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• Chargé d'études à la CAF laine. ETUDES LOCALES Les bénéficiaires du travail social à la caisse d'Allocations familiales d'Ille-et-Vilaine Gérard Bideau La caisse d'Allocations familiales d'Ille-et-Vilaine a souhaité mieux connaître le profil des bénéficiaires des interventions de travail social (service social et économie sociale et familiale). L'étude montre que si les bénéficiaires potentiels sont par des familles avec enfants, les ruptures familiales, la précarité, le chômage, le type de certaines prestations légales ou extralégales, mais aussi le lieu d'exercice professionnel interviennent en élargissant le public à des personnes isolées ou à des personnes sans enfant, et caractérisent ainsi la population bénéficiaire de chaque mode d'intervention. Les familles de plus de trois enfants sontfréquentes chez les bénéficiaires de l'économie sociale etfamiliale, confirmant ainsi sa vocation familiale, alors que celles qui relèvent de la précarité et de l'accès au droit en première urgence dépendent du service social. 1 epuis 1992, le service des études de la caisse d'Allocations familiales (CAF) d'Ille-et-Vilaine produit chaque année des statistiques sur les bénéficiaires des interventions des tra- vailleurs sociaux de l'organisme. Le travail social recouvre trois types d'interventions professionnelles: celles des conseillères en économie sociale et familiale, celles des assistantes sociales Ge service social) et celles des travailleuses familiales. L'objectif de cette étude, qui concerne l'année 1996, est de caractériser le profil des bénéficiaires des deux premiers types d'interventions. Les interventions des travailleuses familiales, majoritairement gérées par des associa- tions, ne font pas partie de l'étude (encadré p. 39). Les conseillères en économie sociale et familiale sont chargées d'accompagner les individus dans_ les de la vie quoti- dienne par des actions de formation et d'in- formation En Ille-et-Vilaine, elles dévelop- pent leur action dans le cadre d'un centre social et participent aux projets de cet éta- blissement, notamment dans le cadre d'ac- tions collectives. EUes sont des personnes ressources pour tout public en situation de précarité et contribuent au maintien du lien social en s'appuyant sur les évolutions législatives récentes (loi sur le RMI et le surendettement). Les assistantes sociales accompagnent les individus et les groupes dans les démar- · ches d'insertion et contribuent à prévenir · les facteurs d'inadaptation sociale et d'ex- clusion. Leur rôle de médiateur entre les usagers et les institutions les place de fait au coeur de la mise en oeuvre des politiques d'action sociale. En 1996, année sur laquelle reposent les statistiques présentées dans . cette étude, elles interviennent 4ans le 33 RECHERCHES N' IJI!- 11188

Les bénéficiaires du travail social à la caisse … profil des bénéficiaires des interventions de travail social (service social et économie sociale et familiale). L'étude montre

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• Chargé d'études à la CAF d'llle~t-Vi­laine.

ETUDES LOCALES

Les bénéficiaires du travail social à la caisse d'Allocations familiales d'Ille-et-Vilaine

Gérard Bideau •

La caisse d'Allocations familiales d'Ille-et-Vilaine a souhaité mieux connaître le profil des bénéficiaires des interventions de travail social (service social et économie sociale et familiale). L'étude montre que si les bénéficiaires potentiels sont par n~fure des familles avec enfants, les ruptures familiales, la précarité, le chômage, le type de certaines prestations légales ou extralégales, mais aussi le lieu d'exercice professionnel interviennent en élargissant le public à des personnes isolées ou à des personnes sans enfant, et caractérisent ainsi la population bénéficiaire de chaque mode d'intervention. Les familles de plus de trois enfants sontfréquentes chez les bénéficiaires de l'économie sociale etfamiliale, confirmant ainsi sa vocation familiale, alors que celles qui relèvent de la précarité et de l'accès au droit en première urgence dépendent du service social.

1 epuis 1992, le service des études de la caisse d'Allocations familiales (CAF) d'Ille-et-Vilaine produit

chaque année des statistiques sur les bénéficiaires des interventions des tra­vailleurs sociaux de l'organisme. Le travail social recouvre trois types d'interventions professionnelles: celles des conseillères en économie sociale et familiale, celles des assistantes sociales Ge service social) et celles des travailleuses familiales. L'objectif de cette étude, qui concerne l'année 1996, est de caractériser le profil des bénéficiaires des deux premiers types d'interventions. Les interventions des travailleuses familiales, majoritairement gérées par des associa­tions, ne font pas partie de l'étude (encadré p. 39).

Les conseillères en économie sociale et familiale sont chargées d'accompagner les individus dans_ les d9~aines de la vie quoti-

dienne par des actions de formation et d'in­formation En Ille-et-Vilaine, elles dévelop­pent leur action dans le cadre d'un centre social et participent aux projets de cet éta­blissement, notamment dans le cadre d'ac­tions collectives. EUes sont des personnes ressources pour tout public en situation de précarité et contribuent au maintien du lien social en s'appuyant sur les évolutions législatives récentes (loi sur le RMI et le surendettement).

Les assistantes sociales accompagnent les individus et les groupes dans les démar- · ches d'insertion et contribuent à prévenir · les facteurs d'inadaptation sociale et d'ex­clusion. Leur rôle de médiateur entre les usagers et les institutions les place de fait au cœur de la mise en œuvre des politiques d'action sociale. En 1996, année sur laquelle reposent les statistiques présentées dans . cette étude, elles interviennent 4ans le ~ch:e

33 RECHERCHES ET~ N' IJI!- 11188

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1 : · • • : • • ~

•• • 1 . .

· Indicateurs statistiques et catégorie"S' adntitl.istratives

' , r, .. . . A la différence du fichier réduit exhaustif des CAF qui est un fichier normé à finalité statistique, l'interrogation des bases lnfocentre fait appel à des catégories administratives souvent hermétiques servant à la liquidation des dossiers allocataires. Ces bases de données composées de 700 rubriques sont, en effet, une copie condensée des 5 355 variables des bases de ges~on des organismes. La structure de cette base de données est elle-même le reflet d'une. législation en évolution dont chacun s'accorde à reconnaître la complexité. Il s'est donc agi de dégager de ces informations des indicateurs sociodémographiques sous une forme qui en permette un usage partagé et sans ambiguïté.

L'évaluation des ressources basée sur le quotient familial dans la définition de la CNAF a également ses limites qui ont déjà été soulignées dans des groupes de travail de l'institution. Cet indicateur anéanmoinsl'avantaged'êtreconnuetintégréparlesdifférentsacteursetpartenairesinstitutionnels de l'organisme. Cet état de fait proprement local est le résultat d'une politique de communication de la CAF qui utilise depuis 1982 cet indicateur dans ses relations avec ses partenaires, notamment pour mesurer les niveaux de ressources des allocataires relevant de son action sociale. Les conditions de lisibilité sont réunies et portées par les travailleurs sociaux eux-mêmes.

Les produits statistiques doivent être clairs et compréhensibles par tous et permettre un suivi de l'action dans le temps ainsi qu'un cadrage avec des données issues de la statistique publique. Le choix est de retenir les catégories suivantes : • états matrimoniaux détaillés ; • situation familiale et nombre d'enfants ; • ressources en fonction du quotient familial CNAF et de la situation familiale; • activité de l'allocataire et de son conjoint à partir de la nomenclature de l'INSEE appliquée à la base allocataire : actif occupé, actif au chômage, inactif ; • état détaillé des prestations de logement par situation familiale et nature du logement (parc HLM ou privé) ; ' • situation du dossier par rapport à l'ensemble des prestations gérées par la CAF.

Chaque série est distribuée par territoire d'intervention, l'échantillon total pouvant faire l'objet d'interrogations complémentaires (structure d'âge des allocataires, territorialisation communale et infracommunale, partition de l'échantillon sur des critères particuliers comme l'activité et le nombre d'enfants).

A l'issue des traitements effectués au mois de janvier sous lnfocentre, les séries statistiques sont donc transmises à chaque service. Elles concernent douze territoires d'intervention pour le service d'économie sociale et familiale, vingt-quatre territoires pour le service social. Chaque travailleur social qui a effectué son recensement reçoit en retour une image statistique de la population allocataire qui a bénéficié de son intervention.

Une réunion de confrontation entre le service des études et les services d'action sociale permet, chaque année, des échanges complémentaires afin d'optimiser les traitements, de s'adapter à l'évolution des pratiques et de confronter l'approche statistique à la connaissance, par nature plus étendue, qu'ont les travailleurs sociaux de leur public.

RECHERCHES ET PRSvls/oNS N'55 - fUll

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de la polyvalence de secteur (1), que l'on peut définir comme un mode d'interven­tion global sur un territoire déterminé au niveau départemental : le centre départe­mental d'action sociale. Leur champ d'in­tervention les confronte à toutes les situa­tions d'urgences individuelles, et à la mise en œuvre des réponses appropriées : me­sures administratives, contrats d'insertion, instruction des demandes d'aides financiè­res extralégales, d'intervention des fonds de solidarité logement, accès aux droits.

Un travail social ciblé géographiquement

A partir des données statistiques désormais disponibles sur l'action sociale, tant sur les bénéficiaires de prestations (monétaires) extralégales que sur les bénéficiaires des prestations en nature (voir encadré), il est possible de dresser un tableau global des bénéficiaires de l'action sociale de la CAF d'Ille-et-Vilaine. Le tableau 1 (p. 36) présente pour chaque catégorie élémentaire, et par ordre décroissant, le nombre de bé­néficiaires en 1996, rapporté (en pourcen­tage) au total des bénéficiaires effectifs d'action sociale. En 1996,4125 personnes ont bénéficié d'une intervention d'un tra-

ETUDES LOCALES

vailleur social (en vert dans le tableau), soit 27% des 15 292 bénéficiaires d'action so­ciale d'Ille-et-Vilaine. Si les prestations extralégales d'action sociale sont accessi­bles à toutes les familles d'Ille-et-Vilaine, il n'en va pas de même pour l'intervention des travailleurs sociaux, qui est géographi­quement ciblée et ne concerne pas la totalité du département.

Dans le cadre de la polyvalence de secteur, le service social gérait, en 1996, trois centres départementaux d'action sociale sur la partie sud de Rennes, où le parc HLM est important. Cette aire géographique com­prend une zone urbaine sensible et une zone de redynarnisation urbaine entourées par un habitat diversifié. Ces territoires regroupent6 920 allocataires bénéficiant de prestations familiales, distribués sur vingt­deux secteurs d'intervention (un secteur correspondant à un sous-territoire géré par un travailleur social). De ce service social, 2 955 allocataires ont bénéficié d'une inter­vention. Ces 43 % de la population alloca­taire résidant sur ce territoire représentent un cinquième de l'ensemble des bénéficiai­res de l'action sociale de la CAF d'Ille-et­Vilaine.

L'action du service d'économie sociale et

Prestations légales, prestations extralégales d'action sociale et travail social

En 1996, les caisses d'Allocations familiales (CAF) géraient 20 "prestations légales», 7 n'étant pas soumises à conditions de ressources. Ces prestations concernaient respectivement la naissance, l'entretien et la garde des enfants (9 prestations), le logement (5), la monoparen­talité (2), l'invalidité (2), la précarité (RMI) et la vieillesse (1). Elles couvrent une part étendue du risque social bien au-delà des seules allocations familiales, ce qui n'a pas toujours été le cas. Ainsi, en 30 ans en Ille-et-Vilaine, la part des seuls bé­néficiaires d'allocations familiales est passée de 77 o/o à 38 o/o, tandis que dans le même temps le nombre d'allocataires a triplé, passant de 51 500 à 151000. Les "prestations extralégales d'action sociale», sous la forme d'aides financières directes aux fa­milles, sont de nature différente tant par l'origine des fonds que par les conditions d'attribution va­riablessuivantlesorganismes,quidisposentd'une certaine autonomie dans ce domaine. Elles restent toutefois réservées aux f~lles avec enfants (bé-

néficiaires potentiels d'action sociale) et prennent généralement la forme d'aides aux vacances et aux loisirs, de secours et de prêts d'honneur. Les fonds d'action sociale participent également à des actions partenariales, dans le cadre de dispositifs comme le fonds de solidarité logement dont certaine~~ CAF, comme celle de Rennes, assurent également la gestion. Parallèlement à ces prestations en espèces, le «travail social »estuneprestationennaturemise en œuvre par des travailleurs sociaux. Ceux-ci développent leur action localement auprès de la population d'un secteur géographique dans une finalité d'insertion et de développement social. Les modes d'intervention sont variés : ils peuvent être relatifs à des secteurs géographiques donnés, des catégories de population particulières, individuels ou collectifs, en gestion directe ou avec des partenaires (commune, conseil général, préfecture, etc.). Leurs trois composantes sont le service social, l'économie sociale et familiale et les travailleuses sociales.

35 RECHERCHESET~N" 55· 1888

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Tableau 1 -Bénéficiaires de l'action sociale par catégorie d'intervention (1)

Nombre de o/o du total des Catégories d'intervention bénéficiaires bénéficiaires

(2) d'action sociale

Secours 3444 22,5

Vacances familiales individuelles 3 219 21,1

Service social 2 955 19,3

Centres de loisirs sans hébergement 2246 14,7

Centres collectifs de vacances 1907 12,5

Fonds de solidarité logement : prêts accès 1795 11,7

Fonds de solidarité logement: secours accès . 1766 11,5

Economie sociale et familiale 1442 9,4

Centres familiaux de vacances 1160 7,6

Prêts mobiliers et ménagers 922 6,0

Fonds de solidarité logement : secours maintien 744 4,9

Prêts d'honneur 737 4,8

Fonds de solidarité logement : prêts maintien 359 2,3

Bourses BAF A 191 1,2

TravaiUeuses familiales CAF (3) 78 0,5

Autres vacances 55 0,4

Aide décès du soutien de famille 49 0,3

Prêts amélioration de l'habitat 22 0,1

Sous-Total (2) Bénéficiaires travail social 4125 27,0

Total (2) Bénéficiaires action sociale 15292 100,0

Source: FRECAF 1996- CAF d'ill~t-VIlaine. (1) Le SeTTiice socilll, l'lconomie sociale et fomilillle et les trllt1ailleuses fomilillles représentent les catégories non finoncitres propres au travail sociiJl, les autres rubriques correspondent aux prestations extralégales. n cont~ient de prkiser que les blnificillires de l'action socillle frlquentant les lquipements sociiJux girls pt~r la CAF et ceux accueillis p4r le SeTTiice sociol splcilllisl et les relais assistantes maternelles ne sont ptiS pris en compte. (2) u~ meme famille ou un meme individu peut bmlficier de plusieurs types d'intert/entions, les btnificillires ne sont comptés qu'une seule fois dans le sous-total et le total. (3) Trllt1ailleuses fomilillles dépendant directement de la CAF, il l'erdusion de celles travaillant dans des associlltions.

RECHERCHESET~N' a5· f888

Page 5: Les bénéficiaires du travail social à la caisse … profil des bénéficiaires des interventions de travail social (service social et économie sociale et familiale). L'étude montre

ETUDES LOCALES

Graphique 1 - Profil comparé des bénéficiaires du travail social selon le nombre d'enfants

70

60

50

40

o/o

30

20

10

0

Oenfant t enfant

O Serviœ social

Fa Economie sociale et famlliale O Allocataires non étudlants en DJe-et-Vilaine • llénéfidaires potentiels Action sociale en IDe-et-Vilaine

48

2enfants 3 enfants 4 enfants et +

Source : Bases Infoœntre et FRECAF 1996 - CAF d'ille~-Vilaine.

familiale se développe quant à eUe sur les villes de Rennes, Saint-Malo, Fougères, Vitré et Redon, pour une population globale de 9 437 allocataires bénéficiant de prestations familiales, répartie en douze secteurs d'in­tervention.

L'étude n'a en fait concerné que les alloca­taires présents dans la base de gestion des prestations légales au moment du traite­ment informatique, c'est-à-dire bénéficiant d'un droit payable pour une prestation légale, soit 2 740 allocataires pour le service social et 1372 allocataires pour le service d'économie sociale et familiale (sur respec­tivement 2 955 et 1442 bénéficiaires réels). L'analyse compare le profil des bénéficiai­res des deux types d'intervention de travail social à celui de deux populations de réfé­rence : l'ensemble des allocataires de la CAF d'Ille-et-Vilaine, d'une part, les bénéficiai­res potentiels d'action sociale, d'autre part. L'action sociale des CAF a une vocation familiale. Ses bénéficiaires potentiels sont

par nature des familles avec enfants. En Ille-et-Vilaine, près de la moitié d'entre eux ont deux enfants, et un quart trois enfants ou plus.

Quatre bénéficiaires sur dix n'ont pas d'enfant

Cependant, on rencontre parmi les béné­ficiaires d'une intervention du travail social des allocataires sans enfant: 19 o/o des bénéficiaires d'une intervention d'une conseillère en économie sociale et familiale et 41 o/o des bénéficiaires d'une interven­tion de service social, ce qui rapproche ces derniers de l'ensemble des allocataires sur ce point (graphique 1). La très forte pro­portion dans ce deuxième cas peut s'expli­quer en partie par Le fait qu'en 1996, le service social était en convention avec le conseil général d' Ille-et-Vilaine, dans le cadre de La polyvalence de secteur. Indé­pendamment de cette polyvalence, la CAF

37 RECHERCHES ET~ M' M - 1N8

Page 6: Les bénéficiaires du travail social à la caisse … profil des bénéficiaires des interventions de travail social (service social et économie sociale et familiale). L'étude montre

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est confrontée à une population précaire qui comprend beaucoup d'isolés (bénéfi­ciaires du RMI par exemple).

Il en est de même pour les interventions des conseillères en économie sociale et familiale qui s'exercent dans le cadre d 'un centre social et qui de ce fait touchent des popu­lations avec enfants ou non. Bien qu'allo­cataires, ils ne relèvent théoriquement pas de l'action sociale familiale des CAF. Ce­pendant, les isolés bénéficiant des trans­ferts sociaux gérés par la CAF (prestations de logement, RMI et allocation aux adultes handicapés) se trouvent dans une situation objective marquée par un faible niveau de ressources ainsi qu'un isolement social et relationnel (2). n paraJ"t difficile d'écarter de l'intervention des travailleurs sociaux de telles populations.

Parmi les familles avec enfants, celles qui bénéficient d'une intervention du service social comptent plutôt peu d'enfants, alors que celles qui bénéficient d'une interven-

tion d'une conseillère en économie sociale et familiale sont plus souvent des familles nombreuses. 17 %des familles recevant des interventions de travail social et 31 % de celles bénéficiant de conseillères en écono­mie sociale et familiale ont trois enfants ou plus.

Une proportion élevée d'Isolés

Les divorces et séparations de fait sont près de trois fois plus nombreux pour l'un ou l'autre des types d ' intervention du travail social que chez les allocataires ou les bé­néficiaires potentiels d'action sociale en Ille-et-Vilaine. 40 % seulement des béné­ficiaires du service social et 54 % des béné­ficiaires d'une intervention d 'une conseil­lère en économie sociale et familiale sont des couples, mariés ou non, pour respec­tivement 60 % des allocataires non étu­diants d'Ille-et-Vilaine et 85 % des béné­ficiaires potentiels d'action sociale (graphique 2).

Graphique 2 - Profil comparé des bénéficiaires du travail social selon la situation matrimoniale

D Service social m Economie sociale et familiale fJ Allocataires non étudiants en ille-et-Vilaine • Bénéficiaires potentiels Action sociale en ille-fl-Vilaine

"!o

24

20

10

0

Source : Bases Infocentre et PRECAF 1996 - CAF d 'ille-et-Vilaine.

RECHEifCHES ET~ Ir -'5 · fllll

Page 7: Les bénéficiaires du travail social à la caisse … profil des bénéficiaires des interventions de travail social (service social et économie sociale et familiale). L'étude montre

Bénéficiaires d'une intervention du travail social : définition d'une méthode de collecte

ETUDES LOCALES

L'objectif de l'étude est de conruu'lre les populations touchées par un exercice professionnel

spécifique, le travail social, dans le cadre des orientations de la politique sociale et familiale de

la CAF d'Ille-et-Vilaine, et non de mesurer l'impact global d'une action élargie qui relève d'une

autre approche.

Contrairement aux bénéficiaires des prestations légales ou extralégales versées par les caisses

d'Allocations familiales (CAF) ,!~identification des bénéficiaires du travail social n'est pas enregistrée

automatiquement au moment de l'intervention de travail social et doit donc faire . l'objet d'un

recensement par les travailleurs sociaux eux-mêmes.

Les bénéficiaires du travail social perçoivent généralement des prestations légales et sont ainsi

identifiés dans les bases de gestion de la CAF qui contiennent un certain nombre de caractéristiques

des allocataires (âge, situation de famille, revenus, prestations touchhs, etc.). Le matricule

allocataire (numéro d'identification informatique) constitue le lien qui permet la mise en relation

de la population bénéficiaire du travail social avec les informations présentes dans ces bases de

gestion. Produire des statistiques fiables sur ces bénéficiaires supposait donc que les travailleurs

sociaux se mobilisent sur le terrain pour effectuer la collecte de ces matricules, tout en garantissant

la confidentialité et la pertinence des informations. L'implication de l'encadrement du service

social et de l'économie sociale et familiale a donc été déterminante et a permis d'établir des règles

de gestion claires des différentes procédures, connues et acceptées de tous.

L'intervention des travailleurs sociaux se développe en lien étroit avec les usagers sur leur lieu

de vie et peut se présenter sous les aspects les plus divers indépendamment de la structure des

services ou de la forme individuelle ou collective de leur action.

Le service d'économie sociale et familiale, qui s'est impliqué dans cette collecte d'information

à partir de 1992, a défini ses propres critères : seuls sont recensés les allocataires bénéficiaires

d'une intervention dans le cadre d'activités collectives structurées ou d'une intervention

professionnelle individuelle. Les contacts ponctuels ainsi que la participation à des actions

d'information ou d'animation globale sont exclus.

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Le service social a effectué son recensement mabiculaire l'année suivante à partir de la «fiche­

famille ,, (dossier de suivi individuel de l'allocataire géré par l'assistante sociale) : cette identification

se fait dès qu'une prise en charge professionnelle de l'allocataire est exercée, ou à la suite de

cinq contacts successüs, signes d'un suivi conséquent de la famille.

Les 78 bénéficiaires figurant dans le tableau 1 sont le fait d'interventions de travailleuses familiales

dépendant directement de la CAF d'Ille-et-Vilaine et ne représentent qu'une petite fraction de

l'ensemble des bénéficiaires réels de ce type d'intervention, qui est majoritairement géré par des

associations. Pour cette raison l'étude n'aborde pas le profil des bénéficiaires de ces interventions.

Cette méthode de collecte présente trois avantages importants :

• la constitution de la population à étudier est déterminée de façon homogène par les professionnels

eux-mêmes;

• le recueil du matricule est légitimé auprès de l'allocataire par la forme même de l'intervention,

ce qui n'aurait pas été le cas s'il avait également concerné de simples demandes de renseignements

ou des participations ponctuelles à une animation globale (bourses aux vêtements, etc.) ;

• le fait de limiter ce recueil dans le cadre d'interventions bien spécifiques neutralise tout risque

d'évaluation de l'activité des travailleurs sociaux, qu'aurait pu entraîner un décompte exhaustif

des interventions in~épendamment de leur contexte.

La qualification statistique des bénéficiaires du travail social n'a pas la prétention de proposer

une image figée et définitive des bénéficiaires de l'intervention des travailleurs sociaux. Au

contraire, elle ne trouve son véritable aboutissement que dans la confrontation de ces informations

avec la connaissance qu'ont les professionnels du travail social de leur propre public. C'est

pourquoi la restitution individualisée des séries statistiques aux travailleurs sociaux qui ont

effectué le recensement matriculaire, loin d'être une formalité de type administratif, constitue

un moment important de la démarche d'étude à travers les échanges qu'elle suscite. Ce moment

privilégié résume tout l'esprit d'une démarche basée sur la complémentarité des approches

quantitatives et qualitatives, en respectant l'intégrité des méthodes et les champs de compétence

de chacun. En ce sens, cette mutualisation des expertises sur un même champ d'étude peut être

un facteur déterminant dans l'évaluation des politiques familiales et sociales locales.

RECHERCHES ET~ N' 511· 11811

Page 9: Les bénéficiaires du travail social à la caisse … profil des bénéficiaires des interventions de travail social (service social et économie sociale et familiale). L'étude montre

La forte proportion de bénéficiaires du travail social ayant connu une rupture va de pair avec une forte proportion de monoparents parmi eux : elle est de 26 % chez les bénéficiaires des interventions des assistantes sociales et de 31 % chez les bé­néficiaires d'une intervention de conseillère en économie sociale et familiale,alors qu'elle n'est que de 8% pour la population allo­cataire de la ville de Rennes et de l'ensemble du département.

ETUDES LOCALES

49 % des bénéficiaires du service social et 38% de l'économie sociale et familiale ont un « quotient » familial (3) inférieur à 2 000 francs (pour 9 % des familles bénéfi­ciaires potentielles de l'action sociale d'Ille­et-Vilaine). Cette proportion de bas reve­nus est deux fois plus importante chez les isolés ou les monoparents que chez les couples. Les monoparents allocataires ont, en effet, généralement de faibles ressour­ces, puisque 33% d'entre eux sont dans

Tableau 2- Répartition des bénéficiaires du travail social selon leur niveau de ressources

eno/o

Bénéficiaires d'une intervention Bénéficiaires d'une inteiVention du seiVice social de conseillère en économie sociale

Tmndlede' et familiale

quotient familial dont dont dont Couples isolés et Total couples isolés et Total

monoparents monoparents

0 à 1999 F '19 63 49 23 54 38

2000 à 2999 F 34 26 29 35 36 35

3000 à 3999 F 20 5 11 22 6 14

4000 F et plus 13 1 6 14 0 8

Inconnue 3 5 5 6 4 5

Total 100 100 100 100 100 100

Source: Bases lnfocentre et FRECAF 1996- CAF d'We-i!t-Vilaine.

Tableau 3- Répartition des bénéficiaires du travail social selon leur situation d'emploi

eno/o

Bénéficiaires d'une intervention Bénéficiaires d'une intervention du service social d'une conseillère en économie sociale

et familiale

Isolés+ Isolés+ Couples (1) mono parents Total Couples (1) monoparents Total

Actifs occupés 58 28 44 69 33 52

Actifs au chômage 25 37 32 18 '19 23

Inactifs 17 28 24 13 38 25

Total 100 100 100 100 100 100

Taux de chômage 30 52 42 21 45 31

, Source: Bases lnfocentre et FRECAF 1996 -CAF d'llle-i!t-Vilaine. Le taux de chômage est calculé en rapportant le nombre des chômeurs à l'ensemble de la population active (actifs occupés ou au chômage). (1) Personne de rlftrence du mbrJJge.

41 RECHERCHES ET I'RSVISIONS fr 55- 1888

Page 10: Les bénéficiaires du travail social à la caisse … profil des bénéficiaires des interventions de travail social (service social et économie sociale et familiale). L'étude montre

42

cette tranche de quotient familial, qu'ils bénéficient ou non de travail social.

Le taux de chômage atteint 42 o/o chez les bénéficiaires du service social, 31 o/o chez les bénéficiaires de l'économie sociale et fami­liale contre 13 o/o chez les bénéficiaires po­tentiels d'action sociale et 20 o/o chez les allocataires non étudiants (4).

Une population particulièrement touchée par le chômage

Le taux particulièrement fort du service social n'est pas surprenant si l'on se réfère à son territoire d'intervention, Rennes, où il atteint 30 o/o chez les allocataires non­étudiants. Cette particularité s'explique par le fait que les ménages actifs occupés et les classes moyennes sont majoritairement domiciliés sm les communes pérfmbaines. La part des chômeurs et des inactifs culmi­ne chez les isolés et les monoparents dans les deux populations, mais l'état d'actif avec emploi n'est pas non plus synonyme de ressources conséquentes. 79 o/o des actifs occupés du service social, 53 o/o des actifs occupés de l'économie sociale et familiale ont un quotient familial inférieur à

· 3 000 francs. Le pourcentage atteint respec­tiveme~t 89 o/o et 83 o/o chez les isolés et les familles monoparentales.

La part des inactifs est importante puis­qu'elle concerne un allocataire sm quatre dans les deux populations de bénéficiaires. Cette catégorie a fait l'objet de recherches complémentaires, tant sur son mode de constitution, qui fait appel à des agrégats de codes d'activité, que lors des échanges avec les travailleurs sociaux. Elle est, en effet, établie par défaut à partir de codifi­cations hétérogènes et nécessite donc des précautions particulières quant à son inter­prétation. Il convient, cependant, de remar­quer que la rubrique des « autres inactifs » issue du recensement général de la popula­tion n'échappe pas non plus à cette ambi­guïté. Les travaillems sociaux ont confirmé la montée en charge régulière de cette ca­tégorie dans lems contacts avec les alloca­taires. Elle recouvre des formes très hété-

RECHERCHES Er PRSvrsloNs N'as- tm

rogènes à la fois d'inactivité et de traite­ment social du chômage qui ne rentrent ni dans les actifs occupés ni dans les actifs au chômage.

Ce constat partagé objective la difficulté de se servir d'une nomenclature qui, en tout état de cause, est issue d'une situation économique de plein emploi Oes Trente Glorieuses). Il est à rapprocher du concept de« Privé d'emploi» créé par l'association du Centre d'étude des revenus et des coftts, afin de mesurer l'exclusion du marché de l'emploi d'une fraction de plus en plus importante de la population. Dans cette logique, la catégorie des exclus du marché du travail se calcule en cumulant les chô­mems et une partie des inactifs. De ce point de vue, la catégorie des inactifs avec ses limites dememe néanmoins intéressante.

L'effet solvabilisateur des prestations légales

, Le détail des prestations légales perçues par les bénéficiaires du travail social mon­tre l'importance de ces transferts sociaux dans le revenu des familles. Cette mise en relief rappelle le champ étendu de cou­verture du risque social par ces mêmes . prestations : l'effet solvabilisateur des pres­tations de logement; la prise en compte des situations particulières que constituent la séparation des parents, la monoparenta­lité, le handicap et la précarité, le soutien financier compensant les charges liées à la naissance et l'entretien des enfants. La nature de ces prestations nous renseigne également sur les problèmes rencontrés par ces ménages, complétant lem profil soda­démographique.

Faible niveau de ressomces et domicilia­tion en logement HLM caractérisent les deux populations de bénéficiaires. 82 o/o des bé­néficiaires du service social et 88 o/o des bénéficiaires de l'économie sociale et fami­liale perçoivent des prestations de loge­ment qui sont soumises à condition de ressources. L'aide personnalisée au loge­ment, majoritaire, recouvre exclusivement le parc HLM, l'allocation logement à carac-

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ETUDES LOCALES

Graphique 3 - Profil comparé des bénéficiaires du travail social selon les prestations légales perçues

80

70

60 59

50

%40

30

20

10

0

1 OService social ~Economie sociale et familiale a Allocataires d'ille-et-Vilaine (1)

Source : Bases Infoœntre et FRECAF 1996 - CAF d 'ille-et-Vilaine. (1) Les al/OCiltaires inclumt ici les Hudiants .

APL : aide personnalisée au logement

ALS : allocation logement à caractère social

ALF : allocation logement à caractère familial

AF : allocations familiales

CF : complément familial

APJE :allocation pour jeune enfant

APE : allocation parentale d'éducation

tère social (ALS) et l'allocation logement à caractère familial concernent le parc privé, ce qui confinne sa vocation sociale de fait.

La relative forte proportion d' ALS (12 %) perçue par les bénéficiaires du service social s'explique par la forte représentation des isolés parmi eux. La présence des étudiants

AFEAMA: aide à la famille pour l'emploi

d ' une assistante maternelle agréée

API :

ASF :

AAH :

AES :

RMI :

allocation de parent isolé

allocation de soutien familial

allocation aux adultes handicapés

allocation d 'éducation spéciale

revenu minimum d 'insertion

parmi l'ensemble des allocataires d'Ille-et­Vilaine majore par ailleurs le poids de cette prestation sur le département.

Le RMI concerne environ un bénéficiaire du travail social sur quatre, part nettement supérieure à celle rencontrée sur le dépar­tement. Au total, les travailleurs sociaux

43 RECHERCHES ET ~VISIONS Ir 55- 1H8

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L'lnfocentre

44

L'Inlocentre est un concept et une technique qui permettent d'accéder aux données dé­centralisées d'une entreprise à des fins décisionnelles. n estopératoiredans la branche famille depuis 1990 et offre la possibilité d'utiliser les informations nécessaires aux paiements des prestations pour qualifier des populations de bénéficiaires. Pour le chargé d'études, l'Infocentre permet également de maitriser toute la chaine d'infonnations qui conditionne l'intégrité de toute opération statistique, mais il n'est porteur en lui-même d'aucun modèle économétrique ni de catégo­risation a priori. Peu de risques, dans œ cas de figure, que le social sait, selon l'expression du sociologue Jean-Noël Chopart, « $0luble dans les logiciels ». L 'Infocentre- comme toute tech-

· ont accueilli 1 056 bénéficiaires du RMI sur les 7 712 que compte le département.

Les prestations liées à la monoparentalité regroupent l'allocation de soutien familial (ASF) et l'allocation de parent isolé (API). L' ASF est attribuée à dès familles dont l'en­fant est orphelin ou n'a pas été reconnu, ainsi que dans le cas où le deuxième parent biologique ne participe plus à l'entretien de l'enfant. Elle est perçue par 13 o/o des béné­ficiaires du service social et 18 o/o des béné­ficiaires de l'économie sociale et familiale, contre 2 o/o pour l'ensemble des allocataires d'Ille-et-Vilaine. L'API, allocation différen­tielle, qui complète les ressources du mé­nage, était attribuée, en 1996, aux familles ayant un enfant à charge dont les ressour­ces étaient inférieures à 4 157 francs (pla­fond majoré de 1 039 F par enfant supplé­mentaire). 7% des bénéficiaires du service social et 8 o/o des bénéficiaires de l'économie sociale et familiale la perçoivent, pour 1 % parmi l'ensemble des allocataires d'Ille-et­Vilaine. Situation familiale complexe et précarité financière se conjuguent donc sur cette catégorie des monoparents. Le nom­bre de bénéficiaires d'allocations familiales correspond au nombre de familles de deux enfants ou plus. La part de cette prestation est donc plus importante chez les béné­ficiaires de l'économie sociale et familiale (59 o/o) que chezles bénéficiaires du service

RECHERCHESET~N'M· tm

nique informatique -est lui-même soumis aux prescriptions de la CNn.. Dans l'étude sur les bénéficiaires au travail social, l'anonymisation est double. La variable qui avait permis la distribution des bénéficiaires par travailleur social est supprimée une fois les opérations effectuées et le matricule qui pourrait assurer le lien avec le nom du bénéficiaire n'est pas intégré dans les bases de gestion elles-mêmes. Tout décompte inférieur à cinq allocataires est neutralisé. Enfin, conformément au Code de la sécurité sociale sur le secret professionnel, aucune donnée concernant la vie privée de l'allocataire, dont le travailleur social pourrait avoir connaissance, n'est communiquée à un tiers ni a fortiori intégrée dans une base informatisée.

· social (34 %). La forte proportion de béné­ficiaires de l'économie sociale et familiale qui perçoivent le' complément familial re­lève de la même logique, cette prestation étant attribuée aux familles assumant la charge d'au moins trois enfants, tous âgés de trois ans ou plus.

Des difficultés financières importantes

L'allocation pour jeùne enfant est attribuée sous condition de ressources dès le premier enfant, à partir du cinquième mois de grossesse jusqu'aux trois ans de l'enfant. Elle concerne un bénéficiaire du travail social sur cinq, soit près de deux fois plus que parmi l'ensemble des allocataires (y com­pris étudiants).

En rapportant le nombre des bénéficiaires de cette prestation à la seule catégorie des familles avec enfants, on constate qu'ils atteignent une part de 34 % pour le service social pour 25% pour l'économie sociale et familiale. Les familles avec des enfants en bas âge sont plus fortement représentées chez les bénéficiaires du service social, ce qui explique cette différence.

Lorsqu'ils sont isolés et sans enfant, les bénéficiaires du service social et de l' éco-

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ETUDES LOCALES

Graphique 4 - Profil comparé des bénéficiaires du travail social selon l'âge des béné­ficiaires (1)

50 ans et plus

45-SOans

40-45 ans

35-40ans

30-35ans

25-30ans

o-r. 5o/o 10% 15%

19% -~g.rm 23%

20% 25%

1 ml Service social &J Economie sociale et familiale 1

Source : Base lnfocentre 1996- CAF d' lie-et-Vilaine. (1) Tl s'agit de l't2ge de la personne de rlftrence.

nomie sociale et familiale perçoivent essen­tiellement des prestations de logement (89 % et 84 %), mais également le RMI (31% et 53 %) et l'allocation aux adultes handicapés (8 % et15 %). Outre la complexité des modes de calcul des prestations de logement, cette catégorie de bénéficiaires est confrontée à d 'importantes diffirultés financières. Sans préjuger des autres facteurs pouvant jus­tifier l' intervention d'un travailleur social, le profil socio-économique des isolés et la complexité de la législation induit donc la nécessité de trouver des médiateurs au quotidien.

Les moins de 30 ans représentent 32 % des bénéficiaires du service social pour 18 % des bénéficiaires de l'économie sociale et familiale. Cela est contrebalancé par la forte proportion des 30-45 ans parmi les béné­fic aires de l'économie sociale et familiale, ce qui n'est pas surprenant puisqu'il s'agit le plus souvent de familles avec enfants. Cette proportion élevée des 30-45 ans est liée à une forte proportion de monoparents âgés de 30 à 35 ans (27 %) et d'isolés très souvent âgés de plus de 40 ans (61 %). En revanche, la structure par âge des bénéfi-

ciaires du service social est relativement comparable, qu'ils soient en couple, isolés ou monoparents.

La catégorie des isolés, bien qu'également touchée par la précarité financière, est donc différente par son âge, sa forme d'exclusion et sans doute de comportement, d'un cor­pus à l'autre.

Un travail social en direction des plus démunis

L'action sociale de la CAF d'Ille-et-Vilaine qui s'adresse théoriquement à des familles touche assez fréquemment des isolés sans enfant, notamment dans le cas des inter­ventions de service social. Cela s'explique sans doute en grande partie par la poly­valence de secteur qui était encore en vi­gueur en 1996, mais traduit également le fait que la CAF est confrontée à une de­mande sociale indépendante du fait d 'avoir des enfants ou non. La population à la­quelle s'adressent les interventions du service social et celles des conseillères en économie sodale et familiale se caractérise

45 RECHERCHES ET~ N'55 - 10811

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par une ·forte précarité : faible niveau de ressources, chômage, monoparentalité se conjuguent le plus souvent. Les deux po­pulations concernées se distinguent, ce­pendant, du point de vue de l'âge et du nombre d'enfants. Les conseillères en économie sociale et familiale s' adres­sent à une population plus âgée, consti­tuée principalement de familles nombreu­ses. Les assistantes sociales touchent plutôt une population jeune avec peu d'enfants, confrontée aux difficultés d'insertion so­ciale et professionnelle.

Ces résultats sont cohérents avec les mis­sions de ces deux types de travailleurs sociaux. Le service d'économie sociale et familiale œuvre dans le cadre structuré d'un centre social. Il n'est donc pas surpre­nant que sa vocation familiale s'en trouve confirmée ainsi que sa fonction d'inté­gration et de maintien du lien social. Le

service social, dans le cadre de la poly­valence de secteur, se situait plus au cœur de l'urgence individuelle et d'une préca­rité protéiforme par l'interface qu'il assu­rait avec les dispositifs partenariaux. Le noyau dur de cette précarité est constitué par les isolés pour qui les transferts sociaux sont d'autant plus déterminants qu'ils se limitent souvent à une prestation de loge­ment et au RMI. L'accès au droit se conju­gue sous le sceau de la première urgence. Le service social instruit également les demandes d'intervention du fonds de soli­darité logement dont la moitié des béné­ficiaires étaient en 1996 des ménages sans enfant, près des trois quarts des isolés ou des familles monoparentales. Le centre départemental d'action sociale du Blosne, où intervenait ce service, comptait cette même année le nombre le plus important de dossiers de fonds de solidarité logement sur Rennes.

Notes

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(1) La Caf d'Dl~-Vilaine est sortie de la polyvalence de secteur en 1998. (2) Une étude menée par la CAF en 1995 sur un point d'accueil du service des prestations avait ~ement iden­tifié cette ca~e des allocataires comme le noyau dur de la prarité sociale et financière. La difficulll! de ces mêmes allocataires à accéder à leurs droits avait ~e­ment lh! signalée. (3) Le quotientfamflialse calcule en divisant la somme du 1/12 des revenus annuels et des prestations perçues au mois de décembre par un nombre de parts variant selon la situation familiale (deux parts pour les couples et les

RECIŒitCHESET~N' 55- flllll

monoparents auxquelles s'ajoute une demi-part par en­fant à charge, avec une demi-part supplémentaire pour les familles de trois enfants et plus). Un quotient familial de 2 000 francs correspond à un revenu net mensuel, prestations comprises, de 6 000 francs pour un couple avec deux enfants, 5 000 francs pour une famille mono­parentale avec un enfant et 2 000 francs pour un isolé. A titre de comparaison, un quotient familial de 4 000 francs correspond environ au seuil d'imposition. (4) A titre indicatif,le taux de chômage au sens du Bureau international du travail était de 10,7 o/o en 1996 dans le département d'IDe-et-Vilaine.