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LE RETOUR DE BASTIEN-LEPAGE par M. Gilbert PERCEBOIS, membre titulaire Formé dès l'enfance au dessin, le jeune Jules BASTIEN quitte sa Meuse natale à peine âgé de 20 ans, bien décidé à consacrer sa vie à la peinture. Admis dans l'atelier de CABANEL, il concourt pour le Prix de Rome. Il échoue en 1875, puis encore en 1876. Il en souffre mais conquiert certains milieux artistiques et mondains. Dès lors, sa partici- pation au Salon annuel est attendue par le public et la critique. Un succès rapide - trop rapide, peut être - lui assure une certaine aisance et une renommée qui dépasse le cadre national. C'est alors qu'un mal implacable le frappe. Ses médecins, malgré une intervention chirurgicale mutilante, ne peuvent empêcher l'issue fatale. Sa mort, à 36 ans, est annoncée dans toute la presse française et étrangère avec des détails souvent erronés. Le « Voltaire », en particu- lier, avance faussement que le peintre, cancéreux, était inopérable et qu'un séjour en Algérie ne fit qu'activer son mal. Mis en cause, le D r WATELET sort maladroitement de l'obligation de réserve et, dans une lettre que publie « Le Matin », viole le secret professionnel. Le Ministère public réagit en poursuivant le médecin qui est condamné. La Cour de Cassation confirme le verdict le 18 décembre 1885 et fixe pour de nombreuses années l'interprétation stricte de l'article 378 du Code pénal. Très rapidement, en une dizaine d'années, la gloire de BASTIEN- LEPAGE s'estompe ; une disgrâce posthume frappe son oeuvre ; ses toiles, dans maints musées, prennent le chemin des réserves. Quant à l'affaire WATELET, si elle reste enseignée dans les facultés de droit et de médecine, elle évoque de moins en moins le peintre et son oeuvre. Or, depuis quinze ans environ, un mouvement né outre-atlantique, trouvant un écho en France, tend à raviver l'intérêt quasi-éteint des esthètes et des historiens de l'art pour une oeuvre que l'on croyait oubliée. Au même moment, le projet de révision du Code pénal, plus 123

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LE RETOUR DE BASTIEN-LEPAGE

par M. Gilbert PERCEBOIS, membre titulaire

Formé dès l'enfance au dessin, le jeune Jules BASTIEN quitte sa Meuse natale à peine âgé de 20 ans, bien décidé à consacrer sa vie à la peinture.

Admis dans l'atelier de CABANEL, il concourt pour le Prix de Rome. Il échoue en 1875, puis encore en 1876. Il en souffre mais conquiert certains milieux artistiques et mondains. Dès lors, sa partici­pation au Salon annuel est attendue par le public et la critique. Un succès rapide - trop rapide, peut être - lui assure une certaine aisance et une renommée qui dépasse le cadre national.

C'est alors qu'un mal implacable le frappe. Ses médecins, malgré une intervention chirurgicale mutilante, ne peuvent empêcher l'issue fatale. Sa mort, à 36 ans, est annoncée dans toute la presse française et étrangère avec des détails souvent erronés. Le « Voltaire », en particu­lier, avance faussement que le peintre, cancéreux, était inopérable et qu'un séjour en Algérie ne fit qu'activer son mal. Mis en cause, le D r WATELET sort maladroitement de l'obligation de réserve et, dans une lettre que publie « Le Matin », viole le secret professionnel. Le Ministère public réagit en poursuivant le médecin qui est condamné. La Cour de Cassation confirme le verdict le 18 décembre 1885 et fixe pour de nombreuses années l'interprétation stricte de l'article 378 du Code pénal.

Très rapidement, en une dizaine d'années, la gloire de BASTIEN-LEPAGE s'estompe ; une disgrâce posthume frappe son œuvre ; ses toiles, dans maints musées, prennent le chemin des réserves. Quant à l'affaire WATELET, si elle reste enseignée dans les facultés de droit et de médecine, elle évoque de moins en moins le peintre et son œuvre.

Or, depuis quinze ans environ, un mouvement né outre-atlantique, trouvant un écho en France, tend à raviver l'intérêt quasi-éteint des esthètes et des historiens de l'art pour une œuvre que l'on croyait oubliée. Au même moment, le projet de révision du Code pénal, plus

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particulièrement de son article 378, le relâchement de la jurisprudence, des déclarations retentissantes de médecins à propos de maladies attribuées à des personnalités du monde du spectacle, font qu'on se remémore WATELET et son malheureux ami et patient BASTIEN-LEPAGE.

Aperçu sur la vie et l'œuvre de Jules BASTIEN-LEPAGE

A Damvillers, le 1 e r novembre 1848 à une heure du matin, M m e BASTIEN met au monde un enfant qui sera baptisé Jules. Quelque trente années plus tard, devenu peintre à la mode, il ajoutera un peu de gloire à ce gros bourg meusien au riche passé (10), situé à mi-distance entre Verdun et Montmédy.

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Jules BASTIEN-LEPAGE - ^ Détail de la statue par RODIN, à t Damvillers (cliché de Vauteur).

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André THEURIET vécut six semaines sur ces lieux en 1856 ; il nous en transmet l'ambiance dans une biographie écrite au lendemain de la mort du peintre (51) ; on croit entendre les bruits et les voix qui animent cette place. La maison souffrit des guerres (10, 36) ; remodelée (29), face à l'installation des bains-douches, elle abrite aujourd'hui le maire et sa famille. La place porte le nom d'une autre célébrité locale, dont la statue occupe le centre, le maréchal G E R A R D .

Anciennement implantée dans le pays, la famille possédait quel­ques champs et vignes. Le père, Claude BASTIEN, entraîna très tôt son fils à reproduire par le dessin des objets usuels. La mère, Adèle, âme du foyer avait auprès d'elle son père, Charles Nicolas LEPAGE, retraité des contributions indirectes, fils d'un médecin de la Marne (10). Six ans après la naissance de Jules, un autre enfant, Emile, vit le jour.

A onze ans, l'aîné fut admis au collège de Verdun d'où il sortit bachelier ès sciences en 1867. Ses aptitudes artistiques s'étaient affir­mées, pourtant, lorsqu'il émit le vœu de devenir peintre, même son professeur de dessin au collège, M. FOUQUET, tenta de l'en dissuader, effrayé de l'aventure qu'un tel choix impliquait. On l'aurait préféré fonctionnaire. Un ami de la famille, fonctionnaire des postes à Paris, trouva un compromis : le jeune BASTIEN passa le concours des Postes à Mézières et fut affecté, par faveur, comme surnuméraire dans la capitale en octobre 1867 (10, 38). Il occupait une chambre au sixième, rue Turbigo, qu'il quittait chaque matin pour être à son travail à quatre heures ; les après-midi étaient libres pour compléter sa formation artistique. Ce rythme ne put durer longtemps ; le 2 mai 1868, Jules BASTIEN fit part à sa famille de son intention de se consacrer entièrement à l'Art (38) ; il quitta son emploi.

Ses dons étaient réels puisque reconnus par William BOUGUE-R E A U qui le recommanda à CABANEL, et confirmés par ses succès à deux concours où il fut premier : celui des places de l'Ecole des Beaux-Arts et celui de l'Ecole des Arts Décoratifs de la rue de l'Ecole de Médecine.

Subsistant grâce à de petits métiers (copies de tableaux, coloriage de photographies, peinture d'éventails...), aidé par sa famille et par une subvention de 600 F allouée par le Conseil général de la Meuse, il partage avec un ami une grande mansarde, rue d'Assas, qui deviendra son atelier. Il se forme en courant les musées et les galeries telles celle de DURAND-RUEL où il découvre DAUBIGNY.

1870. Il participe pour la première fois au Salon avec un portrait de jeune homme en redingote verte (51)... qui passe inaperçu. C'est aussi, en juillet, la guerre puis en janvier 1871, la capitulation de Paris et la

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Commune. Exempté, il s'engage dans les francs-tireurs ; légèrement blessé par une motte de terre lors de l'explosion d'un obus, son chef, le peintre CASTELLANI jugeant son avenir prometteur, estimant que sa mort serait inutile (20), demande, à son insu, qu'on le garde loin des combats à l'ambulance privée de l'hôpital Necker où il a été évacué. Son atelier de la rue d'Assas détruit, une de ses toiles, un nu intitulé « La Source » est endommagée (elle est au musée de Nancy, restaurée par DAGNAN-BOUVERET) . Il se réfugie à Damvillers. Il y peindra des portraits ; ses modèles étant à Damvillers (1) mais aussi à Thiau-court, Marville, Verdun (10), Metz (26). Il reviendra à Paris en 1872, avec son frère, Emile, qui se destine à l'architecture. Ils logent très peu de temps rue Placide (29), puis déménagent pour le 102, rue du Cherche-Midi avant de s'installer à Montparnasse, impasse du Maine.

Un industriel lui commanda un tableau vantant les mérites d'un lait contre les éphélides ; il peignit, à la manière de WATTEAU, un groupe de femmes allant à une Fontaine de Jouvence. Il souhaitait exposer son œuvre au Salon, avant d'y peindre le nom du produit et la raison sociale. Le fabricant voulait au contraire que le caractère publicitaire paraisse au Salon ; conditions inacceptables ! Il perdit la commande ; le tableau lui resta qui, intitulé « Au Printemps », aura un certain succès au Salon de 1873 puisque « VIllustration » en donna une reproduction.

Le Salon de 1874 confirma ce premier succès. Il y participa avec « La Chanson du Printemps » et le portrait de son grand-père. La critique lui fut favorable ; le jury lui attribua une médaille de 3 e classe et l'Etat fit l'acquisition de « La Chanson du Printemps » (1 200 F) qui fut déposée au musée de Verdun (13). C'est devant le portrait de son grand-père qu'il rencontra l'écrivain André THEURIET et qu'une amitié durable naquit entre les deux hommes (13). Cette œuvre fut aussi remarquée par le banquier Simon HAYEM qui commanda son portrait. Pour se différencier d'autres BASTIEN et aussi pour honorer sa mère, l'artiste obtint, à cette époque, d'ajouter LEPAGE à son nom.

Le Prix de Rome représentait la consécration qui lui assurerait une carrière officielle, une satisfaction d'amour-propre et pour les membres de sa famille une juste récompense à leurs efforts. Aussi entra-t-il en loge en 1875. Il traita le thème imposé, « lAnnonciation aux Ber­gers... », en dehors des conventions académiques ; ce qui lui coupa l'accès de la Villa Médicis. Mais, la décision du jury jugée injuste par beaucoup lui assura la sympathie de certains milieux. Sarah BERN-HARDT, dit-on, vint déposer un bouquet (une palme ou une branche de laurier) au pied de son œuvre en signe de protestation (10, 19). Profondément ulcéré à la suite de cet échec, (alors que pour certains il était le meilleur, il ne fut gratifié que du deuxième second Grand Prix) il quitta le Salon, errant dans Paris, et tomba en arrêt devant les

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« Demoiselles au Balcon » d'Edouard MANET, exposée dans une galerie du boulevard des Italiens (13).

Participant au concours de 1876, il ne fut guère inspiré par le sujet imposé : « Priam suppliant Achille de lui rendre le corps de son fils... ». Cette fois, il peignit d'une manière fort conventionnelle, allant jusqu'à plagier - calcul ou mimétisme inconscient ? - le Saint Jean-Baptiste de son maître CABANEL (14). Le résultat fut nul, aucune distinction ne vint récompenser ses efforts. Cette même année, la mort de son père vint ajouter le chagrin à son amertume.

Parallèlement à ces échecs académiques, le Salon lui apporte des satisfactions. Au Salon de 1875, il triomphe avec lé portrait de Simon HAYEM et avec un tableau que lui-même compare à « une chose flamande », « la Communiante » pour lequel on évoque le portrait d'Anne de CLEVES par HOLBEIN. Bien accueilli par la critique, encore que pour certains il soit « un peu trop étrange et japonais » (34), il retiendra plus tard l'attention de Van G O G H (52). Une médaille de seconde classe lui est attribuée.

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,1

Portrait de femme (vers 1875/76), vêtue de dentelle noire, camélias dans les cheveux, le corsage, la ceinture. Signé en bas et à gauche. Shepherd Gall. New-York (cliché de Vauteur).

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Succès également au Salon de 1876 avec le portrait du ministre Alexandre WALLON que ZOLA juge excellent (54).

Dès lors, il partagera ses activités entre les tableaux de plein air, dans lesquels il exalte la vie des champs dans sa campagne meusienne, et les portraits, en particulier ceux dont il obtient commande par ses relations mondaines, car il fréquente les salons parisiens. Celui de M m e ADAM, où il côtoie hommes politiques, écrivains et critiques comme Albert WOLFF du « Figaro » ; celui de M m e CHARPENTIER où il fait la connaissance de Sarah BERNHARDT.

Il fera le portrait d'Albert WOLFF, ennemi de la peinture moder­ne, mais aussi celui de l'éditeur Georges CHARPENTIER, ami des Impressionnistes. Il peindra Marie SAMARY de l'Odéon, tandis que RENOIR fera le portrait de sa sœur, Jeanne SAMARY de la Comédie française (14). Mais, alors que les Impressionnistes exposent, en 1876, chez DURAN-RUEL, BASTIEN-LEPAGE est attaché à Georges PETIT, rue de Sèze.

Chaque année, il vient se replonger pour des séjours de longue durée dans sa Meuse natale. Il chasse, il se promène et il peint. En septembre 1876, son frère et lui, André THEURIET et l'un de ses amis, excursionnent sac au dos à travers l'Argonne : « de Varennes à la Chalade, des Islettes à Beaulieu » (51) ; il quitte le groupe pour aller à Saint-Mihiel voir le Sépulcre de LIGIER-RICHIER.

Au Salon de 1877, il présente le « portrait de Lady L » ( M m e LE-BEGUE) et surtout les portraits de sa mère et de son père, réunis pour la circonstance en un diptyque intitulé « Mes Parents ». Ils sont aujourd'hui exposés avec le portrait du grand-père, au musée Chéret, à Nice. Il travaille alors à une œuvre de plein air qu'il destine au Salon de 1878. Ce sera « Les Foins » qu'il présentera avec le portrait d'André THEURIET. On trouve ce dernier admirable ; « Les Foins » enthou­siasme certains (53), en choque d'autres, et lui vaut d'être considéré comme le chef de l'Ecole du plein air. Le jury lui accorde une médaille de 3 e classe.

Succès mitigé au Salon de 1879 ; il a des admirateurs zélés mais aussi des détracteurs. Sa composition : « Saison d'Octobre » ou « Le Ramassage des pommes de terre », arrache des cris d'admiration : on loue le ciel, le visage des ramasseuses ; mais pour d'autres la main du sujet principal a des doigts trop peu réalistes (2, 33). Le portrait est celui de Sarah BERNHARDT, présenté de profil. Œuvre admirable pour les uns ; « portrait d'une tapageuse par un tapageur » (2) pour d'autres. Sarah BERNHARDT, satisfaite du travail de son peintre, lui offre une palette à ses initiales. Quant au prince de Galles, séduit, il

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commande son portrait. Voilà donc BASTIEN-LEPAGE à Londres ce même été. Il loge à l'hôtel Dieudonné, Ryder Street. Les séances de travail chez son client princier sont pénibles ; son modèle reçoit, bouge sans arrêt, « les gosses de la famille royale... plus insupportables que les gamins des rues... » se jettent des oranges par-dessus sa tête, ce dont s'amuse le prince (15).

Malgré cela, et bien que ne parlant pas anglais, BASTIEN-LEPAGE se plut à Londres, les quartiers populeux l'inspirèrent, la lumière sur la Tamise, les tons de l'eau, l'enthousiasmèrent.

En 1880, il s'installe 12 rue Legendre. Il a réalisé, pour le Salon, une très grande toile dont il attend beaucoup : « Jeanne d'Arc écoutant les voix ». Mais ce n'est pas l'accueil espéré, ce n'est pas le succès des années précédentes. La matérialisation des voix, l'air égaré de Jeanne qui évoque pour certains les patientes de CHARCOT, son aspect de paysanne décontenancent ou font rire (9, 54). Critiques et caricaturistes l'éreintent. ZOLA ne peut admettre ce mélange de naturalisme auquel il souscrit et de symbolisme qu'il rejette.

On critique aussi le second tableau exposé, le portrait du préfet de police ANDRIEUX.

Déçu, BASTIEN-LEPAGE quitte Paris. Il se rend à Gand où sa « Jeanne d'Arc » est exposée, il découvre avec ravissement le polyptique de l'Agneau mystique des van EYCK à la cathédrale Saint-Bavon (1) ; il retourne en Angleterre où il renoue avec le succès au cours de l'exposition de neuf de ses toiles à la Grosvenor Gallery. Il loge 104, Régent Street, il commence le portrait d 'IRVING, découvre les paysa­gistes anglais du siècle précédent, s'enthousiasme pour les préraphaéli­tes, tels BURNE-JONES dont il fera le portrait, ou MILLAIS dont Y« Ophélie » (1851/52) l'inspirera peut-être plus que celle de DELA­CROIX (1844) quand il abordera le sujet.

Il fera un troisième séjour à Londres en juillet 1881, avant de se rendre en Suisse et six semaines à Venise d'où il ramènera une très belle représentation de la lagune le soir (Musée Magnin, Dijon). Au Salon de 1881 il retrouva la faveur de son public avec le portrait d'Albert WOLFF et un « Mendiant » (39) (actuellement à Copenhague).

En janvier 1882, une jeune aristocrate ukrainienne (elle a 22 ans), Marie BASHKIRTSEFF lui est présentée. Peintre elle-même, elle admire son œuvre depuis près de trois ans. Alors commencera une amitié amoureuse qui illuminera le reste de leurs existences, car elle comme lui sont malades et condamnés sans le savoir.

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Des douleurs abdominales croissantes fatiguent BASTIEN-LEPA­GE ; à cela s'ajoute le mauvais accueil fait par certains critiques à sa participation au Salon : « le père Jacques » un vieillard ployant sous la charge d'un fagot, accompagné d'une petite fille au tablier bleu, et le « portrait de M™ WASKIEWICZ » (31).

Quant à Marie BASHKIRTSEFF, une tuberculose avait inter­rompu les études de chant qu'elle avait entreprises ; elle se donna alors à corps perdu à l'étude de la peinture à l'atelier JULIAN. En outre, elle tenait un journal qui, plus tard, enthousiasmera Maurice BARRES (3).

Au cours de l'été 1882, BASTIEN-LEPAGE se rend à Londres. Ce sera pour la dernière fois. Il loge chez Mrs. H.M. Stanley, Richmond Terrace, White Hall (1). La Tamise exerce toujours sur lui le même attrait (témoins, les toiles exposées à Tournai, musée des Beaux-Arts ; à Philadelphie, J. G. Johnson Collection, Muséum of Art) , comme le mouvement de la rue qu'il s'efforce de faire transparaître dans son œuvre, « Le Petit Cireur de Bottes à Londres », devant lequel « on croit entendre le fracas des voitures qui passent » (3) (Paris - Arts décoratifs).

La mort, qui était apparue dans son œuvre avec une « Etude pour VEnterrement d'une jeune fille à Damvillers » (Musée des Beaux-Arts -Nancy) se concrétise dans un tableau aujourd'hui exposé au Musée des Beaux-Arts de Budapest, « Le Jour des Morts » où deux enfants accompagnent un vieillard sur le chemin du cimetière.

En décembre, il voit souvent Marie, ils dînent ensemble le 23. Quelques jours plus tard, le 31, GAMBETTA s'éteignait victime d'une appendicite que ses médecins n'eurent pas l'audace d'opérer (27, 28). Alors qu'Emile est chargé de dessiner le char funèbre, Jules se rend plusieurs fois à Ville d'Avray dans la chambre mortuaire, faisant des croquis pour un tableau représentant l'homme politique sur son lit de mort. Cette même année, il réalise l'admirable portrait de Juliette D R O U E T , criant de vérité, où déjà se lit la mort qui devait emporter son modèle peu après. C'est aussi l'année de la disparition de MANET qui l'avait beaucoup influencé. Mais plus que tout, c'est l'année de la mort du grand-père auquel il était très attaché.

Il souffre en son âme, il souffre aussi dans sa chair ; en mai, on lui découvre une tumeur cancéreuse au testicule, on l'opère. Désemparé, tenaillé par la douleur, il quitte son atelier de la rue Legendre et fuit à Concarneau où il passe l'été, puis il se réfugie à Damvillers amené par la mort du grand-père et pour se reposer ; il chasse et, bien sûr, il peint. Il réalise « VAmour au village » qu'il destine au Salon et que Pol SIMON verra en 1912 à Moscou, au Musée Tretiakov (50).

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En mars 1884, son médecin et ami, le D r WATELET le ramène à Paris. Il est vu par le P r POTAIN. Après quoi, il part avec sa mère et son domestique Félix pour Alger où, pense-t-il le climat le soulagera.* Il loue une maison avec un grand jardin, la « Villa Chauve », route des Aqueducs à Mustapha Supérieur, il visite Blidah (3), la lumière et les autochtones l'enthousiasment. Il y peint sa dernière toile : « Lever de lune à Alger » (Musée de Nancy).

A Paris, quelques-unes de ses œuvres anciennes sont exposées avec celles de CAZIN à la galerie PETIT. Au Salon, il ne figure qu'avec un petit tableau peint deux ans auparavant « La Forge », que louera TOULOUSE-LAUTREC. Pour sa part, Marie BASHKIRTSEFF y connaît un vif succès avec « Le Meeting » que remarque FRIANT (3).

La maladie progresse chez les deux jeunes artistes. Lucide, Marie BASHKIRTSEFF écrit le 5 mai « je suis perdue », et une semaine plus tard, à propos de B ASTIEN-LEPAGE, qu'elle croit atteint d'un cancer à l'estomac, elle a ce cri de désespoir : « alors, il est donc flambé » (3). Le 28 juin, elle le voit à son retour d'Algérie : « de pauvres jambes maigres... les yeux grandis et très clairs, les cheveux ébouriffés » (3).

Le 1 e r octobre, elle notait, désespérée : « il plane déjà au-dessus de nous... c'est son ombre, moi aussi je suis ombre à demi... il ne sent pas particulièrement ma présence, je suis inutile ; je nai pas le don de ranimer ses yeux... Tout est fini, du reste. Tout est fini, on m enterrera en 1885 » (3). Elle devait s'éteindre le 31 octobre 1884. Elle repose au cimetière de Passy ; Emile BASTIEN réalisa son mausolée que la croix orthodoxe de la coupole désigne aux regards ; à l'intérieur est reconsti­tué un coin d'atelier.

Le 10 décembre, à 18 heures, B ASTIEN-LEPAGE mourait à son tour, rue Legendre. Une messe d'enterrement fut célébrée en l'église Saint-François-de-Sales, rue Brémontier (17 e) ; le 12, le corps fut transporté à la gare de l'Est pour Damvillers où il fut inhumé le lendemain (38).

Le 17 mai 1885, pour inaugurer l'hôtel de Chimay que venait d'absorber l'Ecole des Beaux-Arts, une rétrospective de son œuvre fut présentée en même temps qu'une rétrospective de l'œuvre de DELA­CROIX (12).

Une souscription fut ouverte pour l'érection d'un monument à Damvillers (au sous-comité de Nancy figurait MEIXMORON de DOM-BASLE) (26). RODIN, dont B ASTIEN-LEPAGE avait gravé un portrait, réalisa une maquette représentant le peintre à l'œuvre. Elle fut

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exposée à la galerie Georges PETIT, en même temps que « les Bourgeois de Calais », en 1887. Un bronze en est conservé à Paris, au Musée Rodin. Inaugurée le 29 septembre 1889, cette statue, apparentée à celle de Claude GELLEE (à Nancy, à la Pépinière), moins dynamique que la maquette, souleva de vives critiques. Les Allemands l'enlevèrent pour la fondre, mais elle fut retrouvée intacte à Metz (26).

La physionomie du peintre correspond aux descriptions qu'en donnèrent André THEURIET ou Virginie DEMONT-BRETON ou encore Marie BASHKIRTSEFF qui le dépeignait, « tout petit, tout blond, les cheveux à la bretonne, le nez retroussé et une barbe d'adoles­cent ».

Derrière la statue se dresse une haute stèle, dessinée par Emile BASTIEN (26), qui domine cinq pierres tombales disposées en hémicy­cle ; celle de Jules BASTIEN-LEPAGE occupe le centre ; sur un côté sont deux tombes : celle commune à son père (1820-1877) et à sa mère (1824-1895) et, plus à l'extérieur, celle de son frère Emile (1854-1938) et de son épouse, Lucie MONCUIT (1848-1931) ; sur l'autre côté est la tombe du grand-père, Charles Nicolas LEPAGE (1797-1883) et de son épouse Marie A D A M (1804-1848) ; la cinquième tombe est inutilisée.

Conséquence de la révélation des causes de la mort de BASTIEN-LEPAGE ; l'affaire WATELET

A Paris, la présence parmi les médecins du peintre du professeur Alfred FOURNIER, syphiligraphe connu, fit qu'on mit en doute, de bouche à oreille, le rôle d'une tumeur cancéreuse que pourtant des journalistes localisaient « entre Vabdomen etVépigastre » (43).

Peintre de réputation internationale, la mort de BASTIEN-LEPAGE fut rapportée par de nombreux journaux étrangers et par toute la presse française, souvent d'une manière critiquable. L'un d'eux, « le Voltaire » fit paraître le 13 décembre, en première page, un article qui devait déclencher une vive réaction d'un médecin mis en cause. Il était écrit : « nous avons dit hier que BASTIEN-LEPAGE avait succombé aux suites d'une affection cancéreuse. Lorsque cette maladie se déclara, il y a plus d'un an, les docteurs POTIN (sic), MARCHAND, FOURNIER et WATELIN (sic) furent appelés en consultation et constatèrent dans la région abdominale une tumeur placée de telle sorte qu'une opération était impossible. Il fallut donc abandonner le malade à une mort prochaine... » et plus loin : « Le climat de l'Algérie ne fit qu'activer le développement de la maladie... etc. ».

* Le peintre croit souffrir de rhumat isme. Dans une lettre au tographe , on lit : « W A T E L E T sort d'ici : venu de Paris et repar t i , il n'y a que du rhumat isme et il penche pour l 'Algérie de lui-même sans que je lui en ai par lé . Il par t content et débarrassé d ' inquiétude ». ( Y b 3 1638 Res. ) B . nat .

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Médecin et ami du peintre depuis une dizaine d'années, le D r WATELET supporta mal ces attaques ; d'autant plus qu'il avait été tenu éloigné de son malade lorsqu'il revint d'Algérie. Il adressa, sans attendre, une lettre au rédacteur du « Matin », qui parut le jour même dans laquelle il dévoilait tout le dossier clinique de son patient.

Après la découverte d'une tumeur au testicule gauche en mai 1883, écrivait-il, BASTIEN-LEPAGE fut examiné par le D r MARCHAND, professeur agrégé à la faculté de Paris, chirurgien des hôpitaux et, suivant le désir du peintre, par le P r A. FOURNIER. Il s'ensuivit une ablation du testicule pratiquée par M A R C H A N D , assisté de WATE­LET ; le P r FOURNIER donnant l'anesthésie au chloroforme. La tumeur enlevée fut adressée au D r MALASSEZ, préparateur au Collège de France. C'était un cancer. On ne pouvait espérer une guérison ; des métastases intestinales et rénales étaient à craindre et la mort pouvait survenir dans les deux ans.

En 1884, le peintre, souffrant et affaibli, ayant voyagé en Bretagne et à Damvillers, souhaitait aller en Algérie. Le D r WATELET demanda l'avis de son maître le P r POTAIN, qui ne déconseilla pas le voyage, le climat ne pouvant guère aggraver l'état du malade. On sait la suite.

La famille ne réagit pas devant ces révélations. Le médecin fut poursuivi par le Ministère public, qui le déclara coupable d'avoir violé l'article 378 du Code pénal de 1810, « pour avoir adressé à un journal, sur les causes de la mort d'un de ses clients, une lettre destinée à la publicité et dévoilant un ensemble de faits secrets par leur nature et dont il n'avait eu connaissance qu'en raison de sa profession » (5).

Jusqu'en 1810, le secret médical n'avait été qu'une obligation morale ; avec la rédaction de l'article 378, il devenait une obligation légale. Le législateur donnant au secret un intérêt double : privé (devoir de discrétion du médecin vis-à-vis du malade qui se confie à lui) et public (il importe à l'ordre public que l'on soit assuré de pouvoir se confier à un médecin sans risque d'être trahi) (6). Les médecins, dans leur majorité, en firent une règle étroite : « le secret absolu » ; la jurisprudence l'interpréta avec plus de souplesse ; la Cour de Cassation admettait que « la révélation n'est délictueuse que si elle a été faite avec l'intention de nuire » (30) ; certains magistrats considéraient que l'article 378 n'était violé que si plainte était déposée par le patient ou sa famille, ou s'il y avait eu dommage subi.

WATELET comparut devant la 9 e Chambre correctionnelle du Tribunal de la Seine. Pour sa défense, il rappela une situation semblable à la sienne, qui ne donna pas lieu à procès. Après la mort de

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GAMBETTA (31 décembre 1882), ses médecins avaient été critiqués ; ils firent paraître in extenso, l'observation médicale et le compte-rendu d'autopsie dans la « Gazette hebdomadaire de médecine et de chirurgie » du 19 janvier 1883. L'article était signé par LANNELONGUE et par le P r CORNIL, approuvés par les Professeurs CHARCOT, VERNEUIL, TRELAT, B R O U A R D E L et par le D r SIREDEY (35).

B R O U A R D E L , professeur de médecine légale à Paris, sollicité par son élève WATELET pour l'appuyer, se récusa ; qui plus est, appelé à donner son avis lors du procès, il condamna WATELET. C'est que dans le cas de GAMBETTA, estimait-il, la situation était différen­te : la publication avait été faite dans une revue médicale et rien qui put intéresser la curiosité extra-médicale n'y était écrit. (Cependant, le même article parut aussi sous forme de brochure éditée par MASSON).

Le substitut GOMBOIS demanda une peine, même légère, afin que « le principe salutaire de la loi fut sauvegardé » (22). Le 11 mars, le gérant du journal « le Matin », accusé de complicité dans la révélation du secret médical, fut condamné à 16 F et WATELET à 100 F d'amende en application des articles 378, 59 et 60 du Code pénal (23, 49) ; la peine était modérée, des circonstances atténuantes étant admi­ses (art. 463). WATELET risquait une amende de 100 à 500 F et un emprisonnement de un à six mois.

WATELET fit appel ; la condamnation fut confirmée par la Cour le 5 mai 1885 puis par la Cour de Cassation le 18 décembre 1885. Le pourvoi de WATELET lui paraissait justifié sur l'absence d'intention de nuire nécessaire dans la jurisprudence antérieure pour qu'il y eut délit, ainsi que sur la notoriété des faits qu'il avait publiés. Le conseiller TANON, rapporteur de l'arrêt, rejeta le pourvoi ; WATELET ayant librement révélé un fait confidentiel qu'il n'avait appris que dans l'exercice de sa profession. Il était conscient de révéler un secret et même si le fait était de notoriété publique, par sa déclaration, il « assurait les convictions incertaines ».

Cet arrêt du 18 décembre 1885 (Cass. 19 déc. 1885 - Pal. 1886, 1, 176) mettait un terme aux hésitations de la jurisprudence ; il eut une importance considérable pendant plus de cinquante ans. Dès lors, un médecin pouvait être poursuivi pour avoir révélé un secret, même sans intention de nuire, à condition que le fait soit le résultat d'une libre détermination.

Quelques associations médicales refusèrent alors de donner des renseignements aux administrations et WATELET fit savoir dans la presse politique qu'en même temps qu'on lui reprochait ses déclara-

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tions, le Préfet de Police de la Seine lui demandait, ô ironie ! (comme aux autres médecins, par lettre circulaire et pour des raisons statisti­ques) de fournir l'adresse et la cause de la mort de ses clients (24).

Maître de MORO-GIAFFERRI , qui connut WATELET des années plus tard, écrivait combien le médecin avait de rancœur à l'évocation de ce procès (40).

Rappelons qu'outre la sanction pénale, WATELET était passible d'une réclamation devant la juridiction civile, en réparation (pécuniaire) du dommage causé (Code civil, art. 1382-1383), ce qui ne fut pas demandé.

Succès et déclin posthume de l'œuvre de BASTIEN-LEPAGE

Durant la courte carrière artistique de BASTIEN-LEPAGE, sa production ne laissa jamais indifférent ; il eut des laudateurs peut être trop ardents, il eut des censeurs peut être trop virulents.

Portraitiste, il est dès le Salon de 1875 comparé à HOLBEIN (34), on rapproche aussi sa manière de celle de CLOUET (9) ; BAIGNIE-RES, à propos du portrait de Sarah B E R N H A R D T dont il n'aime pas du tout le choix de la pose, reconnaît que BASTIEN-LEPAGE a « modelé un visage comme Albrecht DURER, peint des mains dignes d'HOLBEIN, coloré des cheveux comme TITIEN » (2). Le portrait de THEURIET évoque FANTIN-LATOUR que BASTIEN-LEPAGE admirait. Là, ne s'arrêtent pas les comparaisons flatteuses. Bref, à quelques exceptions près, il est reconnu portraitiste distingué (32) sachant analyser les sentiments de ses modèles, leur manifestant une profonde compréhension. C'est par le portrait qu'il devait s'attacher la clientèle mondaine de Paris et d'ailleurs.

Mais il fut aussi le peintre du plein air et dans ce domaine il fut parfois mal compris. ZOLA, dont les jugements sur la production picturale de son temps se confirmèrent très souvent, ZOLA le natura­liste ne pouvait que suivre attentivement les réalisations de ce peintre. Il sentit en lui « le petit-fils de COURBET et de MILLET » mais influencé par les Impressionnistes avec, sur eux, la supériorité « qu'il sait réaliser ses impressions » (54).

HUYSMANS décèle aussi une influence de MILLET, mais Jules BRETON, à qui on l'a parfois comparé, écrivait plus justement : « il ne ressemble ni à MILLET, ni à LHERMITE, ni à moi. Il est lui... » (4). MANET, venu du réalisme sombre inspiré des Espagnols et des Hollandais, allant vers le plein air jusqu'à prendre en 1863 le grand tournant de la peinture moderne a aussi influencé BASTIEN-LEPA-

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GE, mais ce dernier ne s'est pas laissé suffisamment entraîner pour rompre avec sa formation académique. On lui en fera grief parfois : « entre M. MANET et M. BASTIEN-LEPAGE il n'y a que la différence d'un peintre qui ne sait pas son métier à un peintre qui sait très bien le sien et qui volontairement l'oublie la moitié du temps. Il y a aussi la différence d'un peintre sincère à un peintre habile. Celui-là... est un précurseur ; celui-ci est un chef reconnu. M. MANET a semé, c'est M. BASTIEN-LEPAGE qui récolte » (31). Ou encore : « les Impressionnistes sur qui tombent tous les sarcasmes quand ils s'appellent MANET, RENOUARD, CAILLEBOTTE, DEGAS, toutes les couronnes quand ils se nomment BASTIEN-LEPAGE, DUEZ, BOMPARD, DAGNAN-BOUVERET, etc. »

La part de l'impressionnisme dans son œuvre, excepté peut être pour sa « Jeune Femme au Lit » ou « Le Petit Cireur de Bottes à Londres », est peut être moins flagrante pour nous que pour ses contemporains. Peut être peut-on seulement dire comme l'écrivait DARGENTY « qu'il se laissa entraîner à une sorte d'impressionnisme vague » (12). Certes, il chercha à traduire son réalisme rustique dans une peinture claire, avec un sentiment moderne, mais il resta fidèle au dessin parfait, à une certaine composition, héritage de son passage par l'atelier de CABANEL. Cette double tendance, cette duplicité pour certains, lui sera souvent reprochée.

L'habitude qu'il avait prise de présenter simultanément au Salon un portrait et un tableau de genre semblant confirmer ce double aspect de sa manière. L'opinion de BAIGNIERES résume les reproches que l'on pouvait lui faire : « je ne le crois pas si naïf. Il semble que son amour des champs est un peu une affaire de mode. Nous ne sentons pas en lui la foi d'un BRETON ou d'un MILLET, et je n'en veux pour preuve que le contraste singulier de ses deux toiles. (2). Il s'agissait de « Saison d'Octobre » et du portrait de Sarah BERNHARD. A propos de « Saison d'Octobre », HUYSMANS est plus sévère encore : « la candeur et la naïveté de BASTIEN-LEPAGE me semblent par trop feintes, je doute qu'il ressente une bien sincère émotion devant les pauvres gens qu'il représente ». (33).

Le japonisme, dont on connaît l'influence sur les Impressionnistes, est aussi sensible chez BASTIEN-LEPAGE ne serait-ce que dans la préférence donnée aux dispositions frontales, à l'absence de perspecti­ve. « Les Foins », a été retenu comme exemplaire par les organisateurs de la récente exposition sur ce thème à Paris (Le japonisme - Grand Palais, 17 mai - 15 août 1988), mais on le retrouve dans le « Mendiant » ou dans « le fond plat de peinture japonaise » du « Père Jacqes » à propos duquel HOUSSAYE s'écriait : « devant cette chinoiserie... on ne nous convertira pas... » (31).

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Malgré ces critiques BASTIEN-LEPAGE vendait ses toiles, et à bon prix. Une version du « Mendiant » atteignit 36 000 F à D R O U O T en 1882, soit 120 000 F/1969 (48) et « Les Foins » fut payée 25 000 F à la famille par l'Etat en 1885 (14).

Selon G E R O M E , son succès tenait au fait qu'il « présentait un panorama de tous les mouvements esthétiques alors à l'honneur, en nuançant fortement les particularités trop accusées » (26). C'est proba­blement vrai ; mais faut-il y voir opportunisme et duplicité ? Pour Octave MIRBEAU, BASTIEN-LEPAGE « était un convaincu et un honnête » (39). Son éclectisme ne serait-il pas plutôt la conséquence d'un succès trop rapide chez un sujet trop peu préparé ? Lors du Salon de 1875, F. de LAGENEVAIS craignait une telle évolution : « pourvu maintenant que M. BASTIEN-LEPAGE, que Von dit fort jeune, ne devienne pas trop vite à la mode, pourvu qu'il ne gagne pas trop rapidement de Vargent, et qu'on le laisse encore un peu à ses études et à son art ! » (34). ZOLA émettait une opinion semblable, il jugeait que BASTIEN-LEPAGE avait « réussi trop vite et trop bruyamment. Tous les grands créateurs ont rencontré au début de leur carrière une forte résistance - c'est une règle absolue, qui n'admet pas d'exception ; mais lui, on l'applaudit. Cela est mauvais signe » (54).

On est tenté de rapprocher ce succès rapide et bruyant de celui que, sous la plume de ZOLA, connaît Ferdinand SOURDIS, peintre imaginaire, ayant son atelier rue d'Assas et dont « au Salon, « la Promenade » eut un succès énorme. Pendant six semaines, la foule se pressa devant la toile. Ferdinand eut ce coup de foudre de la célébrité, tel qu'il se produit souvent à Paris, d'un jour à l'autre. Même la chance voulut qu'il fût discuté, ce qui doubla son succès. On ne l'attaquait pas brutalement, certains le chicanaient seulement sur des détails que d'autres défendaient avec passion. En somme, « la Promenade » fut déclarée un petit chef-d'œuvre, et l'administration en offrit tout de suite six mille francs. Cela avait la pointe d'originalité nécessaire pour soigner le goût blasé du plus grand nombre, sans que pourtant le tempérament du peintre débordât au point de blesser les gens ; en somme tout juste ce qu'il fallait au public de nouveauté et de puissance. On cria à la venue d'un maître, tant cet aimable équilibre enchantait » (55).

La gloire de BASTIEN-LEPAGE ne lui survécut guère que quelques années. Dès 1905, Henry MARCEL constatait, à regret, le discrédit dont souffraient les créations du peintre meusien (37). Pour­tant il eut des disciples, français mais aussi anglais et américains qui intégrèrent son style, et c'est des U.S.A. que naquit un mouvement de réhabilitation de ses œuvres. Il est vrai que les grands musées de ce pays continuèrent à exposer les toiles qu'ils possédaient de notre peintre.

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Ainsi, le Métropolitain Muséum de New-York a mis admirablement en valeur la « Jeanne d'Arc » que lui offrit Erwin DAVIS en 1889 et les visiteurs sont encore nombreux aujourd'hui à s'arrêter longuement devant cette toile alors qu'ils passent, indifférents, devant deux œuvres voisines de CABANEL : « Echo » (1874) et la « Naissance de Vénus » (1875).

Le regain d'intérêt pour l'œuvre de BASTIEN-LEPAGE

En 1973, William Steven FELDMAN, publia la première étude scientifique consacrée à Jules BASTIEN-LEPAGE ; une thèse Ph. D. , bientôt suivie de quelques articles (17).

La même année, à Nancy, Richard G E R O M E consacra son mémoire de maîtrise à BASTIEN-LEPAGE et à son œuvre, sous la direction de M l l e CHARPENTIER alors conservateur du Musée de l'Ecole de Nancy (26).

A partir de 1978, Kenneth Me CONKEY publia également quel­ques essais (voir DEBIZE) (14).

C'est en Meuse, fort naturellement, que ce mouvement devait aboutir à une exposition d'envergure de nombreuses toiles, dessins, etc.

Il existait, au premier étage de l'hôtel de ville de Montmédy, un petit musée, deux pièces où, à la mort d'Emile BASTIEN (1938) quelques toiles furent conservées (16) : des peintures d'Emile BAS-TIEN, une toile de Louise BRESLAU « la cueillette des genêts » et des œuvres de Jules BASTIEN-LEPAGE dont un « Semeur » d'une exécu­tion toute moderne, peut être parce que restée à l'état d'esquisse : des sillons vont, en arcs parallèles, du premier plan jusqu'à l'horizon que surplombe un ciel à la luminosité digne de celle de « Saison d'Octo­bre » ; sur ces sillons, qui occupent la quasi-totalité du tableau, s'étire l'ombre immense du semeur. Remarquable aussi le beau portrait de M m e GODILLOT (1878), dépôt de l'Etat depuis 1949. Admirablement peinte, le seul défaut de cette toile est l'attitude du modèle dont les avant-bras croisés sur le vide font chercher, en vain, le dossier sur lequel elle semble s'appuyer. En 1983, ce musée BASTIEN-LEPAGE quitta l'hôtel de ville pour la Citadelle de Montmédy.

A l'occasion du centenaire de la mort du peintre, une exposition rétrospective, la première depuis celle de 1885, fut organisée par les Musées du département de la Meuse dont M. Philippe PAGNOTTA en est le conservateur ; ainsi, 48 peintures, 76 dessins, des estampes, des sculptures furent réunies à Verdun, au Musée de la Princerie (5 mai -

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15 juillet 1984), puis à la Citadelle de Montmédy (21 juillet - 15 octobre 1984). A cette manifestation participèrent M. et M m e Claude M E D A R D de CHARDON, parents du peintre, William FELDMAN, Christian DEBIZE, professeur à l'Ecole des Beaux-Arts de Nancy. Depuis, le Conseil général de la Meuse et le Fonds Régional d'Acquisition des Musées de Lorraine permirent d'enrichir la collection. C'est ainsi que lors d'une vente aux enchères en 1987, l'Etat exerça son droit de préemption sur une version du « Mendiant », une huile de 1880, voisine de celle qui est conservée à Copenhague.

En 1985, M m e Marie-Madeleine AUBRUN édita un catalogue raisonné de l'œuvre de BASTIEN-LEPAGE répertoriant près de 800 peintures, dessins et gravures (1).

L'ombre de BASTIEN-LEPAGE derrière les remises en question du principe du secret médical

Coïncidence. Alors que le centenaire de la mort du peintre était l'occasion de secouer les cendres qui recouvraient son œuvre, l'Ordre des Médecins rappelait l'affaire WATELET avec, en première page de l'un de ses bulletins mensuels, le portrait de BASTIEN-LEPAGE (6).

Longtemps le secret fut considéré - et pour beaucoup il reste - non pas comme un contrat passé entre deux individus, mais comme une obligation qui engage la profession dans son ensemble envers la société. Les médecins, dans leur majorité, voyaient dans le secret professionnel un devoir avant qu'il ne devienne une obligation légale et l'article 11 du Code de Déontologie étend ce devoir du médecin non seulement à ce qui lui est confié, mais à tout ce qu'il a vu, entendu et compris de la maladie pour laquelle il est consulté (11).

La raison du secret est simple ; elle est ainsi résumée par maître de MORO-GIAFFERRI : « si des médecins peuvent trahir leur malade, les malades ne feront plus à leur médecin la confiance nécessaire... le malade menacé d'être trahi par un examen, s'éloignera » (40). La confiance est indispensable à la sauvegarde de l'individu, à la protection de la communauté. Mais progressivement les décisions de justice furent plus nuancées et certains médecins piétinèrent les usages, spectaculairement, par médias interposés, comme en 1986, le P r Léon SCHWARZEN-BERG annonçant que Thierry LE LURON, dont on chuchotait qu'il présentait un S.I.D.A., ne pouvait remplir ses engagements artistiques en raison de son hospitalisation pour un cancer. Le Conseil national de l'Ordre des Médecins qualifia ces propos de « choquants », de « contrai­res aux usages de la profession » (44). SCHWARZENBERG n'eut pas le sort de WATELET mais la presse le fustigea (voir, entre autres, « Le

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Monde » du 22 novembre, « France-Soir », « Le Matin » du 24 Novem­bre, etc. (46). Le président du Conseil de l 'Ordre, le P r Raymond VILLEY, tenta de minimiser l'événement en affirmant que « l'annonce de la maladie est légitime quand c'est le malade lui-même qui la demande » (ce qui était le cas) mais il précisa que la déclaration devait être strictement limitée, sans détails, sans commentaires que seul le malade pouvait donner (45). Lui-même devait, quelques semaines plus tard, (18 janvier 1987), inaugurer en ce domaine, apparaissant sur les écrans de télévision (TF 1), à la demande de l'actrice Isabelle ADJANI, que l'on disait atteinte, elle aussi, du S.I.D.A. pour annoncer qu'elle était en bonne santé et que les bruits qui couraient étaient faux (47).

Alors ? n'y aura-t-il plus de secret médical demain ? comme l'écrivait le D r TESSON-MILLET (47) « pour nourrir les rumeurs-phé­nomènes de société auxquels il faudra nous accoutumer - rien de tel que la maladie de personnages publics. A eux, si la rumeur les gêne, de protester de leur bonne santé, devant les médias comme on proteste de son innocence au tribunal. Et de plus en plus souvent les médecins devront s'en mêler !... ».

Parrallèlement à ces faits de société, le projet de réforme du Code pénal inquiète les médecins : l'article 226-16 de ce projet, appelé à remplacer l'article 378 semble vouloir restreindre le secret à l'informa­tion confidentielle, introduit la notion de « personnes qualifiées » à recevoir cette information (mais qualifiées selon quels critères et par qui ?) et seule la partie lésée par la révélation du secret pourrait porter plainte. On retire ainsi au secret son « caractère d'ordre public indispen­sable afin que nul n'hésite à recevoir les soins qui lui seraient nécessaires par peur d'être trahi » (7).

Pierre MULLER, devant l'Académie de médecine fait part de ses craintes de voir dans les « personnes qualifiées » d'abord les magistrats, ceux de l'instruction et du parquet ; peu nombreux, ils devront déléguer leur pouvoir d'investigation à la police, à des experts qui seront « qualifiés » ; administrations et ministères pourront aussi avoir leurs « personnes qualifiées ».

Or « chaque malade, chaque blessé, qu'il soit ou non en règle avec la loi, a droit à des soins et au secret ». L'article proposé rend possible une dénonciation. Il faut y veiller (41).

Ces quelques réflexions nées lors de la redécouverte du peintre meusien à l'occasion de la sortie de l'Académie nationale de Metz à la

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Citadelle de Montmédy, permettront peut-être, à quelques-uns, de voir d'un œil nouveau ce peintre qualifié improprement de « pompier ».

Certes, il ne put jamais se défaire d'un certain académisme, mais, comme l'écrivait ZOLA, « on ne passe pas impunément par Vatelier de CABANEL » (54). Né avec la photographie, BASTIEN-LEPAGE en fut plus ou moins consciemment influencé, comme le furent COURBET et l'Ecole Réaliste ; elle est présente dans ses compositions, dans ses fonds, mais il s'en dégageait progressivement, tendant à rendre une impression plus qu'à reproduire la réalité. Certes, G E R O M E a raison, mais il est peut-être trop sévère, quand il écrit que son œuvre « apparaît souvent comme un art de compromis, de concession, comme un composé malhabile de courants et d'esthétiques diverses » (26) et l'explication qu'il essaie de trouver dans la conduite du peintre, « celle d'un enfant n'ayant pas su se dégager de l'emprise familiale » est probablement valable, mais il faut considérer qu'il est mort jeune, après seulement une dizaine d'années de production. Nul ne peut savoir ce qu'aurait été sa production à venir ; Jules BRETON, qui lui était favorable, écrivait qu'il faisait « penser à ces colonnes tronquées des cimetières ; savons-nous ce qu'eût été son chapiteau ? » (4).

Stoppée en pleine évolution son œuvre reflète une « prodigieuse habileté » (33) mais est-ce suffisant ? Le jugement d'Octave MIR-BEAU, si peu enthousiasmant soit-il, semble bien contenir la vérité : « BASTIEN-LEPAGE manquait de flamme, de cette flamme de création ardente et sacrée qui élève l'homme au-dessus de la virtuosité du métier pour le faire entrer dans le ciel splendide de l'art immortel... » et de conclure « un peintre qui n'a été qu'un peintre ne sera jamais que la moitié d'un artiste » (14).

Cela ne doit pas nous détourner de la connaissance d'une œuvre dont maints exemples existent proches de nous : à la Citadelle de Montmédy bien sûr, où se trouve la meilleure présentation rétrospecti­ve, mais aussi au Musée de la Princerie à Verdun (La chanson du printemps (1874) ; le portrait de l'oncle de l'artiste : Eugène LOISON (1888) ; un portrait d'homme, une nature morte, des dessins à la plume : Emile dessinant, Vieil homme lisant).

A Bar-le-Duc, où n'est exposé que le portrait officiel et assez banal de Paulin GILLON, fondateur du Musée et maire de la ville (1840-1848). En outre, ce Musée Barrois conserve, dans ses réserves, le portrait du messin Jean Eugène BILLY (1820-1878).

A Nancy, au Musée des Beaux-Arts où l'on peut voir depuis la venue du nouveau Conservateur, M m e PETRY, JOB et OPHELIE. Sont encore dans les réserves « La Source » (1868), « les Bergers se

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rendant à Bethléem » (1883), une « Etude pour l'enterrement d'une jeune fille à Damvillers » qui fut donnée par Emile à Lucien GRAND-G E R A R D (1936), et remise au Musée en 1969 (13) et surtout l'œuvre ultime « le lever de lune à Alger » qui mériterait d'être exposée.

A Nancy encore, le Musée lorrain expose des œuvres de jeunesse : un portrait de jeune homme (1873 ?) et un portrait de femme (1873), son effigie par le sculpteur américain A. SAINT-GAUDENS, une vue de son atelier à Damvillers peinte par Alfred GARNIER (1884), la palette offerte par Sarah BERNHARDT. Ce Musée a fait l'acquisition en 1986, d'un portrait du D r LIOUVILLE (pointe-sèche) et d'une eau-forte, « Les Faucheurs » qui est la réplique à quelques détails près d'une huile vendue récemment à un texan par la Galerie HIRSCHL & ADLER de New-York (21 E - 70 th Str.).

« Les Faucheurs », huile, signée en bas à droite : « J. BASTIEN-LEPAGE, Damvillers, Meuse, 1881 ». Collection privée (Photographie due à la courtoisie de Hirschl & Adler Galleries. Inc. New-York).

Le Musée de Lunéville expose une « Femme à l'éventail » don du peintre B O U C H O R (1933), inachevée, mais pleine de vie.

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A Dijon, le Musée MAGNIN présente « Venise le soir » (1881), vibrante représentation en bleus de l'atmosphère d'un soir sur la lagune.

Paris, bien sûr, offre plus de possibilités d'approcher ce peintre avec « Les Foins » (à Orsay) ; l'admirable portrait de Juliette D R O U E T (Musée V. Hugo, place des Vosges), etc.

Le catalogue de M m e AUBRUN (1), celui des Musées de la Meuse (13, 42) et, plus accessible, un article de M. DEBIZE (14) donnent la localisation de toute la production de BASTIEN-LEPAGE.

Que ces quelques pages soient une invitation à les consulter.

Qu'il me soit permis de remercier pour leur disponibilité et leur courtoisie :

— à New-York : • H1RSCHL & ADLER G aliènes, Inc. 21 E 70 Str. • SHEPHERD Galleries, 21 E 84 str.

— à Philadelphie : • M. Lawrence W. NICflOlS. Assistant-Curator-.lohn G Jonhson Collection.

Muséum of Art.

BIBLIOGRAPHIE

DOCUMENTS D'ARCHIVES

Recueil de lettres autographes de Jules Bastien-Lepage à Charles Baude (v. 1874-1884) et de croquis. Bibliothèque nationale. Cabinet des Estampes (Réserve( Yb 3 1638 Rés.).

TEXTES IMPRIMÉS

1. AUBRUN (Marie-Madeleine), Jules Bastien-Lepage (1848-1884). Catalogue raisonné de l'œuvre - 1985.

2. BAIGNERES (Arthur), Le Salon de 1879 dans la Gazette des Beaux-Arts, 1879,19, 556-558.

3. BASHKIRTSEFF (Marie), Journal, 2 vol., Paris, 1925.

4. BRETON (Jules), Nos peintres du siècle, Paris (s. d.), p. 216-226.

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5. B R O U A R D E L (P.), Le Secret médical, Paris, 1887.

6. Bulletin de l'Ordre des médecins, novembre 1985, p. 1-3.

7. Bulletin de l'Ordre des médecins, avril 1986, p. 3.

8. Bulletin Société méd. légale de France, 1887, p. 9, 143-149.

9. BURTY (Ph.), Le Salon de 1880. Les portraits. La grande peinture dans l'Art, 1880,27, (2), 178-180.

10. C H A R D O N (L. de), Damvillers. Son canton et ses célébrités, 1973.

11. Code de Déontologie médicale, Décret n° 79-506 du 29 juin 1979.

12. DARGENTY (D), Bastien-Lepage dans l'Art, 1885, 38, (1), p. 146-151 et 163-166.

13. DEBIZE (Christian), Hommage à Jules Bastien-Lepage. Catalo­gue, Musées de la Meuse 1984, p. 34-84.

14. DEBIZE (Christian), Actualité de Jules Bastien-Lepage. Questions et perspectives dans Bull. Soc. Hist. Archeol. Meuse, 1984.

15. DEMONT-BRETON (Virginie), Maisons que j'ai connues. Peintres et Savants - L'atelier de Jules Bastien-Lepage, Paris 1 vol., (s.d.).

16. E R R A R D (P.,), Le musée Bastien-Lepage à Montmédy, dans le Bull. Soc. naturalist, et archéologues Nord-Meuse, 1960, 72, p. 17-19.

17. FELDMAN (William, S.), Hommage à Jules Bastien-Lepage. L'œuvre et son influence, Musées de la Meuse, 1984, p. 23-32.

18. FOCILLON (Henri), La peinture aux XIXe et XXe siècles. Du Réalisme à nos jours, Paris, 1928.

19. F O U R C A U D (L. de), Bastien-Lepage ; sa vie, ses œuvres (1848-1884). Paris, 1885.

20. FRESNAY (Paul), Une anecdote sur Bastien-Lepage dans Le Voltaire, samedi 13 décembre 1884 (2352) p. 1.

21. GARCOT (M), Jules Bastien-Lepage, discours de réception Acad. de Stanislas (15 juin 1950) dans Mem. Acad. Stanislas, 1951, 37, p. 136-149.

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22. Gazette hebdomadaire méd. & chir., 1885 (6 mars), p. 22, (10), p. 168.

23. Gazette hebdomadaire méd. & chir.y 1885 (13 mars), p. 22, (11), p. 169-172 et 183.

24. Gazette hebdomadaire méd. & chir., 1885 (10 avril), p. 22, (15), p. 238.

25. Gazette Hôtel Drouot, 1985 (12 avril), 94, (15), p. 27 et 1985 (10 mai), p. 94, (19), p.2.

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