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Le Reporter · 2014. 6. 27. · Le Reporter spécial état des médias Le crtc avait-il le choix ? Robert Lacerte Les suites a décision de suspendre la licence de CHOI-FM, rendue

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Le Reporter

spécial état des médias

Le crtc avait-il le choix ?

Robert Lacerte

Les suites

a décision de suspendre la licence de CHOI-FM, rendue par le Conseil de la radiodiffusionet des télécommunications canadiennes(CRTC), a entraîné un débat enflammé.

Plusieurs articles ont été écrits sur le sujet. Desémissions de radio et de télévision lui ont consacré denombreuses heures. Malgré cela le combat entre laliberté d'expression et la censure n'a pas fait de gagnant.La présidente de la Fédération professionnelle desjournalistes du Québec (FPJQ), Mme Anne-MarieDussault, prend une position ambiguë : « La FPJQdéplore la décision du CRTC, mais n'approuve pas lecontenu que défend la station. La liberté d'expressionest une liberté fondamentale qui s'accompagne deresponsabilités déontologiques toutes aussifondamentales. »

Les ondes radiophoniques sont du domaine public.L'obtention d'une licence n'est pas un droit mais bienun privilège. Elle s'accompagne de devoirs. Le CRTCveille à l'application des lois qui régissent le contenu desondes. Bien qu'en affaires pour générer des profits, unecompagnie privée comme Genex communications,propriétaire de CHOI-FM, ne peut se servir des ondespour proférer des insultes ou désinformer en crachantdes mensonges dans ses micros.

La chasse aux cotes d'écoute ne peut expliquer les excèsde langage de la « radio poubelle ». Les animateurs viséspar les plaintes, Jeff Filion et André Arthur, se targuentde dire les « vrais choses au vrai monde, qu'ils donnentla parole au peuple «. Cet argument est employé pour sedonner bonne conscience. En fait, cela démontre le peude respect porté aux auditeurs. On croit que c'est le seullangage que les gens peuvent comprendre. Au lieud'élever le débat, le discours tend vers le plus bas

dénominateur commun. C'est facile et ça fonctionne. Lastation a les meilleures cotes d'écoute. Ses fidèles serendent dans les rues par milliers pour manifestercontre sa fermeture. La formule doit plaire. Mais cettepopularité naît d'un malentendu. On fait croire àl'auditeur qu'on lui donne du pouvoir. Le pouvoir cesont les animateurs qui l'ont et ils l'utilisent à leurs fins.

Jeff Filion se dit ciblé parce qu'il est « différent, qu'ilrefuse d'entrer dans le moule de la radio uniforme etsans saveur «. Il prétend qu'on le juge sur de « raresdérapages ». Selon lui, les personnes lésées devraientintenter des poursuites judiciaires. Au Québec, ce n'estpas simple. Dans les causes de diffamation les fraisd'avocat ne sont pas remboursés même si on a gain decause, la jurisprudence n'est pas favorable et les délaissont très longs. Le CRTC n'avait pas le choixd'intervenir pour protéger l'intérêt public.

Le 31 août annonçait la fin de CHOI-FM. Le CRTC aaccordé une extension jusqu'en mars 2005. La « radiopoubelle » peut continuer de sévir. La campagne dedénigrement contre les annonceurs de la stationconcurrente, le 93,3, a réussi. Tous les annonceurs ontquitté. Cette guerre des ondes se retrouve maintenantdevant les tribunaux. La cour devra décider si CHOI-FM a le droit de parler des annonceurs d'une autrestation. Le jugement n'a pas encore été rendu. Enfin, enseptembre dernier, les animateurs ont participé àl'élection dans Vanier du député de l'ADQ SylvainLégaré. La radio de propagande a servi les intérêts duparti de Mario Dumont, le plus grand supporteur deCHOI-FM. Des analystes affirment qu'une telle radione pourrait survivre à Montréal parce qu'elle est uneville plus cosmopolite que Québec. Le conseillermunicipal Jean-François Plante dit sur toutes lestribunes que pourtant cela manque à Montréal.

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Le Reporter

spécial état des médias

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Quand les marchands d'armes

dirigent les médias...

Didier Bert

'industriel et politicien Serge Dassault voulaitfaire passer ses idées dans les médias. Il estaujourd'hui à la tête du premier groupe de

presse français.

« Je souhaite posséder un journal ou un hebdomadairepour exprimer mon opinion et peut-être aussi pourrépondre à quelques journalistes qui ont écrit sur moides choses pas très agréables. » Fin 1997, le patron dugroupe d'armement Dassault, Serge Dassault,s'exprimait en ces termes sur la chaîne d'information encontinu LCI.

Au mois de juin 2004, cetami de longue date duprésident français JacquesChirac est devenu lepropriétaire du groupeSocpresse. Cette sociétédétient 70 titres, dont30% de la pressequotidienne régionalefrançaise. La Socpressecompte des titres parmiles plus prestigieux, telsque le quotidien nationalLe Figaro, le quotidienrégional Le Progrès, lesmagazines L'Express,L'Expansion, Lire, La VieFinancière et L'Etudiant.

Avec cette acquisition, Serge Dassault a pris le contrôledu premier groupe de presse français, devant le groupeLagardère, autre industriel de l'armement. A eux deux,ils possèdent 70% de la presse écrite française.

Durant l'été, Serge Dassault a inauguré ses nouvellesfonctions de patron de presse. Il a commencé à exercerson contrôle à la rédaction du Figaro. A sa demande, unarticle traitant des discussions sur l'avion militaireRafale, produit par le groupe Dassault, a été coupé. Puis,une entrevue avec un intermédiaire du contrat desfrégates de Taïwan a été refusée. Les modalités ducontrat de vente de frégates à Taïwan font actuellementl'objet d'une enquête de la part de magistrats français ettaïwanais. Ceux-ci soupçonnent le versement deplusieurs centaines de millions d'euros de commissionsoccultes.

Les journalistes du Figaros'inquiètent de cesinterventions du nouveaumaître des lieux ? « Il y aquelquefois desinformations quinécessitent beaucoup deprécautions. (...) Il y a desinformations qui font plusde mal que de bien. Lerisque étant de mettre enpéril des intérêtscommerciaux ouindustriels de notre pays »,répond Serge Dassault.

Aujourd'hui, Serge Dassaultest patron de presse et il

entend bien marquer le journalisme français de sesconvictions. « J'espère que vous allez cesser de formerdes journalistes de gauche ! », a-t-il lancé le 1er octobreà des responsables du Centre de Formation des

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Le Reporter

SPÉCIAL ÉTAT DES MÉDIAS

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l'état des médias

Vu de chez Vincent

Mathias Marchal

incent®, subways et pizzas, c'est un anachro-nisme sur Le Plateau, royaume de la gentrifica-tion montréalaise. On peut, le temps d'un pogo

sauce Michigan et d'une poutine, croiser différentsspécimens d'humanus occidentus. Ce soir-là, à la nuittombée, rodaient le Tony XXLus qui règne sur sonrestaurant tel un patriarche sicilien, un couple de cyber-estudiantus adepte de la toute-garnie, ainsi qu'une espèceassez rare; le Fransiscus ennervatus grâce à sa langue bienpendue, fera le régal de tout journaliste. Sous le menu,placée bien en évidence, trône une boîte à images coinscarrés et la feuille de chou du jour qui porte le nom dela ville. C'est donc l'endroit idéal pour savoir de quoinotre humanus occidentus nourrit son cerveau en plus desonestomac.

Ahmed est unspécialiste de lapizza. Il détientaussi le titreprestigieux depremier musul-man à qui on aconfié la responsabilité stratégique de s'occuper du fourduquel sortent , selon la rumeur, les meilleures pizzas detout Montréal. « Je ne regarde plus la télévision depuisque les Américains ont envahi Bagdad, ça me causebeaucoup trop d'émotions », confie-t-il tout en surveil-lant d'un œil le thermostat de son outil de travail. « Déjà,lors de l'encerclement d'Arafat par les chars israéliens,on avait pleuré toute la nuit », ajoute-t-il avant de pré-ciser : « Les autres victimes du 11 septembre c'est aussinous, les musulmans, car on n'ose même plus donner

notre avis de peur de peur de pas ser pour des sympa-thisants des terroristes.» « Il n'y a pas de vraie télévisionlibre », enchaîne-t-il en retirant une fromage pepperonisdu four. « Si tu regardes CNN tu n'auras qu'une part dela réalité. Et si tu regardes la télé syrienne ou jordani-enne , que tu vois les enfants mourir en Irak, tu verrasl'autre face de la réalité. » Il nous fournit ainsi quelquespistes de réflexion concernant l'importance de diversifi-er ses sources d'information.

Jipi, son truc, c'estle sport, qu'ildévore aussigoulûment que lapizza all dressedque lui a préparéAhmed. Dans LeJournal de Montréal,il s'empresse detourner les pre-mières pages en

n'y lisant que les grands titres pour arriver plus rapide-ment aux résultats sportifs de la fin de semaine. Ce quil'a marqué récemment dans l'actualité ? « Le gars dumarathon d'Athènes qui a été bloqué par un bum alorsqu'il menait la course ! » Dans sa voiture, Jipi écouteCKOI et CHOM « parce que des fois t'aimes mieuxécouter la musique que la violence ». Dans un sens, Jipiest assez proche de Tony, le patron de la place, quibranche la télé uniquement pour suivre les courses dechevaux, évitant ainsi de se confronter à la violence quenous subissons en regardant le bulletin de nouvelles.Ainsi, d'après une étude publiée dans le magazineScience, il y aurait un lien entre le nombre d'heures

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Le Reporter

SPÉCIAL ÉTAT DES MÉDIAS

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béhaviorisme chez les lecteurs

Julie Demers

es lecteurs de journaux, les téléspectateurs dubulletin de nouvelle, sont-ils victimes debéhaviorisme (comportementalisme) ? M. J.B Watson aurait sûrement eu son mot à

dire, eût-il été encore vivant…

La dynamique de la société de l'information doit à lafois permettre au lecteur de journaux ou au téléspecta-teur du bulletin de nouvelles télévisées d'acquérir del'information nouvelle et de l'instruire sur ce qui sepasse dans le monde. Or, présentement, le téléspecta-teur subit le phénomène de la désinformation. Lecoupable ? La convergence de l'informatique, de l'au-diovisuel et des télécommunications. Cette conver-gence, en effet, rend possible un accès instantané à degrandes quantités de ressources d'information de typestrès divers, ce qui, pour laplupart des êtres humains,rend indigeste les infor-mations, acquises toutesen même temps. Car trop,c'est trop. Sans compterle matraquage direct etindirect (pubs assénéesaux 12 minutes).

Donc la question concer-nant le béhaviorisme estlégitime, car les médias entraînent un mou-vement de masse qui se traduit par des réactions simi-laires chez l'être humain, déclenchant des émotions quise résument ainsi : chagrin, peur, enthousiasme, etc. Ici,le stimuli est la nouvelle qui enchaîne des réactionstelles que consternation, chagrin, enthousiasme. Ce quiferme la boucle de la théorie de M. Watson , sauf pourles quelques esprits analytiques qui demeurent, bien sûr,mais qui se font toutefois rares. La première nouvelle,une fois absorbée, est avalée et l'on passe à la bouchéesuivante, sans prendre le temps d'en analyser le contenu,son goût, et sa texture, etc.

Vivant dans un monde très technologique, parfoispresque robotique, les gens ont possiblement moinstendance à analyser ce qui se dit, ce qui s'entend.D'autant plus que les médias nous bombardent d'im-ages qui ne nous font réagir que pendant un court lapsde temps, puis tout revient à la normale. Parfois même,l'automatisme des gestes, des images font que nous neréagissons pas humainement ou plutôt qu'il y unmanque d'humanisme face aux évènements surmé -diatisés.

Un autre article Hull soutient que « le comportementest flexible, adaptable et intelligent. De plus il affirmeque le besoin motive ou pousse à l'activité. Il introduitalors le concept de drive . Les besoins sont doncregardés comme des déclencheurs des tendances pri-

maires à l'action. » Alors, ici lesbesoins sont les émotions qui sontelles-mêmes les déclencheurs pri-

maires à l'action qui est demontrer ses émotions dans unecertaine communauté ou dans

un groupe.

Après tout, que l'on parlede béhaviorisme (com-portementalisme) ou d'au-tomatisme, une véritéindéniable reste: le con-

tenu manque d'analyse et les images prennent trop deplace pour l'être humain que nous sommes, et dont lesneurones sont surchargés de faits divers. Il revient alorsaux grosses corporations de faire le ménage, deréfléchir, et effectivement, d'analyser leur comporte-ment envers leurs stations de télévision et leurs jour-naux. Toutefois, il revient avant tout à l'être humaind'analyser davantage le contenu et de ne pas se fieruniquement aux réactions de son entourage face auxnouvelles.

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Le Reporter

POLITIQUE INTERNATIONALE

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le proces du siècle

Sébastien Boudine

Racketeer-Influenced and Corrupt OrganizationsAct), conçue dans les années 1970 pour lutter con-tre le crime organisé. Ce texte considère qu'uneactivité économique devient criminelle si elle estliée à une conspiration illégale. Dans ce procès l'accusation principale est doncque les cinq dirigeants de ces compagnies seseraient réunis il y a cinquante ans afin de toutmettre en oeuvre pour que les méfaits de la ciga-rette soient cachés au public.

Aujourd'hui le gouvernement Bush aurait bienaimé abandonner les poursuitesen cours, mais il ne l'a pas fait,craignant le scandale qu'auraitprovoqué l'arrêt d'une procé-dure ayant produit 122 millionsde pages, 645 décisions de jus-tice et coûté 135 millions dedollars au contribuable. Lesadversaires des groupes detabac craignent cependant que,si George W. Bush est réélu, legouvernement prenne moins deprécautions et accepte unetransaction amiable favorableaux industriels.

Rien d'étonnant en cela, étantdonné que les compagnies detabac ont toujours été degrands financeurs de partis

politiques et spécialement des républicains. On necitera que l'exemple de Karl Rove actuellementconsultant senior au sein de l'administration Bush,qui travaillait avant comme conseiller politiquepour Philip Morris. Auparavant il travaillant simul-tanément pour G.W Bush lorsque celui-ci étaitgouverneur, et la compagnie de tabac mentionnée.Les petites contributions de ces compagnies sechiffrent chaque année en millions de dollars.

ardi 21 septembre, les audiences duprocès du siècle contre l'industrie dutabac ont débutés. En effet, le ministère

américain de la justice a demandé à six compagniesde tabac de rembourser 280 milliards de dollarspour les préjudices subis par les consommateurs deleurs produits depuis cinquante ans.

Les compagnies en cause sont : Philip Morris USAdevenue Altria Group Inc.; R.J. Reynolds TobaccoCo.; Brown & Williamson Tobacco Co.; BritishAmerican Tobacco Ltd.; Lorillard; Liggett GroupInc. Les accusations portent sur lamanipulation des dosages de nico-tine de façon à augmenter la dépen-dance des fumeurs, les campagnesde publicité à destination des ado-lescents, et la manipulation ou ladissimulation des résultats d'étudesscientifiques prouvant l'existencedes risques. Deux organismes sontégalement sur le banc des accusés :le Counsel for Tobacco Research-U.S.A., et le Tobacco Institute. Cesdeux instituts de recherche entière-ment financés par les compagniesde tabac, et aujourd'hui disparus,servaient auparavant à lancer desopérations de communication niantles méfaits du tabac. WilliamOhlemeyer, vice-président d'Altria,la société mère de Philip Morris,résume clairement l'enjeu du procès : « Si le gou-vernement obtient tout ce qu'il demande, alors ildeviendra le propriétaire des entreprises accusées. »

C'est en 1999, après avoir passé cinquante ans dansla fumée, que le gouvernement américain, dirigé àl'époque par Bill Clinton, entame des poursuitescontre les géants du tabac. Les poursuites sontalors engagées en vertu de la loi RICO (pour

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Le Reporter

Société

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le proces du siècle

u contact et au rythme de la nature, ainsi va lavie rurale. Est-ce pourquoi elle croît en popula -rité? Au point de faire l'objet d'une

émission animée aux États-Unis par Paris Hilton et auQuébec, par Anne-Marie Losique. Mode passagère ouretour à la terre, l'avenir le dira.

Qu'est-ce qui pousse des Québécois de tous âges,hommes et femmes, à s'inscrire auprès d'un centred'emploi agricole, comme Agrijob de Montréal, pourobtenir le droit de travailler aux champs, dans les verg-ers ou les serres? Par nécessité ou par choix, il s'agitd'une mauvaise ou d'une bonne aventure, selon le cas.

En pleine saison, lors des récoltes, il y a quatre pointsd'embarquement situés à proximité de diverses stationsde métro, à Montréal ou à Longueuil. Le reste du temps,l'effectif journalier s'embarque à bord d'autobus sco-laires dans un stationnement du métro Longueuil, sixjours semaine, du lundi au samedi. Un agent recruteursert d'intermédiaire entre employeurs et ouvriers. ÀLongueuil, Serge règne en maître de céans. Il y fait lapluie et le beau temps. Il sélectionne et répartit ceux quiont réservé leur place par téléphone ou qui, en désespoirde cause, se présentent à 6h le matin. Certains sont choi-sis, d'autres non, surtout lorsqu'il pleut et que beaucoupde producteurs remettent à plus tard la journée de tra-vail.

D'ailleurs, Denis, qui a porté plainte, accuse Serge defavoritisme : « Il fait ce qu'il veut et il a ses préférés, sou-vent Noirs ou Mexicains. Parce qu'ils ne chialent pas. »Ce mécontent voudrait bien que Serge soit remplacé.

Maintes expériences s'avèrent plus heureuses. Celle deMarie-Hélène, orthopédagogue de profession venue unbeau samedi de mai planter des oignons sur une fermede St-Valentin, près de Lacolle, « pour changer, déclare-

trouver sa place au soleil

Lise Michaud

A

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t-elle, et se mettre en forme ». Les journées sont haras-santes, mais payées environ 8$ l'heure, soit plus que lesalaire minimum, le soir même. Et elle avoue avoirbesoin d'argent sonnant.

Il y a les occasionnels et les réguliers. Jean ne manquepas de travail. Il est aujourd'hui connu et apprécié decertains producteurs qui réclame sa présence. C'est lecas de l'ex-hockeyeur Pierre Bouchard qui doit prendrerégulièrement un jour ou deux de repos.

Quant à Sophia, leproblème ne se posepas. « Je ne suis pas tou-jours disponible », dit-elle. Satisfaite de sajournée, elle affirmetravailler chaque foisqu'elle éprouve l'irré-

sistible envie d'une escapade campagnarde. Elle le faitpour s'évader du Mile-End montréalais et découvrir laplaisante Montérégie rurale. Ou même les régions deLanaudière ou de celles des Laurentides-Outaouais si lebesoin de main-d'œuvre s'y fait sentir.

Puisqu'Agrijob met aussi ses adhérents en contact avecd'autres agences. Telle est normalement la conjoncturequi prévaut à la saison des récoltes, en août-septembre.

Au revoir monde rural, sans rancune ni regrets!

Pour de plus amples renseignements: il faut s'adresser

chez Agrijob, au dCentre Jean-Marie Gauvreau, 911, rue

Jean-Talon Est, bureau 124, Montréal.Du lundi au ven-

dredi, de 8h à 12h et de 13h à 15h.

Site Internet : www.agrijob.info

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CULTURE

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Des larmes d'espoir

pour le tibet

Robert Lacerte

e qu'il reste de nous est un documentaire deFrançois Prévost et Hugo Latulippe filmé àl'aide d'une caméra cachée. Il raconte le pre-mier voyage au Tibet de Kalsang Dolma, une

Montréalaise d'origine tibétaine. Elle profite de l'occasionpour présenter un message clandestin du Dalaï Lama, leleader politique et spirituel du Tibet. Elle permet derompre plus de 50 ans de silence. À cause de l'emprise dela Chine, il n'est plus permis de parler de politique dansles rues ou de posséder une photo du Dalaï Lama.Certains ne l'ont pas vu depuis son exil en Inde en 1949,l'année de l'invasion. Toute une génération ne l'ont mêmejamais vu.

La tension créée par l'illégalité du geste et par l'effet de lacaméra cachée est palpable. Elle commence dès notreentrée dans la salle de cinéma. Tous les spectateurspassent au détecteur de métal. Les appareils capables deprendre des images sont confisqués. Une note nousexplique que c'est pour protéger ceux qui osent contesterle régime chinois à l'écran. C'est une leçon de couragequand on sait qu'il y a environ 1 200 000 Tibétains quiont disparu depuis 1949.

Les visionnements se font donc à l'insu des autorités. Onsurveille portes et fenêtres afin de ne pas être repérés. Ladélation est bien payée dans un régime totalitaire. Tout lemonde se méfie de son voisin. D'un magnifique paysageà l'autre, avec l'Himalaya en toile de fond, le message sepropage de maison en maison jusque dans les coins lesplus reculés du pays. Le documentaire montre les réac-tions très émotives des Tibétains face au message d'e-spoir. Les larmes se mélangent à la rage et à l'espoir. Ongarde un mince espoir de revoir le Dalaï Lama revenir auTibet, mais sans grande conviction. Les Tibétains sontplutôt résignés. Ce qu'il reste de nous est un film très puis-sant. La simplicité des images montre la force des émo-

tions. La répétition des nombreux visionnements pour-rait lasser, mais au contraire cela nous rend encore pluscomplices.

Kalsang Dolma visite aussi l'ONU afin de savoir ce qu'afait la communauté internationale pour aider le Tibet.Sauf quelques motions de blâme, l'ONU demeure plutôtdiscrète. Les enjeux économiques sont trop grands. LaChine est devenue un joueur majeur. Aucun pays ne veutcouper les ponts avec ce pays de plus d'un milliard deconsommateurs potentiels. Les Tibétains se sententabandonnés. Leur pays des neiges est devenu le grenier etla poubelle de la Chine, et personne ne leur vient en aide.

Un autre aspect intéressant, particulièrement pour lesQuébécois, est la quête d'identité. Le Tibet n'est plus surles cartes du monde depuis 1984. Les autorités chinoisesont changé les noms de montagnes, de fleuves et dequartiers. 6254 lieux sacrés ont été détruits. Dix millionsde colons ont envahi le Tibet dans le but de faire dis-paraître la culture tibétaine. Plusieurs jeunes ne parlentplus leur langue maternelle. Ces informations sur la situ-ation du Tibet font contraste au message de résistancepacifique du Dalaï Lama. Cette attitude ne semble pasporté fruit. On ressent le doute dans les paroles desTibétains : « On a perdu le Tibet », dira l'un d'eux. SelonKalsang Dolma, la Chine fait une guerre d'usure à l'es -poir : « Il n'y a plus que six millions de corps et d'âmespris dans la douleur. »

Quand les lumières de la salle s'allument, tous les specta-teurs quittent en silence en signe de respect mais avec unsentiment de culpabilité. Pouvons-nous faire quelquechose pour le Tibet et les Tibétains? Le documentairesème un grain d'espoir.

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LA JONCTION

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Mathias Marchal

Le journalisme scientifique :

Quel avenir?

Lise Audet

'animateur de la soirée du 26 mars 2004,Bernard Lévy, écrivain et enseignant àl'Université de Montréal en rédaction et en jour-

nalisme, a lancé le sujet en indiquant que la télévisionreprésenterait 60 % de la diffusion des connaissancesscientifiques, la presse écrite, entre 30 % et 40 %, et laradio, moins de 10 %. Internet, de son côté, s'im-poserait de plus en plus dans ce secteur d'information.

La science dans les médias

Pascal Lapointe, journaliste de formation aux comman-des de l'Agence Science Presse depuis 25 ans, précise lestatut de la vulgarisation scientifique dans les médias :En 2001, selon un sondage réalisé par l'Association desCommunicateurs Scientifiques (ACS), de 3 % à 5 % du con-tenu hebdomadaire global des médias était consacré à lascience. M. Lapointe poursuit en expliquant queL'Agence Science Presse offre son bulletin hebdomadaireaux quotidiens pour la somme modique de 104 $ parannée; malgré ce faible coût, les abonnés se font rares etles quotidiens boudent l'information. Pour réussir àinformer les amoureux de la science, l'Agence SciencePresse s'est tournée vers Internet. Actuellement, son siteWeb (http://www.sciencepresse.qc.ca/) recevrait men-suellement la visite d'un demi-million d'internautes.

Selon Robert Dubois, directeur du magazine Dire, lavulgarisation scientifique est absolument nécessaire à lasociété pour une prise de décision éclairée dans bien desdomaines, mais, malheureusement, elle demeure à lamerci des subventions publiques et privées.

Chantal Srivastava, journaliste à la radio de Radio-Canada, insiste pour sa part sur la nécessité de sauveg-arder un créneau consacré à la science dans les médiasgénéralistes. « Bien sûr, on retrouve des articles de sci-ence ou des capsules insérées un peu partout dans

plusieurs magazines populaires, mais sans le créneau[consacré à la science] tout est menacé. Il faut se battrepour l'espace, pour assurer un minimum.»

Communicateurs ou des chercheurs ?

Selon les invités, les scientifiques, en général peu enclinsà la communication, perçoivent encore la vulgarisationcomme un mal nécessaire et laissent souvent cette tâcheaux journalistes de profession.

Chantal Srivastava, sociologue de formation et journal-iste depuis 5 ans à l'émission Les Années-lumière, nousconfie qu'elle est d'abord passée par les affairespubliques avant de se joindre à l'équipe de journalismescientifique. Robert Dubois précise de son côté que sonmagazine est conçu et rédigé uniquement par des étu-diants des cycles supérieurs.

Deux profils de vulgarisateurs scientifiques se dessinentdonc : le premier et le plus fréquent, le journaliste oucommunicateur de profession; le deuxième, le scien-tifique qui décide d'œuvrer dans le domaine des com-munications, en passant parfois par une formation d'ap-point en journalisme ou en rédaction.

Un métier exigeant

Selon Pascal Lapointe, les journalistes scientifiquesœuvrent principalement à la pige. Ils doivent fairepreuve de beaucoup d'initiative, car les magazines enattente de sujets scientifiques intéressants n'ont souventpas de ressources à consacrer à la recherche. Le jour-naliste scientifique, doit lire énormément, et souventdans plusieurs langues, afin de débusquer la nouvelle.

Les perspectives d'avenir en journalisme scientifiquevous paraissent un peu minces ? Peut-être, mais selonnos valeureux invités, elles existent !

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Le Reporter

Jonction

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Quand les marchands d'armes

dirigent les médias...

epuis le début de l'année 2004, une vague dejoueuses russes domine le haut du classementgénéral au tennis féminin. Présentement, le

top 10 mondial comprend cinq joueuses russes. AprèsAnastasia Myskina à Rolland-Garros et Maria Sharapovaà Wimbledon, une autre joueuse russe s'est imposée auUS Open. Dans une autre finale toute russe, SvetlanaKuznetsova a battu Elena Dementieva. À chaquetournoi, on est presque sûr de retrouver une joueuserusse en demi-finale ou en finale. Cette dominationrusse n'est certes pas le fruit du hasard.

C'est grâce à l'ex-pre-mier ministre del'U.R.S.S. que la Russies'illustre si bien sur lecircuit de la WTAprésentement. Eneffet, le tennis est unedes passions deMonsieur Eltsine qui adécidé de créer un pro-gramme pour aider lesjeunes talents.

« Boris Eltsine,il a sorti le ten-nis de nulle parten Russie. C'esten quelque sortenotre grand-père », analysaiten début d'an-née AnastasiaMyiskina, quin'avait que 10ans quandl'URSS s'est dés-

intégrée. « Il jouait autennis puis beaucoupd'hommes politiques s'ysont mis. L'argent acommencé à arriver dansle tennis qui est devenuun sport populaire. »

Le Canada devrait suivrel'exemple de la Russie et

créer un vrai pro-gramme de développe-ment pour les joueusescana diennes. Avec lenouveau Centre Rexallà Toronto qui vientd'être complètementrénové au coût de45M$, et qui devraitservir de centre d'en-traînement national seserait une bonne idée.Cela aiderait grande-ment les joueuses

québécoises qui ont beaucoup de talents. AlexandraWozniak, Mélanie Marois, Marie-Eve Pelletier,Stéphanie Dubois et Valérie Tétreault ne cessent des'améliorer de jour en jour.

Puisque le gouvernement met autant d'efforts à rénoverles stades à Toronto et Montréal, il devrait logiquementaugmenter le financement aux joueuses prochainement.Qui sait, peut-être verra-t-on un jour une joueuse cana-dienne dominer le classement mondial?

D

La domination russe

Thierry Bastien

Volume 6, numéro 1, novembre 2004 Volume 6, numéro 1, novembre 2004

Kournikova

Sharapova

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Le Reporter

Les suites

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Volume 6, numéro 1, novembre 2004 Volume 6, numéro 1, novembre 2004

passées devant la télévision et le degré de stress et d'a-gressivité d'une personne.

Plus tard, Michel et Sophie, tendance bobo, font leurentrée pour un hamburger à emporter. Leur activitéprofessionnelle tournant autour des dotcom, leur Mecqueà eux, c'est slashdot.org et autres cryptome.org « parceque sur Internet, on peut choisir spécifiquement ce quinous intéresse. Y a plus de chnoute, mais aussi plus dechoses intéressantes », précise Michel. L'évènement quia retenu son attention est « le move de Microsoft qui vadoubler son portfolio de brevets ». Il évite d'ailleurscomme la peste la télévision : « Pourri, brainwashing,bullshit » sont les mots qui lui viennent spontanémentpour décrire une télé « pleine de rien ».

François, la quarantaine énervée, résume bien l'opiniongénérale qui règne dans la place ce soir-là : « Dansl'ensemble, les médias, c'est de la folie furieuse. On vitdans une société un peu dépressive et les médias cul-tivent notre impuissance. Tu ne peux rien écouter sansqu'on te parle de catastrophes, alors que les chosesessentielles de la vie ne sont pas là », éructe-t-il en pas-

Contrairement aux exigences des poursuites crim-inelles, où la preuve doit être établie hors de toutdoute raisonnable, les dispositions civiles de la loiRICO n'exigent qu'une norme de preuve minimale(la prépondérance des probabilités). Mais cette loistipule également que l'accusation doit prouverque la conspiration existe toujours et n'appartientpas seulement au passé. Les avocats des fabricants

sant hargneusement la mop sur le plancher. « On n'estpas informés, on est BOMBARDÉS de choses trèssuperficielles. Un écureuil qui se fait frapper par unpoids lourd, qu'est ce qu'on en a foutre! Le sexe estpartout. À c't'heure le soir, t'as des filles en bikini qui tedisent appelle, appelle, c'est-y pas niaiseux! », rajoute-t-il avant d'aller bravement nettoyer les toilettes. « Autrefois, il y avait des dictatures et on parlait de pro-pagande, mais ça existe encore ici et aujourd'hui, à tra-vers les médias et la publicité qui nous disent commentvivre, quoi acheter, sans se soucier que ce soit moral oupas », s'emporte-t-il de retour du petit coin. « Les seuleschoses que je trouve un peu différentes dans les médias,ce sont Radio Vatican pour la qualité de l'information etle 29, Télé Université, car tu peux y apprendre plein detrucs même si tu ne comprends pas toujours tout »,conclut-il sur une note un peu plus optimiste.

D'une telle soirée chez Vincent®, on ressort l'estomacun peu lourd. Et l'esprit légèrement embrumé quant àl'impact (positif ou négatif ?) des médias sur notresociété.

Vu de chez Vincent ...

Le procès du siècle...de cigarettes soulignent que les paquets portentdes mises en garde pour la santé depuis les années1960, et que de nombreux sites web sont en placeaujourd'hui pour prévenir les consommateurs desdangers encourus. Il est certain que ce procès,touchant à la fois à l'économie d'un pays toutentier et à toute son organisation politique, s'an-nonce décidément long et complexe.

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30 novembre 2004Thématique :

Politique et société en 2004

novembre 2004 Vol. 6 No 1

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