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UNIVERSITÉ DE PARIS 1 – PANTHÉON SORBONNE INSTITUT DE RECHERCHE ET D’ÉTUDES SUPÉRIEURES DU TOURISME Les bibliothèques, un lieu touristique en devenir Mémoire professionnel présenté pour l’obtention du Diplôme de Paris 1 – Panthéon Sorbonne MASTER PROFESSIONNEL “ TOURISME “ (2 e année) Spécialité Valorisation Touristique des Sites Culturels Par Mlle Gaëlle DENANT Directeur du mémoire : M. Valéry PATIN JURY Membres du jury: M. Valéry PATIN : M. Michel TIARD Session de septembre 2010

Les bibliothèques, un lieu touristique en devenir...Aujourd’hui, dans l’esprit des gens, le terme “patrimoine“ fait d’abord référence aux monuments et musées. Pourtant,

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UNIVERSITÉ DE PARIS 1 – PANTHÉON SORBONNE

INSTITUT DE RECHERCHE ET D’ÉTUDES SUPÉRIEURES DU TOURISME

“Les bibliothèques, un lieu touristique en devenir “

Mémoire professionnel présenté pour l’obtention du

Diplôme de Paris 1 – Panthéon Sorbonne

MASTER PROFESSIONNEL “ TOURISME “ (2 e année)

Spécialité Valorisation Touristique des Sites Culturels

Par Mlle Gaëlle DENANT

Directeur du mémoire : M. Valéry PATIN

JURY

Membres du jury: M. Valéry PATIN

: M. Michel TIARD

Session de septembre 2010

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“Le paradis, à n’en pas douter, n’est qu’une

immense bibliothèque“.

Gaston BACHELARD1

1 GOUHIER Henri, POIRIER René (Sous la dir.de). Actes du Colloque de Cerisy. UGE, 1974

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AVANT PROPOS – REMERCIEMENTS

Ce travail de recherche fut l’occasion de fusionner mes différentes formations

effectuées : de mon DEUST, “Métiers des bibliothèques et de la documentation“, à ce Master

professionnel “Valorisation Touristique des Sites Culturels“ dispensé à l’Institut de Recherche

Supérieure du Tourisme (I.R.E.S.T). Il convient donc de remercier les deux corps enseignants

de ces structures universitaires à Rennes comme à Paris. Dans le cas, de l’Université Rennes 2

Haute-Bretagne, une pensée revient à Catherine DANIEL, directrice du DEUST “Métiers des

bibliothèques et de la documentation“, qui continue de nous faire parvenir les actualités du

monde des bibliothèques par emails. Pour l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, je

remercie bien entendu Valéry PATIN pour avoir soutenu ce projet jusque là jamais traité,

mais également pour son encadrement et ses conseils durant les deux années de suivi de

réalisation du mémoire. Ma gratitude revient également à Michel TIARD, directeur de la

spécialité “Valorisation Touristique des Sites culturels“, pour ses corrections et conseils

obtenus à l’issue des rendus semestriels sur l’avancée du mémoire.

Concernant les différentes aides de professionnels, je remercie les personnels de

l’accueil de la Bibliothèque nationale de France (BnF) comme Philippe BERNARD pour

leurs visites et pour avoir répondu à quelques unes de mes questions. Merci également à

Martine POULAIN, directrice de la Bibliothèque de l’Institut national d’Histoire de l’Art

(I.N.H.A) et à son personnel pour m’avoir accordé de leur temps pour un entretien et des

questions.

A l’heure des remerciements, mes pensées vont aussi bien sûr à ma famille qui a joué

tantôt le rôle de soutien, relecteur, correcteur et conseiller. Enfin, je n’oublierai pas mes

amies : Loriane, Julie, Hélène, Alexandra, Suzon… qui, elles aussi, ont suivi l’avancée de ce

travail.

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SOMMAIRE

INTRODUCTION.................................................................................................................................5

PROBLEMATIQUE ET METHODOLOGIE.................................................................................. 10

I. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES ................................................................................................ 10

1. La Problématique ................................................................................................................ 10

a. Elaboration de la problématique.......................................................................................... 10

b. Présentation de la problématique........................................................................................ 11

2. Les Hypothèses.................................................................................................................... 11

3. Cadrage et limitation du sujet............................................................................................. 12

II. METHODOLOGIE DE RECHERCHE : EXPLORATION DES SOURCES ET DES RESSOURCES EXISTANTES........................................................................................................................................................... 13

1. Lieux de recherche .............................................................................................................. 13

2. Sources bibliographiques .................................................................................................... 14

3. Les Entretiens exploratoires et investigations sur le terrain .............................................. 14

DEVELOPPEMENT.......................................................................................................................... 16

I. LES BIBLIOTHEQUES : UNE STRUCTURE PATRIMONIALE URBAINE................................................ 16

1. “Constat“ : les bibliothèques aujourd’hui........................................................................... 16

a. Les différents types de bibliothèques................................................................................... 17

b. L’organisation des bibliothèques.......................................................................................... 18

c. Les rôles et missions des bibliothèques................................................................................ 18

d. Les activités des professionnels des bibliothèques.............................................................. 22

e. Les publics............................................................................................................................. 23

2. Les bibliothèques : un patrimoine bâti et écrit ................................................................... 24

a. Le patrimoine écrit et graphique.......................................................................................... 25

b. Le patrimoine bâti ................................................................................................................ 28

c. L’exploitation du patrimoine des bibliothèques................................................................... 32

3. La bibliothèque, une institution culturelle au cœur d’un territoire, d’un tissu urbain....... 35

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II. Le tourisme et les sites culturels................................................................................................... 41

1. Comparaison de deux structures culturelles : le musée, lieu culturel touristique par excellence et la bibliothèque, structure culturelle qui se veut ouverte à tous............................ 41

a. Les parentés des musées et bibliothèques........................................................................... 42

b. Bibliothèques et musées : deux structures faussement amies qui se distinguent .............. 45

2. Les prémices du tourisme dans le milieu du livre et des bibliothèques ............................. 48

a. Les bibliothèques aux abords de stations touristiques ........................................................ 49

b. Les bibliothèques nationales ................................................................................................ 50

c. Les bibliothèques dites historiques ...................................................................................... 53

d. Les complexes culturels : musées-bibliothèques, les maisons d’écrivains… : d’autres structures culturelles apparentées au monde du livre et des bibliothèques. .................... 61

III. Proposition concrète : la bibliothèque peut devenir un lieu touristique. ................................... 63

1. Aménagements : zone d’accueil pour les touristes ; espaces aménagés pour la visite ; espaces dédiés à des expositions ................................................................................................. 64

2. L’Accueil du public : entre usagers et touristes .................................................................. 68

3. Les Acteurs : le rôle des bibliothécaires et des opérateurs touristiques ............................ 70

4. La politique de valorisation et de médiation de la bibliothèque ....................................... 71

5. La Communication - marketing – promotion...................................................................... 76

6. La Préservation, sécurité, et conservation.......................................................................... 81

7. Le Montage juridique et économique................................................................................. 88

CONCLUSION.................................................................................................................................... 92

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INTRODUCTION

Au XXème siècle, s’ancre une nouvelle activité que l’on nomme le tourisme. Si son

fondement remonte au XVIIIème avec les “Grands Tours“ de l’aristocratie anglaise, il se

développe et se démocratise véritablement aux XIX et XXème siècles grâce en autre, au

développement des transports (ferroviaires, routiers et aériens) et à l’apparition des congés

payés dans les années 1936 dans le cas de la France. Aujourd’hui, le tourisme est une activité

présente partout à travers le monde. C’est un facteur d’emplois, de valorisation du patrimoine

naturel comme culturel et surtout une grande ressource économique pour une destination. S’il

se diversifie sans cesse : tourisme de santé, tourisme balnéaire, tourisme de montagne,

tourisme urbain, éco-tourisme, tourisme sportif, tourisme gastronomique,… le tourisme

culturel reste parmi le plus attractif. La culture ne se calcule pas en retombées économiques,

néanmoins de nombreuses enquêtes dont celle de l’Ipsos / Maison de la France sur L’Image

touristique de la France et de son positionnement à l’étranger 2 en 2007, nous affirment qu’il

s’agit bien d’un critère déterminant dans le tourisme, en France par exemple. Selon leur étude,

“les séjours à dominante culturelle demeurent le principal facteur d’attractivité de la France

en tant que destination touristique, pour la quasi-totalité des personnes interrogées, devant

les courts séjours dans les principales villes, les séjours à la campagne, le tourisme itinérant

et les séjours balnéaires“. Claude ORIGET DU CLUZEAU - spécialiste en tourisme culturel,

au travers de stratégies de tourisme urbain et de missions pour les musées et monuments - le

confirme à l’occasion d’une conférence de l’Université de tous les savoirs le 12 janvier 2006.

Elle étend même cette attraction du tourisme culturel à l’Europe entière sinon plus. D’après la

retranscription de son intervention dans le journal Le Monde, “le tourisme culturel tient une

place exceptionnelle tant dans l'activité touristique en Europe que dans l'audience des

musées, monuments et événements culturels“.3. Le patrimoine a donc un rôle considérable

2 Ipsos, Maison de la France. Analyse de l’image touristique de la France et de son positionnement à l’étranger

[en ligne]. Disponible sur <http://www.franceguide.com/bd_doc/475_200704123051.pdf> (consulté le

17.08.2010)

3 Le Monde. Claude Origet du Cluzeau : Le tourisme culturel [en ligne]. Disponible sur

<http://www.lemonde.fr/savoirs-et-connaissances/article/2005/12/29/claude-origet-du-cluzeau-le-tourisme-

culturel_725377_3328.html#xtor=AL-32280340> (consulté le 17.08.2010)

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dans le tourisme d’une destination. Cela se remarque d’ailleurs par la communication faite par

les pays ou régions concernés. L’élément visuel accrocheur d’une destination touristique

relève souvent du patrimoine culturel. La tour Eiffel évoque immédiatement dans l’esprit des

visiteurs potentiels - français comme étrangers - la France et/ou Paris, par exemple. Qu’il soit

architectural, pictural, muséal, ou même immatériel, le patrimoine attire le touriste.

La fin du XXème siècle et le XXIème marquent l’ère de ce que les spécialistes du

patrimoine appellent la “patrimonialisation“. La disparition de nombreux témoignages du

passé, à l’issue des guerres et révolutions successives au cours de l’Histoire, a amené les

hommes à prendre conscience de leur héritage : de sa richesse et surtout de sa rareté et

fragilité. C’est cette prise de conscience progressive qui a participé au développement

d’institutions culturelles publiques comme les musées, particulièrement en France, à l’issue de

la Révolution de 1789. Les musées et bibliothèques ne sont, bien sûr, pas des inventions

révolutionnaires. Il en existe depuis l’Antiquité4 mais ces structures étaient jusqu’alors

confinées au secteur privé. A la fin du XVIII – début du XIXème siècle, ces institutions

prennent un tournant dans leur statut. Elles se retrouvent sous l’égide de la nation. C’est à

cette même période que se met en place une politique de conservation du patrimoine. Ce

système d‘institution municipale moderne émerge donc dans la période révolutionnaire pour

aboutir à la naissance de musées et bibliothèques municipaux.

En 1980, la proclamation d’une “Année du patrimoine“ par le gouvernement, met en évidence

ce nouvel intérêt pour les choses (personnes, œuvres, paysages,…) du passé. Depuis, cette

idée de protéger le patrimoine a continué de s’accroitre : l’on souhaite aujourd’hui donner de

la valeur à tout et, de ce fait, le conserver.

La bibliothèque fait partie de ces patrimoines que l’on cherche à protéger.

Aujourd’hui, dans l’esprit des gens, le terme “patrimoine“ fait d’abord référence aux

monuments et musées. Pourtant, il est bien plus vaste que cela. Le patrimoine n’est pas que

pictural, architectural, sculptural, il est aussi naturel, immatériel et enfin écrit. Les

bibliothèques regorgent de ce type de trésors sous la forme de manuscrits, photographies,

estampes… Ces documents sont la trace des savoirs et réflexions passés. Ce sont les premiers

que l’on a cherché à préserver. En effet, les bibliothèques sont les premières structures à

4 L’Antiquité dans l’histoire européenne est considérée comme l’ère des civilisations de l’écriture.

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collecter et conserver un patrimoine. A la suite de l’apparition de l’écriture en Mésopotamie

au IVème siècle avant Jésus-Christ sont instaurées des archives pour conserver en lieu sûr les

tablettes d’argiles et feuilles de papyrus recueillant des informations juridiques et

administratives. C’est à cette même période que voient le jour les premières bibliothèques

privées. C’est le roi Assurbanipal qui va créer en 640 avant Jésus-Christ à Ninive en Assyrie,

la première grande bibliothèque institutionnelle. A partir de l’époque hellénistique, on se met

à imaginer des bibliothèques universelles : d’immenses collections représentant tout le savoir

humain. C’est ce que vont chercher à réaliser les Ptolémées à Alexandrie, puis les Attalides à

Pergame. A cette fin, sont alors crées des bâtiments spécifiques. Pour les musées, c’est plus

tardif. Une première forme de musée apparait avec la création du centre culturel de la

bibliothèque d’Alexandrie. Sinon, le premier musée tel qu’on le connait aujourd’hui

n’apparait qu’à l’issue des cabinets de curiosités au XVIème siècle.

La Révolution française a permit l’émergence de la lecture publique et de la conservation du

patrimoine écrit. La bibliothèque a également bénéficié de l’engouement collectif des

témoignages du passé en 1980. A cet effet, une politique de valorisation des collections

patrimoniales des bibliothèques s’est développée.

A l’heure de la patrimonialisation et d’un accroissement toujours plus fort du tourisme

qui tire particulièrement profit des richesses patrimoniales, se pose donc la question du

patrimoine des bibliothèques pour encore inexploité par le tourisme. Toutes les formes de

cultures semblent attirer les touristes : le patrimoine matériel (peinture,

architecture, sculpture…) comme le patrimoine immatériel (théâtre, musique, danse,

légende…) De nombreux sites culturels accueillent des touristes. Les musées, monuments

historiques (châteaux, églises…), sites archéologiques… en attestent. En revanche, la

bibliothèque demeure cantonnée à un public de proximité, à un public d’usagers qui ne voient

en cet établissement, qu’un “fournisseur“ d’ouvrages pour la recherche ou la lecture. Pourtant,

au-delà de cette ressource documentaire, le fonds des bibliothèques est riche,

patrimonialement parlant, de part la nature de ces documents (le sujet, leur forme, leur

ancienneté…). Alors, pourquoi les bibliothèques, structures culturelles renfermant tous les

savoirs grâce à leur patrimoine écrit et graphique, ne sont-elles pas pour encore arpentées par

des touristes ? Peut-on envisager une mise en tourisme de ces lieux ? Si oui, comment la

bibliothèque, où les missions de conservation et diffusion du savoir sont prédominantes, peut-

elle devenir un lieu valorisé, attractif et touristique ?

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A travers ce mémoire, nous verrons pourquoi ces lieux de culture aux multiples

facettes ne sont pas encore considérés comme lieux culturels touristiques. Une fois cette

réponse trouvée, il s’agira de voir par quels moyens peuvent-ils le devenir en évaluant les

limites de cette mise en tourisme ?

L’intérêt de rassembler le tourisme et les bibliothèques dans ce mémoire réside dans le

fait que ces notions n’ont pour encore jamais ou quasiment pas été associées. De la même

manière que le tourisme était perçu comme très négatif à son apparition dans les musées, il

semble hostile, dangereux, immaîtrisable pour de nombreux professionnels des bibliothèques

qui suspectent son apparition aujourd’hui dans certaines de leurs structures. Si des

bibliothèques ont un potentiel pour devenir touristiques – ce que ce mémoire tentera de

démontrer –, on peut déjà prévoir des limites à cette mise en tourisme. De la même manière

que toutes les régions du monde n’ont pas la capacité à devenir attractives touristiquement

parlant, les bibliothèques ne possèdent pas toutes le potentiel ou les conditions nécessaires à

une future mise en tourisme. De petites bibliothèques communales, dont la mission principale

est d’offrir à la population locale de la lecture à proximité, n’ont pas lieu à devenir

touristiques. Les bibliothèques scolaires et universitaires n’auront, à priori, pas non plus de

vocation touristique ; la valorisation de leur fonds n’entrant pas dans leurs attributions. Ces

limitations soulèvent la question : Quelles sont les conditions nécessaires qui peuvent

permettre à un lieu de devenir touristique ?

A l’issue d’une recherche, effectuée selon une méthodologie précise, expliquée dans

un premier grand chapitre, ce mémoire tentera de répondre à ce type de questions, de

découvrir les potentiels patrimoniaux des bibliothèques et par quels moyens les valoriser à des

vues touristiques ; ceci, à travers un développement argumentatif divisé en trois parties.

La première partie de ce travail fera office de constat. Elle décrira la situation actuelle des

bibliothèques, en mettant en avant son rôle patrimonial et son impact sur le territoire, sa place

dans le réseau urbain.

Une fois “le décor planté“, il s’agira de lier les notions de tourisme et culture. Un premier

paragraphe introductif évoquera dans les grandes lignes ce rapport, puis après une

comparaison entre la bibliothèque, site culturel non touristique - officiellement du moins – et

le musée, institution patrimoniale touristique par excellence, nous rentrerons dans le vif du

sujet : les prémices du tourisme au sein des bibliothèques. Seront évoquées les premières

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formes de tourisme présentes dans certaines de ces structures. Ces deux grandes parties

mettront en avant les potentiels touristiques exploitables des bibliothèques, mais aussi, grâce

aux comparaisons avec des sites culturels touristiques comme le musée, cela permettra de

mieux connaitre les pratiques des visiteurs de façon à identifier les différentes actions à mettre

en place pour attirer et accueillir ce nouveau public dans les bibliothèques.

Cela permettra d’aboutir à une dernière grande partie qui fera office de réponse pratique. De

manière plus concrète, seront étudiés les différents aspects à développer pour rendre une

bibliothèque véritablement touristique.

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PROBLEMATIQUE ET METHODOLOGIE

I. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES

1. LA PROBLEMATIQUE

a. Elaboration de la problématique

Pour la réalisation d’un mémoire, la “méthode de l’entonnoir“ peut être utile : on part

d’une thématique générale pour aboutir à un sujet problématisé. Mes études portant sur le

tourisme culturel, je suis donc partie de ces deux thèmes : le tourisme et la culture. Après

quoi, j’ai rétréci à un secteur culturel : celui des bibliothèques ; avant d’arriver à la

problématisation de mon sujet.

La problématique de ce travail m’est venue assez facilement : mon sujet étant déjà

suffisamment centré. Aujourd’hui, les bibliothèques et le tourisme sont des thèmes

dissociables. C’est un rapprochement qui n’a pas encore été effectué, en pratique comme de

manière théorique. En effet, mis à part un article de John R. WHITMAN5, “Libraries and

tourism“ - qui mentionne le potentiel touristique des bibliothèques dans la région des Caraïbes

comme vecteur entre les touristes et la population locale et comme moyen de découvrir l’île

au travers de son fonds écrit – et un autre d’Isabel VIDAL 6 - qui établit une première

réflexion sur l’accueil du public touristique en bibliothèque - aucun document ne parle des

bibliothèques en des termes touristiques et inversement. Le milieu du tourisme ne fait

aucunement mention des bibliothèques. Lier ces deux topiques est donc un problème en soi.

Pour trouver l’angle sous lequel aborder mon travail, je me suis posée une question : quelles

sont les activités d’une bibliothèque ? D’après mon expérience en tant qu’usager de ce type

d’établissement, suite à mes études de DEUST “Métiers des bibliothèques et de la

documentation“ et à travers mes lectures sur le domaine, la réponse est venue assez

rapidement et aisément. Comme le montre le site Internet de la Bibliothèque nationale de

5 WHITMAN John R. Libraries and Tourism [en ligne]. Disponible sur

<http://portal.unesco.org/ci/en/ev.php-URL_ID=13678&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html>

(consulté le 17.01.2009)

6 VIDAL Isabelle. Tu viens pour les vacances ? Réflexions sur l’accueil du public touristique en bibliothèque.

BIBLIOthèque(s) : revue de l’Association des bibliothécaires français, 2010, n° 49, p. 54 à 57. ISSN 1632-9201

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France (BnF)7, les bibliothèques, ont trois fonctions principales : la constitution, la

conservation et la mise à disposition de collections auprès du public. Ces rôles peuvent être

plus ou moins importants et agrémentés d’autres tâches selon les bibliothèques. Mais, de

manière générale, qu’elles soient situées dans des structures spécialisées, municipales,

universitaires, nationales, ces missions sont toujours présentes. Les questions qui viennent

alors à l’esprit sont : est-ce que l’on peut ajouter l’activité touristique et des visiteurs à une

structure qui possède déjà plusieurs rôles et a un public défini ? Est-ce que le tourisme peut

s’accorder aux fonctions préexistantes des bibliothèques ? Qu’est-ce qui va pousser les

touristes à vouloir découvrir une bibliothèque ? Il s’agit de se mettre à la place des

professionnels des bibliothèques mais aussi de penser comme les visiteurs potentiels.

Le sujet de ce mémoire sera donc traité sous l’angle suivant : comment une structure

culturelle telle que la bibliothèque, où les missions de conservation et de diffusion des

connaissances prédominent, peut-elle devenir, un lieu touristique attractif ?

b. Présentation de la problématique

Au centre de ma question, je voulais faire ressortir mes deux thèmes puis les préciser.

Avec cette problématique, la bibliothèque est le sujet principal, auquel, s’additionne une

dimension touristique. Cela traduit la manière dont je vois ma formation. Issue d’une Licence

d’Histoire de l’art, ce Master est selon moi, l’étude de la mise en valeur de structures

culturelles à laquelle s’ajoute une visée touristique.

Au sein même de l’interrogation, je présente brièvement la bibliothèque comme une structure

culturelle aux activités déjà définies. Ce sujet amène donc à réfléchir sur une évolution d’un

secteur existant.

2. LES HYPOTHESES

Plusieurs hypothèses étayent mon argumentation afin de répondre à cette problématique.

Les deux premières consistent à prouver que la bibliothèque a un potentiel patrimonial et

urbain à valoriser, qui de surcroit, peut être attractif vis-à-vis des touristes. La troisième vient

à démontrer que, bien qu’un institut aux missions déjà définies comme la conservation, le

7 BnF. Les missions de la BnF [en ligne]. Disponible sur

<http://www.bnf.fr/pages/zNavigat/frame/connaitr.htm> (consulté le 15.06.2009)

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service de lecture publique,…, la bibliothèque peut encore se donner une autre mission :

l’accueil d’un nouveau public : les touristes.

3. CADRAGE ET LIMITATION DU SUJET

Le sujet d’un mémoire doit être suffisamment centré de manière à le traiter en profondeur,

en évitant tout éparpillement. C’est le rôle de la problématique de préciser une question au

cœur d’un thème. Suivant le travail effectué, un cadrage et une limitation s’impose. Là encore

pour éviter tout hors sujet et pour être pertinent, les exemples doivent être soigneusement

sélectionnés. Dans le cadre de cette recherche, ne parler que d’un cas était insuffisant.

Plusieurs exemples figurent donc dans ce mémoire. Les bibliothèques abordées sont de

différents types et de différents pays. Elles reflètent l’ampleur internationale du sujet. Rares

sont les bibliothèques qui accueillent actuellement des visiteurs. Elles n’ont pas toutes

vocation ou les capacités à devenir touristiques. Dans chaque pays, peu de bibliothèques

deviendront véritablement touristiques, d’où la dimension internationale des exemples choisis.

A travers l’argumentation, le modèle français se fait bien sûr davantage sentir. Je m’appuie

sur le fonctionnement français étant celui que je connais le mieux et pour lequel j’ai pu

trouver le plus de sources accessibles, puis, je le compare, l’associe, ou le distingue à d’autres

exemples étrangers. Aujourd’hui les bibliothèques fonctionnent beaucoup en réseau à

l’échelle locale comme internationale. C’est le cas de la Bibliothèque nationale de France et

de la Bibliotheca Alexandrina en Egypte par exemple. Ces institutions d’origines distinctes, se

ressemblent donc dans leur fonctionnement.

Certaines bibliothèques, de par leur type, sont moins présentes dans ce travail de recherche.

C’est le cas des bibliothèques départementales de prêt, des bibliothèques scolaires,

universitaires, d’hôpitaux ou de prisons…Ce sont des structures qui n’ont, à priori, pas de

vocation touristique ; leurs missions étant trop spécifiques et leur potentiel touristique

minime.

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II. METHODOLOGIE DE RECHERCHE : EXPLORATION DES

SOURCES ET DES RESSOURCES EXISTANTES

Différents lieux de recherche et rencontres m’ont été utiles pour mon travail. Le sujet

de ce mémoire porte sur deux grands thèmes : le monde des bibliothèques et le tourisme. Ces

deux notions sont pour encore peu associées. Les lieux d’étude, sources bibliographiques et

entretiens se partagent donc entre ces deux items. II s’agit, grâce à ce travail universitaire de

les faire converger.

1. LIEUX DE RECHERCHE

Concernant les lieux de recherches, il existe à Paris deux centres documentaires

spécialisés sur ces deux topiques. Dans le domaine du tourisme, on trouve le fonds spécialisé

de la bibliothèque du Trocadéro. Mes premières recherches dans cette enceinte ne furent pas

concluantes : les documents étant trop éloignés de la deuxième dimension ; à savoir les

bibliothèques.

En revanche, le centre de documentation sur les métiers du livre à la bibliothèque municipale

Buffon s’est avéré plus riche. Comme le Centre de Formation aux Carrières des Bibliothèques

de Rennes ou le Centre Médiadix à Paris, il reçoit des revues spécialisées comme BBF, et

Bibliothèque(s) qui s’avèrent souvent riches en matière de réflexions sur le monde des

bibliothèques en France mais aussi plus largement à travers le monde. Ces périodiques

fournissent également de bons exemples de structures à réutiliser. Au sein de ces centres

d’informations, j’ai pu y trouver également quelques livres sur l’architecture des

bibliothèques, les bibliothèques du monde, les bibliothèques classées “ Monuments

Historiques “, l’animation en bibliothèque…. De plus, les documentalistes du centre Buffon

effectuent une veille documentaire en dépouillant la presse spécialisée et constituent ainsi des

dossiers thématiques (“bibliothèques par pays“, “animation en bibliothèque“, “accueil du

public“,…) Toute cette documentation est mise à disposition des lecteurs en parallèle au

périodiques. C’est très utile pour les usagers : ça leur permet d’aller plus vite dans leurs

recherches.

Enfin, mes recherches ont été complétées par une prospection sur Internet à l’aide de moteurs

de recherche comme Google et ses “Alertes Google“, mais aussi via l’outil informatique

Copernic.

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2. SOURCES BIBLIOGRAPHIQUES

Comme dit précédemment, je n’ai pas trouvé d’ouvrages touristiques abordant les

bibliothèques. J’ai donc exploré plutôt du côté du thème des bibliothèques, en essayant de me

rapprocher au mieux du tourisme : accueil du public, animation en médiathèque,

valorisation…

Il existe un grand nombre d’ouvrages diversifiés sur le monde des bibliothèques. Et malgré

leur évolution constante, je n’ai pas eu trop de difficultés à trouver des ouvrages récents ; mon

sujet ne portant pas sur l’historique de ces lieux mais plutôt sur une potentielle évolution

future, il m’était nécessaire de connaître au mieux leur positionnement actuel.

Au final, plusieurs grands thèmes de documentation ressortent de mes lectures :

- la bibliothèque : un lieu patrimonial : les trésors écrits, l’architecture des bibliothèques,…

- les politiques culturelles d'une bibliothèque : expositions conférences, animation…

- le management et la gestion des bibliothèques

- les bibliothèques dans l’histoire du développement urbain

- la bibliothèque et le musée : Similitudes et divergences

- le tourisme culturel

- etc.…

3. LES ENTRETIENS EXPLORATOIRES ET INVESTIGATIONS SUR LE TERRAIN

Bien qu’importants, je n’ai au final eu que peu d’entretiens exploratoires. La difficulté

de rencontrer certaines personnes, une mauvaise gestion de mon temps, une période de

réflexion trop longue quant aux choix de mon plan, de mon approche du sujet et des exemples

à traiter… autant de facteurs qui m’ont empêché d’aller au bout de mes perspectives

concernant ces entretiens. J’ai, cependant, tenté de combler cette lacune en assistant à un

colloque8 et en effectuant des visites de bibliothèques qui m’ont permises à cette issue

d’interroger les guides et/ou personnels de l’accueil. Mes expériences professionnelles dans

ce milieu m’ont également offert l’opportunité de discuter de mon sujet de mémoire avec des

collègues (BnF, bibliothèque de l’Institut national d’Histoire de l’Art, bibliothèque

8 BnF Richelieu : Un projet en question. Journées d’étude les 5 et 6 juillet 2010 à l’Institut national

d’Histoire de l’Art, organisée par l’Association pour la Sauvegarde et la Mise en valeur du Paris

historique et l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.

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universitaire de Rennes 2 Haute Bretagne) et aussi, dans le cas de l’Institut national d’histoire

de l’art, de récolter l’avis des lecteurs et/ou visiteurs au quadrilatère Richelieu à Paris.

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DEVELOPPEMENT

I. LES BIBLIOTHEQUES : UNE STRUCTURE PATRIMONIALE

URBAINE

1. “CONSTAT“ : LES BIBLIOTHEQUES AUJOURD’HUI

Avant d’établir tout argumentaire sur le potentiel touristique des bibliothèques, il est

nécessaire de débuter par une phase de constat ; il faut “planter le décor“. Que sont

aujourd’hui les bibliothèques ? Comment fonctionnent-elles ? Quelles sont leurs missions ?

Sous quelles formes existent-elles ? Comment se place ce type de centres culturels dans le

maillage territorial ? Autant de questions qui permettent, une fois la réponse acquise,

d’évaluer au mieux leur évolution touristique. Ce premier constat s’appuie essentiellement sur

le modèle français, qui est, cependant, très proche de ceux d’autres pays, puisque les

bibliothèques françaises ont été influencées - au XXème siècle notamment - par différents

systèmes étrangers comme les modèles anglo-saxon et américain. De plus, depuis les années

1980, le Conseil des ministres de la Culture de la Communauté européenne, vise à créer une

“Europe des Bibliothèques“ en mettant en place un certain nombre d’actions portant aussi

bien sur le développement des technologies que sur l’encouragement à l’usage de normes

unifiées, l’harmonisation des politiques nationales en matière de bibliothéconomie… L’idée

est de favoriser l’accès aux documents à l’échelle européenne. Cette “Europe des

bibliothèque“ à la volonté d’encourager l’harmonisation des bibliothèques grâce à la mise en

place d’objectifs communs, à la fois culturels, scientifiques, éducatifs et sociaux.

L’apparition d’Internet – le plus grand réseau du monde, offrant n’importe quel type

d’informations, n’importe où, à n’importe qui – dans la deuxième moitié des années 1990, fut

perçue comme une menace. Cela a suscité de nombreuses interrogations de la part des

conservateurs. Certains ont vu dans l’apogée d’Internet et du numérique, la fin des

bibliothèques physiques. Pourtant ces structures ont su s’adapter aux pratiques culturelles

évolutives. Elles intègrent de plus en plus les nouvelles technologies et nouveaux médias.

Aujourd’hui, leur possible disparition ne semble plus d’actualité. L’afflux des constructions

de bibliothèques en est la preuve. De plus, en 2006, d’après l’association des bibliothèques

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américaines (American Library Association), le succès des médiathèques n’est plus à prouver

aux Etats-Unis. “Les Américains se rendent chaque année deux fois plus dans les

bibliothèques scolaires, publiques et académiques qu’au cinéma“ 9.

La difficulté pour appréhender les bibliothèques vient du fait qu’il en existe plusieurs

types, qu’elles touchent différents publics à la fois, qu’elles renferment des documents

multiples sur leur fond (littérature, sciences, arts, langues, géographie, histoire, religion…)

comme sur leur forme (manuscrits, estampes, cartes, livres imprimés, périodiques, journaux,

mais aussi CD, DVD, CD-Rom, œuvres d’art, photographies, jeux…) et qu’elles possèdent

plusieurs missions inégalement traitées selon la bibliothèque.

a. Les différents types de bibliothèques

A l’origine les bibliothèques étaient privées. Elles étaient souvent nées du désir

d’hommes puissants de collectionner les savoirs du monde pour assouvir une soif de

connaissances mais bien souvent aussi pour asseoir une certaine légitimité, un pouvoir vis-à-

vis du peuple et des principautés voisines. C’était le cas, par exemple, avec le roi

Assurbanipal (roi d'Assyrie de 669 avant Jésus.-Christ à 627 avant Jésus-Christ) et sa

bibliothèque à Ninive constituée de l’ensemble de la littérature cunéiforme disponible à son

époque. La bibliothèque publique voit le jour bien plus tard, après la Révolution. Elle sera

ancrée alors sur des désirs de démocratisation.

Aujourd’hui, bibliothèques privées comme publiques coexistent.

Les bibliothèques privées sont gérées par un propriétaire privé ou par une association. Elles

sont généralement confinées au sein d’un bâtiment : maison, château, abbaye… Elles

possèdent rarement leur propre bâtiment. Ces institutions privées peuvent être distinguées en

deux : celles uniquement visibles de leur propriétaire et celles ouvertes au public : certaines

ciblent un type d’usagers restreints (les chercheurs) et d’autres, un plus large public (les

visiteurs). Les bibliothèques privées ouvertes aux touristes sont souvent issues de monuments

historiques reconnus comme les abbayes ou châteaux. La bibliothèque du château de

Chantilly en France en est un exemple. A l’heure actuelle, ce sont les bibliothèques privées

qui sont seules considérées réellement comme touristiques.

9 PITARD Florence, BERREZAI Olivier, LESNIAK Isabelle [et al.]. Bibliothèques : le livre et l’architecture font bon

ménage. Dimanche Ouest-France, 2006, p. 8-9 ISSN : 1285-7688

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Dans le cas des bibliothèques publiques, il en existe également plusieurs sortes :

- La bibliothèque nationale

- Les bibliothèques universitaires et de recherche

- Les bibliothèques publiques (au sens qu’elles sont sous la tutelle de la fonction

publique nationale ou territoriale) : municipales, départementales

- Et enfin, d’autres bibliothèques plus atypiques ou du moins inclassables comme les :

bibliothèques scolaires, de prisons et d’hôpitaux.

Toutes ces formes de bibliothèques sont présentes dans le monde entier. La seule différence

notable selon les pays vient des bibliothèques publiques qui varient dans leur gestion selon la

politique de l’Etat.

b. L’organisation des bibliothèques

En France, la notion de service public est constituée à partir de la fin du XIXème

siècle. Depuis le XXème siècle, le service des bibliothèques publiques repose sur les principes

d’égalité, de continuité, de mutabilité, de neutralité et de transparence.

Il existe deux tutelles différentes dans le cas de ces structures. La Bibliothèque nationale de

France, la Bibliothèque Publique d’Information (BPI), les bibliothèques universitaires sont

gérées par l’Etat. En revanche, dans le cas des bibliothèques municipales, bibliothèques

municipales classées, bibliothèques municipales à vocation régionale, bibliothèques

départementales de prêt… elles sont sous la tutelle de la fonction publique territoriale.

c. Les rôles et missions des bibliothèques

La bibliothèque possède un rôle majeur dans la société. Comme le dit bien Denis

PALLIER, ancien inspecteur général des bibliothèques, dans son ouvrage Les

bibliothèques10 : “À la fois lieux de travail pour des recherches contemporaines et lieux de

conservation d’un patrimoine, les bibliothèques ont un rôle charnière entre le passé et le

présent“. Cet espace public, collectionneur et conservateur d’un fonds documentaire et

patrimonial, oscille donc entre la culture et l’éducation.

10

PALLIER Denis. Les bibliothèques. Paris : Presses Universitaires françaises, 2006. 127 p. (Que sais-je?) ISBN

978-2-13-057064-6

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De manière assez schématique, l’ensemble des bibliothèques remplissent plusieurs missions ;

ce, quelque soit leur type. Elles ont toutes un rôle pédagogique et culturel mais de manière

plus ou moins importante selon leur statut.

La bibliothèque : le gardien de collections écrites et graphiques

L’objectif premier d’une bibliothèque, qu’elle soit publique ou privée, est de se

constituer un fonds. Cette collection peut être spécialisée ou diversifiée : multisports,

encyclopédisme, niveaux de lecture, multilinguisme, pluralisme… Une fois cette politique

documentaire définie, le bibliothécaire doit alors poursuivre les acquisitions pour enrichir le

fonds, les conserver, les valoriser et les mettre à disposition du plus grand nombre ou d’un

cercle réduit. Il s’agit de faire vivre les collections. La mise à disposition des documents,

grâce aux expositions, aux salles de lecture publiques et aux systèmes de prêts et retours, ne

présuppose pas l’usage qui en sera fait. Un même ouvrage peut d’ailleurs avoir plusieurs

usages : formation, culture, recherche, construction de soi.

La bibliothèque : un espace public

La bibliothèque est un outil d’usage collectif, un lieu d’échanges, un lieu de

sociabilité. C’est assez paradoxal car les activités des usagers : lire, travailler, sont des

pratiques privées solitaires, assez contraires avec cette idée d’espace public. Mais en même

temps, les usagers affirment aussi que d’être entourés de personnes travaillant ou lisant

motive à faire de même.

La bibliothèque est à la fois lieu de travail et lieu de loisirs. Une même personne peut avoir

lors de son séjour à la bibliothèque ses deux pratiques. Le souci des bibliothécaires est alors

de faire coexister ces deux activités, de garder ses deux usages présents sans qu’ils se nuisent

l’un à l’autre, d’où la multiplication d’espaces.

Les collections sont elles aussi d’usage public, collectif. On peut lire sur place, les

emprunter… Les documents ne sont donc pas toujours accessibles. Ils font l’objet d’une

appropriation temporaire par l’utilisateur.

Selon les principes républicains d’égalité, de mutabilité, de transparence, la bibliothèque est

un lieu accessible à tous sans formalités (pas de prix d’entrées). C’est un lieu neutre

socialement. Les villes possèdent peu de lieux de cette nature, qui soient aussi ouverts ; ceci,

même si les freins socioculturels à sa fréquentation sont encore aujourd’hui plus ou moins

forts. C’est un lieu qui permet à la fois de retrouver des gens que l’on connaît et, d’être parmi

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les autres à la fois quand on ne connaît personne. Les jeunes adolescents ou adultes ont

souvent un usage collectif de la bibliothèque.

La bibliothèque : un lieu éducatif d’information et de formation

Le facteur pédagogique est important dans toutes les bibliothèques, et ce, quelque soit

son statut. Ce rôle n’est pas réservé aux bibliothèques scolaires et universitaires. La

bibliothèque et l’école sont deux institutions de service public. Elles partagent les mêmes

idéaux républicains qui consistent à donner accès à la formation à tous les citoyens. Tout

comme l’école, la bibliothèque invite à s’informer, débattre, développer son esprit critique.

En tant que “centre de la connaissance“, elle accompagne le travail de la population

scolarisée. Aujourd’hui, un enfant est dès le début de sa scolarisation en présence d’une

bibliothèque ou d’un centre de documentation. Depuis les années 1970, les programmes

pédagogiques incitent les élèves et étudiants à rechercher par eux même des éléments

d’information à la bibliothèque. Les bibliothèques publiques sont complémentaires des

bibliothèques scolaires vis-à-vis de l’offre en espace, en documentation et en heures

d’ouverture.

La population scolarisée est la première bénéficiaire du rôle d’accompagnement des

bibliothèques. Mais une partie du public “hors système scolaire“ l’utilise également pour sa

formation : les chômeurs, personnes en reconversion professionnelle, les participants aux

concours, mais aussi les autodidactes qui souhaitent se former tout seul dans n’importe quel

domaine.

La bibliothèque, structure de loisirs et de développement culturel

Grâce à la diversité des documents - dans leur fond comme dans leur forme -, un

travail de valorisation des collections ainsi qu’une médiation adéquate, les médiathèques font

aussi partie des structures culturelles de loisirs. Parmi les activités de détente et de découverte

culturelle que propose la bibliothèque, figurent la lecture, la découverte d’une exposition et la

participation à des animations (conférences, concerts, rencontres avec des auteurs…). La

bibliothèque est souvent perçue en priorité comme un lieu de travail, néanmoins, le

développement de ses activités culturelles et ludiques tend à faire évoluer cette perception. Le

tourisme pourrait d’ailleurs servir à renforcer cette image.

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Autres missions des bibliothèques

De manière générale, toutes les bibliothèques possèdent les missions énumérées

précédemment. Seulement, ces tâches sont plus ou moins exploitées suivant le statut de la

bibliothèque. Certaines de ses structures possèdent des fonctions qui lui sont particulières.

La nature des bibliothèques dépend de son fonds mais aussi de son public parfois. Certaines

bibliothèques comme les bibliothèques de prisons, d’hôpitaux, d’entreprises ou d’institutions

scolaires ont une desserte spécifique selon ses usagers. Par exemple, au sein des bibliothèques

implantées en centres pénitenciers, l’aspect social prime sur la constitution d’un fonds. Il

s’agit pour le personnel de ces structures d’aider le prisonnier en vue de sa réinsertion dans la

société, mais aussi parfois de lui permettre de retrouver le goût de la lecture, etc. Pour les

bibliothèques d’hôpitaux, la médiation, la pédagogie, l’écoute des malades est mise en avant

par les bibliothécaires. Alors que dans le cas des bibliothèques d’entreprises, ils aident les

employés dans leur recherche et effectuent des veilles documentaires. Enfin, les centres de

documentation scolaires favorisent la formation, la pédagogie. De manière générale, ces

structures adaptent leurs fonds et leurs outils d’accompagnement selon le profil des usagers

(âge, catégorie socioprofessionnelle, santé…).

Le statut des bibliothèques et sa spécificité peut aussi amener des bibliothèques publiques à

avoir certains rôles particuliers. C’est le cas des organismes dépositaires du dépôt légal.

Instauré par François Ier en 1537, le dépôt légal consiste à collecter un exemplaire de tous les

documents mis à la disposition du public, de toute nature11 qu’ils soient, en vue de constituer

une collection exhaustive de référence. Inscrite dans le Code du patrimoine12, cette obligation

de dépôt légal à l’égard de tout éditeur, imprimeur, producteur, distributeur, importateur, de

déposer chaque document qu'il édite, imprime, produit, distribue ou importe, à l’un des

organismes dépositaires du dépôt légal : la Bibliothèque nationale de France, l’Institut

national de l’audiovisuel, le Centre national du cinéma et de l’image animée et les

bibliothèques habilitées par arrêté du ministre chargé de la culture, servent à préserver la

11 Documents imprimés, graphiques, photographiques, sonores, audiovisuels, multimédias, logiciels et bases

de données, ainsi que les signes, signaux, écrits, images, sons ou messages de toute nature faisant l’objet d’une

communication au public par voie électronique (Internet).

12 Code du patrimoine, Partie législative, LIVRE Ier : DISPOSITIONS COMMUNES À L'ENSEMBLE DU

PATRIMOINE CULTUREL, TITRE III : DÉPÔT LÉGAL, Articles L131-1 et L131-2

Legifrance. Code du patrimoine [en ligne]. Disponible sur

<http://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do?idSectionTA=LEGISCTA000006108728&cidTexte=LEGITEXT0000

06074236&dateTexte=20090917> (consulté le 17.08.2010)

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mémoire du patrimoine culturel diffusé sur le territoire national. L’atout de ces centres,

recueillant un dépôt légal, est qu’ils accroissent ainsi leur richesse patrimoniale. Par exemple,

la bibliothèque des Champs Libres de Rennes reçoit le dépôt légal de tous les documents

traitant de la Bretagne. Elle consacre un étage de son bâtiment à ce fonds régional. C’est un

atout non négligeable pour attirer les touristes car elle possède une collection riche et unique

qui témoigne du territoire dans lequel elle est implantée. Ce fonds est représentatif de la

destination dans laquelle se trouve le visiteur ; cela peut donc l’intéresser. C’est un autre

moyen de découvrir la région : son histoire, ses habitants…. C’est un patrimoine à exploiter

pour des expositions par exemple.

d. Les activités des professionnels des bibliothèques

Pour répondre aux missions générales de lecture publique, d’information, de

formation, de loisirs et développement culturel, etc., le personnel des bibliothèques a

plusieurs activités envers les documents comme envers les usagers :

- la gestion et l’administration

- l’acquisition d’ouvrages pour constituer des collections

- la préservation et conservation des documents

- la valorisation et diffusion au public des fonds documentaires

- l’accueil et l’information du public

- le travail en réseau avec d’autres bibliothèques

Chacune de ces missions et activités est gérée par un personnel qualifié. La bibliothèque

requiert les compétences d’un personnel scientifique, technique et d’exécution.

La bibliothèque est un lieu de services. Comme dans toute structure d’activités

tertiaires, le client est à la fois consommateur et acteur. Il donne vie à l’enceinte et joue un

rôle majeur quant à la transformation de l’institut. Les bibliothécaires en ont conscience. S’ils

accordent une part importante de leur travail à la conservation, la mission de diffusion auprès

des usagers reste capitale. Les médiathèques s’adaptent donc beaucoup en fonction de la

société.

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e. Les publics

Alors qu’elles n’étaient fréquentées que par quelques chercheurs et érudits jusqu’au

début du XXème siècle, les bibliothèques sont, de nos jours, arpentées par un public

nombreux et éclectique. Depuis une trentaine d’années, les bibliothèques municipales se sont

considérablement développées. D’instituts fermés pour un public lettré et peu nombreux, les

bibliothèques municipales se sont transformées en véritables centres culturels, proposant des

services diversifiés : expositions, vidéothèques, discothèques, accès à Internet, ludothèque :

c’est la naissance des médiathèques. Conjointement à cette diversification de l’offre, une

demande sociale croissante de bibliothèque s’est fait sentir. Le Rapport statistique sur l’année

fiscale de 200813 de l'Institute of Museum and Library Services, agence fédérale d'évaluation

et de promotion indépendante des Etats-Unis, portant sur les bibliothèques de 50 Etats prouve

cette forte demande sociale, puisque qu’entre 1999 et 2008, la fréquentation des bibliothèques

américaine a augmenté de 20%. Malheureusement, si le nombre d’usagers augmente, de

même que les fonds documentaires, il n’en va pas de même pour les bibliothécaires qui, selon

l’enquête américaine, pour 25.000 habitants est resté stable sur la même période.

Grâce au souhait démocratique de faire accéder la connaissance à tous, permettant ainsi à tout

le monde d’entrer dans une bibliothèque en France, et ce, sans inscription obligatoire

préalable, les publics des bibliothèques sont aujourd’hui très divers (hommes et femmes,

enfants et adultes, salariés et chômeurs,… de toute nationalité confondue) à l’image de la

population du pays. Alors que jadis, la majeure partie des usagers étaient des professionnels

de la documentation (enseignants, chercheurs, étudiants…), aujourd’hui, les bibliothèques

touchent un public plus diversifié, moins familier de l’écrit et de l’institution. Les

bibliothécaires doivent alors assurer un accueil personnalisé tout en gérant les flux.

Depuis le début des années 1990, les bibliothèques connaissent une grande fréquentation. En

France, les bibliothèques publiques constituent les premiers lieux culturels fréquentés par les

français. Cette hausse des usagers crée un effet de masse peu propice à la familiarité mais

favorable à un certain anonymat.

De nombreux usagers fréquentent plusieurs bibliothèques à la fois et leurs pratiques peuvent

être multiples au sein d’un même institut. Mais de manière générale, deux facteurs et donc

13

DI PIETRO Christelle. Plus de public, autant de bibliothécaires [en ligne]. Disponible

sur <http://www.enssib.fr/breves/2010/07/02/plus-de-public-autant-de-bibliothecaires> (consulté le

21.08.2010)

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deux types de pratiques encouragent la fréquentation des bibliothèques : le besoin et le rapport

à la lecture. Le besoin est associé à un travail à effectuer par exemple. De nombreux jeunes

utilisent la bibliothèque pour des raisons utilitaires. Malheureusement, nombreux sont ceux

qui, une fois leurs études finies, abandonnent ce lieu. Ils associent la bibliothèque à un usage

contraint et leur venue à la bibliothèque disparaît donc souvent conjointement à la contrainte.

Concernant le rapport à la lecture, les usagers des bibliothèques municipales ont un rapport

plus étroit avec le livre et la lecture. La familiarité avec la bibliothèque est un facteur

favorable. Avoir été inscrit en tant qu’enfant est un atout de fidélisation, ou même de

fréquentation. Les bibliothèques ne recrutent presque plus de nouveaux adhérents arrivés à la

trentaine. Connaître quelqu’un qui fréquente la bibliothèque est aussi un facteur favorable. Il

contribue à démythifier le lieu.

2. LES BIBLIOTHEQUES : UN PATRIMOINE BATI ET ECRIT

D’après Françoise CHOAY dans son livre, L’Allégorie du Patrimoine14 , le patrimoine

historique se définit comme "un fonds destiné à la jouissance d’une communauté élargie aux

dimensions planétaires et constitué par l’accumulation continue d’une diversité d’objets que

rassemble leur commune appartenance au passé : œuvres et chefs-d’œuvre des beaux-arts et

des arts appliqués, travaux et produits de tous les savoirs et savoir-faire des humains“. Si

l’on s’en réfère à ces propos, la bibliothèque fait donc partie des lieux patrimoniaux. En effet,

elle possède un fonds écrit et graphique (estampes, manuscrits, lettres, enluminures, plans

géographiques ou architecturaux, cartes postales, cartons verts, photographies, carnets de

voyages, etc.), répertoriant des savoirs universels du passé, utiles pour le présent et l’avenir.

Grâce à la nature des ouvrages, à l’ancienneté des documents et selon les sujets traités, cette

collection est diversifiée, riche, parfois rare, voire même unique.

D’autre part, les locaux mêmes des bibliothèques peuvent aussi révéler parfois un patrimoine

architectural intéressant. Depuis l’Antiquité (cf. bibliothèque d’Alexandrie), l’on cherche à

magnifier les collections et savoirs en leur offrant de splendides écrins. Cela va pour les

bibliothèques comme les musées. Il faut donc prendre en compte le contenu (les collections)

et son contenant (l’édifice).

14

CHOAY Françoise. L’Allégorie du patrimoine. Paris : Editions du Seuil, 1992. 278 P. ISBN 2-02-014392-5

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a. Le patrimoine écrit et graphique

L’arrivée des nouvelles technologies – permettant, grâce au principe de numérisation,

de visionner un ouvrage écrit via un écran, n’importe où, sans avoir à se déplacer pour le

chercher et ni à le tenir - a été perçue par beaucoup de professionnels du livre comme une

menace pour l’existence de cette documentation imprimée. Pourtant, si aujourd’hui, n’importe

qui peut lire son livre ou son journal via Internet, les e-books…et si des bibliothèques

universelles virtuelles se développent, le livre continue d’être consulté, de se vendre

notamment l’été au moment de vacances. La communication massive de la part des maisons

d’éditions sur les livres durant l’été montre bien que le touriste est un acheteur d’ouvrages à

fort potentiel. L’ère du numérique n’a donc pas causé la mort de l’imprimé. Il a même

finalement permis de donner une nouvelle dimension, une nouvelle image aux documents

papiers. Comme le fait remarquer Annie SCHNEIDER dans son ouvrage Le livre. Objet d’art,

objet rare15, depuis “ l’heure du numérique, le livre est reconsidéré comme objet, comme

résistance à l’éphémère“. Le beau livre ne permet pas de faire signifier le statut social de son

possesseur aussi bien que le fait une œuvre picturale. Cependant ce type d’ouvrage attire de

plus en plus – outre les bibliophiles – une nouvelle catégorie de collectionneurs, attiré parfois

par des motivations seulement spéculatives, mais surtout par une véritable curiosité à l’égard

de ces témoignages des cultures passées. La forte fréquentation lors des salons du livre ancien

ainsi que le succès de leurs foires internationales en attestent. Organisé depuis 1984, le Salon

International du Livre Ancien de Paris16 convie, amateurs, conservateurs, relieurs, éditeurs

spécialisés et marchands à se rassembler pour rendre hommage au patrimoine écrit et

graphique. C’est un moyen de rendre ce patrimoine moins réputé, plus visible par tous.

Chaque année, une institution publique internationale (une bibliothèque) est invitée à venir

exposer ses trésors. Présent pour la 4e année consécutive sous la verrière du Grand Palais, ce

salon a connu en 2010 une hausse de fréquentation de 30 % par rapport à l'édition 2008.

Manuscrits enluminés, incunables, éditions originales de grands textes, livres d’artistes,

ouvrages aux reliures somptueuses, etc. sont autant d’œuvres d’art qui ont vu leur prix

atteindre des sommes témoignant d’un renouveau du goût pour le patrimoine écrit. La vente

15 SCHNEIDER Annie. Le livre. Objet d’art, objet rare. Paris : Ed. de la Martinière, 2008. 239 p. ISBN 978-2-7324-

3756-9

16 SLAM. Salon du livre ancien de Paris : Accueil [en ligne]. Disponible sur

<<http://www.salondulivreancienparis.fr/articles.php> (consulté le 17.08.2010)

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aux enchères des trésors du poète français, Jacques PREVERT, en juin dernier, peut en

attester. La petite fille de l’écrivain, Eugénie BACHELOT-PREVERT, à l’initiative de cette

transaction, a pu récolter plus de 2 millions d’euros dont 557.640 euros grâce à la vente du

manuscrit original de Quai des Brumes pour lequel les enchérisseurs se sont déchaînés,

jusqu'au dernier mot adjugé au Musée des lettres et des manuscrits (Paris, France). Plus

accessibles, les éditions d’art contemporain en tirages limités tendent aussi à devenir

aujourd’hui des objets rares, convoités par les bibliophiles.

La richesse d’un ouvrage ne se limite pas à son contenu ; sa forme : son grammage,

son papier, sa reliure, sa couverture, ses illustrations, sa police de caractères…sont autant

d’éléments qui participent à rendre un livre unique. Tout un artisanat se cache à travers un

ouvrage : relieur, imprimeur, calligraphe, illustrateur… Ces savoir-faire font partie du

patrimoine. Aujourd’hui, à l’heure du développement de masse, ils sont pour la plupart en

voie d’extinction, peu connus et reconnus.

La bibliothèque est, depuis ses débuts avec le centre d’Alexandrie sous les Ptolémées,

un vaste conservatoire de collections anciennes. En France, si la BnF est riche d’au moins

600 000 livres anciens17 (depuis la convention de 1811 à l’issue des confiscations et

dispersions révolutionnaires), il s’en trouve environ six millions conservés dans quelque 300

bibliothèques municipales et près d’un million dans les bibliothèques universitaires

(essentiellement les grandes parisiennes telles que la Sorbonne, Sainte Geneviève et celle de

Strasbourg : bibliothèque nationale et universitaire18).

Parmi les missions fondamentales de la bibliothèque figure l’acquisition. C’est au moment des

confiscations révolutionnaires, que les bibliothèques publiques vont apparaître et s’enrichir

d’un patrimoine écrit, jusqu’alors constitué par les anciennes élites. Aujourd’hui, plus de

confiscations : la collection des bibliothèques s’accroit par l’achat ou le don d’ouvrages. Un

fonds patrimonial qui ne s’enrichit pas, perd de sa valeur. Chaque année, une partie du budget

17 Chiffres de 2007 issus de : BERTRAND Anne-Marie. Les bibliothèques. 3ème Ed.. Paris : La Découverte, 2007.

120 p. (Repères). ISBN 978-2-7071-5277-0

La politique constante d’acquisition de documents patrimoniaux élève chaque année ces données chiffrées.

18 La bibliothèque de Strasbourg s’est vue élevée au rang de bibliothèque nationale lors de son annexion à

l’Allemagne en 1870. Elle a conservé ce statut à son retour en France.

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des bibliothèques est donc réservée à l’achat de documents récents mais aussi – selon le type

de bibliothèques - patrimoniaux. Concernant les collections anciennes, elles proviennent pour

la plupart d’achats à l’issue de ventes publiques. C’est le cas notamment pour les collections

patrimoniales de la bibliothèque de l’Institut national d’Histoire de l’Art qui récupère de

nouveaux ouvrages par dons mais aussi par achats lors de ventes aux enchères par exemple.

Cependant, l’on peut aussi s’en procurer auprès de librairies spécialisées, de librairies

anciennes, d’éditeurs, d’auteurs, d’artistes et de propriétaires privés. Selon la spécificité de

son fonds, la bibliothèque peut rechercher des ouvrages en particulier. Les fonds sont étoffés

de manuscrits ou éditions originales qui complètent une collection spécifique mais surtout

d’œuvres contemporaines qui sont acquises dans un but de conservation : livres d’artistes,

production des auteurs locaux, documents ayant trait à la région, la commune. La bibliothèque

de Nantes, en France, conserve, par exemple, les manuscrits de 98 romans, nouvelles, pièces

de théâtre et autres écrits de Jules VERNE. C’est un corpus unique de 15.000 feuillets qui

permet de suivre l’évolution littéraire de l’auteur.

La constitution de ce type de collection est onéreuse lors de l’achat, mais aussi après pour la

conserver. Les bibliothécaires ont plusieurs ressources financières. Les achats d’ouvrages

anciens peuvent se faire sur des budgets de fonctionnement et sur des budgets

d’investissement. En France, les bibliothèques municipales classées peuvent bénéficier

d’aides de donateurs divers : sa région d’implantation ou aide de la part de la Direction du

Livre et de la Lecture (DLL). Il existe aussi un mécénat pour le patrimoine écrit. Ce type

d’aide peut servir aussi bien à l’acquisition de documents qu’à des actions de valorisation

(exposition, numérisation, édition…), dès lors qu’elle n’a pas un but d’ordre lucratif.

Certaines entreprises peuvent être sollicitées par exemple dans l’accompagnement de

l’acquisition d’un document rare.

La bibliothèque contribue avec les archives, musées, monuments historiques à

entretenir la mémoire locale. Pourtant longtemps, les fonds anciens étaient perçus comme une

charge, un frein à la modernisation plutôt qu’une richesse, un atout. Deux raisons expliquent

ce regain d’intérêt qu’elles connaissent actuellement. D’une part, le patrimoine est

aujourd’hui désigné comme un élément de l’identité collective. D’autre part, le bon

développement des bibliothèques municipales permet aujourd’hui de cesser de concurrencer

fonds anciens avec ceux de lecture publique en termes de priorité et de moyens. Le patrimoine

n’est plus envisagé comme un handicap qui mobilise et immobilise locaux, budget et

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personnel et qui nuit à la modernisation et l’essor de ces structures. La preuve en est avec les

actions d’enrichissement des collections anciennes et un travail assez récent de valorisation de

ces fonds de manière à les faire davantage connaître du public.

b. Le patrimoine bâti

“ Le monument le plus précieux pour une nation est sans doute celui qui renferme

toutes les connaissances acquises “19. Cette conception de l’architecte Etienne-Louis

BOULLEE pour définir la bibliothèque est revenue au goût du jour.

Lieux du passé, du présent et de l’avenir, les bibliothèques sont en constante évolution.

Autrefois “ recluses“, au fond des greniers de mairie, elles ont aujourd’hui des bâtiments

fonctionnels, accueillants, ouverts sur l’extérieur.

Si les premières archives étaient confinées dans une partie d’un bâtiment : temple, palais

royal…, à l’intérieur de petites niches ou réduits, creusés à même le mur, à partir de l’époque

hellénistique, sont créés des bâtiments appropriés pour accueillir des collections. Durant

l’Antiquité romaine, on assiste à l’éclosion de bibliothèques dont un grand nombre bénéficiait

d’un bâtiment qui lui est propre. Aujourd’hui, ces magnifiques monuments romains ont tous

disparu mis à part les restes de la bibliothèque

d’Ephèse (Figure 1). Cette dernière est l’un des

emblèmes du site antique. Sa façade fait partie des

éléments les plus attractifs de ce lieu touristique

turc.

Figure 1 : Vestiges de la bibliothèque Celcius - Site

archéologique antique d'Ephèse (Turquie)

Source : © Gaëlle DENANT

L’arrivée du numérique a été perçu comme un mauvais présage pour le monde des

bibliothèques qui s’est inquiété du futur des bibliothèques physiques. Pourtant, assez

paradoxalement, depuis la dématérialisation des documents et la création de bibliothèques

virtuelles, les constructions de bibliothèques ne cessent de se multiplier. On crée, on rénove

ces institutions. Pourquoi ? Car la bibliothèque est l’un des rares lieux publics d’une ville.

19

BERTRAND Anne-Marie, KUPIEC Anne. Ouvrages et volumes : Architecture et Bibliothèques. Paris : Ed. du

Cercle de la librairie, 1997. 212 p. (Bibliothèques). ISBN 2-7654-0657-X

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C’est donc sa fonction de point de rassemblement d’hommes qui explique la permanence de

l’activité architecturale de ces structures. Il ne reste aujourd’hui que peu de lieux sans

restriction d’accessibilité (sans distinction de race ni de niveau social), permettant

d’emprunter et lire des ouvrages librement et gratuitement. D’autre part, l’apparition

d’Internet - souvent désigné comme le “fossoyeur du livre et des bibliothèques“ - a aussi servi

le futur des bibliothèques, en provoquant une demande de centres multimédias.

Depuis les années 1990, les municipalités veulent créer des bâtiments d’envergure

pour leur bibliothèque. Pour ce faire, ils font appel à des architectes de renommée

internationale tels que Renzo PIANO, Norman FOSTER… L’architecture des lieux culturels

comme les opéras, les théâtres, les musées et les bibliothèques est, de tout temps, utilisée

comme une “vitrine“ pour la ville et un outil de prestige pour les politiciens. L’essor de

constructions de bibliothèques innovantes et originales est principalement à l’initiative

d’hommes politiques. Par exemple, le centre culturel des Champs Libres à Rennes créé, par

Christian DE PORTZAMPARC en 2006, fait partie d’un projet de revitalisation urbaine à

l’initiative d’Edmond Hervé (maire de Rennes).

Si les architectures de bibliothèques affluent, cela vient aussi du fait qu’elles inspirent les

architectes. Selon Richard ROGERS (architecte britannique), “ la bibliothèque victorienne

traditionnelle tenait un peu de l’église alors qu’aujourd’hui, elle doit être à la pointe de la

technologie. La bibliothèque est devenue un endroit où le citoyen doit pouvoir trouver toute

une gamme d’activités pour les jeunes comme pour les seniors, pour tous, pour toutes les

croyances“20. En Angleterre, comme ailleurs, la bibliothèque publique perd peu à peu son

image poussiéreuse, grâce au talent d’architectes vedettes comme Richard ROGERS et son

projet pour Birmingham21, qui prévoit - dans un quartier à réhabiliter, défiguré par une

autoroute urbaine - un édifice ultra moderne, rempli de nouvelles technologies, attirant le

public le plus large possible avec des collections de livres, des écrans à profusion, des

restaurants, des expositions, un auditorium, des salles de conférence, des jardins paysagers, 20

BERARD, Raymond. Architecture et design en : Séminaire international [en ligne]. Disponible sur

<http://bbf.enssib.fr> (consulté le 15.08.2010)

21 La bibliothèque n’est pas encore ouverte au public. Les travaux ont débuté en 2002 comme l’explique le Site

Internet dédié à ce projet :

Rogers Stirk Harbour. Library of Birmingham [en ligne]. Disponible sur :

<http://www.richardrogers.co.uk/work/all_projects/library_of_birmingham> (consulté le 28.08.2010)

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etc. L’architecture des bibliothèques peut donc servir à casser les idées stéréotypées de la

bibliothèque traditionnelle.

Les acteurs des bibliothèques ont pris conscience des nouveaux besoins du public : un

accès à toutes les formes de savoirs. C’est de là qu’est venue l’émergence de médiathèques.

Ces nouvelles bibliothèques ont donc subi des transformations dans leur agencement interne

qui a évolué en fonction de la diversification des usages. Aujourd’hui, au lieu d’une grande

salle de travail unique et austère, se retrouvent une multitude d’espaces aux fonctions

différentes : espace d’accueil, salle de lecture, salle de travail, cafétéria, etc. C’est bien sur ces

principes qu’a reposée la construction de la bibliothèque de Norwich (Figures 2, 3 et 4),

largement ouverte, complètement décloisonnée et occupant la moitié d’un complexe

regroupant des boutiques, une pizzeria, un café, l’office de tourisme et la station locale de la

BBC.

La diversification des espaces, son aspect informel et non monumental, a favorisé son

appropriation vis-à-vis des usagers et a même permit d’augmenter sa fréquentation en attirant

d’autres publics venus à l’office de tourisme, allant au restaurant… ; un public jusqu’alors

non-usager.

Majestueuses, très modernes, les nouvelles bibliothèques sont souvent empreintes d’un

grand symbolisme via leur architecture. Elles font tantôt écho au territoire, tantôt à l’histoire

de la bibliothèque et de son fonds… Les quatre tours de la BnF du site François-Mitterrand

font par exemple allusion à 4 livres ouverts. Dans le cas de la Bibliotheca Alexandrina (Figure

6), son architecture très moderne a fait l’objet d’un concours international visant à

Figures 2, 3 et 4 : Bibliothèque de Norwich (Angleterre)

Sources : http://www.enssib.fr/breves/2010/02/18/nocturnes-a-la-bibliotheque http://english-matters.co.uk/library/norwich%20library.html

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sélectionner le projet qui symboliserait au mieux la continuité entre le passé et le présent,

ainsi que la réconciliation entre le local et l’universel. Le groupe norvégien SNOHETTA,

sélectionné en 1989, a fait de la bibliothèque un bâtiment contemporain alliant simplicité et

splendeur. Situé au bord de la mer, sur le site de l’ancienne bibliothèque, le bâtiment se

présente sous la forme d’un cylindre vertical de 160 mètres de diamètre coupé en diagonale,

dont la pureté géométrique n’est pas sans rappeler à de nombreux égards les grands édifices

de l’Egypte antique. Vu de haut, sa forme circulaire (Figure 5) évoque l’image du soleil (les

hiéroglyphes représentaient généralement le soleil comme un simple disque). Si les

architectes n’ont pas conçu la bibliothèque, au sens strict, comme un symbole solaire, ils

reconnaissent néanmoins qu’elle se veut une image de rayonnement et d’ouverture. C’est

d’ailleurs cette idée que les murs de granit, côté sud expriment. En effet, y sont inscrites

toutes les écritures connues dans le monde (Figure 7) : de l’écriture arabe aux caractères

chinois, en passant par les caractères cyrilliques, coptes, hébreux, latins… Enfin, les jeux de

lumières évoluant au fil de la journée selon la course du soleil sur les symboles gravés,

évoquent également les murs des temples égyptiens. A travers son fonds et son architecture, la

Bibliotheca Alexandrina se propose ainsi comme le nouveau temple du savoir universel. Cela

retranscrit à la fois l’ambition de l’ancienne bibliothèque et celle de la nouvelle.

Figures 5, 6 et 7 : Bibiliotheca Alexandrina (Egypte) - vues extérieures

Source : http://www.aaha.ch/photos/bibliotheca.htm

Les aménagements intérieurs font aussi écho à l’ancienne bibliothèque puisque l’on y

retrouve un véritable centre culturel avec une salle de lecture, un centre de conférences, un

centre de connexion à Internet, une bibliothèque numérique, des bibliothèques spécialisées,

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des galeries d’expositions, un musée de la calligraphie, un musée des sciences, un musée des

antiquités, un planétarium, un exploratorium, un laboratoire de restauration pour les

manuscrits rares, une école internationale des sciences de l’information et 7 centres de

recherches et de documentation.

Les bibliothèques sont conçues pour être des points forts, visibles de la ville.

L’architecture joue beaucoup sur la notoriété qu’aura la bibliothèque. C’est le cas de la BnF.

Son architecture a été beaucoup décriée au début. C’est cet élément qui a fait la plus grande

publicité de cet édifice.

En matière de tourisme, l’architecture des bibliothèques peut être très importante, elle peut

par exemple attirer le regard d’un touriste déambulant au hasard dans la ville. Cela peut attiser

sa curiosité et l’amener à visiter l’intérieur. C’est la même chose pour les musées. L’exemple

le plus frappant est le musée Guggenheim de Bilbao. Son architecture, plus que les œuvres

conservées dedans, a fait la réputation et l’attraction de cet établissement construit en 1997

par l'architecte américain Frank O. GEHRY et qui, aujourd’hui, a participé grandement à

redorer l’image de la ville industrielle de Bilbao.

En outre, aujourd’hui, quand on visite une bibliothèque, c’est autant si ce n’est plus pour son

architecture que pour son fonds. Par exemple, les visites guidées de la BnF sur le site

Richelieu comme sur le site François-Mitterrand, traitent plus de l’architecture des lieux que

des collections. Lors de ma visite à la BnF, Philippe BERNARD, personnel de l’accueil qui

s’occupe aussi des visites guidées (cf. prospectus des visites proposées par la BnF en annexe

A) a parlé en première partie de l’histoire de la bibliothèque : l’évolution des collections, des

missions de la bibliothèque et, dans un second temps, il a abordé tout l’aspect architectural de

ce bâtiment : l’agencement interne, les matériaux, les étapes de construction… Des

prospectus, visibles en annexe B, sont même consacrés à cet aspect des édifices. Il ne faut pas

oublier qu’une bibliothèque, c’est autant son fonds (collection patrimoniale) que son

contenant (bâtiment).

c. L’exploitation du patrimoine des bibliothèques

Avant d’aborder le traitement de ce type de ressources culturelles au sein des

bibliothèques, il faut garder à l’esprit que le patrimoine n’est pas le même dans toutes les

structures. Certaines de ces institutions sont plus riches que d’autres. Se distinguent par

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exemple, les bibliothèques de lecture publique - dont leur fondement-même est de favoriser la

lecture et de rendre accessible une documentation généraliste au maximum de citoyens - de

celles qui possèdent un dépôt légal, ont un fonds spécialisé, ont une histoire relativement

ancienne, etc.

Une prise de conscience du patrimoine écrit récente

La prise de conscience des richesses patrimoniales des bibliothèques est assez récente.

Jusque dans les années 1980, le patrimoine était “laissé pour compte“ dans les bibliothèques

au bénéfice de la lecture publique. Passéiste, poussiéreux et élitiste : voila les qualificatifs

que le public et les bibliothécaires même s’accordaient à associer au patrimoine. En revanche,

la lecture publique était, elle, signe de modernité, d’ouverture, de sociabilité. Il faut donc

attendre les années 1980 pour que s’impose l’idée selon laquelle le patrimoine constitue un

enjeu culturel et touristique important pour les villes. La création d’une administration du

patrimoine au sein du Ministère de la Culture en France aura eu certainement un effet sur

cette évolution.

Aujourd’hui, le patrimoine n’est plus perçu comme une “crispation du passé“. C’est même

devenu une activité consensuelle, mais elle l’est encore davantage dans les propos que dans

les moyens entrepris.

Un patrimoine disparate qui n’est pas traité de la même façon selon le statut et type de

bibliothèque

Depuis les années 1980, il existe une politique de valorisation des fonds patrimoniaux

qui se développe dans les bibliothèques. Le patrimoine n’étant pas le même selon le type de

bibliothèque dans lequel il se trouve, il n’est alors pas valorisé de la même manière. Par

exemple, la bibliothèque nationale a amélioré sa politique de valorisation depuis la

construction du nouveau bâtiment sur le site François-Mitterrand. Les politiques de

valorisation sont de manière générale, dans tous les pays, supérieures dans les instituts

nationaux, à celles effectuées dans les autres bibliothèques. Il y a plusieurs raisons à cela : les

bibliothèques nationales possèdent un fonds plus riche, ont depuis le début des missions plus

élargies, des locaux mieux adaptés pour ce genre de tâches et enfin, et surtout, des

financements plus conséquents. Du côté des bibliothèques municipales, les avancées en

matière de valorisation se sont faites plus lentement ; leur rôle de lecture publique

prédominant jusqu’alors. Des efforts ont été toutefois remarqués grâce au Plan d'Action pour

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le Patrimoine Ecrit (P.A.P.E.)22. Est apparu le souci de mieux connaître le patrimoine écrit et

sa valorisation. Enfin, du côté des bibliothèques universitaires, la valorisation des collections

est une réflexion encore plus récente. Cela, remonte à deux ans, puisqu’avant, la

préoccupation se centrait sur la modernisation de ces institutions.

Les acteurs jouent aussi un rôle dans les avancées de la valorisation du patrimoine écrit au

sein des bibliothèques. Par exemple, des efforts sont notables dans les villes. Emergent des

évènements et expositions en lien avec la bibliothèque et sur les livres. En atteste Le Mois du

Livre par exemple. Quant aux professionnels du monde des livres, la barrière entre lecture

publique et conservation tend à diminuer. Il y a une volonté de faire davantage pour le

patrimoine de la part des bibliothécaires.

De manière générale, aujourd’hui, la valorisation du patrimoine s’exprime par trois

types d’actions : des expositions, des éditions et la numérisation.

La mise en place d’expositions révèle à un large public des

documents que leur fragilité rend habituellement peu accessibles.

Ces manifestations culturelles permettent de sortir des magasins et

réserves des manuscrits, cartes postales, plans, estampes, objets

divers23… que l’histoire et les dons ont fait entrer dans la

bibliothèque. Elles offrent ainsi aux habitués des bibliothèques

comme aux non-usagers, l’occasion de découvrir et s’approprier de

manière symbolique ces fonds riches et précieux.

Si certains documents sont rarement dévoilés de part leur grande

ancienneté et donc leur fragilité, certains, plus vulnérables encore,

sont devenus complètement inaccessibles. C’est le cas des Très

Riches Heures du duc de Berry (Figure 8) par exemple. Dans ce cas,

les bibliothèques ont recours aux nouvelles technologies. Depuis

quelques années, elles mènent une politique de numérisation des

biens anciens. La numérisation permet à la fois la conservation des

connaissances mais aussi sa valorisation et sa grande diffusion.

Aujourd’hui, de nombreuses bibliothèques comme la BnF, la bibliothèque interuniversitaire

22

Le Plan d'action pour le patrimoine écrit et graphique (P.A.P.E.) a été mis en place en 2004 par la Direction

du Livre et de la Lecture (D.L.L.). IL est né d'une réflexion autour du patrimoine écrit de notre pays.

23 Un sarcophage a longtemps été stocké dans les bâtiments du quadrilatère Richelieu suite à un don.

Figure 8 : Avril, Les Très

Riches Heures du duc de

Berry. Livre d’heure du

XVème siècle, conservé

aujourd’hui au musée

Condé à Chantilly

Source : http://fr.academic.ru/dic.nsf/frwiki/163447

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de médecine ou la médiathèque de Troyes dévoilent sur leur sites Internet leurs “Trésors“

numérisés accompagnés d’expositions virtuelles pour présenter ces œuvres (voir annexe C).

Enfin, une politique d’édition accompagne généralement les expositions temporaires. C’est un

outil qui permet, à la fois d’obtenir quelques retombées économiques (objet-souvenir pour les

visiteurs) et, à la fois de garder une trace de ces manifestions éphémères.

Cependant ces actions ne suffisent pas encore compte-tenu de la richesse de ce

patrimoine. De plus, selon Martine POULAIN (cf. compte-rendu d’entretien en annexe D),

avant d’effectuer tout travail de valorisation, il faut connaitre son patrimoine. Or, aujourd’hui,

ce n’est pas encore le cas, car une partie du patrimoine n’est pas encore catalogué et les

moyens financiers et humains manquent terriblement pour accomplir cette tache.

3. LA BIBLIOTHEQUE, UNE INSTITUTION CULTURELLE AU CŒUR D’UN TERRITOIRE, D’UN TISSU URBAIN

Si la bibliothèque a plusieurs rôles, ce ne sont pas tous des objectifs mais certains font

plutôt partie des effets induits. De par son emplacement, ses acteurs, ses missions, son public

et son fonds, la bibliothèque est un objet urbain, un élément au cœur même du territoire. Ce

n’est pas tant un choix qu’une évidence. Une bonne analyse d’une institution implique de la

replacer dans son contexte. Ne pas prendre en compte l’environnement de la bibliothèque (sa

population locale, la dynamique de son lieu d’origine en matière de culture, d’actions

sociales, de tourisme,….) empêche toute compréhension complète de ce lieu : sa fonction, son

histoire… C’est d’autant plus vrai dans le cas des bibliothèques publiques. Or, aujourd’hui, la

majeure partie des bibliothèques connues de la population sont publiques. Sous la tutelle de

l’Etat ou sous le contrôle des collectivités territoriales, servant la population locale, elles

représentent donc, la ville, le département, la région ou l’Etat qui les gèrent.

Une bibliothèque se définit d’abord par sa collection organisée de documents, mais c’est

aussi un bâtiment public, un ensemble de ressources et de services, une maille dans le filet de

l’aménagement du territoire, une médiation entre les documents/informations et les usagers.

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Il s’agit d’un lieu social, qui se veut ouvert à tous selon les principes de la Charte des

Bibliothèques24 adoptée par le Conseil supérieur des bibliothèques, le 7 novembre 1991.

Depuis un demi-siècle, l’aménagement culturel du territoire s’est révélé un enjeu nouveau

capital pour les villes, départements, région et l’Etat. Deux raisons, ont participé à l’apparition

de cette évolution. Tout d’abord, l’intensification du réseau urbain dans le monde entier

depuis une cinquantaine d’années, a fait se développer une forte demande de la population en

matière de services publics de proximité. Ensuite, l’élévation du niveau scolaire a suscité un

accroissement des pratiques culturelles et donc une demande de produits et services liés à ces

dernières. La bibliothèque, lieu de culture et d’éducation par excellence – deux éléments clés

pour une nation - fait donc partie de ces aménagements culturels de proximité fortement

développés ces dernières années.

Les structures culturelles sont des éléments forts pour l’image d’une ville. Elles

dévoilent la richesse d’un lieu, ses moyens, le dynamisme de la politique urbaine du territoire.

Elles participent à la notoriété positive d’une ville. Les municipalités l’ont bien saisi. Depuis

les années 1980, le patrimoine a retrouvé un certain attrait. Les maires ont donc saisi cette

opportunité pour rénover ou construire de nouveaux écrins aux institutions publiques

culturelles comme les musées et bibliothèques. Jusque dans les années 1980, les bibliothèques

municipales n’étaient pas connues pour être des projets architecturaux forts. En créant des

architectures modernes, monumentales au symbolisme fort, l’idée est de briser l’image de

“ temple de la culture“ des bibliothèques pour le rendre vivant et attractif. C’est ce qui a été

fait en 1993, à Nîmes, avec le Carré d’art qui abrite

un musée d’art contemporain et une médiathèque.

Créé par le célèbre architecte Norman FOSTER, ce

“Beaubourg régional “ participe à la volonté du

maire de l’époque, Jean BOUSQUET, d’affirmer

l’image urbaine de la cité. La presse n’hésitera pas

d’ailleurs à qualifier Nîmes de ville

“médiagénique“. D’ampleur nationale cette fois, le

projet architectural de Dominique PERRAULT pour

24

Conseil supérieur des bibliothèques. Charte des bibliothèques [en ligne]. Disponible sur <http://enssibal.enssib.fr/autres-sites/csb/csb-char.html> (consulté le 15.06.2009)

Figure 9 : Bibliothèque nationale de France -

Site François-Mitterrand Source : http://www.yanous.com/pratique/culture/culture060505.html

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la nouvelle Bibliothèque nationale de France sur le site de Tolbiac à la fin des années 1990, en

est un autre exemple (Figure 9).

L’idée de cette construction monumentale (bâtiment organisé autour d'un socle et de quatre

tours d'angle, hautes de 79 mètres, soit sept étages de bureaux et onze étages de magasins),

moderne (architecture de verre) et symbolique (les bâtiments forment 4 livres ouverts) ne se

limitait pas à créer une nouvelle bibliothèque pouvant accueillir plus de documents et

d’usagers. Le challenge était aussi de manifester, aux français comme aux étrangers, la place

de la culture dans la société française. Le bâtiment ne pouvait donc qu’être monumental. En

tant que bâtiment public, la bibliothèque a un impact sur l’organisation urbaine. Elle peut

revivifier un quartier, servir à redonner à un secteur urbain une dignité et considération pour

ses habitants. L’implantation d’un nouveau bâtiment de bibliothèque est porteuse de plusieurs

messages : nouveau lieu de rassemblement, établissement très fréquenté, etc. La bibliothèque

crée une force d’attraction dans le tissu urbain. Elle lui donne du sens. Ce fut le cas avec le

site François Mitterrand dans le 13ème arrondissement de Paris. Force est de constater l’essor

des constructions : logements, commerces, entreprises de ce quartier. La majorité de ces

édifications, concentrées autour de la BnF lui sont postérieures. C’est une zone de Paris qui a

trouvé une nouvelle dynamique. Cela permet de casser cet effet concentré des sites culturels

du cœur historique de Paris (cf. carte des sites touristiques de Paris en annexe E). La BnF

ayant une attraction touristique, l’objectif est aussi d’amener des touristes dans cette partie de

la capitale.

En trois siècles, le rôle des élus s’est affirmé et, depuis quelques années, les politiques

culturelles n’hésitent plus à s’afficher. Aujourd’hui, les municipalités sont très nombreuses à

vouloir reconstruire leurs médiathèques. En témoignent, le projet de St-Malo ou la

bibliothèque de Seattle (Figures 10 et 11) de l’architecte Joshua PRINCE-RAMUS.

Figures 10 et 11 : Bibliothèque de

Seattle construite par Joshua

PRINCE-RAMUS

Sources : http://commons.wikimedia.org/wiki/File:Seattle_library_main_branch_overhead.jpg http://seattletimes.nwsource.com/news/local/library/photogalleries/spl20.html

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Ces édifices se veulent de plus en plus impressionnants. Pour ce faire, les institutions

publiques ont recours à des architectes notables, comme Christian DE PORTZAMPARC

(Champs Libres, Rennes) (Figure 12). L’architecture de ces lieux est une “vitrine“ pour la

ville et un outil de prestige pour les politiciens. C’est un moyen d’attirer l’attention de

visiteurs potentiels. C’est le cas de la Bibliothèque nationale de France notamment mais aussi

de la bibliothèque municipale de Kansas City aux Etats-Unis (Figure 13).

Figure 12 : Vue d'ensemble de l'architecture extérieure du

centre culturel des Champs Libres de Rennes (France) édifié

par Christian DE PORTZAMPARC

Source : © Ouest-France

Figure 13 : Vue d'ensemble de la bibliothèque

de Kansas City (Etats-Unis)

Source : http://projets-architecte-urbanisme.fr/bibliotheque-

kansas-city-libabry-livre-architecture-insolite/librairie-kansas-city-

architecture-insolite/

La façade de la bibliothèque est un grand “trompe l’œil“ faisant figurer de grandes œuvres

littéraires classiques occidentales (Roméo et Juliette de SHAKESPEARE, Le seigneur des

anneaux de TOLKIEN…) sous forme de livres rangés sur un rayonnage (Figure 14). Cette

conception au design innovant est à l’initiative de la municipalité de Kansas City. Dans un

souci d’intégration du bâtiment au sein de la ville et auprès des habitants, la municipalité a

demandé à la population locale de choisir des livres fortement influents qui représenteraient

Kansas City. Cette démarche de concertation avec les locaux a pour objectif d’inciter ces

derniers à lire et à fréquenter la bibliothèque. En les impliquant, cela permet de rendre le lieu

Figure 14 : Détail de la façade d'entrée de la

bibliothèque municipale de Kansas City

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représentatif de la ville. De plus, sa grande originalité a accrut sa notoriété. Cela a fonctionné

puisque la municipalité de Cardiff l’a imitée.

Grâce à ses acteurs, son emplacement, ses usagers, son fonds patrimonial faisant écho

au lieu et/ou aux habitants de sa région d’implantation, la bibliothèque est donc bien une

représentation de la ville, de son entourage. En témoigne, la bibliothèque de Rennes. Etant

dépositaire du dépôt légal des ouvrages sur la Bretagne, la bibliothèque des Champs Libres

possède tout un étage : “Zone Patrimoine“, dans laquelle, l’usager trouve des documents de la

région ainsi qu’un petit Musée du Livre et des Lettres Henri Pollès. Il s’agit de la

reconstitution des pièces de la maison de l’écrivain breton Henri POLLES.

A travers son architecture, la bibliothèque peut aussi servir l’image de la ville dans laquelle

elle se situe. C’est le cas de la bibliothèque Carnegie de Reims (Annexe F) qui reflète, par son

édifice (Figures 15, 16, 17, 18 et 19), l’importance qu’a eu l’architecture Art déco dans la

ville.

Figures 15, 16, 17, 18 et 19 : Plusieurs

détails du style Art déco de la

Bibliothèque Carnegie de Reims

Sources :

http://www.evene.fr/culture/lieux/bibliothequ

e-carnegie-5934.php?photo

http://fr.wikipedia.org/wiki/Biblioth%C3%A8qu

e_Carnegie_%28Reims%29

A travers son fonds riche d’environ 300.000 livres et son architecture contemporaine aux

influences traditionnelles, la Bibliothèque nationale du Royaume du Maroc (B.N.R.M.) à

Rabat est un autre exemple représentatif de son territoire. Située parmi les sites historiques et

culturels comme la Tour Hassan et la Médina, le tout récent bâtiment de la B.N.R.M., œuvre

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des architectes Rachid BENBRAHIM AL ANDALOUSSI et Abdelouahed MOUNTASSIR,

se fond harmonieusement dans la géographie de la ville avec son style marocain-andalou

(jardins intérieurs, fontaines, marbre et mosaïques). Bibliothèque moderne, elle possède tout

le confort requis pour accueillir un large public : salle de lecture, auditorium, cafétéria avec

grande terrasse, salle de prière et d’ablutions ; le tout inséré dans une enfilade d’espaces

paysagers. Concernant son patrimoine écrit, un espace lui est réservé : manuscrits et livres

rares y sont exposés et disponibles à la consultation.

Le positionnement des bibliothèques dans un territoire est un atout à exploiter dans le

cas des bibliothèques touristiques. Elles peuvent être un vecteur entre les touristes et la

population locale. Comme le dit bien John R. WHITMAN25 dans son article, les collections

d’une bibliothèque peuvent donner aux visiteurs étrangers, une meilleure connaissance de la

culture de la zone géographique visitée.

25

WHITMAN John R. Libraries and Tourism [en ligne]. Disponible sur <http://portal.unesco.org/ci/en/ev.php-

URL_ID=13678&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html> (consulté le 15.06.2009)

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41

II. LE TOURISME ET LES SITES CULTURELS

“La culture, tant dans ses différents "objets" que dans sa représentativité globale des

identités nationales et régionales, est une puissante force d'attraction pour un territoire, et

elle seule est capable de créer le "génie du lieu" autour duquel les visiteurs se retrouvent,

apprennent, s'émeuvent et se différencient“ 26. Cette citation de Claude ORIGET DU

CLUZEAU résume parfaitement le rôle que jouent les sites patrimoniaux pour un territoire.

Le patrimoine, est une valeur attractive en matière de tourisme. C’est pour des raisons

patrimoniales qu’a débuté le tourisme avec les “Grands Tours“ au XVIIIème siècle.

Aujourd’hui encore, même si le tourisme a évolué avec l’apparition de nouvelles formes de

tourisme (balnéaire, tourisme de montagne, tourisme d’affaires, tourisme de santé,…) le

patrimoine et la culture restent des points forts dans le tourisme. La communication de la

plupart des destinations en atteste puisqu’elle met en avant les atouts culturels du lieu pour le

faire connaître et attirer le visiteur ; ceci même si le séjour touristique n’est pas centré sur la

culture.

1. COMPARAISON DE DEUX STRUCTURES CULTURELLES : LE MUSEE, LIEU CULTUREL

TOURISTIQUE PAR EXCELLENCE ET LA BIBLIOTHEQUE, STRUCTURE CULTURELLE

QUI SE VEUT OUVERTE A TOUS.

L’étude des activités touristiques des musées et autres sites culturels fournit nombre

d’informations quant aux attentes des touristes, ce qu’ils désirent trouver à l’issue de leur

visite de ce type d’institution. Elle permet d’identifier les potentiels attractifs et touristiques

des structures culturelles en général. Une comparaison de ces institutions déjà touristiques

avec d’autres, comme les bibliothèques, qui ne le sont pas encore, met en évidence les

changements à effectuer et les actions à mener en vue d’attirer et d’accueillir les touristes dans

les médiathèques.

26

Le Monde. Claude Origet du Cluzeau : Le tourisme culturel [en ligne]. Disponible sur

<http://www.lemonde.fr/savoirs-et-connaissances/article/2005/12/29/claude-origet-du-cluzeau-le-tourisme-

culturel_725377_3328.html#xtor=AL-32280340> (consulté le 17.08.2010)

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a. Les parentés des musées et bibliothèques

Par son édifice, son histoire, son fonds et ses rôles, la bibliothèque a de nombreuses

similitudes avec le musée. Ce sont tous les deux des instituts, majoritairement publics, qui

conservent un patrimoine et le mettent à la disposition de la population dans des écrins

architecturaux plus ou moins majestueux.

L’une des parentés première que possèdent musées et bibliothèques vient de leur

architecture. Dès l’époque des Ptolémées, au IIIème siècle avant Jésus-Christ, avec la

bibliothèque d’Alexandrie en Egypte, on rassemble les premières formes de musée et

bibliothèque sous un même bâtiment. Cette bibliothèque antique, aujourd’hui disparue, n’était

pas, comme son nom l’indique, qu’une simple bibliothèque, mais plutôt un véritable centre de

culture et de savoir constitué de plusieurs espaces dont deux bibliothèques : l’une principale,

rattachée au “Museion“ (musée) était une sorte d’académie des sciences et la seconde annexait

le temple de Sérapis. D’après quelques écrits dont les témoignages de Strabon dans le livre 17

intitulé Géographie, les bâtiments de la bibliothèque d’Alexandrie comprenaient donc des

salles pour stocker les nombreux papyrus, des espaces réservés aux savants, enseignants et

étudiants (cour, salles de réunion, réfectoires, logements…) mais aussi, un musée, un

observatoire astronomique et un jardin zoologique et botanique... Au XIXème siècle aussi, les

architectes rassemblent ce type d’institutions culturelles en construisant des musées-

bibliothèques27 (exemples français : Rouen, Nantes, Grenoble, Amiens, etc.). Et après une

séparation de ces structures au XXème siècle, ce modèle de fusion revient plus que jamais

aujourd’hui à travers de nouvelles édifications. En attestent, le Centre d’art contemporain

Georges Pompidou qui partage son bâtiment avec la Bibliothèque Publique d’Information ;

les Champs Libres de Rennes qui concentrent bibliothèque, musée de Bretagne et cité des

sciences sous un même toit ; mais aussi The Morgan Library & Museum à New York (Etats-

Unis) (Figures 20, 21, 22 et 23) composée :

- d’un musée implanté dans l’ancienne villa de John PIERPONT MORGAN (1837-

1913), fondateur de cette institution,

27

Attention à ne pas confondre les musées-bibliothèques, des musées qui possèdent une bibliothèque comme

complément d’étude de leurs collections d’œuvres d’art. Dans le cas présent, les musées-bibliothèques

abordées sont des structures dans lesquelles les deux institutions vivent de manière relativement égale ; c'est-

à-dire que l’une n’est pas la subordonnée de l’autre.

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- d’une bibliothèque (Figures 20 et 21). D'inspiration Renaissance italienne (rappelle le

palais du Té à Mantoue), elle a été conçue en 1906 par l'architecte Charles FOLLEN

MCKIM,

- et plus récemment, depuis 2006, d’un auditorium, construit d’après les plans du

célèbre architecte italien Renzo PIANO.

Cette bibliothèque d’histoire, de littérature et de musique, vaut le détour pour son

architecture éclectique mêlant différents styles architecturaux, pour ses collections

anciennes (350.000 œuvres au total), parmi lesquelles se trouvent un manuscrit et des

partitions de Mozart, la Bible de Gutenberg, des lettres de Van Gogh, des gravures de

Rembrandt, un manuscrit original d'Eugénie Grandet de Balzac… et pour sa politique

d’animation culturelle variée : expositions, concerts, etc.

Figures 20, 21, 22 et 23 : The Morgan Library & Museum (New-York)

Sources : http://lifeasdaddy.typepad.com/lifeasdaddy/2008/08/wanna-see-a-gutenberg-bible-get-thee-to-the-morgan.html

http://www.dwell.com/articles/creating-the-modern-stage-at-the-morgan-library.html

Ces édifices communs, sont la manifestation la plus tangible de cette parenté entre

musée et bibliothèque. Ce rapprochement n’est pas anodin. Si musées et bibliothèques sont

rassemblés sous un même toit, cela vient de la proximité de leur fonctions et des usages. Cela

démontre aussi que le public des musées et bibliothèques est proche.

Les musées et bibliothèques publiques, sous leur forme actuelle, apparaissent à l’issue

de la Révolution. Ce sont des progénitures du mouvement des Lumières à la fin du XVIIIème

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siècle. Nées d’un mouvement de démocratisation des connaissances, elles vont participer à

l’émergence d’une nouvelle société, sur les ruines de l’ancienne. C’est par elles que va se

créer ce que l’on appelle aujourd’hui le public. Les œuvres picturales, écrites et graphiques,

jusqu’alors réservées à un usage privé, se retrouvent dans les bibliothèques et musées,

confrontées à un usage public. Depuis leur apparition, l’histoire des bibliothèques et musées

est proche. Elles n’évoluent pas toujours en même temps selon les domaines, mais de manière

générale, ces deux institutions suivent une trajectoire parallèle. La preuve en est concernant

leur appropriation par les villes. Les musées comme les bibliothèques intéressent aujourd’hui

toutes deux les maires. Mais le musée a été bien plus tôt pris en considération par les villes

que la bibliothèque. La construction de grands musées des Beaux-arts en province depuis le

XIXème siècle atteste bien de cette sollicitude plus précoce de la part des municipalités.

Cependant, il est aussi à noter qu’au XIXème siècle, les musées comme les bibliothèques

n’occupaient pas les premières places au rang du budget accordé aux structures culturelles par

les villes. Jusque dans les années 1960, c’est le théâtre qui demeure l’institution centrale des

politiques culturelles des agglomérations provinciales.

Les musées comme les bibliothèques oscillent entre conservation et diffusion. Leur chemin

d’évolution concernant ses deux rôles est aussi assez proche. C’est le cas par exemple avec la

numérisation de leur collection. Ce sont deux structures qui se posent les mêmes questions.

Elles s’interrogent, par exemple, toutes deux sur ce que signifie aujourd’hui le concept de

démocratisation culturelle. Selon, Dominique POULOT28, l’histoire des musées doit s’inspirer

des mutations qui touchent les bibliothèques. Mais cela marche aussi dans l’autre sens, les

bibliothèques peuvent aussi prendre appui sur les transformations des musées. Dans le cas

d’une mise en tourisme des bibliothèques c’est d’ailleurs conseillé.

Ce sont les collections des bibliothèques et musées qui rendent ces deux instituts si proches.

Qu’il soit pictural et sculptural dans les musées et écrit et graphique dans les bibliothèques, il

n’en demeure pas moins que ces deux structures concentrent un patrimoine légitime.

28

Le musée et la bibliothèque, vrais parents ou faux amis ?. Paris : BPI-Centre Georges Pompidou, 1997. 242 p.

(Collection “Etudes et recherche, ISSN 0993-8958) ISBN 2-84246-016-2

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“Ce sont toujours la conservation et la réunion d’un trésor précieux qui constituent la

raison de l’édification du musée et ces bâtiments doivent être conçus dans le même esprit que

les bibliothèques […] qui peuvent être considérées pour une part comme un trésor public,

comme l’entrepôt le plus précieux des connaissances humaines, pour l’autre, comme un

temple consacré aux études“. Jean-Nicolas-Louis DURAND, en 1803, dans son Précis des

leçons d’architecte, dévoile bien les similitudes des musées et bibliothèques dans leurs rôles

et missions. La présence de ce patrimoine, différents dans leur forme, mais révélant tous deux

le témoignage du passé utile pour le présent et l’avenir, donne aux bibliothèques et musées un

certain nombre de rôles et missions identiques. Ce sont des espaces publics (au sens de leur

accessibilité) ancrés dans un territoire, qui ont des fonctions pédagogiques et culturelles qui

leurs sont assignées. Ils ont pour rôle, de gérer des collections : acquisition, préservation,

valorisation, diffusion, font parties des fonctions des musées comme des bibliothèques.

Grâce à ce fonds et leur missions, ces deux établissements culturels rencontrent

aujourd’hui un succès public l’un comme l’autre. La fréquentation de ces lieux n’a jamais été

aussi bonne et leur notoriété aussi forte. D’institutions fermées élitistes, ils ont su se

transformer en lieux ouverts et attractifs. Cependant, le pari n’est pas complètement gagné ;

tout le monde n’arpente pas encore les allées des bibliothèques et les salles des musées. Même

si leur évolution concernant la question de l’accessibilité est certaine, ils continuent tous deux

de susciter, pour certaines couches de la société, un sentiment d’étrangeté, voire d’hostilité.

Les couches de la population défavorisée ne viennent pas ou très rarement dans ces enceintes

culturelles, et la gratuité de ces structures n’y change rien.

b. Bibliothèques et musées : deux structures faussement amies qui se

distinguent

Bien qu’apparentes grâce à leurs fonds et missions, c’est aussi par ces deux aspects

notamment, que musées et bibliothèques se distinguent.

Comme dit précédemment, la bibliothèque et le musée recèlent un patrimoine culturel.

Cependant, ce patrimoine n’apparait pas sous la même forme. Dans le cas des institutions

muséales, il s’agit d’œuvres d’art : peintures, photographies, sculptures, dessins, gravures…

alors que pour la bibliothèque, il s’agit d’un patrimoine écrit et graphique : imprimés,

manuscrits, estampes, cartes géographiques, cartes postales, plans d’architectes, mais aussi

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des documents comme les disques, CDs, DVDs… Ces derniers supports, plus modernes, ne

sont pas encore considérés comme un patrimoine - nous n’avons pas encore la distance

temporelle suffisante pour pouvoir les considérer comme tel – mais dans quelques années, il

n’est pas impossible qu’ils le deviennent, ne serait-ce pour leur type de support marquant une

évolution technique.

La nature différente de ces fonds nécessite un usage différent de ce patrimoine. Dans

les musées, il n’est pas possible de toucher les œuvres, seul le regard est autorisé. Dans les

bibliothèques, en revanche, il est obligatoire de manipuler l’objet écrit pour le découvrir. Les

usages sont donc distincts pour le public. Le traitement de ce patrimoine de la part des

professionnels l’est tout autant. Le travail de valorisation des collections n’est pas le même et

de même ampleur, dans les bibliothèques que dans les musées. Les institutions muséales ont

recours à la valorisation de leur fonds afin de le diffuser au public. Cela se manifeste par des

expositions principalement. Les bibliothèques ayant aussi une mission de lecture publique,

elles, ont eu tendance, au siècle dernier, à privilégier cette mission, au désagrément de la

valorisation de leur patrimoine. Les expositions et médiations pour faire découvrir les

richesses des bibliothèques étaient donc peu présentes au XXème siècle. Mais, aujourd’hui,

cette dissemblance s’est considérablement amoindrie. En effet, les bibliothèques effectuent

depuis quelques années une valorisation sur le fond comme dans la forme. Les collections

documentaires sont mises en avant par des actions culturelles. Quant aux bâtiments

renfermant ces collections, ils deviennent plus fonctionnels et esthétiques. Qu’elles soient

municipales, nationales, spécialisées ou encore religieuses, les bibliothèques se sont toutes

ouvertes à cette nouvelle mission qu’est la valorisation. Elles diversifient leurs offres, tout en

gardant, leurs fonctions premières ; à savoir, la conservation du patrimoine écrit et la diffusion

de la connaissance au public.

Concernant leur autres missions, il existe certaines fonctions au sein du musée qui ne sont pas

présentes dans les bibliothèques, et inversement. Par exemple, le musée a une mission

commerciale plus visible que la bibliothèque n’a pas. Cela se manifeste notamment par le

prix des entrées et la présence de boutiques dans lesquelles se trouvent des objets dérivés, des

souvenirs de l’exposition : catalogues, cartes postales, affiches, reproductions et objets divers.

Les bibliothèques, à part des droits payants pour le prêt, ne sont en aucun cas commerciales.

A l’inverse, la bibliothèque est un lieu de travail, ce que n’est pas le musée même si son rôle

éducatif est acquis.

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Ces différences de pratiques au sein des bibliothèques et musées entrainent aussi une

différence concernant leur public. Il ne s’agit pas de dire que les usagers en bibliothèques ne

vont pas dans les musées et inversement, mais plutôt de dire que leurs pratiques au sein de ces

deux institutions ne sont pas les mêmes. Tout d’abord, d’un point de vue terminologique, il

faut préciser que les musées n’ont pas d’usagers mais plutôt des visiteurs. Leur venue dans la

structure muséale est de l’ordre du parcours alors que dans le cas du public des bibliothèques,

il s’agit plutôt d’un séjour.

Le caractère touristique des institutions muséales est clairement avéré. Pour la bibliothèque,

même si elle est ouverte à tous, elle conserve un public de proximité : majoritairement des

abonnés. Mises à part quelques bibliothèques comme celle de l’Abbaye de Melk (Autriche) -

uniquement ouverte à la visite et non à la consultation - et la mise en place d’expositions dans

de grandes bibliothèques comme celle sur les estampes japonaises : “Estampes japonaises,

Images d’un monde éphémère“ à la BnF, qui attire des visiteurs, le caractère touristique des

bibliothèques est loin d’être établi. A cet effet, la place de ces deux instituts est quelque peu

divergente dans l’esprit des élus. La bibliothèque est sans aucun doute l’établissement le plus

fréquenté par la population locale (lecteurs-électeurs). Quant au musée, il offre davantage ses

collections aux regards des touristes de passage dans la ville.

Enfin, le musée et la bibliothèque se distinguent du point de vue de leur notoriété, de

leur image. Le musée est clairement une institution patrimoniale légitime. Le statut de ces

collections en tant qu’œuvres est plus établi, sans contexte par tout le monde. C’est une

structure qui apparait aux yeux de la population comme un haut lieu culturel, plus “noble“ que

la bibliothèque, qui elle, apparait avant tout comme un lieu social. Au regard de l’évolution de

ces structures, cette différence de reconnaissance semble logique. La bibliothèque s’est

transformée plus rapidement en espace public ouvert à tous, pour favoriser la lecture publique

notamment ; alors que dans le cas des musées, le public est resté plus élitiste : l’idée que tout

le monde ne peut accéder à l’art, ne peut le comprendre. L’écart entre les modes de médiation

a participé à cette perception. En outre, de tout temps, la peinture – style pictural majoritaire

dans les musées – a toujours été considérée comme l’art “noble“ au contraire d’arts plus

mineurs comme les arts décoratifs, la littérature, etc.

Pour conclure sur cette comparaison, musées et bibliothèques sont tous deux des

instituts culturels faisant partie du même “arbre généalogique“. En ce sens, ils possèdent

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nombre de ressemblances dans leurs fonds, leurs missions, leurs bâtiments et leurs histoires.

Mais ce sont aussi ces mêmes éléments qui les distinguent. De manière caricaturale, la

bibliothèque fut autrefois un musée mais elle s’en est détachée depuis longtemps pour devenir

une structure largement ouverte et plus vivante dans ses usages. Le musée, quant à lui,

commence progressivement à devenir une bibliothèque, au sens où il incorpore de nouveaux

instruments de travail, des méthodes de découvertes interactives rendant le visiteur plus actif.

L’évolution de ces deux instituts montre clairement qu’ils s’auto-influencent. La bibliothèque,

en quête d’une identité d’institution patrimoniale plus légitime et d’une ouverture toujours

plus grande sur le monde et son public, va-t-elle s’inspirer du musée pour se transformer

progressivement en un lieu également touristique ? Si oui, il lui faudra donc prendre exemple

sur la valorisation, médiation culturelle, politique d’accueil du public touristique, présentes au

sein des structures muséales. Ce sont des éléments qui figurent déjà dans les bibliothèques

mais qui ne sont pas travaillés de la même manière. Par exemple, la bibliothèque n’a pas

recours pour encore aux mêmes moyens en matière de valorisation du patrimoine que les

musées pour le moment. Cela parait logique, vu qu’elle a des missions supplémentaires à

gérer. Une étude des moyens de communication – moyens très peu utilisés par la bibliothèque

– présents dans les musées sera aussi très importante en vue de faire évoluer la notoriété des

bibliothèques et d’étendre sa visibilité à des touristes nationaux comme étrangers.

2. LES PREMICES DU TOURISME DANS LE MILIEU DU LIVRE ET DES BIBLIOTHEQUES

Même si associer le tourisme au monde des bibliothèques n’est pas encore chose

acquise pour le public comme pour les professionnels, des traces de tourisme sont tout de

même apparentes dans quelques bibliothèques. Elles mettent d’ailleurs déjà en avant deux

types de touristes au sein de ces institutions culturelles : le “touriste-usager“ et le “touriste-

visiteur“, c'est-à-dire des touristes qui utilisent la bibliothèque (emprunteurs, lecteurs…) et

d’autres qui viennent la découvrir (visite de son bâtiment, découverte de ses documents, des

expositions,…). Les premiers recherchent l’activité de lecture publique alors que les seconds

sont en quête de l’offre culturelle, du patrimoine de ces lieux.

Sans être exhaustif, ce sous-chapitre fera état des formes de tourisme apparentes au

sein des bibliothèques dans le monde, à travers plusieurs exemples.

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a. Les bibliothèques aux abords de stations touristiques

Les bibliothèques implantées dans ou aux abords des stations touristiques à la plage

comme en montagne observent depuis quelques années une fréquentation plus forte durant la

période estivale. Dans un article de BIBLIOthèque(s)29, la directrice de la Médiathèque de

Megève (station touristique de montagne française notoire), Isabelle VIDAL, affirme que

“[…] le public touristique fait largement partie des visiteurs potentiels des bibliothèques“.

Elle déclare d’ailleurs dès le début que “de nombreux professionnels en ont désormais

conscience […]“. L’article annonce qu’il existe des expériences de tourisme avec des

bibliothèques de plages, mais aussi de montagne. C’est le cas à Megève. De nombreux

touristes viennent à la bibliothèque pour lire les journaux, utiliser Internet, emprunter un

livre… pour la soirée après une journée sur les pistes de ski ou en cas de mauvais temps par

exemple. Selon les bibliothécaires, la météo est un facteur déterminant dans la fréquentation

des touristes en bibliothèques. L’hiver, s’il y a du mauvais temps et peu de neige, la

fréquentation des médiathèques entourant les stations de ski sera plus forte. Et, en été, le taux

de visiteurs venant dans les bibliothèques de destinations touristiques se révèle inversement

proportionnel aux taux d’ensoleillement. Alors que certains établissements urbains réduisent

leurs horaires d’ouverture durant les périodes de vacances pour cause de baisse de

fréquentation ce n’est pas le cas à la médiathèque de Megève. Pour asseoir ses propos,

Isabelle VIDAL fournit quelques statistiques comme, en autre, que “les entrées d’une après-

midi pluvieuse (1.300 entrées en 3 heures en août 2008) égalent presque un mois entier en

basse saison (1.785 entrées en mai 2008)“.

En 2007, lorsque l’on interrogeait les professionnels des bibliothèques ils ne

considéraient pas les vacanciers comme un public à accueillir et trouvaient même surprenant

d’envisager une telle possibilité. En 3 ans, les choses ont évolué. Certaines bibliothèques font

désormais apparaitre ce public dans leur documentation de communication. Les Offices de

tourisme référencent ce type de structures culturelles sur leurs sites Internet. Et pour les

29

VIDAL Isabelle. Tu viens pour les vacances ? Réflexions sur l’accueil du public touristique en bibliothèque.

BIBLIOthèque(s) : revue de l’Association des bibliothécaires français, 2010, n° 49, p. 54 à 57. ISSN 1632-9201

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professionnels du tourisme, avoir une médiathèque à proximité est même devenu un atout

dans l’obtention de certains labels touristiques (type Famille +30).

Les médias ont même saisi cette évolution. En atteste un reportage présenté dans le journal

télévisé de 13h de Jean-Pierre PERNAUT (sur TF1) sur la bibliothèque de Carnon-Plage,

implantée dans l’Hérault par le conseil général.

L’accueil de ce nouveau type de public a entrainé certaines modifications au niveau

des services, des horaires d’ouvertures, de la tarification, et même parfois dans l’agencement

des locaux pour les bibliothèques touchées par ce phénomène. Dans le cas de Megève, la

prise de conscience de ce public a coïncidé avec le projet de la nouvelle médiathèque. Le

bâtiment a donc été conçu pour accueillir des “séjourneurs“ grâce à la mise à disposition de

grands espaces vides permettant de se reposer et d’observer par le biais de larges baies vitrées

le paysage montagneux de cette région.

Enfin, les vacances étant propices à la lecture, certaines bibliothèques se sont même

déplacées vers les touristes. Aux abords de certaines plages (Frontignan, Boulogne, Talmont

saint Hilaire, Calais… pour les exemples français), les touristes peuvent désormais trouver de

petites annexes de bibliothèques pour y emprunter un livre à la journée à feuilleter au bord de

l’eau. Même si ce modèle s’éloigne des bibliothèques plus traditionnelles abordées à travers

ce mémoire, cela montre tout de même l’évolution et la prise en compte de l’intérêt qu’ont les

vacanciers pour les livres.

Les touristes aiment lire et visitent souvent des sites culturels durant leurs vacances. En

partant de ces deux observations schématiques, un peu caricaturales, il est possible de

convenir que la bibliothèque possède un potentiel touristique attractif à développer.

b. Les bibliothèques nationales

Ce sont les plus grandes bibliothèques : les bibliothèques nationales, qui travaillent le

plus à une médiation auprès de visiteurs autres que les usagers traditionnels. Ce n’est pas

étonnant : elles ont généralement le fonds le plus important de leur pays grâce au système de

dépôt légal, à des dons importants et des moyens financiers plus conséquents qui permettent à

30

Famille + est un Label national reconnu depuis 2006 par le ministère délégué au Tourisme. Inscrit dans la

démarche du Plan Qualité Tourisme, il offre une meilleure lisibilité des prestations proposées aux familles et

enfants dans les communes touristiques françaises aux clientèles françaises et étrangères.

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la fois d’augmenter leur collection mais aussi de mettre en place de plus grands dispositifs de

valorisation et de communication. C’est le cas, par exemple, en France avec la Bibliothèque

nationale de France (BnF), au Québec avec la Bibliothèque et archives nationales du Québec

(BAnQ), en Egypte, avec la Bibliotheca Alexandrina, ou encore en Colombie avec la

Biblioteca nacional de Colombia.

La bibliothèque nationale est le symbole de l’autorité et de l’efficacité d’une administration

centrale. Pour plus de visibilité, une plus grande singularité face aux monuments historiques

et sites culturels, la bibliothèque nationale est aujourd’hui placée en marge des établissements

historiques. La preuve en est avec la BnF qui a transféré son centre, jusqu’alors placé au cœur

de Paris (1er arrondissement) dans la bibliothèque Richelieu, dans le 13ème arrondissement de

Paris sur le site de Tolbiac, François-Mitterrand. “Aujourd’hui, le nouvel emplacement d’une

bibliothèque nationale est souvent considéré comme une petite city autonome […], le centre

idéal d’un vaste quartier en pleine rénovation, une référence fondamentale dans l’océan

d’habitations de la grande ville“. Cette citation d’Aldo DE POLI, dans son ouvrage

Bibliothèques. Architectures. 1995-2005, illustre parfaitement la situation de la BnF, qui,

ancrée dans un quartier en pleine reconversion, a su se placer comme centre attractif et

dynamique. La majeure partie des habitations et commerces aux alentours ont été conçus

après son implantation. Aujourd’hui, la BnF reçoit le 1er budget du ministère. Elle doit donner

gage d’une plus grande ouverture jusqu’alors réservée plutôt aux chercheurs. A cet effet, elle

accorde une grande importance au développement de ses actions culturelles : visites (des

bâtiments, des expositions), l’accueil de groupes,… C’est d’ailleurs déjà payant puisque la

BnF profite de l’attractivité de Paris comme haut lieu touristique et culturel pour recevoir des

visiteurs. A cet effet, elle fait désormais partie des 52 établissements culturels franciliens

faisant chaque année l’objet d’une enquête de publics : “Qualité de l’Accueil du Visiteur“,

réalisée par le Comité Régional du Tourisme Paris-Ile-de-France (CRT)31. La BnF envisage,

suite aux travaux de rénovations qui ont lieu actuellement, de donner un accès gratuit à la

salle ovale dans laquelle seront présentés les trésors de la bibliothèque (de manière virtuelle

ou réelle).

31

TOUITOU Cécile. Bienvenue à la BnF. Trajectoire. Lettre interne de la Bibliothèque nationale de France, 2009,

n°130, p.1. ISSN 1169-2669

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52

Peu de bibliothèques, même nationales, affichent directement leur ambition

touristique. Pourtant ce fut le cas dès le début avec la Bibliotheca Alexandrina en Egypte.

Implantée à Alexandrie sous les fondements de la plus célèbre des bibliothèques antiques du

monde, la bibliothèque nationale d’Egypte a vu grand dès sa phase de projet : concentrer huit

milles ouvrages à long terme, et accueillir un public diversifié : national et international.

Alexandrie a subi un peu le même sort que Barcelone et Bilbao en Espagne avant leurs

reconversions touristiques. Pendant des décennies, elle était en dehors des grands circuits

touristiques du tourisme international, qui ne se concentraient que sur Le Caire, la Mer rouge

et la Haute-Egypte. Ainsi, en choisissant d’implanter cette bibliothèque, l’ambition était non

seulement de créer une grande bibliothèque internationale mais aussi de replacer Alexandrie

sur les cartes touristiques.

De manière générale, les bibliothèques nationales n’utilisent pas le terme “touristes“

en parlant de leur public visiteur. Le colloque sur le projet de rénovation du quadrilatère

Richelieu32, a clairement montré, d’après les interventions de l’auditoire, qu’il était tabou

d’associer le tourisme aux bibliothèques. Les professionnels du livre semblent voir dans cette

activité de loisirs, une menace, un risque de dégradation de ces lieux de culture et de savoirs.

Pourtant, dans leurs actions culturelles entreprises et dans l’aménagement de leurs locaux, ces

institutions nationales patrimoniales semblent avoir réuni les conditions pour faire venir ce

type de public. Que ce soit la bibliothèque nationale de Colombie, celle d’Irlande à Dublin,

celle d’Australie à Canberra, mais aussi la BanQ de Montréal et bien d’autres, elles proposent

toutes aujourd’hui des manifestations culturelles temporaires (expositions, conférences,

concerts, colloques, projection) sur leur fonds, ainsi que des visites guidées de leur bâtiment et

de leurs expositions. En outre, ces haut lieux de recherche possèdent tous des espaces de

détente (cafeteria, boutique, espace de repos), davantage propres au pratiques des visiteurs

qu’à celles des étudiants et enseignants. Enfin, leur situation dans les capitales, villes parmi

les plus visitées de leur pays, favorise l’attraction touristique car elles sont généralement bien

desservies et indiquées par des panneaux signalétiques. Par exemple, la Bibliothèque et

archives nationales du Québec est desservie directement.

32

BnF Richelieu : Un projet en question. Journées d’étude les 5 et 6 juillet 2010 à l’Institut national d’Histoire de

l’Art, organisée par l’Association pour la Sauvegarde et la Mise en valeur du Paris historique et l’Université Paris

1 Panthéon-Sorbonne.

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c. Les bibliothèques dites historiques

Le terme de “bibliothèques historiques“, au sein de ce travail de recherche, fait

référence aux bibliothèques anciennes, souvent privées (du moins à l’origine) et se trouvant

souvent nichées dans des monuments historiques déjà touristiques. Ce sont des bibliothèques

uniquement patrimoniales. Elles n’ont pas de missions de lecture publique ; leur fonds étant

ancien et spécialisé. En revanche, elles intéressent les chercheurs et historiens. Ce sont des

structures qui sont plus ou moins partiellement ouvertes aux érudits et aux visites.

L’évocation de plusieurs cas permettra de mieux les cerner et de prendre conscience de la

place du tourisme au sein de ces instituts.

Les bibliothèques spirituelles

Au Moyen-âge, les bibliothèques qui étaient jusqu’alors principalement placées dans des

palais, ou bâtiments propres à leurs fonctions, se retrouvent cachées dans des institutions

religieuses. Aujourd’hui, il nous reste plusieurs magnifiques exemples de bibliothèques issues

de monuments religieux. Elles se manifestent sous la forme de magnifiques salles renfermant

un patrimoine écrit riche et rare. C’est le cas de la bibliothèque abbatiale d’Admont en

Autriche et de celle du couvent de St-Gall en Suisse.

- La bibliothèque de l’Abbaye d'Admont (Autriche) (Figures 24 et 25).

Figure 25 :

Bibliothèque de

l'Abbaye d'Amont

Source : http://urga.over-blog.com/article-

26940448.html

Fondée en 1074 au cœur de l’Autriche, l’Abbaye d'Admont est un monastère

bénédictin qui héberge la plus grande bibliothèque monastique du monde créée au milieu du

XVIIIème siècle. Dès le XIème siècle, les moines commencent à se constituer un fonds

documentaire en collectionnant et copiant - grâce à leur atelier de copistes - des manuscrits

religieux Aujourd’hui, la bibliothèque conserve environ 180.000 ouvrages dont 1.400

manuscrits et 530 incunables. Il s’agit de la plus grande bibliothèque d’abbaye conservée au

monde. Parmi ce fonds ancien riche, se trouvent des pièces uniques telles que l'édition

Figure 24 : Abbaye

d'Admont (Autriche) Source : http://urga.over-blog.com/article-26940448.html

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originale de l'encyclopédie de DIDEROT et D'ALEMBERT (1758) ou la bible de Martin

LUTHER.

L’architecture de la bibliothèque est toute aussi impressionnante que son fonds patrimonial.

En effet, les collections prennent place dans une somptueuse bibliothèque, aux dimensions

gigantesques (13 mètres de haut, 79 mètres de long et 14 mètres de large) achevée en 1776.

De style rococo, la bibliothèque est surmontée de sept coupoles décorées de fresques en

trompe-l'œil de Bartolomeo ALTOMONTE. Le sol de marbre en damier est parsemé de

sculptures figurant La Mort, Le Jugement dernier, Le Paradis et L'Enfer.

Enfin, outre son patrimoine écrit et son architecture attrayante, son histoire peut aussi susciter

l’intérêt du visiteur puisque la bibliothèque a été “miraculeusement“ épargnée par un incendie

qui ravagea le reste du monastère en 1865. De plus, durant la seconde guerre mondiale, cette

bibliothèque, qui comporte un fonds spécialisé sur les sciences et l'histoire, s’est vue

réquisitionnée quelque 2.000 ouvrages médicaux par les nazis pour servir leurs expériences

sur des cobayes humains dans les camps de concentration de Dachau. Ces livres ont pu être

récupérés à la fin de la guerre.

Après quatre ans de travaux de rénovations qui coutèrent 6 millions d’euros, la bibliothèque

de l’Abbaye d'Admont est de nouveau ouverte au public. Depuis 2003, aux côtés de la

bibliothèque, se déploie un espace d’exposition de 3.600 m² dans lequel se trouvent un musée

d’histoire naturelle, un musée d’art contemporain avec des expositions temporaires et un

espace multimédia présentant le monastère. Ses gestionnaires espèrent que, malgré sa

situation géographique isolée des circuits touristiques, l’Abbaye puisse dépasser les 80.000

visiteurs annuels actuels. Pour accueillir des touristes, la bibliothèque et le musée sont ouverts

quotidiennement de mars à novembre de 9h à 17h. Selon les jours, les visiteurs peuvent

bénéficier de certains prix ou attractions. Par exemple, il existe un prix d’entrée spécial “Fête

des mères“ ; l’été, des tarifs préférentiels sont accordés aux familles et les édifices sont

ouverts jusqu’à 20h le vendredi ; en décembre, la bibliothèque et le musée sont ouverts deux

jours et l’abbaye propose un marché de Noël pour ses visiteurs…Une tarification très

diversifiée a été mise en place dans cette institution pour attirer aussi bien les individuels et

groupes, les familles, les adultes et enfants, les handicapés. Cette tarification varie aussi selon

la saison. Cela montre clairement le désir d’attirer un large public parmi lesquels des touristes.

Une fois l’entrée payée, la bibliothèque se découvre par soi-même ou accompagné d’un guide

pendant 40 minutes. Les gestionnaires ont bien réfléchi à l’accessibilité du site, puisque

comme indiqué sur le prospectus en annexe G, les personnes en fauteuil roulant et les parents

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accompagnés de poussettes peuvent circuler dans l’Abbaye. De plus, aux vues des figures 26,

27 et 28, un plan de circulation et une valorisation des éléments exposés ont été pensés. Le

tapis au sol informe le visiteur de manière implicite sur le chemin à prendre. Les bancs et

barrières sur les côtés délimitent l’espace de circulation. La bibliothèque sert de décor en

quelque sorte et au milieu se trouvent des éléments d’exposition. La conservation de ce

patrimoine unique est d’autant plus primordiale que l’abbaye a failli le perdre à plusieurs

moments de son histoire. Depuis sa dernière restauration, l’accent est donc mis sur la

préservation. Il ne faut pas que l’ouverture au public pâtisse de la conservation de ces biens.

Ainsi, comme en témoigne la figure 29, des gants sont prêtés aux visiteurs lorsqu’ils ont

l’occasion de manipuler des ouvrages. Pour aboutir à la visite, la figure 30 montre qu’il existe

une boutique, élément très présent dans les structures touristiques. Enfin, l’actualité et la

richesse des informations de son site Internet, la présence d’un prospectus anglais-allemand et

celle de liens hypertextes vers des sites Internet d’autres lieux culturels et parcs naturels

(puisque l’Abbaye est elle-même implantée dans une zone naturelle riche et attractive pour les

randonneurs notamment), témoignent d’un travail de communication et de promotion effectué

par les gestionnaires de l’Abbaye.

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Figures 26, 27, 28, 29 et 30 : Salles de la

bibliothèque de l’Abbaye d’Admont (Autriche)

Source : http://www.stiftadmont.at/english/

La bibliothèque du monastère d’Admont est un bon exemple pour prouver le potentiel

touristique des bibliothèques. La part de tourisme est clairement perceptible. D’ailleurs sur

leur site Internet, dans la page présentant les effectifs de la structure, il est bien mentionné

qu’il s’agit de la “ Team of the department "Culture & Tourism"“ 33. Bien qu’isolée, car située

au cœur de l’Autriche parmi les sommets alpins, elle arrive tout de même à drainer quelque

80.000 visiteurs par an. Et dans ce cas, ce n’est pas le musée l’élément fondateur et attractif

mais la bibliothèque à laquelle s’est ajouté un musée comme complément. Son accessibilité

donne aussi des idées quant aux transformations que d’autres bibliothèques devront effectuer

pour envisager une plus grande ouverture aux visiteurs.

- La bibliothèque du couvent de Saint-Gall (Suisse) (Figure 31)

La bibliothèque conventuelle de Saint-Gall

est un autre exemple de bibliothèques

“religieuses“. Inscrit en 1983 sur la liste du

patrimoine culturel de l'UNESCO, le couvent de

Saint-Gall et sa bibliothèque, dans sa version

actuelle, remonte au XVIIIème siècle.

L’architecture de sa salle séculière, de conception

baroque et de décor rococo – sans doute le plus bel

exemple de Suisse – et son fonds patrimonial de

quelque 150.000 volumes dont 2.000 manuscrits

originaux du Moyen-âge, parmi lesquels figurent 400 ouvrages datant d’avant l’an mille,

offrent à ce lieu une renommée mondiale.

33

Benediktinerstift Admont [en ligne]. Disponible sur <http://www.stiftadmont.at/english/> (consulté le

29.08.2010)

Figure 31 : Bibliothèque du couvent de Saint-

Gall (Suisse)

Source : http://urga.over-blog.com/article-26940448.html

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Ouverte, sur entrée payante (prix variant selon le profil des visiteurs : enfants, adultes,

étudiants…), quotidiennement (du lundi au samedi : 10:00 - 17:00 et dimanche : 10:00 -

16:00), du 30 novembre 2009 au 7 novembre 2010, la bibliothèque se visite individuellement

ou en groupe et propose chaque année, une exposition temporaire. Généralement basées sur

les collections de la structure, les expositions temporaires en bibliothèque reflètent le lieu et

participe à une meilleure compréhension du site par les visiteurs. Une personne au sein du

personnel de cette bibliothèque travaille uniquement sur les visites de ce lieu. Cela montre

l’importance de cette activité même si cette bibliothèque reste aussi une bibliothèque publique

qui autorise les prêts d’ouvrages. En tant que site emblématique de Saint-Gall, la bibliothèque

du couvent fait partie des éléments découverts lors de circuits guidés de la ville, autant pour

son architecture que pour son fonds et son lapidarium. Le touriste peut ainsi visiter la

cathédrale, la bibliothèque et la vieille ville de Saint-Gall. Parmi ses outils de communication,

elle est présente sur la toile à travers un site Internet34 et une page Facebook35. De plus, des

informations sur ce couvent sont visibles également sur les sites Internet de l’Unesco et de la

ville de Saint-Gall. Riche de manuscrits très anciens remontant pour la plupart au moyen-âge,

la bibliothèque de Saint-Gall a mis en place le projet “Codices Electronici Sangallenses“

(Bibliothèque abbatiale de Saint-Gall numérique)36 qui vise à numériser progressivement ses

fonds et les mettre en accès libre à tous depuis Internet. C’est un moyen de diffuser le contenu

de ces ouvrages et de les conserver. A l’heure actuelle, 383 manuscrits sont déjà accessibles.

Comme pour l’abbaye d’Admont, le site Internet du couvent de Saint-Gall propose des liens

vers d’autres sites touristiques comme celui de l’Office de Tourisme de la ville. Si ses atouts

touristiques et attractifs semblent indéniables, son inscription au titre de patrimoine mondial

de l’Unesco a dû jouer une part importante dans le développement de cette activité, de part la

notoriété internationale de cette convention. De plus ce titre a dû aussi avoir un impact sur les

financements et aides obtenus pour sa préservation.

34 Stiftsbibliothek St. Gallen. Stiftsbibliothek St. Gallen [en ligne]. Disponible sur

<http://www.stibi.ch/index.asp> (consulté le 10.09.2010)

35 Stiftsbibliothek St. Gallen. Stiftsbibliothek St. Gallen [en ligne]. Disponible sur

<http://www.facebook.com/photo.php?pid=120893&fbid=127113863996641&id=116761311698563#!/stiftsbi

bliothek> (consulté le 10.09.2010)

36 CESG - Codices Electronici Sangallense [en ligne]. Disponible sur <http://www.cesg.unifr.ch/fr/index.htm>

(consulté le 10.09.2010)

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Pour conclure sur ce cas, la bibliothèque du couvent de Saint-Gall est un bon exemple de

bibliothèque qui allie différentes missions : scientifique, éducative, de lecture publique et

touristique.

Les bibliothèques de cour

Parmi les bibliothèques historiques, l’on retrouve aussi des bibliothèques conservées dans

des châteaux et/ou issues de collections de nobles, bourgeois, riches collectionneurs.

- La bibliothèque du château de Chantilly en est un exemple.

Riches des collections de documents écrits, réunies au fil des siècles par les seigneurs de

Chantilly (membres des familles DE MONTMORENCY et DE BOURBON-CONDE), mais

aussi par le duc D’AUMALE au XIXème siècle, la bibliothèque et les archives du château de

Chantilly possèdent un fonds patrimonial unique, qu’elles continuent de compléter par des

acquisitions modernes et contemporaines aujourd’hui.

Lieu historique très fréquenté, le château de Chantilly fait bénéficier à la bibliothèque de son

attractivité touristique. Pour répondre aux attentes de ce public, est mise en place des actions

de valorisation du fonds patrimonial et une politique d’animation et de médiation. Ainsi, le

touriste, en venant à Chantilly, peut visiter en libre accès le cabinet des livres du duc

D’AUMALE ainsi que la bibliothèque du théâtre, mais qui n’est ouverte au public que sur

visite guidée. Il peut également découvrir les différentes animations proposées autour des

collections, comme des expositions temporaires et conférences thématiques. Enfin, des outils

de communication et d’informations sont mis à la disposition du visiteur comme avant-gout

de la visite ou complément après la visite. C’est le cas du site Internet qui propose des

expositions virtuelles.

Les bibliothèques privées familiales

Les bibliothèques de Chinguetti, d’Ouadane et d’Oualata en Mauritanie nous

confrontent à un autre type de structures : les bibliothèques patrimoniales privées.

Implantées au cœur historique de la Mauritanie, les prestigieuses anciennes cités caravanières

d’Ouadane, Chinguetti et Oualata forment, aux confins du désert, grâce à leurs bibliothèques,

le cœur historique de la Mauritanie. Elles participent au rayonnement culturel du pays à

travers tout le Sahara occidental.

Principalement privées, la dizaine de bibliothèques familiales de Chinguetti sont stockées

dans les maisons des propriétaires qui, en plus d’être conservateurs de manuscrits, éditeurs (ils

recopient les livres qui leur sont transmis par tradition familiale, de père en fils) sont aussi

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souvent professeurs de théologie. Ces bibliothèques renferment des centaines de manuscrits

précieux issus de tout le monde arabe : du Maroc à la Syrie, en passant par l’Egypte. Certains

proviennent de dons de souverains mauritaniens faits par le pacha d’Egypte ou le Bey de

Tunis et d’autres grands personnages de l’histoire. D’autres, maintes fois recopiés, ont été

achetés au cours de pèlerinages en Afrique du Nord, au Caire, en Arabie, à Damas et à

Bagdad. En Mauritanie, les manuscrits ne sont pas des pièces de musée, mais des sources

incontournables de l’histoire vivante du pays. Destinés en premier lieu aux étudiants en

théologie, ils abordent, dans une calligraphie de type orientale ou maghrébine, toutes les

sciences arabes islamiques traditionnelles : jurisprudence, théologie, grammaire,

lexicographie, métrique, rhétorique, littérature, histoire, herméneutique, arithmétique,

mystique, ésotérisme, médecine, astronomie…

Concernant leur conservation, on est également loin du modèle occidental car bien souvent les

ouvrages sont mis à rude épreuve. Conservés sur de simples étagères ou dans des coffres,

dévorés par les termites et sujets aux caprices des températures et de l’humidité, ils subissent

les aléas du temps qui passe. De plus, ces trésors qui attisent la curiosité des visiteurs, se

retrouvent bien souvent malmenés par les touristes qui les effritent et les rendent ainsi

illisibles.

Dans le cas de ces bibliothèques ce ne sont ni les sites Internet, ni les brochures qui amènent

les touristes à venir les découvrir. Ces cités caravanières font partie des points d’étapes de

circuits touristiques organisés par des tours opérateurs. Les visiteurs sont donc souvent des

participants à des treks dans le désert.

L’intérêt touristique, culturel et social de ces hauts lieux de la culture africaine, repose autant

sur la qualité de leur patrimoine que sur le mode de fonctionnement des bibliothèques. Ces

villes reconnues culturellement et touristiquement parlant pour leurs bibliothèques font

aujourd’hui partie des monuments inscrits sur la liste des patrimoines mondiaux. A ce titre, ils

bénéficient notamment, d’une aide plus grande pour la préservation de leur patrimoine, sans

pour autant les transformer en bibliothèque occidentale. Cependant cette aide reste

insuffisante car si ces bibliothèques sont devenues touristiques, ce n’est pas tant par désir de

faire découvrir ce patrimoine riche que pour entretenir les livres. De manière paradoxale, les

propriétaires des bibliothèques se voient obligés de les montrer aux touristes de passage,

quitte à les abîmer chaque jour un peu plus, au contact de la lumière et de la poussière et des

manipulations incessantes pour obtenir les fonds financiers nécessaires à leur sauvegarde.

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Ces cités comme Chinguetti sont très pauvres, sans cesse menacées par des ensablements. Le

tourisme est donc un facteur de survie capital pour ces villes anciennes, grâce à leur position

géographique et leurs patrimoines architectural et écrit qui traduisent leur histoire.

Autres cas de bibliothèques patrimoniales touristiques

Les bibliothèques Carnegie de Reims et Marmottan de Boulogne-Billancourt en

France sont deux institutions qui peuvent aussi entrer dans la catégorie de bibliothèques

historiques au sens ou elles ont une histoire par leur fonds et par leur architecture importante.

Cependant, à la différence de bibliothèques historiques à proprement parler, comme la

bibliothèque du Château de Chantilly, ce sont des bibliothèques plus largement ouvertes à

différents publics : chercheurs, lecteurs et visiteurs. Elles n’ont pas un public d’usagers

restreint.

Dans le cas de la bibliothèque Carnegie, il s’agit d’une institution municipale édifiée dans les

années 1920. Comme le montre l’annexe F, elle peut être considérée comme attraction, au

sens ou elle fait partie des points phares des parcours touristiques de découverte de la ville de

Reims proposés par la municipalité. Son atout principal est son architecture de style Art déco :

qui en fait un témoin de l’histoire de l’architecture mais aussi de l’histoire de Reims.

Elle regroupe aussi les documents patrimoniaux de la ville. Parmi les 400.000 ouvrages qui

composent son fonds, la bibliothèque Carnegie possède 3.000 manuscrits, 220 volumes

d’incunables, 8 000 livres rares, une collection régionaliste (sur Reims et la Champagne) de

25.000 volumes, 60.000 documents iconographiques (affiches, cartes postales, cartes et plans,

gravures) ainsi que près de 30.000 titres de romans policiers. Majoritairement consultables

ces collections se découvrent sur place à la bibliothèque. Comme toute bibliothèque publique

tout le monde peut y entrer et déambuler. Cependant ce sont les visites extérieures qui sont les

plus développées grâce aux circuits touristiques “Reims, ville art déco“.

Dans le cas de la bibliothèque Marmottan, cette structure culturelle dédiée au Premier Empire

possède un ensemble de livres, gravures, tableaux et mobilier recréant l'atmosphère où vécut

Paul MARMOTTAN (1856-1932), historien et collectionneur napoléonien. Entièrement

restaurée et dotée d’équipements modernes nécessaires aux recherches, conférences ou

concerts, la bibliothèque Marmottan attire, depuis 1996, un nombre croissant de chercheurs et

de visiteurs. C’est à la fois une bibliothèque et une maison-muséifiée. Selon, le site Internet de

l’Office de tourisme de Paris, elle propose des visites guidées individuelles et groupées ainsi

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que des visites libres. Son référencement sur le site de l’Office de tourisme de Paris montre

bien qu’il s’agit d’un lieu susceptible d’attirer un public touristique.

d. Les complexes culturels : musées-bibliothèques, les maisons

d’écrivains… : d’autres structures culturelles apparentées au monde du

livre et des bibliothèques.

Il existe des institutions culturelles touristiques abordant un patrimoine écrit et

graphique, similaire à celui des bibliothèques, mais qui, par leur gestion et fonctionnement,

s’apparentent davantage aux musées. C’est le cas du musée international du manga de Kyoto

au Japon (Figure 32).

Cette structure culturelle propose une immense

bibliothèque de mangas en japonais (environ

50.000 exemplaires classés par années), ainsi que

des collections plus restreintes en différentes

langues. Cet institut retrace en son cœur

l’historique et les techniques du manga. Le

visiteur découvre l’évolution de ce type

d’ouvrages, de ses débuts à nos jours, avec son

utilisation comme outil de propagande, son

exportation internationale, et également tout le

domaine amateur des “Doujinshi“37. Ce lieu se visite par soi-même ou en compagnie de

guides-interprètes (en français notamment). Des expositions sont organisées au sein du

bâtiment. Par exemple, en mai 2009, une manifestation temporaire a proposé une

rétrospective, à partir de nombreuses planches originales, sur le dessinateur-scénariste

français Moebius avec “Le Monde moebusien“. Si aucune photographie n’est autorisée à

l’intérieur, il est en revanche possible de consulter les ouvrages ; seule contrainte : lire le

japonais !

Le patrimoine littéraire est loin de désintéresser les touristes. Il existe des maisons

d’écrivains visitables comme celles de Victor HUGO - place des Vosges à Paris - ou celle de

37

Les Doujinshi sont des mangas réalisés par des auteurs amateurs ou confirmés sous formes de fanzines. Ils

parodient souvent des séries populaires.

Figure 32 : Bâtiment du Musée international du

manga de Kyoto (Japon)

Source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Mus%C3%A9e_international_du_manga_de_Ky%C5%8Dto

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Jules Verne à Nantes transformées aujourd’hui en musées. De nombreuses actions culturelles

et touristiques sont créées pour ce patrimoine littéraire. En atteste l’existence, en France,

d’une Fédération des maisons d’écrivain & des patrimoines littéraires. Cette dernière a, selon

son site Internet, pour objectif“[…] de proposer et de mettre en œuvre des actions visant à

assurer l'existence, la préservation et le rayonnement culturel de maisons d'écrivain, de lieux

ou collections, publics ou privés, liés à des écrivains et à l'œuvre écrite d'hommes célèbres de

toutes cultures.“38 En outre, toujours en France, il existe aussi un circuit touristique sur ce

thème : La Route historique des maisons d'écrivains. Couvrant l'Île-de-France (sauf Paris) et

la vallée de la Basse-Seine, cet itinéraire permet de visiter les demeures de treize écrivains,

soit douze lieux (dont celui du couple Aragon-Triolet).

D’après une étude39 réalisée, de mars à septembre 2008, par la Fédération des maisons

d’écrivain & des patrimoines littéraires, concernant les publics de ces lieux littéraires,

présentée aux Xe Rencontres de Bourges, le public des maisons d’écrivain est majoritairement

national et passionné par la littérature. C’est donc plutôt une “niche“ culturelle spécifique à un

type de touristes. Ce n’est pas très étonnant, mais cela à au moins le mérite de confirmer le

potentiel attractif du patrimoine écrit auprès de touristes. De plus, l’enquête révèle que ce

public peut être fidélisé, comme dans les autres lieux culturels, par une politique de

l’évènementielle proposant des activités variées qui peuvent susciter l’intérêt du visiteur si les

moyens de communication utilisés sont suffisants pour les interpeler.

38

LIGNAC Florence, VANNIEUWENHUYZE Sophie. Fédération des maisons d'écrivain et des patrimoines

littéraires : Objectifs [en ligne]. Disponible sur <http://www.litterature-lieux.com/federation/> (consulté le 27

août 2010)

39 Fédération des maisons d'écrivain et des patrimoines littéraires, Université d’Orléans. 2008. Etude des publics

des lieux littéraires [en ligne]. Disponible sur <http://www.litterature-lieux.com/documents/rencontres/2008-

etude-publics-lieux-litteraires.pdf> (consulté le 27 août 2010)

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III. PROPOSITION CONCRETE : LA BIBLIOTHEQUE PEUT DEVENIR UN LIEU

TOURISTIQUE.

Un visiteur est une personne qui cherche à trouver dans un lieu ce qu’il ne verra pas

ailleurs. C’est d’autant plus le cas pour le touriste culturel qui fait un déplacement plus

important et met des moyens financiers (transport, hébergement…) supplémentaires pour

venir découvrir un lieu. La rareté et la préciosité sont donc les atouts d’une structure pour

attirer ce public. Son fonds patrimonial écrit et graphique, son architecture et son

positionnement au cœur de la ville et/ou d’un territoire, placent la bibliothèque comme un site

suffisamment riche culturellement parlant pour faire partie des sites attractifs d’un point de

vue touristique. En outre, selon ses principes idéologiques : “institution culturelle ouverte à

tous“, la bibliothèque est prédisposée à accueillir des touristes.

Malgré les efforts effectués en matière de valorisation, le patrimoine écrit reste encore

bien méconnu du large public. Cela ne vient pas forcement d’un désintérêt puisque par

exemple, lors des journées du patrimoine en France, le public est présent dans les structures

appartenant au monde du livre comme les grandes maisons du journalisme (ex : Le Monde)

ou encore bien sûr, les bibliothèques. En 2009, selon Martine POULAIN, directrice de la

bibliothèque de l’Institut national d’Histoire de l’Art, au moins 3.000 personnes sont venues

visiter le quadrilatère Richelieu à Paris. Cette méconnaissance vient donc plutôt d’un manque

d’informations et de communication de la part des visiteurs potentiels qui ne connaissent pas

suffisamment les activités culturelles des bibliothèques, mais aussi de la part des

bibliothécaires qui ne cernent pas bien leur public patrimonial. D’autre part, il est important

de développer encore la mise en valeur des collections, non pas dans une optique de diffusion

des connaissances, mais dans une visée plus muséale. De la même manière que les musées ou

maisons d’écrivain, il s’agit d’exposer les œuvres que recèle la bibliothèque. Cela peut passer

par des expositions temporaires, des visites guidées du site, des ateliers, des animations…

Cette dernière grande partie fait état des évolutions des bibliothèques qui peuvent

amener à un changement quant à une plus forte attraction touristique. Pour qu’un lieu

devienne touristique cela suppose une réflexion poussée quant à son aménagement, l’accueil

des publics, la médiation culturelle, les financements, l’aspect juridique, la communication, la

politique de conservation… Cette réflexion doit être d’autant plus élaborée quand il s’agit

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d’un lieu comme la bibliothèque qui possède déjà une activité, des missions et un public bien

défini.

1. AMENAGEMENTS : ZONE D’ACCUEIL POUR LES TOURISTES ; ESPACES AMENAGES

POUR LA VISITE ; ESPACES DEDIES A DES EXPOSITIONS

Aujourd’hui, les bibliothèques - mis à part les bibliothèques “historiques“ qui ne sont

qu’accessibles sur visites – accueillent déjà des usagers pour consulter des documents,

travailler, emprunter. Le lieu a donc été conçu pour la lecture publique et la recherche. De

manière générale, les bibliothèques peuvent être découpées en plusieurs espaces.

• Du côté du public se trouvent :

- Une zone de parking. Cet espace, en amont de la bibliothèque en elle-même, est très

important pour son accessibilité

- Une zone d’accueil, celle, par laquelle le public entre, qui fait souvent office de

banque de prêts et retours et de point d’information

- Des zones de rayonnages. Présents, dans toute la médiathèque, les rayonnages de

documents sont répartis généralement par type (musique, bandes dessinées, films, nouveautés,

périodiques, documentaires, romans) puis par thème (selon le classement Dewey).

- Des zones de travail, définies par des tables prévues à cet effet: ces espaces sont soit

épars entre les rayonnages, soit dans une salle coupée du reste pour offrir à l’usager tout le

calme dont il a besoin pour se concentrer.

- Des zones de détente, marquées par la mise à disposition de bancs, de fauteuils…

pour la lecture, le confort des usagers. Ces espaces se trouvent généralement éparpillés dans la

bibliothèque à côté des rayonnages

- Un espace d’exposition. La plupart des bibliothèques construites dans les années

1990 possèdent un lieu pour la mise en place d’une exposition.

- Un auditorium . Là aussi, ce sont les bibliothèques les plus récentes qui possèdent ce

genre de salles pour des concerts, conférences, colloques…

- Des espaces de confort. Comme tout lieu public, la bibliothèque dispose de

sanitaires publics. Les bibliothèques les plus récentes, comme la bibliothèque municipale

Marguerite Duras à Paris qui a ouvert en juin 2010, ou les grandes bibliothèques comme la

Bibliotheca Alexandrina possèdent aussi des cafétérias.

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- Une boutique. De grandes bibliothèques ou des bibliothèques déjà touristiques possèdent

une boutique dans leur enceinte. Sur le même principe que les musées et sites culturels, celles-

ci proposent souvent des ouvrages, cartes postales et objets divers en lien avec les expositions

qu’elles ont présentées.

• Du côté des personnels, dans les espaces inaccessibles au public :

- Les magasins. Certaines bibliothèques mettent en libre accès tous leur ouvrages,

d’autres en revanche, souvent les bibliothèques spécialisées, anciennes ou ayant un fonds rare,

stockent leurs documents dans des réserves, autrement appelées magasins. C’est la partie

cachée des bibliothèques.

- Les bureaux des personnels : bibliothécaires, administration…

- Les salles de reliure, de numérisation… Cas plus rares, certaines bibliothèques

possèdent des salles spécialisées pour la conservation des documents. C’est le cas à la

bibliothèque de l’Institut national d’Histoire de l’art qui possède un espace dédié à la reliure.

Accueillir des touristes dans ces locaux demande quelques aménagements supplémentaires

dus à leurs activités différentes des usagers habituels.

Au regard des aménagements existants au sein des bibliothèques, le bilan est plutôt positif.

La bibliothèque étant un lieu ouvert au public, peu de nouveaux aménagements seront à

prévoir pour l’ouverture au public touristique. Bien sûr cet état des lieux des différentes zones

de la bibliothèque est général. Toutes les bibliothèques ne possèdent pas ce type

d’aménagement, mais cela montre qu’elles peuvent l’envisager ; cela ne dénote pas avec leur

politique de fonctionnement.

La bibliothèque étant implantée dans une ville, il est difficile de prévoir une zone de tampon

vis-à-vis des aménagements urbain attenants à la bibliothèque. Si les bibliothèques peuvent

devenir attractives touristiquement parlant, il est de toute façon, difficilement pensable

aujourd’hui qu’elles connaissent une affluence énorme pouvant transformer son territoire aux

alentours. Cependant, même pour une petite fréquentation, il faudra que la bibliothèque, si ce

n’est déjà le cas, possède un hall d’accueil suffisamment vaste pour accueillir les visiteurs qui

attendent de payer ou de s’inscrire pour participer à des animations. Cette zone servira

également au regroupement des visiteurs. Enfin, c’est dans cette partie que sera installé un

point d’information spécifique aux visites, car il serait désagréable et peu pratique pour les

usagers comme le personnel de n’avoir qu’un seul point d’accueil et de renseignement. Les

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différences de pratiques engendrent des questions très diverses ; le personnel ne sera donc

peut être pas le même pour les lecteurs et pour les visiteurs.

Pour des questions d’accessibilité mais aussi de valorisation, une scénographie et un plan

de circulation devront être mis en place.

La scénographie est l'art d'agencer l’espace scénique ou l’espace public à l’aide de moyens

techniques et artistiques. Utilisée au théâtre, à l’opéra puis au musée, elle apparaît aujourd’hui

pour la première fois en France, dans la bibliothèque du Val d’Europe (Figure 33).

Sur le modèle des musées, ce projet inédit donne un nouveau regard et une nouvelle

attractivité sur les collections. Comme le dit sa directrice, Christine BOURRUS40 " Un lecteur

a pratiquement toujours un projet lorsqu'il franchit la porte d'une bibliothèque. Dans la

grande majorité des cas, il fréquente une médiathèque, mais ne fait pas un détour pour la

visiter ou y passer un moment.“ L’objectif est donc ici, “ d'inventer de nouveaux itinéraires

entre la cité et les collections, entre les collections et le lecteur...".

Concernant le plan de circulation, il est indispensable pour la sécurité des visiteurs et du lieu,

pour le confort des publics, pour la valorisation de la structure et pour optimiser

l’aménagement des différents espaces entre eux. Ce sera le plus gros travail à effectuer au sein

des bibliothèques vis-à-vis de l’aménagement en vue d’accueillir des touristes. De manière

schématique, les chemins de circulation existants au sein des bibliothèques actuelles ont été

conçus pour guider l’usager : de l’entrée vers les rayonnages, en commençant par – si besoin

est - la banque de retours des documents. Après quoi, le lecteur se tourne vers les tables et

sièges disponibles pour la consultation et/ ou vers le bureau de renseignements pour parler au

bibliothécaire. Enfin, en repartant, il repasse devant la banque de prêt des ouvrages. Grâce à la

scénographie et à une signalétique différente de celle aidant à trouver des livres, le visiteur 40 Bibliothèques. 10 m2 par jour ...et une mise en scène des collections [en ligne]. Disponible sur

<http://www.bibliofrance.org/index.php?option=com_content&task=view&id=343> (consulté le 18.12.2008)

Figure 33 : Muséographie de

la salle de lecture de la

bibliothèque du Val d'Europe

Source : http://www.bibliofrance.org/index.php?option=com_content&task=view&id=343

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doit pouvoir circuler de manière sécurisée, sans gêner les autres publics et découvrir étape par

étape les différents points d’attraction de la bibliothèque. Ce sont les grands challenges de ce

réaménagement. Pour favoriser la réussite de ces changements, les bibliothécaires devront

s’inspirer de structures culturelles déjà touristiques et faire appel à des professionnels comme

des architectes, des scénographes, des spécialités du tourisme culturel. L’aménagement est

une étape capitale pour rendre un lieu touristique sans risque pour le lieu et ses publics.

Outre la signalétique traditionnelle sous la forme de panneaux indicatifs, il existe plusieurs

moyens pour valoriser des collections tout en mettant en valeur un chemin de circulation

prédéfini :

- le mobilier choisis (figure 33) montre la muséographie mise en place à la médiathèque

du Val d’Europe est un outil indispensable pour mettre en valeur les collections, les

ranger et disposer mais aussi pour définir le plan de circulation.

- Les outils numériques peuvent également servir à la valorisation du lieu et des

collections. Par exemple, insérer des projections (avec possibilité d’entendre le son par

casque pour ne pas gêner les usagers) sur l’histoire du lieu au sein de la bibliothèque

peut attirer aussi bien les visiteurs que les touristes. Les documents ne peuvent être

découverts qu’après manipulation. Or, un livre est aussi un patrimoine fragile qui, au

fil du temps et des multiples utilisations, se dégrade. Les outils numériques sont donc

une bonne alternative pour montrer des documents sans qu’ils soient abimés. Par

exemple, il est possible de mettre des écrans tactiles permettant au visiteur de passer

d’une page à l’autre. Il a ainsi encore la sensation de manipuler l’œuvre exposée par le

biais de cet outil interactif. De plus, ce moyen permet aussi d’insérer des informations,

traductions, etc. complémentaires pour comprendre et mieux connaitre l’ouvrage

présenté. Ces projections aident aussi bien à la médiation, à la présentation de la

structure qu’à la circulation. S’ils sont bien situés, ils permettent de créer des haltes ou

des points stratégiques dans le circuit de visite.

- La disposition des “espaces de détente“ marqués par des sièges pour se reposer sont

aussi des outils pour marquer le chemin de circulation. Là aussi soigneusement placés,

ils peuvent montrer au visiteur un détail de l’architecture du bâtiment par exemple,

tout en servant de lieu de pause pour les visiteurs et usagers.

- Au sein de la bibliothèque, il est difficile de jouer sur les sons pour valoriser différents

espaces , car même si la bibliothèque peut être perçue comme un lieu de sociabilité, un

lieu de vie convivial, le silence est généralement requis dans la majeure partie des

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salles de ces structures. Cependant, des effets de lumière peuvent être crées pour

donner une ambiance à certaine partie du site et pour mettre en valeur certains

éléments architecturaux par exemple. Il faut toutefois garder à l’esprit le confort des

lecteurs et la préservation des ouvrages d’une trop forte luminosité.

2. L’ACCUEIL DU PUBLIC : ENTRE USAGERS ET TOURISTES

Les bibliothèques sont des structures ouvertes à tous qui ont déjà un public. Ce public est

très diversifié de par son statut (âge, sexe, classe sociale, catégorie socioprofessionnelle,…) et

de par son activité au sein même de la bibliothèque. Si les activités en bibliothèques sont

multiples, la visite est encore un usage peu fréquent. Est-ce que cela vient d’un désintérêt de

la part de la population pour le patrimoine des bibliothèques ? Au regard du succès que

connaissent les bibliothèques lors des journées du patrimoine, il semblerait que non. Certaines

bibliothèques qui n’accueillent pas de publics visiteurs ont d’ailleurs même déjà un public

demandeur. C’est le cas de la Bibliothèque de l’Institut national d’Histoire de l’Art confinée

actuellement dans la salle ovale du Quadrilatère Richelieu à Paris. Bien que réservée aux

chercheurs, le personnel de la bibliothèque qui surveille les entrées voit très souvent défiler

des touristes derrière les hublots de la porte d’entrée. Ils sont nombreux à venir y jeter un œil

et à tenter de déambuler dans la salle. En outre, il arrive même parfois que des groupes

étrangers viennent recevoir quelques explications de la part de leur guide sur le patrimoine de

cette institution devant l’entrée de la bibliothèque.

Sans que cette demande puisse être mesurable, chiffrée, il est tout de même possible

d’affirmer qu’il existe un public susceptible d’être attiré par des visites patrimoniales de la

bibliothèque. Cependant, il est pour encore très mal connu des professionnels. Si les

bibliothécaires connaissent bien leurs usagers en matière de lecture publique à la vue des

nombreuses études faites sur eux ; concernant le public attiré par le patrimoine écrit, en

revanche, ils ne connaissent que peu de choses. Le public des fonds anciens n’est pas et n’a

jamais été objet d’étude. Les professionnels en ont une approche plus perceptive, subjective,

relative que réaliste. De plus, les études des publics en bibliothèques qui mentionnent des

visiteurs ne peuvent être considérées comme des touristes car, sont pris en compte dans cette

appellation “visiteurs“ les non abonnés qui viennent temporairement utiliser la bibliothèque.

Sont donc considérés comme visiteurs les usagers pour lesquels la bibliothèque ne possède

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pas de renseignements. C’est donc un constat de silence sur le public du patrimoine des

bibliothèques qui s’impose dès lors qu’on aborde cette question. C’est étonnant dans une

société portant en gloire le patrimoine que le public de ce domaine soit si peu maitrisé, et

connu de la part des professionnels. Pour y remédier, il faudrait donc mettre en place des

systèmes d’enquêtes au sein des bibliothèques mais aussi au sein des sites culturels et

touristiques pour effectuer des sondages d’opinion et de suggestion. D’autre part, les moyens

de communication et suivi du public (inscription à la bibliothèque, billets d’entrée pour les

expositions) peuvent contribuer à faire davantage connaître les visiteurs des bibliothèques

patrimoniales, ceci, même si souvent, la consultation sur place de documents patrimoniaux ne

donne pas lieu à une inscription préalable.

La première question qui vient à l’esprit lorsque l’on aborde le thème de l’accueil des

touristes dans les bibliothèques n’est pas tant : Quels aménagements sont nécessaires pour

leur venue ? Mais plutôt, avant cela, comment les faire coexister avec les usagers

traditionnels ?

Ces deux types de publics : touristes et lecteurs, en apparence diamétralement opposés de part

leurs pratiques peuvent se retrouver dans un même lieu sans compromettre l’activité de l’un

ou l’autre. Cela peut paraitre invraisemblable pour les professionnels des bibliothèques,

pourtant il existe bien des lieux qui arrivent à faire coexister différents publics et pratiques.

C’est le cas des églises notamment. Au regard du compte-rendu de la conférence,

“L’architecture religieuse : spiritualité et accueil des publics. Les églises d’aujourd’hui :

entre visites et célébrations sacrées“ 41 qui s’est tenue en 2009, à Paris, au Salon International

du Patrimoine Culturel, l’on peut se rendre compte qu’il n’est pas incompatible d’accueillir

deux types de publics aux attentes différentes. La frontière est mince entre le statut d’usager et

le statut de touriste. Le fidèle utilise l’église comme lieu de culte, mais il peut également se

trouver comme le touriste : intéressé par la dimension architecturale et historique de l’édifice.

De plus, il pourra se retrouver touriste dans d’autres églises. C’est la même chose avec

41

BROUTET Laure, DENANT Gaëlle, GOUJON Lise. L’architecture religieuse : spiritualité et accueil des publics.

Les églises d’aujourd’hui : entre visites et célébrations sacrées [en ligne]. Disponible sur

<http://www.patrimoineculturel.com/Francais/telechargements09/6-

11/SIPC2009_IESA_Architecture_religieuseED.pdf> (consulté le 22.01.2010)

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l’usager des bibliothèques. Il peut tout aussi bien être lecteur un jour et visiteur le lendemain.

C’est une question de présentation de la structure.

Une réflexion poussée sur les pratiques de ces publics, en amont, permettra d’évaluer

l’aménagement à effectuer au sein de la bibliothèque pour favoriser la coexistence lecteurs-

touristes. Un bon plan de circulation, la création de zones spécifiques mais aussi

l’aménagement des horaires peuvent être requis à cette fin. Par exemple, le parti pris peut être

d’ouvrir aux touristes le week-end et aux chercheurs la semaine. Il est aussi possible de

cloisonner les espaces selon les pratiques des usagers. Rendre visitable la bibliothèque

uniquement sur visite guidée à certains horaires peut être aussi une solution pour éviter que

les différents publics ne se mélangent de trop et se gênent entre eux.

3. LES ACTEURS : LE ROLE DES BIBLIOTHECAIRES ET DES OPERATEURS

TOURISTIQUES

La mise en tourisme des bibliothèques patrimoniales nécessitera l’implication de plusieurs

acteurs autre que ceux des bibliothèques.

Bien entendu, les bibliothécaires resteront les principaux acteurs. Néanmoins, ils devront

bénéficier d’une formation et surtout d’informations sur ce nouveau type de public et ses

usages. La réalisation d’enquêtes qualitatives sera très utile pour améliorer la perception des

bibliothécaires sur son futur public touristique.

Il sera également nécessaire de travailler en collaboration avec des acteurs de structures

culturelles touristiques et / ou faire appel à un bureau de conseil pour mettre en place cette

évolution de la bibliothèque, pour concevoir ce nouveau projet au cœur d’une structure déjà

existante.

Pour toutes les phases de réalisation et lors du montage du projet, il sera très important

d’avoir des personnes-ressources de différents corps de métiers : muséographe, médiateur,

chargé de communication… autant de postes que la bibliothèque ne possède pas.

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Pour la communication et la promotion, il s’agira cette fois de rencontrer des acteurs

directement touristiques, tels que des agents d’Offices de tourisme qui aideront à promouvoir

le site. Se faire connaitre des éditeurs de guides touristiques et des tours opérateurs,

participera aussi activement à développer une meilleure perception de la bibliothèque auprès

des touristes internationaux, car les visiteurs regardent davantage les guides quand ils

découvrent un pays étranger. Enfin, il pourra être intéressant de monter des partenariats avec

d’autres structures culturelles et touristiques de la ville ou région, là aussi dans une optique de

communication et de promotion, en autre.

D’un point de vue juridique et économique, la plupart des bibliothèques étant publiques, il

s’agira de travailler en étroite collaboration avec les collectivités : la mairie notamment, pour

des questions de financements.

Enfin, selon les moyens humains et financiers des bibliothèques patrimoniales, la création

de nouveaux postes devra également être envisagée. Accueillir les touristes n’entre pas dans

les attributions des bibliothécaires. Il s’agira donc de trouver quelqu’un capable de mettre en

place des activités culturelles destinées à ce public particulier. Il faudra quelqu’un au sein de

la bibliothèque capable de proposer des visites guidées ou de gérer des ateliers. Deux

solutions sont possibles : comme pour les monuments, les bibliothèques peuvent faire appel à

des conférenciers extérieurs ou former certains de leurs agents pour faire des visites guidées

(plus courtes et générales que les visites-conférences). La bibliothèque n’a pas de pôle de

communication actuellement (mise à part les grandes bibliothèques comme la BnF). Or, sa

mise en tourisme nécessitera dès le début de réaliser une communication adaptée pour attirer

les visiteurs et valoriser son patrimoine et sa notoriété.

4. LA POLITIQUE DE VALORISATION ET DE MEDIATION DE LA BIBLIOTHEQUE

Les bibliothèques sont des lieux culturels non seulement par leur contenu (fonds) mais

aussi par leur activité de médiation et de production car il s’agit de faire vivre les collections

et non d’en faire des cimetières de livres.

D’après Martine POULAIN (voir annexe D), on est dans une période favorable du point de

vue des mentalités pour valoriser le patrimoine. Selon elle, les gens recherchent un retour au

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passé par crainte du futur, d’où l’intérêt pour le patrimoine. Cela semble vrai compte tenu du

succès des évènements culturels de plus en plus nombreux organisés de par le monde.

La médiation : élément de connexion entre le visiteur et le patrimoine écrit et graphique

Avant d’effectuer tout travail de valorisation, il faut connaitre son patrimoine. Cette

connaissance vaut autant pour le personnel que pour les visiteurs. Or, aujourd’hui, ce n’est pas

encore le cas. En effet une partie du patrimoine n’est pas encore catalogué et donc inconnu

des professionnels comme du public. C’est le cas à l’INHA par exemple, qui n’a jamais eu - et

n’aura sans doute jamais - les moyens (ni financiers et ni humains) pour tout cataloguer, car

connaître le patrimoine, cela demande des moyens humains, scientifiques et financiers

importants. Si aujourd’hui, l’on interroge la population et les grands médias sur ce qu’est le

patrimoine écrit et graphique, il est certain que peu de personnes sauront le définir. En France,

l’élargissement indéfini du patrimoine ne semble pas favoriser sa lisibilité. Le terme de

patrimoine est souvent employé comme le terme opposé à celui de lecture publique.

La médiation culturelle est une alternative pouvant faire face à cette méconnaissance du

patrimoine et des bibliothèques. Si pour André MALRAUX, le rapport à l’œuvre devait être

direct sans intermédiaire, on a depuis compris que cette relation était élitiste, en ce qu’elle

n’était possible que pour un type précis de public déjà habitué au monde de la culture. La

question de la médiation culturelle a donc autant son importance dans les bibliothèques que

les musées. Une médiation est utile aussi pour les collections en libre accès : il faut guider le

lecteur dans ses recherches, durant son séjour à la bibliothèque. Face à une masse de

documentation, le lecteur peut se sentir perdu. Il s’agit alors pour les bibliothécaires de

proposer une signalétique adéquate, des modules d’aide à la recherche mais aussi de

promouvoir les livres en installant des tables de nouveautés par exemple. Dans le cas de

valorisation du patrimoine, le médiateur culturel propose au public en complément des

expositions, des animations et outils associés aux manifestations temporaires.

Enfin, les visites touristiques réclameront un travail de médiation au niveau de la circulation

particulièrement et donc à travers la signalétique.

Une politique de valorisation et d’animation au service des documents patrimoniaux et

de son public.

Grandes comme petites, les bibliothèques appliquent toutes, selon leur moyen et

public, chacune à leur niveau, une politique d’animation : l’image de la bibliothèque et son

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pouvoir d’attraction en dépendent. Pour les bibliothèques municipales, cette politique

culturelle est aussi un mode de valorisation vis-à-vis des élus : elles montrent ainsi la richesse,

le prestige de leur collection et participent à faire vivre la ville ou commune.

Grâce au montage d’expositions, mettant en valeur son fonds patrimonial, la bibliothèque fait

partie des producteurs culturels.

• Les expositions

Les expositions sont des activités régulières, temporaires, donnant l’opportunité au

public de découvrir les fonds patrimoniaux du lieu. Exposer fait du bien à un fonds. Cela

permet d’une part de voir les documents dans leur ensemble et surtout, donne l’occasion de

les restaurer plus rapidement et mieux que prévu.

Selon la diversité des collections, différents thèmes d’expositions peuvent être proposés par la

bibliothèque. Il est possible par exemple de monter une exposition sur : l’histoire du livre ou

de la bibliothèque ; un auteur (rétrospective); un livre en particulier ; un genre littéraire ; les

différents types de livres ; un thème vu à travers différents genres littéraires ; la ville

d’implantation de la bibliothèque ; une collection spécialisée ; l’architecture des

bibliothèques ; un collectionneur ; l’apparition de l’imprimerie ; l’encyclopédisme ; les

Lumières ;…

Une exposition en bibliothèque ne s’improvise pas. Plusieurs éléments sont à penser.

Dans un premier temps, il s’agit d’identifier le sujet en fonction de la collection. Il est capital

de définir le public qu’attirera une exposition : ses centres d’intérêts bien sûr, mais aussi, son

degré de connaissance. Selon le public choisi, le niveau intellectuel de l’exposition peut

varier. Il est intéressant de sélectionner un thème d’exposition en fonction des usagers

habituels de la bibliothèque, j’entends par usagers, les locaux. Cela permet non seulement de

les attirer à la bibliothèque et ça participe à faire figurer la bibliothèque comme un espace

public, reflet de son territoire. Ce n’est pas négatif pour le tourisme non plus, car le vacancier

va pouvoir vouloir visiter une bibliothèque pour découvrir le territoire dans lequel il se trouve

temporairement. L’exposition en lien avec cette destination, ses habitants sera donc un bon

moyen pour mieux faire connaître la région aux touristes.

Une fois le thème sélectionné, l’équipe interne, aidée par des personnes-ressources externes,

effectue un travail documentaire, des recherches scientifiques et une étude de faisabilité. Tout

en étant innovant dans la conception de l’exposition, il faut aussi être particulièrement réaliste

lors de l’évaluation du budget. Il s’agit, par exemple, de s’interroger, en fonction de nos

moyens, sur le choix des œuvres exposées: expose-t-on uniquement son propre fonds ou a-t-

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on recours au prêt qui est relativement onéreux en transport, assurance… ? La bibliothèque

n’est pas qu’un lieu d’exposition. Il s’agit de faire attention à équilibrer le budget annuel en

fonction des autres missions de cette structure.

Il est important de faire appel à des personnes extérieures aux projets capables d’évaluer le

sujet, de faire des propositions. Cela peut être par exemple, de professionnels d’autres

structures culturelles, de professionnels du tourisme. Habituées à recevoir le même type de

public et/ou de réaliser des actions similaires ces personnes-ressources seront aptes à faire des

propositions peut être plus innovantes car elles ne sont pas focalisées sur les missions

habituelles de cet institut.

Comme l’a démontré le premier chapitre faisant office de constat sur les rôles des

bibliothèques, cette institution oscille entre la diffusion de la connaissance et son aspect

culturel. Une exposition doit donc faire ressortir ces deux dimensions. Il ne s’agit pas de se

contenter de montrer des éléments patrimoniaux. Il s’agit aussi de les transmettre, de les faire

partager avec le visiteur. Une démarche pédagogique est donc très importante. Les

bibliothécaires doivent être pédagogues grâce à une médiation réfléchie à travers des

documents de visite, des animations organisées autour de l’exposition, des visites guidées…

Selon Claudine CHEVREL, conservatrice de la Bibliothèque Forney à Paris qui organise

plusieurs expositions chaque année, “l’idéal est d’étonner les visiteurs et le meilleur moyen de

les étonner est de les informer“ 42.

Le montage d’une exposition implique de respecter certains aspects juridiques et légaux.

Respect des droits d’auteur et assurance des fonds sont deux éléments fondamentaux à garder

à l’esprit durant toute la mise en place du projet culturel. L’assurance est obligatoire, ce,

même si le fonds exposé appartient à la bibliothèque dans laquelle est proposée la

manifestation temporaire. Cette assurance est propre à chaque exposition. Dans le cas des

droits d’auteur, l’idéal est de négocier avec les ayant-droits, les modalités d’ostension.

L’existence d’un projet sous-entend une phase réflexive en amont, une phase de réalisation et

une phase d’après projet. A l’issue d’une exposition, il est important d’évaluer l’impact

qu’elle a eu sur le public. Des études quantitatives et qualitatives sont donc utiles à mettre en

place à toutes les étapes de durée de vie d’une exposition. Les résultats faisant suite à ces

enquêtes pourront être capitalisés en connaissances utiles pour les futurs projets.

42

NUTTIN Guillaume. Réussir le montage d’une exposition en bibliothèque. Archimag, 2007, n°209, p. 42-44.

ISSN 0769-0975

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• Animations culturelles en bibliothèque

Parmi les activités culturelles il s’en trouve d’autres qui se veulent plus festives plus

originales que des expositions, et qui tendent à donner un caractère familier à la bibliothèque

en la démythifiant, de manière à favoriser sa fréquentation. C’est le cas de Lire en fête par

exemple.

Parmi d’autres exemples d’animations culturelles pouvant figurer au sein d’une bibliothèque

figurent : l’heure poétique, l’heure du conte, l’atelier de calligraphie et d’enluminure, l’atelier

photo (si la bibliothèque en possède un fonds), le quizz, le jeu d’enquête à travers les livres

(davantage pour les enfants), l’atelier sur la reliure…

• La visite de bibliothèque

La visite est une alternative intéressante pour faire découvrir le patrimoine, car les

images numérisées sont loin du but pour permettre à tout le monde de découvrir le patrimoine

écrit à distance.

Quelques exemples de visites potentielles: thématique sur son fonds, sur son architecture, sur

son histoire, sur sa création dans la ville ainsi que, sur sa conservation et restauration de

manuscrits (reliure, comment prendre soin de vos ouvrages ?)…

• L’édition de catalogues

Le caractère éphémère de ces manifestations laisse parfois comme dans les musées des

traces : catalogues, affiches, cartes postales…. Cela permet de pérenniser l’exposition. De

plus, le catalogue est un outil scientifique qui peut aussi être utile par la suite dans le cadre de

la recherche. Parfois, l’exposition n’est qu’un début. Elle donne de l’impulsion pour d’autres

actions comme la création d’un cycle de rencontres sur le sujet de l’exposition.

Il est mieux de faire porter l’ensemble de ces actions culturelles temporaires autour d’un

même thème, souvent celui qui est choisi pour l’exposition. Ainsi, par exemple, une

bibliothèque possédant un fonds important de manuscrits reliés pourrait envisager de faire une

exposition retraçant l’évolution de la reliure, faire une visite de l’atelier de reliure et même

proposer des stages d’initiation à cet artisanat. Ce serait l’occasion de sensibiliser les visiteurs

à la fragilité du document papier et à faire ressortir l’esthétique de ces ouvrages.

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Tous ces modes de valorisation peuvent servir la mise en tourisme de la bibliothèque

car ce sont ces activités qui vont attirer ce public. A l’heure actuelle beaucoup d’expositions

dans les bibliothèques sont destinées aux enfants qui viennent avec leurs parents ou lors d’une

coopération bibliothèque/école. Des efforts sont donc à poursuivre car, rappelons-le, la

valorisation des fonds patrimoniaux dans les bibliothèques ne fait que débuter.

5. LA COMMUNICATION - MARKETING – PROMOTION

Tout est affaire de communication, pour que la bibliothèque acquière une visibilité en tant

que site patrimonial, visitable et touristique.

La notoriété des bibliothèques patrimoniales

La bibliothèque souffre depuis longtemps des images auxquelles on l’associe : lieu

poussiéreux et terne ; institution élitiste, réservée aux érudits… Le développement des

médiathèques de lecture publique, visant une ouverture au public la plus large possible et une

diversité plus grande des supports et des pratiques, a permis à la bibliothèque de se

débarrasser peu à peu de ces images. Seulement, ces qualificatifs de “bibliothèque

poussiéreuse, passéiste…“ se sont retrouvés attribués au facteur patrimonial des

bibliothèques. Autrement dit, c’est son patrimoine qui empêche la modernisation de la

bibliothèque. Voila qu’elles étaient les perceptions de la population mais aussi des

professionnels de ces institutions jusqu’à la fin des années 1980. La “glorification“ récente du

patrimoine a permis aux bibliothèques de valoriser davantage leur collection, mais demeure

encore ce souci de notoriété et de manque de communication. Dans ce contexte, la conquête

d’une image moderne est un enjeu fondamental pour les professionnels du patrimoine.

Comme le dit bien Henri-Jean MARTIN, “… Il ne doit pas y avoir de différence conceptuelle

entre les [fonds de prêt] et les [fonds de conservation]. Les frontières intellectuelles entre les

fonds anciens, les collections des XIXème et XXème siècles et les acquis récents doivent donc

être réduites au minimum : il n’y a qu’une culture, si vous faites de la culture sans les livres

anciens, vous massacrez la culture. Et le bibliothécaire doit viser à entretenir la mémoire

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d’une très ancienne culture dans laquelle notre culture actuelle prend racine…“.43 Voila l’un

des messages à développer pour cette revalorisation du patrimoine au sein des bibliothèques.

Outils de communication au service des bibliothèques patrimoniales

Pour parer à cette mauvaise notoriété et visibilité, le patrimoine des bibliothèques doit se

faire davantage connaitre au travers de différents outils de communication. Seulement, en la

matière, les bibliothèques partent de loin. Il n’y a actuellement pas de personnels dévolus pour

cette mission dans la grande majorité de ces structures. Mises à part pour leur public de

proximité, les bibliothèques ne développent pas d’outils de communication à proprement dit.

Pourtant, plusieurs actions peuvent être entreprises de manière à étendre la communication à

un public plus large, notamment les visiteurs.

Cette période de patrimonialisation est propice à la valorisation du patrimoine des

bibliothèques et donc à sa communication. Avant d’évoquer tout outil de communication à

mettre en place, il est nécessaire de commencer par travailler la signalisation des

bibliothèques dans les villes (pancartes de circulation, présence sur les plans de la ville) et son

accessibilité (transports en commun, zone de stationnement, ouverture).

Ensuite, dans l’optique de se faire davantage connaître, il est important que la bibliothèque

se crée des supports de communication :

- le prospectus, mis en page selon la charte graphique établie de la bibliothèque, doit

dévoiler brièvement les richesses du lieu, ses activités culturelles et des informations

pratiques. Après quoi, ce document peut être disposé dans les lieux publics de la ville

ainsi que dans des structures purement touristiques comme les offices de tourisme. S’il

est bien fait ce document synthétique peut faire office de “carte de visite“ à distribuer

aussi bien auprès du public qu’auprès d’opérateurs touristiques pour se promouvoir.

- L’association Paris Bibliothèques, sous contrat avec la mairie de Paris, produit les

expositions et les animations des 65 bibliothèques de la ville. A cet effet, elle édite et

diffuse aussi leurs publications. Avec leur revue des bibliothèques (annexe H),

largement diffusée dans les lieux publics de la ville, l’association arrive à

43 Henri-Jean Martin. Une vision totale du livre. Paris : Bulletin des bibliothèques de France, 49, n°5,

2004, p.21.

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communiquer auprès d’un public local mais aussi plus large, sur le patrimoine écrit et

graphique de ces structures et diffuse sa programmation culturelle.

- En matière d’annonce, des communiqués sont aussi à prévoir dans le cas

d’expositions. Envoyés aux médias, c’est un outil de communication supplémentaire

pour faire connaître les actualités culturelles de la bibliothèque par l’intermédiaire de

la presse. Selon les médias destinataires visés, la visibilité des manifestations

culturelles de la bibliothèque peut être d’échelle locale à une dimension internationale.

- Sur le même principe que la revue, la bibliothèque peut aussi avoir recours aux

nouvelles technologies et se créer un site Internet dans lequel elle affichera toutes les

informations nécessaires pour se faire connaitre, recevoir des visites ou y consulter des

documents. Il est devenu capital aujourd’hui d’utiliser ces nouvelles technologies, car

Internet est le média le plus utilisé à travers le monde. Il permet de faire rayonner des

informations très rapidement à une grande échelle mondiale. Outre une plus grande

visibilité, il permet d’attirer un public plus large. Il est important de l’actualiser au

maximum. Le site Internet est une vitrine pour un lieu. Selon, son esthétique, le

nombre d’informations fournies et son actualisation, le visiteur potentiel se fait une

idée du lieu. Enfin, c’est espace interactif qui peut aussi accueillir des supports

complémentaires à la visite (visite guidée sous format électronique ; exposition

virtuelle…) (voir annexe C). Le site “Reims, ville art déco“ (annexe F) qui propose

plusieurs parcours de la ville selon différentes thématiques est un très bon exemple de

site Internet touristique révélant les qualités architecturales et territoriales de la

bibliothèque Carnegie. Actualisé, dynamique, esthétique, il offre aux visiteurs toutes

les informations (plans des parcours, histoire de chaque bâtiment,..) nécessaires pour

effectuer une visite en groupe ou individuelle. De plus, il témoigne de la réussite de

projets en partenariats44. Si le site Internet est l’outil le plus riche en matière de

nouvelle technologie pour diffuser de l’information, d’autres outils numériques sont

aussi envisageables pour attirer le public : il s’agit des réseaux sociaux comme

44

Les organisateurs de ce site Internet sont : la Ville de Reims et la Direction de la Culture, en collaboration

avec le Rectorat de l’Académie de Reims et l’Université de Reims Champagne-Ardenne et avec le

soutien financier du Ministère de la Culture et de la Communication, de la Direction Régionale des Affaires

Culturelles de Champagne-Ardenne, de la Région Champagne-Ardenne et du Département de la Marne.

S’ajoutent à ce projet collectif les différents lieux de visite comme la bibliothèque Carnegie, le grand théâtre de

Reims, le cinéma…

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Facebook ou Twitter qui connaissent un véritable succès aujourd’hui. En les utilisant,

la bibliothèque peut se créer un groupe de fidèles et mettre en avant par de cours

messages toute son actualité, car il faut garder en mémoire que ce sont les évènements

qui favorisent la fidélisation d’un public et participe à la notoriété d’un lieu.

Promouvoir les bibliothèques en travaillant avec des opérateurs touristiques

Outre sa communication, le meilleur moyen pour un lieu culturel d’être plus visible,

lisible et d’attirer un public touristique est de développer des relations avec des partenaires

touristiques.

- Pour se faire connaître de manière touristique, il est important qu’un site figure sur des

guides et cartes touristiques et les sites Internet des Offices de Tourisme. Aujourd’hui,

il existe des bibliothèques présentes sur les sites Internet d’Offices de Tourisme.

Cependant, leur présence semble plus due pour servir l’image de la ville : montrer

l’étendue de l’offre culturelle de la municipalité, que pour promouvoir de manière

touristique la bibliothèque. Si des informations pratiques sont visibles, il est rare que

soient mises en avant ou même évoquées les possibilités de visite. En outre, il semble

peu pensable que ce soit la bibliothèque elle-même qui se soit démarchée auprès de

l’office de tourisme pour figurer sur ces sites. Pour pallier à une absence ou un

manque d’information, la bibliothèque devra donc véritablement se démarcher auprès

d’institutions touristiques comme les Offices de tourisme en leur proposant des

prospectus à diffuser, un lien de leur site Internet à partager…

- Outre les Office de tourisme, à plus grande échelle, en tant que futur site touristique, la

bibliothèque devra également travailler avec des institutions touristiques telles qu’en

France : les Comités régionaux et départementaux du tourisme (CRT et CDT) et

l’agence de développement touristique Atout France. Ce type de partenariat peut

apporter aux structures telles que la bibliothèque, un appui promotionnel mais aussi

des conseils par le biais de formations et d’études qu’organisent ces institutions

étatiques et territoriales. De plus, sa présence sur les sites Internet des CDT et CRT

offre non seulement à la bibliothèque une plus forte visibilité vis-à-vis du public mais

aussi vis-à-vis des professionnels du tourisme comme les tours opérateurs. C’est un

appui incontestable pour trouver des structures touristiques auprès desquelles se

démarcher et un soutien pour obtenir des partenariats avec ces dernières. Les

bibliothèques étant membres ou, plus simplement, figurant sur les sites des CDT et

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CRT seront davantage prises en considération auprès des opérateurs touristiques pour

d’éventuelles collaborations. Dans le cas de la BnF, elle apparait sur le site du CRT Ile

de France mais de manière assez succincte et peu visible, il faut chercher l’information

pour trouver l’encart qui lui est destiné. En revanche, fait intéressant, le site du CRT

Ile de France, nous informe que la BnF fait partie des sites découverts lors de l’un des

4 circuits en car “city tour“ proposé par la société Paris Open Tour.

Promouvoir la bibliothèque cela passe aussi par un travail en réseau

Toujours, parmi les moyens de promotion, l’une des méthodes consiste à développer des

partenariats et réseaux avec d’autres instituts culturels touristiques de la région à proximité,

ou portant sur une même thématique par exemple. Les bibliothèques travaillent déjà en réseau

avec d’autres bibliothèques mais pour des raisons scientifiques et pour étendre l’offre de

lecture publique. Dans le cas d’une mise en tourisme, un développement de réseaux et de

partenariats est tout aussi pertinent. En faisant partie d’un groupe de sites culturels et

touristiques, la bibliothèque peut espérer partager des visiteurs. En effet, par le bais d’outils de

communication partagés : site Internet collectif, partage de liens sur les sites Internet

respectifs de chacune des structures, mise à disposition de prospectus d’autres institutions du

réseau dans son espace et inversement, création de publications collectives… et grâce à des

outils marketing élaborés : vente de “pass“ permettant au visiteur, une fois un billet acheté, de

visiter un autre site du réseau gratuitement ou à demi tarif, vente de billets jumelés,…un

échange de touristes peut se faire par le biais des sites du réseau. La mise en réseau offre

l’opportunité de mutualiser des financements en matière de communication et promotion.

Enfin, ces structures partenaires apparaitront plus lisibles et plus fortes. Cela peut être utile

lors de demandes de subventions par exemple. Pour qu’une mise en réseau soit pertinente, il

faut que les différents partenaires aient des objectifs communs, des attentes similaires. Même

si certaines structures plus importantes, plus attractives dans un groupement peuvent servir de

locomotives, il est nécessaire que les moyens mis en place soient partagés de manière

équitable.

De la même manière que la cité de l’architecture de Paris qui travaille en partenariat avec le

Palais de Tokyo, le théâtre de l’Odéon et le théâtre des Champs Elysées offrant ainsi aux

visiteurs communs des tarifs préférentiels, la BnF pourrait collaborer avec l’opéra Garnier par

exemple, puisqu’elle y possède dans le même bâtiment, une annexe. De par sa proximité

géographique avec la Seine, elle pourrait aussi envisager un partenariat avec les bateaux

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mouches de Paris qui draine de nombreux touristes. Cela permettrait d’élargir son public. Des

bâtiments à proximité géographique comme le Panthéon, la salle de spectacle de Bercy

peuvent aussi être des cibles intéressantes pour un travail de coopération. Enfin, plus proches

par leur thématique commune, le musée des lettres et manuscrits du 7ème arrondissement et la

BnF pourraient partager des visiteurs aux intérêts similaires.

Pour conclure sur cette partie, une communication est véritablement nécessaire dans le cas

des bibliothèques. Elle est à effectuer pour redorer l’image du patrimoine écrit des

bibliothèques et pour attirer des visiteurs. Néanmoins, les bibliothèques doivent adapter leur

communication en fonction de leur objectif touristique. Il ne s’agit pas forcement d’en faire

des grosses attractions ; cela nuirait aux autres publics de la bibliothèque.

6. LA PRESERVATION, SECURITE, ET CONSERVATION

La bibliothèque étant un lieu public, elle possède déjà une politique de conservation de

son fonds. Cependant, élargir l’ouverture de cette institution aux touristes – public aux

pratiques différentes des usagers habituels - amène à reconsidérer certains aspects de cette

politique de sécurité et de conservation envers les documents comme le public.

Pour éviter au maximum les incidents et dégradations, il est important de bien réfléchir en

amont sur les conditions d’accessibilité au site et au fonds patrimonial. Il est nécessaire de

prévenir au maximum pour éviter d’avoir à agir. Il faut anticiper les risques que peut causer

une plus forte fréquentation et des visites dans ces lieux, en mesurant bien les pratiques de ce

public, leur flux et en parallèle la capacité de charge du lieu, etc. Si le tourisme est un facteur

positif pour la notoriété d’un lieu et pour les retombées économiques qu’il procure, il peut

s’avérer être aussi un facteur de risques, causant des dégâts s’il n’a pas été bien évalué en

amont et s’il n’est pas maitrisé. De nombreux sites culturels et naturels se sont retrouvés

irrémédiablement abimés à cause de trop fortes fréquentations touristiques. C’est le cas des

grottes de Lascaux en France, par exemple. Découvertes en 1940, il aura fallut pas moins de

dix ans pour qu’elles connaissent les retombées néfastes du tourisme. Dès 1949, des

moisissures et enduits noirâtres sont apparues sur les parois suite à une surfréquentation qui

provoqua un taux anormal de gaz carbonique, une condensation intermittente d’eau sur les

parois et une température anormalement élevée pour ce type de lieu. Cela se révéla inquiétant

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pour la conservation des œuvres pariétales et occasionna une gêne lors des visites. Malgré les

tentatives de protection et d’aménagement pour essayer de rétablir l’équilibre de la grotte et

préserver les peintures murales, la dégradation fut telle, qu’en 1963, le propriétaire dû fermer

la grotte définitivement. Et en 1972, il fut décidé finalement de construire un fac-similé des

grottes de Lascaux à côté.

Préservation et conservation des documents en vue d’une diffusion plus large :

Avant de conserver, c'est-à-dire de réparer, il faut tenter de préserver. Dans les deux

cas, il est indispensable de bien connaître la composition des objets à préserver. Dans le cas

des documents patrimoniaux, il faut aussi garder à l’esprit, le but de cette préservation : la

communication au public. Il s’agit de faire en sorte de prolonger au maximum, la disponibilité

d’un document dans son état original et d’assurer la pérennité de l’accès à son contenu par des

procédés de reproduction. Les supports apparus depuis cent cinquante ans fournissent souvent

des documents rares voire uniques. Si aujourd’hui, les livres paraissent en plusieurs

exemplaires, que le dépôt légal favorise la conservation d’au moins un exemplaire de chaque

document publié, il y a moins de deux siècles de cela, ce n’était pas le cas : de nombreux

ouvrages ne nous sont parvenus qu’en un seul exemplaire. C’est d’autant plus vrai quand il

s’agit de productions personnelles, familiales. Les collections de photographies ainsi que les

archives sonores et audiovisuelles en attestent. Ce sont alors des documents qui méritent toute

l’attention des bibliothécaires.

Depuis les années 1970, en France, une politique de conservation préventive est

appliquée aux fonds des bibliothèques. Différents corps de métiers : ingénieurs, spécialistes

des bâtiments, conservateurs et restaurateurs cherchent, par un ensemble d’actions, à

améliorer l’environnement dans lequel sont stockés les documents en vue de leur conservation

à long terme.

Cette conservation préventive se compose d’un ensemble de mesures à mettre en place :

• La dégradation des documents ne provient pas que de l’usage que l’on en fait.

Constitué de papiers, encres, etc., les livres ne sont pas immortels. La plupart des matériaux

composant les documents patrimoniaux sont sujet à des altérations plus ou moins importantes

sur le long terme. Le temps agit irrémédiablement sur leur état de conservation. C’est d’autant

plus le cas quand la qualité des matériaux composant le document est médiocre. Par exemple,

les impressions des années 1860 à 1960 se faisaient sur un papier de moindre qualité. Il s’agit

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donc de bien connaître les matériaux et produits composant les documents, puis contrôler leur

qualité afin de pouvoir au mieux les préserver.

Parmi les supports des documents figurant dans les bibliothèques figurent :

- le papier (de qualité différente suivant son année de production, car la fabrication du

papier a évolué au fil du temps) et l’encollage

- le parchemin

- la peau tannée

- les supports de la photographie (supports originaux et tirages, liants et colorants)

- l’encre

- les supports récents : microfilm, supports mécaniques (cylindre et disque), bande

magnétique, disque informatique, disque compact…

Tous les matériaux qui entrent dans la composition d’un ouvrage ou de son conditionnement

(matériaux de restauration, reliure..) font l’objet d’analyses systématiques. Ces dernières sont

régulièrement renouvelées car la composition d’un produit peut être modifiée par son

fabricant. Grace à ces études, il est également possible d’apprécier la compatibilité des

matériaux entre eux et leur vieillissement.

• En plus de la fragilité de leurs composants, les documents peuvent aussi se dégrader

selon l’environnement dans lequel ils sont. Des facteurs externes viennent aussi fragiliser des

supports relativement résistants. Par exemple, le parchemin, dont la résistance mécanique

dans le temps est excellente, devient extrêmement fragile au contact de variations d’humidité,

de l’eau et s’il est attaqué par des moisissures ou des insectes. Les matériaux appliqués sur les

supports, l’eau, l’humidité, la température, la lumière, la pollution, les micro-organismes, la

poussière, les insectes sont autant de facteurs qui peuvent les dégrader. Lors du contrôle de

l’environnement des documents, les professionnels gèrent et régulent le climat et la lumière

des espaces dans lesquels le document est amené à être stocké et consulté. Il s’agit à ce stade

également, d’étudier le mobilier de rangement et de convoiement des ouvrages et leur

manipulation.

Enfin, concernant la sécurité des documents contre le vandalisme et le vol, il s’agit aussi de

contrôler les dispositifs mis à en place à cet égard.

• Assurer la conservation préventive, c’est aussi informer. Pour ce faire, l’ensemble du

personnel de la bibliothèque (du magasinier au directeur de l’institution) est sensibilisé par le

biais d’informations mais aussi de formations. Cette sensibilisation touche aussi le public

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principal utilisateur de ces documents. Par exemple, l’information des lecteurs consiste à leur

expliquer qu’il y a des limites à la photocopie, voire des limites à la communication des

originaux.

• Passé les analyses, les professionnels de la conservation doivent élaborer un plan de

prévention actualisé régulièrement prévoyant trois étapes : la prévention, l’action et la remise

en état. Il s’agit donc, par exemple, de mettre en place des mesures de préventions

élémentaires d’entretien et de maintenance : installer des systèmes de détection contre les

éventuelles dégradations (inondations, incendies…) et contre les intrusions (vol, vandalisme).

Cela consiste aussi à installer des processus de réparation et d’interventions d’urgence comme

des extincteurs d’incendies, des portes coupe-feux… Enfin, un plan d’urgence pour la

sauvegarde des collections en cas de sinistre prévoit : l’attribution de locaux dévolus aux

opérations d’urgence (locaux pour traiter les documents et pour stocker les consommables

indispensables au traitement des documents mouillés et inondés) ; l’attribution de fournitures

et matériels ; une formation auprès des agents et la rédaction de fiches techniques de

consignes à suivre ; une liste des partenaires et prestataires extérieurs ainsi qu’un repérage des

collections requérant une attention particulière lors des sauvetages.

Malgré les efforts de prévention, il est toujours nécessaire de conserver. Comme les

œuvres picturales, les ouvrages – d’autant plus quand ils sont manipulés – ont besoin d’être

restaurés. Le conditionnement, le dépoussiérage, le nettoyage et l’entretien font partie des

actions à mener impérativement en permanence. Ensuite, selon leur état et les priorités, de

plus lourdes missions de conservations sont effectuées au fur et à mesure selon les fonds

financiers disponibles, car généralement ces étapes se font par des spécialistes extérieurs à la

bibliothèque. Aujourd’hui peu de structures ont leur propre atelier de reliure. La conservation

se fait pour le support mais aussi pour le contenu des documents. La politique de numérisation

des collections mise en place depuis quelques années au sein des grandes bibliothèques sert à

préserver ce fonds et à favoriser sa diffusion.

Pour envisager une mise en tourisme de la bibliothèque, les professionnels de ce lieu,

devront mettre en avant le rôle culturel de leur institution. Ce travail de valorisation passe

essentiellement par la mise en place d’expositions. Ce mode de mise en valeur des collections

accroît de manière significative les risques de dégradation et de vol encourus par les

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documents exposés. En effet, dans les conditions d’une exposition, l’environnement des

documents est moins optimal et stable que dans les magasins ; ceci pour plusieurs raisons :

- L’éclairage obligatoire pour le confort visuel des visiteurs renvoyant aux ouvrages

une luminosité élevé.

- Une forte concentration humaine rendant difficile le maintien de conditions

climatiques stables

- L’ouverture de documents sur une longue durée les exposant trop à l’action de la

lumière

- Enfin, d’un point de vue muséographique, certaines contraintes de présentation vont

à l’encontre des principes de conservation : ouverture, inclinaison des documents ;

hétérogénéité des matériaux à l’intérieur d’une même vitrine.

La valorisation des collections implique donc une vigilance particulière. Pour prévenir tout

risque de vol et vandalisme, la permanence d’un gardiennage est indispensable. Concernant

l’environnement temporaire des ouvrages exposés, il s’agit aussi de surveiller en permanence

les conditions thermohygromètriques aussi bien dans la salle que dans les vitrines. L’éclairage

doit aussi être bien tamisé, mesuré et orienté pour permettre aux visiteurs de voir les œuvres,

et pour mettre ces dernières en valeur sans qu’elles en souffrent. Une des solutions pour

protéger les ouvrages vient aussi à changer le livre ou les pages qui sont exposés au fil de la

manifestation. Ce roulement évite que soit dégradée une même page.

La sécurité des documents

En tant qu’institution patrimoniale, les bibliothèques possèdent des documents rares,

voire uniques, donc précieux et chers. Comme les musées, elles doivent ainsi se prémunir

contre les vols mais aussi contre les vandalismes éventuels. Par exemple, l’année dernière, les

collections de la bibliothèque de l’Institut national d’Histoire de l’Art ont subi des mutilations

gratuites : le personnel de la structure a découvert que des pages avaient été arrachées dans

plusieurs ouvrages encyclopédiques. Pour ces raisons, un certain nombre de règles et de

dispositifs ont été établis. Dans certaines grandes bibliothèques, afin de faciliter le contrôle

des documents, les visiteurs sont invités à laisser manteaux et sacs dans un vestiaire prévu à

cet effet. Par ailleurs, à l'exception des ouvrages disponibles en salle de référence, les

documents sont tous en accès indirect. Cela signifie que la consultation des documents est

supervisée par les personnes-ressources de la bibliothèque qui gèrent les demandes à l’accueil

et cherchent les ouvrages en magasin. Seuls les employés sont autorisés à entrer dans les

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magasins où sont conservés les livres. Dans d’autres bibliothèques, l’on peut entrer librement

avec ses affaires dans la salle de lecture, cependant, une fouille est effectuée à chaque sortie

de l’usager. Dans le cas de la consultation d’ouvrages rares ou abimés, certaines structures

organisent aussi des rendez-vous patrimoniaux. Par exemple, la bibliothèque de l’Institut

national d’Histoire de l’Art invite les personnes voulant consulter ce type de documents à

prendre rendez-vous le mardi ou jeudi après-midi. Les ouvrages demandés sont alors sortis

exceptionnellement des réserves, et sont consultés sous surveillance (devant une personne du

service patrimoine de la bibliothèque). Généralement, ce sont des documents qui ne peuvent

être photographiés, scannés ou photocopiés. Enfin, des gants, lutrins et crayons papiers (pour

la prise de notes) sont mis à disposition des usagers pour éviter toute dégradation.

Si aujourd’hui, de nombreuses bibliothèques de prêt ont mis des portails de sécurité à l’entrée

et la sortie du centre culturel pour les livres magnétisés, la meilleure action pour éviter les

vols de documents reste l’estampillage. Cela empêche notamment toute revente du livre volé.

Dans le cas d’expositions au sein de la bibliothèque, des mesures de sécurité sont aussi

à prendre en compte, notamment quand il y a dans le fonds exposé, des œuvres prêtées.

La visite des locaux des bibliothèques entraîne des complications pour la sécurité des

ouvrages et donc des mesures de prévention supplémentaires à instaurer. Par exemple, si la

visite de la bibliothèque se fait dans les salles de lecture et dans les magasins pour montrer à

la fois les parties visibles et invisibles de l’édifice, cela suppose de protéger les documents,

des réserves notamment, qui ne sont pas prévus pour être montrés habituellement. Selon

l’agencement des bibliothèques, il faut donc bien prévoir le parcours et surveiller au

maximum les visiteurs. Parmi les mesures potentielles à mettre en place :

- il est possible d’obliger les visiteurs - comme le font les usagers - à laisser sacs et

vestes aux vestiaires, ceci même s’ils ne font que passer d’un espace à un autre.

- Quand cela est possible, une seule porte doit permettre l’entrée des visiteurs ; les

autres portes n’étant que des issues de secours.

- Pour faciliter la surveillance et ne pas gêner les lecteurs, prendre de petits groupes et

parler bas seront recommandés aux guides.

- La bibliothèque possédant déjà un public d’usagers, afin de ne pas confondre les

visiteurs des lecteurs, un badge ou un billet d’entrée peut être remis aux touristes : cela

permettra au guide de mieux les visualiser durant le parcours.

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- Enfin, comme les œuvres d’art, les ouvrages sont sensibles au flash des appareils

photo. Deux recommandations sont alors possible : la première, radicale : interdire les

photographies au sein du bâtiment et la deuxième, plus légère, n’autoriser que les

prises sans flash.

La sécurité des visiteurs

Tout lieu ouvert au public doit être sûr, sans danger pour le visiteur. Pour ce faire,

plusieurs mesures sont mises en place :

• Le système de gardiennage. Si ce système sert principalement à la protection des

œuvres, il est aussi utile à la protection des visiteurs. Cela peut paraitre saugrenu, mais dans

les grands musées comme le musée du Louvre, il y a chaque année plusieurs agressions de

visiteurs. En complément aux personnes physiques déambulant dans les salles de lecture, des

caméras peuvent être disposées. Même si elles ne fonctionnent pas, elles auront tout de même

un rôle dissuasif.

• Pour sécuriser un lieu fréquenté, il faut analyser en amont sa capacité de charge. C’est

d’autant plus vrai quand il s’agit d’un lieu touristique. Cela consiste donc à évaluer le nombre

de personnes maximum pouvant être présent dans un lieu. La visite des bibliothèques

entrainera peut être le visiteur à pénétrer dans le côté habituellement caché des usagers. Ces

pièces seront alors moins équipés à recevoir du public car non destiné à cet usage lors de sa

conception. Il faudra donc bien évaluer la capacité de charge de toutes les zones visitées de la

bibliothèque.

• Toujours en amont de la mise en tourisme des bibliothèques, une fois un zonage bien

défini ainsi qu’un parcours de circulation établi, il s’agira de tenter au mieux d’évaluer de

manière prospective la fréquentation future de ce lieu. Cette évaluation prospective maximale

du nombre de visiteurs permet à la fois, d’adapter les équipements destinés plus

particulièrement à ce public, mais aussi de bien sécuriser le lieu : à l’intérieur comme aux

alentours.

• Enfin, comme pour les documents, le personnel devra être formé et informé sur les

pratiques de ce nouveau public : les touristes.

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7. LE MONTAGE JURIDIQUE ET ECONOMIQUE

L’environnement réglementaire et juridique des bibliothèques

Contrairement à d’autres secteurs culturels comme les archives ou les monuments

historiques, les bibliothèques ne sont pas régies par des lois. Certes, en France, il existe une

charte des bibliothèques mise en place depuis 1991 par le Conseil supérieur des bibliothèques,

mais, comme le sous-entend l’appellation même de ce document, les recommandations

figurant dans ce corpus ne sont pas imposées. Les missions des bibliothèques ne sont donc

définies par des textes législatifs. Chaque bibliothèque évolue dans son propre environnement.

Attention, l’absence de textes législatifs et la dispersion des textes réglementaires ne

reviennent pas pour autant à dire que le monde des bibliothèques n’a aucune norme. Mais,

cela signifie que les codes sont mis en place et se construisent encore aujourd’hui selon

l’interaction des différents acteurs étatiques et territoriaux avec ceux des bibliothèques. C‘est

par cette relation entre les acteurs que se détermine la politique qui régie les activités de ces

structures culturelles. En partant de ce principe, rien n’empêche les bibliothèques de devenir

touristiques juridiquement parlant.

Les moyens financiers

Les plus grosses difficultés que rencontreront les acteurs mettant en place cette évolution

touristique des bibliothèques viendront sans aucun doute des moyens financiers. La

bibliothèque est un lieu aux missions déjà diverses. Si le patrimoine a tardé à être valorisé,

cela vient du fait qu’il paraissait moins important que la diffusion de la lecture publique. Ce

lieu évolue beaucoup en fonction des volontés politiques. Jusque dans les années 1990, les

moyens financiers, techniques et humains des bibliothèques étaient donc essentiellement

dévolus à cette mission de diffusion de la lecture au détriment des collections patrimoniales.

Aujourd’hui, maintenant que le patrimoine a “le vent en poupe“ dans notre société, de plus

gros moyens lui sont consacrés. Néanmoins, les bibliothèques, structures majoritaires

publiques avec pour maitre mot : “accessibilité pour tous et gratuité“, vivent essentiellement

sur les budgets de leur tuteur : municipalité, région, département, Etat. La mise en tourisme

des bibliothèques, d’un point de vue juridique et financier, dépend étroitement des acteurs

régissant ces structures plus que de la demande en elle-même. Par exemple, les bibliothèques

territoriales sont organisées et financées par les communes. Elles sont donc placées sous

l’autorité du maire ou du président du conseil général et n’ont pas de personnalités juridiques.

Leurs missions sont relativement libres. Seuls les décideurs ont le pouvoir d’autoriser une

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mise en tourisme de ces lieux. Ce n’est pas forcement un mal pour ces dernières. Le tourisme

est un facteur économique notoire à travers le monde. Les pratiques touristiques apportent des

retombées pour tout un territoire : la visite d’un site culturel peut entrainer des retombées à la

fois sur les hébergements, les structures de restauration, les stations services, les commerces

de proximité… des alentours. Les municipalités sont donc assez ouvertes à son

développement, du moins surement plus que ne le sont les professionnels des bibliothèques.

Le maire gère aussi bien des activités culturelles que touristiques pour sa ville. Il connait donc

plus ou moins bien ces deux domaines et leurs acteurs. En ce sens, il peut être le ligament

utile pour lier ces deux ressources.

Dans le cas des bibliothèques nationales comme celle de France, elles sont régies par l’Etat.

La BnF est un établissement public national à caractère administratif sous la tutelle de la

direction du livre et de la lecture (ministère de la culture et de la communication). Elle

possède un champ d’action plus limité juridiquement parlant puisque ses missions

traditionnelles - qui consistent à collecter, cataloguer, conserver et enrichir dont le patrimoine

national dans tous les domaines dont elle a la garde – sont confirmées depuis le 3 janvier 1994

par un décret. Cependant, en tant que “chef de file“, représentante des bibliothèques du pays,

le budget qui lui est dévolu pour accroitre son développement dans divers domaines est plus

conséquent. Elle a donc une plus grande “liberté“ financière que les autres.

En cette période de crise économique, d’endettement de l’Etat et de décentralisation - qui

oblige les collectivités territoriales à assurer ce que le pouvoir étatique n’est plus en mesure de

faire -, l’essor des constructions des bibliothèques rassure quant aux moyens financiers

attribués par les acteurs pour ces institutions. Par exemple, une médiathèque de 3.000 m²

coute environ dix millions, une grande bibliothèque comme celle de Brest (8.300 m²) est

évaluée au double. Ces investissements sont donc très lourds pour les finances publiques d'un

pays fortement endetté et souffrant d'une croissance atone en cette période de crise

économique. D’autant plus qu’ils faut aussi prendre en considération, outre la construction,

l'exigence environnementale qui augmente les coûts d'au moins 20 %, et bien sûr, une fois le

bâtiment édifié, son entretien et sa mise en marche... Dans un contexte de forte contrainte

pesant sur les ressources locales comme sur le budget de l'Etat, le dynamisme de la

l’édification de bibliothèques montre donc que ces institutions intéressent les acteurs

économiques et qu’ils souhaitent les développer. Pourquoi ne seraient-ils pas alors enclin à

mettre en place une activité touristique ? Plusieurs études, comme la méthode d’évaluation

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contingente qui détermine le montant des contributions que la population (environnante et

étrangère) serait prête à verser pour valoriser et sauvegarder le patrimoine des bibliothèques,

pourraient, si elles se révélaient positives inciter ces acteurs à mettre en tourisme ces lieux.

Tableau 1 : Dépenses et recettes générales des bibliothèques

Dépenses courantes :

- Les documents : livres, CD, revues

- Les petites fournitures

- Les services (reliure, impression, etc.)

- Les animations (mise en place d’expositions, prêt

des œuvres, assurances des ouvrages,…)

- Les frais de fonctionnement (téléphone, Internet,

etc.)

- Les constructions ou travaux de restauration

- Le mobilier

- Les fonds anciens (conservation, acquisitions, etc)

- Le personnel

Recettes courantes :

- budget annuel, définit pas les collectivités tutélaires.

(C’est l’apport majeur dévolu à l’investissement et au

fonctionnement des bibliothèques)

- autres subventions

- Cotisations (abonnement)

- Remboursement de livres perdus ou détériorés

- Amendes

- Photocopies

- Legs et dons

- entrées aux manifestations culturelles (expositions,

conférences, concerts…)

Tableau 2 : La BnF en chiffres – Budget

Source : http://www.bnf.fr/fr/la_bnf/bnf_en_chiffres/s.chiffres_budget.html?first_Art=non

Budget annuel : 254 M € (sommes arrondies)

Fonctionnement 200 M € dont 120 M € de dépenses de personnel

Investissement 54 M €

Subventions 90 %

Recettes propres 10 %

Au regard des différentes recettes et dépenses que peuvent avoir les bibliothèques en

général (Tableau 1) et à la vue du rapport budgétaire de 2008-2009 de la BnF (Tableau 2), il

semble évident que les bibliothèques son loin d’âtre autonomes financièrement. Elles

dépendent étroitement des subventions attribuées par leurs tuteurs. Les activités culturelles

qui se développent comme les expositions, sont payantes, mais cela est loin de pouvoir

couvrir les frais de mise en place de ces manifestations culturelles. En ancrant une activité

touristique, même de manière minoritaire au début, cela pourrait accroitre les visites et donc

améliorer légèrement les retombées économiques de ces manifestations. S’il semble utopique

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de croire que les bibliothèques, de par leur politique de fonctionnement, deviennent

autonomes financièrement un jour, on peut toutefois, envisager à long terme, le tourisme

comme un apport économique au sein de ce type de structure institutionnelle. Sans pouvoir

évaluer de manière chiffrée cette perspective, cette activité pourrait peut-être faire développer

le budget de valorisation du patrimoine écrit qui reste faible, si l’on considère l’étendue des

richesses à connaître, préserver et valoriser. Ce pourrait être une alternative intéressante sans

être une amputation trop importante du budget pour les autres missions comme la lecture

publique. Il n’est bien sûr pas question de “touristifier“ les bibliothèques pour une seule raison

économique. D’ailleurs, les retombées positives ne se feront pas tout de suite, si elles se font,

pour le site en lui-même.

Pour mettre en tourisme la bibliothèque, il faudra repenser son fonctionnement

économique, envisager de faire payer l’entrée de la bibliothèque aux visiteurs pour les

expositions et visites-conférences et pourquoi pas, créer une boutique avec des produits

dérivés, etc. La BnF possède déjà un point de vente de livres et cartes postales des expositions

présentées au sein du quadrilatère Richelieu par exemple.

Même si elle devient attractive, la bibliothèque continuera à fonctionner grâce aux

subventions, aux legs et dons essentiellement. Cependant dans un contexte de

décentralisation, il est important qu’elle recherche aussi d’autres ressources financières. Elle

peut ainsi développer le mécénat, apparut progressivement dans ce type de structures, dans le

cadre d’exposition, de numérisation, d’acquisition d’ouvrages. Il faut inciter cette méthode, en

proposant par exemple, à des sociétés de mécéner un ouvrage : de son acquisition à sa

conservation et sa mise en valeur : proposer une sorte de parrainage pour des ouvrages

patrimoniaux par exemple. Enfin, la création de labels, partenariats et réseaux peut aussi avoir

un impact plus conséquent sur les aides et subventions publiques ou privées éventuelles

d’échelle nationale, européenne (dans le cas de l’Europe) ou/et internationale.

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CONCLUSION

Les livres sont le reflet de l’histoire. Outils de partage du savoir et lieux de mémoire

(par leur patrimoine), les bibliothèques sont aujourd’hui non seulement un enjeu culturel mais

aussi politique et social de la culture et de la civilisation. La “nouvelle bibliothèque“ n’est

plus une simple salle. Elle “[…] se veut être […] un temple de conservation de la mémoire ;

un centre de divulgation de la culture et de l’information ; un lieu de réunion, un lieu

d’exposition et un musée“. La bibliothèque “ veut être également un monument de la

grandeur, de la conscience culturelle et de l’engagement civique d’une société donnée.“45 La

croissance des budgets46 dévolus à valoriser ces lieux confirme bien les dires de Marino

ZORZI.

Ce travail de recherche a montré que loin d’être poussiéreuses, les bibliothèques sont

des institutions culturelles en constante évolution. Comme le tourisme, le monde des

bibliothèques est transversal, pluridisciplinaire. La bibliothèque est une structure

multidimensionnelle qui se place au croisement de plusieurs politiques publiques : culturelle,

éducative, sociale, politiques de la ville, etc. Ainsi de part sa diversité et son rôle dans le

secteur tertiaire, elle possède une forte capacité de renouvellement.

Au regard de toutes ces données - analogie à des structures culturelles touristiques

comme les musées, outil de prestige pour la ville ou même, à plus grande échelle pour des

régions ou pays - il paraît évident que les bibliothèques possèdent des caractéristiques

suffisantes pour devenir un lieu touristique urbain. Ce mémoire démontre aussi que ces

structures peuvent évoluer pour accueillir ce nouveau public. Cependant, au regard de

l’absence d’articles sur le sujet, de données touristiques dans les bibliothèques et inversement,

il semble évident que les acteurs du monde des bibliothèques aussi bien que ceux du monde

du tourisme ne s’intéressent pas encore à cette possible évolution.

45 Marino ZORZI dans la préface du livre d’Aldo DI POLI, Bibliothèques. Architectures. 1995-2005. 46

Le grand emprunt de Nicolas SARKOZY prévoit une affectation de 140 millions d’euros pour accroitre la BnF

et son territoire.

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Après avoir pointé notre angle de vue des bibliothèques vers le tourisme, se pose aussi

la question : qu’est ce que le tourisme peut apporter aux bibliothèques ? A l’issue de ces

recherches, je pense que cette activité pourra améliorer, ou du moins, faire évoluer la

perception que la population a de ces lieux de lecture. Même si l’apparition des nouvelles

technologies n’a pas fait disparaitre les bibliothèques, ni diminuer sa fréquentation, l’image de

ces lieux reste encore pour certains terne. La plupart des usagers voient encore ces structures

comme des lieux de travail avant d’être des institutions culturelles de loisirs. Le tourisme peut

donc amener une plus grande ouverture au niveau de la perception que les hommes en ont et

au niveau de sa fréquentation.

En pleine période de décentralisation en France, les sites culturels : musées comme

monuments s’interrogent sur leur financement pour continuer à vivre. Le tourisme qui est un

vecteur économique important participe aussi à faire vivre ce type de structure. La société

privée de gestion et mise en valeur de monuments patrimoniaux, Culturespaces, l’a bien

compris. En développant le tourisme de ses sites, elle déploie ainsi la dimension plus

commerciale de ces derniers pour les faire vivre. En atteste les arènes de Nîmes. Sans rentrer

dans la caricature de faire des bibliothèques des lieux commerciaux, le tourisme peut être un

enrichissement pour accroitre la valorisation des fonds notamment.

Comme le dit bien l’Unesco, sur son site Internet47, a propos du tourisme culturel, “nul

besoin de preuves pour soutenir l’affirmation selon laquelle le tourisme peut être le meilleur

ami aussi bien que le pire ennemi du développement“. Mettre en tourisme les bibliothèques

est donc envisageable mais, cela demandera une grande réflexion pour synchroniser à la fois

les différentes missions et publics présents dans ce type de structure. Il ne s’agit pas de rendre

une bibliothèque touristique pour des raisons uniquement économiques, sans penser aux

conséquences sur la préservation du patrimoine et le message à passer. L’objectif est vraiment

de faire découvrir au visiteur, par son patrimoine, une partie de l’histoire du lieu, de la

population, etc…

47

UNESCO. Tourisme culturel: UNESCO Secteur de la culture [en ligne]. Disponible sur

<http://portal.unesco.org/culture/fr/ev.php-

URL_ID=11408&URL_DO=DO_PRINTPAGE&URL_SECTION=201.html> (consulté le 27.08.2010)

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En outre, si les bibliothèques peuvent devenir touristiques, dans le cas des institutions

françaises, elles n’ont pour l’instant pas la force d’attirer un public de masse compte tenu de

l’insuffisance de leurs moyens humains et financiers. Mais pour conclure il est tout même

intéressant de retenir les différentes avancées en matière de valorisation qui conduiront peu à

peu à élargir le public pour accueillir en fin de compte des touristes.

Par exemple, la Médiathèque de Troyes en France abrite un pan entier de l’histoire du livre à

travers ses collections. Par l’intermédiaire de son exposition permanente, de manifestations

temporaires et d’une politique d’animation culturelle diversifiée et innovante, les acteurs de ce

lieu arrivent de manière significative à faire connaitre ce patrimoine48 de plus de mille ans,

aujourd’hui abrité dans un bâtiment ultra moderne ouvert en 2002 pour lequel, les architectes

français Dominique LYON et Pierre DU BESSET ont obtenu le prix de l’équerre d’argent.

En reconnaissance de ce travail de conservation, valorisation et démocratisation, la

médiathèque de Troyes a reçu en juillet 2009 l'inscription au registre “Mémoire du monde“49

de la part de l'UNESCO.

48

“Le fonds regroupe 1.750 manuscrits du Moyen Age provenant notamment de l'abbaye de Clairvaux, 2.300

manuscrits modernes dont les papiers des jansénistes de Troyes, 700 incunables, 2.900 livrets de colportage,

160.000 livres imprimés du XVIème au XIXème siècle ainsi qu'une très riche documentation sur l'histoire locale

et régionale“.

Source : Evene.fr. Médiathèque de l’agglomération troyenne [en ligne. Disponible sur

<http://www.evene.fr/culture/lieux/mediatheque-de-l-agglomeration-troyenne-5123.php> (consulté le

28.08.2010)

49 Mémoire du monde est un programme promouvant la conservation et la diffusion des collections d'archives

et de bibliothèque partout dans le monde afin de pallier à l'amnésie collective et la disparition de ce patrimoine

rare.

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BIBLIOGRAPHIE

Cette bibliographie est classée par ordre alphabétique selon le type de sources

(monographies papiers, périodiques, documents électroniques). Je n’ai pas choisi un

classement thématique car plusieurs de mes sources touchent à plusieurs sujets à la fois.

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105

ANNEXES

ANNEXE A : DEPLIANT SUR LES VISITES GUIDEES DE LA BIBLIOTHEQUE NATIONALE DE

PARIS…………………………………………………………………………..…………………………I

ANNEXE B : PROSPECTUS DE COMMUNICATION DE LA BNF SUR L’ARCHITECTURE DE CES

BATIMENTS………………………………...………………………………………………………..…II

ANNEXE C : LES “TRESORS DE LA BIBLIOTHEQUE“ - EXEMPLE D’EXPOSITION VIRTUELLE

DE LA MEDIATHEQUE DE TROYES (FRANCE) VIA SON SITE INTERNET….…………..……III

ANNEXE D : RETRANSCRIPTION D’UN ENTRETIEN…………………….......................….....V

ANNEXE E : CARTE DES EQUIPEMENTS TOURISTIQUES DE PARIS.…………………..…..VIII

ANNEXE F : PARCOURS DE VISITE DE LA VILLE DE REIMS……………………………………X

ANNEXE G : PROSPECTUS ANGLAIS-ALLEMAND DE L’ABBAYE D’ADMONT

(AUTRICHE)………………………………………………………………………………………….XI

ANNEXE H : REVUE DES BIBLIOTHEQUES DE PARIS : “EN VUE“…………….…..…..…..XIII

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I

ANNEXE A : DEPLIANT SUR LES VISITES GUIDEES DE LA BIBLIOTHEQUE

NATIONALE DE PARIS

Pages 1 et 4

Pages 2 et 3

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II

ANNEXE B : PROSPECTUS DE COMMUNICATION DE LA BNF SUR

L’ARCHITECTURE DE CES BATIMENTS

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III

ANNEXE C : LES “TRESORS DE LA BIBLIOTHEQUE“ - EXEMPLE

D’EXPOSITION VIRTUELLE DE LA MEDIATHEQUE DE TROYES (FRANCE) VIA

SON SITE INTERNET

Trésors enluminés de Troyes

La Médiathèque de Troyes conserve un trésor magnifique : la plus riche collection française de manuscrits du Moyen Age après la Bibliothèque nationale de France !

----------------------------------------------------------

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IV

Voici quelques pages Internet de l’exposition virtuelle, les enluminures de Troyes Source : http://www.mediatheque-agglo-troyes.fr/webmat2/expos/tresors/index.html

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V

ANNEXE D : RETRANSCRIPTION D’UN ENTRETIEN

Entretien direct avec Martine POULAIN, le 11.01.2010 à la bibliothèque de l’INHA

Présentation de l’interrogée : Martine Poulain :

Après un doctorat en sociologie, Martine POULAIN devient conservateur des bibliothèques.

Elle a travaillé une dizaine d’années à la Bibliothèque Publique d’Information (BPI) en tant que responsable du Service des études et de la recherche. Bonne connaisseuse du milieu professionnel des bibliothèques, elle devient rédactrice en chef du Bulletin des bibliothèques de France (BBF) de 1990 à 1998, avant de prendre la direction de Médiadix (Centre régional de formation aux carrières des bibliothèques de la région Ile-de-France) et de l’IUP Métiers du livre de l’université Paris X. Aujourd’hui, elle est désormais directrice de la bibliothèque de l’Institut national d’Histoire de l’Art. En parallèle, elle a toujours poursuivit son travail de chercheuse en publiant des ouvrages ayant trait à la sociologie en bibliothèques mais également à l’histoire de ces lieux.

Questions / réponses (Ce n’est pas du mot à mot)

1. Pensez-vous que le patrimoine des bibliothèques est bien valorisé aujourd’hui ? Si non, pourquoi et comment y parvenir ? Si oui, comment ?

Selon, Martine POULAIN, le patrimoine des bibliothèques est valorisé, mais pas assez par rapport à sa richesse. Le patrimoine n’est pas le même et n’est pas valorisé de la même façon selon le type de bibliothèque dans lequel il se trouve. - Du côté de la bibliothèque nationale : Depuis, quelques années, avec la construction de la BnF, la valorisation du patrimoine des bibliothèques s’est améliorée, car plus d’argent a été investi pour les bibliothèques. Il y a eu aussi un élargissement des missions (espace d’exposition multiplié par deux avec la construction des locaux François Mitterrand à Tolbiac). - Du côté des bibliothèques municipales : Des efforts ont été faits grâce au Plan d'Action pour le Patrimoine Ecrit (P.A.P.E.)50. Est apparu le souci de mieux connaître le patrimoine écrit et sa valorisation. - Du côté des Bibliothèques universitaires : C’est une préoccupation beaucoup plus récente dans les bibliothèques universitaires. Cela, remonte à deux ans, puisqu’avant la préoccupation se centrait sur la modernisation de ces institutions. - Du côté des villes : Des efforts sont également notables dans les villes. Emergent des évènements et expositions en lien avec la bibliothèque et sur les livres. En atteste le mois du Livre par exemple. De plus, on observe dans plusieurs villes, la création de nouveaux bâtiments - avec un accent porté sur

50

Le Plan d'action pour le patrimoine écrit et graphique (P.A.P.E.) a été mis en place en 2004 par la Direction du Livre et de la Lecture (D.L.L.). IL est né d'une réflexion autour du patrimoine écrit de notre pays.

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VI

l’architecture de ces structures - pour accueillir des médiathèques. Enfin sont réalisés des petits livres et focus territoriaux. - Du côté de la profession : Au sein même du milieu professionnel du monde des livres, on assiste à un retour au patrimoine (autour duquel, les conservateurs se sont trouvés seuls au début). A un moment, le patrimoine était un problème pour les bibliothèques publiques (cf. saisie révolutionnaire). Maintenant, il y a une volonté de faire davantage. Concernant la valorisation, elle prend plusieurs formes. Selon Martine POULAIN, avant d’effectuer tout travail de valorisation, il faut connaitre son patrimoine. Or, aujourd’hui, ce n’est pas encore le cas. En effet une partie du patrimoine n’est pas encore catalogué. C’est le cas à l’INHA par exemple, qui n’a jamais eu (et n’aura sans doute jamais) les moyens (ni financiers et ni humains) pour tout cataloguer. De plus, aujourd’hui s’est ajouté tout un travail de transposition des catalogues papiers en catalogues électroniques. L’aspect positif de cette tache est que l’on peut enrichir davantage les notices. Ensuite, la valorisation consiste d’abord à traiter. La numérisation, qui est en pleine effervescence depuis 7 ans, a apporté un plus à ce niveau là. Aujourd’hui on numérise avant tout le patrimoine pour le protéger et, car la mise en ligne permet de savoir ce que l’on a et surtout de le communiquer de manière infinie. A l’INHA, 100.000 documents faisant un total de 400.000 pages ont été numérisés et 150.000 pages51 sont encore en attente. A la BnF, le service numérique Gallica représente quelque 80.000 livres numérisés. Le grand emprunt de Nicolas SARKOZY prévoit une affectation de 140 millions d’euros pour accroitre la BnF et son territoire. Après le traitement, la valorisation, c’est aussi les expositions et les ouvrages. Ce n’est pas facile de faire ce genre de valorisation pour des livres. Toutefois, malgré les charges, une dizaine de livres au moins ont été publiés sur les collections de l’INHA. D’après Martine POULAIN, on est dans une période favorable du point de vue des mentalités pour valoriser le patrimoine. Selon elle, les gens recherchent un retour au passé par crainte du futur, d’où l’intérêt pour le patrimoine. Quoi qu’il en soit il faudrait faire plus pour valoriser ce patrimoine des bibliothèques, mais on manque de temps et de budget. Et puis, les bibliothèques doivent aussi répondre avant tout au besoin des lecteurs et leur donner l’accès à la documentation. A l’INHA, le patrimoine a énormément bénéficié par rapport à la bibliothèque d’archéologie quand elle appartenait au réseau des bibliothèques universitaires. Jacques DOUCET a créé deux bibliothèques en France et les a cédé à l’Etat. La bibliothèque de l’INHA comprend l’une d’elle. Au final, la bibliothèque de l’INHA n’est pas encore connue comme elle devrait l’être. Avec son département d’étude et de recherche elle peut néanmoins traiter de manière plus approfondie les collections. 2. Pensez-vous que les bibliothèques peuvent devenir touristiques ? (sans pour autant perdre ses autres missions. C’est plus un ajout)

Le tourisme culturel est omniprésent à Paris. Cela pourrait conduire les touristes vers les bibliothèques. D’autant plus que les images numérisées sont loin du but pour permettre à tout le monde de découvrir le patrimoine écrit à distance. Le centre Pompidou est un haut lieu de tourisme culturel et au sein de la BPI, il y a une part importante de touristes, même si aujourd’hui un peu moins, puisque les accès au musée et à la bibliothèque sont désormais séparés. Cependant, ce n’est pas forcement le type de touristes qui

51 Il est préférable de parler de pages plutôt que de documents car certains documents comme les estampes ne

comportent qu’une seule page. De plus, une page équivaut à une vue en numérisation.

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VII

viennent voir la bibliothèque mais plutôt des touristes vaguement intéressés par la bibliothèque qui en profitent pour jeter un œil et regarder des revues sur leur pays par exemple. Le lieu lui-même (une bibliothèque) et son fonctionnement (une institution culturelle ouverte sur le monde) aurait un intérêt à accueillir des touristes. Aujourd’hui, la BnF reçoit le 1er budget du ministère. Elle doit donner gage d’une plus grande ouverture jusqu’alors réservée plutôt aux chercheurs. A ce titre, elle travaille beaucoup à développer des visites (des bâtiments, des expositions), l’accueil de groupes,… En Province, on note de plus en plus de nouvelles constructions de bibliothèques. L’architecture y est souvent magnifique. C’est le cas de la médiathèque de Troyes par exemple. Son architecte a d’ailleurs reçu l’équerre d’argent pour ce bâtiment. Donc, oui, Martine POULAIN pense que les bibliothèques peuvent devenir touristiques mais pour l’instant, elles n’ont pas la force pour attirer un public de masse. C’est toujours une question d’équilibre. Selon elle, il faut déjà commencer par la signalisation de bibliothèques dans les villes (journaux, circulation) Comment faire pour qu’elle se fasse connaitre ? La bibliothèque Richelieu (BnF, Paris) a une très grande volonté de s’ouvrir plus, par des expositions, des parcours thématiques. La BnF envisage d’ailleurs suite aux travaux de donner un accès gratuit et ouvert à la salle ovale dans laquelle on trouvera les trésors de la bibliothèque (de manière virtuelle ou réelle). 3. Je suis actuellement à la recherche d’exemples de bibliothèques ayant déjà quelques activités touristiques ou du moins un potentiel pour le devenir. J’ai pensé à la BnF mais aussi à la Bibliothèque et Archives Nationales du Québec (BANQ). Comme je crois que vous y êtes allée le mois dernier, peut-être que vous pourriez me donner vos impressions ?

Au Québec, ils partaient de très loin en matière de bibliothèque. Ça commence en 1965. Le pari est de mélanger une bibliothèque publique à une bibliothèque nationale. Le bâtiment est splendide, très ouvert. Il y a un accès direct au métro. C’est ouvert à tous. Les espaces intérieurs sont également splendides et non pas vieilli après 4 ans d’ouverture. L’architecture est simple mais fonctionnelle, lumineuse, chaleureuse. Il y a environ 100.000 visiteurs par jour depuis 4 ans d’ouverture. Il n’y a aucune condition pour entrer (tenue, sac…). Grâce au système de prêt, il n’y a ni file d’attente, ni jauge de fréquentation. Ça amène beaucoup plus de mouvements. Les usagers peuvent emprunter jusqu’à 13 documents en même temps par carte. Des caddies sont d’ailleurs à la disposition des familles pour le prêt. Il y a des visites de mises en place et il y a des touristes mais ce sont quand même plutôt selon Martine POULAIN, des touristes comme ceux de la BPI qui viennent pour lire les journaux de leur pays en autre. La BANQ, ne favorise pas vraiment le tourisme. Elle travaille avant tout à servir la population montréalaise mais comme c’est ouvert à tous pourquoi pas aux touristes. Enfin, Martine POULAIN rajoute qu’il faut faire attention aux chiffres de fréquentations et aux statistique car à Montréal, il y a beaucoup d’étrangers en résidence temporaire. Ils ne peuvent donc pas être considérés comme des touristes. 4. Auriez-vous des données chiffrées sur la fréquentation de la salle ovale lors des journées du patrimoine ?

Il y a eu au moins 3.000 personnes l’année dernière, mais vu que l’INHA se trouve dans les locaux de la BnF (cf. Bibliothèque Richelieu), c’est la BnF qui comptabilise la fréquentation lors des journées du patrimoine. Il faut donc se référer à eux.

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VIII

Selon le rapport d’activité de l’INHA en 2007 :

La valorisation des collections de Jacques doucet est depuis 2004, l’un des investissements

importants de la bibliothèque. Elle est traduite en exposition, éditions, conférences. Le Prêt d’œuvres, et la participation à des expositions organisées par l’INHA ou par d’autres organismes constituent une activité en pleine expansion à la bibliothèque. Cependant, les travaux de la nouvelle bibliothèque (salle Labrouste) entrainent un ralentissement de cette activité. Expositions extérieures : la bibliothèque de l’INHA a participé à 17 expositions en 2007 auxquelles elle a prêté 80 documents (49 estampes, 7 dessins, 4 photos, 1 trousse à outil de graveur, 2 matrices de bois, 4 numéros de périodiques et 7 ouvrages). Elle collabore avec l’éditeur Philippe PICQUIER pour la publication de livres sur les collections de l’INHA. Conférences et communication en 2007 : 2 conférences, 2 émissions de radio (Dominique MORELON) et Martine POULAIN 1 communication.

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IX

ANNEXE E : CARTE DES EQUIPEMENTS TOURISTIQUES DE PARIS

Source : http://blogs.clarin.com/idea/tag/fr/

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X

ANNEXE F : PARCOURS DE VISITE DE LA VILLE DE REIMS

Source : copies d’écran du site internet : http://www.reimsartdeco.fr/parcours_art_deco.php?parcours=1

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XI

ANNEXE G : PROSPECTUS ANGLAIS-ALLEMAND DE L’ABBAYE D’ADMONT (AUTRICHE)

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XII

SOURCE : Benediktinerstift Admont [en ligne]. Disponible sur <http://www.stiftadmont.at/english/> (consulté le 10.09.2010)

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XIII

ANNEXE H : REVUE DES BIBLIOTHEQUES DE PARIS : “EN VUE“

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106

TABLE DES ENTRETIENS-VISITES

Type

d’investigation

sur le terrain

Interlocuteurs

/organisateurs

Fonction des

interlocuteurs

Lieu date

Entretien direct Martine POULAIN Conservateur des bibliothèques. Directrice de la bibliothèque l’Institut national d’Histoire de l’Art (I.N.H.A)

Bibliothèque de l’Institut national d’Histoire de l’Art (Paris)

11 janvier 2010

Visite guidée (+questions)

Personnel de la Bibliothèque des Champs Libres

Bibliothèque des Champs Libres (Rennes)

2008

Visite guidée (+questions)

personnel d’accueil du Quadrilatère Richelieu

Bibliothèque nationale de France : quadrilatère Richelieu (Paris)

octobre 2009

Visite guidée (+questions)

Philippe Bernard personnel d’accueil de la BnF

Bibliothèque nationale de France : site François-Mitterrand (Paris)

Février 2010

Journées d’étude : BnF Richelieu. Un

projet en

question

organisée par l’Association pour la Sauvegarde et la Mise en valeur du Paris historique et l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.

Intervenants français et étrangers : architectes, personnels de bibliothèques : conservateur, directeur de la BnF (Bruno RACINE), directrice générale de la BnF (Jacqueline SANSON), directeur des patrimoines (Philippe BELAVAL), etc.

Institut national d’Histoire de l’Art (Paris)

les 5 et 6 juillet 2010

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TABLE DES MATIERES

AVANT PROPOS – REMERCIEMENTS..........................................................................................2

SOMMAIRE...........................................................................................................................................3

INTRODUCTION.................................................................................................................................5

PROBLEMATIQUE ET METHODOLOGIE.................................................................................. 10

I. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES ................................................................................................ 10

1. La Problématique ................................................................................................................ 10

a. Elaboration de la problématique.......................................................................................... 10

b. Présentation de la problématique........................................................................................ 11

2. Les Hypothèses.................................................................................................................... 11

3. Cadrage et limitation du sujet............................................................................................. 12

II. METHODOLOGIE DE RECHERCHE : EXPLORATION DES SOURCES ET DES RESSOURCES EXISTANTES........................................................................................................................................................... 13

1. Lieux de recherche .............................................................................................................. 13

2. Sources bibliographiques .................................................................................................... 14

3. Les Entretiens exploratoires et investigations sur le terrain .............................................. 14

DEVELOPPEMENT.......................................................................................................................... 16

I. LES BIBLIOTHEQUES : UNE STRUCTURE PATRIMONIALE URBAINE................................................ 16

1. “Constat“ : les bibliothèques aujourd’hui........................................................................... 16

a. Les différents types de bibliothèques................................................................................... 17

b. L’organisation des bibliothèques.......................................................................................... 18

c. Les rôles et missions des bibliothèques................................................................................ 18

d. Les activités des professionnels des bibliothèques.............................................................. 22

e. Les publics............................................................................................................................. 23

2. Les bibliothèques : un patrimoine bâti et écrit ................................................................... 24

a. Le patrimoine écrit et graphique.......................................................................................... 25

b. Le patrimoine bâti ................................................................................................................ 28

c. L’exploitation du patrimoine des bibliothèques................................................................... 32

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3. La bibliothèque, une institution culturelle au cœur d’un territoire, d’un tissu urbain....... 35

II. Le tourisme et les sites culturels................................................................................................... 41

1. Comparaison de deux structures culturelles : le musée, lieu culturel touristique par excellence et la bibliothèque, structure culturelle qui se veut ouverte à tous............................ 41

a. Les parentés des musées et bibliothèques........................................................................... 42

b. Bibliothèques et musées : deux structures faussement amies qui se distinguent .............. 45

2. Les prémices du tourisme dans le milieu du livre et des bibliothèques ............................. 48

a. Les bibliothèques aux abords de stations touristiques ........................................................ 49

b. Les bibliothèques nationales ................................................................................................ 50

c. Les bibliothèques dites historiques ...................................................................................... 53

d. Les complexes culturels : musées-bibliothèques, les maisons d’écrivains… : d’autres structures culturelles apparentées au monde du livre et des bibliothèques. .................... 61

III. Proposition concrète : la bibliothèque peut devenir un lieu touristique. ................................... 63

1. Aménagements : zone d’accueil pour les touristes ; espaces aménagés pour la visite ; espaces dédiés à des expositions ................................................................................................. 64

2. L’Accueil du public : entre usagers et touristes .................................................................. 68

3. Les Acteurs : le rôle des bibliothécaires et des opérateurs touristiques ............................ 70

4. La politique de valorisation et de médiation de la bibliothèque ....................................... 71

5. La Communication - marketing – promotion...................................................................... 76

6. La Préservation, sécurité, et conservation.......................................................................... 81

7. Le Montage juridique et économique................................................................................. 88

CONCLUSION.................................................................................................................................... 92

BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................. 95

ANNEXES .........................................................................................................................................105

TABLE DES ENTRETIENS-VISITES ..........................................................................................106

TABLE DES MATIERES................................................................................................................107

RESUME (FRANÇAIS / ANGLAIS).............................................................................................109

RESUME : “Les bibliothèques, un lieu touristique en devenir“.........................................109

SUMMARY: “LIBRARIES, FUTURE TOURIST PLACES“..................................................................110

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RESUME (FRANÇAIS / ANGLAIS)

RESUME : “Les bibliothèques, un lieu touristique en devenir“

Depuis la seconde moitié du XXème siècle, notre société porte en gloire tout ce qui à

trait au patrimoine. Nous sommes dans une phase de “patrimonialisation“. La bibliothèque,

espace public, éducatif et culturel, profite donc de cet “amour“ porté au patrimoine pour se

positionner comme institution culturelle riche, grâce à ses collections et son architecture

valorisées.

Autre caractéristique de notre société actuelle : le tourisme. Là aussi, depuis la seconde

moitié du XXème, c’est une activité qui connaît un essor considérable. Parmi les différentes

formes de tourisme, figure en tête de liste le tourisme culturel. Aujourd’hui, la majeure partie

des sites patrimoniaux bénéficient d’une fréquentation touristique. On peut alors s’interroger

sur l’absence de cette activité et de ce public au sein des bibliothèques. La bibliothèque a-t-

elle un potentiel touristique attractif ? Si oui, quelles mesures sont à prendre en considération

pour obtenir cette évolution ?

Grâce à son patrimoine écrit et architectural, mais aussi par son rôle représentatif de la

ville, la bibliothèque est un lieu culturel diversifié ouvert à tous qui peut prétendre à attirer des

touristes. Les exemples de bibliothèques nationales et historiques au sein desquelles le

tourisme apparaît peu à peu l’attestent. Cependant, la bibliothèque est une structure

pluridisciplinaire qui a déjà plusieurs missions et usagers. La tâche des professionnels pour la

rendre touristique devra donc prendre en compte cette conciliation des pratiques et publics.

D’autre part, il s’agira aussi d’entreprendre un travail important de communication - élément

peu développé au sein de ces structures – afin de faire évoluer les perceptions de la société sur

ces lieux. En effet, le patrimoine des bibliothèques est pour beaucoup méconnu. En outre, la

bibliothèque reste dans l’esprit des gens une structure dédiée aux savoirs et à la lecture

publique. Sa notoriété en tant que lieu culturel est assez faible. Enfin, même si les

bibliothèques ne deviendront pas toutes touristiques et n’atteindront pas un fort niveau de

fréquentation de visiteurs comme les musées, car ses autres missions sont aussi très

importantes, il faudra mener une réflexion poussée en vue d’accueillir les touristes pour éviter

tout risque et dégradations de ces lieux par le tourisme.

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110

SUMMARY: “LIBRARIES, FUTURE TOURIST PLACES“

Since the second half of the XXth century, our society carries in glory everything

related to the the cultural heritage. The library is an educational and cultural public place. It

thus takes advantage of this "love" carries by people for the cultural heritage by positioning

itself as a rich cultural institution, thanks to its collections and its architecture valued.

Other characteristic of our current society: the tourism. Since the second half of the

XXth century, it is also an activity which knows a considerable development. Among the

various forms of tourism, the cultural tourism is at the top of list. Nowadays, the major part of

the cultural sites welcomes tourists. We can then wonder about the absence of this activity

and of this public within the libraries. Does the library have an attractive tourist potential? If

so, what measures have to be taken to obtain this evolution?

Thanks to its documentary and architectural heritage, but also by its role of city

representation, the library is a diversified cultural place opened to everyone which can claim

to entice tourists. The examples of national libraries and historic libraries within which the

tourism appears little by little gives evidence of it. However, the library is a multidisciplinary

structure which already has several missions and users. The work of the professionals to make

it touristic will thus have to take into account this conciliation of the practices and the public.

Furthermore, it will be also necessary to make an important work of communication - element

little developed within these structures - to improve the perceptions of the society on these

places. Indeed, the cultural heritage of libraries is, for many people, underestimated. In

addition, the library remains in mind of people a structure dedicated to the knowledge and to

the public reading. Its fame as cultural place is quite weak. Finally, even if libraries will not

all become touristic and will not affect a strong level of visitors attendance like the museums,

because its other missions are also very important, it will be necessary to lead a reflection

concerning the welcoming of tourists to avoid any risk and damages of these places by the

tourism.

Page 125: Les bibliothèques, un lieu touristique en devenir...Aujourd’hui, dans l’esprit des gens, le terme “patrimoine“ fait d’abord référence aux monuments et musées. Pourtant,

UNIVERSITÉ DE PARIS 1 – PANTHÉON SORBONNE

INSTITUT DE RECHERCHE ET D’ÉTUDES SUPÉRIEURES DU TOURISME

“Les bibliothèques, un lieu touristique en devenir “

- CORPUS METHODOLOGIQUE -

Mémoire professionnel présenté pour l’obtention du

Diplôme de Paris 1 – Panthéon Sorbonne

MASTER PROFESSIONNEL “ TOURISME “ (2 e année)

Spécialité Valorisation Touristique des Sites Culturels

Par Mlle Gaëlle DENANT

Directeur du mémoire : Mr. Valéry PATIN

JURY

Membres du jury : ……………………….

: ……………………….

: ……………………….

Session de septembre 2010

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La réalisation d’un mémoire ne se fait pas sans une méthodologie élaborée. Durant ce travail, sont donc créés différents outils, documents, ébauches, prises de notes permettant l’avancée des recherches et la structuration des idées en vue de la rédaction finale. Ce corpus méthodologique, non exhaustif, fait état de quelques documents m’ayant aidé pour ce mémoire.

SOMMAIRE

Historique synthétique et non exhaustif des bibliothèques ...........................................................2

Liste des exemples potentiels.....................................................................................................................5

Exemple de Fiche d’observation d’un site ......................................................................................... 10

Recherche documentaire : La Bibliotheca Alexandrina, un symbole de renaissance de la

mégalopole méditerranéenne dans l'Egypte moderne ?............................................................... 14

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HISTORIQUE SYNTHETIQUE ET NON EXHAUSTIF DES BIBLIOTHEQUES

Antiquité

- Naissance des premières formes de bibliothèques pour collecter des documents administratifs.

Exemples : bibliothèque et archives du palais des rois d’Assyrie à Ninive. - Naissance de la plus grande et célèbre bibliothèque de la période antique : la

bibliothèque d’Alexandrie au IIIème siècle avant Jésus-Christ. - Eclosion de belles bibliothèques à l’époque hellénistique : période faste. Exemples : à Ephèse, Pergame, Athènes, Rhodes, Antioche - On trouve des bibliothèques dans des monuments : palais, thermes, temples… puis des

bibliothèques au bâtiment propre.

Moyen Âge

- La tradition romaine qui vise à créer de somptueuses bibliothèques se poursuit. Exemples : à Constantinople et à Cassiodore. - Toutefois, au moyen-âge, les livres se retrouvent souvent confinés dans les espaces

clos des monastères. Des ateliers de copistes se développent au sein de ces structures religieuses afin d’enrichir les bibliothèques de textes religieux.

Exemples : En Occident, on compte parmi les plus grandes celles du monastère du Mont-Cassin, celle de Saint-Gall ou celle de Cîteaux. En Orient, dans le monde islamique, apparaissent aussi des bibliothèques. En attestent celles de Chinguetti. - Création de la bibliothèque Vaticane sous Sixte IV. - Les XIIème et XIIIème siècles voient aussi la création de premières universités. Les

nouveaux ordres mendiants sortent de leur monastère pour répandre la parole divine. Le livre sort alors et est placé dans de spacieuses nefs auxquelles accédaient moines et étudiants. Les universités complètent l’action des monastères. Comme les collèges – lieux d’études également -, elles possèdent souvent leurs propres bibliothèques.

- Dans la lignée des souverains et empereurs antiques, les rois médiévaux comme Saint-Louis ou Charles V possèdent aussi leurs propres bibliothèques. Certaines d’entre elles sont d’ailleurs les fondements de centres actuels.

Renaissance et époque moderne

- Aux XIVème et XVème siècles, l’Humanisme favorise l’émergence de bibliothèques privées rassemblées dans de petits cabinets de travail.

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- Aux XVème et XVIème siècles, l’invention de l’imprimerie va modifier le contenu de ces lieux culturels. Le besoin de créer des espaces de conservation s’accroit.

- Se développe aussi, à cette même époque, un plus grand besoin de lire. Des bibliothèques publiques apparaissent ainsi petit à petit. Plusieurs bibliothèques privées, données ou léguées par leurs propriétaires, deviennent des bibliothèques publiques. Les bibliothèques s’ouvrent de plus en plus au public : timidement à partir de la fin du XVIème siècle, mais plus largement au XVIIIème siècle.

Exemples : Au XVIème siècle : deux grandes bibliothèques sont destinées à la lecture publique : la bibliothèque St Marc de Venise et celle des Médicis de Florence en Italie situées dans de somptueux édifices construits spécialement. - Création du dépôt légal par François 1er. - En Occident, les grandes bibliothèques comme les bibliothèques royales ont une

réputation prestigieuse et deviennent des lieux de visite obligée pour les voyageurs. - Au XVII et XVIIIème siècles, en Europe centrale et particulièrement en Angleterre,

les libraires installent aux côtés de leur boutique, des bibliothèques de prêt. - Le modèle des bibliothèques européennes s’exportent dans les colonies, en particulier

dans les futurs Etats-Unis, où de nombreuses bibliothèques universitaires actuelles sont issues des établissements d'enseignement fondés dès le XVIIème siècle.

Époque contemporaine

- Le développement des bibliothèques de tous types s'accélère entre la fin du XVIIIème et le XXIème siècle. Le développement de l’information exige des bâtiments plus imposants. Les grandes capitales européennes donnent l’exemple Paris et Londres notamment.

- Le transfert de collections privées dans des structures publiques se poursuit. C’est particulièrement le cas en France avec les confiscations révolutionnaires après 1789, qui disperse les biens du Clergé, de l’Aristocratie et des institutions de l’Ancien Régime.

- Suite à la Révolution française, des bibliothèques sont implantées dans chaque département pour recueillir ces biens confisqués. Ces dépôts, confiés aux villes en 1804, constituent le noyau de base d'une partie des bibliothèques municipales au XIXème siècle. Mais les municipalités vont tarder à s’occuper de ces fonds et leur donner accès

- Les cabinets de lecture privés se développent, et proposent soit la consultation sur place soit une forme de location de livres ou de journaux. Ces lieux ne sont fréquentés que par la bourgeoisie vu le prix assez onéreux des abonnements.

- Parallèlement, pendant tout le XIXème siècle, se remarquent de nombreuses tentatives de création de bibliothèques populaires : ligues catholiques et protestantes, mouvements ouvriers, etc.

- Le développement des études supérieures entraîne celui des bibliothèques universitaires, en particulier en Allemagne qui y consacre de grands efforts.

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- Au XXème siècle, on constate un réel développement des bibliothèques sous l’impulsion de personnalités telles que Melvil DEWEY, OTLET et LAFONTAINE et Eugène MOREL. Ces améliorations se constatent au niveau de l’organisation des documents et d’un mouvement de normalisation de description par exemple. Sont créés plusieurs systèmes de classification, encore aujourd’hui utilisés. C’est le cas du classement Dewey notamment. De plus, se développe aussi une volonté de renforcer l'accueil et le service auprès du public. Aux États-Unis, les bibliothécaires instaurent ainsi, dès qu'ils le peuvent, l'accès direct aux documents. Cette politique d'accès libre s'exporte en France dès la fin de la Première Guerre mondiale.

- Dans le même esprit, les bibliothèques diversifient peu à peu leurs activités, avec des expositions, des lectures (heure du conte), des conférences et colloques, des animations diverses.

- Toujours sous l'impulsion de Melvil DEWEY et Eugène MOREL se développe, dès la fin du XIXème siècle, une formation professionnelle des bibliothécaires, couplée avec une meilleure coopération entre bibliothèques.

- Le développement des bibliothèques publiques s'amplifie à partir des années 1970, en relation avec un accroissement de la demande dû à l'augmentation de la part de la population poursuivant des études supérieures, la politique culturelle de l'État et des collectivités territoriales et les possibilités offertes par l'informatique.

- Si dès les années 1950, on songe à utiliser les nouvelles technologies dans les bibliothèques, il faut tout de même attendre les années 1980 pour que l'informatisation soit effective.

- Après une période pendant laquelle le modèle de construction était celui d'un bâtiment accueillant à la fois bibliothèque et musée (exemple : à Grenoble), le XXème siècle voit, au milieu des années 1970, la construction de bâtiments spécifiques, comme la bibliothèque Carnegie à Reims, et de plus en plus de grande ampleur, comme la bibliothèque de La Part-Dieu, à Lyon.

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LISTE DES EXEMPLES POTENTIELS

Nom de la

structure

Pays Potentiel patrimonial et touristique/ Points forts Manques /

faiblesses

Lien Internet

Bibliothèque de

Chantilly

France - Fonds patrimonial - Visites, programme d’animation - profite de l’attractivité touristique du Château

http://www.bibliotheque-conde.fr/accueil.htm

Bibliothèque

Humaniste de

Sélestat

France - Fonds patrimonial : fonds remarquable de livres anciens, dont elle a rendu certains des éléments les plus représentatifs accessibles au public, ce qui est tout à fait exceptionnel. - Architecture ancienne - Visites guidées - expositions en lien avec le livre : Les ouvrages en vitrines, les outils d’impression en exposition, enfin l’ensemble de la bibliothèque donnée à voir permet de s’immerger pour un temps dans l’univers du livre, qui fut le vecteur déterminant dans la diffusion de la culture et de l’Humanisme à partir de la deuxième moitié du XVème siècle. - l’espace d’exposition de la bibliothèque afin de découvrir quelques ouvrages retraçant l’évolution du livre de l’époque mérovingienne au milieu du XVIe siècle. - site Internet en 4 langues

- centrée principalement sur public scolaire.

http://www.ville-selestat.fr/bhselestat

Chester Beatty

Library

Irlande (Dublin)

Fonds patrimonial : grande collection de manuscrits, miniatures, estampes, dessins, livres rares et des arts décoratifs assemblés par Sir Alfred Chester Beatty Les installations comprennent un jardin sur le toit, un restaurant, un espace de lecture, trois salles d'exposition, et une boutique. - architecture 18

e siècle+ extension 20

e siècle

http://www.cbl.ie/index.aspx

Bibliothèques

historiques ou

patrimoniales

ayant déjà un

lien avec le

tourisme

Bibliothèques

de Chinguetti,

d’Ouadane et

d’Oualata

Mauritanie

- Les Bibliothèques de Chinguetti (une dizaine) renferment des centaines de manuscrits précieux et savamment conservés selon des méthodes traditionnelles. Il s’agit de bibliothèques familiales jalousement protégées.

- fragiles. Nécessite une politique de conservation

http://www.guidemauritanie.com/bibliotheques.htm

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- Oualata, cité ancienne est célèbre pour ses bibliothèques, son architecture immuable et ses décorations murales. - ville connue et touristique pour ses bibliothèques. - ville, patrimoine mondial de l’Unesco

importante http://www.bibliorare.com/chinguetti.htm + A voir le livre : Villes De

Sables - Les Cités

Bibliothèques Du Désert Mauritanien d’Anne-Marie Tolba (Fernand Hazan - 20/11/2001)

Bibliothèque de

Leipzig

Allemagne - rassemble des œuvres de langue allemande dont le nombre s'élève actuellement à 7,5 millions de titres. Elle héberge en outre le musée des Livres et de l'Écriture.

http://www.allemagne-tourisme.com/

Bibliothèque de

la Duchesse

Anna Amalia

Allemagne (Weimar)

- architecture historique avec une salle de style rococo - Weimar, ville inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco - a été un grand centre culturel avec de célèbres écrivains

- se présente comme un centre de recherche de l'histoire de la culture et de la littérature vers 1800

http://www.allemagne-tourisme.com/

Deutsche

Bibliothek avec

le musée

allemand du

livre et de

l’écriture de

Leipzig

Allemagne - Fondé en 1884, ce musée est l’un des plus anciens du genre dans le monde - Aujourd’hui rattaché à la bibliothèque allemande - 63.000 ouvrages sur le thème du livre et de l’écriture. Parmi les 500.000 objets exposés, on trouve notamment des manuscrits, des imprimés du XVème au XIXème siècle, des reliures, de la décoration et du dessin de livre du XXème siècle, de l’illustration de livre, de la calligraphie, des œuvres d’arts graphiques appliqués, des spécimens d’écriture et de papier, des livres d’échantillons, des filigranes, des papiers de couleur, du matériel, des outils et des machines intervenant dans la fabrication de livres et de papier, sans oublier des archives et des documents sur l’histoire de l’industrie du livre.

www.leipzig-online.de http://www.allemagne-tourisme.com/

Bibliothèque Allemagne - Architecture XVIIIe siècle à colombage. www.francke-halle.de

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historique des

Fondations de

Francke à Halle

- Fonds patrimonial : D’importants fonds de livres anciens. Ses quelques 57.000 ouvrages traitent de tous les domaines de la connaissance, en mettant cependant l’accent sur l’histoire de l’église et de la culture des débuts de l'ère moderne. Architecture : avec son mobilier original du XVIIIème siècle, la salle historique de la bibliothèque constitue le cœur du bâtiment.

http://www.allemagne-tourisme.com/

Bibliothèque

historique de

Rastatt

Allemagne - Fonds patrimonial : avec d’anciens manuscrits conservés intégralement ou en partie, 162 incunables, de précieux documents des débuts de l’imprimerie (XVIème siècle) et les fonds de l’époque qui a suivi, ces quelques 30.000 ouvrages représentent un patrimoine culturel inestimable. - Visites guidées sur demande.

www.rastatt.de http://www.allemagne-tourisme.com/

Bibliothèque du

duc August de

Wolfenbüttel

Allemagne -Fonds patrimonial : collections nationales de l’imprimerie allemande datant du XVIIème siècle (plus de 12.000 imprimés et portraits originaux), legs et curiosités autographiques, et près de 12.000 manuscrits précieux datant du moyen-âge et 5.000 incunables. Le livre le plus cher du monde, l’évangéliaire du duc Henri le Lion, fait également partie des fonds de l’établissement depuis 1989.

www.hab.de http://www.allemagne-tourisme.com/

Musée Gellert à

Hainichen

Allemagne - Le fonds comprend une bibliothèque essentiellement historique, des archives, la collection Gellert avec divers souvenirs et portraits, mais aussi une collection d’arts plastiques sur le thème des fables. - visites guidées sur demande.

www.gellert-museum.de http://www.allemagne-tourisme.com/

La bibliothèque

du couvent de

St-Gall

Suisse - Bibliothèque de renommée mondiale -Architecture : sans doute la plus belle salle baroque profane de Suisse - Fonds patrimonial : on trouve 150.000 livres et 2.000 manuscrits originaux du Moyen Age ainsi qu'une momie vieille de 2.700 ans. - L'ensemble du complexe conventuel a été inscrit en 1983 sur la liste du patrimoine culturel de l'UNESCO.

http://www.myswitzerland.com/fr/destinations/culture/patrimoine-mondial-naturel-de-UNESCO/patrimoine-mondial-de-l-unesco-la-bibliotheque-du-couvent-de-st-gall.html

Bibliothèque

d'Este

Italie - Fonds patrimonial : Avec ses 600 000 volumes et ses 15 000 manuscrits, c'est une des bibliothèques les plus riches d'Italie : le clou de la visite est sans aucun doute la Bible de Borso d'Este, avec

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ses 1 020 pages enluminées par des artistes ferrarais du 15e siècle,

parmi lesquels figurait Tadeo Crivelli

BnF France - Architecture contemporaine (Dominique Perrault) et historique

- Fonds patrimonial - Visites guidées (service accueil), expositions, conférences… - située dans ville touristique - souhait de donner une plus grande part à l’ouverture de la bibliothèque aux visiteurs lambdas - site Internet en plusieurs langues (français, anglais, espagnol)

http://www.bnf.fr/

BANQ Québec - architecture contemporaine - fonds patrimonial - visites guidées, expositions… - accessibilité pour tous et directe (Métro) - située dans ville touristique

http://www.banq.qc.ca/accueil/

Bibliothèque

municipale de

Versailles

France - architecture ancienne : se trouve dans le bâtiment prévu pour le Ministère des Affaires étrangères sous Louis XV - Fonds patrimonial : Héritière d’une partie des collections du château de Versailles et des grandes familles de la Cour, la bibliothèque de Versailles est riche de près de 100.000 volumes imprimés, de la fin du XVème siècle à nos jours. - la visite est guidée par des conférenciers (office du tourisme) - située dans ville touristique (mais principalement pour le château : difficulté d’attirer les touristes au-delà)

<http://www.bibliotheques.versailles.fr/Statique/index.htm>

Bibliothèques

publiques

Bibliotheca

Alexandrina

Egypte - Visites - architecture contemporaine - fonds patrimonial - située dans ville touristique - Centre culturel (musées, restaurants,…) déjà attractif possédant tous les services d’accueil de touristes nécessaires - certaines pages du site Internet sont en plusieurs versions (ex en français) il y a une page concernant les visiteurs avec des explications sur l’accessibilité depuis l’aéroport. - tarifs spécial visiteurs étrangers ou visiteurs égyptiens (ça montre

http://www.bibalex.org/french/index.aspx

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donc, qu’ils sont des visiteurs étrangers ou du moins qu’ils tentent d’en avoir

Bibliothèque du

Trinity College

Irlande (Dublin)

- se visite accompagné - visite virtuelle - fonds patrimonial (livre de Kells) - expositions (notamment en lien avec Dublin)

http://www.tcd.ie/Library/

1ere

bibliothèque de

l'Université de

Coimbra

- sur ce site on trouve aussi une visite virtuelle de cette bibliothèque

http://bibliotecajoanina.uc.pt/

bibliothèque

des Champs

Libres de

Rennes

France - Dans un centre culturel donc peut bénéficier des retombées du musée de Bretagne, de la cité de science… + équipements d’accueil existants - au sein même de la bibliothèque : musée, concerts au niveau musique, salle de projection, zone patrimoine (sur la mer et la Bretagne), espace expo - architecture contemporaine (Christian de Portzamparc)

http://www.bibliotheque-rennesmetropole.fr/24669219/0/fiche___pagelibre/

Bibliothèque

Carnegie de

Reims

France - visites + fait partie d’un parcours touristique de la ville - Architecture : art déco

http://www.bm-reims.fr/webcontent/viewer/viewer.asp?INSTANCE=EXPLOITATION&EXTERNALID=WBCTDOC_50

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EXEMPLE DE FICHE D’OBSERVATION D’UN SITE

Nom du site : Bibliothèque nationale de France (BnF)

Type de structure / statut juridique : Bibliothèque nationale

Localisation : Paris (capitale)

La Bibliothèque nationale de France se déploie sur 7 sites géographiques distincts ayant chacun leurs spécificités, leurs collections, leurs missions. Cinq de ces sites accueillent le public : Site François-Mitterrand (Paris) (collections d'imprimés, périodiques, documents audiovisuels et documents informatiques) Site Richelieu (Paris) (départements des Manuscrits, des Estampes et de la photographie, des Cartes et plans, des Monnaies, médailles et antiques, de la Musique, des Arts du spectacle). Bibliothèque de l'Arsenal (Paris) Bibliothèque-Musée de l'Opéra (Paris) (musique) Maison Jean Vilar (Avignon) (théâtre) Les deux autres sont consacrés à la conservation des collections.

Création (date, contexte, historique) : - 1988-1994 : Héritière des riches collections nationales et d'un patrimoine architectural

lié à son histoire, la bibliothèque nationale s'est trouvée confrontée aux difficultés inévitables nées de la croissance de la production imprimée et de la demande culturelle : elle devait s’accroitre. Cette mutation intervient au un moment où les développements scientifiques et techniques ouvrent de nouvelles perspectives aussi bien dans le domaine de la conservation que dans celui de l'accès aux documents. C’est la période du développement de l’informatique notamment et des progrès en télécommunication. Avec

- le projet du président de la République François MITTERRAND, la Bibliothèque nationale de France s'inscrit dans la nouvelle génération de bibliothèque, qui voit le jour, aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en Allemagne, au Japon, à Alexandrie.

- Le 20 décembre 1996 : la bibliothèque d'étude du site François-Mitterrand s'ouvre. - Le 8 octobre 1998 : l'ouverture de la bibliothèque de recherche scelle l'achèvement de

ce grand projet.

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Mode de gestion : - En 2008, la BnF avait un personnel de 2 673 collaborateurs et un budget total

de 277,13 M€.

Missions : Les missions principales dont est investie la Bibliothèque nationale de France en tant que bibliothèque nationale gérant et valorisant le patrimoine qui lui est confié sont :

- La constitution des collections (dépôt légal) - La conservation des fonds - La communication des ces ressources au public - La constitution d’un catalogue complet de référence - La coopération avec d’autres établissements (sur le réseau national, européen et

international) - La recherche.

Valeur patrimoniale : - Fonds écrit et graphique : Les fonds de la BnF comprennent actuellement plus de

quatorze millions de livres et d'imprimés, deux cent cinquante mille volumes de manuscrits, trois cent soixante mille collections de périodiques, environ douze millions d'affiches, plus de huit cent mille cartes et plans, deux millions de pièces musicales, un million de documents sonores, plusieurs dizaines de milliers de vidéos et de documents d'estampes, photographies et multimédias, cinq cent trente mille monnaies et médailles...

- Architecture : plusieurs ensembles dispersés géographiquement à Paris et en région et dont la diversité des bâtiments et des lieux retrace l’évolution historique de la Bibliothèque : le site François-Mitterrand, bâtiment moderne implanté en bordure de Seine, qui abrite les collections imprimées et audiovisuelles ainsi que la réserve des Livres rares et qui offre deux types de salle de lecture mais aussi des espaces d’expositions temporaires et permanents, des manifestations culturelles ; le site Richelieu, lieu historique de la Bibliothèque royale depuis 1721, installé au cœur de Paris, où sont conservées les collections spécialisées de la BnF (arts du spectacle, monnaies et médailles, estampes, manuscrits, musique…) ; les sites de la bibliothèque de l’Arsenal et la Bibliothèque-musée de l’Opéra, rattachées à la BnF depuis 1934, ainsi que la Maison Jean-Vilar à Avignon depuis 1977 ;

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Offre culturelle : - Mise en place, d’expositions temporaires, d’expositions virtuelles - Editions ou coéditions d’ouvrages + Chroniques (magazine de la BnF) - Offre pédagogique (synthèses, éléments de réflexion) + banque d’images et

numérisation (ex : Gallica) - Auditorium avec programme de conférences, manifestations…

Visite : - Visites guidées quotidiennes de trois des sites (Richelieu, François-Mitterrand et

l’Arsenal) pour le grand public, les familles, les nouveaux lecteurs, les professionnels. - Ateliers pour enfants de 7 à 10 ans. - Visite des expositions

Fréquentation : Dans le rapport d’activités de 2008, la fréquentation a été comptabilisée à partir des inscriptions et de la billetterie aux expositions. Aucuns chiffres ne sont fournis concernant les visites. En 2008 :

- 390.000 lecteurs dans les salles de recherche - 560.000 lecteurs dans la bibliothèque d’étude du haut-de-jardin - 255.000 visiteurs dans les expositions - 18.000 auditeurs pour les conférences - 18.000 élèves dans le cadre des activités pédagogiques.

Evolution : - Contrat de performance, qui couvre la période 2009-2011. Il définit les six

orientations stratégiques de la BnF : o Être une bibliothèque numérique de référence o Enrichir, signaler et préserver les collections nationales o Conduire la rénovation du site Richelieu et rationaliser le patrimoine

immobilier o Accroître, diversifier et satisfaire nos publics La BnF entend moderniser ses services et renouveler son offre scientifique et culturelle grâce à la rénovation du quadrilatère Richelieu, mais aussi avec la réforme du Haut-de-Jardin sur le site François-Mitterrand, qu’il s’agisse de l’offre même de la bibliothèque d’étude comme de l’aménagement et de l’accessibilité du site. La valorisation de son patrimoine immobilier sera ainsi une orientation majeure pour la bibliothèque pendant cette période. o Développer notre présence sur la scène nationale, européenne et mondiale

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o Se préparer aux mutations de son environnement en garantissant les conditions de développement

Liens : BnF. Bibliothèque nationale de France [en ligne]. Disponible sur <http://www.bnf.fr/> (Consulté le 24.01.2010) BnF. Connaître la bibliothèque [en ligne]. Disponible sur <http://www.bnf.fr/pages/zNavigat/frame/connaitr.htm> (Consulté le 24.01.2010)

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RECHERCHE DOCUMENTAIRE : LA BIBLIOTHECA ALEXANDRINA, UN SYMBOLE DE

RENAISSANCE DE LA MEGALOPOLE MEDITERRANEENNE DANS L'EGYPTE MODERNE ?

Outre son phare, sa bibliothèque antique a fait d'Alexandrie une des cités méditerranéennes les plus célèbres du monde. Plusieurs millénaires après la disparition de l'ancienne bibliothèque d 'Alexandrie, l'Egypte a retrouvé une grande bibliothèque digne de celle de l'antiquité. Résurrection du passé mêlée des nouvelles technologies, la Bibliotheca Alexandrina va t-elle apporter un rayonnement culturel international comme jadis l'a fait son ancêtre ? Dans un premier temps, revenons sur le modèle de l'ancienne bibliothèque, avant d'aborder celui de la nouvelle bibliothèque d'Alexandrie, ce qui nous permettra pour finir de déterminer les points communs nouveaux apports qui pourraient faire de cette dernière un nouveau pôle culturel méditerranéen du XXIème siècle.

> L'ancienne bibliothèque d'Alexandrie Ce n'est certainement pas la première bibliothèque de l'histoire de l'Humanité. En

effet, il existait des sortes de dépôts d'archives, des ci bibliothèques trouvées dans les temples. Cependant les modèles étaient loin d'être aussi aboutis, aussi grandiose que celui de la bibliothèque d'Alexandrie.'

Un projet novateur et ambitieux

La ville fondée par Alexandre le Grand et gouvernée depuis sa mort par l'un de ses généraux Ptolémée 1er Sôter, n'était pas seulement la capitale de l'Egypte, mais avec Athènes, l'un des centres de rayonnement culturel du monde. Pour accroître encore sa grandeur, Ptolémée lança un projet démesuré qu'ont poursuivit ses descendants notamment Ptolémée II Philadelphe (282-246 av. J.C) et Ptolémée III. L’ambition du projet était de rassembler toutes les œuvres écrites de l’humanité, d'où le besoin de se procurer le plus grand nombre d’ouvrages. Pour cela, différentes méthodes ont été employées : Ils ont fait venir d’Athènes toutes les œuvres connues, les empruntant contre un gage, le temps de les recopier ; ou bien, ils demandaient aux monarques de leur envoyer divers ouvrages (le plus souvent, des originaux) ; ou encore, les papyrus se trouvant dans le port d’Alexandrie, étaient momentanément confisqués et copiés par des scribes, l’original étant conservé par la bibliothèque et la copie rendue au propriétaire du document de base. La Bibliothèque est devenue ainsi la première grande bibliothèque publique de l’histoire, qui comportait selon les estimations, entre 400 000 et 700 000 rouleaux de papyrus, et attirait, de ce fait, les plus célèbres penseurs et savants de l’époque (Euclide, Denys de Thrace, Héron, Eratosthène. Cet attrait était renforcé par les offres des Ptolémées aux savants, d'être logé, nourris, blanchi et même exempté d'impôts

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Au milieu du troisième siècle avant Jésus-Christ, le bâtiment d'origine devint trop petit, d'où la nécessité d'en bâtir un second situé au Serapeum. La bibliothèque mère dota celle du Serapeum d'environ 42800 rouleaux de papyrus ; ces derniers étaient soit des copies imparfaites, soit des prêts qui s'inscrivaient dans ce qui pouvait être considéré comme une « tentative d'allégement » du désordre qui régnait dans l'ancienne bibliothèque. Signalons que cette démarche permit de se débarrasser des copies et des manuscrits incomplets. Mais, la bibliothèque ne se contenta pas d’accumuler les écrits dans leur langue d’origine, puisqu’elle employa ses efforts à un immense travail de traduction. A peine arrivé chaque ouvrage était traduit en grec - la langue savante de l'époque -, résumé, analysé et catalogué. A cet égard, on trouva les volumes du Pentateuque, fondement du judaïsme, ce qui témoigne un souci de conquérir, par la diffusion, la plus grande diversité de cultures.

Les bâtiments

Installées dans le quartier du Bruchium, près du palais royal, deux bibliothèques se côtoyaient. La plus importante faisait partie du « muséion » (musée) qui était une sorte d'académie des sciences, un foyer de savants. La seconde annexait le temple de Sérapis. D'après quelques écrits dont les témoignages de Strabon (v.58av.J-C. - v.25 apr. J-C.) dans le livre 17 intitulé Géographie, les bâtiments comprenaient des salles abritant d'énormes quantités de papyrus une cour ombragée entourée d'un portique, une grande salle de réunion – où avaient lieu les cours magistraux –, d'autres salles dont l'une servant de réfectoires aux élèves et professeurs, des logements pour les savants ainsi qu'un musée, un observatoire astronomique, un jardin zoologique et botanique.

Les usagers

La bibliothèque n'était pas de consultation publique mais réservée aux savants que les Ptolémées invitaient du monde entier, les rassemblant au musée, institution de recherche qui jouxtait le bâtiment de la bibliothèque. La fonction première des savants (astronomes, médecins, écrivains, mathématiciens,...) était non pas l'enseignement mais la recherche, l'étude et l'expérimentation. Par la suite des conférences et des cours eurent lieu. Si la bibliothèque mère était réservée aux savants, il semblerait que la bibliothèque fille était accessible à tous, « pour donner à toute la ville la possibilité de philosopher » (Aphhtonius).

L'apparition des bibliothécaires.

Le nombre d'ouvrages croissant, la création du poste de bibliothécaire pour gérer ce centre devint indispensable. Au-delà de conservateur le bibliothécaire était bibliographe et philologue. Les bibliothécaires avaient un rôle très important. D'ailleurs, l'histoire a conservé leurs noms au même titre que les monarques. Ainsi nous pouvons citer en autre Zénodote, (282 à 260 av.- J-C) ; Apollonios (vers 240-230 av. J-C) ; ou encore Erasthosthène (230 à 195 av. J-C). Mais à coté des noms de ces bibliothécaires figurent aussi ceux des savants et auteurs comme Démétrios et le poète Callimaque qui a inventé le premier catalogue : outil permettant de classer et répertorier les collections selon un système de règles établies.

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Sa destruction

Rien ne demeure aujourd’hui de ce monument de l’esprit humain. Selon les historiens, la plus grande partie des collections de la Bibliothèque disparut dans l’incendie qui ravagea le port, lors de la prise d’Alexandrie par Jules César, en 47 avant J-C. Selon la légende, d’autres catastrophes l’endommagèrent à plusieurs reprises, pour la faire, finalement, disparaître totalement. Pendant un temps, on datait sa disparition à 691 après J-C lors des invasions arabes, maintenant, on pense plutôt au 3ème siècle, au temps d'Aurélien. Certes, toute grande bibliothèque, comme celle d’Alexandrie, possédait des doubles des ouvrages originaux, et en l’occurrence, ceux-ci étaient conservés dans la bibliothèque du temple de Sérapis, à Alexandrie même. Par malheur, ce temple fut brûlé en 931, lors de la domination chrétienne de sorte que les ouvrages qui avaient échappé jusqu’alors aux désastres, disparurent à leur tour.

> La nouvelle bibliothèque d'Alexandrie : La Bibliotheca Alexandrina

La Bibliotheca Alexandrina est née de l'idée de deux professeurs de l'Université d'Alexandrie qui, en 1974, ont cherché le moyen de redonner un peu d'éclat à leur cité. Leur ténacité leur a valu d'être peu à peu entendus des autorités et d'obtenir l'appui de l'UNESCO. Réinventer la bibliothèque d'Alexandrie ne s'imposait pas ; en revanche : construire une bibliothèque moderne à Alexandrie était une nécessité. Alexandrie est une grande ville universitaire moderne. Il fallait créer une bibliothèque pour les universitaires et les chercheurs égyptiens. Inaugurée le 16 octobre 2002, elle est aujourd’hui accessible à tous.

Son architecture

• L'aspect extérieur Une grande attention a été portée à l’architecture même de la Bibliothèque, ce qui explique

la mise en place d’un concours international visant à sélectionner le projet qui symboliserait au mieux, la continuité entre le passé et le présent, ainsi que la réconciliation entre le local et l’universel. 524 projets ont été remis, et ce sont surtout les jeunes générations qui ont participé : un tel succès s’explique notamment par la dimension symbolique du thème, par la renommée des institutions qui soutiennent ce projet, à savoir l’UNESCO, le PNUD et l’UIA, et le rôle historique de l’Egypte comme berceau de la culture. Cette initiative a d’ailleurs été l’occasion de faire découvrir la ville d’Alexandrie. Finalement, le prix a été remporté en 1989 par le groupe norvégien Snohetta, lequel a su concilier les aspects esthétiques, symboliques et fonctionnels. Les premiers travaux ont commencé en 1995. La bibliothèque allie la splendeur à la simplicité. Pour l’essentiel, le bâtiment, situé au bord de la mer, sur le site de l'ancienne bibliothèque se présente sous la forme d’un cylindre vertical

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de 160 mètres de diamètre, coupé en diagonale, dont la pureté géométrique n’est pas sans rappeler à de nombreux égards les grands édifices de l'Egypte antique. Un pont piéton permettant d'accéder à la bibliothèque côté Sud apparaît comme une ligne droite transperçant la forme cylindrique du bâtiment. Ce pont traverse une rue à grande circulation avant d’atteindre le deuxième étage de la bibliothèque et de mener jusqu’à une place publique donnant sur la mer, du côté Nord du bâtiment. A l'Ouest du pont, le cylindre est entaillé sur la quasi-totalité de son diamètre, le vide ainsi créé constituant l’entrée principale de la bibliothèque. Cette entrée fait face aux portes d’un hall de conférence assez ancien, auprès duquel la bibliothèque semble empreinte de déférence. Entre les deux bâtiments s’étend une place pavée. A demi enfoncée sous ce parvis, une vaste forme sphérique abrite un planétarium. Une tranche oblique est séparée du corps du bâtiment cylindrique. La forme obtenue devrait normalement présenter une surface en ellipse, mais les architectes sont partis d’un cylindre ellipsoïdal incliné par rapport à la verticale, de façon à ce que la surface du rez-de-chaussée et celle du toit, lui-même incliné, forment des cercles parfaits. Les murs de la bibliothèque penchent tous vers le Nord et la mer, tout comme la pente du toit. Un cylindre est en soi une forme statique, les irrégularités intentionnelles de la forme du bâtiment lui impriment un mouvement, impression encore renforcée par la portée verticale du bâtiment de 10 étages, qui s’étend d’un niveau de 10 m au-dessous du sol jusqu'à une hauteur de 32 m. De l’extérieur, cet immense demi-cercle s’élevant de terre, est un hommage à Râ, le dieu Soleil. L’inclinaison du toit permet aux niveaux supérieurs de la bibliothèque de bénéficier d’un éclairage naturel et d’atténuer les effets des embruns. Plus profondément, les architectes n’ont pas conçu la bibliothèque, au sens strict, comme un symbole solaire, mais ils reconnaissent volontiers qu’elle se veut une image de rayonnement et d’ouverture - et non pas un lieu clos ou réservé-. Vu de haut, en effet, sa forme circulaire évoque l’image du soleil (les hiéroglyphes représentaient généralement le soleil comme un simple disque). C’est d’ailleurs cette idée que les murs de granit, côté sud, expriment dans leur matérialité même: en effet, y sont inscrites toutes les écritures connues dans le monde, de l’écriture arabe à la chinoise, en passant par les caractères cyrilliques, hébreux, latins… La course du soleil et les reflets des éclairages électriques dans un bassin adjacent produisent un jeu dynamique d’ombres et de lumières sur les symboles gravés, évoquant ainsi les murs des temples égyptiens. La nouvelle Bibliotheca Alexandrina se propose ainsi comme le nouveau temple du Savoir universel.

• L'organisation interne

A ce jour ce vaste complexe est composé : • d'une salle de lecture de 2.000 places organisée selon neuf niveaux, chaque niveau

étant divisé en deux espaces : la salle de lecture et les magasins ou services internes de l’autre coté.

• d'un centre de conférences disposant de 2.500 places équipées pour la traduction simultanée.

• un centre de connexion à Internet (Archives Internet)

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• de bibliothèques spécialisées : Taha Hussein pour les non-voyants, jeunesse, livres rares...

• d'une bibliothèque numérique • des galeries d’exposition • d'un Musée de la Calligraphie. • d'un Musée des Sciences. • d'un Musée des Antiquités • d'un planétarium • d'un exploratorium • d'un laboratoire de restauration pour les manuscrits rares. • d'une école Internationale des Sciences et de l'information, qui sera le premier centre

de recherches dans ce domaine au Moyen-Orient. Il accueillera 350 étudiants de troisième cycle.

• de sept centres de recherche et de documentation. Les salles de lecture sont organisées selon des thématiques telles que les nouvelles technologies, les sciences et techniques, les sciences sociales, arts et musique, langues et littératures, audiovisuel et multimédia ou encore, religions, philosophie, histoire...

Ses publics

L'Alexandrina est officiellement définie comme une « bibliothèque publique de recherche ». Sa vocation est donc double : d’une part, elle se doit de proposer à la population égyptienne une large gamme de services, et d’autre part, elle doit garantir aux chercheurs l’accès à une collection encyclopédique solide et à des instruments de recherche perfectionnés. Une des originalités de l’Alexandrina résidant précisément dans son orientation vers les multimédias, les concepteurs du projet ont porté une attention particulière à la mise en place des salles d’informatique qui seront sans doute utilisées par les rares initiés (les chercheurs et les étudiants). De plus, la Bibliotheca Alexandrina se trouve à côté du campus de la Faculté des arts de l’Université d’Alexandrie, à Chatby. Une majeure partie de son public sera donc étudiant. Il faut aussi garder en mémoire que la Bibliotheca Alexandrina est plus qu’une bibliothèque publique locale ; elle s’adresse à un public plus large et international, souvent déjà relativement cultivé. C'est un centre résolument ouvert au monde entier, véritable reflet de l'association des multiples partenaires internationaux et passerelle entre le Proche-Orient et l'occident, à l'instar de la bibliothèque antique. Ainsi ses objectifs ne se situent pas à la même échelle qu’une bibliothèque de quartier. Reste à savoir si la mise en œuvre de cette bibliothèque ne se fait pas au détriment, justement, de programmes de développement culturel et d’éducation en direction des populations locales peu cultivées ou analphabètes.

Les objectifs de cette nouvelle bibliothèque d'Alexandrie

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Quand on a un si illustre ancêtre, on est obligé d'en tenir compte. La bibliothèque d’Alexandrie se présente avant tout comme la résurgence de l’ancienne. En effet, c’est bien la volonté proclamée de la part du gouvernement égyptien et des Universités d’Alexandrie, en collaboration avec l’UNESCO (en 1986), de l’inscrire dans la continuité de l’ancienne bibliothèque, et lui permettre de jouer, à l’aube du troisième millénaire, un rôle équivalent à celui qu’elle joua aux alentours du premier millénaire. Le pari de la Bibliotheca Alexandrina est de réaffirmer son héritage dans un lieu qui utilise les techniques d’information les plus récentes : c’est donc véritablement à un rêve d’universalité que vise cette nouvelle bibliothèque. Les objectifs du gouvernement égyptien :

· Faire renaître un haut lieu d’apprentissage · Construire une bibliothèque de recherche dotée d’une collection unique d’ouvrages,

qui suscite l’admiration à travers le monde, et permette de restaurer des manuscrits originaux.

· Attirer des chercheurs internationaux et relever les défis du XXIème siècle. · Favoriser la coopération culturelle entre les pays du Bassin méditerranéen. · Constituer une source d’information indispensable au développement culturel,

social et économique de l’Egypte. Les objectifs de l’UNESCO :

· Encourager l’ouverture d’esprit : cela implique un élargissement des horizons culturels et l’acceptation de critères culturels et scientifiques différents de ceux de la tradition locale.

· Explorer les champs du savoir : cela nécessite une recherche des racines, une redécouverte des raisons historiques, des choix présents et des options qui s’offrent pour l’avenir

· Rendre la connaissance accessible : cela appelle un engagement total de tous les partenaires et la mise en œuvre des techniques les plus modernes.

> Le symbole de la renaissance de la mégalopole méditerranéenne dans l'Egypte moderne ?

Au point de confluence de trois continents, Asie, Afrique et Europe, l’Égypte a été le berceau des civilisations depuis les temps les plus antiques. Redeviendra t-elle ce carrefour méditérranéen aujourd'hui par le biais de projets comme la Bibliotheca Alexandrina?

Le reflet de la bibliothèque antique

On peut remarquer de nombreuses similitudes entre ces deux bibliothèques d’Alexandrie. Similitudes qui on participé à l'essor et à la célébrité de la bibliothèque antique. En sera-t-il de même pour la nouvelle ?

- Importance des traductions, du multilinguisme Les inscriptions alphabétiques internationales sur la façade extérieure en sont la preuve.

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Caractérisée par le multilinguisme, la collection porte sur l’héritage culturel du bassin méditerranéen et plus précisément sur les pays arabes du Moyen-Orient. L’Egypte est bien évidemment au premier plan de cette documentation. Pour atteindre tous ces objectifs, les organisateurs du projet ont non seulement reconstitué un patrimoine culturel disséminé à travers le monde entier au cours de l’Histoire ou accumulé dans les caves de ses universités, mais également récolté des fonds (et notamment des copies de documents existant de par le monde) grâce au soutien des pays étrangers. - Collaboration avec les autres nations : Les fonds actuels de la bibliothèque ont été constitués en coopération avec de nombreux pays, par l’intermédiaire d’associations des amis de la bibliothèque, mais aussi grâce à la générosité d’acteurs privés. L’Italie a ainsi contribué à la restauration de 4000 manuscrits arabes du X° au XVIIème siècle provenant de différentes bibliothèques alexandrines. La Norvège a fournit du mobilier pour les salles de lecture, le japon, du matériel informatique, la Finlande et la Turquie ont proposé des formations, enfin des dons de livres et CD-ROM ont été faits par l'Australie, la Belgique, l'Espagne, la France, l'Allemagne en autre. - Un centre culturel Comme la bibliothèque antique, il s'agit plus d’un centre culturel qu'une simple bibliothèque. En effet, on y trouve un planétariun, mais aussi plusieurs musées et des salles d'exposition. - L'importance du public étudiant Là encore, semblable au centre antique, l'étude a une grande place. Outre le fait qu’elle ait été construite à côté d'une université, la Bibliotheca Alexandrina comporte une école Internationale des Sciences et de l'information. - Rassembler un nombre important d'ouvrages Elle peut accueillir jusqu'a 8 millions d'ouvrages.

Accompagnée d'éléments novateurs comme l'importance des nouvelles technologies, du multimédia, la Bibliotheca semble contenir tous les ingrédients pour voir renaître comme un phœnix sur ses cendres, un pôle culturel antique amélioré.

Quelque scepticisme...

Un projet tel que ce nouveau centre culturel a donc de quoi faire rêver. Pourtant de nombreuses polémiques sont nées autour de l’Alexandrina pour de multiples raisons, à commencer par la légitimité même d’un projet de cette ampleur dans un pays qui connaît de très nombreux problèmes de développement et où la liberté d’expression semble fortement limitée. Les critiques se sont cristallisées autour du bâtiment lui-même, dont la conception a souvent été jugée trop futuriste, voire en total décalage avec l’esprit d’une ville égyptienne. La manière dont le projet a été mené (fouilles archéologiques bâclées, choix d’un site exposé aux vents salés et humides, projet de destruction du grand complexe hospitalier adjacent à la bibliothèque pour de simples raisons esthétiques, l’Alexandrina ne s’harmonisant pas avec les

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bâtiments construits dans les années soixante-dix) et le coût indécent à l’égard des conditions de vie des populations n’a pas contribué à rassurer les nombreux détracteurs de l’Alexandrina.

Alexandrie apparaît comme une ville plus développée que la moyenne nationale dans de nombreux domaines et essentiellement au niveau de l'éducation et de la culture. La bibliothèque ne pouvait donc être mieux située qu'à Alexandrie. Cependant, il existe encore des tendances lourdes dans l'ensemble du pays et qui pèsent par conséquent aussi sur Alexandrie. En effet, la situation de l'enseignement est encore précaire et les taux d'analphabétisme encore très élevés. La moitié de la population ne sait encore ni lire, ni écrire. D'autre part, il s'agit de noter aussi les taux d'endettement que doit faire face l'Egypte et qui handicapent un certain nombre de perspectives, notamment en terme d'éducation. Le poids des remboursements de la dette est beaucoup plus élevé que les dépenses allouées à l'éducation. Maintenant ancrée dans ce XXIème siècle, la Bibliotheca Alexandrina montre toutes les conditions réunies pour assurer l'essor déjà présent d'Alexandrie dans le monde, en particulier en Orient. Et il semblerait qu'elle remporte un certain succès car elle compte plus de 800.000 visiteurs par an.