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Faut-il rendre les marbres du Parthénon à la Grèce? Un débat ancien mais sans cesse remis sur le devant de la scène. L’étude du régime juridique des biens conservés dans les musées anglais nous éclaire sur les modalités de déclassement et de restitution en cas de demande. La règle est simple, les biens sont indisponibles, principalement en vertu du Trust, sauf certaines exceptions, dont les deux plus importantes sont les restes humains et les biens spoliés. Le déclassement de ces objets est toléré car l’on considère que leur absence ne provoquerait pas d’appauvrissement de la collection. En outre ils sont attachés à des valeurs morales, culturelles ou spirituelles qui motivent les professionnels des musées en Angleterre à les restituer lorsqu’ils sont revendiqués. Pourquoi alors des objets tels que les marbres du Parthénon ou la Pierre de Rosette ne sont-ils pas restitués également?
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ÉCOLE DU LOUVRE
Violette Vauchelle
Le régime juridique des biens dans les musées en
Angleterre: déclassement
et restitution
Mémoire d'étude(1ère année de 2ème cycle)présenté sous la directionde M. Jérôme Fromageau
Mai 2012
Je tiens à remercier tout d’abord Jérôme Fromageau, qui m’a donné la possibilité de traiter un sujet qui me tient à coeur et sans qui ce mémoire n’aurait pas vu le jour.
J’exprime toute ma gratitude à Sophie Vigneron, qui en tant que personne ressource pour ce travail, s’est toujours montrée disponible et de bons conseils.
Mes remerciements s’adressent également à tous les bibliothécaires et documentalistes qui m’ont apporté leur aide et qui ont accepté de répondre à mes questions avec gentillesse.
Enfin je n'oublie pas ma famille et mes amis pour leur contribution, leur soutien et leurs encouragements.
Remerciements
Introduction 1
I. L’indisponibilité des collections 9 A. Le principe de l’indisponibilité 9
1. La règle 92. Les conditions 10
a. L’indisponibilité des collections en vertu du trust 10b. La question de la propriété 11
3. Le principe de l’indisponibilité en fonction des différentes catégories de collections 13a. Les musées nationaux 13b. Les musées locaux 15c. Les musées d’organismes caritatifs 16
B. Les exceptions 171. Les déclassements tolérés 17
a. Les doublons 18b. Les faux et contre-façons 18c. Les objets endommagés 19
2. Les déclassements difficiles 20a. Les objets indispensables à la collection 20b. Deux exceptions: les restes humains et les objets spoliés 21
II. Les déclassements particuliers 22A. Les restes humains 22
1. Le cadre légal : Human Tissue Act 2004 232. La déontologie 25
a. Les guides de recommandations du Ministère 25b. Les codes de déontologie 26c. Les «museum policies» 27
3. Étude de cas: Restes aborigènes rendus à la Tasmanie par le Natural History Museum 28a. Historique de la revendication 28b. Résolution de la dispute 29c. Solution adoptée: restitution conditionnelle 31
Sommaire
B. Les objets spoliés 331. Le cadre légal: Holocaust Act 2009 342. Le Spoliation Advisory Panel 35
a. Présentation 35b. Règles de procédure 36c. Rapports 37
3. Étude de cas: Benevento Missal 38a. Première revendication 38b. Renouvellement de la revendication 39
III. Théorisation de la notion de restitution 41A. Les arguments pour et contre la restitution 42
1. Quand la restitution devient valeur de réparation des erreurs du passé 42a. Différents contextes, différentes sources, différentes raisons 42b. De la recherche d’une identité culturelle 43
2. Les arguments contre 44a. Les obstacles à la restitution 44b. Le point de vue des «musées universels» 45c. L’argument muséologique 47
B. Solutions alternatives à la restitution 481. La restitution sous conditions 482. Prêts à long-terme 493. Le rapatriement numérique 494. Les autres solutions 50
C. Pourquoi, alors, ne pas restituer les marbres du Parthénon ou la Pierre de Rosette? 51
En guise de conclusion 54
Sources 55I. Commentaires sur mes éléments de bibliographie et autres sources II. Éléments de bibliographieIII. Sources numériquesIV. Textes sourcesV. Webographie
Annexes 65I. Traductions personnelles 66II. Présentation des organismes de coordination des musées 93III. Images 94
"Aveugles sont les yeux qui ne versent pas de larmes en voyant, Grèce adorée, tes
objets sacrés pillés par de profanes mains anglaises qui ont encore blessé ton sein meurtri et ravi tes dieux, des dieux qui haïssent l'abominable climat nordique de
l'Angleterre."Lord Byron, Childe Harold1
«Bring them back!», slogan de la campagne de restitution des marbres du Parthénon,
Mélina Mercouri, alors ministre Grec de la Culture, en a fait son cheval de bataille en
réclamant le retour des frises en 1982. De nombreuses tentatives ont été lancées depuis,
notamment avec la création du comité intergouvernemental de l’Unesco2. Puis l’ouverture du
musée de l’Acropole en 2009 relance le débat: Faut-il rendre les marbres du Parthénon à la
Grèce?
Le Parthénon, un des plus éminents édifices de l’Acropole fut construit entre 447 et
438 avant J.-C., son entablement était composé d’une frise de reliefs en marbre, sculptés par
Phidias3. La frise était à l’origine constituée de 111 panneaux, environ 97 survécurent aux
dégâts du temps, de ceux-là, 51 sont conservés par le British Museum4. En Août 1800, Lord
Elgin (1766-1841) fut envoyé en Grèce en tant qu’ambassadeur britannique auprès de
l’Empire Ottoman, accompagné d’une équipe d’artistes ayant pour mission de prendre des
relevés, faire des croquis et des moulages des antiquités5. Lord Elgin constata à son arrivée le
piètre état de conservation dans lequel se trouvaient les monuments de l’Acropole et le peu
d’attention qui était porté à leur préservation par les autorités Turques. En effet en 1686 déjà
Introduction
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
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1 Lord Byron (1788-1824), Childe Harolde, in The Curse of Minerva.2 Comité intergouvernemental pour la promotion du retour de biens culturels à leur pays d'origine ou de leur restitution en cas d'appropriation illégale, créé en 1978 par la résolution 20 C4/7.6/5 de la 20e session de la Conférence générale de l'UNESCO. Informations disponibles ici:<http://portal.unesco.org/culture/fr/ev.php-URL_ID=35283&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html> (consulté le 2 mai 2012).3 PROTT L. V. (Dir.), Témoins de l’Histoire: recueil de textes et documents relatifs au retour des objets culturels, Paris, Unesco, 2011, p.229.4 GREENFIELD J., The return of cultural treasures, Cambridge, Cambridge University Press, 2007, p.59.5 MERRYMAN J. H. Law, ethics and the visual arts, Alphen aan den Rijn: Kluwer law international, 2007, p.347.
le temple d’Athéna Nike avait été délibérément renversé par les Turcs pour être remplacé par
une place d’artillerie6. Lord Elgin reçu l’autorisation par un firman7 d’accéder à l’Acropole,
de faire des croquis et des moulages, et selon lui, de ramener les éléments qui lui semblaient
intéressants ou dans la nécessité d’être préservés des destructions. Le texte originellement en
Turc, version qui a été perdue, a été traduit en italien puis de l’italien a été traduit en anglais.
Il est fort probable que des erreurs de traductions aient été à l’origine d’un quiproquo quant
aux termes et aux conditions du décret accordé à Lord Elgin8. Plusieurs sources indiquent aux
chercheurs que les frises étaient dans un très mauvais état de conservation et menacées de
destruction ou de pillage. En 1804 une première partie des marbres arrive à Londres, et le
reste en 1812. Ils furent achetés par le Parlement pour la somme de 30500 livres, et le British
Museum les reçu en don en 1816. Une loi sera votée pour l’occasion, les considérant comme
biens de la couronne9.
Comme l’histoire nous l’apprend et comme le proclame Neil MacGregor, l’actuel
directeur du British Museum, les reliefs en marbre «ont été acquis légalement, on peut
déplorer qu'ils l'aient été sous la tutelle ottomane, mais elle représentait l'autorité de
l'époque»10. Cette question a été fortement médiatisée et largement débattue depuis ces vingt
dernières années, et la réponse reste la même, les sculptures ne peuvent pas sortir de la
collection en vertu de la loi qui l’interdit. Les frises du Parthénon ne sont pas, d’ailleurs, les
seuls biens culturels à être revendiqués au British Museum, la Pierre de Rosette ainsi que
d’autres objets antiques ont été réclamés. Les revendications de biens culturels ne sont pas de
nouvel ordre, des réclamations d’œuvres d’art et de biens culturels ont été formulées de tout
temps et des restitutions ont été déjà été effectuées dans le passé. Pourquoi donc le British
Museum s’évertue à vouloir conserver ces objets entre ses murs?
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
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6 MERRYMAN J. H. Law, ethics and the visual arts, Alphen aan den Rijn: Kluwer law international, 2007, p.347.7 Dans les pays du Moyen Orient, dont l’Empire Ottoman, un «firman» est un décret royal émis par un souverain. Le mot firman vient du persan firmān qui veut dire « décret » ou « ordre ». (Source: Oxford English Dictionnary).8 MERRYMAN J. H. Law, ethics and the visual arts, Alphen aan den Rijn: Kluwer law international, 2007, p.349.9 «An act to vest the Elgin Collection of ancient Marbles and Sculpture in the Trustees of the British Museum for the use of the Public» = un acte qui remet la collection Elgin composée d’anciens marbres et de sculptures entre les mains des Trustees du British Museum afin de les mettre à la disposition du public. HERSHKOVITCH C. et RYKNER D., La restitution des œuvres d’art. Solutions et impasses, Hazan, 2011, p.18.10 NOCE V., ‘Les collections du British Museum sont un patrimoine de l’humanité’, Interview de Neil MacGregor, Libération, 10 février 2007.
Il n’est, bien entendu, pas si simple de répondre à cette question. Les arguments pour
et contre le retour des biens culturels à leur pays d’origine dépendent non seulement de
considérations légales, mais également de facteurs éthiques, émotionnels et politiques11.
Quelles sont donc les restrictions juridiques auxquelles sont contraints les objets conservés
par les musées en Angleterre et pourquoi ne peuvent-elles pas être contournées ou modifiées?
Le débat des frises du Parthénon a été maintes fois abordé et la question largement discutée. Il
n’en reste pas moins que le système de gestion et d’administration des musées en Angleterre
est peu connu du juriste français et qu’il paraît intéressant de s’attacher à l’étudier, et à
s’intéresser plus particulièrement aux possibilités de déclassement et de restitution. Traiter de
la question du déclassement et de la restitution en droit anglais est un sujet tout à fait
passionnant car il fait appel à tout un panel de disciplines, à la fois le droit mais aussi
l’éthique, la morale, la déontologie et la philosophie.
Commençons tout d’abord par définir les termes essentiels à ces questions. Il est
nécessaire de revenir sur des précisions terminologiques, tout d’abord puisqu’un mot peut
vouloir faire référence à plusieurs notions et ensuite car le sens d’un terme peut changer de
l’anglais au français. Le terme de deaccessioning est difficile à décrire en langue française,
étant donné que le droit français impose le principe d’inaliénabilité des collections12.
L’Oxford English Dictionnary définit le verbe «to deaccession» ainsi: « to remove an entry for
(an exhibit, a book) from the accession register of a museum, a library, etc. usually in order to
sell the item concerned ». Si l’on considère uniquement la notion de «accession», transposée
en français dans ce cas en «acquisition», alors la «de-accession» peut se traduire par le
«processus de passage d’un objet du monde commun vers la collection du musée, par le biais
de son entrée dans l’inventaire. La ‘‘dé-accession’’ constitue en ce sens une sorte de
dégradation, de retour aux valeurs communes»13.
Le terme de restitution est plutôt utilisé pour évoquer les biens volés ou pillés en
temps de guerre , c’est-à-dire dans le cas d’une situation illicite14. «On parle de ‘‘restitution’’
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
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11 LEGGET Jane, Guidelines for good practice, Restitution and Repatriation, Museum and Galleries Commission, Londres, 2000, p.5.12 Art. 1er du Code du Patrimoine.13 MAIRESSE F., «La question de l’aliénation: cinq pistes de réflexion», In L’aliénation et la restitution du patrimoine culturel: une nouvelle déontologie mondiale, 33ème Symposium annuel de l’IFOCOM, organisé par le Comité international pour la muséologie de l’ICOM les 2-7 Novembre 2010, DESVALLÉES André et NASH Suzanne (éds.), Shanghai, 2010, <http://icom.museum/uploads/tx_hpoindexbdd/ICOFOM_ISS_39.pdf>, (consulté le 2 mai 2012).14 KOWALSKI Wojciech V., «Les divers types de demandes de récupération des biens culturels perdus», Museum International 2005, n°228.
lorsque le bien culturel a été volé et de «retour» lorsque celui-ci a été illicitement exporté vers
une autre État»15, ce terme engendre tout de même des polémiques quant à la signification
qu’on lui donne, car bien souvent associé à l’idée de la réparation d’un préjudice. En Common
Law, quand on parle de restitution, on entend par là le rétablissement de la position dans
laquelle se trouvait une partie avant une transaction, cela peut être appliqué à un transfert d’un
objet de son propriétaire d’origine16. L’Oxford English Dictionnary le définit ainsi:
the restoration of something lost or stolen to its proper owner (...) recompense for injury or loss17.
La restitution d’un bien culturel fait donc référence au «retour d’un objet faisant partie d’une
collection à un groupe connu pour être lié à l’objet par un titre légal valide ou tout autre forme
de tutelle traditionnelle, outrepassant les droits du musée qui le conserve»18.
Il arrive également de rencontrer le terme de retour, alors utilisé pour évoquer les
biens déplacés durant la période coloniale. De plus le terme de retour est surtout attaché à la
notion de territoire plus qu’à la personne, ainsi l’on dira d’un bien qu’il «retourne» dans son
pays d’origine, et qu’il est «restitué» à son propriétaire légitime19. Le terme de retour désigne
ainsi le transfert d’un objet faisant partie d’une collection à celui qui le demande, suite à une
décision prise par le plus haut niveau d'approbation au sein du musée, en général son conseil
d’administration20. Les frontières sont fines entre le terme de «restitution» et le terme de
«retour», ainsi pour trouver un compromis, le Comité intergouvernemental de l’Unesco,
emploie le terme «retour» et conserve le mot « restitution» en ajoutant « en cas
d’appropriation illégale» d’où son actuelle dénomination (Comité intergouvernemental pour
la promotion du retour des biens culturels à leur pays d’origine ou leur restitution en cas
d’appropriation illégale).
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
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15 Art. 1er de la Convention d’Unidroit 1995.16 PROTT L. V. (Dir.), Témoins de l’Histoire: recueil de textes et documents relatifs au retour des objets culturels, Unesco, Paris, 2011, p.xxi.17 «Rendre quelque chose qui a été perdu ou volé à son légitime propriétaire» «réparation d’un mal causé ou d’une perte».18 «Restitution refers to the return of an object from a museum collecion to a party found to have a prior and continuing relationship with the object, such as a valid title or traditionnal guardianship, which is seen to override the claims of the holding museum» in LEGGET J., Guidelines for good practice, Restitution and Repatriation, Museum and Galleries Commission, Londres, 2000, p.29.19 CORNU M., RENOLD M.-A., Le renouveau de biens culturels: les modes alternatifs de règlement des litiges, JDI, 2007, p.494.20 «Return refers to the transfer of an object from a museum collection to a requesting party, following a decision at the highest level of approval within the museum, generally its governing body», in LEGGET J., Guidelines for good practice, Restitution and Repatriation, Museum and Galleries Commission, Londres, 2000, p.29.
Enfin on peut également rencontrer le mot «rapatriement», ce terme serait plus
volontiers utilisé pour les revendications de biens culturels formulées par les peuples
autochtones, ainsi le propriétaire est dans ce cas, plutôt qu’un pays ou qu’une personne, un
groupe ethnique21. Le terme de «rapatriement» a cela d’intéressant qu’il peut aussi s’appliquer
dans le cas du retour d’un objet dans une institution d’un même pays. «Le rapatriement
consiste donc en la restitution d'un bien présent dans la collection d’un musée, à un groupe
reconnu comme étant le véritable propriétaire ou le gardien traditionnel, ou leurs héritiers et
descendants. Le bien peut avoir été acquis dans des circonstances injustes, durant lesquelles
son propriétaire d’origine en a été séparé sous la contrainte. L'objet est alors considéré comme
essentiel à l'identité, à l'histoire ou au bien-être culturel et spirituel de ce groupe»22. Le
rapatriement d’un objet a ainsi valeur de «retour au pays», il représente donc un
«rétablissement de connexions et d’histoires qui ont été déchirées. Il s’agit d’une libération de
l’esprit dans le domaine de la «loi» éternelle et d’une reconnexion avec le monde spirituel
ancestral»23.
À travers une première approche du vocabulaire nous pouvons donc nous rendre
compte des différences terminologiques que l’on peut noter lors du passage du français à
l’anglais, mais en plus de ces précisions terminologiques il nous sera bénéfique, pour la
compréhension du reste de notre étude, de s’attarder quelques instants sur les spécificités du
droit anglais, notamment en matière d’administration du patrimoine. Jacques Rigaud écrivait
en 1995: «On ne se lassera jamais d’énumérer, en tous domaines, cette obstination que nous
prêtons aux Anglais de faire autrement que nous»24. Le droit anglais est un droit
jurisprudentiel, il est le produit de l’ensemble des règles non écrites élaborées au cours des
siècles25. La Common Law est donc un droit coutumier en opposition au droit écrit, à la loi
(statute law). Ce droit s’applique en Angleterre et au Pays de Galles, il ne s’agit pas du droit
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21 CORNU M. et RENOLD M.-A., Le renouveau de biens culturels: les modes alternatifs de règlement des litiges, JDI, 2007, p.494.22 «Repatriation has a broader scope than restitution. It refers to the return of an object of cutlural patrimony from a museum collection, to a party found to be the true owner or traditional guardian, or their heirs and descendants. The material may have been acquired in circumstances where the owner or traditional guardian was disavantaged or parted with it under duress. The object is deemed essential to the identity, and to the cultural and spiritual well-being or history of that party», in LEGGET J., Guidelines for good practice, Restitution and Repatriation, Museum and Galleries Commission, Londres, 2000, p.29.23 PROTT L. V. (Dir.), Témoins de l’Histoire: recueil de textes et documents relatifs au retour des objets culturels, Unesco, Paris, 2011, p.xxi.24 RIGAUD J., L’Exception culturelle: culture et pouvoirs sous la Cinquième République, Paris, Grasset, 1995, p.141.25 SÉROUSSI R., Introduction aux droits anglais et américains, Paris, Dunod, 2003, p.1
du Royaume-Uni dans son ensemble. Les juridictions diffèrent en Écosse et en Irlande. Le
droit n’est pas non plus le même dans tous les pays du Commonwealth, bien que le droit
anglais en soit une inspiration26. La Common Law s’est développée avec la conquête
normande en 1066, menée par Guillaume le Conquérant, qui a transposé le droit normand, et a
ainsi permis d’unifier le droit. La protection des biens immeubles est apparue à la fin du
XIXème siècle, en revanche pour les biens meubles, leur prise en compte a été plus tardive27.
L’équivalent du Ministère de la Culture et de la Communication est le Department for
Culture, Media and Sports (DCMS), qui est chargé de prendre les décisions relatives à la
gestion et au financement des musées. Le système anglais délègue les autorités à des
«councils», en l’occurrence le Art Council England, a remplacé en 2011 le Museum, Libraries
and Archives Council (MLA), qui gérait les musées, les bibliothèques et les archives28. Le
droit du patrimoine puise ses sources dans divers textes législatifs, en ce qui concerne les
musées, nous pouvons en citer quatre: Museums and Galleries Act 1992, Public Libraries and
Museums Act 1964, British Museum Act 1963 et le British Library Act 1972. La déontologie a
également beaucoup d’importance dans la gestion des musées en Angleterre, la Museum
Association a édicté un code de déontologie29, et les musées sont encouragés à mettre en place
des codes de conduites qui leur sont propres. La règle est claire dans la législation muséale,
les biens dont la propriété a été confiée au musée et qui y sont conservés, sont indisponibles et
ne peuvent donc pas être déclassés. Il existe néanmoins des exceptions à cette règle, qui
concernent les déclassements que l’on considère comme ne portant pas préjudice à l’intégrité
de la collection, de l’institution ou au bénéfice du public. Les règles diffèrent en fonction des
catégories de musées, s’il s’agit d’un musée national, local ou ayant un statut caritatif.
Déjà, plusieurs questions se posent à nous. Quels sont les objets qui peuvent être
déclassés et pour quelles raisons autorise-t-on ces déclassements? Les revendications de biens
culturels, de plus en plus croissantes, entraînent la création de nouveaux instruments
normatifs permettant le déclassement des biens conservés dans les musées et leur restitution
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
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26 FRISON D., Introduction au droit anglais et aux institutions britanniques, Ellipses, Paris, 2005, p.527 VIGNERON S., Rapport national, Grande-Bretagne, in CORNU M. et FROMAGEAU J. (dir.), Protection de la propriété culturelle et circulation des biens culturels. Étude de droit comparé Europe / Asie, rapport pour le ministère de la Justice, Centre d’études sur la coopération juridique internationale (CECOJI) - UMR 6224 - Université de Poitiers/CNRS, Septembre 2008, p.259, <http://www.circulation-biens.culture.gouv.fr/pdf2/Cornu.pdf> (consulté le 2 mai 2012).28 Art Council England <http://www.artscouncil.org.uk/> et Department for Culture, Media and Sport: http://www.culture.gov.uk/index.aspx> (consultés respectivement les 2 et 3 mai 2012).29 TREVELYAN Vanessa (dir.), Code of ethics for museum: ethical principles for those who work for or govern museums in the UK, London, Museum Association, 2002. Traduction française en annexes, Annexe n°6, p.73-82
au requérant. Quels sont les biens revendiqués et quelles motivations se cachent derrière ces
revendications? Les professionnels des musées ont désormais la mission de prendre en
compte et de répondre aux demandes en restitution, quels sont donc les moyens mis à leur
disposition pour les accompagner dans leur démarche? Qu’est-ce que la déontologie permet
de résoudre que le droit ne peut pas? Pourquoi certains biens culturels ne peuvent être
restitués? Sous la pression des peuples autochtones, la loi relative aux restes humains a été
votée, permettant ainsi leur déclassement et leur restitution. Il en va de même pour les biens
spoliés. Quelles sont les raisons morales qui justifient ces restitutions? Et enfin, avec les
éléments de réponses à ces questions, pourquoi des objets tels que les marbres du Parthénon
ou la Pierre de Rosette ne seraient-ils pas rendus si certains biens le sont? Tout autant de
questions auxquelles je m’efforcerait de répondre dans ce devoir.
Les consignes imposées pour ce devoir, en termes de temps et de nombre de pages, ne
m’ont pas permis d’approfondir certains sujets, moins essentiels à mon propos, mais qui me
semblent néanmoins tout à fait dignes d’intérêt. Mon sujet est centré tout d’abord sur le droit
anglais, je n’aborderai donc pas les questions relatives au Royaume-Uni dans son ensemble,
étant donné les différences de législation entre l’Angleterre, l’Irlande du nord et l’Écosse30. Je
fais toutefois référence par endroits, et en notes de bas de pages, aux différences de législation
avec l’Écosse par exemple. Et bien que je n’ai pas choisi de faire un sujet de droit comparé,
qui aurait été bien trop ambitieux pour ma personnalité d’historienne de l’art, j’ai tenu, tout au
long de cette étude, à rappeler ponctuellement quelle était l’actualité ou la position française
sur le sujet en question. Et a fortiori, je ne traiterai pas de la législation européenne ni des
conventions internationales31. Je n’aborderai pas non plus le sujet de la circulation des biens
culturels et du trafic illicite, sujet qui pose des questions passionnantes et digne d’un sujet de
recherche à part entière32.
Il existe sur le sujet de la restitution quantité d’informations et de matériel d’étude
illustrant les différents aspects juridiques, éthiques et philosophiques de la restitution, ainsi
que la diversité des sources dont elle provient, des formes qu’elle revêt et des biens auxquels
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
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30 D’une manière générale, la législation du Pays de Galles rejoint la législation anglaise.31 Il existe une vaste bibliographie sur le sujet, Corinne Hershkovitch dans son ouvrage La restitution des œuvres d’art. Solutions et impassses, en propose une bonne synthèse à la page 82.32 Sur le sujet je recommanderais la lecture de CARDUCCI G., La restitution internationale des biens culturels et des objets d’art volés ou illicitement exportés, LGDJ, 1997.
elle s’applique. Pour plus de détails, j’ai commenté les sources utilisées pour ce devoir en
chapeau introductif à mes éléments de bibliographie33.
Mon étude concerne donc le régime juridique des objets conservés dans les musées
anglais et sujets à des demandes en restitution. Demandes qui pressent les professionnels de
musées à entreprendre une réflexion sur le déclassement des biens présents dans les
collections qu’ils gèrent. À partir d’une première étude du système muséal anglais je
m’attacherai à comprendre quelles sont les raisons qui justifient les déclassements et les
restitution, dans le but de répondre à une ultime question: pourquoi restituer certains objets et
non d’autres?
Pour ce faire, un premier chapitre sera consacré à la règle de l’indisponibilité en droit
anglais, ses principes, la législation qui en est la source et les exceptions tolérées car
appliquées aux objets considérés comme moins essentiels, dont le déclassement ne serait pas
un appauvrissement pour le musée. Il s’agit d’une première approche de la législation muséale
anglaise, toutefois en lien avec le coeur de mon sujet que je développe en deuxième partie. Le
deuxième chapitre, sera donc consacré aux deux types de biens autorisés à être déclassés, que
sont les restes humains et les biens spoliés. Pour chacun, seront présentés les cadres légaux et
déontologiques, ainsi qu’une étude de cas, dans laquelle seront expliquées les raisons qui
justifient ces restitutions. Et enfin, dans un troisième et dernier chapitre je tenterai de
rassembler toutes les idées et conclusions dressées autour des problématiques de retour de
biens culturels à leurs pays d’origine, en théorisant la notion de restitution. Les arguments
pour et les arguments contre seront évoqués tout d’abord, pour ensuite aborder les différentes
solutions qui sont offertes aux musées anglais pour remédier aux conflits lors d’une
revendication. En m’appuyant sur l’étude et la synthèse que j’aurais donc effectué, je tenterai
d’apporter des réponses à la délicate question de restituer ou non les œuvres phares des grands
musées, tel que le British Museum et le débat autour des frises du Parthénon.
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
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33 Voir p.55.
« In art, we value the creative act : the gesture that transcends boundaries, defies conventions, and break the
rules. In contrast, law and ethic work within a system of boudaries, conventions, and rules, maintained by an
established order. How cant they coexist ? »34
A. Le principe de l’indisponibilité
1. La règle
À l’instar des biens placés sous la domanialité publique en droit français, en
Angleterre les biens de la Couronne sont indisponibles. Les biens inventoriés dans les
collections anglaises sont soumis au principe de l’indisponibilité selon les règles fournies dans
le statut du musée qui les conserve. Le deaccessioning (déclassement) de ces biens n’est pas
permis sauf certaines exceptions et cas particuliers, sous réserve de l’adoption de certaines
conditions très restrictives35.
Le Board of Trustees (conseil d’administration) a la responsabilité de conserver,
préserver et enrichir la collection qui leur est attribuée, en s’assurant de leur accessibilité au
public et pour la recherche. Le «conseil d’administration ne peut se défaire de sa propriété
sans le consentement du Secrétaire d’État»36. L’article 4 du Museum and Galleries Act 1992
(«Acquisition and disposal of pictures and other objects») pose les principes relatifs aux
acquisitions et aux cessions d’objets et interdit aux musées de déclasser leurs biens, sauf
dans certains cas. La règle veut que le conseil d’administration ne puisse se défaire d’un objet
à moins que cela ne soit en vertu de l’article 6 de la présente loi, concernant le transfert
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34 « En art, nous donnons de la valeur à l’acte créatif: le geste qui transcende les frontières, défie les conventions, et rompte avec les règles. En contraste, le droit et la déontologie fonctionnent au sein d’un système de frontières de conventions et de règles maintenues par un ordre établi. Comment peuvent-elles coexister?», MERRYMAN J. H., Law, ethics and the visual arts, Alphen aan den Rijn: Kluwer law international, 2007, p.25.35 CORNU M., RENOLD M.-A., Le renouveau de biens culturels: les modes alternatifs de règlement des litiges, JDI, 2007, p.503.36 «(The Board) shall maintain a collection of works of art (...) and shall care for, preserve and add to the works of art and the documents in their collection; secure that the works of art are exhibited to the public; secure that the works of art and the documents are available to persons seeking to inspect them in connection with study or research. (...) A new Board shall not acquire or dispose of land without the consent of the Secretary of State», Museum and Galleries Act 1992, s 2.
d’objets entre institutions37; ou que l’objet soit considéré comme inadéquat à la collection, et
que son transfert ne porte pas préjudice aux étudiants ou aux chercheurs38; ou bien que l’objet
soit endommagé 39. Il est toutefois précisé dans la législation qu’une telle action ne peut être
entreprise si elle va à l’encontre des conditions posées par le donateur et/ou par le Trust
auquel est soumis l’objet. Il va de soi désormais d’aborder le système du Trust anglais et les
conditions qu’il pose à la conservation des biens dans les musées.
2. Les conditions
a. L’indisponibilité des collections en vertu du Trust
Illustration magistrale de l’exoticité du droit anglais40, la notion de Trust déroute le
juriste français par l’étendue de son champ d’application. La définition anglaise de cette
véritable institution qu’est le Trust en Angleterre est formulée ainsi:
«A relation or association between one person (or persons) on the one hand and another person (or persons) on the other, based on confidence, by which property is vested in or held by the one person, on behalf of and for the benefit of another»41.
Il s’agit d’un système triangulaire dans lequel un individu (le disposant) investit une
personne, appelée le Trustee, de la propriété de son bien, pour le bénéfice d’un tiers, désigné
par le disposant, le cestui que trust (le fidéicommissaire)42.
Beaucoup de collections en Angleterre sont soumises à des conditions de trust privé.
Les biens conservés dans les musées sont indisponibles selon la règle du Trust. La plupart du
temps ces conditions ont été posées par le donateur, que ce soit de son vivant ou par
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37 «(The Board) shall not dispose of a relevant object the property in which is vested in them and which is comprised in their collection unless the disposal is an exercise of the power conferred by section 6», Museum and Galleries Act 1992, s 4 (3). Voir traduction Annexe n°.1, p.66-67.38 «the disposal is of a relevant object which, in the Board's opinion, is unsuitable for retention in their collections and can be disposed of without detriment to the interests of students or other members of the public» Museum and Galleries Act 1992, ss 4 (4) (b).39 «the disposal (...) is of a relevant object which the Board are satisfied has become useless for the purposes of their collections by reason of damage, physical deterioration, or infestation by destructive organisms» Museum and Galleries Act 1992, ss 4 (4) (c).40 PAPANDREOU-DETERVILLE M.-F., Le droit anglais des biens, Paris, LGDJ, 2004, p.1.41 RUTHERFORD L. & BONE S., Osborn’s Concise Law dictionary, Londres, Sweet & Maxwell, 1993, p.332-333.42 SÉROUSSI R., Introduction aux droits anglais et américains, Paris, Dunod, 2003, p.53.
testament. Il est arrivé que certains musées locaux, d’ordinaire plus souples dans leur
règlementation en matière de déclassement, ne soient pas autorisés à déclasser certains objets
en raison des obligations prononcées par le Trust43. En vertu de l’article 4, paragraphe (6) du
Museum and Galleries Act 1992 le conseil d’administration de la Wallace Collection ne peut
disposer d’un objet ou acquérir un nouvel objet pour la collection, et cela en vertu des
conditions posées par le donateur44. Les Trustees sont donc tenus à cette règle et ne peuvent
pas y déroger.
D’une manière générale, et bien que des exceptions existent à la règle de
l’indisponibilité, les conditions posées dans un trust par le donateur primeront toujours sur les
possibilités de déclasser. «La présomption du trust sous-tend l’exploitation de l’ensemble des
collections nationales, de telle sorte qu’elles sont conservées pour le bénéfice des visiteurs à
présent et dans le futur. Il en est ainsi à la fois parce que les statuts fondamentaux (governing
statutes) des collections nationales britanniques interdisent le déclassement, mais aussi parce
qu’il s’agit légalement d’organisations caritatives»45.
b. La question de la propriété
Sur la question de la propriété, le principe français qui veut «qu’en fait de meuble,
possession vaut titre»46 n’est pas applicable en droit anglais. Le droit des bien anglais diffère
assez du droit français sur la question de la propriété, il ne fait par exemple pas de distinction
entre propriété publique et propriété privée. Aucun transfert de propriété lié à la possession
n’est possible47, la condition première à remplir doit donc être, bien entendu, que le musée
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43 DOUBLEDAY T., « Droits et interdictions relatifs au déclassement (de-accession) affectant les musées et les galeries du Royaume-Uni », L'inaliénabilité des collections, performances et limites, Colloque international organisé par le Centre de recherches sur le droit du patrimoine culturel et naturel, (CECOJI, CNRS - Université de Poitiers/université Paris-Sud 11) l'UMR LISA (Université de Corte) et le musée du Quai Branly, les 2 et 3 mars 2010 au musée du Quai Branly, p.2. Les actes ont été publiés récemment ainsi: L’inaliénabilité des collections, performances et limites?: actes du colloque organisé les 2 et 3 mars 2010 au Musée du Quai Branly, Paris, L’Harmattan, (coll. Droit du patrimoine culturel et naturel), 2012.44 «The Wallace Collection Board shall neither add any object to their collection nor dispose of any object the property in which is vested in them and which is comprised in their collection», Museum and Galleries Act 1992, s 4 (6).45 DOUBLEDAY T., « Droits et interdictions relatifs au déclassement (de-accession) affectant les musées et les galeries du Royaume-Uni », L'inaliénabilité des collections, performances et limites, Colloque international organisé par le Centre de recherches sur le droit du patrimoine culturel et naturel, (CECOJI, CNRS - Université de Poitiers/université Paris-Sud 11) l'UMR LISA (Université de Corte) et le musée du Quai Branly, les 2 et 3 mars 2010 au musée du Quai Branly, p.5.46 Article 2276 du Code civil.47 PAPANDREOU-DETERVILLE M.-F., Le droit anglais des biens, Paris, LGDJ, 2004, p.11.
soit propriétaire du bien concerné. La première question à poser en cas de demande en
restitution est donc de savoir si le musée est véritablement le propriétaire de l’objet.
Il arrive que la frontière entre un don et un prêt soit mal définie, et peut alors faire l’objet de
discordes48. La notion de possession est différente de la notion de propriété. Un musée peut
posséder un bien mais ne pas en être le propriétaire légal. C’est le cas par exemple des prêts à
très long terme, lorsque le bienfaiteur fait don de son bien à vie. Les deux toiles de Vernet49
acquise en 2004 par la National Gallery de Londres en sont un bon exemple, puisqu’elles ont
été données par David H. Koch, et qu’il s’agit d’un prêt à long terme50. Cela peut également
être le cas de l’acceptance in lieu. Équivalent anglais de la dation en paiement, l’acceptance
in lieu, permet au contribuable de transférer la propriété d’un bien culturel dans le domaine
public. Le don a valeur de paiement de l’impôt et l’objet est placé dans un musée ou une
bibliothèque51. Ce système a permis notamment de garder à Sissinghurst Castle dans le Kent,
dont les jardins appartiennent au National Trust, un portrait peint par Philip Alexis de Laszlo
ainsi que les ouvrages de toute la bibliothèque52. Les objets «acceptés in lieu» sont acquis par
une institution publique mais prêtés au propriétaire du lieu dans lequel ils sont conservés et
sont sujets à des conditions ayant trait à l’accessibilité du public et aux conditions de
conservation53. Si l’objet a été déposé en lieu et place d’un impôt sur l’héritage ou de droits de
succession, et affecté à l’institution sous cet arrangement alors le déclassement sera limité par
les conditions posées dans le testament.
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48 MANISTY E. & SMITH J., « The deaccessioning of objects from public institutions: legal and related considerations », Art, Antiquity and Law, Vol. XV, Issue 1, April 2010, p.3. L’article fait d’ailleurs mention du cas du crâne du «Proconsul Africanus» mis au jour par Richard Leakey, en prêt à long-terme au British Museum of Natural History.49 Cf. Annexes n°14-15, p.94.50 MANISTY E. & SMITH J., « The deaccessioning of objects from public institutions: legal and related considerations », Art, Antiquity and Law, Vol. XV, Issue 1, April 2010, p.5.51 Art Council England, Acceptance in Lieu, <http://www.artscouncil.org.uk/what-we-do/supporting-museums/cultural-property/tax-incentives/acceptance-lieu/> (consulté le 27 avril 2012).52 RYCKNER D., «Acceptance in lieu : acquisitions récentes des musées britanniques (1)», La Tribune de l'Art, samedi 21 novembre 2009. <http://www.latribunedelart.com/em-acceptance-in-lieu-em-acquisitions-recentes-des-musees-britanniques-1-article002340.html> (consulté le 2 mai 2012). Pour le tableau en question, voir Annexe n°16, p.94.53 MANISTY E. & SMITH J., « The deaccessioning of objects from public institutions: legal and related considerations », Art, Antiquity and Law, Vol. XV, Issue 1, April 2010, p.24.
3. Le principe de l’indisponibilité en fonction des différentes catégories
de collections54
S’agissant du principe d’inaliénabilité, le système anglais fait la distinction suivant les
biens et les collections concernées. Le Museum and Galleries Act 1992 prévoit d’ailleurs une
sous-section particulière en fonction des musées. Il est en effet divisé en sept sous-sections
dont quatre sont établies pour un musée en particulier. La sous-section 3 veut que «le conseil
d’administration de la National Gallery ne peut se défaire d’un objet essentiel à la collection
et dont la responsabilité lui a été confiée, à moins que la cession de l’objet soit effectuée en
vertu du pouvoir conféré par l’article 6 de la présente loi»55. La sous-section 4 indique la
même règle pour le conseil d’administration de la Tate Gallery et rajoute des exceptions,
notamment sur l’état de l’objet, en effet si celui-ci est devenu inadéquat à la collection en
raison des dommages qu’il a pu subir, d’une détérioration physique ou d’une infestation due à
des organismes destructeurs56. Ainsi la règle d’inaliénabilité en droit anglais prend sa source
dans la législation applicable au musée en particulier. La question du déclassement des biens
dans les musées anglais est à traiter de façon différente en fonction de la catégorie à laquelle
appartient le musée, il en existe quatre, et malheureusement pour le juriste français qui est
déjà quelque peu perdu dans ce labyrinthe qu’est celui du droit anglais, certains musées
appartiennent à plusieurs catégories à la fois57.
a. Les musées nationaux (National Museums)
En ce qui concerne les musées nationaux la loi est la même pour tous58, leurs
collections sont soumises au principe d’indisponibilité, étant donné qu’ils conservent,
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54 Je ne fait mention ici que des trois catégories principales et pertinentes à mon sujet que sont les musées nationaux, les musées locaux et les musées à statut caritatif. Il existe bien entendu d’autres catégories, tels que les musées d’université, les propriétés classées sous l’appellation «English Heritage», les musées indépendants ou privés, les propriétés classées sous le National Trust, ou encore les musées placés sous l’autorité du Ministère des armées. (Source: Site internet de la Museum Association, rubrique «FAQ», consulté le 2 mai 2012).55 «National Gallery Board shall not dispose of a relevant object the property in which is vested in them and which is comprised in their collection unless the disposal is an exercise of the power conferred by section 6 below», Museum and Galleries Act 1992, s 4 (3).56 Museum and Galleries Act 1992, s 4 (4) (c), voir plus haut, note n°39, p.10.57 DOUBLEDAY T., « Droits et interdictions relatifs au déclassement (de-accession) affectant les musées et les galeries du Royaume-Uni », In L’inaliénabilité des collections, performances et limites?, compte-rendu du colloque organisé les 2 et 3 mars 2010 au Musée du Quai Branly, p.2.58 Sont notamment des musées nationaux le British Museum, la Tate Gallery ou encore la National Gallery.
préservent et mettent à disposition du public, les collections qui leur ont été confiées, au nom
de la Nation59. Lorsqu’il s’agit d’objets acquis grâce à un don pour lequel plusieurs conditions
ont été posées par le donateur, ou lorsque l’objet est soumis à un Trust, le musée ne peut pas
s’en dessaisir. La Wallace Collection est très particulière car la collection ne peut ni s’agrandir
ni diminuer, les Trustees ne peuvent faire aucune acquisition et ne peuvent disposer d’aucun
des biens contenus dans leur institution60.
Je n’évoquerai ici que l’exemple du British Museum, l’un des plus importants des
musées nationaux anglais, tout d’abord car il est le premier musée financé par l’État
britannique, et ensuite parce qu’il a servi de modèle pour la constitution des autres musées
nationaux, au Royaume-Uni et ailleurs61. Le British Museum a été créé par une loi du
Parlement en 1753 pour conserver la collection du physicien et collectionneur Hans Sloane
(1660–1753). Ouvert au public le 15 Janvier 1759, il est ainsi le premier musée public
national au monde62. Les Trustees du British Museum sont tenus par le British Museum Act de
1963 de conserver et de préserver les collections pour le bénéfice du public et pour la
postérité63. Diverses lois ont été votées après sa création et en 1963 cette section a été rajoutée
pour que les objets acquis après la collection originelle soient protégés au même titre du Trust
privé64. Le British Museum a d’ailleurs édité une politique concernant le déclassement
(deaccessioning), entre autres sujets, sous forme d’un code de conduite65.
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59 CORNU M., RENOLD M.-A., Le renouveau des restitutions de biens culturels: les modes alternatifs de règlement des litiges, JDI, 2007, p.503.60 Museum and Galleries Act 1992, s 4(6), voir plus haut, p.2.61 DOUBLEDAY T., « Droits et interdictions relatifs au déclassement (de-accession) affectant les musées et les galeries du Royaume-Uni », In L’inaliénabilité des collections, performances et limites?, compte-rendu du colloque organisé les 2 et 3 mars 2010 au Musée du Quai Branly, p.2.62 Site internet du British Museum, History of the British Museum <http://www.britishmuseum.org/about_us/the_museums_story/general_history.aspx>, (consulté le 11 février 2012).63 Objects vested in the Trustees as part of the collections of the Museum shall not be disposed of by them otherwise than under section 5 or 9 of this Act [or section 6 of the Museums and Galleries Act 1992] British Museum Act 1963, s 3(4). Les articles 5 et 9 sont respectivement dédiées aux cessions et transferts d’œuvres. 64 Provided that where an object has become vested in the Trustees by virtue of a gift or bequest the powers conferred by this subsection shall not be exercisable as respects that object in a manner inconsistent with any condition attached to the gift or bequest, British Museum Act 1963, s 5 (1). Cf. Annexe n°3, p.69-71 pour la traduction française.65 British Museum Policy on De-accession of Registered Objects From the Collection. Tous les documents sont disponibles en ligne en version pdf, sur le site internet du musée, dans la section «management and governance», <http://www.britishmuseum.org/about_us/management/museum_governance.aspx>. Pour le code de conduite du British Museum sur le deaccessioning en version française, cf. Annexe n°7, p.83-84.
b. Les musées locaux (Local Museums)
Les musées locaux conservent des «collections d’art et d’antiquités détenues par de
nombreuses collectivités locales autonomes dans tout le Royaume-Uni»66. Ces collections
sont gérées en vertu du Public Libraries and Museum Act 196467, qui ne prévoit aucune
restriction particulière en matière de déclassement. Étant donné que les musées des
collectivités locales ne sont pas considérés par la loi comme des organismes caritatifs, et à
moins que les collections soient soumises à l’obligation d’un trust privé interdisant le
déclassement, le responsable de la collection a le pouvoir de se déposséder d’un bien conservé
dans son institution, si ce déclassement est considéré comme bénéfique pour l’institution
comme pour le public. Ce pouvoir est conféré par le Local Government Act 1972, à l’article
11168.
Les musées locaux sont pour la plupart accrédités par le Art Council England
(autrefois Museums, Libraries and Archives Council)69 et n’ont donc pas le droit de se
déposséder de leurs biens par le biais d’une vente70. La loi autorise ces institutions à céder
leurs biens dans le but de récolter des fonds, à condition que ces fonds soient utilisés dans
l’intérêt de l’institution, pour de nouvelles acquisitions par exemple, ou pour le bénéfice du
public. Tout autre utilisation plus triviale des fonds récoltés serait une violation des termes et
conditions posés lors de l’accréditation donnée par le Art Council England ou des principes
déontologiques édictés par la Museum Association71 et entraînerait la perte de l’accréditation
ainsi que le financement prévu par l’organisme associatif (dans le cas ou bien sûr l’institution
avait été accrédité ou est membre de la Museum Association). L’article 58 du County of
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66 DOUBLEDAY T., « Droits et interdictions relatifs au déclassement (de-accession) affectant les musées et les galeries du Royaume-Uni », In L’inaliénabilité des collections, performances et limites?, compte-rendu du colloque organisé les 2 et 3 mars 2010 au Musée du Quai Branly, p.1.67 Pour une traduction personnelle, voir Annexe n°4, p.7168 Cf. Annexe n°5, p.72.69 Présentation du Art Council England en annexes, cf. Annexe n°12, p.93. Le changement a été opéré en mars 2012, pour plus d’informations sur le sujet, voir l’article de Martin Bailey, «Arts Council England takes over most MLA functions», publié le 22 décembre 2010 dans The Art Newspaper <http:/ /www.theartnewspaper.com/articles/Arts+Council+England+takes+over+most+MLA+functions/22147> (consulté le 2 mai 2012).70 La loi régissant les musées locaux en Écosse est plus stricte sur ce sujet car il leur est permis de vendre ou de céder par d’autres biais, comme l’échange par exemple, seulement si l’œuvre d’art en question existe en double dans leur collection (Public Libraries Consolidation (Scotland) Act 1955, s 21, et Education (Scotland) Act 1980), disponibles ici <http://www.legislation.gov.uk/ukpga/1955/27/pdfs/ukpga_19550027_en.pdf> et ici <http://www.legislation.gov.uk/ukpga/1980/44> (consultés le 2 mai 2012).71 Présentation de la Museum Association en annexes, cf. Annexe n°13, p.93.
Lancashire Act 1984 «donne aux conseils généraux le pouvoir de prêter, échanger ou
autrement de se séparer de la possession (mais non de la propriété) d'un spécimen, œuvre d'art
ou d'un livre qui leur a été confié, et lorsqu’il n’est pas, dans l’opinion de l'autorité
responsable, nécessaire de l’exposer ou de l'utiliser dans un musée, une galerie d'art, une
bibliothèque ou un autre bâtiment dirigé par l'autorité concernée»72. Cela ne donne pas pour
autant aux autorités locales du Lancashire le pouvoir de faire don des objets présents dans
leurs collections. Un tel pouvoir est en effet donné par l’article 58 (2) mais est soumis à des
restrictions, les objets peuvent être transférés par voie de don à une autre personne morale
propriétaire d’un musée, d’une galerie d’art ou d’une bibliothèque, où l’exposition de l’objet
concerné serait plus adaptée que dans les bâtiments du conseil général73.
c. Les musées d’organismes caritatifs (Charitable Museums)
Les collections de ces musées sont régies en vertu de la loi sur les organismes
caritatifs, le Charities Act 2006 qui considère dans l’article 2(1) que le musée a une fin
caritative, c’est-à-dire qu’ils ont pour objectif «l’avancement des arts, de la culture, du
patrimoine et de la science»74. Ces musées «possèdent des objets à des fins caritatives et pour
le bénéfice du public, et sont par conséquent responsables devant la loi de la conservation et
de l’exposition de ces objets»75. Ce qui signifie qu’ils n’ont pas le pouvoir de déclasser les
biens présents dans leurs collections tout simplement parce que, en quelque sorte, ces biens ne
leur appartiennent pas directement, mais appartiennent plutôt à la communauté au sens large
du terme. Le droit anglais des musées veut aussi que chaque musée ait sa propre législation,
et, dans le cas des musées caritatifs, lorsque la législation ne fait pas mention particulière du
déclassement, alors le musée est soumis à la décision des «Charity Commissionners» ou de l’
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72 “power to lend exchange or otherwise to part with possession (but not ownership) of any specimen, work of art or book vested in them which in the opinion of the authority is not required for exhibition or use in any museum, art gallery, library or other building of the authority”, County of Lancashire Act 1984, s 58 <http://committeeadmin.lancaster.gov.uk/mgConvert2PDF.aspx?ID=3827> (consulté le 2 mai 2012).73 Department for Culture, Media and Sport, Museums, Libraries and Cultural Property, Restitution of Objects S p o l i a t e d i n t h e N a z i - E r a : A C o n s u l t a t i o n D o c u m e n t , J u i l l e t 2 0 0 6 , < h t t p : / /w e b a r c h i v e . n a t i o n a l a r c h i v e s . g o v. u k / + / h t t p : / / w w w. c u l t u r e . g o v. u k / i m a g e s / c o n s u l t a t i o n s /cons_restitutionspol_nera.pdf> (consulté le 2 mai 2012).74 «Meaning of “charitable purpose” (...) the advancement of the arts, culture, heritage or science» Charities Act 2006, s 2(1), <http://www.legislation.gov.uk/ukpga/2006/50/pdfs/ukpga_20060050_en.pdf> (Consulté le 2 mai 2012).75 DOUBLEDAY T., « Droits et interdictions relatifs au déclassement (de-accession) affectant les musées et les galeries du Royaume-Uni », In L’inaliénabilité des collections, performances et limites?: compte-rendu du colloque organisé les 2 et 3 mars 2010 au Musée du Quai Branly, p.2.
«Attorney General» (le Procureur). Les conditions de déclassement seraient alors que l’objet
en question soit sans valeur, ou que le musée puisse prouver que le déclassement serait
bénéfique pour l’institution ou les collections détenues par elle, «ou bien moralement justifié
par des circonstances exceptionnelles»76.
B. Les exceptions
1. Les déclassements tolérés
Les musées nationaux peuvent disposer des biens de leurs collections, les donner ou
les vendre si l’une des conditions suivantes est remplie: ils possèdent un double, ou le bien est
un document imprimé postérieur à 1850 et le musée en a une photocopie, ou le bien est
devenu inapproprié pour la collection et il peut être vendu sans que n’en pâtissent les
chercheurs ou le public ou, enfin l’objet est devenu inadapté en raison de sa détérioration par
exemple77. L’article 5 du British Museum Act 1963 autorise les Trustees à se défaire de
certains objets: des duplicatas, des objets fabriqués après 1850 et des objets ne rentrant pas en
adéquation avec ses collections, ils sont également investis du pouvoir de détruire les objets
inutiles78.
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76 Charities Act 2006, s 26 et s 27.77 CORNU M., RENOLD M.-A., Le renouveau des restitutions de biens culturels: les modes alternatifs de règlement des litiges, JDI, 2007, p.503.78 The Trustees of the British Museum may (...) dispose of any object vested in them and comprised in their collections if the object is a duplicate of another object, or the object appears (...) to have been made not earlier than the year 1850, and substantially consists of printed matter of which a copy made by photography or a process akin to photography is held by the Trustees, or (...) the object is unfit to be retained in the collections of the Museum and can be disposed of without detriment to the interests of students. The Trustees may destroy or otherwise dispose of any object vested in them and comprised in their collections if satisfied that it has become useless for the purposes of the Museum by reason of damage, physical deterioration, or infestation by destructive organisms. British Museum Act 1963, s 1 et s 2. Traduction française en annexes, Annexe n°3, p.69.
a. Les doublons
Les musées nationaux sont, pour la plupart, investis du pouvoir de déclasser un objet
s’il existe un double dans leurs collections79. Ce pouvoir, déjà présent dans la loi de 1767 du
British Museum, a été utilisé jusque là principalement pour procéder au déclassement des
pièces de monnaies et des doubles d’imprimés, particulièrement lors de l’acquisition d’un
nouvel exemplaire en meilleur état de conservation80.
C’est justement cet argument qui a été utilisé pour la restitution des Bronzes du Bénin
au Nigéria. Sous influence britannique depuis 1866, le pays a connu des évènements d’une
grande violence, notamment à la fin du XIXème siècle. Le 18 janvier 1897, au cours d’une
opération militaire particulièrement sanglante, et menée en réponse au non-respect d’un
accord commercial, des objets furent emportés. Ces objets devaient être vendus aux enchères
et les fonds ainsi récoltés rendus aux familles des victimes britanniques de la première
altercation. Parmi eux deux cents bas-reliefs en bronze entrèrent dans les collections du
British Museum. C’est grâce à une politique dynamique en matière de deaccessioning menée
par le musée dans les années 1950 à 1970 que le Nigéria a pu retrouver les bronzes. Étant
donné que les pièces étaient considérées comme des doublons dans la collection du British
Museum, elles ont pu être déclassées et cédées au gouvernement nigérian par le biais d’une
vente81.
b. Les faux et contrefaçons
Le deuxième critère pour pouvoir procéder au déclassement est que l’objet soit
considéré comme inadéquat à la collection et qu’il soit possible de s’en défaire sans que cela
porte préjudice ni aux étudiants ni aux chercheurs. Ainsi le Museum and Galleries Act 1992
permet aux Trustees de la National Portrait Gallery de se défaire de tout portrait dont
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79 Sauf la Tate Gallery, Museum and Galleries Act 1992, s 4 (4).80 DOUBLEDAY T., « Droits et interdictions relatifs au déclassement (de-accession) affectant les musées et les galeries du Royaume-Uni », In L’inaliénabilité des collections, performances et limites?: compte-rendu du colloque organisé les 2 et 3 mars 2010 au Musée du Quai Branly, p.4.81 HERSHKOVITCH C. et RYKNER D., La restitution des œuvres d’art. Solutions et impasses, Hazan, 2011, p.71-72.
l’identification serait remise en doute82. Il s’agira toutefois de faire la distinction entre un faux
et une copie qui elle a une véritable valeur. La National Gallery avait d’ailleurs organisé une
exposition sur le sujet en 2010, intitulée «Close Examination : fakes, mistakes &
discoveries » (« A la loupe : faux, erreurs et découvertes »). La National Gallery a été victime
de faussaires à plusieurs reprises, c’est avec la création de son département scientifique en
1934 que l’identification de certaines œuvres a été revue83.
c. Les objets endommagés
L’article 5 du Museum and Galleries Act 1992 permet aux Trustees de se
défaire, ou même de détruire, tout objet qui aurait subi des dégâts, qui serait physiquement
détérioré ou infesté par des organismes destructeurs. Ce droit pourrait très bien être invoqué
par le British Museum s’il cherchait à déclasser certains objets composés de matériaux
organiques, trop endommagés pour pouvoir les conserver dans de bonnes conditions ni même
les restaurer.84 La plupart des autres musées, nationaux et non nationaux, suivent les mêmes
restrictions et conditions en matière de déclassement. Le conseil d’administration du Victoria
and Albert Museum est depuis 1983 soumis à l’article 6 du National Heritage Act de 1983,
qui est similaire aux clauses des articles 3 (4) et 5 du British Museum Act 1963. Ainsi le
Victoria and Albert Museum «peut déclasser les objets en double, les objets considérés
comme impropres à être conservés dans l’institution sans que cela pose des désagréments aux
étudiants, aux chercheurs ou à tout membre du public, ainsi que tout objet qui aurait subi trop
de dégâts pour assurer de bonnes conditions de conservation et de restauration»85. Les statuts
et les lois secondaires qui régissent les musées tels que le Science Museum ou le Museum of
London contiennent tous des clauses qui suivent de près celles du British Museum Act 1963.
Certains musées ont des droits plus souples en matière de déclassement.
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
19
82 The National Portrait Gallery Board shall not dispose of a relevant object the property in which is vested in them and which is comprised in their collection unless, the disposal (by whatever means) is of a portrait and the Board are satisfied that the identification formerly accepted by them of the person portrayed has been discredited, Museum and Galleries Act 1992, s 4.83 MAZEIN Élodie, «Faux, supercheries et bonnes surprises à la National Gallery de Londres», AFP, 29 juin 2010. <http://www.lapresse.ca/arts/arts-visuels/201006/29/01-4294209-faux-supercheries-et-surprises-a-la-national-gallery-de-londres.php> (consulté le 2 mai 2012).84 DOUBLEDAY T., « Droits et interdictions relatifs au déclassement (de-accession) affectant les musées et les galeries du Royaume-Uni », In L’inaliénabilité des collections, performances et limites?: compte-rendu du colloque organisé les 2 et 3 mars 2010 au Musée du Quai Branly, p.4.85 National Heritage Act 1983, s 6.
2. Les déclassements difficiles
a. Les chefs d’œuvres indispensables à la collection
Une des missions essentielles du musée est d’acquérir et de préserver des objets pour
la postérité. Il paraît donc difficile pour les responsables des musées de se défaire de certaines
pièces maîtresses de leur collection lorsqu’elle sont revendiquées. Dans le cas de biens
culturels telles que les antiquités grecques du British Museum, lorsqu’il n’est pas prouvé que
l’appropriation ait été illégale, le musée ne peut dûment pas se permettre de déclasser ces
objets, principalement parce qu’on considère que cela appauvrirait la collection. Certains cas
notables comme les marbres du Parthénon, les bronzes du Bénin et les momies égyptiennes,
ont été largement médiatisés et rendus publics. Ces objets n’entrent pas dans la catégorie des
objets pouvant être déclassés et restitués car en vertu de la loi ils sont considérés comme
indisponibles, mais ajouté à cela, la raison principale est que ces objets sont considérés
comme trop précieux à la collection pour être rendus.
C’est là qu’entre en jeu l’importance de la déontologie en Angleterre, et des processus
de médiation. Les normes éthiques et morales existent en chaque personne, mais les codes de
déontologie sont là pour «écrire les valeurs morales qu’une collectivité doit respecter au-delà
de sa propre éthique et de sa propre morale»86. La Museum Association, entre autres, a mis
en place un code de déontologie ainsi que divers codes de conduite, pour accompagner les
musées dans leur démarche de réponse à une demande en restitution87. Notamment la section
7.7 au sujet du traitement de ces demandes:
«S'occuper sensiblement et promptement des requêtes de rapatriement depuis le Royaume-Uni, d’éléments présents dans la collection du musée, en prenant en compte de: la loi, la pensée actuelle sur le sujet, les intérêts des descendants réels et culturels, la force de la relation avec les demandeurs, leur importance scientifique, pédagogique, culturelle et historique ; leur traitement futur des objets»88
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
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86 MILES C., «Déontologie du Patrimoine et des Musées», Journée d’étude organisée par l’ICOM, Paris, le 21 mars 2012.87Pour une étude complète sur le sujet voir : LEGGET J., Restitution and repatriation: Guidelines for good practice, London, Museum and Galleries Commission, 2000 et SIMPSON M., Museums and repatriation: an account of contested items in museum collections in the UK, with comparative material from other countries, London, Museum Association, 1997.88 Museum Association, Code of ethics, s 7.7, cf. Annexe n°6, p.73-82.
Il est à la charge du musée de mettre à la disposition de tous, des documents écrits sur
la politique adoptée, sur les questions de déclassement et de restitution. Et c’est également au
musée de prendre en compte ces demandes au cas par cas, en s’aidant des codes de
déontologie, mais également en faisant appel à leur bon sens, leur morale et en pesant les
intérêts de chacun89.
Il est toutefois entendu que deux types d’objets sont considérés comme susceptibles
d’être déclassés pour les restituer à leur(s) propriétaire(s) légitime(s), il s’agit des restes
humains et des biens spoliés.
b. Deux exceptions: les restes humains et les objets spoliés
Face aux demandes de plus en plus croissantes des propriétaires spoliés, des
communautés pillées, des peuples assujettis pendant tant d’années à des puissances
étrangères, des peuples autochtones voulant affirmer leur légitimité sur leur patrimoine
culturel, il a fallu contourner les restrictions juridiques et permettre la restitution de certains
biens. Le principe veut que si l’acquisition a été illégale alors l’objet est susceptible d’être
restitué, ainsi les biens spoliés durant les temps de guerre sont rendus à leur propriétaire
légitime dans le but de réparer une erreur commise dans le passé. Ainsi le Holocaust Act a été
voté en 2009, et bien que valable pendant seulement dix ans, cette loi va permettre aux
propriétaires spoliés de se manifester pour revendiquer leur bien. Si l’objet a une quelconque
valeur symbolique, religieuse, spirituelle ou culturelle pour un peuple indigène, c’est le cas
pour les restes humains, il s’agit de faire preuve de sagesse, de bon sens et de comprendre
l’importance que revêt l’objet pour la communauté qui le revendique. Une loi a donc été votée
pour permettre la sortie des restes humains du domaine public des musées et permettre leur
restitution, le Human Tissue Act de 2004.
Après ces quelques mots introductifs sur ce qui fait le cœur de ce sujet, nous allons
donc à présent nous attacher à comprendre quels sont les tenants et les aboutissants de ces
deux cas de déclassement particuliers que sont les restes humains et les objets spoliés.
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
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89 Museum Association, Disposal Digest, <http://www.museumsassociation.org/download?id=15854> (consulté le 2 mai 2012). Cf Annexe n°11, p.92 pour la traduction française.
II. Les déclassements particuliers
A. Les restes humains
La question des restes humains est particulièrement intéressante dans le cadre de la
restitution de biens culturels car, s’agissant de dépouilles humaines, toutes les barrières
juridiques semblent être soudainement ôtées sans que cela paraisse problématique.
L’Angleterre n’est bien évidemment pas la seule à être concernée par cette question délicate,
pour ne parler que de notre pays, la Musée de l’homme a restitué en 2002 la Vénus Hottentote
à l’Afrique du Sud, après vingt ans de réclamations90; et très récemment, le 4 mai 2010, a été
votée la loi permettant de restituer les têtes maories à la Nouvelle-Zélande91. Au sujet de ces
restitutions et dans le but de justifier la décision française, le ministre de la culture Frédéric
Mitterand a dénoncé l’acquisition frauduleuse des têtes maories en avançant qu’«on ne
construit pas une culture sur un trafic, sur un crime. On construit une culture sur le respect de
l’échange, sur une véritable pratique de la mémoire»92.
Le guide de recommandations produit par le Department for Culture Media and
Sports en 2005, dérivant de la loi relative aux tissus humains (Human Tissue Act 2004) définit
les restes humains comme étant «les corps, parties de corps d’êtres humains autrefois vivants
appartenant à l’espèce Homo sapiens (définie comme des personnes entrant dans la gamme de
formes anatomiques connues aujourd'hui et dans un passé récent), y compris le matériel
ostéologique (tout ou partie du squelette, des os ou des fragments d’os et de dents), tissu mou
comprenant les organes et la peau, les embryons et les préparations de tissu humain»93. Il est
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
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90 PIERRAT E., Faut-il rendre les œuvres d’art ?, Paris, CNRS Éditions, 2011, p.104.91 Dossier de presse relatif à la remise officielle des têtes maories des collections des musées de France, en application de la loi n° 2010-501 du 18 mai 2010 visant à autoriser la restitution par la France des têtes maories à la Nouvel le-Zélande e t re la t ive à la ges t ion des col lect ions , d isponible ic i : <ht tp: / /www.culturecommunication.gouv.fr/Espace-Presse/Dossiers-de-presse/Remise-officielle-des-tetes-maories-des-collections-des-musees-de-France?> (consulté le 30 avril 2012).92 Frédéric Mittérand, Compte-rendu intégral, Séance du lundi 29 juin 2009, Sénat, Journal Officiel de la République française, N°77 S. (C.R.), publié le mardi 30 juin 2009, p.6430, <http://www.senat.fr/seances/s200906/s20090629/s20090629.pdfl> (consulté le 1er mai 2012).93 «the bodies, and parts of bodies, of once living people from the species Homo sapiens (defined as individuals who fall within the range of anatomical forms known today and in the recent past). This includes osteological material (whole or part skeletons, individual bones or fragments of bone and teeth), soft tissue including organs and skin, embryos and slide preparations of human tissue»,,DCMS, Guidance for the Care of Human Remains in Museums, Octobre 2005, p.9.
reconnu que les restes humains sont porteurs d’une valeur symbolique ou sacrée et sont les
témoins de la relation qu’entretiennent les hommes avec leurs morts.
1. Le cadre légal : Human Tissue Act 2004
Les instruments juridiques concernant les restes humains en Angleterre sont contenus
dans la loi relative à la bioéthique (Human Tissue Act 2004), qui a valeur de remplacement de
la loi de 1961 relative aux restes humains, la loi de 1984 relative à l’Anatomie (Anatomy Act
1984) et la loi de 1989 relative à la transplantation d’organes humains, applicables en
Angleterre, au Pays de Galles et en Irlande du Nord. Cette loi régule les activités concernant
le transfert, le stockage, l’usage et la cession de tissus humains94.
En juillet 2000, le Premier Ministre du Royaume-Uni, Tony Blair, et le Premier
Ministre australien, John Howard, ont signé à Londres une déclaration commune visant à,
dans la mesure du possible, favoriser le rapatriement des restes humains vers les
communautés indigènes d’Australie, «The Australian and British governments agree to
increase efforts to repatriate human remains to Australian indigenous communities»95. En
réponse à cela, en Mai 2001, le Ministre pour les Arts, Alan Howarth, mis en place le Human
Remains Working Group (Groupe de Travail sur les Restes Humains), présidé par Norman
Palmer, qui était chargé d’examiner le statut actuel des restes humains dans les collections des
musées publics britanniques et d’étudier les possibilités d’apporter des modifications à la
législation dans ce domaine96. C’est dans cette perspective qu’en 2004 a été rajoutée à la loi
relative aux tissus humains la clause n°47, donnant le pouvoir à neuf musées nationaux97 , en
cas de nécessité et sous réserve de justifications, d’aliéner les restes humains âgés de moins de
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
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94 Site de la Human Tissue Authority, commentaires sur le Human Tissue Act 2004, Juillet 2010, disponibles ici<http://www.hta.gov.uk/legislationpoliciesandcodesofpractice/legislation/humantissueact.cfm> (consulté le 1er mai 2012). Il existe une législation différente pour l’Écosse, le Human Tissue (Scotland) Act 2006, disponible ici <http://www.legislation.gov.uk/asp/2006/4/pdfs/asp_20060004_en.pdf> (consulté le 1er mai 2012).95 John Howard, “Joint Statement with Tony Blair on Aboriginal Remains,”, Communiqué de presse, July 4, 2000, <http://parlinfo.aph.gov.au/parlInfo/download/media/pressrel/FC026/upload_binary/fc0261.pdf;fileType%3Dapplication%2Fpdf>, (consulté le 21 avril 2012).96 DCMS, Guidance for the Care of Human Remains in Museums, Octobre 2005, p.7. Les rapports sont disponibles ici <http://webarchive.nationalarchives.gov.uk/+/http:/www.culture.gov.uk/reference_library/publications/4553.aspx>, (consulté le 21 avril 2012).97 Le Conseil d’administration des arsenaux, les administrateurs du British Museum, les administrateurs de l’Imperial War Museum, le conseil des gouverneurs du musée de Londres, les Administrateurs du Musée maritime national, le Conseil d’administration des galeries et musées nationaux du Merseyside, les administrateurs du Musée d’histoire naturelle, le Conseil d’administration du Musée des sciences, le Conseil d’administration du Victoria and Albert Museum.
mille ans sans avoir recours à une procédure de déclassement98. Le British Museum a de son
côté entrepris des recherches documentaires pour établir une liste de tous les objets étant
considérés comme «restes humains» selon la définition donnée par l’article 47 du Human
Tissue Act de 2004 et se trouvant dans ses collections. Au total 8663 objets ont été répertoriés,
et parmi eux 95% dataient de plus de mille ans et seulement 4% dataient de moins de trois
cents ans. Il est également apparu lors de ces recherches que, sauf pour quelques rares cas, la
provenance de ces objets était toujours indiquée de façon précise99.
Tout d’abord les restes humains autorisés à être transférés doivent être considérés
comme étant les «restes d’une personne décédée moins de mille ans avant la date d’entrée en
vigueur de ladite section s’il lui paraît indiqué de le faire pour une raison quelconque, liée ou
non à ses autres fonctions»100. La condition première tient donc du fait de l’âge des restes
humains par rapport à la date d’entrée en vigueur de cette loi, mais aussi du fait d’une
réflexion morale que doit exercer son détenteur. Le responsable légal devra prendre sa
décision suivant des critères moraux, s’il considère que la raison de retourner ces restes
humains est assez valable. En outre, dans le cas où les restes humains sont liés à d’autres
objets n’étant pas pas considérés comme des tissus humains, il est possible pour le régisseur
d’autoriser le déclassement et le transfert de ces objets. Ainsi si «ces restes humains sont
mêlés ou attachés à quelque chose d’autre que des restes humains; et qu’il n’est pas
souhaitable ou praticable de les séparer, le pouvoir conféré par la sous-section 2 comprend
celui de transférer ce à quoi les restes humains sont mêlés ou attachés»101.
Instaurée par la loi relative aux tissus humains, une Autorité des Tissus Humains
(Human Tissue Authority) régule désormais les usages et la détention des tissus humains, à
l’exception des gamètes et des embryons, et sa compétence s’étend donc à tous les restes
humains dans les musées. Depuis lors, deux décisions de transfert de restes humains hors des
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98 CADOT L., «Les restes humains: une gageure pour les musées ?», La lettre de l’Ocim, p. 4-15, <http://ocim.revues.org/800#tocto2n6> (consulté le 1er mai 2012).99 HERSHKOVITCH C., RYKNER D., La restitution des œuvres d’art. Solutions et impasses, Hazan, 2011, p.102.100 Human Tissue Act 2004 (2004 c 30), s 47 (2), traduction proposée dans PROTT L. V., Les Témoins de l’Histoire: recueil de textes et documents relatifs au retour des objets culturels, Unesco, Paris, 2011, p.288.101 Id.
musées ont été décidées : l’une concernant des Aborigènes d’Australie, l’autre des Aborigènes
de Tasmanie102 .
2. La déontologie
a. Le guide de recommandations du Ministère
Le Ministère a édité en Octobre 2005 un guide de recommandations à l’usage des
musées, le Guidance for the Care of Human Remains in Museums103. Il vise à fournir des
conseils concernant les orientations déontologiques à adopter quant à la conservation, la
préservation, et aux procédures de déclassement et de restitution de restes humains. Y sont
évoqués justement l’importance des restes humains dans les collections muséales, et le statut
particulier qui leur est attribué.
Leur étude, les recherches qui en découlent, l’enseignement qui peut en être tiré et
éventuellement leur exposition, peuvent être un bénéfice notable pour le public. Dans
beaucoup de cas ils ont aussi une importance personnelle, culturelle, symbolique, spirituelle
ou religieuse, pour des personnes ou des communautés104. «Les travaux de recherches
effectués sur les restes humains et leur contexte sont des témoignages directs des civilisations
passées. Ils nous permettent de comprendre l’évolution et l’adaptation de l’être humain, les
relations entre populations à travers la génétique et le morphologie, les maladies et les causes
de décès, l’histoire de la médecine, la prise en compte de la santé dans le passé, les pratiques
funéraires, les croyances et attitudes vis à vis des morts, et la diversité des pratiques
culturelles selon lesquelles le corps et ses membres sont utilisées»105. Il est notamment
recommandé aux musées concernés par des demandes de restitution de prendre en compte la
notion de possession, les valeurs culturelles ou religieuses chères à la communauté intéressée
et l’importance de sa relation avec les restes en question, ainsi que l’importance culturelle,
spirituelle et religieuse attachée aux restes en tant que dépouilles, mais aussi à la valeur
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
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102 JENKINS T., Contesting Human Remains in Museum Collections. The Crisis of Cultural Authority, New York / Oxon, Routledge, 2011, p.16. Il est d’ailleurs intéressant de noter que l’action en restitution était pour la plupart lancées à l’initiative des professionnels de musées.103 Ce guide de recommandations est non statutaire et également disponible pour toute autre institution, pas uniquement celles précisées dans la liste.104 DCMS, Guidance for the Care of Human Remains in Museums, Londres, Octobre 2005.105 Id., p.8.
historique et éducative des restes en tant que matériel d’étude106. Les demandes doivent
notamment être traitées au cas par cas, et sous forme d’un dialogue ouvert et constructif avec
la partie requérante. Néanmoins, il n’est jamais facile pour les musées, qui se doivent de
prendre une décision qui leur sera bénéfique dans le futur, d’être équitable dans le processus
de décision. C’est pourquoi ils ont une obligation déontologique de transparence dans leurs
actions et de rendre les négociations les plus équitables possibles107.
b. Les codes de déontologie
Différentes instances ont contribué au Royaume-Uni à produire des orientations déontologiques à l’usage du personnel des musées en ce qui concerne la manipulation,
l’exposition et le mouvement de restes humains faisant partie de leur collection. Le Museum Ethnographers Group (MEG), avait déjà produit en 1991 un guide de recommandations
professionnelles concernant le stockage, l’exposition, l’interprétation et le retour de restes humains dans les collections ethnographiques du Royaume-Uni108. Ces recommandations sont
incluses dans les Principes sur la Restitution et la Rapatriement produits par la Museum and Galleries Commission. Le traitement des demandes en restitution est abordé dans l’article 4, il
est notamment précisé que «les prêts à long terme sont considérés comme une méthode inappropriée pour répondre à une demande en restitution de restes humains», et également
que «la propriété juridique des objets demandés doit être établie avant que tout transfert puisse être considéré»109. Des principes déontologiques sont également à la disposition des
musées dans le code de déontologie de l’ICOM ainsi que dans celui de la Museum Association, dont le code de déontologie fait référence au traitement des demandes en
restitution des restes humains à l’article 6, paragraphe 18: «Répondre aux requêtes de retour de restes humains, et autres matériaux culturellement sensibles avec compréhension et respect
envers les communautés d’origine»110.
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
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106 Id., p.23.107 Ibid.108 Museum Ethnographers Group, Guidelines on Management of Human Remains, Londres, 1991.109 Museum Ethnographers Group, Guidelines on Management of Human Remains, Londres, 1991, s 4.3 et s 4.5, cf. Annexe n°9, p89-90.110 «Respond to requests for return of human remains, and other culturally sensitive material with understanding and respect for communities of origin», Museum Association, Code of Ethics, 2007, 6.18.
c. Les «museum policies»
Les restes humains font partie d’une catégorie différente des autres objets présents
dans les collections anglaises, étant donné que les lois applicables en Angleterre et au Pays de
Galles ne reconnaissent pas le concept de propriété sur le corps humain. Cependant les
musées continueront à ajouter des restes humains à leurs collections, s’ils peuvent le faire de
manière légale, si la provenance a été établie de façon sûre, s’il n’y a aucun soupçon d’un
trafic illicite et si les dépouilles ont une certaine valeur pour le musée ou la communauté
scientifique de manière plus générale111. À charge donc du musée d’éditer sa politique
concernant l’acquisition, la conservation et la préservation des restes humains. Le British
Museum a mis à la disposition de tous un document très détaillé concernant ce sujet112.
Face aux demandes en restitution de plus en plus nombreuses, les musées seront avisés
non seulement de vérifier la légalité de l’acquisition de leurs biens et de se montrer les plus
transparents possibles dans leurs actions. Le musée a le devoir d’informer le public des
démarches qu’il entreprend. Le code de conduite concernant la conservation des restes
humains édité par le musée, devra comporter les critères selon lesquels une réclamation sera
évaluée, le laps de temps que prendra la demande à être considérée, et la position des
individus au sein de l’organisation qui a la responsabilité de la prise de décision. Il devra
également être indiqué qui prendra à sa charge le financement des opérations, bien que cela
devrait logiquement être le musée. La question des dépenses engendrées par le traitement de
ces demandes ne devrait ni empêcher ni ralentir la rapidité de traitement de ces demandes, ou
être utilisé comme excuse pour refuser une demande de retour. Il est à ce moment-là
fortement conseillé aux musées de mettre en place un comité extraordinaire qui se chargera de
ses réclamations113.
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111 Site du Cultural Property Advice, Rubrique «about human remains» (consulté le 15 avril 2012).112 British Museum’s Board of Trustees, British Museum policy on Human remains, Londres, 6 octobre 2006. Cf. Annexe n°8, p.84-88..113 DCMS, Guidance for the Care of Human Remains in Museums, Octobre 2005, p.24. En ce qui concerne l’étude de cas qui va suivre, le Natural History Museum fait partie de ces musées qui ont justement mis en place un comité interne qui se penche ponctuellement sur ces questions.
4. Étude de cas: Restes aborigènes rendus à la Tasmanie par le Natural
History Museum114
Ce cas de demande de restitution de restes humains est un des plus intéressants à
étudier parce que d’une part l’affaire a été résolue par le biais de la médiation, et que d’autre
part il a été décidé de procéder au retour de ce restes aborigènes dans leur communauté
intégralement, c’est-à-dire que l’ensemble des éléments revendiqués ont été rendus, y compris
les prélèvements ADN, sous réserve de conditions particulières115.
a. Historique de la revendication
Dans les années 1850, George Augustus Robinson met au jour des restes humains provenant de sites funéraires de Tasmanie et les transfert au Muséum d’Histoire Naturelle de
Londres. Au total la collection comprend 19.950 restes humains116. Dès 1980 plusieurs demandes sont formulées par le Centre Aborigène de Tasmanie (Tasmanian Aboriginal Centre
(TAC)) pour le retour de dépouilles de dix-sept aborigènes de Tasmanie, y compris un squelette complet, conservé au Muséum. Ces dépouilles avaient été soit achetées soit données,
le conseil d’administration refusa donc de répondre positivement aux demandes117. La déclaration signée par Tony Blair et John Howard a servi d’élément déclencheur,
puis le groupe de travail sur les restes humains, chargé d’étudier le statut juridique des dépouilles dans les musées publics au Royaume-Uni, a permis d’ajouter une clause au Human
Tissue Act en 2004. Suite à cela, en 2005, à la National Museums Directors’ Conference, le guide de recommandations du Ministère concernant les restes humains est entré en vigueur.
En Novembre 2006, le Muséum accepte donc de rendre définitivement les restes aborigènes à
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114 Le Museum d’Histoire Naturelle de Londres est un musée à statut caritatif, en même temps qu’un Non Departmental Public Bordy (Organisme public non départemental) financé par le DCMS et il est régi en vertu du British Museum Act 1963. À l’origine département d’Histoire Naturelle du British Museum, le Museum d’Histoire Naturelle est devenu une entité indépendante en vertu du British Museum Act 1963 et a reçu son appellation officielle avec le Museum and Galleries Act 1992. (Source: Site du Natural History Museum, rubrique «about us» et «museum governance», disponible ici: <http://www.nhm.ac.uk/about-us/corporate-information/museum-governance/index.html>, consulté le 1er mai 2012).115 PALMER N., La restitution des restes humains : une question d’actualité pour les collections ethnographiques, Journée d’étude du 9 novembre 2010, Organisé à l’Université de Genève par le Centre universitaire du droit de l’art et la Fondation pour le droit de l’art, disponible ici <http://www.art-law.org/archives/SemNov10/pv091110.pdf> (consulté le 30 avril 2012).116 PROTT L. V., (éd.), «Return of the Remains of Seventeen Tasmanian Aboriginals» dans Witnesses to History, A Compendium of Documents and Writings on the Return of Cultural Objects, UNESCO, Paris, 2009, p.401.117 Id.
la Tasmanie, sous les conseils de son comité de conseil indépendant sur les restes humains
(Human Remains Advisory Panel) et les recommandations du Ministère, après avoir procédé à
plusieurs examens scientifiques118. Le TAC fit appel plusieurs fois à la cour suprême de
justice pour stopper ces examens, considérés comme trop invasifs, car allant à l’encontre de
leurs croyances et de l’intégrité spirituelle des dépouilles. Ils acceptent cependant que soient
menés des examens moins destructeurs du type rayons X. Le 24 avril 2007 quatre dépouilles
sont rapatriées en Tasmanie, et des négociations se déroulent en parallèle pour les treize
dépouilles restantes. Dès le mois de mai 2007 une session de médiation de trois jours est mise
en place par le TAC et le Museum pour déterminer les examens scientifiques à effectuer sur
les dépouilles avant leur retour en Tasmanie. L’accord est finalement conclu le 11 mai 2007 et
on annonce l’organisation d’une cérémonie officielle au Muséum pour les jours qui suivent;
quant aux restes humains, ils retournent officiellement en Tasmanie le 14 mai 2007119.
b. Résolution de la dispute
Les questions les plus importantes portaient sur la question du droit de propriété sur
les restes humains et l’affrontement entre les droits de propriété du Museum sur les dépouilles et la détermination de la TAC à protéger les croyances culturelles et spirituelles aborigènes.
Les dispositions contre le déclassement dans la législation muséale britannique ont empêché les musées d’aliéner les biens de leurs collections, y compris les restes humains. En Common
Law les restes humains ne peuvent être soumis à un droit de propriété «property rule» sauf quand l’objet a subi de telles transformations qu’il peut être considéré comme une œuvre
d’art. Cependant, des développements juridiques récents reconnaissent l’importance du consentement des communautés indigènes lorsqu’il s’agit des dépouilles de leurs ancêtres120.
La Déclaration des Nations Unies sur les Droits des Peuples Indigènes (The United Nations Declaration on the Rights of Indigenous Peoples (DRIPs) 200726) soutient que «les
peuples indigènes ont le droit de pratiquer et de revitaliser leurs traditions et coutumes
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118 Natural History Museum London Press Release, “Natural History Museum Offers an Alternative Dispute Resolution to the Tasmanian Aboriginal Centre (TAC),” 2007, <http://www.nhm.ac.uk/about-us/press-office/press-releases/2007/press_release_10853.html> (consulté le 21 avril 2012). Les examens scientifiques évoqués ici comprennent des prélèvements d’ADN, des analyses chimiques conduites sur les os, des scanners et prises de vues photographiques sur les restes humains.119 BANDLE A.-L., CHECCHI A., RENOLD M.-A., “Case 17 Tasmanian Human Remains – Tasmanian Aboriginal Centre and Natural History Museum London,” Platform ArThemis (http://unige.ch/art-adr), Art-Law Centre - University of Geneva.120 Id.
culturelles» et que les «États doivent fournir un redressement à travers des mécanismes
efficaces, y compris la restitution, développé conjointement avec les peuples indigènes, dans
le respect de leur propriété culturelle, intellectuelle, religieuse et spirituelle, prise sans leur
consentement libre, premier et informé ou en violation de leurs lois, traditions et
coutumes»121. Au Royaume-Uni, le Human Remains Working Group conclut son rapport en
recommandant d’apporter un amendement à la législation des musées et ainsi de «donner le
pouvoir aux musées nationaux de se déposséder des restes humains»122. De plus les musées
non nationaux «devraient également être investis du pouvoir de se déposséder des restes
humains dans la mesure où cela n’existe pas déjà»123.
Les Trustees du Muséum d’Histoire Naturelle ont tenté, dès le départ, de s’entendre
sur la meilleure solution à adopter et de trouver un équilibre entre deux opinions opposées. Ils
ont tenu à ce que des examens scientifiques soient effectués sur les dépouilles, étant donné
leur statut inestimable pour les collections du Muséum, en effet, selon le directeur, ces
dépouilles «représentent une population appartenant à une époque où la Tasmanie était isolée
du reste du monde et les informations scientifiques récoltées grâce à elles pourraient permettre
aux générations futures de mieux comprendre comment leurs ancêtres évoluaient, d’où ils
venaient et d’écrire un chapitre fascinant dans l’histoire de ce que cela signifie d’être
humain»124. Néanmoins les Trustees ont admis que les dépouilles avaient été acquises
illégalement et que cela constituait un argument favorable à leur retour125.
Étant donné la longueur du procès et les frais juridiques coûteux, les Trustees ont
accepté de faire appel à la médiation, idée suggérée par le juge de la Cour Suprême. Le
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121 «Indigenous peoples have the right to practise and revitalize their cultural traditions and customs” and that “States shall provide redress through effective mechanisms, which may include restitution, developed in conjunction with indigenous peoples, with respect to their cultural, intellectual, religious and spiritual property taken without their free, prior and informed consent or in violation of their laws, traditions and customs», The United Nations Declaration on the Rights of Indigenous Peoples (DRIPs) (200726), art. 11, disponible ici <http://www.un.org/esa/socdev/unpfii/documents/DRIPS_en.pdf> (consulté le 30 avril 2012).122 «to empower national museums to relinquish human remains», Human Remains Working Group, Report on Human Remains, Novembre 2003, p.199.123 «shall be given a power to relinquish human remains in so far as this does not already exist», Human Remains Working Group, Report on Human Remains, Novembre 2003, p.199.124 NHM London, “Natural History Museum Offers an Alternative Dispute Resolution to the Tasmanian Aboriginal Centre (TAC)», Communiqué de presse, 2007, disponible ici <http://www.nhm.ac.uk/about-us/press-office/press-releases/2007/press_release_10853.html> (consulté le 18 avril 2012): «The remains represent a human population from a time when Tasmania was isolated from the rest of the world and this scientific information gathered from them could enable future generations to understand more about how their ancestors lived, where they came from and ultimately provide a fascinating chapter in the story of what it means to be human».125 BANDLE A.-L., CHECCHI A., RENOLD M.-A., “Case 17 Tasmanian Human Remains – Tasmanian Aboriginal Centre and Natural History Museum London,” Platform ArThemis (http://unige.ch/art-adr), Art-Law Centre - University of Geneva.
Muséum a de son côté invoqué les intérêts scientifiques, la récolte de données et la
préservation du matériel génétique comme fondamental pour les travaux de recherche futurs.
De leur côté les représentants du TAC, et selon leurs traditions, ont émis le souhait que les
dépouilles soient préservées, ne souhaitant pas «d’interférences physiques avec les dépouilles
ni aucune future profanation». En fin de compte, le médiateur a réussi à convaincre les parties
d'un compromis mutuellement acceptable: les Aborigènes ont reconnu l'importance pour le
Muséum de préserver les prélèvements ADN et les scientifiques ont à leur tour convenu que
les dépouilles et toute la documentation qui leur était liée devrait être confiée à un centre
médical de Tasmanie126.
c. Solution adoptée: restitution conditionnelle
L’accord conclu prévoit le retour des restes humains aborigènes accompagnés par les
délégués du TAC127. Les restes humains ont été restitués à la Tasmanie à condition que
certains prélèvements ADN ne soient pas détruits avec le reste des dépouilles mais préservés
en vue d’une utilisation future pour la recherche, en tant que matériel d’étude scientifique,
avec l’accord de la communauté aborigène128.
Le directeur du Museum d’Histoire Naturelle, Michael Dixon, explique qu’ils se sont
«efforcés tout au long de l’affaire de concilier deux opinions très différentes de ce qui serait la
bonne chose à faire, d’une part de rendre les dépouilles à leur pays d’origine et d’autre part
d’utiliser cette ressource unique et inestimable pour la recherche scientifique »129 et affirme
également qu’ils ont «reconnu l’importance des croyances culturelles et religieuses des
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126 BANDLE A.-L., CHECCHI A., RENOLD M.-A., “Case 17 Tasmanian Human Remains – Tasmanian Aboriginal Centre and Natural History Museum London,” Platform ArThemis (http://unige.ch/art-adr), Art-Law Centre - University of Geneva.127 NHM London, «Agreement on Aboriginal Remains Reached», Communiqué de presse, 11 Mai 2011, <http://www.nhm.ac.uk/print-version/?p=http://www.nhm.ac.uk//about-us/news/2007/may/news_11682.html>, (consulté le 21 avril 2012).128 CORNU M., RENOLD M.-A., Le renouveau de biens culturels: les modes alternatifs de règlement des litiges, JDI, 2007.129 NHM London, “Natural History Museum Offers an Alternative Dispute Resolution to the Tasmanian Aboriginal Centre (TAC)», Communiqué de presse, 2007, disponible ici <http://www.nhm.ac.uk/about-us/press-office/press-releases/2007/press_release_10853.html> (consulté le 18 avril 2012): «We have strived throughout to balance two very different opinions of what is the right thing to do - on the one hand returning the remains to the country of origin; on the other using this invaluable and unique resource for scientific research».
aborigènes de Tasmanie»130 et c’est justement pour ces raisons que les Trustees ont décidé de
rendre les dépouilles. Cependant, selon les principes fondateurs du Muséum, qui définissent
ainsi sa mission comme étant de «maintenir et de développer ses collections et de les utiliser
pour promouvoir la découverte, la compréhension, l'utilisation responsable et la jouissance du
monde naturel»131, les Trustees décidèrent de ne réaliser le transfert qu’à la suite d’une
collecte de données.
Il est intéressant de constater ici qu’au départ, lorsque le TAC avait envoyé ses
premières demandes dans les années 1980, le Muséum était dans l’incapacité d’y répondre car
soumis à la loi qui le lui interdisait. Mais depuis que la loi relative aux tissus humains de
2004, entrée en vigueur en 2005, a été modifiée pour y inclure la possibilité pour les musées
de se dessaisir des restes humains présents dans leurs collections, le Muséum d’Histoire
Naturelle de Londres, parmi d’autres, a désormais le droit de déclasser ces biens, et de les
restituer à leur pays d’origine s’ils sont revendiqués. En l’occurrence, les Trustees du Muséum
a fait preuve d’un raisonnement moral et éthique et a compris l’importance spirituelle et
culturelle que revêtait ces dépouilles pour la Tasmanie. C’est donc bien un argument moral,
lié à la valeur spirituelle de l’objet qui a incité à restituer ces objets.
Voyons désormais ce qu’il en est des objets spoliés.
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130 NHM London, “Natural History Museum Offers an Alternative Dispute Resolution to the Tasmanian Aboriginal Centre (TAC)», Communiqué de presse, 2007, disponible ici <http://www.nhm.ac.uk/about-us/press-office/press-releases/2007/press_release_10853.html> (consulté le 18 avril 2012): «we have recognised the importance of the cultural and religious beliefs of Tasmanian aboriginals».131 «The Museum’s mission is to maintain and develop its collections and use them to promote the discovery, understanding, responsible use and enjoyment of the natural world», The Natural History Museum, Life and Earth Sciences and Library Collections, Curatorial Policies and Collections Management Procedures, Londres, 2003, p.5 <http://www.nhm.ac.uk/resources-rx/files/life-earth-sciences-18441.pdf> (consulté le 1er mai 2012).
B. Les objets spoliés
Norman Palmer dans son ouvrage Museums and the Holocaust revient sur la notion de
bien spolié, et de la perception qu’ont certains de ce qu’est la réclamation des œuvres d’art et
des biens culturels volés durant la période Nazi. D’autant trouveront futile, voire ostentatoire,
de revendiquer des œuvres d’art. D’un certain point de vue, les pillages et vols de biens
culturels ne sont pas perçus ou considérés comme à un niveau équivalent que celui des
atrocités qu’ont pu vivre les victimes132. En dehors des musées publics, l’accumulation
d’œuvres d’art est vue comme le privilège des riches, et qu’on ne peut pas comparer les
pillages d’œuvres d’art aux meurtres et aux actes de brutalité qu’ont vécu les innocents de
guerre133. Cependant, priver les nations asservies de leur culture matérielle est une forme
d’aliénation et d’oppression. Restituer les œuvres d’art est ainsi une forme de réparation des
erreurs commises en tant de guerre, c’est de cela qu’il s’agit lorsqu’on évoque la notion de
restitution des biens spoliés. Elazar Barkan nous dit que «les conventions juridiques
définissent la restitution comme l’un des moyens possibles de réparer des injustices passées; il
en existe d’autres, comme les réparations ou les excuses»134.
Selon Norman Palmer une des difficultés liées à la restitution des biens spoliés tient du
fait que les œuvres d’art sont unes et indivisibles, autrement dit on ne peut pas les séparer
comme on pourrait le faire avec une somme d’argent, pour régler un litige entre deux parties,
et que, finalement, il est physiquement impossible de procéder à un «jugement de
Salomon»135. Une autre difficulté tient dans le fait que la plupart de ces biens spoliés sont
aujourd’hui conservés dans des musées, qui sont restreints à des législations strictes en
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132 «Some would say why works of art? Why are paintings different in principle from other forms of wealth? Does not an emphasis on material wealth minimalise the greater suffering? To some, cultural objects might seem less worthy of attention because, outside public museums, the accumulation of art is the preserve of the privileged», PALMER N., Museums and the Holocaust, law, policies and practice, London, Institute of Art and Law, 2000, p.2.133 «It bears no comparison to the countless murders and acts of brutality perpetrated on innocent people. It is, moreover, only one manifestation of the economic plundering of the Axis-dominated countries», Id., p.3.134 E. Barkan, The Guilt of Nations: Restitution and Negociating Historical Injustices (La Culpabilité des nations: restitution et négociation des injustices historiques), John Hopkins University Press, Baltimore, 2001, in PROTT L.V., Témoins de l’Histoire: recueil de textes et documents relatifs au retour des objets culturels, Unesco, Paris, 2011, p.85.135 «most works of art are (unlike money or most other economic assets) indivisible. Demands for art restitution tend to take an ‘all or nothing’ form and can be hard to compromise: physically there can be no judgment of Salomon», PALMER N., Museums and the Holocaust, law, policies and practice, London, Institute of Art and Law, 2000, p.5.
matière de déclassement et d’aliénation des biens culturels. Lorsqu’une demande en
restitution est formulée concernant un objet qui aurait été spolié en tant de guerre, cela
soulève d’importantes questions, et notamment des questions d’ordre moral et éthique.
1. Le cadre légal: Holocaust Act 2009136
Avant l’entrée en vigueur du Holocaust Act, les musées anglais ne disposaient pas
d’instrument juridique leur permettant de restituer des biens qui leur étaient réclamés. Le
comité de spoliation prononçait des recommandations mais elles n’étaient pas contraignantes
pour tous les musées, et d’autres solutions que la restitution étaient choisies, comme
l’indemnisation financière137.
La loi Holocauste est applicable en Angleterre, au Pays de Galles et en Écosse, elle est
entrée en vigueur en 2010 avec le décret d’application 2010/50 (Holocaust (Return of
Cultural Objects) Act 2009 (Commencement) Order 2010/50) et expirera à la fin d’une
période de dix ans à compter du jour d’entrée en vigueur138. Ce texte investit les Trustees ou
divers musées publics en Grande-Bretagne du pouvoir de se dessaisir de tout objet culturel
actuellement présent dans leurs collections qui aurait été détourné entre 1939 et 1945, pour
qu’ils soient rendus à leurs propriétaires légitimes ou à leurs héritiers. Ce texte concerne 17
musées nationaux139 . Un tel pouvoir est nécessaire quand le bien en question fait partie d’une
collection nationale que la loi empêche de déclasser. Ce pouvoir ne pourra être utilisé que
lorsque le retour de l’objet revendiqué aura été recommandé par un organisme de conseil,
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136 Disponible en ligne sur le site du gouvernement à cette adresse: <http://www.legislation.gov.uk/ukpga/2009/16/pdfs/ukpga_20090016_en.pdf> (consulté le 1er mai 2012). Pour le chapitre 16, en version originale en anglais et traduction personnelle en français, voir Annexe n°2, p.68.137 «Une loi anglaise pour la restitution des œuvres spoliées par les nazis», Le Journal des Arts, 18 Novembre 2009, <http://www.lejournaldesarts.fr/site/archives/docs_article/70118/une-loi-anglaise-pour-la-restitution-des-oeuvres-spoliees-par-les-nazis.php> (consulté le 3 mai 2012). L’article nous apprend d’ailleurs qu’en «2001 la Tate Gallery a dédommagé les anciens propriétaires d’un tableau de Jan Griffier à hauteur de 125 000 livres (141 000 euros)».138 Holocaust Act 2009, Ch.16, ss 4 (2) (7).139 Le Conseil d’administration des Arsenaux, les administrateurs de la British Library, les administrateurs du British Museum, les administrateurs de l’Imperial War Museum, le conseil des gouverneurs de la National Galleries of Scotland, le conseil des gouverneurs de la National Gallery de Londres, les Administrateurs de la National Library of Scotland, les Administrateurs du Musée maritime national, le Conseil d’administration des galeries et musées nationaux du Merseyside, le Conseil d’administration du National Museums of Scotland, le Conseil d’administration de la National Portrait Gallery de Londres, le Conseil d’administration du Royal Botanic Gardens à Kew, le Conseil d’administration du Musée de la Science, le Conseil d’administration de la Tate Gallery à Londres, le Conseil d’administration du Victoria and Albert Museum, le Conseil d’administration de la Wallace Collection à Londres.
comme la Museum Association par exemple, et quand le Secrétaire d’État a accepté ladite
recommandation. Les musées de Grande-Bretagne ont entrepris des recherches minutieuses
sur leurs collections pour identifier les objets dont la provenance serait incertaine entre 1933
et 1945140. Les détails de ces objets sont disponibles dans une base de donnée accessible à
tous. Le nombre d’objets pillés durant la période nazie et présents dans les collections
britanniques est estimé à une vingtaine141.
L’article 2 du chapitre 16 de la loi Holocauste définit les conditions selon lesquelles un
bien peut être rendu à son propriétaire légitime. Il faut tout d’abord que le Comité consultatif
ait recommandé le transfert142. La deuxième condition à remplir est que le Secrétaire d’État
ait approuvé la recommandation du Comité consultatif. Le Secrétaire d’État peut approuver
une décision concernant le transfert d’un objet depuis les collections d’une institution
écossaise uniquement avec l’accord des ministres écossais143. Le pouvoir consenti par le
paragraphe 1 de ce texte n’affecte pas un trust ou les conditions auxquels serait soumis l’objet
et constitue un pouvoir additionnel144. Enfin le demandeur doit toutefois apporter les preuves
nécessaires pour justifier de son lien continu avec l’objet réclamé145.
2. Le Spoliation Advisory Panel146
a. Présentation
Créé en juin 2000, le Spoliation Advisory Panel est un comité consultatif désigné par
le Secrétaire d’État et qui a pour mission d’étudier les demandes qui pourraient être faites par
tous ceux qui avaient perdu la possession d'un bien culturel au cours de la période allant du
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140 DCMS, Museums, Libraries and Cultural Property, Restitution of Objects Spoliated in the Nazi-Era: A Consultation Document, Juillet 2006, disponible ici: <http://webarchive.nationalarchives.gov.uk/+/http://www.culture.gov.uk/images/consultations/cons_restitutionspol_nera.pdf> (consulté le 1er mai 2012).141 Projet de Loi Holocaust (Return of Cultural Objects), Committee Stage Report, Bill No. 111, research paper 09/59, 23 juin 2009, disponible ici <www.parliament.uk/briefing-papers/RP09-59.pdf> (consulté le 1er mai 2012).142 Holocaust Act 2009, Ch. 16, s 2(2). Cf. Annexe n°2, p.68.143 Id., s 2(4).144 Id., s 2(6) (7).145 CORNU M., RENOLD M.-A., Le renouveau de biens culturels: les modes alternatifs de règlement des litiges, JDI, 2007, p.504.146 Équivalent anglais de la Commission pour l’indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l’Occupation, créée par le décret n°99-778 du 10 septembre 1999.
1er Janvier 1933 au 31 décembre 1945147, dans le cas où l’objet en question est maintenant en
la possession d'une collection nationale britannique ou en la possession d'un autre musée ou
d’une galerie du Royaume-Uni créé pour le bénéfice du public148. La manière de procéder du
comité consultatif est une alternative aux poursuites, et non pas un processus de règlement de
litige. Le comité consultatif devra donc tenir compte d’obligations non légales, tels que la
force morale de l'affaire du requérant et si une obligation morale repose sur l'institution149.
b. Règles de procédure
Le Spoliation Advisory Panel a mis en ligne un document indiquant la marche à suivre
pour faire ou répondre à une demande en restitution150. Il est tout d’abord indiqué que la
partie requérante doit faire une déposition par écrit en apportant toutes les preuves et
témoignages, écrits ou oraux, nécessaires au bon déroulement de la procédure, et que de cela,
le musée accuse réception par écrit151. La résolution du conflit en elle-même est la
responsabilité du jury qui peut s’en charger soit par écrit soit en entretien oral152. Cet entretien
est un entretien privé, mené par le Président du Spoliation Advisory Panel et quatre autres
membres du jury, il se déroule à Londres153, en anglais et si la partie requérante le demande,
en présence d’un interprète154. Enfin le jury devra mener ses débats et parvenir à une décision
dans la plus stricte intimité155.
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147 Holocaust Act 2009, Ch. 16, s 3(a) (b).148 DCMS, Museums, Libraries and Cultural Property, Restitution of Objects Spoliated in the Nazi-Era: A Consultation Document, Juillet 2006, disponible ici: <http://webarchive.nationalarchives.gov.uk/+/http://www.culture.gov.uk/images/consultations/cons_restitutionspol_nera.pdf> (consulté le 1er mai 2012).149 «The Panel's proceedings are an alternative to litigation, not a process of litigation. The Panel will therefore take into account non-legal obligations, such as the moral strength of the claimant's case and whether any moral obligation rests on the institution», DCMS, Spoliation Advisory Panel’s Constitution of Terms and References, Art. 6. <http://www.culture.gov.uk/images/publications/SAPConstitutionandTOR11.pdf> (consulté le 1er mai 2012),150 DCMS, Spoliation Advisory Panel’s Rules of Procedures, Londres, 2009, disponible ici: <http://www.culture.gov.uk/images/publications/SAPRulesofProcedure09.pdf> (consulté le 1er mai 2012), cf. Annexe n°10, p.90-91. 151 DCMS, Spoliation Advisory Panel’s Rules of Procedures, Londres, 2009, s 1 à 5.152 Id., s. 6.153 Ibid., s 7(a).154 Ibid., s 9.155 Ibid., s 12.
c. Rapports156
Le Spoliation Advisory Panel a maintenant terminé les rapports sur les cinq
revendications d’objets détenus respectivement par la Tate Gallery, la British Library, le
conseil municipal de Glasgow, dans le cadre de la Collection Burrell, l'Ashmolean Museum à
Oxford et le British Museum. Dans quatre cas, ils ont constaté que la réclamation était
valable, et dans deux cas - un tableau précédemment attribué à Chardin dans la collection
Burrell, et un manuscrit du XIIème siècle, le Benevento Missal, conservé à la British Library,
le Comité consultatif a recommandé que l'objet en question devait être retourné au
requérant157.
Dans chacun des cas où la restitution a été recommandée, il existait différents types de
restrictions juridiques au déclassement de ces objets. La British Library fait l'objet de
restrictions statutaires relatives à la cession des biens conservés dans sa collection, comme
toutes les collections nationales, à un degré plus ou moins élevé158.
Dans son troisième rapport, relatif au Benevento Missal, le Spoliation Advisory Panel
a recommandé que la législation soit introduite pour permettre la restitution des objets faisant
partie de la catégorie définie dans les Terms and References, c'est-à-dire, des objets culturels,
dont la possession a été perdue au cours de l’ère nazie (1933-1945) qui font maintenant partie
d'une collection nationale britannique ou qui sont en la possession d'un autre musée ou d’une
galerie du Royaume-Uni, créé pour le bénéfice du public159.
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
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156 Tous les rapports du Spoliation Advisory Panel sont disponibles en format pdf, ici: <http://www.culture.gov.uk/what_we_do/cultural_property/3296.aspx> (consulté le 1er mai 2012).157 DCMS, SAP, Reports of the Spoliation Advisory Panel in respect of a Painting now in the possession of Glasgow City Council, 24 November 2004, HC 10, and in respect of a 12th century manuscript now in the possession of the British Library, 23 March 2005, HC 406.158 DCMS, Museums, Libraries and Cultural Property, Restitution of Objects Spoliated in the Nazi-Era: A Consultation Document, Juillet 2006, disponible ici: <http://webarchive.nationalarchives.gov.uk/+/http://www.culture.gov.uk/images/consultations/cons_restitutionspol_nera.pdf> (consulté le 1er mai 2012).159 Id.
4. Étude de cas: le Missel de Benevento160
a. Première revendication
Le comité consultatif a réexaminé une demande qui lui fut soumise une première fois
en 2004. Le requérant, le chapitre métropolitain de la cathédrale de la ville de Benevento, près
de Naples, dans le sud de l'Italie, demande le retour du Missel de Benevento, un magnifique
témoignage de l’art des manuscrits du XIIème siècle. Le missel avait été pillé lors du
bombardement de la ville par les troupes alliées en 1943. Les destructions furent terribles, la
cathédrale quasiment entièrement détruite, mais ses manuscrits furent sauvés161. Le missel
aurait ensuite été vendu par un vendeur de livres napolitain à un soldat britannique en 1944,
qui le vendit trois ans plus tard à la maison de vente anglaise Sotheby’s, où il fut ensuite
acquis par le British Museum en 1947 et transféré à la British Library en 1973.
Une première réclamation avait été faite à la British Library en 1978, et avait été
rejetée. Les bibliothécaires avaient alors perdu tout espoir de revoir le manuscrit, selon les
dires de Laureato Maio, qui fut nommé à la bibliothèque de la cathédrale cinq ans après cette
première demande162. Dans les années 2000, grâce à la nouvelle politique du gouvernement
britannique concernant les œuvres d’art spoliées durant la période nazie, et la création du
Comité consultatif sur les spoliations, l’archevêque de l’époque, Serafino Sprovieri, persévéra
et renouvela la demande au Spoliation Advisory Panel, par le biais de Jeremy Scott, l’avocat
pro bono chargé de l’affaire163.
Dans un premier rapport, publié le 25 mars 2005164, le Comité consultatif a reconnu
que le missel avait victime des pillages lors de la période nazie, mais que, à l'époque, son
déclassement était exclu par l’article 3(5) du British Library Act 1972, qui l’empêchait de
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
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160 Voir Annexe n°19, p.95.161 BAILEY M., «Benevento Missal returns home», The Art Newspaper, 24 Novembre 2010 <http://www.theartnewspaper.com/articles/Benevento%2BMissal%2Breturns%2Bhome/21936> (consulté le 1er mai 2012).162 Id.163 Ibid.164 DCMS, SAP, Report of the Spoliation Advisory Panel in Respect of a 12th Century Manuscript now in the Possession of the British Library (2005 HC406).
retirer le Missel de ses collections165. Il a alors recommandé de transférer le missel en tant que
prêt à long-terme à la cathédrale italienne et a jugé nécessaire d’examiner une éventuelle
modification de la loi afin de permettre la restitution des objets culturels perdus pendant la
période nazie.
Suite à l'introduction de la Loi Holocauste (Retour des biens culturels) de 2009, qui
autorise dix-sept collections nationales à restituer les objets perdus pendant la période nazie,
lorsque cela est recommandé par le Comité consultatif sur la spoliation et que les ministres
donnent leur accord; la demande a été renvoyée à la commission. Le rapport final du Comité,
qui a été publié et mis en ligne en 2010, recommande la restitution du Missel de Benevento et
a été approuvé par les ministres.
b. Renouvellement de la revendication
La Loi Holocauste (Retour des biens culturels) de 2009 prévoit que divers organismes,
dont le conseil d’administration de la British Library, puisse transférer un objet de sa
collection si, entre autres, le Comité consultatif désigné par le Secrétaire d'Etat a recommandé
son transfert et le secrétaire d'Etat a approuvé une telle recommandation166. Le conseil
d’administration de la British Library a précisé alors qu’il ne s’opposerait bien entendu pas à
la recommandation du Comité mais qu’il tenait toutefois à ce que les conditions de
conservation et d’accessibilité pour la recherche, ses préoccupations premières, soient idéales,
et que soit également reconnu, que si transfert il y avait, il s’agissait d’une perte inestimable
pour les collections de la British Library. Sur les questions de conditions de conservation, le
Comité précise dans son rapport que, bien qu’une telle demande aille de soi, là n’était pas sa
place ni son rôle d’en décider167.Le comité a finalement recommandé que le Missel soit rendu
aux requérants, et le Secrétaire d’État a approuvé cette recommandation. La British Library
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165 Report of the Spoliation Advisory Panel in respect of a renewed claim by the Metropolitan Chapter of Benevento for the return of the Beneventan Missal now in the possession of the British Library, The House of Commons, The Right Honourable Sir David Hirst, Londres, The Stationery Office, 15 septembre 2010 <http://www.culture.gov.uk/images/publications/Benevento_5119_HC448_7-9.pdf> (consulté le 1er mai 2012).166 Id.167 «The Panel considers that such recognition and acknowledgement are due but do not consider it would be appropriate for the panel to stipulate any conditions for transfer», Report of the Spoliation Advisory Panel in respect of a renewed claim by the Metropolitan Chapter of Benevento for the return of the Beneventan Missal now in the possession of the British Library, The House of Commons, The Right Honourable Sir David Hirst, Londres, The Stationery Office, 15 septembre 2010 <http://www.culture.gov.uk/images/publications/Benevento_5119_HC448_7-9.pdf> (consulté le 1er mai 2012).
est donc libre, en application de l’article 2(2) de la Loi Holocauste (Retour des biens
culturels) de 2009, de transférer le Missel à la Bibliothèque du Chapitre de Benevento.
Après dix ans de demandes en restitution, le manuscrit fut finalement rendu le 9
Novembre 2010 officiellement et en mains propres, à Jeremy Scott, l’avocat britannique
chargé de la défense168. L’archevêque a annoncé durant une interview pour The Art
Newspaper que le retour du Missel était comme “a son coming back to join his family”, il a
d’ailleurs démontré sa reconnaissance à la British Library pour s’être occupé du manuscrit
avec si grand soin depuis 1947169. Martin Bailey, dans son article pour The Art Newspaper,
raconte les retrouvailles émouvantes de Laureato Maio, le bibliothécaire de 84 ans qui a
connu le bombardement et les pillages de la ville de Benevento, avec le manuscrit
médiéval170.
Ce qui est particulièrement intéressant dans le cas du Missel de Benevento c’est que ce
livre liturgique datant de 1100 est le premier objet à être rendu par une institution britannique
depuis que le Royaume-Uni a adopté la loi concernant le pillage des trésors culturels durant la
période Nazi, depuis l’arrivée d’Hitler en 1933 à la fin de la Deuxième Guerre Mondiale en
1945. Mais en tant que cas de bien spolié mais non lié à l’Holocauste en tant que tel, comme
le précise Martin Bailey, «a non-Holocaust case», le cas du Missel de Benevento reste
inhabituel. Le propriétaire d’avant la guerre était une cathédrale et le dernier propriétaire
britannique, un officier de l’armée. À ce jour, nous ne savons toujours pas qui a volé le
manuscrit, cela aurait pu être un italien (civil ou militaire, un allemand ou un soldat
britannique171.
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168BAILEY M., «Benevento Missal returns home», The Art Newspaper, 24 Novembre 2010 <http://www.theartnewspaper.com/articles/Benevento%2BMissal%2Breturns%2Bhome/21936> (consulté le 1er mai 2012).169 Id.170 Ibid.171 BAILEY M., «How The Art Newspaper changed the law», The Art Newspaper, 10 November 2010, <http://www.theartnewspaper.com/articles/How-i-The-Art-Newspaper-i-changed-the-law/21774> (consulté le 1er mai 2012).
III. Théorisation de la notion de restitution
«De l’ensemble monumental aux créations des artisans, les œuvres enlevées étaient plus
que des décors ou des ornements: elles portaient témoignage d’une histoire,
l’histoire d’une culture, celle d’une nation dont l’esprit se perpétuait, se
renouvelait en elles.» Amadou-Mahtar M’Bow, 1978172
Cet appel lancé par Amadou-Mahtar M’Bow en 1978 prône le retour des biens
culturels à ceux qui les réclament, en cela qu’ils représentent leur histoire, leur mémoire et
qu’ils sont les instruments de la reconstruction de leur identité culturelle.
Les demandes en restitution ont existé de tout temps mais c’est véritablement au
milieu du XXème siècle que le phénomène s’est développé et a pris de l’ampleur dès le début
du XXIème siècle. Il est alors apparu la nécessité de renforcer la législation, de poser des
barrières légales, d’imposer un régime juridique particulier pour permettre aux musées
comme aux requérants de procéder au mieux dans leurs démarches.
Les arguments pour et contre le retour des biens culturels à leur pays d’origine
dépendent non seulement de considérations légales, mais également de facteurs éthiques,
émotionnels et politiques173.
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
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172 «Architectural features, statues and friezes, monoliths, mosaics, pottery, enamels, masks and objects of jade, ivory and chased gold -in fact everything which has been taken away, from monuments to handicrafts - were more than decorations or ornementation. They bore witness to a history, the history of a culture and of a nation whose spirit they perpetuated and renewed», Amadou-Mahtar M’Bow, A plea for the restitution of an irreplaceable cultural heritage to those who created it, Unesco,1978, disponible ici <http://www.unesco.org/culture/laws/pdf/PealforReturn_DG_1978.pdf> (consulté le 2 mai 2012). Traduction française dans Les Témoins de L’histoire... cf. bibliographie.173 LEGGET J., Guidelines for good practice, Restitution and Repatriation, Museum and Galleries Commission, Londres, 2000, p.5.
A. Les arguments pour et contre la restitution
1. Quand la restitution devient valeur de réparation des erreurs du passé
a. Différents contextes, différentes sources, différentes raisons
Ces revendications proviennent de différentes sources, de différents pays, mais
également de communautés ou groupes autochtones, en fonction de cela, leur requête sera
motivée par des raisons différentes. Jane Legget dresse une liste des différentes sources
desquelles proviennent ces demandes174. Les réclamations peuvent tout d’abord provenir
d’individus, ou de leurs descendants, demandant le retour d’œuvres d’art volées ou
confisquées en temps de guerre et/ou exportées illicitement. Des descendants linéaires de
groupes culturels peuvent aussi réclamer le retour des dépouilles de leurs ancêtres, connues
pour avoir été déplacées de leur contexte funéraire. La motivation première est ici d’agir selon
leurs obligations culturelles et patrimoniales envers leurs morts, ce qui peut impliquer la mise
en terre, la crémation, ou le placement des reliques des ancêtres au sein du territoire du clan
auquel ces personnes appartenaient. Des groupes culturels ou des tribus peuvent également
demander le retour d’objets religieux qui sont toujours utilisés pour la pratique d’une religion
ou pour une cérémonie traditionnelle. Il arrive aussi que des gouvernements demandent le
retour de biens ayant un statut d’icône national et considérés comme essentiel à l’identité
nationale, régionale ou locale. Et enfin, des musées nationaux ou des instituts de recherche
peuvent également demander le retour de spécimens d’histoire naturelle provenant d’une
espèce ayant une importance symbolique ou spirituelle.
La plupart du temps les pays revendicateurs ont été dans le passé sous la domination
de puissances étrangères. Ainsi l’Égypte a longtemps été, sous le joug mamelouke, ottoman
ou occidental, il en est de même pour la Grèce qui a été dominée par les Turcs175. Pour ces
pays, en «convalescence politique», revendiquer leurs biens culturels est une manière
d’affirmer leur légitimité. Ces pays peuvent par exemple réclamer des biens qui auraient été
spoliés durant la période d’occupation. En Angleterre, le gouvernement a permis de rétablir la
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174 LEGGET J., Guidelines for good practice, Restitution and Repatriation, Museum and Galleries Commission, Londres, 2000, p.9-10.175 HERSHKOVITCH C., RYKNER D., La restitution des œuvres d’art. Solutions et impasses, Hazan, 2011, p.32.
lacune du droit sur la question des biens spoliés durant la période Nazi en créant l’Holocauste
Act. À ce moment-là il n’est pas de la responsabilité du musée ou de l’institution de décider
d’une restitution mais de l’État. Les biens spoliés ne font pas uniquement référence à cette
période historique, l’on peut également parler de biens spoliés pendant la période coloniale, et
tout un chacun sait que la colonialisation britannique a été une des plus répandues. Combien
d’objets ont-ils été déplacés durant cette période? Là se pose le problème de la non-
rétroactivité des lois. On ne peut pas juger d’une situation passée en faisant appel à des
instruments juridiques qui ont été mis en place bien après. Dans le cas des colonies, le droit
du pays dominant s’applicant, il n’est pas véritablement question de spoliation étant donné
que l’acquisition s’est faite par des moyens tout à fait légaux à l’époque.
b. De la recherche d’une identité culturelle
La requête émise par les institutions, communautés ou pays demandeurs, reflètent bien
souvent une volonté de reconnaissance et de respect envers la valeur de leur culture. Les
peuples indigènes souhaitant établir une véritable identité culturelle et nationale peuvent être
particulièrement sensibles au fait que certains objets soient détenus par des musées dans
d’autres pays et particulièrement ceux étant géographiquement éloignés176. Ces objets peuvent
avoir le statut d’icônes dans leur contexte culturel d’origine, définissant l’identité ou même
encore symbolisant des évènements nationaux. Ils peuvent en effet être liés à des évènements
historiques essentiels dans le passé d’une communauté, considérés ainsi comme étant
l’illustration de ce passé177. Les pays émergents développent de plus en plus les droits et les
concepts relatifs aux notions de propriété, de préservation et de gestion des ressources
nationales, y compris les biens culturels meubles. Il existe donc une véritable prise de
conscience de la valeur de leur passé, des témoins de ce passé et du rôle clé que vont jouer ces
biens culturels pour l’affirmation de leur histoire, de leur pouvoir et de la légitimité de
l’existence de leur nation. Corinne Hershkovitch interprète cette démarche comme légèrement
teintée de nationalisme, mais en l’occurrence en faisant référence à la démarche
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176 LEGGET J., Guidelines for good practice, Restitution and Repatriation, Museum and Galleries Commission, Londres, 2000, p.7.177 Krzystof Pomian in PROTT L. V., Les Témoins de l’Histoire: recueil de textes et documents relatifs au retour des objets culturels, Unesco, Paris, 2011, p.49.
particulièrement insistante de l’Italie, «Selon les autorités italiennes (qui ont exprimé
clairement leur position quant au durcissement de la législation sur l’exportation des biens
culturels lors de l’exposition «Nostoi») cette démarche ne doit pas se comprendre comme une
démarche nationaliste mais comme une volonté universaliste»178. En revendiquant leurs biens
culturels ces nations partent à la recherche de leur identité culturelle perdue.
Pour ces pays bien ayant été, pour la plupart, sous le joug d’une puissance étrangère,
la restitution de leurs biens culturels aura valeur de réparation des erreurs commises dans le
passé. Le musée, l’institution ou le pays auquel la requête est faite sera avisé d’y répondre
positivement. S’agissant d’une appropriation illégale ou faite dans un contexte de guerre, lors
d’évènements violents, la morale et le simple bon sens pousse l’actuel possesseur à rendre le
bien. C’est d’ailleurs l’attitude qui est conseillé dans les codes de déontologie anglais. Il est
intéressant ici de voir que ce sont des enjeux moraux et éthiques qui entrent en jeu, et qui ont
du poids.
2. Les arguments contre
a. Les obstacles à la restitution
Restituer un objet à son propriétaire légitime implique que la propriété de l’objet soit
assurée. Encore faut-il donc que le demandeur apporte les preuves de sa propriété légitime sur
l’objet. Cela peut parfois être rendu difficile quand la demande est formulée par une
communauté, dans ce cas, comment juger de la propriété collective? À ce moment là, la
réclamation et le processus de restitution se font par le biais de l’État179. Il faut donc
déterminer le lien entre l’objet et le requérant, «pays d’origine ou de provenance, la notion
n’est pas d’une grande netteté»180. En ce qui concerne les revendications formulées par les
peuples autochtones, les droit de ses peuples ont été encadrés au niveau communautaire par la
Convention n°169 relative aux peuples indigènes et tribaux, ayant pour principaux objectifs
de reconnaître les droits territoriaux et de respecter les valeurs culturelles et spirituelles des
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178 HERSHKOVITCH C., RYKNER D., La restitution des œuvres d’art. Solutions et impasses, Hazan, 2011, p.35.179 CORNU M. et RENOLD M.-A., Le renouveau de biens culturels: les modes alternatifs de règlement des litiges, JDI, 2007, p.506.180 Id., p.513.
«Terres»181. Un autre point sur la question pourrait être discuté, celui de l’appartenance de
l’objet à la terre d’accueil. Pourrions-nous nous risquer à avancer l’argument selon lequel un
objet, après tant d’années de résidence dans le pays qui l’a accueilli, fait finalement partie du
patrimoine de ce dernier?
Une autre des principales difficultés liées à la notion de restitution est la concept de la
non-rétroactivité des lois. On ne peut porter un jugement sur une situation qui s’est déroulée il
y a plusieurs siècles en faisant appel à des lois élaborées postérieurement à ces situations.
Cela implique donc que le litige entre les deux parties ne peut véritablement se résoudre que
par des moyens éthiques, de médiation et de conciliation, d’où l’importance de la
déontologie182.
Enfin, la résolution de litiges en matière de restitution de biens culturels se heurte à la
difficulté de concilier chaque loi, chaque droit, chaque code, selon les pays et les
institutions183. La diversité des cas et la divergence des droits respectifs rendent le processus
de restitution difficile à entreprendre. C’est pourquoi la Museum Association conseille aux
musées de procéder au cas par cas184.
b. Le point de vue des «musées universels»185
Du point de vue des musées qui se voient demander de restituer certains objets,
l’argument avancé est celui d’une vocation «universelle» et «encyclopédique» de présenter au
public une grande diversité, en termes de cultures et de civilisations, dans leurs collections.
En 2002, dix-huit musées ont adopté conjointement une «déclaration sur l’importance
et la valeur des musées universels» dans laquelle ils affirment que les «musées universels»
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181 CORNU M. et RENOLD M.-A., Le renouveau de biens culturels: les modes alternatifs de règlement des litiges, JDI, 2007, p.499. Convention C169 concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants (entrée en vigueur le 5 septembre 1991).182 Krzystof Pomian in PROTT L. V., Les Témoins de l’Histoire: recueil de textes et documents relatifs au retour des objets culturels, Unesco, Paris, 2011, p.51.183 PIERRAT E., Faut-il rendre les œuvres d’art ?, Paris, CNRS Éditions, 2011, p.95.184 LEGGET J., Guidelines for good practice, Restitution and Repatriation, Museum and Galleries Commission, Londres, 2000, p.5.185 Sur le sujet voir: CUNO J., Who Owns Antiquity? Museums and the Battle Over Our Ancient Heritage, Princeton , Princeton University Press, 2008.
sont au service de tous les peuples et que leur mission principale est de conserver le
patrimoine des nations du monde entier186.
Selon Neil McGregor, directeur du British Museum: «cette déclaration, publiée par les
directeurs de quelques-uns des musées et des galeries les plus réputés du monde, est un texte
sans précédent qui exprime une vocation et une vision communes. L’affaiblissement des
collections comme celles-ci serait une perte immense pour le patrimoine culturel mondial»187.
Cette déclaration a cependant suscité les ouires des pays revendicateurs, et l’argument
d’universalité des musées risque de s’essouffler face aux demandes en restitution de plus en
plus croissantes188.
On peut difficilement discuter l’appartenance des collections au public, Krzystof
Pomian, l’affirme lui-même, «toute œuvre d’art, quelque soit son statut juridique actuel, a
virtuellement un caractère public. Pour une œuvre donnée, avoir le caractère public signifie
qu’elle a la vocation à susciter un intérêt, à éveiller la curiosité des gens, à provoquer un
scandale, à se trouver au foyer d’une controverse, à faire objet d’une controverse (...) l’œuvre
qui suscite l’intérêt du public a vocation à appartenir au public»189. L’appartenance au public
implique cependant que d’une part, le bien culturel soit la propriété d’une personne morale de
droit public et que d’autre part il soit exposé dans le respect des règles de conservation. Neil
MacGregor, dans son intervention lors du forum de l’Unesco190 évoque à juste titre la fait que
les grandes villes européennes comme Londres sont cosmopolites, et que quelque part, il en
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186 «Déclaration sur l’importance et la valeur des musées universels», signée par les directeurs des institutions suivantes: Institut d’Art de Chicago ; Musée bavarois, Munich (Alte Pinakothek, Neue Pinakothek) ; Musées d’Etat, Berlin ; Musées d’Art de Cleveland; Musée Getty, Los Angeles ; Musée Guggenheim, New York ; Musée d’Art du comté de Los Angeles ; Musée du Louvre, Paris ; Musée d’Art métropolitain, New York ; Musée des Beaux-Arts, Boston ; Musée d’Art moderne, New York ; Opificio delle Pietre Dure, Florence [Office des Pierres dures] ; Musée d’Art de Philadelphie ; Musée du Prado, Madrid ; Rijksmuseum, Amsterdam ; Musée de l’Ermitage, Saint-Pétersbourg ; Musée Thyssen-Bornemisza, Madrid ; Musée Whitney d’art américain, New York ; British Museum, Londres. On en trouve une version française dans: PROTT L. V., Les Témoins de l’Histoire: recueil de textes et documents relatifs au retour des objets culturels, Unesco, Paris, 2011, p.126187 Neil MacGregor in PROTT L. V., Les Témoins de l’Histoire: recueil de textes et documents relatifs au retour des objets culturels, Unesco, Paris, 2011, p.128188 Sur ce point, un exemple illustre bien la colère des pays revendicateur est celui de l’Égypte qui a menacé la France de ne plus lui accorder de permis de fouilles tant que le Louvre ne lui restituerait pas des fragments de fresques, acquis par le musée en 2000 et 2003. Bien que ces objets ait été acquis de bonne foi par le musée, l’insuffisance des recherches sur leur provenance a joué en sa défaveur. La France a donc accepté le rapatriement des biens en Égypte pour éviter tout litige. 189 Krzystof Pomian in PROTT L. V., Les Témoins de l’Histoire: recueil de textes et documents relatifs au retour des objets culturels, Unesco, Paris, 2011, p.48190 Forum de l’Unesco sur la Mémoire et l’universalité, Siège de l’Unesco, Paris, 5 février 2007. Retranscrit dans PROTT L. V., Les Témoins de l’Histoire: recueil de textes et documents relatifs au retour des objets culturels, Unesco, Paris, 2011, p.45-82.
est de même pour les grands musées occidentaux. «Les populations du monde entier
cohabitent désormais dans les grandes villes de la planète. À Londres, il est certainnement
impossible aujourd’hui de faire la distinction entre le local et l’étranger. Des personnes issues
de chacune des cultures que nous présentons au British Museum vivent dans notre
capitale»191.
c. L’argument muséologique
Le problème de la protection du patrimoine est primordiale dans le débat sur la
restitution des biens culturels. On ne peut dûment pas répondre positivement à une demande
en restitution sans vérifier que les conditons de conservation dans l’institution qui recevra le
bien sont adaptées. «C’est seulement à cette condition que s’avère légitime l’exigence de
restituer ou de faire revenir son patrimoine culturel à la nation qui a été spoliée»192. La
Museum Association dans son code de déontologie insiste sur l’importance de s’intéresser au
traitement futur qui sera apporté à l’objet en cas de restitution193. Il existe dans les mentalités
de la communauté muséale occidentale, puisqu’il est répandu de distinguer musées du nord et
musées du sud, l’idée que les pays demandeurs ont un manque crucial de locaux adaptés aux
règles de conservation édictées par la déontologie, ainsi qu’un manque de moyens financiers
nécessaires à la préservation des biens culturels. Un argument plutôt motivé par la mauvaise
foi, veut que les grands musées européens seraient plus aptes à préserver ces biens culturels,
mais également à les rendre plus accessibles. Mais accessibles pour qui?194. Il est vrai qu’il
paraît difficile, au vu des évènements qui bouleversent la Grèce ces dernières années, pour ne
parler que d’elle, d’imaginer que les frises du Parthénon puissent être préservées avec les
mêmes moyens que ceux déployés par le British Museum. Pourquoi, alors ne pas donner les
moyens à ces musées, soi-disant sous développés, de conserver et de préserver leur
patrimoine selon les normes et les standards de la profession?
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191 Neil MacGregor in PROTT L. V., Les Témoins de l’Histoire: recueil de textes et documents relatifs au retour des objets culturels, Unesco, Paris, 2011, p.56.192 Krzystof Pomian in PROTT L. V., Les Témoins de l’Histoire: recueil de textes et documents relatifs au retour des objets culturels, Unesco, Paris, 2011, p.50.193 MA, Code of ethics for museums, London, 2007, s 7.7. Cf. Annexe n°6, p.73-82.194 MERRYMAN J. H., Law, ethics and the visual arts, Alphen aan den Rijn: Kluwer law international, 2007, p.358.
Enfin, il faut bien évoquer l’idée qui nous parait explicite dans le discours des
professionnels des musées «du nord» que restituer certains objets constituerait un
appauvrissement considérable de leurs collections, et que les conséquences que cela
entraînerait, en termes de fréquentation entre autres, est une crainte partagée par beaucoup.
«De leur côté, les institutions occidentales concernées par des retours craignent de voir
disparaître de leur collection des objets dont la renommée contribue au rayonnement du
musée. On voit que la question économique ne concerne pas uniquement la valeur vénale du
bien, mais aussi les retombées économiques de sa présentation au public»195. Ainsi,
l’argument favori avancé par les détracteurs de la «restitution tout azimuts» est que les grands
musées du monde risquent de se retrouver vidés de leurs trésors, et qu’ils en craignent ainsi
les retombées économiques196.
B. Solutions alternatives à la restitution
À quels instruments peut-on faire appel pour régler les litiges en matière de restitution
de biens culturels lorsque l’on ne peut faire appel aux instruments juridiques classiques? «En
raison de la grande faiblesse du droit face à ces questions, le grand défi de notre siècle
consiste à développer des solutions alternatives applicables en matière de résolution des
conflits autour de la propriété et de l’emplacement d’un bien culturel»197. Les solutions
alternatives à la restitution sont souvent assez satisfaisantes pour les deux parties. Il s’agit de
trouver la meilleure localisation pour le bien culturel, tant en termes d’infrastructure adaptée à
sa bonne conservation qu’en termes d’accessibilité au public.
1. La restitution sous conditions
Dans ce cas, le bien est restitué au demandeur, ceci étant justifié par le fait que
l’appropriation ait été illégale ou que l’objet rentre dans les catégories de biens pouvant être
déclassés. Il s’agit d’une restitution pure mais l’institution dépossédée peut poser certaines
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195 HERSHKOVITCH C., RYKNER D., La restitution des œuvres d’art. Solutions et impasses, Hazan, 2011, p.36.196 MERRYMAN J. H., Law, ethics and the visual arts, Alphen aan den Rijn: Kluwer law international, 2007, p.358.197 HERSHKOVITCH C., RYKNER D., 2011, p.12.
conditions. Encore une fois ici il s’agit bien de faire appel aux moyens de médiation et de
conciliation, finalement les seuls moyens capables de résoudre les conflits198. C’est ce qui a
été adopté dans le cas de la restitution des restes humains aborigènes à la Tasmanie par le
Museum d’Histoire Naturelle de Londres. En effet, le museum a demandé à ce que les
prélèvements ADN ne soient pas détruits en même temps que les dépouilles mais qu’ils soient
préservés en vue d’une éventuelle utilisation scientifique, utilisation qui ne s’effectuera
qu’avec l’accord de la communauté aborigène199.
2. Prêts à long-terme
La solution du prêt à long-terme peut être une bonne solution pour contourner la règle
d’indisponibilité à laquelle le bien est tenu200. C’est d’ailleurs la première solution qui avait
été retenue dans le cas du Benevento Missal en 2005, avant que la Loi Holocauste ne soit
votée, et c’est également une solution envisagée pour le retour des marbres du Parthénon à la
Grèce. Dans le cas du prêt à long-terme, c’est au Conseil d’Administration du Musée de
prendre la décision, sans que cela ait à être validé par le gouvernement au préalable. Notons
ici qu’il est déconseillé, dans le cas des restes humains, de choisir la solution d’un prêt à long
terme201.
3. Le rapatriement numérique
Les nouvelles technologies numériques appliquées au patrimoine sont en plein
développement, ainsi que les techniques d’information et de communication. Internet et les
technologies numériques offrent une myriade de possibilités que les musées seraient avisés
d’utiliser en matière de restitution de biens culturels. Ils les utilisent d’ailleurs déjà pour
procéder aux numérisation des collections dans la perspective de l’augmentation de
l’accessibilité au public. Pourquoi alors ne pas utiliser ce formidable outil pour rendre les
objets à leur pays d’origine, virtuellement parlant. C’est d’ailleurs Bérénice Murphy qui a
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198 CORNU M. et RENOLD M.-A., Le renouveau de biens culturels: les modes alternatifs de règlement des litiges, JDI, 2007, p.518.199 Voir supra, p.28-32.200 CORNU M. et RENOLD M.-A., 2007, p.504.201 Voir supra.
employé les termes de «rapatriement numérique» comme étant un nouvel instrument de la
restitution202.
4. Les autres solutions
Il existe bien d’autres solutions qui seraient à la portée des professionnels des musées
anglais, faisant face à des demandes en restitution. L’une d’entre elles est d’instaurer une
copropriété sur l’objet en question. Dans le cas du tableau de Degas, Paysage et Cheminées,
qui avait été spolié durant la période Nazie et acquis ensuite par un collectionneur américain,
il a été convenu en août 1998, que le collectionneur fasse don de la moitié à l’Art Institute de
Chicago et l’autre moitié serait rendue aux descendants de la famille spoliée203. Une autre
solution envisageable serait également d’instaurer une collaboration entre institutions204, c’est
le cas notamment des traités de collaborations convenus entre l’Italie et les États-Unis,
notamment dans le cas du cratère d’Euphronios, il a été convenu qu’en échange de cette
restitution, les autorités italiennes mettront à disposition du musées des biens culturels «de
beauté et de d’importance historique et culturelle égales au cratère d’Euphronios» en mettant
en place un programme d’échange et de prêts pendant quatre ans205. Enfin la partie requérante
pourrait tout à fait accepter un don pour palier à la non restitution de l’objet réclamé. Dans le
cas de la médiation de la Confédération Suisse dans le litige entre les cantons de Saint-Gall et
de Zurich portant sur les manuscrits anciens, Zurich a été reconnu propriétaire des manuscrits
mais s’est toutefois engagé à faire don à Saint-Gall d’un autre manuscrit206.
Ce qui est certain c’est qu’on évolue de plus en plus vers une acceptation commune
d’une forme de propriété culturelle collective. On ne peut plus parler de déposséder le musée
détenteur et de restituer le bien à son ou ses propriétaires légitime(s); ce n’est plus si simple.
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202 Bérénice Murphy in PROTT L. V., Les Témoins de l’Histoire: recueil de textes et documents relatifs au retour des objets culturels, Unesco, Paris, 2011, p.61.203 CORNU M. et RENOLD M.-A., Le renouveau de biens culturels: les modes alternatifs de règlement des litiges, JDI, 2007, p.521-522. Pour le tableau en question, voir Annexe n° 17, p.95. Pour plus d’informations sur le sujet, voir TRIENENS Howard J., Landscape with Smokestacks, The Case of the Allegedly Plundered Degas, Northwestern University Press, 2000.204 Le British Museum développe d’ailleurs une coopération avec le musée de la Cité interdite à Pékin, «Tous ces échanges s'accompagnent de programmes de formation des conservateurs, qui me semblent essentiels pour faire partager ces biens de l'humanité», NOCE V., ‘Les collections du British Museum sont un patrimoine de l’humanité’, Interview de Neil MacGregor, Libération, 10 février 2007.205 CORNU M. et RENOLD M.-A., 2007, p.518. Voir tableau, Annexe n°18, p.95.206 Id., p.521. Plus d’informations dans un article publié par le Art Law Centre, disponible à cette adresse:< http://www.art-law.org/fondation/newsletters/news130606.pdf> (consulté le 4 mai 2012).
La recherche de solutions à ces litiges doit aller plus loin, utiliser les moyens de la médiation
et se concentrer sur l’importance de la bonne conservation de l’objet et de sa présentation au
public.
C. Pourquoi, alors, ne pas restituer les marbres du Parthénon ou la Pierre
de Rosette?
Depuis leur sortie du territoire grec, les marbres du Parthénon ont fait l’objet de
nombreuses polémiques et ont fait naître de nombreuses discussion sur le statut illégal ou non
de l’acquisition207. Sur la question de la légalité, on ne peut la remettre en question. Lord
Elgin a reçu l’autorisation par le fameux firman de remporter certaines pièces avec lui. Pour
autant asservissante qu’ait été la domination ottomane, elle n’en restait pas moi l’autorité
légale à l’époque. Le problème de la non-rétroactivité des lois joue ici en la défaveur de la
Grèce. La question maintenant est de savoir si, toute légale qu’elle ait été, l’acquisition
n’allait pas à l’encontre de simples principes moraux. Il est admis par ailleurs que les travaux
entrepris pour les désolidariser du monument ont été «un peu barbares»208.
Les premiers appels à la restitution des frises datent de 1833. Après la chute de la
dictature militaire en 1974, les marbres du Parthénon commencèrent à jouer un rôle de
symbole de la démocratie renaissante209. Ainsi la Grèce dès son indépendance, a fait preuve
d’une grande persévérance en demandant la restitution des marbres en 1924, 1941, 1950 et
encore en 1970210. C’est en 1983 que Mélina Mercouri, alors ministre grec de la Culture, se
lança dans une campagne très médiatisée pour la restitution des marbres. Les demandes furent
formulées à plusieurs reprises à travers l’Unesco au gouvernement britannique, qui décida de
transférer la responsabilité de la prise de décision aux Trustees du British Museum, étant les
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207 Voir poème de Lord Byron (1788-1824), Childe Harolde, in The Curse of Minerva.208 Selon Lusieri, le chef de travaux de Lord Elgin, in MERRYMAN J. H., Law, ethics and the visual arts, Alphen aan den Rijn: Kluwer law international, 2007, p.355.209 British Museum Board of Trustees, ‘The Parthenon Sculptures, Facts and Figures’, (7.1) <http://www.britishmuseum.org/about_us/news_and_press/statements/parthenon_sculptures/facts_and_figures.aspx> (consulté le 3 mai 2012).210 HERSHKOVITCH C., RYKNER D., La restitution des œuvres d’art. Solutions et impasses, Hazan, 2011, p.19.
responsables légaux de la collection.211 Pour traiter cette demande le British Museum mis en
place un comité chargé de la réclamation, et a beaucoup été montré du doigt par les
promoteurs du retour des marbres à la Grèce, quand l’Université d’Heidelberg et le Vatican
restituèrent les marbres qu’ils possédaient212. Pourquoi donc le British Museum s’évertue à
vouloir les conserver?
Il existe deux arguments en faveur du retour des marbres du Parthénon à la Grèce,
d’une part l’argument de l’intégrité, les sculptures et le monument constituent un tout
indivisible qu’il est peut avisé de séparer; d’autre part le concept de la propriété culturelle qui
outrepasserait la propriété juridique d’une personne morale sur un bien213. Mais la barrière
légale principale consiste en l’interdiction posée au British Museum, fournie par le trust qui
encadre les marbres, de les aliéner.
De plus comme l’ont avancé les Trustees du British Museum, quel est, finalement,
l’intérêt de déplacer les marbres d’un musée pour les exposer dans un autre, aux conditions de
conservation probablement moins adaptées?214 Les Trustees ont finalement renoncé à
répondre positivement à la demande de la Grèce et ainsi d’apporter une modification à leur
législation. Selon Neil MacGregor, directeur du British Museum, «le British Museum en lui-
même est aussi un joyau du patrimoine de l'humanité. C'est un point unique de rassemblement
des cultures du monde» et sur les marbres du Parthénon: «Ceux-ci ont été acquis légalement.
On peut déplorer qu'ils l'aient été sous la tutelle ottomane, mais elle représentait l'autorité de
l'époque. (...) Je regrette beaucoup la récupération politique à laquelle donne lieu cette dispute
(...) nous avons pour devoir de nous opposer à toute récupération politique, et en général à
toute réduction de sens des oeuvres»215.
Le British Museum met par ailleurs en avant le fait que l’arrivée des sculptures du Parthénon
en 1816 a contribué au développement du goût pour la civilisation grecque en Grande-
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211 British Museum Board of Trustees, ‘The Parthenon Sculptures, Facts and Figures’, (7.2), <http://www.britishmuseum.org/about_us/news_and_press/statements/parthenon_sculptures/facts_and_figures.aspx> (consulté le 3 mai 2012).212 HERSHKOVITCH C., RYKNER D., La restitution des œuvres d’art. Solutions et impasses, Hazan, 2011, p.19.213 MERRYMAN J. H., Law, ethics and the visual arts, Alphen aan den Rijn: Kluwer law international, 2007, p.357.214 HERSHKOVITCH C., RYKNER D.,2011, p.21. Athènes prévoierait des les exposer au nouvellement ouvert (2009) musée de l’Acropole.215 NOCE V., ‘Les collections du British Museum sont un patrimoine de l’humanité’, Interview de Neil MacGregor, Libération, 10 février 2007.
Bretagne et que cela a conduit à l’implication des puissances européennes dans la libération
de la Grèce en 1833. Il est d’ailleurs précisé que «les sculptures du Parthénon se trouvent
depuis plus longtemps au British Museum à Londres que ce que la Grèce moderne a existé»,
cela implique donc que les marbres sont devenus une partie intégrante du patrimoine
britannique et qu’ils «ont trouvé leur place dans un musée né de l'esprit libre des Lumières
avec une culture internationale qui transcende les frontières nationales»216.
En ce qui concerne la Pierre de Rosette217 là aussi, il s’agit d’un bien qui a été acquis
dans un pays sous la domination d’une puissance étrangère et dans lequel une quelconque
protection du patrimoine culturel était quasi inexistante. Depuis sa proclamation
d’indépendance, l’Égypte a fait savoir à plusieurs reprises qu’elle souhaitait le retour de la
Pierre de Rosette, souhait qui n’a toutefois jamais été officialisé. L’annonce de l’ouverture du
musée de la Civilisation pharaonique faite récemment attise les tensions entre les deux pays et
le British Museum a déclaré qu’il serait (prêt) à étudier les possibilités d’une restitution par le
biais d’un prêt218. Le gouvernement égyptien devrait cependant apporter les preuves de sa
stabilité politique et de respect des normes de conservation et de sécurité adaptée aux œuvres.
À la lumière des récents évènements qui ont bouleversé le pays, la question de la stabilité ici
est particulièrement aiguisée.
Que ce soit donc la Pierre de Rosette ou les marbres du Parthénon, la grande question
porte sur le rôle que joue des collections telle que celle du British Museum au sein de la
communauté mondiale. Demander le retour de ces objets remet finalement en question la
notion de collection mondiale, exposant au public les témoins matériels qui constituent le
patrimoine de l’humanité. Ainsi, dans une perspective idéaliste, les marbres pourraient être
restitués à la Grèce, mais non seulement cela impliquerait qu’on réfute la notion de
patrimoine de l’humanité, mais en outre ce geste n’ouvrirait-il pas la boîte de Pandore des
restitutions à tout-va?
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216 British Museum Board of Trustees, ‘The Parthenon Sculptures, Facts and Figures’, (10.4), <http://www.britishmuseum.org/about_us/news_and_press/statements/parthenon_sculptures/facts_and_figures.aspx> (consulté le 3 mai 2012)217 Pour une étude plus poussée sur le sujet voir notamment John Ray, The Rosetta Stone and the Rebirth of Ancient Egypt, Cambridge, Mass.: Harvard University Press, 2007.218 HERSHKOVITCH C., RYKNER D., La restitution des œuvres d’art. Solutions et impasses, Hazan, 2011, p.23.
«Un musée est une institution permanente sans but lucratif au service de la société et de son
développement ouverte au public, qui acquiert, conserve, étudie, expose et transmet le patrimoine
matériel et immatériel de l’humanité et de son environnement à des fins d'études, d'éducation et
de délectation»219.
L’ICOM définit la mission du musée comme étant de conserver les témoins matériels
de l’histoire de l’humanité et de le rendre accessible à tous. Les «musées universels» comme
ils se plaisent à se nommer, regorgent de trésors , illustrations des civilisations de ce monde au
fil des siècles. Un musée tel que le British Museum, premier musée au monde créé par le
Parlement en 1753, est un musée de l’histoire et de la culture humaine. Il a pour vocation de
présenter les peuples du monde entier. Il fait cependant de plus en plus l’objet de demandes en
restitution. Et il n’est pas le seul. Les récents évènements liés au printemps arabe et la volonté
d’affirmation politique formulée par ces pays, sont les preuves d’un rapport au patrimoine qui
se renouvèle. On pourrait avancer l’idée qu’en réclamant leurs biens culturels, les pays
revendicateurs transforment en quelque sorte le patrimoine en instrument de pouvoir. Cette
fonction du patrimoine n’est pourtant pas nouvelle, elle a existé de tout temps. Ce qui est en
train de se développer c’est l’appréhension que les responsables des musées ont de cette
motivation et leur réaction face à ces demandes. L’Angleterre est un pays connu pour ses
mœurs plus souples, et il en est de même pour la législation muséale, en tout cas dans certains
domaines. Nous l’avons vu tout au long de cette étude, les responsables de musées anglais ont
tout de même tendance à prendre en compte les demandes et à y répondre positivement.
Pourtant le British Museum continue à tenir tête à la Grèce. Il est très difficile de peser le pour
et le contre, étant donné la pertinence des arguments avancés par les deux parties. Finalement,
comme le dit Neil MacGregor, la communauté muséale serait plus avisée d’orienter le débat
vers l’accessibilité des collections au public, et non pas de savoir qui en a la propriété et qui
les possèdent. Est-ce-que se réclamer le propriétaire légitime d’un bien conservé dans un
musée ne vas pas finalement à l’encontre de la définition du patrimoine, bien commun à
l’humanité?
En guise de conclusion
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219 Définition du musée par l’ICOM, Code de déontologie, 2007.
Avant de commencer l’étude des nombreux ouvrages sur le thème de la restitution des
biens culturels, il m’a fallu, en tant que non juriste et donc étrangère aux notions de droit, me
pencher sur des ouvrages généraux d’introduction au droit anglais. C’est un travail qui peut
peut-être paraître trop vaste et trop éloigné de mon sujet mais qui m’a tout de même été utile
pour me permettre de comprendre l’appareil juridique anglais avant de pouvoir aborder la
question du droit des musées en particulier. J’ai pour cela consulté les ouvrages de Danièle
Frison, de Roland Séroussi ainsi que l’ouvrage paru chez PUF de René David et Xavier
Blanc-Jouvan. J’ai simplement parcouru certains ouvrages de droit français du patrimoine et
des musées dans le but d’avoir une vision générale du droit en France, bien que mon sujet ne
soit pas du droit comparé, il me paraissait essentiel d’avoir d’abord une vision française
globale du thème que j’allais traiter.
Forte des mes connaissances désormais plus claires sur le système anglais je me suis
ensuite penchée sur l’étude des textes de lois correspondants à mon sujet, notamment le
British Museum Act 1963, le Public Libraries and Museum Act 1964, le Museums and
Galleries Act 1992, le Human Tissue Act de 2004 ainsi que le Holocaust (Return of Cultural
Objects ) Act de 2009. Il existe malheureusement peu de sources traitant du système muséal
anglais étant donné son fonctionnement particulier (ou en tout cas peu d’ouvrages sont
présents dans les bibliothèques françaises), c’est pourquoi ma synthèse des règles posées par
la législation ne puise principalement sa source que dans les textes eux-mêmes, les codes de
déontologie, les codes de conduite des musées ou les rapports publiés pour le ministère. À ce
sujet, deux rapports fort intéressants, sont ceux de Jane Legget et de Moira Simpson, qui
dressent toutes deux un tableau très clair et très explicite des questions de restitution en
pratique. Le seul ennui serait que ces rapports de recherches sont quelque peu âgés. Ils
fournissent cependant des chiffres, graphiques et statistiques particulièrement enrichissants.
En ce qui concerne la notion de restitution il existe tout un corpus d’ouvrages
généraux, d’ouvrages de vulgarisations ou d’articles sur le sujet. Ces ouvrages n’étant pas
centrés sur le droit anglais, il m’a fallu consulter nombre d’entre eux, ayant bien souvent pour
Sources
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
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I. Commentaires sur mes éléments de bibliographie et autres sources
sujet le droit international, afin de pouvoir passer en revue toutes les études faites au niveau
anglais. Je pense notamment aux ouvrages parus sous la direction de John Henry Merryman
ou encore celui paru sous la direction de Lyndel V. PROTT. Ce dernier m’a particulièrement
aidé pour une étude plus théorique de la notion de restitution. Lorsque je fais référence dans le
corps de mon devoir à l’intervention de Tony Doubleday lors du colloque organisé les 2 et 3
mars au musée du Quai Branly, je donne la référence du compte rendu de ce colloque et non
pas des actes publiés car, étant donné leur date de publication trop récente, je n’ai pas pu y
accéder. Le compte-rendu était disponible à la bibliothèque de l’Institut National du
Patrimoine, je précise à ce sujet qu’il m’a été généreusement donné par la responsable,
Nathalie Halgand. Je me permet toutefois de noter uniquement es références de la publication
en bibliographie.
Sur le thème des marbres du Parthénon, je n’ai pas particulièrement intégré d’éléments
traitant de ce sujet dans ma bibliographie, tout simplement car il a été traité maintes fois et
que les sources sont assez faciles d’accès. J’aurais voulu approfondir le sujet de la restitution
des biens spoliés, mais par manque de temps, je ne me suis concentrée que sur les ouvrages et
les rapports publiés par Norman Palmer. Il en va de même pour le sujet des alternatives à la
restitution, partie de mon devoir pour laquelle j’ai principalement puisé mes informations
dans l’article de Marie Cornu et de Marc-André Renold. Avec plus de temps j’aurais souhaité
approfondir le sujet mais il m’a tout de même semblé que cette étude était parfaitement
complète et que d’autres sources n’auraient peut-être pas nécessairement agrémenté leur
propos.
En ce qui concerne mes sources numériques, elles m’ont été d’une grande aide,
qu’elles prennent la forme de communiqués de presse ou d’articles en ligne, tout
particulièrement pour comprendre la législation muséale anglaise et pour étudier des cas de
restitution de restes humains et de biens spoliés. Enfin, les textes de lois, codes
déontologiques, guides de recommandations et les codes de conduite des musées, sont tous
disponibles en ligne, chose qui m’a bien évidemment été particulièrement utile. Par ailleurs
étant donné leur accessibilité je me suis permis de ne pas intégrer les versions anglaises de ces
textes dans mes annexes, mais uniquement mes traductions françaises personnelles, pour des
raisons d’optimisation de l’espace.
Violette Vauchelle - Mémoire d’étude - École du Louvre - Mai 2012
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