjen’aipasrenoncéàl’idéed’unroman.Enfait,j’aipleind’idées.Jepenseàuneséried’enquêtes.Desthrillers.Dugenrebest-seller,maisjecroisquandmêmequemefairelamainavecdesnouvellesestunebonneidée.»
Tonygarasavoituredevantl’hôtel.«Jeterase,pasvrai?»Il l’avait dit avechumour,mais son inquiétude était réelle. Il n’avait pasprévudediscourir
commecela,lesmomentsqu’ilpassaitseulavecLibbyétaientassezrares,etaprèsunquartd’heuredetrajetellen’avaitpasencorepuplacerunmot.
«Jenem’ennuiejamaisavectoi,ditLibbyenriantdoucementàl’idéedepouvoirêtreavecTonyetdes’ennuyerenmêmetemps.Jepourraileslire?»
Etvoilàqu’ilréapparut:lesourirespécialLibby.TonyposalamainsurcelledeLibby.«Tuseraslapremière.Jetelepromets.»C’étaitunenuitparfaite.Partoutoùelleregardait,Libbydécouvraitdecharmantesdécorations
deNoëlargentéesetdorées.Biensûr,elleétaitassiseaveclafamilleMarchetti,maiselledécouvritquesachaiseétaitàcôtédecelledeTonyplutôtquedelapersonnequ’elleaccompagnait,c’est-à-direMel. On leur servit unmagnifique repas avec un nombre de couverts déroutant, et dont Libby nesavait que faire,mais il était impossible qu’elle se sentemal à l’aise en dînant avec lesMarchetti,quelsquesoientlespiègesquiluiétaienttendus.
Quand l’orchestre se mit à jouer, une grand-tante vint chercher la famille pour faire desphotos.Mais,mêmeàcemoment-là, abandonnée seuleà la tableavec sonverred’eauglacée, ellen’eutpas le tempsdesesentirmalà l’aise.Car,dèsque lebrasdeTonyeutquitté ledossierdesachaise,ellefutl’objetdebiendesattentions.Elledansad’abordavecl’undesamisdumarié,maisilluimarchait sur les pieds et samain descendait trop bas dans sondos.Elle fut doncheureuse queNick,uncousindeMel,l’invitâtàsontour.Nickavaitdeuxansdemoinsqu’elle,maisilgardaitsesmainspourluietildansaittrèsbien.Deplus,illuiconfiaqu’onl’avaitreléguéàlatabledesenfants,etLibbyétait touteprêteàsympathiseravecce tristesort.AprèsavoirbienriavecNickpendant lesolodeguitareélectrique,LibbyseretrouvaàdanseravecFrankie.
Frankieétaitl’undesnombreuxcousinsMarchetti,maisLibbyl’avaitdéjàrencontréunefoisoudeuxàdesréunionsdefamille.IlavaitunandeplusqueTony,pensait-elle,et ilétait trèsbeau.Grand,commeTony,maisleteintplussombreetunpeutropmusclé.Frankieétaitbienducôtéitaliendelafamille…Ildansaittrèsbien,mêmes’illaserraitunpeutrop.
«Alors,petiteLibby…onagrandi!»Ilcommençaàpencherlatêteverselle,etLibbyfutprised’unmouvementdepaniqueetfitun
pasenarrière.LesmotsdeFrankieétaientpresquelesmêmesqueceuxdeTonyquelquesheuresplustôt,maisilslafaisaientréagirdefaçonentièrementdifférente.
«Désolée,ilfaitsichaud,jecroisquejevaisallerboirequelquechose.»Etelles’éloignad’unpasvif.Aubar,toutlemondedemandaitdescoupesdechampagneetellevenaitdesedécideràfaire
lamêmechosequandlamaindeTonyseposasursoncoude.«UnCocacerise…etduchampagnepourmoi.»Tony ne laissa rien paraître devant le barman, mais en revenant à leur table, ses yeux se
plissèrent.«Alors,commeça,tubois,maintenant?l’accusa-t-il.—Commenttusaisquejen’allaispascommanderunCocacerise?sedéfenditLibby,outrée
deceretourabruptàsonstatutdepetitesœur.—On peut lire tes pensées sur ton visage. Si tu avais quelques années de plus, j’adorerais
joueraupokeravectoi.»Libbysedégagea,indignée.«J’ail’âgequ’ilfaut,mercibeaucoup!»Mais,àcestade,iln’étaitplustrèsclaircepourquoielleavaitl’âgenécessaire.«Ettun’espasunexempleàsuivre.Qu’est-cequetuauraisfaits’ilsavaientvouluvérifierton
âgeavantdeteservirduchampagne?»Tonylevaunsourcilensetournantverselle.«Jeluiauraismontrémespapiers,répondit-ilsèchement.—Nesoispasridicule,tun’asque20ans.—J’aidespapiersquidisentautrechose,murmuraTony tandisqu’ils se rasseyaientà leur
table,quiétaittoujoursvide.—Trèsbien,jevoisquetuasréponseàtout,marmonnaLibby,pluspourelle-mêmequepour
Tony.—Voyons,Lib,c’estdifférent.Tuas16ans!J’enaurai21cetété.
—Etmoi17dansdeuxsemaines.»Àprésent,Libbyseparlaitclairementàelle-même.Lecharmeétaitrompu.«Et17ans,c’estassezpourseroulerdespellesavecmoncousinFrank?»Tonymurmuraitàprésent,maissesmotsétaientchargésdecolèreetdereproche.C’étaitdonc
ça!TonyavaitcrudevoirvolerausecoursdelapetiteLibbyMcKayquesongrandméchantloupdecousinmenaçait.
«D’abordilaunecopine.Etqu’est-cequeSamTuckerpenseraits’iltevoyaitcommeçadanslesbrasdeFrank?»
EncorecettehistoiredeSamTucker.Bonsang,ellen’étaitsortieavecluiquetroisfois,toutçapourunpetitbaiserminable.EnsoulignanttroisfoislecôtéMINABLE.
«Jen’aipasroulédespellesàFrankie.Onadansédeuxfois.Puisj’aieuchaudetj’aieuenviedeboirequelquechoseetdem’asseoir.»
Ellen’ajoutapasquec’étaitTonyquil’avaitfaitasseoir.Paslapeinedeleluirappeler.«EtSamTuckern’apasàavoirunavissurcequejefaisavecFrankie,mêmesijedécidaisde
finirlasoiréeaveclui.—CequetuNEVASPASfaire!»Tonyfutsichoquéparcequ’ellevenaitdedirequ’ilenrenversasacoupedechampagne.Mais
bon,ilnecomptaitpaslaboire,ill’avaitjustecommandéepourleprincipe.«Cequejen’aipasl’intentiondefaire,convintLibby.Toutcommejenel’aipasembrassé.—C’estluiquit’aembrassée,»insistaTony.Maisilcommençaitàsecalmerpeuàpeu.«Etpourquoiest-cequeSamn’apasledroitd’avoirunavis?—Onn’estpasensemble,luietmoi.Onestsortisdeuxoutroisfois,c’esttout.EtFrankm’a
presqueembrassée.J’aireculéjusteàtemps,maisjesupposequetuétaistropoccupéàcouriràmarescoussepourt’enrendrecompte.Maisbon,cen’estpascommesiçateregardait,toutça.Onm’adéjàembrassée.Jenesuisplusunepetitefille.»
Sam n’était pas son petit ami. Libby n’avait pas de petit ami. Mais alors, qui l’avaitembrassée?
«Etquit’aembrassée?—Encoreunefois,çaneteregardepas.Maisilmesemblebient’avoirembrassétoi,ilya
quelquesheures.—Etmoiquicroyaisquec’étaitmoiquiavaisprisl’initiative…»Etjustecommeça,toutallaitbienànouveau.TonyavaitvurougeentrouvantLibbydansles
bras de Frank et presque collée à lui, et en croyant les avoir vus s’embrasser.Mais il avait pu setromper.EtLibbyétaitlà,maintenant.EtellenesortaitpasavecSamTucker.
«Jesuisdésolé,Lib.J’ai…j’aieuunmouvementd’humeur,maisc’estterminé.»EtvoilàqueréapparutlesourirespécialLibby.Iln’étaitplusfâché.«Comments’estpasséelaséancephoto?»ditLibbypourchangerdesujet.Tonyfitlagrimace.«Elleapristroisplombes!Touteslestantes,lesgrands-mères,lesgrands-tantes,personnene
savaitcequisepassait,quidevaitsemettreàquelendroit.C’étaitlebordel.Rappelle-moi,lemomentvenu,dememarierenpetitcomité!»
Pendantun instant, sesmots flottèrentdans les airs et semblèrentprendreunautre sensqueceluiqu’ilavaitenvisagéaudépart.L’airétaitchargéd’électricité.TonysepenchaettouchalebrasdeLibby.
«Danseavecmoi,Libby.»Endansant,Tonylatenaitprèsdelui.PascolléecontreluicommeFrankie,maisillaserrait
délicatementdanssesbrasetattiraitsatêtecontresonépaule.«Tusenslalavande.—C’estunecrèmehydratante.J’ailapeausèche.»Tonyeutunpetitrire.Iln’yavaitqueLibbypourrendresexylefaitd’avoirlapeausèche.«Tusenstrèsbon.J’aimebeaucoup.»LecœurdeLibbybattittrèsfortplusieursfoisavantqueTonynereprennelaparole.«Jet’aiditquelacopinedefacd’Olivia,Tara,m’apincélesfessespendantlesphotos?—Quoi!»Le changement soudainde conversation fit rireLibby et elle s’écartaunpeupour regarder
Tonydanslesyeux.«C’estvrai!J’aieul’impressiond’êtreunmorceaudeviande.C’étaitdégoûtant.»Unpetitsourireapparutaucoindesabouche.«Etlavoilàquivientdroitversnous.»Tonysepenchaetmurmuraàl’oreilledeLibby:«Faisonssemblantd’êtreensemblepourdevrai.—Quoi?murmuraLibbyensentantsoncœurs’arrêter.—S’ilteplaît.Çamepermettrad’échapperàTara,dit-ildansunsoufflechaudethumideque
Libbysentitcontresonoreille.—D’ac’.»Elle leva le visage pour le regarder,mais le sien n’était qu’à quelques centimètres et il ne
perditpasuneseconde.Cenefutpasunbaiserdélicatcommeceluisouslegui.Ses lèvres prirent possession des siennes. Sa langue caressa ses lèvres qu’elle entrouvrit,
souhaitantqu’ilapprofondisselaquestion.«Tony!»Unevoixhautperchéeetchantanteinterrompitcemomentpartagé.«J’espèrequetum’asgardéunedanse.»C’étaitunefemmedequelquesannéesplusâgéequeTony,unebombasseblondedontlarobe
dedemoiselled’honneursemblaitunetailletroppetite–àdessein.«Tara.»TonysetournaengardantunbrasautourdelatailledeLibby.«JenecroispasquetuaiesrencontréLibby,quim’accompagne.»Ilparlaitd’untondétendu,maispasamical.Taranesemblapasleremarquer.«Quit’accompagne?»Taraparutintriguée,puiselleeutl’airdecomprendretoutàcoup.«Libby.Ah,oui,Libby.Maistun’accompagnespaslapetiteMélanie?—J’ai l’airdesortiravecMel?»réponditLibbyenglissantsamainlibresouslavestede
Tonyjusqu’àcequ’ellereposesursapoitrine,toutenpivotantleshanchesverslui.Libby n’avait pas l’intention de se laisser intimider, et encoremoins de renoncer à être la
copinedeTony,mêmepourdefaux.«Bon,ehbien,àplustard,touslesdeux.»Tarafitvolte-face,l’airunpeusonnée,etsedirigeaverslebar.«Tuasétéparfaite!s’écriaTonyenfaisantvirevolterLibbydanssesbras.Ellenousregarde
toujours?»Libbyn’avaitaucuneidéed’oùsetrouvaitTara,maiselleréponditouisanshésiter.«Bien,»ditTonyensepenchantpourunnouveaubaiser.Avecl’anglequeformaientleursvisages,cebaiserfutsisensuelqu’elleensentitl’effetjusque
danssesdoigtsdepied.PuisTonys’écartaenmurmurant:
«Ouah.»ChaqueinstantdecettesoiréerestagravédanslesouvenirdeLibby.Elledansaplusieursfois
avecTonyetilluioffritmêmeunecoupedechampagneaumomentdeporteruntoast.MaislasoiréeseterminatropviteetTonylaraccompagnachezelle.Elleespéraitqu’ilviendraitjusqu’àlaporteetqu’illuidonneraitpeut-êtreunnouveaubaiser.
«Jemesuisbienamusé,Lib,ditTonyavecunsourireensegarantdevantchezelle.—Moiaussi.—Bon, eh bien, passe un bonNoël. Je ne vais pas revenir pendant quelque temps. J’ai un
aviontôtdemainmatinetjecommenceaujournallelendemain.Maisonresteencontact,»dit-ilsanscesserdesourire.
Libbyn’encrutpassesoreilles.Lameilleuresoiréedesavieetunerobequiallaitluicoûtertouteslesvacancesàtravailleràlapâtisseriedesamère,toutçapour«onresteencontact»!
«Super.Mercipourlasoirée.JoyeuxNoël.»Elle descendit de voiture. Son appartement était au quatrième étage. En montant les deux
premiers,elleétait furieusecontre lui.Mais,enarrivantauquatrième,elleavaitdécidédevoir leschoses de manière positive. La soirée avait été super. Il avait dit qu’il s’était bien amusé. Ens’endormantcesoir-là,elleétaitsûrequeTonyétaitsurlepointdecomprendrequ’ilnepouvaitpasvivresanselle.
CHAPITRETROIS
JoyeuxNoël!C’estbizarrederaterNoëlenfamille,maislebilletd’avionauraitdépasséunmoisdemonsalaire…Celadit,leboulotestsympa.Jenefaisriendevraimentimportant,maisc’estunvraijournal.Tuvoiscequejeveuxdire?J’aiparléauxparentsetàMeltoutàl’heure,ondiraitqu’ilss’amusentbien.Monvoisinetmoionamangéchinois:çaal’airminablecommeNoël,maisenfaitc’étaitplutôtcool.J’aipenséàt’appeler,maisjenesavaispassituseraisoccupée.AlorsJoyeuxNoël,Libby,j’espèrequetoutvabienpourtoi.-T-
Cool,leNoëlchinois.Mamèreetmoi,ons’étaittellementgoinfréesdebiscuitsdeNoëlqu’onn’apaspu manger la dinde qu’on avait préparée. Donc on l’a mangée aujourd’hui à la place. J’ai vu tafamillehier,jesuispasséerapidement.Tuleurmanques,mêmeàMel.Tumemanquesaussi.-L-
Quelques jours plus tard, Libby reçut un colis par la poste. À l’intérieur se trouvait un
chronomètredigital, pour la course àpied, avec lapossibilité d’enregistrer sesmeilleurs temps ettoutuntasdestatistiquesdontellenesoupçonnaitmêmepasl’existence.C’étaitlecadeauparfaitpourelle.EtLibbyaimatoutautantlacartedevœuxquil’accompagnait:c’étaitunecarteblancheavecunebranchedeguidessinéeetunmotdeTonyqu’elleputàpeinedéchiffrer.
J’aipenséqueçapourraitteservir.Boncourage.TonTonyTonTony.Pas«bises»,ou«ciao».TonTony.Biensûr,lesgarçonsnedevaientpasbeaucoup
réfléchiràcegenredechosesetLibbyessayadenepastropinterprétercechoix.Maisellesepermittoutdemêmeunepetitedansefestiveautourdesonlit,aprèsavoirglissélacarteausoindumiroirdesacommode.
J’aireçutoncolis.J’adore.C’estparfait.Lessélectionssontdansdeuxsemaines,croiselesdoigts!-L-
Commentças’estpassé?-T-
Je suis sûre d’être prise ! Les résultats officiels sont demain, mais j’ai été la plus rapide au1500mètres.Paslaplusrapidedesfilles.LaplusrapideDETOUS!Çamontrel’importanced’avoirunbonchronomètrepours’entraîner.-L-
Quelques instants après avoir cliqué sur Envoyer, elle entendit son alerte de messagerie
retentir.TMarchetti:C’estsuper!Bravo!Libbylibbylibby:Merci,jesuissupercontente.Jen’aijamaisfaitdesportencompétition.Au
début,c’était justepouravoirdespointsenpluspour l’entréeen fac,maismaintenant jeveux tropgagner.
TMarchetti :Super,Lib.Tudoisêtrecontente.Jesuis sûrque tuauraisaussibien fait sans,
maisjesuiscontentquelechronoteplaise.Ilsdiscutèrentdechosesetd’autrespendantpresquetroisquartsd’heure.Cettenuit-là,Libby
eutl’impressiondeflottersurunpetitnuage!Touslesquelquesjours,ellerecevaitune-mailouuntextodeTony.Riendeparticuliernidepersonnel,maisillafaisaittoujourssourireetmêmeparfoisrireauxlarmes.Unesemaineplustard,ellereçutunecarted’anniversairequiallarejoindrecelledeNoëlau-dessusdelacommode.C’étaitcommeçaqu’ilsfonctionnaient.Unecorrespondancelégèreetparfoisunpeucoquine.Libbyétaitauseptièmeciel,maisellesedemandaitparfois,toutdemême,cequetoutcelasignifiaitpourlui.
Joyeuxanniversaire,Lib.Melmeditquevousallezaucinéma toutes lesdeux?Çamesemble trèsraisonnable comme idée ! Tu te souviens de la fois où tu nous avais traînés à laPetite Sirène surglace?Tuavaisététrèsdéçueparleprince,jenesaispluscommentils’appelait.Amusez-vousbien!-T-C’étaitleprinceÉric!Etl’acteuravaittoutfaux.Lefilmétaitbien.Jesupposequ’onn’aplusl’âgedesprincessessurglace.-L-
Ouah!Lechampionnatd’État!Melétaitsiexcitéepourtoiqu’elleenapresqueoubliédeparlerdesanouvellerobe.Maisçanem’apastropdérangé,tupenses.Pourquoitunem’asrienditquandons’estparlé?-T-
Eh bien, je suis contente, mais je voulais attendre de voir comment ça se passait avant de me laraconter.Aucasoùjefinissedernière,jenevoulaispasavoiràtel’avouer.Trophorrible.-L-Tu es bête. J’espère que c’est la dernière fois que tu n’oses pas me dire quelque chose. Et c’estimpossiblequetusoisdernière.J’aimeraisbienpouvoirêtrelà,maisjedoisvraimentbosser.-T-
« SamTucker t’a invitée à la fête de fin d’année ? s’écriaMel en faisant irruption dans lapâtisserie.EttuasditNON!
—Mel,maisquitel’asdit?Çanedoitmêmepasfaireuneheure.»Samluiavaitposélaquestionàlasortiedescourset,troisquartsd’heureaprès,Melétaitdéjà
aucourant.«Iln’étaitpasfâché.C’étaitplusgenre«jen’aipersonne,tun’aspersonne,etsionyallait
ensemble»,tuvois.»Melfitlagrimace.«Maistupourraisavoirquelqu’un.JesaisbienqueSamnet’intéressepasvraiment,maisil
estcanonetildansesuperbien.Etaumoinstupourraisalleràlafêtedefind’année!»MelplissalesyeuxenobservantLibbyquiagençaitdescupcakessurl’étalage.«Tuneveuxpasyaller?Tun’essortieavecpersonnedepuisdesplombes.Enfait,depuis
Noël?TupensestoujoursàTony?»Libbysentitlerougeluimonterauxjoues.«Non.Jen’aijustepasenviedesortir.C’estquoileproblème?J’aipleindetrucsàfaireentre
lesentraînementsetlapâtisserie,»ditLibbyengardantlesyeuxbaissésetens’efforçantdegarderunevoixnormale.
Ilfallaitqu’elletrouvequelquechosepourdétournerl’attentiondeMel.«Et,euh,Cory?Tuessûrequetuveuxcontinuer?»Toutes les six semaines, des histoires circulaient sur Cory et Mel. Étaient-ils ensemble ?
Séparés?Voussavezqu’ilssesontdisputésenpleincours?Libbyétaitpresquesûrequec’étaitcestatutdecélébritéquiintéressaitsurtoutsonamiedanssarelationavecCory.EtMeln’enfinissaitpasdedisséquertoussespetitsproblèmesdecouple,augranddamdeLibby.
Melfitungested’indifférence.«C’estunpeucommeunemauvaisehabitude,ceCory,maisildansetrèsbienetilmefaitrire.
Etilseratrèsbiensurlesphotos…»Melouvritgrandlesyeux.«Tuessaiesdechangerdesujet!—Non.—Lemoisdernier, tum’asditquetuenavaisrasleboldemeshistoiresdeCoryetquetu
boycottaistouteanalysefuturedemapart leconcernant.Etjesuiscenséecroirequetoutàcoupçat’intéresse?
— Le mois dernier, j’avais dû traverser toute la ville pour aller te chercher parce que turefusaisqu’ilteraccompagnecheztoi.
—Hé!Iln’enavaitquepourSherriMunski.C’étaithumiliantpourmoiet…ARRÊTE!Tun’yarriveraspas.Ilfautqu’onparle.»
Melsedéhanchasursontabouretcommepourmieuxs’installer.« Je saisque je t’aiunpeuencouragéeàNoël,mais jecroyaisqueTonyallait retrouver la
raison.»Elleinspiraprofondément.«Là,jen’ycroisplus.»Elleattenditquelanouvellefassesonchemin.«Ilm’aembrassée.»Libbyespéraitavoirréussiàprendreuntonnonchalant.«Jesais,jevousaivusaumariage,etçaavaitl’airsérieux.»Melfitunepetitegrimacepensive.«Maisjecroisqu’ilesttropvieuxpourtoi.
—Etdepuisquand?Iln’aquetroisansetdemideplus.Et tumedisaisdelepousseràmevoircommeuneadulte?
—Ehbien…çanerisquepasd’arriversiturestescheztoitouslesweek-ends!»Melsetortillasursontabouret.«Effieestsouventaveclui,cesdernierstemps.Jecroisqu’ellevapasserl’étéavecluidansle
NewJersey,quandilretourneratravaillerauCourrier.—ÀLaDépêche,corrigeaLibbyd’unairabsent.QuiestEffie?—Tutesouviens,jet’avaisparléd’elleavantlemariage.Lunettesœil-de-chat,unefillequia
toujoursfroid?—Tuavaisditqu’elles’appelaitStéphanie.C’estquoicommenom,Effie?»Mince, avec combiende filles est-cequ’elle était en compétition ?Même si, en réalité, elle
n’étaitpasdanslacourse,vuqu’elleétaitenCarolineduNord–etluipas.«Ahbon?»Melnesemblaitpaspréoccupéeparcedétail.Meln’étaitpaslegenreàs’intéresserauxdétails.«J’aidûmetromper.C’estEffie.Jecroisquec’estgrec,ouitalienouquelquechose.»Demieuxenmieux.Étrangère,sansdouteavecunaccent,etintelligente.Illefautpourentrerà
Columbia.«Ilnet’apasparléd’elle?Danssese-mails?»Libbysefigea.«Qu’est-cequetuveuxdire?»Meln’étaitpasaucourantpour lese-mails.SaufsiTonyluienavaitparlé.Est-cequeTony
parlaitd’elleavecMel?Est-cequec’étaitunebonnechose?«Nejouepasàlaplusfine,Lib.Ilt’envoiedese-mailstoutletemps,pasvrai?Ettuaspassé
toutlefilmàluienvoyerdestextos,leweek-enddernier.Jepensequ’onvadevoirregarderquelquechosed’autrecesoir.Jesuispeut-êtrebienentraindedevenirtropvieillepourlaPetiteSirène.Oualorspeut-êtrequ’onpeutjustesauterleschansons.»
Elleluiavaitenvoyédestextospendantlefilm.Peut-êtrequ’elleauraitdûêtreplusdiscrète,maiscommentprendreletempsd’êtrediscrètequandTonyMarchettiavaitbesoindesonaidedansunmomentdecrise?Libbysouritenyrepensant.
Tony:C’estquoiladifférenceentrelebeurredouxetlebeurresalé?Libby:L’unestsalé,l’autrepas.Libby:Pourquoi?Tony:Jesuisentraindefairedescookies.Libby:?????Tony:Jet’aivuefairedesmillionsdefois!Jesuissûrquejepeuxmedébrouiller.Douxousalé?Libby:Doux…Tusaisquetupeuxacheterdescookiesdansunepâtisserie,pasvrai?Tony:Jeveuxlessentirdanslefour!
•••
Tony:Ilabrûléetl’intérieurestcru.Libby:Il?
Tony:Lecookie.Tony:J’aifaituncookiegéant.Tony:Tueslà?Libby:Désolée,jeriaistellementfortqueMelm’aviréedelapièce.Ilfallaitunetempératureplusbasse.L’odeurétaitbien?Tony:Non,c’étaitdifférent,maisjesuisentraindemangerl’intérieuràlacuilleret…pasmal.Libby:Tuvasterendremaladeàmangerdelapâtecrue!Tony:Aprèstoutcetravail?Jesuisprêtàtenterlecoup.Lelendemain,Libbyavaitfaituncolisavecunedouzainedecookiesetl’avaitenvoyéàTony.Okay,doncMelavaitcaptéquelestextosvenaientdesonfrère.«Ilt’aditqu’ilm’écrivaitdese-mails?—Hé,Lib,c’estpassorcieràdeviner.Ilsaitmieuxquemoicequisepassedanstavie,ces
temps-ci.Maispeuimporte.Situasenvie,pouruneraisonquim’échappe,d’êtreamieavecTony,pasdeproblème.Maisarrêtedetirerlatroncheenattendantqu’iltefasselacour!J’aitoutecetteardeuradolescenteettumelaissesgérerçatouteseule.»
Melsouritpourmontrerqu’elleplaisantait,enfin,principalement.«Bon,parle-moid’Effie,ditLibbyenpoussantunsoupirrésigné.—Pasgrand-choseàdire,maisilsvonthabiterensemble.»IlyeutunelonguepausependantqueMelattendaituneréaction.Maisrien.«Tucomprendscequejesuisentraindedire,pasvrai?—Ouais,Mel,»ditLibbyavecunsouriretriste.Peut-êtrequ’elledevraitalleràlafêtedefind’année,aprèstout.«JecroisquejevaisappelerSam.»Melfitunsourireettrottinajusqu’àlaporte.
C’est les vacances ! Tu dois être impatiente d’avoir l’été de libre. Quel effet ça fait d’être enterminale?-T-C’estcool,ettoi?Mêmesitun’auraspasautantdevacancesavectonjobaujournal,tuteréjouisd’allervivredansleNewJersey?-L-
Libbysavaitqu’elleavaittortd’êtreinquisitrice.Mais,siTonyetelleétaientamis,pourquoineluiavait-ilpasparlédesesprojetsd’emménagement?
Ouais,j’aipeurquelesvacancesd’été,cesoitfinipourmoi.Maistuverras,quandtuserasunpeuplusvieille,tupréférerasbosserquederêvasseràlaplage.-T-
Unpeuplusvieillemoncul!Libbyneluiréponditpaspendanttroisjours.
CHAPITREQUATRE
«Tunousasmanquéàlaplagecetété,grandfrère.»Mel tenait le téléphone calé entre l’épaule et l’oreille tout en choisissant sa tenue pour la
rentréedesclasses.«JohnetParkert’auraientplu.IlsdormaientchezlesJohnson,àcôté.IlsvontàNYU.—Tusaisbienquelesstagiairesn’ontpasdevacances,Mel.Jesuissûrquetuasprofitéde
monabsencepourenfingagnerauScrabble.JohnetParkersontlesfilsdesJohnson?—Non,ilslouaientpourlasemaine.Johnm’adrôlementfaitlacour.—Qu’est-cequiestarrivéàCory?»TonysefichaitpasmaldeCory,maisiltenaitàgarderunœilsursasœurdetempsentemps.
Iltrouvaitnormaldesavoirsisasœuravaitunpetitamiet,danscecas,commentils’appelait.«Bah.Cory,c’estdupassé.Ilnem’apresquepasappeléedetoutl’été,tusais.Johnm’appelle
toutletemps.Parkeretluisontmêmevenuspasserle4JuilletavecLibbyetmoi.»Là,Tonyfitplusattention.«ParkerestvenuvoirLibby?»Avait-ilréussiànerienlaisserparaître?Ilauraitpeut-êtredûposerd’abordunequestionsur
John.«Hmm…alorsilteplaît,ceJohn?…— Oui aux deux questions. Libby sortait avec Sam Tucker, mais je crois qu’elle préfère
Parker.Onaétéauparcetonapique-niquéenregardantlefeud’artifice.—SamTucker!»Là,ils’étaittrahi.Maisl’informationl’avaitprisparsurprise.«Oui.SamTucker,tusais,legarçonquil’inviteàsortirlesamedisoir.Tusaisqueçasefait,
pasvrai?Tunesorsjamais,avecEffie?—Cen’étaitpascequetucrois,avecEffie.Onhabitaitdanslamêmevilleetçamefaitdes
économiessurleloyer.—Dansunappartavecuneseulechambre?—Ilyauncanapé-litdanslesalon.Etqu’est-cequ’ilsfontdebeau,ParkeretJohn?»Il n’avait pas à se justifier devantMel.Effie était juste une amie.Enfin, unpeuplusqu’une
amie.MaisEffienecherchaitpasunerelationsérieuseplusquelui,etcommentaurait-ilpuexpliqueràsapetitesœurlanotiond’amitiéaméliorée?
«ParkeretJohnontpasséleweek-enddansunhôteletilssontrepartisendébutdesemaine.Parkerseprépareàêtreavocat,maisJohnveutêtremédecin.Jetrouvequec’esttrèsnoble,pastoi?»
Tonyn’écoutaitplus.Iln’allaitpasenapprendreplussurceParkernisurSamTucker.Mêmesicen’étaitpasgrave.Libbypouvaitsortiravecquiellevoulait.Lui-même,ilavaitpassétoutl’étéavec Effie. Et c’était normal que Libby ait des petits copains. N’était-ce pas pour cela qu’il avaitdécidéd’êtrepatient?Pourqu’ellegoûteàtouslesplaisirsdel’adolescence?Et,danssonsouvenir(quin’étaitpassivieuxqueçaaprèstout),lesrendez-vousgalantsfaisaientpartiedecetteexpérience.Ilsenétaientmêmelaquintessence.
Ilaneigéaujourd’hui.C’estunpeutôt,delaneigeenoctobre,mêmepourNewYork,maisj’aimebien.Laneigemerappelletoujourslamaison.Tutesouviensdenosbataillesdeboulesdeneige?Melseréfugiaittoujoursdanslamaisonavecunchocolatchaud,maistoituétaisuneguerrière.J’aimeraisbientefairevisiterNewYork.Surtoutsouslaneige.-T-J’adorelaneige,c’estvrai.Sionadelachance,ilyenaurapourNoël.Çafaitdesannéesqueçan’estpasarrivé.Mel organise une fête pourHalloween. Je vaisme déguiser enVéra…comme dansScoubidou. Cen’estpascequej’auraischoisi,maisonestquatre,etc’estl’idéedeJohn.Biensûr,luiestenFredetMelenDaphné.Maisçanemedérangepasd’êtreVéra,elleatellementd’énergie!-L-J’aitoujoursaiméVéra.J’aimebienlesintellos.-T-
Iln’avaitpaseubesoindedemanderquiétaitlequatrième.MelluiavaitdéjàditqueJohnet
Parkerseraientdelafête.Ilessaieraitpeut-êtred’yalleraussi.C’étaitsansdoutesadernièrechancedeprendredesvacancesavantdedevoirseconcentrersursesexamens.EtilvoulaitmontrerquelquechoseàLibby.Tonyneputs’empêcherdesourire.Maintenantqueladécisionétaitprise,ilavaithâtederentreràlamaison.Celafaisaitpresqueunanqu’ilétaitloin,etilsentitunfrissond’excitationleparcourir.Le billet d’avion allait coûter cher, à la dernièreminute,mais il avait des économies etaccès au code du programmede fidélité de ses parents.Libby allait-elle être surprise de le voir ?Mêmes’iln’yallaitpasquepourLibby.Sesparentsluimanquaientaussi,etbiensûrMel.EtLibby.Libbyluimanquait.IlnevoulaitpascéderàParkerleprivilègedelavoirencostumedeVéra.
Libbyseréveillaetsachambretournaitdanstouslessens.Non,c’étaitimpossible.Cedevait
être sa têtequi tournait.Elle essayad’appeler samère,mais il semblaitqu’aucoursde lanuit elleavait avaléunballondebasket.Sagorgeétait serrée et irritée.Mince.Elle étaitmalade.Elle allaitrater la fêtedeMelet lavisitedeParker.Mêmesiellen’étaitpasexcessivement tristedenepas levoir,ellesesentaitgênéedel’abandonnerdansunesoiréeoùilneconnaîtraitpersonne.ElleespéraitqueMelprendraitletempsdeluiprésenterdesgensavantdeseréfugierdansuncoinsombreavecJohn.Cesdeux-làn’arrêtaientpasuneseconde.
Dansl’après-midi,aprèsdesdosesmassivesd’Actifed,Libbysesentaitdéjàunpeumieux.Pasvraiment assez pour se rendre à la soirée,mais la chambre ne tanguait plus et elle avait réussi àterminer son devoir d’anglais. Après s’être chauffé la voix, elle parvint à appeler Mel et à luiexpliquer la situation d’une voix rauque.Mel était déçue,mais John était déjà arrivé, et Libby luifaisaitconfiancepourluiremonterlemoral.
Aprèsunedouchequi,imagina-t-elle,lalavaitdetoussesmicrobes,ellemitunpyjamapropreet retournasoussescouvertures,biendécidéeàdormir le restedecetteatroce journée.C’estalors
qu’onsonnaàlaporte.Libbyn’avaitpasmislepanneauinvitantlesenfantsàvenirpouruntrick-or-treat,maisparfoisceux-cin’yfaisaientpasattention.Onsonnaencore.Libbyenvisageadeseleveretsedemandas’il restaitdesbonbonsdans lacuisine.Oualorsellepourrait justeoffrir lescupcakesqu’elleavaitpréparéspourlasoirée?Personnen’allaitlesmanger,detoutemanière.
«Tuesfolle?!»LevisagedeTonyapparutàlaportedesachambre.Elleenétaitaustadedeshallucinations?
Tony.Ici.Danssachambre.Clairementunehallucination.«Souslepaillasson?Tucachesvraimenttaclésouslepaillasson?C’estlàquetoutlemonde
regardeenpremier.Lescambrioleurs,lesprisonniersévadés,lestueursensérie…Jen’arrivepasàcroirequetusoissiimprudente.»
Bon, ce n’était pas ainsi que se déroulaient normalement les fantasmes oùTony débarquaitdanssachambre…Cedevaitêtrelaréalité.
«Tudevraisarriveràycroire.Aprèstout,tuasbientrouvélaclé,non?»Tonyluilançaunregardnoir.«C’estbon,Tony.TuesrestétroplongtempsàNewYork.Personnenevavenirnousattaquer.
Et il y a un concierge dans l’immeuble. Le prisonnier évadé qui voudrait venir voler le nouveaumixerCuisinartdemamandevraitd’abordpassersurlecorpsduconcierge.»
CesderniersmotsarrachèrentunsourireàTony.«Ouais,Arthur les ralentirait aumoins trente secondes. Il était àmoitié endormi devant sa
télévisionquandjesuisentré.»Arthurdevaitavoirpresque200ansetiln’ouvraitpluslaporteàpersonne,secontentantde
faireunpetitsignedelamainquandlesgensentraientetsortaient.C’étaitsansdoutepourçaqu’ilétaitpasséveilleurdenuitquandLibbyétaittoutepetite.
«Oùesttamère?Tunedevraispasêtretouteseule,tuesmalade.—LaFièvredeMinuit,»ditLibbyenseredressantdanssonlit.Tonyhochalatête.Ilsesouvenaitàprésentquelasemained’Halloweenétaitaussil’occasion
d’unévénementappelé«laFièvredeMinuit»:touteslesboutiquesducentre-villerestaientouvertesjusqu’àuneheuredumatinetorganisaientunesortedefêtedequartier.
«Elleestrestéeavecmoicematin,maisellenevoulaitpasdemanderàquelqu’und’autrederenoncer à sa nuit d’Halloween. Et puis je crois qu’elle en pince pour Stuart, le propriétaire ducinémaquiestplusloindanslarue.Qu’est-cequetufaislà?»
Tonyfitquelquespasverselle.«J’avaisunpeudetempsavantmesexamensetjesuisvenupourlafêtedeMel.Maisellem’a
ditquetuétaismalade.Mamant’afaitdelasoupe.»Tony leva le bras et montra des sacs que Libby n’avait pas remarqués jusque-là. Tony
regardaittouràtourlescheveuxdeLibbyetl’endroitoùelleétaitassise,lesjambescroisées,sursacouetteàfleursroses.
«Tuaslescheveuxmouillés.»Ilfitànouveauunpasverselle.«Jesorsdeladouche.Çafaitbeaucoupdesoupe.»Tonys’immobilisa.Libbyavaitlescheveuxmouillés.Libbysousladouche.L’eaucoulantsur
soncorps…Non.Ilnefallaitpasqu’ilpenseàLibbysousladouche.Il inspiraprofondémentetseforçaàsourire.
«Iln’yapasquedelasoupe.Jereviens.»Etilsortitdelapièced’unpasleste.Deuxminutesplustard, il revenait lesmainsvidesetbalayalachambreduregard.Libbyse
félicitaintérieurementd’avoirtoutrangéquelquesjoursplustôt.Etellepriapouravoirreferméson
panierdelingesale.«Çan’irapas.»Tonyavançaverselleetenunmouvementsouple, il lasoulevadanssesbras,ycompris la
couetterose.Ellepassainstinctivementlesbrasautourdesoncouetill’emmenadanslesalon.Ellesesouvintfurtivementquedanssesfantasmes,illaportaitgénéralementdansl’autredirection.Tonyladéposadélicatementsurlecanapéetquittalapièce.
Ilrevintavecdeuxbolsdesoupeetdeuxbouteillesd’eaucoincéessouslesbras.«Ledînerestservi.»Il approcha la table basse du canapé et posa les bols de soupe au poulet et aux vermicelles
devanteux.«J’espèrequeçanetedérangepas.Jemesuisserviaussi.J’adorelasoupedemamère,»dit-
ilavecungrandsourire.Libbysepenchaaubordducanapépourgoûterlasoupe.Elleavaladeuxgrandescuilléréeset
soupirad’aise.«Mmm.Moiaussi.Qu’est-cequ’ilyadanslesautressacs?»Tonylaregardamanger…Cettecuillère…Ilauraitpeut-êtredûapporterunthermos.Est-ce
qu’onpouvaitmangerdelasoupeaupouletetauxvermicellesdansunthermos?Etpuisildoutaitque regarderLibby boire d’un thermos soitmoins…efficace…que de la voir lécher cette sacréecuillère.
«Tony?—Quoi?Oui,lessacs.IlyaunchoixdeDVDetunesurprisepourtoi–pourplustard.»Libbylevalessourcilsaumot«surprise»,puisellesortitlesDVDdusacetregardalestitres.
Il y avait une série de films d’horreur (sans doute eu égard àHalloween), le premierPirates desCaraïbes(sansdouteeuégardàlaplastiquedeKeiraKnightley)et…laPetiteSirène!?
« Jemesuisditque tuétaismaladeetque tu ratais la soirée,donc jepouvais faireunpetiteffort,»ditTonyavecunnouveausourire.
Libbyavaitdumalàdéterminersic’étaitlagrippeoulessouriresdeTonyquiluidonnaientlevertige.
«Alors?Qu’est-cequiteferaitplaisir?»Plaisir?Ahoui,lefilm.«Jet’épargnelaPetiteSirène,maisseulementparcequej’aitropmalàlagorgepourchanter.
PiratesdesCaraïbes?—Çamarche.»Tonyétaitàlafoissoulagéetdéçu.Enchoisissantlesfilmsd’horreur,ilavaitimaginéLibby
luiserrantlamain,seserrantcontreluietbondissantdepeur.Maiselleavaitlagrippe,bonsang.Ungentlemannedevaitpasavoirdetellespensées.Ilétaitjustevenuluiremonterlemoral.Et,pourêtrehonnête,quandilétaitarrivéchezluietavaitdécouvertungrouped’adolescentsquidansaientdanslejardin,sasœurcolléeàJohn l’étudiantenmédecineetpasdeLibby, ilavaitétéplutôtdéçu.Aussi,quandsamèreluiavaitdemandéd’apporterlasoupe,ilavaitignorésonclind’œilets’étaitdépêchédevenirretrouverLibby.
Unefois lasoupeterminéeetJohnnyDeppenroutepour lahautemer,Tonyse tournaversLibby.
«Est-cequeceParkerauraitdesobjectionsàceque tu regardesunfilmavecmoi,ouSamTucker?
— Tu es vraiment obsédé par Sam Tucker. Et que dirait Effie ? » dit Libby en évitant laquestion.
C’étaitvraiqu’elleétait censéeêtreavecParkerce soir.Maisc’étaituniquementpardéfaut,
parcequeleursmeilleursamissortaientensemble.«Effien’estpasmapetiteamie,Lib,»ditTonyd’untonvif.Ilavaitl’airfatiguédedevoirrépondreàcettequestion,cequiétaitcomplètementinjuste,étant
donnéqueLibbyavaitjusqu’icifaitmined’ignorercomplètementsonexistence.«Onétaitamisetcolocs,c’esttout.Jel’aiàpeinevuedepuislafindel’été.»Çanelaregardaitpas,maisTonyavaittoutàcoupbesoinqueLibbycomprenne.«Jen’aipasdepetiteamieencemoment,Lib.»Sesmots résonnèrentun instantdans levide.Libbysentaitpresqueuncourantélectrique les
traversertouslesdeux.Elleouvritlabouchepourdirequelquechoseetelleéternuabruyamment.Ilséclatèrentderiretouslesdeux,Libbyluttantpourreprendresonsouffle.C’étaitincroyable:mêmesiladélicieusetensionavaitdisparu,Libbypassaittoutdemêmeunexcellentmoment.
«JevaistechercherdesKleenex,j’auraisdûypenser,ditTonyenselevantetsanscesserderire.Iltefautautrechose?
—Enfaitl’Actifedestsurl’évier,situveuxbienmel’amener.»L’Actifedlafaisaitdormir,maiselleavaitbesoindequelquechosequil’empêched’éternuerà
nouveaucommeçadevantTony.Tonys’éloignadanslecouloiretLibbysepermitdeleregarderlonguement.Ilportaituntee-
shirtbleuColumbiaetunvieuxjeandélavé.Chezlaplupartdesmecs,Libbyremarquaitàpeineleurpantalon,saufs’ilsportaientduveloursjauneouautrechosedebizarre.MaisTonyportaitbiensonjean.C’étaitlescuisses,seditLibby.Ellevoyaitlesmusclessecontracterquandilmarchait.Etsontee-shirtmoulaitseslargesépaules.Tonyjouaitaufootballdepuistoujours.Mêmeàlafac,ilavaitungroupe d’amis avec qui il organisait régulièrement des parties. Toutes ces années de pratique luiavaientforméunemusculatureharmonieuse.Iln’étaitpasmassifcommecertainsjoueurs,maisbienproportionné,avecdesbicepsprononcés.Libbyaimait regarder sesbras.Tony revint,LibbyavalasonmédicamentetTonyserassit,passaunbrasautourdesépaulesdeLibbyetselaissaallersurledossierducanapépourregarderlefilmàsonaise.
Libbyessayadeluttercontreleseffetsdumédicament,maisbienavantlafindufilm,elleétaitprofondémentendormie,latêtesurl’épauledeTony.Tonysongeaàlaporterdanssachambre,maisilneputs’ydécider.Detoutemanière,samèren’allaitpasrentreravantplusieursheures,etsiLibbyavait besoin de quelqu’un ? Il s’inclina donc sur le côté et attiraLibby, toujours enroulée dans sacouette,contrelui.Ilétaittardetils’endormitbientôt,ensentantlarespirationdeLibbycontresonventre.
Le lendemainmatin, Libby se réveilla dans son lit en ayant l’impression de n’avoir jamais
aussibiendormi.IlluifallutuninstantpoursesouvenirqueTonyétaitvenuluiapporterdelasoupeetregarderunfilm.Ellesesouvenaitaussivaguementd’avoirsentilesbrasdeTonyautourd’elleetd’avoirdormiserréecontrelui,maisc’étaitsansdouteunrêve.Cependant,ilétaitimpossiblequesamère,quiétaitplutôtmenue,l’aitportéedanssonlit,cequinelaissaitqu’uneseuleautrepossibilité,seditLibbyavecunfrissond’excitation.Elleseredressaet trouvaunechemisebleuecartonnéeaupieddesonlit.
Ellel’ouvritettrouvaunpetitmotdel’écrituredeTony.Libby,Tamèreestrentrée,jeretournechezmoi.Jetelaisselemanuscritdemonlivre.Jet’avaispromisquetuseraislapremièreàlalire,tutesouviens?Regarde-lequandtuaurasletemps.J’espèrequeçateplaira.Bises,
TonyP.S. : Au cas où tu t’inquiéterais, JohnnyDepp s’est échappé et Orlando Bloom a séduit la jeunepremière.
C’étaitdonclàsasurprise.Libbyselaissaretombersurl’oreilleravecungrandsourireetsemitàlire.
CHAPITRECINQ
«Victoire!»Melsautaitsurplaceenpoussantleshautscris.Satogevertpâledecérémoniesautaitsurses
hanches. La couleur allait merveilleusement bien avec ses cheveux blonds et sa peau claire. JohnsoulevaMeldeterreetlafittournerdanssesbras.
«Bravo,chérie!»dit-ilavantdel’embrasseravecunenthousiasmelégèrementexcessifpourunlieupublic.
Ilsétaienttropmignonsensemble.«Toiaussi,Libster,»ditJohnenlamontrantdudoigt.BonDieuqueLibbydétestaitcesurnom!ParkerposaunbaisersurlecrânedeLibby.«Ouais,bravo,»murmura-t-il.Libby aurait vraiment aimé qu’il arrête de faire ce genre de chose.Cela faisait unmoment
maintenantqueJohnetMelétaientensemble,etLibbyseretrouvaitinévitablementappariéeàParker.Nonqueçaladérangebeaucoup:c’étaitplutôtsympad’avoirquelqu’unpourl’accompagneràtouteslesfêtesdedernièreannée.EtelleaimaitbienParker.Ilétaitdrôle,ilavaitconfianceenlui,etmêmesielleétaitunpeugênéedelereconnaître,qu’unétudiantviennedeNewYorkjustepourlavoirluiconféraituncertainprestigeparmisescongénères.Engénéral,ilss’entendaientbien,Parkeretelle,et même s’il y avait eu quelques tièdes baisers, il n’avait jamais semblé en vouloir plus. Mais,récemment, il s’étaitmisàappelerplussouventet il semblait toujoursen trainde la toucherd’unemanièreoud’uneautre.Libbysavaitqu’àprésentlelycéederrièreelle,elleétaitprêteàattaquerlaquestionTonyMarchettifrontalement.CettehistoireavecParkerrisquaitdoncdedevenirgênante.
Le jardin desMarchetti était magnifique. Des lanternes en papier pendaient aux câbles que
M.Marchetti avait tendus entre les arbres et des torches enflammées éclairaient tout le jardin.Melavaitpassédesmoisàpréparersafêtehawaïennedefind’année.Vulenombredegensquiétaientvenus, c’était un vrai succès. Une grande tente blanche abritait des tables et des chaises,mais deschaises supplémentaires avaient dû être installées un peu partout dans le jardin pour faire face àl’affluence.LibbyavaitfaitlaconversationàParkertoutelasoirée,maisellefutsoulagéequandilsemêlaàuneconversationsurlebase-balletqu’elleputs’éclipser.Ellefitquelquespasdanslejardin.Elleavaitunpeufroidenpagneetenhautdebikini,maisellesavaitl’effetqu’elleproduisaitetellen’avait pas l’intentionde se changer avant l’arrivéedeTony.Unpeude sex-appealnepouvait queservirsesprojets.L’aviondeTonyavaiteuduretardetilavaitmanquélacérémonie,maisildevait
arriverd’uninstantàl’autre.«Jepeuxembrasserl’impétrante?»Comme si ses pensées l’avaient fait apparaître, la voix chaude de Tony lui parvint dans
l’obscurité.Elleavançadanssadirectionenlaissantsesyeuxsefaireaumanquedelumièreetelleletrouvaétendusurunechaiselonguesousunarbre.
«Jenesavaispasquetuétaisarrivé.—Ilyauneheure.Tuétais…occupée.»Tonyselevaàsonapprocheetlapritdanssesbras.Elledutsemettresurlapointedespieds
tantillaserraitfortcontrelui.Sapeauétaitchaudecontrelasienneetellesentitsonsoufflechaudsursoncou.Illagardadanssesbrasunlongmomentavantdelalibérer.
«Commenttutesens?—Super,»réponditLibbydansunsouffle.Puiselleserenditcomptequ’ilvoulaitsansdouteparlerdufaitd’avoirfinilelycée.«Trèsbien,jesuiscontented’enavoirterminé.»TonyfitasseoirLibbyàcôtéde luisur lachaise longue, toutengardantsesmainsdans les
siennes.«Tuaschoisiuneuniversité?Ilneresteplusbeaucoupdetemps.»Libbysourit.ElleavaitunesupernouvellepourTony.«Oui,j’aireçuuncourrierdeColumbia,ilsmeprennent!»Libbyavaitétéprisepresquepartoutoùelles’étaitportéecandidate.Maissonpremierchoix–
Columbia–l’avaitmisesurlisted’attente.L’universitédeFloridaStatel’avaitleplusimpressionnéeet luioffrait lesmeilleuresconditionsfinancières,maisellevoulaitalleràNewYork.SiColumbian’avaitpas finipar l’accepteraprèsunultimeentretien, il lui restaitNYUcommedeuxièmechoix.Maistoutcelaétaitterminé.ElleallaitétudieràColumbiaavecTony.
« Ouah, bravo. C’est dur de sortir de la liste d’attente.Mais c’est vraiment là que tu veuxaller?Tuavaisl’aird’aimerlaFloride.
—Ehbien,jeveuxêtreàNewYork,doncc’étaitsoitColumbiasoitNYU.»LesouriredeLibbys’effaça.Elleavait imaginélascèneautrement.Tonyl’auraitprisedans
sesbrasetauraitproclamésonbonheurqu’ilspuissentenfinêtreensemble.NYU. Avec Parker. Tony espérait que Libby ne pouvait pas le voir faire la grimace dans
l’obscurité.QuandLibbyavaitcommencéàpenseràColumbia,Tonys’était toutdesuitemisà lesimaginer enfin réunis.Mais elle avait eu l’air vraiment enthousiaste à l’idée d’aller en Floride, etquantàluiilneluirestaitplusqu’unanàNewYork.Ilavaitmêmeenvisagéd’allervivreenFlorideune fois ses études terminées – en supposant que Libby soit intéressée.Encore un an, se disait-il.LaisseLibbyfairesesarmesàl’université.Encoreunsemestreoudeux,etilspourraientenfinêtreensemble.Biensûr,c’étaitavantd’arriveràcettehorriblesoirée.Ilavaitpassédesheuresàattendreàl’aéroport,ilavaitquandmêmeratélacérémonie.Et,enarrivantàlasoirée,iln’avaiteuaucunmalàtrouverLibby.
Elle était magnifique dans son costume hawaïen. La plupart des filles portaient unaccoutrementsimilaire.Ilenavaitmêmevuuneavecunsoutien-gorgeennoixdecoco!MaisseuleLibbyluifaisaitbattrelecœurainsi–iln’avaitvuqu’elleenarrivant.Maisladeuxièmechosequ’ilavait vue, c’était ce nigaud deParker qui la suivait partout, lamain posée dans son dos ou sur sahanche.Biensûr, il savaitqu’ilsétaientplusoumoinsensemble,mais ilnepensaitpasqueParkerseraitprésentcesoir-là.Bêtement,TonyavaitimaginépasserlasoiréeavecLibby,etquellen’avaitpasétésasurpriseenréalisantqueLibbyavaitdéjàquelqu’un.
« New York est super, Libby. C’est juste que je me souviens de ton enthousiasme pour laFloride.Tum’avaismêmedonnéenviedepasserquelquetempslà-bas,moiaussi.»
Libby ne comprenait pas bien,mais elle ne comptait pas se décourager. Elle était sûre quec’étaitleurnuit,àtouslesdeux.Elles’approchaunpeudeTonyetposalamainsursacuisse.
«JeveuxveniràNewYork.Pourêtreavectoi.»Risquantletoutpourletout,Libbys’approchaencoredeTonyetluiplaquaunbaisersurles
lèvres.Ellenel’avaitplusfaitdepuisunanetdemi.Depuislemariagedesoncousin.Ellenefutpasdéçue.
Sielleavaiteufroidplustôtdanslasoirée,àprésentsapeauluisemblaitenfeu.LeslèvresdeTonysepressaientcontre lessiennes, sa languecaressait lasienneet,aucontrairede leursbaisersprécédents,illuisemblaqu’ilneseretenaitpas.Tonyluipassaunbrasautourdelatailleetl’attiracontrelui.Ilpoussaungémissementensentantsesseinsappuyercontresapoitrine,puisilplongeasamaindanssescheveuxetluiinclinalatêtepourl’embrasserencoreplusprofondément.Encouragéeparsaréaction,Libbypassalamainentreeuxetsemitàdéboutonnersachemise.Ellenepensaitqu’àunechose,c’étaittouchersapeau,sentirsesmusclesqu’elleadmiraitdepuisdesannées.Samainseposasurlasienneet,l’espaced’uneseconde,ellepensaqu’ilallaitl’aideràtrouverlapeauqu’elledésiraittant.MaisilfermalepoingsursonpoignetetrompitleurbaisersibrusquementqueLibbyneputretenirunsonplaintif.
«Libby.Arrête.Qu’est-cequetufais?—Jetel’aidit.Jeveuxêtreavectoi.»Libbyvoulutsepencheretreprendreleurbaiser,maisTonylarepoussa.«Onnepeutpasfaireça,Lib.Pasmaintenant.Pascommeça.»Tonyessayadegarderunevoixcalme.Maisenmêmetempssoncorpsobjectaitviolemmentà
sesparoles.Libbysereculabrusquement,unsentimentd’humiliationnaissantdanssapoitrine.«Tuneveuxpasdemoi?Tuneveuxpasêtreavecmoi?—Biensûrquejeteveux!Tuétaisoùilyadeuxsecondes?Tuestellementbelle.Tuesla
plusbellefemmequej’aiejamaisvue.Habilléecommetul’escesoir,tousleshommesteveulent–jeteveuxdésespérément,maisçaneveutpasdire…onn’estpas…ensemble…»
Tonybafouillaenessayantdes’expliquer.Ilavaitunplan.Pourquoiest-cequ’ellechamboulaitson plan ? Pourquoi son cerveau refusait-il de l’aider à comprendre ce qui se passait ? Il savaitpourquoi – parce que tout son sang avait afflué vers le bas aumoment où elle lui avait touché lacuisse.
« Mais c’est tout ? Tu as juste réagi à mon apparence physique ? dit Libby en s’écartanttoujoursplusetenlibérantsesmains.
—BonDieu,Libby!Cen’estpasça.»Cumulantlesfrustrations,Tonysepassalamaindanslescheveux.«Tuas17ans!—18,»ditLibbyensemordantlalèvre.Tonyplissalesyeux.«Mela17ans.—Je suisnéeen janvier, elle endécembre. J’aipresqueunandeplus,»ditLibbydansun
murmurepresqueinaudible.Ellesesentaitsurlepointdepleurer.Ellenes’étaitjamaissentiesiminuscule.Tonyhochalatête.Illesavait,c’étaitjustequ’iln’avaitpaslesidéesclaires.«18,okay,maistuviensdefinirlelycée.Jenesaispassic’estlechiffrequicompteleplus.Et
pasmaintenant,Libby.Jenepeuxpastefaireça.»Libbyhochalatête.Ellen’osaitpasrépondre.«EtquiddeParker?Enfin,Libby,tuesiciavecquelqu’und’autre.Jenevaispasluivolersa
copine.»Maintenant,Tonyparlaitjustepourparler.Ilpensaitques’ilcontinuait,iltrouveraitunmoyen
defairedisparaître ladouleurqu’ilvoyaitdans lesyeuxdeLibby.Il réussiraitàseconvaincrequec’étaitlabonnedécision.
«Cen’estpassérieux,ditLibbyd’unevoixtremblante.—Lib.Ilesticitouslesmois.Tusaiscequeçacoûte,unbilletd’avionentreicietNewYork?
Crois-moi,c’estsérieux.»Libbyfitdemi-tourets’éloigna.«Attends.Onpeut…Onpeut separler?Onest toujoursamis…Onnepeutpas reveniren
arrière?…»Tonyluicourutaprèsetellefitdemi-tour.«Jesuisdésolée,Tony.Jecroisquej’ainégligémonpetitamitroplongtemps.»Libbyfitvolte-faceetretournaverslafêteaussivitequ’elleleput.Tonyrestalà,bouchebée,à
laregarderpartir.Puisilfinitparrentrerdanslamaison.Ilétaitencolère,ilsesentaitmeurtri,seul,etilauraitvouluêtretoujourscoincédanscettesaletéd’aéroport.
Libbyseconcentraitsursacolère.CommentTonypouvait-ilflirteravecelle,l’embrasseretla
toucheretnepasvraimentvouloirêtreavecelle.Ellen’étaitpasassezpourlui.Elleavaitperdusontemps à penser à lui. À penser qu’ils pourraient être autre chose qu’amis. Être en colère étaitpréférable à être triste. Préférable au désespoir qui guettait. Préférable au nœud d’angoisse qui seformaitdanssonventre.ElleretrouvafacilementParkerauseind’ungroupedegarçonsquiparlaientencoredesport.Libbyl’entraînaavecelledanslamaisonetjusqu’àlachambredeMel.Ellenesavaitpasclairementcequ’ellefaisait.Toutàcoup,ilfallaitqu’elleseprouveàelle-mêmequ’elleétaitunefemmedésirable.Ellel’embrassa.
Parker lui rendit son baiser. D’une langue experte, il écarta ses lèvres, pressa ses hanchescontre les siennes et caressa du bout des doigts sa colonne vertébrale. Libby sentit une tristessel’envahir.
«Attends,dit-elleens’écartant.—Net’inquiètepas,murmuraParkerenl’attirantànouveaucontreluietenluiembrassantla
gorge.J’aicequ’ilfaut.»Dequoivoulait-ilparler?Oh!LesensdesesmotsapparutsoudainàLibbyetlaramenaàla
réalité.«Non,dit-elleenreculantànouveau.Jesuisdésolée,c’étaituneerreur.Jesaisquec’étaitmon
idée,mais…»Elleneterminapassaphrase:ellen’avaitpasd’excuse.Tonyavaitraison.ElletraitaitParker
demanièrehorrible.«Hé,c’estpasgrave,Libby.Onn’estpasforcédelefaire.Pourêtrehonnête,j’étaisunpeu
surpris.Jeveuxdire,j’yavaispensé,àcequ’ondevienneplusintimes,surtoutsituvasêtreàNYUavecmoil’annéeprochaine.Maiscen’estpaslafindumondeetpuisaumoins,maintenant,onsaitoùonenest.»
C’était décidé – impossible d’aller à NYU avec Parker l’année prochaine. La Floridegagnait…hautlamain.
«Jesuisdésolée,Parker.Jenesaispascequim’apris.—Net’excusepas,Libby.Onestamis.C’estcool.»Il l’attiraànouveaucontre lui,maisc’étaitunmouvementd’amitié, etLibbyavaitvraiment
besoind’unami.«D’ailleurs,entantqu’ami,jepourraistedemanderunservice?»
Libbylevalesyeuxverslui.«JohnetMelsontpartisdansnotrevoituredelocationilyauneheure…alors…—Tuveuxquejeteraccompagneàtonhôtel?ditLibbyensouriant.Pasdeproblème,ilfaut
quejemetired’icidetoutemanière.»Parker passa un bras autour des épaules de Libby et, tout en se dirigeant vers la porte, lui
donnaunbaisersurlajoue.«Euh,Parker?—Hmm?—Çacoûtecombiendeveniricienavion?»Parkeréclataderire.«Justeunpeud’humiliation.»Libbydutavoirl’airdenepascomprendre,parcequ’unefoisinstallésdanslavoiture,Parker
continua.«Legrand-pèredeJohnpossèdeunecompagnieaérienne.Tusais,desjetsd’entreprise.John
paieses trajetsen travaillantcommesteward,etçanecoûte riendeplusauvieuxsi jeviensaussi,doncvraimentçacoûtejusteunpeud’humiliationàJohn.
—Unsteward?Commeunagentdebord?—Ouais, c’est ça.Legrand-pèrede Johnest à l’ancienne, il préfère le terme“steward”.Et
commeçafaitrougirJohnjusqu’auxoreilles,jedoisdirequemoiaussi.»IlsrirentdeboncœuretLibbyfutheureusequesonamin’aitpasdépensétoutsonargenten
billetsd’avion.Elles’enallait.AvecParker.Tonyétaitsonné.Ilétaitvenulachercher,pourlasupplierdelui
donnerune seconde chance. Il était vraiment idiot.Elle lui avait offert tout cequ’il désirait depuistoujoursetill’avaitrembarrée.Toutçaparcequ’ilétaitunpeumalàl’aisequ’ellesoitsijeune.Ilsauraient pu faire avec – peut-être commencer doucement, ils auraient pu sortir ensemble,platoniquementaudébut.N’était-cepascequeMel lui avaitditde faire? Il auraitpu l’emmeneràBroadway, à l’Empire State Building.Mais il n’aurait jamais imaginé la trouver dans les bras deParker,sehâtantverslasortie.C’étaitsûrementdesafaute.Ill’avaitpousséedanslesbrasd’unautre,maisçan’enlevaitrienàladouleurqu’ilressentait.
CHAPITRESIX
J’aieuunepromotioncetteannée.Aulieud’êtreceluiquifaitlecafé,j’ailedroitd’écrirequelquechose ! Bon, juste les nécrologies, mais j’aurai mon nom dans le prochain numéro. Et je peuxdemanderauxstagiairesdem’apporterducafé.Jesuisvraimentdésolépourtout.-T-CommentestlaFloride?Ici,ilfaitdéjàfroidetjet’imagineauchaud,entraindebronzerausoleil.J’espèrequelafacteplaît.Melmeditquetuaimestescours–biensûr,elleestrévulséeàcetteidée.Jecroisqu’ellesespécialisedanslesfêtesàNCState.-T-Melmeditquetuesdansl’équipedecross.C’estsuper,Libby.Jesaisqueçadoitteplaire.Jesaisaussiquetuesoccupée,maistupourraispeut-êtremedirecommenttuvas?-T-Une de mes nouvelles a été publiée dans une revue littéraire locale. Je voulais t’en envoyer unexemplaire,maisMelrefusedemedonnertonadresse.Elleditquetuesfâchéecontremoi.Jesupposequ’ellearaison.P.S.:Tupourraispeut-êtremedirecommentmefairepardonner?-T-Cette année, pour Halloween, je pense louer un costume de pomme et prendre le métro toute lajournée. J’ai tellement aimé croiser des personnages hallucinants dans le métro, c’est mon tourd’offrirçaàlacommunauté.P.S.:Tumemanquestellement,Lib.-T-Aujourd’hui j’aientenduuneblaguequim’a faitpenserà toi…Deuxcookiessontdansun four.Lepremierditàl’autre:«Pfffffilfaitchaudici!»L’autres’écrie:«Haaaaaa!uncookiequiparle!»-T-
Pour lapremière foisenpresquecinqmois,Tonyfit sourireLibby.Elleeneutassezde luibattre froid et de se sentir humiliée.Cen’était pas vraiment de sa faute.Et puis elle était vraimentheureuseàFloridaState.Alors…elleluirépondit.Ta blague est nulle ! Tu sais ce que le cookie a dit au chercheur d’or ? « Et toi, t’as trouvé unepépite?»Lafacestgéniale.Jemesuisfaitpleind’amis,ettumemanquesaussi.-L-Tuessuruneîledéserteettuasneufcarottes.Commenttulesfaiscuire?Tuenlèvesunecarotte,lescarottessontqu’huit…Désolé,monhumourdecuisineestlimité…Merci.-T-
Mêmesic’étaitvraiqu’ellen’étaitpasmalheureuse,Libbyavaitdumalàsesentirvraimentàl’aiseenFloride.Ellesavait,biensûr,quel’universitéseraittrèsdifférentedulycée,maislesavoiretenfairel’expérienceétaientdeuxchosesbiendifférentes.Libbyetsacoloc,Suzy,participaientàdenombreusesactivités. Ilyavait les fêtes, lesexcursionsàSt.GeorgeIsland,etLibbyétaitvraimentmotivéeparl’équipedecross.Melluimanquait,ainsiquesesautresamis,maisellesesentaitlibreaussideneplusêtretoutletempsavecdesgensquilaconnaissaientdepuisl’âgede6ans.
PourThanksgiving,MelétaitvenueàTallahassee,etLibbyétaitrentréeàlamaisonpourNoëletpourlesvacancesdeprintemps.JohnetParkerétaientvenuslesvoiràNoël.RevoirParkeravaitétéplusagréablequeLibbynel’auraitimaginé.Peut-être,pensa-t-elle,cettehorriblesoiréeétait-elleenfinderrièreelle.Peut-êtrequ’ellepassaitàautrechose.Cequiétaitbien,carLibbyétaitàprésentconvaincuequ’ellenepouvaitpas simplementattendrequeTonysemetteà l’aimer.TonyetLibbyétaientredevenusamis,maisilsavaientévitédereparlerdelasoiréeenquestion,etleschosesétaientrestéeslégères,amicales.Libbyétaitbiendécidéeànepasl’inciteràflirterànouveau,carellesavaitàprésentquecesmomentsnemenaientpaslàoùellelesouhaitait.
Ilss’écrivaient,s’envoyaientdesmessagesetsetéléphonaientdetempsentemps.Unefois,ilavaitmêmeréessayédeluidemanderdescoursdecuisineparcorrespondance.MaisilsavaientétédistraitsparundébatsurledernierromandeJohnGrishamqui,selonLibby,étaituneexceptionàlarègleselonlaquellelelivreestmeilleurquelefilm.Certaineschosespassenttoutsimplementmieuxà l’écran. C’était pareil pour Nicholas Sparks, mais Tony déclina de se prononcer en avançantqu’aucunhommequiserespecten’aregardéN’oubliejamaisjusqu’àlafin,sansmêmeparlerdelirelelivre.Maisilsn’avaientjamaisterminéledébatsurJohnGrisham,carlescookiesdeTonyavaientbrûlé et la fumée l’avait chassé de son appartement. Libby songea à lui envoyer des cookies deremplacement,maisellenevoulutpasrisquerderetomberdansdemauvaiseshabitudes.
Aprèssondernierexamen,Libbyregardalentementsachambrevide.Suzyétaitpartielaveilleetunemoitiédelapièceétaitentièrementnue.L’autreétaitpleinedecartonsprêtsàêtrechargésdanslacamionnettequ’elleavaitlouéepourlelendemain.Commec’étaitétrange,pensa-t-elle,derentreràlamaisonlelendemainmatin.C’est-à-dire,plustarddanslamatinée,sedit-elleenremarquantqu’ilétait2heurespassées.ElleavaithâtederevoirMel,etsamèreetmêmeStuart–lecompagnondesamère. Mais cela semblait bizarre de dormir à nouveau dans la petite chambre de son ancienappartement.Letéléphonesonna,tirantLibbydesarêverie.LenomdeTonyapparutsurl’écrandesontéléphone.IlavaitreçusondiplômedeColumbial’après-midimême.Libbydécrocha:
«Bravo!Commentças’estpassé?
—C’étaitgénial,toutelafamilleétaitlà.Ilsontprisbeaucoupdephotos.Lahonte.Commenttuassuquec’étaitmoi?
—J’aivutonnomsurl’écran.Pourquoituascettevoixbizarre?»Tonyparlaittropviteetd’untoninhabituel.«C’estsansdouteparcequej’aitropbu.»Tony,avoirtropbu!Çaneluiressemblaitpas,dumoinslecroyait-elle.Maisà22ansetun
diplômed’universitéenpoche,çanedevaitpasêtresapremièreexpériencedelaboisson.«Lapetitefamilleestrepartiedepuislongtempsetj’aifêtéçaavecdesamis.Jesuischezmoi
maintenant.Dansmonappart,jeveuxdire,paschezmoienCarolineduNord.J’auraisaiméquetusoislà,Lib.»
Libbygloussadoucement.Tonyétaitaussicharmantbourréquesobre.«J’auraisbienvouluaussi,maisj’avaisundernierexamenàpasser.Jeseraichezmoidemain
soir.ChezmoienCarolineduNord.—Pourquoitunedorspas?»Libbyrittouthaut,cettefois.«Toinonplustunedorspas!J’allaisjustemecoucher,enfait.J’avaisplusderangementà
fairequejenelecroyais,puisj’aiprisunedouche,puisj’aireçuuncoupdetéléphone!»Ilyeutunlongsilence.«Tony?Tueslà?— Oui, je suis là, dit-il d’une voix plus grave et plus chaude que précédemment. Je t’ai
interrompueentretadoucheettonlit?—Euh,oui,maisnet’enfaispas.»Cequ’ilpouvaitêtrebizarre,desfois.«Tony,allô?—Jesuislà,Lib.J’essaied’évaluersijesuisassezsoûl.—Assezsoûlpourquoi?—Dis-moicequetuportescommevêtements.»LecœurdeLibbyfitunbonddanssapoitrine.Celanecadraitpasaveclecodeimplicitede
leurnouvelleamitié.Ilfallaitqu’ellesoitferme.Qu’elleluidised’allercuversonvin.«Uneserviette.Jeporteuneserviettedebainrouge.»Qu’est-cequiluiavaitfaitdireça?C’étaitvrai,maisellen’avaitpaseul’intentiondelelui
dire.«J’aimelerouge.Tuasencorelescheveuxmouillés?—Euh,ouais…»C’étaitsexy,lescheveuxmouillés?«Parfoisjerêvedetoi,lescheveuxmouillés,rouléedansunecouverturerose.»Ouaip,apparemment,c’étaitsexy.«Turêvesdemoi?—Tuveuxbientemettreaulit?—Laserviettevamouillerlesdraps.»Libbyfutsurprisequ’ilentendesavoixetnonlebruitdesoncœurquibattaitlachamade.«Tupourraisl’enlever.»ElleentendaitlesouffledeTonyentresesmots.Unfrissonluiparcourutl’échineenpensantàluientraindel’imaginerenleversaservietteet
seglisserentrelesdraps.«Jenecroispasquecesoitlameilleurechoseàfaire.—Libby?
—Oui,Tony.—J’aimeraisêtrebeaucoupplussoûl.»Quoi?Ouah,ilétaitvraimentmauvaisàcepetitjeu.«Ouah,tuesvraimentmauvaisàcepetitjeu.»Tonyeutunriregraveetchaudetellefrissonnaànouveau.«Désolé,Lib.Etmoiquicroyaisêtretrèsadroit.»Ils’interrompituneseconde.«J’étaisfou,l’étédernier,Libby.Jesupporteraispasquetumefassesànouveaulatête.J’ai
besoindetoidansmavieetcen’estpasunebonneidée,cequ’onfaitlà.—Tuasraison.»Libbysoupira,maisellesavaitaussique,lematinvenu,elleseraitsansdoutetrèscontenteque
leschosessesoientarrêtéeslà.«J’aimeraisquetusoisplussoûl,moiaussi.»Ceàquoiilréponditparungrognement.«Tuescouchée?—Oui.—Tirelacouverturesoustonmenton,Libby.Fermelesyeux.Respireprofondément.»Libbyfitcequ’illuidisait.«Endors-toi,Libby.Bonnenuit.»Etilraccrocha.Libbyjetasontéléphoneàtraverslapièce.
CHAPITRESEPT
«Tuarrêtestesétudes!»Libby s’en voulut aussitôt d’avoir informé tous les clients de la pâtisserie de la mauvaise
nouvelleannoncéeparMel.«Qu’est-cequetesparentsvontdire?»MeletLibbynes’étaientpasquittéesdel’été,etLibbysavaitbienqueMeln’avaitguèrehâte
dereprendrelescours,maisellenes’attendaittoutdemêmepasàça!«Ilssontaucourant,Libby!Ilssontd’accordavecmoi.Jenesuispasvraimentuneétudiante
modèle,commetusais.Et,sij’arrêtemaintenant,ilspeuventrécupérerunegrandepartiedesfraisdescolarité.Jenesuispasbête,j’aibienréfléchi.Situprometsdem’écouter,jepourrait’expliquer.»
Libbyregrettad’avoircrié.«Biensûr.—Tutesouviensdelacravatequej’avaisfaiteàJohnauprintempsdernierquandFranks’est
marié?»Le cousin de Mel, Frankie, s’était marié quelques mois plus tôt. Mel avait trouvé la robe
parfaite, couleur lilas,mais elle avait été très déçue que John semontre incapable de trouver unecravate assortie.Libby avait trouvé celaun tantinet ridicule,mais c’était biendans le styledeMel.Celle-cis’étaitdoncmiseentêtedefabriquerelle-mêmeunecravatequiailleavecsarobe.
«Johnareçupleindecompliments,certainsdesesamisdefacvoulaientmêmelaluiacheter.Ilarefusé,biensûr,maisquandilsontfaitleursoiréeétudianteàlafindel’année,jeleuraipréparéunedouzainedecravates.Lesparentssontd’accordpourmeprêterl’argentquelafacvaleurrendreetjevaism’installeràNewYorkavecJohn.»
Libby soupçonnait fortement qu’une information essentielle manquait à l’appel, mais desannéesdepratiqueluiavaientappriscommentaidersonamieàrévélerlechaînonmanquant.
«Bon.Etàquoidoitservirl’argent?—Àacheterdesmatériaux,bêta.»Okay,elleavaitpeut-êtreperdulamain.Libbycomptajusqu’àdixdanssatête.«Quelgenredematériaux?—Oh,surtoutdelasoieetdusatin.Etjevaisavoirbesoind’unemeilleuremachineàcoudre.
EtJohnaunamiquivamefaireunsiteInternet,jevaisdevoirlepayer…—Tuarrêteslafacpourfairedescravates?—Passeulementdescravates.Desfoulards,desmouchoirs.Etjesuisentrainderéfléchirà
uneformationcuirpouréventuellementfairedesceintures.Jecommenceaveclesaccessoirespour
hommes,carjecroisquelemarchéestmoinsencombré.EtlamèredeJohnestchirurgienneetellem’apromisd’enparleràsesamischirurgiens,laplupartsontdeshommes.Quandj’auraiétablimamarque,j’aimeraisaussifairedesaccessoirespourfemmes.
—TudéménagesàNewYork!—Faisuneffort,Libby,ditMelensouriant.J’aimeJohnetj’enaimarredenelevoirqu’un
week-endparmois.Çavaêtre super.De toutemanière tuesenFloride laplupartdu temps.Onseverrapeut-êtreplusqu’avant,avecleplandeJohnpourprendrel’avion.C’estcequejeveuxfaire,Libby.J’aienfintrouvécepourquoijesuisdouée.
—Tuesdouéepourbeaucoupdechoses,ditLibbyensemordantlalèvreetenréfléchissantàtoutcequeMelluiavaitdit.Jepensequec’estunebonneidée,maistudevraisprendredescoursdegestionetdedesign.Pourêtresûred’avoirtoutcequ’ilfautpourréussir.»
C’était ce que Libby comptait faire, en tout cas. Elle voulait un diplôme de gestion avantd’ouvrirsonproprecafé-pâtisserie.
«Nan.Jefaisçaaufuretàmesure.Tonyaunamiquifaitdudroitetquipourrameconseillerpour lesdémarchesdedépart.Maismaintenantque j’aiunprojet, jeneveuxpasattendre troisanspourcommencer!»
Libbyhochalatêted’unairabsent.«Etças’estpasséquand?—Tunem’écoutaispas?Moncousins’estmariéet…—Pasça,Mel.Jemeparlaisàmoi-même,enfait.Jemedemandaisquandest-cequej’airaté
letrain.TuvascommencertanouvellecarrièreàNewYork,TonylasiennedansleNewJersey,etmoijesuislarguée.
—Lavache !Tu exagères, ditMel en lançant sa serviette en papier surLibby.Tun’es paslarguée, tu retournesenFloride lasemaineprochaine, tuasbeaucoupd’amis là-baset tuaimes tescours.Libby,moi,j’étaismalheureusel’annéedernière.TuétaisàTallahassee,JohnàNewYork.S’ilteplaît,essaied’êtreheureusepourmoi…
—Jelesuis,Mel.Sij’étaisunhomme,j’achèteraistoutesmescravatescheztoi.— Très bien. Maintenant que c’est réglé, tu veux m’aider à déménager ? John et Parker
arriventdemainmain,onva loueruncamionet repartirensemble.Tupourraispasser leweek-endchezmoi.Parkerseralà.
—J’aimeraisbien,Mel,maisj’aipleindechosesàfaired’icilundi.Maisjepasseraidemainmatinpourt’aideràfairetescartons.»
Libbyauraitvoulupouvoirdireoui.ElleauraitbienaiméaiderMelàdéménageretvoir lasplendidemaisondevilleoùhabitaitJohn.Maisilfallaitqu’elleretourneenFloridedèslundietTonyallaitêtrelàceweek-end.Illeluiavaitannoncélui-même.
«Ah,bon,jesupposequej’auraisdûteprévenirplustôt.»MelsemblaitétudierlevisagedeLibby.Elleécartasafrangedesonvisageetrepritlaparole.«Tonyarrivedemainsoir.»Libbynesutpasquoirépondreetdécidad’ignorerl’interventiondesonamie.Ellepritunair
détaché,maisMelfutloindesedécourager.«Tunem’asjamaisvraimentditcequis’estpasséavecParker.—Quoi?Ilnes’estrienpasséavecParker.OnestsortisdeuxoutroisfoiscommeJohnettoi,
etmaintenantonestamis.—EtavecTony?—Ilnes’estrienpasséavecluinonplus.Onestjusteamis.C’estmieuxcommeça.Tuavais
raison,ilesttropvieuxpourmoi,detoutemanière.»Melhochalatêted’unairpensif.
«Donctunevaspasmedirepourquoivousvousêtesdisputésl’annéedernière?—Parkeretmoi,onnesedisputejamais.Ons’entendtrèsbien,»réponditLibbyenfaisant
mined’avoirmalcompris.Melhochaànouveaulatête.«Tuaspeut-êtreraison.Peut-êtrequetuesunpeularguée,maisc’estdetafaute.Quandest-ce
quetuessortieavecungarçonpourladernièrefois,Libby?»Libbypoussaunsoupir résigné.Pour lapremière foisendouzeans,Mels’intéressaitàune
autrevieamoureusequelasienne.Auplusmauvaismoment.«Jesors,Mel.Commetul’assijustementdit,jevisenFloride,doncjesorssurtoutlà-bas.»LevisagedeMelexprimalesoulagement.«Super!Alorsraconte.Avecquiest-cequetusors?»Mince.«Euh,cen’estpassérieux,maisj’aipassépasmaldetempsavecBrianlesemestredernier.»Cen’était pasvraimentunmensonge.Brian avait sacrifié laplupart de ses jeudis soir pour
l’aider avec ses devoirs de compta. Et ce n’était pas sérieux, principalement parce queBrian étaitamoureuxdesapetiteamie.CequinechagrinaitpasLibby,vuqueBrianavaitunepersonnalitéunpeuterne.Ilferaitsansdouteunexcellentcomptable,maisunpeuterne.
MeletLibbybavardèrentencoreunpeu,cettedernièrefaisantpreuvedediplomatiequandlenomdeBrianrevenaitdanslaconversation.QuandMelselevaetannonçaqu’ellerentraitchezellepréparer son déménagement, Libby fut heureuse de se retrouver seule avec ses pensées. Elle avaitbesoinderéfléchir.Cen’étaitpastoutdeneplusêtreamoureusedeTony,cequiétaitlecas.Melavaitraison.Libbyavaitbesoindesortirplussouvent.Lesoccasionsnemanquaientpas,maiselletrouvaittoujoursdesexcuses.
Plus maintenant. À partir de la semaine prochaine, LibbyMcKay était sur le marché pourtrouverl’hommeparfait.Ouauminimum,l’hommeparfaitpourl’instant.
Le lendemain matin, Libby arriva de bonne heure chez les Marchetti, avec un plateau de
cappuccinosglacésetuneboîtedemuffinspréparéspar samère.Pendant lanuit, elleavait réaliséqu’ellenes’étaitpasmontréetrèsenthousiasteavecMel.Ellevoulaitluimontrerqu’ellecroyaitenelleetensonprojet.ElletrouvaMel,JohnetParkerencoreoccupésàfermerdescartons.Cen’étaitpas surprenant :Melavaitpeut-êtrebien réfléchià sondépart,maiselleavait laissé lespréparatifsconcrets pour la dernière minute. Sans se plaindre, Libby se joignit à eux. Le travail avançaitlentement.Touteslesdeuxminutesenviron,Melarrêtaitcequ’ellefaisaitetjouaitCen’estqu’unaurevoirsurlachaîneHi-Fi.Sanostalgieétaitcontagieuse,etLibbyseretrouvaelleaussiassaillieparlessouvenirsdeleurenfance.Leurshistoiresnemanquaientpasd’amuserlesgarçonsquisemirenteuxaussiàraconterdessouvenirsd’enfancehilarantsetfictifs.
«John,tutesouviensquandtuassauvéleschatonsquiétaientdanslagrangeenfeu?—Cen’étaitriencomparéàlafoisoùtuasportécettevieilledamequis’étaitcassélajambe
surdixkilomètrespourl’ameneràl’hôpital.—Ah,maisjen’avaispaslechoix.Tum’avaisempruntémavoiturepourallerfairecesafari.—UnsafariàNewYork?—Ne sois pas ridicule,Libster, le safari était auCanada, c’est pour çaqu’ilme fallait une
voiture,ditJohnensouriantcommeungosse.— Ah oui, si je me souviens bien, tout le monde voulait attraper la fameuse licorne
canadienne.—Qu’est-cequifaitqu’unelicorneestcanadienne?»ditMelenayantdumalàcontrôlerson
fourire.
Parkerpritunairsérieux.«Lefaitqu’ellevitauCanada.—Ouais,ditJohnd’untonexcité.Etellesn’ontpascettestupidecorneenspiralecommeles
licornesaméricaines.Non,ellesontunboisderenneenpleinmilieudufront.»Johnouvrit lamain, se planta le pouce aumilieudu front et fit plusieurs fois le tour de la
pièceengalopant,tandisquetoutlemondeéclataitderire.«Tuenasattrapéune?parvintàdemanderMel.— Bien sûr que oui ! intervint Parker. Et tu sais que, si tu attrapes une licorne, elle doit
t’accorderunvœu.—Jecroyaisquec’étaitleslutins,ditLibbyenselevantpourrangerlesrestesdeleurpetit-
déjeuner.—Maisleslutinsn’existentpas,réponditJohnavecleplusgrandsérieux.—Qu’est-cequetuluiasdemandé?»Johnnepritpasletempsderéfléchir.«Lespom-pomgirlsdesLakers.»Mel se tourna vivement vers lui d’un air agacé et heurta Libby dans le dos. Le reste des
cappuccinosfondusjaillitsurletee-shirtdeLibby.«Mel ! s’écria Libby en écartant le tissu froid et taché de sa peau. Dis-moi qu’il te reste
quelquechosedanscescartonsquejepourraisporter.»Melsecoualatêteengloussant.«Tusaisquemestee-shirtsàmoiseraientindécentssitulesportais.»C’était vrai. Libby avait une poitrine beaucoup plus prononcée, et cela faisait longtemps
qu’ellesnepouvaientpluséchangerleursvêtements.«Peut-êtretamère?»Mais Libby savait que Mel avait hérité sa silhouette de Mme Marchetti et elle ne fut pas
surprisequandMelsecoualatêted’unairconsterné.Deplus,mêmesilescappuccinosn’étaientplusglacés depuis longtemps, le liquide était toujours froid ce qui, en provoquant une réactionphysiologiqueapparente,nefaisaitqu’ajouteràlagênedeLibby.
Enparfaitgentleman,Parkerempoignasachemise,lafitpasserpar-dessussatêteetlajetaàLibby.
«Tiens,metsça,Libby.»Celle-ciseretiradanslecouloirpoursechangeretpourallerrincersontee-shirtdanslasalle
debains.Parkerétaitgrandet lespansde la chemise tombaientplusbasque l’ourletde son short.Libby enleva l’élastique qui tenait ses cheveux et s’en servit pour nouer la chemise dans son dos.QuandellerevintdanslachambredeMel,ParkerfaisaitjouersesmusclesensemoquantdeJohnquimanquait d’exercice. Libby resta debout un instant à regarder ses amis. Bientôt ils seraient tous àNewYorketelleàTallahassee.
«Tucroisquetuasassezdevêtements?»ditJohnd’untonrieurtoutenportantunebrassée
decintresjusqu’àunepiledevalises.Toutelamatinéeetunepartiedel’après-midiavaientàpeinesuffiàterminerlescartons.Libbyauraitpresqueregrettédes’êtreportéevolontaire,s’ilsnes’étaientpassibienamuséstousensemble.
«C’estimportantdesoignersonapparence,tusais,»réponditMelensehaussantsurlapointedespiedspourluifaireunbaisersurlajoue.
Johnlapritdanssesbrasetlasoulevadeterre.«Chérie,tupeuxavoirtousleshabitsquetuveux,maistusaisquetun’esjamaisaussibelle
quequandtuneportesrien.»
Etilluipinçalesfessespourétayersonargument.«Hé,mec,unpeudetenue,protestaParkerenfaisantmined’êtrechoqué.Aide-moiàcharger
lecamion,Libby,»ajouta-t-il.Illuitenditunpetitcartonetsoulevadeuxgrossesvalises.«Tuvasmelaisserseulavecceshormonesambulantespendantdixheuresderoute!Tues
sûrequetuneveuxpasveniravecnous?—Désolé,j’aimesproprescartonsàfaire.Etj’aidesprojetspourceweek-end.—AvecBrian?—Quoi!»LibbylaissatombersoncartonparterreetsetournaversParker.«Pardon,quoi?»répéta-t-ellepluscalmement.Parkerfronçalessourcils.«C’estbienleprénomdetoncopain,pasvrai?C’estcequeMeladit,maisellen’estpastrès
douéeaveclesprénoms.»Libbyeutuncoupaucœurensesouvenantqu’elleavaitpenséquelquechosed’analogueau
sujetdesonamielorsdeleurconversationsurStéphanie/Effie.Aufinal,sonnomimportaitpeu,saufpeut-êtreencequeLibbyavaitpupardonneràsatanteStéphaniedepartagerleprénomdelacopinedeTony.Toutcequi importait,c’étaitqueTonyavaitunecopine.Certes,çan’avaitduréqu’unété,maisc’étaitplusque tous lescopainsdeLibby réunis.Cequin’étaitpasdifficile,étantdonnéqu’à19ansellen’avaitjamaiseudecopainsérieux.Quelletristesse,pensa-t-elle.
«Libby?C’estunpeulourd,tupourrais…»Tiréedesarêverie,LibbysepoussapourlaisserParkerchargersesvalisesdanslecamion.«Jenevoulaispastedéprimer.Meladitquetusortaisavecquelqu’un,jepensaisjustequ’il
t’aideraitpeut-êtreàfairetescartons.Sinonjepourraisaussiresterunjourdepluspourt’aider.»Libby lança un regard vif à Parker. Elle avait toujours des remords de lui avoir donné de
faussesidéesl’annéepassée.Ildutdevinercequ’ellepensait.«Net’inquiètepas,jenesuispasentraindetedraguer.Jepensaisjustequesituavaisautant
debagagesqueMel…—Même Jennifer Lopez n’a pas autant de bagages queMel, répliqua Libby. Brian est en
Floride et je suis presque prête –maismerci pour la proposition. Et puis, comment est-ce que turentreraisàNewYork?
— Je commence à croire qu’échapper à ce road trip infernal vaudrait le prix d’un billetd’avion,»ditParkerensouriant.
Parkeravaitunjolisourire.Enfait,songeaLibbyenlesuivantdansl’escalier,Parkerétaitjolientouspoints.Ilétaitgrandetminceetsedéplaçaitavecunegrâcepleinedeconfianceensoiquiluiévitait de paraîtremaigre. Il avait le genre demusculature qu’ont les nageurs ou les coureurs decross. Il aurait pu être danseur, pensa-t-elle. Tous les danseurs n’étaient pas homosexuels, si ?Comments’appelaitlegarsdansDirtyDancing?Libbyétaitpresquesûrequ’ils’agissaitd’unvraidanseur.Oui,Parkerétaitclairementagréableàregarder.C’étaitvraimentdommagequ’ellen’avaitpas su convaincre son cœurdebattreunpeuplusvitequand il entrait dans lapièce, ni sapeaudefrissonnerquandelleentendaitsavoix.Hormiscespetitsdétails,Parkerauraitétéunsérieuxcandidatautitred’hommeparfait.
Parkers’arrêtaenfaisant lagrimacedevant laportedelachambredeMel,quiétaitfermée.Libbyétaitàpeuprèssûrequ’ilsl’avaientlaisséeouverteenpartant.Parkerfrappa.
«Vousêtestoujourslà?»Pasderéponse.«Onferaitbiendechargerlecamionsionveutpartircesoir.»
Ils entendirent un coup sourd. Inquiète, Libby fit un pas en avant, mais Parker la retint enposantundoigtsurseslèvres.
Libbyentenditalorsdesgémissementsprolongés.«Beurk,dit-elleenreculantvivement.Ilsn’oseraientpas…»Ellerougit.Parkerfrappaplusieurscoupsdelapaumedesamain.«Mec,allezquoi!—Vavoirailleurssij’ysuis,Park,finitparrépondreJohnàtraverslaporte.—Qu’est-cequetunoussuggèresdefaire?—Parker,monpote, si jedois te l’expliquer,c’estque tunecomprendraispas.Maintenant,
casse-toi,tumetsmacopinemalàl’aise.—Viens,Libby.Onn’aqu’àsetrouverquelquechoseàmanger.»Parkersecoualatêteendescendantl’escalier.Libbynesavaitpasquoidire.Dans la cuisine,Libby sortit de quoi faire des croque-monsieur et Parker trouva une poêle
adaptée.«OnenfaitpourJohnetMel?»demandaLibby.Parkerfitlagrimace.«Pasquestion.Mêmes’ilsaurontsûrement faim.Mais ilspourrontsedébrouillerquand ils
auront…fini.»Libbyréalisaqu’ellerougissaitànouveau.«Parker,tupensesque,jeveuxdireJohnsemblaitpenserque…»Ellenesavaitpasvraimentcommentposerlaquestion.«Ehbien,onl’apresquefaitl’autrefoisetmaintenant…»Parkersemitàrire.Ungrandéclatderireénervant,allantjusqu’àsetapersurlescuisses.«Jenecroyaispasêtresidrôle!»Libbyavaittellementhontequ’elleavaitcomplètementoubliécequ’étaitunsimplemomentde
gêne.«Toutcequejevoulaisdirec’était…Oh,tantpis,oublie.—Pardon,Libby.Jen’auraispasdûautantrire,maistuavaisl’airsinerveuseetpuisonn’a
jamaispresquefaitquoiquecesoit.»Ilfitglisseruneassiettedecroque-monsieurdanssadirectionetcroquaunegrossebouchée
dusien.«L’étédernier!—Ma petite, si ça, c’était presque, dans ce cas… dans ce cas, j’imagine que ça explique
pourquoituasrougitoutàl’heure,dit-ilenseremettantàrire.—Oh,labarbe!s’impatientaLibby.Jemedemandepourquoijefaisdesefforts.»Parkersemblapercevoirl’angoisseréellequ’exprimaitlevisagedeLibby.Ils’approchaetla
fittournerpourqu’ilssoientfaceàface.«Ceseraitgénial,Libby…pourmoi.Tuesbelleetsexyetj’yaibiensûrpensépasmalde
fois.Maisceserait justedusexe.Et tun’espas legenredefillepourça.Tuveuxvraimentgâcherdeuxansd’amitiépouruneheuredeplaisir?
—Uneheure?»ParkeréclataderireencoreunefoisetdéposaunpetitbaisersurlenezdeLibby.«Libby,jet’adore!Jeneveuxpasrisquernotreamitié–mêmepourtroisheures!»Illuiavaitmurmurécesderniersmotsàl’oreille,avantderetourneràsoncroque-monsieur.«Jesuisentouréed’hommesquiveulentmesauverdemespropresdésirs…J’aivraimentde
lachance.
—TuparlesdeBrian?Çanemarchepasentrevous?»Parkerétaitretournéàsondéjeuner.«Non,Brianestcool…maisonn’estpasvraimentensemble.Oublietoutça,okay?»Libbysefourralecroque-monsieurdanslabouchepourarrêterdediredesbêtises.
CHAPITREHUIT
Dehors,Tonyattendaitenfaisantlescentpassurletrottoir.Uninstantplustôt,ils’étaitsentisiheureux d’être de retour. Mais il était entré et il avait vu Libby porter ce qui était clairement lachemisedeParker,vuqueParkerlui-mêmen’enportaitpasetqu’elleétaitàpeuprèscinqfoistropgrandepourLibby.Tonyn’étaitpasd’unenatureviolente,maisilavaitdûseretenirdenepassautersurlegarspourluidéfoncerlatête,quandill’avaitvusepencherpourembrasserLibby.Dèsqu’ilavaitretrouvél’usagedumouvement,Tonyavaitcalmementreculéjusqu’àlaporte.
Pourquoin’était-ilpasaucourantqueLibbyetParkerétaienttoujoursensemble?Libbyneluiavaitriendit,maisaussi,àpartuneconversationtéléphoniquetardiveetéméchée(dontlesouvenirlui faisait encore honte trois mois plus tard), ils n’avaient guère parlé de sujets romantiques. Cen’étaitpascommes’ils’attendaitàcequ’ellerestechezelletouslesweek-ends,maisilyavaitunesacréedifférenceentresavoirqu’ellevoyaitdesgarçons,etenêtreletémoindanssaproprecuisine!Oùallait-ilpouvoirprendresonpetit-déjeunermaintenant? Impossibledemangersescéréalessurcettetable,désormais!
Bon,ilfallaitqu’ilretrouvesesesprits.Tonyseconcentrasursarespiration,enessayantdesecalmer.Libbyetluines’étaientquasimentpasparlédepuiscettesoiréecinqmoisplustôt,oùill’avaitpratiquementpousséedans lesbrasdeParker.Queldébile il était !Elleétaitdevant lui et il l’avaitrepoussée.Illuiavaitrappeléqu’elleétaitvenueavecParker.Etque,biensûr,Parkernevoulaitpasjusteêtreamis.Idiot!Non.Ilnefallaitplusypenser.Ilfallaitjustequ’ilsesouviennedelapromessequ’ils’étaitfaitependantceslongsmoisdesilence,deneplusjamaisfaired’erreursstupidesdanscegenreavecLibby.Etsicelasignifiaitresteramis,alorsilenseraitainsi,carilétaitprêtàtoutsaufàlaperdre.Peut-êtrequ’ildevraitallerfaireuntourenvoiturepoursecalmer.DanscombiendetempsMelrepartait-elleàNewYork?Parkerallaitsansdoutepartirenmêmetemps.TonypouvaitrevenirplustardetinvitersonamieLibbyàdîner,peut-êtreàallervoirunfilmetmangeruneglaceaprèsça.Il venait de se décider à partir et se dirigeait vers sa voiture quand il entendit le bruit de la ported’entrée.
«Tony!»Enseretournant,ilvitLibbyquicouraitverslui.«Tuesenavance,dit-elleenleprenantdanssesbraspourunmomenttropbref.Tunepartais
pasdéjà?»ajouta-t-elleenregardantsavoiture.Oui,pensa-t-il,jem’envaispournepasdéfoncerlatêtedetonpetitcopain.Maisaulieude
cela,ilrépondit:«Oh,non,jevérifiaisjustequejel’avaisbienfermée.
—D’accord, allons-y. Mel est ta sœur, ce n’est que justice que tu contribues à porter sescartons.»
EtLibbyl’entraînadanslamaison.Malàl’aise,Tonytrouvatoutlemondedanslacuisine.Johnetsasœurfinissaientdedéjeuner.«Alors…Melvousafaitfairetoutletravail?—Non.—Oui.—Oui.—Oui.»Toutlemondeavaitréponduenmêmetemps.Tonyeutunpetitsourire,maisilneputs’empêcherdedévisagerParker.Celui-cifinitparle
remarquerets’éclaircitlagorge.«Oh,Libbyempruntejustemachemisejusqu’àcequelasiennesoitsèche.»Tonylevalessourcils.«Parcequ’ellearenverséducafé…»Parker,troublé,neterminapassaphrase.«Maisjesupposequetuvasvouloirlarécupéreravantquevousnepreniezlaroute.»TonysetournaversLibby.«Tupeuxprendrecequetuveuxdansmachambre,tusaisoùc’est.»Libby eut l’air de ne pas comprendre, mais elle se dirigea néanmoins vers la chambre de
Tony.Ellerevintaprèsavoirremplacéunechemisetropgrandeparuneautre,etTonydutseretenirdenepassefrapperdespoingssurlapoitrinecommeungorilledominant.
Deuxheuresplustard,lecamionétaitchargéetilssefirentleursadieux.« Jenecroispasque le frèredeMelm’adore,ditParkeravecunpetit sourireendisantau
revoiràLibby.Ilportaitunénormepotdepop-cornsousunbras,ayantfaitvaloirqu’illuifallaitdesprovisionspourlevoyage.
—Net’enfaispas,parfoisilmeprotègeunpeutrop,ditLibbyenfaisantlagrimace.Commeungrandfrère.
—Ouais,maiscen’estpastongrandfrèreàtoi,si?répliquaParkerd’unairamusé.—Ilfaudraitleluidire,murmuraLibbycommepourelle-même.—Jepensequ’ils’enrendracomptetoutseul,ditParkerencaressantamicalementlajouede
Libby.Çava?Tuaseul’airunpeubizarretoutelajournée.—Blues de fin d’été, je suppose.Rappelle àMel dem’envoyer un texto quand vous serez
arrivés.—Promis.»Parkerl’embrassasurlajoueetgrimpadanslecamion.«Àplus.Passeunbonsemestre.»Lecamions’éloignaetsesamisaveclui.Libby revint vers lamaison en secouant la tête. Il ne fallait pasqu’elle se laisse abattre.Ce
n’était pas comme s’ils l’avaient exclue exprès de leur petit club new-yorkais. Et puis elle adoraitTallahassee.Melavaitraison.IlfallaitqueLibbysorteplussouvent.Ceseraitsaprioritéquandelleretrouveraitl’universitélasemainesuivante.
TonyregardaitLibbyparlafenêtre.IlavaitdéjàconvenuavecJohnetMeld’undînerpourla
findelasemaine.IlavaitprisunposteàtempspleinàLaDépêchedeTrentonetilallaitresterdansleNewJersey.IlpourraitdoncvoirMelbienplussouventqueLibby,etc’étaitpourçaqu’il lesavaitlaissées se faire leurs adieux tranquillement. Et puis il en avait eu définitivementmarre de Parker
environtroisquartsd’heureplustôt.EtilétaitàpeuprèssûrqueLibbyn’auraitpasappréciés’ilavaitmisunedroiteàsoncopain.S’ilavaitdelachance,Parkermourraitétoufféparsonpop-corn.
Le reste de la soirée fut plus divertissant. Tony emmena Libby au cinéma. Le film étaitmauvais,maiscen’étaitpasgrave,ilétaittellementmauvaisqueçaenétaitdrôle.Aprèslecinémailsmangèrent une pizza – moitié hawaïenne pour Libby, moitié poivron chorizo pour Tony. Ilsdiscutèrent tout enmangeant :Libby racontaàTonyqu’elleétait tombéeamoureusedeSt.GeorgeIslandetluiparladelacollectiondecoquillagesqu’elleavaitcommencéeavecSuzy.Tonydécrivitsontravailaujournal,maintenantilavaitunbureauàlui,riendegrandiose,maisc’étaitundébut…Tonyétait unpeudéçud’avoir été affecté au servicedes sports,mais il avait aussi commencédesarticlessurdessujetsdesociétéetlerédacteurenchefl’encourageaitàcontinuer.Libbyseplaignitdedevoirfairedelacomptaendeuxièmeannée:sonamiBrianneseraitmêmepaslàpourl’aider,vuqu’ilpartaitpasserunanàl’étrangeravecsacopine.
«Peut-êtrequ’ilpourrat’aiderpartéléphone,suggéraTony.—Tuparles, ilseraenAustralie.Ilyaquatorzeheuresdedécalagehoraire!Et jeneparle
mêmepasdelafacturedetéléphone.—Quatorzeheures!Ouah.Jesavaisquec’étaitloin,maisàcepoint.Celadit,çadoitêtrecool
commepays.Dis-luideregardersil’eaudestoilettestournebiendanslesensinversedecheznous.»Libbyeutunpetitrire.«Jecroisquec’estunelégende,maisjeluidemanderaidevérifier.Sijepouvaispasserunan
àl’étranger,genresijegagnaisauloto,jecroisquejepréféreraisallerenEurope.Peut-êtreàRome.OuàParis.LesFrançaisetleurspâtisseries!»
Ilsparlèrentjusqu’àcequelapizzasoitfroide.C’étaitdommagedelaisserlesdeuxdernièrestranches,alorsilsenprirentchacununeenayantl’airdesesacrifier.
«Lesfruitsn’ontrienàfairesurunepizza,»déclaraTonyenramassantunmorceaud’ananasquis’étaitégarésursatrancheetenlerendantàLibby.
Libby avait lesmains pleines et sans réfléchir, elle se pencha et picora lemorceau de fruitdirectementdanslamaindeTony.
Undésirbrûlants’emparadusystèmenerveuxdeTony.LeslèvresdoucesethumidesdeLibbyavaient effleuré ses doigts. Sa langue avait caressé le bout de son pouce et ses dents avaientlégèrementfrottécontresapeau.Çan’avaitduréqu’unedemi-seconde,maisTonyétaitscotchéàsonsiège,muet.Libbyneserenditcomptequetroptarddelanaturedesongesteetelleseretranchadesoncôtédelatableetseremitàmangerensilence.Latensionétaitàsoncomblequandlaserveuseleur apporta l’addition.Libby fit ungeste endirectionde son sac àmain,maisTony l’arrêta d’ungestedelamain.
«Tuoubliesquejesuisemployéàpleintemps,maintenant.»LesouriredeTonypermitenfinàLibbydesedétendre.«Pastrèsbienpayé,maisjesuisheureuxdet’inviter.Surtoutquej’avaischoisilefilmetque
c’étaitvraimenttefaireperdredeuxheuresdetonexistence.—Maistuaspayélecinémaaussi,alorslebillardestpourmoi.»Libby sortit quelques billets et alla les changer à unemachine à faire de lamonnaie. Tony
profitadecesquelquesinstantspouressayerdesecalmer,avantd’avoiràseleverdetable.4fois6font24,4fois7font28,4fois8font32…
Lorsqu’arriva la fin de la soirée, Libby avait complètement humiliéTony au billard et sonscoreleuravaitmêmevaluplusieurslots,ycomprisdesbonbons,unbraceletdeperlesetuneétoilede shérif enplastique.Tonyépingla fièrement lebadge sur sapoitrine et ilsparadèrentdansMainStreetpourrejoindreleursvoitures.
«Hé,oùesttonbracelet?»demanda-t-il,labouchepleinedebonbons.
Libbylesortitdesapocheetl’agitadevantlui.«Ici.»Tonyluipritlebraceletdesmains,lesortitdesonemballageetleluiglissasolennellementau
poignet.Avantd’avoireuletempsderéfléchir,ilavaitaccompagnésongested’unbaiseràl’intérieurdupoignet,commepoursentirsonpoulsavecses lèvres. Ils repartirentsansse lâcher lesmainsetterminèrent leurpromenadecommes’ilsavaienteul’habitudedemarcherainsimaindans lamain.Avait-ildéjàremarquéàquelpointelleavait lespoignetsfins?Biensûrquenon.Iln’avait jamaisremarqué lespoignetsd’aucunefemme,carseuleLibbyavait lepouvoirde le réduireàcetétatdeNéandertalobsédéparlesexe.
Il avait essayé de s’intéresser à d’autres femmes. Toute l’année, il avait essayé de trouverquelqu’un avec qui il aurait pu établir ne serait-ce qu’un semblant de connexion. Ça n’avait pasmarché. Il s’était contenté de raccompagner chacun de ses rendez-vous chez elle, avec une excusepoliecommeuncourstôtlematinouundébutderhume,etilétaitrentréchezlui–seul.
«Qu’est-cequetuveuxfairedemain?ditTonyenarrivantàleursvoitures.—Euh…Jenesaispas.Tunedoispaspasserdutempsavectesparents?»Libbymouraitd’enviedepassertoutelajournéeaveclui.Maisellenevoulaitpassefairede
faussejoie,etpuisilyavaitcesmauvaiseshabitudesdontilfallaitqu’ellesedébarrasse.Aprèstout,setenirlamainetsemettredesbraceletsenplastique,celarestaitdesjeuxd’enfants.
«Jepensequ’ondevraitfairedescookies.Tun’aspasétéautopcommeprofjusqu’ici,maisjeveuxbienréessayer,réponditTonyenignorantsaquestion.
—Tuveuxquejet’apprenneàfairedesgâteaux?— Juste des cookies, la corrigea-t-il. Tes cookies aux pépites de chocolat m’ont vraiment
manqué.Jepourraispasseràlapâtisserie.—Nan,tuesuneinfractionaucodedesantépublique.Maisonpeutlefairechezmamère.—Ouah,tusaisvraimentremettreuntypeàsaplace!»Libbyluifitunpetitsourire.«Neleprendspasmal.Ilfautsuivreuneformationavantdetravaillerencuisine.—Okay,doncdemain,14heures?—14heures,çamarche.»Ils étaient debout à côté de la voiture de Libby, réticents tous les deux à voir la soirée se
terminer.Tony considéra les options possibles. Il pouvait la prendre dans ses bras, sentir son
shampoing, sentir ses hanches dans ses paumes.Bien sûr, un baiser d’adieu seraitmieux.Un petitfrôlementdelèvresresteraitinnocent,mêmesiguèresatisfaisant.Cequ’ilavaitenviedefaire,c’étaitde la pousser contre la voiture et de lui dévorer les lèvres.Des lèvres à l’orée desquelles il étaitconvaincu de pouvoir mourir heureux. Et sa gorge, il fallait absolument qu’il découvre le goûtqu’avaitlapeaudesoncou.Ilvoulaitlatoucher,sentirlepoidsdesesseins,ladouceurdesapeau…Okay,cen’étaitpasvraimentuneoption.Aulieudetoutcela,illevaleursdeuxmainsencoreunies,déposaunbaisersurlesdoigtsdeLibbyetluiditbonsoiravantdesedirigerverssavoiture.
CHAPITRENEUF
Le lendemain, Tony arriva comme promis à 14 heures précises. Libby sortit tous lesingrédientsnécessairesàlafabricationdescookiesauxpépitesdechocolat.C’étaitunedeschoseslesplusamusantesqu’elleaitjamaisfaitesavecTony.Elleavaitretrouvéuntablierrosequiappartenaitàsamère et disait «Grosoupetits, sauvons les seins ! » (il venait d’une vente de gâteaux au profitd’uneassociationdeluttecontrelecancerquelquesannéesplustôt)etTony,envraichampionqu’ilétait, l’avaitmis sans fairedecommentaire. Ils avaient travaillé toute lamatinée.Libbyn’avaitpasl’habitudedefaireuneseulefournéedecookies.C’estcequiarrivequandongranditavecunemèrepâtissière.Ilsmangèrentdonclapremièrefournéetoutenpréparantlesfournéesdeuxàneuf,qu’ilsiraientdonneràuneassociationlocalepourlakermessequ’elleorganisaitlasemainesuivante.LibbyemballaladixièmefournéepourqueTonypuissel’emporteravecluidansleNewJersey.
Sous l’œil sévère de Libby, Tony ne brûla pas un seul cookie et il ne laissa pas traîner sacuillèredanstouteslespâtes.Mêmeaprèsavoirpassétoutelasoiréeprécédenteensemble,LibbyetTonyavaienttoujoursdeschosesàsedire,etlaconversationnefaiblitpasdetoutelajournée.
«Merci,Lib.Jenetediraipascombiendetempsilvamefalloirpourlesmanger,niletempsquejedevraipasseràlasalledesportensuite.»
Tonyfaisaitlavaisselletoutenluiparlantpar-dessussonépaule.IlyavaitquelquechosedepresquetendredanscemomentquiempêchaLibbydeluirépondretoutdesuite.Souvent,lorsqu’ellepensaitàsonavenir,elleimaginaitdesmomentscommecelui-ci.Mêmesilavaissellen’auraitpasétécelled’uneleçondecuisine,maisplussimplementcelledudîner.Unrôtiqu’elleauraitpassél’après-midiàpréparerpourTony,elleet leurs troisenfants.Desenfantsquiauraient lescheveuxcouleurchocolat de Tony et son teint italien. Mais c’était du passé. Libby n’avait-elle pas grandi, depuisl’époqueoùelleattendaitqueTonylavoiecommedavantagequ’uneamie?Ellechassacespensées.Iln’yauraitnirôtinibébésauteintolive.
C’était presque l’heure du dîner. Tony s’essuya les mains après avoir déposé la dernièreplaquedecuissonsurleséchoir.Ilfitdemi-touretvitLibbyquiessuyaitlesplansdetravail.Elleavaitde la farinedans les cheveux, sur lesmainset les coudes.Dieuqu’elle était jolie. Il avait enviedes’approcherd’elleetdeluidirequelafarineluiallaitbien.Ilvoulaitdéfairesatresseetpassersesdoigtsdanssescheveux.Ilvoulaitfairebeaucoupdechoses.
«Tuveuxdînerquelquepart?Sinon,jeconnaisunesalledejeuxoùjepeuxtelaissergagneraubillardencoreunefois.»
Tonyn’avaitpasfaimaprèsavoirpassél’après-midiàmangerdescookies,maisiln’avaitpasnonplusenviederentrerchezlui.
«Danstesrêves,Marchetti.»Libbyn’avaitpasmangéautantdecookiesqueTonyetelleavaittrèsfaim,maisellesentaitun
contrecoupsentimental sur lepointdeseproduireetelleavaitbesoinde tempspour retrouversesesprits.
«Jen’aipastrèsfaim.Etj’aiencorepasmalderangementàfaire.Uneprochainefois?»Tonysentitquelquechoses’effondrerenlui.«Ouais,tropdecookies–jenesuispassûrd’avoirfaimnonplus.»Il afficha un sourire de circonstance (celui qu’il réservait normalement à la grand-tante
Millicent,quisentaitlepipidechat,maisquesonpèretenaitàinviteràchaqueThanksgiving)etallaprendresavestepourêtreprêtàpartir.
«Demain.Qu’est-cequetufaisdemain?»Ilvoulaitlatuer.«Jeparstrèstôtlundimatinetjesuissûrquetesparentsontenviedetevoiraussi.»Mêmesonsourirefacticen’allaitpastenirlecoup.MaisTonyétaitdéterminé.«Okay, tun’asqu’à finir ton rangement ce soir. Jepasse te chercherdemainmatin.On ira
courirauYMCA.»Super idée, pensa-t-il. Elle allait le ridiculiser – ce n’était pas le meilleur moyen de
l’impressionner.«Etaprèsjet’aideraiàchargertesaffaires,commeçatupourrasdormirunpeulundimatin.»Libby accepta sa défaite, incapable qu’elle était de résister à l’idée d’un footing avecTony.
Ellehochalatête.«J’aimebiencourirtôt.»Tonypoussaunsoupirdesoulagementenacquiesçant:«Jeserailàdebonneheure.»Iltintsaparole.Etapportaducafé.TonyfrappaàlaporteetfutsurprisqueMmeMcKaylui
ouvre.Cequiétaitbête,car,biensûr,elleaussihabitaitlà.MaiselletravaillaitengénéralàdesheuresdécaléesetTonynel’avaitquerarementvuechezelle.
«Entre,Tony.Libbysechange,elledevaitêtrelàdansuneminute.Assieds-toi.»Tonylaremerciaets’installasurlecanapé,ensirotantducafétropchaudpourcachersagêne.
Ilsesouvenait trèsclairementdelanuitoùMmeMcKayétaitrentréechezelleaupetitmatinet lesavait trouvés, lui et Libby, endormis dans les bras l’un de l’autre sur cemême canapé. Elle avaitsecouéTonypourleréveilleretilavaiteuenviededisparaîtresousletapis.Mêmesielleavaitétéplutôt gentille : elle l’avait remercié d’avoir sacrifié sa soirée d’Halloween pour prendre soin deLibby,puislesmédicamentsl’avaientassommée.Maiscelanel’avaitpasfaitsesentirmoinsgêné;ilavaitaussisespropresraisonsmoinshonorablesd’êtrelà.
«Libbym’aditquetuhabitesdansleNewJersey?»Oups,arrêtederêver,mec.MmeMcKayluiparlait.Est-cequ’ilavaitmanquéquelquechose?«Euh,oui.Jesuisstagiairedansunjournaldepuisquelquesannées.C’esttombécommeça.»Ilneparlapasdufaitqu’ilavaitcherchédutravailàTallahasseeunanplustôt.Avantlafête
hawaïenneetavantParker.«Unjournaliste?»ditMmeMcKayensouriant.IlreconnutunpeudusouriredeLibbysursonvisage.IlsedemandasiLibbyluiressemblerait
dans vingt ans. Libby était grande comme feu son père, mais les yeux sombres et les bouclesondulantesvenaientclairementdesamère.
«Est-cequej’aipulireundetesarticles?— Si vous lisez les nécrologies de La Dépêche de Trenton ou le magazine littéraire de
Columbia, peut-être, dit Tony avec un haussement d’épaules. La Dépêche de Trenton est un petitjournal,maisçameplaît.Jenesaispassij’ail’ambitiond’êtreungrandrédacteurenchef.J’espèrejusteavoirdeschosesplusintéressantesàécriremaintenantquej’aimondiplôme.
—Hmm.»Ellehochalatêtepoliment.Peut-êtreaurait-ildûluidirequ’ilavaitécritunlivreetqu’ilen
avait d’autres en cours.Non, c’était encore du domaine du rêve, pas exactement la promesse d’unavenirstable.
«LaDépêchen’estpasungrandjournal,maisilestbiengéré.J’aibeaucoupappris.Jecroisquej’aimeraiscréermonproprejournal,unjour.Iln’yenapasàTaylorsville.»
D’oùsortait-ilcetteidée?Maisellen’étaitpasmauvaise,etiln’avaitpasl’intentiondevivreéternellementdansleNewJersey.Iln’yavaitpasbeaucoupréfléchidepuisqu’ilavaitrenoncéàl’idéedevivreenFloride,maisildécouvraitàl’instantqu’ilaimeraitpeut-êtrecela,reveniràTaylorsville.
«C’esttrèsbien,Tony.»MmeMcKaynesemblaitpasplus impressionnéequecelaparsesprojetsd’avenir.Mêmesi
celanedevaitpasluiimporterbeaucoup.Parkerallaitdeveniravocat.Parkeravaitlegenredecompteenbanquequiluipermettaitdeprendrel’aviontouslesmoisjustepourvenirvoirsafille.
MauditParker.Libby etTony coururent deux fois 1 500mètres.Les deux fois, elle le laissa loin derrière.
Tonysepromitàlui-mêmedes’entraînerplussouvent.Iln’étaitpasnonpluscomplètementrouilléet,une foisqu’ils semirentà joggerplus lentement, iln’eutaucunproblèmepour resteràniveau.Libby était magnifique quand elle courait. Elle l’était toujours, mais dans la course, un calmes’emparaitdesonvisage.Ellesemblaitn’avoiraucunsoucietc’étaitapaisantàvoir.QuantàTony,sespoumons lebrûlaient et il regrettait sonpetit-déjeuner.MaisLibbyétait splendide.Ses longuesjambesfinesenshortcourtn’yétaientpaspourrien.
«C’étaitsympa.Jecroisqueçamemanquait,d’avoirquelqu’unavecquicourir,»ditLibbyens’essuyantlevisageavecuneserviette.Tonyauraitrépondus’ilavaitpu–maisilétaittropessoufflépourcela.
Aprèsladouche,Tonyproposad’aiderLibbyàchargersoncamiondedéménagement.«Jelerécupèreseulementcesoir,dit-elle.C’estmoinschercommeça.—Ah,okay.—MamèreetStuartvoulaientqu’ondéjeuneensemble.—Ah,okay.Bon,jeteramènecheztoialors.»Tonylaraccompagnaensilenceàsonimmeuble.«Merci dem’avoir tenu compagnie ceweek-end, finit-il par dire en s’arrêtant devant chez
elle.Faisbonvoyagedemain.— Ouais. C’était sympa de te voir. C’est bien de t’avoir comme ami, vu que Mel m’a
abandonnéesitôt.»Libbysepenchapourluidireaurevoir.Sescheveuxencorehumidessecollèrentàsoncou.
Ouais,sedit-il,biensûr,onestjusteamis.Unefoisrentréechezelle,Libbyseditqu’elleétaitcontentequeTonyn’aitpasinsisté.Ellese
rappelasarésolutiondepasseràautrechose.Ellenerestapaslongtempsàsongeràlasensationquil’avaitenvahiequandlesyeuxdeTonys’étaientattardéssursesjambesetsursesfessespendantleurséancedesport.Enfin,presquepas.
CHAPITREDIX
Leretouràl’écoleavaitétéfacile.Suzyn’arrêtaitpasderaconterdeshistoiresdevacancesetde parler de son petit copain de lycée qu’elle avait retrouvé. La compta n’était pas aussi barbantequ’ellel’avaitimaginé.Et,biensûr,lesoleildelaFlorideétaitagréable.
En accord avec sa résolution de vivre sa vie, Libby fit de sonmieux pour profiter de sesannéesd’étudiante.Elleacceptadesrendez-vousavecdesgarçonsetallaàdessoirées.Ellecontinuadeseconsacreràsesétudes,maisellenelaissaitpaslavieluifilerentrelesmains.Loindelà.
Brian a tiré la chasse – il dit que l’eau tombe tout droit. C’est à cause de la forme des toilettesaustraliennes.Désoléedetedécevoir.-L-Jenesuispasdéçu.Jepensequ’ilsemoquedetoi.Jechoisisdecontinueràcroirefermementàcettehistoiredetoilettesquisevidentàl’envers.-T-
IlsmelaissentécrirelesarticlesdeSarahKendallpendantqu’elleestencongématernité.C’estunevraiepromotion.Halloweenaubureauétaitsuper.JemesuisdéguiséenClarkKent.-T-Super!Envoie-moitesarticles!J’étaisunefemmepirate–c’étaitmarrantdefairel’accentpirate.-L-ÇafaitlongtempsquejenesuispasrentréàlamaisonpourThanksgiving.J’aihâted’yêtre.Quandest-cequeturentres?-T-Maman et Stuart partent en voyage pour Thanksgiving. Je suis contente pour elle – ce n’est passouventqu’elleprenddesvacances.JevaisàNewYorkrendrevisiteàMel.-L-
Mamères’estmariée!ElleestrevenuedesonvoyagedeThanksgiving,mariée!IlsétaientpartisàLasVegas–bizarre.J’aimebienStuartettout,maissemarieràVegas!C’esttropromantiquepourdesadultes.-L-Ouah. Stuart assure. C’était lui qui entraînait mon équipe de base-ball, tu sais. Je suis sûr qu’ilsserontbienensemble.Jecomprendsquecesoitbizarrepourtoi.J’aientendudirequeMelavaitbrûléladinde!Çat’apprendraàm’abandonneràTaylorsville.Situveuxdiscuter,tupeuxmetéléphoner.-T-TunousasmanquépourNoël,Lib.J’auraispréféréquetumepréviennesquetuallaisresterprendredescourspendantlesvacancesd’hiver.J’aiunpeudecongésàprendre–jepensaisallerenFloride.Qu’est-cequetuenpenses?-T-
«SalutTony.»Libbyétaitassisesursonlit.Elleavaitdécrochédèsqu’elleavaitvulenomdeTonysurson
téléphone.«Libby!Tunedevinerasjamais.J’avaispresquerenoncéàl’envoyer…Maisjesuisdugenre
têtu…—Tony!TumefaispenseràMel,là,»ditLibbyensouriantàsontéléphone.LavoixdeTonyluiavaitmanqué. Ilvenait lavoir lasemainesuivanteetelleavaithâted’y
être.Elleavaittouteunelistedechosesàluimontreretàfaireaveclui.«Désolé,Lib.»Tonyinspiraprofondément.«J’aiunagent.—Pourtonlivre?C’estgénial.Ouah.Jet’avaisditqu’ilétaitbien.—Jesais,tuasétésuper.Tueslaseuleàquijeledis,tusais.Jen’enparleàpersonne–pas
avantd’avoir trouvéunéditeur.Maisunagent,c’est super important. Ilestvraimentoptimisteet ilm’amisencontactavecunéditeuràManhattan.Jevaislavoirlasemaineprochaine.
—Lasemaineprochaine?—Jesais,Lib.C’estaussipourçaquej’appelle.Ilfautquej’annulemavisite.Çamedésole,
mais jen’aiqu’unesemainedecongé.Et jecroisqu’ilvautmieuxque j’enprofitepourallervoirmonéditeur.Monéditeur,tuycrois?
—Biensûr,jecomprends.C’estsuper,même.Jesuistrèscontentepourtoi.»Cemauditlivre!SasemaineavecTonyétaitgâchée.Saufquecen’étaitpasunmauditlivre.Il
étaittrèsbonetTonyétaitunsuperécrivain.« Je savais que tu comprendrais, Libby. Je ne mérite pas d’avoir une amie comme toi.
MonsieurCarsonJack,c’est l’agent.Je luiaienvoyépleinde trucsenplusdumanuscritet ilaimetout.Ilestd’accordavecmoi,c’estIsaacRaineslemeilleurpersonnage.J’aidéjàcommencéàfairequelquesplans.Jet’aiparléd’Isaac,pasvrai?
—Euh,non.— C’est un détective, un vrai. Du genre qui se retrouve toujours au mauvais endroit au
mauvaismoment.CommeJohnMcClane,maisenmoinssoupeaulait.
—JohnMcClanen’estpassoupeaulait!»LibbyadoraitlasériedesDieHard.«Cen’estpasçal’important,Libby,ditTonyenriant.—Oui,bon,d’accord.Parle-moidetonéditeuretdetonnouveaulivre.»Ils discutèrent toute la nuit. Tony était tellement excité. Ce qui était compréhensible. C’était
énorme,commenouvelle.MaisLibbynepouvaits’empêcherd’êtretriste.Elledétestaitcesentimentdejalousie,maiselledevaitl’admettre,neserait-cequ’àelle-même:elleétaittrèsjalouse.D’unlivre.Enfin, pas vraiment du livre – c’était juste que Tony et elle semblaient toujours devoir attendre.Autourd’elle,lesgensfaisaientdeschosesquiengageaientleuravenir.Elledevaitsesatisfairedesesbonnesnotesencompta.
MelvenaitdesignerunaccordavecuneboutiquedeSoHo.(C’estça,devivreàNewYork,vousfaitesdes trucscommeallerdansdesboutiquesàSoHo.)ElleallaitproposersesconceptionsMarchettiDesigndansdesboutiquesdevêtements.Apparemment,cesontlesfemmesquiachètentlesaccessoirespourhommes,detoutemanière.JohnetParkersepréparaientrespectivementàdesétudesdemédecineetdedroit.Suzypassait laplupartde sesnuits chez sonpetit amices temps-ci et ellecommençait à évoquer des fiançailles. Même Brian le banal et sa banale petite amie s’amusaientcommedesfousenAustralie.EtlabraveLibbycontinuaitsapetitevoieversundiplômedegestion.
TMarchetti:T’eslà?Libbysursautaausignalsonoredesonordinateur.Libbylibbylibby:Jefinissaisjusteundevoir,ouais,jesuislà.TMarchetti:J’aivumonagentaujourd’hui.J’aidînéchezMel.Tuluiasparlérécemment?Libbylibbylibby:Pasdepuisquelquessemaines,enfait.Elleesttrèsoccupée.Toutvabien?TMarchetti:Toutvabien.Jepeuxt’appeler?Libbylibbylibby:Biensûr.«Allô?»Libbycommençaitàs’inquiéter.ElleauraitdûappelerMelpouravoirdesnouvelles.Maiselle
avaitététrèspriseparsescours.«Lib.»Tonyavaitunevoixbizarre.«Qu’est-cequisepasse?—Doncj’étaisenvilleaujourd’hui.JesuispasséchezMeletJohn.EtParkerestpasséaussi.—Okay.Qu’est-cequisepasse,Tony?—Libby,ilyavaitunefilleaveclui.Etjenesavaispassituétaisaucourantouquoi,maisj’ai
penséqu’ilfallaitteledire.Ettuesmillefoisplusjolie,aufait.Iln’aaucungoût.—Tony!TuessaiesdemedirequeParkeraunenouvellecopine?Elles’appellePenny.Jela
connais.Elleestcool.»Grandsdieux!Ellequis’inquiétaitalorsqu’ilnefaisaitquejouerlegrandfrèreprotecteur.«Alorsvousn’êtesplusensembletouslesdeux?—Non,onnel’ajamaisété.Pasvraiment.Onestsortisdeuxoutroisfoisensembleetonest
restésamis.Sérieusement,moncœurvabien.Maismercidet’êtreinquiétépourmoi,c’étaitmignon.—Vousn’étiezpasensemble!»LavoixdeTonyexprimaitlacolère.«Cen’estpascequ’ilm’asemblél’étédernierquandvouspartagiezlamêmegarde-robe!—Aurisquedemerépéter,Parkeretmoionestjustedesamis.»Libbyessayadegarderunevoixcalme.ToutçaneregardaitpasTony.
«Vousétiezquoi?Amisavecavantages?Unefaçondepasserletempspendantqu’ilétaitenville?Jedevraisletuer.»
Là,Libbycommençaàperdrepatience.«Non,tunevasrienfaireTony!Parcequetun’espasresponsabledemoi,tun’espasmon
grandfrère.Et,mêmesi tul’étais, jesuisuneadulteet jesuisassezvieillepoursavoirquijeveuxdansmavie.
—Jesaisquelâgetuas,Libby.»Tonyfitmarchearrière.«Désolé.C’estjuste.Jeneveuxpasquetusouffres.»Ilsemblaitsecalmerunpeu.«Parkernem’ajamaisfaitsouffrir.»Tony fit la grimace. Il savait que c’était lui qui avait fait souffrir Libby, mais maintenant,
c’étaitdifférent.«DoncParkerestavecPennyettoi…—Moi,jesuiscontentepoureux.—Okay.Quandest-cequetescoursseterminent?»Libby fut soulagée que Tony change de sujet. Elle ne voulait vraiment pas parler de ses
amoursavecTony.Elleluidonnaladatedesesderniersexamens(quiétaientencoredansplusieurssemaines)etcelleà laquelleellepensaitretournerenCarolineduNord.IlsparlèrentdufaitqueceseraitbizarrepourellederentrerchezelledanslamaisondeStuartplutôtquedansl’immeubleoùelleavaitgrandi.Et,quandTonyl’entenditbâiller,ill’envoyasecoucher.
CHAPITREONZE
Lorsqu’ellearrivaàlapâtisserielelendemaindesonretouràTaylorsville,Tonyl’attendait.Ilétaitadosséàlaportedederrière,lesbrascroiséssurlapoitrine,unlargesourirebarrantsonvisage.Ils’agissaitdesonnouveausourire.PaslesourirespécialLibbytantespéréparcettedernière,maisunsourirearrogant,voireunsouriredeprédateur,maiscedevaitêtrelemanquedesommeilquiluidonnaitcetteimpression.
Illapritdanssesbrasetlasoulevadeterreenlaserrantcontrelui.«Tum’asmanqué,Lib.»Sondouxmurmureluicaressa lescheveuxjusteau-dessusde l’oreille,etLibbyressentitun
frissonqu’ellenes’étaitpasautorisédepuislelycée.«Quellesurprise!»parvint-elleàdirelorsqu’ill’eutreposée.ElleouvritlaporteetTonylasuivitàl’intérieur.Ill’observaensilencetandisqu’elleallumait
lesfoursetpréparaitledébutdelajournéedetravail.Ildutsefaireviolencepournepassejetersurelleetl’embrasser.Iln’étaitque5heuresdumatin.Elleavaitlescheveuxnouésenqueuedechevaletaucune trace de maquillage. Elle était la plus jolie fille qu’il ait jamais vue. Mais il devait faireattention–ilnevoulaitplusdemalentendusnidequiproquos.Tonyvoulaitfaireleschosesbienetcelavoulaitdiregarderlecontrôledesalibidoencoreunmoment.
«Bontuvasmedirecequetufaislà?commençaLibby.—Jetel’aidit.Tum’asmanqué,ditTonyenluimontrantsonplusbeausourire.—Jetemanqueà5heuresdumatin?—Surtoutà5heuresdumatin.»Sonsouriredevintplusprovocant.«Jenesuisenvillequepourquelquesjours.JeseraisbienvenuchezStuarthiersoir,maisj’ai
penséquetamèrevoudraitt’avoirpourelleseule.—Enfait,MamanetStuartavaientpréparéungranddînerquandjesuisarrivée.Etilsavaient
unenouvelleincroyableàm’annoncer.—Moiaussi,j’aiunenouvelleincroyable.»IlsétaientpassésdanslaboutiqueetTonyl’aidatoutnaturellementàdescendreleschaisesdes
tables.«Enfin,ilyaunenouvelleetilyaautrechosedontjeveuxteparler.—Alors?—Ehbien,d’abord…JackavenduThrillsàunéditeur!Ceseraunepetiteédition,maisc’est
uncontratpourplusieurslivres:lespremierschapitresdelasérieIsaacRaines lesontconvaincus.
C’estplutôtcool…»Tonyneputfinirsaphrase,carLibbys’étaitjetéesurluidansuneembrassadeincontrôlée.L’espaced’uninstant,Libbyeuthontedesonimpulsion,maislesbrasdeTonyluiencerclèrent
lataillesanshésitation.Ilpressasoncorpscontrelesien,puisillevalesmainspourluiencadrerlevisage.Saboucheseposasurlasienneenunbaiseraffamé.Desdoigtsàlapeaurêcheglissèrentlelongdesoncou,sesmainss’ouvrirentetcaressèrentsondos.Lachaleurdesapeaulabrûlaitjusqu’àlamoelle,mêmeàtraverssontee-shirt.Lorsqu’ellesentitleboutdesespoucesfrôlerledessousdesesseins,elleeneutlesoufflecoupé.Tonypoussaungrognementtoutenl’embrassant;salangueexploraitpassionnémentlabouchedeLibby.Enlaprenantparlataille,illasoulevafacilementetladéposasurunhauttabouret.D’instinct,Libbyécartalesgenoux–l’invitantàs’approcherplusprès.Ilavançaverselle,glissantsesmainsjusqu’àl’ourletdesonshortetcaressantlapeaunuedescuisses.Enluisoulevantunejambequ’ellerepliaautourdelui,Tonyavançaseshanchescontrelessiennes.
Une chaleur se concentra sur le bas-ventre de Libby. Elle sentait clairement l’excitation deTony,mêmeàtraversleursvêtements.Ivredupouvoirqu’elleavaitsurlui,ellecaressalentementsondosduboutdesongleset, lorsqu’elleatteignit laceinturede son jean,elle l’encourageaàpousserplusfort,plusprès.Glissantlesmainssoussachemise,ellepermitàsespaumesdesentirladuretémiraculeusedesesmuscles.Elleparcourut toutsondosdesesmainstoutenluidonnantdechaudsbaisersdanslecou,jusqu’àseretrouveràmordillersonomoplate.
«Hrgh,Libby!»gémitTony.Il avait une main enfouie dans ses cheveux depuis longtemps dénoués, et l’autre pressant
contresongenoupourlaserrercontrelui.Libbydécouvraitàl’instantàquelpointl’arrièredugenoupeutêtreunezoneérotique.
«Ilfautqu’onarrête,parvint-ilàdire,àboutdesouffle.—Pasquestion,répliquaLibbyenluidonnantuncoupdedentdanslecou,avantdeleverle
visagepourgoûterànouveauseslèvres.—Arrête.»Tonydégagea sesmainsàgrand-peine. Il agrippa lecomptoirderrièreelle, l’emprisonnant
entresesbras,maissanslatoucher.Libbysentitunfrissonglaciallàoùlachaleurdesoncorpsavaitdisparu.«Ouais,onestjusteamis,ditLibbyenregardantpartoutsaufdanssesyeux.—Non,chérie.»LavoixdeTonyétaitchaudeettendre.Ilavaittoujourslesoufflecourt.«Jenevoulaispasqueçasepassecommeça.»Ileutunpetitrire.«Tutrouvestoujourslemoyendeperturbermesplans,pasvrai?»Libbysemblanepascomprendre.«Ilyaunevitrinequidonnesurlaruederrièretoi.J’étaissurlepointdeteprendrelà,surce
tabouret,murmuraTonydanslecreuxdesoncoutoutenydéposantquelquesbaisers.—Okay,onvaencuisinealors.—Jesuistenté,chérie,maiscen’estpascommeçaqu’ondevraitfaire.Baiserentrelesfours
detamère?Cen’estpastoi,Libby.»Libbypensaqueçapourraitsansdouteêtreelle.«Ons’estsouventmalcompris,toietmoi.Ondevraitsansdouteseparlerd’abord.»Ah.Touts’éclaircissaitàprésent.Elleregrettabrièvementdeluiavoirlaissépenserqu’elleet
Parkeravaientuneamitiésexuelle.Ilvoulaits’assurerqu’ellen’attendaitriendeplus.C’étaitcorrect,pensa-t-elle,vuqu’ilhabitaità1500kilomètresdechezelle.Maisquecesoitcorrectnerendaitpaslachosemoinsdouloureuse.
«Okay.Parle.»Tony s’appuya sur le comptoir et se redressa. Il se passa lamain sur le visage et dans les
cheveux.Libbyadoraitquandilfaisaitça.«Donne-moi justeun instantpour retrouvermesesprits. Jeneveuxpasêtremaladroit– la
communication avant tout, n’est-ce pas ? dit-il avec un sourire en coin. Parle-moi,Libby, distrais-moi.
—Okay.»Libbyglissadesontabouretetrajustasesvêtements.«Ehbien,machambrechezStuart estminuscule. Ilditqu’ilvamedonner sonbureauà la
place,maisiln’apasencoreeuletemps.Ilyatoutjustelaplaced’ymettremonlit.—Libby!»Le regard de Tony était brûlant et sombre, mais un sourire rieur venait tempérer son
expression.«Parle-moid’autrechosequedetonlit,parpitié.—Oh!»fitLibbyenrougissant.Ellesemitàremplirlavitrinedesmuffinsdujour.«Ehbien,MamanetStuartavaientunesupernouvelle.Ilsm’envoientàRome.—Ouah?TuparsenItalie?Genrepourlesvacances?—Non,pourétudier.Ilsmefinancentunanàl’étranger.JesupposequeStuartadesremords
d’avoirenvahimonespace…»D’ungestedubras,elleindiquaqu’ilpouvaitavoirtouteslesraisonsqu’ilvoulait,cen’étaitce
quipréoccupaitLibby.«Donc,jeparsàRome.—Pourunan?Tut’envas,pourunan.»Tonyétait sous le choc. Il était sur lepointde luiouvrir soncœur.Dedéclarer sa flamme,
pour ainsi dire.Et elle s’en allait. Il n’était rien d’autre pour elle qu’unParker de plus. Il n’auraitjamaiscruavoirun jourpitiédeParker,maisc’était lecas.Elle l’avait rejeté,commeelleallait lefairedeTonyàlafindel’été…enquittantlepays.
Son silence semblaencouragerLibbyqui continua son récit tout en finissantdepréparer lemagasinpourl’ouverture.
«Je luiaiditquecen’étaitpasnécessaire,mais ila insisté.Etçameditvraimentd’yaller,doncjen’aipasététropdureàconvaincre.Ilyauninstitutculinairepastrèsloindel’universitéavecdescoursdepâtisserie,jepourraisapprendreàfairedesbiscotti,dubudino,dutiramisu,toutçaenfaisantundiplômedegestion.Jecroisqueçaseraitidéalpourmoi.Jeveuxdire,toituécris,Melcréesesmodèles,Parkerveutêtreavocat…
—J’enairienàfairedeParker!»Tonyétaitfâché.«Okay,»ditLibbyd’unairsurpris.C’était ridicule.Elle lui racontait savieenattendantqu’ilait lecouragede luidemanderde
fairel’amourencamarades?Pasquestion.«Écoute,Tony,c’estbon.C’étaitsûrementunemauvaiseidée.Onn’estpascegenred’amis,
si?Ons’estlaisséallerunmoment,c’esttout.Oublions.—Biensûr.Tuasraison,Lib.Fautquej’yaille,okay?Onseparlebientôt,ouais?»Tonysortitdelaboutiqued’unpasvifet,unefoisassisdanssavoiture,ilsortitsontéléphone
portableetappelaleTallahasseeNewspourannulersonentretiend’embauche.Cen’estquevingtminutesaprèsledépartdeTonyqueLibbyréalisaqu’ilneluiavaitpasdit
sonautrenouvelle.
CHAPITREDOUZE
«MonDieu!J’arrivepasàcroirequetut’envas!»s’écriaMelàl’aéroport.Toutcommeellel’avaitfaitdanslavoiturequilesyconduisait,etautéléphonequandLibby
avaitessayédeluiexpliquerqu’ellen’avaitpasbesoinderevenirexprèspourl’accompagner.«Onpourraseparlerquandonvoudra,Mel.C’estlemiracledelatechnologiemoderne.—Ceneserapaslamêmechose!—Okay,chérie,embrasse-laetlaisse-laembarquer.Sinonellevaratersonavion»,ditJohn
enessayantdecalmerMel.PauvreJohn.Melnevivaitquepourcesmoments-là.«Faisbonvoyage,Libster.Appelle-nousquandtuserasinstallée.—Oh,j’aifaillioublier!Tonytesouhaitebonvoyage,luiaussi.»Toutàcoup,Libbyfutintriguée.Ellen’avaitpasrevuTonydepuisl’incidentàlapâtisserie.Apparemment, ilavait reçuuncoupde téléphonecetaprès-midi-là, luidonnant rendez-vous
chezsonéditeurpourparlerdesromansd’«IsaacRaines»etilétaitpartisur-le-champ.Ilss’étaientparlé,biensûr,etenvoyédese-mails.Maisquelquechosedetroublepersistaitentreeux.Ilsavaienttous lesdeuxévitédeparlerdubaiser,maisLibbypensaitqu’il faudraitplusde tempspourque lagênedisparaisse.Celaluiconvenait,detoutemanière.AutantelleétaitprêteàaccepterqueTonysoitdugenreàcoucherjustepourleplaisir,autantellen’avaitaucuneintentiond’êtrepourluiuncorpschaud et consentant. Toute la semaine, tout l’été en réalité, ce baiser avait créé un véritable balletd’hormonesdanssoncerveau,contrelequelelleavaitluttéavecacharnement.Elleledésiraitplusquetout,maisilsuffisaitpoursecontrôlerqu’ellepenseàlafêtederemisedediplômedeMel,quandilluiavaitexpliquéqu’ilnepouvaitpascontrôlersesréactionsphysiques.Etquesesréactionsenversellen’étaientprécisémentquephysiques.Ladouleurqu’elleavaitressentieens’entendantdirequ’ellen’étaitqu’unpurbesoinphysique,cettedouleuravaitdurédesmoisetelleentendaitbiennepas laraviver.
«Remercie-ledemapartetdis-luiquejel’appellerai…justeaprèst’avoirappelée,toi.»Melricana.«Ouais,biensûr,justeaprès.Écoute,Lib,cequetudevraisfaire,c’esttetrouverunbelétalon
italienett’enservirpouroubliermonidiotdefrère.Uneaventureeuropéenne,genre.—MaisjenevaispasenEuropepourdraguer!—Ehbien,tudevrais.Jesaisquetoutescesétudesvontteprendredutemps,maisilvabiente
resterquelquesnuitsdelibres!Imagine:ilsauronttousdesaccents!—Okay,j’yréfléchirai.»Libbyn’avaitaucuneintentiond’yréfléchir,maisc’étaitlameilleurefaçonderépondreàsa
meilleure amie quand le temps pressait : lui dire ce qu’elle voulait entendre. Libby et Mels’embrassèrenttendrement.EtLibbysedirigeaverslescontrôlesdesécurité.
Contentquetoutsepassebien.Tudevraism’envoyerdescookiesàl’italienne!PlusquecinqsemainesavantlasortiedeThrills.Jesuisàcran.Tunepourraspasl’acheterenItalie,maisjet’enverraiunexemplaire.-T-
J’aidéjàprécommandémonexemplairesurAmazonlemoisdernier!Maistupourraispeut-êtrem’enenvoyerunquandmême–avectonautographe.Et,quandjeseraivieille,jepourrailerevendrepourdesmillionsdedollars.Romeestmagnifique.Audébut ilyavaitdessortiesorganiséesavec la fac,maismaintenantque jecommenceàavoirdesamis,jedécouvretouslessecretsdelaville.-L-
ChèreLibby,Jenesaisjamaisquoidiredansceslettres!Tumemanques!Commentsepasselachasseàl’étalon?Bises,MelChèreMel,Pourl’instant,bredouille.Bises,Libby
LibbyreçutlecolisenvoyéparTonyet l’ouvritsansattendredanslacaged’escalierdeson
immeuble.À l’intérieur, elle découvrit deux exemplaires deThrills, «par le jeune auteur à succèsAnthony Marchetti ». En ouvrant le premier livre, elle découvrit l’écriture brouillonne, maisfamilièredeTonysurlapremièrepage.
Mercid’avoirtoujourscruenmoi!TonAnthonyMarchettiJeviensderecevoirtoncolis!Lelivreestsuper!Jem’endoutais,biensûr,maisc’estbondelevoir.J’aifaitcirculerunexemplaire(pasceluiquetum’asdédicacé,quejegardepourmaretraite)parmimesamis.Unefilles’estplaintedenepasavoirpudormirpendantunesemaine.Jolicompliment.-L-P.S.:C’estbizarrequej’aieenviedetedirequejesuisfièredetoi?
Ellen’étaitpasrentréeàlamaisonpourNoël,choisissantplutôtd’allerskieravecungroupe
d’amis.Safamilleetsesamisluimanquaient.MaiselleaimaitRomeetsesnouveauxamis.Quelquechose lui disait qu’elle avait besoin de prendre du temps pour elle. Elle avait besoin d’avoir uneaventureeuropéenne,mêmesiellen’étaitpasdugenreauquelpensaitMel.
ChèreLibby,Contente de savoir que le ski s’est bien passé. Et merci pour le bouton en cuir italien ! Mondistributeuradorelesceinturesetlesportefeuillesencuiritalien.JoyeuxNoël,MelChèreMel,Ici,ilyenapartout!Contentequeçat’aitplu.Bises,LibbyJeviensdesignerlecontratpourIsaacRaines.EtilsfontréimprimerThrills.Jepenseàdéménager.TucroisquejeseraisbienàTaylorsville?-T-ChèreLibby,J’aihâtequeturentres!Tut’estrouvéuncopain?Despistes?Jenecroispasquecesoitsérieux,maisTonyaamenéunefilleaudînerdePâques.J’aimeautantquetusoisaucourant.Bises,Mel
Libbynepleurapas.Elleenavaitenvie,maisfinalementpasautantqu’ellel’auraitcru.Alors,
aulieudepleurer,ellesortitenboîte.EllefitappelàsessouvenirspourconjurerlesconseilsdeMelets’habillaavecentrain.Saroberougemoulaitsoncorpsavantdes’enflammerautourdesataille.Entournantdevantsonmiroir,Libbyadmiralafaçonqu’avaitletissud’onduleravecsoncorpsetdesesouleveraumoindredéhanchement.Defineschaussuresàtalonnoiresetuneséancedemaquillagevinrentcomplétersatenue.
Lena,uneamie italiennequeLibbyavait rencontrée à l’institut culinaire, l’avait invitée à lasoirée.Libbyavaitd’abordrefuséenpensantqu’elleseraitlaseuletouristedulot,maisfinalement,resteràlamaisonavecseslivresdecoursnesemblaitpasunebonneidée.Dansletaxi,enapprochantde laboîtedenuit,elleeutplusieurs foisdesdoutes.Elleavaitunpeupeurqu’une fois lepremierchocpassé,lanouvelleannoncéeparMelneprovoqueenelleunétatdépressif.Or,lapirefaçondontsasoiréepouvaitseterminer,c’étaitparunecrisedelarmespubliqueethumiliante.
CesquelquesmoispassésenItalieluiavaientpermisd’apprendreàcommanderunrepas,fairelescoursesetdemanderoùétaientlestoilettes.Cen’étaitpassuffisantpoursoutenirtouteunesoiréede conversation. Sans doute tous ces gens qui seraient là en train de danser, de boire et de rireparlaientmieuxanglaisqueLibbyelle-même,maiscelal’embêtaitd’êtrel’Américaineignorantedeservice.Lena laprésenta à tout lemonde,maisbientôtLibby se retrouva seule aubar à siroterunverre de vin, en se demandant si elle pouvait poliment s’appeler un taxi. Elle en était arrivée à laconclusionqu’ilétaitplusfaciled’avoirunflirtd’unsoirenthéoriequ’enpratique.
«Ballare?»Libby se retourna et découvrit un homme grand et brun, d’une beauté ravageuse qui aurait
sans doute satisfait toutes les exigences deMel. Il semblait trop vieuxpour être étudiant.Mais desgensdetousâgesfréquentaientl’institutculinaire,aussinepouvait-ellepasenêtrecertaine.Ilavaitretroussé lesmanches de sa chemise et déboutonné son col eu égard à la chaleur de la pièce.Unbouquetdepoilsémergeaitducolentrouvert.CequimitfinpourLibbyàunvieuxdébatqu’elleavait
euavecMel:lespoilsdepoitrine,sexyoupas?Clairement,définitivementsexy.Ilpenchalatêteenattendantuneréponse.«Américaine?—Si.Oui,désolée.»Ilsemblatrouverlaréponseamusante.«Tuesdésoléed’êtreaméricaine?—Non.Jesuisdésoléedenepasavoircompriscequetuasdit.Jeneparlepasencoretrès
bienitalien.—Jet’aidemandésituvoulaisdanseravecmoi.—Ah!Euh…oui.Merci.»Cette réponse également sembla l’amuser. Libby se leva et ils se rapprochèrent des autres
danseurs.L’hommeétaitgrand,mêmeavecseschaussuresdedanseLibbyn’arrivaitpasàsahauteur.DesbrasmusclésgonflaientlesmanchesdesachemiseetsesépaulesétaientduressouslesmainsdeLibby.Ildansaitmerveilleusementbien.CequitombaitbienpourLibby,carcen’étaitpassoncas–etdeuxmauvaisdanseursréunisrisquenttoujoursledésastre.Ilsdansèrentdeuxoutroisfoisetillatintsuffisammentprèsdeluipourqu’ellepuissesentirsonparfum.
«Tuveuxvenirtepromeneravecmoi?MiaBellezza?»Ilavaitdûsepencheretluiparleràl’oreille,carlamusiqueétaitbeaucoupplusfortesurla
pistededanse.Sonsoufflechaudluicaressalecou.Libbyseraidit.Ildutpercevoirsagêneparcequ’ilajouta:«Ilfaittropchaudici,etonnepeutpasseparler.Onferajustequelquespas.Larueestbien
éclairéeetilyadumonde.Jeneferairienquitemettemalàl’aise.»Leprincecharmantestaussiungentleman,pensa-t-elleenselaissantconduireau-dehors.« Comment tu m’as appelée ? » demanda Libby lorsque le calme de la rue rendit la
conversationpossible.«MiaBellezza.»Libbyréfléchitunmoment.«Majolie?— Ça sonne mieux en italien, mais c’est ça. Et tu es très jolie, » dit-il en souriant très
largementeteneffleurantdesamainlibrelesdoigtsqu’elleavaitposéssursoncoude.Ilss’assirentsurunbancbienéclairéparunréverbère,àquelquespasdel’entréedelaboîte.«Çafaitdetoilaméchantesorcièredel’Ouest?ditLibbyensouriantàl’idéedecethomme
trèsmasculinlevisagepeintenvert.—Scusi?dit-ilenfronçantlessourcils.—CommedansleMagiciend’Oz–danslefilmlasorcièreditJet’auraimajolieettonpetit
chienaussi!»Ilsemblaittrouverdrôletoutcequ’elledisait.«Jenecroispasavoirjamaisvucefilm,»dit-ilenriantbruyamment.Illuicaressabrièvementlajoueetcontinua:«Tumefaisrire.Jedevraispeut-êtret’appelermiarisata?Maisjepréféreraisconnaîtreton
prénom.—Libby–c’estlediminutifd’Elizabeth.»Évidemment,pasbesoindepréciser!Pourquoiétait-ellesinerveuse?«Elisabetta.»Ilplissalesyeuxcommes’ilsemoquaittoujoursunpeud’elle.«Tuvois,toutsonnemieuxenitalien.—Oh.»
Ilavaitraison;sonnométaitbienplusjolienitalien.«Hmm.Ettoi,c’estquoi,tonnom?—Gio,c’estlediminutifdeGiovanni.»Illataquinait!Libbyéclataderireetlatensiondisparut.La nuit était bien avancée lorsqu’ils prirent un taxi qui la déposa devant son immeuble.
Obnubilésparleurconversation,ilsn’avaientpasvuletempspasser.Gion’étaitpasétudiant.Enfait,ilenseignaitàl’institutculinaire.Maispaspourlescoursdepâtisserie,heureusement,carcelaauraitmisLibbymalàl’aise.Ilavait30ans,maisiln’avaitpassembléremarquerleurdifférenced’âge.Enplusdedonnerdescours,Gioétaitaussipropriétaired’unrestaurant.CequilesamenaàparlerdelapâtisseriedelamèredeLibbyetdesprojetsdecelle-ci.
Ilsparlèrentdesesétudesàl’université,etilfutimpressionnéparlefaitqu’elleparvienneàsuivredeuxcursusenmêmetemps.Etilsparlèrentdesvisitesqu’elleavaitfaitesdepuissonarrivéeàRome.Unautreéclatderires’ensuivitlorsqu’elleseplaignitden’avoirpaspufairedepromenadeenmotodanslaville.
«CommeAudreyHepburn!s’écriaGio.—Jenesaispas…ellefaisaitdelamoto?»Gioéclataderireànouveau.Décidément,ilriaitbeaucoup.Libbynesavaitpasencoresielle
devaitsevexer.«DansVacancesàRome…c’estunfilmtrèsconnu.Ilfautquetuleregardes.»Etilspassèrentlasoiréeainsi,àfaireconnaissance.Libbysepermitbrièvementdecomparer
etseditquec’étaituneexpériencequ’ellen’auraitpaseueavecTony.Ilsn’auraientjamaisbesoindepasserlanuitàsedécrireleurvieetleurpersonnalité.Quandletaxis’arrêta,Giorefusaqu’ellepaieetdemandaauchauffeurd’attendrequ’ellesoitrentréedanssonimmeublepourdémarrer.
Lelendemain,Libbyfitlagrassematinée;ellenes’étaitcouchéequ’àl’aube,aprèstout.Justeavantl’heuredudéjeuner,soninterphoneretentit.
«Betta,jepeuxmonter?»C’étaitlavoixchaudedeGioquisefaisaitentendre.Libby jeta un coup d’œil autour d’elle pour évaluer l’état de l’appartement. Une pile de
vêtementssetrouvaittoujoursparterredevantsonplacard,làoùelles’étaithabilléelaveilleausoir.Sonlitn’étaitpasfait,puisqu’ellevenaitd’ensortir.EllerisquaitdefairemauvaiseimpressionàGio.
«Jevaisdescendre,»répondit-elle.Aussivitequ’elleleput,Libbypassadesvêtementspropresetattachasescheveuxenqueue-
de-cheval.Pas le tempsde semaquiller,Libby se contentad’unpeudebrillant à lèvres enprenantl’ascenseur.Dehors,elletrouvaGiodeboutàcôtéd’unemotogaréelelongdutrottoir.
«Lecarrossedemadameestavancé,ditGioens’inclinantetenindiquantlevéhicule.—Tuasunemoto!—Jel’ailouée,enfait.Maislerésultatestlemême.Viensfaireuntouravecmoi.»C’est ce qu’ils firent. Ils se promenèrent dans tout le centre-ville. Elle connaissait déjà la
plupartdesendroits,maisellelesappréciaitdifféremmentencompagniedeGio.LabaladeseterminaàlafontainedeTrevi.Gion’eutaucunmal,avecsagrandetaille,àfendrelafouledestouristesetàamenerLibbyjusteàcôtédumonumentcélèbre.
«Onditquesitujettesunepiècedanslafontaine,tuessûredereveniràRomeunjour.»Gioplongealamaindanssapocheetluitenditunepoignéedepièces.Libbyconnaissaitcette
légende et de fait, elle avait déjà jeté un euro dans la fontaine quelques jours après être arrivée àRome.MaisellenevoulutpasbriserlecharmeetellechoisitunepiècedanslapaumedeGio,lajetahautdanslesairsetlaregardaretomberdansl’eau.SansquitterLibbyduregard,Giolaissatomberlerestedespiècesdanslafontaine.
«Pourquetureviennessouvent,miaBetta,»dit-ilenlavoyantleverlessourcils.
ChèreMel,J’airencontréquelqu’un.Ils’appelleGioetilestincroyable.Ilm’aemmenéefaireunepromenadeenmoto lasemainedernièreet, ilyaquelques jours, ilm’a faitàdîner.Leweek-endprochain ilveutm’emmenersurlacôteamalfitainepourpique-niquersurlaplagedePositano.Bises,LibbyP.S.:Sonaccentteplairait.ChèreLibby,Desdétails!Bises,Mel.
•••
J’espère que tu vas bien – tu ne m’as pas écrit depuis quelque temps. Je suppose que tu es trèsoccupée.Jedoisadmettrequeletempspasseplusvitequejenelepensais.J’aihâtedetevoircetété.-T-Désolé,j’aiétéoccupée.Letruc,c’estquejenevaispasrentrercetété,finalement.J’aiétéacceptéepourpréparerundiplômeàl’institutculinaire.Jevaisfinirmoncursusàl’UniversitéaméricainedeRomecetautomne,puisjepasseraidix-huitsemainesàplein-tempsàl’institutculinaire.J’aiencoredumalàcroirequemamèreaditoui,maisc’estvraimentunechanceincroyable.J’aihâtede lire lepremier livreavecRaines.Tousmesamisontprécommandé leur exemplaire.TuserasbientôttraduitenEurope!-L-C’estsplendide,Lib.Jesuiscontentpourtoi.-T-ChèreLibby,Onvasemarier!J’espèrequej’aieul’airsurprisequandJohnm’aposélaquestion,maispourêtrehonnête j’avais trouvé labagueparhasard ilyaplusieurssemaines.Onpense le faireen juin– tuserasrentrée,pasvrai?Ilfautqu’onaitletempsdetetrouverunerobededemoiselled’honneur.Bises,LafutureMadameJonathanEvansChèreMel,Félicitations !Biensûrque je serai là.Jedevrais rentrerenavril, cequinous laisse tout le tempspourenterrertaviedejeunefille.JesuistrèscontentpourJohnettoi.Bises,Libby
Tulecrois,toi?Bon,Johnm’estassezsympathique,finalement.MaisMelmesembletropjeunepoursemarier.Ouah.J’aiquittélejournal.JeloueunbureauàTaylorsvilleavecunappartementau-dessus.J’aidécidédefondermonproprejournal.Qu’est-cequetuenpenses?-T-C’estgénial,Tony!Jeveuxquetum’envoiestouslesnuméros!-L-
LibbydécidadenepasluirappelerqueMelétaituneadulte.Ilétaitsansdoutetempsdemettre
finaudébat.
Jen’arrivepasàcroireque j’ai terminé.Lesderniersmoisontétédurs,maisçavalaitvraiment lecoup.Pourquoitunem’avaispasditqueterminersesétudesdonnaituntelsentimentdepuissance?C’étaittristequeMeletJohnnesoientpaslà.MaismamèreetStuartsontvenusàRomepasserunesecondelunedemieletc’étaitchouettedelesvoir.Jesaisquetuesoccupé,maisj’auraisaiméquetusoislàaussi.-L-
CHAPITRETREIZE
Un sentiment de puissance ?Tony ne gardait pas un souvenir si important de sa remise dediplôme.Maisc’étaitpeut-êtreuntrucdefille.Ilauraitpuyaller,maisilnesesentaitpascapabledefairefaceaupetitamiitaliendeLibby.Etpuiselleseraitderetourdansquelquesmois.Melsemblaitpenserquec’étaitsérieux,aveccetItalien.MaisLibbyavaittoujoursl’intentiondereveniraupays,cequi, aux yeux de Tony, était l’essentiel. Il savait qu’il avait mal réagi lorsqu’elle était partie et,maintenantqu’ilavaiteuletempsd’yréfléchir,ilsavaitqueLibbyavaiteuraison.C’étaitimportantpourelled’allerenItalieet,aprèstoutcetemps,cen’étaientpasvingtmoisdeplusàl’attendrequiferaientunegrandedifférence.Renonceràelles’étaitavéré impossible.LesouvenirdeLibbyétaitgravéenluisiprofondémentqu’ilavaitmêmearrêtédesortiravecd’autresfilles.
Melavaitété trèsclaireavec lui lorsqu’elle l’avaitengueuléaumomentdudépartdeLibby.Apparemment, Libbyméritaitmieux que quelques e-mails et coups de téléphone.Apparemment, ill’avait privée des fleurs, des sorties, des choses que faisaient les vrais couples. Mel avait raison,Libbyméritaittoutcela.Lorsqu’ellereviendrait,Tonyseraitàlahauteur.Ilavaitmontésonentrepriseet, à présent que le journal tournait, il s’étaitmis à chercher unemaison à acheter. Il avait publiéplusieursromans.Bon,iln’étaitpasavocatnicuisinieritalien,maislecôtéromanciersemblaitquandmêmeimpressionnerLibby.Ilallaitluioffrirdesfleurs,l’emmenerdansdesendroitsélégantsetlafairetomberamoureusedelui.D’ailleurs,iln’avaitpaslechoix,carilétaitcertainqueLibbyétaitlaseulefemmequipourraitcompterpourlui.
GioetLibbypartageaientundîner tardifdanssonrestaurant.C’était ledernier jouravant le
débutdustagedeLibbyàl’institutculinaire.Ilsavaientpassél’essentieldeleurtempslibreensembledepuisquelquesmois.Audébut,Libbyavaitété impressionnéepar le faitqueGione lapressepasphysiquement – ils s’embrassaient passionnément de temps en temps, mais rien de plus. Maismaintenant,ellecommençaitàs’impatienter.
«Mercid’avoirpassétellementdetempsavecmoicettesemaine,dit-elleenserapprochantdelui.
—Jet’enprie,miaBetta,»réponditGioenl’embrassant.Cen’étaitpaslabrûlureinsoutenablequ’elleavaitressentiedanslesbrasdeTony,maisily
avaittoutdemêmeunechaleuragréable,confortable.« Peut-être qu’on ne devrait pas s’arrêter là ? dit-elle en faisant la grimace, gênée par sa
propreaudace!—Ah,Betta.Jenecroispasquecesoitunebonneidée,ditGioenlaserrantcontrelui.
—J’embrassemal?»Sous lechoc,Libbyposa laquestionqui la tourmentaitdepuisdesannées.Elle fut soulagée
quandGioéclataderire.«Quelleidée!dit-ilenluiplaquantunbaisersurlabouche.Non,tuesplutôtdouée,jecrois.—Alorsc’estquejesensmauvais?plaisantaLibbypourdissimulersagêne.—Jecroisqu’ilyaquelqu’und’autredanstoncœur,non?—Non.»LibbyvoulaitêtreavecGio,elleenétaitsûre.«Tuvaspartirdansquatremois.Jeneveuxpastefairel’amourensachantquetuvaspartir.—Oh.»Il n’avait pas tort. Même si elle adorait Rome, elle ne savait pas si elle voulait y vivre
éternellement.Sesamisetsafamilleluimanquaientdéjà.«Jenesuis jamaisalléenAmérique.Peut-être,quand tuauras fini tonstageetque tuseras
rentrée, peut-être que je pourrais te rendre visite ?On pourrait faire un road trip !On verra à cemoment-là,Betta.»
Libbyhochalatête.
CHAPITREQUATORZE
Est-ce que l’Amérique avait une odeur ? En descendant d’avion, Libby eut l’impression desentir le pays qu’elle retrouvait.Mel et John l’attendaient et elle courut jusqu’à sameilleure amiepourlaprendredanssesbrasencriantdejoie.C’étaitbond’êtrederetour.
«Dis-moicequetunousrapportes!»plaisantaMelenprenantLibbyparlebrasetenlaissantJohnsechargerdesbagages.
Le trajet jusqu’àTaylorsvillepassaà toutevitesse,dansun fouillisd’exclamations relativestouràtouràl’Italieetaumariageàvenir,sibienqueJohngardaprudemmentlesilence.
C’étaitmerveilleuxde se retrouver chez soi.Libby était heureusede retrouver sonunivers,
jusqu’à sa chambre minuscule chez Stuart. Elle n’arrivait pas à considérer vraiment cette maisoncommelasienne.ElleaimaitbienStuartetelleétaitcontentequesamèreaittrouvéquelqu’un,maiscen’étaittoutdemêmepaschezelle.Heureusement,ellen’allaityvivrequedemanièretemporaire.Carelleavaitunplan.
Elle allait ouvrir un commerce de traiteur en utilisant la cuisine de sa mère. Premièrecommande:legâteaudemariagedeMel.L’idéeétaitdesefaireunepetiteréputationetd’économiserdel’argentjusqu’àcequ’ellepuisseobtenirunprêtetouvrirsapropreboutique.Enattendant,ilétaitpratiquedepouvoirvivre chezStuart, d’autantqu’ellen’était pas sûrequeTaylorsville soit lebonendroitpourouvrirsaboutique.Lavillen’étaitpasgrande,etellerisquaitdefairedelacompétitionàsamère,aussiLibbyétait-ellerésignéeàs’installerailleurslemomentvenu.
Lelendemaindesonarrivée,aprèsavoirprissonpetit-déjeuneravecStuart(lamèredeLibby
étaitdéjà au travail), cequi avait étéunpeugênant,maisglobalementpasdésagréable,Libbyétaitpartiefaireunjogging.Ilfaudraitqu’elletrouveunmomentpourallerrenouvelersoninscriptionauYMCA,mais en attendant elle ne voulait pas perdre la forme.Mais, à peine était-elle sortie, alorsqu’ellecommençaitsespremiersétirements,qu’ellevitTonyvenirverselle.
LessouvenirsdeTonynerendaientpasjusticeàcesjambesmagnifiques.Leurvisionlefigea
surplacesurletrottoir,soudaintropnerveuxpourparler.«Salut!»s’écriaLibbyenvenantl’embrasser.Toujoursimmobile,Tonyparvinttoutjusteàluirendrelapareilleavantqu’ellenes’écarte.«Salut.»Bravo,Marchetti,sefustigeaTony.
«Tuasunmoment?—Tupensespouvoirtenirlerythme?»luiréponditLibbyavecunsourirejoueur.Il n’était pas habillé pour courir, mais il se rappelait très clairement son échec de la fois
passée,etils’étaitentraînéexprèspourprendresarevanche.Ilacceptadoncetilssemirentàcourir,d’abordlentement,cedontTonyfutheureuxcomptetenudesonaccoutrement.
«Bienarrivée,alors?—Oui,depuisvingt-quatreheurestoutjuste.»Tony fit une légère grimace. Il avait eu l’intention de lui laisser plus de temps pour se
réadapter.Etpuisilyavaitcettehistoiredepetitamiitalienqu’ilfallaitluipermettred’oublier.MaisTonyn’avaitpaspuseretenir,ilavaiteuunbesoinincontrôlabledelavoir.Enfin,lavoirnesuffiraitpasàassouvirtoussesdésirs,maiscelairaitpourl’instant.
« Bien. Je sais que tu as sans doute besoin de temps pour, euh, te réadapter, mais je medemandaissituvoulaisveniràlaFêteduvignobleavecmoi,cesamedi.
—LaFêteduvignoble?Jenesavaispasquetuaimaislevin.—Euh,non.»Mince, son plan s’effondrait déjà. Mel lui avait dit que Libby s’intéressait au vin, en ce
moment.«MaisjedoisyallerpourmonjournaletMelm’aditquetut’yconnaissaisenvin,alors…—Oui,d’accord.Avecplaisir.»Libbycommençaitàs’essoufflerunpeu.Tonysesentitfierd’avoirtenulecoupjusque-là.«Super.Jepasseteprendreà4heures?—Et si je venais te voir à ton bureau ? Çame plairait de voir où tu travailles. Et puis je
voulaisteparlerboulot,detoutemanière,depublicitéplusprécisément.—Okay,pasdeproblème.Viensunpeuplustôtetonverraçaensemble.»Tonyauraitpréférépasserlachercherchezelle.Maisilsavaits’adapter.IlsavaientfaitletourdupâtédemaisonsplusieursfoisetTonyralentit.«Tucales?letaquinaLibbyencourantsurplace.—Nan, il faut justeque j’y aille. Jedois repassermechanger à lamaisonavantd’aller au
bureau.»LevisagedeLibbyprituneexpressionderemords.«Jesuisdésolée!Jen’yavaispaspensé!Tuauraisdûledire!—Pasdepanique,Lib. Je suis lepatron, jepeuxêtreen retard si jeveux…etaujourd’hui,
c’estcequejevoulais.Àbientôt,d’ac?—D’ac.»Tonyfitvolte-faceetsedirigeaverssavoiture.Ildémarraets’éloignaenfaisantaurevoirde
lamainparlafenêtreouverte.LasemainedeLibbyfutcourte.Elleavaitpassélespremiersjoursàtravailleràsonbusiness
plan et à déterminer quelle sorte de publicité elle voulait faire paraître dans le journal. Elle avaitconçuunmenupourl’éditiondudimanche,maisellepensaitqu’uneannoncequotidienneseraitutileégalementaudébut.LejournaldeTonyétaittrèsapprécié,etpresquetoutlemondeyétaitabonné.
LibbyentradanslebureaudeTonyunpeuaprès3heures.«Tu es en avance, ditTony en passant la tête par l’embrasure d’une porte.Attends-moi un
moment,jemechange.»TonydisparutetLibbyessayadenepastropl’imaginerentraindesechanger.La réception du journal était assez petite, mais Libby se dit que ce n’était pas le genre
d’entreprise qui recevait beaucoup de clients dans ses locaux, ce n’était donc probablement pas
gênant. Contre le mur de l’entrée se trouvaient plusieurs distributeurs de journaux et une borned’impressiondephotos.Unpeuplusloinsetrouvaitlebureaudelaréceptionniste,puisdeuxautrespetits bureaux. L’un des murs était décoré d’une fresque représentant les locaux d’un journal àl’ancienne,enstylebandedessinéeavecdeslignespourmontrerlebruitdestéléphonesquisonnentetdesreportersvêtusdecostumesetchapeauxentraindes’affairer,sousl’œild’unhommerougeaudquiétaitsansdoutecenséreprésenterTony.L’ensembleétaittoutàfaitcharmantetentièrementdanslestyledeTony.
«Oui,jel’aimebienaussi.»Libby fit volte-face et découvritTony juste derrière elle. Il avaitmisune chemiseverte.La
couleurluiallaitbien.«Cesontdeslycéensquil’ontfaitepourleurprojetdefind’année.Enparallèle,onapublié
unarticlesurl’importancedescoursd’artplastique,ditTonyenlafaisantentrerdanssonbureau.Etlemieuxdanstoutça?Onnevoitplusquelemurendessousestfendudepartout!Pasmal,hein?ajouta-t-ilavecunsourirefier.
—Jenem’attendaispasàmoinsde tapart, répliquaLibbyen luirendantsonsourire.C’estvraimentbienici,Tony.Vraimentbien.»
LebureaudeTonyétaitcouvertdepapiersendésordre,cequinesurpritpasLibby. Ilavaittoujourseutendanceàcréerdudésordre.Surlemurdufondétaientaccrochéslepremierexemplairedu journal et les deux romans publiés par Tony. Dans un coin, il y avait une corbeille à papier,entourée d’innombrables boules de papier froissé. Libby imagina Tony en train de tenter des tirsimpossiblesetd’enraterlamoitié–c’étaittoutlui.
«Bon,j’arrivetoutjusteàjoindrelesdeuxbouts,maisjefaisçaavanttoutparpassion.J’aideux jeunes qui acceptent de travailler pour des cacahouètes et je sous-loue l’appartement du hautdepuisquejen’yhabiteplus,çaaide.
—Tuhabitesoù,maintenant?»LevisagedeTonyrougitdefiertéetd’excitation.« J’ai acheté unemaison. Il y a deuxmois. Une vieille bâtisse victorienne sur Pine Street.
L’affaire a englouti tout le revenu demon livre, je n’ai pas de quoi acheter desmeubles et il y aprobablement60000dollarsdetravauxàfaire,maisj’yarriverai.J’aihâtedetefairevisiter.»
Libbynesesouvenaitpasdel’avoirjamaisvusiheureux.«Ouah,tutedébrouillesvraimentbien,Tony,bravo.Toustesrêvesseréalisent,ondirait.—Pastous,Libby.Maisj’aibonespoir.Etqu’est-cequejepeuxfairepourtoi?»Libbyluitenditledossierqu’elleavaitpréparé.« Jeveuxabsolument faire l’annoncedudimanche.Et, en fonctiondubudget, peut-êtreune
annoncequotidienne.»Tonyneditrienpendantquelquesinstants,letempsdefeuilleterledossierrapidement.«Çamesemblebien…Dolce-McKay?»Libbyhaussalesépaules.« Je trouve que ça sonne bien. Et ça joue sur ma formation italienne… Dolce veut dire
«gâteau».—C’estsympa,ditTonyenhochantlatête.Pasdeproblème,onvatepublierça.Tutravailles
danslacuisinedetamère?—Pour l’instant. Jecompte toujoursouvrirmapropreboutique,maischaquechoseenson
temps.—Tuastoutprévu,ondirait.Onyva?dit-ilenselevant.—Quoi?réponditLibby,surprise.—ÀlaFêteduvignoble?Tuveuxtoujoursveniravecmoi,pasvrai?
—Biensûr.Maisonn’apasencoreparléduprixet…—Nesoispasbête,Libby…c’estgratuit.—Horsdequestion!Tudirigesuneentreprise,etj’aiunbudget–quiinclutunecampagnede
pub.»Oups.Ill’avaitoffensée.Parfois,c’étaitplusfaciledeluiparlerpare-mail.Enface-à-face,il
sesentaittroubléetparfoisildisaitn’importequoi.« Ce n’est pas ce que je voulais dire, Libby. Je veux juste t’aider. Bon, voilà ce qu’on va
faire.»Illuitenditunprospectus.«Voilànosformulespublicitaires.Touslesprixysont.J’insistepourtefairelaréductionde
25%quej’accordeàlafamilleetauxamis.Jelefaismêmepourtamère,c’esttedire.Après,situveuxcompenserunepartiedeces25%sousformedepâtisseries,c’esttoiquivois.»
Libbysedétenditvisiblement.«Bon,allons-y,maintenant.»Tonypassalalanièred’unappareilphotoàsonépaule,ouvritlaporteets’effaçapourlaisser
passerLibby.«Ilesttempsdes’amuserunpeu.»Et ils s’amusèrentbien,eneffet. Ilyavaitdesstandsetdes tentes,etunorchestrequi jouait
pourunepoignéed’enthousiastesvenuspique-niquersurl’herbe.Laplupartdesexposantsvendaientleurvin,mais il y avait aussides spécialités culinaires etdesproduits artisanaux.Lamusiqueétaitentraînante, et Tony prit la main de Libby pour la guider parmi les stands. Même s’il étaitofficiellement là pour travailler, Tony semblait bien décidé à ce que Libby ne s’ennuie pas. Il luidemandasonavissur tous lesvinsqu’ilsgoûtèrent–en lapoussantàexpliquer lessubtilitésde ladégustationpard’habilesquestions.Ildevaitêtretrèsbonjournaliste,pensaLibby.
«Maintenant,onpique-nique,»annonçaTonyd’unairjoyeuxquandilseurentfaitletourdesexposants.
Libbyrevintenarrièrepouracheterunedemi-bouteilled’unroséqu’elleavaitbienaimé.EllepâlitquandTonysortitsonportefeuille.Mêmesiellen’avaitpaschoisiunvintrèscher,cen’étaitpasnonpluslemoinscherdetous.
« Détends-toi, lui dit-il en souriant. Ça passera en frais professionnels, puisque tu es uneconsultantepourmonarticle.»
Illuifitunclind’œilenrécupérantlamonnaieettenditlabouteilleàLibby.«D’accord,fit-elle.Etqu’est-cequ’onmange?—Commetuveux.Jen’aiaucuneidéedecequiferaitunbonmariageavectonvin.—C’estcequiestbienaveclerosé.Ilconvientpresqueàn’importequoi.»Aprèsréflexion,elleachetaunebaguettecroustillanteetplusieursfromages.«Fraisprofessionnels,çaaussi,ditTonyenrefusantdelalaisserpayer.Parcontre,j’auraisdû
amenerunecouverture,ajouta-t-ilenindiquantsonpantalonbeigeclair.—Onapeurdesefairedestachesd’herbe,Marchetti?»leprovoquagentimentLibby.Ilsallèrents’installerprèsdel’orchestre,leurpetitpique-niqueposédirectementsurl’herbe.
Autour d’eux, des couples et des familles profitaient du cadre agréable à présent que l’après-miditouchaità sa fin.Uncoupleâgédansait lavalseàcôtéde l’orchestreetdepetitsenfants jouaientàDansonslacapucine.
«Quiauraitcruqu’ilyauraitdesenfantsàuneFêteduvignoble,ditTonyensourianttandisquelespetitss’effondraientdansl’herbeavecdeséclatsderire.
—Cen’estpascommesionétaitdansunbar,ditLibbyenmâchantunmorceaudepain.Onne
boitpasduvinpourl’alcool,maispourpartageruneexpérience.»Tonylevaunsourcildubitatif.« C’est vrai, insista Libby en lui donnant une petite tape. Traditionnellement, c’est avec un
repas,maisçapeutconveniràtouslesmomentsdel’existence.»Tonyhochalatête,l’airimpressionné.«Bon,maisest-cequ’ilsaurontdebonssouvenirsdupique-niqueetdelamusiquemêmes’ils
neboiventquedujusdefruit?demanda-t-ilenindiquantlesenfants.—Oui,etleursparentsaurontlesouvenirdelesavoirregardésjoueretrire.C’estBenjamin
Franklin qui a dit : Le vin rend l’existence plus plaisante, moins pressée, apaise les tensions etencouragelatolérance.EtjecroisqueThomasJeffersonaparléduvincommeétantnécessaireàlavie.
—Bien, j’aime bien, dit Tony en prenant des notes sur un petit carnet extirpé de son étuid’appareilphoto.
—Euh,jenesaispassic’estdumotàmot,parcontre.»Tonyluilançaunregard.«Jevérifierai,net’inquiètepas.»Elleespéranepasavoirinsultésacompétenceprofessionnelle.QuandTonyeutfinid’écrire,ilselevad’unairdécidéetsortitsonappareil.«Maintenant,ilfautquejegagnemavie!»Tony se mit à se promener entre les groupes, prenant des photos de familles qui pique-
niquaientetdecouplesquidansaient.Pendantcetemps,Libbyrestaassisesurl’herbeàsirotersonvinet à le regarder travailler. De temps en temps, il s’arrêtait pour parler à quelqu’un ou pour fairesignercequidevaitêtreuneautorisationdepublierlesphotos.Ilsemontraittrèsàl’aise–sachantquand rester discuter comme un vieil ami ou s’éclipser rapidement lorsqu’un couple voulaitreprendreunmoment tendre.Auboutd’unmoment, il revintversLibby.Enarrivantdevantelle, illeva son appareil et prit une série de photos, tandis qu’elle levait son verre dans sa direction ensouriant. Lorsqu’il baissa l’appareil, leurs regards se croisèrent, et elle eut l’impression qu’il laregardaitavecunairdeconvoitise.Maiscen’étaitpeut-êtrequel’effetduverredevinquialtéraitsaperception.
Lerestedelasoiréefutagréable.IlsfirentunderniertourdesstandsetLibbys’arrêtadevantun étalage de bijoux artisanaux – un collier en particulier lui plaisait, fait de belles pierres bleuesreliéesparunechaîne.Tonysortitimmédiatementquelquesbilletsetleluipassaautourducou.
«Jenecroispasqueçacomptepourtesfrais,plaisantaLibbypourcachersagêne.—Nan, ce n’est plus le journal qui paie, disons que c’est un cadeau pour te remercier de
m’avoirfaituncourssurlesplaisirsvinicoles.»Mêmesic’étaitjusteunesortieentreamis,cettejournéeavaitétéunedesmeilleuresqueLibby
aitpasséesenlacompagniedeTony,pensacettedernièrecesoir-làavantdes’endormir,enrepensantàtoutcequis’étaitpassépourmieuxs’ensouvenir.
CHAPITREQUINZE
«Jedétestelafacdemédecine.—Heureusementquec’estpastoiquiyétudiesalors.»Libbyavaitletéléphonecoincéentrel’épauleetl’oreillepourpouvoirécouterMelseplaindre
etmélanger sa pâte enmême temps. Stuart voulait des biscotti à vendre sur son stand, alors elleenvahissait la cuisine de samère, le soir après la fermeture. C’était sûrement du népotisme,maisLibbyn’avaitpasl’intentiondefaireladifficile.
«Oh,tusaisbiencequejeveuxdire.Johnn’estpresquejamaisàlamaison,etj’aipleindetrucsàfairemoiaussi.Onn’ajamaisletempsde…–tuvois.Çafaitpresqueunesemaine.
—GrandDieu,Mel ! Je teplainsvraiment,nepasavoir fait l’amourpendantune semaine,grave!
—Oh,net’enfaispas,cen’estpastafaute.»SoitMeln’avaitpassaisil’ironiedeLibby,soitelleavaitchoisidel’ignorer.«Maisjesuistropexcitéepourceweek-end.Johnapromisdenepasamenerdetravailavec
lui.—Vousallezquelquepart?—Oui,jenetel’avaispasdit?C’estnotreréuniondefamille.Tudevraisvenir!Onnesevoit
plusjamais,mêmedepuisquetuesrevenueaupays.Ettupourraisdéfendretontitreauconcoursduplusgrosmangeurdetartes.»
Petite, Libby accompagnaitMel à la réunion de famille desMarchetti tous les ans.Mais, àl’adolescence,Mels’étaitmiseàyemmenerdesgarçonsàlaplace.
«J’avais14ansladernièrefoisquej’ysuisallée.J’imaginequequelqu’unadûmeprendremontitreenhuitans.
—Quelqu’ungagne,c’estsûr,maispersonnen’ajamaisfaitaussibienquetoi.Septassiettesdetartes!»
Libbysesouvenaitavoirététrèsfièrecetteannée-là.À14ans,elleneréalisaitpasencorequecen’étaitpastrèsélégantd’engloutirseptassiettesdetartesàlasuite.
«Okay,situpensesquepersonnen’yverrad’inconvénient,jeseraisraviedevenir.Maisjeneprometsrienpourleconcoursdetartes.»
Libbyétaiten traindedonner formeauxbiscottiquandTonyentrapar laportebattantequi
séparait laboutiquede lacuisine.Commesi lesdeuxannéespasséesn’avaientpasexisté,Libbyseretrouvatransportéejusqu’auderniermomentqu’ilsavaientpasséensembledanscelieu.Commesi
cela s’était passé à présent, elle l’entendit lui murmurer à l’oreille « baiser entre les fours de tamère?»Heureusementqu’ellen’étaitplusamoureusedeTony,oùcemomentauraitpuêtregênant,pensaLibbyenseconcentrantsursapâte.Ellel’avaitdéjàétalée?
«Salut,Lib.Tamèrem’afaitentrer,elles’enallait.»Tony s’appuya contre le mur et la regarda donner forme à la pâte. Ses mains si petites
dégageaient pourtant une vraie force. Ses gestes étaient assurés, fermes, tandis qu’ellemalaxait etroulait la pâte entre ses doigts. Que ne donnerait-il pas pour être ce petit morceau de pâte ? Etpourquoisemblait-ilainsiobsédéparlesmainsdeLibby?S’il luiétaitrestésuffisammentdesangdanslecerveaupourréfléchir,ilauraitsûrementeuhontedelui.
«Tum’écoutes?»Merde.«Désolé,Lib,j’étaisdistrait.Qu’est-cequetudisais?—Peuimporte.Qu’est-cequetuveux?»Cequ’ilvoulait?Tonyfitunpasverselleavantdepouvoir secontrôler, tant l’effetdeses
hormones sur son organisme était fort. Doucement, il fallait qu’il aille doucement. Il fallait qu’ildonne à Libby le temps d’oublier le cuistot italien, avant de passer à l’action. Pour lemoment, ilfallaitqu’ilpasseunpeudetempsavecelleetqu’illuimontreàquelpointilsétaientbienensemble.
« Je suis justevenu t’inviter àune fêteceweek-end.En fait, c’est la réunionde familledesMarchetti.»
Pourquoiest-cequ’elleleregardaitcommeça?«Jesais…Jeviensdetedirequej’yvaisavecMeletJohn.»Cettestupideobsessionpoursesmains.« Ah oui. Hmm… difficile de dire à quelle heure ces deux-là sortiront de leur chambre
d’hôtel.Pourquoitunevienspasavecmoi?Commeçatunerisquespasderaterleconcoursduplusgrosmangeurdetarte!»ditTony,avecunelueurtaquinedanslesyeux.
Qu’est-cequ’ilsavaienttousàluiparlerdetarte!«Bon,d’accord,àquelleheuretuveuxquejesoisprête?»Unefoistoutarrangépourleweek-end,Tonypritunechaiseettrouvaunstyloetunepilede
serviettesenpapierpourjoueraumorpionletempsquelesbiscotticuisent.Libbygagna28à3.Mais,pourêtre franc, il avait eudumal à se concentrer.Libbyavait cette façon si charmantede tenir lestylo…
«Nemangepastrop,Libster!Leconcoursdetartesestjusteaprèsledéjeuner!Jevaistefaire
delaconcurrence!»ditJohnenrugissantderire.Libbysedemandabrièvementsic’étaitmaldeluisouhaiterdefairetombersonhot-dogsursa
chemise.MaisMel était assise sur sesgenouxetLibbyn’avait pasvraiment enviede l’entendre seplaindretoutl’après-midiquesesvêtementsétaienttachés,aussirenonça-t-elleàcetteidée.
Libby s’était habillée avec soin, cematin-là.Un shortvert très court et un tee-shirt bleuvifmoulantavecuncolenVpourrévélerunsoupçondedécolleté. Il feraitsûrement tropchaudpourlaisser ses cheveux tomber sur ses épaules,mais elle l’avait fait quandmême. Ses boucles brunesformaient un contraste agréable avec le bleu de son tee-shirt. Alors elle glissa un élastique à sonpoignet (au cas où elle changerait d’avis unpeuplus tard) et laissa ses cheveuxvoleter librement.Libbyessayadenepastroppenseràlaraisonquilafaisaitfournirtantd’efforts.N’yparvenantpas,elle se dit qu’elle avait remarqué Tony pendant quinze ans, il était normal qu’elle veuille qu’il laremarqueàsontour–çanepouvaitpasluifairedemal.
Tonynerestaeneffetpasindifférentlorsqu’elleluiouvritsaporte.Enréalité,ilpassaunlongmomentàsedemandersisonshortétaitassezgrandpourcomptercommeunvêtement.Leparcoù
avaitlieularéunionétaitàunpeuplusd’uneheuredevoituredeTaylorsville,cequifaisaitunlongmomentàs’efforcerdenepasregarderlesjambesfinesetbronzéesdeLibby.Desjambesqu’ilauraitadoré…NON.C’étaitseulementleurdeuxièmerendez-vous,ilnefallaitpasqu’ilailletropvite.«Vadoucement»étaitdevenuunmantra,queTonyserépétasanscesseaucoursdelajournée.
Lorsqu’ils arrivèrent, la réunion de famille battait son plein. Tony présenta Libby auxmembresdesafamillequ’elleneconnaissaitpas,etcelle-ciretrouvaavecplaisir tousceuxqu’ellen’avait pasvusdepuisdenombreuses années.Chacun s’exclamait : « Jeme souviensde toi ! »ou«Commetuasgrandi!»et,àlagrandehontedeLibby,ilfutaussiquestiondesesseptassiettesdetarte.Principalementdelapartdestantesetdescousines.Leshommesavaientplutôttendanceàfairedesclinsd’œilàTony,àluidonnerdescoupsdecoudeetàluiserrerlamaind’unairapprobateur.SoncousinNickallamêmejusqu’àluidonneruncoupdepoingdanslebrasenletraitantdesacréplay-boy,cesurquoiTonyserengorgeafièrement.
VoirainsiLibbyavecsafamillenelelaissaitpasindifférent.Ilenressentaitquelquechosedesitendrequ’ilenavaitlesoufflecoupé.Ils’imaginaitrevenirdansquelquesannéesavecLibbyàsescôtés en tant qu’épouse, et peut-être en tant que mère. À quoi pourraient bien ressembler leursenfants?Ilsauraientdescheveuxbrunsetbouclés,décida-t-il.Quoiqu’ilarrive,ilvoulaitavoirunepetitefilleavecdescheveuxbrunsetbouclés.
«LibbyMcKay!s’écriaFrankieenarrivantaupasdecourse.Commentçava?Salut,Tony.Tunevaspasmefrappersijeteserrelamain,non?»
Tonyjetaunregardnoiràsoncousin,maisilluiserraquandmêmelamain.«Viens,Lib,jecroisquejevoismesparents.»TonyemmenaLibbyàsasuite,etelleentenditderrièreFrankiepousserunhurlementdeloup.«Qu’est-cequ’ilvoulaitdire?—Jel’aifrappéilyaplusieursannées,etilaimeàmelerappeler,ditTonyenpassantunbras
autourdesépaulesdeLibbyd’unairprotecteur.—Oh.»Libbypensaitpouvoirdevinerpourquelleraisoncecoupdepoingavaitétédonné.Leconcoursduplusgrosmangeurdetartesn’étaitpaslaseulecompétitiondelajournée.Les
Marchettiadoraientlesjeux.Ungrandtableaublancsetrouvaitdansuncoin,avecleprogrammedesactivitésetunefeuillepours’inscrire.Enfant,Libbyadoraittouscesjeux.Ellehabitaitseuleavecsamère,avantqueStuartneviennesejoindreàelles.Çanefaisaitpasassezdemondepourdesjeuxtelsquelelancerd’œufs,lescoursesderelaisetleschassesautrésor.DanslesouvenirdeLibby,Tonyn’étaitpasungrandfandecesjeux,hormislapartiedesoftballquimarquaittouslesanslafindesfestivités.Mais,quandLibbysefutinscrite,Tonyajoutasonnomàcôtédusienpourlacourseàtroisjambes,labatailledebombesàeauetbiensûrletiràlacorde.
Lacourseàtroisjambesétaitlepremierévénementdelacompétition.Unepistedecinquantemètresavaitététracéeàlacraieblanche.
«Jecomptebiengagner,McKay.Nemelaissepastomber.»Tonyaffichaitunsourireambitieux toutennouant les foulardsautourde leurchevilleetde
leurcuisse.Siellen’avaitpassuàquois’entenir,elleauraitd’ailleurseulavagueimpressionqu’ilfaisaitdurerlatâcheplusquenécessaire.
«Net’inquiètepas,onestlesmeilleurs,ditLibbyenfaisantsemblantdelustrersesonglesenfrottantsursamanche.»
Lesecretd’unecourseàtroisjambesréussie,cen’estpastantlavitessequeletravaild’équipeet l’équilibre.LibbyetTonyprirentunplutôtbondépart. Il la tenait fermementpar la tailleet elles’appuyait d’une main sur son épaule. Ce qui aurait été parfait niveau équilibre si Libby n’avaitressenti de petites décharges électriques dans tout le corps en raison de cette proximité physique
inopinée.Ilsétaiententêteàlami-course.Mais,lorsquelesdoigtsdeTonyseglissèrentparmégardeentrelaceinturedushortdeLibbyetlebasdesontee-shirt,touchanttoutàcoupsapeaunue,Libbyeutuneréactiondesurprise.Elleperditl’équilibreversl’avantet,inévitablement,entraînaTonydanssachute.
Celui-cipassa lesdeuxbrasautourd’ellepouressayerd’absorber l’essentielduchoc,maiscelanefitqueleslierdavantagel’unàl’autreaumomentdetoucherlesol.LevisagedeTonytombadanslecreuxdel’épauledeLibby,soncorpsparfaitementalignéaveclesien.Ilsentituneforteodeurdelavandeet,l’espaced’uninstant,oupeut-êtrededeuxinstants,Tonysouhaitatrèsfortqu’ilsnesesoientpastrouvésdansunparcenprésencedetoutesafamille.
«Çava?demanda-t-ilenregardantLibbydanslesyeux.—Seulmon orgueil est blessé, » dit Libby en rougissant jusqu’aux oreilles. Tony s’écarta
rapidement,avantquecetteproximiténecausedavantagedeproblèmes.Le temps qu’ils se relèvent, les gagnants (un oncle et une tante queLibby ne reconnut pas)
effectuaient une danse de victoire légèrement agaçante. Les Marchetti aimaient vraiment lacompétition.
«Ehbé,j’espèrequevousferezmieuxàlabatailledebombesàeau!»C’étaitMel qui leur faisait signe, flanquée de John qui la serrait contre lui. Comme Tony
l’avaitprédit, ilsarrivaientavecplusd’uneheurederetard.HeureusementqueTonyavaitoffertdel’amener,seditLibby,ouelleauraitmanquétouteunepartiedelafête.
«Salut,sœurette,salut,John.»Tonyallaembrassersasœuretserrerlamaindesonfuturbeau-frère.«Vousallezparticiperàlabataille?—Pasmoyen,affirmaMel.J’aimisunerobeblanche,ajouta-t-elledansunmurmurequetout
lemondeentendit.—Eton s’inscritoù?dit Johnen levant les sourcilsd’unairqui sevoulait sexy,maisqui
semblasurtoutgrossieràLibby.—John!»s’écriaMelenluidonnantunetapejoueuse.Enréponseàcela,Johnlasoulevadeterreetlahissasursonépaulepourl’emporteraveclui.«Ilsfontunspectacleinterditauxmineurs,touslesdeux,ditLibbyensecouantlatête.—Tu l’as dit, opina Tony.Dire que c’estma petite sœur ! » ajouta-t-il en faisantmine de
vomir.Tony et Libby rejoignirent les deux autres et ils regardèrent les autres jeux pendant un
moment. IlsencouragèrentNickau lancerde feràchevalet Johndans lacourseà relais (mêmesicelui-ciarrivabondernier).
Pourlabatailledebombesàeau,leséquipesdedeuxsefaisaientfaceetselançaientunballonrempli d’eau. Si le ballon se cassait, vous étiez éliminé, sinon, vous reculiez d’un pas pourrecommencer.Tonyn’aimaitpeut-êtrepasbeaucouptouscesjeux,maisilétaitaussicompétitifquelerestedesafamille.Jusqu’auderniermoment,ildonnaitencoredesinstructionsàLibby:
«Lesmainsdétendues,sansserrer,tulancesparendessous.»C’était extrêmement agaçant et Libby applaudit avec les autres quand Tony fit éclater leur
ballonautroisièmetour.«T’avais pas lesmains assezdétendues ! » lui lança-t-elle alors qu’il enlevait son tee-shirt
mouillé.Libbydutalorsserappelerqu’ellen’étaitplusamoureusedeTony.Car,siellel’avaittoujours
été,levoirainsis’extirperdutissugorgéd’eau,révélantsontorsemusclé,auraitsansdoutesuffiàlafairedéfaillir.Pour lapunirdesesmoqueries,Tonydérobaunebombeàeauàsonvoisinet la fitexplosersurledosdeLibby,cequibiensûrdéclenchaunebataillegénéraliséeet,bientôt,iln’yeut
plusunseulMarchettisecàl’horizon.Tonydénichaune couverture de pique-nique et la déplia sur le sol.Libby s’allongea sur le
ventre et laissa le soleil sécher son tee-shirt. Heureusement qu’il n’était pas blanc ! Ils restèrentallongéslàunpetitmoment.C’étaitunedeschosesqueLibbyappréciaitquandelleétaitavecTony:ils ne ressentaient pas le besoin de meubler le silence. Lorsqu’ils se mirent à parler, Tony luidemanda son avis sur des idées de nouvelles, et Libby lui montra comment faire un collier depissenlits.Lorsqu’onlesappelapourletirdecorde,ilsétaientsecsetrhabilléstouslesdeux.
Traditionnellement,letirdecordesefaisaithommescontrefemmes.Nepensezpasquecelaaitétéinjuste:ilyavaitdeuxfoisplusdefemmesqued’hommesdanslafamilleMarchetti!Commeilsétaientdansunparcpublic,ilsn’avaientpaspucreuseruntrouàremplirdeboueaumilieudelacorde,mais ils l’avaient remplacéeparunepiscinegonflable rempliedecequi ressemblaitàde lacrèmechantilly.Commentavaient-ilspuacheterautantdecrèmechantilly?sedemandaLibby.Cettefamille prenait vraiment ses jeux au sérieux. Libby nota que l’année prochaine elle ferait biend’apporterunetenuederechange.Puisellenotaqu’elleneseraitsansdoutepaslàl’annéeprochaine,puisqu’ellenesortaitpasavecTony.Leshommesgagnèrent,maisLibbyparvintànepastomberdanslacrèmeChantilly–cefutdoncunevictoirepersonnelleauseind’unedéfaitecollective.
«Tuessûrequetuneveuxpasmangerdetarte?demandaTonyunefoisqu’ilseurentfinidedéjeuner.
—Certaine.Unevraiedemoisellenemangepasplusd’uneseuletarteàlafois.»Tonyl’imaginauninstantlabouchecouvertedefruitsetdecrème.DommagequeLibbysoit
unevraiedemoiselle.«Bon,onpeutaumoinsallerobserver.JepariesurNick,ilestassezdoué.—Jeprendslepari.Tuoubliesquej’aidéjàvuJohnmanger.L’annéeoùMelavaitbrûléla
dinde?Johnavaitdûmangertroistartes…justepourleplaisir.Là,ilauneréputationàdéfendre!—Paritenu.»Tony s’appuya contre unpoteaudukiosqueoù se déroulait le concours. Il n’y avait pas de
chaise,doncilplaçaLibbydevantluietl’entouradesesbras.Beaucoupmieuxqu’unechaise.«Qu’est-cequetuveuxparier,McKay?demanda-t-il.—Descookies?suggéraLibbyensedemandantsisavoixétaitnormale.—Nan.Lesmienssonttoujoursdégueu.Ceseraittrophumiliantdetelesfairemangersije
perds.Non,jesais,onvaparierunfilm.Situgagnes,jeregarderaiunedetescomédiesmusicalesàlanoix,etsijegagnetudevrasregarderMatrixavecmoi.
—L’enjeuestgrave. Impossiblede tepersuaderdechoisirautrechose?D’échangerKeanuReevescontreunpiratedesCaraïbes?»
TonysedemandasiLibbysedoutaitdugenred’idéesqueluidonnaitleterme«persuader».Ilétaitàpeuprèssûrqu’ellepouvaitlepersuaderdetoutcequ’ellevoulait.
«Pasmoyen.»NicketJohnperdirent tous lesdeux.Tonydécidaqu’ils regarderaient tous lesDieHard,en
guisedecompromis.«Lapartiecommence!criaquelqu’undepuisleterraindesoftball.—Allons-y,ditTonyenentraînantLibby.—Jevaisjusteregarder.—Non,ilfautquetujoues,c’estlemeilleurmomentdelajournée!—Maisjeneconnaispaslesrègles.—J’avaisoubliéquetun’aimaispaslessportsd’équipe.Tutesouviensquandtuavaisvoulu
êtrepom-pomgirl?»Tonysecoualatêteenyrepensant.
«Bon,onvasepromeneralors.—Non,tupeuxjouer.Jevaisteregarder–ett’encourager,»ditLibbyd’untontaquin.Mais,finalement,Tonynevoulutpasjouer.Ilenmouraitd’envie,maiscettejournéeétaitpour
Libby.Alorsilsallèrentsepromener.Ilyavaituncheminquitraversaitunpetitbois.Et,siTonysesouvenait bien, un ruisseau avec un pont romantique. En prenant Libby par la main, Tony prit ladirectionduruisseau.Leboisétaitsuffisammentdensepourqu’ilssoiententièrementisolésduresteduparc.Ilsétaienttoutàcoupseuls.Tonynepensaitdéjàplusàlapartiedesoftball.
«Qu’est-cequec’est?ditLibbyenmontrantquelquechoseausommetd’unarbre.—Ilmesemblequec’estunoiseau rare, l’hirondelledesboisà longuequeue !»ditTony
sansmêmeleverlesyeux.Libbyricanaetleforçaàleverlatête.«Ah,ça,ditTonycommes’ilvenaitjustederéalisersonerreur.Ondiraituncerf-volant.»Justeau-dessusd’eux,uncerf-volantétaitcoincédanslesbranchesd’unarbre.«Aide-moi.»Libbys’étaitdéjàmiseàgrimperàl’arbre.Tonyl’aidaàsehisserenessayantdenepastrop
mater son cul… Il fallut un moment à Libby pour atteindre le cerf-volant, puis encore quelquesminutespourledécoincer.L’espaced’uninstant,Tonyeuttrèspeurqu’ellenetombe.
«Attentionenbas!»Lecerf-volant,unpeudéchiré,volajusqu’àterreetLibbysemitàredescendre.«Hmm…Jecroisqueçavaêtreplusdurdanscesens-là.»Tonyl’aidaenluidonnantdesinformationssurcequisetrouvaitsoussespieds,etbientôtelle
arrivaitàladernièrebranche.«Jetetiens,»ditTonyenlaprenantparlataillepourl’aideràdescendre.Et,dansunmouvementgracieux,LibbytournoyadanslesbrasdeTonyetseretrouvaserrée
contrelui,ledosappuyécontrel’arbre.Oh,c’étaitbeaucoupmieuxquedejouerausoftball!Tonynefit pasmine de reculer, au contraire, il avança un de ses genoux entre ceux deLibby en inspirantprofondémentsonparfumdelavande.Tonyretiradélicatementunebrindillequis’étaitprisedanslescheveuxdeLibby,puissamainluicaressalajoueetilsepenchaunpeuplus…
«Qu’est-cequec’est?»ditLibbyensursautant.Ilstendirentl’oreilleetentendirentunevoix.«Ilyaunruisseauavecunjolipontjusteauboutduchemin,»ditNick,lecousindeTony,en
apparaissant au détour du chemin. Il tenait une jolie blonde en robe rose serrée contre lui et luicaressaitlecoutoutenmarchant.
Tonyseredressaets’écartadeLibby.Ilsouffraitlemartyre,maisungentlemanneselaissepas surprendreen trainde tripoter sademoiselledans lesbois. Il fitunpetit signeàNicket à sonamie,maisilsnesemblèrentpaslevoir.
« On dirait que Nick a des projets, dit Libby en riant et en rajustant ses cheveux et sesvêtements.
— Ouais, on dirait bien, répondit Tony d’un ton un peu agacé. On teste notre dernièretrouvaille?»ajouta-t-ilensepenchantpour ramasser lecerf-volant,avantdereprendre lecheminpoursortirdubois.
CHAPITRESEIZE
Unmois avaitpassédepuis la réunionde familledesMarchetti.LemariagedeMelet Johndevait avoir lieu dans deux semaines. Les commandes de pâtisseries étaient chaque jour plusnombreuses,etLibbyétaitauseptièmeciel.Laviesemblaitluiapportertoutcequ’elledésirait.Enfin,presquetout.Depuislaréuniondefamille,Tonyvenaitsouventlavoir.Cequin’étaitpasvraimentunproblème,puisqueLibbyaimaitpasserdutempsaveclui.Ilssemblaienttoujoursavoirunehistoireouuneblagueàseraconteretilsnes’ennuyaientjamaisensemble.Maisl’avoirsiprèsd’elle,sentirses regardsseportersurellede lamêmemanièrequece jour-làdans lesbois–ellenesavaitpasquoienpenser.EllenevoulaitpasêtreamoureusedeTony–enfin,elleétaitpresquesûredenepasvouloirêtreamoureusedelui.
Commeconvenu,ilsavaientregardétouslesDieHardàlasuite,danslesalondeStuart,carTonyn’avaitpasencoredemeublesdanslesien.EtLibbytrouvaitcelapresqueattendrissant.
Tonyvenaitparfoislaretrouveràlapâtisseriepourdéjeunerensemble,etunefoisqu’elleeutrenouvelésoninscriptionauYMCA,ilpritl’habitudedelarejoindredeuxoutroisfoisparsemainepoursonjoggingdumatin.Lasemainedernière,Tonyl’avaitemmenéeàlaplageetilsavaientbâtides châteaux de sable. La présence de Tony commençait à lui devenir indispensable, comme unoxygènequotidien.
«Alors,là,j’aiunedecesnouvellesàt’annoncer!»Libby adorait queMel l’appelle au téléphone – la voix de son amie était toujours si pleine
d’enthousiasme!«Quoidonc?—Devineàquijeviensdeparlerautéléphone–nontunedevinerasjamais–etilvat’appeler
bientôt!—Alorstuferaismieuxdecracherlemorceau.—Gio,criapresqueMeldansletéléphone.Libby?Allô?—Gio?MonGio?”Libbyne savait pasquoidire.Pourquoi est-cequeGio avait appeléMel ? Ils s’étaient écrit
quelques lettres et e-mailsdepuisqueLibbyavait quittéRome,maisGione l’avait pas exactementharceléd’appelstransatlantiques.Entoutefranchise,elleenavaitconcluqu’ilavaitoubliésonprojetdevenirlavoirauxÉtats-Unis,ouqu’ilavaitchangéd’avis,entoutcasqu’ilnetenaitpasplusqueçaàcontinuerunerelationavecelle.Qu’est-cequ’elleauraitpuattendred’autre?Qu’ilchamboulesonexistencejustepourvenirêtreavecelle?
«CombiendeGioest-cequ’onconnaîttouteslesdeux?—Franchement,jecroyaisaucun…Pourquoiest-cequevousvoustéléphonez?—Ilvientàmonmariage!»Libbyenlâchaletéléphone.«Pardon…quoi?—Jeluiaienvoyéuneinvitation.C’étaitjustepourlegeste,évidemment–jen’auraisjamais
penséqu’ilallaitaccepter.Ildoitvraimentêtreamoureuxdetoi,mapoulette!Ettunem’avaispasditàquelpointsonaccentétaitcharmant!
—J’aiunappel,Mel!Àplus!»C’étaitlui.LibbyétaitheureusederevoirGio.Ilavaitembauchéunnouveaugérantpourlerestaurantetil
avaitterminésontrimestreàl’institutculinaire.LasurprisedeLibby,quandilavaitannoncésavisite,l’avaitfaitrire.
«Betta!Onenavaitparlé.Jet’aiditquejevoulaisvoirl’Amérique,etc’estvrai.Ettevoirtoi.Jemesuisorganisé,jepeuxresteraumoinsunmois.»
Libbysedemandaitcequ’ilvoulaitdireparaumoins.Gio était arrivé quelques jours plus tard, un vendredimatin. Libby était allée le chercher à
l’aéroport et, commedans son souvenir, il était d’une beauté désarmante.Elle retrouva aussi cetteimpressiond’irréalitéqu’elleavaitdéjàconnueensacompagnie.Ilss’étaientjetésdanslesbrasl’undel’autre,àl’aéroport.Enfin, ilsavaientmarchérapidement,puisGioavaitsoulevéLibbydeterrepourluidonnerunbaiserdigned’unecomédieromantique.C’étaitunpeugênant,pourtoutdire,avectoutlemondequilesregardait.
«Jet’aimanqué,Betta?—Biensûr,Gio!»Etc’étaitvrai.Cen’étaitpasdelafautedeGiosiellen’avaitguèreeuletempsdepenserau
faitqu’illuimanquait.«Quelquechosenevapas?—Non.Non.C’estjuste,tusais,onestàl’aéroport,lesgensnousregardent…— Ah. Et tu crois que Gregory Peck n’aurait pas embrassé Audrey Hepburn dans un
aéroport?— Des deux, c’était Gregory Peck l’Américain, » le corrigea Libby comme si cela avait
contreditsonargument.IlsavaientregardéVacancesromainesplusieursfoisl’annéepassée.Danslefilm,lehérosétait
américainetl’héroïneeuropéenne.«Désolépour…»Libbyfitungesteendirectiondelaportevitrée,pourindiquerlemauvaistempsàl’extérieur.
Libby aurait aimé qu’il ne pleuve pas pour l’arrivée deGio.Mais, dans la nuit, une averse s’étaitdéclaréeetavaitfaitsortirpleindeversdeleurtrou.Engénéral,Libbyaimaitbienlapluie,maispaspourcetteoccasion.
Ilsemoquad’elle.Libbyavaitpresqueoubliéàquelpointilpouvaitêtremoqueur.Etaussiàquelpointelletrouvaitçaagaçant.
«Ildevraitfairebeaulerestedelasemaine,dit-ellesurladéfensive.—Ah,miaBetta.Tut’excusespourlemauvaistemps?»Ilriaitencoretoutenluidéposantunbaisersurlefront.«Tum’asmanqué.»
Libbydécidadeluipardonnersesmoqueries.Giovoulaitalleràsonhôteletse reposeraprèssonvol.Libbysesentitcoupabledenepas
l’avoirinvitéàdormirchezStuart.SamèreétaitendéplacementpourunatelierdepâtisserieetStuartétaitallélarejoindrepourleweek-end.Celalagênaitdéjàderesterlàtouteseule,maistouteseuleavecGio?Cen’auraitpasétéunebonneidée.Ilsconvinrentdoncqu’elleviendraitlechercheraprèsledéjeuner etqu’elle luimontrerait laboutique.Mel et Johnarrivaient aussi ce soir-là. Ils allaientséjourner chez les parents deMel pendant les deux semaines qui leur restaient pour organiser lemariage.Melvoulaitabsolumentêtreàl’aéroportavecLibbypouraccueillirGio,maiselleavaitfiniparselaisserconvaincreden’enrienfaire,enéchangedelapromessequ’ilsseretrouveraienttousdansunbarlesoirmême.
Gioavaitadorélapâtisserie.Après,ilsavaientfaituntourenville.Ilsavaientétévoirl’ancienlycéedeLibbyetleparcoùMeletelleallaientjouerquandellesétaientpetites.LibbytrouvaitétrangedemontrertoutcelaàGio,sanstropsavoirpourquoi.Entoutcas,iln’avaitpasl’airdes’ennuyer.Ilavait plein de questions sur son enfance, puis sur ce qu’elle avait fait depuis qu’elle était rentréed’Italie, sur son idée d’ouvrir un commerce de traiteur. Il avait même un tas de conseils quant àl’endroitàchoisirpoursaboutique,lemomentvenu.Libbyn’étaitpassûred’apprécierquelaréalitévienneenvahirsonaventureeuropéenne.
Lesoir,quandilsavaientretrouvéMeletJohn,Libbys’étaitunpeudétendue.Elleaimaitbien
cebar.Cen’étaitpasundecesclubschicscommeceuxoùGiol’avaitemmenée,maiscen’étaitpasun bouge non plus. Libby le fréquentait depuis quelques semaines et elle s’y plaisait. Il y avait engénéralungroupequijouaitassezbienpourfairedanserlesgens,maissansquecesoittropfort,etlesboissonsn’étaientpastropchères.Libbypensaitquelasoiréesepassaitplutôtbien.Giosemblaits’entendreavecsesamis–mêmeavecJohn.
«Ah oui, l’aventure européenne ! » s’était exclamé John avec son habituelmanque de tactquandLibbylesavaitprésentés.
Toutenluiserrantlamain,Gios’étaitcontentédeleverunsourcilenregardantLibbyavantderépondre:
«Jesupposequec’estmoi,oui.—Ignore-le,Gio…c’estcequetoutlemondefait,avaitmurmuréLibby.—Untoastauxfutursmariés?»Gioavaitchangédesujetavecaisance,ensetournantversMel.«Etmesmeilleursvœuxàlamariée!»C’étaitlabonnetactique.Mels’étaitmiseàparleràtoutealluredumariageetdufaitqu’elle
avaittoujoursvoulusemariersuruneplage.EtsiMeln’étaitpasencoreentièrementconquiseàcestade, elle l’était définitivement lorsqu’il avait commandé du champagne pour « boire à leurbonheur».
«Ilestvraimentdélicieux,Lib,ditMelenseremettantdurougeàlèvresdevantlemiroirdes
toilettes.Etildansesuperbien.C’estimportant,qu’unhommesachedanser.»GioavaitobligeammentfaitdanserMellorsqueJohnavaitdéclaréêtrebientropsobrepour
seridiculiserenpublic.Cen’étaitpasqueJohnnedansaitjamais,maisilsecontentaitdebougersurplace,tandisqueGioavaitpassétoutledébutdelasoiréeàfairevirevolterLibbyd’unemainexperte.
«Oui,ilestgénial,»approuvaLibby.Melluilançaunregarddanslaglace.«Çanet’embêtepasquejel’aieinvité,si?—Non,biensûrquenon.Jesuiscontentedelevoir,protestaLibby.
—Okay,super.Parcequec’estclairqu’ilt’adore.»Melseretournaenfermantsonsacàmainavecunclaquementsec.«Tonyvapasseraussiplustard»,dit-elled’untondétaché.Ce qui était une sacrée surprise. Libby n’avait pas vu Tony depuis le mercredi précédent,
quandilsavaientétéprendreuneglaceetqueLibbyluiavaitditqueGioallaitluirendrevisite.Tonyavait été un peu étrange depuis cemoment-là. Elle s’était demandé si c’était de la jalousie, ce quil’avaitagacée,carilavaitrenoncédepuislongtempsàsondroitd’êtrejaloux.Tonyavaitclairementannoncélegenrederelationqu’ilrecherchait–etcelan’intéressaitpasLibby.
«Parfait.C’estbienqu’ilpuisserencontrerGio.»Deretouràleurtable,ilstrouvèrentJohnoccupéàtenterdeconvaincreGioquelebase-ball
étaitsupérieuràtouslesautressports.Libbyperçutl’ombred’unsouriresurlevisagedeGioetvitque celui-ci était plus amusé qu’autre chose par l’attitude de John. Peut-être, pensa-t-elle, lesAméricainsétaient-ilsplusdrôlesqu’ellenelecroyait.
QuandTonyentradanslebar,Melfitdegrandssignespourattirersonattention.«Ouah,heureusementquejet’aitrouvée,sœurette,danscettefoule,ditTonyenregardantla
pièceàmoitiévide.—Haha,trèsdrôle,»réponditMelenluidonnantunetapeamicale,avantdetirerunechaiseà
sonintention.Tonyl’ignoraetchoisituneautrechaiseàcôtédeLibby.Bizarrement,cetteprésentationfutplusdélicate.Enréalité,Libbysavaitpourquoi,maisellese
força à ne pas y penser. Elle trouva amusant de devoir faire un tel effort juste pour avoir l’airnormale.
«Lecuistot,ditTonyeninclinantlatête.—L’écrivain,ditGiod’unevoixrauque.—C’estça.Montroisièmeromanestsurlalistedesbest-sellers.»Tonyavaitclairementtentédedirecelad’unairblasé,maissonexcitationétaitévidente.Latabléeexplosadejoie.MeletLibbyembrassèrentTonyenmêmetempsetJohnpoussaun
hurlementsauvage.Sanscesserdesourire,Tonyexpliquaqu’ilvenaitd’avoirsonagentautéléphone,etquemêmesic’étaitaubasdelaliste,cequicomptaitc’étaitd’yêtre,surlaliste.D’ungestedelamain endirectionde la serveuse,Gio commandaune autre tournéede champagnepour fêter cela.Plustard,JohnboiraitleverreauquelTonyn’avaitpastouché.
«MiaBetta.Tesamisonttellementdetalent.—C’estclair.»LibbyétaittropexcitéepourTonyetneserenditpascompteduchangementd’attitudedeGio.«Commenttul’asappelée?demandaMeldepuisl’autrecôtédelatable.—C’estmonnomenitalien,ditLibbyenrougissant.Gioditquetoutsonnemieuxenitalien.—Cen’estpasjustesonnom,»marmonnaTonyd’untonsibasqueLibbyputfairesemblant
denepasl’avoirentendu.Mel détourna rapidement la conversation en demandant une leçon d’italien.Gio lui fournit
polimentlatraductiondetouteslesphrasesquiluivinrentàl’esprit.«Ilaraison!Toutsonnevraimentmieux!»Elleouvritgrandlesyeux.«John,etsionfaisaitnosvœuxenitalien!Çaseraittellementromantique!—Commetuveux,chérie,maisceseraitpeut-êtrebiensinosinvitéscomprenaientcequ’on
dit.Voire,j’aimeraisbiencomprendrecequejedis,moiaussi.Etpuisj’aidéjàapprislesmiensenanglais.»
LevisagedeMelsefigeaquelquepeu.« Je suis sûr que la cérémonie sera parfaite telle que vous l’avez prévue, dit Gio d’un air
distrait.—Tuasraison,biensûr,ditMelenretrouvantsonentrain.Hé,Libby,cen’estpascommeau
bonvieuxtemps?Quandonsortaitdanslesbarslevendredisoir?J’aipresqueenviequ’onchanteUndertheSea.
—Euh,etsiondisaitjustequ’onl’afait?réponditLibbyenregardantautourd’elleetensedemandantcombiendeverresMelavaitbu.
—Bien sûr, tuesbête.C’estdommageparcontrequemesparentsn’aientplusdechambred’amis,onauraitpusefaireunesoiréepyjama,ettun’auraispasdûdormirtouteseulechezStuart.»
MelfitunregardpastrèsdiscretendirectiondeGio.Libbypensaqu’ellepréféraitencoredormirtouteseulequedeparticiperàunesoiréepyjama
quiincluraitJohn.«Çaira.—J’aiunesuiteàl’hôtel,murmuraGiod’unevoixsourde.Avecuncanapé-litsympadansle
salon,ajouta-t-ilenvoyantlevisagedeLibbyprendreuneexpressiondepanique.—J’aiunechambred’amis,»criapresqueTony.Ilsecalmaavantdereprendre.«Tupeuxdormirdansmachambred’amis,Libby.—Nesoispasridicule,grandfrère,ditMeld’untonglacial.Tun’asmêmepasdemeubles.»CesurquoiGiolevaunsourcilcurieux.«J’aidesmeubles,sedéfenditTony.C’estjustequejen’aipasencorechoisimonsalon.»IlsetournaversLibby.«Machambred’amis est à tadisposition,Lib.Et tun’asmêmepas encorevumanouvelle
maison.Restepourleweek-endsituveux–ceseracommeaubonvieuxtemps.»TonyeutunregardappuyépourGio.«Hmm.Ouais,peut-être.Jen’avaispastropenvied’êtreseulechezStuart.Et–ellesetourna
versGio–jeneveuxpast’envahir.»Enselevant,Libbyannonçasonintentiond’allerserepoudrerauxtoilettes.«Commandez-moi quelque chose si la serveuse vient, okay ? » lança-t-elle par-dessus son
épaulesansparleràpersonneenparticulier.Laserveusearrivabientôt,cequin’étaitpasunesurprisevuqu’ellevenaitvoirsiGion’avait
besoinderien toutes lescinqminutes.QuandGiodansait,Johnallaitchercher lesboissonsaubar,c’étaitplusrapidecommeça.Biensûr,laserveusecommençaparGio–deuxverresdevinblanc–,etelleregardaàpeinelesautresenprenantleurcommande.Tonydemandaunverred’eauetunCocacerise.QuandLibbyserassit,elletrouvaunverredevinetunverredesodaàsaplace.Elletenditlamain vers le soda et Tony put à peine contenir une danse victorieuse.Mais sa joie ne dura qu’unmoment.
«Ballare ? » murmura Gio en posant la main sur celle de Libby. Ils échangèrent un petitsourireetselevèrentd’unmêmemouvement.
«Betta,jet’aiditquej’aiuneamiequiaunrestaurantàNewYork?»GiotenaitLibbyprèsdelui,enoscillantaveclamusique,maisdemanièreàpouvoirdiscuter
tranquillement.«Ah?TuveuxallerfaireuntouràNewYorkpendantquetueslà?Tudevrais, tusais.Le
mieux,c’estenautomne,maisl’étéestbienaussi.—Peut-être.»GioobservaitLibbyd’unemanièrequilamettaitmalàl’aise.Commes’ilessayaitdeprendre
unedécision.
«Monamie,Elaine,elleadéménagéàNewYork,maisellerevientenItalietousleshivers.Jemesuisdit récemmentque jepourrais faire lamêmechose.Peut-être sixmois ici, et l’automneetl’hiveràRome?»
Libbyleregarda,surprise.—Tuveuxpassersixmoisdel’annéeàNewYork?Gioinspiraprofondément.«Non,jepensaisplutôtàlaCarolineduNord.Etquepeut-êtretuvoudraispasserleshiversà
Rome.»Libby comprit tout à coup. Gio voulait vivre avec elle. Ici et à Rome. Il fallait sans doute
qu’elleréponde–dèsqu’elleauraitreprissonsouffle.«Ah,miaBetta.Jen’aijamaiseulamoindrechance,ondirait.»Libbyétaitencoretropoccupéeàremplirsespoumonspourparveniràfourniruneréponse
cohérente.«Hmm?—Contrelegrandfrère,là,jen’aijamaiseumachance,pasvrai?—Quoi?Non,biensûrquetuavais…quetuas!Biensûrquetuastachance.C’estjusteque
c’estunchangementimportantpourtoi,etjenesuispassûre…Maisjeveuxêtreavectoi,Gio.—Non,Betta.Jecroisquetuvoudraisvouloirêtreavecmoi.»Giol’embrassadélicatementetposasonfrontcontrelesien.«Onauraitpuêtreuncouplegénialtouslesdeux,tusais?»Libbysoupira.«Jecroisqu’onapeut-êtrejustebesoindetemps…—Jelecroyaisaussi.Jesavaisqu’ilyavaitencorequelqu’uniciquicomptaitpourtoi,mais
jedoisadmettrequej’espéraisqueletempsetladistanceauraienteuleureffet–surlui.Cen’estpasgrave.Jevoisbiencommentvousvousregardezetjeveuxquetusoisheureuse.
—Tony.Ilnemevoitpascommeça,admitLibbypiteusement.—Alorsjecroisquec’estunimbécile.»CesmotsfirentrireLibby.«TutesouviensdemaNona?—Biensûr.»L’automneprécédent,Libbyavaiteulemaldupays.Romeétaitsplendide,maispersonnene
fêtaitThanksgiving.AlorsGiol’avaitemmenéechezsagrand-mère,Nona,quiluiavaitpréparéundînerdeThanksgivingmémorable.Biensûr,elleavaitservideszitietdelabruschettaavecladinde,maisLibbyconsidéraitquec’étaitl’intentionquicomptaitleplus.
«Tusavaisqu’elleetmongrand-pèren’ontétémariésqueseizemoisavantqu’ilnesoittué?—C’estterrible.—Ne dis pas ça devant elle, dit Gio avec un sourire. Nona considère qu’elle a reçu plus
d’amourpendantcesseizemoisqued’autresn’enconnaissentdetouteleurvie.Elleditqu’elleaeudelachance.Etellenes’estjamaisremariée–elleditquecertainsamoursdurenttoujours.
—C’est trèsbeau.Triste,maistrèsbeau,murmuraLibbyenpensantàNonavivantavecsessouvenirstoutescesannées.
— C’est le genre d’amour que je cherche pour moi-même. Je crois que je vais aller àNewYork.Demainmatin.
—Demain.—Si.J’aiquatresemainesdevacancesetj’aiditquejevoulaisvoirl’Amérique.Jerepasserai
pariciavantderetournerenItalie.Etjecroisqu’ons’entendratrèsbien–enamis.—Merci,Gio.»
Libbynesavaitpasquoidired’autre.«Merci,Betta,monaventureaméricaine.Viens.Onvaletaquinerunpeu,d’accord?ditGio
avecunelueurdanslesyeux.—Tuveuxm’aideràrendreTonyjaloux?»GioeutunpetitrireetfittournoyerLibbyavantdelaramenerverslui.«Tonyettousleshommesquisontdanslapièce.Tunesavaispasquetoutlemondeestjaloux
demoicesoir?»Lerestedelasoiréesepassasansincident.GiocontinuaàprovoquerTonyetTonyàtrembler
de fureur en entendant les mots mia Betta. Mais ils parvinrent tout de même à s’amuser tousensemble.QuandGioditqu’ilétait fatiguédesonvolet se levapour rentreràsonhôtel,Libby leraccompagnaàlaporteetl’embrassatendrement.
«Onsevoitdansunmois?—Dansunmois.»Illuifitunebisesurlajoue,etdisparut.
CHAPITREDIX-SEPT
PeuaprèsledépartdeGio,MeletJohnlesuivirent.«Prête,Lib?»demandaTonyd’untonsourdetpresqueboudeur.Ilétaitdéjàdebout.«Oh,»fitLibby.Ellesesouvintd’avoirconvenudedormirdanssachambred’amis.«Hmm,ouais.JecroisquejevaisplutôtallerdormirchezStuart.»Tonysecoualatête.« Tu as bu, pas question que tu conduises. Je peux te servir de chauffeur, mais je rentre
directementchezmoi.Enroute.»Tony savait trèsbienqueLibbyn’avait rienbudepuisplusieursheuresetque lamaisonde
Stuart était plus oumoins sur son chemin, de tellemanière qu’il aurait très bien pu la déposer enrentrantchezlui.Maisilvoulaitêtreseulavecelle.IlavaitdétestédevoirlapartageravecGiotoutelasoirée.Quellebêtise,cetteidéedenepasallertropvite!Ilauraitdûl’attendreàl’aéroportavecunprêtre à ses côtés.Àprésent, il était forcéde rivaliser avec la version italiennedeDanse avec lesstars,aulieudusimplesouvenird’unepassadedevacances.Maisiln’étaitpasprêtd’abandonner.Pasquestion.Jamais.
Tonyremuadesidéesnoirespendanttoutletrajetduretour.IldétestaitGio!Illehaïssait.EtMelavaitbienditqu’ilétaitplusâgéqu’eux,maisenfin!C’étaitunvieillard!Etlafaçonqu’ilavaiteu de la toucher toute la nuit ! Tout le temps en train de caresser son bras, de faire semblant derajuster unemèchede cheveux inexistante.C’était profondément ridicule.Tonyavait à peinepu seretenir de prendre Libby par le bras et de s’élancer vers la sortie quand il avait entendu pour lapremière foisGio luimurmurermiaBettad’unevoixchaude.Mia, c’est àdire«mienne».Graveerreur,monpote,pensaTony,çafaitdesannéesqueLibbyestàmoi…c’estjustequ’ellenelesaitpasencore.Maisçan’allaitpastarder.Tonydevaitsimplementtrouverlebonmoyendeleluimontrer.Commentpouvait-illaconvaincre?
«Euh…onyest?»Tonyse renditcomptequ’ilétaitgarédevantchez luiet il sedemandacombiende temps il
étaitrestélà,perdudanssespensées.«Oui,désolé,Lib.Jedoisêtrefatigué.Ouaip.Onyest.»Tony et Libby durent courir jusqu’à la porte d’entrée. Les gouttelettes du matin s’étaient
transforméesenunevéritableaverse,puisenundéluge,etàprésentilsemblaitqu’unoragesoitsurlepointd’éclater.LamaisondeTonyétaitdestylevictorien. Ilyavaitunepetitevérandaavecune
balancellejusteàgauchedelaported’entrée.Unbelendroitpourfonderunfoyer,pensaLibby.Unefoisàl’intérieur,Libbyregardaautourd’elleetéclataderireenvoyantl’étatdusalon.
«Etmoiquicroyaisquetun’avaispasdemeubles!letaquina-t-elleenselaissanttombersurunechaisedejardinenplastique.L’unedesquatrequicomposaienttoutlemobilierdelapièce.
—Jenevoulaispasavoirl’airdefrimer,ditTonyens’asseyantenfaced’elleetens’étirantd’un air las. Je vais bien finir par acheter desmeubles, continua-t-il plus sérieusement, avec cettenouvelleconcernantmonlivre,jenedevraisplusavoirdeproblèmesd’argent.»
Libbyhochalatêted’unairfatigué.«C’est super, Tony.Mais tu n’as pas à te justifier devant une fille qui vit toujours dans la
minusculechambred’amisdesonbeau-père.Montre-moilereste!»s’exclama-t-elleenjaillissantdesachaise.
Lacuisineétaitspacieuseavecunîlotaucentredelapièce,etellemenaitàunepièceàvivretoutaussiagréable.Enbonnepâtissière,Libbyremarqualesvastesplansdetravailetledoublefour.C’étaitlacuisineidéale.Spontanément,desimagesdeTonyvêtud’untablierroseetenfournantdescookiesdanssaboucheluivinrentàl’esprit.
«Tuveuxquelquechose?J’aidujus,maisc’estàpeuprèstout,ditTonyenpassant la têtedans le réfrigérateur. Désolé, je mange souvent au restaurant. Il doit y avoir de quoi faire de lalimonade,jepense.»
Tony fouilla les étagères vides, comme si le fait de déplacer leur contenu pouvait faireapparaîtredenouveauxingrédients.
«Çaira,merci,Tony.»Libbyfitletourdesdeuxpièces.Ellesluiplaisaient.Toutelamaisonluiplaisait.Elleaimaitse
retrouver là, seule avec Tony, si tard le soir, dans son intimité. Cela lui rappelait leurs parties deMonopoly,maisenmillefoispluspuissant.Etc’estalorsqu’ellecomprit–dansunéclairdelucidité!Non,enréalitél’éclairétaitdûàl’oragequiéclataitaudehors,maisl’effetsurLibbyfutidentique.Deboutdanslacuisine,gouttantlégèrementsurlecarrelage,elleregardaitTonys’inquiéterbêtementdecequ’ilpouvaitluiserviràboire,etelleréalisaqu’elleétaitcommeNona.Tonyluiavaitenlevélapossibilitéàjamaisdetomberamoureused’unautre.Mêmeunchefcuisinieritaliensupersexyquil’adorait et qui était prêt à réorganiser sa vie pour elle,même cela ne suffirait pas à changer sessentiments.ElleallaitêtreamoureusedeTonypourlerestedesesjours.Mince.
« Bon, alors je te promets le meilleur petit-dej’ à emporter demain matin, » dit Tony enrenonçantàchercher.
IlseretournaetvitLibbyquiavaitleregardperdudanslevague.«Tuasl’airfatiguée.Tuveuxvoirtachambre?—D’accord.»LibbysuivitTonysansréfléchir.Ilsmontèrentdesescaliersenspiralecouvertsdemoquette.
Charmant,pensa-t-elle.Commelerestedelamaison,etcommeTony.«Là,c’estlasalledebains.Ilyenauneautredansmachambre,donctupeuxavoircelle-là
justepourtoi,etmachambre,c’estcetteporte-là.»Mêmesiellen’avaitpasbesoindelesavoir,sereprochaTonyintérieurement.«Ettoitueslà.»Tonyouvrit laporteet révélaunechambred’ami,meublée intégralementdumobilierdesa
chambred’enfantchezlesMarchetti.«C’estpourçaquetesparentsn’ontplusdechambred’ami,»letaquinaLibbyenentrant.Maisquelquechosen’allaitpas.Quelétaitcebruit?Ilsenvirentlacauseaumêmeinstant.«Merde!»lançaTonyenseruantverslelit.Celui-ciétaittrempéetl’eaucontinuaitdegoutterfortementduplafond.
«Lematelasestfichu,gémitTonyenécartantlescouvertures.Tuneconnaîtraispasunboncouvreurparhasard?
—Désolée,non,réponditLibbyensecourantlatête.C’estvraimentgrave?—Pasautantqueçaauraitpu.Enfait,lelitaprotégélesol,c’estl’essentiel.Etjesavaisquela
toitureavaitbesoindetravaux,jen’aijustepaseuletempsdem’enoccuper.Jesupposequej’auraismieuxfait.»
Ilsepassalamaindanslescheveux.«Bon,ilfautlimiterlesdégâts.»Ilsortitdelapièceencourantetrevintavecunegrandebâcheenplastiqueetungrandvase.Ils
poussèrent le lit sur le côté, étendirent la bâche sur le sol et placèrent le vase à l’endroit où l’eaugouttait.PuisTonyemportalesdrapsdanslabuanderie.
Ayantfaittoutcequ’ilspouvaient,TonyetLibbyseretrouvèrentfaceàfacedanslecouloir.Ilnerestaitplusqu’unseullit.
«Jesuisdésolé,Lib.Bon,tuvasprendremachambre,etjevais…—Dormirsurlecanapé?interrompitLibbyavecunsourire.—Parterre,jesuppose,»terminaTonyenfaisantlagrimace.LibbysavaitqueleplussimpleseraitdeluidemanderdelaconduirechezStuart.Maisquelque
choses’étaitmisàlatracasserdepuislarévélationqu’elleavaiteuedanslacuisine:ellen’étaitpasvraimentcommeNona,carNonaavaiteuseizemoisdebonheurdontellepouvaitsesouvenir.Libbyétaitpeut-êtrecondamnéeàvivredans la solitude,maisdanscecasellevoulait aumoinsavoirunmomentdontsesouvenir.
«Onpourraitpartager?»dit-elled’unevoixquisevoulaitsensuelle.Ellen’avaitpaseusouventl’occasiondejouercerôleetelleimprovisaitaufuretàmesure.«Jeveuxdire,onestdesadultesetdevieuxamis…Jesuissûrequ’onpeutpartagerunlitsans
qu’ilyaitdeproblème.»Là,elleavaitpeut-êtrepassélalimiteentresensuelleetpétasse.Maisellejouaitsesdernières
cartes,doncpeut-êtreque«pétasse»étaitnécessaire.EtsiTonyn’avaitjamaiseupourelled’autreintérêtqueceluid’unesimplepartenairesexuelle–peut-êtreque«pétasse»,c’étaitbien?Non,elleavaitsadignité,toutdemême.
Tonyavaitlabouchesèche.Etsoncerveaun’étaitpasloind’êtredanslemêmeétat–toutsonsangsemblaitavoirquittécettepartiede soncorps.Est-cequeLibbyavait tropbu?Est-cequ’ellesavaitcequ’elledisait?Ilessayadecomptercombiend’heuress’étaientécouléesdepuissondernierverredevin.Lui-mêmen’avaitbuquedel’eautoutelasoirée.Enguisedepunition,ils’étaitimposéd’entendretouscesmiaBettaaveclatêtesobre.IlétaitpresquesûrqueplusieursheuresavaientpassédepuisledernierverredevindeLibby–presquesûr,maispasentièrement.
«Tony?—Oui,onpeutpartager.Pasdeproblème.»Ilnepouvaitpasfaireça.Enfin,biensûr,ilpouvait.Physiquementilenétaittoutàfaitcapable.
Maisçanesefaitpas,decoucheravec la femmequ’onaimepour lapremièrefoisalorsqu’elleapassé lanuitàboireetàdanseravecunautrehomme.Pascesoir,en toutcas.Demain,c’étaituneautreaffaire.
«Hmm.Attends-moilàuninstant.»Tony seprécipitadans sa chambre etLibbyentendit desbruits sourds. Ilmettait de l’ordre,
pourelle!Tropcharmant.«Bon,voilà,çadevrasuffirepourl’instant,»dit-ilenpassantlatêtedanslecouloir.Libbyavaitdespapillonsdansl’estomac,enentrantdanslachambredeTony.Celaressemblait
tantàcesnuitsqu’ilsavaientpasséesàjouerauMonopoly,quandilsétaientadolescents.Saufqu’ils
avaientgrandietquelesparentsdeTonynedormaientplusauboutducouloir.Etpuisilsn’avaientpasdejeudeMonopoly.
«Sympa,commentaLibbyenregardantlachambreàcoucher.Lelitétaitgrandetpresquefait.Ellesoupçonnaqu’ilvenaitjustedetirerlacouvertureàl’instant.Unegrandefenêtredonnaitsurlejardin,mêmesiàprésentl’obscuritérégnaitau-dehors.D’uncôté,uneportequimenaitsansdouteàlasalledebains,del’autre,plusieurscommodesassortiesauxtablesdenuit.
«Ouais,j’aimebien.»Tony voulait qu’elle adore. Il voulait lui dire qu’il avait tout acheté pour elle – le lit, les
commodes,toutelamaisonétaitpourelle.Çafaisaitpartiedesonplanpourluimontrerqu’ilpouvaitluioffriruneaussibelleviequen’importequelcuistotitalien.
«Tony?—Ouais?—Jen’aipasdepyjama.—Quoi?—Tuvoulaisrentrerdirectementcheztoi.—Ah,oui.»Ilavaitétéunpeudésagréable,aumomentdepartirdubar,maisilavaittantattendud’avoir
Libby touteà lui–etellequiavaitditvouloir rentrerchezStuart.Ouais, il avait étéunpeusec. Ilauraitaumoinspuluipermettredeprendredesaffaires.
«Tuveuxquejeteprêteuntee-shirt?»Il n’allait jamaispouvoirdormir si elle était allongéeprèsde lui vêtue seulementd’un tee-
shirt.Maisildoutaitpouvoirdormirdetoutefaçon.«J’aiuncaracoendessousdeça…Situavaisuncaleçonouunboxer?—Biensûr,attends.»Sanstropsavoircequ’ilfaisait,Tonyallaprendreunboxerdansl’unedescommodes.Ilse
demandaàquoipouvaitbienressembleruncaraco.Sansdouteunesortedemaillotdecorps.Ilsortitdesoreillersd’unplacardetsemitàlesaligneraumilieudelit.
«Euh,justeaucasoù,»marmonna-t-ilquandillavitleverunsourcil.Biensûr.Libbyeneutuncoupaucœur. Iln’avaitclairementpasperçuseseffortspourêtre
sensuelle,oupétasse,ouquoiquecesoit.Iln’avaitpasl’intentiondeprofiterdelasituationetellesehaïssaitdenepas savoirêtreplusdéterminée.Cen’étaitpascommecelaqu’elleallait se fairedessouvenirs.
«Bon,jevaismechangerdanslasalledebains.»Découragée,Libbysortitutiliserlasalledebainsducouloir.Ellesuspenditsarobeau-dessus
delabaignoirepournepaslafroisseretretournadanslachambredeTony.Ahbon, ce n’était pas unmaillot de corps !Un caraco était apparemment un instrument de
torturefaitdesoieetdedentelle.Tonyn’arrivaitpasàdétournerlesyeuxtantLibbyétaitbelle.Soncaracoétaitbeige(presquecouleurchair)etdesmorceauxdedentellejouaientaveclesommetdesesseins.Desseinsdontilvoyaitclairementlecontournusouslasoie–letissuseplissaitlégèrementaubasducouetilsedemandacequ’ilverraitsiellesepenchaitenavant.
«Jevaisprendreunedouche.»Etbienfroide.«Nem’attendspaspourdormir.Tonypassadanslasalledebainssansunregarddeplus.»Ayantofficiellementéchouédanssonrôledeséductrice,Libbygrimpasursoncôtédulit,en
prenantsoindenepasfaireeffondrerlamurailled’oreillers,ets’endormit…auboutd’unmoment.Tony prit une longue douche froide. Puis il attendit, compta jusqu’àmille, replia toutes les
serviettes du placard, nettoya les toilettes, essaya de se rappeler des cinquanteÉtats desÉtats-Unisdansl’ordrealphabétique(iln’entrouvaque47–ah,etlaCarolineduNord,48!)puisilrentrasansbruitdans la chambreet seglissadans le lit, et attenditque le sommeil legagne.6 fois8 font48.7fois8font56.8fois8font64.
CHAPITREDIX-HUIT
C’étaitsonrêvepréféré.Tonyrêvaitdelavande,desoie,depeautrèsdouce.Danslameilleureversion du rêve, Libby était blottie contre lui, son sein couvert de soie lui remplissant unemain,tandisquel’autreseperdaitsurlacourbedesahanche.Normalement,saLibbyderêveneportaitpasdeshort,maispeuimporte,ilabaissalaceinturedecotonjusteassezpouremplirsapaumedepeauchaudeetdouce.LaLibbyde rêveémitun légermiaulement.Tonyouvrit lesyeux.Libby, lavraieLibby, était blottie contre lui. Son derrière doux et parfait pressé contre ses hanches, ses jambesemmêléesdanslessiennes.Entordantlatête,Tonyvitunepiled’oreillersaupieddulit.Quilesavaitbougés?Ahoui,biensûr.C’étaitluiquiétaitdumauvaiscôtédulit.Libbymiaulaànouveau.
Tony essaya de ne pas paniquer. Il essaya également de ne pas penser aux sensationsincroyablesqui l’attendaients’ilavançait soncorpsverselleneserait-cequ’unpeu.Maisc’était lapremièrechoseàfairepourqu’unefemmes’enfuieencriantdanslesbrasd’unautre:laviolerdanssonsommeil.Qu’est-cequiluiprenaittoutàcoup?Lentement,délicatement,ilremontalaceinturedushortdeLibby.Ilavaitencoreunbrasbloquésoussonépaule.Enretenantsonsouffleetenpriantpourqu’elleneseréveillepas,Tonylaserradélicatementcontreluietlafittournerjusqu’àpouvoirlibérersonbras.IlressentitunedouleurperçantedanssapoitrineendevantabandonnerlachaleurdeLibby.Sesbrasvoulaientlaserrerànouveauetnepluslalâcher,ildutsefaireviolencepourseleveretallerdanslasalledebainsprendreunedouchefroide.
Vingtminutesplustard,Tonyrevintdanslachambresurlapointedespieds,ens’interrogeant
surl’efficacitédesdouchesfroides.Ilévitadejeterlemoindreregardàsonlit.Toutcequesoncorpsexigeait, c’était qu’il se recouche et mène son rêve à son terme. Il ferait peut-être mieux de s’enaller?Lepetit-déjeuner:illuiavaitpromislemeilleurpetit-dej’àemporterquisoit,ils’ensouvenaitàprésent.Celaluiinspiraunpland’action:ilallaits’habilleretpartirchercherlepetit-déjeuneravantqu’elleneseréveille.Elleavaitsansdouteprévuquelquechoseaveclechefplustarddanslajournée,maisilspouvaienttoujoursprofiterdeleurmatinée.Enayantainsidécidé,Tonytraversalachambrejusqu’àsonbureau,afindelaisserunmotàLibbyaucasoùelleseréveilleraitavantsonretour.Maisunpetitbruitetunlégermouvementaucoindesonchampdevisionl’immobilisaaupieddulit.
TonypivotaetvitLibbyqui,lesyeuxtoujoursfermés,s’étaittournéesurledos.Ledrapetlacouvertureavaientdescendujusqu’àsatailleetl’onvoyaitdistinctementlaformedesamainsoussoncaraco. Cloué sur place, Tony sentit son corps se contracter presque douloureusement. Il laissaéchapperungrognementavantdepouvoirsecontrôler.
Soudaincomplètementéveillée,Libbyouvritlesyeux.Réalisantdansquellepositiongênante
Tonyl’avaitsurprise,ellelesrefermaaussitôt.«Bonjour,Lib.»LavoixdeTonys’élevaau-dessusd’elle.«Qu’est-cequetufais?»Elleosaluijeterunregard;sonvisageavaituneexpressionaffaméededésir.Biensûr,pensa-
t-elle,ilavaittoujoursétéattiréparsoncorps.C’étaitsoncœurdontiln’avaitquefaire.«Hmm.J’aifaitunrêve,dit-elleenrestantvague,àdessein.—Ondiraitbien.Tuveuxmeleraconter?»Parcequejepensebienquej’aifaitlemême,ajouta-t-ildanssonforintérieur.Pasquestion, pensaLibby.Elle n’allait pas lui admettre qu’elle venait de rêver qu’elle était
danssesbras,qu’ellesentaitsa jouehirsute luigriffer la tempealorsqu’ilsepenchaitpourhumerl’odeurdesescheveux.
«DeGio.Évidemment,jerêvaisdeGio.»Tonyvitrouge.«Dansmonlit!Tuétaiscouchéedansmonlit…entraindefairecequetufaisais,enpensantà
unautrehomme!»Illafoudroyaduregard,commepourlamettreaudéfidemodifiersaréponse.«Euh…je…»Libbyétaitsouslechoc.Elleseredressaquelquepeusurlelit.Pourquoiavait-elleditcela?
Elleauraitpusimplementrefuserderépondre.Cen’étaitpasenl’insultantqu’elleallaitleconvaincredelarejoindreaulit.Elletentaitjustedeleconvaincredufaitqu’ellenerecherchaitpasunerelationsentimentaleetqu’elleétaitcapabledecoucherjustepourleplaisir.Ellevoulaitqu’ilselaissealleretqu’illuidonnecesouvenirqu’elleavaitdésirétoutelanuit.Àprésent,ilallaitsûrementlamettreàlaporte.
«Bon,ehbien,jevoiscequ’ilmeresteàfaire.»Tonytenditlamainetluisaisitlacheville,puisiltirapourlafaireglisserjusqu’auboutdulit.«Jevaistemontrerceàquoitudevraisrêver.Mapetite,jevaistefairel’amourjusqu’àceque
tuaiesoubliéjusqu’aunomdeMonsieurPanzani.»Il grimpa sur le lit, s’étendit au-dessusd’elle et lui plantaun longbaiser langoureux sur la
bouche.«D’accord.»Tonycommençaàmettresapromesseàexécutionenluitraçantunsentierdebaisersdansle
cou, balayant de la langue les moindres recoins de sa peau. Ses mains coururent sur son ventrejusqu’àcequ’ilatteignel’ourletdesoncaraco,qu’ilrelevajusqu’àfaireapparaîtresesseinsfleurisderose.Toutenlespétrissantdesdeuxmains,Tonyfitdescendrelacibledesesattaquesbuccales.Ilcaressadesalanguel’undesmontsausommetduquelilfitroulersalangue,tandisqu’iltaquinaitleseconddupouceetdel’index.LecorpsdeLibbysecourbasouslesien,exigeantd’autresattentions.Ill’obligeaenrépétantlaséquenceensensinverse.
Libby sentait chacun de ses nerfs exploser de plaisir et en même temps, elle brûlait d’enressentirdavantage.Unbesoinchaudetaffaméseformaitdanssapoitrine.ElleessayadeserassasierentouchantetengoûtantlapeaudeTony,maiscelui-ciluirefusaimpitoyablementceplaisir.
«Laisse-toifaire,chérie,intima-t-ilenlarepoussantcontrelematelas.Laisse-moitedonnerduplaisir.Jepeuxt’endonnertant.»
Dansunélandevénération,Tonyutilisasalangueetsesmainspouractivertouslesboutonsdu corps de la femme tels qu’il avait pu les découvrir, en lire la description dans des livres ousimplementdans son imagination.Pasuncentimètrede sapeaune futnégligépar sesattentions. Ilretirasoncaleçonetluiôtasapetiteculotte,jetantlesdeuxnégligemmentsurlesol.
«Tu es si belle,murmura Tony contre sa peau tout en déposant des baisers autour de sonnombril.Jesavaisquetuleserais.»
Lentement, il lui souleva une jambe et, en commençant à la cheville, il se mit à remonterdoucement, en prêtant particulièrement attention à l’arrière de son genou. Lorsqu’il eut atteintl’endroitoùelleledésiraitleplus,illuilançaunregardtaquinetsautajustepar-dessuslesommetdesescuissesetsemitàredescendrelelongdel’autrejambe.Ayantenfinépuisésaquêteexhaustivedesrecoinsdesoncorps,enfinpresqueexhaustive,ilrevintàcetendroitleplusintime.Illuiadressaunpetitcoupdelangue.Ellegémit.Unefiertémasculinel’emplit.C’étaitluiquilafaisaitproduiresessons.Ill’avaitréduiteàcetétatdeplaisirsonoreetinintelligible.Enluiinclinantleshanchespoursefrayerunmeilleuraccès,Tonysuçaetgrignotaavidementsapeaudélicieuse.
«S’ilteplaît,»l’implora-t-elle.Ilsentaitqu’ellen’étaitpasloindubut.«Détends-toi,chérie.Laisse-toialler,»l’encouragea-t-ilenredoublantd’attentions.Leplaisirdéferlasurellecommelesvaguesdel’océan–desvaguesincroyablesporteusesde
plaisir.«Oh,Tony,»murmura-t-elleenrevenantsurterre.Sonnom.Sonlit.SaLibby.Sonnom.Sonlit.SaLibby.Unbrouillarddedésirenvahitl’esprit
deTonyenl’entendantdiresonnom.«Nebougepas,»ordonna-t-il.S’éloignantàregret, il tenditlebrasverssatabledenuitetaprèsunmomentrevintavecun
petitcarréargenté.Unefoisrégléecettequestion,ill’embrassadenouveauàpleinebouche.Avecunenouvellefougueetunnouvelentrain,ilcaressasalanguedelasiennetoutenluiécartantlescuissesetensefondantenelle.
Sous lui,Libby poussa un petit cri.Tony s’immobilisa sur elle.Unvoile de douleur s’étaitposésursesyeuxoùuninstantplustôtn’étaitqueledésir.
«Libby?»Ileutunélandetendresse.Elleluiavaitfaitconfiancepourcemomentsiprécieux.«Pourquoitunemel’aspasdit.J’auraisfaitplusattention.—Situavaisfaitplusattention,jemeseraisévanouieàforced’attendre,»murmuraLibbyen
luidonnantunbaiseraumenton.Il resta immobile, sans savoir comment continuer. Il avait peur de lui fairemal,mais il ne
pouvaitserésoudreàseretirer.«Tony?—Hmm?—Tusaiscommentfaire,pasvrai?Ceseraitbienqu’aumoinsundenousdeuxlesache.Tonyeutunpetitrire.—Biensûr,chérie,c’estjuste…jeneveuxpastefairemal,Libby.—Ah,d’accord.Bon,tusais,tunemefaispasmal.»Tonylaregardad’unairdedoute.«Non,vraiment,insista-t-elle.Çan’afaitmalqu’uninstant.»Libbyfitunetentativepourondulerdeshanches.Tony poussa un grognement et pesa de tout son poids sur elle. En longs mouvements
méthodiques, ilcommençaàlesemmenerlentementversunsommetsensuel.Lorsqu’ellefrissonnasousluienmurmurantsonnom,ilperdittoutcontrôle.Illapossédadeplusenplusvite,répondantàtoutelasoifquesoncorpsavaitd’elle.Enfin,endisantsonnom,ils’effondrasurelle.Puisilroulasurlecôtépournepasl’écraser,enlapressantcontresapoitrineetcouvrantdebaiserssonvisage,sescheveuxettoutcequeseslèvresatteignaient.
«Ouah,parvintseulementàdireLibbyquelquetempsaprès.—Çava?Jesuisdésolé,j’aiétéunpeu…enthousiastesurlafin.—J’aiaimé,enthousiaste,»ditLibbycommeenronronnantcontresapoitrine.Elle réalisa tout à coup qu’elle pouvait le toucher et le goûter des lèvres, contrairement à
auparavant.Ellefitpassersesonglessursesabdominauxd’ungestehésitant.LecorpsdeTonyétaitfermeetLibbyosadenouvellescaresses,voulantluirendreautantdeplaisirqu’illuienavaitdonné.
«Attends.»Tonyinterrompitsesmouvementsenluiprenantlesdeuxmainsdanslasienne.«J’aifaitquelquechosequetun’aimespas?— Impossible,Lib, ditTony en lui plantant unbaiser sur la bouche.Tunepeuxpas savoir
commej’aimesentirtesmainssurmoncorps.Maisonnepeutpaslerefairetoutdesuite.—Ah,oui.Jesais,ditLibbyenhochantlatête.Euh,Tony?Combiendetemps?—Quoi?—Combiendetemps,jusqu’àceque…tupuisses…»Elles’interrompitenlevoyantsourire.«Jevoulaisdirepourtoi,Libby,dit-il.Tuvassansdouteavoir…unpeumal.—Jesuisprêteàcourirlerisque.Euh…quandtuserasprêt,»réponditLibbyavecunsourire.TonyguidalesmainsdeLibbyunpeuplusbasetluimontraàquelpointilétaitprêt.
CHAPITREDIX-NEUF
Tonyouvritlesyeuxetregardasonréveil:ilétait11heures.C’étaitlapremièrefoisdepuissesannéesd’étudiantqu’ilfaisaitainsilagrassematinée.Mêmes’iln’avaitpastantdormiqueçacematin.Libby ronflait légèrement à côté de lui.Dieu, qu’elle était belle. Il eut envie de la réveiller.Peut-êtreavecunbaiser?Peut-êtreavecautrechose?Sonventregargouilla.Ilavaittropfaimpourautrechose,etLibbyseraitsûrementaffaméeenseréveillant.Tonyseglissahorsdulit,enfiladesvêtements propres et écrivit un petit mot pour Libby avant de partir en quête du meilleur petit-déjeuner(oudéjeuner)àemporterqu’ilpourraittrouver.LedinerpréférédeLibbyn’étaitqu’àdixminutesàpied.IlsavaientunediscussionimportantedevanteuxetTonyétaitprêtàcorrompreLibbyavecuneassiettedepancakess’illefallait.Ilallaitlaconvaincrequ’ilpouvaitlarendreheureuse.Ilallaitluimontrerquesaplaceétaitaveclui,danssavie,danssamaisonetdanssonlit.
«Commenttuaspu!?criaMeldansletéléphone,alorsqueTonyportaitdequoinourrirun
régimentjusqu’àsavoiture.—Salut,sœurette!—N’essaiepasdemecharmer,fripon!OùestLibby?»Questiongênante.Pouvait-ildireàsapetitesœurquesameilleureamieétaitendormiedans
sonlitaprèsunelonguematinéepasséeàfairel’amour?Non.«Euh…elleesttoujourschezmoi,Mel.Jesuissortichercherlepetit-dé…ledéjeuner.—Nemedis rien ! Jeneveuxpassavoir.Tuesallé trop loin. Jene tecroyaispascapable
d’unetellebassesse.Mêmesiaprèstacrisededivahiersoir,jenedevraispasêtresurprise.—Tuveuxmedirecequitedérange,Mel?—Gioestparti.JenesaispascequetuasfaitàLibbyhiersoir,maisilsontdûsedisputer
parcequ’ilaquitté l’hôtel. J’espéraisqu’il retrouvesesespritsetqu’ildécidede resterchezStuartavecLibby–maisiln’yapersonnechezStuartetlavoituredeLibbyesttoujoursdevantlebar.Cequiveutdirequ’elleétaitavectoilanuitdernière.
—Etalors,c’estunproblème?»Gioétaitparti?Est-cequ’ellel’avaitappelé?Pourluidiredes’enaller?«Pasdu tout, si jepensaisque tuétaissérieux,mais tusaisbienquecen’estpas lecas.En
généraltuesplutôtungarsbien,Tony,jenesaispaspourquoitulafaistournerenbourriquecommeça.Giol’aime!Ilallaitvenirhabiterici,tusais.Ilmel’aditlasemainedernièreautéléphone.
—Vraiment?—Soitça, soitc’estellequiseraitpartie là-bas…Cen’étaitpas trèsclair,mais ilavaitdes
projets.»Tonyaussiavaitdesprojets.«Ilvoulaitqu’ilsviventensemble?—Qu’ilssemarient,grandfrère.Jesuissûrqu’ilallaitluidemanderdel’épouser.J’aisenti
clairementquelaquestionn’étaitpasloin.Tunesupportespasqu’ellesoitheureuseavecquelqu’und’autre,c’estça?Tun’esqu’unconnardégoïste!Tunel’aimespas,maistuveuxqu’ellecontinueàt’aimer?ElleaimeGio,Tony.Çasevoitrienqu’àlafaçondontilsdansent.»
L’épouser?Ilsn’avaientmêmepascouchéensemble.Àmoinsqu’ellen’aitvouluattendreleurnuit denoces ?Dans certaines cultures, ça comptait encore, cettehistoiredevirginité, non?Tonyavaitenviedehurler.Ilavaitenviededirequ’ill’aimaitdepuisqu’ellel’avaitbattuauMonopolysixans plus tôt.Mais ce n’est pas quelque chose à dire à la meilleure amie avant de l’avoir dit à laprincipaleintéressée.Ilsecontentad’un:
«Libbycomptebeaucouppourmoi.— Non, Tony, si elle comptait pour toi tu voudrais qu’elle soit heureuse. Tu m’énerves,
j’abandonne!Jevaisréessayersonportable.—Non.Mel.Jesuisàdeuxminutesdechezmoi.Jevaisluiparler.Promets-moidenepast’en
mêler…Mel?…Allô?»Mince.Tony accéléra.Mel avait tort. Libby ne pouvait pas être amoureuse deGio – c’était
impossible.Se réveiller un peu fourbue et royalement satisfaite dans le lit de Tony était l’une des
meilleuresexpériencesqueLibbyaitjamaisconnues.Pasloindelameilleure,même.LibbytenditlamainversTony.Iln’étaitpaslà.EnpassantrapidementsachemisedenuitetleboxerdeTony,ellepartitàsarecherche.Maisiln’étaitvraimentpaslà.Aprèsavoirfouillélamaison,Libbyregardaparla fenêtre et vit que sa voiture n’était plus là. Il l’avait abandonnée. Elle se roula en boule sur lamoquettedusalonetselaissaenvahirparlechagrin.
Deslarmesluicoulèrentsurlevisage.Commentavait-ellepucroirequ’elleétaitprêteàcela?Qu’ellepouvait supporterd’êtreune fillequ’ilvoyait justepour le sexe, si ça lui permettait d’êtreaveclui.Elleavaiteutort.Ellen’étaitpasdutoutcegenredefille.Parkeravaitraison,etmaintenantilneseraitsansdoutemêmepluspossibledelegardercommeami.Carellesavaitqu’elleneseraitjamaisplussatisfaiteavecluisiellen’étaitpasvraimentaveclui.
«Libby?appelaTonyenseruantdanslapièce.Libby…»Ellepleurait–rouléeenpositionfœtalesurlesol,parcequ’iln’avaitmêmepaseuletemps
d’acheter dumobilier.Mais d’abord, qu’est-ce qu’elle faisait là ? Peut-être qu’elle n’avait pas purestercouchéedanssonlitaprèss’êtredisputéeavecGio?Melavaitraison.ElledevaitaimerGio.
«Libby,chérie,s’ilteplaît,nepleurepas.»Tonylaissatomberlesacdenourritureprèsdelaporteetsedirigeaverselle.Ellesesentait
sûrementcoupable.Coupabledes’êtrelaisséeséduireparTonyalorsquec’étaitGioqu’ellevoulaitvraiment.
« Ne t’inquiète pas. Écoute, j’ai parlé avec Mel, je sais que Gio est parti. Vous vous êtesdisputés?
—Quoi?Oh.Non,cen’étaitpasunedispute,justeundésaccord.»C’étaitunpeuvrai : ilsn’étaientpasd’accordquantà leuravenir.Cen’étaitpas lapeinede
dire à Tony qu’elle s’était sentie légèrement soulagée, quand Gio avait décidé de partir. Libbys’essuyalesyeuxdureversdelamain.
—Je fais juste l’idiote. Jevaisme rhabiller,puis tupourraspeut-êtreme raccompagneren
voiture?Ilsentitsoncœursefiger.Ilvoyaitdisparaîtresondernierespoirqu’elleaitpulechoisir,lui
et pas Gio. Elle ne voulait pas de lui et, en insistant, il ne faisait que lui rendre la situation plusdifficile.Melavaitraison,iln’étaitqu’unconnardégoïste.
«Votredésaccord,c’était…Tuluiasparlédelanuitdernière?—Comment?Non.Jeneluiaipasparlédepuisqu’ilaquittélebar.»LibbyselaissaallerdanslesbrasdeTony,enessayantd’ignoreràquelpointilétaitironique
quecelui-cilaconsoled’unchagrind’amourdontilétaitresponsable.Lanuitdernière?ElleetGios’étaientdisputéslanuitdernière?Libbyavaitcouchéaveclui
enréaction?Etmaintenantelleleregrettait.MaintenantellevoulaitretrouverGio.«Okay,bon.Écoute,jesuissûrqueçavas’arranger.Tun’espasobligéedeluidirepour…tu
sais.»Libbypleuradeplusbelle.Des larmesvinrent auxyeuxdeTony.C’était si difficile, de ne pas la supplier de rester, la
supplierd’oublierGio.Maissielleétaitsitristeàprésent,ilsavaitqu’elleneseraitjamaisheureuseavecluietque,quantàlui,ilnepouvaitpaspassersaviedansl’angoissedevoirGioreveniretlaluireprendre.
« Je suis désolé,Lib. S’il t’aime, ça s’arrangera – et si tu es vraiment inquiète, tu pourraisjuste…peut-êtrefairesemblant?Teraidiretpousserunpetitcriouquelquechosecommeça.
—Quoi?»Libbylevalatêtepourleregarder.«Jeveuxdiresitu…euh…siGios’attendaità…pourvotrenuitdenoces?»Mince,pourquelqu’unquigagnaitsavieenécrivant,ilavaitbiendumalàfinirsaphrase.«Ceque j’essaie de dire,Libby, c’est que je veuxque tu sois heureuse.Alors je vais vous
laisserlechamplibre.J’arrêteraidet’appeleretdeteproposerdesrendez-vous.EtjetejurequeGionesaurajamaisqu’onestsortisensemble.Mêmes’ilfautquejefassecouperlalangueàMel–ilnelesaurapas.»
Souslechoc,LibbydutseforceràfaireattentionàcequedisaitTony.Maisellenecomprenaittoujourspas.
«Quandest-cequ’onestsortisensemble?»Tonyfronçalessourcils.«Ehbien…tusais,depuissixsemaines.»Elleledévisageasansriendire.«Lepique-nique,lafêteduvignoble,ettouscesdéjeuners.Onaperduuneaprès-midientière
àregarderDieHard!—C’estMelquim’ainvitéeaupique-nique.LaFêteduvignoble,c’étaitpourlejournal.Onne
sortaitpasensemble,tunem’avaispasinvitéeàsortiravectoi.EtregarderDieHardn’estjamaisdutempsperdu!»
Silemomentn’avaitpasétésidouloureux,Tonyauraitéclatéderire.Vraiment?EllevoulaitcontinuerleurdébatsurlecaractèreombrageuxdeJohnMcClane?
«Biensûrqu’onsortaitensemble.Tucroyaisquec’étaitquoi?—Dessortiesentreamis,jesuppose.Unrendez-vous,c’estautrechose–ons’habille,tuviens
mechercherchezmoi,tum’apportesdesfleursettum’emmènesdîneroudanserou…»LevisagedeLibbysedécomposa.Merde. Il avait oublié les fleurs.Maintenant qu’elle en parlait, il était sûr queMel lui avait
suggérédesfleurs.« J’ai oublié les fleurs, et je ne pensais pas que tu voulais d’un repas guindé. Je t’aurais
emmenéeoùtuvoulais.—Tuasraison,ditdoucementLibby.Onsortaitensemble.»Elleinclinalatêteetsemitàgémir.«Jesuisdésolé,Libby.»Tonynesavaitmêmeplusdequoiilétaitentraindes’excuser.Maisc’étaitlapremièrefois
qu’ilavaitfaitpleurerunefemmeenl’invitantsimplementàquelquesrendez-vous.«Peut-êtrequ’onnesortaitpasvraimentensemble?—Si,si,»ditLibbysansreleverlatête.Tonyavaitdumalàsaisircequ’elleressentaitennevoyantquelesommetdesoncrâne.TonyMarchettim’inviteenfinàsortiraveclui,pasune,maisplusieursfois–et jenem’en
rendspascompte.«Libby?Jenecomprendspas.—Moinonplus.»Ilsrestèrentun instantsansriendire,dans lesbras l’unde l’autre.Aucundesdeuxnesavait
commentpoursuivre.CefutfinalementLibbyquirompitlesilence.«Dequelmariagetuparles?—Hein?—Tupensaisquej’allaismemarieravecGio?Tuasparléd’unenuitdenoces.»Tonyeutl’airtrèsmalàl’aise.«Melsemblaitpenserquec’étaitcequiallaitsepasser.—Melestidiote.»Tonyfutenvahiparunevaguedesoulagementetd’espoir.«Alors,cen’estpasvrai?—Non.Gioetmoiavonsdécidéd’êtreamis.—Etçateconvient?»Libbyhochalatêtecontresonépaule.«Maisalors…pourquoiest-cequejet’aitrouvéeparterreentraindepleurer?—Euh.Parfois,lesfilles,çapleure…»ditLibbyenlevantversluiunregardtimide.Peut-êtrequ’iln’insisteraitpas?Maisilluirenditsonregard,impassible.«Bon, okay, j’ai réalisé que je ne suis pas le genre de fille qui couche juste pour le sexe.
Quandjemesuisréveillée,j’aieudelapeinequetusoisparticommeça.Maiscen’estpasgrave.—Jerevenaistoutdesuite!Jenevoulaisjustepasteréveiller.Tun’aspaslumonmot?—Quelmot?»LeportabledeLibbysemitàsonner.Tonydécrocha:«Mêle-toidetesaffaires,Mel!»Etilraccrochaaussisec.Puis il s’écarta légèrementdeLibby,demanière à lui faire face. Il nepouvait pas réfléchir
aveccetteodeurdelavandeetdesexequiémanaitd’elle.«Tutesouviensquejet’aiditunjourqu’onavaitdesproblèmesdecommunication?»Libbyhochalatête.«Bon.Doncj’aiquelquesquestionspourtoi.Est-cequetuesamoureusedeGio?—Non.—Tuveuxlerécupérer?—Non.—Pourquoitum’aslaissécroirequetucouchaisavecParker?»Libbyeutl’airgênée.«Jenevoulaispasquetucroiesquejemelanguissaisdetoidansmoncoin.»
Tonypritunairtriste.«Jesuisuncon.—C’estunequestion?réponditLibbyavecunpetitsourire.—Non.C’est justeunfait.Jet’aime.Jet’aimedepuis…disonsqueçafaitunmoment.Et je
prieleCielpourquetum’aimesaussi.»Libbyenrestabouchebée.Puisellesourit,seblottitcontreTonyetl’embrassa.«Ohque non, ça ne va pas être si facile, ditTony avec son sourire spécialLibby. Je veux
t’entendreledire.—Biensûrquejet’aime,Tony.JesuiscommeNona.—CommeNona?Tuveuxbienm’expliquer?—Peut-êtreplustard.»Libbyluidonnaunnouveaubaiser.«Tuétaisoù,alors?—Oh.Chercherlepetit-dej’,réponditTonydistraitementenlaserrantcontrelui.—Lepetit-dej’?Jemeursdefaim!»Ellesedégageaetrampaverslessacsquiétaientrestésparterreprèsdelaporte.«Rejetépourdespancakesfroids!»ditTonyenportantlamainàsoncœur.C’étaitbiensaLibby.Etelleétaitbienàlui,cettefois,pourdevrai.Ils réchauffèrent les pancakes et Libby eut enfin droit à son petit déjeuner – à 2 heures de
l’après-midi.«Jepensequ’ondevraitsemarier,»annonçaTonyd’unevoixdouce.Libbyenrecrachaunebouchéedepancake.«Semarier?—Ouais–onn’estpasdouéspoursefairelacour,ditTonyavecungrandsourire.Tupeux
emménager avec moi dès aujourd’hui. Et je sais que tu n’étais pas sûre de vouloir rester àTaylorsville,maisjepeuxécrireden’importeoù.IlyaunjournalàTallahasseequis’intéressaitàmoi,àunmoment,situveuxretournerenFloride.OusituveuxtoujoursalleràNewYork,c’estcoolaussi.
—Quandest-cequetuasparléàunjournaldeTallahassee?»Oups.Cramé.«Avantquetun’aillesàRome.Tum’asmanqué,Lib.Jenevoulaisplusêtreloindetoi.Jene
veuxplusêtreloindetoi.Alors,qu’est-cequetuendis?Onsemarie?Jeteprometsquetupourraschoisirlecanapé.»
Libbyledévisageasansrépondre.Peut-êtrequ’ilavaitmalcalculésoncoup.Puiselledit:«Combiendetemps?—Avantdepouvoirsemarier?ditTonyenseprécipitantverselle.—Non.Combiende tempsdepuisque tu es amoureuxdemoi ?Tuasdit que ça faisaitun
moment.—Euh.C’estunpeugênant.Tun’étaispasbienvieille.»Libbyluilançaunregardexaspéré.«Jeteledispourmoi,situmedispourtoi.»Tonyhochalatête.«Bon,mais tune temoquespas.C’était le jouroùons’est rencontrés.Tuavaisvolénotre
pop-cornettut’étaismoquédelaPetiteSirène.—Çadécritlaplupartdesvendredissoirdenotreenfance,Lib,ditTonyd’untonenjoué.Moi,
c’étaitl’étéoùonajouéauMonopoly.Tuportaiscetoutpetitpyjamableu,tutesouviens?J’aidûm’asseoirsurcettehorriblechaisedebureaujustepourrésisteràl’enviedetesauterdessus–cepourquoij’auraissansdoutepuallerenprison,vuquetun’avaisque16ans.
—Ettoiseulement19!Tuvascontinuerlongtempsàêtreobsédéparnotredifférenced’âge?—Çadépendprobablementdetaréponseàmaquestion.»Libbycroquaunenouvellebouchéedepancake.« Je me plais bien ici. J’aimerais y rester et je pense que ma mère n’y verra pas
d’inconvénient.Onnes’adressepasvraimentaumêmepublic,detoutefaçon.Etonpourrachoisirlecanapéplustard,situveux.
—Libby!s’écriaTony.Lacommunication,tutesouviens?Est-cequetuveuxm’épouser?—Jenevienspasdetedireoui?—Lesmots,Lib.Jeveuxtelesentendredire.»Libbyeutunsourire.«Oui,Tony,jeveuxbient’épouser.»Tonylasoulevadesachaiseetsedirigeaversl’escalier.« On pourra choisir le canapé plus tard, » dit-il en poussant la porte de leur chambre à
coucher.
ÉPILOGUE
Quatreansplustard…
ChèreBetta,Elaineetmoiteremercionschaleureusementpourtoncadeau.Nousregrettonsquetunepuissespasêtre làpour lemariage,mais tu as raisondenepas voyagerdans ton état.FéliciteTonypour sondernierroman.Jecrainsqu’Elainenesesoitunpeuentichéed’IsaacRaines.Nous reviendrons à New York dans quelques mois et avons hâte de faire la connaissance du petitMarchetti.DisaujeuneLuca,delapartdesononcleGio,quec’estunegranderesponsabilité,d’êtreunfratello.Peut-être, l’année prochaine, pourrez-vous venir à Rome, toute la petite famille ? Nona aimeraitbeaucouprencontrerlesenfants.Bises,Gio
ÀPROPOSDEL'AUTEUR
T.J. est une princesse venue de l'île deThemyscira.Avec son lassomagique et ses bracelets pare-balles,elledéfendlepauvreetl'oppriméensillonnantlemondedanssonavioninvisible…Ahnon,çac'estWonderWoman.Maisbon,WonderWomanestun tantinetplus intéressantequeMmeDell,donc laissons ce qui précède. T.J. vit dans leMaryland et aime partager son imagination avec seslecteurs.