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Les apprentis Madoff du continent - · PDF fileExtrait du Burkinapmepmi.com - le portail des PME / PMI au Burkina Faso ... En avril au Togo, les responsables de Double Star Global

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Les apprentis Madoff du continent

Extrait du Burkinapmepmi.com - le portail des PME / PMI au Burkina Faso

http://www.burkinapmepmi.com/spip.php?article1608

Les apprentis Madoff du

continent- Actualité -

Date de mise en ligne : lundi 12 juillet 2010

Description :

De la promesse de gains mirobolants à la perte de ses placements, il n'y a qu'un pas que des milliers d'Africains, d'Abidjan à N'Djamena, ont franchi bien malgré

eux. Face à des escrocs experts en marketing, les États peinent à trouver la parade.

C'est un tract de mauvaise qualité, mal imprimé et desservi par un design approximatif. Rien de bien rassurant en apparence pour un salarié ou un retraité

désireux de placer son épargne. Et pourtant !Burkinapmepmi.com - le portail des PME / PMI au Burkina Faso

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Les apprentis Madoff du continent

De la promesse de gains mirobolants à la perte de ses placements, il n'y a qu'un pas que des milliers d'Africains,d'Abidjan à N'Djamena, ont franchi bien malgré eux. Face à des escrocs experts en marketing, les États peinent àtrouver la parade.

C'est un tract de mauvaise qualité, mal imprimé et desservi par un design approximatif. Rien de bien rassurant enapparence pour un salarié ou un retraité désireux de placer son épargne. Et pourtant ! Le document de présentationde Havila, qui s'annonce comme une « structure » proposant des investissements « dans le cadre de la lutte contrela pauvreté », a un effet ravageur au sein de la classe moyenne béninoise.

À première vue, les produits financiers présentés par cette organisation sont très intéressants. Après avoir bloqué lasomme de 400000 F CFA (610 euros) pendant un an, l'épargnant gagnerait 50000 F CFA par mois pendant troisans, soit au final une somme de 1,8 million de F CFA. Le groupe La Baraka, au Bénin également, propose quant à luide gagner 6,6 millions de F CFA en six mois, après avoir bloqué la somme de 1 million de F CFA pendant un an.

Tour de passe-passe

La ruée des petits épargnants vers ces produits financiers aux incroyables taux d'intérêt est telle que banques etinstitutions de microfinance s'en trouvent déstabilisées. « Des comptes dormants sont complètement vidés par leurspropriétaires, qui vont placer l'argent dans ces structures », explique Ulrich Bankolé, de l'Association professionnelledes systèmes financiers décentralisés du Bénin. Plus grave : certains usagers s'endettent auprès de leurs banquierspour aller déposer l'argent emprunté dans ce qu'ils considèrent comme des machines à cash inespérées.

Par quel tour de passe-passe ces étranges acteurs de la finance peuvent-ils proposer des gains aussi élevés ?Interrogés par leurs clients, les gestionnaires de ces structures associatives expliquent que l'argent récolté financedes projets à rentabilité très élevée dans les secteurs des mines ou des hydrocarbures. L'un d'entre eux écrit dansson tract que, « après plusieurs mois de recherche et de négociation avec ses partenaires occidentaux », il offreenfin « l'occasion d'investir dans les secteurs industriels et des télécommunications les plus rentables et à fortecroissance ». Aucune mention, bien sûr, des valeurs dans lesquelles l'argent des épargnants serait placé. Juste unevague mention : « Votre investissement est protégé par une compagnie d'assurances française. »

Ancien directeur des opérations de Bourse au Conseil régional de l'épargne publique et des marchés financiers,organe de régulation dépendant de l'Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), le banquier WilfriedTamegnon ne décolère pas. « Ces gens s'engagent dans des montages de Ponzi similaires à celui utilisé parBernard Madoff aux États-Unis : les derniers paient pour les premiers. Et quand la base de la pyramide se rétrécit,c'est la fin du jeu », explique-t-il. Le principe de cette pyramide de Ponzi est simple : l'escroc finance ses premiersclients avec l'argent déposé par les suivants... si bien que le système s'écroule dès que les épargnants cessentd'affluer de manière exponentielle.

Talents en marketing

Quelques douloureuses expériences devraient inciter à la circonspection. Le 2 mai, des centaines de Soudanaisayant souvent vendu leurs biens pour gagner plus grâce à des systèmes financiers similaires ont manifesté àEl-Facher, au Darfour, pour réclamer une compensation. En avril au Togo, les responsables de Double Star GlobalInvestment, une société munie de documents falsifiés censés attester de son autorisation d'installation, ont réussi àcollecter plus de 863 millions de F CFA en dix jours. Avant de disparaître... Et, en Côte d'Ivoire­, la quasi-totalité desdizaines de structures informelles de placement d'argent créées en 2005 et 2006 ont fermé leur porte. En général,leurs dirigeants se sont enfuis, laissant des dizaines de milliers d'épargnants dans la détresse. Manifestations de rue,

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protestations par voie de presse, création de collectifs de victimes n'ont rien pu y faire.

Qui sont les promoteurs de ces activités financières illicites ? Personne ne le sait, mais leurs talents en marketingsont indéniables. L'exemple des premiers souscripteurs qui ont reçu l'argent promis et acheté des biens deconsommation qu'ils n'auraient autrement pas pu s'offrir marque les esprits. « Les nantis n'ont rien de plus que vous; sauf qu'ils sont plus courageux et moins incrédules », professe un tract au Bénin.

Prédicateurs de la prospérité

Dans les pays de l'UEMOA, aucune étude sérieuse n'a été publiée à ce sujet. À l'Association professionnelle desbanques et établissements financiers de Côte d'Ivoire, on ne souhaite pas s'étendre sur la question : « Nous n'avonspas enquêté là-dessus. » À Abidjan, nombre de responsables des maisons de placement d'argent étaient desprédicateurs, surfant sur la « théologie de la prospérité ». « Nous avons été rassurés par une de ces structuresnotamment parce qu'elle était dirigée par un pasteur », explique un couple d'enseignants qui a perdu beaucoupd'argent dans des placements informels.

Les lacunes juridiques et la corruption sont des facteurs aggravants. À cet égard, l'histoire de Théodore KouaméN'Guessan, aujourd'hui derrière les barreaux de la Maison d'arrêt et de correction d'Abidjan, est exemplaire. Celuiqui, protégé par des bodyguards, camouflait ses activités derrière le paravent d'un « mouvement patriotique » enCôte d'Ivoire a pu diffuser sur une chaîne d'État des publicités vantant les mérites de ses activités - illégales - et abénéficié plus d'une fois de protections occultes qui lui ont évité la prison...

Mais face à l'ampleur prise par le phénomène, les États et les institutions financières et de régulation de la région(BCEAO, Commission bancaire, etc.) ne pourront pas rester longtemps sans agir. « Il n'est pas irréaliste des'attendre à une action coordonnée des régulateurs, non seulement pour attirer l'attention du public sur le fait queces structures de placement ne sont contrôlées par personne, mais aussi pour conduire des investigations visant àfaire la lumière sur l'utilisation des capitaux collectés », estime Wilfried Tamegnon. Mais ces institutions y ont-ellestoujours intérêt ? « Dans quelques pays, certaines investissent elles-mêmes dans ces structures, ce qui soulève dessituations de conflit d'intérêts, relève un acteur du marché financier ouest-africain. Mais la réalité, c'est que lorsque lemontage s'écroule, elles tirent presque toujours leur épingle du jeu grâce à leur position et à leurs relations. Ce sontdonc les populations à la base qui finissent par en pâtir. »

Par Théophile Kouamouo, à Abidjan

Source : jeuneafrique.com

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