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Le malade sait-il ce qui est bien pour lui ?

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Page 1: Le malade sait-il ce qui est bien pour lui ?

Kinesither Rev 2014;14(149):1–2 Éditorial

Le malade sait-il ce qui est bien pour

lui ?

Do patients know what's good for them?

Remi Remondière(Membre du Comité derédaction, modérateurdu Groupe d'intérêt enSanté publique de laSFP)64, boulevard Vincent-Auriol, 75013 Paris,France

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Lorsqu'un malade est sur la voie de la guérison, il est légitime que le professionnelde la santé s'attribue intérieurement les mérites du résultat. Cependant, untraitement personnalisé doit tenir compte au plus près de certaines caractéristiques

du malade.Grâce à l'internet, aux associations de malades et aux réseaux, le malade est informé sur samaladie et ce pouvoir récemment acquis a fait prendre conscience que son rôle est importantdans la guérison, même s'il est rarement intervenu dans les décisions du traitement. Tout au plusa-t-il refusé les soins, comme la loi le permet en France.Mais à mesure que son socle de connaissances en la matière augmente, le pouvoir médicals'effrite. Devenu malade–acteur, il est alors capable d'identifier ses connaissances, ses compé-tences en lien avec sa maladie et de s'approprier son traitement. On est donc passé d'unemédecine paternaliste qui poussait à la dépendance à une médecine de responsabilité qui setourne vers une prise du pouvoir du malade. Modérée, certes !Cette relative indépendance, gagnée chèrement, ouvre la porte à des pratiques qui se démar-quent du recours médical attendu : remèdes d'origine familiale, automédication, thérapiescomplémentaires qui ont séduit 47 % des Français en 2007, phytothérapie, voire absencede traitement. Le malade pourrait alors mettre en parallèle ses croyances avec une pratiqueproposée par le professionnel. Un choix cruel. . .Mais quels sont les malades capables d'un tel comportement ? On serait tenté de répondre :tous ! En réalité, les plus éduqués, les mieux informés, les plus réceptifs à la prévention, maisaussi les plus suspicieux, les plus réfractaires à la médecine officielle proposée. À condition quele malade ait toutes les informations pour apprécier sa situation.Face à la carence d'informations trop longtemps entretenue, le malade « explose » dansl'information médicale et paradoxalement, faible en kinésithérapie. Est-ce à dire que cettediscipline n'est pas comme les autres ou que son intérêt est limité ?Pour les maladies chroniques, l'éducation thérapeutique du patient n'est que l'instauration d'uneprise de pouvoir affirmée sur le management de sa maladie. Cependant, le succès de cettepratique n'est mesurable que lorsque le malade a acquis certains gestes, à un moment donné.Avant ce serait déplacé et après ce serait une étape manquée. Les professionnels ont été formésà repérer, à identifier, à comprendre les déficiences, les incapacités, les désavantages tout enconsidérant le milieu dans lequel évoluent les malades et que d'autres professionnels se sontappropriés. Aussi, encore peu répandu en France, l'empowerment ou le renforcement de lacapacité à agir permet au malade atteint de pathologie chronique de développer des moyenspour exercer un pouvoir d'autogestion de sa maladie. On voit se profiler une augmentation descompétences du patient à satisfaire ses besoins et résoudre ses problèmes de santé et quidéterminent sa qualité de vie.Mais quelles sont ces connaissances ? Sont-elles familiales et enracinées, acquises et récen-tes, car la démarche n'est pas identique, tout en valorisant les expériences personnelles. Doit-onles respecter et contre lesquelles doit-on freiner ? Et comment faire émerger celles qui semblentles plus pertinentes ?Actuellement, l'approche culturelle de la kinésithérapie n'est pas encore d'actualité, mais ilsemble bien qu'elle soit une voie ouverte, car nous savons que l'acceptation d'un handicapest différente selon les sociétés.Si un patient accepte l'idée d'une affiliation à une association de défense des intérêts desmalades, c'est qu'il reconnaît à la fois les limites de ses connaissances, voire son impuissance etqu'il accepte les apports extérieurs. Il va alors baigner dans un monde d'entraide, où chacunapporte une contribution à sa propre difficulté, qu'il a identifiée, reconnue et acceptée, sansendoctrinement, ni persuasion. Mais, il pourrait refuser « la main tendue » et attendre commepar le passé une aide à la décision, voire une substitution de son action par le professionnel.Rien ne laisse augurer qu'une situation antérieure de protection tellement rassurante ne fasse unretour qui serait, non pas une régression, mais un surcroît de sécurisation qui leur aurait manqué

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http://dx.doi.org/10.1016/j.kine.2014.03.006© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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R. RemondièreÉditorial

dans cette nouvelle démarche. Celle qui consiste à savoir cequi est bon pour soi, même quand on est malade.

Déclaration d'intérêtsL'auteur déclare ne pas avoir de conflits d'intérêts en relation avec cetarticle.

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Pour en savoir plus

Barlow J, et al. Self-management approaches for people with chronic

conditions: a review. Patient Educ Counsel 2002;48:177–87.