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Lecture analytique de la scène d’exposition de Dom Juan. La scène est étudiée en entier. On peut cependant distinguer : - L’éloge surprenant du tabac. - Le récit des événements et le portrait du libertin. - Compilation de questions. Etudier les aspects comiques de cette longue tirade de Sganarelle. Quel portrait Sganarelle brosse-t-il de son maître ? Quelle image le spectateur se fait-il de Don Juan à travers ce premier portrait ? Qu’apprend-il dans le même temps sur Sganarelle ? Qu’apprend-on sur Sganarelle grâce au portrait qu’il dresse de son maître ? Un prologue surprenant. Le début de la pièce s’écarte délibérément des règles de la scène d’exposition, qui doit informer sur l’identité des personnages, les éléments de l’action, le lieu et le moment (voir le cours introducteur sur le théâtre). C’est d’ailleurs ce que fera Sganarelle à l’issue de son éloge du tabac en disant : « Mais c’est assez de cette matière. Reprenons un peu notre discours ». Le valet souligne l’incongruité de son propos avant d’amorcer l’exposition proprement dite. On peut s’interroger sur le sens de cet éloge liminaire du tabac qui n’a apparemment aucun rapport avec la pièce qu’il introduit. Un discours burlesque. Molière confie les premiers et les derniers mots de sa pièce au valet bouffon dont il interpétait le rôle comme s’il voulait revendiquer l’appartenance de Dom Juan au genre de la comédie. La tirade initiale exploite plusieurs procédés comiques, à commencer par la forme de l’éloge paradoxal qui sera reprise par le héros dans ses apologies de l’inconstance et de l’hypocrisie. Cet exercice de style, hérité de l’humanisme, était une plaisanterie de lettrés consistant à louer ironiquement un objet discrédité ou trivial (ex : Erasme, L’Éloge de la folie.). Ici, le comique est accentué par la bouffonnerie de Sganarelle qui orne ses boniments d’allusions et de tournures faussement savantes. La référence à Aristote est absurde (puisque l’antiquité grecque ignorait le tabac) et elle donne ainsi le ton de la parodie burlesque. Celle-ci est renforcée par la construction rhétorique et l’éloquence de l’argumentation qui contrastent avec le sujet évoqué : Sganarelle annonce sa thèse « il n’est rien d’égal au tabac » qu’il argumente à l’aide d’une période oratoire « non seulement (…) mais encore (…) ». La portée morale du tabac est soulignée par les termes « honnêtes gens », « digne », « vertu », honnête homme », « sentiments d’honneur et de vertu ». Ainsi, l’éloge du tabac, aussi éloigné semble- t-il des attentes de l’exposition, annonce le registre de la farce bouffonne qui traversera la pièce comme pour désamorcer sa dimension inquiétante ou tragique. Une annonce déguisée. Le rapport du prologue à la pièce ne se limite cependant pas à cette fonction d’ancrage dans la comédie. De façon allusive ou détournée, l’éloge du tabac annonce la thématique du libertinage et la dimension subversive du héros. La morale du plaisir prônée par le valet à travers l’usage du tabac, n’est pas sans rappeler l’hédonisme de Dom Juan. L’usage du tabac était condamné par les dévots de la Compagnie du Saint-Sacrement. Ainsi, dès les premiers

Lecture Analytique de La Scene d Exposition de Dom Juan

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  • Lecture analytique de la scne dexposition de Dom Juan. La scne est tudie en entier. On peut cependant distinguer :

    - Lloge surprenant du tabac. - Le rcit des vnements et le portrait du libertin. -

    Compilation de questions. Etudier les aspects comiques de cette longue tirade de Sganarelle. Quel portrait Sganarelle brosse-t-il de son matre ? Quelle image le spectateur se fait-il de Don Juan travers ce premier portrait ? Quapprend-il dans le mme temps sur Sganarelle ? Quapprend-on sur Sganarelle grce au portrait quil dresse de son matre ? Un prologue surprenant. Le dbut de la pice scarte dlibrment des rgles de la scne dexposition, qui doit informer sur lidentit des personnages, les lments de laction, le lieu et le moment (voir le cours introducteur sur le thtre). Cest dailleurs ce que fera Sganarelle lissue de son loge du tabac en disant : Mais cest assez de cette matire. Reprenons un peu notre discours . Le valet souligne lincongruit de son propos avant damorcer lexposition proprement dite. On peut sinterroger sur le sens de cet loge liminaire du tabac qui na apparemment aucun rapport avec la pice quil introduit. Un discours burlesque. Molire confie les premiers et les derniers mots de sa pice au valet bouffon dont il interptait le rle comme sil voulait revendiquer lappartenance de Dom Juan au genre de la comdie. La tirade initiale exploite plusieurs procds comiques, commencer par la forme de lloge paradoxal qui sera reprise par le hros dans ses apologies de linconstance et de lhypocrisie. Cet exercice de style, hrit de lhumanisme, tait une plaisanterie de lettrs consistant louer ironiquement un objet discrdit ou trivial (ex : Erasme, Lloge de la folie.). Ici, le comique est accentu par la bouffonnerie de Sganarelle qui orne ses boniments dallusions et de tournures faussement savantes. La rfrence Aristote est absurde (puisque lantiquit grecque ignorait le tabac) et elle donne ainsi le ton de la parodie burlesque. Celle-ci est renforce par la construction rhtorique et lloquence de largumentation qui contrastent avec le sujet voqu : Sganarelle annonce sa thse il nest rien dgal au tabac quil argumente laide dune priode oratoire non seulement () mais encore () . La porte morale du tabac est souligne par les termes honntes gens , digne , vertu , honnte homme , sentiments dhonneur et de vertu . Ainsi, lloge du tabac, aussi loign semble-t-il des attentes de lexposition, annonce le registre de la farce bouffonne qui traversera la pice comme pour dsamorcer sa dimension inquitante ou tragique. Une annonce dguise. Le rapport du prologue la pice ne se limite cependant pas cette fonction dancrage dans la comdie. De faon allusive ou dtourne, lloge du tabac annonce la thmatique du libertinage et la dimension subversive du hros. La morale du plaisir prne par le valet travers lusage du tabac, nest pas sans rappeler lhdonisme de Dom Juan. Lusage du tabac tait condamn par les dvots de la Compagnie du Saint-Sacrement. Ainsi, ds les premiers

  • mots de sa pice, Molire annonce par ce bais sa volont de braver nouveau ses ennemis. La polmique porte galement sur les valeurs morales et lidal de lhonnte homme : en faisant du tabac la source des sentiments dhonneur et de vertu , Sganarelle ridiculise demble ces valeurs qui seront bafoues par le hros libertin. Cependant, partir de Reprenons un peu notre discours , conformment aux rgles de fonctionnement du thtre, nous avons dans ce dbut de pice toutes les caractristiques dune scne dexposition. Attention, il faut utiliser adroitement les lments thoriques (double situation dnonciation, urgence propre au thtre, statut des personnages) et les lier aux lments prsents dans le texte. I Les caractristiques dune scne dexposition.

    - Les lments dune intrigue sont clairement et rapidement poss. Le conflit est dfini : il sagit dun conflit amoureux Done Elvire surprise de notre dpart , les saints nuds du mariage .

    - Deux personnages essentiels sont prsents par lintermdiaire de leurs valets Done Elvire, ta matresse , mon matre Dom Juan .

    - Dj vont apparatre les traits de caractre de ces deux personnages, trs opposs : la puret de Done Elvire aux chastes feux de Done Elvire soppose lambigut de Dom Juan tu ne sais pas encore quel homme est Dom Juan .

    On voit certains indices le caractre un peu artificiel de la scne dexposition : - In media res reprenons : quelque chose existait avant, ce que disent les deux

    hommes est la consquence dune action antrieure inconnue du public (et qui convient de lui rappeler, do les rcits alterns des deux hommes.

    - Inter nos = entre nous, ce qui est savoureux puisquil sagit, in fine, d une reprsentation publique.

    - La redite de paroles dj prononces. - La rfrence la colre du Ciel qui trace le destin de Dom Juan et qui prpare le

    dnouement fatal.

    II Lopposition des caractres. La scne progresse partir de lopposition des discours et des caractres des deux valets avec :

    - Celui qui sait (Sganarelle) apporte des rponses tout en cherchant se protger je connais , je gagerais , lexprience , tu ne sais pas encore : verbe de connaissance, sens de la formule grand seigneur mchant homme mme si elle est maladroite(laspect comique de Sganarelle apparat ds lexposition, il est celui qui mlange le noble le Ciel au superstitieux le loup- garou = , longueur de la prise de parole, ponctuation, type des phrases (dclarative pour Sganarelle, interrogative pour Gusman).

    - Celui qui ignore stonne, fait rfrence aux rgles du mariage une infidlit ? , les saints nuds du mariage .