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Généré le 23/02/2009 | www.lexbase.fr | Guides juridiques | Tous droits réservés | (c) Lexbase SA Le harcèlement moral Sommaire 1000 1. Généralités sur le harcèlement moral 1001 2. La définition et les éléments constitutifs du harcèlement moral 1002 3. Les agissements répréhensibles au titre du harcèlement moral 1003 4. La prévention du harcèlement moral 1004 4.1. L'employeur garant de la prévention du harcèlement moral 1005 4.2. Le droit d'alerte des délégués du personnel en matière de harcèlement moral 1006 4.3. Le rôle du CHSCT en matière de harcèlement moral 1007 4.4. Le rôle du médecin du travail en matière de harcèlement moral 1008 5. La protection contre le harcèlement moral 1009 5.1. Le recours à un médiateur extérieur à l'entreprise 1010 5.2. Le droit d'action des organisations syndicales représentatives en cas de harcèlement moral 1011 5.3. La charge de la preuve en matière de contentieux relatif au harcèlement moral 1012 5.4. Les sanctions du harcèlement moral 1013 5.5. La qualification de certains accidents dus au harcèlement moral en accidents du travail 1014 5.6. Le sort du salarié placé en arrêt de travail en raison d'un harcèlement moral

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Le harcèlement moral

Sommaire

1000 1. Généralités sur le harcèlement moral

1001 2. La définition et les éléments constitutifs duharcèlement moral

1002 3. Les agissements répréhensibles au titre duharcèlement moral

1003 4. La prévention du harcèlement moral

1004 4.1. L'employeur garant de la prévention du harcèlementmoral

1005 4.2. Le droit d'alerte des délégués du personnel enmatière de harcèlement moral

1006 4.3. Le rôle du CHSCT en matière de harcèlement moral

1007 4.4. Le rôle du médecin du travail en matière deharcèlement moral

1008 5. La protection contre le harcèlement moral

1009 5.1. Le recours à un médiateur extérieur à l'entreprise

1010 5.2. Le droit d'action des organisations syndicalesreprésentatives en cas de harcèlement moral

1011 5.3. La charge de la preuve en matière de contentieuxrelatif au harcèlement moral

1012 5.4. Les sanctions du harcèlement moral

1013 5.5. La qualification de certains accidents dus auharcèlement moral en accidents du travail

1014 5.6. Le sort du salarié placé en arrêt de travail en raisond'un harcèlement moral

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1000 1. Généralités sur le harcèlement moral [E6349A8N]

Pour un questions-réponses sur le harcèlement moral.

QRTR0018, Le harcèlement moral comment le reconnaître le prévenir le sanctionner, intégration base Droit dutravail 19-09-2003

Une thèse a été publiée sur la reconnaissance d'un droit à la protection de la santé mentaleau travail.

66847, La santé mentale au travail

Loïc Lerouge est à la fois un athlète-juriste de haut niveau (1) et un juriste-athlète, comme en témoignela publication de sa thèse soutenue en décembre 2004, intitulée La reconnaissance d'un droit à laprotection de la santé mentale au travail (préf. P. Chaumette, LGDJ 2005, coll. Bibliothèque de droitsocial, t. 40). Au regard de son double profil, tout à fait exceptionnel chez les universitaires, il étaitattendu et logique qu'il investisse un champ qu'il connaît bien -le sport- pour écrire sur le contrat detravail du sportif ou le droit du travail dans les milieux sportifs. Or, sa thèse en est très éloignée,puisque son thème est celui de la santé mentale du travailleur.

Depuis un article de Michèle Bonnechère sur Le corps laborieux : réflexion sur la place du corpshumain dans le contrat de travail (Dr. Ouvrier 1994, p. 173), la doctrine conservait une grille d'analysefinalement très historique de la santé du travailleur, centrée sur son corps, la maladie professionnelle etl'accident du travail ayant vocation à être également analysés dans leur dimension physique etorganique.

L'histoire du travail s'est construite sur la protection du salarié dans ses rapports avec l'employeur etcette protection a porté, à l'origine, sur la personne même du travailleur (enfant, femme...). Pendantplus de deux siècles, cette vision est finalement restée inchangée. Tout le mérite de Loïc Lerouge estd'attirer notre attention sur des phénomènes pourtant très médiatisés de harcèlement moral au travail(§ n° 365, 609), de stress (§ n° 546), de souffrance psychique au travail (§ n° 513 et 537), de fragilitépsychique, de fatigue mentale, de suicide (...) qui, juridiquement, méritent pleinement de jouir du mêmecorps de règles que la santé physique au travail.

Selon les travaux conduits par la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et detravail de Dublin, environ un tiers des salariés déclarent une détérioration de leur santé mentale.Comme le relève le Conseil économique et social, les enquêtes relatives aux conditions de travail, lesanalyses de sociologues, de médecins, ainsi que de professionnels et de chercheurs, témoignent del'impact des facteurs psychosociaux au travail sur la santé et le bien-être des personnes. Ellesconfirment les effets que les nouvelles formes d'organisations du travail, qui s'inscrivent dans uncontexte d'exigence de compétitivité accrue, peuvent avoir sur les conditions de travail. Elles mettent enévidence un accroissement du poids relatif des facteurs mentaux et psychologiques dans lespréoccupations de santé au travail (2).

La démonstration de Loïc Lerouge, ainsi présentée, a le mérite de la simplicité : le propos est desynthétiser un corps de règles très récentes, éparpillées entre différentes sources, visant la santé mentaledu travailleur. Identifiées et repérées, ces règles sont ensuite analysées dans leur régime afin de mieuxsaisir la prise en charge par le droit de la santé mentale du salarié.

Ce thème, très innovant en droit du travail est, hasard du calendrier, porté par l'actualité législative etjurisprudentielle : loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, laparticipation et la citoyenneté des personnes handicapées (loi n° 2005-102, 11 février 2005, pour l'égalitédes droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ) ; décrets n°2005-724 (décret 29 juin 2005, n° 2005-724, relatif à l'allocation aux adultes handicapés et modifiant leCode de la Sécurité sociale ) et n° 2005-725 (décret 29 juin 2005, n° 2005-725, relatif à l'allocation auxadultes handicapés modifiant le Code de la Sécurité sociale ) du 29 juin 2005 relatif à l'allocation auxadultes handicapés ; actualité jurisprudentielle sur le harcèlement moral au travail (Cass. civ. 2, 24 mai2005, n° 03-30.480, M. Jean Liard c/ Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) d'Eure-et-Loir,FS-P+B , lire nos obs., Harcèlement moral et qualification juridique d'accident du travail, LexbaseHebdo n° 172 du 16 juin 2005 - édition sociale ), la prise en charge, au titre de la législation sur lesaccidents du travail, de l'état dépressif (Cass. civ. 2, 15 juin 2004, n° 02-31.194, Caisse primaired'assurance maladie (CPAM) d'Indre-et-Loire c/ M. Philippe Badin, FS-P+B , lire nos obs., Le chocémotionnel créant des troubles psychologiques est bien un accident du travail, Lexbase Hebdo n° 128 du8 juillet 2004 - édition sociale ).

Dans une première partie, sont traitées les questions de notions et qualifications juridiques serapportant à la santé mentale. Le champ d'analyse couvert par l'auteur reste très large, rendantnécessaire et utile, au préalable, des définitions. Selon l'auteur, "la santé mentale au travail est qualifiéepar un état d'équilibre et de bien-être mental caractérisé par l'absence de troubles mentaux et favorisépar l'harmonie du sujet avec les éléments matériels et moraux de son environnement professionnel" (§n° 421). La maladie mentale "est une affection dont les symptômes résultent d'une atteinte organique ducerveau ou d'un trouble du comportement lié à une anomalie fonctionnelle" (n° 315), alors que "lestroubles mentaux se rapportent plus largement aux déséquilibres affectant la santé mentale [...] lestroubles mentaux recouvrent les affections d'ordre mental qui se manifestent notamment par unedétérioration du comportement et des fonctions psychiques" (§ n° 316).

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Les fondements d'un droit à la santé mentale sont multiples et recouvrent de nombreuses dispositions,aussi bien en droit international (convention OIT n° 155 ou n° 161 § n° 161) qu'en droit communautaire(directive CE 89/391 du 12 juin 1989 concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoirl'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail ) (§ n° 130). Mais le droit internereste très en retrait et l'auteur observe seulement une montée en puissance d'un droit subjectif à la santémentale et psychique du salarié.

Deux dispositions vont en ce sens. Le chef d'établissement prend les mesures nécessaires pour assurer lasécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs de l'établissement. Ces mesurescomprennent des actions de prévention des risques professionnels, d'information et de formation ainsique la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. Il veille à l'adaptation de ces mesurespour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes(C. trav., art. L. 230-2 ).

De plus, l'employeur est tenu d'assurer une sorte de sérénité à ses salariés, en s'abstenant de toutcomportement conduisant au harcèlement, c'est-à-dire des agissements répétés de harcèlement moralqui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinteà ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenirprofessionnel (C. trav., art. L. 122-49 ).

Enfin, l'auteur pose la question du champ d'application de la jurisprudence dite "Amiante", faisantpeser sur l'employeur une obligation de sécurité de résultat, qui devrait couvrir le champ de la sécuritéphysique et corporelle du salarié, mais également sa sécurité mentale (§ n° 301).

Dans une seconde partie, logiquement, est analysée la prise en compte et prise en charge de la santémentale en droit du travail. La jurisprudence tend de plus en plus à prendre en compte l'état mental etpsychique du salarié dans l'analyse des rapports individuels de travail. Les illustrations connues portentessentiellement sur le régime de la démission, puisque la fragilité psychologique du salarié peut rendreéquivoque sa décision de rompre unilatéralement le contrat de travail (§ 724, 728).

La loi, ensuite, prend en compte l'atteinte à l'intégrité mentale et psychique du salarié dans deuxdispositifs déjà mentionnés : une obligation générale de sécurité et de prévention (C. trav., art. L. 230-2)d'une part, le régime du harcèlement moral au travail, d'autre part (C. trav., art. L. 122-49). La loi demodernisation sociale (loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale ) a marqué une étapedécisive dans la prise du conscience, par le législateur, d'une meilleure protection de la santé mentaledes travailleurs (§ n° 767 s.).

La loi du 17 janvier 2002 a apporté une définition du harcèlement moral professionnel (art. 169), l'apénalisé (art. 170 de la loi), a modifié en conséquence le contenu du règlement intérieur des entreprises(art. 172), a élargi l'obligation de prévention de l'employeur à la santé mentale (art. 173), a étendu lerôle du CHSCT à la santé mentale (art. 174) et a, enfin, accordé aux médecins du travail de nouvellescompétence (art. 175).

Il faut souligner que ces avancées ont exprimé un consensus qui dépassait les clivages politiques et la loide modernisation sociale n'a pas, ici, connu les outrages du législateur ayant suspendu, maisultérieurement abrogé, les dispositions relatives au droit du licenciement économique collectif donnantlieu à la mise en place d'un plan de sauvegarde de l'emploi (loi n° 2003-6 du 3 janvier 2003 amendant etsuspendant partiellement la loi de modernisation sociale ; loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005, deprogrammation pour la cohésion sociale , abrogeant les articles 97 et 98 de la loi de modernisationsociale).

Plus classiquement, la victime d'un trouble mental ou psychique causé par son activité professionnellepeut invoquer le droit commun de la législation sur les accidents du travail, notamment lorsque ladégradation de son état mental résulte d'une faute inexcusable de l'employeur (§ n° 854). En effet,contrairement à ce que l'intitulé de la thèse laisse entendre, la protection de santé mentale du travailleurpasse d'abord et avant tout par un corpus de normes et de règles "travaillistes", mais aussi par le droitde la Sécurité sociale, notamment le droit des accidents du travail et des maladies professionnelles. Cedroit constitue un excellent terrain d'observation de l'analyse que le juge peut faire du stress au travail,de la fragilité psychologique générée par les conditions de travail, qui peuvent déboucher sur despathologies appelant une prise en charge médicale et, dans les cas les plus extrêmes, au suicide.

La jurisprudence n'est pas, en la matière, très audacieuse ni protectrice des maux dont peuvent souffrircertains salariés. Ainsi, dans un arrêt récent, la Cour de cassation, confrontée à la question desconditions auxquelles le harcèlement moral, à l'origine d'un état dépressif du salarié, peut conduire à laqualification juridique d'accident du travail, a décidé que la victime d'un harcèlement moral qui nerapporte pas la preuve de ce qu'un arrêt de travail a été causé par une brutale altération de ses facultésmentales, en relation avec les événements invoqués, ne peut se prévaloir de la législation sur lesaccidents du travail (Cass. civ. 2, 24 mai 2005, n° 03-30.480, M. Jean Liard c/ Caisse primaired'assurance maladie d'Eure-et-Loir, FS-P+B , lire nos obs., Harcèlement moral et qualificationjuridique d'accident du travail, Lexbase Hebdo n° 172 du 16 juin 2005 - édition sociale ).

La Cour de cassation refuse la qualification juridique d'accident du travail à l'état dépressif du salariécausé par le harcèlement, faute d'être en présence d'une brutale altération des facultés mentales de lavictime. La solution est rigoureuse, d'autant plus que la Cour de cassation fait peser sur le salarié lacharge de la preuve que l'arrêt de travail prescrit, dû à son état dépressif, a été causé par une brutalealtération de ses facultés mentales en relation avec les événements invoqués.

La protection accordée par le législateur aux salariés victimes d'actes de harcèlement (au titre du droitdu travail) ne trouve pas son prolongement, pourtant logique et naturel, par la législation sur lesaccidents du travail (reconnaissance de la qualification d'accident du travail à un état dépressif causépar des actes de harcèlement).

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Enfin, le droit interne privé suggère d'autres approches possibles du phénomène de l'atteinte àl'équilibre psychique du travailleur par le comportement de l'employeur que celles visées par le droit dutravail ou le droit de la Sécurité sociale. Le droit pénal offre, là aussi, un beau terrain d'observation despratiques "esclavagistes" des employeurs, qui soumettent leurs employés à des conditions de travailcontraires à la dignité de la personne humaine (C. pén., art. 225-13 et 225-14 ).

La jurisprudence donne des illustrations pathétiques d'employeurs eux-mêmes psychologiquementfragiles, soumettant leurs salariés à un véritable enfer mental et psychique. La cour d'appel deVersailles le 20 novembre 2001 (3) relève que la soumission à des conditions de travail incompatiblesavec la dignité humaine abaisse ou avilit l'être humain en tendant à la réification de son corps ou enportant atteinte aux droits essentiels de sa personnalité.

Dans son arrêt rendu le 4 mars 2003, la Chambre criminelle de la Cour de cassation souligne que lasoumission d'un salarié à des conditions de travail indignes doit être assimilée à une pratiqueesclavagiste, lorsqu'elle tend à faire considérer le travailleur comme un prolongement d'unemachine-outil (Cass. crim., 4 mars 2003, n° 02-82.194, Bonnet Maxime c/ partie civile, F-P+F , lire nosobs., "Quand le travail devient esclavage", Lexbase Hebdo n° 83 du 28 août 2003 - édition sociale ). Lescritères du travail indignes les plus souvent relevés par les juges portent sur les brimades, vexations,humiliations et injures. Ces situations infligées aux salariés vont au-delà de la pénibilité au travail, desconditions d'hygiène et de sécurité défaillantes, d'une durée du travail excessive, au-delà du harcèlement(stress, dépression...), au-delà de la faute inexcusable de l'employeur définie par le droit des accidents dutravail.

Bref, lorsque la santé mentale des salariés est compromise parce que l'employeur n'est plus en état decomprendre que derrière le salarié, se profile l'homme et la personne humaine, le droit pénal prendalors toute la mesure de son efficacité dissuasive car, dans de tels cas extrêmes, la responsabilité pénaleplus que civile de leurs auteurs a un sens et s'impose.

Au final, le Conseil économique et social (rapport précité n° 2004-10) suggère un certain nombred'avancées, conclusion partagée par l'auteur : renforcer le rôle des acteurs au sein de l'entreprise etmieux les former, sensibiliser les délégués syndicaux et les élus du personnel, optimiser et déployer lesmoyens des CHSCT, mobiliser les membres des comités d'entreprise, soutenir l'engagement desorganisations syndicales de salariés.

Christophe WillmannProfesseur à l'Université de Haute AlsaceLEXBASE HEBDO n° 182 du 21septembre 2005 - Edition SOCIALE

(1) AS Universitaire Nantes : 4ème aux 400 mètres homme série 2, Meeting National de Castres ;qualifiés au 13 février 2003 pour les France Elite 2003 pour les 400 mètres hommes ; champion deFrance, Athlétisme indoor 2003/04 ; 4x100 mètres relais, arrivé 4ème aux championnats d'Europe, en1999 ; championnat du monde, 4x100 mètres relais, arrivé 3ème, en 1997 ; 3ème au 400 mètres,championnats de France Elite, en salle, 2002...

(2) E. Bressol, Organisations du travail et nouveaux risques pour la santé des salariés, Rapport duConseil économique et sociale, publié in extenso sur le site internet du CES ; S. Hamon-Cholet et C.Rougerie, La charge mentale au travail : des enjeux complexes pour les salariés, Economie et statistiquen° 339-340, 2000 - 9/10, p. 243, accessible sur le site internet de l'Insee.

(3) Cour d'appel de Versailles, 20 novembre 2001, RG 2001/00366, inédit.

Les dispositions de l'article L. 122-49 du Code du travail ne s'appliquent pas à des faitsantérieurs à la loi du 17 janvier 2002 ayant institué ce texte.

Cass. soc., 15-02-2006, n° 04-43.114, Mlle Angélique Quilici c/ Fédération des caves coopératives de l'Hérault,F-D

Le licenciement pour une inaptitude physique résultant d'agissements fautifs de l'employeur,commis antérieurement à la loi du 17 janvier 2002 instituant L. 122-49 du CT relatif auharcèlement moral, est un licenciement sans causée réelle et sérieuse.

Cass. soc., 13-12-2007, n° 06-45.818, société Groupe Pierre le Goff Normandie, FS-P+B

1001 2. La définition et les éléments constitutifs du harcèlement moral [E1444AWE]

Le harcèlement moral est constitué dès lors que des agissements répétés ont pour objet oupour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droitsdu salarié et à sa dignité.

C. trav., art. L. 1152-1, version du 01-05-2008, à jour

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C. trav., art. L. 122-49, version du 18-01-2002, à jourLoi n°2002-73, 17-01-2002, de modernisation sociale, art. 168, JO 18 janvier

Loi n° 2002-73, 17-01-2002, de modernisation sociale, art. 1

La notion de harcèlement moral dégagée par la jurisprudence antérieure à la loi d

L'absence de texte juridique spécifique sanctionnant le harcèlement moral n'avait pas empêché lajurisprudence récente, notamment de premier degré, de reconnaître et sanctionner certains abus desubordination commis par des employeurs, ainsi que les agissements de salariés harcelant leurscollègues. Toutefois, aucune définition jurisprudentielle du harcèlement moral n'avait été dégagée. Eneffet, certaines décisions employaient le terme de harcèlement (1), d'autres préféraient se référer à lanotion de "conditions de travail incompatibles avec la dignité humaine" (2). La jurisprudence avaitcependant indiqué que, pour que les agissements soient répréhensibles, il fallait qu'ils soient répétitifs,une action isolée ne constituant pas une attitude de harcèlement (3).Jusqu'à présent, les juridictions ont combattu le harcèlement moral en ayant recours au délit consistant dans le fait de faire travaillerdes salariés dans des conditions de travail incompatibles avec la dignité humaine, ou en prononçant larésiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur. D'autre part, de nombreux arrêtsont mis en évidence le lien entre les problèmes de santé du salarié résultant du harcèlement moral et le travail afin que ces problèmes de santé soient pris en charge en tant qu'accident du travail.Lesfondements juridiques qui ont permis aux juges d'appréhender le harcèlement moral sont de plusieursordres :

- Le harcèlement, facteur de conditions de travail incompatible avec la dignité humaineLe fait desoumettre une personne, en abusant de sa vulnérabilité ou de sa situation de dépendance, à desconditions de travail incompatibles avec la dignité humaine est un délit pénal réprimé par 2 ansd'emprisonnement et 75 000 euros d'amende (4). Les formes les plus graves de harcèlement moral, qu'ilsoit le fait de l'employeur ou d'un salarié, pouvaient être sanctionnés pénalement sur ce fondement. -La résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur : L'objectif du harcèlementmoral est souvent de faire démissionner le salarié. L'intérêt d'une action en justice est alors de rendrela rupture imputable à l'employeur, afin que le salarié bénéficie d'une indemnité identique dans sonmontant à celle d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que des allocations chômages. Lesalarié, en cas de harcèlement moral commis par la direction, obtenait la résiliation judiciaire de soncontrat de travail aux torts de l'employeur, ce dernier ayant manqué à ses obligations contractuelles, etnotamment à son devoir d'exécuter le contrat de travail de bonne foi. Si l'auteur du harcèlement moralétait un cadre titulaire d'une délégation de pouvoir , la solution était identique, car l'employeur a ledevoir de contrôler, et au besoin sanctionner, le comportement de ses subordonnés (5). Malgrél'absence de décisions sur ce point, le harcèlement moral d'un salarié par un autre salarié devaitpermettre la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, dans la mesure où cedernier a manqué à son obligation d'assurer la sécurité et de protéger la santé des salariés. La résiliation judiciaire du contrat de travail pouvait être demandée en référé, si le comportement deharcèlement moral et l'impossibilité pour le salarié de reprendre le travail ne sont pas sérieusementcontestables (6).Lorsque le salarié avait commis une faute, même grave, l'employeur peut êtreresponsable de la rupture, s'il est démontré qu'il a empêché le salarié, notamment matériellement, demener à bien sa mission (7).- La qualification d'accident du travail : Les dommages sur la santé ou lavie du salarié causés par le harcèlement moral pouvaient être qualifiés d'accident du travail, dans lamesure où ils étaient survenus "par le fait ou à l'occasion du travail" (8).Ainsi, de nombreux arrêts ontconsidéré que le suicide ou la tentative de suicide ayant eu lieu au sein de l'entreprise sont desaccidents du travail (9). - L'intervention du C.H.S.C.T. :

La mission du C.H.S.C.T. ne comprend pas de façon expresse la prévention du harcèlement moral,mais englobe la protection de la santé et de la sécurité des salariés, ainsi que l'amélioration desconditions de travail. A ce titre, le comité peut valablement faire appel à un expert agréé en cas derisque grave, notamment en cas de "souffrances professionnelles" consécutives au harcèlement moraldu salarié (10).

(1) T.A.S.S. Epinal, 28-02-2000.(2) T.G.I. de Caen (correctionnelle), 10-02-1998, Legrand c/ Robichon ;Cass. soc.,16-07-1998, Bringel c/ Sté Bronzes Strassacker.(3) CA Poitiers, 26-03-1996, Marchix c/Goudeau ; CA Montpellier, 17-06-1998, SA Deli c/ Standinguer.(4) C. pén., art. 225-14.(5) Cass. soc.,15-03-2000, n° 97-45.916. (6) Ordonnance de référé du conseil de prud'hommes de Mont-de-Marsan,8-09-1998, Beziat c/ SARL Eurocamp.(7) Cass. soc.16-07-1998.(8) L. 411-1, du Code de la Sécuritésociale.(9) CA de Versailles, 23-03-2000 ; T.A.S.S. Epinal , 28-02-2000 ; CA de Riom, ch. soc.,25-02-2000 ; T.G.I. Bobigny ,1ère ch. B, 7-12-1999.(10) CA d'Aix-en-Provence, 1re ch. civ. B, 5-07-1999.

Le harcèlement moral est constitué dès lors que des agissements répétés ont pour objet oupour effet une dégradation des conditions de travail susceptible d'altérer la santé physique oumentale du salarié ou de compromettre son avenir professionnel.

C. trav., art. L. 1152-1, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 122-49, version du 18-01-2002, à jour

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La définition du harcèlement moral

La définition de certains psycho-sociologues du harcèlement moralAvant même que le débat juridiquene se penche sur la question du harcèlement du travail, Heinz Leymann, en Suède, et Marie-FranceHirigoyen, en France, avaient déjà tenté de définir la notion de harcèlement moral.Ainsi, selon HeinzLeymann (1), le mobbing (terme anglais de harcèlement moral) "définit l'enchaînement, sur une assezlongue période, de propos et d'agissements hostiles, exprimés ou manifestés par une ou plusieurspersonnes envers une tierce personne (la cible)".Par ailleurs, pour Marie-France Hirigoyen (2), lanotion de harcèlement moral recouvre "toute conduite abusive se manifestant notamment par descomportements, des paroles, des actes, des gestes, des écrits, pouvant porter atteinte à la personnalité, àla dignité ou à l'intégrité physique ou psychique d'une personne, afin de mettre en péril l'emploi decelle-ci ou dégrader le climat de travail".L'évolution de la définition du harcèlement moralLaproposition de loi déposée le 14 décembre 1999 par le gouvernement communiste prévoyait d'insérerdans le Code du travail un article L. 122-47 énonçant qu'aucun salarié ne peut faire l'objet d'unharcèlement par la dégradation délibérée de ses conditions de travail. Aucun salarié ne peut êtresanctionné ni licencié pour avoir témoigné des agissements définis à l'alinéa précédent ou pour les avoirrelatés. Toute rupture du contrat de travail qui en résulterait, toute disposition ou tout acte contraire estnul de plein droit". Elle prévoyait également d'insérer un article 225-15 au Code pénal selon lequel "lefait de harceler un salarié dans le but de porter atteinte à sa dignité ou à son intégrité psychique est punide deux ans d'emprisonnement et de [75 000 euros] d'amende".En première lecture à l'Assembléenationale, le 11 janvier 2001, la notion de harcèlement moral a été reprise dans le projet demodernisation sociale mais sa définition, qui était la copie conforme de celle existante en matière deharcèlement sexuel, a été sensiblement modifiée :"Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés deharcèlement moral d'un employeur, de son représentant ou de toute personne abusant de l'autorité quelui confèrent ses fonctions, qui ont pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité et de créer desconditions de travail humiliantes et dégradantes.Aucun salarié ne peut être sanctionné ni licencié pouravoir témoigné des agissements définis à l'alinéa précédent ou pour les avoir relatés.Toute rupture ducontrat de travail qui en résulterait, toute disposition ou tout acte contraire est nul."Finalement le textedéfinitivement adopté dispose que :"Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlementmoral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porteratteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre sonavenir professionnel.Aucun salarié ne peut être sanctionné ou licencié ou faire l'objet d'une mesurediscriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, dereclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutationou de renouvellement de contrat pour avoir subi, ou refusé de subir, les agissements définis à l'alinéaprécédent ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.Toute rupture du contrat detravail qui en résulterait, toute disposition ou tout acte contraire est nul de plein droit."

(1) D'après, Heinz Leymann, Mobbing, la persécution au travail, Seuil, 1996.(2) D'après Marie-FranceHirigoyen, Le harcèlement moral, la violence perverse au quotidien, Editions Syros, 1998.

La volonté de harceler n'est pas requise pour incriminer le harcèlement moral.

C. trav., art. L. 1152-1, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 122-49, version du 18-01-2002, à jour

La finalité ou l'effet des agissements de harcèlement moral

Le harcèlement moral est constitué dès lors que des agissements répétés ont pour objet ou pour effetune dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits du salarié et à sadignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Peuimporte donc que ces agissements n'aient pas eu pour effet une dégradation des conditions de travail,dès lors que leur but était de parvenir à un tel résultat. Inversement, ces agissements seront égalementréprimés s'ils ont eu pour effet une dégradation des conditions de travail, alors même qu'il n'y avaitaucune volonté de harceler.

Dans la mesure où les agissements doivent être répétés, un seul acte ne peut constituer unharcèlement moral, et ce, quel que soit sa gravité.

C. trav., art. L. 1152-1, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 122-49, version du 18-01-2002, à jour

Les chiffres du harcèlement moral

Selon un sondage réalisé par Ipsos de juin 2000 (1) trois salariés sur dix ont le sentiment d'avoir déjàété l'objet de harcèlement moral sur leur lieu de travail et 37 % (2) des salariés disent avoir été témoindu harcèlement moral d'un collègue. Tous les salariés sont concernés : femmes (29 %), hommes (31 %),cadres supérieurs (35 %) ou ouvriers (32 %).Les agissements dont ils s'estiment victimes consistent, le

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plus souvent :- en une indifférence systématique de l'employeur à leur égard ;- en un refussystématique d'une augmentation ou une augmentation moins importante que les autres salariés ;- endes "brimades répétées de la part de leur supérieur hiérarchique, visant à les faire démissionner sansindemnité ou à les faire charger de service" ;- en des insultes répétées.

(1) Voir le site de l'Ipsos : http://www.canalipsos.com .(2) L'enquête a été réalisée en mai 2000 auprès de471 salariés sur un échantillon national représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus.

Un fait unique ne peut caractériser un harcèlement moral. De plus, en l'espèce, le contrôledu travail de la salariée n'était destiné qu'à assurer sa formation à de nouvelles fonctions.

Cass. soc., 15-04-2008, n° 07-40.290, Mme Zohra Meghraoui, F-D

Le harcèlement moral est constitué qu'il émane de l'employeur ou d'un salarié del'entreprise.

C. trav., art. L. 1152-1, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 122-49, version du 18-01-2002, à jourC. trav., art. L. 1152-5, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 122-50, version du 18-01-2002, à jour

Les niveaux de harcèlement

Le texte adopté en 1ère lecture à l'Assemblée nationale le 11 janvier 2001 n'envisageait que leharcèlement moral vertical (émanant de l'employeur). En effet, le harcèlement moral ne pouvaitémaner que d'un employeur, de son représentant ou de toute personne abusant de l'autorité que luiconfère ses fonctions.Finalement, cette solution n'a pas été retenue. Le texte adopté envisage aussi bienle harcèlement moral vertical qu'horizontal (émanant de salariés).En réalité, la première version dutexte s'inspirait des dispositions applicables au harcèlement sexuel (C. pén., art. 222- 33). Finalementc'est ce dernier qui suit le pas du harcèlement moral dans la mesure où l'article 222-33 du Code pénal aété modifié par la loi de modernisation sociale. En effet, les mots "par une personne abusant del'autorité que lui confèrent ses fonctions" sont supprimés, de sorte que le harcèlement sexuel peutdésormais être, tout comme le harcèlement moral, aussi bien vertical qu'horizontal.

Constituent un harcèlement moral le retrait sans motif du téléphone portable à usageprofessionnel, l'instauration d'une obligation de se présenter tous les matins au bureau dusupérieur, l'attribution de tâches sans rapport avec les fonctions exercées.

Cass. soc., 27-10-2004, n° 04-41.008, publié

Harcèlement moral

Rendu tristement célèbre par certaines affaires édifiantes et les travaux, notamment, de Marie-FranceHirigoyen (Le harcèlement moral, Syros, 1998), le harcèlement moral a fait son entrée dans le Code dutravail avec la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 ). Jusqu'à aujourd'hui, la Cour decassation n'avait eu que rarement à connaître de telles affaires. Pour la première fois, la Chambresociale de la Cour de cassation livre une définition de ce phénomène dans un arrêt du 27 octobre 2004,où les dispositions de la loi du 17 janvier 2002 n'étaient pas applicables (1). Elle précise, également,quelles sont les conséquences, pour le salarié, de ces comportements déviants (2).

Mme Pouvreau a été engagée par la société Mât de misaine, le 2 novembre 2000, par contrat à duréedéterminée, en qualité d'animatrice de magasin. Son contrat de travail a été renouvelé le 31 janvier 2001pour une durée de onze mois. La salariée a saisi la juridiction prud'homale de demandes enrequalification de son contrat de travail en contrat à durée indéterminée et en paiement de diversesindemnités, notamment pour harcèlement moral.

1. Les éléments constitutifs du harcèlement moralL'apport de la loi du 17 janvier 2002

La loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 () a introduit dans le Code du travail plusieursdispositions relatives au harcèlement moral.

L'article L. 122-49 du Code du travail () définit le harcèlement moral comme des "agissements répétés[...] qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porteratteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre sonavenir professionnel".

Cette définition est plus précise que celle qu'en donne la directive 2002/73/CE du Parlement européen etdu Conseil du 23 septembre 2002 () modifiant la directive 76/207/CEE du Conseil, relative à la mise enoeuvre du principe de l'égalité de traitement entre hommes et femmes, en ce qui concerne l'accès àl'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles, et les conditions de travail (), la direcive76/207/CEE étant abrogée à compter du 15 août 2009 et remplacée par la directive 2006/54/CE du 5juillet 2006 (), et qui vise le "comportement non désiré lié au sexe d'une personne, ayant pour objet ou

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pour effet de porter atteinte à la dignité d'une personne et de créer un environnement intimidant,hostile, dégradant, humiliant ou offensant".L'absence de véritable définition jurisprudentielle

Jusqu'à cet arrêt, rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation le 27 octobre 2004, la Hautejuridiction n'avait pas eu l'occasion de donner plus de précisions sur la nature de ces comportements,même si de nombreuses décisions des juridictions du fond avaient dressé un catalogue de "l'imaginationdémoniaque de certains pervers" (TGI de Bobigny, Première Chambre B, 7 décembre 1999 Chapet c/Société Hella, Dr. ouvrier 2000, p. 194, chron. P. Bouaziz : un salarié avait reçu des avertissements àrépétition en raison de baisses dans ses ventes, sans avoir jamais eu le temps de prendre les mesuresréclamées par l'employeur pour améliorer des performances et alors, au contraire, que les chiffres deses ventes étaient en hausse ; CA, Aix-en-Provence, chbre soc. 17, 18 décembre 2001, Dr. soc. 2002, p.701, chron. C. Bouty : salariés victimes de brimades, bureau sous un escalier, pas de véhicule defonction, mutations à répétition, etc).

Dans certaines décisions, la Cour de cassation avait censuré les juges du fond qui avaient retenu uneconception trop large du harcèlement moral, caractérisé par le seul fait "que le salarié avait, par lepassé, fait l'objet de plusieurs tentatives de licenciement, toutes infructueuses, pour des motifssimilaires" (Cass. soc., 8 janvier 2003, n° 00-46.824, Société Jeumont c/ M. Michel Blondeau, F-D ), ouque le salarié "s'est vu infliger deux sanctions disciplinaires irrégulières en l'espace d'un mois et 4jours" (Cass. soc., 16 juin 2004, n° 02-41.795, Société des Taxis de la Seine c/ M. Mohamed Aouidad,F-D ).

Dans d'autres affaires, en revanche, la Cour reprochait aux juges du fond d'avoir écarté le harcèlementdans des hypothèses où le salarié avait invoqué ce grief. A ces occasions, la Cour avait fait référence à"des procédés vexatoires, abusifs et pénibles la poussant à démissionner" (Cass. soc., 19 novembre 2003,n° 02-41.530, Mme Natacha Azaïs c/ Société Salans Hertzfeld et Heilbronn, F-D ).L'apport de l'arrêt du27 octobre 2004

Cet arrêt, rendu le 27 octobre 2004, nous donne donc, pour la première fois, dans une décision publiéeau bulletin, une définition précise du harcèlement moral.

Dans cette affaire, une salariée, initialement embauchée sous contrat à durée déterminée pour une duréede deux mois, puis renouvelée pour une période de onze nouveaux mois, avait quitté son emploi et saisila juridiction prud'homale de demandes tendant à la requalification de son contrat en contrat de travailà durée indéterminée et réclamait à son employeur diverses indemnités, dont certaines en réparation dupréjudice que lui avait causé le harcèlement moral dont elle avait été l'objet. La cour d'appel lui avaitentièrement donné raison, et cet arrêt se trouve ici confirmé par le rejet du pourvoi.

Bien qu'elle fasse référence au pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond, l'intention de laHaute juridiction est bien de donner son aval au travail de qualification des faits. La Chambre socialede la Cour de cassation reprend, ici, les éléments relevés par la juridiction d'appel et constate, avec elle,que "la salariée avait fait l'objet d'un retrait sans motif de son téléphone portable à usage professionnel,de l'instauration d'une obligation nouvelle et sans justification de se présenter tous les matins au bureaude sa supérieure hiérarchique, de l'attribution de tâches sans rapport avec ses fonctions, faitsgénérateurs d'un état dépressif médicalement constaté nécessitant des arrêts de travail". Parconséquent, la cour d'appel a, "par une appréciation souveraine, estimé que la conjonction et larépétition de ces faits constituaient un harcèlement moral".Les éléments constitutifs du harcèlementmoral

De ces éléments ressortent, très nettement, deux séries d'indices.

Les premiers sont de nature objective et décrivent le comportement fautif de l'employeur. Il s'agissait debrimades et autres mesquineries destinées à priver le salarié de ses moyens de travail (retrait sans motifde son téléphone portable à usage professionnel), d'obligations professionnelles injustifiées (instaurationd'une obligation nouvelle et sans justification de se présenter tous les matins au bureau de sa supérieurehiérarchique), ou contraires aux fonctions pour lesquelles la salariée avait été recrutée (attribution detâches sans rapport avec ses fonctions). Ces faits constituent, par leur "conjonction" et leur"répétition", un harcèlement moral. Il apparaît donc que le harcèlement s'apparente à une infractiond'habitude et qu'un seul comportement, même fautif, n'est pas suffisant, conformément d'ailleurs à ladéfinition qu'en donne l'article L. 122-49 du Code du travail (), qui vise des "agissements répétés".

L'autre composante du harcèlement moral est psychologique. Dans cette affaire, les juges du fondavaient bien relevé l'existence "d'un état dépressif médicalement constaté nécessitant des arrêts detravail". Cette atteinte à la santé du salarié figure également dans l'article L. 122-49 du Code du travailqui fait référence à l'altération de la santé physique ou mentale du salarié.L'absence de fondementtextuel à la condamnation

Dans la mesure où il s'agit ici d'un arrêt de rejet, la Cour de cassation n'a pas pris la peine d'indiquer lefondement de la décision, alors que dans d'autres arrêts elle avait visé, faute de pouvoir faire uneapplication de l'article L. 122-49 du Code du travail (), soit l'article 1134, alinéa 3, du Code civil (),consacrant l'exigence de bonne foi dans l'exécution du contrat de travail (Cass. soc., 16 juin 2004, n°02-41.795, Société des Taxis de la Seine c/ M. Mohamed Aouidad, F-D ), soit l'article L. 122-45 du Codedu travail () qui constitue le siège des applications du principe de non-discrimination (Cass. soc., 8janvier 2003, n° 00-46.824, Société Jeumont c/ M. Michel Blondeau, F-D ).

Sans doute, l'article 1382 du Code civil () pourrait-il fonder la condamnation de l'employeur à desdommages-intérêts ou, directement, les articles L. 122-14-4 () et L. 122-14-5 () du Code du travail,lorsque le juge statue sur la cause réelle et sérieuse du licenciement.

2. La sanction du harcèlement moralLes sanctions prévues par la loi du 17 janvier 2002

La loi du 17 janvier 2002 a prévu plusieurs sanctions, comme la nullité des actes pris en violation del'interdiction (C. trav., art. L. 122-49, al. 3), la mise en cause de la responsabilité disciplinaire du salariéharceleur (C. trav., art. L. 122-50 ) et, le tout, sans préjudice des sanctions pénales édictées par l'article

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222-33-2 du Code pénal ( un an de prison, 15 000 Euros d'amende).Les sanctions prononcées en l'espèce

Dans cette affaire, aucune de ces sanctions n'était directement applicable, puisque les faits étaientantérieurs à l'entrée en vigueur de la loi nouvelle.

Les demandes présentées par la salariée se fondaient sur d'autres dispositions du Code du travail, ce quia permis aux juges du fond de sanctionner indirectement l'employeur, puisque le contrat de travail a étérequalifié en contrat de travail à durée indéterminée et la rupture analysée comme un licenciement sanscause réelle et sérieuse.La nécessaire annulation du licenciement

Il nous semble que la salariée aurait pu ici être plus ambitieuse et la sanction plus lourde. Certes, lanullité du licenciement ne pouvait être prononcée sur le fondement de l'article L. 122-49 du Code dutravail, comme nous l'avons rappelé.

Mais, en application de la jurisprudence "Clavaud" (Cass. soc., 28 avril 1988, n° 87-41.804, Sociétéanonyme Dunlop France c/ M. Clavaud, publié ) depuis confirmée (Cass. soc., 13 mars 2001, n°99-45.735, Mme Hugues c/ Société France Télécom et autre, publié , Dr. soc. 2001, p. 1117, obs. C.Roy-Loustaunau ; Cass. soc., 31 mars 2004, n° 01-46.960, Société nouvelle Les Tricotages du Bassigny c/Mme Anne Marie Fréquelin, épouse Voinchet, F-P+B , voir Annulation du licenciement et article 6 de laCESDH : la salutaire mise au point de la Cour de cassation, Ch. Radé, Lexbase Hebdo n° 115 du 8 avril2004 - édition sociale ), un licenciement peut être annulé et le salarié réintégré, lorsque l'employeur aviolé une liberté fondamentale du salarié.

Or, il nous semble bien que le harcèlement moral, lorsqu'il est avéré (dans l'hypothèse d'un fauxharcèlement : Cass. soc., 18 février 2003, n° 01-11.734, Mme Geneviève Beauzac c/ Société Fiduciairejuridique et fiscale de France (Fidal), inédit , voir Tel est pris qui croyait prendre - nul ne peut accuserimpunément autrui de harcèlement, Ch. Radé, Lexbase Hebdo n° 60 du jeudi 27 février 2003 - éditionsociale ), porte bien atteinte à la santé et à la sécurité du salarié.

La Cour de cassation pourrait alors affirmer, de manière plus énergique et pour les faits antérieurs à laloi du 17 janvier 2002, que le licenciement du salarié harcelé est nul, ce qui constitue une satisfactionpour la victime, même si l'hypothèse d'une réintégration effective dans l'emploi semblerait peuprobable, tout du moins tant que le harceleur demeure en place.

Christophe RadéProfesseur à l'université Montesquieu-Bordeaux IVDirecteur scientifique de LexbaseHebdo, édition sociale LEXBASE HEBDO n° 141 du Mercredi 3 Novembre 2004 - Edition SOCIALE

Le point de vue de Claude Roy-Loustaunau

La Cour de cassation, dans cet arrêt, exerce sur le "standard" que représente la notion de harcèlementmoral, un certain contrôle. En effet, comme le constate Claude Roy-Loustaunau, "elle apprécieindirectement la qualification opérée par les juges du fond en vérifiant la pertinence de leur motivationsur les circonstances révélatrices de la gravité des agissements constitutifs du harcèlement moral dont asouffert la salariée". Et la Chambre sociale de souligner que "la conjonction et la répétition de ces faitsconstituent un harcèlement moral".

Ainsi, la Cour de cassation, à travers cette décision, livre les deux critères constitutifs du harcèlementmoral : d'une part, le critère objectif, constitué par le comportement du harceleur et, d'autre part, lecritère subjectif, s'agissant des répercussions d'un tel comportement sur la santé physique et mentale dela salariée. D'ailleurs, en l'espèce, c'est bien l'origine professionnelle de la dépression de la salariée quel'employeur contestait et, par la même, la recevabilité du certificat médical du médecin traitant produitpar la salariée. Mais, malgré les arguments invoqués par l'employeur devant la Cour, cette dernière n'apas été convaincue : la constatation de l'existence d'un état dépressif médicalement constaté nécessitantdes arrêts de travail a suffi a justifier de l'origine des troubles.

Enfin, comme le précise Claude Roy-Loustaunau, "les nouveaux textes n'étant pas applicables avec leurcortège de sanctions civiles (notamment la nullité du licenciement) et pénales, on peut, en marge del'arrêt, s'interroger sur le fondement juridique de la condamnation pour harcèlement moral". Les jugesayant rejeté le pourvoi, ils n'étaient pas tenus de viser un texte en particulier.

Mais, il est bien évident que l'employeur a été condamné à verser à la salariée harcelée des dommagesintérêts en réparation d'un préjudice particulier, dans le cadre de la requalification d'un CDD en CDIet de la rupture du contrat à l'initiative de la salariée, analysée comme un licenciement dépourvu decause réelle et sérieuse. Pourtant, comme le souligne l'auteur, on aurait aimé que la voie de secours queconstitue a nullité du licenciement soit ouverte à la salariée victime.

D'après Claude Roy-Loustaunau, Droit social n° 1, janvier 2005, p. 100

Des tentatives de licenciement, toutes infructueuses, pour des raisons similaires, nepermettent pas de caractériser l'existence d'un harcèlement moral et d'une discriminationsyndicale.

Cass. soc., 08-01-2003, n° 00-46.824, inédit

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La salariée s'étant livrée à une manoeuvre consistant à adresser à son supérieur deux lettreslui imputant faussement des actes de harcèlement moral et à poursuivre en justice larésolution de son contrat, elle s'est rendu coupable de faute grave.

Cass. soc., 18-02-2003, n° 01-11.734, inédit

Tel est pris qui croyait prendre - nul ne peut accuser impunément autrui de harcè

Plus de dix ans après l'adoption de la loi du 2 novembre 1992 relative à la lutte contre le harcèlementsexuel au travail () et un an après l'introduction dans le Code du travail de la notion de harcèlementmoral (loi nº 2002-73 du 17 janvier 2002 ), la jurisprudence est aujourd'hui amenée à trier le bon grain de l'ivraie et de séparer les vraies affaires de harcèlement, particulièrement scandaleuses , des fausseshistoires montées de toutes pièces par des salariés voulant profiter d'un courant de sympathiemédiatique et judiciaire pour soutirer à leur employeur quelques euros supplémentaires à l'occasion dela rupture du contrat de travail. Or , l'exercice n'est pas sans risques pour le salarié qui se fait prendre,comme le montre un arrêt rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation le 18 février 2003.

Dans cette affaire, une avocate salariée avait adressé à son supérieur hiérarchique deux lettres luiimputant des actes de harcèlement moral et avait poursuivi en justice , sur le fondement des mêmesaccusations, la résolution de son contrat de travail aux torts de l'employeur. Ce dernier, considérantque cette dénonciation méritait d'être sanctionnée, avait prononcé à son égard un licenciement pourfaute grave que la salariée contestait devant le conseil de prud'hommes. Les juges du fond avaient donné raison à l'employeur après avoir considéré que ces allégations étaient mensongères . Le pourvoidirigé contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles le 29 mars 2001 est ici rejeté. Selon la Chambresociale de la Cour de cassation, "la cour d'appel , qui a relevé que la salariée s'était livrée à unemanoeuvre ayant consisté à adresser à son supérieur hiérarchique deux lettres lui imputant faussementdes actes de harcèlement moral et à poursuivre en justice, sur le fondement des mêmes accusations, larésolution de son contrat de travail aux torts de l'employeur, a pu décider que ce comportement étaitde nature à rendre impossible son maintien en fonctions pendant la durée du préavis et constituait unefaute grave". La salariée avait essayé de mobiliser toutes les techniques qui conduisent habituellement àla condamnation de l'employeur (1), mais en vain, ce qui ne paraît pas choquant compte tenu de lanature des faits (2).

1 - Les éléments caractérisant le harcèlement moral

Introduite par la loi du 17 janvier 2002, la définition du harcèlement moral figure dans le Code dutravail à l'article L. 122-49 (). Selon ce texte, " aucun salarié ne doit subir les agissements répétés deharcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travailsusceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou decompromettre son avenir professionnel". Une même règle s'applique au salarié qui serait "sanctionné ,licencié ou (qui ferait) l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte , notamment enmatière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation , de qualification, declassification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi, ou refusé de subir, les agissements définis à l'alinéa précédent ou pour avoir témoigné de telsagissements ou les avoir relatés". La définition, dont le moins que l'on puisse dire est qu'elle n'est pasaisée à cerner, est bien entendu appréciée souverainement par les juridictions du fond et suscite dès àprésent un contentieux nourri.

Face à ce qu'il considère être un harcèlement moral (mais la remarque vaut également pour leharcèlement sexuel de l'article L. 122-46 du Code du travail ( ), le salarié dispose d'une option.

Il peut tout d'abord quitter l'entreprise et saisir le conseil de prud'hommes d 'une demande dedommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse . On sait en effet qu'aujourd'hui,les tribunaux dissocient l'initiative de la rupture et son imputabilité et que le salarié qui quittel'entreprise n'est pas ipso facto considéré comme démissionnaire, dès lors que sa décision n'est pasl'expression d 'une volonté claire et non équivoque. Lorsque les juges estiment que le départ de l'entreprise a été directement provoqué par le harcèlement dont le salarié a été la victime, ilsn'hésiteront pas à condamner l'employeur sur le fondement des articles L. 122-14-4 () ou L.122-14-5 ()du Code du travail (Cass . soc., 16 juillet 1987, Yves Douchet c/ Théotime Patissou. - Cass. soc., 16décembre 1993, n° 90-43.039, M. Alexandre Baudeloque c/ Mme Mariemma Malnar, inédit - CAAix-en-Provence, 18 chambre, 4 janvier 1995 : JCP E 1996, II, 789, note C. Roy -Loustaunau : 20.000F. de dommages-intérêts. - CA Paris, Ch. Soc., 18ème C., 16 janv . 1997 : Dr. ouvrier 2000, p. 202,chron. P. Bouaziz. - CA Pau, Chambre sociale, 9 février 1998 ; Société Jean Salet Entreprise c/dePizzol. - Cass. soc., 13 janvier 1999, n° 268 D. - CA Paris, 14 avril 1999 : Dr. ouvrier 2000, p. 198, chron.P. Bouaziz. - CA Rennes, chambre 8 A, 4 février 1999 : 50.000 F. - CA Toulouse, 31 mars 2000 : RJS2001, n° 404. - CPH Longjumeau, 5 septembre 2000 : Dr. ouvrier 2001, p. 158 , obs. M.-F. Bied-Charreton. - CPH Longjumeau, 21 mai 2001 : Dr. ouvrier 2001, p . 439, obs. P. Bouaziz . - CAToulouse, 30 mai 2001 : RJS 2001, n° 1218. - CA Rennes , chambre prud. 5, 16 oct. 2001) et à viser lesarticles 1382 et suivants du Code civil pour accorder au salarié des dommages et intérêts en réparationdu préjudice subi (CA Rennes, Chambre prud. 8, 23 mai 2002 : 6000 Euro(s). - CA Paris, chambre 18,section D, 16 sept. 2002).

Le salarié peut également opter pour une autre voie et, tout en continuant d'exécuter son contrat detravail (ce qui suppose que cette exécution soit encore possible humainement , ce qui n'est pas toujoursle cas), saisir le conseil de prud'hommes d'une demande de résolution judiciaire. Si le conseil considèrela demande du salarié justifiée , il pourra alors, sur le fondement de l'article 1184 du Code civil () ,prononcer la résolution aux torts de l'employeur (Ord. de référé du Conseil de Prudhommes deMont-de-Marsan, 7 septembre 1998, Beziat c/ SARL Eurocamp : Dr. ouvrier 2000, p. 199, chron. P.Bouaziz. - Cass. soc., 15 mars 2000, n° N 97-45.916 D, Société France restauration rapide c/ Gavin,

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inédit ) - CPH Limoges, 17 avr . 2000 : Dr. ouvrier 2000, p. 288. - CA Grenoble, 20 avril 2001 : RJS2001, n° 1245 . - CA Orléans, 7 novembre 2001 : 60.100 Euro(s) de dommages-intérêts. - CA Orléans,chbre soc., 12 septembre 2002 : 38.426 Euro(s) de dommages-intérêts), ce qui produira les mêmes effetsqu'un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 20 janvier 1998 , n° 95-43.350, M Leudièrec/ société Trouillard, publié, D. 1998, p. 350, note C . Radé ).

Mais quelle que soit la voie choisie, les juges du fond disposent d'un important pouvoir d'appréciationet peuvent débouter le salarié s'ils estiment sa demande non fondée. Les accusations formulées par lesalarié peuvent alors se retourner contre lui, comme le montre cet arrêt rendu par la Chambre socialede la Cour de cassation le 18 février 2003.

2 - Les risques d'une dénonciation frauduleuse

Dans cette affaire, en effet, les magistrats n'avaient pas été convaincus par les éléments fournis par lesalarié. La loi lui facilite toutefois singulièrement les choses en allégeant son fardeau probatoire.L'article L. 122-52 du Code du travail (), issu de la loi du 17 janvier 2002, dispose en effet qu'"en casde litige relatif à l'application des articles L. 122-46 et L. 122-49, dès lors que le salarié concerné établitdes faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, il incombe à la partie défenderesse,au vu des ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement etque sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme saconviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles".

Dans notre affaire, ces dispositions n'étaient pas directement applicables. Les juges du fond avaient enréalité bien vite compris que le salarié avait, semble-t -il, monté cette affaire de toutes pièces pourtenter de tirer partie du climat favorable aux actions fondées sur l'existence d'un harcèlement.

L'employeur avait également peu goûté la manoeuvre et avait licencié la salariée pour faute grave. Lesjuges l'avaient suivi et considéré que "la salariée s'était livrée à une manoeuvre ayant consisté àadresser à son supérieur hiérarchique deux lettres lui imputant faussement des actes de harcèlementmoral". Telle est prise qui croyait prendre !

La solution n'est pas nouvelle et le salarié qui décide de jouer sur la corde sensible du harcèlement seretrouve souvent pris au piège de ses propres mensonges. La Cour de cassation impose certes aux jugesdu fond d'établir préalablement le caractère mensonger des allégations avant d'admettre lelicenciement pour faute (Cass. soc ., 27 janvier 1993, n° 91-45.777, Mme Beguet c/ Fondationeuropéenne des métiers de l'image et du son, publié, Dr. soc. 1993, p. 349 ), mais de nombreux salariésont dû essuyer les foudres de licenciements disciplinaires pour avoir joué à ce petit jeu pervers. Enl'absence de réelle intention de nuire, le licenciement sera prononcé soit pour faute sérieuse, comptetenu des circonstances parfois complexes des affaires (CA Pau, Chbre sociale, 16 décembre 1996), soitpour faute grave (CA Bourges, chbre soc., 24 novembre 1995) comme c'était le cas ici. La qualification de faute lourde sera même parfois retenue lorsque l'intention de nuire apparaîtra nettement au traversdu dossier (CA Dijon , 29 sept. 1993 : RJS 1994, n° 820 : la salariée avait inventé une histoire deharcèlement sexuel et avait même appelé l 'épouse de son employeur).

Une telle sévérité est évidemment justifiée. Si le harcèlement doit en effet être combattu avec toute larigueur qui soit, il est également nécessaire de montrer aux salariés que des accusations deharcèlements formulées à la légère peuvent nuire considérablement à l'entreprise et provoquer, chezcertains employeurs, des traumatismes profonds qui seront parfois difficiles à soigner.

Christophe RadéProfesseur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IVDirecteur scientifique de LexbaseHebdo, édition sociale

Le retrait brutal des fonctions de la salariée, la restructuration de son bureau, la reprise dutéléphone portable, l'avertissement injustifié ne caractérisent pas un harcèlement moral maisun manquement à l'obligation d'exécuter le contrat de bonne foi.

CA Paris, 18e, D, 23-11-2004, n° 04/34060, Mme Dominique SCIIREINER c/ ASSOCIATION DES COMMERCANTSDU CENTRE COMMERCIAL LES ULIS 2

Les juges du fond apprécient souverainement l'existence d'un harcèlement moral.

Cass. soc., 23-11-2005, n° 04-46.152, Mme Jeanne Foata c/ société Polyclinique Santa Maria, F-PCass. soc., 23-11-2005, n° 04-41.649, Mme Viviane Prins-Jorge c/ Association de sauvegarde de l'enfance et de

l'adolescence des Yvelines (SEAY), F-PCass. soc., 11-07-2006, n° 04-48.051, Mme Anna Fauquet, F-D

La Cour de cassation confirme l'arrêt rendu par les juges du fond qui ont prononcé la nullitédu licenciement pour violation de l'article L. 122-49 du Code du travail, tous les élémentsconstituant le harcèlement moral étant présents.

Cass. soc., 04-04-2006, n° 04-43.929, société Hymatom c/ M. Cyril Singer, F-D

Est victime de harcèlement moral la salariée qui n'a précédemment fait l'objet d'aucun

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reproche et qui est sanctionnée par quatre avertissements dont aucun n'est fondé et dont il estrésulté une dégradation de ses conditions de travail.

Cass. soc., 22-03-2007, n° 04-48.308, société Les Pyramides, F-D

Des conditions de travail dégradées et stressantes, affectant toute l'équipe et, non seulement,la demanderesse, à la suite de l'arrivée d'un nouveau directeur, ne s'inscrivent pas dans unprocessus de harcèlement moral.

CA Paris, 18e, D, 04-09-2007, n° 06/10196, Mme Sophie VERNET c/ Immeuble Les Portes de Paris

1002 3. Les agissements répréhensibles au titre du harcèlement moral [E1460AWY]

Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objetou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à sesdroits et à sa dignité.

C. trav., art. L. 1152-1, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 122-49, al. 1, version du 18-01-2002, à jour

Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objetou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible d'altérer sa santé physiqueou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

C. trav., art. L. 1152-1, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 122-49, al. 1, version du 18-01-2002, à jour

Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire,directe ou indirecte, pour avoir subi ou refusé de subir les agissements répétés deharcèlement moral.

C. trav., art. L. 1152-2, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 122-49, al. 1, version du 18-01-2002, à jour

Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire,directe ou indirecte, pour avoir témoigné de tels agissements.

C. trav., art. L. 1152-2, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 122-49, al. 1, version du 18-01-2002, à jour

Les dispositions de l'article L. 122-49 du Code du travail sont applicables aux marins.

C. trav., art. L. 1152-1, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 742-8, version du 18-01-2002, à jour

C. trav., art. L. 122-49, version du 18-01-2002, à jour

Les dispositions de l'article L. 122-49 du Code du travail sont applicables, dans leur relationavec leur employeur, aux concierges et employés d'immeubles à usage d'habitation et auxemployés de maison.

C. trav., art. L. 7211-3, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 771-2, version du 06-03-2007, à jour

C. trav., art. L. 7221-2, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 772-2, version du 06-03-2007, à jour

C. trav., art. L. 1152-1, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 122-49, version du 18-01-2002, à jour

Le fait pour l'employeur d'affecter la salariée dans un local exigu, sans outils de travail nichauffage décent, de l'isoler des autres salariés de l'entreprise et de mettre en doute sonéquilibre psychologique constitue du harcèlement moral.

Cass. soc., 29-06-2005, n° 03-44.055, M. Guy Lambert c/ Mme Chantal Boursier, F-D

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Le harcèlement moral peut être le fait de modifier délibérément des heures de présence,d'empêcher le salarié d'accèder à son lieu de travail, de le priver de ses salairesirrégulièrement, de lui faire des reproches injustifiés ou réflexions désobligeantes

Cass. crim., 21-06-2005, n° 04-86.936, LAPEYRE Jean-Noël, F-P+F

Harcèlement moral d'un agent administratif : position de la Chambre criminelle

Depuis l'entrée en vigueur de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 () qui a fait duharcèlement moral un délit pénal, rares sont les décisions des juridictions répressives statuant sur cedélit, par rapport aux nombreux litiges prud'homaux pour lesquels le harcèlement moral est souventinvoqué dans les prétoires.

L'arrêt rendu le 21 juin 2005 par la Chambre criminelle donne ainsi l'occasion d'analyser la manièredont les juridictions répressives appréhendent le délit de harcèlement moral et ses éléments constitutifs.Ce délit fait l'objet de deux sanctions pénales différentes : l'une prévue par le Code du travail(prévoyant une peine d'emprisonnement d'un an et une amende de 3 750 euros), l'autre prévue par leCode pénal (prévoyant une peine d'emprisonnement d'un an et une amende de 15 000 euros), endonnant toutefois une définition identique des agissements constitutifs de harcèlement moral. Le champd'application du texte pénal est toutefois plus vaste que celui issu du Code du travail : l'article 222-33-2du Code pénal () a vocation à s'appliquer à autrui, tandis que l'article L 122-49 du Code du travail ()vise à protéger les salariés. En l'espèce, la plaignante n'avait pas d'autre choix que d'agir sur lefondement du Code pénal, étant donné son statut d'agent administratif. Quelle appréciation est faite dela notion de harcèlement moral par la Chambre criminelle, au travers des concepts de droit pénal ?

Une employée municipale a porté plainte pour harcèlement moral contre le maire de la commune pourdes faits commis entre le mois de mars 2001 et le mois d'août 2002, consistant dans :

- le refus d'harmoniser son statut avec les dispositions légales relatives aux 35 heures et àl'aménagement du temps de travail ;

- son exclusion temporaire pour trois jours ;

- la réduction de son temps de travail de 7 heures à 3 heures hebdomadaires ;

- la modification unilatérale de ses horaires de travail, l'empêchant notamment de remplir ses fonctionsdans une autre mairie ;

- les entraves apportées à l'accès à son lieu de travail (changement des serrures) et à ses outils de travail(notamment par le changement du mot de passe de son ordinateur) ;

- les reproches injustifiés sur son travail ;

- les réflexions désobligeantes et répétitives ;

- le non-paiement de ses salaires depuis le mois de juillet 2002.

La cour d'appel de Riom a retenu l'infraction de harcèlement moral, en considérant que le délit deharcèlement moral était constitué pour les faits s'étant déroulés entre l'entrée en vigueur de la loi demodernisation sociale du 17 janvier 2002, et le mois d'août 2002, dans la mesure où "par leur répétitionet leur gravité, [ces] agissements prohibés, causes de dégradation des conditions de travail de [lavictime] sont suffisamment établis ; que ces mesures [...] vexatoires, injustes et tout à fait inappropriéesqui ne trouvent leur justification que dans la volonté bien arrêtée [du maire] de se séparer d'unesecrétaire de mairie qui ne lui convenait plus [...] portent indubitablement atteinte à la dignité de lavictime [...] et à ses droits".

Le maire faisait notamment grief à la Cour d'avoir excédé son pouvoir en se fondant sur les faitspostérieurs à ceux énoncés dans sa saisine, et de pas avoir caractérisé l'élément intentionnel del'infraction.

1. Procédure pénale et délit de harcèlement moral

1.1. L'application du principe de non rétroactivité de la loi pénale

Bien que cet élément n'ait pas fait l'objet d'un moyen de cassation, il convient de souligner l'applicationqui a été faite par les juges du fond du principe de non rétroactivité de la loi pénale.

Saisie de faits commis antérieurement et postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi demodernisation sociale, la cour d'appel a écarté ceux s'étant déroulés avant le 18 janvier 2002, enapplication du principe de non rétroactivité de la loi pénale.

Cette application mérite d'être soulignée, car dans une autre affaire, le délit de harcèlement moral avaitété retenu pour des faits survenus antérieurement et postérieurement à l'entrée en vigueur de lanouvelle loi, au motif que le harcèlement moral est un "délit d'habitude" : "Qu'une loi nouvelles'applique à l'infraction d'habitude dès lors que le dernier acte constitutif est postérieur à l'entrée envigueur de cette loi ;qu'en conséquence dans le cadre d'une infraction d'habitude le tribunal a examiné

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les faits antérieurs à la loi nouvelle présentant un caractère indissociable sans faire échec au principegénéral de la non-rétroactivité des lois".

L'infraction d'habitude nécessite la commission d'actes identiques les uns des autres.

Or, si le texte incriminant le harcèlement moral exige des agissements répétés, l'intention du législateurétait de pouvoir réprimer "l'ensemble des situations réelles de harcèlement moral", c'est-à-dire larépétition de comportements aussi bien identiques que différents.

Par ailleurs, il a été précisé, au cours des travaux préparatoires de la loi, que "l'application rétroactivede ces sanctions n'est pas possible".

Cette position semble avoir été implicitement validée par la Chambre criminelle, qui n'a pas entendu sesaisir d'office d'un moyen fondé sur l'application d'un principe d'ordre public, pour casser l'arrêt rendupar la cour d'appel.

1.2. La prise en compte par le juge répressif de faits non contenus dans sa saisine

La cour d'appel de Riom, sans pour autant qualifier de harcèlement moral les faits survenuspostérieurement au mois d'août 2002, dont elle n'était pas saisie, les a rappelés "à titre derenseignements, dans la mesure où ils s'inscrivaient dans le prolongement des agissements poursuivis eten constituaient l'aboutissement logique".

La Cour a donc pris en compte la décision de radiation, intervenue en janvier 2003, dont elle n'était passaisie, pour caractériser l'élément moral et considérer que le maire avait pris à l'encontre de la victimeun "ensemble de mesures vexatoires, injustes et inappropriées trouvant leur justification dans savolonté de se séparer d'une secrétaire de mairie qui ne lui convenait plus".

La Chambre criminelle, saisie de ce moyen, valide l'interprétation des juges du fond.

Cette solution semble toutefois critiquable, dans la mesure où le juge pénal ne peut statuer que sur lesfaits dont il est saisi.

Le fait que les juges se soient emparés de faits dont ils n'étaient pas saisis pour mettre en exerguel'intention coupable du maire témoigne des difficultés que rencontrent les juridictions pour caractériserles éléments constitutifs du délit de harcèlement moral, dont la définition légale demeure approximativeet succincte.

2. La caractérisation du délit de harcèlement moral

2.1. De la définition succincte et approximative donnée par le législateur...

Inscrite dans le Code pénal et le Code du travail, le législateur a donné une définition identique duharcèlement moral, qui consiste en des "agissements répétés [...] qui ont pour objet ou pour effet unedégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérersa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel".

Toute infraction intentionnelle, pour être constituée, doit réunir trois éléments :- un élément légal : lefondement textuel de l'incrimination ;- un élément matériel : un acte positif ou un acte d'abstention ;-un élément intentionnel : l'intention coupable de l'auteur de commettre l'infraction.

Appliqué au délit de harcèlement moral, l'élément matériel consiste en la commission d'agissementsrépétés, qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porteratteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre sonavenir professionnel.

Ainsi, si les agissements doivent créer une dégradation des conditions de travail, ce seul critère n'est passuffisant : il faut en outre que cette dégradation soit susceptible d'avoir un impact sur la santé physiqueou morale du salarié ou de compromettre son avenir professionnel ou encore de porter atteinte à sadignité et à ses droits.

Il n'est pour autant pas nécessaire qu'un "résultat" ait été atteint : les actes de harcèlement doivent être"susceptibles" d'entraîner ce résultat.

L'élément intentionnel est plus difficile à cerner : est-il nécessaire de démontrer que le délinquant a eul'intention de nuire, c'est-à-dire l'objectif avéré de dégrader les conditions de travail d'autrui et de luiporter atteinte ?

La précision selon laquelle les agissements ont "pour effet ou pour objet" la dégradation des conditionsde travail "susceptible" d'atteindre la victime permet -elle, comme cela a été précisé lors des travauxparlementaires, de qualifier de harcèlement moral des agissements perpétrés sans intention de nuire ?

La nuance des termes a son importance : "pour objet" ferait référence à un but volontairementpoursuivi, tandis que "pour effet" tendrait à considérer que la dégradation des conditions peut ne pasavoir été voulue.

Cependant, ne faut-il pas que la loi prévoit spécifiquement qu'il peut y avoir délit par négligence ouimprudence selon les distinctions établies par l'article 121-3 du Code pénal (), ce qui n'est pas le cas enl'espèce ?

La définition légale du harcèlement moral demeurant imprécise, il incombe à la jurisprudence dedélimiter plus précisément la notion de harcèlement moral.

2.2. ...à l'appréciation souveraine des juges du fond

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La Chambre criminelle, par une motivation succincte laissant à l'appréciation souveraine des juges dufond la caractérisation de l'élément intentionnel de l'infraction, a récemment validé une décision derelaxe de la Cour d'appel de Douai, qui avait considéré "que les faits dénoncés, concernantl'aménagement de leurs horaires de travail, de leurs congés, la définition de leurs attributions dans leservice, et l'appréciation de leur qualité de travail, relèvent des fonctions d'un chef de service ; qu'enl'espèce il n'est pas démontré que les décisions de X aient été prises dans l'intention de nuire aux deuxplaignantes ou de dégrader leurs conditions de travail, ni que ces appréciations sur la qualité de leurtravail aient eu pour but de les humilier ; qu'en conséquence l'infraction n'est pas caractérisée".

Dans l'arrêt de 21 juin 2005, la Chambre criminelle laisse à l'appréciation des juges du fondl'appréciation juridique des faits : "attendu qu'en l'état de ces motifs, fondés sur son appréciationsouveraine des faits et éléments de preuve [...] la cour d'appel [...] a caractérisé le délit retenu en tous seséléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, [...] dès lors qu'elle a mis en évidence [...] desagissements répétés ayant pour effet ou pour objet une dégradation des conditions de travail susceptiblede porter atteinte aux droits de la victime, au sens de l'article L 120-2 du Code du travail, et à sadignité".

Pour rejeter la qualification pénale de harcèlement moral, les juges répressifs recherchent si lesagissements dénoncés s'analysent en des "conséquences à tort ou à raison mal ressenties par le salarié,des contraintes imposées par les impératifs de gestion inhérents à la vie de toute entreprise", dans lamesure où le délit nécessite "pour être constitué, l'existence de faits objectifs non dénaturés par desconsidérations subjectives" de sorte que toute dégradation des conditions de travail n'implique pas pourautant un acte de harcèlement.

Dans l'arrêt du 21 juin 2005, les agissements dénoncés, qualifiés par les juges du fond de "vexatoires,injustes et inappropriés", dépassaient le cadre des contraintes normales liées au travail.

Cette interprétation rejoint celles des juridictions sociales, qui distinguent les mesures relevant del'exercice loyal et légitime par l'employeur de son pouvoir de gestion et direction, des faits deharcèlement moral.

Elles ont ainsi défini, dans un premier temps, ce que le harcèlement moral n'était pas :- le fait qu'unsalarié ait fait l'objet de plusieurs tentatives de licenciement infructueuses pour des motifs similaires ;-le fait d'avoir infligé à un salarié deux sanctions disciplinaires irrégulières en l'espèce d'un mois etquatre jours ;- le fait pour un employeur de demander à un salarié des explications écrites sur uneabsence injustifiée et de faire procéder à une visite du contrôleur médical à son domicile ;- les brimadessubies au niveau des horaires, suivies de sanctions et d'un licenciement jugé sans cause réelle et sérieuse.

Pour la première fois à notre connaissance, la Chambre sociale a reconnu dans une décision récente ledélit de harcèlement moral, constitué par "la conjonction et la répétition de faits", tels que le retraitsans motif du téléphone portable d'une salariée, l'obligation non justifiée de se présenter chaque matindans le bureau de son supérieur hiérarchique, la charge de nouvelles tâches sans rapport avec sesfonctions, qui avaient eu pour conséquence une altération de sa santé.

Au travers de ces décisions, à l'instar de la Chambre criminelle, la Chambre sociale s'en remet àl'appréciation souveraine des juges du fond quant à la qualification juridique donnée aux faitsconstatés.

En tout état de cause, la notion juridique de harcèlement moral, largement tributaire des faits d'espèce,mériterait sans doute d'être d'avantage précisée, ne serait-ce que pour mieux la distinguer de l'exercicenormal du pouvoir de direction.

Enfin, il est intéressant de remarquer que l'arrêt du 21 juin 2005 se réfère expressément à l'article L.120-2 du Code du travail () pour préciser la nature des droits auxquels, pour être constitué, leharcèlement doit porter atteinte... alors que la victime est un agent administratif.

Le Conseil constitutionnel avait considéré que, "si l'article L. 122-49 nouveau du Code du travail n'apas précisé les droits du salarié auxquels les agissements incriminés sont susceptibles de porter atteinte,il doit être regardé comme ayant visé les droits de la personne au travail, tels qu'ils sont énoncés àl'article L. 120-2 du code du travail".

Cette interprétation doit-elle être étendue aux agents de la fonction publique ?

La référence faite par la Chambre criminelle aux droits des salariés peut s'expliquer par sa volontéd'attirer l'attention des pouvoirs publics sur la nécessité d'étendre la protection des salariés contre leharcèlement moral aux fonctionnaires.

A ce titre, il est à noter qu'une proposition de loi a été déposée le 9 février 2005 devant l'AssembléeNationale avec pour objectif d'adapter aux fonctionnaires le dispositif de protection contre leharcèlement moral tel que défini dans le Code du travail, en modifiant la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983(loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires ) portant droits etobligations des fonctionnaires.

Floriane Di SalvoAvocate au sein du cabinet Fromont, Briens et associés LEXBASE HEBDO n° 178 duJeudi 28 Juillet 2005 - Edition SOCIALE

Les violences, brimades, injures et autres vexations infligées à des personnes vulnérables

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constituent une atteinte à la dignité humaine et ne peuvent être assimilées à un modepaternaliste de gestion non pénalement punissable.

Cass. crim., 23-04-2003, n° 02-82.971, publié

L'attestation d'une collègue avec qui la salariée partageait son bureau reconnaissant quecette dernière subissait une pression hiérarchique de son supérieur et les avertissementsprononcés pour des griefs dérisoires peuvent constituer le harcèlement.

CA Paris, 18e ch., D, 30-03-2004, n° 03/33008, Société GMD

L'absence d'information des DP de la réorganisation, d'explication au fait que la salariéen'avait plus librement accès aux dossiers et que son téléphone ait été confié à une autreemployée, de mesures correctrices, constituent un cas de harcèlement moral.

CA Rennes, 8e, 10-01-2008, n° 07/01355, Association SOINS ET SERVICES A DOMICILE c/ MadameMarie-Thérèse NABAT

Une Cour d'appel a évalué le préjudice subi par une salariée, victime de harcèlement moral,à 6000 euros ; les conséquences très importantes du comportement de l'employeur sur lasanté de la salariée ayant entrainée chez elle une dépression nerveuse.

CA Paris, 18e, D, 07-09-2004, n° 04/32588, Madame Colette CASAUX c/ SOCIETE GARAGE DU BAC

Le seul envoi de mails professionnels par l'employeur ne démontre pas les faits deharcèlement moral dénoncés, dès lors qu'il s'agit d'un mode normal de communication de lasociété, que leur rythme n'est pas excessif et leur contenu, non vexatoire, modéré.

CA Paris, 22e, C, 27-01-2005, n° 03/33818, Mme Françoise FOURNEL c/ SA DICTAO

L'avertissement reçu, dont la salariée tout en contestant le bien fondé, ne demande pasl'annulation, ne peut à lui seul constituer les agissements répétés de harcèlement moral.

CA Paris, 18e, D, 07-12-2004, n° 04/33611, Mme Maryse MOREL c/ ASSOCIATION INSTITUT NATIONAL DEL'HYGIENE ET DU NETTOYAGE INDUSTRIEL

Le fait pour un employeur de laisser s'écouler des délais importants avant de rompre lapériode d'essai, dès lors que c'est pour tenir compte de l'état de santé du salarié et luirechercher une autre affectation, n'est pas constitutif de harcèlement moral.

CA Paris, 22e, C, 04-11-2004, n° 03/35183, SA BNP PARIBAS c/ M. Hugues PAUSIER

Sans caractériser la mauvaise foi de la salariée alors que celle-ci s'était bornée à invoquerdes faits de harcèlement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

Cass. soc., 30-05-2007, n° 05-18.755, Mme Martine Dechaux, F-D

En statuant ainsi, alors que les attestations retenues par la cour relatent que le chef deservice a eu un comportement déplacé à l'égard de son assistante, qu'il s'emportait etdevenait violent, la cour d'appel a violé l'article L. 1152-1.

Cass. soc., 10-02-2009, n° 07-44.953, société Kohler France, F-D

1003 4. La prévention du harcèlement moral [E1446AWH]

1004 4.1. L'employeur garant de la prévention du harcèlement moral [E1797AWH]

Il appartient au chef d'entreprise de prendre toutes dispositions nécessaires en vue de

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prévenir les agissements de harcèlement moral.

C. trav., art. L. 122-51, version du 18-01-2002, à jourC. trav., art. L. 1152-4, version du 01-05-2008, à jour

Harcèlement moral : comment l'identifier et le traiter

Fairway a organisé en mai et juin 2002 des journées-stages de formation ayant pour thème : "Droitsocial 2002 : un bouleversement ?". En effet , face à un droit du travail de plus en plus contraignant, ilest important de maîtriser les nouvelles obligations et responsabilités des dirigeants. Ainsi, l'un desateliers , qui a eu lieu le 29 mai dernier, avait trait au "Harcèlement moral : un risque émergent ?" ().Lexbase se propose de faire paraître dans ses colonnes un compte rendu de ce séminaire.La loi demodernisation sociale du 17 janvier 2002 unifie les dispositions relatives au harcèlement et les adapteaux critères européens . Le phénomène n'est pas nouveau mais l'amélioration du marché de l'emploi etles ouvrages de Marie-France Hirigoyen (1) et d'Heinz Leymann (2) ont délié les langues . En 2002,selon une étude de l'UNSA, 9 % des 20 000 salariés interrogés déclarent faire l'objet d'intimidation oude harcèlement moral. Ces statistiques sont , bien entendu, à analyser avec prudence. Mais, quoi qu'il ensoit, les conséquences de la reconnaissance d'un cas de harcèlement moral sont difficiles, tant pour lavictime que pour l'employeur, et les risques financiers et pénaux sont lourds. Il est donc nécessaire dedétecter le cas de harcèlement le plus tôt possible et de le traiter rapidement. Facile ! Sûrement pas, lacomplexité des relations humaines et la diversité des personnalités rend extrêmement difficile ladétection de harcèlement . Daniel Fornili, consultant spécialisé en relations sociales a insisté, lors de ceséminaire Fairway, sur la nécessité de mettre en place des outils de détection , des indicateurs pourobserver ce qui se passe entre les individus. Pour les établir , on peut s'aider des portraits robots desvictimes et des "harceleurs". Les victimes sont souvent des personnalités qui résistent à leurs collègueset/ou à leurs supérieurs ; elles sont plutôt consciencieuses et manquent de confiance en elle. Le"harceleur " (qui peut être un supérieur hiérarchique ou un collègue de la victime) est, quant à lui,d'apparence séduisante, il n'a de considération que pour lui-même et est incapable de se remettre enquestion ; il veut être admiré et n'hésitera pas à utiliser tous les moyens pour accéder au pouvoir oudissimuler son incompétence. Ses méthodes sont récurrentes : isoler, déconsidérer, discréditer,déstabiliser sa victime. Ce bref panorama démontre la difficulté de mettre en place des indicateurs maisc'est sans aucun doute l'un des meilleurs systèmes de prévention. Le rôle de la médecine du travail, quipourra prendre ici toute son ampleur, et l'implication des représentants du personnel favoriseront ladétection de comportements déviants. Daniel Fornili conseille également de suivre avec attention lesévaluations annuelles, les appréciations péjoratives et répétées d'une année sur l'autre qui sont dessignes d'alerte. Une fois détecté, il faut traiter le cas de harcèlement ou tout du moins la souffrance de lavictime. Anne-Elisabeth Combes, avocat associé, responsable du département de droit social chezAndersen Legal, rappelle qu'il pèse sur l'employeur une obligation de sécurité de résultat. En effet,désormais ce dernier risque de commettre une faute inexcusable s'il reste inactif alors qu'il savait ouqu'il aurait dû savoir qu'un de ses salariés était en danger. L'employeur dispose de plusieurs solutions sile mal est pris à temps, la mutation de la victime dans un autre service étant incontestablement lasolution la plus efficace. S'il est impossible de sortir la victime des griffes du "harceleur", en raisonnotamment de sa fonction non interchangeable due à la spécialisation du poste ou à la taille del'entreprise, l'employeur peut , mais n'y est pas obligé, prendre des mesures disciplinaires à l'encontredu "harceleur " (3). Dans ce dernier cas, l'employeur devra suivre avec une attention toute particulièrel'évolution de la relation "harcelé-harceleur" : sans amélioration, il faudra agir pour éviter lecontentieux. Si l'employeur ne fait pas cesser les troubles , la victime peut avoir recours à un médiateurextérieur à l'entreprise (4) ou saisir le conseil de prud'hommes. Devant le conseil de prud'hommes, lesalarié concerné doit présenter les éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement (5).L'employeur devra alors rapporter la preuve de l'absence de harcèlement moral . Le juge appréciera etordonnera si nécessaire des mesures d'instruction pour former sa conviction (6). Si le juge est convaincupar la victime, il pourra alors condamner l'employeur. Civilement, la rupture du contrat de travail(licenciement ou démission) qui résulterait d'agissements répétés de harcèlement moral est nulle deplein droit (7). Le salarié peut alors demander sa réintégration ou des indemnités pour licenciementsans cause réelle et sérieuse. Pénalement, la sanction peut atteindre un an d'emprisonnement et uneamende de 15 000 euros (8). Le Code du travail (9) prévoit , quant à lui, un an d'emprisonnement et 3750 euros d'amende. Toutefois le montant total de l'amende ne peut pas excéder 15 000 euros. Le jugepeut aussi ordonner la publication de la condamnation dans la presse (10). En revanche, si le jugementreconnaît l'absence de harcèlement moral, l'employeur pourra alors engager une procédure pourdénonciation calomnieuse. La victime peut aussi déposer une plainte, la juridiction prud'homale étantalors tenue par la décision du tribunal correctionnel. Ces sanctions, lourdes de conséquences,confirment l'intérêt de mettre en place des indicateurs .

(1) Marie-France Hirigoyen, "Le harcèlement moral, la violence perverse au quotidien ", Syros, 1998 ;"Malaise dans le travail - Harcèlement moral", Syros, 2001.(2 ) Heinz Leymann, "Mobbing, lapersécution au travail", Editions Seuil, 1996.(3 ) L. 122-50 du Code du travail, .(4) L. 122-54 du Code dutravail , .(5) L. 122-52, al. 1, du Code du travail, .(6 ) L. 122-52, al. 3, du Code du travail, .(7) L. 122-49,al. 3, du Code du travail, .(8) C. pén., art. 222-33-2, .(9 ) L. 152-1-1, .(10) L. 152-1-1, al. 2, .A lireégalement :Loi de modernisation sociale : la notion de harcèlement moral fait son apparition dans leCode du travail, Harcèlement moral et protection de la santé mentale des salariés, Le CES propose lapénalisation du harcèlement moral au travail,

Le chef d'entreprise prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger lasanté physique et mentale des salariés.

C. trav., art. L. 4121-1, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 230-2, version du 14-06-2006, à jour

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L'obligation générale de prévention pesant sur l'employeur

Aux termes de l'article L. 230-2 du Code du travail : "le chef d'établissement prend les mesuresnécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs del'établissement, y compris les travailleurs temporaires". Cette disposition doit être examinée au regardde la définition de la "santé" retenue par la Charte de l'OMS, selon laquelle : "la santé est un état decomplet bien être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie oud'infirmité".

Le chef d'entreprise assure la sécurité et protège la santé des travailleurs en procédant à desactions de prévention des risques professionnels, d'information et de formation ainsi que lamise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

C. trav., art. L. 4121-1, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 230-2, version du 14-06-2006, à jour

Le règlement intérieur doit rappeler les dispositions relatives à l'interdiction de toute pratiquede harcèlement moral.

C. trav., art. L. 1321-2, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 122-34, al. 4, version du 18-01-2002, à jour

Le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

C. trav., art. L. 120-4, version du 18-01-2002, à jourC. trav., art. L. 1222-1, version du 01-05-2008, à jour

En n'agissant pas et en se contentant de rappeler une note générale, la société n'a passatisfait à son obligation de veiller à ce que les salariés travaillent dans des conditionsrespectant leur dignité et leur santé morale et physique.

CA Paris, 18e, A, 04-01-2005, n° 03/34249, Société HAVANATOUR c/ Mme Sandra REWINSKI

L'employeur est tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de lasanté et de la sécurité des travailleurs, notamment en matière de harcèlement moral.L'absence de faute de sa part ne peut l'exonérer de sa responsabilité.

Cass. soc., 21-06-2006, n° 05-43.914, M. Jacques X... c/ Mme Martine Y... et autres, Cassation partielle

L'employeur responsable du harcèlement moral dans l'entreprise

La loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 a introduit dans le Code du travail des dispositionsspécifiques visant à prévenir et à lutter contre le harcèlement moral (loi n° 2002-73 ). Le législateur aprévu un certain nombre de règles destinées à garantir l'effectivité de la protection du salarié, mais rienconcernant la mise en cause de la responsabilité civile du salarié harceleur ou de son employeur. Danscet arrêt en date du 21 juin 2006 (Cass. soc., 21 juin 2006, n° 05-43.914, M. Jacques Balaguer,FP-P+B+R+I ), la Chambre sociale de la Cour de cassation confirme la mise en cause personnelle dusalarié harceleur (I) et condamne, également, son employeur en se fondant sur l'existence d'uneobligation de sécurité de résultat (II).

I - La responsabilité personnelle du salarié harceleur

Le dispositif légal en matière de harcèlement moral

L'article L. 122-49, issu de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002, définit le harcèlementmoral comme des "agissements répétés [...] qui ont pour objet ou pour effet une dégradation desconditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physiqueou mentale ou de compromettre son avenir professionnel".

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Le salarié harceleur s'expose à des sanctions pénales (C. pén., art. 222-33-2 : un an d'emprisonnementet 15 000 euros d'amende) et disciplinaires formellement prévues, d'ailleurs, par l'article L. 122-50 duCode du travail. La jurisprudence considère aussi, dans l'hypothèse voisine du harcèlement sexuel, queles faits de harcèlement avérés doivent être qualifiés de faute grave (Cass. soc., 5 mars 2002, n°00-40.717, Société La Louisiane c/ M. Daniel Alzas, FS-P+B , Bull. civ. V, n° 83).

Le Code du travail n'a rien prévu concernant la responsabilité civile du salarié, et il convient donc de setourner vers les règles du droit commun.

Le harcèlement en l'espèce

Dans cette affaire, c'est le comportement "brutal, grossier, humiliant et injurieux" du directeur d'uneassociation qui était en cause, ainsi que "les menaces, dénigrements, intimidations et sanctionsinjustifiées" dont plusieurs salariés avaient été les victimes.

Compte tenu de la gravité des faits, la qualification de harcèlement moral s'imposait (pour des exemples: Cass. soc., 27 octobre 2004, n° 04-41.008, Société Mât de misaine c/ Mme Claudie Pouvreau, F-P+B , etnos obs., Harcèlement moral : la Cour de cassation livre une première définition, Lexbase Hebdo n° 141du 4 novembre 2004 - édition sociale ). La Cour de cassation ne contrôle d'ailleurs plus, aujourd'hui,cette qualification qu'elle a abandonné au pouvoir souverain des juges du fond (Cass. soc., 23 novembre2005, n° 04-41.649, Mme Viviane Prins-Jorge c/ Association de sauvegarde de l'enfance et del'adolescence des Yvelines (SEAY), F-P , Dr. soc. 2006, p. 229, obs. J. Savatier).

Les conditions de la responsabilité civile du salarié harceleur

On sait depuis l'arrêt "Costedoat", rendu par l'Assemblée plénière de la Cour de cassation en 2000, que"n'engage pas sa responsabilité à l'égard des tiers le préposé qui agit sans excéder les limites de lamission qui lui a été impartie par son commettant" (Cass. ass. plén., 25 février 2000, n° 97-17.378, M.Costedoat c/ M. Girard et autres , JCP éd. G 2000, II, 10295, concl. R. Kessous, note M. Billiau). LaCour de cassation a, toutefois, précisé que cette immunité cède lorsque le salarié a "intentionnellementcommis une infraction ayant porté préjudice à un tiers" (Cass. ass. plén., 14 décembre 2001, n°00-82.066, M. Patrick Cousin , BICC n° 551 du 1er mars 2002, conc. R. de Goutte) , et ce même s'il n'aété pas effectivement condamné au pénal (Cass. crim., 7 avril 2004, n° 03-86.203, M. G., FS-P+F , Resp.civ. et assur. 2004, comm. 215).

Valeur de la solution adoptée

La solution adoptée, ici, s'inscrit dans cette perspective puisque les dommages causés par le salarié à sescollègues résultaient bien de faits intentionnels relevant de la qualification pénale de harcèlement.

On regrettera simplement que la Cour de cassation ait "oublié" de faire référence à l'article 1382 duCode civil () qui sert de fondement à la condamnation civile du salarié, tout comme d'ailleurs elle"oublie" l'article 1147 du Code civil () lorsqu'elle condamne le salarié à indemniser son employeur desdommages consécutifs à une faute intentionnelle, au profit d'une simple référence au "principe selonlequel la responsabilité du salarié n'est engagée qu'en cas de faute lourde" (Cass. soc., 23 septembre1992, n° 89-43.035, Mme Lagrèze c/ Société générale , Bull. civ. V, n° 466 ; Cass. soc., 25 octobre 2005,n° 03-46.624 , Bull. civ. V, n° 299).

II - La responsabilité de l'employeur du salarié harceleur fondée sur le manquement à une obligation desécurité de résultat

Précédent

La Cour de cassation avait déjà eu l'occasion d'affirmer, en 2001, le principe selon lequel "l'employeurdoit répondre des agissements des personnes qui exercent, de fait ou de droit, une autorité sur lessalariés" (Cass. soc., 10 mai 2001, n° 99-40.059, Société Repass'Net c/ Mme Rachel Bouet , Dr. soc. 2001,p. 921, chron. B. Gauriau ; JCP éd. G 2002, II, 10044, note J. K. Adom). La Cour n'avait toutefois pasprécisé, dans cet arrêt, le fondement de cette condamnation, et une clarification s'imposait.

Une condamnation fondée sur l'existence d'une obligation de sécurité de résultat

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C'est tout l'intérêt de cet arrêt qui vise "les articles L. 122-49, L. 122-51 et L. 230-2 du Code du travail,ce dernier interprété à la lumière de la Directive CE 89/391 du 12 juin 1989 concernant la mise enoeuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et la santé des travailleurs" et faitréférence à l'"obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité destravailleurs dans l'entreprise".

Cette référence reprend, tout en la modifiant, la formule présente dans les arrêts qui retiennent, depuis2002, la nouvelle définition de la faute inexcusable de l'employeur en matière de maladiesprofessionnelles et d'accidents du travail. Dans ces arrêts, la Cour de cassation, toutes chambresconfondues, affirme l'existence d'une "obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerneles maladies professionnelles contractées par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés parl'entreprise" (Cass. soc., 28 février 2002, n° 00-10.051, Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) deGrenoble c/ Société Ascométal, FP-P+B+R+I , JCP éd. G 2002, II, 10053, concl. Benmakhlouf ; Dr. soc.2002, p. 445, chron. A. Lyon-Caen ; Cass. civ. 2, 14 octobre 2003, ° 02-30.231, Olga Pézin, épouse Rose c/Société Dunlop France, FS-P+B , Bull. civ. II, n° 300 ; Cass. ass. plén., 24 juin 2005, n° 03-30.038, M.Jean-Claude Grymonprez c/ Société Norgraine , Dr. soc. 2005, p. 1067, obs. X. Prétôt ; JCP éd. S 2005,p. 1056, note P. Morvan) et les accidents du travail (Cass. soc., 11 avril 2002, n° 00-16.535, Mme DounyaEdrissi, épouse Hachadi c/ Société Camus industrie, FS-P+B+R+I , Bull. civ. V , n° 127 ; Cass. civ. 2, 12mai 2003, n° 01-21.071, M. Lucien Lapeyronnie c/ Société Les Chaux du Périgord, FS-P+B , Bull. civ. II,n° 141).

La Chambre sociale de la Cour de cassation a, depuis le transfert du contentieux des dommagesd'origine professionnelle à la deuxième chambre civile, poursuivi son travail de détermination duchamp des obligations particulières pesant sur l'employeur au titre de son obligation générale desécurité, pour y intégrer la protection des salariés contre le tabagisme dans l'entreprise (Cass. soc., 29juin 2005, n° 03-44.412, Société ACME Protection c/ Mme Francine Lefebvre, FS-P+B+R+I , Dr. soc.2005, p. 971, chron. J. Savatier) et le suivi des salariés par le médecin du travail au retour de congémaladie (Cass. soc., 28 février 2006, n° 05-41.555, M. Dany Deprez c/ Société Cubit France technologies,FS-P+B+R+I ).

Les mutations de l'obligation de sécurité de résultat du chef d'entreprise

S'il existe un lien évident entre les arrêts rendus dans le cadre de l'indemnisation des victimes demaladies professionnelles et d'accidents du travail, à partir de 2002, et ceux qui intéressent, depuis 2005,le tabagisme, la visite de reprise et, désormais, le harcèlement, deux différences importantes méritentd'être signalées.

La première concerne la formulation même de l'obligation de sécurité qui pèse sur le chef d'entreprise.Dans les arrêts qui concernent la faute inexcusable de l'employeur, la Cour de cassation a, en effet, visé"une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnellescontractées par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par l'entreprise". Or dans les troisarrêts rendus depuis 2005 et qui n'intéressaient pas le droit de la Sécurité sociale mais le droit dutravail, la Chambre sociale de la Cour de cassation a retenu une formulation plus large et fait référenceà une "obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité destravailleurs dans l'entreprise".

Cette nouvelle formule, beaucoup plus générale que la précédente, devrait conduire à étendre le champde l'obligation de sécurité de l'employeur à toutes les questions intéressant l'hygiène, la sécurité et lesconditions de travail ; la solution retenue pourrait alors s'appliquer au harcèlement sexuel, dont lerégime a servi de modèle à la loi du 17 janvier 2002, ainsi que dans toutes les affaires de discrimination.

Une seconde différence, et non des moindres, concerne le fondement même de cette obligation desécurité.

Dans toutes les décisions rendues à partir de 2002 et qui intéressent la qualification de faute inexcusable,la Cour de cassation a, en effet, visé l'article 1147 du Code civil et précisé que l'obligation de sécurité del'employeur est due "en vertu du contrat de travail le liant à son salarié". Or dans les trois arrêtsrendus depuis 2005 où apparaît la notion d'"obligation de sécurité de résultat en matière de protectionde la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise", toute référence à l'article 1147 du Codecivil a disparu, seules les dispositions du Code du travail et des textes communautaires qui enconstituent le fondement, étant mentionnées. Une relecture attentive de la nouvelle formulation del'obligation de sécurité montre, d'ailleurs, que la Cour de cassation a escamoté la mention du "contratde travail" liant l'employeur "à son salarié", au profit des "travailleurs dans l'entreprise".

La confrontation de ces deux jurisprudences fait alors difficulté car deux explications peuvent êtreavancées qui conduisent à consacrer l'unité de l'obligation de sécurité de l'employeur, ou, au contraire,son éclatement.

La première explication conduit à affirmer l'existence d'une rupture dans la jurisprudence de laChambre sociale de la Cour de cassation qui abandonnerait le fondement contractuel de l'obligation de

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sécurité au profit d'un fondement légal spécial. Ce changement d'orientation créerait alors unecontrariété de solutions avec la deuxième chambre civile et l'Assemblée plénière qui analysent toujoursl'obligation de sécurité par référence au contrat de travail.

Une autre explication conduit, au contraire, à la reconnaissance de deux obligations de sécuritédistinctes, l'une fondée sur le contrat de travail, applicable uniquement pour l'indemnisation desvictimes d'accidents du travail et de maladies professionnelles, l'autre sur les seules dispositions duCode du travail intéressant plus largement la santé et la sécurité.

Nous pensons que la Cour de cassation devrait abandonner la référence à l'obligation contractuelle desécurité pour ne plus viser que les dispositions des articles L. 230-2 et L. 122-51 du Code du travail.

Les incertitudes concernant le fondement de la responsabilité du chef d'entreprise

Reste à déterminer sur quel fondement l'employeur doit être condamné civilement.

Nous l'avons dit, cette responsabilité n'est sans doute pas contractuelle dans la mesure où la Cour decassation a écarté cette référence, dans cet arrêt comme dans les précédents. La prescription de l'actionne devrait donc pas être trentenaire, mais décennale, quoique la préférence de la Cour de cassation soitallée vers la prescription la plus longue lorsqu'il s'est agi de lutter contre les discriminations syndicales(Cass. soc., 15 mars 2005, n° 02-43.560, M. Patrick Monange, FP-P+B+R+I , et nos obs. L'action enréparation du préjudice résultant d'une discrimination syndicale se prescrit par trente ans, LexbaseHebdo n° 161 du 31 mars 2005 - édition sociale ) ou le travail illégal (Cass. soc., 10 mai 2006, n°04-42.608, M. Jean-Claude Zarillo c/ Société Jura Tour, FS-P+B , et nos obs. Application de laprescription trentenaire à l'action en paiement de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,Lexbase Hebdo n° 215 du 17 mai 2006 - édition sociale ).

Elle doit alors être fondée soit sur l'article 1382 du Code civil, mais la victime devra prouver la faute del'employeur, soit sur l'article 1384, alinéa 5, du Code civil () qui met à sa charge une responsabilité deplein droit pour les dommages causés par ses salariés.

Comme précédemment, nous ne pouvons que regretter l'absence de toute référence aux règles de laresponsabilité civile dans l'arrêt.

Christophe RadéProfesseur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IVDirecteur scientifique de LexbaseHebdo - édition sociale LEXBASE HEBDO n° 223 du 13 juillet 2006 - Edition SOCIALE

L'employeur est tenu, en matière de harcèlement moral, à une obligation de sécurité derésultat et les juges n'ont pas à rechercher la preuve d'un manquement fautif.

Cass. soc., 21-02-2007, n° 05-41.741, société Auvergne Denrées, F-D

Les juges doivent simplement faire ressortir l'absence de mesures propres à mettre un termeaux agissements en cause.

Cass. soc., 21-02-2007, n° 05-41.741, société Auvergne Denrées, F-D

1005 4.2. Le droit d'alerte des délégués du personnel en matière deharcèlement moral

[E1798AWI]

Si un délégué du personnel constate qu'il existe une atteinte à la santé physique et mentaledes personnes qui ne serait pas justifiée par la nature de la tâche à accomplir niproportionnée au but recherché, il en saisit immédiatement l'employeur.

C. trav., art. L. 422-1-1, al. 1, version du 18-01-2002, à jourC. trav., art. L. 2313-2, version du 01-05-2008, à jour

L'employeur ou son représentant est tenu de procéder sans délai à une enquête avec ledélégué du personnel et de prendre les dispositions nécessaires pour remédier à cettesituation.

C. trav., art. L. 422-1-1, al. 2, version du 18-01-2002, à jourC. trav., art. L. 2313-2, version du 01-05-2008, à jour

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En cas de carence de l'employeur ou de divergence sur la réalité de cette atteinte et à défautde solution trouvée avec l'employeur, le salarié ou le délégué si le salarié averti par écrit nes'y oppose pas, saisit le conseil de prud'hommes.

C. trav., art. L. 422-1-1, al. 3, version du 18-01-2002, à jourC. trav., art. L. 2313-2, version du 01-05-2008, à jour

Le juge peut ordonner toutes mesures propres à faire cesser cette atteinte et assortir sadécision d'une astreinte qui sera liquidée au profit du Trésor.

C. trav., art. L. 422-1-1, al. 4, version du 18-01-2002, à jourC. trav., art. L. 2313-2, version du 01-05-2008, à jour

1006 4.3. Le rôle du CHSCT en matière de harcèlement moral [E1799AWK]

Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail a pour mission notamment decontribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des salariés del'établissement.

C. trav., art. L. 4612-1, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 236-2, version du 14-06-2006, à jour

L'intervention du CHSCT

La loi de modernisation sociale a introduit, après le mot "santé", du premier alinéa de l'article L. 236-2du Code du travail les mots "physique et mentale". Par ailleurs, depuis cette loi, la mission du CHSCTcomprend de façon expresse la prévention du harcèlement moral (1).La jurisprudence considérait toutefois déjà, avant l'entrée en vigueur de la loi de modernisation sociale, que, dans la mesure où leCHSCT avait pour mission la protection de la santé et de la sécurité des salariés, celui-ci pouvaitvalablement faire appel à un expert agréé en cas de risque grave, notamment en cas de souffrancesprofessionnelles consécutives au harcèlement moral du salarié (2).

(1) L. 236-2, al. 6, du Code du travail.(2) CA d'Aix-en-Provence, 1ère ch. civ. B, 05-07-1999.

Le CHSCT peut proposer des actions de prévention en matière de harcèlement sexuel et deharcèlement moral.

C. trav., art. L. 4612-3, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 236-2, version du 14-06-2006, à jour

1007 4.4. Le rôle du médecin du travail en matière de harcèlement moral [E1800AWL]

Le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que mutationsou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'état desanté physique ou mentale des travailleurs.

C. trav., art. L. 241-10-1, version du 18-01-2002, à jourC. trav., art. L. 4624-1, version du 01-05-2008, à jour

Le chef d'entreprise est tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus,de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite.

C. trav., art. L. 241-10-1, version du 18-01-2002, à jourC. trav., art. L. 4624-1, version du 01-05-2008, à jour

En cas de difficulté ou de désaccord, la décision est prise par l'inspecteur du travail aprèsavis du médecin-inspecteur du travail.

C. trav., art. L. 241-10-1, version du 18-01-2002, à jourC. trav., art. L. 4624-1, version du 01-05-2008, à jour

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1008 5. La protection contre le harcèlement moral [E1447AWI]

1009 5.1. Le recours à un médiateur extérieur à l'entreprise [E1448AWK]

Une procédure de médiation peut être engagée par toute personne de l'entreprise s'estimantvictime de harcèlement moral.

Loi n° 2003-6, 03-01-2003, relance de la négociation collective en matière de licenciement éco, art. 5C. trav., art. L. 122-54, al. 1, version du 04-01-2003, à jour

C. trav., art. L. 1152-6, version du 01-05-2008, à jour

Une procédure de médiation peut être envisagée par la personne mise en cause.

Loi n° 2003-6, 03-01-2003, relance de la négociation collective en matière de licenciement éco, art. 5C. trav., art. L. 122-54, al. 1, version du 04-01-2003, à jour

C. trav., art. L. 1152-6, version du 01-05-2008, à jour

Le choix du médiateur fait l'objet d'un accord entre les parties.

Loi n° 2003-6, 03-01-2003, relance de la négociation collective en matière de licenciement éco, art. 5C. trav., art. L. 122-54, al. 1, version du 04-01-2003, à jour

C. trav., art. L. 1152-6, version du 01-05-2008, à jour

Désormais, les alinéas 2, 3 et 6 de l'article L. 122-54 du Code du travail issus de la loi demodernisation sociale sont supprimés.

Loi n° 2003-6, 03-01-2003, relance de la négociation collective en matière de licenciement éco, art. 5

Suppression de certaines dispositions issues de la loi de modernisation sociale

Certaines dispositions de l'article L. 122-54 du Code du travail issues de la loi de modernisationsociale ont été supprimées par la loi portant relance de la négociation collective en matière delicenciement économique : L'aninéa 2 de l'article L. 122-54 du Code du travail qui dispose que " Leslistes de médiateurs sont dressées par le représentant de l'Etat dans le département après consultationet examen des propositions de candidatures des associations dont l'objet est la défense des victimes deharcèlement moral ou sexuel et des organisations syndicales les plus représentatives sur le plannational" est supprimé. L'aninéa 3 de l'article L. 122-54 du Code du travail qui dispose que " Lemédiateur convoque les parties qui doivent comparaître en personne dans un délai d'un mois. En cas dedéfaut de comparution, il en fait le constat écrit qu'il adresse aux parties." est supprimé. L'aninéa 6 del'article L. 122-54 du Code du travail qui dispose que " Les dispositions des articles L 122-14-14 à L122-14-18 sont applicables au médiateur . L'obligation de discrétion prévue par l'article L 122-14-18 estétendue à toute donnée relative à la santé des personnes dont le médiateur a connaissance dans l'exécution de sa mission." est supprimé.

Le médiateur s'informe de l'état des relations entre les parties, il tente de les concilier et leursoumet des propositions qu'il consigne par écrit en vue de mettre fin au harcèlement.

C. trav., art. L. 122-54, al. 4, version du 04-01-2003, à jourC. trav., art. L. 1152-6, version du 01-05-2008, à jour

En cas d'échec de la conciliation, le médiateur informe les parties des éventuelles sanctionsencourues et des garanties procédurales prévues en faveur de la victime.

C. trav., art. L. 122-54, al. 5, version du 04-01-2003, à jourC. trav., art. L. 1152-6, version du 01-05-2008, à jour

Quiconque aura porté ou tenté de porter atteinte à l'exercice régulier des fonctions demédiateur sera puni d'un emprisonnement d'un an et de 3 750 euros d'amende ou de l'une deces deux peines seulement. Ces peines sont doublées en cas de récidive.

C. trav., art. L. 1155-1, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 152-1, version du 18-01-2002, à jour

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1010 5.2. Le droit d'action des organisations syndicales représentatives en casde harcèlement moral

[E1772AWK]

Les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise peuvent exercer en justicetoutes actions ayant trait au harcèlement moral en faveur d'un salarié de l'entreprise.

C. trav., art. L. 122-53, version du 18-01-2002, à jourC. trav., art. L. 1154-2, version du 01-05-2008, à jour

Les organisations syndicales représentatives dans l'entreprise doivent justifier d'un accordécrit de l'intéressé en cas d'action en faveur d'un salarié.

C. trav., art. L. 122-53, version du 18-01-2002, à jourC. trav., art. L. 1154-2, version du 01-05-2008, à jour

L'intéressé peut toujours intervenir à l'instance engagée par le syndicat en sa faveur et ymettre fin à tout moment.

C. trav., art. L. 122-53, version du 18-01-2002, à jourC. trav., art. L. 1154-2, version du 01-05-2008, à jour

L'article L. 122-53 du Code de travail relatif à l'action des organisations syndicalesreprésentatives en faveur d'un salarié de l'entreprise en matière de harcèlement moral estapplicable aux marins.

C. trav., art. L. 742-8, version du 18-01-2002, à jour

1011 5.3. La charge de la preuve en matière de contentieux relatif auharcèlement moral

[E1451AWN]

Désormais, en cas de litige relatif à l'application des articles L. 122-46 et L. 122-49, le salariéconcerné doit établir -et non plus seulement présenter- des faits qui permettent de présumerl'existence d'un harcèlement.

Loi n° 2003-6, 03-01-2003, relance de la négociation collective en matière de licenciement éco, art. 4

Désormais, au vu des éléments de fait établis par le salarié, il incombe au défendeur deprouver que les agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement moral et que sadécision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Loi n° 2003-6, 03-01-2003, relance de la négociation en matière de licenciement éco, art. 4

Antérieurement à l'adoption de la loi n° 2003-6 portant relance de négoication collective, encas de litige relatif à un harcèlement moral, le salarié concerné devait présenter les élémentsde fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement.

C. trav., art. L. 122-52, al. 1, version du 04-01-2003, à jourC. trav., art. L. 1154-1, version du 01-05-2008, à jour

La charge de la preuve en matière de harcèlement moral

Il est à noter que la charge de la preuve en matière de harcèlement moral est calquée sur le mêmemodèle que celui mis en place par la loi n° 2001-1066 du 16 novembre 2001 relative à la lutte contre lesdiscriminations (1).

(1) L. 122-45, al. 4, du Code du travail.

Si les règles de preuves sont plus favorables à la partie demanderesse à l'instance, elles ne ladispense pas d'établir la matérialité des éléments de fait précis et concordants.

Cons. const., décision n° 2001-455, du 12-01-2002, Loi de modernisation sociale

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Antérieurement, au vu des éléments de fait présentés par le salarié, le défendeur devaitprouver que ses agissements ne constituaient pas un harcèlement moral et que sa décisionétait justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

C. trav., art. L. 122-52, al. 2, version du 04-01-2003, à jourC. trav., art. L. 1154-1, version du 01-05-2008, à jour

Une fois les éléments de fait et les preuves apportées par les parties à l'instance, le juge formesa conviction sur l'existence ou non du harcèlement moral.

C. trav., art. L. 122-52, al. 3, version du 04-01-2003, à jourC. trav., art. L. 1154-1, version du 01-05-2008, à jour

Le juge peut toujours, au cours de l'instance, ordonner, en cas de besoin, c'est-à-dire en casde doute sur l'existence ou non d'un harcèlement moral, toutes les mesures d'instruction qu'ilestime utiles.

C. trav., art. L. 122-52, al. 3, version du 04-01-2003, à jourC. trav., art. L. 1154-1, version du 01-05-2008, à jour

Les règles relatives à la charge de la preuve ne constituent pas des règles de procédureapplicables aux instances en cours mais touchent le fond du droit.

Cass. soc., 13-12-2007, n° 06-44.080, M. Gérard Tauleigne, FS-P+B

Il s'ensuit que le harcèlement moral allégué devait en l'espèce être examiné au regard desdispositions de l'article L. 122-52 du Code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi du3 janvier 2003.

Cass. soc., 13-12-2007, n° 06-44.080, M. Gérard Tauleigne, FS-P+B

Conformément aux dispositions de l'article L. 122-52 ancien du Code du travail (art. L.1154-1, recod.), il appartient à la salariée d'établir des faits qui permettent de présumerl'existence d'un harcèlement.

CA Paris, 21e, C, 01-07-2008, n° 06/08469, M. Joao DIAS MARQUES c/ V - Madame Patricia SAVARY

Les attestations visant à démontrer un harcèlement moral doivent comporter le récit decomportements précis et datés de l'employeur susceptibles de caractériser un tel harcèlement.

CA Paris, 18e, A, 04-11-2008, n° 06/12144, M. Pascal VERNON exploitant sous l'enseigne PROXI-MARCHE c/Mme Catherine PECHERY

Dès lors que le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'unharcèlement, il incombe à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que cesagissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement.

Cass. soc., 24-09-2008, n° 06-43.504, Mme Françoise Bourdin, FS-P+B+R+I

La partie défenderesse, au vu de ces éléments, doit également prouver que sa décision estjustifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Cass. soc., 24-09-2008, n° 06-43.504, Mme Françoise Bourdin, FS-P+B+R+I

La cour d'appel, qui devait rechercher si les éléments constitutifs de harcèlement étaientétablis et, dans l'affirmative, s'ils étaient de nature à faire présumer un harcèlement moral,n'a pas donné de base légale à sa décision.

Cass. soc., 24-09-2008, n° 06-45.579, Mme Maryse Gerin, FS-P+B+I

Quelques semaines, seulement, après l'entrée en vigueur de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, portant

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diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre lesdiscriminations (), la Cour de cassation rend 6 arrêts en date du 24 septembre 2008 concernant lerespect du principe "à travail égal, salaire égal", le tout nouveau principe d'égalité de traitement,l'interdiction de toute discrimination et de tout harcèlement sexuel comme moral. Sur un certainnombre de points, la Haute juridiction renforce ses positions et confirme des solutions déjà acquises (I).Sur d'autres, la Cour manifeste son désir de ne pas se laisser déborder par les juridictions du fond etrenonce, ainsi , à laisser ces dernières souveraines dans l'appréciation qu'elles faisaient, jusqu 'àprésent, des notions clef, singulièrement de celle de harcèlement (II).

I - Les confirmations

1.1. Les éléments constitutifs de harcèlement sexuel

L'article L. 1153-1 du Code du travail () définit le harcèlement sexuel comme "les agissements [...] detoute personne dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit ou au profit d'un tiers".Si la rédaction du texte suggère que les agissements doivent être répétés pour constituer un"harcèlement " (1), la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, portant diverses dispositions d'adaptation audroit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, assimile le harcèlement àune discrimination lorsque celui-ci repose sur l'un des motifs prohibés par la loi (2). Dans cettehypothèse, en pratique fréquente lorsque le harceleur et le harcelé ne sont pas du même sexe, un seulagissement suffit pour caractériser la discrimination.La caractérisation des faits de harcèlement sexuel

Dans l'une des affaires (n° 06-46.517), une salariée, de surcroît mineure, avait été victime ducomportement plus que douteux de l'un des cadres de l'entreprise , qui tentait de l'embrasser contre songré sur le lieu du travail, l'emmenait à son domicile en renouvelant, à cette occasion, des avances denature sexuelle, l'appelait fréquemment par téléphone en dénigrant la relation affectueuse que celle-cientretenait avec un tiers, provoquant par ces agissements angoisse et, même, dépression. La courd'appel avait retenu la qualification de harcèlement sexuel et cette qualification est logiquementconfirmée dans cet arrêt par le rejet du pourvoi.La nécessaire sanction des faits de harcèlement sexuel

La Chambre sociale a déjà eu l'occasion de juger que le harcèlement sexuel constitue nécessairementune faute grave (3). C'est ce que confirme l'un des arrêts rendus le 24 septembre 2008 (n° 06-46.517).Même si la Cour de cassation n'affirme pas, à l'égard des faits, que ces derniers devaient nécessairementcaractériser l'existence d'une faute grave, c'est à cette conclusion que la cour d'appel était arrivée etc'est, également, à cette même conclusion que parvient la Cour en rejetant le pourvoi formé par le cadrelicencié.

1.2. Les éléments constitutifs de harcèlement moral

Introduite par la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002, de modernisation sociale (), la définition duharcèlement moral se trouve, aujourd'hui, dans l'article L. 1152-1 du Code du travail (). Ce textedispose qu'"aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objetou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et àsa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel".

Comme cela était jugé en matière de harcèlement sexuel, le harcèlement moral ne saurait résulter d'uncomportement unique (4). Cette affirmation doit être, désormais, tempérée lorsque le harcèlements'accompagne d'une volonté discriminatoire.

L'examen de la jurisprudence de la Chambre sociale de la Cour de cassation donne quelques exemplesde comportements qui entrent dans la qualification de harcèlement moral. Il a, ainsi, été jugé queconstituent un harcèlement moral le retrait sans motif d'un "téléphone portable à usage professionnel,[...] l'instauration d'une obligation nouvelle et sans justification de se présenter tous les matins aubureau de sa supérieure hiérarchique, [...] l'attribution de tâches sans rapport avec [les ] fonctions", dèslors que ces "faits générateurs d'un état dépressif médicalement constaté" nécessitent des arrêts detravail (5).

Constitue, également, un harcèlement moral le fait, pour une salariée, d'être "en butte à l'hostilité deson supérieur hiérarchique qui l'avait menacée" et qui avait fait l'objet de plusieurs avertissements dontaucun n'était fondé (6).

En revanche, ne suffit pas à caractériser un harcèlement moral, le fait que le "salarié avait, par le passé,fait l'objet de plusieurs tentatives de licenciement , toutes infructueuses, pour des motifs similaires" (7).

L'examen des décisions rendues depuis plusieurs années par la Cour de cassation montre le désir decelle-ci de se montrer sévère à l'égard des harceleurs, sans, toutefois, se laisser déborder par desimputations fallacieuses. Il a, ainsi, été jugé que la salariée qui avait accusé à tort son employeur deharcèlement s'exposait à un licenciement pour faute grave (8).Confirmation de cette sévérité en l'espèce

Dans l'une des affaires (n° 06-45.579), une salariée, qui se plaignait de subir le harcèlement moral de sonemployeur, avait été déboutée de l'ensemble de ses demandes par la cour d'appel. Celle-ci avait, en effet,retenu qu'il n'était pas établi que l'altération de l'état de santé de la salarié, matérialisée par un étatanxio-dépressif, fût la conséquence d'agissements répétés de harcèlement moral émanant del'employeur, ajoutant que la médecine du travail n'avait pas été alertée et que l'allégation d'un malaisecollectif des sages-femmes de la clinique ne saurait établir l'existence d'agissements répétés deharcèlement moral. Or, cet arrêt est cassé, la Chambre sociale de la Cour de cassation affirmant qu'"ense déterminant ainsi, par des motifs inopérants, alors que la salariée invoquait le retrait arbitraire deson statut de cadre, la stagnation de sa rémunération, la suppression de primes et d'éléments de salaire,la détérioration progressive de ses conditions de travail, la cour d'appel, qui devait rechercher si de telséléments étaient établis et, dans l'affirmative, s'ils étaient de nature à faire présumer un harcèlementmoral au sens des textes précités, n'a pas donné de base légale à sa décision".

Cette sévérité s'inscrit donc dans la droite ligne de la jurisprudence antérieure et mérite une pleineapprobation.

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Même s'il convient de demeurer vigilant, afin d'éviter un dévoiement de la notion de harcèlement moral,certains comportements doivent être bannis des entreprises et leurs auteurs sanctionnés comme ils lesméritent. Rappelons, d'ailleurs, que l 'obligation de prévention du harcèlement moral dans l'entreprisefait partie intégrante de l'obligation de sécurité de résultat de l'employeur et que ce dernier est, parconséquent, pleinement responsable des conséquences dommageables d'un harcèlement réalisé par l'unde ses subordonnés (9).

1.3. Le rôle du demandeur dans les procès en discrimination ou inégalités

Pour favoriser la preuve du harcèlement ou d'une discrimination, et à l'initiative du droitcommunautaire, le droit du travail n'exige du salarié que la preuve de faits de nature à caractériser unharcèlement ou une discrimination. Lorsque ces éléments de fait sont considérés comme étantsuffisamment crédibles par les juges, il appartient à l'employeur de prouver, en dépit des apparences,que le salarié n'a été victime de harcèlement ou de discrimination. L'article L. 1134-1 du Code dutravail () dispose, ainsi, que, "lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositionsdu chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou lesalarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ouindirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi du 27 mai 2008, portant diverses dispositionsd'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations. Au vu deces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des élémentsobjectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas debesoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles".

Il appartient, par conséquent, au juge de déterminer si les allégations des salariés sont matériellementavérées et si elles sont suffisamment sérieuses pour transférer le risque de la preuve de la discriminationou du harcèlement sur les épaules de l'employeur, alors tenu de se justifier. C'est cette répartition desrôles lors du procès qu'illustrent deux des arrêts rendus par la Chambre sociale le 24 septembre 2008.

Dans une première affaire (affaires jointes n° 06-45.747 et n° 06-45.794), c'est le respect du principe denon-discrimination qui était en cause. Une salariée s'estimait , en effet, victime d'une inégalité detraitement en ce qui concerne l'avancement et la rémunération au sein de la RATP. Pour parvenir àconvaincre le juge, elle avait produit des tableaux comparatifs faisant apparaître des déroulements decarrière différents alors que les salariés dont on comparait la situation présentaient des caractéristiquesprofessionnelles et personnelles comparables. Dans cette affaire, la cour d'appel avait considéré cestableaux comparatifs comme pertinents et avait contraint l'employeur à se justifier. Cette analyse estconfirmée par le rejet du moyen, la Haute juridiction affirmant "que les tableaux comparatifs produitspar la salariée étaient de nature à laisser supposer une inégalité de traitement tant en ce qui concernel'avancement", la cour d'appel ayant "légalement justifié sa décision de considérer la différence alléguéecomme établie".

Dans une autre affaire (n° 06-45.579), c'est le respect du principe "à travail égal salaire égal" quijustifiait la saisine du juge. A cet égard, on rappellera que la Cour de cassation fait application desmêmes principes probatoires en matière de discrimination (10). Ici, la cour d'appel avait écarté leséléments de faits présentés par les salariés et considérés par elle comme insuffisants pour établir unesuspicion de différence de traitement illégitime. Les juges du fond avaient, en effet, retenu que lasalariée ne produisait aucun élément de référence provenant de salariés ayant travaillé dans la mêmeclinique ; or, ce rejet est "légalement justifié" et le pourvoi formé rejeté.

Ces deux décisions confirment une jurisprudence, désormais, bien établie. La charge de la preuve de ladiscrimination est partagée entre le salarié et l'employeur ; le salarié supporte la charge et le risque del'allégation, ce qui signifie qu'il doit convaincre le juge de la matérialité des faits qu'il dénonce et de leurpertinence. Une fois ces faits établis et vérifiés par le juge, le cas échéant, après une enquête menée dansl'entreprise, c'est à l'employeur qu'il appartient de se justifier au regard des différents critères dégagéspar la jurisprudence de ces dernières années.

1.4. Le champ d'application du principe "à travail égal, salaire égal"

Comme cela a déjà été jugé, la Cour de cassation confirme que le principe "à travail égal salaire égal"ne peut s'appliquer entre salariés appartenant à la même entreprise (11). Réserve faite de l'hypothèseparticulière des salariés appartenant à une même unité économique et sociale (12), le principe n'a pasvocation à s'appliquer à d 'autres cas de figure. Dans l'un des arrêts rendus le 24 septembre 2008 (n °06-45.579), la Cour de cassation précise qu'il importe peu que les salariés, qui prétendent comparerleurs situations respectives, soient soumis à la même convention collective.

Cette précision, sans doute nécessaire, est parfaitement justifiée.

C'est, en effet, parce que l'employeur dispose d'un pouvoir d'individualisation des rémunérations qu'illui appartient de respecter l'égalité de traitement entre ses salariés. Ce pouvoir, inhérent à la qualitéd'employeur, n'est par hypothèse pas présent dans les branches d'activité, chaque entreprise relevant desa branche, quoique tenue par les minima fixés conventionnellement, étant à même de déterminer parelle-même les conditions particulières de rémunération de ses salariés.

1.5. Les modalités de défense de l'employeur confronté à des allégations pertinentes

Exposé des moyens de défense

L'employeur dispose de plusieurs moyens pour s'exonérer en cas de suspicion de discrimination, deharcèlement ou d'atteinte au principe d'égalité de traitement.

Il peut, en premier lieu, contester que les salariés dont on compare les situations respectives soient au

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sein de l'entreprise dans une situation identique ou comparable.

Il peut, en deuxième lieu, se justifier d'une différence de traitement existante en prouvant que celle-cirepose, non pas sur un motif prohibé, mais sur une raison légitime.

Il peut, en troisième lieu, prouver que cette différence de traitement repose, bien sûr, sur un motif enapparence prohibé, mais que cette différence répond à une exigence professionnelle essentielle etdéterminante et, pour autant, que l'objectif soit légitime et l'exigence proportionnée (13).

La justification des différences de traitement par la preuve de différences de situation

C'est le premier moyen de défense qu'illustre l'un des arrêts rendus le 24 septembre 2008 (affairesjointes n° 06-43.529 et n° 06-43.530).

Dans cette affaire, qui a déjà donné lieu à un contentieux relativement abondant et à des décisions de laCour de cassation (14), l'entreprise avait décidé, après avoir remis à plat les modes de rémunération,d'accorder aux salariés concernés une compensation financière destinée à éviter toute perte effective derémunération à l'occasion du changement de statut. Ces mesures, prévues par le nouvel accord collectif ,ont été, par conséquent, réservées aux seuls salariés en poste avant l'entrée en vigueur du nouveaudispositif, ce qui avait déclenché des protestations des salariés recrutés postérieurement à l'entrée envigueur du nouveau statut, qui s'estimaient victimes d'une inégalité de traitement. Comme cela avait étéjugé à plusieurs reprises, la Cour de cassation a confirmé que la volonté de compenser une baisse derémunération justifiait pleinement l'attribution sélective de la prime conventionnelle, les salariésembauchés avant le changement de statut ne se trouvant pas dans la même situation que leurs collèguesembauchés postérieurement (15).

La justification des différences de traitement par la preuve du caractère non discriminatoire du motif

C'est le deuxième moyen de défense qu'illustre un autre arrêt rendu le 24 septembre 2008 (n°06-43.504).

Dans cette affaire, un salarié se plaignait d'avoir fait l'objet, en quelques mois , d'un certain nombre demesures (mutations, modification du contrat de travail) et considérait que celles-ci s'inscrivaient dansune stratégie discriminatoire. Devant le juge, l'employeur avait justifié chacune de ces mesures par lasituation économique de l'entreprise et la nécessité de sa réorganisation. La cour d'appel avait considérécette justification comme convaincante, tout comme la Chambre sociale de la Cour de cassation, quirejette le pourvoi sur ce moyen. Pour la Haute juridiction, "ayant relevé que chacune des mesuresinvoquées par la salariée était justifiée par la situation économique de l'entreprise et la nécessité de saréorganisation, la cour d'appel , qui n'a pas violé les textes susvisés au moyen, a légalement justifié sadécision".

1.6. Le régime de la nullité des dispositions contraires au principe d'égalité de traitementLa nullité desdispositions conventionnelles discriminatoires

Les dispositions imposant l'égalité de traitement, le respect du principe "à travail égal, salaire égal" ouprohibant le harcèlement sont d'ordre public. Il est, par conséquent, logique que les conventionscollectives qui y dérogent s'exposent à des actions en nullité (16). Il s'agit même d'une nullité absolue,compte tenu des intérêts en cause, ce qui autorise toute personne, qui y a intérêt, à agir, qu'il s'agisse dessyndicats non signataires ou des salariés.

C'est ce que confirme l'un des arrêts rendus le 24 septembre (affaires jointes n° 06-46.179, n° 06-46.180et n° 07-40.935), la Cour affirmant que "tout salarié qui y a intérêt est recevable à invoquer le caractèreillicite d'une clause d'une convention collective qui lui est applicable", dans une affaire où l'accordlitigieux avait réservé un traitement privilégié aux salariés selon un critère d'affiliation syndicale,contrevenant, ainsi, au principe fondamental de la liberté syndicale, principe qui impliquenécessairement, comme cela a, d'ailleurs, été jugé par la Cour européenne des droits de l'Homme, laliberté de ne pas se syndiquer (17).

1.7. Les limites imposées aux politiques de rattrapages dans l'entrepriseSolutions acquises

Les employeurs, tenus d'assurer le respect effectif du principe d'égalité de traitement dans leurentreprise, doivent mettre en oeuvre des actions visant à supprimer les différences résiduelles detraitement. Pour ce faire, ils peuvent être tentés par la mise en place de mesures ciblant les populationsdiscriminées en leur garantissant des droits spécifiques. En d'autres termes, ils peuvent vouloircombattre des discriminations par d'autres mesures, parfois, improprement dénommées"discriminations positives".

La Cour de cassation a, déjà, eu l'occasion de manifester son opposition à de telles mesures quicombattent le mal par le mal. Ainsi, dans un contentieux opposant un salarié à la RATP, il a été jugéqu'un accord collectif ne pouvait pas, sous prétexte que les femmes se trouvent le plus souventempêchées de voir leur carrière progresser , compte tenu de leurs charges de famille, mettre en placedes modalités de progression qui leur seraient réservées ; les hommes, placés dans une même situationfamiliale, doivent, également, pouvoir en bénéficier (18). Confirmation en l'espèce

C'est cette solution qui se trouve confirmée dans l'un des arrêts rendus le 24 septembre et quiconcernait, de nouveau, la RATP (affaires jointes n° 06-46.179, n ° 06-46.180 et n° 07-40.935). Cettefois-ci, c'étaient les dispositions conventionnelles destinées à favoriser la carrière des représentantssyndicaux de l'entreprise qui étaient en cause, l'accord litigieux leur ayant réservé un traitement

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particulier. Or, le critère d'attribution de ses avantages se fondait sur l'activité syndicale des intéresséset apparaissait, à son tour, comme discriminatoire.

Il ressort de ces deux décisions que la mise en place de mesures de rattrapage doit se faire dans lerespect du principe de non-discrimination, à moins que le législateur , lui-même, n'autorise uneexception, ce qui est le cas pour les accords destinés à favoriser le rattrapage des écarts de rémunérationentre les femmes et les hommes (19). Ces mesures de rattrapage doivent donc être ouvertes à tous lessalariés placés dans la même situation que la catégorie-cible visée par l'accord.

II - Le retour au contrôle des qualifications par la Chambre sociale de la Cour de cassationSituationantérieure

Jusqu'à présent, la Cour de cassation semblait avoir abandonné la qualification de harcèlement ou dediscrimination au pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond.

S'agissant, en premier lieu, du harcèlement moral et ce, bien avant l'introduction de cette notion dans leCode du travail à l'occasion du vote de la loi de modernisation sociale en janvier 2002 (loi n° 2002-73 du17 janvier 2002 ), la Chambre sociale de la Cour de cassation avait eu l'occasion d'affirmer,singulièrement, dans une décision très nette rendue en 2005, que "les juges du fond apprécientsouverainement l'existence d'un harcèlement moral" (20), affirmation qui allait être confirmée jusqu 'àune date très récente (21).

Une même tendance, sans doute moins marquée, pouvait être notée en matière de discrimination, laHaute juridiction faisant référence au "pouvoir souverain d'appréciation des faits et des preuves" desjuges du fond portant, notamment, sur la pertinence des allégations des salariés (22) ou desjustifications avancées par l'employeur (23).

Dans certaines décisions antérieures, la Cour de cassation s'était, toutefois, montrée plus sévère,singulièrement, pour casser des décisions qui avaient admis de manière trop laxiste la qualification deharcèlement sexuel (24).Justification de la solution antérieure

La référence au pouvoir souverain des juges du fond pouvait se justifier à deux égards.

En premier lieu, la qualification de harcèlement ou de discrimination dépend très étroitement desdonnées de fait propres à l'affaire, étant acquis que les juges du fond doivent, toutefois, ne pasdénaturer les termes de la loi.

En second lieu, la Chambre sociale de la Cour de cassation pensait, sans doute, se prémunir, ainsi,contre une augmentation massive du nombre des pourvois en cassation, augmentation directement liée àla prolifération des allégations devant les juges du fond à l'occasion du règlement delicenciements.Justification du revirement

C'est certainement devant la multiplication des décisions divergentes que la Chambre sociale de la Courde cassation s'est décidée à "reprendre la main" et à recontrôler les qualifications de harcèlement,discrimination on inégalité de traitement et ce , afin d'affirmer son rôle de Cour régulatrice.Illustrationsen l'espèce

Ce retour au contrôle des qualifications s'est traduit, dans les arrêts rendus le 24 septembre 2008, parun certain nombre de rejets accompagnés de "bons points" accordés aux juridictions du fondconcernées et ce, alors que les griefs formulés contre les employeurs n'étaient pas nécessairementconsidérés comme établis, mais , également, par un nombre équivalent de cassations prononcées pourdes motifs disciplinaires .

Ainsi, dans le pourvoi n° 06-46.517, la Cour a repris l'ensemble des éléments retenus par les juges dufond pour caractériser un harcèlement sexuel pour souligner que la somme de ces éléments permettait,effectivement, au juge de conclure en ce sens (25).

En revanche, dans le pourvoi n° 06-43.504, la Haute juridiction a considéré que l'employeur ayantjustifié chacun des mesures litigieuses "par la situation économique de l'entreprise et la nécessité de saréorganisation, la cour d'appel, qui n'a pas violé les textes susvisés au moyen, a légalement justifié sadécision" (26).

Dans deux autres décisions, l'exercice de contrôle a, au contraire, conduit la Cour à casser une décisionqui n'avait pas retenu la qualification de harcèlement moral, la Haute juridiction exerçant, cette fois-ci,un contrôle disciplinaire sur un arrêt d'appel qui ne l'avait pas mis en "mesure d'exercer son contrôlesur le point de savoir si les faits établis n'étaient pas de nature à faire présumer un harcèlement moral"et ce, alors que la salariée avait produit des échanges de courriers entre elle et son employeur, descertificats médicaux dans lesquels les praticiens reprenaient les dires de leur patiente sur les origines destroubles (pourvois n ° 06-45.747 et n° 06-45.794).

Dans un autre arrêt (pourvoi n° 06-45.579), c'est pour manque de base légale que se trouve cassé unarrêt d'appel ayant, également, écarté la qualification de harcèlement moral au motif qu'il n'était pasétabli que l'altération de l'état de santé de la salariée, matérialisée par un état anxio-dépressif, fût laconséquence d'agissements répétés de harcèlement moral émanant de l'employeur, que la médecine dutravail n 'avait pas été alertée et que l'allégation d'un malaise collectif des sages femmes de la clinique nesaurait établir l'existence d'agissements répétés de harcèlement moral. La Cour de cassation qualifie cesmotifs d'"inopérants", dans la mesure où "la salariée invoquait le retrait arbitraire de son statut decadre, la stagnation de sa rémunération, la suppression de primes et d'éléments de salaire, ladétérioration progressive de ses conditions de travail" et reproche à la cour d'appel de n'avoir pasrecherché "si de tels éléments étaient établis et, dans l'affirmative, s'ils étaient de nature à faireprésumer un harcèlement moral au sens des textes précités".Conclusion

Cette série d'arrêts rendus par la Chambre sociale de la Cour de cassation, et promis à la plus large despublicités, contient deux messages.

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Le premier, et sans doute le plus important, à destination des salariés et des employeurs, montre que laCour entend contribuer, à son niveau, à la lutte contre toutes les formes de discriminations, toutes lesfois que les comportements dénoncés n'ont aucune justification valable.

Le second, à destination des juges du fond, est qu'ils doivent, désormais, se plier aux critères dégagéspar la Haute juridiction. Gageons que l'un et l'autre de ces messages parviendront bien à leursdestinataires !

(1)Cass. soc., 14 novembre 2007, n° 06-45.263, Société Aventis Pharma, F -D ().(2) Sur ce point, lire nosobs., La nouvelle approche des discriminations en droit du travail, Lexbase Hebdo n° 309 du 19 juin2008 - édition sociale (). (3) Cass. soc., 5 mars 2002, n° 00-40.717, Société La Louisiane c/ M. DanielAlzas , FS-P+B ().(4) Cass. soc., 15 avril 2008, n° 07-40.290, Mme Zohra Meghraoui , F-D ().(5) Cass.soc., 27 octobre 2004, n° 04-41.008, Société Mât de misaine c/ Mme Claudie Pouvreau, F-P+B (), lire nosobs., Harcèlement moral : la Cour de cassation livre une première définition, Lexbase Hebdo n° 141 du3 novembre 2004 - édition sociale () ; Dr. soc. n° 1, janvier 2005 , p. 100, obs. ClaudeRoy-Loustaunau.(6) Cass. soc., 22 mars 2007, n° 04-48.308, Société Les Pyramides, F-D ().(7) Cass. soc.,8 janvier 2003, n° 00-46.824, Société Jeumont c/ M. Michel Blondeau, F-D (). (8) Cass. soc., 18 février2003, n° 01-11.734, Mme Geneviève Beauzac c/ Société Fiduciaire juridique et fiscale de France(FIDAL), F-D () et nos obs., Tel est pris qui croyait prendre - nul ne peut accuser impunément autrui deharcèlement, Lexbase Hebdo n° 60 du 26 février 2003 - édition sociale ().(9) Cass. soc., 21 juin 2006, n°05-43.914, M. Jacques Balaguer, FP-P+B+R+I () et nos obs., L 'employeur responsable du harcèlementmoral dans l'entreprise, Lexbase Hebdo n° 223 du 12 juillet 2006 - édition sociale (). Solution confirméepar Cass . soc., 21 février 2007, n° 05-41.741, Société Auvergne Denrées, F-D ().(10) Cass. soc., 28septembre 2004, n° 03-41.825, Société STAVS Transport de voyageurs c/ M. André Hoarau, F-P+B (),Bull. civ. V, n° 228 ; Cass. soc., 12 mars 2008, n° 06-40.999, M. Frédéric Chazal, F-D ().(11) Cass. soc ., 6juillet 2005, n° 03-43.074, M. José Correia c/ Compagnie générale des eaux de Paris, FS-P+B (), Bull.civ. V, n° 235 et nos obs., Principe "A travail égal, salaire égal" : comparaison n'est pas raison, LexbaseHebdo n° 177 du 20 juillet 2005 - édition sociale ().(12) Cass. soc., 1er juin 2005, n° 04-42 .143, SociétéPlastic services c/ Mme Annick Clavel, FS-P+B+R+I (), Dr . soc. 2005, p. 1049, obs. Ch. Radé, JCP éd.G, 2005, II, 10092, note P. Lokiec.(13 ) C. trav., art. L. 1133-1 ().(14) Cass. soc., 25 mai 2005, n° 04-40.169, Société The Hôtel Ritz Limited c/ Mme Stoyanka Smilov, FS-P+B (), Bull. civ. V, n° 178.(15) Cass.soc., 1er janvier 2005, n° 03-47.197, Société Transports de tourisme de l'océan, OCECARS c/ M.Jean-Pierre Gandon, FS-P+B+R+I (), JCP éd. G, 2005, II, 10017, note D. Corrignan-Carsin et nos obs.,Le principe "A travail égal, salaire égal" impuissant à réduire les inégalités résultant du passage aux 35heures, Lexbase Hebdo n° 193 du 7 décembre 2005 - édition sociale ().(16) C. trav., art. L. 2251-1 ().(17)CEDH, 25 avril 1996, req. 18/1995/524/610, Gustafsson c/ Suède (), Gaz. Pal. des 11 -12 juillet 1997, p.31, note C. Pettiti.(18) Cass. soc., 18 décembre 2007, n° 06 -45.132, Société autonome des transportsparisiens (RATP), FS-P+B+R+I (), Dr. soc., 2008, p. 246, obs. Ch. Radé et nos obs., Des limites auxmesures tendant à favoriser l'accès des femmes aux carrières, Lexbase Hebdo n° 287 du 9 janvier 2008 -édition sociale ().(19) C. trav., art. L. 1142-4 ().(20) Cass. soc., 23 novembre 2005, n ° 04-46.152, MmeJeanne Foata c/ Société Polyclinique Santa Maria, F-P (). Déjà, Cass. soc., 27 octobre 2004, n° 04-41.008,préc..(21) Dernièrement Cass. soc., 9 octobre 2007, n° 06-42.350, Mlle Laëtitia Astruc, F-D () ; Cass.soc., 27 novembre 2007, n° 06-41.854, M. Fernando Candido , F-D () ; Cass. soc., 21 mai 2008 , n°06-44.948, Société Frigoccasion, FS-P+B () et les obs. de S. Tournaux, Présomption d'innocence etlicenciement disciplinaire , Lexbase Hebdo n° 307 du 4 juin 2008 - édition sociale ().(22) Cass . soc., 25juin 2007, n° 05-45.903, Société Multi Contact France, F-D ().(23) Cass. soc., 20 juin 2007, n° 06-41.399,M. Claude Dupuis, F-D () ; Cass. soc., 27 mai 2008, n ° 06-45.324, M. Roland Durand, F-D ().(24) Cass.soc., 27 novembre 2007 , n° 06-41.854, préc..(25) Cf. supra les éléments constitutifs du harcèlementsexuel.(26) C'est nous qui soulignons. Sur cet arrêt, nos développements supra..

Christophe Radé, Professeur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV, Directeur scientifique deLexbase Hebdo - édition sociale, Principe "à travail égal, salaire égal", égalité de traitement,non-discrimination et harcèlement : la Cour de cassation reprend la main, Lexbase Hebdo n° 321 du 9octobre 2008 - édition sociale.

1012 5.4. Les sanctions du harcèlement moral [E1452AWP]

Le fait de harceler autrui par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet unedégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignitéest puni d'un emprisonnement d'un an et de 15 000 euros d'amende.

C. pén., art. 222-33-2, version du 18-01-2002, à jour

Les droits du salarié auxquels les agissements incriminés sont susceptibles de porter atteintesont les droits de la personne au travail tels qu'ils sont énoncés à l'article L. 120-2 du Code detravail.

Cons. const., décision n° 2001-455, du 12-01-2002, Loi de modernisation sociale

Le fait de harceler autrui par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet unedégradation des conditions de travail susceptible d'altérer sa santé physique ou mentale estpuni d'un emprisonnement d'un an et de 15 000 euros d'amende.

C. pén., art. 222-33-2, version du 18-01-2002, à jour

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Le fait de harceler autrui par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet unedégradation des conditions de travail susceptible de compromettre son avenir professionnelest puni d'un emprisonnement d'un an et de 15 000 euros d'amende.

C. pén., art. 222-33-2, version du 18-01-2002, à jour

Toute rupture du contrat de travail qui résulterait d'agissements répétés de harcèlementmoral, toute disposition ou tout acte contraire à l'article L. 122-49 du Code du travail est nulde plein droit.

C. trav., art. L. 1152-3, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 122-49, al. 3, version du 18-01-2002, à jour

Les effets de la légalisation du harcèlement moral sur le pourvoir de licencier

La loi de modernisation sociale, qui rend déjà plus difficile pour l'employeur le licenciementéconomique, risque d'avoir des effets sur le licenciement pour motif personnel. En effet, d'aucunsseront tentés de faire obstacle au pouvoir disciplinaire de l'employeur en arguant d'un harcèlement dece dernier. Toutefois, l'employeur pourra toujours démontrer que le licenciement du salarié est justifiépar des motifs objectifs étranger à tout harcèlement (1).

(1) L. 122-52, al. 1, du Code du travail.

Tout salarié qui a procédé à des agissements répétés de harcèlement moral est passible d'unesanction disciplinaire.

C. trav., art. L. 122-50, version du 18-01-2002, à jourC. trav., art. L. 1152-5, version du 01-05-2008, à jour

Toute infraction aux dispositions de l'article L. 122-49 du Code du travail relatif auharcèlement moral est sanctionnée d'une peine d'emprisonnement d'un an et d'une amendede 3 750 euros ou de l'une de ces deux peines seulement.

C. trav., art. L. 1155-2, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 152-1-1, al. 1, version du 18-01-2002, à jour

Le tribunal peut ordonner, aux frais de la personne condamnée, l'affichage du jugement etson insertion, intégrale ou par extraits, dans les journaux qu'il désigne, sans que ces fraispuissent excéder le maximum de l'amende encourue.

C. trav., art. L. 1155-2, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 152-1-1, al. 2, version du 18-01-2002, à jour

Le juge peut ajourner le prononcé de la peine lorsqu'il apparaît que le reclassement ducoupable est acquis, que le dommage causé est réparé et que le trouble résultant del'infraction a cessé.

C. trav., art. L. 1146-2, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 152-1-2, al. 1, version du 18-01-2002, à jour

C. pén., art. 132-59, al. 1, version du 01-03-1994, à jour

La juridiction qui prononce une dispense de peine peut décider que sa décision ne sera pasmentionnée au casier judiciaire. En tout état de cause, la dispense de peine ne s'étend pas aupaiement des frais du procès.

C. trav., art. L. 1146-2, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 152-1-2, al. 1, version du 18-01-2002, à jour

C. pén., art. 132-59, al. 2, version du 01-03-1994, à jour, et 3

Le juge peut ajourner (ajournement simple) le prononcé de la peine lorsqu'il apparaît que lereclassement du coupable est en voie d'être acquis, que le dommage causé est en voie d'êtreréparé et que le trouble résultant de l'infraction va cesser.

C. trav., art. L. 1146-2, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 152-1-2, al. 1, version du 18-01-2002, à jour

C. pén., art. 132-60, version du 01-03-1994, à jour

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Dans l'hypothèse d'un ajournement simple, sans dispense de peine, la juridiction fixe dans sadécision la date à laquelle il sera statué sur la peine.

C. trav., art. L. 1146-2, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 152-1-2, version du 18-01-2002, à jour

C. pén., art. 132-60, al. 2, version du 01-03-1994, à jour

L'ajournement simple ne peut être ordonné que si la personne physique prévenue ou lereprésentant de la personne morale prévenue est présent à l'audience.

C. trav., art. L. 1146-2, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 152-1-2, al. 1, version du 18-01-2002, à jour

C. pén., art. 132-60, al. 3, version du 01-03-1994, à jour

A l'audience de renvoi, le juge peut soit dispenser le prévenu de peine, soit prononcer la peineprévue par la loi, soit ajourner une nouvelle fois le prononcé de la peine.

C. trav., art. L. 1146-2, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 152-1-2, al. 1, version du 18-01-2002, à jour

C. pén., art. 132-61, version du 01-03-1994, à jour

La décision sur la peine doit intervenir au plus tard après la première décisiond'ajournement.

C. trav., art. L. 1146-2, version du 01-05-2008, à jourC. trav., art. L. 152-1-2, al. 1, version du 18-01-2002, à jour

C. pén., art. 132-62, version du 01-03-1994, à jour

La décision par laquelle l'inspecteur du travail refuse d'autoriser le licenciement d'un salariéprotégé qui lui est demandé à raison de faits de harcèlement moral sur ses subordonnés peut,par ses conséquences, porter atteinte à une liberté fondamentale.

CE contentieux, 04-10-2004, n° 264310, Société Mona Lisa investissements et autres

Dès lors que l'employeur a eu à l'égard du salarié une attitude répétitive constitutive deviolences morales et psychologiques, le salarié peut rompre son contrat de travail et enimputer la rupture à son employeur.

Cass. soc., 26-01-2005, n° 02-47.296, société Industrielle méditéranéenne alimentaire (IMA), anciennementdénommée SA Pedelhez c/ M. Jésus Pastor, F-P+B

Pour des précisions sur le montant de l'indemnité dû en réparation du préjudice subi, seréférer aux arrêts suivants.

CA Paris, 18e, D, 26-10-2004, n° 04/32315, SOCIETE OMNIUM DE GESTION ET DE FINANCEMENT c/ M. MichelROS

CA Paris, 18e, D, 07-09-2004, n° 04/32588, Madame Colette CASAUX c/ SOCIETE GARAGE DU BACCA Paris, 18e, D, 07-09-2004, n° 04/31167, Madame Laure JEHLEN c/ SOCIETE AEROPORTS DE PARIS

CA Paris, 18e, D, 02-11-2004, n° 04/33037, Mme Jeanine ROUGERIE c/ ASSOCIATION VITACITE`LA MISSIONLOCALE

CA Paris, 18e, A, 30-11-2004, n° 03/34035, Mme Rolande ROMAIN c/ SCA EURO DISNEY

Pour d'autres arrêts sur le montant de l'indemnité dû en réparation du préjudice subi

CA Paris, 22e, B, 18-01-2005, n° 03/35989, Melle Michelle SIMONCA Paris, 18e, A, 04-01-2005, n° 03/34249, Société HAVANATOUR c/ Mme Sandra REWINSKI

CA Paris, 22e, B, 14-01-2005, n° 03/34712, Melle Flora, Katia PREVOST c/ Me Monique BOISSETCA Paris, 18e, C, 20-01-2005, n° 04/30920, M. Pascal GOFFIN c/ SA UFP INTERNATIONAL

CA Paris, 18e, E, 10-02-2006, n° 04/34437, M. CANDIDO FERNANDO EXERCANT EN NOM PROPRE S OUSL'ENSEIGNE "ETS CANDIDO" c/ M. M. Joaquim FRAZAO

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La législation sur les ATMP ne fait pas obstacle à l'attribution de dommages-intérêts ausalarié en réparation du préjudice que lui a causé le harcèlement moral dont il a été victimeavant la prise en charge de son affection par la Sécurité sociale.

Cass. soc., 15-11-2006, n° 05-41.489, société UFP international, FS-P+B

Précisions sur les limites de l'immunité de l'employeur dans le cadre de l'indemn

Les règles spécifiques qui régissent l'indemnisation des accidents du travail et maladies professionnelleslimitent cette dernière. Cette limitation découle de deux principes : le principe de la réparationforfaitaire et le principe de l'immunité de l'employeur. Le second de ces principes s'exprime dansl'impossibilité pour le salarié d'exercer une action contre son employeur sur le fondement du droit de laresponsabilité civile pour obtenir une indemnisation complémentaire à celle que lui offre la législationprofessionnelle. Cependant, le principe d'immunité de l'employeur n'exclut pas toute action sur lefondement de la responsabilité civile : un arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation, en datedu 15 novembre 2006, est l'occasion de le préciser (Cass. soc., 15 novembre 2006, n° 05-41.489, SociétéUFP international, FS-P+B )..

Dans la droite ligne du compromis historique issu de la loi du 9 avril 1898, l'indemnisation des accidentsdu travail et maladies professionnelles revêt des caractères spécifiques eu égard aux principes classiquesdu droit de la responsabilité civile. Ainsi, on le sait, l'indemnisation est tout d'abord forfaitaire,caractère qui se démarque du principe de réparation intégrale des préjudices qui prévaut en droit de laresponsabilité civile. L'indemnisation est, également, spécifique du fait de son caractère automatique.Plus exactement, la victime n'a pas à établir de faute, seule lui incombe la preuve de l'existence d'unrisque professionnel. Ce second caractère est assorti d'une règle corollaire : celle de l'immunité del'employeur. L'affaire, objet de l'arrêt rendu le 15 novembre 2006 par la Chambre sociale de la Cour decassation, intéresse le second caractère de l'indemnisation des risques professionnels et son principecorollaire d'immunité de l'employeur.

Dans sa décision, la Chambre sociale précise qu'un salarié peut exercer une action sur le fondement dudroit commun en réparation d'un préjudice subi antérieurement à la prise en charge de son affection autitre de la législation professionnelle. La décision paraît logique, mais mérite quelques observations euégard aux principes habituellement retenus en matière d'indemnisation des risques professionnels (1).En particulier, il faut remarquer que le préjudice, dont la réparation en marge de l'indemnisationprofessionnelle est considérée comme légitime par la Cour de cassation, est celui qui a été causé ausalarié par le harcèlement moral dont il a été victime antérieurement à la prise en charge de sonaffection par la Sécurité sociale (2).

Après quelques rappels sur le principe d'immunité de l'employeur et les nombreuses critiques qu'il a pususciter, quelques observations relatives au cas d'espèce méritent d'être faites, car il pourrait annoncerd'autres évolutions.

1. Le principe de l'immunité de l'employeur

L'indemnisation des accidents du travail et des maladies professionnelles repose sur plusieurs piliersadoptés dès la loi du 9 avril 1898 et jamais remis en cause depuis : les caractères automatique etforfaitaire de cette indemnisation, ainsi que le principe d'immunité de l'employeur. Porteuse d'unvéritable compromis entre les intérêts des employeurs et ceux des salariés, la loi de 1898 prévoit quel'indemnisation doit intervenir sans que le salarié ait à prouver une faute de son employeur, en échangede quoi l'indemnisation est forfaitaire et ne saurait être complétée par le biais d'une action contrel'employeur sur le fondement de la responsabilité civile de droit commun. Le caractère forfaitaire del'indemnisation s'articule ainsi avec l'impossibilité pour le salarié d'agir contre son employeur pourobtenir un éventuel complément d'indemnisation. En vertu de l'article L. 451-1 du Code de la Sécuritésociale, le droit de la Sécurité sociale se substitue, en principe, intégralement au droit de laresponsabilité civile et en écarte l'application (1).

Cependant, le Code de la Sécurité sociale prévoit que l'immunité de l'employeur peut parfois être levée,notamment quand ce dernier a été l'auteur d'une faute d'une gravité particulière. Contrairement à unefausse idée assez répandue, la faute inexcusable de l'employeur ne permet pas la levée de son immunité :elle permet à la victime d'obtenir, tout en restant sur le terrain du droit de la Sécurité sociale, unemajoration de son indemnisation (CSS, art. L. 452-1 ). Seule la faute intentionnelle de l'employeur,d'une gravité plus importante, permet à la victime d'obtenir une réparation intégrale de son préjudiceen lui rouvrant la possibilité d'une action contre l'employeur sur le fondement du droit commun de laresponsabilité civile délictuelle (CSS, art. L. 452-5 ).

L'exclusion de l'action en réparation sur le terrain de la responsabilité civile de droit commun estégalement écartée quand le dommage a été causé au salarié par un tiers (2) ou, encore, quand il résulted'un accident de trajet. Enfin, fort logiquement et sans surprise, le principe d'immunité ne peut êtreopposé qu'aux personnes bénéficiant d'une indemnisation au titre de la législation professionnelle. Dansune décision désormais célèbre, et dont la solution reste valable, la Cour de cassation a, en effet, eul'occasion de préciser que toute autre personne conserve ses droits sur le terrain de la responsabilitécivile (Ass. plén., 2 février 1990, n° 89-10.682, Mme Rodriguez, publié ).

Mais, comme le principe de réparation forfaitaire, le principe d'immunité de l'employeur fait l'objet detrès nombreuses critiques. En premier lieu, ce principe apparaît contraire à l'égalité entre les victimes :selon qu'elles "bénéficient" ou non d'une indemnisation au titre de la législation professionnelle, leurindemnisation peut être différente. Les principes du droit de la responsabilité civile ayant eux-mêmesbeaucoup évolué, il n'est pas rare que le "bénéficiaire" de la législation professionnelle soit moins bienindemnisé que la victime agissant sur le fondement du droit commun. En second lieu, l'immunité de

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l'employeur est critiquable en tant que corollaire du principe de réparation forfaitaire, c'est-à-dire en cequ'elle prive les victimes d'une possibilité de réparation intégrale qui prévaut en droit commun.D'aucuns ont pu dénoncer le fait que le régime d'indemnisation des risques professionnels était souventdevenu un carcan empêchant des actions plus porteuses sur le terrain de la responsabilité civile. Or, untel raisonnement a de fortes chances d'être entendu dans l'avenir. De nombreuses décisions portentremise en cause du fondement même de l'immunité de l'employeur. On peut, ici, évoquer, par exemple,une décision du Conseil constitutionnel en date du 19 décembre 2000, rendue à propos de la loi definancement de la Sécurité sociale pour 2001 (Cons. const., décision n° 2000-437 DC, du 19 décembre2000, Loi de financement de la Sécurité sociale pour 2001 ). Le Conseil constitutionnel valide, certes,l'article 53 de la loi instituant le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, mais non sans avoirpris la précaution de préciser que tout recours devant les juridictions de droit commun n'était pas exclu(4). Plus généralement, on a déjà eu l'occasion de souligner que, faute d'une intervention législativeabandonnant le principe de la réparation forfaitaire, la jurisprudence force, assez régulièrement, sonraisonnement pour aboutir à des solutions similaires (v., notamment, l'élargissement manifeste de ladéfinition de la faute inexcusable dans le souci de permettre l'octroi de majorations). Il n'est pasimpossible que l'arrêt commenté constitue un nouvel appel du pied en direction du législateur !

2. Le harcèlement moral, hypothèse de dérogation à l'immunité de l'employeur ?

Prenant, sans doute, conscience qu'elle va parfois un peu loin pour développer les cas de réparationintégrale, notamment en multipliant les hypothèses de levée de l'immunité de l'employeur, la Cour decassation n'est pas sans manifester, elle-même, quelques hésitations.

Il y a quelques années, dès lors que le préjudice résultait d'un fait ayant le caractère d'une infractionpénale, la Cour de cassation a pu étendre l'applicabilité de l'article 706-3 du Code de procédure pénale() aux victimes d'accidents du travail, ouvrant ainsi la voie à une réparation intégrale (v., notamment,Cass. civ. 2, 18 juin 1997, n° 95-11.223, Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme etd'autres infractions c/ M. Sorribes et autres, publié ). Mais, la Cour de cassation a, par la suite,abandonné cette position audacieuse. Dans plusieurs décisions postérieures, la deuxième chambre civileexclut, pour les victimes d'accidents du travail, la mise en oeuvre d'autres mécanismes d'indemnisationdes victimes d'infraction (v., notamment, Cass. civ. 2, 7 mai 2003, n° 01-00.815, Fonds de garantie desvictimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (FGVAT) c/ M. Nicolas Brevot, FP-P+B+R+I ;Cass. civ. 2, 23 octobre 2003, n° 02-16.580, M. Saïd Fadili c/ Fonds de garantie des victimes d'actes deterrorisme et d'autres infractions, FS-P+B ).

Il n'est pas impossible que, dans l'arrêt commenté, la Cour de cassation retrouve le chemin qu'elletentait déjà d'emprunter en 1997. En effet, alors que l'employeur auteur du pourvoi insiste sur le faitque les juges d'appel n'ont pas recherché si la demande de dommages et intérêts pour harcèlementmoral ne constituait pas une action en réparation de la maladie professionnelle du salarié, la Chambresociale affirme, dans sa décision, la possibilité pour un salarié dont l'affection a été prise en charge autitre de la législation professionnelle, d'intenter une action sur le fondement du droit commun pourobtenir réparation du préjudice résultant du harcèlement moral dont il a été victime antérieurement. Lecaractère d'infraction pénale du harcèlement moral n'est, certes, pas expressément mentionné, mais ilne saurait être trop rapidement oublié dans l'analyse de la décision...

Cependant, la portée de la décision peut être fortement relativisée : dans la rédaction de sa décision, laChambre sociale insiste tout particulièrement sur la chronologie des événements de l'espèce. Du rappeldes faits et de la procédure tel que la Cour de cassation le rédige, dates à l'appui, il ressort que leharcèlement moral était manifestement antérieur à la prise en charge au titre de la législationprofessionnelle. La Cour de cassation insiste également, dans son troisième attendu, en faisant référenceau harcèlement moral dont le salarié a été victime "antérieurement à la prise en charge de son affectionpar la Sécurité sociale".

La Chambre sociale a-t-elle voulu faire sienne la jurisprudence de la deuxième chambre civileantérieure à 2003 ou ne rend-elle qu'une décision entièrement fondée sur des considérationschronologiques ? Le doute est au moins permis quant à la réponse à apporter à cette question. Ausurplus, la nature même du harcèlement moral, enchaînement de faits sur une assez longue période,n'est pas sans brouiller quelque peu les pistes.

Affaire à suivre !

Olivier PujolarMaître de conférences à l'Université Montesquieu-Bordeaux IV

(1) En ce sens, v., notamment, J.-J. Dupeyroux, M. Borgetto, R. Lafore et R. Ruellan, Droit de laSécurité sociale, 15ème éd., Dalloz 2005, spéc. p. 623.(2) Les principes d'immunité de l'employeur et deréparation forfaitaire sont, notamment, destinés à simplifier et pacifier les rapports internes à lacollectivité de travail. Ils n'ont donc pas vocation à s'exporter en dehors de l'entreprise. La victime peutdonc agir contre les tiers à l'entreprise. A ce propos, v., notamment, M. Badel, Droit de la Sécuritésociale, Ed. Ellipses, 2006, spéc. p. 86.(3) Plus précisément, le Conseil constitutionnel retient que : "lelégislateur a entendu garantir aux victimes" la réparation intégrale de leurs préjudices "tout eninstituant une procédure d'indemnisation simple et rapide ; que la personne qui a choisi de présenterune demande d'indemnisation devant le fonds a la possibilité d'introduire un recours devant la courd'appel si sa demande a été rejetée, si aucune offre ne lui a été présentée dans un délai de six mois ouencore si elle a rejeté l'offre qui lui a été faite ; qu'en toute hypothèse, la décision de la cour d'appelpourra faire l'objet d'un pourvoi en cassation ; que les dispositions du dernier alinéa du IV de l'article53, relatives au désistement et à l'irrecevabilité des actions en réparation, s'entendent compte tenu decelles de son deuxième alinéa ; que les actions juridictionnelles de droit commun demeurent ouvertes,aux fins de réparation, aux personnes qui ne saisissent pas le fonds ; qu'enfin, la victime conserve lapossibilité de saisir la juridiction pénale ; qu'ainsi, les dispositions contestées, qui trouvent leurjustification dans la volonté de simplifier les procédures contentieuses, d'éviter qu'un même élément depréjudice ne soit deux fois indemnisé et d'énoncer clairement les droits des victimes, ne méconnaissentpas le droit à un recours juridictionnel effectif qui découle de l'article 16 de la Déclaration des droits de

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l'homme et du citoyen".

Lexbase Hebdo n° 239 du 7 décembre 2006 - édition sociale

Dès lors que le comportement de la victime a contribué à la dégradation de ses conditions detravail, la responsabilité de l'employeur peut être atténuée.

CE 2/7 SSR., 24-11-2006, n° 256313, Mme BAILLET

Préjudice moral : prise en compte du comportement de la victime pour diminuer son

La loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 (loi n° 2002-73 ) a inséré la lutte contre leharcèlement moral dans les entreprises et les administrations dans le Code du travail et dans le statut dela fonction publique. Pour la première fois, à notre connaissance, le Conseil d'Etat nous livre, dans unarrêt en date du 24 novembre 2006, une définition attendue du harcèlement moral (1). Plus surprenante,et disons-le clairement, plus scandaleuse est, en revanche, l'affirmation selon laquelle le préjudice causéà la salariée s'expliquait, pour partie, par le comportement de cette dernière, comme si le harcèlementmoral pouvait être excusé (2).

1. Les éléments constitutifs du harcèlement moralEléments légaux de définition

L'article 178 de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 a instauré, dans la fonction publique,des dispositions visant à prévenir et sanctionner le harcèlement moral, à l'instar, d'ailleurs, des règlesintroduites dans le Code du travail par les articles 168 à 177 de la même loi.

Ce texte, qui a introduit un article 6 quinquies dans la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits etobligations des fonctionnaires (), dispose qu'"aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétésde harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travailsusceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou decompromettre son avenir professionnel", qu'"aucune mesure concernant notamment le recrutement, latitularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peutêtre prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé desubir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; 2° Le fait qu'il ait exercé unrecours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser cesagissements ; 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés", qu'"estpassible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé aux agissements définis ci-dessus" et que"les dispositions du présent article sont applicables aux agents non titulaires de droit public".

Comme la Cour de cassation avant elle, le Conseil décide, dans cette affaire, que les dispositions de la loidu 17 janvier 2002 n'étaient pas, ici, directement applicables dans la mesure où les faits étaientantérieurs à son entrée en vigueur (dans le même sens, Cass. soc., 15 février 2006, n° 04-43.114, MlleAngélique Quilici c/ Fédération des caves coopératives de l'Hérault, F-D : "les dispositions de l'articleL. 122-49 du Code du travail ne s'appliquant pas à des faits antérieurs à la loi du 17 janvier 2002 ayantinstitué ce texte, la cour d'appel, qui a constaté que les faits invoqués comme caractérisant unharcèlement moral étaient antérieurs à juin 1999, en a exactement déduit que les dispositions susviséesn'étaient pas applicables").

C'est donc dans le cadre du contentieux ordinaire de la faute commise par l'employeur public que leConseil d'Etat entendait, ici, se situer, et qu'il nous livre d'ailleurs, pour la première fois à notreconnaissance, une définition du harcèlement moral.

Jusqu'à présent, en effet, le Conseil avait déjà eu à connaître de faits de harcèlement moral mais n'avaitjamais été conduit à en donner une définition précise (on pensera, ainsi, à l'arrêt en date du 4 octobre2004 concernant l'application de la procédure du référé liberté dans le cadre du refus d'autoriser lelicenciement d'un salarié protégé convaincu de faits de harcèlement : CE 3° et 8° s-s-r., 4 octobre 2004,n° 264310, Société Mona Lisa Investissements et autres ).L'affaire

Dans cette affaire, le Conseil d'Etat conclut, contre l'avis du tribunal administratif et de la Couradministrative d'appel, que la salariée avait bien été victime de harcèlement moral, après avoir retenuun faisceau d'indices concluants : isolement (son supérieur hiérarchique ne communiquait, en effet, plusavec elle que par écrit, parfois même par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, et avaitincité ses collaborateurs à faire de même), dirigisme excessif (le chef de service multipliait "les consignesinutilement tatillonnes"), déqualification ("la requérante a été progressivement confinée dans des tâchessubalterne"), dénigrement ("celle-ci a vu son comportement et ses capacités professionnellessystématiquement dénigrés"), humiliations ("termes souvent humiliants pour un agent de sonancienneté"), diffamations ("son honnêteté [avait été] mise en doute à plusieurs reprises, sans quejamais une procédure de licenciement pour insuffisance professionnelle ou de sanction disciplinaire aitété engagée à son encontre selon les formes et avec les garanties prévues par son statut"), brimades("mesures vexatoires telles que l'interdiction de pénétrer dans certaines pièces ou d'assister, sans quesoit invoqué un motif précis tiré de l'intérêt du service, aux voeux du directeur de l'établissement") et,pour finir, l'altération de la santé de la salariée ("placement de la requérante en congé de maladie pourun état dépressif pendant cinq mois et demi au cours de l'année 1995").

Par ailleurs, le directeur de l'établissement n'avait pas satisfait à son obligation de lutte contre leharcèlement au sein de son établissement ("aucune mesure n'a été prise pour mettre un terme à cette

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situation").Une solution conforme à la jurisprudence de la Cour de cassation

Tous ces ingrédients correspondent parfaitement à la jurisprudence de la Cour de cassation qui, endépit de la référence au pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond (Cass. soc., 23 novembre2005, n° 04-46.152, Mme Jeanne Foata c/ Société Polyclinique Santa Maria, F-P ), caractérise leharcèlement moral par l'existence de brimades, l'attribution de tâches disqualifiant et la dégradation del'état de santé (Cass. soc., 27 octobre 2004, n° 04-41.008, Société Mât de misaine c/ Mme ClaudiePouvreau, F-P+B : ; lire nos obs., Harcèlement moral : la Cour de cassation livre une premièredéfinition, Lexbase Hebdo n° 141 du 4 novembre 2004 - édition sociale ) ou, encore, par uncomportement "tatillon" et l'imputation de fautes imaginaires (Cass. soc., 4 avril 2006, n° 04-43.929,Société Hymatom c/ M. Cyril Singer, F-D ).

La mise en cause de la responsabilité civile de l'employeur est, également, conforme aux analyses de laCour de cassation, qui a considéré que l'employeur était tenu, à l'égard du salarié, d'une obligation desécurité de résultat (Cass. soc., 21 juin 2006, n° 05-43.914, M. Jacques Balaguer, FP-P+B+R+I ; lire nosobs., L'employeur responsable du harcèlement moral dans l'entreprise, Lexbase Hebdo n° 223 du 13juillet 2006 - édition sociale ).

2. La faute exonératoire de la victimeUne exonération partielle de l'employeur public surprenante

Si la qualification de harcèlement moral ne fait, finalement, pas difficulté, dans cette affaire,l'exonération partielle du harceleur par la faute de la victime harcelée est des plus surprenantes.

Le Conseil d'Etat a, en effet, relevé que, par son attitude ("Mme Baillet, qui regardait comme illégale etinjustifiée son affectation à la 'mission conseil juridique' de l'Office national de la chasse, a fait preuve,tout au long des années en cause, et sous couvert de défendre l'intérêt du service, d'une mauvaisevolonté persistante dans l'accomplissement des tâches qui lui étaient imparties, ignorant ou critiquantfréquemment les consignes qui lui étaient données et dénonçant celles-ci à tout propos, en termespéremptoires, dans des courriers adressés au directeur de l'Office, voire aux autorités de tutelle") lasalariée avait "largement contribué [...] à la dégradation des conditions de travail dont elle se plaint", et"que, si cette circonstance n'est pas de nature à retirer leur caractère fautif aux agissements rappelésprécédemment de sa hiérarchie, elle est, dans les circonstances de l'espèce, de nature à atténuer laresponsabilité de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage à hauteur de la moitié desconséquences dommageables de ceux-ci".

Sur le plan des principes qui gouvernent habituellement le droit de la responsabilité, l'exonération duresponsable par la preuve de la faute de la victime est des plus classiques.

Mais, cette logique est-elle adaptée au cas présent ? Nous ne le croyons pas.Une exonération des pluscontestables

En premier lieu, et compte tenu du fondement de la prohibition de toute forme de harcèlement (pour ledroit communautaire le principe de non-discrimination et, plus fondamentalement, le respect de ladignité de la personne), la solution retenue équivaut à "justifier" en partie le comportement, pourtantpénalement répréhensible, du supérieur hiérarchique. Pire, elle accrédite l'idée que le harcèlementcaractérisé était une réponse en partie justifiée au comportement de la salariée, autrement dit que cettevoie de fait était en partie justifiée.

Or, pareille suggestion est, à proprement parler, inadmissible. Certes, le comportement de la salariéeavait certainement de quoi exaspérer son supérieur. Mais, ce dernier disposait de voies de droit pour lasanctionner et pouvait mettre en oeuvre la procédure disciplinaire adéquate. En l'exonérantpartiellement de sa responsabilité, le Conseil retient alors une sorte d'excuse de provocation, au senspénal du terme, comme si la salariée "l'avait cherché" ! Pire encore, en privant la salariée d'une partiede son indemnité, le Conseil d'Etat lui impose une sanction pécuniaire déguisée, en totale contradiction,d'ailleurs, avec sa propre jurisprudence (CE Contentieux, 1er juillet 1988, n° 66405, Billard et Volle ;Dr. soc. 1988, p. 775, concl. O. Van Ruymbeke).

Le propre du principe de dignité est qu'il constitue un droit fondamental, un droit absolu qui n'autoriseaucune dérogation d'aucune sorte. Permettre au chef de service de s'exonérer équivaut, alors, à justifierl'injustifiable.

La solution peut, également, se prévaloir de l'obligation faite par le Code du travail au salarié de veillerà sa propre sécurité (C. trav., art. L. 230-3 ). Mais, le code prévoit que cette obligation ne saurait avoirpour conséquence d'atténuer la propre responsabilité de l'employeur (C. trav., art. L. 230-4 ).Comment, dans ces conditions, admettre l'inadmissible ?

Christophe RadéProfesseur à l'Université Montesquieu-Bordeaux IVDirecteur scientifique de LexbaseHebdo - édition sociale LEXBASE HEBDO n° 241 du 21 Décembre 2006 - Edition SOCIALE

Bien que procédant des mêmes agissements du prévenu, les infractions d'entrave à l'exercicedu droit syndical et de harcèlement moral doivent être toutes deux retenues, dès lors que cesinfractions sanctionnent la violation d'intérêts distincts.

Cass. crim., 06-02-2007, n° 06-82.601, PERIN Max, F-P+F

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1013 5.5. La qualification de certains accidents dus au harcèlement moral enaccidents du travail

[E1792AWB]

Est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par lefait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou enquelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs.

CSS, art. L. 411-1, version du 21-12-1985, à jour

La présomption d'accident du travail ne tombe que si l'employeur ou la caisse primaired'assurance maladie (CPAM) démontre qu'il n'y a pas de lien entre le travail et l'accident.Sur la définition de l'accident du travail, voir N°LXB: E2525AGM .

Cass. soc., 24-03-1986, n° 84-16.764, Cass. soc., 15-06-2000, n° 98-14.537,

Les dommages sur la santé ou la vie du salarié causés par le harcèlement moral peuvent êtrequalifiés d'accident du travail, dans la mesure où ils sont survenus "par le fait ou àl'occasion du travail".

CSS, art. L. 411-1, version du 21-12-1985, à jour

Une tentative de suicide liée à un harcèlement moral (brimades, pression...) survenu lelendemain d'un alourdissement notable de ses attributions a eu lieu à l'occasion du travail etconstitue donc un accident du travail.

TASS Epinal, 28-02-2000, Mme Rousseau c/ CPAMdes Vosges.

1014 5.6. Le sort du salarié placé en arrêt de travail en raison d'unharcèlement moral

[E6873EQM]

Lorsque la cause du licenciement est l'absence prolongée du salarié dûe au harcèlement dontil fait l'objet, le licenciement est nul. L'employeur ne peut se prévaloir de la perturbation dufonctionnement de l'entreprise liée à l'absence du salarié.

Cass. soc., 11-10-2006, n° 04-48.314, M. Gérard Petitpas, F-P+B+R

Licenciement d'un salarié absent : le harcèlement moral affiche sa singularité

La protection exorbitante du droit commun contre le licenciement dont bénéficient les salariés victimesde harcèlement moral interdit de les licencier pour quelque motif que ce soit, comme en témoigne ladécision commentée. A la question de savoir si un salarié victime de harcèlement moral et absent pourdépression consécutive au harcèlement dont il a fait l'objet et déclaré inapte, peut être licencié pour letrouble que son absence cause au bon fonctionnement de l'entreprise, la Cour de cassation vientrépondre par la négative (Cass. soc., 11 octobre 2006, n° 04-48.314, M. Petitpas c/ Société Cora,F-P+B+R ). Pour cette dernière, en effet, le fait que l'absence du salarié perturbe le fonctionnement del'entreprise ne suffit pas à justifier la rupture. Dans la mesure où l'employeur a exercé un harcèlementmoral sur le salarié et que son absence est due à ce harcèlement, l'employeur ne peut plus se prévaloirensuite de la perturbation au fonctionnement de l'entreprise pour le licencier. Le licenciement prononcéest nul. Cette solution, à notre connaissance nouvelle, ne peut qu'être approuvée.

I - Interdiction de licencier un salarié absent pour cause de harcèlement moral

Prohibition des discriminations

L'article L. 122-45 du Code du travail () interdit qu'une personne soit écartée d'une procédure derecrutement ou d'accès à un stage, qu'un salarié soit sanctionné, licencié ou fasse l'objet de mesuresdiscriminatoires, directes ou indirectes, notamment en matière de rémunération, de formation, dereclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutationou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientationsexuelle, de son âge, de sa situation de famille, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ousupposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales oumutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son patronyme, ou saufinaptitude constatée par un médecin du travail, en raison de son état de santé ou de son handicap.

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Prohibition de principe du licenciement fondé sur l'état de santé du salarié

En matière de maladie, le principe est donc celui de la prohibition du licenciement fondé sur l'état desanté du salarié. Le licenciement n'est toutefois discriminatoire que s'il est directement fondé sur l'étatde santé du salarié. S'il repose sur un autre motif, il peut échapper à l'interdiction posée par l'article L.122-45 du Code du travail. C'est la raison pour laquelle ce texte, issu d'une loi du 12 juillet 1990 (loi n°90-602, 12 juillet 1990, relative à la protection des personnes contre les discriminations en raison de leurétat de santé ou de leur handicap ), n'est pas venu remettre en cause la jurisprudence antérieure quipermettait à l'employeur de rompre le contrat de travail d'un salarié dont le contrat est suspendu dansla mesure où cette suspension trouve sa cause, non dans la maladie elle-même, mais dans lesconséquences que cette maladie peut avoir sur le fonctionnement de l'entreprise.

La jurisprudence affirme, dans ce cas, que l'article L. 122-45 du Code du travail n'interdit pas lelicenciement motivé, non par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise quise trouve dans la nécessité de pourvoir au remplacement définitif d'un salarié dont l'absence prolongéeou les absences répétées perturbent le fonctionnement (Cass. soc., 16 juillet 1998, n° 97-43.484, SociétéLa Parisienne assurances c/ M. Darcy et autre ). Il faut, mais il suffit, dans ce cas que l'employeurétablisse que l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié perturbent le bon fonctionnementde l'entreprise et qu'il se trouve devant la nécessité de remplacer le salarié absent (Cass. soc., 19 octobre2005, n° 03-46.847, Comité mosellan de sauvegarde de l'enfance et de l'adolescence (CMSEA) c/ MmeCarmen Sepe, FS-P+B , voir Nicolas Mingant, La justification du licenciement du salarié malade,Lexbase Hebdo n° 188 du 2 novembre 2005 - édition sociale ). C'est cette exception que vient limiter laCour de cassation dans la décision commentée en présence d'un harcèlement moral.

Espèce

Elle vient, en effet, affirmer que, lorsque l'absence prolongée est la conséquence du harcèlement moraldont le salarié a été l'objet, l'employeur ne peut se prévaloir de la perturbation que son absence a causéau fonctionnement de l'entreprise pour le licencier. En l'espèce, le licenciement était donc nul.

Cette solution, bien que nouvelle, n'est pas une surprise. Il ne pouvait, d'ailleurs, en être autrement.

II - Prohibition justifiée du licenciement du salarié absent pour harcèlement moral

Une solution conforme à la lettre des textes relatifs au harcèlement moral

L'article L. 122-49, alinéa 2, du Code du travail () interdit le licenciement d'un salarié ayant subi ourefusé de subir un harcèlement moral. Littéralement, le fait qu'un harcèlement moral ait été constaté,interdit à l'employeur, pour quelque motif que ce soit, de rompre le contrat de travail du salarié.

Le licenciement n'est pas seulement irrégulier, il est nul. L'alinéa 3 de l'article L. 122-49 du Code dutravail dispose, en effet, que "toute rupture du contrat de travail qui en résulterait (sous entendu duharcèlement moral) [...] est nulle de plein droit". Le salarié pouvait donc demander à réintégrerl'entreprise dont il avait été évincé.

Il faut donc, mais il suffit, qu'un harcèlement moral ait été constaté pour que le salarié puisse bénéficierde la protection exorbitante du droit commun contre le licenciement et donc obtenir sa réintégration.

Dans l'espèce commentée, le harcèlement ne faisait aucun doute. Le salarié devait donc bénéficier de laprotection mise en place par le législateur.

Faire application de l'exception au principe de l'interdiction de licencier un salarié absent dans ce casaurait, en outre, été contraire à la définition même du harcèlement moral. Cela l'aurait, en effet,partiellement vidée de sa substance.

Une solution conforme à l'objet du harcèlement moral

Le harcèlement moral se définit comme des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet unedégradation des conditions de travail du salarié susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité,d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel (C. trav., art. L.122-49 ).

Le harcèlement moral a, généralement pour objet de faire partir le salarié "visé" de l'entreprise.Appliquer à cette hypothèse l'exception prévue à l'article L. 122-45 du Code du travail () qui permet àl'employeur de se séparer d'un salarié dont l'absence perturbe le fonctionnement de l'entreprise aurait

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ouvert une porte aux employeurs désireux de se séparer de certains membres de leur équipe. Il leuraurait alors suffi de pousser le salarié à la dépression, donc de lui faire quitter temporairementl'entreprise, pour pouvoir le licencier pour le trouble que son absence cause au fonctionnement del'entreprise. La protection contre le harcèlement moral mise en place par le législateur n'aurait alorsplus servi à rien... C'est la raison pour laquelle il est souhaitable que cette jurisprudence soit étendue auharcèlement sexuel.

Une extension à toute forme de harcèlement ?

Vu la proximité des deux types de harcèlement moral et sexuel, il y a tout lieu de penser, même si le visade l'arrêt ne fait référence qu'à l'article L. 122-49 du Code du travail () relatif au harcèlement moral,que la solution a vocation à s'appliquer également en matière de harcèlement sexuel. L'article L. 122-46du Code du travail () dispose, en effet, de la même manière que l'article L. 122-49 du Code du travail,qu' "aucun salarié ne peut [...] être licencié [...] pour avoir subi ou refusé de subir les agissements deharcèlement de toute personne dont le but est d'obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit ou auprofit d'un tiers". A protection identique, solution identique...

Article paru dans Lexbase Hebdo n° 233 du 26 octobre 2006 - édition sociale

Le point de vue de Marie Hautefort

Ainsi que le souligne Marie Hautefort, la notion de harcèlement moral a été intégrée dans le Code dutravail il y a 4 ans. Au départ, les juges craignaient d'être confrontés à un "déferlement d'actions plusou moins justifiées". Or, force est de constater que l'état d'esprit est aujourd'hui différent et que "lephénomène du harcèlement , traité au travers du concept plus global de la souffrance au travail, a étéinvesti par les médecins du travail et, de manière plus générale, les services de santé au travail". Ilrevient, maintenant, à la Haute Juridiction de se prononcer sur la portée des remèdes qui ont étéimaginés pour se protéger du fléau .

Pour se protéger du harcèlement moral, un arrêt de travail peut être prescrit par le médecin traitant.Mais en pratique, il est rare que l'employeur mette à profit cette période pour prendre les mesures quis'imposent car il est rarement informé du motif de l'arrêt de travail en raison du secret médical. Entoute bonne foi, l'employeur peut donc mettre en oeuvre la procédure de licenciement s'il estime quel'absence du salarié perturbe le fonctionnement du service. Or, dans un arrêt du 11 octobre 2006, laCour de cassation a décidé que le harcèlement moral à l'origine de l'arrêt de travail excluait lapossibilité pour l'employeur de se prévaloir de la perturbation causée par l'absence et que lelicenciement était nul (Cass. soc ., 11 octobre 2006, n° 04-48.314, M. Gérard Petitpas, F-P+B+R ).

D'après Marie Hautefort, Quand une maladie dissimule un harcèlement moral..., La rédaction web desEchos - 7 novembre 2006

L'introduction par le salarié d'une instance en résiliation de son contrat de travail pourharcèlement moral ne dispense pas l'employeur qui le licencie pour inaptitude, alors quel'instance est pendante, de respecter l'obligation légale de reclassement.

Cass. soc., 30-05-2007, n° 06-41.652, société Distrileader Bouches-du-Rhône, F-D

Le fait qu'un salarié ait introduit une action en résiliation de son contrat de travail pour harcèlementmoral dispense-t-il l'employeur de respecter l'obligation de reclassement inhérente, notamment, aulicenciement du salarié déclaré inapte ? Singulièrement, l'employeur peut-il prononcer le licenciementde ce salarié sans, au préalable, avoir cherché à le reclasser ? Non, répond la Cour de cassation, dans unarrêt en date du 30 mai 2007. Elle considère, en effet, que le fait pour le salarié d'agir en résiliation deson contrat de travail pour harcèlement moral ne dispense pas l'employeur, qui licencie ultérieurementce salarié pour inaptitude, de son obligation de reclassement. Cette solution qui est, d'un point de vuethéorique, parfaitement logique, suscite l'étonnement d'un point de vue pratique. A quoi bon rechercherà reclasser un salarié qui a expressément manifesté sa volonté de quitter l'entreprise ?

1. Caractère d'ordre public de l'obligation de reclassement du salarié inapteSource de l'obligation dereclassement

Lorsque, à l'issue de la seconde visite médicale de reprise, le salarié est déclaré définitivement inapte àreprendre l'emploi pour lequel il a été embauché, il bénéficie d'un droit au reclassement. Le législateur,reprenant la jurisprudence, vient mettre à la charge de l'employeur une obligation de reclassement (C.trav., art. L. 122-24-4 , issu de la loi n° 2005-102, du 11 février 2005, pour l'égalité des chances, laparticipation et la citoyenneté des personnes handicapées ).

L'article L. 122-24-4 du Code du travail dispose, à cet effet, qu'"à l'issue des périodes de suspension ducontrat de travail consécutive à une maladie ou à un accident, si le salarié est déclaré par le médecin du

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travail inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur est tenu de lui proposerun autre emploi approprié à ses capacités, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail etdes indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dansl'entreprise et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise enoeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du tempsde travail". La formulation retenue par le législateur est tellement générale que cette obligation avocation à s'appliquer à toutes les hypothèses d'inaptitudes.Portée

Cette obligation s'impose à l'employeur alors même que le médecin du travail a conclu à l'inaptitude dusalarié à tout emploi dans l'entreprise (C. trav., art. L. 122-24-4, dernier alinéa ; Cass. soc., 27 octobre1993, n° 90-42.560, Société Lemonnier c/ M. Da Silva, publié ; Cass. soc., 20 septembre 2006, n°05-40.526, M. François Lombard, FS-P+B ), et quelle que soit la forme de l'inaptitude, totale, partielle,temporaire ou permanente.

Le non-respect par l'employeur de son obligation entraîne automatiquement la requalification de larupture en un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 11 juillet 2000, n° 98-45.471, M.Claverie c/ M. Roche, ès qualités de représentant des créanciers du redressement, publié ; Bull. civ. V,n° 271 ; Dr. soc. 2000, 923, obs. J. Savatier).

Il n'y a donc rien d'étonnant à voir, dans la décision commentée, les juges sanctionner l'employeur pourne pas avoir recherché à reclasser son salarié déclaré inapte, sans égard à l'action en résolution qu'ilavait intentée. Espèce

Dans cette espèce, en effet, un salarié a saisi le juge d'une demande de résolution de son contrat detravail pour harcèlement moral et résistance au paiement d'un complément de salaire. Licencié en coursd'instance pour inaptitude à son poste de travail régulièrement constatée par le médecin du travail, lesalarié a, à titre subsidiaire, demandé la condamnation de son employeur pour licenciement sans causeréelle et sérieuse. La cour d'appel a fait droit à la demande du salarié et a condamné l'employeur à luiverser diverses sommes à titre de dommages et intérêts, d'indemnités de préavis et de congés payés.Cette solution est confirmée par la Haute juridiction, laquelle considère que le fait pour un salariéd'agir en résiliation de son contrat de travail pour harcèlement moral ne dispense pas l'employeur, quile licencie ultérieurement pour inaptitude, de respecter son obligation de reclassement.

Cette solution théoriquement irréprochable reste, en pratique, contestable.

2. Plénitude de l'obligation de reclassement du salarié déclaré inapte par le médecin du travailConséquence de l'existence d'un droit créance au profit de tout salarié

Nous l'avons vu précédemment, tout salarié inapte dispose d'un droit au reclassement. Il s'agit d'undroit créance attaché à la seule qualité de salarié déclaré inapte par le médecin du travail, et doncindépendant de la nature du contrat qu'il a conclu (pour l'application de ce droit à un salarié sous CDD: Cass. soc., 8 juin 2005, n° 03-44.913, Société protectrice des animaux de Charnay Les Mâcon c/ MmeFrédérique Legrand, FS-P+B ).

Tout salarié licencié pour inaptitude est en droit d'en exiger le respect et, le cas échéant, de fairesanctionner son inobservation par l'employeur (Cass. soc., 11 juillet 2000, préc.). On comprend doncpourquoi le salarié a pu en bénéficier dans la décision commentée. Il s'agissait, en effet, d'un salariélicencié pour inaptitude. Aucune raison ne permettait, au regard de la lettre de l'article L. 122-24-4 duCode du travail, de l'exclure du bénéfice de ce système protecteur. Cette décision trouve, en outre, sonbien-fondé dans le caractère d'ordre public absolu attaché à l'article L. 122-24-4 du Code du travail.

La jurisprudence considère, à juste titre, que toute renonciation expresse du salarié, sous la forme, parexemple, de la conclusion d'un accord de rupture amiable, est nulle (Cass. soc., 29 juin 1999, n°96-44.160, M. Lavenir c/ Société Publitex, publié ; Dr. soc. 1999, 963, obs. Verdinkt). Une tellerenonciation qui, corrélativement, aboutirait à dispenser l'employeur de respecter ses obligationslégales, est illégale. Il est ainsi impossible pour un salarié de renoncer au bénéfice des dispositions del'article L. 122-24-4 du Code du travail, et, singulièrement, à son droit au reclassement, même si cetterenonciation n'est que la conséquence de ses actes.

Admettre le licenciement sans reclassement préalable, dans l'espèce commentée, serait revenu àconsidérer que l'introduction par le salarié d'une action en résolution de son contrat de travail valaitrenonciation au bénéfice des dispositions protectrices du salarié inapte. Une telle position aurait étécontraire au caractère d'ordre public absolu de l'article L. 122-24-4 du Code du travail. Touterenonciation expresse étant interdite, toute renonciation tacite l'est a fortiori. La décision n'encourtdonc aucune critique d'un point de vue théorique et elle doit, au contraire, être totalement approuvée.

D'un point de vue pratique, en revanche, la solution retenue par la Haute juridiction est moinsconvaincante.Une pratique contestable

Quel est l'intérêt d'obliger l'employeur à reclasser un salarié qui avait choisi de manière non équivoquede quitter l'entreprise ? L'obligation de reclassement est, en effet, en principe, faite pour éviter qu'unsalarié, dans une situation difficile, éprouve des difficultés pour retrouver un emploi dans une autreentreprise. C'est afin de maintenir le salarié dans l'entreprise, et de lui éviter de se trouver au chômage,que le législateur vient mettre à la charge de l'employeur une obligation de reclassement. Tout est, enprincipe, fait pour éviter la rupture du contrat de travail. Est-il, dès lors, normal d'imposer àl'employeur de rechercher à maintenir le contrat de travail d'un salarié qui demande à partir ?

Cette obligation n'a, à notre sens, dans cette hypothèse aucun sens. Le salarié a pris l'initiative de larupture de son contrat de travail en saisissant le juge, il devrait être tenu compte de sa volonté etl'employeur devrait pouvoir le licencier sans être inquiété, le reclassement devenant dans cettehypothèse sans objet...

LEXBASE HEBDO n° 264 du 14 juin 2007 - édition SOCIALE

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Le licenciement prononcé pour une inaptitude physique résultant d'agissements fautifs del'employeur, commis antérieurement à la loi du 17 janvier 2002 instituant l'article L. 122-49du CT relatif au harcèlement moral, est sans cause réelle et sérieuse.

Cass. soc., 13-12-2007, n° 06-45.818, société Groupe Pierre le Goff Normandie, FS-P+B