le travail et sa valeur

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     A.V. Alferov, E.Y. Kustova

     Piatigorsk, Russie,

     L’Université Linguistique d’Etat de Piatigorsk 

    [email protected]@yandex.ru

    PRINCIPES INTERACTIONNISTES DE L'ANALYSE

    CONVERSATIONNELLE

    L’article «Principes interactionnistes de l'analyse conversationnelle» porte sur les aspects différents

    de l’analyse conversationnelle dite « interactionniste » qui sont présentés par les auteurs comme paradigme de principes concernant l’idée de négociation entre interlocuteurs sur plusieurs nivaux

    hiérarchisés. En premier lieu les interlocuteurs confrontent leurs attitudes propositionnelles sur le

    réfèrent et par là essaient d'influer sur leurs croyances respectives. L'échange de paroles porte alors principalement sur les modalités d'énoncés, qui déterminent à tout moment comment les agents de

    la communication situent ce qu'ils disent par rapport à la vérité, la fausseté, le doute ou la certitude.

    L'échange de paroles porte aussi sur les modalités d'énonciation qui correspondent à la relation

    interpersonnelle entre les protagonistes de la communication. Car c'est leurs actes de parole que les

     partenaires entreprennent de confronter leurs attitudes propositionnelles et de les influencer 

    mutuellement.

    Les études sur la morphologie orale, menées d'après des corpus, sont toujours

    assez peu nombreuses. Bien qu’elles durent plus de 30 ans un peu partout dans le

    monde, il reste encore beaucoup à faire pour décrire les différents usages du langage

     parlé dans des différentes langues et habitudes linguistiques. Cette description ne peut

     pas se faire entièrement dans le cadre unique: il suffît de penser que la délimitation de

    la phrase n'a pas de stricts équivalents dans la langue parlée. On peut penser que la

    recherche de nouvelles unités d’analyse et de nouvelles démarches pourra apporter un

    renouvellement intéressant des études du discours, aussi bien écrit que parlé.

    Par exemple, D. André-Larochebouvy [5] met en question les genres du langage

     parlé et fait une typologie de modes conversationnels: interview, dialogue polémique,

    conversation quotidienne, etc. Elle envisage un corpus varié et remarquable

    d’interactions verbales en français et dont elle fait une analyse recherchée.

    C. Kerbrat-Orecchioni et le groupe lyonnais [8;11] présentent les différentes

     perspectives théoriques sur le fonctionnement des interactions, les outils

    mailto:[email protected]:[email protected]:[email protected]:[email protected]

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    méthodologiques dont on dispose pour les décrire, et les problèmes que l'on rencontre

    en étudiant les variations culturelles des systèmes conversationnels.

    E. Roulet [13], J. Moeschler [12] et le groupe de «Cahiers de linguistiquefrançaise» [7] envisagent surtout les fonctions argumentatives du discours.

    Le discours peut être conçu comme négociation, ce qui permet de mieux en

    saisir la structure et le fonctionnement. Cette conception mène à la construction d'un

    modèle global de représentation du discours. Ce modèle développé par E. Roulet

    (1985) et son équipe veut rendre compte du fonctionnement du discours en

    construisant une représentation des liens entre les divers énoncés. La structure

    construite tient compte de différents niveaux (interactions, structures, enchaînements)

    et surtout des relations entre ces niveaux. L'ouvrage de Roulet comporte

    essentiellement une série d'analyses de textes écrits (éditoriaux de journaux,

    fragments littéraires). Un ouvrage complémentaire est celui de Moeschler (1985), qui

    choisit comme support de description des conversations authentiques de genres

    différents (interview radiophonique, interaction en librairie, débat politique,

    conversation de table). Ces discours sont interrogés sous l'angle de leurs propriétés

    structurales (envisagées à partir des unités définies par Roulet) et argumentatives (par 

    l'examen du rôle des marques argumentatives et de leur fonction structurante), mais

    aussi sous leur aspect dynamique (comment clore un échange, comment poursuivre

    l'interaction en différant sa clôture, comment revenir à un thème abandonné).

    Cette théorie de l'argumentation s'est essentiellement consacrée à l'étude des

    opérateurs et connecteurs argumentatifs comme  presque, puisque, même, mais,

    d'ailleurs, justement, eh bien et d’autres, qui ont pour propriété d'une part de

    connecter les actes de langage, ou en tout cas des unités de nature pragmatique, et

    d'autre part de réaliser des actes d'argumentation, c'est-à-dire des actes obligeant

    l'interlocuteur à interpréter les énoncés comme autant d'arguments pour conclusions,

    généralement implicites, visées par le locuteur.

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    II pose que l'analyse de discours a pour objet principal de décrire la structure

    hiérarchique de la conversation, en termes des unités conversationnelles qui la

    composent (échange, intervention, acte de langage) et des différentes relations oufonctions (illocutoires et interactives) entre ces unités. Il lui apparaît dès lors qu'une

    analyse pragmatique du discours authentique interroge une conversation à partir des

    questions suivantes [12: 18] :

    (1) Quels sont les types d'actes de langage réalisés dans une conversation ?

    Comment sont-ils réalisés ? Quels sont les enchaînements et les conditions posées sur 

    l'enchaînement de ces actes ?

    (2) Quels sont les actes d'argumentation réalisés dans la conversation et

    comment sont-ils réalisés ? Quel rôle joue l'implicite argumentatif dans la com-

     préhension des enchaînements de discours ?

    (3) Quelle est la structure hiérarchique de la conversation ? Quelles sont ses

    conditions de poursuite et de clôture ?

    Dès lors que l'on s'intéresse au discours oral, il devient indispensable de le

    considérer comme un processus interactionnel. C'est-à-dire, chaque fois qu'on

    communique, il y a une interaction entre les (inter)locuteurs, d'un côté, et entre le

    locuteur et la situation, de l'autre, car le locuteur est obligé de formuler ses pensées

    compte tenu du fait où il parle, à qui il parle et dans quels buts, ainsi que de réagir à

    tout changement des paramètres constituant les contraintes communicatives.

     Nombreuses sont les études qui sont ces toutes dernières années consacrées au

     problème de la "compétence conversationnelle". Certaines tentent de dégager les

    règles très générales qui définissent un bon usage de l'échange verbal, d'élaborer une

    sorte de code déontologique auquel on est censé se conformer si l'on veut

    honnêtement jouer le jeu dialogique. D'autres études s'efforcent de formuler, voire de

    formaliser les règles qui déterminent plus précisément la cohérence dialogique, tantôt

    elles n'excèdent pas les limites du couple question-réponse, tantôt elles prétendent

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    rendre compte de la mise en séquence de la totalité de conversation (voir p. ex.,

    [2;3]).

    Il arrive enfin que l'analyse fonctionne successivement à deux niveaux. Ainsi,François Flahaut [9] a montré à l'aide de nombreux exemples, qu'à un niveau

    relativement superficiel une conversation fonctionne comme un tout cohérent (chacun

    apportent sa contribution, essaye de dire "son mot") et que l'on peut procéder à une

    sorte de typologie des répliques (acquiescement — quand on dit   oui, contestation -

    quand on dit  non, esquive - quand on fuit la réponse directe, manoeuvre dépréciative

    et d'autres) mais à un tout autre niveau et ce n'est plus alors du fonctionnement du

    dialogue qu'il s'agit, mais de sa fonction - quel est finalement le véritable enjeu de

    l'échange verbal? demande de reconnaissance? désire d'avoir raison? ou d'avoir raison

    de l'autre? Pour Flahaut, l'essentiel se joue dans le rapport de places, c'est-à-dire les

    relations interpersonnelles qui se constituent dans le dialogue et par le dialogue.

    L'influence réciproque est le component indispensable de l'interaction verbale.

    La psychologie distingue trois types d'influence:

    • activation (inciter, stimuler les actions de l'interlocuteur);

    • interdiction (cessation de force de l'activité de l'interlocuteur);

    • déstabilisation (une sorte de sabotage des activités de l'interlocuteur).

    Ces trois types de régulations du comportement humain se réalisent

    nécessairement au cours de l'interaction verbale. Ainsi on est en présence de la

    division de répliques en :

    • répliques informatives (qui informent sur un certain état de

    choses) et

    • répliques régulatrices (ordre, question, etc, qui influe le comportement de

    l'interlocuteur).

    On peut considérer chaque énonciation comme possédant cette faculté

    intrinsèque d'informer soit sur un état de choses, soit sur les intentions du sujet

     parlant ou sur ses attitudes envers ce qui l'entoure: ses émotions, ses états d'âme, etc.

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    Mais sur le fond le but de renonciation c'est quand même la régulation: faire faire,

    interdire de faire, ruiner les efforts de son vis-à-vis - voilà grossièrement le but de

    l'interaction verbale. Evidemment, toutes ces démarches s'effectuent par des moyenslinguistiques, c'est-à-dire la réalisation de ces trois démarches régulatrices demande

    l'emploi de telle ou telle forme grammaticale, tel ou tel acte de parole, telle ou telle

    trope ou jeu linguistique. C'est assez difficile de les lister.

    Par contre, on peut présenter le corps de répliques existant en trois espaces:

    • les actes de parole qui servent à l'orientation thématique d'un dialogue qui

    constituent l’espace informatif de l'interaction verbale;

    • les actes de parole aux fonctions régulatrices qui influencent mutuellement les

    interlocuteurs et déterminent les relations interpersonnelles et qui constituent l’espace

    illocutoire, liée aux aces tels que ordre, déclaration, affirmation, contestation,

    question, requête, etc.) et   l’espace interpersonnel  qui implique les rôles et les

     positions sociaux psychologiques des interlocuteurs au cours de l'échange verbal:

    • les énonciations ou interventions qui servent au maintien d'un dialogue en tant

    qu'interaction verbale et qui constituent l’espace discursif, c'est-à-dire la construction

    du texte oral au cours de l'interaction verbale.

    La réalisation du discours dans ces trois espaces qui s'entremêlent donne un

    modèle dynamique reflétant les   stratégies interactionnelles, interactives et

    interprétatives mises en œuvre par les interlocuteurs. Le caractère cohésif du discours

    conversationnel est déterminé par:

    - condition thématique (le constituant réactif ne doit pas introduire de

    changement de thème) ;

    - condition de contenu propositionnel (il doit exister une relation sémantique

    entre le constituant réactif et le constituant initiative) ;

    - condition illocutoire (le constituant réactif doit avoir une fonction illocutoire

    qui dépend de celle du constituant initiative) ;

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    - condition d'orientation argumentative (le contenu sémantique du constituant

    réactif doit être en accord avec sa fonction interactive) ;

    - condition de co-orientation interpersonnelle (les rôles interpersonnels socio- psychologiques doivent être coordonnés);

    - condition de cohésion discursive (les répliques doivent être liées, accordées et

    complémentaires les unes aux autres).

    Le terme   d'interaction suggère, dans son étymologie même, l'idée d'une action

    mutuelle, en réciprocité. Appliquée aux relations humaines, cette notion oblige à

    considérer la communication comme un processus circulaire où chaque message,

    chaque comportement d'un protagoniste agit comme un  stimulus sur son destinataire

    et appelle une réaction qui, à son tour, devient un stimulus pour le premier.

    La notion   d'interaction rassemblerait toutes les influences qu'un individu peut

    avoir ou subir par rapport au comportement langagier ou I non — on distingue les

    interactions verbales et non verbales — d'un autre individu ; elle est définie comme

    «les influences réciproques que les partenaires exercent sur leurs actions respectives

    quand ils sont en présence physique les uns des autres» (E. Goffman) ou comme «à la

    fois coopération et défense, respect du territoire propre, mais aussi de l'autre, afin de

    ne pas risquer le sien » [10].

    La notion de   discours se rapporte à tout ce qui est expression verbale d'un

    individu dans un cadre situationnel donné; on peut distinguer dans tout discours

    conversationnel la forme de la fonction. Par définition, une conversation, s'inscrivant

    dans une interaction verbale, présuppose l'existence d'au moins deux participants, et

    en plus une ou plusieurs contributions de ceux-ci. Elle a un aspect   dialogal  et

    s'oppose ainsi au discours  monologal va termes du nombre de participants et de leurs

    contributions. Un examen plus attentif du discours oblige à prendre en compte, en

     plus de sa forme, sa fonction, qui dépend du nombre d'intentions argumentatives non

    complémentaires. Un discours dialogal peut très bien être caractérisé comme une

    suite de contributions de locuteurs distincts s'assimilant à un même énonciateur. Et

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    rien n'empêche qu'un discours monologal simule, implicitement ou explicitement,

    une situation de conversation (par exemple le discours polémique). Pour qualifier la

    fonction du discours, on peut avec E .Roulet opposer  dialogique vs.  monologique(structure d'échange vs. structure d'intervention ; plusieurs intentions argumentatives

    distinctes vs. une seule intention argumentative). Ainsi un enfant ne peut d'abord

     produire un récit que grâce à un étayage dialogique de questions, ce n'est que dans un

    deuxième temps qu'il parviendra à construire de façon monologal un texte narratif 

    cohérent. Certains articles de presse ont en fait une structure de dialogue, soit qu'ils

    constituent une intervention au sein d'un échange dont les autres constituants sont

    implicites, soit qu'ils simulent une structure d'échange. Un discours peut donc être, en

    regard de sa forme et de sa fonction  dialogal et dialogique (conversations, débats),

    dialogal  et   monologique (commis par plusieurs personnes présentant une autorité

    supérieure: par exemple instructions préfectorales données au nom de l'État),

    monologal  et  monologique (poème, réflexion personnelle, narration),  monologal  et

    dialogique (éditorial de journaux, lettre ouverte). La conversation serait à la fois une

    interaction verbale et un discours dialogal et dialogique; elle obéirait aux contraintes

    d'enchaînement, structurelles et interactionnelles des échanges qui la constituent.

    Dans son livre "La représentation de soi dans la vie quotidienne", E. Goffman

    développe d'une manière systématique l'idée que la vie (du langage) est un théâtre. La

    vie sociale ressemble à un répertoire de situations types, et les interlocuteurs

    cherchent avant tout à "représenter un rôle". Les conversations les plus banales,

    d'après Goffman, représentent en fait de petites luttes symboliques. "L'interaction

    n'est pas une scène d' harmonie, mais une disposition permettant de poursuivre une

    "guerre froide": si la société n'est pas une guerre de tous contre tous, ce n'est pas

     parce que les hommes vivent en paix mais qu'une guerre ouverte est trop coûteuse"

    [10].

    Une des premières tâches de toute rencontre sociale est la définition de la

    situation, qui comporte une certaine distribution des places et rôles occupés par 

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    chacun et une certaine forme de l'action; ces éléments peuvent être donnés dès le

    départ parce qu'ils résultent du contexte ou des rencontres antérieures. Ainsi le patron

    et sa secrétaire savent en arrivant chaque jour au bureau que leur relation sera fondéesur un rapport hiérarchique; ils peuvent aussi faire objet d'un consensus temporaire

    (le même patron rencontrant sa secrétaire chez des amis peut proposer, avec sa

    complicité, une nouvelle définition de leur relation comme amicale). Ce consensus

    est nécessaire pour que les acteurs puissent déterminer avec suffisamment de sécurité

    quel rôle ils ont à tenir pour la mise en scène de la vie quotidienne et quel scénario

    minimal guide leurs rapports.

    Chaque acteur cherche, dans la rencontre, donner une image valorisée de lui-

    même et va s'efforcer d'organiser une "mise en scène" de son Moi qui aille dans ce

    sens.   C'est  ce que Goffman désigne par la notion de face, image de soi exposée à

    l'autre, dans le but de défendre son propre territoire (face négative) et de proposer de

    soi une image valorisante (face positive), et qui définit comme étant la valeur sociale

     positive qu'une personne revendique effectivement à travers une ligne d'action.

    Le rituel veut que les partenaires de l'échange coopèrent pour confirmer la

    "face"que chacun revendique à travers sa tenue (à condition qu'elle ne s'impose pas

    aux dépens des autres). Cependant faire connaître une image positive de soi n'est pas

    le seul enjeu de l'interaction. Il s'agit de permettre le contact lorsque celui-ci est

    mutuellement souhaité.

    Or, l'instauration (l'interruption) d'une relation est un moment délicat dans la

    mesure où il comporte le risque d'une intrusion dans le territoire d'autrui, et par là

    même d'un rejet. La fonction de l'acte de langage rituel est de faciliter ce

    rapprochement avec le minimum de risque pour la face des interactants. Le rituel doit

    aussi permettre d'interrompre un échange sans que cette interruption puisse être

    ressentie comme une offense par l'un des partenaires. C'est pourquoi le

    rapprochement et la séparation, l'ouverture et la fermeture de la communication, les

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    demandes et les offres de service, les invitations, les présentations et les départs sont

    des moments particulièrement ritualisés.

    Ce jeu de faces dans la conversation présente une sorte de négotiation pour avoir du profit interactionnel:

    face positive: - coopérer (laisser aller l'interlocuteur)

    - respecter le territoire d'autrui

    face négative - protéger son territoire à soi

    - intervenir (sur le territoire de l'interlocuteur)

    Le travail des faces entre en jeu surtout en vue des actes menaçant à l'intégrité

    du territoire :

    • du locuteur même

    • de l'interlocuteur  

    Le but de l'analyse linguistique interactionnelle est d'établir une liste voire

    l'hiérarchie des stratégies conversationnelles visant l'aspect interpersonnel de

    l'interaction verbale.

    Les actes qui contribuent à maintenir le dialogue, on peut ranger toutes les

    actions des participants du dialogue qui visent à régler la question de savoir qui

     parlera et qui écoutera. Sur ce point on demande aux interlocuteurs- quelle que soit

    leur divergence d'opinions- une certaine coopération. Car même la discussion la plus

     passionnée n'est possible que si un seul participant tient le rôle de locuteur à un

    moment donné. La contribution au dialogue doit marquer une certaine étape dans le

    déroulement du dialogue - étape qui, à son tour, sera dépassée par une contribution

    ultérieure qui aura tenu de ce qu’on vient de dire. Cela signifie que la notion de

    "dialogue" ne suppose pas seulement un échange de paroles entre deux ou plusieurs

    interlocuteurs mais aussi un lieu thématique et interactionnel entre la contribution

    d'un locuteur et celle d'un autre qui l'a précédée.

    Il y a, dans presque tous les dialogues, des émissions verbales ou sonores de la

     part d'auditeurs - émissions qui accompagnent le discours d'un locuteur actuel, le

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    commentent sans exiger de prendre la parole. Ces signaux d'auditeur comme on peut

    les appeler, confirment le droit à la parole du locuteur actuel. Ce sont "oui", "mhm",

    "très juste", "quelle horreur !", etc. (voir [1; 4]).On voit que ces signaux peuvent remplir différentes fonctions communicatives:

    ils peuvent signaler au locuteur que l'on a compris ce qu'il dit, qu'on sait déjà ce dont

    il parle ou bien si l'on est d'accord avec lui. Grâce à ces signaux le locuteur sait si ce

    qu'il dit est accepté, et comment. On les appelle parfois marqueurs du "feed-back"ou

    de la rétroaction informative.

    Attachons-nous à la manière dont s'ouvre le dialogue. Celui-ci ne se noue dans

    son moment référentiel qu'à partir du moment où une certaine question obtient le

    consensus des interlocuteurs. Cette question initiale ne surgit donc de nul part dans la

    conversation. Elle est introduite par des répliques préliminaires au cours desquelles

    les participants explorent l’arrière-plan de leurs croyances communes. La question

    qui a le statut textologique de question initiale appelle une suite pour laquelle elle

    ouvre un espace et donne une direction. L'espace dialogique est celui où va s'inscrire

    toute l'enquête référentielle. Le sens de la question est la direction dans laquelle seule

     peut s'effectuer la réponse si elle veut être une réponse significative. Mais quelle suite

    appelle-elle? La conversation des présupposés d'existence et d'unicité est un critère

    qui permet de reconnaître le moment référentiel d'un dialogue. Il est clair qu'un

    dialogue à dominante polémique n'admet pas de tels critères. L'art de questionner 

    dans un dialogue, c'est l'art de continuer à questionner. Appartenir à un certain

    dialogue retient d'abord à pouvoir entrer dans un cadre sémantique défini par la

    compatibilité logique avec les présupposés de la question initiale. Toute parole

    échangée subit donc une double contrainte: elle est liée par une condition formelle de

    compatibilité et une condition matérielle d'informativité, puisqu'elle doit apporter une

    information médite, ou du moins la discuter.

    Donc, le dialogue est un texte dont la formation est soumise à certaines règles.

    Parmi ces règles certaines sont sémantiques, elles concernent le cadre sémantique et

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    l'objectif du dialogue. D'autres sont pragmatiques: elles concernent les phrases en tant

    qu'elles sont émises dans une certaine situation d'interaction verbale.

    Les répliques précédant la question initiale comportent habituellement desadverbes révélateurs tels que "à coup sûr", " certainement' - morphèmes qui avaient

     pour fonction d'accréditer les présupposés, de les présenter comme une quasi-

    évidence et en fin de compte de solliciter l'adhésion à leur égard. C'est que la stratégie

    du dialogue référentiel écarte toute procédure ironiste d'insinuation ou d'implicite.

    Par ex., "je me demande si" exprime un doute et "je vous demande s/" exprime

    une question. Dans la première expression le verbe concerne la façon dont le locuteur 

    entend situer son énoncé par rapport à la certitude - il introduit ce qu'on appelle une

    modalité d'énoncé (aspect sémantique). Et dans le second cas nous avons affaire à un

    verbe qui porte sur la relation entre le locuteur et l'allocutaire, qui introduit une

    modalité d'énonciation (aspect pragmatique).

    On distingue selon cette division le dialogue référentiel qui a pour but d'informer 

    et porte sur un certain contenu et l'échange régulateur ou rituel qui remplit

    uniquement des fonctions pragmatiques

    Il y a, donc, deux aspects complémentaires dans le déroulement d'un dialogue

    référentiel. En premier lieu les interlocuteurs confrontent leurs attitudes

     propositionnelles sur le réfèrent et par là essaient d'influer sur leurs croyances

    respectives. L'échange de paroles porte alors principalement sur les modalités

    d'énoncés, qui déterminent à tout moment comment les agents de la communication

    situent ce qu'ils disent par rapport à la vérité, la fausseté, le doute ou la certitude.

    Ce premier aspect interfère avec un autre. L'échange de paroles porte aussi sur 

    les modalités d'énonciation qui correspondent à la relation interpersonnelle entre les

     protagonistes de la communication. Car c'est leurs déclarations, leurs questions, leurs

    réponses, leurs objections, etc. que les partenaires entreprennent de confronter leurs

    attitudes propositionnelles et de les influencer mutuellement.

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    On va maintenant chercher à mettre en évidence la fonction illocutoire de

    chaque élément d'un échange ainsi que les fonctions interactives qui lient les

    constituants de chaque intervention, dans le cadre d'une analyse fonctionnelle. Ondistinguera parmi les interventions celles qui ont une fonction illocutoire initiative de

    celles qui ont une fonction illocutoire réactive; les premières donnent des droits ou

    imposent des contraintes à l'interlocuteur (assertion, demande d'information, demande

    de confirmation, retraite, offre, invitation, relance, etc.) tandis que les secondes sont

     positives ou négatives selon qu'elles satisfont ou non la fonction illocutoire de

    l'intervention précédente. Seules les interventions de clôture d'échange ne comportent

    qu'une fonction illocutoire réactive ; les autres sont à la fois réactives de l'intervention

    antérieure et initiatives de la suivante. Les fonctions interactives permettent, dans le

    cas d'interventions complexes, d'expliciter le rôle argumentatif d'un constituant

    coordonné à l'acte directeur (justification, commentaire, explication, concession). Les

    marqueurs argumentatifs ont ici un rôle important dans la détection de la fonction

    interactive pertinente : certes introduit une concession, car, parce que, puisque - des

     justifications ou des explications, donc, par conséquent - des conclusions, mais - un

    contre argument. Ils indiquent en outre si la fonction interactive en question est plus

    ou moins marquée.

    On distinguera quatre degrés possibles: 1) pas de marque, 2) implicite

    conversationnel (introduit, pour une demande, par un marqueur ambigu comme est-ce

    que), 3) implicite conventionnel (marqueur univoque:  s’il vous plaît) ou 4) explicite

    (marqueur dénominatif de la fonction comme je demande) (voir [1]).

    Alors, dans les études envisageant le déroulement de l'interaction verbale, tous

    les linguistes accordent une place centrale au concept de négociation. Communiquer,

    ce n'est pas seulement interagir avec des interlocuteurs, présents ou potentiels, c'est

    entreprendre avec eux une véritable négociation, et ceci à plusieurs niveaux:

    opinions, sens des mots et des énoncés, tours de parole, rapports de places et de faces.

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    Dans cette perspective, on peut poser, d'un point de vue pédagogique,

    qu'apprendre à communiquer en une langue étrangère, ce n'est pas seulement

    apprendre à “jouer" aux “questions et réponses", mais apprendre à négocier à l'aidede certaines formes et structurés linguistiques [2].

     Références bibliographiques

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    5. André-Larochebouvy, D. La conversation quotidienne [Texte]/ D. André-

    Larochebouvy. - .: Didier-Crédif, 1984.- 196 .

    6. Anscombre, J.C., Ducrot, O. L'argumentation dans la langue [Texte] / J.C.

    Anscombre, O. Ducrot. -Bruxelles, 1983.-184 .7. Cahiers de linguistique française. - Genève, 1981-1987,

    8. Cosnier, J., Décrire la conversation [Texte] / J. Cosnier, C. Kerbrat-Orecchioni. -

    Lyon: PUL, 1987. – 392 .

    9. Flahault, F. La parole intermédiaire [Texte]/ F. Flahault. - P.: Seuil, 1978. - 237 .

    10.Goffman, Е. Façons de parler [Texte] /Е. Goffman. -.: Minuit, 1987.- 278 .

  • 8/19/2019 le travail et sa valeur

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    11.Kerbrat-Orecchioni, C. Les interactions verbales [Texte] / C. Kerbrat-Orecchioni.

    - T 1-3. - P.: A. Collin, 1990-1994.

    12. Moeschler, J. Argumentation et Conversation. Eléments pour une analyse pragmatique du discours [Texte] / J. Moeschler. - P.: Hatier, 1985. -203 .

    13.Roulet, E. L' articulation du discours en français ntmrain [Texte] / E. Roulet

    et al. – ern: Peter Lang, 1985. -272 .