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Psychologie française 58 (2013) 41–51 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com et également disponible sur www.em-consulte.com Article original Le rôle du conjoint dans les stratégies de coping mises en place chez les femmes lors d’une fausse couche Role of the partner in coping strategies used by women after miscarriage E. De Ville 1 , A. O’Reilly ,2 , S. Callahan 3 Octogone-CERPP, université Toulouse-II Le Mirail, 5, allées Antonio-Machado, 31058 Toulouse cedex 9, France i n f o a r t i c l e Historique de l’article : Rec ¸ u le 29 octobre 2011 Accepté le 23 septembre 2012 Mots clés : Fausse couche Soutien social Coping Dépression Deuil r é s u m é La fausse couche est un évènement de vie potentiellement stres- sant et traumatique. Le but de cette étude est d’étudier le lien entre le soutien rec ¸ u de la part du conjoint, l’utilisation des stratégies de coping et l’intensité des réactions face à la perte. Cent six femmes ont participé à cette étude. Les analyses de corrélation montrent que la satisfaction liée au soutien du conjoint est négativement cor- rélée à la dépression et à l’auto-accusation. De plus, la disponibilité et la satisfaction liées au soutien rec ¸ u de la part du conjoint sont en lien avec la stratégie de coping recherche de soutien social. La recherche du soutien social est en lien avec la résolution du deuil et la dépression. Le soutien rec ¸ u de la part du conjoint serait un fac- teur qui influencerait positivement l’ajustement des femmes à la fausse couche ; il leur permettrait de mettre en place des stratégies de coping adaptatives qui conduiraient à moins de dépression et à une meilleure résolution du processus de deuil. © 2012 Société franc ¸ aise de psychologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (A. O’Reilly). 1 Étudiante en psychologie, principaux thèmes de recherche : coping, fausse couche. 2 Docteur en psychopathologie, principaux thèmes de recherche : dépression, douleur chronique, thérapies cognitivo- comportementales maternité. 3 Professeur de psychologie, principaux thèmes de recherche : maternité, allaitement, thérapies cognitivo- comportementales. 0033-2984/$ see front matter © 2012 Société franc ¸ aise de psychologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.psfr.2012.09.005

Le rôle du conjoint dans les stratégies de coping mises en place chez les femmes lors d’une fausse couche

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Page 1: Le rôle du conjoint dans les stratégies de coping mises en place chez les femmes lors d’une fausse couche

Psychologie française 58 (2013) 41–51

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

et également disponible sur www.em-consulte.com

Article original

Le rôle du conjoint dans les stratégies de coping mises enplace chez les femmes lors d’une fausse couche

Role of the partner in coping strategies used by women aftermiscarriage

E. De Ville1, A. O’Reilly ∗,2, S. Callahan3

Octogone-CERPP, université Toulouse-II Le Mirail, 5, allées Antonio-Machado, 31058 Toulouse cedex 9, France

i n f o a r t i c l e

Historique de l’article :Rec u le 29 octobre 2011Accepté le 23 septembre 2012

Mots clés :Fausse coucheSoutien socialCopingDépressionDeuil

r é s u m é

La fausse couche est un évènement de vie potentiellement stres-sant et traumatique. Le but de cette étude est d’étudier le lien entrele soutien rec u de la part du conjoint, l’utilisation des stratégies decoping et l’intensité des réactions face à la perte. Cent six femmesont participé à cette étude. Les analyses de corrélation montrentque la satisfaction liée au soutien du conjoint est négativement cor-rélée à la dépression et à l’auto-accusation. De plus, la disponibilitéet la satisfaction liées au soutien rec u de la part du conjoint sonten lien avec la stratégie de coping recherche de soutien social. Larecherche du soutien social est en lien avec la résolution du deuil etla dépression. Le soutien rec u de la part du conjoint serait un fac-teur qui influencerait positivement l’ajustement des femmes à lafausse couche ; il leur permettrait de mettre en place des stratégiesde coping adaptatives qui conduiraient à moins de dépression et àune meilleure résolution du processus de deuil.

© 2012 Société franc aise de psychologie. Publié par ElsevierMasson SAS. Tous droits réservés.

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (A. O’Reilly).

1 Étudiante en psychologie, principaux thèmes de recherche : coping, fausse couche.2 Docteur en psychopathologie, principaux thèmes de recherche : dépression, douleur chronique, thérapies cognitivo-

comportementales maternité.3 Professeur de psychologie, principaux thèmes de recherche : maternité, allaitement, thérapies cognitivo-

comportementales.

0033-2984/$ – see front matter © 2012 Société franc aise de psychologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.http://dx.doi.org/10.1016/j.psfr.2012.09.005

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Keywords:MiscarriageSocial supportCopingDepressionGrief

a b s t r a c t

Miscarriage is potentially stressful and traumatic. The objective ofthis study is to determine the link between partner support, use ofcoping strategies and the intensity of reaction to the loss. One hun-dred and six women participated in this study. Correlation analysesshow that satisfaction with partner support is inversely associatedwith feelings of guilt and depression. In addition, availability andsatisfaction related to the partner support are associated with see-king social support. Seeking social support is associated with griefresolution and depression. The results suggest that partner supportshould prove a positive influence on a woman’s capacity to adjustto miscarriage enabling women to use adaptive coping strategiesthat in turn lower depressive levels and provide a better resolutionof the grief process.

© 2012 Société franc aise de psychologie. Published by ElsevierMasson SAS. All rights reserved.

1. Introduction

La fausse couche est un évènement relativement fréquent puisque 12 à 24 % des grossesses cli-niquement reconnues se terminent ainsi (Carter, Misri, & Tomfohr, 2007). La majorité d’entre ellessurviennent au cours des trois premiers mois (Garel & Legrand, 2005), et il s’agit de la complication degrossesse la plus courante (Garcia-Enguidanos, Calle, Valero, Luna, & Dominguez-Rojas, 2002). La pertepérinatale est fréquemment suivie d’une période de deuil, plus ou moins longue, caractérisée par unedétresse émotionnelle (Franche & Mikail, 1999). Cet état affectif douloureux, provoqué par la mort del’enfant porté, peut engager des réactions de chagrin et de désespoir (Beutel, Willner, Deckardt, VonRad, & Weiner, 1996 ; Flis-Trèves, 2004). Outre le chagrin et la tristesse liés à la perte, environ la moitiédes femmes développera, à la suite de sa fausse couche, une morbidité psychologique avec notammentdes symptômes anxieux, dépressifs et des états de stress post-traumatique (Lok & Neugebauer, 2007).

Les études montrent certaines divergences à la fois dans la proportion de femmes rencontrant dessymptômes dépressifs, et dans l’évolution de cette symptomatologie au cours du temps. Dans uneétude américaine, 36 % de femmes présentaient des symptômes dépressifs quelques semaines aprèsleur fausse couche (Neugebauer et al., 1992a). Une étude franc aise a montré que 51 % des femmesprésentaient une dépression selon les critères du DSM III, trois mois après la fausse couche (Garelet al., 1992). Une autre étude réalisée en Grande-Bretagne indique qu’une semaine après la faussecouche, seules 22 % des femmes présentaient des symptômes dépressifs (Prettyman, Cordle, & Cook,1993).

Des études révèlent le caractère stressant et potentiellement traumatique de la fausse couche(Bennett, Litz, Lee, & Maguen, 2005 ; Engelhard, Van Den Hout, & Arntz, 2001 ; Simmons, Singh,Maconochie, Doyle, & Green, 2006). La prévalence d’état de stress post-traumatique n’est pas négli-geable dans cette population de femmes endeuillées. Bien que la plupart des couples retrouvent leursressources après une fausse couche, 15 à 25 % des femmes ont des problèmes d’ajustement psycho-logique et manifestent entre autre des symptômes dépressifs ou un état de stress post-traumatique(Bennett et al., 2005 ; Engelhard et al., 2001).

Pour Lazarus et Folkam (1984), la notion de coping renvoie à l’ensemble des efforts cognitifs etcomportementaux qui sont mis en place pour maîtriser, réduire ou tolérer les exigences internes ouexternes qui menacent les ressources de l’individu. Une étude menée en 2009 a permis de mettreen évidence certaines stratégies de coping utilisées par les femmes pour faire face à l’évènementdifficile qu’est la fausse couche (Séjourné, Callahan, & Chabrol, 2009). Ainsi, la prise de distance est uncomportement fréquemment adopté.

Parallèlement à ces travaux, des recherches indiquent clairement que le soutien social contribue àréduire l’impact psychologique des évènements stressants (Paulhan & Bourgeois, 1995a). Le soutiensocial rec u se réfère au soutien effectif apporté par l’entourage (Winnubst, Buunk, & Marcelissen, 1998),

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alors que le soutien social perc u renvoie à la perception subjective d’une personne vis-à-vis de l’aideapportée par son entourage (Bruchon-Schweitzer, 2002). Le concept de soutien social perc u prenden compte le nombre de personnes sur lesquelles l’individu peut compter, ainsi que les différentessources de soutien. De plus, une place importante est accordée à la satisfaction que la personne ressentà l’égard de ce réseau social, c’est-à-dire à la qualité du soutien (Bruchon-Schweitzer, 2002). Le soutiendu conjoint n’est pas spécifique à la fausse couche. Il a d’ailleurs été montré que parmi des femmesayant eu à affronter un évènement de vie majeur, seulement 4 % d’entre celles qui avaient pu parlerde leur détresse à quelqu’un avaient rapporté un état dépressif, contre 40 % chez celles qui n’avaientpas eu la possibilité d’en parler (Brown & Harris, 1978). Lorsqu’on interroge ces femmes à propos dusoutien qu’elles attendent de la part de leur entourage, elles semblent privilégier et attendre davantagede soutien de la part de leur partenaire, et celles qui ne peuvent compter sur leur conjoint et/ou qui nebénéficient que d’un faible soutien de leur part rapportent des scores de dépression plus élevés queles autres (Beutel et al., 1996 ; Capponi & Horbacz, 2007 ; Garel & Legrand, 2005 ; Séjourné et al., 2009).Cependant, plus que le soutien dont elles bénéficient réellement, c’est la fac on dont elles perc oiventce soutien qui importe (Bruchon-Schweitzer, 2002 ; Capponi & Horbacz, 2007). Ainsi, lors d’une faussecouche, le conjoint occupe souvent une place de premier plan (Garel & Legrand, 2005). Les femmesse tournent préférentiellement vers eux pour trouver du soutien et de la consolation. Cependant, plusde 40 % des femmes rencontrent des difficultés pour exprimer leurs sentiments à leur conjoint (Beutelet al., 1996). En effet, si le rôle du partenaire est essentiel, s’il peut disculper et redonner confiance,la perte précoce d’un bébé affecte parfois les relations au sein du couple (Garel & Legrand, 2005).Dans l’étude réalisée par Beutel et al. (1996), 75 % des femmes rapportaient que leur conjoint étaitcompréhensif et attentionné immédiatement après la fausse couche, mais pas nécessairement par lasuite. Par ailleurs, 14 % des femmes reprochaient à leur mari d’éviter de parler de cette perte, et cepourcentage augmentait à 29 et 27 % respectivement six et 12 mois après la fausse couche. Lorsqu’il ya des difficultés à s’exprimer à propos de la fausse couche, la communication au sein du couple peutse détériorer (Bennett et al., 2005). La littérature indique que l’expérience de la fausse couche peutengendrer la même détresse émotionnelle et psychologique chez les hommes que celle éprouvée parles femmes (Rinehart & Kiselica, 2010). En ce sens, l’absence ou le manque de soutien du conjoint peutêtre la manifestation de sa propre détresse.

Le modèle de Holahan et Moos (1991) considère que lorsqu’une personne fait face à un stress élevé,ce sont les ressources individuelles (la confiance, une disposition plutôt détendue et l’utilisation destratégies de coping actif) et les ressources sociales (le soutien familial) qui agissent positivement surles stratégies de coping, lesquelles conduisent à un meilleur ajustement et donc à moins de dépression.À partir de ce modèle, nous pouvons supposer qu’il existe un lien entre le soutien rec u de la part duconjoint, l’utilisation des stratégies de coping, l’intensité des réactions face à la perte, et la dépression.Ainsi, plus le soutien rec u de la part du conjoint sera important, plus les femmes mettront en placedes stratégies de coping adaptées pour s’ajuster à la fausse couche, et moins elles manifesteront desymptômes dépressifs ou de difficultés à faire face au deuil.

2. Méthode

2.1. Participants et protocole

Les participantes de cette étude ont été contactées via des forums et par le biais de la liste dediffusion de l’expérimentateur. Il était précisé que l’étude était menée dans le cadre de la réalisationd’un mémoire de psychologie. Pour le groupe de femmes ayant vécu une fausse couche, l’objet et lesmodalités de l’étude étaient précisés dans les appels à témoins postés sur les forums. Il était indiquéque l’étude portait sur la fausse couche et le soutien du conjoint. Leur participation était possible viaInternet, et toutes les femmes majeures ayant déjà vécu une fausse couche pouvaient y participer.Les participantes du groupe de comparaison ont été sollicitées par un message électronique envoyéaux femmes figurant dans la liste de diffusion de l’expérimentateur. Ce message invitait les femmesmajeures à participer à une étude portant sur le rôle du soutien du conjoint face à un évènement devie stressant et négatif. Des femmes nullipares ont été inclues dans le groupe de comparaison, caril s’agissait d’évaluer le soutien du conjoint face à une situation stressante, indépendamment de la

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variable maternité (nullipare vs multipare). Lorsque les femmes acceptaient de participer à l’étude, lequestionnaire assorti de consignes plus précises, ainsi que le formulaire de consentement éclairé, leurétaient envoyés.

Cent huit femmes ont accepté de participer à cette étude. Deux femmes ont été exclues de l’étudecar leur questionnaire était incomplet. L’échantillon final est composé de 106 femmes majeures : legroupe fausse couche et le groupe de comparaison comptent respectivement 53 femmes. Le pre-mier groupe est composé de femmes qui ont vécu l’expérience de la fausse couche dans les septmois précédant leur participation à l’étude, et le groupe de comparaison est constitué d’une popula-tion « tout-venant ». Ces deux groupes sont indépendants et n’ont pas fait l’objet d’appariement d’unpoint de vue sociodémographique. Le Tableau 1 présente les caractéristiques sociodémographiquesde l’échantillon.

2.2. Mesures

Toutes les participantes ont rempli une fiche anamnestique. Cette fiche comportait des questionssupplémentaires pour les femmes ayant fait une fausse couche, permettant de recueillir des informa-tions obstétricales telles que la date de la fausse couche, le nombre de fausse couche et la prise encharge médicale de la fausse couche. Les questionnaires proposés aux femmes sont les mêmes pourles deux groupes, à l’exception du questionnaire de deuil Texas Revised Inventory of Grief (TRIG) ; seulles femmes du groupe fausse couche y ont répondu.

Le TRIG permet d’évaluer l’intensité des réactions face à la perte à l’aide de 25 items (Faschingbauer,Zisook, & DeVaul, 1987 ; Paulhan & Bourgeois, 1995b). Il est divisé en trois parties : le comportementpassé après le décès (moyenne : 29,8 ; écart-type : 9,3), les sentiments actuels du sujet (moyenne :16,5 ; écart-type : 6,5) et la capacité à faire face au deuil (moyenne : 14,1 ; écart-type : 4,8). Les sujetsdevaient indiquer sur une échelle de Lyckert en cinq points, dans quelle mesure chacun des itemsprésentés renvoyait à leur expérience de la perte. Seuls les trois derniers items sont cotés de 1 à 2.

L’échelle d’impact subjectif de l’évènement (IES), est composée de 15 items pour lesquels le sujetdoit évaluer, sur une échelle de Lyckert en quatre points, la fréquence d’apparition des différentssymptômes évoqués au cours des sept derniers jours (Horowitz, Wilner, & Alvarez, 1979 ; Hansenneet al., 1993). Elle permet d’évaluer l’impact psychologique d’un évènement traumatique en identifiantdeux types de symptômes fréquemment retrouvés à la suite d’un évènement traumatique : l’intrusionet l’évitement. La somme des scores obtenus à ces deux sous-échelles permet d’obtenir un score totald’impact du traumatisme qui s’étend de 0 à 75. Plus ce score total est élevé, plus le sujet aura souffertdes deux formes de symptomatologies.

La version abrégée de 13 items du questionnaire de dépression de Beck (QDB-A) a été utilisée pourrepérer les symptômes ou attitudes fréquemment observés chez des sujets dépressifs (Beck, 1978).Pour chacun des items présentés, le participant choisit l’énoncé (ou les énoncés) parmi les quatreproposés, qui correspond(ent) le plus à son état actuel ; la cotation varie de 0 à 3. Dans le dépouillement,il faut tenir compte de la cote la plus forte qui a été choisie (Collet & Cottraux, 1986). Ainsi, lorsqu’onadditionne les scores des 13 items, on obtient une note globale, comprise entre 0 et 39. Plus la noteglobale est élevée, plus le sujet est déprimé. Un score compris entre 0 et 4, indique une absence dedépression ; un score compris entre 4 et 7, une dépression légère ; un score compris entre 8 et 15, unedépression modérée, et un score égal ou supérieur à 16 indique une dépression sévère.

Le Crisis Support Scale (CSS) permet d’évaluer, sur la base de sept items, d’une part, le soutien socialrec u au moment de la crise et, d’autre part, celui rec u au moment de l’évaluation (Joseph, Williams,& Yule, 1992). Les questions de l’échelle initiale ont été conservées, mais sa dimension temporelle aété supprimée. Pour cette étude, seul le soutien social rec u juste après la fausse couche a été mesuré.Les sujets répondent sur une échelle de Lyckert en sept points, allant de 0 à 6. Lorsqu’on additionneles scores des sept items, on obtient une note totale comprise entre 0 et 84. Plus cette note est élevée,plus le répondant a rec u du soutien de la part de sa famille et de son milieu professionnel.

Le Social Support Questionnaire (SSQ), est une échelle d’auto-évaluation dont l’objectif estd’apprécier la perception de la disponibilité et la satisfaction du soutien social (Rascle et al., 1997 ;Sarason, Levine, Basham, & Sarason, 1983). Ici, c’est la version courte à six items qui est utilisée :le SSQ6. Les participants doivent d’abord indiquer le nom ou les initiales des personnes qui leur

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Tableau 1Caractéristiques sociodémographiques de l’échantillon.

Groupe de comparaison(n = 53)

Groupe fausse couche(n = 53)

Variables Moyenne (min–max) Écart-type Moyenne (min–max) Écart-type

Âge (en années) 32,72 (19–55) 11,47 28,60 (21–42) 5,31

Durée du couple (en années) 5,94 (0–29) 7,15 5,75 (1–13) 3,23

Date de la fausse couche (nombre de moisséparant la fausse couche et le recueilde données)

3,64 (0–7) 2,39

Nombre de semaines de grossesse 7,79 (2–21) 3,69

Nombre de fausses couches 1,13 (0–7) 1,62

Nombre d’enfants 0,94 (0–4) 1,25 0,49 (0–2) 0,78

Groupe de comparaison(n = 53)

Groupe fausse couche(n = 53)

Variables Nombre de femmes(pourcentage)

Nombre de femmes(pourcentage)

Pays d’origineFrance 50 (94,34) 41 (77,36)Autres pays 3 (5,66) 12 (22,64)

Niveau d’étudeSans diplôme 3 (5,66) 0 (0)BEP-CAP 2 (3,77) 3 (5,66)Bac 8 (15,09) 10 (18,87)Bac +2 9 (16,98) 13 (24,53)Bac +3 et 4 20 (37,74) 18 (33,96)Bac +5 ou plus 11 (20,75) 9 (16,98)

Statut maritalCélibataire 9 (16,98) 0 (0)En couple 27 (50,94) 26 (49,06)Mariée 12 (22,64) 17 (32,08)Pacsée 1 (1,89) 10 (18,87)Divorcée 3 (5,66) 0 (0)Veuve 1 (1,89) 0 (0)

ProfessionArtisans, commerc ants et chefs d’entreprise 2 (3,77) 2 (3,77)Cadres et professions intellectuelles supérieures 9 (16,98) 12 (22,64)Professions intermédiaires 16 (30,19) 15 (28,30)Employées 11 (20,75) 14 (26,42)Ouvrières 0 (0) 1 (1,89)Sans activité 15 (28,30) 9 (16,98)

Curetage après la fausse coucheOui 25 (47,17)Non 28 (52,83)

Première fausse coucheOui 32 (60)Non 21 (39)

Prénom donné à l’enfant à naîtreOui 11 (20)Non 42 (79)

Antécédents gynécologiquesAucun 25 (47,17)Fausse couche 13 (24,53)Infertilité 3 (5,66)IVG 3 (5,66)Grossesse extra-utérine 0 (0)Autre 1 (1,89)2 antécédents ou plus 8 (15,09)

Enceinte après la fausse coucheOui 19 (35)Non 34 (64)

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apportent un soutien, et ce pour chacun des six énoncés. Cette première consigne a été modifiéeafin d’évaluer plus particulièrement le soutien perc u de la part du conjoint ; il a été demandé auxfemmes d’indiquer pour chaque énoncé, si oui ou non elles peuvent compter sur leur conjoint. Lasomme des scores de chaque énoncé fournit une note de disponibilité, qui s’étend de 0 à 6. Plusla note est élevée, plus les femmes perc oivent leur conjoint comme étant disponible pour elles.Dans la seconde étape, qui est restée fidèle à la version originale, les participants indiquent pourchaque énoncé, sur une échelle de Lyckert en six points leur degré de satisfaction au regard du sou-tien rec u. La somme des scores de chaque énoncé fournit une note de satisfaction, qui s’étend de1 à 36. Plus la note est élevée, plus les femmes sont satisfaites du soutien obtenu de la part de leurconjoint.

La version franc aise du Ways of Coping Check-List (WCCL), est composée de cinq échellesqui permettent d’évaluer les stratégies de coping mises en place par le sujet lorsqu’il doit faireface à une situation stressante (Paulhan, Nuissier, Quintard, Cousson, & Bourgeois, 1994). Lecontenu des 29 items renvoie aux cinq types de coping suivants : la résolution de problème,l’évitement avec pensée positive, la recherche de soutien social, la réévaluation positive et l’auto-accusation. Les réponses possibles sont cotées de 1 à 4. Plus les notes de chacune des stratégiesde coping sont élevées, et plus le répondant a utilisé ces stratégies pour faire face à la situationstressante.

2.3. Analyses statistiques

Toutes les analyses statistiques ont été réalisées à l’aide du logiciel Statistica 9. Le test t de Student aété effectué, afin de comparer les moyennes obtenues par le groupe de femmes ayant vécu l’expériencede la fausse couche et le groupe de comparaison à l’échelle d’IES, au questionnaire de dépression deBeck, aux questionnaires permettant d’évaluer le soutien social perc u (SSQ6), le soutien social rec u(CSS), et les stratégies de coping (WCCL). Une matrice de corrélations a été conc ue entre les variablesde la résolution du deuil (TRIG), de l’impact traumatique de l’évènement, de la dépression, du soutiensocial rec u de la part des milieux familial et professionnel, du soutien social rec u de la part du conjoint,et des stratégies de coping.

Tableau 2Statistiques descriptives.

Variables Groupe de comparaison (n = 53) Groupe fausse couche (n = 53)

M ET (min–max) M ET (min–max)

Sous-échelles du TRIGComportement passé 14,92 5,74 (7–30)Sentiments actuels 28,68 10,41 (13–54)Capacité à faire face au deuil 16,38 3,89 (10–24)

IES 32,58 11,64 (6–60) 37,72 12,41 (9–65)

Beck 4,91 3,90 (0–14) 8,87 5,90 (0–28)

CSS 42,17 13,69 (9–70) 38,51 17,30 (7–72)

Sous-échelles du SSQ6Disponibilité 3,77 2,58 (0–6) 5,02 1,70 (0–6)Satisfaction 20,13 12,65 (0–34) 26,96 7,54 (6–36)

Sous-échelles du WCCLRésolution de problème 20,75 5,31 (8–32) 18,94 4,46 (11–28)Évitement avec pensée positive 15,91 4,12 (8–26) 17,32 3,94 (9–25)Recherche de soutien social 15,28 3,15 (5–20) 15,38 3,10 (7–20)Réévaluation positive 12,64 3,10 (5–19) 13,02 3,35 (7–19)Auto-accusation 9,21 3,80 (4–16) 9,11 2,86 (4–16)

TRIG : Texas Revised Inventory of Grief ; SSQ6 : Social Support Questionnaire ; WCCL : Ways of Coping Check-List.

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3. Résultats

3.1. Statistiques descriptives

Le Tableau 2 présente les statistiques descriptives des deux groupes, obtenues sur la base desrésultats aux différents questionnaires : TRIG, IES, Beck, CSS, SSQ6 et WCCL.

Les analyses statistiques révèlent plusieurs différences significatives dans les scores obtenus auxquestionnaires, entre le groupe fausse couche et le groupe de comparaison. En moyenne, les femmesqui ont vécu une fausse couche ont des scores significativement plus élevés au questionnaire de Beckqui évalue la dépression et aux deux sous-échelles du SSQ6, soit la disponibilité et la satisfaction liéesau soutien du conjoint, comparé aux femmes du groupe de comparaison. Le Tableau 3 présente lesrésultats obtenus au t test.

Les femmes ayant vécu l’expérience de la fausse couche ont en moyenne des scores significati-vement plus élevés aux sous-échelles du TRIG sentiments actuels et capacité à faire face au deuil, etdes scores significativement moins élevés à la sous-échelle comportement passé, comparé à la valeurstandard obtenue par Paulhan et Bourgeois (1995a, 1995b) pour la validation du TRIG. Le Tableau 4présente les résultats de la comparaison des moyennes de l’échantillon aux valeurs standards.

Les analyses statistiques révèlent plusieurs corrélations significatives :

Tableau 3Comparaison des scores obtenus à l’impact subjectif de l’évènement (IES), au Beck, au Crisis Support Scale (CSS), au Social SupportQuestionnaire (SSQ6), et au Ways of Coping Check-List (WCCL) entre le groupe fausse couche et le groupe de comparaison.

Groupe faussecouche (n = 53)

Groupe decomparaison (n = 53)

Variables M ET M ET t p

Total IES 37,72 12,41 32,58 11,64 2,20 0,03

Total Beck 8,87 5,90 4,91 3,90 4,08 < 0,005

Total CSS 38,51 17,30 42,17 13,69 –1,21 0,23

Total Disponibilité 5,02 1,70 3,77 2,58 2,93 < 0,005

Total Satisfaction 26,96 7,54 20,13 12,65 3,38 < 0,005

Total Résolution de problème 18,94 4,46 20,75 5,31 –1,90 0,06

Total Évitement avec pensée positive 17,32 3,94 15,91 4,12 1,81 0,07

Total Recherche de soutien social 15,38 3,10 15,28 3,15 0,16 0,88

Total Réévaluation positive 13,17 3,08 12,89 3,21 0,46 0,64

Total Auto-accusation 9,11 2,86 9,21 3,80 –0,14 0,89

Le seuil de signification a été ajustée avec la correction de Bonferroni (p = 0,005) ; ddl = 104.IES : Impact of Event Scale ; CSS : Crisis Support Scale ; SSQ6 : Social Support Questionnaire (sous-échelles : Disponibilité etSatisfaction) ; WCCL : Ways of Coping Check-List (sous-échelles : Résolution de problème, Évitement avec pensée positive,Recherche de soutien social, Réévaluation positive, et Auto-accusation).

Tableau 4Comparaison entre les scores par le groupe de femmes ayant fait une fausse couche et les scores obtenus par Paulhan et Bourgeois(1995a, 1995b) aux trois sous-échelles du Texas Revised Inventory of Grief (TRIG).

Groupe fausse couche (n = 53)

Variables Valeur standard M ET t p

Total Comportement passé 29,80 14,92 5,74 –18,86 0,00a

Total Sentiments actuels 16,50 28,68 10,41 8,52 0,00a

Total Capacité à faire face au deuil 14,10 16,38 3,89 4,26 0,00a

a p < 0,05 ; ddl = 52.

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Tableau 5Corrélations entre les variables.

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14

Sous-échelles TRIG1. Total TRIG – 0,77a 0,93a 0,85a –0,24 –0,49a 0,38a –0,03 0,07 0,15 –0,33a 0,27a 0,19 –0,38a

2. Total Comportement passé – 0,53a 0,57a –0,44a –0,48a 0,42a 0,18 0,14 –0,05 –0,50a 0,40a 0,06 –0,50a

3. Total Sentiments actuels – 0,73a –0,09 –0,42a 0,35a –0,08 0,06 0,19 –0,17 0,19 0,16 –0,25

4. Total Capacité face au deuil – –0,20 –0,37a 0,15 –0,19 –0,06 0,24 –0,35a 0,13 0,33a –0,36a

5. Total IES – 0,15 –0,42a –0,19 –0,08 0,28a 0,50a –0,34a 0,10 0,39a

6. Total Beck – –0,22 –0,24 –0,31a –0,27 0,18 –0,50a –0,37a 0,36a

7. Total CSS – 0,40a 0,40a –0,00 –0,15 0,59a –0,04 –0,25

SSQ68. Total Disponibilité – 0,71a –0,03 –0,09 0,51a –0,08 –0,22

9. Total Satisfaction – 0,09 0,04 0,57a –0,02 –0,31a

Sous-échelles WCCL10. Total Résolution de problème – 0,06 0,31a 0,38a 0,03

11. Total Évitement avec pensée positive – –0,24 –0,08 0,52a

12. Total Recherche de soutien social – 0,22 –0,27a

13. Total Réévaluation positive – –0,01

14. Total Auto-accusation –

TRIG : Texas Revised Inventory of Grief ; IES : Impact of Event Scale ; CSS : Crisis Support Scale ; SSQ6 : Social Support Questionnaire ; WCCL : Ways of Coping Check-List.a p < 05.

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• la stratégie de coping recherche de soutien social : cette variable sature à 0,27 avec les scoresdu questionnaire évaluant la résolution du deuil (TRIG) (r = 0,27 ; p < 0,05). Il y a une corrélationnégative entre cette même stratégie de coping et les scores relatifs à l’évaluation de l’IES (r = –0,34 ;p < 0,05). Le questionnaire de dépression de Beck, corrèle négativement avec la stratégie de copingrecherche de soutien social (r = –0,50 ; p < 0,05). Le soutien rec u de la part des milieux familial etprofessionnel, évalué par le CSS, corrèle positivement avec la stratégie de coping recherche desoutien social (r = 0,59 ; p < 0,05) ;

• la stratégie de coping auto-accusation : elle est positivement corrélée à la dépression (r = 0,36 ;p < 0,05) et à l’IES (r = 0,39 ; p < 05). Elle corrèle négativement à la satisfaction liée au soutien duconjoint (r = –0,31 ; p < 0,05) et à la résolution du deuil (r = –0,38 ; p < 0,05) ;

• l’impact subjectif de l’évènement évalué par l’IES sature à 0,50 avec la stratégie de coping évitementavec pensée positive (r = 0,50 ; p < 0,05). Il y a également une corrélation négative entre l’impactsubjectif de l’évènement et la satisfaction liée au soutien du conjoint (r = –0,42 ; p < 0,05) ;

• le soutien du conjoint : la variable de la satisfaction liée au soutien du conjoint sature à –0,31(r = –0,31 ; p < 0,05) avec les scores de dépression obtenus au questionnaire de Beck. On observeégalement une corrélation positive entre la satisfaction liée au soutien du conjoint et la résolutiondu deuil (r = 0,38 ; p < 0,05). En ce qui concerne les sous-échelles du SSQ6, soit la disponibilité etla satisfaction liées au soutien rec u de la part du conjoint, elles saturent respectivement à 0,51(r = 0,51 ; p < 0,05) et 0,57 (r = 0,57 ; p < 0,05) avec la stratégie de coping recherche de soutien social.Les corrélations sont présentées dans le Tableau 5.

4. Discussion

Les femmes ayant vécu l’expérience de la fausse couche ont en moyenne des scores supérieursau questionnaire évaluant la dépression, comparé aux femmes du groupe de comparaison. Cette dif-férence significative confirme que cette perte périnatale est un évènement qui est susceptible deconduire à la dépression. Parmi les femmes ayant vécu une fausse couche 13,21 % ont des scores supé-rieurs ou égaux à 16 ; ce qui renvoie à une dépression majeure. Les symptômes dépressifs sont associésà des difficultés à faire face à la perte périnatale. Ces résultats sont en accord avec l’étude menée parNeugebauer et al. (1992b), qui révèle des scores de dépression plus élevés chez les femmes ayant vécuune fausse couche, et ce dès les premières semaines suivant la perte.

De même, on observe une différence significative dans les scores obtenus au SSQ6, qui évalue lesoutien rec u de la part du conjoint : les femmes ayant vécu l’expérience de la fausse couche ont desscores plus élevés au SSQ6, que celles du groupe de comparaison. On observe que seulement 9,43 % desfemmes ayant vécu une fausse couche ont des scores au SSQ6 inférieurs à 16 et sont donc insatisfaitesdu soutien rec u. À l’inverse, 90,57 % de ces femmes ont des scores au SSQ6 supérieurs à 16, et sontsatisfaites du soutien rec u. Les entretiens révèlent en effet que même si certaines femmes disent avoirrencontré des difficultés avec leur conjoint, elles reconnaissent toutefois qu’il a été présent, et semontrent globalement satisfaites du soutien apporté.

Diverses corrélations apparaissent entre les variables étudiées : on observe un lien positif entre lesoutien rec u de la part du conjoint et la stratégie de coping recherche de soutien social. Nous pouvonsnous demander si c’est la satisfaction liée au soutien du conjoint qui incite les femmes à rechercherdu soutien social pour faire face à leur fausse couche, ou si c’est parce qu’elles recherchent du soutienqu’elles en trouvent également auprès de leur conjoint. Par exemple, certaines femmes déc ues dusoutien apporté par leur conjoint pourraient ne pas en chercher ailleurs, et inversement.

Ces premiers résultats montrent que plus le soutien du conjoint est important, plus les femmesutilisent la stratégie de coping adaptative recherche de soutien social. Cette stratégie de coping semblejouer un rôle important dans l’ajustement des femmes : plus les femmes rechercheraient du soutiendans leur entourage, meilleure serait la résolution du deuil, et moins elles manifesteraient des symp-tômes dépressifs liés au traumatisme. Par ailleurs, plus les femmes rechercheraient du soutien social,plus elles utiliseraient la stratégie de coping résolution de problèmes, et à l’inverse moins elles s’auto-accuseraient. Le partenaire permet en effet de disculper et de redonner confiance aux femmes (Garel& Legrand, 2005). L’auto-accusation conduirait également à des scores de dépression plus élevés et à

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des difficultés à faire face au deuil. C’est en cela qu’on peut dire que l’auto-accusation est une stratégiede coping non adaptative.

En outre, nous observons un lien direct entre le soutien du conjoint et la dépression. Il apparaîtque plus les femmes se sentent soutenues par leur conjoint, et moins elles manifestent des symp-tômes dépressifs. Ces résultats sont en accord avec l’étude de Beutel et al. (1996) qui a montré que lesfemmes qui bénéficiaient d’un faible soutien de la part de leur conjoint étaient également celles quimanifestaient les scores de dépression les plus élevés à la suite de la fausse couche.

Ces résultats doivent être considérés avec relativité, car leur interprétation pourrait être pluscomplexe. En effet, la détresse psychologique dans laquelle se trouvaient certaines de ces femmesaurait pu avoir des répercussions sur leur fac on de percevoir le soutien rec u de la part de leur conjointet de leur entourage. Cette étude a été réalisée auprès d’un petit échantillon, les résultats ne sontdonc pas généralisables. Le mode d’échantillonnage peut biaiser les résultats. Ainsi, les participantespeuvent présenter des caractéristiques qui leurs sont spécifiques. Leur participation à l’étude a pu êtremotivée par une recherche de soutien social ; ce qui sous-tendrait qu’elles ne sont pas ou peu satis-faites du soutien apporté par leur entourage. De plus, des femmes célibataires ont été inclues dans legroupe de comparaison, ce qui n’a pas permis d’évaluer le soutien du conjoint mais uniquement lesoutien de l’entourage.

Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

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