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Imagerie de la Femme 2006;16:169-174 Mise au point 169 © 2006. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés Mise au point L’écho-endoscopie dans le diagnostic de l’endométriose digestive Gilles Roseau 30, rue d’Astorg, 75008 Paris. Correspondance : G. Roseau, à l’adresse ci-dessus. Email : [email protected] Résumé L’échoendoscopie rectale (EER) permet de réaliser un examen endoscopique du rectum et du sigmoïde, et une étude échographique des éléments anatomiques situés au voisinage immédiat de la sonde. À ce titre, elle est indiquée chez les patientes pour lesquelles une endométriose profonde est connue ou suspectée. Elle permet de porter un diagnostic positif « d’endométriose pariétale digestive » lorsqu’une infiltration rectale et ou colique est décelée. Pour les patientes auxquelles une résection est proposée, l’EER contribue au bilan d’extension pré-opératoire, en déterminant la présence et l’étendue des atteintes digestives qui siègent habituellement au contact de l’implantation des ligaments utéro-sacrés, du torus, ou de l’ovaire gauche. L’EER participe au choix de la voie d’abord (laparotomie ou cœlioscopie) et du geste à réaliser sur le tube digestif. Mots-clés : Endométriose. Endométriose digestive. Échoendoscopie rectale. Summary Rectal Endoscopic Ultrasonography (Rectal EUS) allows endoscopic evaluation of the rectum and sigmoid colon, and surrounding structures. Therefore it is a useful examination in cases of known or suspected deep pelvic endometriosis. A diagnosis of intestinal involvement by endometriosis is confirmed when rectal EUS shows bowel wall infiltration by endometriosis, mainly next to the utero-sacral ligaments, torus uteri, or left ovary. When surgical resection is necessary, rectal EUS allows precise “staging” of digestive endometriosis, thereby helping in the choice between laparotomy or laparoscopy. Roseau G. Rectal endoscopic US in patients with endometriosis. Imagerie de la Femme 2006; 16: 169-174 Key words: Endometriosis. Bowel endometriosis. Rectal endoscopic ultrasonography. Au-delà de l’étude des parois rec- tales et sigmoïdiennes, l’écho-endos- copie par voie endo-rectale (EER) permet d’évaluer en partie le péri- toine et les anses digestives, la vessie et les culs-de-sac vaginaux, l’utérus, le vagin et les ovaires. Cette imagerie est à présent utilisée en gynécologie dans le diagnostic et le bilan d’extension de l’endométriose. Une fois rappe- lées les grandes lignes de l’endomé- triose digestive, nous décrirons pour l’EER : 1) les généralités et la techni- que de cette imagerie, 2) les bases « écho-anatomiques » pelviennes et digestives, en situation normale et pathologique, 3) la place à laquelle l’EER peut prétendre par rapport aux autres examens complémentaires dans le diagnostic topographique de l’endométriose. Endométriose pelvienne et digestive, généralités L’endométriose, définie par la présence d’endomètre en dehors de la cavité utérine et du myomètre, concerne presque exclusivement les femmes en âge de procréer. Sa pré- valence moyenne de 10 %, est en fait beaucoup plus élevée en cas de symptômes abdomino-pelviens et/ ou d’infertilité [1]. L’endométriose pelvienne peut être superficielle ou profonde selon que les lésions res- tent localisées au péritoine ou enva- hissent les structures anatomiques

L’écho-endoscopie dans le diagnostic del’endométriose digestive

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Imagerie de la Femme 2006;16:169-174

Mise au point

169

© 2006. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

Mise au point

L’écho-endoscopie dans le diagnostic de l’endométriose digestive

Gilles Roseau

30, rue d’Astorg, 75008 Paris.

Correspondance : G. Roseau, à l’adresse ci-dessus. Email : [email protected]

Résumé

L’échoendoscopie rectale (EER) permet de réaliser un examen endoscopique du rectum et du sigmoïde, et une étude échographique des éléments anatomiques situés au voisinage immédiat de la sonde. À ce titre, elle est indiquée chez les patientes pour lesquelles une endométriose profonde est connue ou suspectée. Elle permet de porter un diagnostic positif « d’endométriose pariétale digestive » lorsqu’une infiltration rectale et ou colique est décelée. Pour les patientes auxquelles une résection est proposée, l’EER contribue au bilan d’extension pré-opératoire, en déterminant la présence et l’étendue des atteintes digestives qui siègent habituellement au contact de l’implantation des ligaments utéro-sacrés, du torus, ou de l’ovaire gauche. L’EER participe au choix de la voie d’abord (laparotomie ou cœlioscopie) et du geste à réaliser sur le tube digestif.

Mots-clés : Endométriose. Endométriose digestive. Échoendoscopie rectale.

Summary

Rectal Endoscopic Ultrasonography (Rectal EUS) allows endoscopic evaluation of the rectum and sigmoid colon, and surrounding structures. Therefore it is a useful examination in cases of known or suspected deep pelvic endometriosis. A diagnosis of intestinal involvement by endometriosis is confirmed when rectal EUS shows bowel wall infiltration by endometriosis, mainly next to the utero-sacral ligaments, torus uteri, or left ovary. When surgical resection is necessary, rectal EUS allows precise “staging” of digestive endometriosis, thereby helping in the choice between laparotomy or laparoscopy.

Roseau G. Rectal endoscopic US in patients with endometriosis. Imagerie de la Femme 2006; 16: 169-174

Key words: Endometriosis. Bowel endometriosis. Rectal endoscopic ultrasonography.

A

u-delà de l’étude des parois rec-tales et sigmoïdiennes, l’écho-endos-copie par voie endo-rectale (EER)permet d’évaluer en partie le péri-toine et les anses digestives, la vessieet les culs-de-sac vaginaux, l’utérus, levagin et les ovaires. Cette imagerie està présent utilisée en gynécologie dansle diagnostic et le bilan d’extensionde l’endométriose. Une fois rappe-lées les grandes lignes de l’endomé-triose digestive, nous décrirons pourl’EER : 1) les généralités et la techni-que de cette imagerie, 2) les bases« écho-anatomiques » pelvienneset digestives, en situation normale etpathologique, 3) la place à laquellel’EER peut prétendre par rapport auxautres examens complémentairesdans le diagnostic topographique del’endométriose.

Endométriose pelvienne et digestive, généralités

L’endométriose, définie par laprésence d’endomètre en dehors dela cavité utérine et du myomètre,concerne presque exclusivement lesfemmes en âge de procréer. Sa pré-valence moyenne de 10 %, est en faitbeaucoup plus élevée en cas desymptômes abdomino-pelviens et/ou d’infertilité [1]. L’endométriosepelvienne peut être superficielle ouprofonde selon que les lésions res-tent localisées au péritoine ou enva-hissent les structures anatomiques

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L’écho-endoscopie dans le diagnostic de l’endométriose digestive

ou les organes au contact : annexes,ovaires, vessie, uretères, cloisonrecto-vaginale, tube digestif… Lessituations cliniques qui conduisent àen rechercher l’existence sontaujourd’hui établies : douleurs, dys-ménorrhée, dyspareunies et/ou sté-rilité… [1-3]. Tous les praticienssusceptibles d’être confrontés au dia-gnostic d’endométriose profonde,gynécologues, médecins généralistes,chirurgiens viscéraux, et gastroenté-rologues…, doivent en connaître laséméiologie clinique et savoir sus-pecter une éventuelle atteinte diges-tive. Selon les données de la littéra-ture, 5 à 37 % des patientes atteintesd’endométriose auraient une exten-sion digestive, dont les symptômessont inconstants et parfois erratiques[1]. Des douleurs abdominales cycli-ques éventuellement accompagnéesde troubles du transit peuvent orien-ter le diagnostic tout comme unedyschésie, une défécation doulou-reuse, voire des rectorragies cycli-ques.

Les performances de l’examenphysique et de l’imagerie classique(échographie pelvienne, tomodensi-tométrie, lavement baryté et colos-copie) sont insuffisantes dans le dia-gnostic de l’endométriose profonde etde son extension digestive [1, 4].Aussi, d’autres examens morphologi-ques plus récemment évalués sontaujourd’hui utilisés : l’échographieendovaginale (EEV), l’IRM, et l’EERtraitée dans cette mise au point [5-8].

Localisations digestives de l’endométriose pelvienne

Elles sont recto-sigmoïdiennesdans 80 à 95 % des cas. Les autreslocalisations sont, par ordre de fré-quence décroissante, l’iléon (2-16 %),l’appendice (3-18 %) et le cæcum(2 %). Les atteintes gastriques coli-ques transverses, pancréatiques etjéjunales sont exceptionnelles (< 1 %).Selon la profondeur de l’atteintepariétale digestive, on distingue desformes « séreuse » ou « musculeuse ».L’endométriose digestive est le plussouvent issue de nodules pelviens pro-

fonds provenant des ligaments utéro-sacrés ou du torus ; elles peuvent éga-lement être en relation avec uneatteinte ovarienne. Les formes séreu-ses exclusives ont volontiers l’aspect depetits nodules qui sont en fait décou-verts lors de l’exploration cœlioscopi-que ou chirurgicale. À partir de cestade initial, l’atteinte digestive peuts’accroître sous l’influence de facteurshormonaux et inflammatoires pourinfiltrer la paroi digestive « de dehorsen dedans ». La fibrose associéeentraîne des adhérences avec les élé-ments génito-pelviens au contact.

Présentes dans près de 30 % descas [2-4], ces atteintes digestives,principalement rectales et/ou coli-ques, ont longtemps été sous-esti-mées. Lorsqu’elles sont décelées, sepose le difficile choix de la voied’abord par chirurgie ou cœlioscopiedès que l’indication d’une exérèse estposée [9, 10]. Dans cette décision,l’EER a été démontrée comme unexamen clé [7, 8, 11, 12].

Le fait que la seconde atteintedigestive en fréquence soit la régioniléo-cæco-appendiculaire témoignebien d’une répartition élective del’endométriose digestive dans les por-tions les plus déclives de l’abdomen.Rarement diagnostiquées en pré-opé-ratoire, ces atteintes iléo-cæcales peu-vent poser un diagnostic différentielavec la maladie de Crohn, le cancercolique, voire une appendicite aiguë.Quant aux rares localisations anales,elles peuvent elles aussi être docu-mentées en EER [13].

Échoendoscopie par voie anorectale : matériel, technique et aspects normaux

L’EE anorectale est un examennon invasif, réalisé au mieux aprèspréparation par lavement. Le recoursà l’anesthésie se justifie si l’examenest douloureux (lésion anale hyperal-gique, endométriose à priori hautsituée dans le sigmoïde, ou notiond’adhérences). Des sondes rigidesaveugles ou des sondes souples d’EEmunies de transducteurs linéaires ou

sectoriels peuvent être utilisées pourl’examen.

Les écho-endoscopes souples équipés de sondes radiales (Olympus UM160/EUM20)

Ils sont, à notre avis, le matériel leplus approprié en cas de suspiciond’endométriose digestive (EM). Eneffet, la possibilité de placer le trans-ducteur très haut dans le sigmoïde etl’obtention d’images circonférentiel-les permettent une étude fiable dessites principaux de développement del’EM digestive. Ils sont égalementbien adaptés à l’évaluation de l’appa-reil sphinctérien anal. Les fréquencesdisponibles varient de 5 à 20 MHz ;l’étude en 5 ou 7,5 MHz est recom-mandée puisqu’elle offre des profon-deurs de champ de 3 à 5 cm. L’utilisa-tion de fréquences plus élevées(essentiellement 12 MHz) est utiledans l’évaluation de l’extension intra-pariétale (musculeuse et/ou sous-muqueuse) et pour l’étude des nodu-les pariétaux de petite taille. Lepremier temps de l’examen, « endos-copique », permet de rechercherd’éventuelles anomalies de relief oude coloration pouvant faire évoquerune compression extrinsèque oususpecter une atteinte intrapariétale.Le positionnement du transducteurd’échographie au-dessus de la char-nière rectosigmoïdienne peut se fairesous contrôle endoscopique ou écho-graphique en utilisant les principauxrapports anatomiques (en arrière, lesvaisseaux et en avant les organes géni-taux). Schématiquement, quatre prin-cipales incidences et leurs multiplesvariables permettent une étude quasiexhaustive des parois anorectales etsigmoïdiennes, et du voisinage (inci-dences sigmoïdiennes, de la charnièrerectosigmoïdienne, rectales, et ducanal anal). En pratique, l’étude écho-graphique des parois digestives et del’anatomie péri-digestive est faite defaçon simultanée au cours de multi-ples passages de sonde. La paroidigestive apparaît habituellementavec une stratification en cinq cou-ches échographiques dans le rectum

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et le sigmoïde, et en trois couches, auniveau du canal anal

(

fig. 1 et

2)

. Au-delà des parois, on visualise habituel-lement de haut en bas :

• Au-dessus de la charnière recto-sigmoïdienne, en arrière, l’aorte et laveine cave en coupes transversales ousagittales, et par mobilisation de lasonde, les pédicules iliaques et hypo-gastriques et les aires ganglionnairescorrespondantes. En avant et latérale-ment, à ce même niveau, il est parfoispossible de repérer des anses grêles oucoliques et un éventuel épanchementpéritonéal (fréquent et non spécifique).

• La charnière rectosigmoïdienneétant à nouveau franchie de haut en bas,les plis du rectum apparaissent alorsnettement. Les éléments de voisinageaccessibles aux ultrasons sont l’utérus etles ovaires, le vagin, et plus en avant, lavessie. En arrière, l’image osseuse dusacrum et celle du coccyx induisent unaspect hyperéchogène avec effacementdu faisceau ultrasonore. Le corps utérinest bien visible en cas de rétroversion ;l’isthme utérin peut être « approché » àpartir des incidences centrées sur le col,et en remontant la sonde de quelquesmillimètres.

• Plus bas, l’étude du canal analcommence avec celle du muscle rele-veur de l’anus, bien visualisé en étudesectorielle sous la forme d’un « fer à

cheval » ouvert en avant. Avec lasonde linéaire, il est repéré au niveaude son point le plus proche de la paroirectale ; ce dernier type de sondemontre parfaitement la jonction ano-rectale : zone où disparaissent les cinqcouches remplacées par trois autresavec diminution progressive del’épaisseur pariétale. Sous le plan dureleveur, l’étude du canal anal portesur les sphincters externe et interne, etles couches superficielles (muqueuse,sous-muqueuse et interfaces).

La sonde endorectale 1850 Bruel et Kjäer et sa console dédiée

Le matériel rigide le plus utiliséest la sonde endorectale 1850 Bruel etKjäer et sa console dédiée. La techni-que d’examen est semblable à la pré-cédente bien que la charnière recto-sigmoïdienne ne puisse être franchie.Du fait de la préhension directe de lasonde, sans recours possible d’un« béquillage », ce type de matériel estparfaitement adapté et limité à l’étudedu rectum et du canal anal.

Les sondes linéaires sectorielles (notamment Hitachi)

Elles ont l’intérêt de bien montrersur une même coupe la paroi rectale,celles de l’anus et du rectum distal.

Les « minisondes »

Plus récemment, une équipe aproposé l’usage de « minisondes ».L’intérêt est de pouvoir « coupler »un véritable examen endoscopique dequalité (coloscope) à une échographieendocavitaire. Ce matériel est fragileet ne peut être utilisé qu’avec uneseule fréquence [14].

Les échoendoscopes linéaires électroniques (Pentax, Olympus, Hitachi)

Ils sont moins adaptés au bilan desatteintes digestives puisqu’ils ne per-mettent pas d’accéder au sigmoïde. Ilsseraient cependant plus à même demontrer les ligaments utérosacrés[15], et ils permettent de réaliser unecytologie voir une histologie « échoguidée » [16].

Séméiologie échographique de l’endométriose rectosigmoïdienne : résultats de l’EER et principes thérapeutiques

(fig. 2-

8)

L’endométriose pelvienne pro-fonde apparaît habituellement enEER sous la forme d’images tissulai-res ou de kystes. Ces derniers répon-dent le plus souvent à des endomé-

Figure 1. Image échoendoscopique axiale, Olympus EUM 20. Canal anal : sphincter interne ( ), sphincter externe (➝), muqueuse-sous-muqueuse (➞).

Figure 2. Image échoendoscopique axiale, Olympus EUM 20. Parois rectales : cinq couches échographiques sont visible de la superficie vers la profondeur : 1re couche (hyperéchogène) = inter-face ; 2e couche (hypoéchogène) = muqueuse et sous-muqueuse (➝) ; 3e couche (hyperéchogène = interface) ; 4e couche (hypoé-chogène) = musculeuse ( ) ; et 5e (hyperéchogène) = interface.

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L’écho-endoscopie dans le diagnostic de l’endométriose digestive

Figure 3. Image échoendoscopique axiale, Olympus EUM 20. Endométriose rectale avec atteinte de la musculeuse (➝) et de la sous muqueuse ( ).

Figure 4. Image échoendoscopique axiale, Olympus UM 160. Atteinte sigmoïdienne, « nodule suspendu », vues endoscopique (➝ et échographique ( ).

Figure 5. Image échoendoscopique axiale, Olympus EUM 20. Endométriome ovarien gauche (➝).

triomes ovariens bien distincts deskystes fonctionnels de part leurcontenu (plus épais) et leur stabilité.Classiquement, les nodules ont uneprésentation « d’image tissulaire »d’échostructure hétérogène associantun fond hypoéchogène à des zoneshyperéchogènes irrégulièrement répar-ties, punctiformes ou linéaires. Lescontours sont irréguliers, la formegénérale étant ovalaire ou conique.Ces nodules siègent le plus souventlatéralement, lorsqu’ils correspon-dent à des foyers de fixation sur lesligaments utérosacrés. Ils sont parfoismédians, ce qui traduit plutôt uneatteinte du torus ou un comblementdu cul-de-sac de Douglas. Dans cecas, la présentation échographique esttrès imprécise, associant liquide,zones tissulaires, cloisons et adhéren-ces rétractiles. De taille et de localisa-tion variant de quelques millimètres àplusieurs centimètres, ces atteintespeuvent être isolées ou associées entreelles. L’atteinte digestive est le plussouvent en continuité avec d’autresnodules profonds. En cas d’atteintedu ligament utérosacré, l’infiltrationdigestive en rapport est située sur laface rectale latérale correspondante.Dans le cas d’une atteinte primitivedu torus, c’est plutôt la face antérieuredu rectum qui est concernée. Locale-ment, le caractère « rétractile » deslésions peut être noté, responsabled’adhérence avec les éléments de voi-sinage. L’infiltration intrapariétale estle plus souvent développée dans lamusculeuse digestive, l’atteinte sous-muqueuse étant plus rare. Celle-cis’accompagne volontiers de signesendoscopiques qu’il convient de savoirrechercher (voussure, aspect rigide,coloration violacée de la muqueuse).L’intérêt majeur de l’étude échogra-phique endocavitaire digestive, enprésence d’une endométriose pro-fonde, est d’apprécier les rapports avecles structures digestives au contact :apposition avec préservation du liseréhypercorrection de séparation, ouinfiltration avec atteinte de la paroirectale ou colique, typique, de« dehors en dedans », ce qui signe lediagnostic d’endométriose digestive.

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Les sensibilités et spécificités dansle diagnostic de l’atteinte musculeusedigestive sont aujourd’hui proches de100 % dans la plupart des séries. Cesperformances inégalées expliquentl’intérêt de l’EER dans le choix dutraitement. En effet, pour la plupartdes équipes, la constatation en EERd’une infiltration de la musculeuserectale ou sigmoïdienne signe l’échecd’une résection radicale par cœliosco-pie et pose donc l’indication d’unechirurgie par voie abdominale avecrésection digestive [11]. L’EER, ini-tialement validée pour le stagingdes cancers et la caractérisation destumeurs sous-muqueuses, a ainsi étéproposée pour le diagnostic positif etd’extension de l’endométriose diges-tive dès le début des années 1990.Depuis cette date, les performances etl’intérêt de l’EER dans le bilan pré-

thérapeutique de l’endométriose pro-fonde ont été confirmés. Plusieurs« séries comparatives » EER/IRMont été réalisées [17, 18]. La complé-mentarité des deux méthodes d’ima-gerie a ainsi été démontrée dès 2002dans un travail de notre équipe [17].Les moindres performances de l’IRMdans la détermination de la profon-deur de l’infiltration digestive avaientété montrées, y compris lorsqu’uneantenne endocavitaire était utilisée.Concernant les autres atteintes d’endo-métriose, ligaments utérosacrés, cloi-son rectovaginale et ovaires, l’IRMétait plus sensible que l’EER, mais ellerestait peu spécifique tandis que pourles nodules de la cloison rectovaginalesans atteinte digestive, les résultatsdes deux techniques avaient été peuconcluants (sur 9 nodules, 3 ont étéméconnus par échoendoscopie et 2

par l’IRM ; celle-ci a, en outre, été àl’origine de 5 faux positifs).

Le traitement des atteintes diges-tives diffère selon leur localisation, lethérapeute impliqué et le contextedu diagnostic de l’EM. Lorsquecelui-ci est bien établi, et en dehorsdu contexte de l’urgence, la résectionchirurgicale radicale peut s’imposerdu fait d’une stérilité ou de douleursrebelles. Bailey

et al.

[9] ont établil’effet favorable d’une chirurgied’exérèse sur l’ensemble des symptô-mes (disparition durable de touteforme de douleurs, et cure de la stéri-lité une fois sur deux). Les interven-tions réalisées chez les 130 patientsde cette étude (résections colorecta-les antérieures, excisions rectales « enpatch », appendicectomies, colecto-mies droites) s’étaient accompagnéesd’une morbidité de 4 %. Des résul-

Figure 6. Image échoendoscopique axiale, Olympus UM 160. Endométriose colique (➝) avec envahissement de la musculeuse sans envahissement de la sous-muqueuse, associée à un endomé-triome ovarien droit ( ).

Figure 7. Image échoendoscopique axiale, Olympus EUM 20. Endométriose étendue avec atteinte vésicale (➝).

Figure 8. Image échoendoscopique axiale, Olympus UM160. Nodule d’endométriose profonde juxtadigestive avec atteinte de la séreuse du côlon : épaississement hypoéchogène à minima, visible en bas, à droite de l’image ( ).

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tats voisins ont depuis été publiés pardivers auteurs qui soulignent tous ladifficulté de la dissection dans cecontexte et le risque de complicationspotentielles sous forme de perfora-tions ou de fistules [19]. Le geste chi-rurgical proposé comporte une résec-tion simple, associée ou non, selonl’importance de l’atteinte et des adhé-rences, à des résections génitales :annexe, ligament, ovaire. Si, dans unpassé encore récent, le traitement del’endométriose rectale symptomati-que relevait majoritairement d’unechirurgie d’exérèse par laparotomie,quelques études font état de résec-tions cœlioscopiques de nodulesd’endométriose rectale, voire decolectomie segmentaire, par voieendovaginale [20]. Les résultats deces études encore récentes deman-dent cependant à être validés par deplus grandes séries. Quel que soit letype d’intervention, l’EER est consi-dérée comme un préalable utile pourprédire la difficulté de la résection[11]. Elle permet en effet, avant touterésection, d’informer les patientes dugeste opératoire et de préparer aumieux celui-ci, l’intervention étantalors éventuellement programmée endouble équipe.

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