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6 actualités Actualités pharmaceutiques n° 484 Avril 2009 La parfaite répartition démo-géographique de proximité des 23 000 pharmacies françaises, doublée d’une complète accessibilité et d’un haut niveau de compétence de leurs titulaires ont plaidé, lors de l’examen par l’Assemblée nationale de la Loi Bachelot, en faveur d’une notable extension du champ de compétence des pharmaciens d’officine. A ppelés à se prononcer sur le projet de loi Hôpi- tal patients santé et territoires (HPST) visant à combattre les déserts médicaux tout en res- pectant la liberté d’installation des médecins, les députés ont considéré qu’il était totalement dépassé de continuer à circons- crire le périmètre d’activité des officinaux à la seule distribution des médicaments. Au terme de leur examen du texte, qui s’est achevé mercredi 11 mars dernier à l’aube, avant que le Sénat s’y penche à son tour en mai, les élus ont fait au pharmacien une place à part entière au Panthéon des professionnels de santé de pre- mier recours. Unanimes, ils ont voté les amendements proposés de manière unitaire par les repré- sentants de la profession, à savoir les syndicats et l’Ordre national des pharmaciens. Au terme de l’examen du titre 2 “accès de tous à des soins de qualité”, les députés ont donc conféré de nouvelles missions aux officinaux dans le Code de la santé publique. De nouvelles missions À l’article 14, ils ont introduit le “conseil pharmaceutique” sur la liste des soins de premier recours que les futures agences régiona- les de santé (ARS) sont appelées à organiser dans chaque région. Rapporteur de la Commission des affaires sociales, le médecin généraliste Jean-Marie Rolland (UMP, Yonne) a souligné que « les 23 000 officines apportent une contribution importante à l’offre de soins ». Il s’est montré décidé à « tirer le meilleur parti possible du réseau des pharma- ciens ». Outre un maillage terri- torial adéquat, les officines sont « ouvertes six jours sur sept » ont fait observer nombre de dépu- tés dont l’avocat Pierre Morel- A-l’Huissier (UMP, Lozère). Pour sa part, le médecin hospitalier Jean-Luc Preel (Nouveau centre, Vendée) a rappelé que « le phar- macien souhaite être reconnu en tant qu’acteur à part entière de notre système de santé ». Un vœu d’autant plus justifié aux yeux de la pharmacienne Catherine Lemorton (PS, Hau- te-Garonne) que les officinaux ont d’ores et déjà été conduits à prodiguer davantage de conseils aux patients du fait des dérem- boursements massifs de médi- cament. Quant à Christian Paul (PS, Nièvre), il estime que cette disposition « sera un bouclier face au risque de vente de médi- caments en grande surface ». Une formulation de compromis Les députés ont été unanimes, après l’article 14, pour consacrer les fonctions de “pharmacien de coordination” désigné par le patient. À l’origine, les amende- ments de la profession suggéraient d’instituer le statut de “pharmacien traitant”. Fallait-il y voir malice ? Non, se défendent les auteurs de l’amendement. Ils ont retenu ce libellé en faisant le parallèle avec ce qui fonctionne en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EPHAD), à savoir le pharmacien et le méde- cin coordinateurs. Un duo qui, transposé en ambulatoire, pouvait donner le médecin et le pharma- cien traitants. Las ! L’appellation aurait eu pour effet de créer « une confusion avec le dispositif du médecin traitant » a plaidé Jean- Luc Preel. En échange, la formula- tion de compromis sur laquelle les députés se sont rabattus, après concertation avec les syndicats de pharmaciens, correspond en tout cas « au rôle que la Com- mission entend confier aux phar- maciens » renchérit Jean-Marie Rolland. Ceux-ci peuvent « avec l’accord du médecin renouveler périodiquement des traitements chroniques, ajuster au besoin leur posologie ». Ils n’ont pas été jusqu’à leur reconnaître le droit de modifier des spécialités prescrites. Pourtant « dans certains territoires, les médecins sont si peu nombreux que les pharmaciens sont souvent obligés d’avancer les produits » a regretté Catherine Lemorton. Les députés n’ont pas plus auto- risé les pharmaciens à participer au développement des services à la personne car cela aurait créé un « risque de confusion des genres dans l’activité des pharmaciens » a argumenté Jean-Marie Rolland. Pour sa part, Roselyne Bachelot a émis un avis défavorable, esti- mant qu’une telle activité aurait pour conséquence d’éloigner de ses missions principales le phar- macien titulaire de l’officine. DPC et démarche qualité Le pharmacien a ainsi autant de nouvelles missions pour lesquel- les il devient obligatoire qu’elles s’accomplissent dans le cadre d’une démarche qualité. Le projet de loi entérine la fusion des dispo- sitifs de FMC (formation médicale continue) et d’EPP (évaluation des pratiques professionnelles), sous le nouvel acronyme de DPC (développement professionnel continu). Roselyne Bachelot a dévoilé l’armature du projet de décret type d’application de la nouvelle obligation. Le dispositif serait fondé pour les pharma- ciens sur un Conseil national du DPC. Cette instance, composée de représentants de l’Ordre, des caisses maladies (UNCAM), des enseignants chercheurs, des syndicats et des usagers, sera chargée d’établir les critères et les orientations de la nouvelle obliga- tion. Si celle-ci n’était pas respec- tée, les ordres départementaux chargés de le vérifier intervien- draient via un “dispositif incitatif” auprès du pharmacien. Les “cré- dits” de DPC acquis depuis juin 2006 seront comptabilisés et un système d’information créé pour permettre à chaque professionnel de suivre l’évolution de ses efforts de formation. Ceux-ci, pour être conformes à l’obligation, devront comprendre « une action de for- mation évaluative chaque année au minimum ». Loi HPST Le pharmacien entre au Panthéon des professionnels de santé de premier recours © Fotolia.com/ Rémy Vallée

Le pharmacien entre au Panthéon des professionnels de santé de premier recours

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Page 1: Le pharmacien entre au Panthéon des professionnels de santé de premier recours

6actualités

Actualités pharmaceutiques n° 484 Avril 2009

La parfaite répartition

démo-géographique

de proximité des

23 000 pharmacies

françaises, doublée

d’une complète

accessibilité et

d’un haut niveau de

compétence de leurs

titulaires ont plaidé,

lors de l’examen

par l’Assemblée

nationale de la Loi

Bachelot, en faveur

d’une notable

extension du champ

de compétence

des pharmaciens

d’officine.

A ppelés à se prononcer sur le projet de loi Hôpi-

tal patients santé et territoires (HPST) visant à combattre les déserts médicaux tout en res-pectant la liberté d’installation des médecins, les députés ont considéré qu’il était totalement dépassé de continuer à circons-crire le périmètre d’activité des officinaux à la seule distribution des médicaments. Au terme de leur examen du texte, qui s’est achevé mercredi 11 mars dernier à l’aube, avant que le Sénat s’y penche à son tour en mai, les élus ont fait au pharmacien une place à part entière au Panthéon des professionnels de santé de pre-mier recours. Unanimes, ils ont voté les amendements proposés de manière unitaire par les repré-sentants de la profession, à savoir

les syndicats et l’Ordre national des pharmaciens.Au terme de l’examen du titre 2 “accès de tous à des soins de qualité”, les députés ont donc conféré de nouvelles missions aux officinaux dans le Code de la santé publique.

De nouvelles missionsÀ l’article 14, ils ont introduit le “conseil pharmaceutique” sur la liste des soins de premier recours que les futures agences régiona-les de santé (ARS) sont appelées à organiser dans chaque région. Rapporteur de la Commission des affaires sociales, le médecin généraliste Jean-Marie Rolland (UMP, Yonne) a souligné que « les 23 000 officines apportent une contribution importante à l’offre de soins ». Il s’est montré décidé à « tirer le meilleur parti possible du réseau des pharma-ciens ». Outre un maillage terri-torial adéquat, les officines sont « ouvertes six jours sur sept » ont fait observer nombre de dépu-tés dont l’avocat Pierre Morel-A-l’Huissier (UMP, Lozère). Pour sa part, le médecin hospitalier Jean-Luc Preel (Nouveau centre, Vendée) a rappelé que « le phar-macien souhaite être reconnu en tant qu’acteur à part entière de notre système de santé ».Un vœu d’autant plus justifié aux yeux de la pharmacienne Catherine Lemorton (PS, Hau-te-Garonne) que les officinaux ont d’ores et déjà été conduits à prodiguer davantage de conseils aux patients du fait des dérem-boursements massifs de médi-cament. Quant à Christian Paul (PS, Nièvre), il estime que cette disposition « sera un bouclier face au risque de vente de médi-caments en grande surface ».

Une formulation de compromisLes députés ont été unanimes, après l’article 14, pour consacrer les fonctions de “pharmacien de coordination” désigné par le patient. À l’origine, les amende-ments de la profession suggéraient d’instituer le statut de “pharmacien traitant”. Fallait-il y voir malice ? Non, se défendent les auteurs de l’amendement. Ils ont retenu ce libellé en faisant le parallèle avec ce qui fonctionne en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EPHAD), à savoir le pharmacien et le méde-cin coordinateurs. Un duo qui, transposé en ambulatoire, pouvait donner le médecin et le pharma-cien traitants. Las ! L’appellation aurait eu pour effet de créer « une confusion avec le dispositif du médecin traitant » a plaidé Jean-Luc Preel. En échange, la formula-tion de compromis sur laquelle les députés se sont rabattus, après concertation avec les syndicats de pharmaciens, correspond en tout cas « au rôle que la Com-mission entend confier aux phar-maciens » renchérit Jean-Marie Rolland. Ceux-ci peuvent « avec l’accord du médecin renouveler périodiquement des traitements chroniques, ajuster au besoin leur posologie ». Ils n’ont pas été jusqu’à leur reconnaître le droit de modifier des spécialités prescrites. Pourtant « dans certains territoires, les médecins sont si peu nombreux que les pharmaciens sont souvent obligés d’avancer les produits » a regretté Catherine Lemorton.Les députés n’ont pas plus auto-risé les pharmaciens à participer au développement des services à la personne car cela aurait créé un « risque de confusion des genres dans l’activité des pharmaciens »

a argumenté Jean-Marie Rolland. Pour sa part, Roselyne Bachelot a émis un avis défavorable, esti-mant qu’une telle activité aurait pour conséquence d’éloigner de ses missions principales le phar-macien titulaire de l’officine.

DPC et démarche qualitéLe pharmacien a ainsi autant de nouvelles missions pour lesquel-les il devient obligatoire qu’elles s’accomplissent dans le cadre d’une démarche qualité. Le projet de loi entérine la fusion des dispo-sitifs de FMC (formation médicale continue) et d’EPP (évaluation des pratiques professionnelles), sous le nouvel acronyme de DPC (développement professionnel continu). Roselyne Bachelot a dévoilé l’armature du projet de décret type d’application de la nouvelle obligation. Le dispositif serait fondé pour les pharma-ciens sur un Conseil national du DPC. Cette instance, composée de représentants de l’Ordre, des caisses maladies (UNCAM), des enseignants chercheurs, des syndicats et des usagers, sera chargée d’établir les critères et les orientations de la nouvelle obliga-tion. Si celle-ci n’était pas respec-tée, les ordres départementaux chargés de le vérifier intervien-draient via un “dispositif incitatif” auprès du pharmacien. Les “cré-dits” de DPC acquis depuis juin 2006 seront comptabilisés et un système d’information créé pour permettre à chaque professionnel de suivre l’évolution de ses efforts de formation. Ceux-ci, pour être conformes à l’obligation, devront comprendre « une action de for-mation évaluative chaque année au minimum ».

Loi HPST

Le pharmacien entre au Panthéon des professionnels de santé de premier recours

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Page 2: Le pharmacien entre au Panthéon des professionnels de santé de premier recours

7 actualités

Actualités pharmaceutiques n° 484 Avril 2009

Il est reconnu

qu’un taux de HDL-

cholestérol bas est

un élément péjoratif

chez les patients

coronariens, au même

titre qu’un taux de

LDL-cholestérol

élevé. Cependant,

il n’est pas évident

que les interventions

pour l’élever

diminuent le risque

cardiovasculaire.

Différentes recomman-dations internationales suggèrent que le taux de

HDL-cholestérol doit être supé-rieur à 0,40 mg/L chez l’homme et à 0,50 mg/L chez la femme.

Augmenter le HDL-cholestérol, la bonne piste ?Une publication récente1 passe en revue toutes les données acquises au cours de 108 essais étudiant les effets des différentes approches ayant pour but d’aug-menter le taux de HDL-cholesté-rol. Seuls ont été pris en compte les essais précisant aussi les

taux de LDL-cholestérol, pour pouvoir corriger le biais que représente l’efficacité démon-trée de la baisse de ce taux sur le risque cardiovasculaire.Ces approches sont surtout médi-camenteuses, avec des essais relatifs aux statines, fibrates, rési-nes, niacine, inhibiteurs de l’acyl-coenzyme A-cholestérol acyl-transférase, probucol, glita zones, hormones, torce trapib. Mais cinq essais étudiant les effets d’une alimentation pauvre en graisse et de la chirurgie bariatrique ont également été examinés. Au total, l’ensemble de ces travaux réunit près de 300 000 patients, dont la moitié sont “traités”, l’autre appar-tenant aux groupes contrôle.Si les résultats montrent, comme prévu, avec la baisse du LDL-cho-lestérol, une diminution des patho-logies coronariennes, aucune réduction de la morbidité ni de la mortalité cardiovasculaires n’ap-paraît lorsque seules les modifica-tions du taux de HDL-cholestérol sont prises en compte. L’aug-mentation isolée du taux sérique de HDL-cholestérol ne peut donc être considérée comme apportant un bénéfice dans la prévention cardiovasculaire.Les auteurs avancent une expli-cation à cet apparent paradoxe. Les différents traitements modifi-cateurs de lipides et les mesures

diététiques peuvent affecter les fonctionnalités du HDL-choles-térol, entraînant la perte de ses fonctions protectrices. C’est, par exemple, le cas de certains traitements qui, en inhibant la Cholesterol Ester Transfer Pro-tein (CETP), conduiraient à la production de particules diffé-rentes de HDL-cholestérol ayant des propriétés pro-inflamma-toires et athérogènes.

Un paradoxe qui peut s’expliquerUn taux sérique bas de HDL-cholestérol est un facteur bien connu de risque cardiovascu-laire. Logiquement, son élévation devrait donc être favorable à la diminution de ce risque et à la prévention. Cette étude montre que ce n’est pas le cas, du moins pour le moment. Jusqu’à ce qu’une meilleure connaissance de ses fonctionnalités permette de tirer profit de toutes les quali-tés de ce “bon cholestérol”. �

Roseline Péluchon

© jim.fr

Fin juillet 2008, la Caisse nationale d’assurance maladie

(Cnam) rendait publics les tarifs des consultations

de chaque médecin libéral sur www.ameli.fr et par

téléphone, au 36 46. Aujourd’hui, le service est étendu

aux actes techniques, tels que radios, scanners,

échographies, imagerie par résonance magnétique

(IRM)... Selon la Caisse nationale d’assurance maladie

des travailleurs salariés (Cnamts), les médecins ont

perçu 19,3 milliards d’euros d’honoraires en 2006,

dont 1,75 milliards d’euros au titre de la pratique

du dépassement d’honoraires. En moyenne, un médecin

a perçu 175 000 € d’honoraires en 2006, dont 18 500 €

de dépassements. Enfin, selon l’Assurance maladie, les

dépassements d’honoraires représentent plus de 12 %

du total des honoraires des médecins en 2008. Face à

cette dérive, les pouvoirs publics ont décidé d’imposer

une information préalable des patients pour toute

facturation dépassant 80 €. Dans ce cas, un devis écrit

doit obligatoirement leur être remis. �

Noémie Legendre

© emploisante.fr

Vers la publication de tous les tarifs médicaux sur le webÉconomie

Cardiovasculaire

Augmenter le “bon cholestérol” ne diminue pas le risque cardiovasculaire

Les DASRI aussiLa gestion gratuite des déchets d’activités de soins, à risque infectieux (DASRI) des patients en autotraitement est appelée, dans certaines zones, à être sous la res-ponsabilité du pharmacien à partir du 1er janvier 2010, au terme de l’ar-ticle 30 adopté par le Sénat dans la Loi de financement de la Sécurité sociale pour 2009. Les députés du Nouveau centre qui envisageaient d’abroger l’article ne l’ont pas tenté. En revanche, Roselyne Bachelot a sans difficulté fait adopter un amen-dement qui restreint l’obligation de collecte aux « déchets piquants et tranchants ». Pour Gérard Bapt (PS, Haute-Garonne), « c’est une source de satisfaction pour ceux des phar-maciens qui s’étaient déjà organisés pour collecter les déchets piquants et donc dangereux et un soulage-ment pour les élus locaux ».Le texte a également institué les Unions régionales des pro-fessions de santé par profession et édicté de nouvelles règles de représentativité des syndicats. Le Sénat doit se prononcer à son tour sur un texte dont les députés ont notablement aug-menté le nombre d’articles. �

Serge Benaderette

Journaliste

Source1. Briel M et coll. Association between change in high density lipoprotein cholesterol and cardiovascular disease morbidity and mortality: systematic review and meta-regression analysis. BMJ 2009; 338: b92. doi: 10.1136/bmj.b92.

Source : Caisse nationale d’assurance maladie (www.ameli.fr).