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Des tas de sables… bien vivants ! Les dunes de l’estuaire du Payré couvrent plus d’une centaine d’hectares répartis sur la commune de Talmont-Saint-Hilaire (dunes boisées et cordon littoral du Veillon, dunes du Port de la Guittière) et celle de Jard-sur-Mer (dunes grises du Maroc, dunes perchées des Grottes, landes dunaires acides et dunes de la Pointe du Payré, dunes boisées des tréfonds du Payré...) ; d’autres petites formations de dunes, parfois en cours de constitution, jalonnent toute la partie basse de l’estuaire du Payré ; certaines ne sont pas naturelles et résultent des sables d’extraction des concessions ostréicoles. Au gré de la mer et du vent L’essentiel des sables de l’estuaire du Payré a été arraché au Massif Central par la Loire et ses affluents ; c’est surtout à la suite de la fin du dernier épisode glaciaire qu’une grande partie de ceux-ci furent transportés vers la mer ; la dérive littorale nord-sud (courant ma- rin) a progressivement fait le reste et les sables se sont entassés le long des côtes. Arrivés sur les plages, les grains de sable sont alors repris par le vent pour former des du- nes ! Un vent de 4 à 5 mètres par seconde (25 à 30 kilomètres par heure) suffit à mobiliser des grains de sable sec de taille moyenne. Les grains se déplacent alors par saltation (sauts) rebondissant les uns contre les autres ; d’où leur aspect « éclaté » quand on les observe à la loupe binoculaire. Toutes les dunes ac- tuelles ne sont cependant pas dues à la seule natu- re : à la fin du XIX ème siè- cle, des bancs de sables se formaient régulière- ment dans les passes de l’estuaire menaçant la na- vigation ; afin de piéger ces sables mobiles, l’Offi- ce des Forêts fut chargé d’ériger une barrière de dunes haute de 10 mè- tres : le cordon littoral du Veillon était ainsi créé vers 1896. Groupe Associatif Estuaire Cordon littoral du Veillon Dunes du Port Dunes grises du Maroc Dunes boisées du Veillon Dunes boisées des tréfonds du Payré Dunes perchées des Grottes Les Dunes de l’estuaire du Payré

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Des tas de sables…

bien vivants !

Les dunes de l’estuaire du Payré couvrent plus d’une centaine d’hectares répartis sur la commune de Talmont-Saint-Hilaire (dunes boisées et cordon littoral du Veillon, dunes du Port de la Guittière) et celle de Jard-sur-Mer (dunes grises du Maroc, dunes perchées des Grottes, landes dunaires acides et dunes de la Pointe du Payré, dunes boisées des tréfonds du Payré...) ; d’autres petites formations de dunes, parfois en cours de constitution, jalonnent toute la partie basse de l’estuaire du Payré ; certaines ne sont pas naturelles et résultent des sables d’extraction des concessions ostréicoles.

Au gré de la mer et du vent

L’essentiel des sables de l’estuaire du Payré a été arraché au Massif Central par la Loire et ses affluents ; c’est surtout à la suite de la fin du dernier épisode glaciaire qu’une grande partie de ceux-ci furent transportés vers la mer ; la dérive littorale nord-sud (courant ma-rin) a progressivement fait le reste et les sables se sont entassés le long des côtes.

Arrivés sur les plages, les grains de sable sont alors repris par le vent pour former des du-nes ! Un vent de 4 à 5 mètres par seconde (25 à 30 kilomètres par heure) suffit à mobiliser des grains de sable sec de taille moyenne. Les grains se déplacent alors par saltation (sauts) rebondissant les uns contre les autres ; d’où leur aspect « éclaté » quand on les observe à la loupe binoculaire.

Toutes les dunes ac-tuelles ne sont cependant pas dues à la seule natu-re : à la fin du XIXème siè-cle, des bancs de sables se formaient régulière-ment dans les passes de l’estuaire menaçant la na-vigation ; afin de piéger ces sables mobiles, l’Offi-ce des Forêts fut chargé d’ériger une barrière de dunes haute de 10 mè-tres : le cordon littoral du Veillon était ainsi créé vers 1896.

Groupe Associatif Estuaire

Cordon littoral du Veillon

Dunes du Port Dunes grises

du Maroc Dunes boisées du Veillon

Dunes boisées des tréfonds du Payré

Dunes perchées des Grottes

Les Dunes de l’estuaire

du Payré

Groupe Associatif Estuaire

L’estran des zones littorales, prolongé par des dunes, est normalement constitué d’une pla-ge comme celle du Veillon ; entre celle-ci et la dune se maintient un milieu intermédiaire cons-titué du haut de plage et du bas de dune. Les espèces qui s’y développent appartiennent plus ou moins au monde salé et au monde de la dune : c’est un milieu doublement hostile ; c’est aussi là que se dépose la laisse de mer ; des espèces végétales halo nitrophiles (qui ai-ment le sel et les nitrates) forment un premier obstacle au vent, le ralentissant et bloquant les grains de sable puis servant de tremplin aux suivants.

Sur les laisses de mer poussent ainsi la soude brûlée et le cakilier. À la fin de l’été, les graines grosses comme des grains d’orge du cakilier tombent et sont emportées et déposées plus loin par les grosses marées : une méthode pratique pour conquérir de nouveaux rivages.

Au bas de la dune soumis à l’action des embruns, d’autres espèces prennent place comme le chardon bleu. Plus haut, commence la dune.

Dunes blanches

La végétation de la dune blanche est clairse-mée, laissant apparaître le sable à nu ; on l’appelle aussi dune mobile car le vent la remanie en per-manence.

Les végétaux qui s’y sont implantés doivent pouvoir s’y maintenir et capter tout ce qu’il est possible d’eau ; leurs racines, leurs feuilles ont dé-veloppé d’étonnantes stratégies pour survivre. On y rencontre en particulier l’oyat, le carex des sables, la giroflée des dunes et le liseron soldanelle. En plus de leur reproduction par graines, nombreux sont les végétaux de la dune blanche qui se multiplient par émission de rejets à partir de racines traçantes ou de tiges sou-terraines ; c’est en cela qu’ils participent activement à la fixation des sables de surface. D’au-tres, dans leur quête de l’eau enfoncent d’impressionnantes racines au cœur même de la mas-se de sable, ancrant ainsi tout le volume dunaire. Sur les zones de rupture, sur des sites dé-gradés, des touffes d’armoises s’imposent et exhalent une odeur de persil frais quand on en écrase les feuilles.

Dunes grises

Progressivement les taches de sable nu dis-paraissent et laissent place à une végétation continue : c’est la dune grise ou dune fixée. C’est là, le domaine des immortelles des dunes au parfum de curry, des panicauts ou chardons roulants, des onagres à la ham-pe florale jaune et des queues de lièvre ; mais des plantes protégées, discrètement, y prospèrent aussi, comme l’œillet des dunes et la linaire des sables.

Par tapis entiers, l’éphédra étouffe progressivement ses voisines ; bien que tapissant au

sol, cette curieuse plante est une proche parente des conifères ! Ses fruits rouges, globuleux la font aussi appeler raisin de mer.

Ici, les zones dégradées et riches en matières organiques comme les abords des terriers de lapins sont occupés en particulier par les pavots cornus, une sorte de coquelicot au jaune puissant.

Dunes boisées Ici ou là, au cœur de la dune grise, des îlots d’arbres comme les saules des sables mar-quent une dépression, signalant la présence d’eau sous le sable et accompagnée parfois d’une mare temporaire. Une activité intense d’êtres aquatiques se déroule, pressés de se reproduire avant que l’eau ne s’assèche. Un curieux petit amphibien, tout tacheté de vert y attache ses pontes à chaque herbe : c’est la grenouille persillée… autrement dit, le pélodyte ponctué.

Au sol, les espaces ensoleillés sont occupés par des tapis de rosiers pimprenelles et progressivement la dune s’enrichit de plantes buissonnantes : c’est la dune arbustive qui préfigure la dune boisée. Suivant les sites, les prunelliers, les chênes verts sous forme d’arbrisseaux enferment la dune progressive-ment avant que la forêt ne s’en empare pleinement. Ça et là les lapins y établissent leurs terriers. C’est aussi le domaine des lézards verts et parfois des vipères aspic.

En lisière, les troènes, les cistes à feuilles de sauge bor-

dent les premières rangées d’arbres. Aux dunes arbustives font suite les dunes boisées. C’est ici le domaine des pins mariti-mes et des chênes verts.

Plus à l’intérieur, au hasard d’allées, dans les trouées plus lumineuses, le fragon, le daphné à feuilles de laurier et le garou (un autre daphné) croissent en ordre dispersé. Là où la lumière manque un peu plus, les fougères aigle mais aussi les lianes du lierre et du chèvrefeuille semblent s’en conten-ter.

En vieillissant, la forêt se limite aux seuls chênes verts… plus aucun végétal chloro-phyllien ne l’accompagne alors ; c’est le sta-de terminal d’une forêt.

En sous-bois ou dans les arbres, mulots et écureuils font collecte de toutes sortes de graines, dont certaines oubliées germe-ront au printemps ! Les pigeons ramiers et les geais contribuent aussi aux planta-tions de gland. La nuit venue, les renards, plus rarement les blaireaux, partent en maraude. Sans prédateurs, les chevreuils et les sangliers sont devenus des hôtes ré-guliers de nos forêts littorales.

Dans certaines zones de la forêt, les premières espèces à feuilles caduques font leur appari-

tion comme le robinier faux-acacia ou quelques chênes à feuilles caduques ; les gre-

Groupe Associatif Estuaire

Comme dans tout milieu naturel, lorsque la forêt évolue longuement, l’espèce la mieux adaptée éli-mine progressivement ses concurrentes et s’impose de manière absolue : c’est le climax ou stade cli-macique. Ici, compte tenu de la douceur du climat et de l’ensoleillement (plus de 2200 heures par an) la forêt évolue en une chênaie verte, comme en Provence. D’ailleurs d’autres espèces dites méditerranéo-atlantiques (une trentaine) témoignent de cet ex-ceptionnel ensoleillement. Les insectes méridio-naux ne sont pas étrangers ; bien que rare c’est le cas de l’empuse (une sorte de mante religieuse).

Tronc de pin-grattoir à sanglier !

Des dunes et des hommes

La dune n’a pas toujours été cette étendue apparemment improductive et naturelle. Sur certains sites, dans les dunes, étaient creusées des conches ; sortes de jardins encaissés pour approcher au plus près l’eau qui circule sous le sable et remonte par capillarité entre les grains. L’homme y cultivait la vigne ou l’asperge engraissée avec les algues d’échouage ; dans les an-nées 60 se fut au tour des oignons à fleurs comme les glaïeuls ou les tulipes. À l’un des angles de la conche (on dit aussi carré de sable !) on trouvait souvent un figuier ; parfois un osier. Aujourd'hui, les conches

qui n’ont pas servi de terrain à construire sont en friche et il n’est pas facile d’en trouver les limites caractéristiques.

Ailleurs, la dune était souvent le domaine du mouton quand l’herbe se faisait plus rare ail-leurs.

Depuis longtemps, l’homme a toujours cherché à fixer les sables et rendre la dune producti-ve… c’est aussi comme ça que s’est étendue la forêt littorale. L’espèce la mieux adaptée était sans conteste le pin maritime grâce à son système racinaire et sa rapidité de croissance; sa durée de vie excède rarement la centaine d’années. Les pins de nos dunes ont été plantés es-sentiellement vers la fin du XIXème siècle. L’arbre fournissait ainsi du bois de charpente et de menuiserie, des mâts pour les navires, du bois de chauffage et de la résine récoltée par sai-gnée et à l’aide de petits pots de terre cuite. Les derniers gemmeurs (les récolteurs de résine) quittèrent la forêt dans les années 50.

Avec le temps de l’urbanisation galopan-te du littoral, la dune fournit alors des car-rières de sable pour la construction… sans contrôle !

Aujourd’hui, la dune est lieu de prome-nade et de loisirs mais aussi de découverte d’un monde étrange, riche et fragile, subis-sant bien des agressions : le « hors piste » fatal aux espèces fragiles, les prises de sa-ble illégales, les passages de 4 x 4 et par-fois même une déchetterie à ciel ouvert pour promeneur indélicat.

Groupe Associatif Estuaire

Une ancienne carrière de sable au cœur de la dune.

Une publication du Groupe Associatif ESTUAIRE

Un autre regard sur l’environnement ! —————

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(GAE 01/03/2005 – graphisme et crédit photo : Pierr e Buquet, Christophe Jarry, Daniel Verfaillie, Fabi en Verfaillie – reproduction totale ou partielle interdite sans autorisation)