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REPORTAGES EN ÉQUATEUR Coup de pouce aux petits producteurs DES SOMMETS À LA FORÊT Une nature qui vaut de l'or L'OMBRE DU SIDA plane encore L'Amérique du Sud prend son envol Quel rôle pour la coopération? GAGNEZ UN RECUEIL DE PHOTO CONCOURS N° 1 / 2013 • BIMESTRIEL JANVIER-FÉVRIER 2013 • P308613 • BUREAU DE DÉPÔT BRUXELLES X dimension LE JOURNAL DE LA COOPÉRATION BELGE

LE JOURNAL DE LA COOPÉRATION BELGE dimension...Le “Train des Nuages ”, ou “Tren de las Nubes”, relie l'Argentine, le Chili, la Bolivie et le Pérou. Il monte jusqu’à 4.220

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REPORTAGES EN ÉQUATEURCoup de pouce aux petits producteurs

DES SOMMETS À LA FORÊTUne nature qui vaut de l'or

L'OMBRE DU SIDAplane encore

L'Amérique du Sudprend son envolQuel rôle pour la coopération?

GAGNEZ UN RECUEIL DE PHOTO

CONCOURS

N° 1 / 2013 • BIMESTRIEL JANVIER-FÉVRIER 2013 • P308613 • BUREAU DE DÉPÔT BRUXELLES X

dimensionLE JOURNAL DE LA COOPÉRATION BELGE

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sommaireJANVIER-FÉVRIER 2013

8/9 >Petits producteurs, grand chocolat

24/25 >Droits de l'homme et démocratie pour lutter

contre le sida

20/22 >De la forêt aux sommets :Une nature qui vaut de l’or

10-11 Diversités andines

12 De la glace pour les poissons !

13 Les peuples indigènes, entre tradition et modernité

14-15 De l’eau pour tous

16-17 Trente ans d’échanges

18 Regards croisés

19 Mindalae : artisanat avec identité

23 Sur les rivières de l'Amazonie

26-27 Gand, centre mondial de nématologie

28 Un parcours sinueux vers les 0,7%

29 Agriculteurs du Sud et du Nord,même combat

30-31 Petite Dimension

32 Le sida au Rwanda

ou par mail à :[email protected]

Abonnementgratuit sur :www.dimension-3.be

> DOSSIER AMÉRIQUE LATINE

Un Sud en quête de puissance

2 JANVIER-FÉVRIER 2013 I dimension 3

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Le “Train des Nuages”, ou “Tren de las Nubes”, relie l'Argentine, le Chili, la Bolivie et le Pérou. Il monte jusqu’à 4.220 mètres dans les Andes. Ici vue sur les Andes.

© Mohamed Haddad - IRD

Le “miracle” latino-américain

I l y a vingt ans encore, on parlait d’un continent sacrifi é, “non développé”, et qui semblait profondément blessé suite à une colonisation vieille de 500 ans. Aujourd’hui, le Brésil est l’une des nations émergentes parmi

les plus puissantes et prometteuses. Son dynamisme ‘booste’ toute la région. L’ensemble du sous-continent a profi té d’un miracle économique. Les Objectifs du Millénaire sont en grande partie atteints. Une vraie classe moyenne s’est développée, les mouvements sociaux (groupes indigènes, coopératives de petits producteurs, etc.) se sont organisés. Que s’est-il passé ? Quelle place pour la coopération dans un tel contexte ? Telle était la question à l’origine de ce dossier.

La coopération belge, jadis très active sur le continent, y est à présent moins visible, à mesure que les nations souveraines et leurs populations acquièrent les capacités à conduire un développement de qualité. Et c’est ainsi que cela doit être : une fois les besoins humains rencontrés, l’aide doit prendre d’autres formes ou disparaître. Il reste toutefois trois pays partenaires et, là aussi, la coopération s’est transformée, de la satisfaction des besoins humains de base à quelques derniers coups de pouce : à telle économie fl orissante, afi n qu’elle profi te à tous (selon la nouvelle formule de “croissance inclusive”), à telles institutions encore un peu inexpertes, à telle population désavantagée en sorte qu’elle trouve une place digne dans une société encore fortement inégalitaire.

C’est ce que nous sommes partis voir sur place, en Équateur, pays qui demeure l’un des trois partenaires de la coopération en Amérique du Sud ; ni le plus pauvre (la Bolivie), ni le plus “riche” (le Pérou) des trois ; et qui recelle sur des distances raisonnables une grande diversité géographique et démographique. Depuis la côte, où les afro-équatoriens tentent de gagner une place digne grâce à leur petite production, à la selva (forêt) amazonienne, en passant par la sierra (montagne) où les peuples indigènes, oubliés du miracle économique équatorien, aspirent eux aussi à pouvoir vivre bien (“Buen vivir”) tout en conservant leurs terres et leurs traditions.

En Équateur enfi n, on trouve deux richesses emblématiques, mais antinomiques, du continent : l’or noir qui, à court terme, permet de remplir les caisses de l’État, et une nature exceptionnelle, dont la valeur est inestimable pour l’humanité toute entière. L’une menace l’autre. À l’heure où la Conférence de Doha s’achève sur de piètres accords climatiques, dans la triste lignée de l’échec de Copenhague, il s’impose de rappeler que les conditions climatiques extrêmes sont six fois plus importantes ces 30 dernières années dans les pays en développement. L’Amérique latine est particulièrement sensible aux changements climatiques et aux catastrophes naturelles. Elle détient par ailleurs le plus grand potentiel de “réserve de carbone”.

Enfi n, il n’aura échappé à personne que la fi n de l’année 2012 a été marquée par des mesures d’austérité dans les portefeuilles politiques belges. La coopération au développement et l’aide humanitaire n’échapperont pas à ce mouvement. Gageons qu’en repensant la coopération de façon plus “cohérente” avec les autres politiques, “pour que ne soit pas repris d’une main ce qui est donné de l’autre”, on parvienne à agir effi cacement avec moins… Mais cela, l’année qui vient nous le dira. Ce sera également le thème du prochain numéro.

LA RÉDACTION

dimension 3 I JANVIER-FÉVRIER 2013 3

Périodique bimestriel de

la Direction Générale de la

Coopération au Développement

et de l'Aide humanitaire (DGD)

Rédaction :

DGD

Rue des Petits Carmes 15

B-1000 Bruxelles

Tél. +32 (0)2 501 48 81

E-mail : [email protected]

www.diplomatie.be • www.dg-d.be

Secrétariat de rédaction :

Elise Pirsoul, Jean-Michel Corhay,

Chris Simoens

Création et production :

www.mwp.be

Les articles publiés ne représentent

pas nécessairement le point de vue

offi ciel de la DGD ou du gouvernement

belge. La reproduction des articles est

autorisée pour autant que la source

soit mentionnée et qu'une copie de la

publication soit envoyée à la rédaction.

Dimension 3 paraît 5 fois par an tous les

2 mois sauf en été.

Imprimé sur papier 100 % recyclé.

Abonnement :

Gratuit en Belgique. À l’étranger

seulement la version électronique.

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ÉMERGENCE DE L’AUTRE AMÉRIQUE

UN SUD EN QUÊTEEn l’espace d’une génération, l’Amérique latine a tourné la page d’un passé troublé pour

revendiquer une place à part entière parmi les pays émergents, voire les grandes puissances.

Loin de constituer un ensemble uniforme, l’Amérique latine offre un éventail d’expériences

nationales contrastées utiles à une réfl exion sur les enjeux actuels au niveau global.

Signes des temps : le XXIIe Som-met Ibéro-américain, qui se tenait à Cadix en novembre derniers, avait pour mot d’ordre celui d’une

“relation rénovée” entre pays latino-amé-ricains et leurs anciennes puissances coloniales. En marge de ce sommet, le Roi Juan Carlos devait illustrer ce mot d’ordre en demandant à la Présidente du Brésil, Dilma Rousseff, d’inciter les entreprises brésiliennes à davantage investir dans une Espagne en crise. Deux mois plus tôt, elle était la première femme de l’histoire à prononcer le discours d’ouverture de l’Assemblée générale des Nations Unies et y aborda les sujets brûlants du moment, de la crise économique mondiale au confl it syrien.Ces deux événements, parmi tant d’autres, contrastent avec les nombreux malenten-dus dont l’Amérique latine a pu être l’ob-jet de par le passé. Aujourd’hui, l’image qu’offre ce continent, de Tijuana à Ushuaïa, est plutôt celle d’une région du monde dynamique, soutenue par une conjoncture économique relativement favorable, des sociétés en mouvement, et qui désormais nourrit l’ambition de jouer un rôle diplo-matique de premier plan, même si cer-tains défi s restent de taille.

Quand le Nord et le Sud se déplacent

La dernière décennie a connu un bascu-lement de la richesse au niveau mondial entre un Nord, plongé dans une crise sans précédent, et un Sud en pleine expansion. Sont ainsi apparus des pays émergents disposant, pour reprendre la définition du Fonds monétaire international (FMI), d’une population importante, jeune et en croissance, d’institutions stables, d’un marché intérieur sans cesse grandissant,

et d’une croissance économique rapide. Plusieurs pays d’Amérique latine fi gurent d’ailleurs au cœur de ces acronymes qui caractérisent ce phénomène : le Brésil fait partie des BRICS (avec la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud), la Colombie des CIVETS1 (catégorie recouvrant une série d’économies dynamiques jouissant d’une stabilité politique et d’une popula-tion jeune), le Mexique du E72 (ensemble d’économies qui devraient dépasser le G7 en PIB avant 2020). Le FMI recense quant à lui, dans son classement 2012 des éco-nomies émergentes, outre les pays déjà cités : l’Argentine, le Chili, le Pérou, et le Venezuela. L’Amérique latine joue donc pleinement sa partition dans l’émergence d’un Sud dont les limites sont dès lors de plus en plus fl oues.Cette redéfi nition des cartes économiques n’est pas allée sans une redéfi nition des alliances politiques et une renégociation

du poids de ces pays dans les enceintes de décision au niveau global, que ce soit en termes de sièges au Conseil de sécurité ou de droits de vote au sein des institutions fi nancières internationales plus conformes aux rapports de force actuels.

(R)évolutions récentesPlusieurs évolutions majeures au cours des vingt dernières années expliquent ce rôle accru sur la scène internationale. La démocratie et la paix se sont profondé-ment enracinées dans une région où des dictatures militaires sévissaient encore au début des années 1990, surtout dans son cône sud (Chili, Argentine, Uruguay, Paraguay, Brésil). La région a aussi vécu un profond renouvellement des élites politiques dans de nombreux pays. Un ouvrier a pris le pouvoir au Brésil. Un syndicaliste indien est devenu président en Bolivie. Un mulâtre préside aux desti-nées du Venezuela. Plusieurs femmes ont occupé ou occupent encore la plus haute charge de l’État en Argentine, au Brésil, au Costa Rica.Les régimes politiques qui se sont mis en place depuis le tournant des années 2000 ont connu également une forte évo-lution, que certains qualifi ent de “virage à gauche”, même s’il serait erroné de n’y voir qu’un élan unique au cœur d’une région si complexe. Cette évolution peut se résumer en deux tendances principales : l’apparition d’une gauche radicale repré-sentée par les pays-membres de l’ALBA3

(principalement l’Équateur, la Bolivie, le Venezuela, Cuba, le Honduras, et le Nica-ragua), pour laquelle l’État pilote l’écono-mie, et une gauche modérée (Uruguay, Paraguay, Argentine, Salvador), inspirée du modèle brésilien, réformatrice et plu-tôt en faveur d’un État régulateur, qui tend

La Présidente du Brésil, Dilma Rousseff, fut la

première femme de l’histoire à tenir un discours

d’ouverture de l’Assemblée générale des

Nations Unies en septembre 2012.

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Une nouvelle mer intérieure,

le Pacifi que, devient la Mare nostrum

du capitalisme nouveau, après la

Méditerranée dans l’Antiquité et

l’Atlantique à l’âge moderne.

Daniel Cohen (économiste)

DE PUISSANCE

L’architecture

moderne de

Brasilia, capitale

du Brésil est

un symbole de

la “nouvelle”

Amérique latine.

à s’imposer sur le continent, confortée en 2011 par les élections d’Ollanta Humala à la tête du Pérou et de Dilma Rousseff au Brésil, et par la facile ré-élection de Cris-tina Kirchner en Argentine.La conjoncture économique mondiale, orientée vers une demande accrue en matières premières et en produits agri-coles, dont les cours se sont renchéris ces dernières années, a indéniable-ment permis de fi nancer des poli-tiques publiques volontaristes, après ce qui a été souvent qualifi é de década perdida (décennie perdue) pour le conti-nent. L’Amérique latine était alors considé-rée comme le laboratoire des préceptes néo-libéraux du Consensus de Washing-ton, qui participèrent à dissoudre le tissu social et les solidarités traditionnelles dans la région.L’Amérique latine ressort aussi passable-ment épargnée par la crise mondiale. Elle n’est plus la périphérie d’un centre unique, mais s’est ouverte ces dernières années à d’autres partenaires commerciaux, parmi lesquels la Chine. Entre 2001 et 2009, les importations chinoises en provenance de l’Amérique latine ont été multipliées par dix, pour atteindre 64,4 milliards de dollars (sources CEPAL).Une large majorité des pays latino-améri-cains fi gure aujourd’hui dans la liste des Pays à revenu intermédiaire tranche supé-rieure (pays où chaque habitant perçoit en moyenne au moins 4000 dollars/an), dres-sée par le Comité d’Aide au Développe-ment de l’OCDE.

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AMÉRIQUE LATINE

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Ces évolutions ont permis de transformer ces sociétés, de réduire les taux de pau-vreté sur le continent et d’y faire naître une classe moyenne, comme le démontre un récent rapport de la Banque mondiale4. Il n’en demeure pas moins que la pau-vreté continue à dépasser les 30 % de la population pour l’ensemble de la région (CEPAL) alors que 9 % de la population souffre encore de la faim (FAO).

Des défi s à releverLes défis restent donc de taille pour le continent. Malgré le bénéfice qu’ils peuvent tirer de l’exploitation de leurs richesses, les États disposent encore de moyens trop faibles, notamment en ce

qui concerne leurs ressources fi scales, au regard par exemple des pays de l’OCDE. Ces pays manquent aussi encore sou-vent des ressources humaines qualifi ées nécessaires à l’émergence d’institutions fortes. Pour reprendre les mots d’Edgar Montiel (UNESCO), ces pays sont souvent “sous-administrés, sous-gouvernés”.Ensuite, le narco-terrorisme demeure l’une des principales menaces à la stabilité du continent, tant au plan politique qu’éco-nomique, phénomène qui n’épargne pour ainsi dire aucun pays. De plus, le narco-terrorisme dispose d’un pouvoir de cor-ruption irrésistible pour les institutions étatiques qui y sont soumises, et génère violence et insécurité.

Enfi n, ce continent demeure le fait d’un paradoxe : si nombre des pays qui le com-posent jouissent aujourd’hui d’un fort taux de croissance, qui leur a permis de faire sortir des millions d’individus de la pau-vreté, ils demeurent parmi les plus inéga-litaires au monde.Le continent appelle donc de profondes réformes structurelles, en termes d’édu-cation, de transfert de technologies ou de renforcement institutionnel, pour pour-suivre sur sa lancée.

Un laboratoire d’idéesIl n’en demeure pas moins que l’Amé-rique latine est le lieu d’expériences inédites et utiles à une réfl exion sur les

AMÉRIQUE LATINESous la dénomination ‘Amérique latine’ se classent généralement 20 pays environ comptant au total une population avoisinant les 600 millions d’habitants. Le Brésil et le Mexique se taillent la part du lion, représentant à eux seuls la moitié de la population du continent. À ces pays peuvent aussi s’ajouter une série de poids moyens, avec l’Argentine, la Colombie, et le Pérou. L’autre moitié des pays du continent ne compte pas 10 millions d’habitants chacun. D’un point de vue géographique, ce continent énorme (15,9 % des terres émergées) peut se découper de la manière suivante : le cône sud (représenté entre autres par l’Argentine, le Brésil et le Chili) et les pays andins (Bolivie, Colombie, Équateur, Pérou, Venezuela), ces deux parties formant l’Amérique du Sud, et l’Amérique centrale (avec notamment le Mexique et le Nicaragua). À ces pays peuvent s’ajouter parfois les Caraïbes (Cuba et Haïti, par exemple).

Buenaventura

PopayanTumaco

Esmeraldas

CuencaMachala

Portoviejo

Pasto

Manizales

Ibagué

Bucaramanga

Cucuta

Cartagena

Santa Marta

Cabimas

Barquisimeto

MonteriaSan

Cristobal

Neiva

Mitu

Barranquilla MaracaiboValencia

Cordoba

Rosario

La Plata

MendozaValparaiso

San Juan

Ciudad

del Este

PosadasCorientes

Santa Fe

Salta

San Miguel

de TucumanSantiago

del Estero

La Rioja

San Salvador

Parana

Concepcion

MONTEVIDEOBUENOS AIRES

SANTIAGO

ASUNCION

LA PAZ

LIMA

Barcelona

Maturin

Ciudad

Bolivar

Puerto

Ayacucho

San Fernando

de Atabapo

Riberalta

Trinidad

RiveraSalto

Paysandu

Colonia

Mar del Plata

Bahia BlancaNeuquén

San Carlos

de BarilochePuerto Montt

Osorno

Temuco

Concepcion

Chillan

Talca

Rancagua

Antafagasta

Arica

Cochabamba

Arequipa

Puerto

MaldonadoHuancayo

Pucallpa

Iquitos

Callao

Chimbote

Trujillo

Chiclayo

Piura

Ica

Santa Cruz

de la Sierra

Potosi

Iquique

Coquimbo

Viedma

Rawson

Deseado

Puerto Aisen

Rio Gallegos

Ushuaia

Stanley

Punta Arenas

Puerto Santa Cruz

Rocha

Ciudad

Guayana

Cumana

Cali

Medellin

SANTA FE DE BOGOTA

QUITO

Guayaquil

CARACASPORT OF SPAIN

GEORGETOWN

CAYENNE

PARAMARIBO

PanamaSan José

Manaus

Goiânia

Campinas

Florianopolis

Belém

Fortaleza

Recife

Salvador

BRASILIA

Belo Horizonte

Sao Paulo

Curitiba

Porto

Alegre

Rio de Janeiro

Nova Iguaçu

Macapa

Obidos

Itaituba

Boa Vista

Fonte Boa

Porto Velho

Guajara-Mirim

Mato Grosso

Campo Grande

Joinville

Caxias

do SulSanta Maria

Rio Grande

Pelotas

Uberlândia

Cuiaba

Corumba

Rio Branco

Porto de Moz

Maraba

Imperatriz

Teresina

Parnaiba

Sobral

Quixada

Natal

Joao Pessoa

Campina Grande

Caruaru

Maceio

Aracaju

Juazeiro

Feira de

Santana

Ilheus

Vitoria

Caravelas

Vitoria da

Conquista

Sao Luis

Santarem

Palmas

Isla de

Malpelo (Col.)

Isla San Felix

(Ch.)

(Ch.)

Isla San Ambrosio

Isla Robinson Crusoe

Isla Alejandro Selkirk

Islas Malvinas/

Falkland Islands(administered by UK, claimed by Argentina)

South Georgia and the

South Sandwich Islands(administered by UK, claimed by Argentina)

Trinidad & Tobago

Grenada

BarbadosSaint Lucia

Nederlandse

Antillen

Martinique (Fr)

San Andreas (Col.)

SOUTH

ATLANTIC

OCEAN

NORTH

ATLANTIC

OCEAN

CARIBBEAN SEA

CHILE

HONDURAS

NICARAGUA

Panamaamamaaa

COSTA RICA

PANAMA

GUYANA

SURINAME

FRENCH GUIANAVENEZUELA

PARAGUAY

ARGENTINA

URUGUAY

A m a z o n R a i n f o r e s t

BOLIVIA

BRAZILPERU

COLOMBIA

ECUADOR

Vue sur Quito, capitale de l’Équateur

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6 JANVIER-FÉVRIER 2013 I dimension 3

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enjeux globaux. Ainsi, le continent abrite la forêt amazonienne, souvent considérée comme le poumon de la planète. Y règne une biodiversité sans égale, pour la pro-tection de laquelle des initiatives nova-trices ont été proposées à la communauté internationale.En matière de croissance inclusive, l’Amérique latine est également por-teuse d’idées utiles à la réfl exion. Les programmes brésiliens Fome Zero(Faim Zéro) ou Bolsa Familia ont parti-cipé à réduire la malnutrition et la pau-vreté au Brésil. De même, le concept du Bien Vivre (‘Sumak Kawsay’ en Que-chua), emprunté à la vision indigène du monde (voir p. 13).

Petit pays pris en tenaille entre les deux géants que sont l’Argentine et le Brésil, l’Uruguay est le laboratoire d’un modèle économique en mutation et de pro-grammes sociaux qui ont véritablement transformé la société, porté par le Fronte Amplio (le Front élargi).Ainsi, les expériences nationales, que ce soit au Mexique, en Argentine, en Bolivie, au Brésil, au Chili, en Équateur, ou au Pérou, sont de plus en plus diversifi ées et l’Amé-rique latine apparaît comme un ensemble complexe de pays traversé par de nom-breuses lignes de fractures. Cependant, on y observe bien des tentatives de rapproche-ment (la dernière en date étant la création en 2011 de la CELAC, la Communauté des

États latino-américains et des Caraïbes). Ainsi, un enjeu d’avenir demeure l’intégra-tion régionale sur un continent qui n’a pas connu, comme ce fut le cas en Europe, de traumatisme profond la motivant.

ERIC DE MUYNCK

1 Colombie, Indonésie, Vietnam, Egypte, Turquie,

Afrique du Sud.2 Les BRIC, associés à l’Indonésie, la Turquie et le

Mexique.

3 L’Alliance Bolivarienne pour les Peuples de notre

Amérique (ALBA).

4 Ferreira, Francisco H. G., Julian Messina,

Jamele Rigolini, Luis-Felipe López-Calva, Maria Ana

Lugo, y Renos Vakis. 2013. Panorámica General :

La movilidad económica y el crecimiento de la clase

media en América Latina. Washington, Banco Mundial.

Comment, selon vous, l’Amérique latine

a-t-elle évolué dans la période récente ?

Je pense que l’Amérique latine a radicalement changé, et cela au cours des 25 dernières années. Si elle traverse encore des diffi cultés, elle a consolidé sa démocratie grâce à une institutionnalisation qui n’a cessé de se renforcer, avec une économie qui s’est relevée au cours des dix dernières années. Cela lui a permis de faire face aux dernières crises fi nan-cières d’une manière plus appropriée que l’Europe ou les États-Unis, par exemple.Aujourd’hui, l’Amérique latine, notamment au tra-vers du Brésil, son leader naturel, peut participer aux grands débats relatifs aux problèmes globaux. Je pense à des apports au thème du changement

climatique, de la redéfi nition de l’architecture fi nancière mondiale et des mécanismes fi nanciers.Je pense que l’Amérique latine a désormais beaucoup de choses à dire en tant que région, et beaucoup à faire. À ce titre, je crois fermement en la capacité de l’Amérique latine à participer de manière active à la coopération sud-sud.

Vous avez déclaré récemment que la

coopération internationale, n’est plus

indispensable au développement des

pays du continent. Comment peut-elle,

selon vous, encore démontrer son utilité

dans le contexte de l’Amérique latine, de

pays à revenu intermédiaire ?

Je ratifi e mes propos ! Je pense qu’aucun pays en Amérique latine, et aucun pays en développement ne peut dépendre de la coopération internationale pour se développer. La coopération internationale est utile, pas tant par son apport fi nancier que par les expériences qu’elle peut apporter. Je pense que l’un des thèmes fondamentaux sur lesquels la coopération internationale peut apporter une aide aujourd’hui à l’Amérique latine est l’institution-nalisation. La Belgique, qui dispose d’institutions anciennes, pourrait ainsi utiliser son expérience pour renforcer l’effi cacité de la police, du Parle-ment ou de la justice.La coopération internationale n’est donc pas un facteur indispensable, vu les niveaux de dévelop-pement atteints en l’Amérique latine. Néanmoins, en Équateur par exemple, nous vivons aujourd’hui un paradoxe : le pays détient des ressources fi nancières, mais les institutions publiques ont

des problèmes pour les dépenser, par manque de capacité de gestion, de ressources humaines, de formation. Raison pour laquelle le gouvernement actuel investit dans la formation, l’éducation, avec une vraie vision de son développement futur.

Comment envisagez-vous le futur de

l’Amérique latine en tant que région ?

Je suis optimiste. J’ai bien entendu mes doutes, mes inquiétudes concernant le renforcement de la démocratie, avec tout ce que cela implique d’alternance, de réponse à l’excès de présidenti-alisme qui s’observe dans plusieurs pays d’Amé-rique latine, d’une capacité pour les citoyens d’ex-primer leur opinion, vu les contraintes exercées sur l’expression de cette opinion. Mais en termes généraux, il faut reconnaître que depuis dix ans, pour ne pas dire depuis vingt-cinq ans, l’Amé-rique latine est un continent qui a énormément progressé. Par exemple, en Amérique latine, il n’y a pas eu de guerre classique depuis trente ans. Les contentieux qui existent entre pays latino-américains, comme entre le Chili et le Pérou, sont désormais soumis à des mécanismes pacifi ques, comme la Cour internationale de justice (la plus

haute instance judiciaire de l’ONU – Ndr) ou entre puissances garantes (Argentine, Brésil, Chili et États-Unis) comme ce fut le cas pour les confl its frontaliers qu’ont connus le Pérou et l’Équateur. Autant d’expressions d’une maturité et de respect vis-à-vis du droit international. Et cela est extrê-mement important.

PROPOS RECUEILLIS PAR ERIC DE MUYNCK

“L’AMÉRIQUE LATINE A DÉSORMAIS QUELQUE CHOSE

À DIRE AU MONDE”

Docteur en Relations internationales,

Francisco Carrión Mena a été Ambassadeur

d’Équateur en Espagne (2000-2005) avant

de devenir ministre des Affaires étrangères

(2005-2007). Il a également été représentant

de l’Équateur auprès des Nations Unies

(2009-2011). Il est aujourd’hui professeur

à la Faculté latino-américaine de Sciences

sociales (FLACSO) à Quito.

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AMÉRIQUE LATINE

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Petits producteurs,grand chocolat

Saviez-vous que le cacao serait né en Équateur, et qu’aujourd’hui encore

c’est là qu’on trouverait la variété la plus fi ne, la fameuse ‘Fino de Aroma’

reconnue par les plus grands chocolatiers ? Comment faire de cette

ressource extraordinaire et déjà existante un digne gagne-pain pour

les petits producteurs ? C’est le défi relevé par la Coopération belge.

Ignacio dans sa “fi nca” où pousse

une grande variété de plantes.

À l’intérieur de la cabosse de cacao,

les fèves en pulpe.

Dépôt des sacs de fèves de cacao récoltées

à la coopérative APROCA.

La “selva verde” d’IgnacioNord de l’Équateur, sur la côte, province d’Esmerladas. Serait-on au jardin d’Éden ? Des manguiers hauts à en toucher le ciel, des arbres surchargés de fruits aussi étranges que délicieux que côtoient des poulets effarouchés par notre présence. Tout pousse ici : fruits, plantes médici-nales, légumes, bananes…, et parmi eux sont plantés des cacaotiers. C’est la “selva verde”, la fi nca, la “propriété” (traduction de fi nca) d’Ignacio. On est bien loin des vastes monocultures de cacao détenues par les gros propriétaires fonciers. Ou des mono-tones rangées d’arbres aspergés régulière-ment d’insecticide. Ici, les plants poussent en système de permaculture, aux côtés de plantes “amies”, sans aucune addition de produit chimique. Ainsi Ignacio peut non seulement se nourrir des fruits et légumes de son jardin, mais aussi avoir des revenus décents pour sa famille grâce à la vente

du cacao. Et sa variété, c’est la fameuse ‘Fino y de Aroma’, celle dont on ne trouve la meilleure sorte qu’en Équateur et que les grands chocolatiers du monde entier recherchent. Mais, si son goût est incompa-rable, elle demande des soins particuliers et sa productivité est trois fois moins élevée que celle des autres variétés, les cabosses et les fèves en sont plus petites, et l’arbre a besoin d’espace et d’ombre ainsi que la compagnie d’autres cultures.

La coopérative traite et vend le cacao

Après chaque récolte, Ignacio va déposer les fèves à la coopérative APROCA. Celle-ci rassemble la production ‘Fino di Aroma’d’environ 150 producteurs dans le canton et garanti un traitement optimal des fèves de cacao. Créée depuis 7 ans avec l’aide de la Coopération belge, et soutenu depuis deux ans par le programme de développement

rural du Nord de l’Équateur (PDRN) mis en œuvre par la CTB, la coopérative permet aux petits producteurs d’avoir une meil-leure rétribution de leur production, une plus grande force sur le marché, et des certifi cations très pointues. Avant, les petits producteurs vivaient diffi cilement de leur terre. Ils étaient dépendants du cours du

Avant, j’avais une petite

culture et je devais

travailler comme ouvrier

dans une usine de

ciment pour gagner ma

vie, maintenant je peux

vivre de ma production

et de mon savoir-faire.

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ONLINEwww.pacarichocolate.com

www.aprocaecuador.com

APROCA laisse fermenter les fèves

quelques jours.

Séchage et triage

des fèves.

Le cacao vendu par la coopérative

a remporté des prix de qualité.

La permaculture est un ensemble de pra-

tiques et de mode de pensée visant à créer

une production biologique et soutenable,

très économe en énergie et respectueuse

des êtres vivants et de leurs relations réci-

proques (comme par exemple, le cacaotier

grandit mieux aux côtés du bananier). Elle

vise à créer un écosystème productif en

nourriture et autres ressources utiles, tout

en laissant à la nature "sauvage" le plus de

place possible.

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PPAPACCARARI, un mustust dudududu chchchocoocolatlat fi n

éququatorien uéquué atorien utiliseiseee lelelee cacacac caocen utilisese lelelele cacacacaocaoc ded bonne qualité

dedes petits pproddodoductucuctucteureure s comme Ignacio.s comme Ignacio.i

cacao fl uctuant et souvent bas. “APROCA nous achète les fèves en pulpe à 0,47 dol-lars les 450 gr la livre Au lieu de 0,39 dollars ailleurs”, explique Ignacio.Les fèves d’Ignacio seront ensuite fermen-tées, séchées et triées, avant d’être vendues à des transformateurs. Les certifi cations ‘bio’ et même ‘biodynamique’ (Demeter - Rainforest Alliance), et la garantie de qua-lité qu’offre APROCA permet de vendre la production à un bon prix. L’appui de la coopération belge a permis de passer de 60 associés à 150. “Et nous voudrions dou-bler notre stock qui est actuellement de 120 tonnes par an”, explique Francisco Peñar-rieta, directeur commercial d’APROCA et lui-même producteur.Dans une ‘approche ‘coopérative’, APROCA connaît les champs de produc-tion de chacun. Avec l’aide de la coopé-ration belge, 84 fermes ont pu obtenir la certification organique ; 100.000 petits cacaotiers ainsi que 6.000 arbres fruitiers ont été plantés. Les associés sont invités à s’entraider et recevoir des formations spécifi ques pour améliorer leur produc-tion. “Avant, je devais payer quelqu’un pour tailler mes plants de cacao ; main-tenant, ce sont les autres qui m’appellent pour que je le fasse. On me paie pour cela aussi”, déclare, fi er, Mártires Bautista Sol, un autre producteur-associé. Il continue :

“Avant, j’avais une petite culture et je devais travailler comme ouvrier dans une usine de ciment pour gagner ma vie, maintenant je peux vivre de ma production et de mon savoir-faire. Mais je ne suis pas dépen-dant du cacao ; si la récolte est moins bonne, j’ai également des fruits et légumes à consommer et à vendre.”

Dans les rayons du supermarché

La qualité du cacao APROCA est garantie et les grands noms du chocolat ne s’y trompent pas ! PACARI, un must du chocolat équato-rien haut de gamme, achète 70 % du stock d’APROCA. “Nous entretenons des rela-tions presque personnelles avec 3.000 petits producteurs. Nous tenons à les connaître, aller sur leur champ, suivre le traitement des fèves pour être certains de la qualité. C’est parfois presque du travail social. C’est pourquoi nous adresser directement à une coopérative de qualité comme APROCA est un avantage. L’idéal serait de traiter seulement avec des associations”, déclare Gabriela Paredes, assistante du créateur de la marque.“PACARI est né d’une véritable passion de son créateur pour le chocolat. Le choix de ne traiter que du bio, d’avoir une ‘res-ponsabilité sociétale’ affi rmée, d’appuyer les petits producteurs tout en produisant un ‘bon’ chocolat, fait partie de la vision et de la mission de PACARI. Nous n’avons pas de label ‘fair trade’ car nous faisons du ‘direct trade’, dans lequel nous choi-sissons de payer mieux les petits produc-teurs pour leur qualité”. C’est ainsi que le cacao d’Ignacio et des centaines de ses collègues se retrouve dans les barres de chocolat de luxe au goût intense sur les

rayons des supermarchés équatoriens et les épiceries fi nes, à travers l’Amérique latine et même en Europe, aux États-Unis et en Australie.Notre chocolatier national, Pierre Marco-lini, a lui aussi succombé au charme du cacao équatorien "Fino de aroma". Il prend soin de sa production et l'importe directe-ment pour ses plus grandes saveurs.Dans un pays à revenu moyen tel que l’Équateur, le programme de dévelop-pement rural dans la fi lière cacao a pour objectif, à l’instar d’Ignacio, de donner la possibilité aux petits producteurs d’être fi ers et de vivre dignement de leur culture, avec seulement un petit appui.

ELISE PIRSOUL

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AMÉRIQUE LATINE

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La coopération belge en Amérique latine

Diversitésandines

LA COOPÉRATION BELGE DANS LES ANDESLa Belgique entretient des liens très anciens avec cette région du

monde. Sans remonter à l’époque des Pays-Bas du Sud où des reli-

gieux, commerçants et artistes de nos contrées établirent de pre-

miers contacts avec le continent, notre pays n’a-t-il pas, au début du

siècle dernier, aidé à l’établissement de l’Université agronomique de

La Molina (Lima), qui demeure encore aujourd’hui l’un des fl eurons de

la recherche agronomique en Amérique latine ?

Quoi qu’il en soit, la coopération y est formellement active depuis

1965, avec des programmes d’assistance technique et de coopéra-

tion universitaire lancés au Pérou. Viendront ensuite la Bolivie (1974)

et l’Équateur (1977). Ces pays demeurent les seuls pays de concen-

tration de la coopération belge en Amérique latine.

Il serait fastidieux de passer en revue les domaines dans lesquels

ces pays et la Belgique ont pu coopérer, tant ils sont nombreux.

Aujourd’hui, la coopération bilatérale travaille dans ces trois pays

dans les domaines de la santé, développement rural, de la gestion

stratégique des ressources naturelles et de l’appui aux PME.

Pour l’amoureux des cartes géographiques, il saute aux yeux que le continent latino-américain

est disposé sur un axe Nord-Sud, et s’étire grosso modo entre les tropiques du Capricorne

et du Cancer. Cette disposition entraîne généralement des différences d’environnement et

de climat moins fortes que dans d’autres parties du monde. Cependant, les changements

d’altitude y favorisent une diversité frappante, et rien n’est plus vrai dans les Andes.

Paysage agricole dans la plaine

de Machachi en Équateur.

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Un relief, des sociétésLorsque l’on parle des Andes, l’image d’Épinal demeure souvent ces sommets enneigés qui parsèment la Cordillère. Ce territoire, qui regroupe sept pays (le Venezuela, la Colombie, l’Équateur, le Pérou, la Bolivie, le Chili et l’Argentine), se compose d’environnements divers : des zones côtières désertiques, des rivages forestiers humides, des plaines d’altitude ainsi qu’une partie de la plaine amazo-nienne. Cette diversité d’environnements ne manque évidemment pas de se réper-cuter sur une population, hétérogène, et ses modes de vie.

Pour ne parler que des pays andins où la coopération belge est présente, face à cette diversité, l’inclusion y est récem-ment apparue comme un thème poli-tique majeur. Ainsi, les constitutions de la Bolivie et de l’Équateur reconnaissent en leur sein ces différences : la Bolivie s’est rebaptisée en 2009 État plurinational et l’Équateur, au même titre que la Bolivie, a emprunté à la vision indigène du monde le concept du Bien Vivre, qui vise la mise en place d’un système économique inclu-sif, “social et solidaire”, en harmonie avec la Terre-Mère (Pachamama), et autour duquel s’articulent les plans nationaux de développement de ces deux pays. Au Pérou, le gouvernement d’Ollanta Humala, à travers le ministère du dévelop-pement et de l’inclusion sociale (MIDIS), a mis en place une série de programmes visant une croissance au bénéfi ce du plus grand nombre. Ces trois pays mènent également une profonde réfl exion sur la citoyenneté (ciudadanía), tranchant ainsi avec ces régimes qui, pendant long-temps, n’ont pas reconnu cette condition de citoyenneté à la majeure partie de leur population, allant même jusqu’à instituer son exclusion de la vie publique.Même s’ils ont la Cordillère des Andes comme charpente commune, il ne faut cependant pas commettre l’erreur de confondre ces pays, fondamentalement différents. Ainsi, la Bolivie, au contraire des autres pays andins, est un pays enclavé, sans accès à la mer, ce qui est souvent considéré comme un obstacle au dévelop-pement, malgré les immenses richesses naturelles dont regorge le pays.

Les Andes en quelques chiffresComme il est souvent plus facile de s’ar-ranger avec les statistiques qu’avec les faits, voici quelques données permettant de distinguer ces pays.

L’ensemble des pays andins a connu dernièrement une forte croissance mais malgré des taux de pauvreté qui ont eu tendance à diminuer ces dernières années, ce problème y demeure aigu. Ainsi, le taux de pauvreté national au Pérou est de 31,3 %, mais de plus de 55 % en zone rurale (2 011), la pauvreté rurale atteignant 45 % en Équateur (2012) et 66,4 % en Bolivie (2009).L’inégalité demeure un phé-nomène répandu dans la région, surtout en Colombie et en Bolivie, où la richesse créée est la moins bien partagée. Les liber-tés demeurent fragiles, comme le montre le classement annuel de Freedom House, le Chili tirant néanmoins son épingle du jeu. Quant à la liberté d’entreprendre, une ligne de fracture claire sépare des pays où l’esprit d’entreprise et les investissements directs étrangers sont favorisés (au Pérou, par exemple) et des pays où il est confronté à de fortes contraintes (les pays membres de l’ALBA1).

Quelle coopération pour ces pays à revenu intermédiaire ?

Aujourd’hui, une large majorité des pays latino-américains fi gure dans la liste des pays à revenu intermédiaire tranche supérieure2 dressée par le Comité d’Aide au Développement de l’OCDE.

Deux des 18 pays de concentration de la coopération belge, l’Équateur et le Pérou, sont d’ailleurs passés en janvier 2012 dans cette catégorie, ce qui alimente le débat sur ce que peut

encore apporter une coopération inter-nationale une fois atteint un tel niveau de développement.Cette évolution ne doit pas faire oublier les défi s importants qui demeurent en matière de réduction de la pauvreté et

des inégalités, d’accès à des services de base de qualité, dans le sec-teur de la santé notam-ment, ou encore de lutte contre la malnutrition. Cependant, les thèmes et les approches doivent s’adapter à ce contexte socio-économique chan-

geant. Ainsi, la coopération belge est en train de défi nir plusieurs axes de coo-pération pour appuyer cette catégorie de pays à travers la défense des biens publics mondiaux, comme la lutte contre le changement climatique, le renforce-ment des capacités institutionnelles et humaines, le transfert de technologies, l’appui au secteur privé local ou encore la coopération triangulaire.

ANNELIES DE BACKER,

ERIC DE MUYNCK ET ALAIN SCHMITZ

1 L’Alliance bolivarienne pour les peuples de notre

Amérique (ALBA), principalement l’Équateur, la Bolivie,

le Venezuela, Cuba, le Honduras et le Nicaragua

2 Catégorie recensant les pays où chaque habitant

perçoit en moyenne au moins 4.000 dollars par an.

Une large majorité des pays latino-américains fi gure dans la liste des pays à revenu intermédiaire, tranche supérieure.

Le taux de pauvreté national au Pérou est de 31,3 %, mais de plus de 55 % en zone rurale (2 011).

Pays Argentine Chili Colombie Venezuela RB Bolivie Équateur Pérou

Pauvreté - 2010

[2002]

8,6 % [34,9%]

11,5% [20,2%]

37,3% [49,7%]

27,8% [48,6%]

42,4% [62,4%]

37,1% [49%]

31,3% [54,7%]

Population (millions

d’habitants - 2011)40,7 17,2 47 28,3 10 14,6 29,4

Espérance de vie

à la naissance

(en années - 2011)

76 79 74 74 (2010) 67 76 74

Croissance du PIB

(% annuel - 2011)8,9 6 5,9 4,2 5,1 4,8 6,9

Inégalités

(coeffi cient de Gini)

44,5 (2010)

52,1 (2009)

55,9 (2010)

…56,3

(2008)49,3

(2010)48,1

(2010)

IDH (classement sur

181 Etats – 2011)45 44 87 73 108 84 80

Liberté de la presse

(classement sur

197 Etats – 2012)

104 (partly free)

67 (partly free)

117 (partly free)

168 (not free)

94 (partly free)

127 (partly free)

91 (partly free)

Doing business

(classement sur

185 Etats – 2011)

116 33 44 179 155 134 43

Sources : Banque mondiale (2012), Freedom House (2012), CEPAL (2011), PNUD (2011)

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AMÉRIQUE LATINE

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De la diffi culté d’être un petit pécheur

Rocafuerte, province d’Esmeraldas, l’une des plus pauvres de l’Équateur. Le soleil est levé depuis peu et les barques de pêcheurs reviennent au petit port. Des hommes en 4X4, venus de la ville, les abordent pour leur acheter les poissons, les mettre dans la glace et les emporter. “Comme nous n’avons pas de moyens de conserver notre poisson, nous devons le vendre rapidement. Nous sommes dépen-dants des intermédiaires qui nous imposent leur prix.” Pour avoir de la glace, il faudrait en acheter de mauvaise qualité à un prix élevé, ou faire la route jusqu’à la ville.Ici, la pêche, c’est l’activité qui occupe la grande majorité des gens. On est pêcheur de père en fi ls. On nettoie le poisson et les crevettes de mère en fi lle. Et du poisson, on en mange jusqu’à trois fois par jour. Mais il n’est pas facile de vivre de sa barque aujourd’hui : l’eau est moins poissonneuse, la culture intensive des crevettes pollue les mers, la compétition avec les chalutiers est déloyale, la mer est truffée de pirates, les intermédiaires imposent leurs prix… “Ce que gagne un pêcheur est ridicule”,remarque Espeuci Valencia, le président de l’association de pêcheurs Calamar.

“Mon père n’a pas les moyens de me faire étudier”, renchérit Isabela Prado, fi lle de pêcheur. Alors, beaucoup quittent leur vil-lage pour chercher meilleure fortune dans les centres urbains.

Une fabrique de glaceUne fabrique privée de glace verra bien-tôt le jour à Rocafuerte avec l’aide du pro-gramme PDRN qui prendra en charge la moitié des coûts, en collaboration étroite avec la province qui investit aussi dans le projet et aussi grâce à l’apport person-nel en capital des pêcheurs de la com-munauté. “Cela fait longtemps que l’on attendait cela. Nous ne devrons plus vendre notre poisson rapidement et individuelle-ment. Avec l’établissement d’une chaîne du froid, nous pourrons stocker nos poissons ensemble et proposer un prix commun. Par la suite, on peut envisager une commercia-lisation à plus grande échelle… peut-être même jusqu’en Belgique !”, explique avec un large sourire le représentant de l’une des onze associations de petits pêcheurs qui ont fait la demande de cette fabrique. Elles en seront bientôt les premiers béné-fi ciaires… et actionnaires !

ELISE PIRSOUL

De la glacepour les poissons !Pour que les petits

producteurs soient plus forts

UN COUP DE POUCEÀ LA POPULATION RURALE DE L’ÉQUATEURLe PNB per capita est en augmentation, si bien que l’Équateur est même considéré depuis 2009 comme un pays à revenu moyen. Toutefois, la pauvreté n'a pas été éradiquée du pays. En effet, il subsiste des écarts considérables entre les revenus de la population rurale et ceux de la population urbaine. Un programme a donc

été mis en œuvre en 2006 afin de venir en aide à la population des campagnes par le biais d’un budget de 14 mil-lions d’euros, à savoir le Programa de Desar-rollo Rural del Norte del Ecuador, ou PDRN en abrégé. Entièrement décentralisée, la Coo-pération belge au déve-loppement travaille via son agence exécutive en collaboration directe

avec les autorités provinciales dans le but d’améliorer la qualité de vie de la population rurale dans cinq provinces du nord de l’Équateur.Le programme PDRN poursuit trois objectifs : le renforce-ment des institutions publiques en charge du développe-ment économique local, la création d’un fonds d’investis-sement afi n de soutenir les initiatives des organisations collectives de l’économie populaire et solidaire dans dif-férentes chaînes de production et l’accès au microcrédit par le biais d’une institution nationale existante. Dans le cadre du deuxième objectif, le PDRN est actif dans les secteurs les plus variés : café, cacao, fèves, pommes de terre, maïs, riz, arbres fruitiers, pêche, produits laitiers, bananes, produits artisanaux et tourisme communautaire. Différents projets sont également menés dans le domaine de la sécurité alimentaire. Tous les projets d’investisse-ment du PDRN sont fi nancés par des contributions de la Coopération belge au développement, par les autorités provinciales et, dans la plupart des cas, par les béné-fi ciaires eux-mêmes afi n de pérenniser les effets du programme. Ce dernier se terminera fi n 2015. Selon les estimations, près de 16 000 personnes bénéfi cieront d’un revenu plus stable.

SARA VAN DEN EYNDE - CTB

Pour les petits pêcheurs d’Esmeraldas, la conservation

des poissons est une préoccupation. Avoir sa propre glace

permet de faire fi des intermédiaires et de proposer des

stocks plus frais et importants aux acheteurs. Dans un

pays à revenu moyen comme l’Équateur, les petits produc-

teurs locaux doivent se battre pour trouver leur place au

sein du marché souvent peu complaisant avec les petits. Il

suffi t parfois d’un coup de pouce…

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ONLINEwww.btcctb.org

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LES PEUPLES INDIGÈNESentre tradition et modernité

D’où viennent-ils vraiment ?Sur le plan archéologique, la question n’est pas résolue… Mais en 1492, croyant avoir atteint les Indes au terme d’une traversée homérique de l’Atlantique, Christophe Colomb les appela “Indios”, Indiens en français. Depuis lors, aux yeux du monde occidental, ils n’ont cessé de faire fi gure de “pauvres”, d’“attardés”, de “primitifs”.La réalité est toute autre. En l’an 1000 de notre ère, les Indiens avaient déjà déve-loppé leur propre révolution néolithique afi n de créer un ensemble de civilisa-tions variées sur tout l’hémisphère : les Aztèques et Maya en Méso-Amérique, les Incas en Amérique du Sud, pour ne citer que les plus connues.En créant le maïs à partir d’une plante herbacée des montagnes appelée la téosinte, les Indiens ont accompli un tel prodige que sa réalisation a occasionné parmi les archéologues et les biologistes plusieurs décennies de débats et dont l’impact a été tout aussi spectaculaire au niveau planétaire. Impact, peut-être plus important que celui de l’agriculture andine, à base de pomme de terre et de haricot ou celle de l’Amazonie orientée vers le manioc.La plus remarquable de leurs perfor-mances intellectuelles demeure très clai-rement l’invention du zéro. En Amérique, le premier zéro connu fi gure sur une gra-vure maya de 357 après Jésus-Christ et pourrait donc précéder le zéro sanscrit. Il existe par ailleurs, des monuments anté-rieurs à notre ère qui, s’ils ne portent pas

de zéro, présentent des inscriptions de dates calculées selon un système calen-daire fondé sur son existence.Le contact brutal avec Colomb entraîna des conséquences infi nies. Elles furent fatales pour les descendants de ceux qui furent les acteurs de ces différentes révolutions néo-lithiques sur le continent américain. Après Colomb, s’est évanoui un univers prospère, d’une extraordinaire biodiversité, tourbillon de langues, d’échanges commerciaux et de cultures, balayé par les maladies ou la domination. L’oblitération fut si totale qu’en l’espace de quelques générations, ni les conquérants ni les peuples soumis ne se souvenaient de son existence. L’espace se vida aussi de ses occupants.Avec une résilience extraordinaire, les Indiens ont réussi à résister aux affres de la colonisation et de la post-colonisation grâce aux précieux savoirs et talents hérités de leurs ancêtres. Ceux qui s’en sont sortis se sont néanmoins retrouvés relégués au fi n fond des environnements les plus hostiles.

Des acteurs défavorisés mais incontournables

Après des siècles de silence et d’invisibi-lité, ils sont aujourd’hui plus de 50 millions répartis en 400 groupes ethniques (ou Peuples indigènes) en Amérique latine à refaire surface. Ils essayent de recréer un discours à propos de ce que fut le continent et à propos de ce qu’ils furent eux-mêmes. Discours qui tentent de faire la jonc-tion entre la tradition millénaire de leurs cultures et le pari de vivre dans le futur et dans un monde moderne.

Les Peuples Indigènes sont actuellement des acteurs incontournables sur la scène politico-sociale et économique en Amé-rique latine. D’autant que la “demande indigène” ne se contente pas de réclamer des bénéfi ces pour leurs propres commu-nautés mais propose de plus en plus des changements susceptibles d’affecter l’en-semble de la société et la structure même des États. L’édifi cation de sociétés multi-culturelles et multi-ethniques telles qu’ils le proposent ne met pas seulement leur propre situation de pauvreté ou de margi-nalisation, mais remet plus généralement en question les relations de domination sur base de la discrimination raciale, de l’into-lérance ethnique ou encore de la domina-tion d’une culture par une autre.L’émergence actuelle des “questions indi-gènes” obéit dans ce sens à un idéal d’es-poir de changement pour beaucoup de personnes. La coopération internationale ne peut y être indifférente et y a largement sa place.

VALDI FISCHER

EN SAVOIR PLUS ?

La emergencia indígena en América latina.

José Bengoa (2007).

1491 – Nouvelles révélations sur les

Amériques avant Christophe Colomb.

Charles C. Mann. Albin Michel (2007).

Les semences du “Buen Vivir”.

Marc Fasol et Valdi Fischer.

Fondo Indígena (2012 - à paraître

prochainement).

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Projet “Buen Vivir”

au Guatemala

fi nancé par la

Coopération belge et

le Fonds Indigène.

AMÉRIQUE LATINE

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U ne route de terre nous conduit vers San Vicente, un petit village de 43 familles. Une fois sur place, nous tra-

versons le fleuve en empruntant un pont suspendu. Surtout, ne pas regar-der en bas et bien se tenir pour une traversée sans encombre. De retour sur la terre ferme, sur l’autre rive, nous profi tons de la végétation luxuriante de manguiers, de cacaoyers et de fl eurs hautes en couleur. Notre destination : l’installation d’eau potable du village.El presidente – le chef du village – nous explique le fonctionnement du sys-tème : “L’eau est pompée du fl euve avant d’être purifi ée. Elle est ensuite achemi-née vers une cuve située en amont du village, à une hauteur suffi sante pour que toutes les maisons soient alimentées en eau courante.”Les gens d’ici n’ont pas pour habitude de payer leur accès à l’eau potable, parce qu’il s’agit pour eux d’un droit élémentaire. PROTOS a dû redoubler d’efforts pour

faire comprendre aux habitants qu’ils ne payaient pas pour l’eau, mais bien pour le service de distribution d’eau.Piedad, une collaboratrice de PROTOS, ajoute : “Avant notre intervention en 2011, les habitants disposaient d’une vieille installation d’eau potable qui ne purifi ait même plus l’eau pompée. L’eau du fl euve étant utilisée pour toutes sortes d’activités, elle était extrê-mement sale. Les habitants étaient régulière-ment confrontés aux maladies et cela n’avait donc rien de surprenant.”Plusieurs enfants sautent dans le fl euve et commencent à jouer dans l’eau. Nous avons bien envie de les imiter, car le soleil culmine dans le ciel et la chaleur est étouffante.

HygièneEn route pour la destination suivante : Sandoval. Nous y visitons une petite école qui compte 48 élèves et deux ins-tituteurs. Trois toilettes, une douche et un évier, alimentés par l’eau du fl euve, ont été installés dans l’école. L’eau potable provient de bidons.

“Enseigner l’importance de l’hygiène aux enfants n’a pas été une chose facile”, déclare un collaborateur de l’école. “Ils n’ont en effet souvent pas de toilettes chez eux (ils font leurs besoins en pleine nature) et ne sont certainement pas habitués à se laver les mains avant de reprendre leurs activités.”

Toilettes sèchesEn fi n de matinée, nous poursuivons notre route vers Zapallo, où nous croisons un groupe de femmes en train de faire la les-sive dans le fl euve. Le gouvernement équa-torien a reçu des fonds des Nations Unies afi n d’équiper le village d’une installation d’eau potable d’ici 2013. Plus tôt cette année, PROTOS a lancé un projet pilote consacré aux toilettes écologiques. “Nous avons pu convaincre neuf familles d’utiliser des toilettes sèches”, déclare Piedad. “Il s’agit d’une solution alternative bien plus hygiénique que les W.-C. clas-siques, parce que vous n’avez pas besoin d’eau pour rincer. Vous n’avez donc pas non plus d’eaux usées à évacuer. L’urine et les

De l’eau pour tous

En Équateur, de nombreuses personnes n’ont pas accès à l’eau potable et sont donc

condamnées à vivre dans des conditions d’hygiène déplorables. L’ONG PROTOS met

tout en œuvre pour que l’Or bleu soit accessible à tous. Nous partons pour la province

d’Esmeraldas, au nord-ouest du pays.

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Les élèves de l’école de Sandoval sont très enthousiastes à propos de leur nouvelle installation sanitaire (à l’arrière).

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excréments sont séparés et récoltés dans des compartiments souterrains distincts.” Mais qu’en est-il au niveau des mauvaises odeurs et des insectes ? “De la matière sèche (herbe, terre, feuilles) est répandue sur les excréments pour éviter ce genre de problèmes. Une fois séchés et désinfectés, les excréments sont utilisés comme engrais pour le potager.”Graciela, dont la famille participe au projet, nous montre avec fi erté son pota-ger particulièrement garni. “Les familles participant au projet ont reçu une forma-tion sur l’utilisation correcte des toilettes écologiques”, explique-t-elle. Si l’expé-rience menée auprès des habitants du village rencontre le succès escompté, PROTOS investira davantage dans les toilettes sèches. En cas d’échec du pro-jet pilote, des toilettes classiques avec chasse d’eau seront installées.

Salles de bainDirection Chontaduro maintenant, où nous sommes invités à visiter le village ainsi que quelques maisons pourvues d’une douche et de toilettes privées. Les salles de bain sont joliment décorées, mais restent relati-vement basiques. À notre grande surprise, nous découvrons même une machine à laver dans l’une des maisons, un fait

extrêmement rare dans ces hameaux où les habitants n’ont souvent pas accès à l’électricité. Dans l’ensemble du village, 43 installations sanitaires ont été montées.

Pompe immergéeEn route pour la dernière visite de la jour-née, celle d’une installation d’eau potable dans le village de Chumundé. L’installation n’est accessible que par le fl euve ; un canoë nous emmène donc plusieurs centaines de mètres plus loin, sur l’autre rive. Ce faisant, nous sommes passés à côté de la pompe immergée accrochée à une structure fl ot-tante. Cette solution a été retenue parce que la hauteur du fl euve varie de dix mètres entre la saison des pluies et la saison sèche. La pompe immergée achemine l’eau du fl euve vers l’installation située en amont, où l’eau subit un traitement chimique et une fi ltration. L’installation a été construite en collaboration avec les habitants. Le système ne fonctionne pas 24 heures sur 24 pour des raisons d’économie. La com-munauté est en effet seule responsable de son exploitation et sa maintenance.Nous plongeons un instant nos mains dans le courant pour nous rafraîchir, puis repre-nons notre route en direction de la capitale Quito.

STEFANIE BUYST

PROTOSAvec le slogan “L’eau, LE levier du développement”, PROTOS plaide pour une gestion durable de

l’eau au Nord comme au Sud. En Équateur, l’ONG soutient des programmes de développement qui

offrent à la population locale un meilleur accès à l’eau et aux infrastructures sanitaires. La qualité de

vie s’en trouve considérablement améliorée vu la réduction du risque de maladies. En outre, les pro-

grammes garantissent l’exploitation optimale de l’eau disponible pour l’agriculture locale. PROTOS

favorise en outre la collaboration entre toutes les parties concernées et tente de donner davantage

de pouvoir aux communautés locales en ce qui concerne leur gestion de l’eau.

FAIRE DE L’ACCÈS

À L’EAU ET À

L’ASSAINISSEMENT

UN DROIT DE L’HOMME

Les Nations Unies ont proclamé 2013 Année interna-

tionale de la coopération dans le domaine de l'eau.

L’objectif est de renforcer le degré de sensibilisation

quant à l’importance de la coopération internationale.

Les exemples de bonne gestion de l’eau et de collabo-

ration fructueuse seront mis en lumière. Une attention

toute particulière est prêtée à la gestion adéquate de

l’eau, à la coopération fi nancière et à l’élaboration de

cadres légaux nationaux et internationaux permettant

la coopération dans le domaine de l’eau.

L'Europe, à travers ses citoyens, accorde aussi une

attention à la problématique de l'eau. Le 10 décembre

2012 - lors de la Journée des droits de l’homme –, les

autorités de dix grandes villes européennes1 ont signé la

toute première Initiative citoyenne européenne prônant

l’instauration du droit humain à l’eau et l’assainisse-

ment dans la législation européenne.

ONLINEwww.protos.be

1 Amsterdam, Bruxelles, Copenhague, Gênes, Gand,

Leicester, Moita, Nantes, Naples, Paris et Vienne.

Source :

www.unwater.org/watercooperation2013.html

www.right2water.eu/fr

Une pompe extrait l’eau de la rivière qui sera conduite

à la station d’épuration de Chumundé.

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Suite aux inondations de 2008, la Belgique a soutenu dans

l’urgence les petits agriculteurs par le biais de l’organisation des

Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).

Grâce à UNIFEM, le Fonds de développement des Nations

Unies pour la femme – devenu par la suite ONU Femmes – la

Belgique soutient l’égalité des chances entre fi lles et garçons.

TRENTE ANS D’ÉCHANGESEn 2007, on comptait déjà 30 années de présence de la Coopération belge au développement

en Équateur. Une excellente occasion pour publier, en 2010, le recueil de photos Encuentros

de la photographe Angela Tillieu. Un aperçu des réalisations effectuées au cours de ces

trois décennies étaient ainsi mises en lumière par de splendides photographies en noir et

blanc dont vous voyez une sélection ci-dessous. Si vous souhaitez un exemplaire de cet

ouvrage, participez à notre concours.

Via une organisation locale, l’ONG Trias vient en

aide aux cultivateurs de pommes de terre pour

qu’ils augmentent leurs revenus.

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Grâce aux microcrédits, les populations rurales sont en mesure de lancer

leur entreprise, comme ici la fabrication de nattes en roseau et de meubles.

Moment de détente suite aux moments diffi ciles vécus

lors des inondations (voir photo à gauche).

GAGNEZUN MAGNIFIQUE

RECUEIL DE PHOTOS

50 PERSONNES AYANT RÉPONDU CORRECTEMENT AUX 4 QUESTIONS SERONT TIRÉES AU SORT ET SE VERRONT OFFRIR LE LIVRE ENCUENTROS (126 PAGES) ET SON RECUEIL DE TEXTES (86 PAGES). TOUTES LES RÉPONSES SE TROUVENT DANS CE NUMÉRO.

1. Que signifi e “Mindalae” ?

2. Connaissez-vous le nom de la meilleure variété de cacao cultivé en Équateur ?

3. Que veut dire “Buen Vivir” ?

4. Que sont les “Páramos” ?

5. Que signifi e ALBA ?

Prière d’envoyer vos réponses accompagnées de vos coordonnées postales avant le 28 février 2012 à info.dgd @diplobel.fed.be ou par voie postale à l’adresse suivante : DGD – Concours D4.4

Rue des Petits Carmes 151000 Bruxelles.

Dans le courant du mois de mars 2013, la liste des 50 gagnants sera publiée sur notre site et les livres envoyés par la poste.

Dans la zone frontalière avec Pérou, des projets ont été lancés (secteurs

de l’eau, du café…) pour renforcer la cohésion entre les deux pays, en

mettant une emphase particulière sur les questions d’environnement.

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Il est des événements dans la vie qui vous font embrasser des causes pour lesquelles

vous n’aviez pas d’affi nités particulières. En 1998, Lenín Moreno est victime d’une

agression à main armée, qui le privera de l’usage de ses jambes. Quelques années

plus tard, Nadia Hadad, coopérante au sud du Sénégal, devient tétraplégique suite à un

accident de voiture. Ils ne se connaissent pas mais ont livré le même combat.

L enín Moreno est vice-président de son pays, l’Équateur. Pen-dant son mandat, qui prendra fi n avec les élections présidentielles

de ce début d’année, son combat a été la reconnaissance des droits de la personne handicapée à travers une série d’initiatives et de politiques publiques novatrices.“Quand je suis allé sur le terrain, je me suis rendu compte à quel point les personnes souffrant d’un handicap étaient reléguées au plus bas niveau de la société. Certaines d’entre elles dormaient dans de véritables trous, d’autres étaient attachées à leur lit, pour éviter qu’elles n’en tombent, nous disait-on.”Les programmes mis en place en Équateur s’attaquent à plusieurs chantiers : la pré-vention du handicap, l’amélioration de la qualité de vie des personnes handicapées, mais aussi leur inclusion dans la société, à travers des activités artistiques et spor-tives. Ces programmes promeuvent éga-lement l’inclusion dans la vie active, avec notamment la réforme du code du travail, qui oblige toute entreprise de plus de 25 employés à recruter au moins 4 % de per-sonnes handicapées.Pour couronner cet engagement, Lenín Moreno est parvenu en juin 2012 à faire approuver une loi à l’unanimité par l’As-semblée nationale, garantissant les droits des personnes handicapées. Aujourd’hui, l’expérience équatorienne dépasse les frontières de ce petit pays andin, qui a

signé à ce jour des conventions de coo-pération en matière de handicap avec plu-sieurs pays latino-américains.

Les droits des personnes handicapées dans la coopération

au développementNadia Hadad travaille en tant que bénévole et administrateur pour PHOS (Platform Han-dicap en Ontwikkelingssamenwerking),

une ONG belge fondée en 1994 et qui promeut les droits de la personne handi-capée dans le contexte de la coopération au développement.“Ce qui me frappe, dans l’expérience de l’Équateur, c’est que la problématique des droits des personnes handicapées ne se limite pas à une accessibilité physique pour les personnes à mobilité réduite, mais est considérée comme un thème transversal et intégré dans tous les domaines : transport, bâtiments et services publics, enseignement, emploi, etc.”, déclare Nadia Hadad.Elle rappelle que l’Équateur a ratifi é la Convention des Nations unies et son Pro-tocole en 2008, un an avant la Belgique, et que le pays a adopté un Plan d’action très ambitieux. Cette dynamique est due selon elle au rôle actif joué par une per-sonnalité de premier plan comme Lenín Moreno. Un nombre très limité de pays bénéfi cie de ces fi gures de proue. Par exemple, en Allemagne, le ministre des Finances, Wolfgang Schaüble, lui-même en chaise roulante, a rendu ce pays “accessible”, selon elle.Parmi les projets menés par PHOS, il y a notamment l’insertion de la problématique du handicap dans les Objectifs du Millénaire pour le Développement, ainsi que l’analyse de plusieurs programmes de coopération de la Belgique (au Bénin, en Tanzanie, etc.), et cela en vue de faire respecter notamment l’article 32 de la Convention des Nations Unies de 2006 relatives aux droits des per-sonnes handicapées, qui appelle à une prise en compte de cette problématique dans la coopération au développement. S’il y a souvent de la marge entre la théorie et la pratique, des expériences comme celle de l’Équateur ou de l’Ouganda (où, par exemple, la législation n’octroie pas le droit à quelque parti que ce soit de siéger au Parlement s’il n’est pas représenté par au moins une femme et une personne souffrant d’un handicap) permettent d’espérer et de montrer le chemin à la Belgique où, selon PHOS, cette dimension n’est pas encore prise à bras-le-corps.

ERIC DE MUYNCK

Parmi les projets menés par PHOS, il y a notamment l’insertion de la problématique du handicap dans les Objectifs du Millénaire

pour le Développement.

Regards croisésaccident de voiture. Ils n

Quand je suis allé sur le terrain, je me suis rendu compte à quel point les

personnes souffrant d’un handicap étaient reléguées au plus bas

niveau de la société.LENÍN MORENO

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Bien avant l’arrivée des Incas, les Mindalae se livraient au com-merce de produits divers (sel, coton, bois, etc.). Ces commer-

çants ambulants ont été les fi gures-clés des cultures précolombiennes. Ils trans-portaient des produits de la Cordillère des Andes jusqu’à la côte, et du Nord au Sud. Colporteurs de toutes les nouvelles, ils rem-plissaient également le rôle de messagers.

Soutien belgeLe musée Mindalae, qui a été fondé avec le soutien de la Coopération belge au développement1, s’inscrit dans le cadre d’un projet visant à renforcer, revalori-ser et promouvoir l’artisanat traditionnel de l’Équateur. Il n’abrite pas de pièces archéologiques mais montre, par le biais de l’artisanat, les différents rituels

et traditions des groupes ethniques des trois plus grandes régions de l’Équateur : la région côtière, le massif des Andes et la forêt amazonienne. Dans la mesure où la promotion de la culture n’est générale-ment pas une priorité de la coopération au développement, ce projet est vérita-blement atypique. Toutefois, il a bénéfi -cié d’un soutien en raison de son impact économique : le musée aide les petits arti-sans en vendant leurs produits via le com-merce équitable, ce qui améliore ainsi la qualité de vie d’une partie de la popula-tion démunie. Et cette initiative est une réussite : étant donné que les artisans vendent leur tra-vail régulièrement (et plus en une fois), ils perçoivent ce qui s’apparente à une rémunération. Même s’il s’agit de l’équi-valent d’un salaire minimum (300 dollars), cela représente une importante source de revenus pour des personnes géné-ralement originaires de la campagne, non scolarisées et dont la production se déroule dans un contexte familial. Cette initiative leur permet d’assurer la subsis-tance de leur famille.

IdentitéDe plus, les artisans bénéfi cient d’un feed-back de l’acheteur. Ils peuvent ainsi amé-liorer leurs produits et suivre les tendances de la mode, en adaptant par exemple les couleurs de certains tissus en fonction de la saison. Il arrive fréquemment qu’une fi che technique soit également jointe au produit afi n d’expliquer le contexte eth-nique. Celle-ci confère une valeur ajoutée au produit, tout en transmettant des infor-mations sur les traditions de la population indigène de l’Équateur.La découverte de cette diversité culturelle remporte surtout du succès auprès des jeunes. Des événements sont régulièrement organisés au musée afi n de couvrir les frais, de visites scolaires assorties d’ateliers à des réceptions pour des institutions inter-nationales telles que l’Union européenne. “Le but est de faire connaître la culture dans le musée mais aussi en dehors de celui-ci”, déclare Catalina Sosa, directrice de la Fon-dation Sinchi Sacha (voir encadré). “De cette manière, le musée vit et crée une inte-raction avec ses visiteurs qui ont la possibilité de découvrir, s’approprier et transmettre les traditions de divers groupes ethniques de l’Équateur par le biais de l’artisanat.”

STEFANIE BUYST

Nul n’ignore la richesse de l’histoire de la population indigène

de l’Équateur. De lointains ancêtres témoignent d’une

diversité linguistique et culturelle exceptionnelle. Au musée

Mindalae de Quito, touristes et autochtones peuvent admirer

de belles tranches d’histoire.

ONLINEwww.mindalae.com

1 Entre 2004 et 2007, la Coopération belge au dévelop-

pement a offert 600.000 euros. Le projet s’est déroulé en

collaboration avec la commune de Quito et l’ONG Sinchi

Sacha (voir encadré), qui gère aujourd’hui le musée.

INDALAEartisanat avec identité

Sinchi SachaSinchi Sacha est une ONG qui contribue de manière stratégique au développement durable en Équa-

teur. Cette organisation est spécialisée dans la promotion de l’écotourisme, le commerce équitable,

la réhabilitation du patrimoine culturel et la création de revenus pour les pauvres. L’association se

compose actuellement d’un réseau de 120 petits producteurs, dont une majorité de femmes.

Sinchi Sacha signifi e “imposante forêt vierge” en quechua, une langue précolombienne parlée par

les habitants des Andes et qui était la principale langue véhiculaire à l’époque des Incas.

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DE LA FORÊT AUX SOMMETS :

UNE NATURE QUI VAUT DE L’OR

La nature unique qu’abritent les sommets andins et la forêt amazonienne

sont un enjeu local et international.

Biodiversité : de la forêt…Ce qui est merveilleux ici, c’est que chaque espèce s’est spécialisée dans un biotope qui lui est propre pour ne pas entrer en compétition avec une autre. C’est peut-être la raison pour laquelle certains points de la forêt amazonienne comme le Parc Yasuni sont considérés comme l’un des lieux qui a le plus grand taux de biodiversité de la planète. Des arbres ont appris à vivre dans l’eau pour ne pas prendre l’espace des autres, des plantes se sont faites aériennes, elles poussent sur les arbres, des animaux “endémique” (c’est-à-dire qu’on ne trouve qu’ici) semblent tout droit sortis de la pré-histoire. Selon David Romo, de l’université de Quito, “Yasuni aura traversé l’histoire tout en conservant des poches de biodiversité intactes. Ce qui explique le trésor génétique qu’abrite le parc.” (v. encadré).Souvent surnommée “le poumon de la pla-nète”, l’Amazonie représente à elle seule 1/3 des réserves tropicales de la planète et 60 % de la surface totale de la forêt. La plus grande forêt du monde remplit également un rôle écologique très important. En effet, la pluie, après avoir été absorbée par le sol, s’évapore. Une certaine chaleur se dégage alors dans l’atmosphère. Comme les tro-piques reçoivent les deux tiers des préci-pitations mondiales, la chaleur dégagée est très importante. Les tropiques sont en effet

la première source de redistribution de la chaleur sur Terre. Dans ce processus, les arbres contribuent au processus naturel en transformant le gaz carbonique en oxygène.

…Aux sommetsLa Cordillère des Andes est classée parmi les régions prioritaires pour la conserva-tion de la biodiversité pour la Convention sur la Diversité Biologique en raison de sa vulnérabilité et la richesse irremplaçable des plantes et vertébrés endémiques. Les

páramos, paysages typiques des Andes perchés juste en des-sous des glaciers, entre 3.500 et 5.000 m d’alti-tude constituent des écosystèmes excep-tionnels de biodiver-sité. Les espèces qui peuplent les ruisseaux issus des eaux de fonte,

principalement des insectes, sont pour bon nombre endémiques de ces milieux extrêmes, soumis à la fois au gel, à un rayon-nement intense, et balayés par les vents. Les páramos qui fi ltrent l’eau de fonte sont à la base du système hydraulique de toute la région. D’une façon générale, les écosys-tèmes de montagne fournissent l’eau pour la moitié de l’humanité.

Amérique du Sud : hotspot des changements climatiques

Cette géographie exceptionnelle, entre som-mets enneigés et gigantesque forêt vierge, rend l’Amérique du Sud particulièrement

sensible aux changements climatiques et aux catastrophes naturelles. “L’Équateur fait un monitoring du recul des glaciers. Ces 20 dernières années, le recul est net et a des effets sur tout le système hydrique du pays. En commençant par les páramos qui avec un degré de différence se sont réduits et ont presque disparu. Les effets sur la qua-lité du sol sont déjà visibles et les agricul-teurs doivent aller plus haut pour trouver de bonnes terres. Pour le moment l’Équateur a une eau de bonne qualité qui vient des gla-ciers mais beaucoup d’études montrent que l’on peut s’attendre à des problèmes d’eau potable dans les années qui suivent. Il a suf-fi t de fortes pluies pour que surviennent de terribles glissements de terrain. Mais toute la faute n’est pas à la géographie ; la capacité de se préparer et répondre aux catastrophes d’un pays est aussi un facteur d’aggravation des risques”, explique Gabriel Jaramillo, spécialiste environnement et gestion des risques au PNUD en Équateur.

La biodiversité est un bienfait global pour la stabilité du climat du monde entier.

KLIMOSune plateforme de

recherche sur le climat et la coopération au

développementKLIMOS est une plateforme de recherche regroupant la KULeuven, la VUB, l’UGent et la Katholieke Hogeschool Sint-Lieven. Elle élabore des politiques d’intégration des mesures d’adaptation et d’atténuation au sein de la coopération au développement. Depuis 2011, KLIMOS a développé un toolkit permettant d’intégrer le “développement durable” dans les programmes de développement.

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Qui n’a pas entendu parler d’El Niño(littéralement l’enfant Jésus) ? Ce phénomène climatique désigne à l’origine un courant côtier saison-nier chaud sans danger au large du Pérou et de l’Équateur et par exten-sion le phénomène climatique par-ticulier, différent du climat usuel, qui se caractérise par des températures anormalement élevées de l’eau dans la partie est de l’océan Pacifi que sud. Mais dernièrement, l’enfant terrible est surtout connu dans l’actualité sous sa forme la plus redoutable qui a fait des ravages parmi la population équatorienne. Car sous l’influence du changement climatique global, les apparitions d’El Niño seraient plus fréquentes et intenses provo-quant importantes inondations ou sécheresses. Et le réchauffement aurait des conséquences sur les autres continents ; ainsi un réchauffe-ment localisé de la partie centrale du Pacifi que équatorial nommé El Niño Modoki a un impact spécifi que sur la circulation atmosphérique globale. Il provoque en particulier des sécheresses sévères sur l’Australie et en Inde en per-turbant la Mousson.

Un lien entre biodiversité et changements climatiques

On ne peut lutter contre le changement climatique sans tenir compte de la bio-diversité. “Protéger la biodiversité, c’est sauvegarder des écosystèmes. Et ces éco-systèmes (comme les forêts) maintiennent la réserve de carbone stable. La défores-tation contribue à 20 % des émissions de gaz à effet de serre. Sans compter que la survie des populations dépend des écosys-tèmes dont ils font partie.” Le spécialiste du PNUD renchérit : “Vous savez, le globe

terrestre est un seul et unique système cli-matique. La Belgique, même lointaine fait partie de ce système. Si vous ne pouvez pas diminuer les émissions de gaz des industries chez vous par exemple, vous pouvez compenser en aidant un autre pays à maintenir sa biodiversité. En fait la biodi-versité est un bienfait pour la stabilité du climat du monde entier.”

Rio et le rôle des peuples autochtones

C’est aussi l’idée qui a parcouru les som-mets de Rio en 1992 et de Rio+20 en septembre 2012. Le sommet de 92 pro-duisait la Convention sur les changements climatiques et la Convention sur la diversité

biologique. L’agenda 21 reconnaissait le rôle important des “connaissances, innovations et pratiques des commu-nautés autochtones qui présentent un intérêt pour la conservation et l’utilisa-tion durable de la diversité biologique.” Il proposait de renforcer ce rôle et affi rmait que les peuples autochtones devaient garder le contrôle de leur territoire.Depuis lors, une prise de conscience de l’importance des richesses natu-relles s’est développée tant du côté des populations andines qu’au niveau politique. Ainsi en Bolivie comme en Équateur on promeut (souvent plus dans la théorie que dans la pratique) un système basé sur le “Buen vivir” (conception indigène de vie basé sur le lien social et l’harmonisation de l’être humain avec les écosystèmes) et les “droits de la nature”. Les gou-vernements des pays andins ainsi que des organisations de peuples indi-gènes étaient donc présents à Rio +20 avec des revendications concrètes.

Mitigation et adaptation“Nous luttons contre les changements cli-matiques à travers deux grands axes : l’atté-nuation et l’adaptation en nous basant sur les stratégies nationales”, continue l’expert du PNUD…

La Cordillère des Andes, est la plus grande chaîne

de montagnes du monde avec ses 7.100 kilomètres

de long et son altitude moyenne de 4.000 mètres qui

culmine à 6.962 mètres (en Argentine). Elle débute au

Nord du Venezuela au nord puis traverse la Colombie,

l’Équateur, le Pérou, la Bolivie, le Chili et l’Argentine,

jusqu’à la pointe sud du continent. De nombreux

sommets sont des volcans.

MITIGATION OU ATTÉNUATION Actions pour atténuer ou prévenir les consé-

quences possibles des changements clima-

tiques (ex. lutter contre la déforestation)

ADAPTATION

Actions pour adapter des systèmes naturels

et humains à des changements de climat

éventuels (ex : construire des digues, diver-

sifi er l’agriculture)

REDD+

REDD (Reducing Emissions from Deforestation and Forest

Degradation) a été conçu comme un moyen de valoriser fi nanci-

èrement le carbone stocké dans les forêts. REDD entend inciter

les pays du Sud à s’investir dans un développement durable en

réduisant leurs émissions de carbone causés par la déforesta-

tion. REDD + dépasse la simple lutte contre la déforestation et la

dégradation des forêts et couvre également la protection, de la

gestion durable des forêts et de l'amélioration la séquestration

du carbone dans les forêts.

Le REDD a été mis sur la table pour la première fois en 2005 lors

des négociations sur le climat à Montréal. À Cancun, en 2010,

une décision sur REDD + a été adoptée. Par contre en ce qui

concerne le fi nancement à long terme et son inclusion éventu-

elle dans le marché du carbone il n’y a pas encore d'accord.

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ONLINEwww.bolivie.ird.fr

www.equateur.ird.fr

L’initiative Yasuni ITT

Dans la partie équatorienne de la forêt amazo-

nienne, le Parc Yasuni (9.820 km2) abrite la plus

grande biodiversité sur terre. Sur un hectare,

on y trouve plus de variétés d’arbres que dans

tout le continent Nord américain. Il n’existe pas

de lieu où l’on trouve plus de sortes d’oiseaux,

d’insectes, de grenouilles, de poissons et de

plantes. C’est aussi le territoire des derniers

peuples qui vivent totalement coupés de la

civilisation (Huaoranis). Pour son malheur,

cette zone abriterait aussi 20 % de réserves

de pétrole de l’Équateur. Le pétrole menace

l’équilibre de cet écosystème avec ses routes,

ses stations de travail, ses travailleurs migrants,

l’exploitation de l’eau (il faut 10 l d’eau pour un

baril de pétrole), la pollution constituée par les

déchets de pétrole, les fuites…

Dans certaines zones du Parc Yasuni, l’exploi-

tation pétrolière a déjà commencé avec des

effets dévastateurs pour la biodiversité. Pour

les zones ITT (Ishpingo-Tambococha-Tiputini),

le gouvernement équatorien propose un deal à

la communauté internationale : ne pas toucher

aux 846 millions de barils d’or noir enfouis

dans les sols de la zone ITT mais demander

en compensation de contribuer à un fonds

fi duciaire (géré par le PNUD) pour accompa-

gner la transition énergétique dans le pays et

contribuer à la conservation de la biodiversité

dans le parc. L’initiative ITT Yasuni est présen-

tée par l’Équateur comme une façon de lutter

contre les changements climatiques (émis-

sions nettes évitées). EP

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1,5% 3% 6% 6% 7%2%

DE LA FORÊT AUX SOMMETS

L’Amazonie couvre 6,7 millions de km²

dans 9 pays / territoires.

La forêt amazonienne forme avec les forêts du Bassin Congo et de

l’Asie du sud-est une ceinture verte qui encercle la Terre.

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L’Amérique du Sud est particulièrement sensible aux changements climatiques

et aux catastrophes naturelles. Elle détient par ailleurs le plus grand

potentiel de “réserve de carbone.”

“L’atténuation consiste plus parti-culièrement en la protection globale, par exemple en luttant contre la déforestation ou en développant des énergies renouve-lables. La question des technologies et le transfert de celle-ci est centrale à ce niveau. L’adaptation des populations aux change-ments climatiques relève plutôt du déve-loppement (ressources en eau, adaptation à l’agriculture)”. La Belgique participe à ces programmes via une contribution fi nancière au PNUD.

Suite aux grands sommets et à un niveau international, un Fonds pour les pays les moins avancés a été créé pour soutenir les pays les moins avancés dans l’élaboration et l’exécution de programmes nationaux d’adaptation. Il est géré par le Fonds pour l’environnement mondial (FEM) auquel la Belgique a versé 25,4 millions d’euros depuis 2009. Dix agences exécutives telles que le PNUD, le PNUE et la Banque mondiale viennent en aide aux autorités du Sud pour adapter leurs activités de

développement au climat. La Belgique participe également à la mise en place de systèmes de mitigation comme le REDD+(voir encadré) et a intégré une dimension “changement climatique” dans ses projets de développement (voir Klimos).

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En marge du sommet

de Rio+20, le Ministre

Magnette a rencontré le chef

traditionnel Raoni qui lutte

toujours à l’âge de

82 ans contre la déforestation

de l’Amazonie et pour la

préservation des droits des

Indiens. Un Borduna, un

gourdin de combat, a été

offert à notre Ministre.

22 JANVIER-FÉVRIER 2013 I dimension 3

AMÉRIQUE LATINE

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Sur les rivières deSur les rivières de

Écotourisme communautaireUn complexe touristique géré

par les indigènesLes routes se sont arrêtées pour laisser place à la forêt et sa nature luxuriante. On n’y accède qu’après 3 heures de bateau à moteur et de canoë à travers les ‘aguas negras’ des bras du fl euve Napo. C’est un petit coin de paradis soigneusement conservé par ses “propriétaires” grâce au… tourisme.Au cœur du Parc Yasuni, le Napo Wildlife Center est un modèle d’écotourisme géré par les Indiens Kichwa Añangu. S’il constitue aujourd’hui un superbe com-plexe écotouristique qui propose des découvertes de l’Amazonie, il ne s’est pas construit sans peine : “Pendant 2 ans, 8 volontaires de la communauté, dont j’étais l’un des membres, ont travaillé d’arrache pied pour construire les lodges. Tous les matériaux ont été transportés en canoë, en barque ou à pied”, explique Miguel Andy, manager du lodge. Il explique : “Nous sommes allés à Quito pour prendre des cours de gestion et apprendre l’anglais.”Aujourd’hui c’est devenu un magnifi que complexe touristique, de haute gamme, respectueux de l’abondante nature envi-ronnante et ses bénéfi ces profi tent direc-tement aux communautés autochtones qui le gèrent.À quelques coups de pagaie de là, se trouve l’Interpretacion Center géré par les femmes de la communauté : un lieu où elles présentent divers aspects de leur culture (danses, chants, nourriture, artisa-nat) et qui leur permet de participer aussi au projet touristique. “Nous, les femmes, avons voulu avec ce centre montrer nos coutumes et les perpétuer pour nos enfants”, raconte Mydia, une ancienne. “Avant, nos maris travaillaient dans les sta-tions pétrolières, loin de nous. Maintenant ils sont à nos côtés car ils travaillent dans le projet touristique. Le régime alimen-taire s’est amélioré, nous avons arrêté de

chasser, nos enfants sont scolarisés, nous avons un centre de santé, de l’électricité produite par des panneaux solaires.”

Des retombées socialesLe tourisme n’est en effet que la partie visible du projet de la communauté. En plus de donner du travail à 20 % de la communauté, et “un bon salaire”, nous affi rme-t-on, il fi nance des projets sociaux. 40 % des revenus touristiques sont consa-crés à l’éducation. “L’idée au départ était de faire étudier nos enfants. Mais nous avons été au delà : notre qualité de vie a vraiment augmenté d’une manière géné-rale”, affi rme M. Galo, manager des pro-jets dans la communauté.Car quelques kilomètres de forêt vierge au loin des installations touristiques se trouve le “centre” de la communauté (dont les habitations sont éparses sur des kilo-mètres). Financé par le projet, on y trouve un collège, un centre de santé, une salle internet. Le collège, fraîchement terminé est le meilleur de la région avec l’option “tourisme” pour les dernières années. On y vient de toute l’Amazonie équato-rienne et même de la “ville” pour y étu-dier. “On a mis en place un internat pour accueillir 38 élèves qui viennent de loin. Il

est entièrement gratuit, nous demandons seulement aux élèves de participer à raison de 1'heure de travail par jour.” Un projet qui s’étend puisque des nouvelles lodges sont en construction au cœur la communauté…

Une spécialité régionaleDans un pays doté d’une nature généreuse et conservée, et de peuples indigènes qui cherchent un compromis entre le bien-être et la conservation de leur commu-nauté, l’écotourisme communautaire est en vogue. Dans l’Amazonie, dans les Andes ou sur la côte, dans des lodges somp-tueuses ou des logements modestes près des habitants, le tourisme communautaire semble promis à un bel avenir. Les peuples indigènes, propriétaires de leurs territoires ancestraux, sont souvent pauvres et il leur est diffi cile d’aspirer à un meilleur bien-être sans dégrader leur environnement et leur mode de vie traditionnel. Dans les provinces du Nord de l’Équateur, le projet de développement rural de la CTB appuie également des projets d’écotourisme.

ELISE PIRSOUL

ONLINEwww.turismocomunitario.ec

www.napowildlifecenter.com

Le collège fraîchement inauguré par la communauté des Indiens

Kichwa Añangu grâce aux bénéfi ces du projet touristique.

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AMÉRIQUE LATINE

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À l’occasion de la Journée mon-diale contre le sida et d’une exposition consacrée à la mala-die (voir quatrième de couver-

ture), la Coopération technique belge a invité Mark Heywood, activiste sud-africain dans le domaine de la lutte contre le sida. Le magazine MO* l’a rencontré.

Depuis dix ans, le nombre annuel de nouveaux cas a été réduit de moitié. Le taux de mortalité a lui aussi baissé de manière spectaculaire. Le sida sera éradiqué pour 2015, clame-t-on au sein de l’ONUSIDA. Cette prévision est-elle réaliste ?Depuis les années ‘90, les conditions de vie des personnes atteintes du sida ont profon-dément changé. Actuellement, 7 millions de personnes, dont 1,7 million rien qu’en Afrique du Sud, suivent un traitement d’antirétroviraux. En moins de 10 ans, les cas de transmissions du Sida de mère à enfant ont chuté de 40 à 2,5 %. Les antiré-troviraux dont nous disposons aujourd’hui sont le fruit des dernières recherches en la matière, et un antirétroviral révolutionnaire fera bientôt son apparition sur le marché. Il devrait réduire considérablement le nombre de nouveaux cas chez les femmes, ce qui est très important car, en raison de l’inégalité des sexes, les femmes restent encore impuissantes dans certaines régions du monde face, notamment, à un principe aussi simple que l’utilisation du préservatif. Les progrès sont donc réels, mais l’ONUSIDA a tort de clamer la fi n de l’épidémie. Nous avons à peine parcouru la moitié du chemin.

Où le bât blesse-t-il exactement ?L’accès à l’information et aux traitements reste un luxe pour qui appartient à la ‘société majoritaire’… Dans un certain nombre de régions et de groupes de popu-lation, on assiste à un recul de la prévention et des traitements, voire à une recrudes-cence du nombre d’infections et de décès. Il ne reste plus alors que des groupes et habitants stigmatisés qui ne bénéfi cient pas du même degré d’ouverture et de démocratie que dans les pays occiden-taux. Pour quelle raison notre responsabi-lité envers ces populations devrait-elle être moindre ? Déclarer que la fi n de l’épidémie est proche revient à les laisser tomber.

Pour quelle raison les pays du Moyen-Orient, d’Europe de l’Est et d’Asie centrale présentent-ils un bilan aussi négatif dans le rapport de l’ONUSIDA ? Quels sont les facteurs responsables de leur vulnérabilité ?L’ouverture, le respect des droits de l’homme et la démocratie sont indispen-sables dans la lutte contre le VIH. Les pays

qui bafouent ces principes relèguent le virus à l’arrière-plan. Les personnes infec-tées sont considérées comme des rebuts sociaux, des marginaux, des criminels. L’accès aux informations, et ne parlons même pas des traitements, leur est donc refusé. Ceci explique donc les chiffres alarmants enregistrés dans ces pays. La fragmentation sociale ou le ralentissement économique fragilise les pays.En 30 années d’épidémie, nous aurons au moins appris une chose : tant les auto-rités que la société civile sont néces-saires. En Chine, le programme de lutte contre le sida est intégralement géré par l’État. En outre, les initiatives citoyennes sont davantage considérées comme une menace par les autorités plutôt que comme des partenaires égaux. Cette attitude poursuit un seul objectif : parader face aux membres des missions diplo-matiques étrangères.

Les chiffres publiés par l’ONUSIDA sont donc trompeurs ?L’ONUSIDA prend ses désirs pour des réalités, il s’agit simplement d’une bataille de chiffres camoufl ée en optimisme bien-veillant. Certains se laissent aveugler par la situation dans laquelle nous nous trou-vons aujourd’hui, comme si les 15 der-nières années n’avaient été qu’une simple promenade de santé. La lutte contre le sida n’a pas été de tout repos, bien au contraire. Au cours des 10 prochaines années, nous devrons davantage inten-sifi er nos efforts, surtout en raison de la crise économique. Si l’épidémie avait fait autant de ravages au sein des popula-tions blanches, le sida aurait été éradiqué

Mark Heywood, superactiviste sud-africain et ancien président

du Groupe de référence de l’ONUSIDA sur le VIH, n’est pas

d’accord avec les conclusions optimistes du dernier rapport

de l’ONUSIDA. Selon lui, l’épidémie est loin d’être endiguée.

“Nous avons besoin du VIH. Ceux et celles qui lui tournent le

dos font à nouveau de l’ombre aux soins de santé et gèlent

le processus démocratique dans la moitié du monde.”

Droits de l'homme et démocratie pour luttercontre le sida

À travers la lutte contre le sida, nous avons été contraints de nous poser des questions en matière d’inégalités entre hommes et femmes, mais aussi sur le plan de la démocratie.

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depuis bien longtemps. Mais il touche les Africains, les homosexuels, les pauvres, les toxicomanes et les travailleurs du sexe. Toutes ces années de campagne destinées à donner un visage humain aux victimes du VIH sont tombées dans l’oubli. Ce combat se transforme inévitablement en une lutte d’attention.

Dans le cadre de la Journée

mondiale contre le sida, des activités solidaires ont été organisées en Belgique. Mais le changement climatique attire généralement davantage l’attention du public. Pouvons-nous parler de lassitude face au problème du sida ?Nous nous dirigeons fortement vers une situation où l’épidémie de VIH devient acceptable dans certaines parties du monde. Il sera moins source de préoccu-pation s’il ne représente plus une menace mondiale. Des personnes meurent du sida, mais tant que cette problématique reste concentrée dans des régions mar-ginalisées, il n’y a plus aucune raison de paniquer. Un phénomène identique s’est produit il y a quelques années en ce qui concerne la tuberculose. Les organisa-tions pour lesquelles je travaille ont sauvé des milliers de vies mais luttent désormais pour leur propre survie. La société civile doit réfl échir à des solutions à long terme pour le monde entier au lieu de passer d’une crise à l’autre.

Que se passera-t-il si le problème du VIH est un jour complètement ignoré ?

Nous avons besoin du VIH. Grâce à la lutte contre le virus, la santé est sortie de l’ombre du débat public. En dispa-raissant, le VIH fera peser une certaine pression sur l’ensemble du système des soins de santé.À travers la lutte contre le sida, nous avons été contraints de nous poser des questions en matière d’inégalités entre hommes et femmes, mais aussi sur le plan de la démo-cratie. La Belgique a un passé démocratique, mais dans des pays tels que le Botswana, la Namibie et la Zambie, les projets de lutte contre le sida sont les seules initiatives démo-cratiques en mesure de faire pression sur les pouvoirs publics. Si nous perdons toute l’énergie accumulée pendant 30 années de lutte, ces processus démocratiques utiles à d’autres fi ns seront interrompus.

Un nombre croissant de pays a la volonté politique et les moyens nécessaires à disposition. Comment expliquez-vous alors le fait qu’en 2012, une personne meurt encore du sida toutes les 20 secondes ?Les Africains, homosexuels, pauvres, tra-vailleurs du sexe, toxicomanes sont, de toute évidence, moins importants que les blancs. Qu’est-il advenu de la solida-rité ? La douleur que ressent mon enfant est identique à celle du vôtre. Dans le contexte actuel de mondialisation, tous les problèmes sont liés. Les défi s relevés par ma communauté auront des effets sur les autres, et inversement. La coopéra-tion au développement doit être redéfi -nie de toute urgence. Ce ne sont pas les

membres de votre société qui donnent de l’argent aux miens. Il est ici question de partager les moyens afi n de préparer un avenir meilleur pour chacun.

Un manque de solidarité. L’accoutumance au sida. La diminution des budgets. Tout espoir est-il perdu ?La bataille n’est pas encore perdue, mais nous avons atteint un tournant. Mais quoi qu’il en soit, nous avons gagné. Si ceux et celles qui militent contre le sida n’avaient pas réagi de la sorte, 7 millions de personnes aujourd’hui en vie seraient mortes et enterrées depuis bien long-temps. Nous devons redéfi nir de nou-veaux objectifs plus ambitieux encore, mais les chiffres ne suffi sent pas. Nous avons avant tout besoin de qualité. Le monde entier a le droit de bénéfi cier de soins de santé de qualité capables d’apporter des médicaments dans les hôpitaux, mais aussi d’informations perti-nentes afi n que les personnes sous traite-ment soient conscientes que ces petites pilules sauvent leur vie et celle d’autrui. Enfi n, le monde a besoin de gouverne-ments à même de prendre leurs respon-sabilités afi n de contrôler le système de soins de santé et d’en faciliter l’accès en dépit de la crise.

TESS VONCK

L’interview est une version abrégée de l’interview du samedi publiée sur www.MO.be, le site du magazine MO*.

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-M.

Co

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Mark Heywood est un pilier de la

lutte contre le sida en Afrique du

Sud. Il n’a pas hésité à traduire en

justice le président Mbeki et à mettre

son gouvernement sous pression

pour qu’il distribue gratuitement

des antirétroviraux à cinq millions

de malades du sida et du VIH.

dimension 3 I JANVIER-FÉVRIER 2013 25

OPINION

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Depuis 20 ans déjà, les connaissances de l’Université de

Gand sur les nématodes attirent des étudiants du monde

entier. Le master en nématologie fi gure parmi les plus grands

succès de la coopération au développement universitaire.

U ne certaine effervescence règne dans la salle de cours oblongue. Penchés sur leur microscope, des étudiants analysent leurs

propres préparations de nématodes, appe-lés aussi ‘vers ronds’ (voir encadré). L’étude de ces organismes minuscules exige une certaine technique et de la dextérité. Et c’est à Gand par excellence que se donnent rendez-vous les étudiants pour apprendre le métier. En 20 ans, 261 étudiants origi-naires de pays du Sud ont décroché un master en nématologie1. En outre, le coor-dinateur du département, Nic Smol, reçoit encore 150 demandes chaque année. “Ce succès s’explique en premier lieu par les dommages considérables que provoquent ces petits vers, relativement méconnus, aux cultures dans le Sud”, explique Nic Smol.

Pourquoi les nématodes ?Dans les pays en développement, la majo-rité des récoltes agricoles sont la proie des nématodes, qu’il s’agisse de riz, bananes, maïs, yam, café ou de légumes, entre autres. Cependant, de nombreux paysans ignorent tout de ces “ennemis invisibles”. Lorsque leurs récoltes sont endommagées par les nématodes, ils ont plutôt tendance à penser qu’il s’agit de l’œuvre d’insectes ou qu’ils doivent augmenter les doses d’engrais. Jusqu’à 80 % des récoltes peuvent ainsi être perdus.La question des nématodes va plus loin encore. Certains nématodes qui parasitent des insectes sont cultivés afi n de lutter bio-logiquement contre les invasions de ces insectes. Facilement cultivable, le Caeno-rhabditis elegans est un organisme modèle

parfaitement adapté à la recherche fonda-mentale et, en outre, intéressant pour la santé humaine. Les chercheurs ont ainsi découvert que ces petits animaux vivent plus longtemps lorsqu’ils sont mis au régime. C’est donc pour cette raison qu’ils tentent d’isoler les processus sous-jacents. Enfi n, les nématodes marins sont d’excel-lents bio-indicateurs de pollution.

Impact dans les pays du SudDans quelle mesure le pays hôte béné-fi cie-t-il de l’investissement dans la for-mation ? Nic Smol : “70 % de nos étu-diants poursuivent leurs recherches sur les nématodes et 50 % ont obtenu un docto-rat ou devraient l’obtenir prochainement. Lors de congrès internationaux consacrés à la nématologie, je rencontre souvent

Grâce à leurs nouvelles connaissances, les étudiants sont capables d’aider les paysans locaux à se

protéger contre les nématodes. Parmi les autres applications de la nématologie, on peut également

citer la recherche médicale fondamentale et les indicateurs de pollution.

Des formations universitaires

pour les pays en développement

Le master en nématologie compte parmi les

nombreuses formations universitaires dis-

pensées avec le soutien de la coopération

belge au développement. Les sujets sont

très variés : gestion des transports, techno-

logie alimentaire, économie du développe-

ment, écologie humaine… Des bourses sont

également prévues pour chaque formation.

Au total, près de 2.000 étudiants origi-

naires de pays en développement reçoivent

chaque année une bourse afi n de leur per-

mettre de suivre une formation universitaire

ou un doctorat.

POUR EN SAVOIR PLUS :Vous trouverez davantage d’informations

sur les sites néerlandophone et francophone

de la commission universitaire pour le

développement :

www.vliruos.be et www.cud.be.

Gand,centre mondial de nématologie

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d’anciens étudiants invités en tant qu’ex-perts ou orateurs. Nous essayons dans la mesure du possible de donner un coup de pouce à la recherche.” Les participants peuvent ainsi demander à la VLIR-UOS2

un kit de recherche contenant notamment un microscope.Le master proposé par l’Université de Gand est principalement suivi par des universitaires et des chercheurs employés par des instituts. Les universitaires donnent cours à l’université et transmettent ainsi leur savoir. Les instituts se consacrent quant à eux aux recherches appliquées ; les informateurs exposent les résultats aux petits paysans pour leur permettre d’apprendre à reconnaître et contrer une attaque de nématodes. “Aux Philip-pines, un étudiant a écumé les champs à la recherche de récoltes endommagées. Il a ensuite édité un tract qu’il a distribué aux agriculteurs.” Nic Smol avoue que les anciens étudiants devraient être mieux suivis, mais le budget n’est pas suffi sant. “Les étudiants originaires d’un même pays se cherchent rarement de manière sponta-née, ils ont besoin d’aide. Lors d’un séjour aux Philippines, j’ai réuni tous les anciens étudiants du pays. Ils vont à présent créer la‘Nematology society’ des Philippines. Une telle société est extrêmement importante. Tous les pays devraient en fonder une.”Ces ‘societies’ connaissent un vif succès au Brésil et au Vietnam.Un nombre plus restreint de participants sont issus des bureaux d’inspection doua-nière. Une multitude de pays interdisent l’importation de plantes infectées par des nématodes. Elle risque en effet d’entraîner des dommages considérables. Un type de nématodes néfastes pour les conifères a ainsi été introduit en Chine et au Portugal depuis le Japon. Peu de pays disposent de l’expertise leur permettant d’identifi er une contamination par des nématodes. Gand

leur offre alors la solution. “On peut affi rmer que Gand forme les futurs nématologistes du monde entier”, explique le professeur invité, le Néerlandais Thomas Been.

Au-delà de la connaissanceCette formation ne se limite toutefois pas à inculquer des connaissances. Les anciens étudiants de Gand retiennent surtout de cette expérience les contacts humains noués durant leurs études. La plupart n’avaient encore jamais quitté leur pays.

Dès leur arrivée, ils sont intégrés dans un groupe multiculturel extrêmement varié dont les membres tissent généralement des liens d’amitié solides. Ces étudiants découvrent le mode de vie occidental. Une formation internationale permet de se familiariser avec de nombreux domaines et constitue une étape marquante dans la vie de la majorité des étudiants.

CHRIS SIMOENS

ONLINEwww.pinc.ugent.be

1 Le “master” correspond à ce que l’on appelait ancien-

nement “licence”, donc au 2e cycle de l’enseignement

universitaire.

2 VLIR-UOS : Vlaamse universitaire ontwikkelingssa-

menwerking – La Coopération au développement uni-

versitaire fl amande.

Non, les nématodes ne sont pas des vers de

terre. Ce sont des vers ronds. Les plus petits

nématodes qui composent les 25.000 sortes

connues ne mesurent pas plus d’un milli-

mètre. Ces organismes sont présents partout

autour de nous : dans le sol, l’air, la glace, l’eau

chaude, les océans… Lorsque vous marchez

pieds nus sur la plage, des millions de néma-

todes grouillent sous vos pas.

Il existe plusieurs groupes de nématodes ;

parmi eux, les parasites. Ceux-ci vivent aux

dépens d’autres organismes. De nombreuses

récoltes agricoles en sont les victimes ; on parle

alors d’anguillules, mais ils peuvent également

s’attaquer à l’homme et aux mammifères. Un

second groupe vit librement et joue un rôle-clé

notamment dans la chaîne alimentaire et dans

les processus de décomposition des sols et

des sédiments dans les océans et rivières.

Nématodes

LA REMISE EN QUESTION D’IDÉES EST POSSIBLE

Ce ne sont pas les cours qui ont fait de moi un

autre homme, mais les personnes rencontrées dans

la résidence universitaire, dans le bus, lors de

fêtes d’anniversaire…

Eyualem Abebe (Éthiopie) a suivi le premier

master en nématologie à Gand. “Nous étions sept, c’était l’année-test”, explique-t-il.

Il vit et travaille aux États-Unis depuis 2002. “Mon exil

n’est toutefois pas le fruit d’un choix personnel. J’ai

soudainement été licencié par mon université en Éthio-

pie, la Bahir Dar University, pour des raisons politiques.

J’ai alors été contraint de trouver un autre emploi.” Il

garde cependant des contacts étroits avec l’Éthiopie.

Il connaît tous les anciens étudiants éthiopiens qui

ont suivi le master en nématologie à Gand. Il a même

créé un réseau informel. Dans la mesure du possible, il

apporte son aide par courriel : il envoie des documents

spécialisés (en Afrique, les magazines sont générale-

ment hors de prix), il aide à l’interprétation des résultats

et partage des idées et méthodes. Eyualem Abebe les

encourage à assister aux congrès les plus intéres-

sants. “L’impact que vous pouvez avoir ne dépend pas

de l’endroit où vous vivez.”

L’un des anciens étudiants occupe désormais le poste

de vice-ministre de l’agriculture en Éthiopie. Eyualem

Abebe le connaît très bien. “Jusqu’à présent, le pro-

blème des nématodes parasitaires intéressait peu les

autorités. Mais depuis qu’un ancien étudiant est devenu

ministre, les choses commencent à changer.”

Eyualem Abebe estime que les formations sont mieux

organisées dans les pays de l’hémisphère nord. “En

Éthiopie, personne ne peut remettre en doute la parole

d’un ancien. On ne peut donc jamais contester ce que

nous dit un politicien, un professeur ou un chef, que

ce soit vrai ou non. Quelle différence par rapport au

monde occidental ! Il n’y a qu’en envoyant des étudiants

à l’étranger que ces habitudes changeront progressive-

ment. Vous savez, ce ne sont pas les cours qui ont fait

de moi un autre homme, mais les personnes rencon-

trées dans la résidence universitaire, dans le bus, lors

de fêtes d’anniversaire… J’ai découvert une société dif-

férente. Une véritable démocratie est impossible dans

la tradition de mon pays. Et ne pensez pas qu’en Éthio-

pie, les gens se soutiennent plus qu’ici. Tel était peut-

être le cas il y a 30 ans, mais aujourd’hui, davantage de

personnes dépendent de ressources communes. Cette

situation entraîne plus de compétition et favorise une

société plus individualiste. Ici, on apprend en revanche

que la coopération est au fi nal bien plus bénéfi que.”

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Eyualem Abebe, avec sa femme et son

enfant, de nouveau à Gand, 20 ans après.

dimension 3 I JANVIER-FÉVRIER 2013 27

RECHERCHE

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28 JANVIER-FÉVRIER 2013 I dimension 3

UN PARCOURS

SINUEUX

VERS LES

BUDGET ALLOUÉ AU DÉVELOPPEMENT EN 2013 - PRÉVISIONS (en millions d’euros)

Préparation, accompagnement, évaluation 3

Coopération gouvernementale (CTB, aide budgétaire, prêts, Fonds belge pour la sécurité alimentaire…) 413

Coopération non gouvernementale (ONG, universités, établissements scientifi ques…) 249

Coopération multilatérale (Partenaires multilatéraux, FED, OCDE…) 495

Secteur privé (Société belge d’investissement pour les pays en développement, Commerce équitable…) 57

Aide humanitaire 160

TOTAL 1.377

Le conclave budgétaire du gouvernement, qui s’est tenu en

novembre 2012, a annoncé des restrictions budgétaires peu

réjouissantes pour le secteur du développement. Au fi nal,

100 millions d’euros ont été retirés. Comment ces restric-

tions seront-elles réparties et quelles seront leurs consé-

quences sur l’engagement de consacrer 0,7 % du RNB à la

coopération au développement ?

0,7%

TENDANCES

Aperçu des économiesLe montant total prévu pour la coopéra-tion au développement en 2012 s’élevait à 1,478 milliards d’euros, une enveloppe qui sera réduite de 100 millions d’euros en 2013. Le montant se répartit comme suit :• 40 millions d’euros de moins pour la coopération gouvernementale (CTB) :En 2013, la Coopération technique belge recevra 200 millions d’euros pour le fi nancement de ses interventions : pro-jets, programmes… La CTB est en effet chargée de la mise en œuvre de la coo-pération gouvernementale. L’enveloppe allouée est déterminée sur la base des dépenses réelles de la CTB au cours des années précédentes. Certains fac-teurs uniques, comme la présence de la CTB dans des pays où la situation est tendue, peuvent toutefois infl uencer ces dépenses. Ainsi, depuis 2012, plusieurs programmes ont été suspendus au Mali à cause du coup d’état.• 30 millions d’euros de cotisations volontaires en moins pour les organisa-tions partenaires multilatérales :

La Belgique dispose à l’heure actuelle de 20 organisations partenaires mul-tilatérales, dont cinq sont spécialisées dans l’aide humanitaire. Cette réduction de 30 millions d’euros s’appliquera aux quinze autres organisations actives en par-ticulier dans le secteur du développement comme la FAO ou l’UNICEF. L’adminis-tration et la cellule stratégique examinent actuellement comment répartir les 67 mil-lions restants entre les différentes organi-sations partenaires belges.• 15,5 millions d’euros de moins pour le Fonds européen de développement :L’Union européenne a même décidé de réduire la contribution demandée à la Belgique et destinée au budget pour le développement de l’Union, ce qui représente une économie directe pour la Belgique.• 13,5 millions d’euros de moins pour l’aide humanitaire :Celle-ci se voit allouer un budget pour pallier les crises et besoins dans le monde au cours de l’année. L’aide huma-nitaire disposera donc de moins de fonds en 2013.

• 1 million d’euros de moins pour les frais d’évaluation :La participation aux évaluations internatio-nales sera réduite, tout comme les mon-tants consacrés aux événements à grande échelle dans le cadre des résultats des évaluations.

En route vers les 0,7 %En 2002, le gouvernement Verhofstadt a décidé, à l’occasion du Sommet des Nations Unies de Monterrey, que le bud-get de la coopération s’élèverait à 0,7 % du revenu national brut à partir de 2010. Ceci s’est toutefois avéré impossible, mais la Belgique a souhaité faire en sorte d’atteindre ce chiffre en 2015, de concert avec l’UE.Quelle évolution constate-t-on dès lors ? En 2010, le budget de la Belgique s’élevait à 0,63 %, et à 0,54 % en 2011. En raison de la crise fi nancière, le gouvernement Di Rupo a décidé fi n 2011 de geler le budget alloué à la coopération au développement pour 2012 et 2013 au niveau de 2011. En 2012, les dépenses devraient fi nalement passer sous la barre des 0,50 %. Pour 2013, on prévoit un pourcentage exact de 0,50 %, soit 0,01 % de moins que ce que l’UE attend de ses États membres pour cette année.La Belgique serait-elle toutefois en mesure d’atteindre le taux de 0,51 % imposé par l’UE ? Oui, si elle parvient à dégager 25,5 millions d’euros supplémentaires. Une partie des recettes issues de la négo-ciation des quotas d’émission de C02 est visée. Ce montant serait investi dans des projets qui aideraient les pays en déve-loppement à s’adapter ou à lutter contre le changement climatique.Somme toute, les mesures d’économies sont relativement limitées en temps de crise. Le budget octroyé à la coopération non gouvernementale (ONG, universi-tés…) reste inchangé et l’objectif d’at-teindre 0,7 % est maintenu. Nous verrons bien ce que l’avenir nous réserve.

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Dans le monde entier, les

agriculteurs sont confron-

tés aux mêmes défi s : ils se

demandent comment par-

venir à vivre de leur produc-

tion agricole et de l’élevage.

Ce phénomène est une réa-

lité pour les paysans du Sud

mais aussi du nord, comme

en Belgique.

P artout, les agriculteurs cherchent des solutions pour faire face à ces défi s, et voilà pourquoi il est important qu’ils se rencontrent.

L’une des réponses possibles à leurs diffi -cultés, à la fois en Afrique et en Belgique, c’est la “chaîne courte”. C’est-à-dire, une relation directe entre le consommateur et le producteur, ce qui permet d’offrir des alternatives aux chaînes alimentaires agro-industrielles. Une relation directe qui per-met au consommateur de rétablir l’équi-libre : homme, animal, terre.Dans sa quête de solutions à portée internationale, l’ONG Vétérinaires Sans Frontières veut combler le fossé entre les agriculteurs et vétérinaires du nord et du sud. C’est avec cet objectif qu’elle a organisé un échange entre les paysans et vétérinaires du Rwanda et leurs homolo-gues de Belgique. Du 1er au 8 décembre 2012, un vétérinaire, deux agro-éleveurs et moi avons quitté la Belgique pour l’Afrique avec l’ONG afi n de vivre une expérience d’échange en matière d’éle-vage et de médecine vétérinaire. Parmi les plus notables, voici quelques-unes de mes impressions :• “Plusieurs milliers de kilomètres nous séparent ! Une rencontre improbable dans nos idées reçues. Cette rencontre vient pourtant d’avoir lieu en terre rwandaise ! En Belgique, une ferme moyenne c’est + 200 bovins et 55 hectares. Au Rwanda, c’est un hectare, quelques chèvres et lapins et, pour les plus favorisés, une vache !”• “Notre but, comme le leur, est de sub-venir à nos besoins, de vivre de notre travail. Leurs contraintes sont le manque d’infrastructures, de fi nancement, les diffi -

cultés d’accès à la terre, et le manque de moyens pour investir dans la modernisa-tion de leur agriculture !”• “Ce voyage m'a fait découvrir ce pays de plus de 80 % d›agriculteurs, pour 3 % chez nous ! Le contact avec Vétérinaires Sans Frontières et le partenaire local IMBARA-

GA m’a fait comprendre l’importance de leurs projets ! Grâce à eux, de nombreuses familles vulnérables ont reçu 2 chèvres et 2 lapins ; ce qui leur a permis de payer la mutuelle pour la santé des enfants, de manger, de vivre mieux ! De soigner les animaux ! Ce n’est pas les assister, mais bien un coup de pouce pour les sortir de la précarité !”• “Il est important de développer une agriculture adaptée, qui prenne en consi-dération la sécurité alimentaire, l’environ-nement, et qui nourrit ses travailleurs.”• “J’espère que la monoculture ne pren-dra pas le pas sur les cultures tradition-nelles ! Même si cela peut sembler ren-table au premier abord, la monoculture épuise les sols et le coût environnemental n’est pas négligeable ! De plus, les pays concernés par ce type de fonctionnement y ont perdu une chose capitale : la souve-raineté alimentaire.”• “Quel beau pays ! Mon désir est de m’in-vestir dans un projet de Vétérinaires Sans Frontières. Ce qui m’a touché, c’est de voir le bonheur d’une famille qui est sortie de la précarité grâce à l’aide de Vétérinaires Sans Frontières. C’est l’optimisme d’une association comme IMBARAGA qui croit en l’avenir de son pays. Merci à Vétéri-naires Sans Frontières pour cette mission passionnante et très enrichissante.”

Qui ?Christiane Collinet,

agricultrice à Mierchamps, près

de la Roche-en-Ardenne dans

la province du Luxembourg.

Présidente provinciale de l’Union

des Agricultrices Wallonnes,

elle travaille en outre deux jours

par semaine pour la province.

Quoi ?À participé à un voyage

d’échange entre éleveurs et

vétérinaires belges et rwandais,

organisé par Vétérinaires Sans

Frontières.

Pourquoi ?Dans le monde entier, les

agriculteurs sont confrontés

aux mêmes défi s. Ensemble,

ils peuvent trouver des

solutions pour y faire face.

Il est important de développer une agriculture adaptée, qui prenne en considération la sécurité alimentaire, l’environnement, et qui nourrit ses travailleurs.

AGRICULTEURS DU SUD ET DU NORD,

MÊME COMBAT

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SUR LES TRACES DE...

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AIDE D’URGENCE DANS LA BANDE DE GAZA

Grâce au fonds d’aide d’urgence

de la Croix-Rouge internationale

et du Croissant-Rouge (DREF,

Disaster Relief Emergency

Fund), la Belgique a contribué

pour 18.000 EUR à l’aide aux

populations victimes des opé-

rations militaires dans la bande

de Gaza. Les affrontements de

novembre ont entraîné la mort

de plus de cent quarante per-

sonnes et ont fait un millier de

blessés.

La nouvelle Loi sur la Coopération au développement en chantier

C omme par exemple l'émergence de nouveaux acteurs tels la Chine ou la Fondation Bill & Melinda

Gates, ou encore les grands défi s mon-diaux que sont le climat, l'environnement et la lutte contre le sida. La nouvelle loi accordera beaucoup d'attention à la

cohérence : elle veut éviter que les autres politiques menées n'anéantissent les bénéfi ces de la coopération au dévelop-pement. Les droits humains et le travail décent y occupent également une place particulière. Un prochain numéro vous présentera en détail cette nouvelle loi.

La nouvelle Loi sur la Coopé-

ration au développement est

presque terminée. La précé-

dente loi date de 1999. Dans

l'intervalle, beaucoup de choses

ont changé.

L es affrontements militaires et les frappes armées dans la bande de Gaza menées au début du mois de novembre ont entraîné

de graves conséquences pour les popula-tions civiles qui paient un lourd tribut à ce confl it. Plus de cent quarante morts et un millier de blessés ont été enregistrés durant ces hostilités. Dans la bande de Gaza, où la situation était déjà rendue compliquée par le blocus instauré depuis cinq ans par les autorités israéliennes, les médicaments essentiels ont manqué dans les hôpitaux, tout comme le carburant pour effectuer les transports sanitaires d’urgence. En outre, plus de 200 habitations privées ont été partiellement ou totalement détruites par les frappes aériennes.La Croix-Rouge internationale collabore étroitement avec le Croissant-Rouge pales-tinien et le Magem David Adom israélien.

Elle est en contact régulier avec les auto-rités palestiniennes et israéliennes et appelle les parties au confl it à respecter le Droit International Humanitaire, à proté-ger les civils et à garantir la sécurité des équipes médicales dans les hôpitaux. Plus de 200 volontaires se sont déployés dans la bande de Gaza pour assister les populations au cœur des affrontements. La grande majorité des victimes ont été trans-portées dans des ambulances du Crois-sant-Rouge palestinien, lequel a également fourni médicaments et kits médicaux aux hôpitaux. L’aide d’urgence a aussi consisté

à apporter un support immédiat à 300 familles -2.000 personnes - dont les habi-tations ont été démolies par les frappes aériennes, mais aussi à 27.000 personnes qui nécessitaient des soins et traitements médicaux. Cette assistance humanitaire impliquait également l’acheminement de 75.000 litres de carburant pour alimen-ter les 40 ambulances stationnées dans la bande de Gaza et du carburant sup-plémentaire pour le fonctionnement des générateurs de secours dans les hôpitaux et centres de santé.

JOËL TABURY

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Petite Dimension

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À l ’ issue du sommet, le 8 décembre 2012, le président Abdullah bin Hamad Al-Attiyah semblait très satisfait : “Doha a

ouvert une nouvelle voie vers une action plus ambitieuse et plus solide, la 'Doha Climate Gateway'.” Christiana Figueres, Secrétaire du Groupe d'experts climatiques de l'ONU, pour sa part, a exhorté les pays à mettre en œuvre dès que possible tous les accords convenus : “Parce que la porte va bientôt se refermer, rendant l’objectif de limitation du réchauffement climatique à moins de 2 °C inatteignable.”

Qu'a produit au juste cette conférence ?

1. Le Protocole de Kyoto est prolongé jusqu'en 2020. Il s'agit de l'accord inter-national visant à réduire les émissions mon-diales de gaz à effet de serre, notamment par l'échange de droits d'émission. Les États-Unis et la Chine n'ont à ce jour jamais participé, et voilà que le Japon, le Canada et la Russie quittent le navire. Seuls l'UE, l'Aus-tralie et quelques autres pays restent à bord. Ensemble, ils représentent à peine quinze pour cent des émissions mondiales de CO2. Par ailleurs, rien ne change en matière de limitation des émissions : une réduction de 20 % d'ici à 2020. C'est manifestement

insuffisant pour limiter le réchauffement planétaire à moins de 2 °C. L'UE a déjà qua-siment atteint cette limite.2. L'objectif reste de conclure un accord d'ici 2015 applicable à tous les pays à partir de 2020. Des solutions plus ambitieuses seront également recher-chées afi n de réduire les émissions, ce qui nécessitera de nombreux ateliers. En 2014, le Secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon convoquera séparément tous les dirigeants du monde entier pour s'assurer de la conclusion d'un accord en 2015.3. De nouvelles infrastructures permettront de transférer la tech-nologie et les fonds aux pays en

développement : un Fonds vert pour le climat en Corée et un Centre de technolo-gie climatique du Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUD).4. La promesse a été réitérée de mettre à la disposition des pays en développement d'ici à 2020 la somme de 100 milliards de dollars pour leur permettre de s'adapter et de lutter contre le changement climatique. Pour tenir jusqu'à 2020, plusieurs pays dont l'Allemagne, la France, le Danemark et l'Union européenne - sans la Belgique – ont promis 6 milliards de dollars. Là où les pays en développe-ment exigeaient 20 milliards.5. Restent enfi n une série de résultats mineurs, tels que l'identifi cation des moyens de mieux armer les populations vulnérables contre le changement clima-tique et la résolution de mettre au point des technologies destinées à aider les pays en développement à réduire leurs émissions.La plate-forme belge Justice climatique s'est dite déçue: “Si le Protocole de Kyoto a été prolongé, les résultats des négocia-tions ne freineront guère le changement climatique.” Par conséquent, elle demande à l'Union européenne d'inscrire au Proto-cole un objectif de réduction de 30 %. Les fi nancements au-delà de 2012 sont jugés dérisoires et la situation inacceptable. “Il est inconcevable que les pays industriali-sés abandonnent jusqu'en 2020 les pays en développement face au changement climatique.” La plate-forme Justice clima-tique qui est coordonnée par 11.11.11 et le CNCD-11.11.11 et regroupe diverses organisations, dont Oxfam, le CADTM, les syndicats, Greenpeace et le WWF, met en garde contre un réchauffement irréver-sible de 4 °C ou plus.

CHRIS SIMOENS

ONLINE :www.cop18.qa

www.11.be

www.cncd.be

Il aura fallu une prolongation de 27 heures pour que les quelques 7.000 participants offi ciels à la

18e Conférence sur le changement climatique de Doha (Qatar) parviennent à dégager des résultats.

“Une avancée modeste mais importante dans la bonne direction”, a déclaré le secrétaire d’Etat à

l'Environnement Melchior Wathelet. Les ONG, elles, évoquent plutôt une coquille vide.

L'ACCORD DE DOHA sur le climat n'arrêtera pas le réchauffement

© UN Cop18/CMP8

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N C

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18/C

MP

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Le Président Abdullah bin Hamad Al-Attiyah

(droite) aux côtés de Christiana Figueres,

secrétaire du Panel Climat au Sommet de Doha.

Marche de protestation à Doha.

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Le sida au RwandaEXPOSITION DE PHOTOS À LA CTB

En septembre 2010, la photographe Ans Brys est partie

au Rwanda pour y observer comment les Rwandais font

face au VIH/sida. Découvrez ses remarquables photos

exposées au siège de la CTB, jusqu'au 28 février 2013.

Plus d'informations sur le VIH/sida en pages 24 et 25.

CTBrue Haute 147, 1000 Bruxelles

Les jours ouvrables, de 8 à 17 heures

www.ansbrys.com

Dans le sud du Rwanda, un villageois va se soumettre à un test de dépistage du VIH/sida.

Des tests et des informations sont mis gratuitement à disposition des villages rwandais

par l'organisation Ubuzima. Les résultats sont annoncés le jour même, dans un entretien

personnel le personnel infi rmier. Cette annonce est suivie d'une fête, tout le monde danse

et chante. Les (quelques) personnes qui ont été testées positivement participent également,

pour que le résultat de leur test ne soit pas connu des autres villageois… Bien que

l'épidémie se soit stabilisée depuis 2005, 3 % des Rwandais vivent toujours avec le sida.

DGD - DIRECTION GÉNÉRALE

COOPÉRATION AU DÉVELOPPEMENT

ET AIDE HUMANITAIRE

Rue des Petits Carmes 15 • B-1000 Bruxelles

Tél. +32 (0)2 501 48 81

E-mail : [email protected]

www.diplomatie.be • www.dg-d.be