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LE LIVRE D'HEURES DE MARGUERITE DE VALOIS S OE UR 0F. FRANÇOIS l er CONSERVÉ AU MUSÉE DU LOUVRE PAR AMIDE BOINET Associé correspondant national de la Société des Antiquaires de France. EF.tralt des Mémoires de la Socidte nattonale des AnuquafreS de France, t. LXV. 1<4, ^9c0 PARIS BBUOTQ 1906 \J CHP Document il il il il il I l i 1111111 II il Il 1 Ili 0000005776221

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LE LIVRE D'HEURES

DE

MARGUERITE DE VALOIS

SOEUR 0F. FRANÇOIS l er

CONSERVÉ AU MUSÉE DU LOUVRE

PAR

AMIDE BOINET

Associé correspondant national de la Société des Antiquairesde France.

EF.tralt des Mémoires de la Socidte nattonale des AnuquafreSde France, t. LXV.

1<4, ̂9c0PARIS BBUOTQ

1906

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LE LIVRE l)'H EU RES

DE MARGUERITE DE VALOIS

SOEUR DE FRANÇOIS 1er

CONSERVÉ AU MUSÉE DU LOUVRE

Parmi les quelques manuscrits que possède leMusée du Louvre, il en est un sur lequel on n'alias suffisamment attiré l'attention jusqu'ici et qui,par son intérêt historique, mérite d'être connu.C'est un livre d'heures exécuté pour Margueritede Valois, soeur de François Ce volume a appar-tenu au xix siècle à la duchesse de Berry' et futacquis, à la vente de ses livres en I 86', par l'ad-ministration (lu Musée en même temps que lecélèbre livre d'heures de Catherine de Médicis.Il est (l'une assez petite dimension (Oi 74 sur0 m 098) et contient 85 feuillets. Les miniaturesqu'il renferme, au nombre de 29, ne sont intéres-

1. Le nom de la duchesse de Berry se lit en tête sur unedes feuilles de garde. La reliure, de maroquin rouge avecfers dorés, ne paraît pas antérieure au xvIi 0 siècle.

2 ri: LIVRE D'HEURES

sanies (lue pal' les portraits qu'elles nous offrent,car leur exécution même n'est pas toujours d'ungoût parfait et. témoigne d'une époque où l'art depeindre les manuscrits commençait îk tomber (,ildécadence.

L'histoire (In portrait au XVIe siècle a été, depuisquelque temps, l'objet d'études suivies, en parti-culier depuis l'Exposition des Primitifs françaisde 1901. Aussi avons-nous pensé que le livre deprières de Marguerite de Valois méritait d'êtreétudié d'assez près'.

En tète du volume, on lit, tout d'abord, le titresuivant « Orationes (levotissime ad illustrissi-marri piisSimamque domiriam ciiristianissimi Fran-corum i'cgis matreni dedicate. » Ce titre estd'une cordelière dont ks deux bouts sont réunispar un cartouche sur lequel on a placé l'initiale Ldu nom de Louise de Savoie.

On pourrait croire, d'après cette inscription,que le manuscrit a été exécuté pour la mère deFranc ois r Il n 'en est rien. La plupart des mi-niatures offrent en effet un portrait de Margue-rite de Valois. En outre, une petite peinture, audernier feuillet, nous montre un homme agenouilléfaisant hommage du livre à cette même princesse(pi. I). Celle-ci est assise, tenant sur ses genouxun travail à l'aiguille. A ses côtés est Ufl petit

1. Barbet de Jouy. dans son Catalogue du musée des sou-verains (p. 93 et suiv., est le seul auteur qui ait donné unenotice de ce manuscrit.

miTik

pI_ I

HOMMAGE D'UN LIVRE D'I1EtRE A MARGUERITE DE VÂLOIS.

(Musée du Louvre.)

0E MARGUERITE DE V4LOIS, 3

panier avec des pelotes de laine. Une large ban-derole contient ces mots

« III ustrissima pi issimaque domina, liex chris-tianissimus germanus tuus, diviiio usus exemploin psalmo notato, humilia respiciens a terra meinopem et de stereore, tua clementia intercedente,erexit pauperem interque populi sui judices collo-cavit, pro quo su tibi spes et remuneratio. IhesusDeus latidetur. »

Quel est ce juge reconnaissant (lui remercieMarguerite d'avoir intercédé l)0U1 lui auprès duroi? II nous parait bien difficile de le savoir, et lesrecherches que nous avons fites à ce sujet ne nousont pas permis de l'identifier.

A l'époque où ce livre a été exécuté, Margue-rite de Valois était duchesse d'Alençon, car sonmari, le duc Charles (mort en 1525), figure avecelle dans une miniature au fol, 18. En outre, sonfrère était roi de France'. S'il faut s'en fier auportrait qui le représente au foi. 2 et dans lequelil parait avoir de vingt-cinq à trente ans, il est vrai-semblable ( l ue le manuscrit a été exécuté entre1520 et 1525. A cette époque, Marguerite avaitdans les environs de vingt-huit ans.

Le texte proprement dit comprend l'office deJésus-Christ', les fleures de la Vierge, les sept

1. Comme l'indique la k'gende de la petite miniature quiest au verso du premier feuillet et que nous transcrivonsci-dessous.

2. Le commencement de cet office manque. Un feuillet a

4 LE LIVRE; D'HEURES

oraisons du pape Saint-Grégoire, les sept psaumes(le la Vierge, suivies de diverses prières, le psau-tier de saint Jérôme et l'office de saint Martin.

Voici maintenant la description des miniatures.Nous insisterons sur celles qui ont un intérêt aupoint de vue des portraits.

Au verso du premier feuillet on a figuré l'enfantJésus et au-dessous les armes de France, le toutcompris dans un encadrement (le style antique quise retrouve presque à chaque grande peinture.Dans cet encadrement, on lit les mots « lhesus spesmea » qui sont répétés très souvent aux autrespages. Sur la banderole que portent les deuxanges placés de chaque côté (les armoiries, on ainscrit la devise : « O nobile ternarium regis,matris et sororis, unum est desiderium. »

La miniature suivante (fol. 2) offre trois por-traits intéressants (pi. II). Au premier plan sontagenouillés, les mains jointes, François Ir etLouise de Savoie. Le roi est nu-tête, vêtu d'unriche manteau à fourrure. Sa mère, la tête coifféedu chaperon à templette, porte une robe dont lesmanches sont aussi garnies de fourrure. A côtésont figurées, d'une part, les armes (le France

été arraché (fol. 3 primitivement). Le texte de tout lemanuscrit est écrit en minuscules avec petites initialesd'or ou de couleur et toujours encadré d'une cordelière.Sur trois côtés de cette cordelière sont inscrits les troismots Jesus Spes mea que nous trouvons également à chaqueencadrement de miniatures. Au bas des pages est un petitcartouche avec la lettre M (initiale du nom de Marguerite).

PI. II

FRANçols I, LOUISE flE SAvOIE El' MAR(UES1'N Dr \TALOTS.

(Livre d'heures de Marguerite de Valois. Musée du Louvre.)

PI. III

EORTRAI1 Ifl M.uuuiiiii UE \ALOI.

(Livre d'heures le Marguerite de Valois. Musée du Louvre,)

DE M.tIII.UERITE DE VÂLOI.

pour François 1er, d'autre part, les armes mi-partiede gueules à la croix, d'argent (de Savoie), mi-par-tie de France au lambel d'Orléans, chaque piècedu lambel chargée d'un croissant d'azur (armesdes comtes d'Angoulême) pour Louise de Savoie.

Au second plan, derrière son frère, se tientMarguerite de Valois, dans le même costume quesa mère. Ses armes, mi-partie de France, mi-par-tie de France n la bordure de gueules chargée (lehuit hesans d'argent (d'Alençon), sont aussi àcôté (l'elie.

Au-dessus des trois personnages flotte une ban-derole sur laquelle est la légende : « Menti verbafkles et mentem jungit Olimpo. » Plus haut appa-raît l'enfant Jésus clans des rayons. La scène estcomprise dans un encadrement purement renais-sance où on lit Ihesus spes mea, comme pré-cédemment'. Une autre banderole, à la partieinférieure, porte les mots « Igneus vigor est illiset celestis origo. »

Au verso du même feuillet se trouve, en tête del'office de Jésus-Christ, le portrait de Margueriteseule (pl. III). Toujours clans le même costume,elle est agenouillée, en prières, sous une sorte dePortique à l'antique donnant sur un paysageaccidenté. A gauche, on remarque son blason etune banderole sur laquelle nous lisons In tesperavi, non confundar in eternum. »

4. Pour les miniatures qui suivent, cet encadrement varietrès leu.

LE LIVRE D'HEURES

Les peintures qui suivent n'offrent d'intérêt,comme nous avons dit, que parce qu'elles pré-sentent presque toutes un portrait de Margueritede Valois. La princesse assiste à la scène dans uncoin, agenouillée, adressant quelques mots deprière inscrits sur une banderole. C'est ainsi quedans l'adoration des bergers (fol. 4 y0), nousavons les mots : « Fac nie, Domine Ihesu, in teconfidere et non derelinquar in eternum. »

Les sujets des autres miniatures sont : la Viergeet l'enfant Jésus (fol. 9), Jésus au milieu des doc-teurs (fol. li y0), la Transfiguration (fol. 15 v°),l'enfiint Jésus au milieu d'anges musiciens(fol. 17 V0 , petite miniature).

Au fol. 18 sont représentés, sous un portiqueouvrant sur la calilpagile, Marguerite et son marile duc d'Alençon, Charles IV, à genoux et priant(pl. IV). Au-dessus d'eux parait dans les nuagesl'enfont Jésus entouré de têtes d'anges. Sur deuxbanderoles on lit, pour le duc : « Adjuva nos ck-mentissiine lesu et salvi erinius », et pour la du-chesse: « Non confhndas nos, clernentissime Ihesu,ab expectatione nostra. » Leurs armoiries sont.au bas de la miniature.

Les peintures qui suivent représentent : sainteAnne et Joachim (fol. 18 y0 ) : un ange tientune banderole sur laquelle sont les mots« Gaudere et letare, prolem haberis »; la irais-sauce de la Vierge (fol. 20 y0); l'Annonciationfol. 22), la Visitation (fol. 23 y0 ); l'annonciation

PI. IV

CHARLES IV, uuc DALENÇON, ET MARGTJERTTE DE VALOIS.

(Livre d'heures de Marguerite de Valois. Musée du Louvre.)

Pl. V

SAINT MARUN I'IITAGEANÏ SON \I.I•:AI.

(Livre d'heures de Marguerite de Valois. Musde du Louvre)

DE M 5i;UER1'fE iii: VLOIS. 7

aux bergers (fol. 25) la mort de la Vierge (toi. 27);l'enfnt Jésus sur le globe du monde (fol. 29,petite miniature); la messe (lu pape Grégoire(roi. 29 y0); saint Bernard, premier abbé de Clair-vaux, priant devant, la Vierge et Jésus (fol. 37 y0)

les macérations de saint Jérôme (foi. 62, petiteminiature) : k saint est à genoux, presque nu,devant un crucifix, le lion est à ses côtés.

L'office de saint Martin est orné de neuf mninia-turcs de dimension Plus OU IllOiflS grande : saintMartin ayant pitié d'un lièvre poursuivi par (leschiens (fol. 77 VO); donnant, près de la ported'Amiens, la moitié de son manteau à un pauvre(fol. 78, pl. V); retirant les chaussures de sonserviteur (fol. 79); apparition à saint Martin deJésus-Christ portant la moitié du manteau qu'ilavait donnée au pauvre (tl. 79 y0), le saint gué-rissant les infirmités des malheureux (fol. 80 y0);

sa communion (fol. 81 y0); sa mort (fol. 82 y0);

la prière devant son tombeau (fol. 83 y0 ) et enfinson apparition après sa mort (fol. 8 . y0).

Au point de vue iconographique, quelques-unesde ces peintures peuvent avoir un certain intérêt,comme les scènes relatives au pape Grégoire, àsaint Bernard, à saint Jérôme et à saint Martin.

Cette description donnée, il nous faut dire un

1. Sur la banderole on lit : « Beatissime Bernarde,implora apud Deum matremque ejus (lulcissimam me deco-rari nomine materno. » On sait que Marguerite n'eut pasd'enfants de son premier mariage avec te duc d'Alençon,qui mourut le 11 avril 1525à l'ige de trente-sis ans.

LE LIVRE D'HEURES

mot maintenant de la valeur des portraits que ren-ferme notre manuscrit. Avouons tout d'abordcltI '('n général les personnages ne sont guère flat-tés et que leurs traits sont loin d'avoir cette finessequi caractérise par exemple les charmantes minia-tures du livre d'heures de Catherine de Médicis.François I, contrairement à ce que l'on remarquedans certaines peintures, n'est certes pas embelli.Il en est de même pour sa soeur Marguerite. Cesdéfauts d'exécution ne doivent cependant pasnous tire dédaigner ces portraits. Nous allons voirqu'ils méritent à plusieurs titres notre attention.

On sait aujourd'hui, et Ni. Dimier l'a montré plusd'une fois, (lue des miniatures du XVI t siècle repré-sentant certains personnages avaient été faitesd'après des crayons que nous possédons encore.Dès lors, il nous parait intéressant de recherchersi cette constatation petit, se thire pour le livred'heures de Marguerite de Valois.

Le portrait (le Louise de Savoie est à compareravec celui qui se trouve an fol. 2 y0 du livred'heures de Catherine de Médicis et dans lequella mère de François Pt est en buste de trois quartsà gauche, sans les mains, en habit de veuve.Comme l'a indiqué M. Dimier, cette miniature aété exécutée d'après un crayon original, souventreproduit et dont oit a des copies dans les recueilssuivants :recueils du Cabinet (A de Bouchot.'),

L Na 21, fol. 7 (Cabinet des Estampes). Assez bonne

DE MÂItGUEIIITE 0E ', 1tJ1.

n° 2!; de la Sorbonne (C du même 4 ), preniHirecueil (hi Louvre, 0j ; deuxième recueil du Louvi(O 33516) Valori (bibi. de Lille), femmes, u° 1Béthune (à Chantilly), 110 i; 1)estailleur (à Chaii-tiiiy), n° 1. Oit sait que Gaignières a possédé lemême portrait en peinture, copié dans son recueildu Cabinet des Estampes (Oa 15, foI. 59). M. Mai-Lin. a signalé une autre copie (]airs une mminlur(du manuscrit 4.009 de l'Arsenal, exécutée en 1518environ 2

Il n'est point douteux que le portrait du livred'heures de Marguerite de Valois ne dérive dumême original. En le comparant, par exemple,avec le Crayon du recueil du Cabinet, il est facilede s'en rendre compte, surtout si on examine avecattention les détails du costume et de la coiffures.

Paulin Paris et certains érudits ont cru voird'autres portraits de Louise de Savoie dans lesmanuscrits 144, 145, 221, 421, 985 et 5715 dufonds français de la Bibliothèque nationale. Leuropinion ne doit pas être acceptée sans réserves.

copie. Cf. il. Bouchot, Les portraits as crayon des XVIeXVII' siècles conservés à la Bibliothèque nationale, p. 134.

1. Na 26, fol. 5 (copie très médiocre).2. Notes pour un Corpus iconu,n du moyen âge (Mémoires

de la Société des Antiquaires de France, 1900, p. 49, pl. IV).3. Il existe à l'Ermitage de Saint-Pétersbourg un crayon

représentant Louise de Savoie qui, sans doute, appartient àla mème famille que ceux qui viennent d'être cités. Cf.Bouchot, op. cit., p. 387. On conserve aussi au chàteau deBeau regard un tableau qu'il serait intéressant de comparer(ibid.. p.

4) LE LIVREII}:tBEs

La très nlé(liocre grisaille qui est Cfl tète du nis. I 4h.Triomphe des vertus de Pétrarque) ne nous offre

nullement, comme l'a prétendu Paris 1 , les figures(le Louise de Savoie, de François l r et de Margue-rite (le Valois. Il en est de même pour le ms. 1 1-5Chants royaux du i'uy d'Amiens), oflèrt en 1517

Mi 1 51 8 ù la mère du ro i 2 Quant aux mss. M.Remèdes (le l'une et l'autre fortune de Pétrarque,

et 985 (Vie de Notre-Daine en quatrains), ils neméritent pas non plus de nous arrêter3.

Le ins. 421 (Le trépasseinent de saint Jénhne)il plus d'intérêt. Voici ce que dit P. Paris « Lapremière miniature.., nous offre la figure entière(le Louise de Savoie, vêtue d'une robe noire four-rée et la tête couverte d'une robe noire. Elle estt genoux devant une femme vètue d'une robeManche dont les avant-bras sont gonflés. Cette(lame, allégorie de la Foi, prend un livre que luiiend une main sortant (les nuages'. » Nous avons(ertainement ici un portrait dont l'exécution estloin d'être sans valeur. Cette miniature peut êtrerapprochée utilement de celle qui est en tête duOis. 5715 (Gestes de Blanche de Castille, reine deFrance, oeuvre dédiée à Louise de Savoie jar

I. Les manuscrits francois de la Bib1iohèque du Roi, I,

Ibid., E, p. 297.Ibid., II, p. 228, et VII, p, 398. Dans le ms.

I'. Paris reconnaît à tort Louise de Savoie sous la figure dela Fortune.

Ib.. 1V.

DE MARGUERITE DE FALOIS. Il

Estienne Le Blanc). Signalons aussi dans le ms.lat. 8396 une composition allégorique datée de15 ,12 ou figure François 1er, encore comte d'Angou-lême, à l'âge de dix-huit ans, amené au Christ parLouise de Savoie. Citons enfin un fragment demanuscrit au Musée de Cluny (n° 1 815, Ron-deaux sur les Vertus), où celle-ci est encore plu-sieurs fois représentée.

Telles sont les brèves indications que nous avonscru deoir donner sur les portraits que nous con-naissons de Louise de Savoie. Il est intéressantde constater que celui du livre d'heures de Margue-rite de Valois appartient à une série nettementdéfinie dont nous n'avons plus malheureusementl'original.

Si nous passons maintenant au portrait de Fran-jar, il nous parait difficile d'en trouver le proto-

type ou au moins une copie directe. Les portraitsde ce prince sont, on le sait, fort nombreux. Nousne prétendons pas en donner ici une liste complète;nous nous bornerons à citer les principaux.

Nous rappellerons tout d'abord que le livred'heures de Catherine de Médicis renferme cieuxPortraits identiques dans lesquels le FOI (le Francefigure en David de trois quarts à gauche avec les

I. Cette peinture, attribuée à Barthélemy Guéty, ditGu yot, a été reproduite par R. de Maulde la Clavière dansLouise de Savoie et François fer (Paris, 1895, in-8°(, mais Yau-Leur y voit Marguerite de Valois au lieu de LouisedeSavoie, ce qui est une erreur certainement.

12 LE LITRE D'HEURES

mains. Ils dérivent d'un original dont des copies,pour ce qui regarde le visage, se trouvent à Chan-till y , au Louvre et au Cabinet des Estampes et quia servi pour une peinture du roi à cheval actuelle-ment aux Offices de Florence (n'667). . Le Musée deLyon possède un portrait en buste qui est la réplique(l'un autre original dont (le nombreuses copiesexistent à Chantilly, à la collection Wallace, auLouvre, etc.. •2 Ajoutons que dans le nis. fran-çais 2848 de la Bibliothèque nationale (Recueil dearois de France de Jean du Tillet), le roi est figuré(Jeux fois (fol. 150 u' et v°, à l'àge de vingt-cinqans environ et de quarante-cinq à cinquante.

Rien ne rappelle dans toutes ces peintures ouminiatures le portrait de notre manuscrit. Il noussemble donc hors série pour ainsi dire, ce qui,cela va s'en (lire, ne peut que lui donner plus devaleur.

Nous avons dit précédemment qu'au fil. 18 setrouvait représenté le (lue d'Alençon. Uri examenmême rapide de la miniature nous révèle de suitequ'il ne peut être ici question d'un portrait, caril n'y a aucun caractère individuel dans la figure3.

1. Cf. [)imier, Le livre d'heures de Catherine de Médicis,p. 15 (extrait du Bibliographe moderne, 1904), et du mêmeLe portrait du ZV/° siècle aux Primitifs français. Paris, 1904,n-8°, p. 13-14.

2. Cf. Dimier, Le portrait du XVie siècle, p. 20.:3. Nous ne connaissons d'ailleurs aucun portrait du duc

Charles.

Iii\? , ni; rIR!IIII

On sent (lue l'artiste n'avait aucun modèle i sadisposition.

Il nous reste à parler des portraits de Margue-rite de Valois sur lesquels on nous permettra dedonner un peu plus de détails. Nous indiqueronstout d'abord les miniatures proprement dites.

Le livre (k prières du Musée du Louvre n'estpas le seul volume qui ait, à notre connaissance,appartenu à Marguerite de Valois. M. Delisle nindiqué plusieurs manuscrits qui firent partie descollections de cette princesse 1 . Nous cii retiendronsdeux. Le premier est ii la bibliothèque de l'Arse-nal (11° 5096). Il est intitulé : « Initiatoire instruc-tion en la religion chrestienne pour les enffans » etparait avoir été exécuté vers 1527". Au premierfeuillet est une miniature représentant Henri d'Al-bret, grand-père du roi Henri TV, au milieu d'unjardin, cueillant une marguerite pour l'offrir à salemme Marguerite de Valois. Au-dessous desarmes du roi de Navarre, 0H lit sur une banderole:« hiveni unam j)reeiosam margaritam quam intiinocorde collegi. » Au verso du même feuillet est uneautre miniature où l'on voit Jésus-Christ agenouillé,portant sa croix et suivi d'une foule d'autres per-soninages portant comme lui une croix. Au l)Le-

1. Le Cabinel des manuscrits, t. I, p. 187.2. Ce manuscrit a appartenu à Gaignières. On en trouve

une description assez dtai1Iée dans l'édition de I'lleptame-ron par Le houx de Lincy. Paris, 1880, 4 vol. in-8°; t. I,Ji. 198-199.

I . ii;1,1VL IiI11 1:1 lIE-

inier rang se trouve Ilenry d'Albret, Charles d'Al-bret, son frère, et Marguerite. On a cru voir dansce manuscrit des portraits de ta reine de Navarre',mais une comparaison attentive avec les peintureset cra yons du temps qui nous sont conservés etque nous indiquerons ci-dessous nous oblige àdéclarer que cette affirmation ii 'cst guère soute-tiable.

Le second manuscrit (lue nous avons à signalerest une traduction du Myroer des dames par« maistre Isamberd de Sainct Léger, prestreBibi. uiat., fr. 1 1 89). Il a été incontestablenientpre-

senté par ce dernier à la reine Marguerite, commel'indique une souscription qui est à la fin. En têteest une miniature représentant l'hommage du livreù la princesse 2 . Celle-ci est assise et, reçoit l'ou-vrage des mains mêmes de l'auteur. il y a certai-nement ici un air de ressemblance entre la figurede Marguerite et les portraits que nous connais-sons d'elle. Bien que l'exécution ne soit pas depremier ordre, il est cependant intéressant deluire remarquer que le miniaturiste a voulu êtrefidèle à la réalité. Il n dit copier un crayon ori-ginal ou s'inspirer au moins d'une copie'.

1. Cf. Le Roux de Linoy, op. cit., t. I, p. 198199, et.Henry Martin Les miniaturistes à l'exposition des Primitifsfrancais, dans Bulletin du bibliophile, 1904, p. 377.

2, Elle a été reproduite dans Petit de Julieville : Histoirede la langue et de la littérature francaise, t. III, pi. IV.

3. Ce portrait pourrait appartenir à une série dont nousparlerons plus Loin et dont l'original est à Chantilly.

II1)E M .tRGUERITE ni; vuois. 15

Ou a voulu voir un portrait de Marguerite,assez jeune, dans une miniature d'un exemplairedes Échecs amoureux ( BibI. nat., fr. 1 43), exé-cuté pour Louise de Savoie, sans doute pour l'édu-cation (le ses cieux entants 1 . L'auteury est repré-senté assis et, à la partie supérieure, à droite,remarquent, autour (l'un échiquier aux armes d'Or-léaiis, un jeunejeune IÏOITIIIIC VU de dos et une jeunefille. Derrière celle-ri se tient un homme, d'un àgemûr, tenant un chien en laisse et paraissant s'in-téresser à la partie. Paulin Paris 2 déclare que « toutporte à croire que cette miniature représente lejeune François, Marguerite, sa soeur, depuis reinede Navarre, et enfin Artus de Gouflier. ., gouver-rieur des eiifnts du comte d'Angoulême ». Nousne pouvons guère nous prononcer pour le jeuneFrançois, car son visage est totalement invisible,niais, pour sa soeur, il est de toute évidence quenous ne sommes pas en présence d'un portrait,[)as plus que dans le volume de la bibliothèque (kl'Arsenal.

Pont, terminer ce qui concerne les manuscrits,il nous fiut dire un mot du délicieux portrait deMarguerite (le Valois qui se trouve dans le livred'heures dit. de Catherine de Médicis, conservé auMusée du Louvre (fol. 151 0)3. Notre princesse

I. Cf. P. Paris, Les manuscrits françois de la Bibliouhèqucdu Roi, t. I, p. 279-281.

2. Op. cil., P. 281.3. Cf. Dimier, Le livre d'heures de Catherine de Médicis,

P . 12.

16 LE LIVRE 14'TIEURES

est représentée en âme pénitente, debout, tenantUri miroir, par allusion au Miroir de l'âme péni-tente qu'elle composa. Cette miniature, (J1.11 serecommande par son extrême finesse, a été rap-portée dans un blanc mis exprès. Sur une gardeajoutée on a mis, au XVIIC siècle, l'inscription sui-vante « Marguerite d'Orléans', duchesse d'Alen-çon et depuis royne de Navarre, soeur de Fran-çois ir et grand'nière du roi Henri 1V. »

Le crayon original (le cette miniature (entendonspour la figure seulement) est conservé à Chan-tilly (encadré dans la galerie de Psyché). Il estattribué à François Clouet. La peinture faite d'aprèsce crayon se trouve au même endroit (n° 262,ancienne collection Lenoir) 2, Le Cabinet desEstampes de la Bibliothèque nationale possède tinautre dessin aux crayons de couleur provenant.(le la bibliothèque Sainte-Geneviève, et en touspoints semblable à celui de Chantilly'. On peutencore citer des copies datis (les recueils deseconde main conservés à la Bibliothèque nationaleet aux Arts et Métiers. Dans Lotis ces portraits,Marguerite de Valois, alors reine de Navarre, estâgée d'environ cinquante nus. Elle est représentéeen buste de trois quarts à gauche, tenant un épa-

1. Confusion pour Marguerite de Valois ou d'Angoulême.2. Cf. F.-A. Gruyer, La peinture au chdteau de Chantilly.

École française, p. 67-70.3. Cf. Bouchot, o». cil., p. 20J.4. Cabinet des Estampes, Ne 30.5. T. I, n° 11 (ane. n° 12).

7T:DE MARGUERITE DE MOIS. 17

gneul. Elle porte un chaperon et un collet de four-titre. On ne saurait trop vanter la perfection ducrayon de Chantilly et de la miniature du livred'heures de Catherine de Médicis.

Le Cabinet des Estampes possède encore, dansdes recueils du XVIe siècle, des crayons représen-tant Marguerite de Valois. Bien que leur exécu-tion, du moins pour deux d'entre eux, soit assezmédiocre, ils ont pour nous le plus grand intérêt.On voit eu effet qu'ils ont été exécutés, commeles portraits de notre manuscrit du Louvre, d'aprèsun même original que nous ne connaissons plusaujourd'hui. On s 'en rend compte aisément enobservant, par exemple, les détails (lu costumeet de la coiffure. Ces crayons, au nombre de trois,se trouvent dans les recueils A ou du Cabinet,B OU Brisacier 2 et C ou de la Sorbonne 3 . Le pr-mier est de beaucoup supérieur aux deux autres.

Cette constatation d'une copie d'un crayon parun miniaturiste, constatation (lue flOUS avons d'ail-leurs déjà faite pour le portrait. de Louise de Savoie,ne donne que plus de prix au manuscrit que nousvenons d'étudier. Bien que les peintures qu'il ren-ferme soient loin d'avoir la valeur artistique decelles du livre d'heures de Catherine de Médicis,

1. Na 21, fol. 18 (date de 4530-1537). Reprod. par Niel,Portraits des personnages français les plus célèbres du .1 VIe s.Paris, 1848-56, in-fol., t. II. Cf. Bouchot, op. cit., p. 209,

2. Ne 40, fol. 217 (collection Lallemant de Betz, dited'Uxelles) (1530-1570?). Cf. Bouchot, op cil., p. 209.

3. Na 26, fol. 4 (1530-1570?). Cf. Bouchot, op. cit., p. 209.2

"J

18LE LIVRE D'HEURES DE MARGUERITE DE VÂLOIS.

elles n 'en ont pas moins un caractère documentaireet historique indiscutable. De plus, elles nousoffrent des portraits de Marguerite de Valois quisont les plus anciens que nous connaissions pré-sentement. Nous avons vu en effet que le volumeavait été exécuté entre 1 520 et 1525 et on sait,d'autre part, que Je premier cii date des troisrecueils cités à l'instant, celui du Cabinet, a étécomposé entre 1530 et 1537.

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Nogent-le-Rotrou, irnpr. DAUPELET-GOUVERNEUR.