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boréal
Carl
LEBL
ANC
ISBN-10 : 2-7646-0478-5ISBN-13 : 978-2-7646-0478-6 Im
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Carl LeblancLe Personnage secondaire« Moi, cet après-midi, je me dirige vers un vieillard que tout le monde
croit mort. » En été de 2001, un cinéaste québécois se rend en Angleterre
pour rencontrer le personnage central de son prochain film. Un per-
sonnage bien réel : James Richard Cross, le diplomate anglais qui fut,
en automne de 1970, l’un des deux otages du Front de libération du
Québec. La rencontre de ce « personnage secondaire » de l’histoire
du Québec se double d’un voyage dans le temps, un voyage dans les
coulisses du xxe siècle en compagnie d’un de ses acteurs. Un de ceux, si
nombreux, pour lesquels le script ne prévoyait pas de réplique.
Ce personnage « retrouvé » est donc aussi un temps retrouvé : l’époque
trouble de la crise d’Octobre, où un autre otage, le ministre Pierre
Laporte, fut assassiné et où la Loi sur les mesures de guerre transforma
momentanément Montréal en État policier. Dans cette histoire, Cross,
qui croupira soixante jours dans la « prison du peuple », n’est qu’un
détail et, par là, il s’approche de celui que nous sommes tous, qui
compte pour peu, et qui, pourtant, est, doit être, la seule mesure de notre
humanité.
Révolution. Ordre public. Contre les idées, les individus ne font jamais
le poids. À moins qu’on cesse de les imaginer pour enfin, vraiment, les
rencontrer.
Carl Leblanc est cinéaste. Il a réalisé en 2004 un documentaire sur James Cross,
L’Otage, qui a été couronné par le prix Historia. Le Personnage secondaire est
son premier livre.
Boréal
récit
Carl LebLanC
le personnage secondaire
Extrait de la publication
Les Éditions du Boréal4447, rue Saint-Denis
Montréal (Québec) H2J 2L2
www.editionsboreal.qc.ca
Le Personnage secondaire
Extrait de la publication
Carl Leblanc
Le Personnage secondaire
Boréal
Extrait de la publication
© Les Éditions du Boréal 2006
Dépôt légal: 4e trimestre 2006
Bibliothèque et Archives nationales du Québec
Diffusion au Canada: Dimedia Diffusion et distribution en Europe: Volumen
Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives Canada
Leblanc, Carl
Le personnage secondaire
ISBN 978-2-7646-0478-6
1. Québec (Province) – Histoire – 1970 (Crise d’octobre). 2. Cross, James Richard,1921- . 3. FLQ. 4. Québec (Province) – Histoire – Autonomie et mouvements indépen-dantistes. 5. Conscience historique. 6. Histoire – Philosophie. I. Titre.
FC2925.9.o3L42 2006 971.4304092 C2006-941583-8
ISBN PAPIER 978-2-7646-0478-6
ISBN PDF 978-2-7646-0858-6
ISBN ePUB 978-2-7646-0950-7
James Richard Cross n’est pas un person-nage de fiction. Je peux donc le remercier.
C. L.
À Sophie Lerouge
Extrait de la publication
Dans un mélodrame, l’histoire s’imposeaux personnages. Dans un drame, l’his-toire révèle les personnages.
SYDNEY LUMET, Making Movies
Extrait de la publication
Extrait de la publication
Roulis
À l’automne de 1970, pendant quelques semaines, le Canadacessa d’être ennuyeux. Pour certains ce fut une bénédiction.Pas pour lui. Il se retrouva à cinquante ans, à genoux, devantde jeunes personnes qui auraient pu être ses fils et qui le som-maient d’être ce qu’il devait être pour les besoins de leurcause: un salaud. Il les contraria. Un membre de la celluleLibération éprouva même de la sympathie pour lui et passaainsi à un cheveu d’inventer le «syndrome de Montréal», phé-nomène rarissime où les kidnappeurs adhèrent à l’humanitéde leur otage. Ils nommèrent l’appartement du nord de la villeoù ils le détenaient la «prison du peuple». Ils étaient donc lebras armé de la Nation. Personne ne sut par quelle délégationde pouvoir ils avaient acquis cette représentativité. Sauf ceuxqui, avides de tautologies, avaient lu leur bible: le très confi-dentiel Manuel de la guérilla urbaine du révolutionnaire brési-lien Carlos Marighella. À la page 9, l’art du CQFD confinait ausublime: «Le guérillero urbain possède un gros avantage surle soldat conventionnel ou sur le policier: il défend une causejuste, celle du peuple, tandis que les deux autres se rangent ducôté de l’ennemi que le peuple déteste.» Ils menacèrent donc.
Ils sommèrent. Ils ultimatomèrent passionnément. La celluledu Front de libération du Québec se taillait une place au cœurdu monde. Un cœur battant. L’Histoire était là. Atteinte.Comme une superbe fille qui nous parle enfin. Oui, quoiqu’on en dise, pour eux, ce fut une bénédiction. Cependant,beaucoup de choses les contrarièrent. Il n’y eut pas de révolu-tion. Le Canada redevint ennuyeux. Je vais trop vite.
Son enlèvement marqua le début de la crise d’Octobre,«la plus grave crise de l’histoire canadienne», comme il estécrit dans les manuels scolaires.Je serais bien surpris si quel-qu’un, parmi les Anglais qui m’entourent cet après-midi dansce ferry-boat qui nous emmène vers l’Angleterre, se rappelaitl’événement. Pour le monde entier, Octobre, c’est la Russie,pas le Canada. D’ailleurs une «crise canadienne», c’est aussiimprobable qu’un flegme italien, une exubérance finlandaiseou un puritanisme brésilien… Mais pour nous, collégienscanadiens, il y eut un Octobre où les acteurs ne s’appelaientpas Fiodor, Vladimir ou Boris, mais bien Paul, Jacques, Pierreet James. Il est même certain que, parmi les sexagénaires dupont supérieur, que je viens de rejoindre, certains ont lu lesmanchettes des journaux anglais du 6 octobre 1970. Ce n’estpas tous les jours que l’on kidnappait, à l’autre bout dumonde, l’un de leurs concitoyens. Ils apprirent ainsi l’exis-tence d’une lutte de libération du Québec. La plupart d’entreeux connaissaient vaguement l’existence d’une provincecanadienne où, depuis une dizaine d’années, le ton montaitet des bombes explosaient. La BBC dépêcha une équipe quifit parvenir des reportages où l’on comprenait que cette pro-vince francophone était une sorte de moignon de la Nou-velle-France conquise en 1760 et que la blessure saignaitencore. Les French separatists firent alors l’objet de toutes lesanalyses — les radicaux, les violents, les modérés, les libéraux,les socialisants, les fascisants — et ils s’insinuèrent, c’est pro-bable, jusque dans les correspondances privées, entre lamétéo et les histoires de cœur.
14 LE PERSONNAGE SECONDAIRE
Extrait de la publication
Cet automne-là, un peu plus tard, l’ETA allait frapper. LesBrigades rouges venaient de naître avec pour seul fait d’armesl’incendie d’une auto à Milan. Les groupuscules français, quise fédéreraient un jour sous la bannière «Action directe»,cherchaient à transformer la récréation de 68 en vraie révolu-tion en se mêlant, ici et là, aux grévistes qui ne manquaientpas. La bande à Baader, elle, fourbissait ses armes. Non seule-ment nous ne serions pas en reste, mais nous étions enavance: «Premier kidnapping politique à survenir dans l’hé-misphère nord au XXe siècle», disait l’almanach de mesparents. Dans un pays où il y a plus de géographie que d’his-toire, ce n’est pas rien.
Le surlendemain de l’enlèvement, le 7 octobre 1970, cer-tains connaissaient déjà par cœur le nom de mon person-nage, l’attaché commercial (les Anglais ne disent pas consul,cela fait trop napoléonien) de Grande-Bretagne à Montréal:James Richard Cross. C’était, pour lui, la perte de l’anonymat,trésor de millions d’individus. Cet anonymat, devenu insup-portable à l’échelle d’un peuple: «Attirer l’attention dumonde sur le sort fait aux Québécois» peut-on lire dans lepremier communiqué du Front de libération du Québec.Trois ans plus tôt, du balcon de l’hôtel de ville de Montréal, legénéral de Gaulle avait insufflé une dose d’ontologie à lanation québécoise en en souhaitant la libération. La preuve?À Pékin, l’agence Chine Nouvelles dut concevoir un nouvelidéogramme pour faire écho aux frasques du président fran-çais. Le mot Québec n’existait pas en mandarin. Bien sûr, il sepassa beaucoup d’autres choses en automne 1970 qui vinrentdistraire les sexagénaires du pont supérieur. La ruptureconsommée des Beatles n’étant pas la moindre. Le drame deleur compatriote kidnappé par les révolutionnaires québécoistint tout de même en haleine le gouvernement de Sa Majestéainsi que ses sujets pendant cinquante-neuf jours.
Cet après-midi, trente et un ans plus tard, non, plus per-sonne ne se rappelle cette vieille actualité enfouie sous tant et
ROULIS 15
tant d’autres qui se succédèrent depuis et à côté desquelles unenlèvement est presque devenu une terreur élégante. Per-sonne ne peut imaginer qu’il fut un temps où le sort du vieilhomme qui me rejoindra tout à l’heure sur le quai de NewHaven fut discuté en première page du New York Times. Sousla brume qui peine à se lever, la Manche a l’air d’une mer. Seslimites disparues, on peut espérer la terre que l’on veut. Val-paraíso, Gaspé, Pathmos… À peine ai-je le temps de rêvasserque l’Angleterre émerge du brouillard. Un garçon me bous-cule, poussé par son grand frère. Sa mère se retourne vers moiet s’excuse dans un français approximatif. J’ai l’air d’un Fran-çais. Je n’ai pas l’air de l’Anglais qui rentre chez lui après unvoyage initiatique à dos d’âne dans les Cévennes. Je n’ai pasl’air d’un Québécois qui part à la recherche d’un bout derévolution avortée. Cette chose-là n’a pas d’air. Je ne peux paslui dire: «Vous savez, madame, “la plus grave crise de l’his-toire canadienne…”» Il faut bien parfois avoir peur du ridi-cule. J’observe l’enfant. Il a l’âge de se rappeler. Ce voyage enFrance sera-t-il, plus tard, l’un de ses plus vieux souvenirs? Setransformera-t-il en une de ces fines aiguilles de pin — unémoi, une peur, un paysage, un visage — qui forment le tapisodorant du temps intérieur? La mémoire des peuples est-elleaussi sélective que celle des individus? Est-ce par gêne que lesQuébécois ne se sont jamais intéressés à ce qu’était devenu, àce qu’avait vécu cet étranger désigné pour expier le mal colo-nial? Que répondrais-je si quelqu’un me demandait ce que jevais faire en Angleterre? Que je suis un enquêteur bien ineffi-cace qui vient recueillir, trente ans après les faits, la dépositiond’une victime? Les reliefs de la côte du Sussex se détachent unpeu plus nettement. Je me suis assis sur une banquette malgréla pluie. On ne distingue plus Dieppe. Passé l’énervement dudépart, l’excitation de l’arrivée encore lointaine, les voyageurssemblent engourdis par le roulis. Il a aussi raison de moi. Ilsuffit d’un peu de disponibilité pour que la vague produiseson vague-à-l’âme.
16 LE PERSONNAGE SECONDAIRE
Extrait de la publication
Un nouveau siècle débute, l’inventaire du précédent s’ac-célère. Un de ses acteurs bien secondaires va parler. Je suis unchasseur de têtes. Il a celle de l’emploi. Mon emploi du temps,c’est le passé. Je vais en faire un film. C’est mon métier. Gar-der le foyer sur le visage. Malgré le roulis.
ROULIS 17
Extrait de la publication
Afternoon tea
Seaford est à dix kilomètres de New Haven, où se dirige leferry-boat de la Hoverspeed à bord duquel se trouve lecinéaste. Sur les hauteurs de la ville, il y a une petite maisonperdue dans le décor banlieusard, derrière laquelle une vieilledame finit de tailler des rosiers. Son jardin n’est pas trèsanglais. Trop ordonné. Cinquante mètres carrés. Si le SeafordWeekly Chronicle publiait un agenda des «arts de la vieil-lesse», on ne pourrait trouver représentation plus classiquede la retraite que ce petit royaume pacifique où règne Bar-bara. À 15 h 30, le chien Bally se vautrera sur la fraîcheur despierres du petit sentier qu’il préfère à la moiteur du gazon. Àne pas manquer à 15 h 31 Barbara Cross qui retirera ses gantscaoutchoutés pour se joindre à Jasper qui, vers 15 h 32 devraitdéposer Second World War: First Coast Battle sur la table dusolarium pour servir le thé. Cette tranquillité spectaculairepourrait même être vue comme la rente supplémentaired’une vie qui fut plus tourmentée que les autres. Et qui va,avec l’arrivée du Québécois, le redevenir. Pour une rare foisd’ailleurs, Jasper est maladroit. Barbara comprend-elle à quelpoint tout cela le remue? Jusque-là, il l’a bien caché. La
Extrait de la publication
théière échancrée goutte encore sur le tapis. Un peu plus et latache aurait la forme géographique du Québec. Après le marcet les feuilles de thé, ce serait une première, là, cet après-midi… L’avenir dans le tapis imbibé de Earl Grey.
L’avenir? Est-il vraiment la chose la plus difficile à pré-dire? Se doutait-il que le passé pouvait revenir avec une telleforce? Ce jour de décembre 1970, où le négociateur luidemanda: «Êtes-vous James Richard Cross?» Ce beau jourd’hiver radieux où il vit le visage de ses ravisseurs, où ils rou-lèrent avec lui, escortés par la police dans les rues de Mont-réal, où il les vit partir pour Cuba, où un ministre lui proposaun scotch à onze heures du matin, pressentait-il que cejour…, que tous ses autres jours ne seraient jamais autrechose que le verso de ce petit enfer qui se terminait? Et queces jours exigeraient leur dû? Être racontés?Il y a trente et unans pouvait-il imaginer que ce présent douloureux persiste-rait, qu’il ne se transformerait jamais vraiment en passé? dubeau, du vrai passé simple?
La blouse de Barbara traîne un peu dans le thé accumuléau coin de la table alors qu’elle aide Jasper à éponger. Le thésur les mains, le tapis, le lin... Tous deux ont gardé le silencedevant la copie maculée du Guardian. La tache de Earl Greydonne à Tony Blair des airs de Gorbatchev. Elle a fini par for-mer sur le tapis une péninsule arabique. Cette pluie. Commesi c’étaient les manchettes de ce jour de juillet 2001 quicognaient contre les parois vitrées du solarium; comme sil’actualité du monde tentait de les atteindre: un attentat enIsraël sur la gauche, un scandale de la gauche anglaise sur ladroite. Aiment-ils ce contraste entre le moment paisible où ilsen finissent avec les journaux du jour et le rugissement desvents de la Manche qui pénètrent jusque dans leur petit jar-din sur les hauteurs de Seaford? Ils s’y sont installés au débutdes années 1990 pour se rapprocher de Susan, leur filleunique. Ils finiraient ainsi tout ça ensemble. Tout ça, leur his-toire, qu’ils auraient préférée, comme la plupart d’entre nous,
AFTERNOON TEA 19
Extrait de la publication
sans histoires. D’ailleurs, depuis qu’ils se sont rangés dans cepetit parking de retraités sur la côte du Sussex, on a cessé deles solliciter. Et puis le temps a passé, même les Québécois sesont lassés de souligner, tous les cinq ans, «la plus grave crisede l’histoire canadienne». L’onde de choc s’est dissipée. Unerumeur a fini par l’engloutir lui aussi. Un ami montréalais luia écrit en été 2000: «Alors vieux cachottier, il paraît que tu esmort?» Ça lui plaisait bien d’être mort. L’année 2000 mar-quait le trentième anniversaire de la crise, et cette rumeurpourrait endiguer efficacement les demandes d’interviewsrituelles. Oui, cette mort, ça lui allait bien, en attendant lavraie. Il s’y sentait bien. Jusqu’à ce coup de fil, il y a un an.
— M. Cross? Vous êtes bien le James Cross de…— Oui. Alors, il paraît que je suis mort!— Je suis heureux d’entendre le contraire…— Vous m’appelez pour la commémoration du tren-
tième…— Non, non, enfin oui un peu, mais…— C’est pour la télévision? Si c’est pour une entrevue
sur la crise…— Non, enfin, il se pourrait bien que ce soit vous qui
m’intéressiez…
20 LE PERSONNAGE SECONDAIRE
Extrait de la publication
Table
Roulis 13
Afternoon tea 18
La chair du dictionnaire 21
Le troisième type 24
Vous êtes libre… 28
L’enfant 32
Personnages secondaires 35
Casting 40
La voix intacte 45
Troie 52
Voix hors-champ 57
La chose 61
Accélérer l’histoire 70
Remake 76
Décor 81
Le Graal 87
Le but des promenades 93
Extrait de la publication
La prison du peuple 98
Prédation 105
Premier rôle 112
Cinéma 118
L’au-delà 122
L’inélégance 127
La Guinness 131
Muséologie 135
Poste restante 142
Raisons 146
Congé 152
Fiction 157
Figurant 162
Le rire général 166
Le souffleur 175
Assortiment 179
Billard 184
Snooker 187
Ça recommence 192
Septembre 197
Mauvais rôle 202
Nom d’un chien 211
Charlie Chaplin 216
James Bond 221
Le temps des hommes 226
« La plus grave crise… » 230
After Effect 234
Roméo Gélinas 238
Montage 242
Sources 246
248 LE PERSONNAGE SECONDAIRE
CRÉDITS ET REMERCIEMENTS
Les Éditions du Boréal reconnaissent l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada (FLC) pour leurs activités d’édition et remercient le Conseil des Arts du Canada pour son soutien financier.
Les Éditions du Boréal sont inscrites au Programme d’aide aux entreprises du livre et de l’édition spécialisée de la SODEC et bénéficient du Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres du gouvernement du Québec.
Extrait de la publication
ACHEVÉ D,IMPRIMER EN OCTOBRE 2006SUR LES PRESSES DE MARQUIS IMPRIMEUR
À CAP-SAINT-IGNACE (QUÉBEC).
Extrait de la publication
boréal
Carl
LEBL
ANC
ISBN-10 : 2-7646-0478-5ISBN-13 : 978-2-7646-0478-6 Im
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Carl LeblancLe Personnage secondaire« Moi, cet après-midi, je me dirige vers un vieillard que tout le monde
croit mort. » En été de 2001, un cinéaste québécois se rend en Angleterre
pour rencontrer le personnage central de son prochain film. Un per-
sonnage bien réel : James Richard Cross, le diplomate anglais qui fut,
en automne de 1970, l’un des deux otages du Front de libération du
Québec. La rencontre de ce « personnage secondaire » de l’histoire
du Québec se double d’un voyage dans le temps, un voyage dans les
coulisses du xxe siècle en compagnie d’un de ses acteurs. Un de ceux, si
nombreux, pour lesquels le script ne prévoyait pas de réplique.
Ce personnage « retrouvé » est donc aussi un temps retrouvé : l’époque
trouble de la crise d’Octobre, où un autre otage, le ministre Pierre
Laporte, fut assassiné et où la Loi sur les mesures de guerre transforma
momentanément Montréal en État policier. Dans cette histoire, Cross,
qui croupira soixante jours dans la « prison du peuple », n’est qu’un
détail et, par là, il s’approche de celui que nous sommes tous, qui
compte pour peu, et qui, pourtant, est, doit être, la seule mesure de notre
humanité.
Révolution. Ordre public. Contre les idées, les individus ne font jamais
le poids. À moins qu’on cesse de les imaginer pour enfin, vraiment, les
rencontrer.
Carl Leblanc est cinéaste. Il a réalisé en 2004 un documentaire sur James Cross,
L’Otage, qui a été couronné par le prix Historia. Le Personnage secondaire est
son premier livre.
Boréal
récit
Carl LebLanC
le personnage secondaire
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