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Les enjeux du don de sang dans le monde Entre altruisme et solidarités, universalisme et gestion des risques Sous la direction de Johanne CHARBONNEAU Nathalie TRAN 2012 PRESSES DE L’ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES EN SANTÉ PUBLIQUE

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Les enjeux du don de sang dans le monde

Entre altruisme et solidarités, universalisme et gestion des risques

Sous la direction deJohanne CHARBONNEAU

Nathalie TRAN

2012

PRESSES DE L’ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES EN SANTÉ PUBLIQUE

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Le photocopillage met en danger l’équilibre économique des circuits du livre.Toute reproduction, même partielle, à usage collectif de cet ouvrage est strictement interdite sans autorisation de l’éditeur (loi du 11 mars 1957, code de la propriété intellectuelle du 1er juillet 1992).

© 2012, Presses de l’EHESP, Avenue du Professeur-Léon-Bernard - CS 74312 - 35043 Rennes CedexISBN 978-2-8109-0076-3www.presses.ehesp.fr

Collection

LIEN SOCIAL ET POLITIQUES

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Liste des auteurs

Vincanne Adams, PhD, est professeure et directrice du service d’anthropologie médicale au département d’anthropologie, d’histoire et de médecine sociale de l’université de Californie à San Francisco. On lui doit de nombreuses publications sur la médecine asiatique, la modernisation et le développement, la santé et la politique économique de la médecine, de même que sur le capitalisme du désastre au Népal, au Tibet, en Chine et aux États-Unis.

Matteo Aria est chercheur postdoctoral en anthropologie culturelle à l’univer-sité de Rome-La Sapienza. Il a fait des recherches de terrain au Ghana et en Polynésie française. Il a publié, entre autres, Cercando nel vuoto. La memoria perduta e ritrovata in Polinesia francese (Chercher en vain : la mémoire perdue et retrouvée en Polynésie française, Pacini Editore, 2007), « Passeurs culturels, patrimonialisation partagée et créativité culturelle en Océanie francophone » (avec Adriano Favole, in G. Ciarcia [dir.], Ethnologues et passeurs de mémoire, Kartala, 2011). Avec Fabio Dei, il a codirigé l’ouvrage Culture del dono (Culture du don, Meltemi, 2008).

Bianca Brijnath est boursière de l’Australian National Health and Medical Research Council du département de médecine générale de l’université Monash en Australie. Chercheuse en anthropologie médicale, en santé publique et en soins de santé primaires, elle a travaillé en Inde, en Australie et en Zambie. Elle s’intéresse principalement à l’incidence des contextes sociaux et des antécédents culturels sur la prise en charge individuelle de la santé, de la maladie, des soins et du bien-être. Auteure de près de 20 articles examinés par des pairs, elle a été désignée, en 2009, parmi les huit lauréats mondiaux du prestigieux concours d’essais « La voix des jeunes dans le domaine de la recherche pour la santé », fi gurant à ce titre en page couver-ture de la revue The Lancet. Parmi ses précédents mandats, elle a travaillé au programme de recherche sur les maladies tropicales de l’Organisation mon-diale de la santé (OMS). Elle collabore actuellement avec la Banque mondiale à une évaluation de l’incidence de programmes de fi nancement sur les mères et les enfants zambiens.

Sophie Chauveau est professeure d’histoire des sciences et des techniques à l’université technologique de Belfort-Montbéliard. Ses recherches portent sur les mutations du système de santé en France au cours de la seconde moitié

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du xxe siècle. Après avoir étudié les relations entre les pouvoirs publics et les entreprises pharmaceutiques, elle s’est intéressée à l’histoire des organisations de transfusion sanguine en France, mettant en perspective la transformation des activités de transfusion sanguine et les changements dans la gestion de la transfusion. Elle travaille actuellement sur l’économie et l’éthique des activités de greffe. Elle a publié, en 2011, L’affaire du sang contaminé (1983-2003) aux Belles Lettres.

Johanne Charbonneau, PhD en science politique, est professeure au Centre Urbanisation Culture Société de l’Institut national de la recherche scienti-fi que (INRS) à Montréal, depuis 1993. Titulaire de la Chaire de recherche sur les aspects sociaux du don de sang, financée par Héma-Québec, la Fondation Héma-Québec et le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada, elle a débuté sa carrière par des travaux sur la circulation du don dans la famille et sur le don d’organes. Ses travaux ont porté sur les parcours de vie, les réseaux sociaux, les solidarités sociales et familiales, la vie de quar-tier et les communautés immigrantes. Auteure de nombreux articles, cha-pitres de livres et rapports de recherche, elle a publié et dirigé, ces dernières années, des ouvrages sur les réseaux sociaux et le soutien social aux mères adolescentes, les relations sociales des jeunes, l’habitat solo. Elle dirige la revue Lien social et Politiques depuis 2010.

Jacob Copeman est maître de conférences en anthropologie sociale à l’université d’Édimbourg. Ancien adjoint de recherche au Jesus College (Cambridge), il a obtenu, en 2007, un doctorat en anthropologie sociale à l’université de Cambridge. Auteur de Veins of Devotion: Blood Donation and Religious Experience in North India (Les veines du dévouement : don de sang et expérience reli-gieuse dans le nord de l’Inde, Rutgers University Press, 2009), il a dirigé la publication de Blood Donation, Bioeconomy, Culture (Don de sang, bio-économie et culture, Sage, 2009) et codirigé celle de The Guru in South Asia: New Interdisciplinary Perspectives (Le gourou en Asie du Sud : nouvelles perspectives interdisciplinaires, Routledge, 2012). Il a publié de nombreux articles, notam-ment dans Body & Society, The Journal of the Royal Anthropological Institute, Modern Asian Studies, Social Analysis et Terrain.

Renaud Crespin est docteur en science politique de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et chargé de recherche CNRS au Centre de recherches sur l’action politique en Europe à Rennes (CRAPE/UMR 6051). Il enseigne la sociologie des risques et des crises sanitaires (IEP de Rennes, ENA-formation, EHESP), est membre du comité de rédaction de Lien social et Politiques et du conseil de laboratoire du CRAPE dont il codirige l’équipe « Gouvernance, santé et territoires » (GOST). Ses travaux portent principa-lement sur la comparaison des processus d’instrumentation de l’action publique (dépistage, sélection) dans les domaines de la santé et de la sécurité et sur les relations entre les expertises technico-scientifiques (acteurs et connaissances) et l’action. Auteur de plusieurs articles et rapports de recherche, il a récemment codirigé, avec Yann Bérard, Aux frontières de l’exper-tise. Dialogues entre savoirs et pouvoirs (Presses universitaires de Rennes, 2010) et, avec Bruno Danic, un rapport intitulé La sélection médicale des candidats au

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don : représentations et pratiques du risque et de son traitement (CRAPE/EFS-Bretagne, 2012).

Bruno Danic est docteur en médecine, titulaire d’un master « Biologie molécu-laire et cellulaire et sciences de la santé ». Il exerce depuis 1991 au sein de l’Établissement français du sang (EFS) Bretagne, dont il est directeur adjoint et responsable de la médecine transfusionnelle. Référent pour le prélèvement à la direction médicale de l’EFS, il participe à différents groupes de travail français sur la sécurité transfusionnelle, au sein de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS 1), et de l’Institut de veille sanitaire (InVS). Il a publié de nombreux articles sur les différents aspects du don du sang et de la transfusion sanguine : sociétaux, éthiques, médicaux, organisationnels. Il est co-auteur d’ouvrages collectifs sur le sang et la sécurité transfusionnelle et d’un livre destiné au grand public, De vous à moi, donnez votre sang. Le don du sang, le sang du don (Méditext, 2008).

Fabio Dei est professeur d’anthropologie culturelle à l’université de Pise. Ses domaines de recherche sont la culture populaire et de masse en Italie, l’anthropologie de la violence et les cultures du don. Il est notamment l’au-teur de La discesa agli inferi. J. G. Frazer e la cultura del Novecento (La descente aux enfers. J. G. Frazer dans la culture du xxe siècle, Argo, 1998), Beethoven e le mondine. Ripensare la cultura popolare (Beethoven et les sarcleuses. Repenser la culture populaire, Meltemi, 2002), Antropologia della violenza (Anthropologie de la violence, Meltemi, 2005) et a codirigé, avec Matteo Aria, Culture del dono (Culture du don, Meltemi, 2008) et, avec Matteo Aria et Giovanni Luca Mancini, Il dono del sangue. Per un’antropologia dell’altruismo (Le don du sang. Pour une anthropologie de l’altruisme, Pacini, 2008). Il est codirecteur de la revue Studi culturali.

Kathleen Erwin, PhD, est directrice du programme de bourses de recherche du bureau du président de l’université de Californie. Anthropologue de for-mation, elle est notamment spécialiste de la Chine, de la médecine asiatique, des études sur le genre, le corps et la sexualité, ainsi que des constructions culturelles de la santé et de la maladie.

Annamaria Fantauzzi, PhD en anthropologie sociale et ethnologie de l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) Paris/La Sapienza Rome, enseigne actuellement à l’université de Turin et est également chargée de recherche au Centre de recherche médecine, science, santé et société (CERMES-CNRS) de Paris. Elle est responsable de l’Observatoire national pour la culture du don du sang de l’Associazone Volontari Italiani del Sangue (AVIS Nazionale) en Italie et de missions d’ethno-nursing au Kenya, au Congo, au Cameroun, en Roumanie et au Maroc. Auteure de plusieurs articles publiés dans des revues nationales et internationales, ses derniers ouvrages sont d’ailleurs dédiés à la culture du don du sang en lien avec les communautés immigrées en Italie, notamment Antropologia della donazione (L’anthropologie du don de sang, La Scuola, 2011) et Sangue Migrante.

1. Devenue l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) en 2012.

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Pratiche e culture dell’emodonazione tra il Marocco e l’Italia (Sang migrant. Pratique et culture du don de sang, entre Maroc et Italie, Franco Angeli, 2012).

Jay Fiddler est titulaire d’un doctorat de sociologie de l’université de la Colombie-Britannique et a obtenu plusieurs distinctions et bourses de recherche. Sa thèse examine les politiques institutionnelles qui sous-tendent les stratégies de recrutement des donneurs de sang et les facteurs sociaux qui déterminent leur effi cacité. Coprésidente du Conseil consultatif des consom-mateurs du Réseau canadien de l’arthrite, elle siège aux comités consultatifs de l’Arthritis Research Centre of Canada et de l’Arthritis Consumer Experts. Se consacrant à l’étude des besoins des Britanno-Colombiens souffrant de différentes formes d’arthrite, elle a perfectionné sa capacité d’interpréter la recherche médicale et conclu avec les organismes communautaires des par-tenariats de recherche et d’éducation.

Jean-Paul Lallemand-Stempak, professeur certifi é et enseignant à l’université Paris Diderot, travaille sous la direction de François Weil (EHESS/Centre d’études nord-américaines ou CENA) à une thèse de doctorat d’histoire sur la ségrégation du sang aux États-Unis, de la fi n des années 1930 au début des années 1970. Dans une perspective d’histoire sociale de la médecine et d’his-toire politique, son travail porte plus largement sur la mise en place d’un « racisme socio-médical » et de sa contestation dans le champ politique.

Phuoc Le est assistant professeur au département de médecine et pédiatrie de l’université de Californie (San Francisco). Il est diplômé de médecine à Stanford et titulaire d’une maîtrise de santé publique à l’université de Californie (Berkeley) spécialisée en santé globale. Pendant sa résidence en médecine, il a travaillé avec des organismes communautaires au Rwanda, au Lesotho, au Malawi et plus récemment dans l’Haïti post-tremblement de terre afi n d’apporter des soins de santé équitables. Il a participé à des études quan-titative et qualitative dans le domaine public et celui de la santé communau-taire, ainsi qu’à de la recherche anthropologique dans plusieurs pays.

Ralph Matthews est professeur de sociologie à l’université de la Colombie-Britannique et professeur émérite de sociologie à l’université McMaster (Hamilton, Canada). Auteur de six livres, on lui doit aussi une centaine de textes et chapitres d’ouvrage. Ses recherches portent sur le développement économique et social, la gestion des ressources, les changements environne-mentaux, les soins et les politiques de santé. Ses travaux sur la santé concer-nent les soins infi rmiers, l’infertilité, le don de sang, la génomique et les prions. Il s’intéresse tout particulièrement au transfert du savoir scientifi que dans l’ensemble du contexte sociétal. Ancien président de l’Association cana-dienne de sociologie et ancien rédacteur en chef de la Canadian Review of Sociology, il est actuellement président du Comité sur la sociologie des sciences et des technologies de l’Association internationale de sociologie.

Vishala Parmasad, MBBS, MSc, médecin à Trinité-et-Tobago, termine actuelle-ment son doctorat en anthropologie à l’université de la Colombie-Britannique (Vancouver, Canada). Elle avait suivi une formation professionnelle et exercé en clinique dans ce pays avant d’obtenir sa maîtrise en anthropologie médicale à l’University College (Londres). Fondée sur une étude ethnographique des

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dimensions socioculturelles de la gestion des maladies chroniques à Trinité-et-Tobago, sa thèse de doctorat examine le point d’intersection entre vie cli-nique et sociale où se déterminent les politiques de soins de santé, de même que l’accès et l’équité des services médicaux publics destinés aux populations et groupes vulnérables, atteints notamment de diabète de type 2.

Michael Jay Polonsky est directeur du programme de marketing de la School of Management and Marketing de l’université Deakin. Il a enseigné dans plusieurs autres universités en Australie, en Nouvelle-Zélande, en Afrique du Sud et aux États-Unis, de même qu’en Chine, à Singapour et en Malaisie. Il s’intéresse aux aspects sociaux et environnementaux du marketing, en particulier aux activités bénévoles et promotionnelles sans but lucratif. On lui doit plus de 120 articles, notamment sur des questions de santé, parus dans International Review of Public and Nonprofi t Marketing, Transfusion, Social Science and Medicine et Psychology and Health. L’étude qu’il publie dans cet ouvrage est tirée d’un projet multiphase réalisé en collaboration avec les services transfusionnels de la Croix-Rouge australienne, qui examine l’attitude et les inhibitions des migrants et réfugiés africains face au don de sang. Ayant mis en évidence la diffi culté de promouvoir le don de sang auprès de ces popu-lations, et la nécessité pour ce faire de prendre en compte leur situation passée et d’importants facteurs socioculturels liés notamment à leur intégra-tion dans leur pays d’accueil, ce projet est un excellent exemple de recherche multidisciplinaire appliquée à l’élaboration de solutions globales fondées sur une diversité d’approches et de théories.

Andre Renzaho, aujourd’hui professeur agrégé, a travaillé ces dix-huit dernières années auprès d’organismes des Nations unies et d’ONG œuvrant en Afrique subsaharienne, au Moyen-Orient, en Amérique latine, dans le Pacifique (Australie) et en Asie. Il a siégé à de nombreux comités d’experts et groupes de référence nationaux et internationaux sur les enjeux de santé liés à la migration des pays en développement vers les pays développés, le double problème de la sous-alimentation et de l’insécurité alimentaire et celui de l’alimentation dans les pays à faibles revenus frappés par des catastrophes. Il a occupé, jusqu’en 2006, différents postes de gestion, puis est devenu, en 2007, chercheur et universitaire. Distingué par maintes récompenses, il a conjointement obtenu en 2011 une bourse de l’Australian Research Council et le prix Heart Foundation Career Development (déclinés), fi gurant aussi au répertoire international Marquis Who’s Who in the World (États-Unis, 2008) pour sa riche contribution à son champ de recherche et à l’avancement de la société. Quelques années lui ont suffi pour créer et diriger des programmes axés sur le fi nancement d’équipes de recherche et le renforcement de compé-tences, recueillir des subventions à hauteur de 4,5 millions de dollars et publier une centaine de documents (articles examinés par des pairs, livres, chapitres d’ouvrage et d’encyclopédie, monographies, dossiers et importants rapports).

William H. Schneider, PhD (université de la Pennsylvanie), est professeur d’histoire à l’université de l’Indiana (Purdue University) à Indianapolis. Directeur du programme Medical Humanities and Health Studies de la School of Liberal Arts, il est aussi professeur auxiliaire au Département de génétique

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médicale et moléculaire de l’École de médecine. Il enseigne l’histoire de la médecine, des sciences et des technologies, des humanités médicales et de l’aide humanitaire. Boursier Fulbright et de la National Science Foundation, il a obtenu des subventions de recherche du National Endowment for the Humanities et des National Institutes of Health. Auteur de nombreux articles et de deux monographies, il a publié un livre sur l’histoire de l’eugénisme en France et collaboré à un ouvrage sur l’aide fi nancière accordée par la Fondation Rockefeller à la recherche médicale internationale. Il termine une monographie sur l’histoire de la transfusion médicale en Afrique.

Robert Simpson est professeur d’anthropologie à l’université de Durham au Royaume-Uni. Ces dernières années, ses champs d’intérêt ont englobé l’an-thropologie de la bioéthique, la recherche sur les sujets humains, le don de tissus humains et les nouvelles technologies génétiques et reproductives. Parmi ses récents travaux, citons les projets International Science and Bioethics Collaborations (Collaborations internationales en science et bioéthique, fi nancé par l’Economic and Research Council ou ESRC de concert avec les universités de Cambridge et de Durham), Pakistani Muslims and New Reproductive Technologies (Les nouvelles technologies de reproduction en contexte musul-man au Pakistan, fi nancé par le ESRC) et Biomedical and Health Experimentation in South Asia : Critical Perspectives on collaboration, governance and competition (Collaboration, gouvernance et compétition : le développement d’une pers-pective critique basée sur les expérimentations médicales et de santé en Asie du Sud, fi nancé par le ESRC en lien avec l’université d’Édimbourg). Reposant tous sur des approches ethnographiques, ces trois projets examinent la circu-lation des corps, substances et tissus humains à des fi ns biomédicales et autres.

André Smith est professeur agrégé de sociologie à l’université de Victoria (Colombie-Britannique). Ses champs d’études englobent le vieillissement, la santé mentale, l’ethnicité et le don de sang. Ses travaux visent à situer les questions de santé et de pathologie dans leur contexte social. Associé au Centre sur le vieillissement de l’université de Victoria, il a été soutenu fi nan-cièrement par les Instituts de recherche en santé du Canada et la Société Alzheimer du Canada. Il étudie actuellement l’infl uence des institutions, des cadres de réglementation et des cultures organisationnelles sur les pratiques de soins de santé. Il a publié des articles sur le vieillissement, la démence et le don de sang dans Journal of Aging Studies, Canadian Review of Sociology et The Journal of Deviant Behaviour.

Ferdinand Sutterlüty est professeur de sociologie à l’université Goethe de Francfort-sur-le-Main (Allemagne). Titulaire d’un doctorat de l’université de Berlin, il a obtenu son habilitation de l’université de Vienne. On lui doit maintes publications sur la sociologie de la violence, les ordres symboliques de l’inégalité sociale, les conflits ethniques, la sociologie des religions, l’ethnographie et la théorie sociale.

Nathalie Tran, MSc en anthropologie (2009), est diplômée de l’université de Montréal. Elle est coordinatrice de la Chaire de recherche sur les aspects sociaux du don de sang au Centre Urbanisation Culture Société de l’INRS depuis sa création. Elle a, entre autres, participé aux nombreuses enquêtes de la Chaire, incluant celle portant sur les communautés ethnoculturelles et

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le don de sang au Québec. Elle s’intéresse à la problématique du don sous diverses formes depuis plusieurs années, notamment dans le domaine de l’anthropologie économique (transfert d’argent et envois de cadeaux transna-tionaux) et de l’anthropologie médicale (don de sang).

Kylie Valentine est chercheuse principale au Social Policy Research Centre de l’université New South Wales (Australie). Ses champs de recherche englobent les politiques relatives aux familles, aux mères et aux enfants, les collectivités et individus marginalisés, et l’application des résultats de recherche aux poli-tiques et aux moyens d’action. Parmi ses derniers travaux fi gure une étude qualitative du soutien post-diagnostic destiné aux enfants souffrant de troubles du spectre autistique et à leur famille, ainsi qu’un projet de l’Austra-lian Research Council sur les besoins des grands-parents élevant leurs petits-enfants. Elle est co-auteure, avec Suzanne Fraser, de Substance and Substitution : Methadone Subjects in Liberal Society (Substance et substitution : sujets sous trai-tement par méthadone dans une société libérale, Palgrave, 2009).

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Avant-propos et remerciements

Johanne Charbonneau

Cet ouvrage est le fruit de nos passionnantes discussions lors des réu-nions de coordination de la Chaire de recherche sur les aspects sociaux du don de sang. Cette Chaire de recherche a été créée en 2009, sous l’initiative de Francine Décary, ancienne présidente et chef de la direction d’Héma-Québec, convaincue que les sciences sociales doivent s’intéresser davantage à la dynamique du don de sang et aux motivations et pratiques des donneurs. Je lui exprime ici mes plus sincères remerciements. Son ini-tiative a non seulement permis le développement d’une importante pro-grammation de recherche dans ce domaine, ainsi que le rassemblement de chercheurs provenant de plusieurs disciplines des sciences sociales, mais elle a aussi favorisé une heureuse rencontre entre sociologues, anthropologues, géographes, médecins et épidémiologues. Francine Décary a désigné Gilles Delage, vice-président aux affaires biomédicales en microbiologie, pour nous accompagner dans cette aventure. Je sou-ligne ici particulièrement la curiosité, l’ouverture d’esprit et la générosité de Gilles Delage qui, formé en médecine et en microbiologie médicale, a toujours fait preuve d’enthousiasme et de respect pour les travaux de ces chercheurs en sciences sociales, qui utilisent parfois de bien étranges méthodes de recherche. Plus largement, je tiens à remercier notre par-tenaire, Héma-Québec. En fi nançant des travaux de recherche sur les aspects sociaux du don de sang, cette agence d’approvisionnement sou-haitait que leurs résultats puissent contribuer à éclairer ses décisions en matière de recrutement et rétention des donneurs de sang, ainsi que d’amélioration de l’expérience du don de sang. Cela ne limitait cepen-dant pas le travail des chercheurs à un simple rôle de consultants. Au contraire, depuis la création de la Chaire, celle-ci s’est aussi engagée dans des activités de production académique visant à faire avancer les connaissances scientifi ques, dans ce domaine encore bien peu exploré. C’est dans ce contexte que se situe cet ouvrage qui cherchait d’abord à resituer l’expérience sociale du don de sang au Québec dans un contexte plus large, mais aussi à offrir une rare occasion d’analyser les enjeux des

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changements que connaissent les systèmes d’approvisionnement sanguins dans une grande diversité de pays, occidentaux et non occidentaux.

Nos propres travaux montrent déjà que la diversité sociale et culturelle dans une métropole comme Montréal est un facteur de première impor-tance dans l’interprétation des représentations du don de sang. On peut donc s’attendre à ce que celles-ci soient encore plus variées quand on franchit les frontières des pays occidentaux. Pourtant, depuis plusieurs décennies, le développement des systèmes d’approvisionnement tend vers une certaine uniformisation. Quelles en sont les conséquences dans les différents pays ? C’est ce que nous avons tenté de comprendre en sollicitant divers spécialistes sur la question.

Je remercie tous les auteurs qui ont contribué à cette édition et qui ont exprimé leur confi ance dans la réalisation de ce projet inédit en nous offrant des textes de très grande qualité. Je remercie aussi les traducteurs, Michel Beauchamp et Rachel Rouleau, la réviseure, Catherine Couturier, et les deux assistantes de recherche de la Chaire, Elisha Laprise et Nathalie Tran. Cette dernière, qui assure la coordination de la Chaire, codirige ce livre. Son engagement dans ce projet a été tout simplement remarquable au cours des derniers mois. Tous ont travaillé avec la plus grande célérité pour que ce livre soit publié dans un délai rapide : moins d’un an entre la rédaction de l’appel de textes et l’envoi du manuscrit à notre éditeur. Je tiens ici à remercier les Presses de l’École des hautes études en santé publique, à Rennes, et particulièrement Denis Couet, son directeur, ainsi que Yann Thouault, assistant d’édition, pour avoir accueilli ce projet avec enthousiasme et nous avoir offert les meilleures conditions possibles pour sa réalisation.

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Introduction

Johanne Charbonneau

De Titmuss à Mauss : suivre le chemin des origines du don de sang moderne

En 1971, Richard Titmuss publiait un ouvrage intitulé The Gift Relation-ship: From Human Blood to Social Policy. Cette publication a eu un impact considérable, qu’on ne mesure pas toujours à sa juste valeur. En 2008, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et la Fédération internatio-nale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FISCRCR) réaffi rmaient leur objectif commun de promouvoir une culture mondiale qui permettra d’obtenir 100 % de dons de sang volontaires et non rému-nérés dans l’ensemble des pays du monde (FISCRCR, 2008 ; OMS, 2008). Cette culture du don altruiste s’inspire directement du modèle défi ni par Titmuss, sur la base du système britannique dont il a décrit les modalités dans son ouvrage. Ce modèle altruiste repose sur quelques principes simples : le don de sang doit être volontaire, libre, gratuit, individuel et anonyme. Ce doit être un don réalisé dans un esprit désintéressé, au bénéfi ce d’un Autre inconnu, étranger.

Ce modèle est aussi parfaitement en phase avec l’idée que le sang est une substance universelle, que l’humanité peut partager, indépendamment de toute considération sociale, culturelle, raciale ou religieuse. Derrière cette idée, on retrouve un certain esprit humaniste et universaliste, inspiré des Lumières, où l’avancement des connaissances sur le corps humain, défi ni essentiellement par ses caractéristiques biologiques, contribuera au progrès d’une civilisation moderne au bénéfi ce de tous (Lock et Nguyen, 2010).

La publication de l’ouvrage de Titmuss en 1971 n’est pas le fruit du hasard. Après la Seconde Guerre mondiale, différents systèmes natio-naux de collectes de sang se sont développés dans les pays occidentaux. Deux grands modèles en sont progressivement venus à s’imposer. L’un reposait sur le recrutement de donneurs de sang volontaires et non

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rémunérés : c’est la Croix-Rouge, très active durant la guerre, qui l’a d’abord mis en place. L’autre modèle prévoyait plutôt la rémunération des « fournisseurs » (suppliers) de sang, pour reprendre l’expression de Titmuss. Selon ce dernier, le recrutement des fournisseurs parmi une population pauvre, analphabète et présentant souvent d’importants pro-blèmes de santé, constituait une source majeure de risques potentiels pour la sécurité des composants sanguins et la santé des personnes transfusées.

Lorsqu’il publie son ouvrage, au début des années 1970, cela fait plus d’une décennie que Titmuss a engagé un débat avec les économistes de l’Institute of Economic Affairs qui sont, de leur côté, favorables au déve-loppement d’un système commercial de collectes de sang (Fontaine, 2002). Si, jusqu’alors, Titmuss n’a jamais réussi à les convaincre qu’il est préférable de compter sur un système volontaire, la multiplication des hépatites post-transfusionnelles contribuera à démontrer les limites du système marchand et à faire prendre conscience de la nécessité d’effec-tuer un virage majeur pour garantir la sécurité des produits sanguins. L’ouvrage de Titmuss arrive donc à point nommé.

Enquêtes inédites et recherche documentaire à l’appui, il entreprend de faire la démonstration que le modèle altruiste, qu’il dit inspiré de l’Essai sur le don de Marcel Mauss (1923-1924) – un autre critique du mer-cantilisme des sociétés modernes –, est celui sur lequel il faut dorénavant s’appuyer pour développer les banques de sang. Dans les décennies qui ont suivi la publication de cet ouvrage, les pays occidentaux ont progres-sivement mis en place des systèmes basés sur le don de sang non rému-néré. Après les multiples scandales du sang contaminé, les problèmes liés à la rémunération des donneurs ont à nouveau été dénoncés. Il est apparu encore plus important que ce modèle se répande à travers le monde, puisque les produits sanguins s’échangent en fait sur des marchés internationaux. C’est d’ailleurs toujours le cas de nos jours, surtout pour le plasma destiné au fractionnement et les dérivés sanguins fabriqués à partir de ce plasma. Au Canada, une part non négligeable de ce plasma provient de donneurs rémunérés, en particulier des États-Unis.

L’importance de ces échanges internationaux explique le fait que l’OMS fasse la promotion du don volontaire et gratuit pour le développe-ment des banques de sang dans tous les pays du monde. Selon la FISCRCR, le don de sang volontaire et non rémunéré favoriserait même la stabilité future de la société, le développement de l’esprit citoyen et de la généro-sité, le renforcement d’« un sentiment de cause commune, de solidarité et de bien-être général dans une société civile » (FISCRCR, 2008 : 5), des arguments qu’utilisait déjà Titmuss en 1971.

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Au cours des dernières décennies, la médecine transfusionnelle s’est répandue à l’échelle internationale : elle a donc obligé les autorités sani-taires de tous les pays à développer des stratégies pour recruter des don-neurs de sang. Une grande diversité de systèmes de recrutement et de collectes s’est installée. Cette diversité prend appui sur les caractéristiques organisationnelles des pays concernés et sur leur histoire politique et sanitaire. Ce ne sont cependant pas les uniques facteurs pris en compte : la dynamique des solidarités sociales, propre à chaque pays, ainsi que les représentations culturelles et religieuses du sang ont tout autant contri-bué à façonner la complexité des systèmes établis. Comment peuvent-ils s’adapter pour répondre aux standards de l’OMS ? Pour ceux qui font la promotion d’un système universel de don de sang altruiste, les « mythes » ou les « superstitions » sur le sang constituent autant d’obstacles à vaincre pour susciter l’intérêt des donneurs potentiels. Quant aux modèles de recrutement qui ne font pas appel à des donneurs individuels, volontaires et non rémunérés, on croit généralement qu’il suffi t de montrer, à l’aide des connaissances et preuves scientifi ques disponibles, qu’ils posent d’im-portants risques à la sécurité des produits sanguins pour convaincre les populations locales d’adopter des pratiques plus sécuritaires.

Modifi er en profondeur des comportements établis depuis plusieurs décennies et qui s’appuient sur les systèmes culturels, sociaux et poli-tiques locaux, constitue tout de même un défi d’envergure. On peut se rassurer en se disant qu’au moins, dans les pays occidentaux, les systèmes de collectes répondent aux standards les plus sécuritaires et que les popu-lations de ces pays sont généralement en accord avec le modèle proposé. À la faveur des mouvements migratoires, ces certitudes peuvent cepen-dant être ébranlées. Les produits sanguins ne sont, en effet, pas les seuls à circuler à l’échelle internationale : c’est aussi le cas des populations. Les grandes villes occidentales accueillent des immigrants d’une grande diversité d’origines. Quel peut en être l’impact sur la promotion d’un modèle universaliste de don de sang ?

Cela n’est cependant pas le seul défi auquel font face les agences res-ponsables de l’approvisionnement en sang. Au cours des dernières décen-nies, la sécurité des produits sanguins a été menacée à plusieurs reprises. Compter sur le recrutement des donneurs non rémunérés ne suffi t plus à garantir la qualité des produits sanguins : il faut aller beaucoup plus loin dans la sélection des donneurs afi n d’assurer la sécurité des personnes transfusées. Alors que le principe de précaution s’impose comme un standard incontournable, de plus en plus de personnes font face à des restrictions ou des interdictions lorsqu’elles se portent volontaires pour donner du sang. Ces restrictions réfèrent à des critères territoriaux col-lectifs (pays où les risques de contracter certaines maladies sont élevés) ou à des pratiques individuelles à risques (injection de drogues, plusieurs

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partenaires sexuels et voyages dans des pays à risques). Du point de vue des agences qui doivent garantir la sécurité des produits sanguins, ces critères scientifi ques sont rationnels : tout le monde ne peut qu’acquies-cer devant leur pertinence. Du point de vue des groupes et des individus « interdits de donner », les réactions ne sont pas toujours si rationnelles.

Dans son Essai sur le don, duquel Titmuss disait s’inspirer, Mauss n’in-dique-t-il pas que le refus du don est l’équivalent d’un refus du lien social ? Il semble que les groupes eux-mêmes l’interprètent souvent comme une volonté de les exclure de la société, une négation de leur appartenance à la collectivité et de la reconnaissance de leur existence en tant que groupe. Le refus est donc souvent vécu comme un rejet collectif plutôt qu’individuel.

Ces situations suggèrent que le don de sang ne peut être seulement interprété sous l’angle d’une pratique individuelle, encadrée par la science, libre de toute considération sociale et politique. L’ambiguïté d’un message qui invite, d’une part, à partager un sang dénué de ses particularismes raciaux, religieux et culturels dans un esprit de solidarité universelle, mais qui n’en restreint pas moins, d’autre part, la possibilité de s’y engager à certains groupes, comme les homosexuels ou les per-sonnes originaires de pays ciblés, n’a pas échappé à ceux qui s’en sont sentis lésés. En 1971, Titmuss était pourtant déjà très clair à ce propos : la promotion du modèle altruiste du don de sang n’est pas la seule condi-tion pour assurer la sécurité des composants sanguins. Les autorités sani-taires ont aussi le pouvoir et la responsabilité de sélectionner les donneurs pour atteindre cet objectif. À l’époque, Titmuss n’avait peut-être pas conscience que la défi nition des restrictions, qui s’appuient sur des cri-tères collectifs et fi nissent par écarter du don de sang des groupes sociaux bien défi nis, remettrait au premier plan l’idée que le don de sang n’est fi nalement pas qu’un acte individuel, puisque des groupes se trouvent inclus dans des rapports de force et d’autorité. En effet, ce sont bien les agences qui prennent ces décisions et qui les imposent à des groupes qui ne sont pas toujours d’accord avec elles.

S’il ne peut pas être parfaitement « individualisé », le don est-il si « par-faitement » altruiste, même dans la population majoritaire de nos pays occi-dentaux ? Quarante ans après la publication de l’ouvrage de Titmuss, nous proposons dans cet ouvrage international de faire le point sur ces ques-tions. La sélection des textes poursuit quatre objectifs complémentaires :

1. Offrir un espace de discussion théorique sur les conceptions du don de sang entre altruisme, solidarité, engagement social.

2. Faire un rappel historique des événements politiques et sociaux qui ont façonné la conception moderne du don de sang, en particulier depuis la crise du sang contaminé.

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3. Proposer des analyses de la diffusion du modèle altruiste du don de sang dans les pays non occidentaux, en Asie ou en Afrique particulièrement.

4. Faire le point sur les enjeux du recrutement de nouveaux donneurs de sang dans les sociétés occidentales marquées par la diversité de leur population.

Avant de présenter les grandes sections de l’ouvrage, ainsi que l’apport respectif de chacune des contributions, il nous paraît essentiel de faire un rappel des idées développées par Titmuss, considérant l’importance que sa thèse a prise dans l’histoire récente du développement des sys-tèmes d’approvisionnement en produits sanguins. Pour compléter cette présentation, nous reviendrons à Mauss et à son Essai sur le don. N’est-il pas celui qui demeure l’inspiration ultime de tous ceux qui considèrent que notre société actuelle a autant besoin du don que du commerce pour dicter le sens de la circulation des choses ?

Le don de sang altruiste de Titmuss

L’ouvrage de Titmuss vise à convaincre que le système de don volon-taire et altruiste pour l’approvisionnement en sang est préférable au sys-tème marchand. Son argumentation repose sur la comparaison de ces deux modèles, en dépit du fait qu’il existait déjà à l’époque, et qu’il existe toujours de nos jours, d’autres modes de recrutement de donneurs poten-tiels, par exemple en invitant la famille et les proches à donner du sang lorsqu’une personne a besoin de transfusions sanguines. Cette dernière pratique (le don de remplacement) est toujours la plus répandue dans les pays non occidentaux. Au moment où Titmuss rédige son ouvrage, cette pratique lui semble vouée à disparaître. L’avenir sera au modèle altruiste (anglais) ou au modèle commercial (américain) et il veut convaincre ses lecteurs que ce dernier ne doit surtout pas être le choix des sociétés avancées.

Titmuss a donc peu d’intérêt pour les modèles d’approvisionnement qui reposent sur les principes des solidarités restreintes, comme dans la famille. Il est aussi très critique à l’égard d’un don motivé par des obliga-tions communautaires, comme lorsque les collectes sont organisées dans des espaces « captifs » tels que l’école ou le milieu de travail. S’il montre peu d’empressement à l’égard de ces pratiques, c’est notamment parce que les économistes considèrent que les seules solidarités qui subsistent dans nos sociétés modernes sont précisément celles qui prennent place dans ces communautés restreintes (Fontaine, 2002). Titmuss ne peut certainement pas leur donner raison sur ce plan : il entreprend plutôt de démontrer que l’individu moderne est tout à fait capable d’une solidarité

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désintéressée, détachée des obligations étroites, motivée par un désir altruiste pur, orientée vers la satisfaction des besoins des personnes avec qui il n’a aucun lien direct, des inconnus, des étrangers. L’objectif de Titmuss est donc de contredire la thèse des économistes selon laquelle l’individu, moderne et libre, est un être égoïste qui ne donnera du sang que s’il y trouve un avantage personnel, par exemple à travers une rémunération.

Selon Titmuss, la liberté marchande, bien qu’attrayante, n’est pas une vraie liberté. Elle repose sur l’exploitation des pauvres, des ouvriers non spécialisés, des chômeurs et des Noirs, et sur la marchandisation de leur corps, ce qu’il qualifi e de forme d’esclavage. Comme nous l’avons dit plus tôt, il montrera surtout les risques associés à la rémunération des « four-nisseurs » de composants sanguins. Pour lui, le don de sang volontaire et altruiste est le modèle parfait de la liberté protégée par les institutions publiques. Cette liberté ne doit cependant pas, comme le fait le marché, libérer de tout sens d’obligation. Comment peut-on s’assurer que des individus agiront pour le bien-être de la communauté, dans le contexte impersonnel dans lequel nous vivons ? En prenant l’exemple de l’Angleterre, il montre qu’il existe des « systèmes qui sont particulière-ment susceptibles d’encourager la générosité entre étrangers », soit l’al-truisme. L’altruisme est ce qui permet de construire le tissu social de nos sociétés modernes.

Titmuss défi nit le don de sang volontaire et altruiste par les caractéris-tiques suivantes :

1. Il prend place dans des situations impersonnelles ; c’est bien un don altruiste.

2. Donneurs et receveurs ne se connaissent habituellement pas. S’ils se connaissaient, ils pourraient refuser de participer au don pour des raisons religieuses, politiques, ethniques ou autres. Cela doit donc être un don anonyme.

3. Il n’y a pas de sanction à ne pas donner (remords, honte, culpabi-lité).

4. Il n’y a ni certitude ni attente de retour.5. Aucune pression n’est faite sur le receveur afi n qu’il fasse un don

en retour.Ces trois caractéristiques montrent que c’est bien un don libre.6. Seulement certains groupes sont autorités à donner.7. La qualité du don dépend de l’honnêteté du donneur. Les « inter-

médiaires » ont d’ailleurs l’autorité de décider de ce qui est bénéfi que ou dangereux.

8. Ni le donneur, ni le receveur ne peuvent décider de l’utilisation du don.

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Ces trois dernières caractéristiques montrent qu’on est bien dans un don moderne, avec un intermédiaire qui a la responsabilité de protéger la qualité et la sécurité du don, pour le bien du receveur.

Selon Titmuss, nous vivons dans un monde d’étrangers. À propos des donneurs volontaires britanniques qui ont participé à son enquête, il dira :

« Pour la plupart d’entre eux, l’univers ne se limite pas à des groupes restreints, tels que la famille, la parenté, la communauté ethnique ou la classe sociale ; leur don s’adresse plutôt à l’étranger universel. » (1971 : 238)

Sa typologie des motivations au don de sang en Angleterre a été criti-quée (Pinker, 2006 ; Rapport et Maggs, 2002). La prédominance de l’al-truisme n’y est, en effet, pas si convaincante : elle ne regroupe clairement que le quart des réponses à l’enquête citée par Titmuss. Un don qui consti-tue plutôt une forme de reconnaissance et qui s’ancre dans l’histoire fami-liale et amicale (par exemple « rendre » pour une transfusion reçue par un proche) regroupe un peu plus de 10 % des réponses. Des motivations qui pourraient plutôt être interprétées comme de la solidarité commu-nautaire (devoir, effort de guerre) regroupent également 10 % des réponses. Plus de 30 % des participants à l’enquête font référence au fait d’avoir répondu à la demande d’un proche, de leur employeur, ou d’un appel urgent de l’agence elle-même. Sommes-nous bien toujours dans le cadre d’un don volontaire, libre et altruiste ? En fait, la seule conclusion à laquelle l’auteur parvient vraiment, c’est que personne n’est rémunéré. Plutôt que du caractère volontaire et anonyme, c’est de l’idée de la gra-tuité du don dont il est question.

Le choix de centrer son propos sur l’alternative entre le don altruiste anglais et le système américain de rémunération des fournisseurs de sang conduit Titmuss à élaborer une typologie en huit types de donneurs : cinq types font référence à des formes de rémunération, d’incitatifs, de paiement, de récompenses, donc à une transaction qui fait intervenir de l’argent ou une récompense matérielle. L’un de ces cinq types comprend le paiement dû par le transfusé, en argent ou en don de remplacement. Le don de remplacement, qui peut être fourni par l’entourage, est donc confondu avec une forme monétaire. Parce qu’il s’appuie sur une obli-gation morale, Titmuss ne considère pas ce type de don comme un don volontaire. Il s’agit pourtant d’une obligation qui n’est pas très éloignée de certaines motivations évoquées par les donneurs volontaires anglais (rendre pour un don reçu dans la famille ou à la suite d’une demande d’un proche).

En plus des donneurs volontaires communautaires – dont les motiva-tions altruistes paraissent moins « pures » que supposé –, Titmuss a iden-tifi é un dernier type de donneurs : les donneurs captifs. Il repère d’abord

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ceux-ci chez les militaires et les prisonniers. Mais son analyse l’amène vers d’autres pays que l’Angleterre et les États-Unis, là où les volontaires cap-tifs semblent très nombreux. Il s’agit de personnes qui sont recrutées parce qu’elles sont membres d’une organisation (usine, école, hôpitaux). Pour lui, ce sont des donneurs captifs et non libres :

« Le développement du processus psychologique d’internalisation des valeurs dans le courant de l’âge adulte ne peut se réaliser que dans un contexte de liberté individuelle et de respect de soi. » (1971 : 192)

Selon Titmuss, cet argument suffi t pour écarter tout système d’approvi-sionnement qui ne repose pas sur la liberté du donneur individuel.

La publication de son ouvrage a provoqué de nombreuses critiques de la part des anthropologues (Fontaine, 2002) qui lui ont reproché d’avoir trop insisté sur la liberté, en réaction aux économistes, plutôt que d’admettre que le respect des normes sociales, le sens de l’obligation et même l’acceptation d’une certaine autorité pouvaient être des facteurs favorables au don de sang entre étrangers.

Les analyses complémentaires de Titmuss l’amènent à conclure que les raisons de ne pas donner du sang sont à peu près semblables partout : elles sont nourries par des mythes et des peurs autour du sang. À leur lecture, on constate bien que les mythes évoqués dans les pays non occi-dentaux s’ancrent dans des représentations religieuses ou culturelles, alors que les craintes des Français ou des Anglais paraissent a priori se référer davantage à des aspects médicaux. Mais la peur des aiguilles, men-tionnée par les Français et les Anglais, n’est-elle pas aussi le refl et d’une croyance culturelle ancienne et bien peu « rationnelle » portant sur la crainte et le dégoût associés au franchissement de la frontière du corps dont on doit protéger l’intégrité (Douglas, 1966) ? Selon Titmuss, la science, « ensemble universel de vérités biologiques confi rmées par des expérimentations répétées » (1971 : 241), et la raison devraient, de toute manière, faire disparaître ces mythes. On comprend que la promotion d’un modèle de don altruiste et volontaire avait déjà pour lui une valeur d’universalité.

On peut s’en rendre compte dès le début de l’ouvrage de Titmuss. Il commence par rappeler que le sang a eu un sens symbolique et reli-gieux fort dans toutes les cultures et les sociétés durant des siècles et que certains auraient préféré la mort plutôt que de recevoir du sang d’un groupe ethnique différent. Il se réfère à l’importance des notions de pureté et d’impureté et même au sacrilège de prendre le sang, car il est une partie inviolable du corps, une superstition fortement ancrée dans certaines cultures. Il termine ce rapide survol en rappelant que, dans nos sociétés, une conception plus rationnelle prédomine sur ces représen-tations des « cultures anciennes ». Il affi rme que les arguments médicaux

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permettent désormais de prendre des décisions rationnelles pour défi nir les caractéristiques des donneurs qui respecteront le droit des transfusés de recevoir le sang qui présente le plus faible niveau de risques.

Dans ses analyses comparées de différents pays (autres que les États-Unis et l’Angleterre), il mentionne que les distinctions entre les systèmes d’ap-provisionnement dépendent de l’histoire, des valeurs et des idées poli-tiques de chaque société. Il ajoute que dans les pays en développement, des croyances, des superstitions et même l’idée que le don de sang contre-vient à certaines conceptions religieuses subsistent toujours. Il fait cepen-dant la promotion d’un système qui permettra aux individus libres de donner leur sang indépendamment de leur race, leur religion, la couleur de leur peau ou leur territoire : c’est la condition d’un système qui valo-rise le don entre étrangers.

On constate par ailleurs que ce système n’inclut pas tout le monde (Fantauzzi, 2008). Ne dit-il pas que seuls certains groupes sont autorisés à donner et que ce sont les intermédiaires qui ont l’autorité d’en décider, sur des bases scientifi ques et rationnelles ? Un des principes fondamentaux d’un système sécuritaire suppose l’établissement de la confi ance envers l’honnêteté du donneur. Sa critique du système américain de rémunéra-tion amène Titmuss à mettre en doute celle de personnes motivées par l’appât du gain :

« On ne peut pas s’attendre à ce qu’une personne de couleur, en par-ticulier lorsqu’elle est issue d’un milieu défavorisé, peu évolué et qu’elle ne profi te pas de connaissances médicales et de services de santé adéquats puisse savoir si elle a eu ou non une jaunisse lorsqu’elle était enfant. La dépendance de l’approvisionnement sanguin à l’égard du sang fourni par des Nègres constitue un risque supplémentaire à la transmission de maladies sur l’ensemble du territoire américain. » (1971 : 151-152)

En bref, si l’altruisme, l’anonymat et la liberté sont des conditions nécessaires pour assurer la sécurité de l’approvisionnement, elles ne sont pas suffi santes. Il faut encourager le don parmi les populations les plus susceptibles de fournir du sang de qualité et le restreindre chez celles en qui il est impossible d’avoir complètement confi ance. On constate qu’en mettant en doute l’honnêteté des « fournisseurs » de composants sanguins motivés par l’appât du gain, Titmuss visait principalement les pauvres… et les Noirs. Alors qu’il fait la promotion d’un don de sang dénué de considérations raciales, il réintroduit ainsi directement cette question au cœur de son argumentation. La table est mise pour que celle-ci revienne fréquemment dans les débats, dans les décennies qui suivront.

Pour terminer cette lecture de Titmuss, nous proposons de revenir à ce qui, selon ses propos, a infl uencé sa défi nition du don altruiste : l’Essai sur le don de Marcel Mauss (1923-1924). Nous verrons, entre autres, que

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pour Mauss, les échanges de don ne se font ni entre étrangers, ni seule-ment sur une base individuelle. Le système de don est un « fait social total » qu’on peut bien diffi cilement extraire des contextes sociaux et culturels dans lesquels ils se déploient.

Mauss et le don de sang moderne

Mauss aussi était critique du « mercantilisme », de l’intérêt individuel et de la « matérielle utilité » comme moteurs de l’action dans nos sociétés. En citant les exemples de l’assurance sociale, de la sollicitude, de la coopération et de la redistribution, il appelait plutôt au retour « à de l’archaïque » :

« De nos jours, les vieux principes réagissent contre les rigueurs, les abstractions et les inhumanités de nos codes. À ce point de vue, on peut le dire, toute une partie de notre droit en gestation et certains usages, les plus récents, consistent à revenir en arrière. Et cette réaction contre l’in-sensibilité romaine et saxonne de notre régime est parfaitement saine et forte. » (Mauss, 1923-1924 : 105-106)

Lorsqu’il analyse la société moderne, Mauss n’oppose pas le don et la solidarité. Même si les individus semblent les « receveurs » des temps modernes, ce sont des groupes qu’il associe plutôt au rôle de donneur. Mauss n’avait pas mesuré le fait que, contrairement à ce qu’il aura observé dans ses propres études sur les échanges de don entre groupes dans les sociétés archaïques, l’État se place désormais au milieu de cette relation. C’est l’État qui assure la circulation du don, entre le donneur et le receveur – c’est particulièrement vrai dans le cas du don de sang. L’intermédiaire n’est pas un individu : ce sont en fait plusieurs « groupes » qui agissent en synchronie pour assurer la circulation du don. Le sang provient bien d’un corps individuel et sera transféré dans le corps d’un autre individu, après avoir été « collectivisé ». Ces individus ne se connais-sent pas personnellement : on en déduit donc qu’ils sont des étrangers et que le don de sang est un don altruiste. Mais ces individus, donneurs et receveurs, appartiennent tout de même à des familles et à des groupes sociaux. Ils ont une identité sociale et culturelle. Ces groupes sont en interaction dans les sociétés : ils se connaissent et peuvent même expri-mer des préférences à entrer ou non en relation et à ce que leur sang soit mêlé.

Les intermédiaires n’interagissent donc pas seulement avec des indi-vidus isolés, mais aussi avec des groupes. On est fi nalement assez près de l’étude de la circulation du don de Mauss, qui mettait en relation des groupes et des représentants de ces groupes, et non des individus, comme

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Titmuss, lui, le soutenait. Dans son texte sur l’histoire sociale du dévelop-pement de l’idée de personne et de moi, de « son individualité spirituelle et corporelle à la fois », Mauss se demande même si, un jour, on ne remet-tra pas en question l’idée que « nous ayons chacun notre moi ». Dans sa critique des sociétés modernes, Mauss place l’individu aux côtés du profi t et de l’esprit mercantile :

« Qui sait même si cette « catégorie » que tous ici nous croyons fondée sera toujours reconnue comme telle ? Elle n’est formée que pour nous, chez nous. Même sa force morale – le caractère sacré de la personne humaine – est mise en question, non seulement partout dans un Orient qui n’est pas parvenu à nos sciences, mais même dans des pays où ce prin-cipe a été trouvé. » (Mauss, 1938 : 28)

En faisant la promotion du don dans la société moderne, Titmuss met-tait surtout en avant la capacité à développer le sens de la générosité envers les étrangers. L’institution du potlatch, étudiée par Mauss, est pourtant dominée par le principe de la rivalité et de l’antagonisme :

« On [y] assiste avant tout à une lutte des nobles pour assurer entre eux une hiérarchie dont ultérieurement profi te le clan. » (Mauss, 1923-1924 : 13)

Titmuss avait bien noté le caractère autoritaire du rôle de l’intermé-diaire dans le processus de circulation du don de sang. Parce que c’est lui qui induit le mouvement, l’intermédiaire se place en position d’auto-rité tant par rapport aux donneurs qu’aux receveurs. Dans la circulation du don de sang, les intermédiaires paraissent a priori toujours occuper le haut de la hiérarchie, mais dans l’histoire de l’affaire du sang contaminé, on aura bien compris que les donneurs et les receveurs ne sont pas sans pouvoir quand ils se regroupent pour revendiquer leurs droits (donneurs homosexuels) ou les obligations que la société a à leur égard (receveurs hémophiles).

Un des éléments les plus cités de l’Essai sur le don de Mauss par les auteurs contemporains est celui des trois moments du don : donner, rece-voir, rendre. Prenons donc d’abord le premier moment, celui du don. Bien qu’à quelques reprises dans son Essai sur le don, Mauss utilise l’ex-pression de « la liberté et l’obligation entremêlées », sa première référence à ce paradoxe du don les ordonne dans un rapport spécifi que :

« De cette multiplicité de choses sociales en mouvement, nous voulons ici ne considérer qu’un des traits, profond mais isolé : le caractère volon-taire, pour ainsi dire, apparemment libre et gratuit, et cependant contraint et intéressé de ces prestations. » (Mauss, 1923-1924 : 9)

Selon les observations de Mauss, le caractère volontaire du don serait en apparence libre, mais contraint dans les faits.

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Le don de sang moderne présente toutes les apparences d’un don libre, volontaire ; même dans les faits, l’intermédiaire paraît ne pouvoir contraindre personne à donner du sang. L’obligation n’est cependant pas toujours absente : par exemple, les donneurs peuvent faire référence au devoir citoyen parmi leurs motivations au don de sang. L’intermédiaire peut lui-même contribuer à renforcer le caractère d’obligation du don. Au Québec, par exemple, les collectes sont organisées principalement sur des sites mobiles, par des associations locales et dans des établisse-ments d’enseignement et des entreprises. Dans un tel cadre, on retrou-vera toujours une certaine proportion de donneurs « captifs » qui offrent leur sang au sein de groupes de pairs. À ce titre, les sites fi xes paraissent plus favorables au don individuel et libre. Les agences responsables de l’approvisionnement savent aussi l’importance de compter sur des don-neurs réguliers ; c’est pourquoi ils gardent des contacts étroits avec eux et n’hésitent pas à leur téléphoner pour leur rappeler la date où ils peu-vent à nouveau donner du sang. Ceux qui possèdent du sang plus rare sont aussi habitués à recevoir une demande téléphonique plus urgente si les réserves sont en baisse. Une certaine pression à donner du sang est donc présente dans nos pratiques modernes. Une personne peut cepen-dant vivre sa vie sans jamais donner de sang et un donneur demeure libre d’arrêter quand il le désire.

Dans le cycle du don de Mauss, tout commence par l’offre d’un pre-mier don. Dans le système de circulation du sang, personne ne peut spontanément offrir son sang, sans qu’un intermédiaire ait d’abord prévu une installation pour le recevoir et planifi é un programme d’approvision-nement pour en défi nir le besoin. Tout se passe donc comme si, dans ce système, le premier mouvement n’était pas celui du don, mais celui de la défi nition des conditions de sa réception. Cet acte de recevoir se défi nit aussi à partir des critères de qualifi cation, de la liste des restrictions tem-poraires et des interdictions permanentes établies par les agences respon-sables de l’approvisionnement en sang. Mauss n’a pas hésité à utiliser le terme de « contrat » pour défi nir la circulation volontaire des prestations et contre-prestations. Ne pourrait-on pas dire que le formulaire de sélec-tion constitue un contrat entre le donneur de sang potentiel et l’agence qui s’apprête à recevoir le don ?

Les futurs transfusés se situent à l’étape du « recevoir », dans le cycle du don de Mauss. Ils ne demandent pas directement de recevoir le don : ce sont les hôpitaux qui agissent à titre d’intermédiaires à leur égard et évaluent les besoins. Les hôpitaux sont des demandeurs et ils imposent des quotas que doivent respecter les agences responsables de l’approvi-sionnement. Les transfusés peuvent ponctuellement intervenir dans le processus de sélection des donneurs, par exemple par l’intermédiaire de leurs groupes de pression.

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Aucun transfusé n’est vraiment incité à rendre le don de sang reçu. Plus encore, dans certains pays, comme en France, les transfusés ne peu-vent pas donner de sang. Là où ils en ont l’autorisation, les transfusés qui redonnent du sang le font en toute liberté, en respect des règles de cir-culation du don. Plusieurs donneurs de sang sont aussi motivés à donner du sang en reconnaissance pour des transfusions reçues par un proche. Le sang donné peut effectivement être du sang rendu, ce qui contribue à entretenir le mouvement dans le cycle du don. Si les donneurs peuvent dire qu’ils ne donnent pas leur sang pour se garantir la possibilité d’en recevoir plus tard s’ils en ont besoin, les engagements des agences res-ponsables de l’approvisionnement viennent tout de même offrir une certaine assurance à long terme.

À l’époque de Mauss, les parties du corps ne circulaient pas encore aux fi ns thérapeutiques que la recherche scientifi que moderne a permises. Dans son texte sur « les techniques du corps » (1934), l’acte technique est toujours présenté comme découlant de traditions sociales, magiques, reli-gieuses. Il parlera de phénomènes « biologico-sociologiques » ou de « mon-tages physio-psycho-sociologiques ». Le corps physique ne peut être conçu comme distinct de l’ordre social et symbolique. C’est pourtant bien à cette distinction que Titmuss s’est prêté au début de son ouvrage en met-tant en exergue les conceptions scientifiques rationnelles du sang. Mauss rappelle que la modernité ne signifi e pas nécessairement la fi n des « infl uences anciennes » et que les sociétés archaïques ne sont pas des sociétés « primitives ». N’appelle-t-il pas au retour à de l’archaïque dans son Essai sur le don ? Ces observations laissent penser que Mauss serait le premier à défendre l’idée que les conceptions sociales, religieuses et sym-boliques du sang sont encore fort infl uentes dans nos sociétés modernes. Comme on le verra dans le présent ouvrage, les études anthropologiques réalisées dans les pays non occidentaux démontrent aussi que le dévelop-pement du modèle universel de don de sang volontaire, individuel et altruiste peut se heurter aux cultures locales.

Le concept de hau est évoqué par Mauss dans son Essai sur le don pour rappeler que le cadeau offert garde en lui quelque chose du donateur : « Présenter quelque chose à quelqu’un, c’est présenter quelque chose de soi. » Fluide du corps, symbole de la vie, il n’est pas diffi cile d’imaginer que le sang qui circule puisse être perçu comme porteur de l’identité du donneur. Il s’agit d’un thème majeur d’analyse pour le don d’organes (Fox et Swazey, 1992 ; Godbout, 2000). Le refus de donner ou de recevoir un don de sang peut aussi être interprété comme le refus de partager l’identité de l’autre.

Mauss a cependant référé à la notion de hau pour justifi er le fait que le don doit continuer à circuler, puisqu’on ne peut pas garder pour soi l’esprit de la chose donnée. Par la promotion du don anonyme aux

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étrangers, par la transformation du sang en produits sanguins et son incor-poration dans une réserve collective, les intermédiaires s’efforcent de faire disparaître les traces de l’identité des donneurs, tout en préservant l’idée que le sang est une substance vitale. Par ailleurs, quand ils se trouvent devant le défi de convaincre les membres de communautés spécifi ques d’offrir leur sang rare pour sauver d’autres membres de leur propre com-munauté, les intermédiaires sauront adapter leurs pratiques pour conser-ver l’identité collective et spécifi que de certains dons individuels.

Cette lecture de Mauss suggère que les enjeux autour de la circulation du sang dans nos sociétés modernes sont bien plus complexes que le simple débat entre la valeur d’un système de don altruiste ou d’un système d’ap-provisionnement commercial. C’est cependant dans ce débat que Titmuss a choisi de s’engager, il y a plus de quarante ans, et c’est ce qui dicte main-tenant la volonté des agences internationales de promouvoir le don de sang individuel, gratuit, volontaire et anonyme à l’échelle de la planète.

Présentation de l’ouvrage

Les quinze articles de cet ouvrage nous mènent au cœur de la complexité de ces enjeux. L’ouvrage a été divisé en quatre parties dis-tinctes.

Trois textes historiques sont regroupés dans la première partie. Ils rap-pellent les principaux événements qui ont marqué l’histoire sociale et politique de la transfusion sanguine et du don de sang au cours des der-nières décennies et en particulier depuis le scandale du sang contaminé aux États-Unis, en France et en Afrique. Comme on peut s’y attendre, les débats sur la commercialisation du sang y occupent une place majeure. On constate aussi le développement précoce d’une diversité de systèmes de collecte, même dans les pays occidentaux. Les questions raciales imprègnent fortement l’histoire du système de transfusion sanguine aux États-Unis. Dans les trois cas sélectionnés pour cette présentation histo-rique, on retiendra surtout que l’État occupe la position centrale dans l’exercice de défi nition des confi gurations spécifi ques des modèles d’ap-provisionnement, mais des événements politiques et économiques qui dépassent les frontières des États, sont parfois encore plus infl uents que les volontés nationales : c’est ce qu’on verra dans le cas de l’Afrique.

Ce rappel historique oriente, dès le départ, l’organisation de la suite de l’ouvrage. Deux grandes questions sont posées :

1. Que peut-on dire de nos jours à propos du modèle de don altruiste, dont Titmuss vantait les mérites il y a quarante ans, tant dans les pays occidentaux que dans les pays non occidentaux ?

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2. Comment ce modèle se conjugue-t-il avec les exigences sanitaires et sécuritaires de plus en plus élevées dans les pays occidentaux ?

La deuxième partie de l’ouvrage propose d’interroger le modèle altruiste dans les pays occidentaux. Lorsqu’il s’agit de recruter des don-neurs de sang potentiels, les agences d’approvisionnement font appel aux valeurs d’altruisme des individus. Mais est-ce bien seulement ce qui les motive ? L’enquête réalisée par Titmuss montrait elle-même que plu-sieurs types de motivation peuvent être à l’origine d’un don de sang. C’est aussi ce que les textes sélectionnés permettent d’observer. À cet égard, la pluralité ethnique et culturelle n’est pas la seule raison pour laquelle une telle diversité de motivations est observée. Comme c’est le cas dans la première partie de l’ouvrage, des auteurs soulignent que cer-tains facteurs structurels orientent eux-mêmes la confi guration du recru-tement des donneurs et, conséquemment, favorisent la présence de donneurs dont les motivations peuvent relever de l’altruisme ou d’autres bonnes raisons de donner.

Dans la troisième partie de l’ouvrage, nous nous tournons vers les pays non occidentaux pour réfl échir à la capacité du modèle universel de don altruiste, libre et volontaire de s’imposer dans des contextes sociaux, poli-tiques et culturels très différents de celui des pays occidentaux d’où a émergé ce modèle. L’analyse des stratégies de recrutement de donneurs et les pratiques de don en Chine, en Inde, au Sri Lanka et à Trinité-et-Tobago, révèle une diversité encore plus grande que nous ne l’avions anticipé. Au-delà des traditions bien implantées de don patriotique en Chine, des références aux croyances religieuses ou aux solidarités fami-liales au Sri Lanka et à Trinité, on voit émerger en Inde un type de moti-vations tout à fait inédit jusqu’alors, où le don de sang collectif est pratiqué comme une forme nouvelle de protestation sociale.

Nous terminons cet ouvrage en retournant dans les pays occidentaux où le caractère universaliste du don de sang est confronté à des restric-tions d’accès pour des populations spécifi ques. L’affaire du sang conta-miné a été un tournant à cet égard. Alors que le principe de précaution s’impose comme le standard de référence pour les institutions respon-sables de la gestion des risques, des personnes, toujours plus nombreuses, se voient interdire de donner du sang. Les procédures mises en place sont génératrices d’un sentiment d’exclusion sociale qu’il demeure nécessaire de mieux comprendre. Le sang n’est pas une substance biologique dépour-vue de ses caractères sociaux, culturels et religieux, et il demeure le géné-rateur d’une parenté symbolique. L’acte de don dans une collectivité est lui-même un geste éminemment social. Il n’est pas étonnant, dans cette double perspective, que se vive parfois diffi cilement le refus de son don de sang, même pour des raisons strictement médicales.

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Le premier texte de la première partie est celui de Jean-Paul Lallemand-Stempak qui propose une histoire de la transfusion sanguine aux États-Unis autour de deux problématiques principales : la question de son institution-nalisation et celle de sa racialisation. L’objectif du texte est de saisir l’am-bivalence du don du sang entre son statut de technique médico-sanitaire et d’objet de commerce et celui d’outil politique défi nissant l’apparte-nance à une communauté. Le texte est organisé autour de la présentation des moments charnières de l’histoire de la transfusion sanguine aux États-Unis. Nous voyons ses débuts hésitants au sein du corps médical, l’irrup-tion des associations au tournant des années 1930, la Seconde Guerre mondiale, où la demande croissante en produits sanguins transforme l’esprit du don en geste patriotique et où l’État s’investit dans le modèle transfusionnel. Après la Guerre, en s’appuyant sur la Croix-Rouge, l’État se heurte pour la première fois aux deux enjeux qui défi niront l’histoire de la transfusion sanguine dans les décennies suivantes : la question de la commercialisation et celle de la race. L’histoire racontée par l’auteur révèle le rôle et les interactions entre les différents acteurs, groupes, asso-ciations qui ont participé à la construction sociale du champ de la trans-fusion sanguine dans ce pays, ainsi que l’évolution de l’« esprit du don » au travers des controverses qui ont marqué cette histoire. Il montre que les polémiques actuelles sur le danger sanitaire ou les discriminations sont, sur bien des points, comparables aux crises passées.

Dans l’article suivant, Sophie Chauveau s’intéresse aux conséquences que l’affaire du sang contaminé a eues sur l’organisation de la transfusion sanguine en France, tant sur les règles du don de sang que sur les proces-sus de transformation du sang collecté en produits thérapeutiques. L’analyse des discours sur le don de sang et le don rémunéré produits durant l’affaire du sang contaminé montre que si les acteurs sont demeu-rés attachés au modèle du sang bénévole, il s’est vite révélé obsolète, voire dangereux. Cette affaire a en effet montré que même le sang libre et volontaire pouvait être contaminant. Selon Sophie Chauveau, le principe de l’universalité du don de sang a aussi été remis en cause durant ces événements, car certains donneurs se sont effectivement révélés plus fi ables que d’autres. Avec le temps, la nécessité de s’adapter aux exigences de la production industrielle de médicaments dérivés du sang a conduit à modifi er en profondeur le statut du sang volontaire qui est devenu une pratique de plus en plus encadrée, codifi ée et soumise à des contraintes sanitaires, industrielles et commerciales élevées. Si l’économie du don coexiste toujours avec l’économie de marché de nos jours, les change-ments apportés au système d’approvisionnement ont toujours pour objec-tif que cette substance, cédée gratuitement, cette « chose hors commerce », puisse se transformer en médicaments commercialisés.

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La première partie de l’ouvrage se clôt sur une revue historique de la transfusion sanguine en Afrique. William H. Schneider rappelle d’abord que, malgré les traditions et les superstitions, les Africains ont toujours été très volontaires pour donner du sang. La pauvreté, la fragilité de l’économie, le manque de ressources et d’infrastructures, la présence d’un grand nombre de maladies transmises par le sang… Ces facteurs, qui infl uencent tous la pratique du don de sang, font cependant en sorte que son histoire se distingue de celle de l’Europe et de l’Amérique. L’augmentation de la demande en produits sanguins a d’abord conduit les Africains à utiliser tous les moyens disponibles pour recruter des don-neurs. Il suffi t cependant que des crises majeures se manifestent pour fragiliser considérablement les systèmes en place. La crise du pétrole a ainsi mis le service de transfusion sanguine en concurrence avec les autres services sanitaires pour obtenir les maigres ressources rendues dispo-nibles par les États. Après l’apparition de l’épidémie de VIH/sida, les Africains ont cessé de recruter des donneurs parmi les militaires et les prisonniers et se sont tournés davantage vers les étudiants ; leurs réserves en sont maintenant très dépendantes. Avec le temps, les États ont compris qu’ils ne pouvaient maintenir en place des systèmes de collecte et de transfusion sans l’aide internationale. Celle-ci n’est cependant pas sou-vent de longue durée : rien n’est jamais garanti à long terme. Les Africains doivent faire preuve d’une grande ingéniosité et de fl exibilité pour réus-sir à maintenir un système de transfusion sanguine afi n de répondre aux besoins des populations de ce large continent.

Le quatrième article introduit la deuxième partie de l’ouvrage portant sur la question de la pluralité des motivations au don de sang dans les pays occidentaux. André Smith, Ralph Matthews et Jay Fiddler proposent d’explo-rer la question de la motivation au don de sang au-delà de l’hypo thèse individualiste classique sur la personnalité altruiste. Selon ces auteurs, il est nécessaire d’analyser le don de sang comme un phénomène social qui prend naissance dans le contexte des relations interpersonnelles et de la vie des communautés. En observant les activités dans deux cliniques de don de sang de la Colombie-Britannique (Canada) et en réalisant une enquête par entretiens auprès d’employés et de donneurs, ils arrivent à la conclusion que l’agence d’approvisionnement développe elle-même des stratégies qui tiennent compte de facteurs sociaux, tels que la répu-tation des entreprises ou l’esprit de compétition entre donneurs, pour motiver les donneurs potentiels. De leur côté, les donneurs ont justifi é leur geste en faisant référence au sentiment d’appartenance, au désir de rendre à leur communauté locale, à des motivations religieuses ou encore à l’infl uence de leurs proches. Selon les auteurs, comprendre ces phéno-mènes devrait permettre de développer de meilleures stratégies de recru-tement auprès des non-donneurs.

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Matteo Aria et Fabio Dei poursuivent, dans le cinquième article, l’idée que le don de sang s’inscrit dans des réseaux sociaux de liens concrets. En revenant à la thèse de Titmuss, ces auteurs déplorent son refus de considérer le rôle fondamental que peut jouer le mouvement associatif dans l’organisation des collectes de sang, en lui préférant un lien direct entre les établissements étatiques et les donneurs individuels. Selon la thèse défendue par Titmuss, le don qui transite par les associations ne respecte pas suffi samment le caractère libre du don moderne. En Italie, les associations, telles que l’Association italienne de donneurs de sang bénévoles (AVIS), sont pourtant au cœur du système des collectes de sang. Selon les auteurs, les associations permettent aux donneurs de se percevoir comme des citoyens engagés dans un projet collectif, de mani-fester leur sens civique et leur sentiment d’appartenance. La présence des associations italiennes de don de sang permet d’assurer l’équilibre entre les réseaux locaux de solidarité et un système sanitaire fondé sur des critères abstraitement universalistes. Dans leur critique de Titmuss, Aria et Dei nous invitent aussi à dépasser la dichotomie don/marché en suivant l’exemple de plusieurs auteurs récents qui en font une lecture plus nuancée et plus intégrée. Cette relecture permet de penser autre-ment la question des incitatifs ou des avantages octroyés aux donneurs de sang, par exemple dans les entreprises.

Bianca Brijnath, Michael J. Polonsky et André M.N. Renzaho se sont intéres-sés à la problématique du don de sang dans les communautés migrantes africaines en Australie. La nécessité de recruter de nouveaux donneurs au sein de ces communautés exige que les travailleurs de la santé com-prennent mieux leur niveau de connaissances, leurs attitudes et leurs pratiques actuelles de don de sang. Dans ce sixième article, les auteurs présentent les résultats d’une enquête réalisée auprès d’immigrants afri-cains. Comme le souligne aussi William H. Schneider dans son article, malgré le fait qu’ils réfèrent à certaines croyances traditionnelles sur le sang, celles-ci n’interfèrent pas avec le désir des Africains de donner du sang, mais leur niveau de connaissance du système de collecte et de trans-fusion est faible. Selon les chercheurs, les participants à l’enquête ont manifesté le désir de donner du sang dans des contextes qui leur permet-traient de sentir qu’ils font partie de la communauté australienne. Ils expriment aussi un besoin qu’on reconnaisse l’importance de leur don, alors qu’ils sont nombreux à se dire victimes d’exclusion et de dis-crimination et qu’ils croient que la société australienne ne veut pas de leur sang. Les participants à l’enquête ont fait eux-mêmes de nombreuses propositions pour encourager le don de sang dans leurs communautés.

Le septième article clôt cette deuxième partie. Annamaria Fantauzzi pré-sente une enquête réalisée auprès de la communauté marocaine à Turin. Elle révèle d’abord l’importance de l’identité collective, qui demeure la

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principale référence des immigrants marocains, même dans leurs pratiques de don de sang. C’est la communauté qui donne son sang et non des indi-vidus isolés. Fantauzzi considère qu’il est impossible de comprendre ces pratiques sans tenir compte de l’histoire de l’immigration marocaine en Italie et de la relation entre cette communauté et la société italienne. Pour les immigrants marocains, le don de sang témoigne souvent de l’acquisition d’une fraternité élective. Ils donnent en reconnaissance de l’accueil que leur a témoigné la société italienne. Selon l’auteure, la principale motiva-tion des donneurs de sang de la communauté marocaine est l’aspiration à une citoyenneté symbolique en Italie.

Le huitième article introduit la troisième partie. L’étude ethnogra-phique de Kathleen Erwin, Vincanne Adams et Phuoc Le traite des contra-dictions soulevées par le don de sang dans le contexte de la Chine urbaine contemporaine. Les citadins interrogés ont décrit le don de sang comme un geste volontaire et une obligation sociale. Or, leurs pratiques de don restent structurées suivant des quotas à remplir par les unités de travail et sont compensées par des paiements en espèces, des provisions alimen-taires et des congés rémunérés. Ces pratiques laissent entrevoir une forme de contrat social qui, tout en reposant sur la propagande propre aux campagnes d’éducation de masse exhortant les citoyens à multiplier les « gestes glorieux », accentue leur portée grâce à une sollicitude exprimée par les différentes formes de compensation. Au lieu de mettre en relief la seule mutation vers l’autonomie et l’épanouissement individuel, ou encore le retour aux valeurs traditionnelles – l’une et l’autre tendance ayant été décrites comme caractéristiques de l’ère postsocialiste –, ce pro-cessus met en lumière le triple rôle de l’unité de travail socialiste s’agis-sant de défi nir la citoyenneté chinoise, de soutenir la participation des consommateurs au marché capitaliste et de répondre aux besoins médi-caux de la population.

Dans le neuvième article, Jacob Copeman s’intéresse à l’évolution des pratiques de don de sang en Inde, depuis l’abolition du don rémunéré en 1998. En 2002, ce pays a adopté une politique nationale sur le sang qui prévoyait la suppression graduelle des dons familiaux de remplace-ment, sur une période de cinq ans, mais, malgré de nombreuses cam-pagnes, ce type de don compte toujours pour plus de la moitié des dons. Selon l’auteur, ceci s’expliquerait en partie par une croyance voulant qu’un prélèvement sanguin provoque une déperdition des forces et un défi cit en sang permanent. Le sang est ainsi considéré comme rare et précieux, il faut le réserver pour ses proches. En parallèle, depuis quinze à vingt ans, de grands ordres dévots de tradition sant du nord de l’Inde sont devenus des promoteurs reconnus du don de sang. Dans ce pays où les confl its interethniques et interreligieux sont importants, les dons volontaires lors des services spirituels sont devenus un moyen d’action

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politique et un mode de protestation collective passif, un peu semblable au jeûne.

Au Sri Lanka, Robert Simpson a étudié les publicités utilisées pour recru-ter des donneurs de sang, pour démontrer qu’en appui de la rhétorique offi cielle qui fait la promotion du don volontaire, libre et à l’étranger, se glissent d’autres types d’arguments puisant aux notions bouddhistes de vertu et de dévotion, d’obligation au sein de la parenté et de solidarité en reconnaissance du sacrifi ce des soldats. Comme le faisait valoir Smith, Matthews et Fiddler dans leur étude sur les donneurs canadiens (voir p. 95 et suiv.), on constate aussi dans ce dixième article que les agences respon-sables de l’approvisionnement n’hésitent pas à s’appuyer sur des arguments à connotation sociale, culturelle et religieuse pour faciliter le recrutement de nouveaux donneurs, même si cela ne correspond pas au modèle de don individualiste et volontaire que les autorités tentent d’implanter.

Dans le onzième article, qui clôt la troisième partie de cet ouvrage, Vishala Parmasad décrit ce qui s’est produit lorsque le gouvernement de Trinité-et-Tobago a pris l’initiative de supprimer le don de remplacement par l’adoption d’une loi en 2009. L’auteure montre que les réserves de sang ont alors connu une baisse dramatique. Le gouvernement a dû réta-blir le système de don de remplacement, malgré ses limites, entre autres le fait qu’il induit un système rémunéré « au noir » parallèle. Cette auteure montre que les représentations sociales du don de sang y sont associées aux sentiments de solidarité et d’obligation entre proches. Selon les par-ticipants à son enquête, il est préférable de garder son sang « en réserve », dans la perspective où un proche pourrait en avoir besoin, plutôt que de le donner à un inconnu. On retrouve ici des représentations du sang semblables à celles observées en Inde par Copeman.

La quatrième partie s’ouvre avec le douzième article, rédigé par Renaud Crespin et Bruno Danic. Ces auteurs s’appuient sur l’histoire des instruments de sélection au don de sang dans le but de rendre compte des impacts de la diffusion du principe de sécurité sanitaire. Des critères de sélection existent depuis les débuts de la transfusion sanguine, mais leur forme, leur contenu et les objectifs auxquels ils répondent ont été largement redéfi nis depuis les années 1950. À la suite de la série récente de crises sanitaires qu’a connues la France, des réformes de l’organisation et de l’administration de la santé publique ont été entreprises, suivant une logique de prévention des risques susceptibles de porter atteinte à la santé des populations. Comment ce processus a-t-il colonisé la transfu-sion ? C’est ce que les auteurs ont documenté grâce à une recherche dans les archives, des observations dans des centres de collecte et divers entre-tiens avec des informateurs clés. L’approche retenue conduit les auteurs à distinguer plusieurs régimes successifs dans lesquels ont été élaborées les normes utilisées comme référentiels pour sélectionner les candidats

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au don et leur attribuer (ou non) le statut de donneurs. Cette démarche invite à porter l’attention sur les espaces, acteurs, savoirs et techniques qui se mobilisent ou sont mobilisés dans ces processus.

Dans le treizième article, Kylie Valentine rappelle qu’au-delà des ques-tions de motivations ou d’obstacle au don de sang, il est aussi important de mieux comprendre les enjeux de l’exclusion temporaire ou perma-nente de certains groupes de personnes. En s’appuyant sur l’analyse du système australien de don de sang, de ses mécanismes de gouvernance, de ses politiques d’exclusion, ainsi que sur l’étude des caractéristiques et comportements des donneurs, l’auteure propose une réfl exion sur la portée sociale des instruments de sélection des donneurs et des procé-dures de contrôle du risque sanitaire dans le domaine de la transfusion sanguine. L’auteure est d’avis que la valorisation sociale de la solidarité et de l’altruisme, étroitement associée au don de sang, a pour effet de déva-loriser les personnes ciblées par les politiques d’exclusion. Selon l’auteure, la présence de questions sur l’origine raciale, les habitudes sexuelles, l’état de santé ou d’autres marqueurs de la stabilité sociale des individus, confi rme l’importance que prennent les dimensions sociales et politiques dans le processus de sélection des donneurs.

Dans le quatorzième article, Ferdinand Sutterlüty présente les résultats d’une étude de cas réalisée à partir d’observations et d’entrevues conduites dans le cadre de collectes de sang organisées conjointement dans une ville d’Allemagne par la Croix-Rouge et une association turque. Selon l’auteur, l’association qui en avait pris l’initiative poursuivait une stratégie d’inté-gration en invitant la population allemande à développer une fraternité symbolique avec les immigrants turcs, le sang étant effectivement associé à la parenté dans cette communauté. Lors de la première collecte, des prélèvements auraient été jetés, car la Croix-Rouge ne pouvait être assu-rée que les donneurs avaient répondu adéquatement au questionnaire suite à des problèmes de langue et de traduction. Si, pour les autorités allemandes, le respect du principe de précaution justifi ait le rejet du sang collecté, la communauté turque en a plutôt conclu que la population allemande ne voulait pas de son sang. Selon l’auteur, ces incidents démontrent que les représentations culturelles du sang ne peuvent être évacuées de ces échanges hautement symboliques qui contribuent à défi nir les relations entre les minorités et la majorité en Allemagne.

Dans le quinzième et dernier article de cet ouvrage, nous nous inté-ressons, Nathalie Tran et moi-même, à l’histoire de la communauté haï-tienne à Montréal et à son rapport au don de sang. En tant que minorité catholique et francophone, la communauté haïtienne a toujours entre-tenu une relation privilégiée avec la population majoritaire québécoise, comparativement aux autres minorités noires présentes dans la province. L’histoire de cette relation a connu un épisode douloureux lorsque les

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immigrants haïtiens récents se sont vus interdire de donner du sang, dans la foulée de l’affaire du sang contaminé. Au cours des dernières années, les populations noires sont devenues des cibles de choix pour les agences d’approvisionnement, car leur sang présente des caractéristiques pré-cieuses pour le traitement de certaines maladies. Comment convaincre la communauté haïtienne de s’engager dans la cause du don de sang, après les en avoir exclus ? Pour assurer ce virage, Héma-Québec développe des stratégies conformes au principe du don altruiste, volontaire et universel, tout en misant sur la valorisation de l’appartenance communautaire et sur le respect de l’histoire mouvementée de cette communauté au Québec.

Bibliographie

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Godbout, J.T. (2000), Ce qui circule entr e nous. Donner, recevoir, rendre, Paris, Seuil.

Lock, M., Nguyen, V.-K. (dir.) (2010), An Anthropology of Biomedecine, Malden, Wiley-Blackwell.

Mauss, M. (1923-1924), « Essai sur le don. Forme et raison de l’échange dans les sociétés archaïques », L’Année sociologique, seconde série.

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Table des matières

Liste des auteurs ............................................................................................................................... 3

Avant-propos et remerciements, Johanne Charbonneau......................................... 11

Introduction, Johanne Charbonneau .......................................................................................... 13

De Titmuss à Mauss : suivre le chemin des origines du don de sang moderne 13

Le don de sang altruiste de Titmuss ..................................................................................... 17

Mauss et le don de sang moderne .......................................................................................... 22

Présentation de l’ouvrage ........................................................................................................... 26

PREMIÈRE PARTIE

L’histoire de la transfusion sanguine et l’affaire du sangcontaminé : entre don et commerce

« Ce qui circule entre nous » : don de sang et transfusion aux États-Unis (XIXe-XXe siècles), Jean-Paul Lallemand-Stempak ........................................................... 37Du miracle de la médecine au commerce fl orissant .................................................. 38Transfusion sanguine et métissage symbolique ............................................................. 41La naissance des banques de sang ......................................................................................... 43Frères de sang ..................................................................................................................................... 45Les banques de sang face à la déségrégation .................................................................. 47L’opposition des deux modèles de la médecine transfusionnelle ..................... 49Conclusion ........................................................................................................................................... 52

L’affaire du sang contaminé en France : un tournant pour le don de sang, Sophie Chauveau .................................................................................................................................. 57La fi n du don universel : les exclusions du don de sang ........................................... 60Le don de sang non rémunéré : mythes et réalités ...................................................... 64Le don et le marché ........................................................................................................................ 69Conclusion ........................................................................................................................................... 72

Histoire de la transfusion sanguine en Afrique : « qui a donné du sang ? », William H. Schneider ......................................................................................................................... 77Le don de sang avant la décolonisation ............................................................................. 78Les premiers donneurs : la Croix-Rouge britannique en Afrique ...................... 81L’après-décolonisation : vers les dons en milieu hospitalier et les dons de

remplacement familiaux ................................................................................................... 84Depuis les années 1970 : le développement d’un système centralisé de dons

« volontaires » ............................................................................................................................ 86

Conclusion ........................................................................................................................................... 89

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Les enjeux du don de sang dans le monde

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DEUXIÈME PARTIE

Altruisme, solidarité, citoyenneté : une pluralité de motivations au don de sang

dans les pays occidentaux

Capital social, appartenance communautaire et don de sang : une étude qualitative dans deux villes du Canada affi chant un taux élevé de donneurs, André Smith, Ralph Matthews et Jay Fiddler ........................................... 95

Le système canadien d’approvisionnement en sang .................................................. 97

Don de sang et capital social ..................................................................................................... 99

Méthodologie ..................................................................................................................................... 102

Résultats ................................................................................................................................................. 103

Conclusion ........................................................................................................................................... 109

Où se cache l’altruisme ? Le système d’approvisionnement en produits sanguins et les associations en Italie, Matteo Aria et Fabio Dei ........................ 113

L’association AVIS............................................................................................................................ 115

Les positions théoriques de Titmuss et Godbout ......................................................... 117

Marché et don sont-ils incompatibles ? ............................................................................... 121

Au-delà de la dichotomie don/marchandise .................................................................. 123

Le don de sang en Italie ............................................................................................................... 125

Don de sang : les motivations des donneurs et l’articulation des dimensions de la vie sociale ........................................................................................................................ 126

Conclusion ........................................................................................................................................... 128

« Je ne sais pas comment faire » : évaluation des connaissances des immigrants africains établis en Australie au sujet du don de sang, Bianca Brijnath, Michael Jay Polonsky et André M.N. Renzaho ...................................... 131

Migration africaine en Australie ............................................................................................. 133

Le don de sang en Australie ...................................................................................................... 135

Le don de sang en Afrique ......................................................................................................... 136

Méthodologie ..................................................................................................................................... 138

Résultats ................................................................................................................................................. 140

Conclusions et recommandations ......................................................................................... 146

Corps, migration et don de soi : le cas du don de sang des Marocains à Turin, Annamaria Fantauzzi .................................................................................................... 153

Deux associations et une dimension convergente : la macro- et microtradition islamo-marocaine ................................................................................................................... 154

Un « groupe incorporé » et le corps comme langage ................................................. 156

Les deux médiateurs d’une nouvelle pratique sociale : la famille et l’association ............................................................................................................................... 157

Les aspects anthropologiques d’un don corporel........................................................ 159

De l’incomplétude sociale à la complétude symbolique à travers une alliance entre « inconnus » ............................................................................................... 167

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Table des matières

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TROISIÈME PARTIE

Le modèle universel du don altruiste à l’épreuve des réalités sociales et culturelles

dans les pays non occidentaux

Le « geste glorieux » du don de sang en unité de travail et les désirs postsocialistes en Chine urbaine, Kathleen Erwin, Vincanne Adams et Phuoc Le .................................................................................................................................................. 173

Gestes glorieux et nation socialiste ....................................................................................... 174

Sang et don de sang en Chine : transformations postsocialistes .......................... 175

L’unité de travail en Chine socialiste et postsocialiste ............................................... 178

Shanghai : une étude de cas ....................................................................................................... 179

Expériences corporelles et don de sang............................................................................. 180

Mobilisation face à la demande de sang ............................................................................ 182

Remplir ses obligations de façon glorieuse… et volontaire ................................... 184

Corps chinois, désirs postsocialistes ...................................................................................... 187

Conclusion ........................................................................................................................................... 191

La protestation réincorporée : mutation des techniques de pression morale en Inde, Jacob Copeman .............................................................................................. 195

Don de sang et tradition sant .................................................................................................... 197

Dévotion et réforme ....................................................................................................................... 200

Don de sang et protestation ....................................................................................................... 203

Les formes de protestation gandhiennes .......................................................................... 209

Conclusion ........................................................................................................................................... 214

Rhétoriques du sang : les campagnes de prélèvement sanguin et leurs publics au Sri Lanka, Robert Simpson ................................................................................. 219

Cinq modalités du don de sang ............................................................................................... 222

L’assemblage hémato-global ..................................................................................................... 223

Bouddhisme et moralité du don corporel ........................................................................ 225

Famille et parenté, parents et enfants ................................................................................. 228

Contribuer à l’effort de guerre ................................................................................................ 231

La vulnérabilité du don ................................................................................................................ 234

Conclusion ........................................................................................................................................... 237

« Elle est mon sang » : don de remplacement, parentalité et liens trans actionnels à Trinité-et-Tobago, Vishala Parmasad ..................................... 241

L’approvisionnement en sang à Trinité-et-Tobago ...................................................... 242

Approches théoriques du don de sang ............................................................................... 245

Historique de l’approvisionnement en sang à Trinité-et-Tobago ....................... 247

Crise du prélèvement sanguin ................................................................................................. 255

Conclusion ........................................................................................................................................... 258

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Les enjeux du don de sang dans le monde

QUATRIÈME PARTIE

Universalisme, gestion des risques et exclusion

Instrumenter les crises sanitaires : une solution politique ? Le cas des contre-indications au don de sang, Renaud Crespin et Bruno Danic ............. 263

Premières pratiques et premières régulations : l’établissement d’une primauté du donneur (fi n xixe siècle-années 1970) .............................................................. 266

Entre massifi cation du don et naissance de la médecine du prélèvement (1970-1990) : l’ébauche d’une harmonisation des critères de sélection 269

L’avènement de la sécurité sanitaire et le primat du receveur (1991-1996) 273

Multiplication des lieux et des acteurs : de nouvelles contraintes dans l’élaboration des critères de sélection ? .................................................................... 277

Conclusion ........................................................................................................................................... 284

Le don de sang en Australie : entre altruisme et exclusion, Kylie Valentine 291

Le système national d’approvisionnement en sang .................................................... 292

Les donneurs et le don ................................................................................................................. 293

Politiques d’exclusion des donneurs ................................................................................... 294

Participation citoyenne active, exclusion sociale et risque ..................................... 296

Conclusion ........................................................................................................................................... 302

La parenté ethnique et les liens du sang. Une dimension symbolique fondamentale de l’inégalité sociale en Allemagne, Ferdinand Sutterlüty 307

Donner du sang à Barren-Ost ................................................................................................... 308

Stratégies d’intégration ................................................................................................................ 310

Le « sang turc » ................................................................................................................................... 312

Un universalisme à visée particulariste ............................................................................... 314

Une dynamique d’échec .............................................................................................................. 316

Liens du sang ...................................................................................................................................... 320

Un don entre égaux ....................................................................................................................... 322

La parenté, dimension symbolique fondamentale de l’inégalité sociale....... 324

Les Haïtiens au Québec et le don de sang : une histoire ancrée dans un parcours communautaire mouvementé, Johanne Charbonneau et Nathalie Tran ........................................................................................................................................ 331

La population haïtienne du Québec .................................................................................... 333

Trois vagues d’immigration ....................................................................................................... 334

De la population d’origine haïtienne à la communauté haïtienne .................. 337

La communauté haïtienne : après trois vagues d’immigration et quelques générations… ........................................................................................................................... 338

Les Haïtiens et le don de sang : le scandale du sang contaminé ......................... 342

Les perceptions du don de sang aujourd’hui : nos entrevues ............................... 346

Héma-Québec et le recrutement de nouveaux donneurs de sang au sein de la communauté noire .......................................................................................................... 348

Conclusion ........................................................................................................................................... 351

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